Merci beaucoup, monsieur le président.
Distingués membres du Comité, je vous remercie de m'avoir invité à comparaître aujourd'hui.
Je suis ravi d'avoir l'occasion de vous parler du rapport annuel 2020 du Comité des parlementaires sur la sécurité nationale et le renseignement, ou CPSNR.
Je suis en compagnie de Sean Jorgensen. M. Jorgensen est le directeur des opérations du Secrétariat de notre comité et il est ici pour répondre aux questions et fournir des renseignements techniques.
Chers collègues, depuis 2017, nous avons mené sept examens qui ont donné lieu à trois rapports annuels et deux rapports spéciaux. Nous menons actuellement deux nouveaux examens, l'un sur les activités de sécurité et de renseignement d'Affaires mondiales Canada, et l'autre sur la cyberdéfense, et nous venons d'en lancer un troisième, sur le mandat de police fédérale de la GRC.
Ce rapport annuel 2020 est le seul aperçu consolidé des menaces pour la sécurité nationale au Canada.
J'aimerais souligner que les rapports du CPSNR sont unanimes et non partisans. Nous préparons et mettons au point les rapports par consensus, et tous les membres s'entendent sur le contenu final, les évaluations et les recommandations.
J'en viens maintenant au rapport de Jim Judd, à propos du Protocole public en cas d'incident électoral majeur.
Comme le comité l'a mentionné dans son étude de 2019 sur l'ingérence étrangère, un certain nombre d'États tentent de s'ingérer dans les processus électoraux du Canada. Ils utilisent un certain nombre de méthodes, notamment en tentant secrètement, par exemple, d'influencer les candidatures, cherchant à promouvoir les unes et à miner les autres. Il peut s'agir de contributions illégales à des campagnes électorales et d'efforts visant à mobiliser les fonctionnaires pour exercer des pressions.
Cela arrive à tous les partis, dans tous les ordres de gouvernement. Les cibles peuvent être volontairement ou involontairement soumises à des activités d'ingérence étrangère. Dans le domaine cybernétique, cela pourrait supposer le déploiement d'efforts par d'autres pays pour amplifier les divisions sociales, alimenter la haine en ligne ou aiguiser les différences partisanes.
Ce dernier point est important: les États étrangers tentent d'utiliser des groupes partisans, même des partis politiques, pour poursuivre leurs propres objectifs.
Par conséquent, le CPSNR a appuyé les recommandations de M. Judd visant à rétablir le Protocole public en cas d'incident électoral majeur bien avant la prochaine élection fédérale et à étendre le mandat du Protocole à la période préélectorale.
Le CPSNR estime également que le gouvernement devrait se pencher sur quatre autres questions.
Premièrement, s'assurer que le mandat du protocole englobe toutes les formes d'ingérence étrangère.
Deuxièmement, considérer l'inclusion de Canadiens éminents à titre de membres du groupe d'experts. Si un État étranger tente de manipuler des groupes partisans, il pourrait être plus efficace qu'un Canadien respecté et éminent alerte le public sur ce qui se passe.
Troisièmement, s'assurer par-dessus tout que tous les partis comprennent l'objet du protocole et le processus de signalement d'un problème potentiel.
Quatrièmement, considérer la façon dont le groupe d'experts informerait réellement les Canadiens d'un incident d'ingérence étrangère. Ceci est important: les États étrangers tentent d'attiser les différences partisanes. Nous devrons être prudents, quant à la diffusion de ces efforts et l'attribution de comportement à des pays particuliers.
Monsieur le président, je passe maintenant à l'aperçu du rapport annuel sur les cinq menaces à la sécurité nationale du Canada: le terrorisme, l'espionnage et l'ingérence étrangère, les cybermenaces, le crime organisé, et la prolifération des armes de destruction de masse.
Je vais me concentrer sur les trois premières puisque ce sont elles qui ont le plus changé depuis 2018, quand le CPSNR a commencé à s'y intéresser.
Le terrorisme d'abord.
La défaite de Daech en Syrie et en Irak, en 2019, a été une étape importante dans les efforts mondiaux de lutte contre le terrorisme salafiste-djihadiste. Cependant, elle a créé d'autres problèmes. Nous nous demandons notamment quoi faire avec les Canadiens qui s'étaient déplacés dans la région pour soutenir des groupes terroristes. Comme le CPSNR le sait bien, ces personnes peuvent continuer de représenter une menace pour le Canada et pour ses alliés.
En même temps, nous avons assisté à la croissance d'autres « extrémistes violents à motivation idéologique ». Il s'agit de personnes et de groupes qui adoptent la violence xénophobe, la violence antiautorité et la violence selon les genres.
Alors que les restrictions imposées dans le cadre du confinement lié à la COVID-19, comme les restrictions des déplacements, ont perturbé les efforts de facilitation du terrorisme, la pandémie et les manifestations concurrentes contre le racisme ont accru la rhétorique antigouvernementale liée à un extrémisme violent motivé par des considérations idéologiques.
Je dois être clair que l'espionnage et l'ingérence étrangère sont tout à fait différents. L'espionnage suppose le vol d'information, l'ingérence étrangère suppose l'utilisation de moyens clandestins ou de menaces pour promouvoir une certaine position ou un certain objectif. Cependant, l'appareil de la sécurité nationale les traite souvent comme une menace unique parce que les auteurs, les États étrangers, les poursuivent souvent en collaboration.
En 2019, le comité a conclu que l'ingérence étrangère constituait une menace importante pour la sécurité du Canada. Et cela continue aujourd'hui.
Le changement le plus important est la menace posée par l'espionnage. Les États étrangers ciblent de plus en plus les secteurs des sciences et de la technologie du Canada.
La pandémie a créé des occasions pour les États étrangers, notamment la Russie et la Chine, de cibler le secteur de la santé du Canada, plus particulièrement dans le domaine du développement de vaccins.
En ce qui concerne les cyberactivités malveillantes, le Canada fait face à un large éventail de cybermenaces. Dans le cas des menaces sophistiquées d'origine étatique, la Russie et la Chine sont responsables des plus importantes.
Ces pays continuent de cibler les systèmes gouvernementaux et non gouvernementaux, y compris ceux qui fournissent une infrastructure essentielle au sein du Canada et plus récemment ceux qui participent au développement de vaccins.
Nous avons également vu des acteurs étatiques mener des campagnes de désinformation en ligne au Canada et parmi nos alliés. Ces mêmes acteurs utilisent également des méthodes sophistiquées pour cibler, harceler ou menacer les dissidents au Canada.
En conclusion, monsieur le président, je dirai que les menaces à la sécurité du Canada sont fluides, elles changent. Ce sont autant de choses auxquelles nous, parlementaires de tous les horizons politiques, devons continuer de porter attention et chercher des moyens d'aborder dans le cadre de nos audiences, de notre travail sur la législation et de notre engagement auprès des Canadiens.
Je serai heureux de répondre aux questions des membres du Comité, par votre entremise, monsieur le président, en leur rappelant que les membres du CPSNR ont renoncé à leur privilège parlementaire. Bien entendu, je devrai faire preuve de circonspection dans mes réponses à des questions qui pourraient m'amener sur le terrain de l'information classifiée.
Merci, monsieur le président.