Bonjour.
Je suis médecin de famille, et je représente la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec, ou FMOQ.
En premier lieu, je tiens à remercier le Comité permanent de la santé de la Chambre des communes, et tout particulièrement M. Luc Thériault, député de Montcalm, de nous permettre d'offrir quelques commentaires sur l'état des effectifs médicaux en médecine de famille au Québec.
La FMOQ est un syndicat professionnel représentant les quelque 10 000 médecins de famille qui exercent la profession dans le réseau de la santé au Québec. Il est un organisme représentatif reconnu par l'État québécois pour négocier, avec le ministre de la Santé et des Services sociaux, les conditions de pratique de ses membres. Par contre, ce n'est pas seulement un syndicat, mais aussi un acteur important en matière de planification et d'organisation des soins médicaux généraux au Québec, ainsi que la plus importante entreprise de formation médicale continue en médecine de famille au Québec.
La FMOQ et ses membres jouent un rôle central dans la bonne marche du système de santé québécois. On l'a vu dans le cadre de la crise sanitaire liée à la pandémie de la maladie à coronavirus. Nous avons fait la démonstration que notre organisation est un partenaire indispensable et incontournable pour les décideurs politiques et les gestionnaires du réseau.
La pandémie a révélé que la FMOQ et ses membres ont répondu présent à tous les niveaux d'intervention. Ils ont su, de façon proactive et avec beaucoup d'initiative, réorganiser rapidement l'offre de services en première ligne, tout en appuyant activement les soins aux malades en deuxième ligne et les différents services offerts en établissement. Que ce soit dans les cliniques médicales de première ligne, dans les salles d'urgence, dans les unités d'hospitalisation, aux soins intensifs, dans les centres de soins de longue durée, dans les centres locaux de services communautaires, dans les soins à domicile, dans les soins palliatifs, qu'ils soient donnés à domicile ou en établissement, ou dans le cadre du travail lié à l'aide médicale à mourir, quel que soit le milieu de pratique, les médecins de famille québécois ont été à la hauteur. Ils continuent de l'être aujourd'hui et ils le seront demain. Ils sont solidaires à l'égard des besoins de la population.
Au Québec, les médecins de famille couvrent à la fois la première et la deuxième ligne médicale. À l'échelle du Canada, ils sont plus nombreux à pratiquer en deuxième ligne. L'effort additionnel qu'a commandé l'état d'urgence sanitaire pour les médecins de famille les a assurément marqués. Cet effort s'est traduit par une augmentation des jours travaillés et, conséquemment, par un épuisement palpable sur le terrain. Cela a été un stress important sur les plans physique, psychologique et professionnel que de devoir faire face à un rythme soutenu de travail et d'être continuellement en adaptation, autant pour la couverture des soins, où la demande variait constamment en fonction de la pandémie, qu'au sein des équipes médicales, où l'absence impromptue des effectifs pour raison d'isolement à cause de la COVID‑19 mettait tous les professionnels en mode adaptation rapide, et ce, de façon constante.
L'exercice de la médecine pendant la pandémie, à certains égards, s'en est vu ainsi bouleversé. Pour ne donner qu'un seul exemple, l'avènement en force de la télémédecine dans la pratique de tous les jours a durablement et rapidement modifié les habitudes. Malheureusement, pour soutenir tous ces efforts auprès de la population et pour bien coordonner tous ces changements sur le plan professionnel, l'état de nos effectifs ne se situe pas à un niveau optimal. Bien au contraire, nombreux sont ceux qui manquent à l'appel. Comme nous l'avons déjà répété à de multiples reprises au cours des derniers mois, il manque actuellement plus de 1 000 médecins de famille au Québec pour combler la totalité des besoins.
Les raisons de cette pénurie sont multiples. Outre les bouleversements et la fatigue qu'a générés la pandémie au sein des effectifs ces dernières années, il y a un accroissement important de la lourdeur des tâches médico-administratives. Cela donne lieu à une baisse d'attractivité de la profession pour ce qui est des nouveaux aspirants à l'exercice de la médecine.
À titre informatif, le Service canadien de jumelage des résidents met en avant un système de candidature, de sélection et de jumelage à des postes de formation postdoctorale en médecine partout au Canada. Cette année encore, les finissants boudent la médecine familiale au profit d'autres spécialités médicales, et ce, de façon très importante au Québec. Un peu plus de 90 postes en médecine familiale au Québec sont restés vacants après le premier tour de jumelage. Il ne faut jamais oublier qu'un poste non pourvu en médecine de famille peut avoir une incidence négative sur l'accès aux soins de première ligne pendant plus de 30 ans. Pour nous, cette situation est aussi triste qu'alarmante. La médecine de famille au Québec a un urgent besoin d'être valorisée auprès des étudiants en médecine. Trop de personnes, dont certaines aux plus hauts niveaux, ont malheureusement dénigré cette profession au cours des années, ce qui a produit les résultats que l'on connaît.
Sur le plan des effectifs, il manque donc au moins 1 000 médecins de famille au Québec. C'est une pénurie importante. Au cours des sept dernières années, dont les deux dernières années en particulier, plusieurs postes sont restés vacants.
De plus, il y a moins d'activités de première ligne au Québec que dans le reste du Canada. Les médecins de famille du Québec font preuve d'une plus grande polyvalence que les médecins de famille ailleurs au Canada. En effet, environ 50 % d'entre eux exercent dans au moins deux milieux de pratique. Le nombre de médecins de famille par 100 000 habitants est plus bas au Québec que dans le reste du pays.
Selon les dernières données existantes pour 2020‑2021, il y a approximativement 9 800 médecins de famille dans le régime public québécois, et plus de 7 500 d'entre eux offrent des services de première ligne. De plus, 3 737 soignants s'occupent des patients en milieu hospitalier, 2 453 travaillent dans les salles d'urgence, 2 303 travaillent dans les centres d'hébergement et de soins de longue durée, ou CHSLD, et plus de 117 travaillent dans un service d'obstétrique, où il y a eu au moins 34 000 accouchements en 2020‑2021. D'autres travaillent dans divers secteurs, comme les soins palliatifs, la réadaptation, et ainsi de suite.
Il importe de tenir compte de la polyvalence des médecins de famille québécois, dont la contribution à la charge de travail des médecins de famille en établissement se situe entre 35 et 40 % comparativement à environ 20 % en Ontario, si l'on veut se faire une idée juste des effectifs en médecine familiale au Québec qui sont disponibles en première ligne. Nous voulons également insister sur le fait que les difficultés d'accès aux investigations spécialisées ainsi que les délais d'attente visant les consultations et les interventions chirurgicales donnent lieu à une surconsultation. Par exemple, les patients peuvent consulter plusieurs fois leur médecin de famille pour l'ajustement de la posologie liée à un analgésique ou lorsqu'ils sont en attente d'une intervention chirurgicale ou d'une évaluation. Cet autre problème vient à son tour accroître la surcharge de travail des médecins de famille.
De plus, notamment dans les régions éloignées du Québec, l'état des effectifs médicaux en médecine familiale, bien que loin d'être optimal, s'est révélé relativement stable ces dernières années. Toutefois, certaines régions, comme l'Abitibi‑Témiscamingue, Chibougamau et les Îles‑de‑la‑Madeleine, se détachent du lot. En effet, ces territoires géographiques peinent davantage que les autres à recruter des médecins.
Mentionnons aussi les zones rurales qui, actuellement, sont les secteurs géographiques les plus mal en point à cet égard. Les médecins de famille qui exercent en zones rurales sont souvent des médecins en fin de carrière, qui ont consacré l'essentiel de leur pratique à leur communauté. Il y a très peu de relève médicale dans ces communautés rurales qui, pourtant, ne sont pas toujours si éloignées d'un centre urbain. En effet, de nombreux jeunes médecins hésitent à commencer leur carrière dans des milieux aussi isolés. De nombreux sous-territoires vivent d'importants problèmes de recrutement. En ce qui concerne les communautés autochtones, depuis quelques années...
Good afternoon.
I'm a family doctor, and I represent the Fédération des médecins omnipraticiens du Québec, or FMOQ.
First of all, I'd like to thank the House of Commons Standing Committee on Health, and in particular Mr. Luc Thériault, member of Parliament for Montcalm, for allowing us to make a few comments on the state of the physician workforce in family medicine in Quebec.
The FMOQ is a professional union representing some 10,000 family doctors practising in the Quebec health care system. It is a representative body recognized by the Quebec government to negotiate the conditions of practice with the minister of health and social services. However, it isn't only a union, but also an important player in the planning and organization of general medical care in Quebec, as well as the largest continuing medical education enterprise in family medicine in Quebec.
The FMOQ and its members play a central role in the smooth operation of Quebec's health care system. We saw this during the health crisis related to the coronavirus pandemic. We demonstrated that our organization is an indispensable and necessary partner for policy‑makers and network managers.
The pandemic revealed that FMOQ and its members responded to all levels of intervention. They were able to proactively and with great initiative reorganize front‑line services quickly, while actively supporting second‑line care for patients and the various services offered in institutions. Whether in front line medical clinics, emergency rooms, hospital units, intensive care units, long‑term care facilities, local community service centres, home care, palliative care, whether in home or in institutions, or in work related to medical assistance in dying, whatever the practice setting, Quebec family doctors have risen to the occasion. They continue to be so today and will do so tomorrow. They stand in solidarity with the needs of the people.
In Quebec, family doctors cover both primary and secondary care. Across Canada, they are more likely to practise secondary care. The additional effort required by the state of health emergency for family doctors has certainly had an impact on them. This effort has resulted in an increase in the number of days worked and, consequently, in palpable exhaustion in the field. It has been physically, psychologically and professionally stressful to deal with a steady pace of work and to be constantly adapting, both in terms of the coverage of care, where the demand was constantly changing with the pandemic, and within the medical teams, where the unexpected absence of staff due to isolation because of COVID‑19 put all professionals in rapid adaptation mode on a constant basis.
The practice of medicine during the pandemic was in some respects disrupted. To give just one example, the rapid introduction of telemedicine into everyday practice has brought about lasting and rapid changes. Unfortunately, to support all these efforts with the public and to coordinate all these changes professionally, our workforce is not at an optimal level. On the contrary, many are missing. As we have said many times in recent months, there is currently a shortage of more than 1,000 family doctors in Quebec to meet all the needs.
There are many reasons for this shortage. In addition to the upheaval and fatigue that the pandemic has caused in the workforce in recent years, there has been a significant increase in the burden of medical‑administrative tasks. This has led to a decline in the attractiveness of the profession for new aspiring doctors.
For your information, the Canadian resident matching service promotes a system for applying for, selecting and matching postgraduate medical training positions across Canada. Again this year, graduates are turning away from family medicine in favour of other medical specialties, and this is very important in Quebec. Just over 90 family medicine positions in Quebec remained vacant after the first round of matching. We must never forget that an unfilled position in family medicine can have a negative impact on access to primary care for more than 30 years. For us, this situation is as sad as it is alarming. Family medicine in Quebec urgently needs to be valued by medical students. Too many people, including some at the highest levels, have unfortunately denigrated this profession over the years, which has produced the results we know.
In terms of workforce, there is a shortage of at least 1,000 family doctors in Quebec. That's a significant shortage. Over the past seven years, including the last two years in particular, several positions have remained vacant.
In addition, there is less primary care activity in Quebec than in the rest of Canada. Family doctors in Quebec are more versatile than family doctors elsewhere in Canada. About 50% of them work in at least two practice settings. The number of family doctors per 100,000 inhabitants is lower in Quebec than in the rest of the country.
According to the latest available data for 2020‑2021, there are approximately 9,800 family doctors in the Quebec public system, and more than 7,500 of them offer primary care services. In addition, 3,737 caregivers take care of patients in hospitals, 2,453 work in emergency rooms, 2,303 work in nursing homes and long‑term care facilities, or CHSLDs, and more than 117 work in obstetrics, where there were at least 34,000 deliveries in 2020‑2021. Others work in various sectors, such as palliative care, rehabilitation, and so on.
It's important to consider the versatility of Quebec family doctors, whose contribution to the caseload of family doctors in institutions is between 35% and 40% compared to about 20% in Ontario, if we want to get an accurate picture of the family doctors in Quebec who are available on the front lines. We also want to emphasize that difficulties in accessing specialized investigations and wait times for consultations and surgeries result in over‑consultation. For example, patients may consult with their family doctor several times to adjust the dosage of an analgesic or while waiting for surgery or assessment. This, in turn, increases the workload of family doctors.
Furthermore, particularly in remote areas of Quebec, the state of family medicine doctors, while far from optimal, has been relatively stable in recent years. However, some regions such as Abitibi‑Témiscamingue, Chibougamau and the Magdalen Islands, stand out. In fact, these geographic areas have a harder time recruiting doctors than others.
There are also rural areas, which are currently the worst geographic areas in this regard. Family doctors who practise in rural areas are often late career doctors who have devoted most of their practice to their communities. There is very little medical succession in these rural communities, which are not always so far from an urban centre. Many young doctors are reluctant to start their careers in such isolated settings. Many sub‑territories have significant recruitment issues. With respect to indigenous communities, in recent years—