Monsieur le Président, je suis heureux de prendre la parole en cette belle journée pour parler de la motion de l’opposition dont nous sommes saisis.
Monsieur le Président, je partagerai mon temps de parole avec la formidable députée de Nunavut.
C'est étrange de parler de ce sujet; c’est un peu comme le jour de la Marmotte. Il semble que, quel que soit le problème, les conservateurs se servent toujours du même outil. Je suppose que lorsque le seul outil dont on dispose est un marteau, tous les problèmes ressemblent à des clous.
La crise climatique et le problème très urgent de la hausse astronomique des prix des aliments et de ses répercussions sur les Canadiens sont des problèmes sérieux qui nécessitent des outils efficaces.
De toute évidence, la motion dont nous sommes saisis concerne les agriculteurs. J’aimerais prendre un instant pour parler des agriculteurs du Nord‑Ouest de la Colombie‑Britannique, qui font un travail incroyable, notamment des producteurs laitiers et des éleveurs de bovins.
À Terrace, l’autre jour, j’ai rencontré les propriétaires d’une nouvelle ferme de produits laitiers de chèvre. Ils souhaitent se lancer dans la production artisanale de fromage et de lait de chèvre dans le Nord‑Ouest de la province. C’est un projet vraiment extraordinaire. Cela touche également les producteurs de légumes, les maraîchers et d’autres producteurs qui vendent leurs aliments à la grandeur de la région. La production alimentaire est en plein essor dans le Nord‑Ouest de la province, et nous en sommes très fiers. Tous ces agriculteurs, quelle que soit la taille de leur exploitation, ont raison d’être fiers du travail qu’ils accomplissent.
Il est vrai que les agriculteurs ont de nombreux défis à relever. L’un de ceux-là est le coût des intrants dont ils ont besoin pour exploiter leur ferme, mais ce n’est pas leur seul défi. À long terme, l’un des grands défis est bien entendu l’impact de la crise climatique. N’est-il pas paradoxal de débattre d’une motion de l’opposition qui vise à miner l’approche du Canada à l'égard de la crise climatique, alors que les gens qui sont les plus touchés par cette crise sont justement les agriculteurs de tout le pays?
J’aimerais parler brièvement des agriculteurs qui risquent d’être touchés par cela, mais aussi de ceux qui ne risquent pas de l’être. Je remercie mes collègues bloquistes d’avoir souligné que la province de Québec a mis en place un système de plafonnement et d'échange, un marché du carbone provincial, avec lequel le gouvernement fédéral n’a aucun lien. La Colombie‑Britannique se trouve dans une situation semblable, puisqu’elle s’est dotée d’un système provincial de tarification du carbone.
Ce qui m’inquiète, c’est que cette motion est fondamentalement trompeuse, puisqu’il y est question d’aider les agriculteurs de tout le pays, et pourtant, cela n'aidera pas ceux du Québec ni ceux de la Colombie‑Britannique, que je représente. Ces agriculteurs ne recevront aucune aide si jamais la motion de l’opposition est adoptée et mise en œuvre par le gouvernement.
Le véritable problème auquel sont confrontés les agriculteurs en difficulté, c'est le coût du diésel pour leurs tracteurs. J’ai parlé à un voisin du côté Sud du lac Francois, qui a une exploitation bovine. Le prix qu’il payait pour le diésel de son tracteur était incroyable. C’est un véritable défi. Toutefois, si nous considérons le système canadien de tarification du carbone comme le méchant dans cette affaire, nous nous trompons de cible. Le véritable défi, en ce qui concerne les prix de l’essence et du diésel, c'est l’escroquerie ridicule des compagnies pétrolières et gazières.
Les députés ne sont pas obligés de me croire; ils peuvent demander au président des États‑Unis, Joe Biden. Il a qualifié cette pratique de profit de guerre et a menacé d’imposer une taxe sur les bénéfices exceptionnels aux compagnies pétrolières et gazières de ce pays. Elles n’escroquent pas seulement les agriculteurs, mais tous les Américains qui ont besoin de produits pétroliers dans leur vie.
Nous pourrions également nous tourner vers le Royaume‑Uni, où un gouvernement conservateur a mis en place une taxe de 25 % sur les bénéfices exceptionnels des sociétés pétrolières et gazières. Les recettes de cette taxe sur les bénéfices exceptionnels seront réinvesties dans des mesures d’accessibilité financière afin que les Britanniques puissent en profiter en ces temps difficiles où l’inflation est galopante.
C’est le genre de mesures concrètes que le NPD préconise pour que le gouvernement prenne au sérieux la lutte contre le mercantilisme et les bénéfices exceptionnels en cette période difficile pour tant de Canadiens. Nous avons besoin de ce genre de mesures.
La taxe sur le carbone en Colombie‑Britannique a une histoire intéressante. Elle a été introduite en 2007‑2008 par le célèbre premier ministre écosocialiste de la Colombie‑Britannique, Gordon Campbell. Il l’a fait parce qu'il croyait que le climat était le problème existentiel de notre époque et que nous devions agir de manière rigoureuse et fondée sur des données probantes, et c’est tout à son honneur. Il était un dirigeant politique très conservateur, comme le Président le sait bien, et il croyait que les marchés étaient le meilleur moyen d’y parvenir. L'une des croyances de la philosophie conservatrice, c'est que la meilleure façon de s’attaquer aux problèmes est de passer par les marchés, car ils sont efficaces et offrent souvent l’approche la moins coûteuse pour s’attaquer aux grands problèmes.
Par conséquent, si nous pensons que la crise climatique est un problème, il est logique de choisir un outil qui est efficace et peu coûteux. Voilà pourquoi les conservateurs, dans leur dernier programme électoral, ont inclus une forme de tarification du carbone. Ils voulaient utiliser un mécanisme fondé sur le marché, bien qu’un peu insolite, qui aurait imposé aux gens une taxe sur le carbone pour ensuite placer l'argent récolté dans un compte d’épargne spécial qui ne pourrait être utilisé que pour acheter des choses écologiques comme des bicyclettes et des panneaux solaires. Il s’agissait d’une mise en œuvre un peu bizarre de l’idée, mais au cœur de celle-ci se trouvait l’idée d’utiliser un mécanisme de tarification. Ils l’ont fait parce que presque tous les économistes du monde occidental s’entendaient pour dire que la tarification du carbone était la manière la plus efficace de procéder.
Les députés seront peut-être surpris d’apprendre que je suis un peu agnostique sur le sujet. Je veux m’assurer que nous utilisons tous les outils nécessaires pour réduire les émissions et nous attaquer à la crise climatique afin que mes enfants et les enfants de tous les députés puissent avoir le genre d’avenir stable, d’économie prospère et de bonne qualité de vie dont mes parents et moi-même avons bénéficié. C’est ce dont nous avons besoin. Cette motion n’y parviendrait pas.
Lorsque nous parlons du coût de la crise climatique, celui-ci est astronomique. Si nous n’agissons pas de façon catégorique, non seulement pour réduire les émissions, mais aussi pour adapter nos collectivités et nos infrastructures, nous paierons très cher cette crise.
En Colombie‑Britannique, nous l’avons déjà ressenti. Nous avons perdu toute la collectivité de Lytton, qui a été réduite en cendres. Les inondations dans les basses-terres continentales ont emporté une énorme quantité d’infrastructures clés et paralysé notre chaîne d’approvisionnement juste l’année dernière. En 2018, des incendies de forêt dévastateurs ont ravagé le Nord-Ouest de la Colombie‑Britannique et ont touché tant de secteurs de notre économie et de notre collectivité.
Cette crise mérite une approche sérieuse. La crise de l’abordabilité et la crise de l’inflation et des prix des aliments sont des problèmes graves qui méritent une approche sérieuse. Pour ce faire, nous devons sévir contre le mercantilisme. Nous pouvons faire cela en ayant un véritable plan climatique qui utilise des outils crédibles fondés sur des preuves pour réduire les émissions. Je suis agnostique quant à savoir s’il s’agit de réglementation ou de mécanismes de tarification.
Nous avons besoin d’une action urgente et de dirigeants politiques qui ont un plan, qui sont transparents au sujet de leur plan et qui peuvent dire aux Canadiens que c’est le défi de notre époque et qu’ils ont l’intention de s’y attaquer avec tout le sérieux qu’il mérite. Nos enfants en valent la peine. Les gens de nos collectivités qui doivent composer avec le prix des aliments en valent la peine. Les aînés de Terrace, Smithers, Prince Rupert et Kitimat qui ne peuvent pas se payer l’épicerie en valent la peine.
Des motions comme celle-ci, qui sont intrinsèquement trompeuses et qui essaient de faire croire aux Britanno‑Colombiens, aux Québécois et aux gens de tout le pays que le fait de retirer la taxe sur le carbone de certains secteurs va résoudre ces problèmes, sont franchement injustes et ce n’est pas comme ça qu’il faut aborder des problèmes très graves dans notre pays.