Madame la Présidente, les députés conservateurs n’aiment peut-être pas mes propos, mais c’est la vérité, et parfois, la vérité fait mal. Si nous nous reportions aux premiers débats en mai, nous constaterions que beaucoup plus de compassion était exprimée sur le parquet de la Chambre des communes, de tous les côtés. Les députés libéraux, conservateurs, néo-démocrates et autres ont montré très clairement à quel point ce que devait faire le Parlement était difficile afin de respecter la décision de la Cour suprême du Canada concernant l'aide médicale à mourir. Aujourd’hui, dans ce débat, nous avons vu le chef du Parti conservateur faire un rappel au Règlement sur un sujet qui n’a rien à voir avec le débat, pour tenter de déposer un document. Pourquoi a-t-il agi ainsi? Il ne pouvait tout simplement pas attendre la période des questions, je suppose, qui commence après les déclarations de députés, qui elles, débutent dans 15 ou 20 minutes.
Nous devrions être attentifs aux thèmes que les conservateurs ont abordés dans leurs interventions. Certains conservateurs, les deux ou trois derniers en particulier, se sont levés et ont donné la fausse impression que le projet de loi équivaudrait à un suicide sur demande. La députée de Battlefords—Lloydminster a déclaré qu’aujourd’hui, une personne déprimée en raison de problèmes de santé mentale pourrait se rendre chez un médecin et prendre rendez-vous pour se suicider vendredi, avec l’aide du gouvernement. Les députés conservateurs propagent de la mésinformation sur un sujet aussi délicat. Ce sont des situations très difficiles avec lesquelles des Canadiens doivent composer tous les jours.
Hier, le député de Cumberland-Colchester a parlé de 12 000 ou 13 000 personnes tuées avec beaucoup de désinvolture, laissant entendre que la loi permet simplement de tuer des gens. De mon point de vue, la décision d’obtenir l’AMM n’est pas facile; elle est très difficile à prendre. Les membres de la famille et les personnes concernées vivent des moments très difficiles dans une situation bien concrète. Hier et aujourd’hui, les conservateurs se moquent pratiquement de tout cela et propagent de la mésinformation sur un enjeu aussi important. Qu’est-il advenu de la compassion de 2015, 2016 et même 2017? À l’époque, il semblait y avoir un sentiment dans cette enceinte que, oui, il y aura parfois des désaccords si les députés sont profondément touchés par un enjeu, comme il se doit, mais il y avait aussi un esprit beaucoup plus fort de coopération lorsque les députés racontaient ce que leurs concitoyens avaient vécu.
Le député de Portage—Lisgar a dit que les gens recourent aux banques alimentaires et songent au suicide à cause du coût de la vie. Un certain nombre de qualificatifs me viennent à l'esprit au sujet de la façon dont les députés d'en face font ce genre de déclarations stupides. Franchement, je pense que ces déclarations sont stupides et qu'elles ne contribuent pas de façon positive au débat sur une question très importante que la Chambre doit aborder, ce que ferait une discussion sur les mesures d'aide et les services.
Lors des débats de 2015-2016, nous avons beaucoup entendu parler d’enjeux tels que les soins palliatifs. Nous voulions nous assurer que les dispositions législatives relatives à l’aide médicale à mourir ne seraient en aucun cas invoquées comme résultat direct de l’absence de services et de systèmes appropriés pour fournir des garanties à ces personnes qui se sentaient contraintes de demander l’aide médicale à mourir. C’est le genre d’éléments qui, à mon avis, ont pris une grande importance à l’époque.
Aujourd’hui en revanche, les conservateurs diront: « Qu’en est-il des 4,5 milliards de dollars que le Parti libéral s’est engagé à verser? » Les députés ont raison de dire que le gouvernement avait pris un engagement appréciable à l'égard de la santé mentale, soit celui de verser plusieurs milliards de dollars sur cinq ans. C’est l’une des raisons pour lesquelles les accords sur les soins de santé que nous avons mis en place, dont on a fait grand cas l’an dernier, et qui s’élèvent à un peu moins de 200 milliards de dollars sur 10 ans, visent à financer des soins de santé non seulement aujourd’hui, mais pour les générations futures qui bénéficieront de ce type d’investissement. De plus, le ministre de la Santé collabore avec les provinces pour conclure des accords dans des domaines comme les services en matière de santé mentale. Nous reconnaissons à quel point il est important de veiller à ce que ces services soient financés.
Contrairement à un certain nombre de députés du Parti conservateur, et je ne veux pas les étiqueter tous, du moins pas à ce stade, le gouvernement a continué à travailler avec les provinces, en particulier, et avec d’autres parties prenantes dans différents forums pour garantir que les personnes qui obtiennent l’aide médicale à mourir sont, en fait, informées de manière très concrète des catégories de services disponibles. Il ne s’agit en aucun cas de dire simplement: « Voici ce que je veux et je l’obtiendrai », puis de l'obtenir deux jours plus tard. Nous pouvons observer l’attention et le débat publics accordés à des enjeux tels que les soins palliatifs depuis l’instauration de l’aide médicale à mourir, soins qui ont été grandement améliorés, à mon avis.
J’aimerais croire que les provinces, qui sont responsables en dernière analyse de l’administration publique des services de soins de santé, ont pris des notes et compris qu’elles ont aussi une responsabilité, car ce sont elles qui offrent les services que les Canadiens attendent. Le gouvernement fédéral l’a reconnu en soutenant des mesures telles que l’encouragement des normes en matière de soins de longue durée et en fournissant des fonds substantiels pour veiller à ce que les provinces soient mieux à même de répondre à la demande de soins de santé. En ce qui concerne ce que j’ai dit plus tôt à propos de la santé mentale, nous continuons à honorer les engagements sérieux que nous avons pris et nous travaillons à les réaliser avec les provinces et les territoires.
Comme je l'ai dit hier, je fais confiance aux professionnels de la santé, aux travailleurs sociaux et aux autres personnes qui possèdent l'expertise nécessaire et je fais confiance aux gens qui pensent que l'aide médicale à mourir pourrait être la voie à suivre pour eux. Des efforts considérables sont déployés dans chaque situation, et j'ai confiance dans le système.
Les députés pourront me corriger si je me trompe, mais je ne me souviens pas d’une province ou d’un premier ministre au Canada qui ait clairement déclaré que l’aide médicale à mourir ne fonctionnait pas. Les provinces demandent un report de trois ans pour un aspect de l’aide médicale à mourir, soit lorsque la santé mentale est la seule raison de la demande. La question d'autoriser la maladie mentale comme unique condition médicale sous-jacente a été ajoutée à la mesure législative initiale sur l’aide médicale à mourir, puis introduite sous forme de projet de loi, ce qui a permis aux provinces et aux autres administrations de disposer d’un délai pour prendre les dispositions nécessaires afin d'offrir des services aux Canadiens.
Nous avons ensuite constaté que les provinces avaient besoin de plus de temps. Un certain nombre de gouvernements provinciaux n’ont pas dit qu’il fallait se débarrasser de l’aide médicale à mourir, mais plutôt qu’ils avaient besoin de plus de temps pour mettre en œuvre cet aspect de la loi. C’est essentiellement la raison pour laquelle nous sommes saisis de ce projet de loi aujourd’hui.
Cependant, si on écoute les députés du Parti conservateur, on constate qu’ils ne laissent nullement entendre qu'ils appuieront le projet de loi C-62. Il sera intéressant de voir comment ils voteront. Logiquement, je croirais qu’ils voteraient en faveur du projet de loi. S’ils votent contre le projet de loi C-62 et que, pour une quelconque raison, le projet de loi n’est pas adopté, le critère selon lequel la maladie mentale peut être l’unique condition médicale sous-jacente entrera en vigueur le 17 mars prochain. Par conséquent, il est important que les députés, quel que soit leur position, votent pour le projet de loi parce qu’il répond directement à ce que demandent au gouvernement du Canada nos partenaires, qui sont, en dernière analyse, responsables de l'application de la loi.
Les députés d’en face essaient souvent de dire qu’il revient au gouvernement de décider. Il est important de souligner ce que j’ai mentionné au tout début: la raison pour laquelle nous avons aujourd’hui un projet de loi sur l’aide médicale à mourir est que, en 2015, dans l’arrêt Carter, la Cour suprême a essentiellement déclaré que nous devions l'instaurer. Nous n’avions pas le choix, si, bien sûr, nous respectons la Charte des droits et libertés. Je vais répéter ce que j’ai dit hier: il y a eu beaucoup de consultations, littéralement des centaines d’heures de réunions de toutes sortes, y compris des comités permanents, des débats à la Chambre, des réunions dans les circonscriptions, des sondages et des pétitions. Bien qu’il y ait eu toutes sortes de mécanismes pour apporter une contribution, en fin de compte, je pense que le projet de loi a atteint un seuil permettant de répondre en grande partie aux préoccupations de la Cour suprême du Canada et de respecter la Charte des droits.
Cela a été suivi d'une décision de la Cour d'appel du Québec qui nous a donné une nouvelle obligation d'améliorer la loi, et c'est exactement ce que nous avons fait.
Nous continuons aujourd'hui à chercher des moyens d'améliorer la loi. Je pense qu'elle tient compte de la Charte canadienne des droits et libertés. Si les membres du caucus conservateur maintiennent qu'ils n'appuient pas la loi sur l'aide médicale à mourir, je me demande s'ils appuient réellement la Charte canadienne des droits et libertés.
J'ajouterai que l'attitude générale du chef du Parti conservateur...