Monsieur le Président, je vais commencer par rappeler certains faits, parce qu'il y a des représentants du gouvernement qui, depuis quelques jours, s'amusent à répandre des faussetés. Ils disent, par exemple, que nous nous opposons au fait que le Canada accède au Traité sur le commerce des armes. Les gens qui répandent ces fausses nouvelles — c'est à la mode — savent fort bien que ce n'est pas le cas. Nous avons toujours appuyé l'accession du Canada au Traité sur le commerce des armes. En fait, cela fait des années que nous le demandons. Cependant, nous voulons bien le faire. Nous voulons accéder totalement au Traité et pas juste à la moitié ou au tiers. Le projet de loi qui est devant nous ne fait pas cela. Je vais lire un extrait d'un courriel que je viens de recevoir de Project Ploughshares qui est probablement l'organisation la mieux connue au Canada, en matière de contrôle des armes. On dit:
« Dernier jour de débat sur le projet de loi C-47 pour le Canada en vue d'adhérer au Traité sur le commerce des armes. »
J'aimerais que mes collègues d'en face écoutent bien ceci:
« Il ne faut pas confondre les mérites du Traité avec les mérites du projet de loi. »
On souligne aussi:
« De grosses lacunes subsistent toujours dans le contrôle des exportations, notamment des échappatoires relatives aux exportations vers les États-Unis. »
Nous appuyons le Traité sur le commerce des armes, mais c'est à cause de ces trous béants que nous ne pouvons pas appuyer le projet de loi de mise en oeuvre de ce traité. C'est pour cela que je ne peux pas l'appuyer, que le NPD ne peut pas l'appuyer et que les experts ne l'appuient pas. Ceux-ci peuvent exprimer leur satisfaction sur les quelques changements que le gouvernement a acceptés, mais à ce jour, ils restent contre ce projet de loi. C'est pour cela que 33 000 personnes ont écrit à la ministre pour demander qu'on retire ce projet de loi et qu'on en fasse un meilleur qui inclut et couvre nos exportations vers les États-Unis.
Lorsque des représentants du gouvernement répandent des faussetés, je suis habituellement patiente, mais, dans ce cas-ci, cela me rend vraiment furieuse. Ces personnes devraient avoir honte. Elles affirment que les néo-démocrates s'opposent à l'accession du Canada au Traité sur le commerce des armes. C'est un peu fort. C'est le NPD qui demande depuis des années à ce que le Canada accède au Traité, mais nous voulons le faire bien et totalement, et non seulement à moitié. Le projet de loi C-47 ne le ferait pas bien. Il ne respecte ni la lettre ni l'esprit du Traité et il pourrait même l'affaiblir. Voilà pourquoi je ne peux pas l'appuyer. C'est pourquoi, comme je l'ai dit tout à l'heure, à ce jour, les experts en matière de contrôle des armes s'opposent toujours au projet de loi C-47 et pourquoi 33 000 citoyens canadiens ont écrit à la ministre pour lui demander de corriger le projet de loi.
Les libéraux déforment les faits. En faisant cela, ils ne montrent aucun respect pour les experts. Quels sont les principaux problèmes? Comme je sais que le temps est court, je vais faire cela assez brièvement. D'abord, il y a les exportations vers les États-Unis. Plus de la moitié de nos exportations vont vers les États-Unis.
Quand je dis que plus de la moitié de nos exportations d'armes vont aux États-Unis, nous ne savons même pas si le pourcentage est de 52 %, voire de 57 %. Qui sait, c'est peut-être 62 %. Pourquoi? Parce que nous n'avons absolument aucun renseignement au sujet de ces exportations d'armes aux États-Unis. Avec ce projet de loi, non seulement les exportations d'armes aux États-Unis ne seront pas couvertes, mais, même lorsque nous avons demandé d'inclure une petite mesure visant à rendre des comptes au Parlement relativement à ces exportations, les libéraux ont refusé. Il n'y a absolument aucune transparence, aucune volonté d'accorder au Parlement, à la Chambre, un quelconque pouvoir visant à surveiller le dossier parfois très troublant des exportations d'armes.
On se souvient que nous avons cherché deux fois à créer un comité qui surveillerait les exportations d'armes, mais par deux fois, les libéraux ont rejeté notre proposition. En quoi est-ce important? Il s'agit d'une question de principe, de transparence et de démocratie. C'est aussi important parce que, sous le gouvernement Trump, les Américains abaissent les normes qui régissent les exportations d'armes. On a pu constater, par exemple, que du matériel canadien est exporté aux États-Unis, puis qu'il est intégré à des cargaisons qui sont envoyées dans des pays comme le Nigeria. Le Canada ne vend plus d'armes au Nigeria, mais il y a des armes canadiennes qui s'y rendent quand même à cause de ce vide juridique. Le mot « vide » me dérange un peu parce que le problème, en fait, est énorme. C'est comme s'il y avait un trou de trois pieds de diamètre dans un beigne. C'est stupéfiant. Certains disent: « Oui, nous adhérons au traité. » Non, je regrette, mais nous n'y adhérons pas. Nous ne faisons que risquer un orteil dans l'eau, c'est tout. Le vide est énorme.
Il y a quelques semaines, il y a eu une grosse histoire au sujet d'une vente d'hélicoptères aux Philippines. Les hélicoptères étaient envoyés aux Philippines sans permis d'exportation. Il est curieux que l'on vende des hélicoptères à l'armée d'un président qui s'est vanté d'avoir déjà jeté une personne du haut d'un hélicoptère et d'être prêt à le refaire. Pourquoi aucun permis d'exportation n'a-t-il été exigé pour cette transaction? Parce que la vente est le résultat d'une entente conclue entre le ministère de la Défense nationale et une société commerciale canadienne, et on a jugé que des hélicoptères ne constituent pas de l'équipement militaire; la vente a donc eu lieu. Cela a fait du bruit. Évidemment, les Canadiens étaient mécontents. Nous apprenons maintenant que la société prévoit d'envoyer les hélicoptères aux États-Unis, et ils seront ensuite envoyés aux Philippines. Il n'y a aucun contrôle concernant les utilisateurs finaux.
La mesure législative ne concernera pas tout le gouvernement, car elle apportera des modifications à la Loi sur les licences d'exportation et d'importation, et la société d'État canadienne n'est pas visée par cette loi, comme des fonctionnaires nous l'ont appris.
Il y a un autre enjeu, soit la question de revoir les permis si de nouveaux éléments surgissent. C'est dans le traité, alors pourquoi ne veut-on pas le mettre dans la loi? Je ne le comprends pas.
Quand de nouvelles informations surgissent et quand il y a de nouveaux éléments, le gouvernement devrait se faire un devoir de revoir les permis qui ont été accordés. Je pourrais en parler pendant des heures. En fait, j'en ai probablement parlé pendant des heures au cours des dernières semaines. J'invite tout le monde à regarder mon blogue sur le sujet et mon compte Twitter où je suis assez active.
J'ai décrit ces trous dans ce projet de loi, en plus de décrire comment c'est un mauvais projet de loi. Or ce sont surtout les experts qui ont décrit à quel point il est rempli de trous et à quel point c'est un mauvais projet de loi.
Ma préoccupation finale, c'est que lorsqu'un pays dit se conformer à un traité et ne le fait qu'à moitié et le fait mal, cela affaiblit le traité pour l'ensemble de la planète. Après cela, d'autres pays peuvent décider de faire la même chose. Ce que le Canada est en train de faire en ce moment, c'est de se conformer à une petite partie du traité, mais surtout à l'affaiblir. Cela ne se fera pas en mon nom, et c'est pour cette raison que je vais déposer une motion.
Je propose, avec l'appui du député de Victoria:
Que la motion soit modifiée par substitution, aux mots suivant le mot « Que », de ce qui suit:
« la Chambre refuse de donner troisième lecture au projet de loi C-47, Loi modifiant la Loi sur les licences d'exportation et d'importation et le Code criminel (modifications permettant l'adhésion au Traité sur le commerce des armes et autres modifications), parce qu’il:
a) n’exige pas que le ministre des Affaires étrangères réévalue les licences d’exportation existantes si de nouveaux renseignements concernant des violations des droits de la personne sont mis au jour après l’exportation;
b) ne permet d’aucune façon l’émission de licences, le suivi et la reddition de comptes aux Canadiens pour les produits militaires exportés aux États Unis;
c) va à l’encontre de l’esprit et de la lettre du Traité sur le commerce des armes »