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TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mardi 26 novembre 1996

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[Traduction]

La présidente: La séance est ouverte.

Monsieur Bryden, je suis étonnée que vous n'ayez pas croisé M. Langlois dans l'escalier.

M. John Bryden, député (Hamilton - Wentworth): Il doit avoir son propre passage secret.

Je ne crois pas avoir beaucoup de choses à ajouter. J'aimerais toutefois insister sur un point que j'ai soulevé lors de ma dernière comparution devant vous. Je crois qu'il est très important, peu importe la décision que prendra le comité en ce qui concerne les affaires émanant des députés, que le rôle qui leur est confié soit un rôle véritable afin que des mesures concrètes découlent de ce processus.

Le problème, c'est que si l'on tente de leur confier un rôle trop important, compte tenu de ce que j'ai dit à propos du pouvoir de dépenser du gouvernement, le gouvernement sera obligé de se défendre si des projets de loi d'initiative parlementaire supplantent de quelque façon que ce soit le rôle du gouvernement dans la création de lois en fonction de son pouvoir de dépenser. C'est un aspect fondamental de notre démocratie parlementaire qui remonte à de nombreuses années. Le fait d'élire un gouvernement selon le régime des partis est à mon avis un élément indispensable du fonctionnement correct du système, et sa capacité de créer des lois découle du pouvoir de dépenser accordé par le Parlement par suite de motions et de projets de loi sur le budget.

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Je ne crois pas que les affaires émanant des députés devraient intervenir dans ce domaine. Je crains - et j'ai entendu certains des autres témoignages - qu'en voulant à tout prix confier aux simples députés un rôle plus important, nous risquons plutôt encore une fois de leur confier un rôle plus symbolique que véritable. Je pense que si nous leur confions un rôle dans la création des lois, qui ne leur permet pas d'aller jusqu'au bout ou qui leur donne très peu de chances d'y parvenir, le public canadien s'en apercevra très rapidement.

Je reviens donc à mon argument premier, à savoir que le principe voulant qu'un projet de loi d'initiative parlementaire ne coûte rien au gouvernement est fondamental pour déterminer s'il fera l'objet d'un vote ou non. S'il fait l'objet d'un vote, il devrait donc pouvoir franchir toutes les étapes du processus, et être axé principalement dans de telles circonstances sur la modification d'une loi existante plutôt que sur la création d'une nouvelle loi, qui entraînerait des coûts pour le contribuable.

C'est essentiellement tout ce que j'avais à dire.

La présidente: Je vous remercie beaucoup.

En fait, Robert Marleau est d'accord avec vous. Le greffier en chef nous a présenté une procédure qui, pour permettre aux rédacteurs législatifs d'épargner beaucoup de temps, d'effort et de détail, serait analogue à la procédure de voies et moyens, lorsqu'il s'agit de modifier une loi existante; c'est-à-dire une motion plutôt générale. Une fois qu'elle a fait l'objet d'un examen sérieux de la part de la Chambre et a reçu un appui solide, elle pourrait alors être rédigée de façon plus détaillée. Donc, vous et moi semblons être sur la même longueur d'ondes à ce sujet.

Les deux autres membres du comité souhaitent-ils poser des questions à M. Bryden?

[Français]

M. Langlois (Bellechasse): Je n'ai pas de questions directement là-dessus. Monsieur Bryden, vous avez assisté à des témoignages d'autres députés lors des réunions précédentes. Certains députés ont laissé entendre que, si un projet de loi avait l'appui de plusieurs pétitionnaires - ce pourrait être 25 000 personnes et d'autres ont avancé 250 000 - , il devrait pouvoir sauter une étape et être déclaré votable puisqu'il correspond à une tendance, à un courant qui requiert un débat dans la société. Que pensez-vous de cette idée?

[Traduction]

M. Bryden: Je n'en pense pas grand-chose simplement parce que chaque député représente ceux qui l'ont élu au Parlement et je n'aimerais pas que des projets de loi d'initiative gouvernementale soient assujettis à ce genre de référendum populaire. Si cela ne fonctionne pas dans le cas du gouvernement, pourquoi cela devrait-il fonctionner dans le cas de simples députés? Je ne crois pas d'ailleurs que ce soit nécessaire car à mon avis une contre-proposition très efficace a été présentée, à savoir qu'un député ayant un projet de loi d'initiative parlementaire important obtienne l'appui d'environ 60 ou 80 de ses collègues, dont il peut faire état devant le comité. Cet appui est sans doute suffisant pour permettre au projet de loi de sauter l'étape du tirage au sort et d'être inscrit parmi les affaires qui font l'objet d'un vote.

Il n'est donc pas nécessaire à mon avis que le processus de création et d'approbation des lois se déroule en dehors de la Chambre.

[Français]

M. Langlois: Si, par exemple, 60 députés des partis représentés à la Chambre donnent leur appui à un projet de loi, celui-ci devrait automatiquement être votable et ne pas être assujetti à la loterie ou faire l'objet d'autres tractations. Est-ce que le principe vous plaît?

[Traduction]

M. Bryden: Oui, je crois être celui qui l'a proposé. Je ne sais pas s'il s'agit exactement de 60. Il faudra en discuter. Mais je pense qu'il pourrait exister une procédure qui permettrait de sauter l'étape du tirage au sort si on obtient un certain appui initial de la Chambre.

J'aimerais faire une autre observation qui s'y rapporte indirectement. Je ne voudrais pas non plus que cette procédure pour les affaires émanant des députés devienne trop facile. Je suis persuadé que nous devons entretenir une certaine rivalité dans l'élaboration des affaires émanant des députés.

Si un député tient absolument à présenter un projet de loi, il devrait être prêt à ne reculer devant rien pour le présenter. Si la procédure est trop facile, cela incitera toutes sortes de députés à présenter des projets de loi frivoles ou auxquels ils n'ont pas travaillé, au détriment de nous tous.

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Il faut que cette procédure soit difficile et mise sur l'esprit de compétition. Cela ne présente aucun problème. Si nous pouvons nous battre pour nous faire élire, si nous pouvons nous battre dans nos circonscriptions pour conserver notre siège, nous pouvons également nous battre pour les lois dans lesquelles nous croyons.

La présidente: Vous êtes plus combatif que vous n'en avez l'air.

Jack, avez-vous quelque chose à ajouter?

M. Frazer (Saanich - Les Îles-du-Golfe): John, en ce qui concerne les 60 députés dont vous parlez, devrait-il s'agir selon vous de députés de plusieurs partis? En d'autres mots, faudrait-il que ces 60 députés représentent l'appui de l'ensemble des partis politiques?

M. Bryden: Non pas l'appui de tous les partis. Je pense que c'est un aspect auquel il faudra travailler car il faudrait recevoir l'appui de plus d'un parti, autrement on tomberait dans le sectarisme politique.

J'estime qu'il s'agit d'un principe important en ce sens que cette procédure offre la possibilité aux simples députés de participer à titre individuel au processus législatif. Il faudra trouver une formule, disons 60 députés mais qui représentent un échantillon de chaque parti. Il faudra cependant que vous débattiez entre vous la façon dont cet échantillon sera choisi.

Il y a un principe encore plus important, c'est qu'il s'agira d'un projet de loi qui traduira la conviction profonde du député qui le présente. Nous pourrons donc véritablement débattre entre nous des diverses possibilités de modification des lois existantes.

Cela nous ramène au problème de rivaliser directement avec le gouvernement. Notre régime des partis signifie que le gouvernement devra toujours se défendre. Supposons que les députés du Bloc québécois ou du Parti réformiste présentent un projet de loi ou une motion d'initiative parlementaire. Si cette initiative émane exclusivement d'eux, les députés ministériels auront toujours l'obligation de défendre le gouvernement contre la motion, peu importe son mérite.

Vous devrez donc trouver un moyen pour qu'un projet de loi d'initiative parlementaire bénéficie de l'appui de tous les partis. Je sais que c'est presque une hérésie.

La présidente: Merci beaucoup, comme toujours, John.

M. Bryden: C'est moi qui vous remercie.

La présidente: Nous allons maintenant poursuivre à huis clos pour que les avocats répondent à certaines de nos questions.

[Les délibérations se poursuivent à huis clos]

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