Monsieur le Président, je sais que certains députés ont dit à quel point ils avaient apprécié le discours du député de Thunder Bay—Rainy River. Je ne tiens pas particulièrement à le pointer du doigt, mais son discours me rend très nerveuse. Je l'ai entendu dire que nous examinions ce projet de loi depuis longtemps, que des amendements y avaient été apportés et que nous devrions maintenant admettre que certains compromis seraient de mise afin qu'il soit adopté.
Pour ma part, l'idée de prendre l'avion ne me rend absolument pas nerveuse, mais j'admets que quiconque est inquiet à l'idée de prendre l'avion devrait l'être encore plus en observant l'adoption rapide d'un projet de loi fondé sur des compromis, car tout compromis en matière de sécurité aérienne est inadmissible.
Voilà bien un domaine où, si des doutes subsistent ou s'il est possible que la sécurité soit compromise, il est assez évident que nous devrions continuer de travailler jusqu'à ce que, comme mon collègue de Burnaby—New Westminster l'a dit, nous ayons éliminé toutes les lacunes du projet de loi et nous puissions assurer au public qu'il n'y a eu aucun compromis à cet égard. Il est très difficile d'imaginer comment expliquer aux gens, qu'ils prennent l'avion souvent, à l'occasion ou pas du tout, car je suis persuadée que même dans ce dernier cas ces gens ont des proches qui prennent l'avion, que nous avons décidé de faire certains compromis afin de pouvoir dire que nous avons obtenu des résultats.
Je sais que le député a dit, comme d’autres, que beaucoup des amendements proposés ont été adoptés et que la majorité des témoins qui ont comparu devant le comité en étaient satisfaits. Toutefois, quand je regarde les témoignages, je suis très inquiète du fait que certains de ceux qui n’étaient pas satisfaits, qui demeuraient très préoccupés et qui avaient fortement critiqué quelques aspects fondamentaux du projet de loi semblaient compter parmi les plus renseignés. Je crois qu’il est juste de dire que les témoins les plus désintéressés, qui avaient plutôt des connaissances techniques et professionnelles particulières, étaient en quelque sorte les plus informés et les plus fiables des critiques. C’est à ces gens qu’il faut prêter le plus d’attention.
Il n’y a pas de doute que le projet de loi est très compliqué. Je n’essaierai donc pas de prétendre que je suis devenue soudain une experte du domaine parce que ce ne serait pas vrai. Je m’intéresse cependant de très près aux principes qui me semblent les plus fondamentaux et qu’il importe donc de maintenir. Nous ne pouvons tout simplement pas laisser les compagnies aériennes mettre elles-mêmes en vigueur leurs propres exigences de sécurité.
L’analogie la plus simpliste est celle du renard qui est chargé de surveiller le poulailler. Je sais que certains protesteront et diront qu’il y a des freins et des contrepoids. Toutefois, je n’ai pas l’impression que beaucoup de gens s’inquiètent de la mise en place d’un système dans lequel les compagnies aériennes assument elles-mêmes la responsabilité de gérer leur propre sécurité. Un tel système est faussé à la base, mais ce n’est pas parce qu’elles risquent d’agir toutes d’une manière irresponsable. Nous conviendrons, je crois, que la grande majorité de ces entreprises s’acquittent de leurs responsabilités d’une manière très responsable. Je remercie le Ciel de ce que ce soit le cas pour une très grande majorité. Nous savons néanmoins que certaines compagnies aériennes ont agi d’une façon particulièrement irréfléchie, en faisant abstraction des exigences de sécurité les plus élémentaires. Nous devons donc veiller à avoir un système sans défaillance qui tiendra compte de ceux qui ne savent ou ne veulent pas assumer leurs responsabilités.
J’ai passé en revue quelques-unes des préoccupations mentionnées. Il me semble que nous prenons un peu à la légère la responsabilité qui nous incombe en définitive, à titre de législateurs. Nous devons veiller à mettre en place un système assez serré qui soit basé sur le principe qu’on ne peut pas laisser l’intérêt personnel compromettre les exigences fondamentales de sécurité, plutôt qu’un système qui marchera bien dans la grande majorité des cas. Nous devons prévoir des freins et des contrepoids qui empêcheront une compagnie aérienne irresponsable de faire de l’autogestion.
Je trouve alarmant d’entendre des députés parler de compromis pour être en mesure de montrer des résultats après un an de travail. Que peut-il y avoir de plus grave que de placer l’enjeu fondamental de la sécurité entre les mains de ceux d’entre nous qui ne sont pas des experts ou des professionnels du domaine? Cet enjeu ne devrait être confié qu’à l’organisation la plus compétente. Plusieurs de ceux qui ont exprimé des doutes à ce sujet faisaient partie des experts du domaine. Cela est vraiment inquiétant.
Après avoir suivi une partie du débat dans cette enceinte et après en avoir lu des extraits dans le hansard, je ne suis pas capable de savoir si les députés de l'opposition officielle vont bel et bien voter, pour une fois, compte tenu de l'importance de la question. Certains députés vont peut-être voter pour le projet de loi et d'autres vont voter contre. J'ai entendu des gens prendre parti dans un sens ainsi que dans l'autre.
Je ne suis pas surprise d'entendre des députés de l'opposition officielle dire qu'ils vont voter contre le projet de loi, si on peut toujours dire que les libéraux forment l'opposition officielle à la Chambre. Sauf erreur, ce sont les libéraux qui ont présenté ce projet de loi au départ, et la Chambre est encore en train d'essayer de l'améliorer pour que les règles de sécurité soient mieux appliquées.
Lorsqu'on entend notamment des députés libéraux dire qu'il faut faire un compromis, on sait qu'il y aura des députés libéraux dans les deux camps, lors du vote. Or, il reste encore du travail très important à faire pour améliorer ce projet de loi.
Si je peux m'exprimer ainsi dans le contexte actuel, où il est question de transport aérien, je suis persuadée qu'il reste encore à bien arrimer au sol quelques-uns des principes les plus importants à respecter pour que soient mis en oeuvre les mécanismes de régulation nécessaires et pour qu'on ne confie pas tout bonnement à l'industrie aérienne la responsabilité de se discipliner elle-même.
Je n'aurai pas l'occasion de poser des questions au député qui a défendu l'idée d'un compromis. Je ne voudrais pas qu'on croie que j'essaie de l'isoler, mais l'idée d'un compromis me fait dresser les cheveux sur la tête. J'ai peur que l'on soit en train de trouver une justification pour adopter le projet de loi dans sa forme actuelle.
Les amendements apportés ne suffisent pas à apaiser les craintes. Il ne faut pas oublier la nature de ces craintes. Qui est mieux placé pour connaître les dangers du projet de loi tel qu'il est actuellement que le juge Virgil Moshansky, qui a dirigé l'enquête sur l'écrasement de Dryden? Le juge Moshansky s'est dit hautement préoccupé par le projet de loi dans sa forme actuelle. Qui peut mieux déceler les défauts dans le projet de loi qui est actuellement soumis à la Chambre que les personnes qui ont agi elles-mêmes comme inspecteurs?
Le temps qui m'était accordé est écoulé, mais je voudrais dire une fois de plus, en terminant, qu'aucun compromis n'est acceptable sur une question aussi fondamentale que la sécurité aérienne. Par conséquent, mes collègues du NPD et moi sommes d'avis que nous ne pouvons pas appuyer le projet de loi dans sa forme actuelle.