Merci.
Bonjour, mesdames et messieurs les députés.
Je suis le président national du Syndicat des employés de l'impôt.
Tout d'abord, je tiens à mon tour à vous remercier de me donner l'occasion de participer à cette discussion aujourd'hui concernant le projet de loi C-224.
Le Syndicat des employés de l'impôt, un élément de l'Alliance de la fonction publique du Canada, représente quelque 28 000 employés travaillant à l'Agence du revenu du Canada.
Le but du projet de loi présenté par M. Gabriel Ste-Marie, député du Bloc québécois, est que le gouvernement fédéral donne à la province de Québec la responsabilité de percevoir et d'administrer les impôts fédéraux sur le revenu des particuliers et des entreprises pour le compte du gouvernement fédéral.
Le Bloc québécois étant un parti ouvertement souverainiste, je peux très bien comprendre les raisons politiques qui ont incité le député à présenter ce projet de loi. Cependant, il n'y a pas d'autres bonnes raisons qui, à mon avis, justifieraient l'adoption du projet de loi C-224.
Tout d'abord, il est évident qu'il y aura des pertes d'emplois massives si ce projet de loi est adopté et que le gouvernement fédéral confie l'administration des impôts fédéraux du Québec au gouvernement provincial. En effet, l'Agence du revenu du Canada emploie présentement environ 6 000 personnes au Québec, et notre syndicat représente environ 4 000 de ces employés. Quant à elle, l'Agence du revenu du Québec compte environ 12 000 employés dans ses rangs. Ensemble, les deux agences comptent donc un effectif total d'environ 18 000 personnes. Si l'on compare cela à l'effectif total que compte l'ARC ailleurs au pays à l'extérieur du Québec, soit environ 39 000 employés, on comprend rapidement qu'il y aurait un surplus d'employés au Québec advenant l'adoption du projet de loi.
D'ailleurs, comme le rapportait un article du quotidien Le Devoir de janvier 2019, le premier ministre du Québec, M. François Legault, est d'avis que « “c'est certain” qu'il y aurait des pertes d'emplois ». Ce dernier a aussi pris soin de souligner que seuls les employés du groupe travaillant à Revenu Québec conserveraient leur emploi. Je ne suis pas nécessairement d'accord avec lui, mais c'est ce qu'il a déclaré.
Je tiens à souligner au passage que la vaste majorité des emplois qui seraient perdus sont occupés par des personnes qui vivent au Québec, qui y paient des impôts et qui contribuent grandement à l'activité économique de la province. Dans le fond, ce sont des Québécois de partout au Québec.
Ces pertes d’emploi toucheront plus de 1 200 employés du Saguenay-Lac-Saint-Jean, ainsi que 1 500 autres en Mauricie. Le projet de loi prescrit la prise de mesures pour atténuer les pertes d’emploi, qui seront inévitables. Bien que je cherche une solution réaliste à ce problème, je n’en ai pas encore trouvé.
Je tiens maintenant à souligner que l’idée de créer une déclaration de revenus unique pour le Québec n’est pas la solution, du moins pas pour l’instant. Ce n’est pas moi qui le dis. Ce sont les fiscalistes du Québec à l’occasion d’une réunion en mai 2019, à Sherbrooke. Selon ces experts, la solution n’est pas viable pour l’instant. Ils ont affirmé que les pratiques internationales empêcheraient le Québec de faire une partie du travail du gouvernement fédéral dans ce domaine. Ils ont également déclaré que le fruit d’accords bilatéraux négociés strictement entre administrations centrales, comme le gouvernement du Canada et d’autres pays, par exemple les accords de coopération pour lutter contre l’évasion fiscale, ne permet habituellement pas le partage des données avec d’autres ordres de gouvernement.
Je sais que le projet de loi exige que nous nous penchions sur la question, mais j’insiste sur le fait qu’il a fallu des années à l’ARC pour négocier ces accords avec d’autres pays. Il faudrait beaucoup de temps, si c’était possible et si les autres pays étaient d’accord, pour y apporter quelque changement que ce soit.
De toute façon, le véritable problème est ailleurs. Selon François Vaillancourt, éminent fiscaliste québécois, la majeure partie des coûts supplémentaires associés à l’observation des lois fiscales au Québec ne découlent pas de la redondance, mais des différences entre les politiques fiscales des deux ordres de gouvernement, car il y a deux lois sur l’impôt, soit une provinciale et une fédérale. Il soutient que, tant qu’il faudra se conformer à deux législations distinctes, les grandes économies envisagées ne seront pas possibles.
Les experts proposent donc que Québec et Ottawa harmonisent leurs politiques fiscales avant même d’envisager la création d’un impôt unique. Selon eux, si l’objectif est strictement de réduire les redondances et de faire des économies, il serait plus logique de confier le travail à l’agence la plus apte à réaliser des économies à grande échelle, soit l’ARC. J’avance que c’est pour cette raison que les neuf autres provinces comptent sur l’ARC pour faire ce travail.
Dans son rapport de juin 2015, la commission Robillard, créée par le gouvernement actuel, en est venue à la conclusion que transférer à l’ARC les activités de gestion de l’impôt de Revenu Québec entraînerait des économies directes d’environ 400 millions de dollars par an pour le gouvernement du Québec.
Selon nous, s'il administre les impôts du gouvernement fédéral au Québec, le Québec verra son autonomie diminuer, puisqu'il devra harmoniser plusieurs de ses politiques fiscales avec celles de la Loi de l'impôt sur le revenu du Canada. Ce sera le cas en particulier pour la définition des revenus, qui n'est pas la même au fédéral et au Québec.
En conclusion, je vous remercie encore une fois de m'avoir donné l'occasion de m'adresser à vous aujourd'hui. Je suis prêt à répondre à toute question des membres du Comité.
Thank you.
Good afternoon, ladies and gentlemen.
I am the national president of the Union of Taxation Employees.
First of all, I too would like to thank you for giving me the opportunity to take part in this discussion today on Bill C-224.
The Union of Taxation Employees is a component of the Public Service Alliance of Canada. We represent around 28,000 employees of the Canada Revenue Agency.
The purpose of the bill introduced by the Bloc Québécois member of Parliament Gabriel Ste-Marie is to have the federal government make the province of Quebec responsible for collecting and administering federal-level personal and business income taxes on behalf of the federal government.
Because the Bloc Québécois is an openly sovereignist party, I can certainly understand the political reasons that prompted him to introduce this bill. However, I can see no other good reasons that would justify passing Bill C-224.
First of all, massive job losses will clearly ensue if this bill is passed and the federal government hands over administration of Quebec's federal taxes to the provincial government. The Canada Revenue Agency currently employs approximately 6,000 people in Quebec, and our union represents about 4,000 of them. Revenu Québec has around 12,000 employees. Together, the two agencies therefore have a total workforce of approximately 18,000 people. If we compare that to the CRA'S total workforce in Canada outside of Quebec, which is about 39,000 employees, it's easy to see that there would be a surplus of employees in Quebec if the bill is passed.
Moreover, as reported in a January 2019 article in the daily Le Devoir, Quebec Premier François Legault believes that there will definitely be job losses. He is also careful to point out that only employees in the group working for Revenu Québec would keep their jobs. I actually don't agree with him, but that's what he said.
I'd like to point out in passing that the vast majority of jobs that would be lost are held by people living in Quebec who pay taxes there and greatly contribute to the province's economic activity. Basically, they are Quebeckers from all over Quebec.
Included in these job losses are more than 1,200 employees in the Saguenay—Lac-Saint-Jean region and 1,500 in Mauricie. The bill calls for measures to be put in place to mitigate the job losses that will be inevitable. While I have been looking for a realistic solution to this problem, I have yet to find one.
Now, I also need to point out that the idea itself of creating a single tax return in Quebec is not the solution, at least not at this time. This is not coming from me. This is according to Quebec tax experts who met in May 2019 in Sherbrooke. According to those experts, the solution is not applicable at this time. They said that international practices would prevent Quebec from being able to do a part of the federal government's work in this area. They also said that the result of bilateral agreements negotiated solely between the central governments, like the Government of Canada and other countries, such as co-operation agreements on, among other things, combatting tax evasion, do not usually allow the data to be shared with other levels of government.
I know that the bill is asking us to look into that, but I want to point out that it took years for the CRA to negotiate these agreements with other countries. It will take a long time, if it can happen and if the other countries agree, to make any changes to these agreements.
In any case, the real problem doesn't lie there. The bulk of the additional cost of tax compliance in Quebec doesn't arise from a redundancy issue, according to François Vaillancourt, a renowned Quebec tax expert. It comes from the tax policy differences between the two levels of government, because there are two tax laws, one provincial and one federal. He said that as long as we have to comply with two different sets of legislation, we cannot hope to achieve such huge savings.
The experts therefore suggest that Quebec and Ottawa harmonize their tax policies before even thinking about creating a single tax measure. According to those experts, if the objective is solely to reduce redundancies and achieve efficiencies, it would be more logical to entrust the work to the agency that is most capable of achieving large-scale savings, namely, the Canada Revenue Agency. I suggest that this is why the nine other provinces are counting on the CRA to do the work.
In its report published in June 2015, the Robillard commission, commissioned by the current government itself, came to the conclusion that transferring the tax administration activities from Revenu Québec to the Canada Revenue Agency would result in direct annual savings of approximately $400 million for the Quebec government.
In our view, if Quebec administers the federal government's taxes in Quebec, it will lose some of its autonomy, since it will have to harmonize many of its tax policies with those of Canada's Income Tax Act. In particular, that will include the definition of income, which is not the same at the federal level as it is in Quebec.
In conclusion, thank you again for the opportunity to speak to you today. I will be pleased to answer any questions committee members may have.