Monsieur le Président, je suis content de pouvoir parler de cette question aujourd'hui. Selon moi, il serait utile, pour les gens qui suivent le débat à la maison, de jeter un coup d'oeil au texte de la motion. Cette motion a été présentée par le député de Territoires du Nord-Ouest. Elle dit:
Que la Chambre demande au gouvernement d'agir immédiatement pour corriger le programme Nutrition Nord Canada afin d'améliorer le bien-être des Canadiens autochtones et non autochtones du Nord du Canada en: a) incluant immédiatement dans le programme Nutrition Nord Canada les 50 communautés nordiques isolées accessibles seulement par voie aérienne et qui ne sont pas actuellement admissibles à la pleine subvention; b) lançant un examen approfondi du programme Nutrition Nord en collaboration totale avec les habitants du Nord afin de trouver une façon d'offrir la subvention directement aux résidents du Nord et d'établir des soutiens pour l'alimentation traditionnelle; c) créant, pour les communautés nordiques, des critères d'admissibilité équitables au programme qui tiennent compte de leur situation réelle; d) assurant un financement adéquat pour répondre aux besoins des communautés nordiques; e) travaillant avec tous les habitants du Nord pour élaborer une solution durable à l'insécurité alimentaire.
Si les députés ont bien suivi le débat cet après-midi et ce matin, ils ont sans doute remarqué que les conservateurs ne cessent de citer des chiffres et que ces chiffres diffèrent. Les 50 communautés dont nous parlons dans cette motion ont en réalité été désignées par le vérificateur général. Nous sommes donc simplement d'accord avec lui lorsqu'il dit qu'il faut faire quelque chose.
Que signifie au juste cette motion? Nous espérons que le Canada créera, pour les communautés nordiques, des critères d'admissibilité équitables au programme qui tiennent compte de leur situation réelle, qu'il assurera un financement adéquat pour répondre aux besoins des communautés nordiques et qu'il travaillera avec tous les habitants du Nord pour élaborer une solution durable à l'insécurité alimentaire.
J'aimerais remonter un peu dans le temps et parler de l'époque où j'ai habité dans les Territoires du Nord-Ouest pendant cinq ans. Il y avait alors un programme différent pour m'aider à payer la nourriture, qui coûtait cher. Au début des années 1960, le gouvernement fédéral a lancé le programme Aliments-poste et, à l'époque où j'habitais dans les Territoires du Nord-Ouest, j'ai eu recours à ce programme. J'ai habité dans deux localités, une qui était desservie par le réseau routier, Yellowknife, et une qui n'était pas desservie par le réseau routier, Rankin Inlet, qui était à l'époque dans les Territoires du Nord-Ouest et non au Nunavut. Je devais me déplacer beaucoup pour mon travail. Je trouvais intrigant, à l'époque, que la nourriture coûte aussi cher, même dans le cadre du programme Aliments-poste, alors qu'à Coppermine, une localité accessible par voie aérienne au nord de Yellowknife, une caisse de bière coûtait la même chose qu'à Edmonton. À l'époque, il y avait un programme de subventions pour l'alcool grâce auquel les prix de l'alcool étaient essentiellement les mêmes que dans la capitale provinciale.
Cela a changé maintenant. Je sais qu'il y a maintenant une régie des alcools dans les Territoires du Nord-Ouest et que les choses ont changé. Toutefois, je pense qu'il est instructif de savoir qu'il y a toujours eu des inégalités et des problèmes dans la façon dont l'ancien programme Aliments-poste fonctionnait.
En 1991, quand le programme était géré par Affaires autochtones et Développement du Nord Canada, les communautés recevaient du ministère une subvention au transport pour livrer les produits aux communautés isolées du Nord. Au fil des ans, avec la croissance de la population et la hausse du prix du carburant, les dépenses ont augmenté et le programme a souvent dépassé son budget.
En avril 2011, Affaires autochtones et Développement du Nord Canada a instauré le programme Nutrition Nord Canada, qui avait pour but de faciliter aux résidants des communautés isolées du Nord l'accès à des aliments sains à un coût abordable. L'objectif est louable. Cependant, Nutrition Nord Canada était un programme de paiements de transfert reposant sur un modèle axé sur le marché, ce qui était bien différent de l'ancien programme de livraison par la poste.
Au printemps 2011, le Comité permanent des affaires autochtones et du développement du Nord de la Chambre des communes a procédé à des consultations sur le programme. De nombreuses recommandations ont été formulées, mais je tiens à souligner l'une d'entre elles en particulier, selon laquelle le Comité permanent des affaires autochtones et du développement du Nord devrait effectuer un examen complet du programme après trois ans.
Le gouvernement nous a indiqué vouloir se pencher là-dessus. Je pense bien l'avoir entendu le dire aujourd'hui. Il a l'intention d'examiner la question. Il l'a dit de plusieurs façons aujourd'hui, mais je n'ai pas l'impression qu'il compte procéder à un examen approfondi. Il a peut-être l'intention de laisser le prochain gouvernement s'occuper du dossier après les élections du 19 octobre.
Le rapport du vérificateur général contient aussi une recommandation voulant que l'on inclue dans le programme 50 collectivités qui ne reçoivent aucune subvention ou une subvention réduite.
Nous parlons toujours du Grand Nord canadien. Mais en fait, le Nord de toutes les provinces devrait être compris dans ce programme. Par exemple, la circonscription de Kenora, si nous prenons simplement le cas du Nord-Ouest ontarien, comprend 11 Premières Nations exclues et 7 qui ne reçoivent qu'une subvention partielle. Je suis convaincu qu'elles devraient toutes recevoir au moins une subvention partielle, sinon une pleine subvention. Cela reste à déterminer. C'est le genre de question à propos de laquelle des mesures doivent être prises. On a pu déterminer que, dans la circonscription voisine, Thunder Bay—Superior-Nord, trois collectivités devraient recevoir des subventions, mais n'en reçoivent pas à l'heure actuelle.
C'est un dossier qui ne concerne pas uniquement le Grand Nord canadien, mais bien l'ensemble du pays, d'un océan à l'autre, dans les provinces s'étendant vers le nord.
À la suite du rapport du vérificateur général, les Canadiens des régions rurales et isolées seraient heureux que le gouvernement annonce qu'il entreprendra un examen exhaustif du programme. Je ne suis pas convaincu que cela va se produire, et c'est regrettable.
Selon bon nombre d'habitants du Nord, le programme, dont les paramètres n'étaient pas clairs, n'a pas été mis en oeuvre avec beaucoup de soin. En fait, en mars 2012, l'Assemblée législative du Yukon a voté à l'unanimité en faveur de certains changements au programme. En mai 2013, l'Assemblée législative du Nunavut et l'Assemblée législative des Territoires du Nord-Ouest ont voté à l'unanimité en faveur de la vérification que le vérificateur général a finalement effectuée. Cela prouve que le programme comporte des problèmes et qu'il y a peut-être eu des problèmes liés à sa mise en oeuvre.
En toute justice, même au début des années 1960, il y avait aussi des problèmes avec l'ancien programme Aliments-poste. Je ne dispose pas des renseignements nécessaires pour savoir quels genres d'examens exhaustifs de ce programme ont été effectués dans les années 1960 et 1970, mais je suis certain qu'on a demandé que ce programme soit examiné.
Je suis convaincu qu'un député conservateur va me poser une question, mais peut-être que quelqu'un pourrait nous dire pourquoi, à son avis, le programme Nutrition Nord a remplacé l'autre programme.
Le vérificateur général a accepté d'effectuer la vérification, qui a été rendue publique l'automne dernier, en 2014. Voici quelques-unes de ses constatations.
D'abord et avant tout, il a constaté que le ministère n'a pas déterminé l'admissibilité des collectivités en se fondant sur les besoins, ce qui est intéressant. Les députés devraient garder cet aspect à l'esprit pendant que j'énumère les autres constatations.
Le vérificateur général a aussi découvert que le ministère n'avait pas vérifié si les détaillants du Nord faisaient profiter les consommateurs de l'intégralité de la subvention. C'est un autre aspect intéressant, car le gouvernement parle de transparence, mais il semblerait que ce programme n'est pas tout à fait transparent, alors qu'il doit l'être.
De plus, le vérificateur général a constaté que le ministère n'avait pas recueilli les renseignements nécessaires pour gérer le programme Nutrition Nord Canada ou mesurer son succès. Le programme a été mis en oeuvre en avril 2011, mais il ne semble exister aucun outil permettant de mesurer les résultats antérieurs ou actuels.
Le vérificateur général a également découvert que le ministère n'a pas mis en oeuvre la stratégie de limitation des coûts du programme.
Le vérificateur général a donc fait plusieurs constatations. Ce que j'essaie de dire au sujet du vérificateur général, c'est que j'espère qu'au lieu de se pencher sur cet aspect, le gouvernement entreprendra plutôt un examen exhaustif, qui pourrait commencer dès maintenant, même s'il y aura bientôt des élections.