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TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mardi 3 décembre 1996

.1535

[Traduction]

Le président suppléant (M. Rideout): La séance est ouverte. Tant pis pour les retardataires.

J'imagine que vous voudriez d'abord faire une déclaration d'ouverture.

[Français]

L'honorable Paule Gauthier (Comité de surveillance des activités de renseignement de sécurité): Oui, monsieur le président.

[Traduction]

Le président suppléant (M. Rideout): Nous allons donc commencer par cette déclaration et passer ensuite aux questions.

[Français]

Mme Gauthier: Très bien. Bon après-midi, monsieur le président, messieurs les membres du comité.

[Traduction]

C'est avec grand plaisir que je m'adresse à vous aujourd'hui au sujet de notre dernier rapport annuel. Je crois que vous connaissez déjà mes collègues, M. Vari, M. Goodman et Mme Brown, de même que notre directeur exécutif, M. Maurice Archdeacon.

Malheureusement, le membre qui s'est joint à notre comité le plus récemment, M. James Andrews Grant, avait un engagement de très longue date dont il n'a pu se libérer et il ne peut être avec nous aujourd'hui.

Si vous me le permettez, monsieur le président, je voudrais vous dire jusqu'à quel point j'ai été honorée d'être nommée présidente du Comité de surveillance des activités de renseignement de sécurité. J'ai fait partie de ce comité pendant un peu plus de huit ans au total et je connais parfaitement l'importance de son travail. Je voudrais vous assurer que je n'épargnerai aucun effort pour maintenir ou même améliorer la qualité de la recherche effectuée par le CSARS et son personnel.

Au cours des années où j'ai travaillé au sein du comité, j'ai eu de nombreuses occasions de me présenter devant vous ou devant le comité chargé de la justice. En règle générale, j'ai eu l'impression que les membres du CSARS n'ont jamais sous-estimé l'importance du rôle que vous et vos collègues jouez et que, de son côté, votre comité a toujours été conscient du fait que l'information que nous pouvions donner était limitée, dans certaines circonstances, par la loi en vertu de laquelle nous avons été nommés.

Comme je viens de le dire, monsieur le président, c'était généralement le cas. Toutefois, au cours des dernières années, on a pu remarquer que des tensions sont venues marquer les relations entre votre comité et le CSARS. Les membres de votre comité estimaient qu'ils avaient besoin de plus d'information qu'on ne leur en donnait et nos membres croyaient que la loi les empêchait de répondre à certaines de vos questions. La situation n'était facile pour personne.

J'espère, monsieur le président, que nous pouvons laisser le passé derrière nous. Mes collègues et moi ferons tout ce qui est possible pour vous donner l'information dont vous avez besoin pour juger si nous remplissons de façon satisfaisante le mandat qui nous a été confié par le Parlement. Il y aura des cas où nous croyons ne pas pouvoir donner beaucoup de détails sur certaines opérations, cibles ou sources particulières. Je suis certaine que vous connaissez ces limites autant que nous. Un service de renseignement de sécurité ne peut raisonnablement agir contre le terrorisme ou l'espionnage si ses activités ou méthodes sont rendues publiques.

J'espère sincèrement que, moyennant un peu de bonne volonté de part et d'autre, nous pourrons nous décharger de notre obligation de rendre compte auprès de votre comité avec toute l'ouverture et la confiance mutuelle que les Canadiens attendent de nous tous.

Enfin, monsieur le président, je voudrais mentionner brièvement les points de notre rapport annuel que mes collègues et moi jugeons les plus importants. Nous donnerons bien entendu plus de détails sur ces points si vous le désirez pendant la période des questions.

Premièrement, nous recommandons fortement que, dans le cas d'une demande d'autorisation, toute référence à un individu ou un groupe à cibler soit mise à la disposition du CSARS sur demande. Nous recommandons aussi que les lignes directrices régissant le programme des entrevues avec des membres de communautés soient plus précisément définies. Enfin, nous recommandons que toutes les décisions de la haute direction concernant les enquêtes sur les activités licites de défense d'une cause, de protestation ou de manifestation d'un désaccord soient conservées dans un dossier unique à l'administration centrale.

Et maintenant, monsieur le président, nous ferons de notre mieux pour répondre aux questions du comité.

.1540

Le président suppléant (M. Rideout): Merci beaucoup.

Monsieur Langlois, avez-vous des questions?

[Français]

M. Langlois (Bellechasse): Merci, madame Gauthier. Dois-je comprendre de votre déclaration liminaire que si on en venait à des questions plus spécifiques, vous seriez disposée à y répondre si le comité siégeait à huis clos, en l'absence de personnel? Seriez-vous prête à donner des réponses uniquement aux députés membres du comité?

Mme Gauthier: Ce n'est pas exactement ce que j'ai dit. J'ai dit que nous voulons établir la relation la plus ouverte et la plus franche possible, mais à l'intérieur des limites qui nous sont imposées par la loi.

M. Langlois: Avez-vous eu l'occasion de prendre en considération l'opinion de l'avocat général de la Chambre, Me Davidson?

Mme Gauthier: Oui, j'ai pris connaissance de plusieurs opinions juridiques et je sais que les points de vue sont divergents. Le Parlement, évidemment, est l'organisme suprême de notre pays et on doit tous le reconnaître. Par contre, il y a des lois qui viennent tempérer cela, si je puis dire, et on doit également s'y soumettre.

M. Langlois: C'était pour les procès-verbaux, monsieur le président, parce que je n'ai pas l'intention d'en faire un plat aujourd'hui. Ma position est connue. Ce qui manque, c'est une volonté politique et non pas juridique. Ce n'est pas un reproche que je vous fais, madame Gauthier. Vous n'avez évidemment pas à répondre à des questions lorsqu'il y a une majorité de gens qui ne désirent pas que vous y répondiez.

Donc, ma première question serait la suivante. À la page 16 de la version française de votre rapport, au point g), relativement à la gestion des dossiers, vous parlez de 500 000 dossiers provenant de la GRC qui ont été détruits par le SCRS.

J'aimerais que vous soyez un peu plus spécifique quant à ces dossiers. Sur quoi portent ces dossiers? La destruction s'est échelonnée sur combien d'années? Quant à la répartition régionale, en termes de dossiers, comme je suis un député du Québec, j'aimerais savoir combien de dossiers sur les 500 000 touchaient le Québec.

Mme Gauthier: Vous comprenez que c'est une longue histoire. Lorsque le Comité de surveillance et le Service canadien du renseignement de sécurité ont été cris en 1984, tous les dossiers qui touchaient la sécurité nationale ont été transférés au Service du renseignement de sécurité.

Avec le temps, le Comité de surveillance a constaté que de nombreux dossiers qui avaient été ouverts dans les années antérieures n'étaient pas du tout conformes à la loi. Donc, pendant plusieurs années, dans ses rapports annuels, le Comité de surveillance a suggéré des solutions et aidé le Service à faire en sorte que ces dossiers soient fermés.

Ces dossiers venaient de toutes les régions, pas plus de l'Ouest que de l'Est. C'étaient des dossiers qui ne répondaient pas aux exigences de la nouvelle loi.

M. Langlois: Madame Gauthier, vous avez pris connaissance de la répartition des dossiers. À votre connaissance personnelle, le nombre de dossiers touchant le Québec était-il proportionnel au poids de la population québécoise et vous est-il apparu qu'on avait mis davantage l'accent sur le Québec à certaines périodes?

Mme Gauthier: Écoutez, ce sont des dossiers des années 1970, 1975, etc. Je ne saurais vous le dire. Sincèrement, il me serait impossible de vous dire s'il y avait plus de dossiers sur le Québec. On n'a pas examiné nous-mêmes tous les dossiers, mais ce dont je me souviens très bien, c'est que dans notre examen, il ne nous est jamais apparu qu'il y en avait plus du Québec que d'une autre région.

.1545

M. Langlois: En examinant ces dossiers qui ont été détruits et d'autres dossiers qui sont conservés, avez-vous pu constater si le SCRS et la GRC, lorsqu'elle avait une section spécialisée dans le renseignement de sécurité, ont ciblé au Québec des personnages politiques menant des activités autorisées par la loi aux niveaux fédéral, municipal et provincial?

Mme Gauthier: Vous voulez dire avant 1984?

M. Langlois: Avant et après, dans les dossiers détruits et existants.

Mme Gauthier: La GRC joue un rôle particulier maintenant. En tant qu'organisme, nous n'avons aucun pouvoir sur la GRC. Donc, je ne peux vous parler de la GRC. Avant 1984, il y avait toutes sortes de dossiers, mais ils ont été détruits.

M. Langlois: En tant qu'organisme régulateur du SCRS, avez-vous des dossiers sur les partis politiques au Québec, soit le Parti québécois, le Parti libéral du Québec, l'Action démocratique, l'Union nationale, enfin tous les partis au Québec, et sur des hommes et des femmes politiques comme Jacques Parizeau, Lucien Bouchard, etc.?

Mme Gauthier: J'aimerais mieux que vous me parliez d'aujourd'hui, puisque les dossiers des années passées ont été détruits. Il m'est impossible de vous dire quels étaient les dossiers. Je ne peux que vous dire que ces dossiers ne répondaient pas aux exigences de la définition d'une menace à la sécurité du pays, telle qu'on la connaît dans la loi et telle qu'on l'applique aujourd'hui.

M. Langlois: Étant donné que certains événements ont eu lieu au Québec - je pense entre autres aux vols de dynamite, aux incendies de granges et à l'imputation à des tiers de certaines activités - et que tout cela est sorti un peu en retard, êtes-vous d'accord qu'il est permis de soupçonner légitimement que, parmi les dossiers détruits, il y avait effectivement des dossiers sur des partis politiques, des activités politiques et des personnages politiques en vue ou plus obscurs?

Mme Gauthier: Oui, mais vous savez ce qui est arrivé. Il y a eu une enquête et tout cela est sorti, comme vous le dites. Par la suite, il y a eu l'établissement du Service de sécurité et du Comité de surveillance. Donc, quelques Canadiens ou Canadiennes ont pu penser qu'il y avait peut-être de ces dossiers-là, parce qu'on a tellement parlé de ces choses.

M. Langlois: À l'heure actuelle, maintenant que vous êtes coresponsable avec vos pairs de ce service, depuis qu'on sait qu'il y a eu un dossier ouvert au SCRS sur Preston Manning, n'est-il pas légitime de penser que le mouvement souverainiste québécois qui, semble-t-il, dans l'univers canadien, représente une menace pas mal plus sérieuse que le Parti réformiste, a été l'objet d'infiltration humaine ou que des sources humaines ont été placées pour fournir des renseignements au SCRS ou à d'autres organismes?

Mme Gauthier: Le Parti réformiste a été infiltré? Quelle est votre question au juste?

M. Langlois: À partir du moment où on sait que, dans l'environnement, on a «fram;...

Mme Gauthier: C'est vous qui dites cela.

M. Langlois: Si vous me permettez de poser mes questions, je vous laisserez décider de vos réponses.

On sait que, dans l'affaire Heritage Front, en plaçant une source humaine pour amplifier le mouvement, on a fait apparaître dans l'entourage de M. Manning des personnages qui visaient à discréditer son mouvement, tel que l'honorable député de Surrey - White Rock - South Langley l'a démontré ici et tel que l'honorable député de Scarborough-Ouest, à l'époque où il lui était encore permis de siéger ici, l'avait démontré également. Quand elle voit que cela s'est fait dans le cas du Parti réformiste, l'Opposition officielle se sent encore plus concernée. Vous êtes les chiens de garde face à cela et vous devez rassurer la population canadienne via ses parlementaires. Que pouvez-vous nous dire pour assurer aux parlementaires que le mouvement souverainiste québécois qui, semble-t-il, jusqu'au 30 octobre 1995 démontrait une certaine force, n'a pas été ciblé par le SCRS dans ses activités démocratiques?

Mme Gauthier: Chaque fois qu'on rencontre le Service de sécurité en tant que groupe, ces questions reviennent.

.1550

Je peux vous dire que, lorsqu'un mouvement agit de façon démocratique et ouverte, qu'il est considéré comme un parti politique légalement établi, qu'il n'est pas une menace à la sécurité du pays, le Service ne joue aucun rôle. Ce sont les questions qu'on pose le plus souvent au Service et c'est la réponse qu'on reçoit à chaque fois. Je peux vous assurer de cela.

M. Langlois: À votre connaissance personnelle, des recommandations concernant des mesures disciplinaires ont-elles été faites ou des mesures disciplinaires ont-elle été prises à l'encontre de certains membres du SCRS qui ont renommé le dossier de Preston Manning de manière à ce qu'il se perde dans l'anonymat des dossiers?

Mme Gauthier: Je sais que des mesures disciplinaires sont prises lorsque des membres du Service n'agissent pas en conformité avec la loi ou ne respectent pas les directives qui leur sont données. Malheureusement, au moment de l'affaire du Heritage Front, je n'étais pas membre du Comité et je ne peux vous assurer que dans ce cas précis, des mesures disciplinaires ont été prises.

[Traduction]

Le président suppléant (M. Rideout): Monsieur Hanger.

M. Hanger (Calgary-Nord-Est): Merci, monsieur le président.

Je ne vais certainement pas poser le même genre de question que M. Langlois au sujet du Parti réformiste et les opérations qui l'ont peut-être touché, mais j'ai certaines questions au sujet du premier point de votre exposé, madame Gauthier, c'est-à-dire à propos de la recommandation selon laquelle, dans le cas d'une demande d'autorisation, toute référence relative à un individu ou un groupe à cibler soit mise à la disposition du CSARS sur demande. Pourquoi voulez-vous obtenir ces renseignements immédiatement sur demande?

Mme Gauthier: Il a été question d'un certain document l'année dernière pendant que nous examinions certains dossiers du service. Nous avions demandé un document particulier et on nous a dit que ce document n'était pas disponible. Nous avons insisté pour obtenir le document à cause de la grande importance que nous y attachions pour évaluer la décision prise par le service. Si le service avait utilisé ce même document pour prendre sa décision, nous voulions le voir aussi afin de déterminer si la décision était appropriée ou non. Nous avons donc demandé de voir le document et l'on nous a dit que c'était impossible de l'obtenir. Après certaines discussions et après nous avoir expliqué pourquoi le document n'était pas disponible, le service a fini par nous le donner.

C'est pour cela que nous formulons cette recommandation, pour nous assurer que, chaque fois que nous voudrons obtenir un document, nous l'obtiendrons.

M. Hanger: Avez-vous le pouvoir de l'exiger maintenant?

Mme Gauthier: Oui. La loi nous donne déjà ce pouvoir.

M. Hanger: La loi vous donne-t-elle le pouvoir d'examiner sur demande n'importe quel document ou y a-t-il des restrictions quelconques?

Mme Gauthier: Non, il n'y a aucune restriction, sauf pour le secret du Cabinet. C'est tout. C'est la seule exception prévue par la loi.

M. Hanger: Ainsi, pendant que vous faisiez une analyse relativement à une cible quelconque, vous avez essayé d'obtenir un document et le service n'a pas voulu vous le fournir. Avez-vous fini par voir le document?

Mme Gauthier: Oui, nous avons obtenu le document et l'on nous a expliqué pourquoi le document n'était pas disponible plus tôt. C'est parce qu'il avait été fourni au service par un tiers et avait ensuite été redonné à ce tiers.

M. Hanger: Si vous avez déjà le pouvoir voulu, pourquoi formuler cette recommandation?

Mme Gauthier: À cause du problème que nous avons eu, nous voulions signaler au service et au public que, lorsque nous demandons des documents, nous tenons vraiment à les obtenir. Nous avons jugé important de le noter dans notre rapport annuel.

M. Hanger: Vous faites une analyse des chiffres, n'est-ce pas?

Mme Gauthier: Oui.

M. Hanger: Pourquoi? Vous apprendrez, sans doute, que le SCRS a fait enquête ou effectué une analyse à propos d'un certain nombre de cibles, mais à quelle fin utilisez-vous ces chiffres particuliers dans votre propre analyse?

.1555

Mme Gauthier: Tout d'abord, la loi exige que nous demandions des chiffres. Ils sont utiles.

M. Hanger: Qu'est-ce qu'ils révèlent?

Mme Gauthier: Les chiffres sont des chiffres et montrent certaines tendances. Par exemple, le SCRS a-t-il obtenu plus de mandats que l'année précédente? Y en a-t-il plus au contre-espionnage ou à l'antiterrorisme? Ce sont des choses de ce genre. Les chiffres ne font que donner des tendances, mais cela peut aussi nous aider pour d'autres recherches.

M. Hanger: L'arrivée d'un nombre croissant de personnes de type terroriste au Canada a-t-elle déjà inquiété le CSARS au point qu'il veuille que le SCRS ou le gouvernement prennent des mesures plus efficaces à leur sujet?

Mme Gauthier: Vous voulez parler de terroristes?

M. Hanger: De terroristes ou de personnes mêlées de près au crime organisé, de personnes qui ont des antécédents très douteux dans d'autres pays et qui demandent asile au Canada ou qui y arrivent illégalement.

Mme Gauthier: Comme vous le savez, le service accorde beaucoup de priorité au terrorisme.

M. Hanger: C'est ce qu'on m'a dit, mais à ma connaissance, le SCRS n'a pas vraiment pris de mesures particulières à ce sujet et le CSARS n'a pas demandé au gouvernement ou au SCRS de faire quelque chose à ce sujet.

Mme Gauthier: Que voulez-vous dire par ` votre connaissance»? Pourquoi?

M. Hanger: D'après ce que j'ai pu voir, les inquiétudes du CSARS à ce sujet n'ont pas poussé le gouvernement ou ses ministères à prendre des mesures quelconques.

Mme Gauthier: C'est difficile à déterminer parce qu'il s'agit bien sûr d'opérations secrètes du service. Le SCRS ne peut pas vous dire publiquement ce qu'il fait pour lutter contre les terroristes au Canada. Cependant, il est certainement au courant du danger et il est très actif dans ce domaine.

M. Hanger: Je ne pense pas que vous ayez vraiment saisi ce que j'essaie de dire, mais...

Mme Gauthier: J'essaie, mais je ne suis pas certaine d'avoir bien compris.

M. Hanger: Je vais poser ma question autrement. Quand j'ai parlé à des membres du SCRS et au directeur à propos du genre de personnes qui entrent au Canada illégalement par divers moyens, on m'a dit que le SCRS s'occupait strictement de rassembler des renseignements, mais qu'il transmet les renseignements de ce genre à divers ministères pour que ceux-ci fassent le nécessaire. Cependant, une fois que les renseignements ont été transmis, cela ne préoccupe plus le SCRS.

Mme Gauthier: Le SCRS vous a dit cela?

M. Hanger: Oui.

Mme Gauthier: C'est possible, mais nous n'examinons pas...

M. Hanger: Vous n'examinez pas ces...

Mme Gauthier: Nous examinons les activités du SCRS, mais pas ce que le ministère de l'Immigration ou d'autres services font des renseignements que leur fournisse le SCRS.

M. Hanger: Dans ce cas, que faites-vous des chiffres portant sur le nombre de terroristes connus qui arrivent au Canada et qui inquiètent le SCRS? Cela inquiète le SCRS au point que le solliciteur général l'ait noté en avril 1994 en disant que le pays risquait d'être déstabilisé si certains de ces terroristes se manifestaient.

Mme Gauthier: Je peux vous garantir que, d'après nos recherches, le SCRS s'occupe activement l'antiterrorisme. C'est une question à laquelle il accorde beaucoup d'importance. Il prend toutes les mesures possibles pour empêcher les actes de terrorisme sur notre territoire.

Le président suppléant (M. Rideout): Votre temps de parole est écoulé.

Nick.

M. Discepola (Vaudreuil): Je n'ai pas tellement de questions à poser parce que je croyais que nous avions fini d'examiner le rapport sur le Heritage Front.

Il y a une chose qui m'intrigue. Certains membres du comité conviendront certainement qu'il est très difficile de vous extirper des renseignements quand vous témoignez devant le comité. Je me demande bien pourquoi vous songiez même à avoir un site sur l'Internet. Quels renseignements utiles pourriez-vous y donner? Combien cela a-t-il coûté? Combien cela va-t-il coûter pour maintenir ce site?

.1600

Mme Gauthier: Nous sommes très fiers de notre site. J'ai les chiffres ici et cela ne coûte pas tellement cher. Le maintien coûte environ 3 000 $ par année et l'établissement du site nous a coûté environ 8 000 $. En six semaines, nous avons reçu environ 14 000 demandes de renseignements, ce qui fait environ 362 par jour, et...

M. Discepola: C'était vous, Art?

Des voix: Oh, oh!

M. Hanger: Tout est possible.

M. Discepola: Quel genre de renseignements pourriez-vous offrir qui seraient utiles à quelqu'un qui songe à obtenir accès à votre page d'accueil?

Mme Gauthier: Nous donnons des renseignements sur notre mandat, sur différents rapports que nous avons rédigés et sur nos rapports annuels. Nous fournissons aussi des renseignements sur les plaintes et sur ce qu'un citoyen peut faire s'il n'est pas satisfait de la façon dont le service l'a traité. Nous offrons ces divers genres de renseignements.

M. Discepola: Un citoyen pourrait-il porter plainte par l'entremise de l'Internet pour conserver l'anonymat?

Mme Gauthier: Non, parce que la loi est là et qu'il faut une plainte officielle aux yeux de la loi.

M. Discepola: Ce n'est donc pas une façon pour quiconque d'éviter d'être intimidé ou de se sentir menacé d'intimidation parce que son nom est divulgué. C'est une chose qu'on ne peut pas éviter.

Mme Gauthier: Pas à ma connaissance, non.

M. Discepola: Merci, monsieur le président.

Mme Gauthier: Comme vous le savez, nous ne divulguons jamais le nom des personnes qui portent plainte et nous ne le ferions jamais sur Internet.

[Français]

Le président suppléant (M. Rideout): Monsieur Langlois, vous avez cinq minutes.

M. Langlois: Madame Gauthier, à la page 8 de votre rapport, le seul article qui apparaît in extenso - si vous me permettez l'expression, puisqu'il y a deux paragraphes - est l'article e), «Ingérence étrangère dans les processus démocratiques». On fait une revue de l'année 1995.

Le processus démocratique au Canada, en 1995, c'était le référendum du 30 octobre, à moins que vous puissiez m'indiquer quel autre événement majeur a eu lieu. Avez-vous des raisons raisonnables de croire qu'un pays étranger est intervenu directement ou indirectement dans le processus référendaire au Québec? Si oui, par quels moyens, financiers ou autres, ce ou ces pays étrangers sont-ils intervenus? Sinon, qu'est-ce qui vous permet d'affirmer que la réponse est négative?

M. Discepola: M. Pierre-F. Côté.

Mme Gauthier: Quelqu'un est venu dire à notre service qu'il y avait peut-être eu intervention d'un pays étranger dans un processus démocratique. Donc, le Service a fait des recherches et en est venu à la conclusion que cette information n'était pas crédible du tout et qu'il fallait mettre cela de côté.

Dans notre processus d'examen, on a regardé ce qui s'était passé et on a trouvé que le Service avait reçu une information qui n'était pas crédible, qui n'était pas digne d'être retenue, et tout cela a été mis de côté. C'est tout.

M. Langlois: Dans un autre domaine, madame Gauthier, relativement au trafic d'armes, on a appris que la GRC aurait autorisé l'une de ses sources, l'agent Audet, avec le réseau qui était établi aux environs, sinon sur le lieu même d'Akwesasne, à faire du trafic d'armes. L'opération, semble-t-il, n'a pas été menée à terme. Savez-vous si le Service canadien du renseignement de sécurité a pris la relève ou a mené une activité parallèle et s'est livré au trafic d'armes au Canada ou avec des personnes au Canada transitant par l'étranger?

.1605

Mme Gauthier: Vous me demandez si le Service surveille lui-même s'il y a du trafic d'armes au Canada?

M. Langlois: Non seulement s'il surveille, mais s'il en fait par l'intermédiaire de sources humaines.

Mme Gauthier: Si le Service de sécurité fait lui-même du trafic d'armes?

M. Langlois: Si la GRC en fait, pourquoi pas le Service?

Mme Gauthier: Écoutez, croyez-vous que ce serait conforme à son mandat et à la loi?

M. Langlois: Là, je tirerai mes conclusions.

Mme Gauthier: Et nous aussi. Qu'en pensez-vous?

M. Langlois: Vous savez ce que j'en pense. Le Service en faisait. Pour que ce soit au procès-verbal, pouvez-vous m'assurer qu'à votre connaissance personnelle, le Service n'a jamais planté de sources pour faire du trafic d'armes au Canada et à l'étranger? Non? Votre signe de tête doit-il être interprété comme un non au procès-verbal?

Mme Gauthier: Oui.

M. Langlois: C'est bien. J'ai tellement de choses à traiter que je change de sujet. Pour ce qui est du personnel francophone, les Canadiens français en général et plus spécifiquement les Québécois, au niveau du SCRS, quelle est sa proportion au SCRS et quelle est la proportion de francophones venant du Québec et de francophones venant d'ailleurs au Canada, si vous l'avez?

Mme Gauthier: Je n'ai peut-être pas les chiffres exacts.

M. Langlois: Je pense qu'une précision approximative serait déjà un grand pas en avant.

Mme Gauthier: Dans la région du Québec, je pense qu'on a environ 90 p. 100 de francophones et 4 p. 100 d'anglophones et le reste sont des allophones.

M. Langlois: Ce qui représente par rapport à l'effectif canadien global...

Mme Gauthier: Non, à l'ensemble...

M. Langlois: Je comprends très bien. Votre réponse est très précise, madame Gauthier, mais par rapport à l'ensemble canadien des membres du Service, quelle proportion la section québécoise francophone représente-t-elle?

Mme Gauthier: De l'ensemble des membres, c'est difficile à dire. Je ne connais pas le nombre exact du personnel de la région de Québec. Je connais l'ensemble canadien parce qu'on donne toujours un chiffre d'environ 2 000. On n'est pas censé le dire, mais finalement, c'est public; tout le monde sait que c'est à peu près ce chiffre-là. Pour Montréal et toute la région du Québec, je ne peux vous dire le nombre d'employés. Dans ce personnel, il y en a environ 90 p. 100 de francophones. C'est donc assez important pour une région importante.

M. Langlois: Je comprends que vous n'avez pas sous la main les données vous permettant de répondre à cette question, mais pourriez-vous les transmettre au greffier du comité, M. Farrell, qui se chargera de nous les retransmettre?

Mme Gauthier: Sûrement. Je dois vous dire aussi qu'il y a des francophones dans les autres provinces. Il y a des francophones partout au pays.

M. Langlois: C'était le sens de ma question d'ailleurs. Je ne m'étais pas limité au Québec. Je parlais de francophones en général et au Québec en particulier.

À la page 6 de votre rapport, madame Gauthier, vous mentionnez, au deuxième paragraphe, que le SCRS n'avait pas pris la précaution d'informer le ministre que des représentants étrangers au Canada pouvaient représenter une menace. Je voudrais savoir de quel type de menaces il s'agissait et à quel échelon de représentants étrangers on avait affaire? S'agissait-il du corps consulaire, d'ambassadeurs?

Mme Gauthier: Regardez le titre de de ce paragraphe. On dit: «Enquête sur les services de renseignement d'un pays étranger». Donc, on parle d'un service de renseignement d'un pays étranger.

.1610

M. Langlois: Qui opérait en territoire canadien et qui était une menace pour le Canada à ce moment-là?

Mme Gauthier: On a vérifié si le Service avait eu raison de considérer ce groupement-là comme une menace à la sécurité du pays. Oui, c'est cela.

M. Langlois: Êtes-vous arrivés à la conclusion que le Service avait eu raison?

Mme Gauthier: Oui.

M. Langlois: Et vous êtes arrivés à la conclusion que le Service avait eu tort de ne pas en avoir informé le ministre responsable?

Mme Gauthier: Ce n'est pas dans tout l'ensemble. Nous avons découvert que le ministre avait échangé des renseignements de sécurité même s'il n'avait pas conclu d'entente en vertu de l'article 17, parce qu'on sait qu'on doit avoir une entente lorsqu'on fait des échanges. Ces agents ont expliqué qu'ils avaient supposé, à tort, que l'entente soumise au solliciteur général avait été approuvée. Disons qu'il y a eu un petit manque ici.

De plus, le Service n'avait pas consulté le ministre en temps opportun au sujet des menaces présentées par des représentants étrangers, comme il lui est prescrit de le faire dans une directive ministérielle. Donc, le ministère n'avait pas été informé de l'autorité qui avait été... Vous savez, il doivent avoir un mandat pour agir. À quel moment exactement le ministre n'a pas été informé? Il aurait dû être consulté et il ne l'a pas été en temps opportun. C'est un manque et on le leur a dit.

[Traduction]

Le président suppléant (M. Rideout): Monsieur Hanger.

M. Hanger: Merci, monsieur le président.

Je m'intéresse tout particulièrement à la question du crime organisé. Quelle priorité le SCRS et le CSARS dans son examen accordent-ils au crime organisé?

Mme Gauthier: Selon moi, le SCRS joue un rôle important dans ce domaine puisqu'il sert d'intermédiaire entre les services de renseignement d'autres pays et la police. Au lieu que ce soit les services de police qui communiquent directement avec les services de renseignement d'autres pays au sujet du crime transnational, le SCRS aide la GRC ou sert d'intermédiaire entre nos propres services policiers et les services d'autres pays.

M. Hanger: Bien entendu, on s'inquiète de plus en plus du crime international et du taux de la criminalité à l'échelle internationale. J'espérais pour ma part que cela intéresse beaucoup le SCRS, non seulement à cause de ma propre expérience, mais aussi à cause de ce que j'ai appris d'autres personnes qui s'occupent de la lutte contre le crime organisé.

J'ai eu l'occasion d'assister à une conférence sur le crime asiatique en Californie cette année. Cela m'a bien intéressé de voir ce qui est ressorti de cette conférence et de voir le rôle que joue le Canada relativement au crime organisé asiatique, surtout pour ce qui est du trafic de drogue et du transport de drogue partout dans le pays, surtout l'héroïne et surtout à Vancouver, bien sûr, vu que c'est le principal point d'entrée. On peut presque dire que c'est l'endroit de distribution principal pour l'héroïne partout en Amérique du Nord et, bien sûr, le taux de criminalité dans la région de Vancouver le reflète.

C'est une chose de le savoir et cela devient de plus en plus évident pour l'ensemble de la population, mais ce qui m'inquiète, c'est qu'il y a aussi bien des choses qu'on ne fait pas pour faire respecter la loi relativement à ce genre d'activités. C'est en partie parce que les renseignements ne sont pas toujours fournis aux autorités appropriées. Je ne sais pas pourquoi.

Vu que vous dites que la surveillance dans ce domaine est prioritaire pour le CSARS, je voudrais savoir exactement où l'on pourrait apporter des changements pour garantir que les renseignements sont transmis à qui de droit et que la loi est appliquée comme elle doit l'être.

.1615

Mme Gauthier: Ce que je peux vous dire, c'est que le SCRS est chargé de rassembler des renseignements et de les communiquer lorsqu'il y a une menace pour la sécurité du Canada. Bien sûr, on peut dire que le crime constitue une menace pour la sécurité du Canada...

M. Hanger: Le crime organisé.

Mme Gauthier: Le crime organisé. Nous savons que c'est l'opinion du SCRS, mais le service qui s'occupe surtout du crime n'est pas le SCRS, mais la GRC. Le SCRS collabore en fournissant les renseignements qu'il obtient, mais il n'a pas pour priorité d'obtenir des renseignements sur le crime lui-même. Vous devez le comprendre.

M. Hanger: Je le comprends. Je comprends qu'il s'intéresse davantage aux chiffres sur la criminalité et la façon dont ces chiffres s'insèrent dans la question plus générale de la sécurité du pays. J'imagine que c'est là où je voulais en venir.

Le CSARS a-t-il examiné la façon dont le SCRS fournit ces renseignements aux autorités appropriées? Pouvez-vous me dire que vous êtes convaincue que les renseignements appropriés dans le cas du crime organisé et des chiffres sur le crime organisé sont transmis aux organismes appropriés?

Mme Gauthier: Lorsque le SCRS obtient des renseignements qui seraient utiles à la police, il communique certainement ces renseignements aux services policiers et essaie de les aider.

M. Hanger: D'après votre réponse, j'imagine cependant que vous n'en êtes pas vraiment certaine vu que vous ne pouvez faire qu'une déclaration générique disant que...

Mme Gauthier: J'en suis certaine, mais je n'ai pas vu tous les dossiers sur tous les crimes et je ne suis pas au courant de tous les renseignements que possède le SCRS.

M. Hanger: C'est donc une partie des activités du SCRS que le CSARS ne surveille pas aussi attentivement que lorsqu'il analyse les chiffres et certains autres renseignements.

Le président suppléant (M. Rideout): Elle n'a pas dit cela.

Mme Gauthier: Nous surveillons l'échange de renseignements entre les ministères et organismes fédéraux et entre le SCRS, les services de police provinciaux, les tribunaux provinciaux et les tribunaux fédéraux pour nous assurer que le SCRS ne divulgue pas de renseignements sur la vie privée de Canadiens. Nous nous assurons aussi que le SCRS fournit au besoin les renseignements qu'il possède au sujet de criminels.

M. Hanger: Très bien.

Le président suppléant (M. Rideout): Monsieur Gallaway.

M. Gallaway (Sarnia - Lambton): Merci, monsieur le président. Je m'excuse de mon retard, mais j'avais une autre réunion qui s'est prolongée.

Nul besoin de vous rappeler qu'il y a toutes sortes de rumeurs qui circulent, mais je voulais vous demander quels sont les rapports entre le CSARS et le SCRS. J'ai ou bien lu - et je ne veux pas dire que c'était quelque chose de confidentiel - ou bien entendu dire que les rapports entre le CSARS et le SCRS sont tendus à l'heure actuelle. Je n'irai pas jusqu'à dire qu'il y a une certaine méfiance entre les deux services, mais il semblerait que le CSARS et le SCRS sont en train de se mesurer parce que vous n'avez pas l'impression qu'on fournit tous les renseignements voulus. Cette rumeur est-elle fondée? Deuxièmement, à titre de comité de surveillance, comment pouvez-vous être certain que vous obtenez toute l'information?

Mme Gauthier: Tous les renseignements.

M. Gallaway: Oui.

Mme Gauthier: Tout d'abord, êtes-vous bien certain que vous voulez parler du CSARS et du SCRS ou bien songez-vous plutôt au SCRS et à l'inspecteur général?

M. Gallaway: Non, il s'agit du CSARS et du SCRS.

Mme Gauthier: La loi nous autorise à obtenir tous les renseignements que nous voulons et, normalement, nous les obtenons. Comme nous le signalons dans notre rapport annuel, il y a eu un problème l'année dernière. Nous tenons à bien préciser que cela ne se répétera pas.

Il y aura toujours des tensions entre le CSARS et le SCRS et c'est très sain. Ces tensions doivent exister. Nous examinons les activités du SCRS et le fait pour un service de voir quelqu'un d'autre examiner ses activités ne peut jamais vraiment lui plaire. Cela étant dit, vous avez peut-être raison de parler de rumeur, mais nous ne sommes vraiment au courant de rien.

.1620

M. Gallaway: Donc vous diriez que les rumeurs pas vraiment positives qui circulent ne sont pas fondées.

Mme Gauthier: Elles ne sont pas de source sûre.

Le président suppléant (M. Rideout): De toute façon, Roger, le Parlement ne se préoccupe jamais des rumeurs.

M. Gallaway: Non. Bien sûr, les parlementaires eux-mêmes font l'objet d'un examen. De toute façon...

En politique, nous revenons toujours à des cas particuliers et j'ai moi-même reçu plusieurs coups de fil au sujet de l'affaire Zundel. Les gens m'appellent pour me dire que cela les scandalise de savoir que l'on pourrait même songer à accorder la citoyenneté canadienne à M. Zundel. Diverses personnes sont du même avis.

Si j'ai bien compris la décision du tribunal, et vous me reprendrez si je me trompe, vous ne pouvez pas vraiment intervenir dans cette affaire. Est-ce exact?

Mme Gauthier: Nous ne le savons pas encore parce que l'affaire est toujours devant les tribunaux. Le juge et le tribunal de première instance ont décidé que le CSARS risquait d'avoir une opinion biaisée dans son examen du cas du M. Zundel. Cette affaire est encore devant les tribunaux. Mais pour ce qui est de l'impartialité ou du manque d'objectivité, c'est une chose qu'il faut déterminer pour chaque cas.

Dans ce cas particulier, un appel a été interjeté. Nous jugeons que nous avons de bonnes raisons d'interjeter appel. Le ministère de la Justice a décidé d'en appeler de la décision et nous croyons avoir de bons arguments.

Nous croyons que nous devons en appeler de la décision parce que deux des membres n'étaient pas du tout mêlés à l'affaire du Heritage Front et pourraient donc être objectifs s'ils devaient entendre cette affaire. Nous avons aussi des règles de procédure, comme des murailles de Chine et des règles sur les conflits d'intérêts. La question sera débattue et nous verrons bien ce qui arrivera.

M. Gallaway: Quelle a été la conséquence de la décision du tribunal de première instance pour votre examen des questions de citoyenneté qui peuvent vous être présentées.

Mme Gauthier: Pour l'instant, rien n'a changé parce que, comme je vous l'ai déjà dit et comme le juge lui-même l'a dit dans sa décision, chaque cas est différent. On ne peut donc pas décider...

M. Gallaway: Cela ne vous a donc pas empêchés de poursuivre vos activités.

Mme Gauthier: Non, pas du tout.

M. Gallaway: Deuxièmement, d'après quelque chose que vous avez dit et d'après aussi mon interprétation de la loi constitutive du SCRS, vous êtes d'une certaine façon un comité autonome tout à fait distinct et indépendant du SCRS. Je sais que les membres du comité sont nommés. Avez-vous décidé d'interjeter appel dans le cas en question vous-mêmes ou est-ce quelqu'un au ministère de la Justice qui l'a décidé.

Mme Gauthier: Le ministère de la Justice a décidé d'interjeter appel et, à titre d'organisme indépendant, nous avons décidé que nous avions un intérêt dans cette affaire et que nous devrions intervenir.

M. Gallaway: Très bien. Merci. Merci, monsieur le président.

Le président suppléant (M. Rideout): Vu ce que vous avez dit tantôt, le conflit entre le SCRS et l'inspecteur général empêche-t-il l'un ou l'autre service de faire son travail?

.1625

Mme Gauthier: Le directeur nous a assurés et le solliciteur général dans une lettre au SCRS et à l'inspecteur général a aussi garanti que les deux services devront apprendre quels sont leurs rôles respectifs et comment collaborer. Pour l'instant, nous n'entrevoyons pas de problème.

Le président suppléant (M. Rideout): Il s'agit d'une lettre du solliciteur général?

Mme Gauthier: Oui, une lettre au SCRS et à l'inspecteur général qui définit le rôle de chaque organisme.

Le président suppléant (M. Rideout): Pourrions-nous obtenir cette lettre?

Mme Gauthier: Ce n'est pas à nous qu'elle a été envoyée. Vous pouvez peut-être vous renseigner.

Le président suppléant (M. Rideout): Très bien.

Je m'excuse de mon interruption. Monsieur Langlois.

[Français]

M. Langlois: Madame Gauthier, êtes-vous à l'aise avec le fait que le directeur du Service du renseignement de sécurité pour le Québec, Normand Chamberland, a été impliqué dans le vol de dynamite destinée à des groupes terroristes au Québec?

Mme Gauthier: Cela fait quand même pas mal d'années, n'est-ce pas?

M. Langlois: Eh bien, je ne plaide sur la prescription.

Mme Gauthier: C'est vous qui le dites. Personnellement, je ne savais pas qu'il avait été impliqué dans des vols de dynamite. A-t-il été condamné? Est-ce qu'il y a eu...

M. Langlois: J'ai le rapport du commissaire Jean Keable. C'est la conclusion à laquelle le commissaire en arrive. Il dit que Chamberland et les gendarmes Richard Daigle et Bernard Dubuc ont été impliqués dans le vol de dynamite destiné à conforter une source qui avait été placée auprès d'un mouvement terroriste au Québec.

Mme Gauthier: Richard Daigle et...

M. Langlois: Richard Daigle et Bernard Dubuc.

Mme Gauthier: Donc, qu'est-ce que Normand Chamberland...

M. Langlois: C'était la troisième personne, maintenant directeur du Service, qui a été impliquée.

Mme Gauthier: Il n'est pas mentionné dans le rapport.

M. Langlois: Ah, oui, il est mentionné à la page 317 du rapport, aux point 1.22 et 1.3. On dit:

Cette opération s'est déroulée sans incident dans la nuit du 26 au 27 avril 1972. Trois membres de la section «G» y ont pris part, à savoir le caporal Bernard Dubuc, le gendarme Richard Daigle et le caporal Normand Chamberland.

Je reformule donc ma question. La population canadienne n'a-t-elle pas lieu de s'inquiéter que le directeur régional du Service au Canada ait été reconnu par un commissaire comme ayant participé à un vol de dynamite destinée à des mouvements terroristes au Québec?

Mme Gauthier: C'est dans un rapport d'un commissaire. Jean Keable est mon associé. Ce doit donc être un bon rapport. On parle de 1972 et il faudrait que je sois plus informée de tout le détail. Si vous le voulez, je peux examiner cette question-là et on pourra s'en reparler à une autre occasion.

On a fait un examen complet de la région récemment et il y a certaines choses... Tout n'est pas parfait, mais en fait, il n'y avait rien qui était digne de grande mention pour le moment.

M. Langlois: Monsieur Archdeacon, vous aviez un commentaire à faire là-dessus?

Mme Gauthier: Non, c'était simplement pour me dire que c'était en 1972.

M. Langlois: Dans le rapport du vérificateur général pour cette année, au chapitre 27, page 19, le vérificateur général, au point 27.62, indique, entre autres, qu'il craint que la possibilité que les relations restent tendues avec le sous-comité, c'est-à-dire nous, mène à une érosion de la confiance du Parlement et du public et puisse en compromettre l'efficacité.

Plus tôt, vous avez parlé de relations tendues entre vous et le Service, alors que l'an dernier, Me Robert, qui était alors président pro tempore du Comité de surveillance, disait qu'il avait toute la collaboration du Service. Cette année, c'est le vérificateur général qui parle d'une tension. Vous avez parlé de tension avec le Service. Donc, cela serait apparu depuis que vous avez assumé la présidence.

.1630

Mme Gauthier: Ce ne sont pas les mêmes organismes. Qu'il y ait une tension entre le Comité de surveillance et le Service, vous admettrez avec moi que c'est normal et sain.

M. Langlois: Oui, je l'admets avec vous, mais ce dont je suis surpris, c'est que l'année passée, Me Robert nous disait qu'il n'y avait pas de tension, que c'était full discovery, que c'était pratiquement bar ouvert avec le Service. Ils avaient accès à tous les documents, les gens les aidaient et cela se faisait dans un climat de camaraderie. Donc, depuis que vous êtes arrivée, cela s'est détérioré. C'est probablement bon signe parce que vous êtes peut-être plus perçue comme une menace que les membres qui siégeaient auparavant.

Mme Gauthier: On y a accès parce que c'est la loi qui le dit. Si la loi nous le permet, on va exercer nos pouvoirs. Oui, cela crée une tension et je pense que c'est sain et que ce devrait être ainsi. C'est ma vision de la chose. Si M. Robert avait une autre vision, c'est son affaire.

Maintenant, quant à la tension dont parle le vérificateur général, ce n'est pas la même chose.

M. Langlois: Effectivement, parce qu'elle se situe à deux niveaux. Donc, on peut présumer de ce que vous dites, et je présume que vous parlez aussi au nom de vos collègues, que le climat de camaraderie qui pouvait exister dans les relations entre le Service et le Comité de surveillance n'existe plus. Il s'agit d'une fonction maintenant beaucoup plus professionnelle que par le passé.

Mme Gauthier: La petite camaraderie, en tout cas sous ma présidence, ce n'est pas ce que je favorise.

M. Langlois: Vous parlez également au nom de M. Goodman, de Mme Brown et de M. Vari?

Mme Gauthier: Oui, au nom de tous les membres.

M. Langlois: Merci.

[Traduction]

Le président suppléant (M. Rideout): Monsieur Goodman.

L'honorable Edwin Goodman (Comité de surveillance des activités de renseignement de sécurité): Nous avons trouvé très favorable ce qui est dit dans le rapport du vérificateur général au sujet de la façon dont nous menons nos activités. Comme vous pouvez le voir sur la même page, le vérificateur général nous félicite sur la façon dont nous exerçons nos pouvoirs.

M. Hangar: Je connais très bien la façon dont fonctionne le SCRS dans certaines communautés ethniques et je sais qu'il s'occupe davantage de certaines de ces communautés que d'autres, bien sûr, selon ce qui s'y passe, et je voudrais savoir comment le CSARS a examiné ce processus. Bien entendu, lorsqu'on surveille de très près une collectivité donnée, il y a toujours des risques que des citoyens canadiens soient pris dans le filet des opérations de surveillance ou de collecte de renseignements. Je voudrais savoir si le CSARS a surveillé de près ces activités du SCRS.

Mme Gauthier: Notre rapport cette année contient une recommandation au sujet des entrevues avec des membres de communautés. Est-ce de cela que vous voulez parler?

M. Hangar: En partie, j'imagine. Je sais d'une façon ou d'une autre que de SCRS cible un certain élément d'une communauté ethnique particulière à l'heure actuelle. Certaines de ces activités se passent dans ma propre ville et certaines...

Mme Gauthier: Et le SCRS rencontre des membres de cette communauté?

M. Hangar: Non, ce n'est pas ce que je veux dire. Je veux dire qu'il y a des préoccupations au sujet de cette activité.

Mme Gauthier: Voulez-vous dire que quelqu'un dans votre circonscription est ciblé par le SCRS? Est-ce ce que vous voulez dire?

M. Hangar: Ce que je veux dire, c'est qu'il y a probablement plus d'une personne dans ma circonscription qui est ciblée par SCRS.

Mme Gauthier: Oui, et où est le problème?

M. Hangar: Je ne dis pas qu'il y a un problème. Je me demandais comment...

Le président suppléant (M. Rideout): Êtes-vous soupçonné?

M. Hangar: Je voulais savoir comment le CSARS surveille ce qui se passe lorsqu'une cible est choisie. Le fait-il pendant ou uniquement après l'opération?

Mme Gauthier: Nous le faisons avant, après et pendant parce que lorsqu'une cible est choisie, nous surveillons ce que fait le SCRS pour obtenir l'autorisation ou le mandat nécessaire et nous nous assurons que ce que dit le SCRS dans les affidavits qu'il présente au tribunal et au juge est conforme au document contenu dans ses dossiers. C'est l'une des façons dont nous surveillons ces activités. Nous surveillons dans le sens que nous nous assurons que la cible constitue effectivement une menace pour la sécurité du Canada aux termes de la loi. Ensuite, nous surveillons les renseignements qu'obtient le SCRS et ce qu'il fait de ces renseignements, combien de temps il les conserve et comment il les détruit. Nous faisons donc un examen complet et approfondi.

.1635

M. Hanger: Si un citoyen canadien est mêlé à une telle enquête parce que des étrangers sont arrivés dans la région et sont surveillés par le SCRS... Que fait-on des documents portant sur ceux qui, tout en n'étant pas mêlés à une activité particulière, sont citoyens canadiens et font partie d'une communauté ethnique particulière? Les détruit-on?

Mme Gauthier: Oui, parce que si la personne en question ne constitue pas une menace pour la sécurité du Canada et a été par hasard mêlée à une telle enquête, le CSARS n'est pas autorisé à conserver les renseignements à son sujet. Nous examinons tous les jours les dossiers du SCRS pour nous assurer qu'il ne conserve pas de tels renseignements. C'est notre rôle et c'est ce que nous faisons.

M. Hanger: Donc, le comité de surveillance...

Mme Gauthier: Et si quelqu'un n'est pas satisfait ou a des soupçons quelconques, cette personne peut porter plainte au CSARS.

M. Hanger: Le Comité de surveillance des cibles est donc assujetti à une surveillance constante de votre part.

Mme Gauthier: Et de notre personnel.

M. Hanger: Et de votre personnel. J'imagine que cela constitue une partie importante de vos demandes d'examen ou autres activités et que vous accumulez ces renseignements jusqu'à ce que le CSARS déclare le projet clos. Est-ce exact?

Mme Gauthier: Oui. Nous surveillons. Nous sommes là dès le début et nous restons jusqu'à la fin. Quand nous examinons un dossier, nous l'examinons du début à la fin.

M. Hanger: Merci.

Le président suppléant (M. Rideout): Du côté des ministériels?

Mme Gauthier: Oui. Et si un habitant de votre circonscription n'est pas satisfait, il devrait porter plainte.

M. Hanger: Je n'ai reçu aucune plainte.

Mme Gauthier: Non.

Le président suppléant (M. Rideout): Vous l'avez bien dit, Art.

M. Hanger: Je suis satisfait.

Le président suppléant (M. Rideout): Cela a aussi été consigné au compte rendu.

[Français]

Monsieur Langlois.

M. Langlois: À la page 29, vous parlez d'un espion russe ou d'une source russe. Avez-vous fait un suivi par rapport aux recommandations que vous avez faites? Si oui, qu'est-ce que cela a donné?

[Traduction]

Mme Gauthier: Il s'agit d'une plainte particulière et d'un cas que nous avons entendu.

[Français]

M. Langlois: C'est du couplage d'information. On sait, par le couplage avec l'information qui est sortie devant les médias, que la personne dont vous parlez était un espion russe. Je vous demanderais de nous confirmer qu'il s'agissait de quelqu'un qui provenait de la Fédération de Russie ou d'un pays de l'ex-Bloc soviétique.

Mme Gauthier: Il s'agit d'un cas que je n'ai pas entendu moi-même. C'est même avant que je sois revenue en tant que membre du Comité. À quelle partie du rapport faites-vous allusion exactement?

.1640

M. Langlois: Ce sont vos trois recommandations qui sont marquées par un point.

Mme Gauthier: Oui, l'enquête de sécurité.

M. Langlois: Quel suivi a été fait après ces recommandations-là? Les gens du Service sont-ils revenus pour vous dire ce qu'ils avaient fait? Si oui, dans quel sens? Si non, quelles mesures additionnelles avez-vous prises? Vous demandez un réexamen. L'enquête a-t-elle été rouverte?

Mme Gauthier: Oui, l'enquête a été rouverte. Ils ont réexaminé au complet le dossier et ils nous ont dit qu'ils avaient revu complètement le dossier et qu'il n'y avait pas de problème.

M. Langlois: Des preuves additionnelles ont-elles été recueillies lors de la réouverture ou si on a constaté que le dossier était clos?

Mme Gauthier: Ce n'est pas nous qui avons fait la réouverture, mais eux.

M. Langlois: Vous l'avez ordonnée ou demandée.

Mme Gauthier: On a dit qu'après la réouverture du dossier, l'employé en question a démissionné. Cela a aidé à fermer le dossier.

M. Langlois: Il a démissionné parce qu'il était impliqué dans des activités qui étaient répréhensibles aux yeux du Service ou à vos yeux?

Mme Gauthier: Je ne pourrais vous dire pourquoi il a démissionné. Il était peut-être arrivé près de l'âge de la retraite et a décidé de la prendre.

M. Langlois: Monsieur Archdeacon, est-ce qu'il a pris tout simplement sa retraite?

Mme Gauthier: Il prenait sa pension, c'est cela?

M. Maurice Archdeacon (directeur exécutif, Comité de surveillance des activités de renseignement de sécurité): Oui, sa pension.

M. Langlois: J'en suis peut-être rendu à la conclusion. Étant donné les rapports extrêmement tendus que le Comité de surveillance a eus avec la 35e législature et toutes les questions qui ont été posées pendant cette législature-là, ne croyez-vous pas que le temps est venu de tenir une commission royale d'enquête sur le Service canadien du renseignement de sécurité, afin que la population canadienne puisse voir, comme on le voit dans l'affaire Krever et comme on peut le voir à la Commission de l'honorable Juge Létourneau sur la Somalie, ce qui se passe vraiment au sein du Service canadien du renseignement de sécurité? Comme parlementaire, je suis absolument insatisfait de ce qui s'est passé pendant la 35e législature.

Vous me répondez de façon adorable et avec beaucoup d'à-propos. Le problème, c'est qu'on n'arrive jamais au fond des questions. Il faudrait siéger à huis clos et il faudrait que le rapport que vous remettez au solliciteur général soit transmis aux députés pour examen à huis clos. Nous ne l'avons pas.

Plus tôt, vous avez dit que la loi vous permettait d'avoir accès à tous les documents. Selon l'avocat général de la Chambre, la loi nous permet à nous aussi d'avoir accès à tous les documents. Vous ne nous les donnez pas. Tout ce qu'on a, madame Gauthier, ce sont les documents qui ont été pondus par le Service pour fins de publication. On ne peut travailler avec cela et je vous pose la question à vous, comme avocate d'abord, parce que vous avez une grande expérience.

Mme Gauthier: Comme avocate et aussi comme Canadienne. D'abord, comme avocate, je ne trouve pas que le moment est approprié pour avoir une commission d'enquête. Je trouve que la loi, qui existe depuis 1984, a quand même permis à tous les organismes impliqués, et particulièrement au Service de sécurité puisqu'il s'agit de ce service, de changer beaucoup leur attitude. Je ne dis pas que c'est parfait, et ce ne le sera jamais, mais au moins, la loi a permis de les rendre beaucoup plus conscients de leur rôle et beaucoup plus prudents dans leurs approches.

Comme le Comité de surveillance est là, je pense que les Canadiens et Canadiennes peuvent encore avoir confiance dans l'organisme et dans le processus tel qu'il existe actuellement.

Je sais que c'est parfois frustrant pour vous, mais, comme je l'ai dit au début, on veut faire tout notre possible pour vous donner le plus de renseignements possible. Je pense qu'il y aurait peut-être lieu d'attendre encore quelque temps avant de demander la tenue d'une commission d'enquête. Je vous dis cela en tant qu'avocate.

Comme Canadienne, je vous dirai que le Canada a peut-être d'autres priorités encore plus exigeantes pour le moment.

M. Langlois: Fondamentalement, êtes-ce parce que vous croyez que le tissu démocratique canadien n'est pas assez solide pour endurer les révélations qui pourraient être faites?

Mme Gauthier: Pas du tout, pas du tout. Je pense qu'on perdrait notre temps.

M. Langlois: Alors, pourquoi l'omerta a-t-elle envahi le Comité de surveillance, qui a généralement refusé de répondre à nos questions, sauf en disant de façon vague: «Je ne peux répondre à ces questions»?

Mme Gauthier: Écoutez...

M. Langlois: Mme Gauthier, vous n'étiez pas là...

Mme Gauthier: Je le sais bien.

.1645

M. Langlois: Vous avez plaidé devant les tribunaux, bien sûr, et vous êtes associée à Me Keable, que j'ai bien connu, et à Me Robert, qui vous a précédée. Si on était devant un tribunal régulier, avec d'autres que vous, madame Gauthier - je fais la notable exception pour que cela apparaisse aussi au compte rendu - , on aurait fait des requêtes pour faire déclarer les membres du Comité de surveillance témoins hostiles tellement ils ont refusé de façon caractérisée et répétitive de répondre à nos questions. Malgré les ordres qui leur ont été donnés par la présidence, ils se sont réfugiés derrière une interprétation extrêmement étroite de la loi et ont refusé d'obtempérer à des ordres du comité, qui est une émanation de la Chambre. Cela me semble assez sérieux, madame Gauthier.

Mme Gauthier: Peut-être avez-vous été malheureusement présent à un mauvais moment et que vos actions vont aider à améliorer la chose.

M. Langlois: Je vous remercie, madame Gauthier.

[Traduction]

Le président suppléant (M. Rideout): Je dois vous dire que nous avons fait une étude parlementaire du SCRS. Cette étude a été terminée en 1993. Si je me rappelle bien, c'est un document brillant.

C'est vous qui l'aviez rédigé, Phil, n'est-ce pas? Ce devait donc être brillant.

Monsieur Hanger.

M. Hanger: Vous notez dans votre rapport que l'aspect le plus coûteux de vos activités est l'enquête découlant des plaintes.

Mme Gauthier: Cela coûte cher, en effet, mais nous essayons de faire en sorte que le coût soit le moins élevé possible.

M. Hanger: Je m'interroge sur le genre de plaintes que vous recevez et j'essaie de comprendre pourquoi les enquêtes coûteraient aussi cher. Quel est le genre de plaintes que reçoit le CSARS? Portent-elles généralement sur un agent particulier du SCRS? Portent-elles sur le SCRS en général?

Mme Gauthier: Elles peuvent porter sur un employé du SCRS qui n'a pas très bien fait son travail et la personne qui porte plainte n'est pas satisfaite de la façon dont elle a été traitée par le service. Bien sûr, bon nombre des opérations du SCRS durent assez longtemps. La plainte peut ne pas porter sur un incident précis, ce qui veut dire que nous devons examiner tout le dossier et que cela prend du temps. Normalement, c'est notre personnel qui s'en occupe. Nous fonctionnons comme un tribunal, ce qui veut dire que nous devons avoir un avocat et le SCRS aussi. Il y a des retards et cela peut coûter cher, comme n'importe quelle action devant un tribunal ordinaire.

M. Hanger: Ceux qui ont été ciblés par le SCRS peuvent donc porter plainte.

Mme Gauthier: Oui.

M. Hanger: Vu que le SCRS fonctionne de façon plus ou moins clandestine, à l'insu de bien des personnes, comment une plainte peut-elle être portée? Comment la personne ciblée peut-elle se plaindre?

Mme Gauthier: Il arrive que des gens ne soient pas satisfaits et pensent avoir été ciblés par le SCRS, mais sans en être certains. Dans bien des cas, ceux qui portent plainte essaient simplement de savoir ce qui s'est passé. Nous devons donc être très prudents. Nous devons traiter chaque cas avec circonspection.

Il y a les cas où la citoyenneté est refusée. Nous entendons aussi des cas de ce genre. Il y a aussi ceux à qui on refuse une cote de sécurité, ce qui est très important parce qu'on exige cette cote pour les embaucher ou leur donner une promotion. C'est donc une question très grave que nous devons examiner très sérieusement.

M. Hanger: Si le SCRS surveille une cible au moyen de dispositifs d'écoute, il doit en avertir la cible à un moment donné après la fin de l'enquête.

Mme Gauthier: Non, parce qu'il obtient un mandat pour cela.

M. Hanger: Je le sais fort bien, mais si vous examinez la nature...

Mme Gauthier: Il ne faut surtout pas confondre ce genre de situation avec les affaires criminelles. C'est tout à fait différent.

.1650

M. Hanger: Cela m'intéresse beaucoup de vous l'entendre dire. Je suis au courant d'un cas à Calgary où un particulier a reçu un tel avis immédiatement après ou pendant la guerre du Golfe. Cette personne était d'origine arabe et a été avisée qu'elle avait fait l'objet d'une surveillance au moyen d'un dispositif d'écoute.

Mme Gauthier: Par qui a-t-elle été avisée?

M. Hanger: C'est intéressant parce que je l'ignore. Mais cette personne a certainement été avisée.

Mme Gauthier: C'est important.

M. Hanger: Le renseignement a certainement été transmis, mais la surveillance portait sur l'association possible de cette personne à d'autres personnes d'origine arabe qui s'étaient introduites au Canada et qui en étaient reparties. À mon avis, une telle opération relève davantage du mandat du SCRS que d'activités criminelles.

Mme Gauthier: Peut-être, mais si la personne en question n'est pas satisfaite, elle peut porter plainte. C'est toujours la solution.

M. Hanger: Elle devrait porter plainte directement au CSARS?

Mme Gauthier: Exactement, directement au CSARS. Nous expliquons à ceux qui portent plainte ce qu'ils doivent faire, mais c'est à nous que les plaintes doivent être adressées.

Le président suppléant (M. Rideout): Nous allons devoir mettre fin aux questions après celle-ci parce que nous devons passer quelques minutes à nous occuper de questions de routine, monsieur Gallaway.

M. Gallaway: Mes questions portent davantage sur l'administration. Je voudrais savoir combien le CSARS a d'employés.

Mme Gauthier: Nous avons 14 employés.

M. Gallaway: Combien d'entre eux travaillaient auparavant pour le SCRS?

Mme Gauthier: Aucun.

M. Gallaway: Certains d'entre eux travaillaient-ils à la GRC quand celle-ci avait le même genre d'activités que le SCRS?

Mme Gauthier: Non.

M. Gallaway: Il y a donc une espèce d'écran entre vos employés et les employés du SCRS, si l'on peut dire.

Mme Gauthier: Tout à fait. Je peux aussi vous dire que le personnel du SCRS change constamment. Il est presque impossible à nos employés d'établir des rapports amicaux avec les membres du SCRS et nous nous en rendons très bien compte.

M. Gallaway: Lors d'une réunion de notre comité il y a environ un an, un témoin nous a dit qu'il était très difficile de lutter contre certains genres de terroristes internationaux simplement à cause de l'Internet. On peut organiser des réunions et transmettre des renseignements très rapidement par l'Internet et les membres d'un groupe peuvent être répartis un peu partout dans le monde. J'ignore comment c'est possible, mais à votre connaissance, le SCRS surveille-t-il l'Internet pour déceler de telles activités?

Mme Gauthier: Bien sûr. Le SCRS s'intéresse beaucoup à tous les changements dans la technologie de l'information. Comme vous le savez, cela coûte assez cher et le SCRS tient à garder le pas et à avoir le matériel nécessaire pour suivre ce qui se passe. C'est une chose qui préoccupe beaucoup de SCRS, le CSARS et aussi le CST.

M. Gallaway: D'après vous, le SCRS a-t-il les ressources nécessaires pour cette partie de son travail?

Mme Gauthier: Nous lui avons posé la question et la réponse est oui, pour l'instant. Le SCRS pourra vous en dire davantage si vous lui demandez quelle sera la situation à long terme. Ce n'est pas à nous de vous le dire. C'est le problème du SCRS et non le nôtre. Cependant, cela nous préoccupe aussi parce que nous voulons nous assurer que le SCRS fonctionne efficacement. À l'heure actuelle, il se tire bien d'affaire, mais cela constitue une priorité importante pour l'avenir immédiat et à long terme.

M. Gallaway: J'ai posé cette question parce que le CRTC a annoncé qu'il allait surveiller le contenu canadien, ce que je trouve fort amusant.

Le président suppléant (M. Rideout): Merci beaucoup. Au nom du comité, je désire remercier le CSARS et tous ses membres d'être venus nous rencontrer aujourd'hui et d'avoir enduré cette discussion. Cela nous est très utile, et nous avons bien hâte de vous rencontrer à nouveau très bientôt.

Mme Gauthier: Nous avons bien hâte aussi. Merci beaucoup.

Le président suppléant (M. Rideout): Sur une question d'intérêt courant maintenant, il y a conflit avec la réunion que nous avons prévue le 22 décembre avec le vérificateur général. Le Comité de la justice doit se réunir au même moment. Je ne sais pas s'il y a d'autres dates qui pourraient convenir.

.1655

Les réunions ne vont peut-être pas se chevaucher, mais j'ai cru bon de rectifier cette question d'agenda. Lorsqu'on approche la fin de la session, tout le monde a un horaire très chargé.

M. Gallaway: Il y a une règle claire voulant qu'on puisse se réunir lorsque le Comité de la justice se réunit. Ça c'est en premier lieu. Deuxièmement, si c'est possible, je vous prierais de ne pas tenir cette réunion la semaine prochaine. La semaine prochaine ne s'y prête pas du tout. Ce serait préférable d'avoir moins de réunions plutôt que plus la semaine prochaine.

Le président suppléant (M. Rideout): D'accord. Quel est le climat, l'ambiance?

M. Langlois: Afin de nous assurer que nous n'aurons pas de réunions pendant la semaine qui vient, je pourrais peut-être proposer que nous levions la séance jusqu'à la prochaine convocation du président suppléant.

Des voix: Oh, oh!

Le président suppléant (M. Rideout): D'accord. Ça me semble assez juste. Donc ce sera à Derek de décider.

Si vous êtes tous d'accord, nous essayerons de fixer provisoirement une date pour la réunion avec le vérificateur général pendant la première semaine de février, puisque normalement ce sera la rentrée parlementaire. Ce sera donc le premier point à l'ordre du jour.

Des voix: D'accord.

Le président suppléant (M. Rideout): D'accord. Eh bien, Joyeux Noël et Merry Christmas.

La séance est levée.

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