Monsieur le président, merci.
Chers membres du Comité, je vous remercie de me donner l'occasion de vous faire part de mes réflexions et analyses, basées sur plus de 30 années de travail, de recherches, d'enquêtes et d'analyses sur les activités des services de renseignement chinois au Canada. Ce travail, je l'ai effectué comme agent de contre‑espionnage, ainsi que conseiller en matière de sécurité pour les secteurs privé et universitaire.
Je peux affirmer ouvertement aujourd'hui, preuves à l'appui, que le SCRS est au courant de l'ingérence étrangère de la Chine au Canada depuis au moins 30 ans. Tous les gouvernements fédéraux, de celui de M. Mulroney à celui de M. Trudeau aujourd'hui, ont été compromis par des agents de la Chine communiste. Tous les gouvernements ont été informés à un moment ou à un autre. Tous les gouvernements ont choisi de faire abstraction des avertissements du SCRS. Tous les gouvernements ont été infiltrés par des « agents d'influence » agissant au nom du gouvernement chinois.
Tous les gouvernements ont pris des décisions « douteuses » au sujet de la Chine, qui ne s'expliquent que par une ingérence interne. Tous les gouvernements ont laissé leur processus décisionnel être manipulé pour deux raisons principales, soit la partisanerie et le fait que des agents d'influence aient réussi à contrôler le message.
Tous les premiers ministres ou les membres de leur personnel ont choisi de ne pas tenir compte de la gravité de la menace. Non seulement le gouvernement en place a été compromis, mais tous les partis politiques ont également été compromis à un moment ou à un autre. L'inaction des gouvernements fédéraux a mené à des attaques contre de nombreuses administrations municipales et de nombreux gouvernements provinciaux; au bout du compte, tous les gouvernements ont fait partie du problème et non de la solution, et je vous rappelle que ce n'est pas seulement la Chine qui pratique l'ingérence étrangère.
Encore une fois, nous disposons des preuves, des noms et des circonstances de tout cela.
Le principe de l’ingérence est d'induire en tentation des personnes ciblées. C’est là une des faiblesses d’un système démocratique. Les agents chinois l’ont très bien compris et ont prouvé qu’ils savent comment l’exploiter. C'est donc à nous de nous donner enfin des moyens concrets pour renforcer nos défenses.
À la lumière de ces faits, j’aimerais proposer quelques pistes de réflexion.
Premièrement, il est impératif de doter le pays d'une loi pénale sur l’ingérence étrangère, qui définirait les activités considérées comme illicites et prévoirait les sanctions pouvant s'appliquer.
Deuxièment, je salue l’initiative de vouloir créer un bureau national contre l’ingérence étrangère. Cependant, il n'est pas approprié de le placer sous la tutelle du ministre de la Sécurité publique. Je l’ai dit et je le répète: tous les gouvernements antérieurs et actuels ont fait partie du problème, et non de la solution. Tous ont reçu des avertissements et les ont ignorés. Obliger cette nouvelle instance à se rapporter à un ministre reproduirait ce même schéma, voué à l’échec et exposé à l’interférence politique.
Ce bureau devra donc être indépendant, distinct du Service canadien du renseignement de sécurité, le SCRS, et de la Gendarmerie royale du Canada, la GRC, et devra se rapporter directement à la Chambre de Communes, qui nommera son directeur. Une loi devra confier à ce bureau les pouvoirs d’enquêter, de perquisitionner, de procéder à des arrestations, de poursuivre en cour pénale sans avoir à demander la permission à qui que ce soit et de pouvoir informer le public sans que le politique interfère. De plus, un budget de 13,5 millions de dollars répartis sur cinq ans est insuffisant. Il doit y avoir des enquêteurs pouvant couvrir toutes les régions du Canada et, pour ce faire, il faut des bureaux locaux qui travailleraient non seulement pour le fédéral, mais aussi pour assister les provinces et les municipalités.
J’ajoute que les 48,9 millions de dollars promis sur trois ans à la GRC pour protéger les communautés risquent d’avoir peu d’incidence en l'absence un bureau national. De plus, ni la GRC ni le SCRS ne sauraient être les organismes d’enquête, puisque leur structure actuelle ne leur a pas permis d’inciter les gouvernements à agir en 30 ans. Comment pouvons‑nous croire que cela changerait demain?
Troisièmement, il faut établir un processus obligatoire par lequel les futurs candidats aux élections doivent prêter serment et signer une déclaration selon laquelle ils ne sont pas sous l'influence ou agissant au nom d'un gouvernement étranger ou d'une entité étrangère. Ce formulaire mettra clairement en garde contre d'éventuelles procédures pénales en cas de tromperie intentionnelle. Un processus similaire doit être établi pour l'ensemble du personnel politique et des bénévoles pendant le processus d'embauche.
Quatrièmement, on doit éliminer la possibilité pour les étrangers de voter pour la sélection des candidats et des personnes nommées. C'est un non-sens évident.
Cinquièmement, on doit interdire, pour une période de trois à cinq ans, à tous les membres sortants du Cabinet et aux hauts fonctionnaires de travailler ou de participer à toute activité ou à tout emploi lié à leurs fonctions antérieures.
En terminant, j'aimerais dire un mot sur l'idée de tenir une commission d'enquête.
Cette avenue n'est pas la bonne, selon moi. Une commission publique va inévitablement révéler les méthodes d'enquêtes de nos services de sécurité et ainsi diminuer notre efficacité à détecter et à neutraliser la menace, tout en mettant des sources humaines à risque. Déjà, avec les révélations dévoilées, nous avons aidé les services chinois à nous contrer. Il y a tout à parier que, dans le climat politique actuel, l'attention sera donnée à la chronologie des événements, cherchant à rendre coupable le gouvernement alors que ses prédécesseurs ont tous fait la même chose. Il est temps de donner la priorité à la sécurité nationale, de manière non partisane, et de protéger le futur de la nation.
Merci beaucoup.
Je suis impatient de répondre à vos questions.