Merci, monsieur le président.
Je tiens à remercier le Comité de m'avoir invitée à contribuer à cette importante étude sur l'expérience des anciennes combattantes dans la GRC et dans les FAC.
Le 6 juin 1977, munie d'un baccalauréat de l'Université de Victoria, j'ai rejoint les rangs de la GRC à l'âge de 24 ans. J'ai rejoint 31 autres femmes, dont la plupart avaient également un diplôme d'études postsecondaires.
Ce n'était pas le cas de la plupart des recrues masculines à l'époque. Je pense que la barre était plus haute pour nous, mais nos attentes, elles aussi, étaient plus élevées. Pour moi, l'histoire et la réputation de la GRC étaient une promesse d'aventure, et mon engagement était l'occasion de participer à toutes sortes d'activités passionnantes et une façon d'apporter ma pierre à l'édifice et m'offrait la possibilité de progresser dans l'organisation et, en fin de compte, de faire une carrière à long terme enrichissante.
Je voulais devenir agente de liaison à l'étranger ou entrer au service de sécurité de l'époque. J'ai servi au Québec après ma formation à Regina, puis j'ai été transférée au Cap-Breton, en Nouvelle-Écosse, où je vivais lorsque j'ai démissionné en décembre 1984.
Au cours de mon mandat à la GRC, j'ai occupé divers postes, de l'application des lois fédérales à des fonctions provinciales de maintien de l'ordre en milieu rural. Je pense que j'ai été une bonne policière et je ne regrette pas le temps que j'ai passé dans la GRC. Cela a effectivement été une expérience instructive.
J'ai décidé de partir lorsqu'il est devenu évident que les responsables de la dotation au quartier général de Halifax prenaient des décisions touchant ma carrière avec lesquelles je n'étais pas d'accord. J'ai découvert par la suite que ces décisions étaient probablement liées au fait qu'ils soupçonnaient que j'étais lesbienne.
Après les démarches administratives, une de mes collègues — une de mes amies, elle aussi policière — est venue me voir à la maison pour me demander si je voulais vraiment quitter la GRC et elle m'a dit que des rumeurs circulaient selon lesquelles j'étais lesbienne. Si je l'avais su avant de donner ma démission, je serais peut-être restée et j'aurais peut-être fait valoir mon cas. Je n'en sais rien, probablement que non.
À ce stade, j'étais prête pour quelque chose de nouveau, car je pense que j'avais déjà accepté que ma carrière ne serait jamais celle que j'avais espérée. Quoi qu'il en soit, à l'époque, compte tenu de l'homophobie manifeste qui régnait dans l'ensemble de la GRC — et dans la société en général —, je ne l'aurais pas admis et je n'en aurais parlé à personne, même pas à quelqu'un que je considérais comme une amie. Cela m'a confortée dans l'idée que j'avais pris la bonne décision.
Je ne me souviens pas d'avoir été en colère ou frustrée à l'époque, seulement déçue. J'avais cru que j'avais quelque chose de valable à offrir à la GRC et que j'irais beaucoup plus loin, même jusqu'au grade d'officier. J'ai dû abandonner ce rêve et passer à autre chose.
De toute façon, il n'y a pas eu d'entrevue de départ pour moi. Mon sergent de l'époque m'a simplement demandé s'il avait fait quelque chose qui m'avait poussée à démissionner. Je lui ai simplement répondu que non. Je n'avais pas grand-chose à ajouter, du moins rien qu'il aurait pu comprendre selon moi. Comme seule femme dans la plupart des affectations que j'ai eues, j'ai constaté que mes homologues masculins étaient, pour la plupart, dévoués à leur tâche, serviables et coopératifs.
J'ai fini par retourner en Colombie-Britannique pour étudier le droit à l'Université de la Colombie-Britannique. J'ai été admise au Barreau en 1991 et j'ai pratiqué jusqu'à ma retraite à la fin d'août 2022.
Je ne savais pas que, après avoir quitté la GRC avec moins de 10 ans de service, je serais une ancienne combattante. Quand Jane Hall, qui vous a parlé mardi, m'a demandé de faire du bénévolat auprès du nouveau conseil en cours de formation au sein de l'Association des vétérans de la GRC en 2013, j'ai dû lui confirmer que j'étais effectivement une vétérane pour pouvoir siéger au conseil.
Mon père, qui a servi dans la Marine pendant la Deuxième Guerre mondiale, était lui-même un ancien combattant. C'était cela un ancien combattant pour moi.
Au Conseil des vétéranes de la GRC, je me suis surtout concentrée sur le nombre d'interprétations juridiques douteuses qui ont nui à des anciennes combattantes, en particulier à celles qui ont participé au recours collectif Merlo Davidson. Je n'ai pas personnellement eu l'occasion de communiquer avec ACC ou d'utiliser ses services. Ce que je comprends du fonctionnement d'ACC et de ses relations avec les ex‑agentes de la GRC découle donc du travail de notre conseil depuis environ 10 ans.
Il est évident, d'après les enquêtes de notre conseil, que ni la loi ni les processus décisionnels d'ACC ne sont suffisamment clairs pour que nos anciennes combattantes puissent se débrouiller seules dans le système ou sans se heurter à des obstacles procéduraux et à des contrôleurs hostiles. Je signale en passant que nos données révèlent que les anciennes combattantes continuent de se méfier d'AAC et de craindre le pouvoir qu'il exerce, apparemment de façon arbitraire, sur leurs intérêts fondamentaux.
Les réponses écrites fournies le 20 mars 2023 aux questions concernant la clause de récupération sont pour la plupart insatisfaisantes. À la réunion du 20 mars de ce comité, le représentant de la ministre a déclaré que des messages seraient communiqués aux intéressés pour veiller à ce que cette pratique cesse. On ne sait pas très bien si cette réponse concernait uniquement les demandeurs de niveaux 1 et 2 ou les demandeurs de tous les niveaux, et cela souligne une fois de plus les problèmes de transparence et de communication au ministère des Anciens Combattants.
À défaut de transparence, il ne peut y avoir de reddition de comptes, et, sans reddition de comptes, il n'y a pas de confiance.
Nous demandons au Comité de recommander des modifications immédiates à la Loi sur les pensions afin d'exclure les dommages et intérêts des clauses de récupération pour les types de requêtes énoncées dans le recours collectif.
Le Comité devrait également faire tout en son pouvoir pour s'assurer qu'ACC simplifie ses processus et améliore sa transparence, ses communications et la formation du personnel de première ligne afin que celui‑ci comprenne mieux les expériences vécues par les anciennes combattantes et qu'il agisse selon l'esprit et la lettre du projet de loi et non pas comme la plus mesquine société d'assurances du Canada.
Le mémoire que j'ai remis au greffier au début de la journée comporte un certain nombre d'autres recommandations.
Je me ferai un plaisir de répondre à vos questions.
Merci.