Madame la Présidente, c’est un honneur pour moi de prendre la parole à la Chambre au sujet des amendements que le Sénat a apportés au projet de loi C-68.
Tout au long du processus, j’ai observé attentivement le ministre faire tout ce qu’il a pu pour dénigrer le gouvernement précédent, tandis qu’il essayait de se faire valoir, lui et son ministère. Ce sont là les agissements d’un ministre qui, sur les médias sociaux, s’est attribué le mérite de la mise en service d’un navire de la Garde côtière pas plus tard que la semaine dernière. Il a prétendu que c’était une réalisation du gouvernement libéral, alors que c’est l’ancien gouvernement conservateur qui en est responsable. Le ministre fait vraiment preuve de mauvaise foi lorsqu’il consacre son temps à calomnier et à dénigrer le gouvernement précédent.
J’ai affirmé à maintes reprises et très ouvertement, à la Chambre comme en comité, que les gouvernements successifs, y compris les gouvernements libéraux, devraient porter le blâme pour l’état actuel de nos stocks de poissons. Lorsqu’on leur demandait pourquoi nos stocks de poisson sont à des niveaux critiques, certains bureaucrates, qui sont en poste depuis plus de 20 ans, promettaient systématiquement de faire mieux à chaque gouvernement. Il est absolument honteux que le ministre prenne la parole ici et clame que les libéraux font bouger les choses. Je vais prouver que ce n’est pas le cas au cours de mon intervention.
Aujourd’hui, nous sommes ici pour parler des amendements du Sénat au projet de loi C-68, qui est essentiellement un projet de loi incohérent. Nous avons vu qu’il était incohérent lorsqu’il a été présenté pour la première fois. Malheureusement, encore une fois, le gouvernement a utilisé l'attribution de temps pour limiter le débat sur ce projet de loi. Je crois que c’était alors la 40e fois que le gouvernement libéral faisait cela, ce même gouvernement qui est dirigé par le député de Papineau qui, pendant la campagne de 2015, avait dit que son gouvernement laisserait toute la place au débat et qu'il n’aurait pas recours à des manœuvres parlementaires comme l’attribution de temps.
Nous voici aujourd'hui, alors que le gouvernement a déjà eu recours à l'attribution de temps plus de 70 fois déjà. Il n'y a pas encore eu recours pour ce projet de loi, mais la journée est encore jeune.
Je reviendrai sur les amendements du Sénat. Au début de la semaine dernière, le Sénat nous a communiqué 15 amendements concernant le projet de loi C-68 portant sur quatre sujets différents. Comme nous l’avons mentionné précédemment, ils couvrent les pêches côtières et les réserves d’habitat. Le projet de loi S-203, qui vise à mettre fin à la captivité des baleines, a été intégré au projet de loi C-68, tout comme le projet de loi S-238, présenté par un sénateur conservateur, sur l'enlèvement des nageoires de requin. Je vais revenir sur ce sujet sous peu.
Le récent témoignage de représentants du ministère devant notre comité au sujet du projet de loi S-238 a été intéressant. Les fonctionnaires ont mentionné que même si nous interdisions les nageoires de requin si elles ne sont pas rattachées à la carcasse du requin, l’importation de soupe aux ailerons de requin continuerait d’être autorisée. Le ministère s’est engagé à faire des vérifications et à nous revenir, mais le commentaire que nous avons reçu du fonctionnaire lorsqu’on lui a posé la question et qu’on a insisté, c’est que « la soupe n’est que de la soupe ».
Nous débattons maintenant des amendements proposés par le Sénat au projet de loi C-68. Ce projet de loi a été présenté au début de l’année dernière et, comme nous l’avons mentionné, il s’agit d’une mesure législative incohérente. Au cours de la campagne de 2015, les libéraux avaient promis de rétablir la définition de « détérioration, perturbation ou destruction » de l’habitat du poisson. Je le dis aux Canadiens qui nous regardent d’un océan à l’autre, ainsi qu’à ceux qui se trouvent dans la tribune, qui est bondée encore une fois aujourd’hui.
Comme le disent les libéraux, ils voulaient rétablir les protections perdues en raison des actions du gouvernement conservateur précédent. En fait, j’utiliserai le terme que notre ministre vient d’utiliser, à savoir que les conservateurs ont « vidé la Loi sur les pêches de sa substance ». Ce sont les mots qu’il a utilisés, et c’est tout simplement honteux. C’est le même langage écoguerrier, plutôt honteux, que le gouvernement a utilisé en 2015 pour ternir l’excellent travail que le gouvernement conservateur avait fait. De plus, des ministres et des députés libéraux ont utilisé ce type de propos pour dénigrer certaines de nos entreprises du secteur des ressources naturelles, comme l’exploitation minière, pétrolière et gazière, et, encore une fois, le gouvernement conservateur précédent.
Le comité des pêches a fait une étude approfondie sur les soi-disant « protections perdues » dans les modifications apportées à la Loi sur les pêches en 2012 sous le gouvernement conservateur. Aucun groupe ni aucun témoin n’a été en mesure de prouver que les changements survenus en 2012 ont entraîné une perte de protection — pas un universitaire, pas un groupe environnemental, pas un scientifique. Je reviendrai sur ce point au cours de mon intervention.
Il n’est pas surprenant que le gouvernement ait accumulé du capital politique auprès des groupes environnementaux et du grand public avec ce projet de loi. Les libéraux se sont positionnés comme les défenseurs de l’environnement et comme ceux qui ont restauré les protections soi-disant perdues. Ils ont obtenu un appui non équivoque par l'entremise de divers médias. C’est ce même gouvernement qui continue d’approuver le déversement de millions de litres d’eaux d’égout non traitées dans nos cours d’eau, qui défend ses actions en dénigrant ceux qui s’opposent à ce qu’il dit. Il continue aujourd’hui d’approuver le déversement de millions de litres d’eaux usées non traitées dans nos cours d’eau. Les Canadiens devraient se questionner à ce sujet.
Nous nous opposons au projet de loi C-68 en raison des dispositions sur la détérioration, la destruction ou la perturbation de l'habitat du poisson, mais il comporte certains aspects positifs. Il renferme de bons points. Nous avons toujours dit que nous abrogerions et remplacerions le projet de loi C-68 et que nous réunirions les intervenants autour d’une table afin d’élaborer un projet de loi qui représente vraiment l’intention du projet de loi C-68.
Le Sénat a fait son travail en nous communiquant 15 amendements raisonnés et responsables. Il a tenté de corriger un projet de loi omnibus qui aurait probablement dû être scindé en deux ou trois projets de loi différents, sans parler d'une autre promesse non tenue.
Je crois que c’était lors de la campagne libérale de 2015, et c’est probablement le jour même où le député de Papineau a dit qu’il n’allait pas recourir à des manœuvres parlementaires comme les projets de loi omnibus. Eh bien, nous voici avec le projet de loi C-68, qui est clairement de type omnibus. Le premier ministre n’a pas laissé toute la place au débat. Il a eu recours à l’attribution de temps à plusieurs reprises.
Les amendements portaient sur des modifications à la Loi sur les pêches, notamment les propriétaires-exploitants et la séparation de la flottille. Comme mon collègue d’en face l’a mentionné, le comité des pêches en a entendu parler à maintes reprises. Le projet de loi parle également de la protection de l’habitat et des réserves d’habitat, et il englobe le projet de loi S-203 sur les cétacés en captivité et le projet de loi S-238 sur l'enlèvement des nageoires de requin.
Le projet de loi C-68 a introduit la notion de réserves d’habitat comme moyen pour les entreprises de restaurer les cours d’eau perturbés par leurs projets. Par exemple, lorsque j’étais dans l’aviation, nous avons construit l’une des plus grandes pistes du Canada. Pour être de bons voisins, nous avons remarqué au cours de notre évaluation environnementale qu’il y avait un secteur qui pourrait être l’habitat de la sauvagine ou du crapaud géant de l’Ouest.
Par conséquent, nous avons fait une sorte de chasse aux crapauds. Nous avons cherché à savoir combien il y avait de crapauds dans cette zone désignée ou qui pourrait être sensible sur le plan environnemental. Nous avons également cherché les oiseaux aquatiques qui pourraient être présents dans ces milieux humides. En bons voisins, nous avons travaillé avec Canards Illimités Canada, le groupe de conservation. Nous ne sommes pas des experts en la matière. Nous avions besoin que quelqu’un nous dise ce qui serait le plus approprié, et nous voulions nous assurer que s’il devait y avoir un déplacement, qu'il aurait lieu notre région. Nous avons travaillé avec Canards illimités et d’autres groupes locaux. Nous avons trouvé un secteur qui convenait, et nous nous sommes engagés à l’acheter. Voilà un exemple de ce qu’est une réserve d’habitat.
Il y a des préoccupations au sujet des réserves d’habitat et, disons, des crédits de carbone. Les réserves d’habitat sont très semblables aux crédits de carbone.
Quand je me suis présenté aux élections de 2015, j’ai été intéressé d’apprendre qu’il y avait des sociétés étrangères, des sociétés européennes, qui achetaient d’énormes étendues de terres agricoles dans ma circonscription. Ils se présentaient littéralement à une ferme et offraient des valises pleines d’argent. Bon nombre de nos agriculteurs sont des agriculteurs de père en fils, mais ne peuvent pas compter sur la prochaine génération. Qui peut les blâmer de vendre s’ils en ont l’occasion? Les sociétés étrangères ont raconté de belles histoires. Très rapidement après l’achat de la terre, ils ont fauché tout ce potentiel agricole. Ils l’achetaient pour que des crédits de carbone soient appliqués dans d’autres pays. Nous ne pouvons pas créer de nouvelles terres, nous ne sommes pas capables de le faire. Nous avons mis un terme à cette situation.
Par conséquent, les dispositions sur les réserves d’habitats que le Sénat a tenté de corriger par ses amendements portaient sur les paiements compensatoires versés par des tiers, et ces derniers garderaient l’habitat restauré fermé. La réserve d’habitat est une approche de conservation de l’environnement axée sur les forces du marché. En fait, nous commençons à le constater de plus en plus. Quand j’étais dans l’aviation, le mot à la mode était « crédits de carbone ». On parlait de crédits de carbone à toutes les sauces. Chaque passager qui prenait l’avion d’une compagnie aérienne avait la possibilité d’acheter des compensations carbone avec son billet. Une réserve d’habitats est maintenant la prochaine génération d’une approche très semblable, axée sur le marché, de conservation de l’environnement. Une réserve d’habitats est définie dans le projet de loi comme une « zone d’habitats créée, restaurée ou améliorée grâce à la réalisation d’un ou de plusieurs projets de conservation dans une zone de service et à l’égard de laquelle des crédits d'habitat sont certifiés par le ministre ».
Dans le projet de loi, la définition d'un crédit d’habitat, avant qu'elle ne soit modifiée au comité, était la suivante: « Unité de mesure faisant l'objet d'une entente entre un promoteur et le ministre en vertu de l’article 42.02 et quantifiant les avantages d’un projet de conservation. » En termes plus clairs, l’ancienne version du projet de loi indiquait que les promoteurs, et seulement les promoteurs pouvaient compenser les effets négatifs sur le poisson ou l’habitat du poisson découlant des ouvrages de conservation effectués par le promoteur. Cela ne tient pas compte d'importants groupes de conservation tiers et groupes autochtones.
Je ne connais pas beaucoup de sociétés minières ou forestières qui sont expertes dans les projets de conservation. Par exemple, si une exploitation minière cause des effets préjudiciables sur l'habitat du poisson, la société minière pourrait atténuer les répercussions de ces effets à l'aide d'un projet de conservation, comme le déplacement des poissons touchés dans un autre étang. D'autres mesures comprennent notamment la construction d'une passe migratoire pour le saumon, la préservation d'une terre humide, comme je l'ai décrit dans le cas de l'aéroport, ou toute autre mesure qui crée, restaure ou met en valeur un habitat du poisson. Garantir que les promoteurs atténuent les répercussions qu'ils ont sur l'habitat du poisson est nécessaire pour la conservation de l'environnement. Nous sommes tous d'accord là-dessus.
Il n'y a pas la moindre raison valable de permettre la mise en place des réserves d'habitat uniquement aux promoteurs. En indiquant que seuls les promoteurs peuvent créer une réserve d'habitat, on exclut les groupes des Premières Nations et les groupes spécialistes de la conservation comme Canards illimités ou les défenseurs des terres humides. Parmi les autres participants possibles, on exclut aussi les municipalités. Ces intervenants veulent tous jouer un rôle de premier plan dans la restauration et la mise en valeur de l'habitat, et c'est ce qu'ils devraient faire. Tous les promoteurs n'ont pas l'expertise, les ressources ou les connaissances pour bâtir une mesure d'atténuation physique.
Nous savons tous que l’équilibre des pouvoirs au Sénat repose sur le Groupe des sénateurs indépendants, que nous savons être le groupe du gouvernement. En vertu de l’amendement adopté par le Sénat, le promoteur pourrait maintenant acheter des crédits plutôt que de concevoir et bâtir un ouvrage de compensation physique. La compensation serait toujours requise, mais le projet pourrait désormais être réalisé par un groupe spécialisé en conservation. Dans ces cas, le promoteur financerait essentiellement la construction d’un ouvrage de compensation physique approuvé. Il dirait qu’il comprend que son projet a déplacé des poissons, de la faune ou des espèces aquatiques, et qu’il va faire amende honorable, mais n’étant pas expert en la matière, il établirait un partenariat avec un groupe approuvé.
C’est bénéfique pour l’industrie et pour l’environnement. Les entreprises n’ont pas à se détourner des aspects fondamentaux de leurs activités et de la création des emplois qui vient de pair; elles n’ont qu’à acheter le crédit pour une réserve d’habitats établie par un groupe tiers. Ce nouveau marché de crédits encourage les tierces parties à participer aux réserves d’habitats, ce qui permet une meilleure protection de la biodiversité.
Le deuxième amendement renvoyé par le Sénat sur cette question concerne les paiements tenant lieu de compensation. Cet amendement permettrait au ministère des Pêches et des Océans de percevoir un paiement tenant lieu de compensation au lieu d’établir une réserve d’habitats compensatoire. L’introduction de cet outil avait pour objectif, comme l’ont dit la Fédération canadienne de la faune et d’autres intervenants, d’offrir une marge de manœuvre dans les endroits où un projet de compensation approprié n’est pas disponible ou rentable. C’est logique.
Au lieu d’acheter des crédits, un promoteur pourrait verser de l’argent dans un fonds pour la protection de l’habitat — je pense au Fonds pour dommages à l’environnement, par exemple — afin de compenser toutes les répercussions que son projet pourrait avoir. Selon cet amendement, les fonds devraient être dépensés le plus près possible de l’endroit, ou à tout le moins dans la province, où se trouve l’ouvrage, l’entreprise ou l’exercice de l’activité. Si le déplacement ou les répercussions ont lieu dans une région comme Cariboo—Prince George, j’aimerais voir cette réserve d’habitats installée juste dans ma circonscription. Je devrais dire qu’il faut que ce soit fait ici. Nous ne voulons pas voir ces autres entreprises arriver et faire quelque chose de semblable à ce que nous avons mentionné plus tôt avec le programme de crédits de carbone. Si ce déplacement a lieu dans une région comme Cariboo—Prince George, alors il faudrait trouver un projet approprié dans la même région. Je croirais qu’il y a beaucoup de projets de conservation qui pourraient bénéficier de ce type de programme.
L'ajout de ces paramètres au système était impératif pour assurer l'égalité de traitement entre toutes les provinces et tous les territoires et, espérons-le, si le ministère des Pêches et des Océans fait les choses correctement, entre les bassins hydrographiques également.
Cet amendement ne dit pas comment le gouvernement devrait recueillir ou dépenser l'argent. Il se borne à définir une structure par l'intermédiaire de laquelle les fonds du secteur privé, déterminés et acceptés par le ministre, à sa discrétion — encore une fois, le ministre a tous les pouvoirs — peuvent être utilisés pour appuyer des projets de restauration au Canada. C'est logique pour moi.
Le troisième amendement sur les réserves d'habitat est de la même eau que le deuxième, mais il est aussi le plus différent des trois, et voici pourquoi: le projet de loi C-68, dans ses versions actuelle et antérieures, précise que les crédits d'habitat certifiés doivent être utilisés dans une zone de service. Une zone de service est définie, dans le projet de loi C-68, comme étant une « zone géographique englobant une réserve d’habitats et un ou plusieurs projets de conservation, à l’intérieur de laquelle un promoteur exploite un ouvrage ou une entreprise ou exerce une activité ».
Il est préoccupant que cette définition soit si large. Selon la formulation actuelle, l’ensemble du pays pourrait techniquement être considéré comme une zone de service. Disons, par exemple, que l’on détermine que la firme SNC-Lavalin, qui réalise un projet au Québec, a nui aux poissons ou à leur habitat, ou qu’elle cherche à acquérir des crédits d’habitat. Or, elle exerce aussi des activités à Vancouver, à Toronto ou ailleurs. Elle pourrait alors décider d’appliquer ces crédits d’habitat à ces zones, et non pas nécessairement à la zone dans laquelle elle a entraîné un déplacement.
C’est inacceptable et c’est ce que le troisième amendement visait à corriger. Le but de cet amendement est de s'assurer que les avantages des réserves d’habitats compensatoires restent locaux par rapport à l’ouvrage, l’entreprise ou l’activité. Le terme « local » pourrait vouloir dire soit le plus près possible de la zone, soit à l’intérieur de la même province. Le principe général est que, plus ce sera proche de la zone affectée, mieux ce sera. Par exemple, on ne devrait pas compenser un projet minier à St. John’s par une réserve d’habitats dans le Nord de l’Ontario ou sur l’île de Vancouver, et vice versa.
Cet amendement maintient qu’il faut assurer une certaine souplesse ministérielle tout en protégeant les populations locales de poissons et en offrant un élément de certitude à l’industrie quant à l'endroit où les crédits pourront être utilisés. Le principe directeur devrait être que les retombées des réserves d’habitats doivent demeurer aussi locales que possible. Si ce n’est pas possible, alors les avantages devraient à tout le moins rester dans la province où les travaux ont été effectués.
Tard hier soir, le gouvernement a décidé de donner avis de ses propositions d'amendement aux amendements du Sénat. Malheureusement, tard hier soir, le gouvernement a aussi répondu en éliminant les nouvelles dispositions sur les réserves d'habitats. Le gouvernement dit qu'il « rejette respectueusement l’amendement 11 parce que cet amendement vise à légiférer sur la création de réserves d’habitats pour les tierces parties, ou fondées sur le marché, ce qui va au-delà de la politique du projet de loi, qui vise uniquement la mise en place de réserves d’habitats du poisson dirigées par les promoteurs ».
Est-ce que c'est une blague? C'est de la pure foutaise. C'est le gouvernement qui a rédigé les dispositions du projet de loi sur les réserves d'habitats. Il est donc absolument absurde de prétendre que les amendements visant les dispositions en question vont au-delà de la politique du projet de loi — à moins, bien évidemment, que la mesure ne soit rien qu'une distraction, un geste vide qui n'est pas vraiment censé aboutir à quoi que ce soit et que les libéraux ont posé tout simplement pour pouvoir affirmer avoir fait quelque chose et ainsi se garantir le soutien des tiers qui les ont appuyés en 2015. J'y reviendrai un peu plus tard.
Faisons le bilan de toutes les absurdités qu'on a entendues depuis la présentation du projet de loi. Au chapitre du rétablissement des mécanismes de protection, le ministre a affirmé que l'ancien gouvernement conservateur avait vidé la Loi sur les pêches de sa substance. Le projet de loi C-68 est né de la promesse qu'ont faite les libéraux en 2015 de rétablir les mesures de protection abolies. Après son élection au gouvernement, le ministre des Pêches et des Océans a demandé au Comité permanent des pêches et des océans de faire toute la lumière sur les mesures qui avaient soi-disant été abolies.
Au terme d'une étude approfondie, un rapport de 92 pages a été soumis au Parlement. Mes collègues députés et les nombreuses personnes à la tribune aujourd'hui savent-ils combien de mesures de protection abolies le Comité a trouvées? Il n'en a pas trouvé une seule. Pas une. Pas un seul témoin qui a comparu devant le Comité n'a affirmé que les modifications à la Loi sur les pêches apportées par l'ancien gouvernement conservateur en 2012 auraient entraîné l'abolition du moindre mécanisme de protection. Bien au contraire, ce qu'on a entendu, c'est que ces modifications avaient renforcé le processus de demande et contribué à sa cohérence. Certains promoteurs ont même affirmé qu'elles leur avaient rendu la vie plus difficile, mais qu'au moins, ils avaient une meilleure idée des différentes étapes du processus.
Il est aberrant d'entendre ces gens-là nous répéter sans cesse la même vieille rengaine. Les Canadiens ne seront pas dupes. Je pense avoir vu un sondage récemment qui accordait au premier ministre et au gouvernement libéral une note de 15 % au chapitre de la protection de l'environnement. Notre collègue, la députée de Saanich—Gulf Islands, a reçu la meilleure note, et je pense que notre chef se classait au second rang. Beaucoup plus bas sur la liste, on trouve le député de Papineau, notre premier ministre.
Après avoir effectué une étude approfondie et rédigé un rapport de 92 pages, le comité n'a su trouver un seul mécanisme de protection aboli. Pour notre part, nous avons dit ce qui suit dans notre rapport dissident:
Contrairement à ce qu'indique la lettre datée du 29 juin 2016 que le ministre des Pêches, des Océans et de la Garde côtière canadienne a fait parvenir au Comité, dans laquelle le ministre demande au Comité d'entreprendre une étude sur les modifications apportées en 2012 à la Loi sur les pêches et sur la disparition de mesures de protection qu'elles ont pu entraîner, [...]
Et moi qui pensais que les comités étaient censés fonctionner en toute indépendance et être maîtres de leur destinée. Combien de fois un ministre ou son secrétaire parlementaire a-t-il pris la parole pour vous dire, madame la Présidente, que les comités sont livrés à eux-mêmes et font ce qui leur plaît? Combien de fois avaient-ils la main sur le coeur en le disant? C'est fou. Ça ne fait que démontrer une fois de plus l'hypocrisie du parti d'en face.
J'en reviens au rapport:
[...] les témoins qui ont comparu devant le Comité n'ont pas été en mesure de fournir des preuves — scientifiques ou juridiques — des dommages ayant découlé de la prétendue perte de mesures de protection prévues par la Loi à la suite des modifications de 2012. Ce fait est d'ailleurs évoqué au paragraphe 33 du rapport, dans lequel on indique ce qui suit: « Les paragraphes précédents de la présente section reflètent des témoignages divergents ne s'appuyant sur aucune preuve scientifique ou juridique pour affirmer que les modifications apportées en 2012 ont élargi ou réduit la portée de l'application de l'article 35 ».
Dans certains cas, des témoins ont affirmé que les modifications apportées en 2012 à la Loi avaient en fait renforcé les mesures de protection de l'habitat, notamment la représentante de l'Association minière du Canada, qui a indiqué que: « […] les modifications apportées à la Loi sur les pêches en 2012 ont élargi le champ d'application des interdictions prévues à l'article 35 et multiplié les cas où une autorisation et des mesures d'atténuation sont nécessaires ».
Pour sa part, la Fédération canadienne de l'agriculture (FCA) a ajouté ce qui suit: « […] La FCA est d'avis que le rétablissement de toutes les dispositions antérieures de la Loi sur les pêches ne serait pas productif [et] causerait le retour des mêmes problèmes pour les agriculteurs et aurait une bien faible incidence sur [la conservation] ».
Je viens de passer en revue les amendements du Sénat qui s’appliquent aux réserves d’habitats. Je pourrais parler longuement de la pêche côtière, et je le ferai plus tard dans mon discours.
Je vais parler du projet de loi S-203, qui vise à mettre fin à la captivité des baleines, principe qui a été intégré à ce projet de loi, et de certaines des préoccupations des conservateurs. Auparavant, lorsqu’un épaulard résident du Sud était en péril et avait besoin d’être secouru, il fallait un décret du lieutenant-gouverneur de la Colombie-Britannique pour le faire. Le lieutenant-gouverneur de la Colombie-Britannique et la province n’ont pas les mécanismes en place pour répondre rapidement à cette demande. Lorsque chaque minute compte pour sauver la vie d’un épaulard ou d’un cétacé, nous avons besoin d’un outil pour agir rapidement. Le projet de loi S-203 comportait des lacunes à ce sujet. C’était une grande préoccupation pour les conservateurs. Les amendements du Sénat ont mis fin à cette préoccupation, et le pouvoir est maintenant entre les mains du ministre, ce qui, à mon avis, est la bonne façon de faire.
Bien que le projet de loi S-203 suscite encore des préoccupations, nous croyons que les amendements proposés par le Sénat nous donnent l’assurance que certaines de nos principales préoccupations ont été entendues. Toutefois, dans le projet de loi S-203, il y avait certaines différences dans la traduction du français vers l’anglais. Sur le plan juridique, on pourrait soutenir que l’intention n’est peut-être pas la même. Cette question a été soulevée au comité, et l’équipe juridique et les fonctionnaires n’ont pas pu nous dire si ces divergences dans la traduction du français vers l’anglais pourraient avoir de graves conséquences à l’avenir.
Le projet de loi S-238 porte sur le prélèvement des nageoires de requin. Comme je l’ai mentionné, un sénateur conservateur a présenté le projet de loi S-238. Il est semblable au projet de loi que mon collègue de Port Moody—Coquitlam a présenté plus tôt au cours de la session et qui a été rejeté, mais je suis heureux de voir que le projet de loi S-238 a été intégré au projet de loi C-68. Nous avons encore des inquiétudes quant à l'application du projet de loi S-238 à l’avenir, mais je crois en l’intention de mon collègue et en l’esprit du projet de loi.
Comme on l’a mentionné plus tôt, lorsque les fonctionnaires ont comparu devant le comité, pendant l’étude du projet de loi S-238, au sujet du prélèvement des nageoires de requin et de leur importation, ils ont indiqué qu'il serait apparemment encore possible d'importer de la soupe aux ailerons de requin parce que « de la soupe, c’est de la soupe », comme l'a dit l’un des fonctionnaires. Ils se sont engagés à vérifier la véracité de cette information et de transmettre ultérieurement la réponse au comité. Je ne sais pas encore s’ils lui ont transmis leur réponse.
Mon collègue a parlé de l’objet du projet de loi C-68. Il est important pour les conservateurs d’exprimer encore une fois nos préoccupations au sujet du projet de loi. Elles ont été mentionnées précédemment, et j’en ai exprimé quelques-unes. D’un point de vue stratégique, le projet de loi C-68 est une mesure législative qui procure un sentiment de bien-être aux Canadiens.
Il est intéressant de constater qu'après que les sénateurs ont essayé d'améliorer la situation et qu'ils ont fait leur travail en apportant des amendements qui renforcent le projet de loi, le ministre et le gouvernement libéral ont décidé de l'affaiblir de nouveau. Le Sénat fait du bon travail. Lorsqu'il nous a renvoyé le projet de loi, celui-ci contenait de bons amendements, mais le ministre et le gouvernement en éliminent une bonne partie.
Comme je l'ai dit, le projet de loi C-68 sert de retour d'ascenseur pour tous les groupes qui ont appuyé nos collègues libéraux d'en face. En réalité, ils étaient prêts à appuyer n'importe qui pour barrer la route aux conservateurs. Cela m'amène au point suivant, qui est pertinent, car il va au cœur même du projet de loi C-68.
Le projet de loi C-68 peut être classé avec le projet de loi C-69, le projet de loi anti-pipelines, et le projet de loi C-48, la Loi sur le moratoire relatif aux pétroliers. Récemment, six premiers ministres provinciaux du pays ont écrit au premier ministre pour lui dire que ces projets de loi représentaient l'une des plus grandes menaces à l'unité nationale que nous ayons vues, qu'ils menacent réellement l'économie nationale et que les dommages qu'ils risquent de lui causer sont considérables, y compris les conséquences sur l'emploi et les investissements.
Pourquoi est-ce que j'en parle? Comme je l'ai mentionné, le projet de loi C-68 est une récompense pour tout l'appui que les libéraux ont obtenu lors des élections de 2015. De quel appui s'agit-il? En 2015, 114 tiers ont dépensé 6 millions de dollars pour influer sur le résultat des élections. Bon nombre d'entre eux étaient financés par la Tides Foundation des États-Unis. La nouvelle directrice des politiques y était une cadre supérieure. L'ancien conseiller principal du premier ministre était auparavant le président du Fonds mondial pour la nature, un autre organisme financé par Tides.
Leadnow est également un organisme financé par Tides. Comme c'est indiqué dans un article, il s'agit d'une « société sans but lucratif qui a été fondée en 2010 afin d'introduire au Canada un modèle de campagne politique et d'organisation de mouvement en ligne qui a vu le jour aux États-Unis pour appuyer le président Barack Obama. »
Voici ce que dit l'article:
Au cours des élections fédérales canadiennes de 2015, Leadnow a mené un projet de vote stratégique nommé Vote Together. L'organisme prétend avoir contribué à la défaite de 25 députés conservateurs sortants.
Leadnow m'a ciblé, mais ses efforts ont échoué. Cependant, il a connu du succès dans 25 circonscriptions représentées par des conservateurs.
L'article se poursuit:
D'après le plan d'affaires de 2010 de Leadnow, il est clair que, dès 2010, cet organisme s'est concentré sur l'objectif de défaire le gouvernement conservateur. Le condensé d'information destiné aux bailleurs de fonds de Leadnow précise que ce dernier souhaite offrir un appui concret aux partis adoptant les politiques qu'il privilégie et qu'il se sert d'outils comme le vote stratégique pour influer sur le résultat des élections de façon à ce que ceux-ci reflètent la tendance progressiste de la majorité des Canadiens.
Pourquoi est-ce que je parle de ce groupe? En quoi est-ce pertinent? L'histoire remonte à 2008, quand un groupe radical d'ONG américaines militant contre les combustibles fossiles a lancé une campagne dénonçant les sables bitumineux. Comme on pouvait le lire dans une chronique du Financial Post, cette campagne visait à paralyser « l'exploitation des sables bitumineux du Canada en retardant ou en bloquant l'expansion ou le développement de pipelines de grande envergure », en « incitant, par la sensibilisation, les Premières Nations à contester la construction de pipelines sur leurs territoires traditionnels » et en « multipliant les recours en justice devant les tribunaux provinciaux et fédéraux du Canada ». Ces ONG voulaient faire ressortir les aspects négatifs de ces projets, notamment en gagnant à leur cause toutes sortes de personnalités publiques, comme Leonardo DiCaprio, afin qu'elles « prêtent leur voix aux opposants aux sables bitumineux et ternissent l'image que les médias en projettent ».
On peut également lire ceci dans la chronique du Financial Post:
La fondation Rockefeller, la fondation Hewlett [...] la fondation David and Lucile Packard [...] et divers organismes caritatifs environnementaux ont versé des centaines de millions de dollars à la fondation américaine Tides.
Pourquoi ont-ils agi ainsi? Pour qu'ils puissent nuire le plus possible au secteur canadien des ressources naturelles.
Je signale au passage que le poisson aussi est une ressource naturelle et que le projet de loi C-68, le projet de loi anti-pipelines C-69 et le projet de loi C-48, sur le moratoire relatif aux pétroliers, sont tous dirigés contre le secteur canadien des ressources naturelles.
J'aimerais ramener les députés aux premiers jours de la session. Le premier ministre avait alors déclaré que le Canada serait davantage connu pour son ingéniosité que pour ses ressources naturelles.
Qu'on ne s'y trompe pas: ces groupes ont pénétré jusqu'aux plus hautes sphères de l'appareil gouvernemental. Gerald Butts, qui a déjà été président et chef de la direction du Fonds mondial pour la nature, est devenu le principal conseiller du premier ministre, et il a amené ses anciens compagnons d'armes avec lui. Le chef de cabinet de la ministre de l'Environnement, Marlo Raynolds, a déjà été directeur général de l'Institut Pembina, qui a des liens avec Tides. La chef de cabinet du ministre des Ressources naturelles, Zoë Caron, a déjà été représentante de la section canadienne du Fonds mondial pour la nature. Quant à la directrice des politiques du Cabinet du premier ministre, Sarah Goodman — probablement une des femmes les plus puissantes du Canada —, elle a déjà occupé les fonctions de vice-présidente de Tides. Peu importe sous quel angle on regarde ce portrait, il est à frémir.
Les députés se souviendront que, pendant la période des questions, la ministre des Institutions démocratiques a déclaré qu'un côté de la Chambre se plaît à tricher, tandis que les ministériels font tout en leur pouvoir pour protéger la démocratie canadienne. Or, en 2015, des groupes ont été financés dans le but de défaire Stephen Harper et les conservateurs et de faire élire le premier ministre, qui était alors candidat libéral dans Papineau. Celui-ci a fait toutes sortes de promesses. Que se passe-t-il maintenant? Maintenant, il remplit toutes les promesses qu'il a faites aux groupes environnementaux, qui sont des ONG.
Des groupes de pêcheurs et des Premières Nations m'ont dit que, lorsqu'ils veulent rencontrer le ministre, ils doivent passer par des groupes environnementaux. Je pense que, dans l'histoire du pays, c'est le gouvernement actuel qui a été le plus souvent poursuivi en justice par des Premières Nations. En ce qui concerne les zones de protection marine, le gouvernement mène ce qu'il appelle des consultations. Je vais revenir plus tard sur les consultations concernant le projet de loi C-68. Les libéraux tiennent à dire qu'il s'agit de consultations. En tenant de tels propos à la Chambre, ils sont malhonnêtes envers les Canadiens qui regardent les débats. Nous en avons la preuve. J'ai parlé un peu de la façon dont les fonds étrangers influent sur les plus hautes sphères du gouvernement, et c'est ce qu'on peut constater dans le cas des divers projets de loi présentés à la Chambre. Le projet de loi C-68 ne fait pas exception à la règle.
Dans le cadre du plan d'action économique de 2012 et pour appuyer un plan de développement responsable des ressources, l'ancien gouvernement conservateur avait proposé des changements à la Loi sur les pêches. Il s'agissait de la renforcer et d'en retirer les formalités administratives inutiles. Les changements visaient à rendre le processus gérable de façon à ce que les promoteurs soient au courant des mesures à prendre. Il ne s'agissait pas de les dégager de leurs responsabilités. L'Association minière du Canada avait d'ailleurs témoigné que la loi allait en fait multiplier les zones où ses membres pouvaient être convaincus de négligence et mis à l'amende. Nos changements visaient à appuyer une transition consistant à passer de la gestion des impacts sur tous les habitats du poisson au régime réglementaire et à la gestion des menaces à la viabilité et à la productivité permanente des pêches commerciales, récréatives et autochtones du Canada.
Au lieu d'écouter les experts, les gens qui utilisent les cours d'eau et qui pêchent dans les rivières, les lacs et les océans, le gouvernement a fait la sourde oreille. L'aspect pratique ne l'intéressait pas, et il a imposé, en ayant recours à l'attribution de temps, une mesure législative qui touchera des vies et ne fera pas grand-chose pour empêcher la détérioration des pêches au Canada. J'en ai déjà parlé d'ailleurs dans un discours précédent. À ce moment-là, je pense que 23 des 25 zones de pêches principales étaient gravement à risque. Pourquoi? Parce que les plans de gestion des pêches n'étaient pas appliqués. Nous ne gérons pas les pêches afin qu'elles prospèrent, mais pour les mener à l'extinction.
J'opposerais notre équipe à celle-là n'importe quand. Nos députés de North Okanagan—Shuswap, de Dauphin—Swan River—Neepawa et de Red Deer—Lacombe ont tous déjà travaillé dans ce domaine. Nous chassons. Nous pêchons. Nous vivons de la terre. Nous sommes des agriculteurs. Nous sommes des protecteurs de l'environnement dans l'âme. Le projet de loi C-68, dans les faits, a compliqué les choses en raison de certaines modifications que nous avons apportées.
Un député libéral qui siégeait au comité, à l'époque, qui est lui-même agriculteur, a dit que, s'il y avait une inondation sur ses terres, grâce aux modifications que l'ancien gouvernement conservateur avait faites, il lui serait plus facile de réagir. Dans une localité ou une municipalité où un chemin aurait été emporté par les eaux, les ouvriers pourraient intervenir sans contourner de règle ou de règlement, accomplir le travail dans les délais et selon les calendriers prescrits et réagir rapidement.