Cela dit, je vous remercie, monsieur le président et membres du comité, de me donner l'occasion de vous présenter un bref aperçu de la réaction d'Industrie Canada au rapport de l'automne 2014 du vérificateur général du Canada sur l'aide à la restructuration fournie à General Motors et à Chrysler durant la crise économique de 2009 et le Fonds d'innovation pour le secteur de l'automobile.
Comme vous le savez, le secteur canadien de l'automobile est vigoureux. Il génère chaque année une valeur ajoutée de 17 milliards de dollars, soit 10 % du PIB du secteur de la fabrication. Notre industrie comporte 730 fournisseurs à l'appui de ses 11 chaînes de montage et ses 3 usines de fabrication de moteurs, et elle emploie environ 117 000 Canadiens de façon directe et à peu près 377 000 autres de façon indirecte. En fait, en 2014, l'Ontario était la première administration de fabrication d'automobiles en importance en Amérique du Nord — à ce titre, elle devançait même le Michigan.
Par ailleurs, notre secteur est axé sur les exportations. Une proportion de 90 % des véhicules fabriqués au Canada sont vendus à l'étranger, et la vaste majorité d'entre eux le sont aux États-Unis. La proximité des États-Unis — l'un des débouchés les plus profitables du secteur — constitue l'un des avantages concurrentiels dont nous tirons parti. Notre industrie automobile fait véritablement partie d'un marché nord-américain intégré.
Industrie Canada est toujours intéressée à entendre des points de vue et des idées qui l'aideront à soutenir le secteur canadien de l'automobile et à contribuer à sa croissance. Nous espérons n'être jamais de nouveau aux prises avec une crise comme celle de 2009, mais nous voulons tirer des leçons de ce qui s'est passé et prendre continuellement des mesures afin d'être mieux préparés à une telle éventualité et à y réagir plus efficacement. Dans cette optique, nous accueillons positivement les quatre recommandations du vérificateur général. En fait, Industrie Canada a déjà donné suite à deux d'entre elles, et prévoit faire de même à l'égard des deux autres en temps opportun. Je reviendrai là-dessus plus tard durant mon exposé.
Monsieur le président, comme vous le savez, la fin de 2008 et le début de 2009 ont été marqués par une incertitude et une instabilité extrêmes. À ce moment-là, les conditions du crédit s'étaient resserrées, les consommateurs s'étaient mis à réduire et à reporter leurs dépenses, et partout dans le monde, les économies semblaient se diriger vers une récession ou étaient déjà en récession. L'industrie de l'automobile a pu constater par elle-même les effets de la décision des consommateurs de remettre à plus tard les dépenses majeures. En 2009, aux États-Unis, les ventes ont chuté, passant de 17 millions à un peu plus de 10 millions de véhicules par année.
Cette diminution des ventes a placé toutes les entreprises du secteur dans une situation financière qui commençait à être désespérée, et particulièrement déplorable dans le cas de GM et de Chrysler, lesquelles ne disposaient pas d'un accès au capital semblable aux autres. En novembre 2008, GM a annoncé que, à moins de recevoir des fonds du gouvernement, de procéder à une fusion ou de vendre des actifs, elle se retrouverait à court de liquidités vers la mi-2009. Aucune institution de crédit n'était en mesure d'aider GM ou Chrysler.
Au Canada, même si les ventes n'ont pas connu une chute aussi draconienne, les assembleurs ont subi des contrecoups des événements survenus aux États-Unis, vu que près de 90 % des voitures fabriquées ici sont exportées là-bas. Les filiales canadiennes ont été directement touchées par les difficultés de leurs sociétés mères. La possibilité que GM et Chrysler mettent fin à leurs activités canadiennes dans le cadre d'une restructuration était réelle.
GM et Chrysler étaient les deux principaux fabricants d'automobiles au Canada et le sont toujours — leur production représente plus de 55 % de la production totale. La survie de nombreux fournisseurs canadiens dépendait des contrats qu'ils avaient conclus avec GM et Chrysler; les problèmes de ces sociétés risquaient d'entraîner la disparition de ces fournisseurs, ce qui aurait créé des problèmes pour les autres fabricants de matériel automobile d'origine.
Cela aurait provoqué l'effondrement de l'ensemble de la chaîne d'approvisionnement de l'industrie automobile du Canada. L'interdépendance des intervenants de notre chaîne d'approvisionnement et de nos assembleurs et les solides liens qui les unissent ont été la principale motivation qui a mené le gouvernement à prendre des mesures afin d'aider GM et Chrysler au Canada, lesquelles devaient être protégées contre les répercussions des événements survenus aux États-Unis, non seulement pour leur propre bien, mais également pour le bien de l'ensemble du secteur des fournisseurs et, pour celui de toute l'industrie automobile du Canada.
Monsieur le président, comme le vérificateur général l'a conclu, le gouvernement du Canada a fait ce qu'il devait faire, à savoir prendre des mesures pour empêcher l'effondrement brutal du secteur canadien de l'automobile et assurer sa viabilité.
Le temps pressait. On disposait de très peu de temps pour trouver une solution viable aux problèmes de GM et de Chrysler. Les deux sociétés se trouvaient dans une situation financière désastreuse, et Chrysler devait trouver un acheteur. À partir du moment où, à la fin de 2008, la crise a débuté et GM a présenté des plans très généraux de restructuration au Congrès des États-Unis, les gouvernements disposaient de moins d'un mois pour prendre une décision quant à l'octroi d'un ensemble initial de prêts. Là encore, après que GM a déposé des plans plus détaillés, on ne disposait que de six semaines environ pour évaluer sa viabilité à long terme.
Comme ces événements l'ont montré, la restructuration de GM et de Chrysler a eu lieu dans des circonstances particulièrement éprouvantes. Cette restructuration a exigé un effort collectif sans précédent des gouvernements du Canada, de l'Ontario et des États-Unis.
Charles et moi ne faisions pas partie d'Industrie Canada à l'époque de la restructuration, mais nous savons que le gouvernement fédéral a rapidement constitué une équipe d'intervention chargée du secteur de l'automobile. Cette équipe était dirigée par M. Richard Dicerni et M. Paul Boothe, qui étaient respectivement sous-ministre et sous-ministre délégué d'Industrie Canada à l'époque, de même que de mes prédécesseurs, à savoir M. Ron Parker et M. David Moloney, lesquels ont dirigé une équipe de fonctionnaires dévoués qui ont travaillé sans relâche et d'une façon peu commune à diriger l'intervention du gouvernement à l'égard de la crise. En outre, l'équipe comportait un comité directeur composé de sous-ministres d'Industrie Canada et de Finances Canada et de représentants d'Exportation et développement Canada, du Bureau du Conseil privé et des ministères des Finances et du Développement économique et du Tourisme de l'Ontario, qui ont tous joué un rôle important.
L'équipe a également pris contact avec des intervenants et des spécialistes pour s'assurer d'avoir rapidement accès aux connaissances et à l'expertise requises. Par exemple, elle a noué des relations avec KPMG et Ernst and Young afin d'accéder à de l'expertise en matière de restructuration financière des entreprises, avec Cassels Brock pour obtenir de l'information relative aux lois américaines et canadiennes en matière d'insolvabilité, et avec CSM Worldwide et Casesa Shapiro Group pour recevoir des renseignements touchant le marché de l'automobile.
Des discussions à l'externe ont été tenues avec des membres de l'industrie, y compris les assembleurs et les fournisseurs, afin de recueillir de l'information essentielle aux fins de l'évaluation et de la compréhension des risques. Le gouvernement a ensuite pris une décision responsable et des mesures décisives. Par la suite, le ministère que je représente a surveillé les deux entreprises pour s'assurer qu'elles s'acquittaient de leurs obligations au titre de l'entente et pour veiller à ce que la restructuration donne les résultats souhaités.
Monsieur le président, je suis impressionné par le travail qu'ont accompli mes prédécesseurs pour le compte de l'industrie canadienne et de ses travailleurs. Leur travail constituait le fondement de l'intervention du gouvernement, et il a porté ses fruits. En outre, il s'est révélé crucial au moment de garantir l'avenir immédiat de l'industrie automobile canadienne et de l'ensemble de l'économie. Au début de 2009, les usines de montage de GM et de Chrysler employaient directement quelque 14 000 travailleurs. À l'heure actuelle, les deux sociétés demeurent les principaux fabricants d'automobiles du Canada; elles emploient environ 19 000 Canadiens, et elles sont loin d'être les seules à profiter des avantages économiques qui découlent de leurs activités. D'après le ministère des Finances, à peu près 52 000 emplois étaient directement ou indirectement liés à la production de GM et de Chrysler au moment de la crise. Selon une autre étude, menée par Leslie Shiell et Robin Somerville des IRPP, si aucune restructuration n'avait eu lieu, quelque 100 000 emplois auraient pu être supprimés en 2010, y compris dans le secteur des fournisseurs. L'étude indique également que, en 2009 seulement, l'économie aurait pu essuyer des pertes de 23 milliards de dollars si la restructuration de GM et de Chrysler n'avait pas été menée à bien. Les mesures décisives prises par le gouvernement ont permis d'assurer du travail à des centaines de fournisseurs. Les effets de ces mesures se sont même fait ressentir dans toutes sortes de secteurs de l'économie canadienne.
À l'heure actuelle, tous les fabricants canadiens, y compris GM et Chrysler, investissent dans leurs activités. Plus particulièrement, au cours des deux dernières années, les cinq assembleurs d'automobiles du Canada ont réinvesti au pays, et les fabricants de pièces d'auto ont aussi investi dans leurs activités. Le fait que la production canadienne ait augmenté pour atteindre près de 2,4 millions de véhicules en 2014 est un autre signe de la santé du secteur, qui continuera de contribuer notablement à l'économie canadienne pendant de nombreuses années.
La valeur de ce travail a été reconnue et continue d'être reconnue par les membres de l'industrie et par des tiers, notamment les IRPP, qui ont conclu, dans le cadre de l'étude que j'ai évoquée, que l'aide à la restructuration avait été fructueuse. De surcroît, Industrie Canada a vu ses réalisations être reconnues, notamment par l'Institut d'administration publique du Canada, qui lui a remis en 2010 son prix pour gestion innovatrice. J'estime qu'il s'agit d'une remarquable histoire de réussite que nous avons réussi à écrire rapidement et efficacement de concert avec nos homologues canadiens et étrangers des secteurs public et privé. Ces mesures nous ont permis de prodiguer des conseils judicieux, et, en fin de compte, de préserver des milliers d'emplois et des centaines d'entreprises, et de garantir l'avenir de l'industrie automobile du Canada.
En ce qui a trait au Fonds d'innovation pour le secteur de l'automobile, je suis heureux de constater que le rapport mentionne qu'il s'agit d'un programme qui continue d'être bien administré. À de nombreux égards, ce programme en est encore à ses débuts. Il a été créé en 2008, et il a permis de financer sept projets. Les premiers projets sont tout juste en train d'être parachevés, mais l'évaluation initiale menée en 2008 nous a déjà indiqué que le programme remplissait ses objectifs à court terme. Depuis sa mise en oeuvre, il a suscité des investissements d'environ 2,8 milliards de dollars, et comme le vérificateur général l'a recommandé, nous continuerons de rendre des comptes relativement à ses objectifs à plus long terme à mesure que les projets sont menés à bien.
Monsieur le président, j'aimerais conclure mon exposé en faisant observer que tous ces événements nous ont appris énormément de choses et que les recommandations du vérificateur général ont contribué à graver ces leçons dans notre mémoire. Ces recommandations ont fait ressortir que des rapports clairs et exhaustifs sur le soutien fourni et la gestion de ce soutien aident le public à comprendre la réussite que représente l'initiative de restructuration. Afin d'accroître l'accès à cette information, nous avons publié en décembre dernier un rapport sommaire unique sur l'aide à la restructuration et les sommes recouvrées. En outre, nous nous sommes engagés à mener un examen de la gestion de l'aide à la restructuration, en mettant l'accent sur la désignation des leçons apprises. Ce travail sera mené à bien cette année.
Le vérificateur général nous a aussi recommandé d'examiner notre procédure d'évaluation des demandes d'aide soumises au Fonds d'innovation pour le secteur de l'automobile et d'effectuer un suivi du rendement du programme.
Nous avons mis à jour le cadre d'évaluation des risques du programme, et nous avons explicité la manière dont les profils de risque des demandeurs sont évalués. De plus, nous procéderons en 2017-2018 à une nouvelle évaluation du programme en vue d'établir la mesure dans laquelle il réalise ses objectifs à long terme.
Je peux dire que, comme tous les Canadiens, nous souhaitons ne jamais être confrontés une nouvelle fois à un tel problème et ne jamais avoir à mettre en pratique les leçons apprises de la crise de 2009.
Monsieur le président, membres du comité, je vous remercie. Nous serons heureux de répondre à vos questions.