Membres du comité, merci de nous avoir invités.
Merci, monsieur le président, pour la belle température.
Hong Kong est à la croisée des chemins. Si elle progresse selon le plan directeur élaboré par Deng Xiaoping au début des années 1980, elle aura un bel avenir, tout comme la Chine, à mon avis. Si Hong Kong dérive de ce plan, elle ne sera bientôt qu’une autre ville chinoise.
Il s’agit d’un moment très important de notre histoire, 18 ans après la rétrocession survenue le 1er juillet 1997.
Monsieur le président, membres du comité, j’ai préparé un mémoire pour vous, mais je n’irai pas dans les détails de celui-ci. Selon moi, il est important de se pencher sur la situation à Hong Kong, et ce, dans le contexte de la Chine et des relations Canada-Chine. J’aimerais d’abord souligner qu’il n’y a aucune contradiction entre une bonne politique pour la Chine et Hong Kong et la politique étrangère du Canada en matière de démocratie, de liberté et de droits de la personne. Tout cela est cohérent.
Certains avancent que pour faire le commerce avec la Chine, il ne faut pas parler des droits de la personne. À mon avis, c’est la mauvaise approche à adopter. La Chine ne respecte pas les pays sur lesquels elle exerce une influence. Elle respecte les gouvernements qui croient en l’équité. Le commerce avec la Chine et les préoccupations du Canada à l’égard des droits de la personne, de la liberté et de la démocratie à Hong Kong ne sont pas incompatibles.
La Chine a promis que Hong Kong continuerait de jouir des valeurs fondamentales prônées sous le régime britannique pendant 50 ans, jusqu’au 1er juillet 1997. À cette fin, les gouvernements chinois et britannique ont conclu un accord, la déclaration commune sino-britannique. Cette déclaration devait signaler un vent de changement dans la structure politique de Hong Kong.
Sous le régime britannique, un gouverneur, représentant la Reine, était nommé par le gouvernement britannique pour gouverner Hong Kong, sans que les citoyens de Hong Kong soient consultés. Il revenait ensuite au gouverneur de nommer tous les membres de la législature. Qui plus est, il présidait toutes les réunions du conseil législatif. Si un législateur semblait vouloir lui donner du fil à retordre, il n’était pas reconduit dans ses fonctions.
En vertu de la déclaration commune, qui stipule que le chef de l’exécutif de Hong Kong et les législateurs devront être élus, cette structure coloniale devait être remplacée. À mon avis, c’est la seule façon de permettre au peuple de Hong Kong d’administrer Hong Kong avec un haut degré d’autonomie. C’est ce qu’a déclaré Deng Xiaoping en parlant du principe « un pays, deux systèmes ».
Comment les citoyens de Hong Kong peuvent-ils administrer Hong Kong avec un haut degré d’autonomie s’ils ne peuvent pas élire leur chef et les membres de la législature? C’est là le problème.
La Loi fondamentale, notre mini-constitution, expose les promesses d’un gouvernement élu énoncées dans la déclaration commune, mais plus en détail. Elle précise que 10 ans après la rétrocession, soit en 2007, Hong Kong pourrait élire le chef de son exécutif, ainsi que tous les membres de la législature. Nous avons patiemment attendu ce jour.
Beijing a refusé. Nous avons attendu encore cinq ans en espérant qu’en 2012, ces élections seraient possibles, mais, encore une fois, Beijing a dit « non ».
Selon Beijing, nous devons attendre jusqu’en 2017 avant de pouvoir élire par suffrage universel le chef de l'exécutif de Hong Kong. Si cette élection se déroule sans difficulté, en 2020, nous pourrons élire les membres de la législature.
Malheureusement, bien qu’après 10 ans, Beijing ait décidé, le 31 août dernier, qu’elle permettrait aux citoyens de Hong Kong d’exercer leur droit de vote en vertu du principe « une personne, un vote » pour l’élection du prochain chef de l’exécutif de Hong Kong, elle a également déclaré que c’est elle qui choisirait les candidats. Donc, les citoyens auraient le choix entre deux ou trois candidats nommés par Beijing par l’entremise d’un comité des candidatures sous son contrôle. En d’autres mots, Beijing nous donnera le choix entre le fantoche A, le fantoche B et, si nous sommes chanceux, le fantoche C.
Ce genre d’élection ne respecte certainement pas les normes internationales. Selon la déclaration commune, le Pacte international relatif aux droits civils et politiques s’applique à Hong Kong. L’article 26 de la Loi fondamentale, notre constitution, stipule que tous les résidents permanents de Hong Kong ont non seulement le droit d’élire leurs représentants, mais aussi le droit de se présenter aux élections. La décision de Beijing enfreint toutes ces promesses. D’ailleurs, elle est inconstitutionnelle, mais je n’irai pas dans les détails en ce moment, car ce serait trop long. Peut-être si l'on me pose une question sur le sujet.
Quelles sont les prochaines étapes? Les législateurs du camp démocratique, qui représentent plus du tiers du corps législatif, ont promis de s’opposer à tout projet de loi du gouvernement qui reposerait sur la décision du 31 août. Si Beijing tente de limiter le droit des citoyens de Hong Kong à nommer des candidats pour l’élection de 2017, ces législateurs s’y opposeront. En vertu de la Loi fondamentale, un tel projet de loi doit obtenir l’appui des deux tiers des législateurs pour être adopté. Or, les législateurs du camp démocratique représentent plus du tiers du corps législatif. Ils pourraient donc bloquer un tel projet de loi. Vont-ils le faire? Si oui, qu’arrivera-t-il?
Ça reste à voir, car tout dépend de ce que fera le très haut dirigeant de la Chine, M. Xi Jinping. Il semble vouloir accaparer tous les pouvoirs. L’an dernier, le magazine Time l’a qualifié d’« Empereur Xi ». S’il désire vraiment détenir tous les pouvoirs et devenir un empereur, Hong Kong sera bientôt une autre ville chinoise. Mais, si c’est un réformiste et qu’il détient tous les pouvoirs, il y a de l’espoir, tant pour la Chine que pour Hong Kong.
J’espère que le gouvernement et le Parlement canadiens nous défendront à cette étape difficile du processus. Le Canada a l’obligation morale de nous défendre, puisque Beijing a sollicité son appui lors de l’annonce de la déclaration commune. Craignant une vague d’émigration en provenance de Hong Kong si les habitants de ce territoire devaient perdre confiance en leur avenir, Beijing a cherché à obtenir un appui international envers la déclaration sino-britannique. Après avoir fait l’objet d’une campagne de lobbying, le Canada a déclaré qu’il appuyait la déclaration commune. Il a donc une obligation morale envers les citoyens de Hong Kong d’intervenir si les choses ne se passent pas comme prévu. On ne pourrait pas l’accuser d’intervenir dans les affaires domestiques de la Chine, puisque la Chine a fait des efforts pour obtenir son appui.
Je vais maintenant laisser la parole à ma collègue.