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INAN Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent des affaires autochtones et du Nord


NUMÉRO 123 
l
1re SESSION 
l
42e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le lundi 22 octobre 2018

[Enregistrement électronique]

  (1530)  

[Traduction]

    La séance est ouverte. Nos invités sont arrivés après un long voyage. Nous sommes impatients d'entendre leur histoire.
    Vous assistez à la séance du Comité permanent des Affaires autochtones et du Nord du Parlement du Canada. Conformément à l'article 108(2) du Règlement, nous effectuons une étude sur les projets et les stratégies d'infrastructure dans le Nord.
    Avant de commencer, nous voulons souligner que nous nous trouvons en territoire non cédé du peuple algonquin. C'est une manière de reconnaître notre héritage, notre histoire et notre objectif de vérité et de réconciliation.
    Vous disposerez de 10 minutes pour faire un exposé, que vous parliez seul ou partagiez votre temps. C'est libre à vous. Je vous ferai signe quand vous approcherez de votre limite. Essayez de vous en tenir à moins de 10 minutes pour éviter d'approcher de votre limite. Après les exposés, nous effectuerons des tours de questions des députés.
    Je tiens d'abord à souhaiter la bienvenue à une personne avec laquelle j'ai travaillé pendant de nombreuses années: le maire de la ville de Churchill, Michael Spence.
    Bienvenue devant le Comité.
    Merci. Je suis honoré de prendre la parole devant le Comité cet après-midi.
    À titre de maire de Churchill, je suis parfaitement conscient de l'importance des projets et des stratégies d'infrastructure dans le Nord. Il est crucial que les infrastructures soient améliorées dans le Nord afin de satisfaire les besoins des résidants, des administrations locales et des entreprises dans l'Arctique et la région subarctique. Nous jouons un rôle quant au cadre stratégique pour l'Arctique que le gouvernement fédéral est en train d'élaborer. En fait, notre communauté a tenu sa première audience il y a environ un an. Plus tard aujourd'hui, je témoignerai devant le Comité sénatorial spécial sur l'Arctique, comparution que j'attends avec impatience.
    Comme vous le savez, Churchill travaille depuis longtemps avec les Inuits de Keewatin, qui est maintenant la région canadienne de Kivalliq. Les Inuits vivent à Churchill et dans les environs depuis des milliers d'années et continuent de le faire aujourd'hui. Cette réalité constitue une facette importante de l'histoire de notre communauté subarctique et du Canada.
    Churchill a fait partie des Territoires du Nord-Ouest jusqu'en 1911 et était la capitale administrative du district de Keewatin jusqu'au début des années 1970. En fait, des étudiants de la région venaient à Churchill pour effectuer leurs études secondaires. Notre hôpital continue de servir la région.
    Le ravitaillement de la région venait presque exclusivement de Churchill, les denrées étant transportées pendant des décennies par le chemin de fer de la baie d'Hudson et le port, un lien qui existe depuis longtemps. Étant desservie par un port subarctique, un terminal ferroviaire et un aéroport, Churchill partage des objectifs communs avec ses voisins du Nunavut en ce qui concerne le développement des infrastructures du Nord et l'établissement d'une économie forte dans le Nord, tout en cherchant à protéger l'environnement et à préserver la biodiversité de l'Arctique. Nos infrastructures peuvent continuer d'avoir une utilité régionale et contribuer à la prospérité de l'Arctique. C'est là notre objectif.
    Comme la plupart des membres du Comité le sauront, Chuchill a récemment dû affronter la période la plus difficile de son histoire en raison de la perte du lien ferroviaire et de la mise à pied de travailleurs au port. Il y a environ un mois, cependant, le 31 août, le gouvernement fédéral a annoncé un investissement substantiel dans le port, le parc de réservoirs maritime et le chemin de fer de Churchill.
    Je m'en voudrais de ne pas souligner cet important investissement stratégique du gouvernement fédéral dans notre région. Il a en effet permis le transfert de ces infrastructures à un nouveau propriétaire du nom d'Arctic Gateway Group, un groupe de copropriété local du secteur privé. Il s'agit d'un partenariat sans précédent qui favorisera véritablement la prospérité dans notre région.
    Immédiatement après cette acquisition, on a commencé à réparer la voie ferrée, réparations qui en sont maintenant aux dernières étapes. Nous espérons voir arriver le premier train dans notre communauté dans deux semaines. Notre voie ferrée et notre port peuvent servir l'ensemble de la communauté de l'Arctique en la ravitaillant. Ils l'ont fait par le passé, et nous sommes impatients de rétablir ces importantes relations.
    En plus d'être desservie par la seule voie ferroviaire à se rendre dans l'Arctique, par son parc de réservoirs maritime et par son port, Churchill compte un aéroport qui joue un rôle crucial dans la chaîne d'approvisionnement et qui possède déjà des infrastructures d'envergure. Comme il a été construit à des fins militaires, il peut accueillir le plus grand avion de la planète. À l'heure actuelle, il est sous-utilisé, mais il possède un immense potentiel, pouvant servir le Nord en coordination avec la voie ferroviaire afin d'expédier des marchandises dans la région.
    Nous avons entamé des discussions avec le gouvernement fédéral en vue d'élargir d'utilisation de l'aéroport tout en établissant des liens avec le port et le chemin de fer dans le cadre des efforts que nous déployons pour créer une véritable porte d'entrée de l'Arctique. Nous ferons en sorte que l'aéroport puisse assumer un mandat élargi afin de servir les immenses besoins de l'Arctique, et nous sommes impatients de discuter avec les dirigeants et les résidants du Nord au sujet de l'initiative de l'aéroport de Churchill.
    Nous voulons agir à titre de partenaires dans le cadre des investissements futurs afin de faire le lien entre notre aéroport et les infrastructures portuaires et ferroviaires existantes. Il est tout à fait logique d'optimiser ces infrastructures pour le bien de toutes les communautés de l'Arctique. Nous considérons cette initiative comme un nouvel investissement stratégique. Le projet comprend notamment un entrepôt climatisé, un lien ferroviaire direct avec le tarmacadam, la création d'une chaîne d'approvisionnement intégrée et l'installation d'équipement de déchargement spécialisé.

  (1535)  

     Churchill peut jouer un rôle important afin de réduire encore l'insécurité alimentaire dans le Nord grâce à des investissements effectués pour faire diminuer les coûts du ravitaillement.
    La table ronde régionale de la baie d'Hudson, constituée des gouvernements du Manitoba et du Nunavut, des sept hameaux de Kivalliq, au Nunavut, des villes de Churchill et de Gillam, de la Première Nation des Dénés sayisi et de la nation crie du lac Fox, s'est efforcée de promouvoir les intérêts et le développement locaux. Nous avons tenu des réunions au Manitoba et au Nunavut au sujet de diverses initiatives conjointes.
    Parmi les principales priorités figurait le remplacement du diesel utilisé dans les communautés de Kivalliq. En 2014, après que la table ronde régionale de la baie d'Hudson eut présenté une proposition, une étude d'évaluation de la portée a été lancée en vue de construire une ligne de transport hydroélectrique entre le Nord du Manitoba et les communautés et les mines du district de Kivalliq. Cette initiative faisait suite à l'étude menée en 1999 par Manitoba Hydro, laquelle avait permis de déterminer qu'il existait un solide argument économique et environnemental en faveur de la ligne de transport, car cette dernière alimenterait la région de Kivalliq en énergie propre, fiable et abordable.
    L'association inuite de Kivalliq a utilisé ce rapport pour aller plus loin et a considérablement fait progresser le projet. Nous soutenons les efforts qu'elle déploie pour faire financer et réaliser le projet de ligne de transport et de fibre optique. Il s'agit d'un projet d'édification de la nation qui favorisera la croissance économique et l'utilisation de l'énergie propre, en plus d'améliorer considérablement l'accès à Internet dans la région de Kivalliq.
    Le gouvernement fédéral assume un rôle de leadership dans le cadre des efforts déployés pour réduire le recours aux carburants fossiles.
    Churchill est particulièrement bien placée pour améliorer les connaissances sur l'Arctique et la région subarctique, et pour protéger l'environnement. Son Centre d'études nordiques jouit d'une solide réputation pour son travail de recherche dans ces domaines. Quant à l'observatoire marin de Churchill, dont la construction se terminera l'an prochain, il s'agira du seul projet du monde voué exclusivement à l'étude des changements climatiques. Les autres infrastructures de Churchill, y compris le centre de santé, ont été construites pour servir la région et au-delà.
    Churchill, à titre de capitale mondiale de l'ours polaire, demeure une destination touristique internationale, tout en élargissant ses marchés pour l'observation du béluga et des oiseaux en été et des lumières boréales en hiver.
    En conclusion, nous sommes fiers de travailler avec nos partenaires de l'Arctiques pour combler le manque d'infrastructures dans le Nord afin de favoriser la croissance propre pour le bien de l'Arctique et de l'ensemble du pays.
    Je tiens à remercier le Comité de m'avoir invité ici cet après-midi. Je suis sûr que vous formulerez sur les infrastructures du Nord des recommandations qui contribueront à stimuler le développement économique de l'Arctique et de ses communautés. Le gouvernement fédéral a le pouvoir de réaliser le potentiel de notre région en appuyant le projet de ligne de transport et de fibre optique qui servirait Kivalliq, et en soutenant notre initiative visant à faire le lien entre nos voies ferrées et l'aéroport.
    Il est primordial de préciser que ces infrastructures sont situées dans notre communauté, mais qu'elles appartiennent à la région. Il faut que ce soit bien clair.
    Merci.

  (1540)  

    Merci beaucoup.
    Nous entendrons maintenant nos autres témoins, qui nous arrivent de Tuktoyaktuk.
    Avez-vous conduit jusqu'ici? Nous sommes enchantés que vous disposiez d'un nouveau lien routier, car c'est une longue route.
     Nous avons conduit une partie du trajet.
    Bienvenue à Ottawa et devant notre comité.
    Vous disposez de 10 minutes pour faire un exposé. Vous avez la parole.
    Je voudrais vous remercier tous de m'offrir l'occasion de parler une fois encore de notre cause. Je voudrais traiter de quelques questions, dont le port en haute mer pour la communauté de Tuk et la présence de gaz naturel dans la région. Ce n'est pas nécessairement juste pour Tuk. Si vous regardez où se trouve cette communauté, vous verrez qu'elle se trouve tout près de l'océan Arctique.
    Pardonnez-moi. Je devrais tout d'abord me présenter. Je m'appelle Merven Gruben et suis maire de Tuktoyaktuk.
    Je vais faire un petit retour en arrière. C'est en quelque sorte du déjà vu. En 2012, j'ai été invité ici pour parler à un comité. Je pense que c'était à peu près les mêmes personnes ou le même comité. Nous avons fait un si bon exposé à l'automne 2012 qu'en février 2013, notre ami M. Flaherty — qu'il repose en paix — a annoncé dans le budget que le gouvernement investirait 199 millions de dollars dans notre autoroute. C'est ainsi que l'autoroute de Tuk-Inuvik a vu le jour. J'ignore pourquoi nous l'appelons ainsi. J'aime l'appeler la route de Tuk. Ce n'est que le prolongement de la route de Dempster, construite sous le règne de Diefenbaker. C'est, comme elle devrait l'être, la route menant aux ressources.
    Quoi qu'il en soit, cette autoroute a été construite et, fait incroyable, Tuk a accueilli 5 000 touristes cette année. Les bonnes années, nous en recevions peut-être 2 500. Vous savez, tout le monde veut sauter dans l'océan, bien entendu. Cette route a tout changé.
    Oui, j'espère recevoir ici une réponse semblable à celle que le gouvernement fédéral nous a donnée en 2013.
    Comme vous le savez — ou peut-être pas —, le fleuve Mackenzie baisse continuellement. Le niveau d'eau diminue constamment, et l'expédition est de plus en plus imprévisible. Nous pouvons envoyer des marchandises de plus en plus tard au cours de la saison. Or, on ne peut expédier trop tard au cours de la saison, car le niveau d'eau est trop bas.
     Nous avons donc terminé l'autoroute de Tuk, après quoi j'ai proposé au gouvernement des Territoires du Nord-Ouest et à plusieurs autorités de faire venir les marchandises par camion tout l'hiver et d'entreposer ce dont nous avons besoin dans le Nord. Nous disposons des infrastructures d'entreposage, des réservoirs de carburant et des terres nécessaires, mais nous devons agrandir nos installations portuaires et peut-être draguer un peu l'entrée du port.
    Cette proposition a le grand avantage de nous permettre d'expédier les marchandises bien plus tôt aux communautés si on les fait venir tout hiver par la route. Paulatuk n'a pas reçu d'expéditions maritimes cette année et a tout fait venir par la voie des airs. Cambridge Bay et Kugluktuk n'ont pas reçu toutes leurs expéditions, mais Paulatuk n'a rien reçu, ni carburant, ni denrées. Elle fait maintenant tout venir par avion. Imaginez ce qu'il en coûtera au gouvernement au bout du compte. C'est nous qui lui expédierons les marchandises.
    Vous savez, il serait tout à fait logique d'exploiter ma proposition, mais cela tombe dans l'oreille d'un sourd.
    Je me suis rendu à Anchorage pour parler à un comité semblable au vôtre afin de proposer d'agrandir le port de Tuk et d'accroître la présence de la Garde côtière. Vous savez que le passage du Nord-Ouest est à proximité, au pas de notre porte. On peut voir les navires aller et venir, et il n'y a rien dans le Nord, dans notre région pour leur venir en aide si quelque chose tourne mal. Le nombre de navires de croisière et de bateaux de plaisance augmente, mais nous ne sommes pas préparés à intervenir. Trump essaie de rouvrir la Réserve faunique nationale de l'Arctique, qui se trouve tout à côté de nous. Si un incident survient, nous ne sommes pas préparés à intervenir. Nous ne sommes pas prêts.
    Depuis de nombreuses années, j'exhorte la Garde côtière à développer notre région, juste au cas où quelque chose se passerait, mais elle ne fait rien. En fait, elle a fait quelque chose: elle a construit un bureau à Inuvik, à 80 miles au sud, loin de la côte, ce qui n'aide personne. Comme je l'ai indiqué, j'étais à Anchorage, et aucun représentant de la Garde côtière canadienne n'était présent. Il y avait la Garde côtière des États-Unis et tous les représentants de la Défense nationale des Amériques, ainsi que quelques personnes d'Ottawa, et je les ai rencontrés. Nous nous sommes tous interrogés sur l'absence de la Garde côtière, qui avait pourtant été invitée.
    La situation doit changer. Vous savez, les navires de la Garde côtière affectés un peu partout dans l'Est de l'Arctique sont trop éloignés pour être efficaces ou pour aider qui que ce soit. La Garde côtière doit donc se raviser et venir travailler avec nous avant que quelque chose de vraiment grave ne se produise.
    J'ai parlé avec Michael McLeod, député de l'Ouest de l'Arctique, et il m'a dit «Oui, Merven, nous devrions faire quelque chose pour vous aider. »

  (1545)  

    Je conviens que les libéraux devraient nous aider. Ils ont mis fin aux activités de gazéification extracôtière et imposé un moratoire sur l'ensemble de l'Arctique sans même nous consulter. Ils ne nous ont jamais dit un mot.
    Nous sommes des gens fiers qui aiment travailler pour vivre. Nous n'avons pas l'habitude de recevoir de l'aide sociale et ce genre de soutien. Nous accueillons maintenant des touristes, mais c'est bien peu comparé à ce que nous tirions de l'exploitation pétrolière et gazière. Nos gens sont habitués à ce genre de vie. Ils n'ont pas l'habitude de vendre des babioles et des t-shirts. Mais les activités pétrolières et gazières reprendront, je pense, si vous nous aidez à améliorer le port pour le rendre plus attirant et un peu plus sécuritaire.
    Il y a des années, les anciennes compagnies Dome et Canmar, ainsi que Gulf et Imperial disposaient d'excellents ports. Ces ports étaient bons et très utilisables, mais ils se sont lentement détériorés au fil des ans. Tuk compte trois ports, dont un appartient au Service de transport maritime du gouvernement des Territoires du Nord-Ouest. Cela fait partie de la marine de Bob.
    Nous avons besoin d'aide à propos de ces infrastructures.
    Il faut également parler du gaz naturel. Nous sommes assis sur des billions de pieds cubes de gaz naturel. Il se trouve juste sous nos pieds, alors que nous faisons venir du diesel et de l'essence de loin. Inuvik reçoit son gaz naturel de Delta, en Colombie-Britannique, au prix de 35 $ le gigajoule, ce qui est complètement insensé.
    À Tuk, nous utilisons encore le diesel; pourtant, à 13 kilomètres de la ville se trouvent des billions de pieds cubes de gaz naturel. Nous n'avons besoin que d'un puits de production, puis d'ouvrir la valve dans l'usine de gaz naturel liquéfié, et nous serions approvisionnés.
    Certaines choses, simples pour nous, semblent très difficiles à comprendre et à réaliser pour le gouvernement. Il lui est tellement plus facile de continuer comme il le fait et d'expédier du carburant polluant dans le Nord. Tout le monde veut utiliser les turbines, les éoliennes et les conduites, mais ces technologies ne fonctionnent pas dans le Nord. On a essayé dans diverses régions, en vain.
    Je parle trop. Je dois laisser Jackie prononcer quelques mots, si vous le voulez bien.
    Monsieur Jacobson, vous disposez de deux minutes et demie.
    Merci, monsieur le maire et madame la présidente.
    Juste pour étayer les propos du maire, je soulignerais que nous disposons de beaucoup de ressources, mais de peu d'argent. Voilà la situation dans ma communauté de Tuktoyaktuk.
    Je suis ancien président et député de l'Assemblée législative des Territoires du Nord-Ouest. Depuis trois ans, j'ai vu la situation se dégrader, car nous dépendons trop des transferts du gouvernement. Les fonds que nous obtenons ne sont pas suffisants pour faire quoi que ce soit.
    Le plus important à faire, c'est de tenter de travailler ensemble pour construire un port en haute mer à Tuk en partenariat avec des entreprises privées d'un autre pays, et c'est en ce sens que les choses semblent aller. La China Communications Construction Company, une entreprise portuaire de Chine, est venue visiter le port de Tuk en vue de construire un port en haute mer.
    Comme le maire l'a souligné, nous disposons de 33 billions de pieds cubes de gaz naturel; pourtant, nous en faisons venir de Delta, en Colombie-Britannique, ce qui encombre les routes quand on le fait venir par le Yukon en 48 heures. C'est dangereux.
    Ce n'est pas qu'une question de sécurité. Comme le maire l'a indiqué, nous sommes fiers. Nous voulons faire les choses nous-mêmes et nous allons y parvenir, avec ou sans votre aide. Nous travaillons en ce sens. Nous voulons nous assurer de prendre soin des habitants d'Inuvialuit et de Tuk et de tous les jeunes, car ce sont eux qui y perdent actuellement.
    Tout le monde doit obtenir un diplôme et quitter la ville. Deux de mes enfants vivent au Yukon. Il n'y a pas d'emplois. C'est un facteur auquel vous devez penser.
    Il est si facile, assis ici, de juger les gens qui vivent à 3 500 kilomètres et de prendre des décisions en leur nom, particulièrement en ce qui concerne le moratoire imposé dans la mer de Beaufort. Ce moratoire devrait être levé, merci beaucoup. Cela permettrait de reprendre les activités et de donner des emplois, de la formation et tout ce que nous voulons à notre population.
    Notre gouvernement territorial n'intervient pas dans le dossier actuellement.
    Merci de m'avoir écouté. Je répondrai à vos questions avec plaisir.

  (1550)  

    Merci beaucoup.
    Nous pouvons tous entendre la passion dans vos voix et comprendre les occasions qui s'offrent à vous et à nous tous. Merci de vos exposés.
    Nous entamerons maintenant les tours de questions des députés.
    Nous accorderons d'abord la parole à M. Larry Bagnell.
    Merci, madame la présidente.
    Je vous remercie de vos exposés passionnés. C'est formidable que vous nous informiez de ce qu'il se passe vraiment sur place.
    Comme vous le savez, je suis le député le plus près de Tuk à part le vôtre. Je peux maintenant conduire jusque là maintenant, ce qui me remplit d'enthousiasme. Je ne suis pas encore allé à Tuk, mais j'adorerais emprunter cette route.
    Il faudrait la réparer avant.
    Réparer la route avant...
    Des voix: Ha! ha!
    L'hon. Larry Bagnell: C'est à ce sujet que je voulais vous poser des questions.
    Les changements climatiques mettent à mal les routes du Yukon. Il y a quelques semaines, j'ai annoncé un investissement de 2 millions de dollars dans les recherches scientifiques et l'équipement pour tenter d'atténuer les effets de ces changements sur le pergélisol, le soulèvement des routes et les problèmes de sécurité connexes. Je me demandais quelles sont les modifications que vous observez en raison des changements climatiques, fort de l'expérience que vous avez acquise en vivant là-bas depuis longtemps. Je m'intéresse particulièrement aux répercussions sur les infrastructures.
    On observe une fonte, un dégel considérable.
    Même dans les communautés?
    Comme vous le savez probablement, tout le cercle polaire fond, et on ne peut vraiment rien y faire. Un problème d'érosion touche les communautés et toutes les plages de l'Arctique.
    En ce qui concerne les infrastructures, les routes dégèlent, même dans nos communautés. Chaque année, elles s'affaissent. Nous continuons d'ajouter du gravier, et la situation est la même pour l'autoroute. Elle s'affaisse même en hiver. Le phénomène persiste toute l'année. Vous savez aussi bien que moi que la température ne descend plus à -40. Habituellement en janvier, février et mars, les températures se maintenaient carrément sous les -40, mais aujourd'hui, nous avons de la veine si la température est aussi basse certains jours.
    Ce dégel a-t-il des conséquences sur les fondations des édifices?
    Oui, mais toutes les maisons sont construites sur des pieux.
    En effet.
    Vous proposez quelque chose d'intéressant au sujet de la Garde côtière. Quel est le port d'attache de la Garde côtière ou de la marine le plus près de Tuktoyaktuk?
    Il y a une petite base secondaire à Tuk et une plus grosse à Hay River, mais il n'y a pas vraiment de base à Tuk. Il s'agit d'une station inhabitée où la Garde côtière n'entrepose essentiellement que des bouées et du matériel.
    En outre... je suis désolé, monsieur le maire.
    Larry, le bureau de la Garde côtière se trouve à Inuvik, laquelle, vous le savez, se trouve à 148 kilomètres le long du fleuve. Il n'est pas près de l'océan. Quand la Garde côtière vient à Tuk, elle remorque son bateau depuis Inuvik pour faire des exercices. Elle ne peut même pas naviguer jusqu'à l'embouchure du fleuve. Cette dernière est en piètre état en raison de l'envasement. La vase devra être draguée au cours des prochaines années, sinon, l'endroit sera impraticable. Il y a cinq pieds d'eau par endroit.
    La Garde côtière stationne donc à Inuvik plutôt qu'à Tuk.
    Oui. Mais quand elle vient par la route, elle doit transporter son bateau sur une remorque entre Inuvik et Tuk, puis le mettre à l'eau à Tuk avant de partir.
    Ce sont des bateaux de recherche et de sauvetage, soit dit en passant.
    D'accord.
    J'ai d'autres questions, mais je ferais mieux de laisser au témoin de Churchill la possibilité d'intervenir aussi.
    Tout d'abord, vous avez indiqué que votre ville a déjà fait partie des Territoires du Nord-Ouest. Le Yukon faisait partie de cet empire également, jusqu'à la ruée vers l'or, moment à partir duquel il est devenu le Yukon.
    Je veux simplement savoir ce que vous observez au chapitre des changements climatiques et des infrastructures dans la région. En envisageant un avenir lointain, j'ai toujours prédit que l'océan Arctique décèlerait plus rapidement que les scientifiques ne le prévoient. Pourriez-vous nous expliquer brièvement quelles occasions pourraient s'offrir dans la région une fois qu'il sera dégelé? Je suis certain que vous avez effectué des études sur les occasions économiques que présentent les expéditions à partir de Churchill.
    Voilà une question intéressante. Nous connaissons M. Barber, expert en matière de glace qui dirige les travaux sur les changements climatiques à l'Université du Manitoba. Dans l'exposé qu'il a effectué devant nous et d'autres personnes, il a indiqué que la baie et le détroit d'Hudson seront entièrement libres de glace d'ici 30 ans. La région pourrait donc accueillir un port ouvert à l'année. C'est un changement notable.
    Quand nous examinons la question, nous constatons que les changements climatiques présentent des défis, mais aussi des avantages. À Churchill, nous n'envisageons que des avantages, et c'est ainsi que nous voyons la situation.
    Sommes-nous enthousiastes à propos de l'avenir? Nous le sommes toujours, car il faut avoir une vision pour aller de l'avant. Nous nous réjouissons du dernier investissement du gouvernement fédéral, jugeant qu'il profitera non seulement à notre communauté, mais aussi à toute la région.
    Comme je l'ai souligné, ce qui importe vraiment, c'est le fait que nous parlions non seulement d'une communauté, mais aussi d'une région. Il y aura des retombées.

  (1555)  

     Qu'est-ce que vous expédieriez et vers quelles destinations?
    Nous ravitaillerions les communautés situées plus au nord que nous, par exemple, ou expédierions des produits, comme de l'engrais. Nous pourrions aussi envoyer du grain en Chine. Voyez ce qu'il se passe avec la Russie et la Chine le long de la côte nord. Ces pays du Nord bénéficient de retombées et d'investissements considérables, et nous devons commencer à agir en ce sens.
    Je pense toutefois que c'est un début. Nous sommes enchantés de ce que nous avons.
    Merci.
    J'ai une dernière question pour le maire Gruben.
    Je crois comprendre que 5 000 bateaux sont intervenus lors du déversement dans le golfe du Mexique. Pensez-vous que le gouvernement fédéral devrait investir davantage d'argent pour déterminer comment on peut récupérer le pétrole sous la glace, opération qui représenterait tout un défi? Je pense que nous devrions investir, mais considérez-vous que nous devrions le faire dans ces recherches?
    Certainement. Nous devons prévenir le coup.
    En ce qui concerne la grande réserve que possèdent BP et Imperial, les entreprises poursuivent les démarches en ce sens et cherchent toujours à mettre des techniques au point. Elles ont lancé un appel d'offres de 1,2 milliard de dollars à ce sujet, mais avec l'imposition du moratoire, elles ont tout arrêté.
    Au cours des quatre dernières années environ, nous aurions dû commencer à nous préparer à réaliser des recherches à ce sujet. Je propose que nous formions un groupe d'intervenants qui pourraient agir en cas de déversement de pétrole et construisions toutes les installations nécessaires dans notre communauté, d'autant plus qu'on peut maintenant utiliser la route toute l'année.
    Merci, madame la présidente.
    Nous accorderons maintenant la parole à Mme Cathy McLeod.
    Je remercie les deux témoins de comparaître aujourd'hui.
    Je commencerai par dire que mon conjoint fait partie des 5 000 personnes qui ont emprunté la route pour aller visiter votre communauté.
    Oh, formidable.
    Il n'a fait que se tremper un orteil dans la mer de Beaufort; je ne peux donc pas imaginer des gens y plonger.
    Certains étaient nus. Je ne pense pas qu'il était parmi eux.
    J'ai vu la photo de l'orteil en question.
    Je pense que cette anecdote nous amène à un point intéressant. Le tourisme est important, mais dans le cas de mon conjoint, il n'a passé qu'une journée sur place, dégustant peut-être un repas et une tasse de café. Il n'a donc pas eu tellement l'occasion de prendre le pouls de l'endroit.
    Vous avez parlé de la mer de Beaufort et du moratoire très arbitraire qui y a été imposé sur le forage à 20 minutes d'avis, alors que les premiers ministres ou les communautés n'avaient pas été consultés. Or, le gouvernement au pouvoir aime parler de consultation et de transparence entre les nations.
    Pourriez-vous nous expliquer les répercussions de ce moratoire sur vos rêves et les occasions qui s'offrent à vous?
    Comme je l'ai indiqué, notre région oeuvre dans l'industrie pétrolière et gazière depuis la fin des années 1800. Les premiers arrivants ont été influencés par les chasseurs de baleines. C'est alors qu'ils ont eu leur premier goût du boom pétrolier, boom qui s'est produit à quatre ou cinq reprises depuis. Nous travaillons très bien et sommes vraiment proactifs. Favorables au développement, nous voulons que les choses bougent.
    Depuis le moratoire, j'ai remarqué que bien des gens de notre communauté sont tout simplement... Nous avons eu la chance qu'au moment du moratoire, nous étions en train de construire la route de Tuk. Les gens étaient heureux; ils achetaient des maisons, des motoneiges, des camions et tutti quanti, alors que maintenant, la ville compte de nombreux assistés sociaux.
    Les jeunes appellent même la journée où ils reçoivent leur chèque le jour de la paie. Leur mentalité diffère totalement de celle de la génération précédente, alors que tout le monde avait honte d'être... On ne recevait de l'aide sociale que si on en avait besoin. Aujourd'hui, c'est le jour de la paie.
    Comme je l'ai souligné, nos gens aiment travailler. Ils veulent travailler, mais le moratoire leur a porté un coup dur. Il n'y a absolument aucune activité dans le secteur pétrolier et gazier à l'heure actuelle, à part les travaux préliminaires relatifs à la gazéification du gaz naturel au puits M-18. C'est un projet auquel nous travaillons actuellement, mais nous avons besoin d'un petit coup de pouce supplémentaire.

  (1600)  

    Il n'aura peut-être pas une grande incidence sur le territoire, mais le projet de loi C-69 est actuellement à l'étude au Parlement.
    C'est encore une mauvaise nouvelle.
    Certains affirment qu'il sonnera le glas des pipelines et de l'exploitation. Vous semblez le connaître.
    Je le connais certainement.
    Ce ne sera qu'un autre clou dans le cercueil d'un grand nombre de projets d'infrastructure et d'exploitation du pétrole et du gaz auxquels nous travaillons dans le Nord. Les obstacles sont déjà si nombreux. On ne peut rien faire là-haut. On a presque besoin d'un permis pour aller à la salle de bains... le long de l'autoroute.
    Il existe déjà de nombreux obstacles, et cela ne fait que ralentir des choses. Je pense qu'il y a déjà assez de gens qui s'occupent de la gestion de l'environnement et des terres en vertu de la lettre d'entente interministérielle. Ils s'occupent déjà de la question. Nous n'avons pas besoin de complications supplémentaires pour ralentir des choses.
    Tout le monde devient vert ici. Or, nous allons devenir verts en raison de la famine très bientôt.
     Au projet de loi C-69 s'ajoute un moratoire arbitraire. Je crois comprendre que toutes les grandes organisations inuites ont abandonné le programme Nutrition Nord Canada parce que les échanges n'allaient pas très bien et que le gouvernement ne faisait pas grand-chose en dépit de ses belles promesses.
    Je pense que le gouvernement précédent disposait d'un cadre stratégique raisonnable pour l'Arctique. Un nouveau gouvernement peut vouloir le modifier, mais il me semble que nous y travaillons depuis trois ans en repartant depuis le début.
    Je n'ai rien vu de la part du présent gouvernement. Il ne nous a pas du tout aidés.
    Avez-vous été consultés à propos de ce nouveau...
    Non. Je n'ai aucune idée de ce dont vous parlez.
    Jackie?
    Il n'y a eu aucune consultation.
    Nous pourrions avoir quelque chose qui sera présenté bientôt, un cadre stratégique pour l'Arctique, mais vous n'avez pas eu la moindre...
    Je ne connais pas ce cadre, non.
    D'accord.
    Jackie, allez-y.
    Merci.
    En ce qui concerne les propos du maire, nous n'avons reçu absolument aucune aide depuis le moratoire. La route est maintenant construite, mais il n'y a pas de financement afin de construire un restaurant pour acheter du café ou un hôtel à Tuk. Il n'y a que des gîtes, alors que nous recevons plus de 5 000 visiteurs. Quand j'ai quitté Tuk en voiture avant-hier, j'ai croisé une autocaravane de 40 pieds qui tentait encore de se rendre à Tuk, alors qu'il fait -15 et que tout est maintenant couvert de neige.
    Cela étant dit, pour en revenir au moratoire, vous nous avez essentiellement lié les mains en ce qui concerne ce qu'il va se passer... ou pas, peu importe qui a agi. Je dis seulement que le moratoire doit être levé. Nous voulons travailler et assurer le bien de notre population.
    Comme le maire l'a indiqué, nous participons aux activités extracôtières depuis... Nous y prenions part dans les années 1970, 1980 et 1990 et le faisions avant sur la côte Est, là où se déroulait l'action dans les années 1980 à Tuktoyaktuk. Toute la technologie relative à la glace était utilisée à Tuk. De nos jours, toute la technologie de déglaçage est partout; c'est la même coque qui est conçue maintenant.
    Le casse-tête comprend énormément de pièces. On peut regarder en arrière et attribuer la situation à telle ou telle cause, mais au bout du compte, il faut simplement lever le moratoire pour nous donner des occasions d'agir. Vous n'entendez peut-être pas notre gouvernement territorial s'exprimer pour nous, disant qu'il faut lever le moratoire, mais il faut qu'il le soit pour les gens que nous représentons, pour la population de Tuktoyaktuk. Si vous autorisez l'exploitation du pétrole et du gaz, cela aura une incidence sur les neuf communautés voisines de Tuk.
    Le maire de Churchill a affirmé que nous allons avoir une incidence sur neuf communautés. Même au Nunavut, les gens de Kugluktuk venaient toujours à Tuk pour travailler, car nous disposons d'un aéroport. Yellowknife est comme un immense aspirateur. En raison de la mine de diamants, tout va bien pour elle. Les gens vont bien, ils ont des emplois. Ce sont les habitants des petites communautés de la région de Nunakput et des communautés situées le long de la côte qui sont en difficulté. Nos jeunes vont mal.
    Vous vivez dans le confort ici, mais si vous venez à Tuk et visitez les lieux, vous verrez nos jeunes. Nous avons besoin de l'aide du gouvernement pour lever le moratoire.

  (1605)  

    Merci.
    Nous passons à Rachel Blaney.
    Merci d'être des nôtres aujourd'hui.
    Je vais d'abord m'adresser à vous, monsieur Gruben, si vous le permettez. Vous nous avez notamment parlé des problèmes d'envasement. Pouvez-vous nous donner de plus amples détails à ce sujet? Est-ce attribuable aux changements climatiques? Vous avez indiqué qu'il fallait faire du dragage. Pouvez-vous nous expliquer un peu mieux ce qu'il en est?
    L'envasement est un phénomène naturel. Les rivières se sont toujours envasées. Auparavant, lorsque le gouvernement s'occupait des transports dans le Nord, on procédait fréquemment à du dragage, au moins à tous les deux, trois ou quatre ans. Le gouvernement avait alors ses propres navires de drague.
    Après avoir fini de se retirer progressivement du secteur, le gouvernement a vendu tous ses équipements. Personne ne fait désormais de dragage.
    Je représente une circonscription plus au sud où tout le monde se barricade à la maison, faute de savoir comment réagir, dès qu'il tombe quelques centimètres de neige. J'ai grandi dans une localité plus au nord, mais c'est ainsi que les choses se passent actuellement. Il y a tout de même dans ma circonscription de nombreuses collectivités isolées. Les produits alimentaires et les ressources y coûtent plus cher parce qu'on doit les expédier par bateau ou par avion.
    Vous avez notamment parlé des difficultés associées à tout ce processus d'expédition. Dans quelle proportion le prix des produits qui doivent être envoyés par avion dans les collectivités augmente-t-il?
    J'ai un spécialiste avec moi. Il s'est beaucoup occupé d'expédition...
    Oui, je connais...
    ... mais je peux vous dire que le prix double tout au moins et triple parfois.
    Vous voyez ce que je veux dire. Dans notre cas, c'est pire encore.
    Je veux m'assurer que les membres du Comité comprennent bien cette réalité qui est la vôtre. Bon nombre d'entre nous n'avons pas vraiment idée des coûts supplémentaires que vous avez à assumer. Je veux être certaine que cela soit bien pris en compte dans notre rapport. Si vous avez des précisions à ce sujet, il serait bon que vous puissiez nous les transmettre.
    Pour un contenant de quatre litres de lait par exemple, vous allez sans doute payer environ 24 $ à Sachs Harbour. À Inuvik, c'est à peu près 13 $. Si l'expédition se fait par avion, le coût supplémentaire est censé être assumé par le gouvernement territorial sans que le consommateur n'ait à l'éponger.
    Il y a actuellement à Inuvik de la marchandise qui attend de pouvoir être expédiée par avion. Il faudra sans doute de deux à trois semaines de vols ininterrompus pour y parvenir. On aurait pourtant pu expédier cette marchandise par camion jusqu'à Tuk pour pouvoir la livrer deux mois plus tôt. On était trop concentré sur le temps de navigation pour le carburant. Je dirais que les coûts augmentent sans doute dans une proportion de 30 % à 40 %.
    M. Merven Gruben: Oui.
    C'est parfait. Merci.
    Vous avez aussi parlé de la Garde côtière. Je serais curieuse de savoir une chose, car je fais aussi partie d'un autre comité, celui de la défense nationale. Nous avons reçu des militaires de différents grades, surtout dans la marine, qui nous ont parlé de ces touristes qui se rendent tout simplement là-bas en pensant que toutes les glaces ont fondu et qu'il n'y aura aucun problème. Comme ce n'est pas vraiment le cas, les services de recherche et sauvetage doivent intervenir.
    Je me demandais si vous deviez composer avec des problèmes semblables, car vous avez indiqué avoir vraiment besoin de services de recherche et sauvetage et du soutien de la Garde côtière sur place. Est-ce que cela fait partie des difficultés que vous devez surmonter?
    Nous avons encore un spécialiste avec nous. Il fait partie des Rangers également. Ils font beaucoup de recherche et sauvetage.
    L'an dernier, 23 voiliers ont visité le port de Tuk.
    Ah oui!
    Certains d'entre eux étaient de passage en provenance d'aussi loin que les Bahamas.
    Pour ce qui est de la Garde côtière, on a amorcé la mise en place d'un service auxiliaire, mais ce n'est pas encore chose faite. Ils en sont seulement à gréer leurs bateaux et à l'étape des préparatifs de toutes sortes. Je leur souhaite la meilleure des chances, mais je dois dire que je fais partie des Rangers canadiens depuis une vingtaine d'années maintenant. Je suis sergent de notre patrouille. Nous menons toutes les opérations de recherche et sauvetage en collaboration étroite avec la GRC.
    Oui, ce sont eux, et non la Garde côtière, qui mènent toutes les activités de recherche et sauvetage.
    Voilà qui est intéressant.
    Vous avez dit avoir été exclus du processus de consultation en indiquant que vous ne saviez même pas quelle forme il prenait. À votre point de vue, comment devrait se dérouler un processus de consultation véritablement significatif?
    Vous voulez dire concernant le moratoire?
    Oui.
    Il faut simplement qu'il soit plus ouvert.
    Oui, c'est ce que nous avons toujours réclamé. Si nous avions eu notre mot à dire, il n'y aurait jamais eu de fermeture, car nous avions à l'époque de nombreux projets de forage en mer. Alors, quand on décide d'imposer un moratoire pour l'ensemble de l'Arctique... C'était vraiment une décision stupide. Le gouvernement a envers nous l'obligation de permettre à nouveau les activités de forage et de tout au moins amorcer la formation. Il faut que nous formions nos gens.
    Comment selon vous un processus de consultation pourrait-il être plus significatif? Je comprends que vous nous indiquiez ce que vous auriez voulu qu'il arrive alors que l'on en a décidé autrement... Comment auriez-vous souhaité que les choses se passent?
    Eh bien, il faut que l'on vienne chez nous pour entendre ce que nos gens ont à dire.
    Il faut permettre aux intéressés et aux groupes à l'origine des revendications territoriales de s'exprimer, plutôt que de fonctionner comme on l'a fait. Ce n'est pas la bonne façon de faire les choses.

  (1610)  

    Toute la région a été abandonnée. Absolument personne de notre communauté... J'ai des amis dans toutes les autres collectivités. Personne n'a été consulté.
    Voilà qui m'étonne.
    Vous avez également glissé un mot de l'utilisation du diesel et des préoccupations que cela vous cause. J'aimerais savoir de quand datent vos infrastructures pour le diesel. D'autres témoins nous ont parlé du vieillissement de ces infrastructures et des inquiétudes qui en découlent dans certaines situations où il faut réagir à une coupure d'électricité en plein milieu de l'hiver.
    J'aimerais donc que vous nous parliez de l'état actuel de vos infrastructures pour le diesel.
    La centrale électrique est quand même relativement récente, elle date peut-être de 15 ou 20 ans...
    L'hon. Jackie Jacobson: Oui.
    M. Merven Gruben: ... mais il y a toujours des coupures d'électricité pendant l'hiver. C'est inévitable. Il y a sans cesse des tempêtes qui finissent par venir à bout des lignes électriques; c'est incontournable. J'ai une génératrice d'urgence pour ma maison. Nous savons qu'il y aura des pannes d'électricité, mais c'est la même chose pour toutes les collectivités.
    Le passage au gaz naturel devrait nous permettre d'alimenter les génératrices pour l'ensemble de la collectivité tout en continuant à miser sur l'électricité pour le chauffage et l'éclairage de toute la ville. Il va continuer à y avoir des lignes qui seront détruites et des pannes de toutes sortes, bien évidemment, mais nos génératrices utiliseront un combustible plus écologique. Voilà de nombreuses années déjà que nous consommons du diesel. Je ne sais pas trop pourquoi, car nous avons sous les pieds des billions de pieds cubes de gaz naturel...
    J'ai une brève question. Bien des gens nous ont parlé des problèmes de logement dans leur collectivité. Est-ce que vous vivez la même chose?
    Oui, vraiment. Nous manquons de logements à tous les points de vue. Nous avons des enseignants qui doivent vivre...
    Il manque 2 300 maisons dans notre territoire.
    Oui, et il nous en faudrait sans doute une centaine de plus dans notre localité. Nous avons des enseignants qui vivent dans des logements insalubres. Nous n'arrivons tout simplement pas à construire assez rapidement des logements abordables. Jackie et moi avons la chance de posséder notre propre maison, mais la construction est coûteuse, sans parler des frais d'entretien par la suite.
    Merci.
    Merci.
    Nous passerons maintenant à M. Rusnak.
    Merci, madame la présidente.
    Monsieur Gruben, vous avez beaucoup parlé de l'interdiction du forage dans la mer de Beaufort. Pouvez-vous nous dire s'il y a eu beaucoup de travaux de forage à cet endroit entre le début des années 2000 et 2014?
    J'ai sous la main un article indiquant que Royal Dutch Shell et quelques autres entreprises s'étaient retirées. Vous avez précisé que le prix devait être d'au moins 150 $ le baril pour que les projets soient économiquement viables dans la région. Est-ce que beaucoup de projets étaient en cours avant le moratoire?
    Jackie pourrait mieux vous répondre...
    Oui, merci, monsieur Rusnak.
    Lorsque Royal Dutch Shell s'est retirée de l'Arctique de notre côté de la mer de Beaufort, on est parti avec la plateforme Kulluk qui devait forer dans la mer des Tchouktches. C'est le seul impact que nous avons ressenti à compter de 2007. Pendant quatre ans, soit de 2004 à 2007, l'entreprise travaillait uniquement à la remise en état de cette plateforme de forage.
    Ils y étaient jusqu'en 2007.
    D'accord. Alors, ils ont quitté après 2007.
    Oui. L'entreprise a déménagé la plateforme du côté de l'Alaska, et il n'y avait pas assez de puissance...
    Y a-t-il beaucoup d'activités de forage du côté alaskien?
    Il n'y a pas de forage actuellement. On est censé le permettre dans la mer des Tchouktches. De véritables progrès sont réalisés, mais du côté de Tuk...
    Je suppose qu'il est extrêmement coûteux d'exploiter des puits de pétrole et de gaz dans la mer de Beaufort ou n'importe où dans l'Arctique. Je suis du nord-ouest de l'Ontario. Je sais qu'il est beaucoup plus dispendieux d'exploiter des mines dans le nord-ouest de l'Ontario que c'est le cas, par exemple, dans le nord du Minnesota, une région pourtant pas tellement éloignée. Il faut toutefois beaucoup investir dans les infrastructures pour les équipements, les travailleurs et tout ce qui est nécessaire sur place. Il faut que les prix atteignent un certain niveau, aussi bien pour les minéraux que pour le pétrole, pour qu'une telle initiative soit économiquement viable.
    Je vous soumets donc que le forage n'était pas économiquement viable jusqu'en 2007, et c'est la raison pour laquelle Shell s'est retirée.
    Shell est partie parce que l'entreprise voulait faire du forage dans la mer des Tchouktches. On préparait la plateforme en prévision de cela.
    D'accord.
    Est-ce que la région, ou encore le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest ou le hameau de Tuktoyaktuk, avait d'autres plans? J'écoutais ce que disait le maire Spence de Churchill, et nous en avons discuté brièvement. Je sais aussi que notre présidente représente le Manitoba.
    Je suis ravi d'entendre que Churchill prend une direction différente. Auparavant, Churchill était en concurrence directe avec le port de Thunder Bay pour le transport des céréales. La ville s'est donnée un plan pour devenir un centre de service pour le Nord avec les investissements nécessaires dans les infrastructures requises — ce qui lui permettra de s'affranchir des subventions du passé pour viser la rentabilité — et je crois que tous les Canadiens peuvent être fiers de cette initiative et lui accorder leur appui.
    C'est une nouvelle réjouissante même pour un député représentant Thunder Bay, ville dont le port était en concurrence directe avec le vôtre auparavant. Pouvez-vous nous en dire plus long sur les plans établis par Churchill pour devenir un centre de service régional et au sujet des infrastructures dont la ville aura besoin pour profiter de ce débouché économique?

  (1615)  

    Nous avions surtout besoin en fait... Nos infrastructures commençaient à être désuètes. L'ancien propriétaire n'avait pas réinvesti.
    Nous avons mobilisé un groupe de localités du littoral de la baie d'Hudson de même que des collectivités plus au nord dans le district de Kivalliq. Nous avons été mis en contact avec Fairfax et AGT en vue de l'établissement d'un plan à long terme mettant l'accent sur la prise en charge par la région de telle sorte que les investissements essentiels puissent se poursuivre.
    Tout ce travail nous a vite amenés à nourrir de plus grandes ambitions. Il ne faut pas oublier encore une fois que les équipements dans lesquels on a investi à Churchill dans les années 1940, 1950, 1960 et 1970 ne visaient pas à répondre uniquement aux besoins de la ville. Ils devaient servir au transport des produits agricoles des Prairies vers le reste du monde, soit des endroits comme le Mexique, le Brésil, l'Europe et la Russie.
    Nous adoptons la même approche aujourd'hui. Nos partenaires stratégiques ont les ressources nécessaires... Avec l'aide de ces intervenants de l'industrie, nous allons nous tourner vers le Nord.
    Il est essentiel de noter que nous avions déjà les infrastructures requises. Elles avaient seulement besoin d'un peu d'attention, et c'est ce que nous nous employons à faire. Nous avons une très grande piste d'atterrissage. En fait, il s'agit de deux pistes qui ont été dessinées par les militaires américains dans les années 1940 et 1950. Elles permettaient de desservir le Nord. Il arrive parfois qu'il y ait des dédoublements. Le problème avec les infrastructures, c'est qu'en l'absence de nouveaux investissements, elles perdent leur utilité pratique. Nous avons toutefois maintenant des partenaires stratégiques et nous sommes prêts à réinvestir dans nos infrastructures.
    Je peux vous dire que la mise en oeuvre d'un programme comme Nutrition Nord ne va pas sans certaines difficultés, étant donné les coûts élevés...
    Il faut permettre aux différentes régions du Canada d'avoir un rôle à jouer en misant sur les emplacements clés comme Churchill et Tuk.
    Merci pour cette réponse, monsieur Spence.
    Je veux maintenant m'adresser à M. Jacobson. Avez-vous un plan comme celui de Churchill? Est-ce quelque chose...
    Nous avons déjà un plan.
    Et vous cherchez des partenaires pour investir. D'accord, il y a donc un plan.
    J'ai également appris que la ministre des Affaires du Nord et le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest ont convenu il y a deux semaines de procéder à un nouvel examen du moratoire. Étiez-vous au courant?
    Oui.
    Un nouveau processus de consultation est mis en place et l'on cherche à s'entendre sur un mode de fonctionnement.
    Êtes-vous heureux que l'on se penche ainsi sur la pertinence du moratoire?
    Si l'on nous permet de participer, ce sera effectivement une bonne chose.
    Une voix: Et si le moratoire est levé...
    D'accord. Merci.
    C'est tout le temps que vous aviez.
    Puis-je répondre?
    Non, vous ne pouvez pas répondre Don. Désolée.
    J'ai bien essayé, mais...
    Elle essaie surtout de me couper la parole.
    Espérons que vous aurez l'occasion de vous reprendre au prochain tour de questions.
    Nous poursuivons avec M. Viersen.
    Merci d'être des nôtres aujourd'hui. Est-ce que vous vouliez répondre...? D'accord.
    Si je comprends bien, pour rentrer à Churchill vous prenez l'avion, le bateau ou le train. Il n'y a pas de route qui mène à votre ville.
    On vient de terminer la route qui se rend à Tuk. Est-ce une option que Churchill envisage?

  (1620)  

    Si l'on remonte à 1999, je crois, nous étions visés par une étude en vue de la construction d'une route qui devait relier le Manitoba et le district de Kivalliq au Nunavut. Lorsque des consultations ont été menées dans notre localité, nous avons appris à notre grand étonnement que les gens souhaitaient avoir une route.
    Je pense qu'il faut surtout considérer que nous avons un chemin de fer pouvant être utilisé à moindre coût, si bien que le projet de route peut attendre.
    Ce n'est pas vraiment un problème pour vous.
    Ce n'est pas un problème actuellement, mais cela pourrait le devenir.
    Oui.
    Y a-t-il beaucoup d'activités en cours pour l'exploitation des ressources aux environs de Churchill?
    Non, les projets d'exploitation sont réalisés plus au nord, soit dans le district de Kivalliq. Des investissements vraiment considérables sont consentis à cette fin dans cette région du Nunavut.
    Je me souviens de m'être rendu là-bas dans les années 1990 et au début des années 2000. Il y a certes un essor considérable du développement dans cette région, et c'est formidable pour eux.
    Dans quel secteur?
    Les mines d'or et de diamant.
    Y a-t-il de l'activité dans le secteur pétrolier aux alentours de Churchill? Est-ce qu'on fait du forage en mer dans la baie d'Hudson ou...
    Non, pas à notre connaissance. Il y a seulement de l'exploitation minière juste au nord de notre secteur.
    Je suppose que c'est un peu la même chose pour l'exploitation forestière.
    Il n'y a plus d'arbre.
    Des voix: Ah, ah!
    Ils ont tous brûlé l'an dernier.
    M. Merven Gruben: Nous n'en avons jamais eu.
    M. Arnold Viersen: Comme j'ai pu le constater dans le nord de l'Alberta, la présence de l'industrie pétrolière et les activités d'exploitation forestière, tout particulièrement, sont à l'origine de la construction de routes, de la connexion à Internet et de l'accès aux services de téléphonie cellulaire. Avez-vous pu observer le même phénomène avec le secteur pétrolier dans votre région? Ces entreprises n'ont-elles pas simplement exigé que tous ces services soient mis en place de manière à pouvoir compter, quoi qu'il advienne, sur des outils de communication et des routes pour acheminer leur équipement jusque là-bas?
    Il est bien certain qu'elles nous ont aidés à obtenir ces choses-là, mais nous sommes désormais laissés à nous-mêmes.
    Vous disiez qu'il y avait des ports privés à Tuk.
    Oui.
    Comment les choses se déroulent-elles?
    C'est justement à cet égard que nous voudrions de l'aide pour procéder à certaines mises à niveau. Il y a deux ports privés et un autre qui appartient au gouvernement. Il y a aussi Esso qui est installé en face.
    Esso a un... Est-ce que c'est ce que vous êtes en train de nous dire?
    Leurs installations sont de l'autre côté du havre, mais ils laissent tout à l'abandon.
    Ce sont donc des infrastructures qui seront bientôt désuètes.
    Nous voulons remettre à niveau les installations de notre collectivité pour être prêts en vue du retour de BP et d'Imperial. Si nous remettons nos infrastructures en bon état, il deviendra facile pour l'industrie de revenir en sachant qu'elle aura accès à ces équipements. Ce sera bénéfique pour nous. Ces entreprises vont revenir; il s'agit seulement de savoir quand.
    Selon mon ami d'en face, le manque d'investissement dans l'exploration pour votre région serait attribuable au prix du pétrole.
    Oui, mais il va recommencer à monter.
    Il doit y avoir d'autres obstacles qui se dressent devant les investisseurs.
    Bien sûr, il y a les militants environnementaux...
    Les militants environnementaux... ?
    Oui. Il y a des gens aux États-Unis qui paient ces militants pour qu'ils viennent jusque chez nous faire du grabuge et interrompre les activités d'exploitation. C'est essentiellement ce qui arrive. Je me suis rendu plusieurs fois aux États-Unis, et je sais comment les choses se passent là-bas.
    Avez-vous des documents permettant de prouver ce que vous avancez?
    Effectivement, et je peux vous les transmettre par courriel.
    M. Arnold Viersen: D'accord. C'est intéressant.
    M. Merven Gruben: Nous avons une rencontre importante... J'ai été invité à prendre la parole le 5 novembre prochain à Richmond en Colombie-Britannique. La Coalition nationale des chefs veut que j'aille là-bas pour traiter de ce sujet.
    D'accord.
    Y a-t-il quelque chose du côté de l'infrastructure des pipelines?
    Pas encore. Nous espérons pouvoir envoyer des sables bitumineux vers le nord, à Tuk.
    Vers le nord?
    Oui.
    D'accord.
    C'est plus facile de les envoyer vers le haut s'ils ne veulent pas les laisser aller vers l'ouest ou vers l'est.
    Oui, c'est vrai.
    C'est moins cher pour vous de le faire venir ici des Saoudiens.
    Le temps est écoulé. C'est un bon moment pour arrêter.
    La parole est maintenant à M. Yves Robillard.
    Non?
    Y a-t-il quelqu'un d'autre de votre côté? Mike?
    Certainement, pourquoi pas?
    Je peux prendre plus de temps.

  (1625)  

    En fait, je vais donner mon temps à Hunter.
    Merci, Mike et merci, madame la présidente.
    J'aimerais soulever quelques points.
    J'aimerais d'abord m'adresser à Mike.
    En ce qui concerne le soutien pour l'acheminement de l'hydroélectricité et de la fibre optique vers le nord dans la région de Kivalliq, David Ningeongan, de l'Association inuite de Kivalliq, a comparu devant nous la semaine dernière pour nous parler de ce projet. Vous êtes dans le milieu depuis longtemps. Je le sais. Nous étions tous les deux beaucoup plus jeunes à l'époque, à Churchill.
    Les répercussions économiques positives qu'un projet comme celui-là pourrait entraîner, non seulement dans la région de Kivalliq, mais également à Churchill et dans les collectivités le long de la ligne qui va vers le nord du Manitoba...
    Vous avez de deux à trois minutes.
    D'accord.
    En fait, la ligne de transmission se rend jusqu'à notre collectivité. C'est son point le plus au nord. Nous avons participé à la table ronde régionale de la baie d'Hudson, où nous avons discuté avec les collectivités qui sont plus au nord que nous, et nous avons indiqué que nous devions examiner la question de l'acheminement de l'énergie et de la fibre optique jusqu'à la région de Kivalliq. Nous appuyons grandement ce projet.
    Essentiellement, je crois que nous redonnons à la communauté. Nous faisons notre part pour appuyer ce que souhaite obtenir la région de Kivalliq. Comme je l'ai dit, nous avons de l'énergie, mais je crois qu'il est extrêmement important que nous continuions de collaborer avec notre collectivité voisine, afin que nous puissions tous en profiter. Naturellement, nous en profitons toutes les deux puisque nous sommes dans la province du Manitoba et que nous avons conclu un partenariat régional. Il y a des échanges dans les deux sens et c'est à ce moment-là que nous serons repayés. La collaboration est extrêmement importante dans notre cas.
    Merci.
    J'aimerais poser une question à mon bon ami Jackie. Je sais que Larry a parlé plus tôt des effets du changement climatique. Je connais les défis liés au transport de marchandises par barge de Hay River à l'océan Arctique et dans nos collectivités, y compris la vôtre, en raison du faible niveau d'eau dans le fleuve Mackenzie. Une grande partie de cette situation est attribuable au changement climatique.
    Vous parlez d'avoir un port à Tuk et d'amener des marchandises là-bas par camion et d'en expédier d'autres. Croyez-vous que ce serait une solution beaucoup plus fiable, en raison de la situation du fleuve Mackenzie?
    Merci, Hunter.
    Oui, ce serait plus fiable. Ce serait aussi plus stratégique et efficace, et on pourrait certainement réaliser des économies de coûts si un tel projet se concrétisait. De plus, le gouvernement territorial a des actifs là-bas qui offrent certainement la capacité de faire cela.
    Merci.
    Notre temps est écoulé. J'aimerais remercier tous les témoins d'être venus d'aussi loin pour nous parler des politiques et des besoins en infrastructure dans l'Arctique, et pour nous donner un aperçu de ce qui se passe dans leur collectivité.
    Nous suspendrons brièvement la séance, et nous accueillerons ensuite notre deuxième groupe de témoins.
    Meegwetch.

  (1625)  


  (1635)  

    Bienvenue, et merci de comparaître devant le Comité.
    Nous avons un témoin par vidéoconférence. Bienvenue. Nous vous remercions d'avoir fait le voyage entre votre collectivité et Winnipeg. Je sais que même ce déplacement représente une grande distance.
    Nous étudions l'infrastructure dans l'Arctique, et vous faites partie de notre deuxième groupe de témoins. Chaque témoin aura jusqu'à 10 minutes pour livrer son exposé. Ensuite, les députés vous poseront des questions.
    Pardon?
    Madame la présidente, j'invoque le Règlement.
    J'aimerais présenter une brève motion avant d'entendre les témoins. Comme vous le savez, le vérificateur général comparaîtra au sujet de deux chapitres. Nous avons eu des discussions officieuses, je crois, sur l'importance d'avoir des représentants des Services aux Autochtones et d'EDSC dans le groupe de témoins qui comparaîtra mercredi. J'aimerais seulement présenter une motion officielle à cet égard.
    Une motion pour demander aux représentants d'EDSC de comparaître à la réunion de mercredi.
    En partenariat avec le rapport du printemps du vérificateur général... et pour que la réunion soit télévisée.
    T.J., allez-y.
    Merci, madame la présidente.
    Techniquement, vous ne pouvez pas présenter une motion dans le cadre d'un rappel au Règlement.
    Vous avez raison, monsieur Harvey.
    Monsieur Viersen, allez-y.
    Madame la présidente, j'aimerais proposer la motion suivante: que les représentants du ministère comparaissent devant le Comité avec le vérificateur général, et que la réunion de mercredi soit télévisée.
    D'accord. C'est une motion valide.
    Monsieur Harvey, allez-y.
    Madame la présidente, je propose que le débat sur cette question soit ajourné.
    (La motion est adoptée.)
    D'accord. Je suis désolée de ce contretemps. Nous avons dû nous occuper des affaires du Comité.
    J'aimerais souhaiter la bienvenue à Madeleine Redfern, mairesse d'Iqualuit. Je crois que vous livrerez votre exposé en premier.
    Je tiens à remercier chaleureusement le Comité de m'avoir invitée à comparaître.
    J'aimerais préciser, pour le compte rendu, que je suis aussi présidente de l'Association des municipalités du Nunavut et vice-présidente du forum nordique de la Fédération canadienne des municipalités. De plus, je fais partie du conseil d'administration de cet organisme.
    Je suis très heureuse de comparaître devant vous aujourd'hui pour vous parler du sujet important de l'infrastructure dans le Nord. Je suis sûre que les membres de votre comité ont entendu — et savent bien — qu'il y a un déficit en matière d'infrastructure dans notre région nordique, surtout au Nunavut. En effet, jusqu'à récemment, il n'y avait jamais vraiment eu de stratégie complète relative à l'infrastructure nordique dans notre région du Nord.
    Il y a maintenant une stratégie sur le logement et l'itinérance au Nunavut, mais j'aimerais indiquer que même si ces stratégies régionales ont été mises en oeuvre par notre gouvernement territorial, elles n'ont pas inclus les municipalités dans le développement de ce processus, même si à l'époque, le ministre responsable s'était engagé à communiquer avec les municipalités afin de fournir des données essentielles à leur inclusion. De plus, l'Association des municipalités du Nunavut n'a malheureusement pas été approchée et n'a donc pas participé au processus.
    Néanmoins, il est intéressant de souligner que ces rapports contiennent des recommandations voulant que les municipalités, ainsi que l'Association des municipalités du Nunavut, soient responsables de mettre en oeuvre certaines de ces recommandations. Ce n'est pas la façon idéale d'élaborer des stratégies.
    Il n'y a aucune stratégie énergétique pour le Nord et aucune stratégie en matière de télécommunications pour le Nord. Même si on a récemment annoncé des corridors de transport dans le Nord, ces derniers n'incluent pas l'Est de l'Arctique.
    Manifestement, la plupart des municipalités sont très heureuses que le gouvernement fédéral se soit engagé à verser des milliards de dollars dans l'infrastructure de notre pays. Le Nunavut a signé une entente bilatérale intégrée qui fournit à notre région 566 millions de dollars sur une période d'environ 10 ans. Cela peut sembler être une grosse somme, mais 566 millions de dollars ne sont absolument pas suffisants pour répondre à nos besoins.
    L'entente bilatérale intégrée contient les mots « juste équilibre » et manifestement, à l'échelon municipal, nous avons tendance à interpréter ces mots comme signifiant une juste part et un droit de parole équitable, nous l'espérons, surtout en ce qui concerne l'infrastructure municipale.
    Vous savez probablement aussi que les municipalités canadiennes reçoivent de 9 ¢ à 10 ¢ de chaque dollar payé par les contribuables canadiens. Dans le sud du Canada, 60 % de l'infrastructure publique se trouve dans les villes. Au Nunavut, cette proportion atteint presque 100 %, car il n'y a aucune route, aucun chemin de fer et aucune ligne de transmission. Ainsi, l'infrastructure se trouve dans nos collectivités.
    Iqaluit, la capitale du Nunavut, est la seule collectivité qui reçoit des taxes foncières, car les 24 autres collectivités dépendent entièrement du gouvernement territorial pour leur fonctionnement et leur entretien, ainsi que leurs projets d'immobilisations. Iqualuit compte environ 8 000 résidants et 1 000 non-résidants, c'est-à-dire des gens qui ne résident pas dans la collectivité ou qui ne sont pas considérés comme des résidants de notre collectivité, mais qui sont néanmoins sur place. C'est surtout parce que l'hôpital se trouve dans notre collectivité et qu'un grand nombre de gens viennent d'ailleurs pour des raisons médicales. Nous avons également quatre établissements correctionnels, le seul tribunal, la Direction générale de la GRC, le plus grand des campus du Collège de l'Arctique du Nunavut — qui est sur le point d'être agrandi de presque 100 % —, l'Assemblée législative, la majorité des emplois au gouvernement du Nunavut et, même avec la décentralisation, nous avons également la majorité des emplois fédéraux. Pourtant, nous avons seulement 2 000 contribuables. C'est très peu pour aider la municipalité avec des projets d'immobilisations pour bâtir une infrastructure essentielle.

  (1640)  

    Nous avons un budget d'environ 45 millions de dollars par année, dont 85 % proviennent des taxes foncières et des frais d'utilisation. Ainsi, le gouvernement du Nunavut fournit seulement environ 15 % en subventions tenant lieu d'impôts.
    Nous sommes très reconnaissants du financement que nous recevons du Fonds de la taxe sur l'essence. Il représente environ 12 millions de dollars sur une période de cinq ans. C'est le plus flexible. Ce sont les fonds relatifs à l'infrastructure les plus faciles dont nous disposons. Le critère d'admissibilité a récemment été élargi. Nous recevons également un montant nominal de financement global de notre gouvernement territorial.
    Nous utilisons ces fonds pour nos projets d'infrastructure. Récemment, nous les avons utilisés pour rénover notre usine de traitement des eaux usées. Nous avons reçu environ 19 millions de dollars du gouvernement fédéral dans le cadre d'un projet de 26 millions de dollars. Nous recevons 26 millions de dollars pour fermer notre dépotoir et ouvrir de nouvelles installations de triage et de recyclage et un nouveau site d'enfouissement. C'est un projet d'environ 35 millions de dollars.
    En mai 2017, lorsque nous avons reçu la visite du ministre Sohi — à l'époque, il était le ministre responsable de l'infrastructure communautaire — nous venions d'inaugurer notre nouvel aéroport, un très beau bâtiment qui a coûté environ 300 millions de dollars au gouvernement territorial. La route qui se rend à l'aéroport était dans un état épouvantable. Au lieu de rencontrer le ministre dans mon bureau, je lui ai proposé une visite de la ville. Comme c'était le mois de mai, je peux vous dire que la route était dans un état lamentable, et le ministre a pu faire concrètement l'expérience de la mesure dans laquelle nous avions désespérément besoin d'asphalter cette route, ce qui coûterait seulement 1 % des 300 millions de dollars dépensés pour l'aéroport.
    Une partie du problème dans le cas d'un grand nombre de ces projets d'infrastructure menés par notre gouvernement territorial, même lorsqu'ils sont financés par des fonds fédéraux, c'est qu'actuellement, on n'exige pas qu'une évaluation de l'infrastructure municipale— et encore moins une évaluation des services municipaux — soit menée dans le cadre de ces projets. Même si nous sommes très reconnaissants d'obtenir un port en eau profonde, encore une fois, la route qui se rend au port est inadéquate et elle n'est pas sécuritaire.
    Le ministre a dit que nous pouvions faire une demande de financement. Idéalement, cela devrait faire partie de l'évaluation de l'infrastructure. Cela signifie que la route a dû attendre. Je n'aime pas avoir recours à l'embarras politique, car ce n'est pas comme cela que nous devrions pouvoir convaincre nos politiciens fédéraux ou territoriaux de nous aider.
    De la même façon, lorsque le ministre Garneau est venu à Iqaluit dans le cadre de la collaboration territoriale-fédérale sur le port en eau profonde, nous nous sommes assurés que chaque ministre en visite se rende au site. Aucun d'entre eux ne s'était rendu compte qu'il était situé près de notre dépotoir. Nous pensons que lorsque les touristes arriveront en navire de croisière dans le nouveau port et qu'ils entreront dans notre belle capitale, ils ne devraient pas voir tout d'abord une énorme pile de déchets. Je crois que cela a probablement aidé notre analyse de rentabilisation en vue de recevoir le financement dont nous avions besoin pour fermer le dépotoir et le dissimuler, afin qu'il ne ressemble pas à un dépotoir lorsque le port en eau profonde ouvrira en 2020.
    Nous avons également reçu environ 4 millions de dollars pour notre centre aquatique. Malheureusement, cela représente environ 10 % du coût de notre centre aquatique. À l'époque, nous n'avions pas pu obtenir plus d'aide du gouvernement fédéral. En effet, il n'avait pas encore débloqué des milliards de dollars pour l'infrastructure, et notre gouvernement territorial a seulement été en mesure de fournir environ 100 000 $ pour l'équipement de conditionnement physique. L'argent des contribuables et les frais d'utilisation paient pour cela.

  (1645)  

    Je ne voudrais surtout pas oublier de mentionner que le changement climatique est absolument en train de se produire. L'un des problèmes que cela nous pose, c'est que nos tuyaux se brisent. Nous avons dépensé des centaines de milliers de dollars pour réparer chaque tuyau, mais ce sont des réparations temporaires. Il faudrait des millions de dollars pour effectuer toutes les réparations nécessaires.
    C'est ce qui termine mon exposé, mais je suis certainement ouverte à répondre à vos questions, qui seront nombreuses, je l'espère.
    Merci.
    Je suis sûre qu'on vous posera des questions.
    Nous entendrons maintenant l'aîné George Kemp de Berens River, une collectivité qui a récemment été reliée par une route toutes saisons. Bienvenue — par vidéoconférence — à notre comité.
    Vous avez jusqu'à 10 minutes pour livrer votre exposé.
    Je m'appelle George Kemp. J'ai été chef de Berens Rivers de 2008 à 2014. Lorsque j'étais chef, j'ai réussi à négocier la construction d'une route toutes saisons qui relie Berens River au sud de la province. Je ne sais pas si vous avez reçu le document que j'ai envoyé par courriel, mais il contient une carte qui montre où se trouve Berens River.
    George, nous avons un problème technique. La carte que vous avez envoyée n'est pas traduite en français et nous ne pouvons donc pas la distribuer, à moins que nous obtenions l'accord de tous les membres du Comité. La décision revient donc aux membres du Comité.
    Tout le monde est d'accord? Très bien.
    Allez-y. Je suis désolée de l'interruption.
    J'ai inscrit tous les points sur la feuille que j'ai envoyée aujourd'hui. Mon exposé est sur papier, c'est-à-dire ce dont je vous parlerai aujourd'hui.
    La plus grande concentration de collectivités isolées du Manitoba se trouve dans la région du nord-est de la province, que vous pouvez voir dans le coin de la carte. Il s'agit de St. Theresa Point, de Garden Hill, de Wasagamack, de Red Sucker Lake, de Manto Sipi, Bunibonibee, d'Oxford House et de la route qui mène à Cross Lake. Vous pouvez voir sur cette page la population de cette région par réserve, c'est-à-dire 4 300 habitants à St. Theresa Point, 4 800 habitants dans la Première Nation de Garden Hill et vous trouverez le reste dans cette liste.
    Aujourd'hui, je veux faire valoir le point selon lequel le prolongement de la route toutes saisons de Berens River jusqu'à St. Theresa Point représente le plus grand besoin en matière d'infrastructure dans notre région. Je présente cette proposition ici aujourd'hui au nom du chef Hartley Everett de Berens River et du chef David McDougall de St. Theresa Point. Mon chef, Hartley Everett, et le chef de St. Theresa Point souhaitent présenter aujourd'hui une proposition concernant la ligne rouge que vous voyez entre Berens River et St. Theresa Point.
    Aujourd'hui, de 20 000 à 30 000 personnes vivent dans ce coin isolé du Manitoba. C'est la plus grande concentration de collectivités de Premières Nations vivant en région isolée au XXIe siècle. Cette population représente le futur centre de la région nordique du Manitoba. À une certaine époque, Thompson était le centre de la région nordique du Manitoba, mais la mine fermera ses portes en 2020. Les 20 000 personnes qui vivent ici sont coupées du monde extérieur.
    Dans mon document, j'ai cité une déclaration que j'ai faite lorsque j'étais chef. Dans cette déclaration, j'ai dit que l'isolement tue. Je veux dire que les taux de suicide élevés que nous observons dans nos réserves isolées du Nord découlent de l'isolement, de la pauvreté et du manque d'espoir pour l'avenir.
    Nous avons annoncé le projet de route à Berens River en 2009 et nous avons terminé le prolongement de la route en 2017. Nous n'avons eu aucun suicide, car les jeunes de notre collectivité étaient très enthousiastes à l'idée de cette route.
    Le même type de situation existe ici. Nous demandons aux membres du Comité d'accorder une priorité élevée à cette région. En effet, cette région est dans la circonscription du Canada qui a le taux de pauvreté le plus élevé chez les enfants. C'est également dans cette région qu'il y a le taux le plus élevé de prises en charge par les services aux enfants et à la famille.
    Tout cela est attribuable à l'isolement et à la pauvreté. C'est ce que nous observons ici. Nous vous demandons d'étudier cette proposition de projet de construction d'une route de 400 millions de dollars dans le cadre d'un modèle de PPP hybride pour construire ce segment de route entre Berens River et St. Theresa Point. Cela représente 270 kilomètres de route.
    Nous demandons également une liaison avec la Première Nation de Poplar River. Sur la carte, ce segment est appelé P4. C'est un segment de 95 kilomètres. Nous demandons 140 millions de dollars pour ce projet.
    Nous pouvons compter sur l'expérience acquise pendant la construction de la route à Berens River. Les deux collectivités ont l'infrastructure et la capacité nécessaires pour le dynamitage, l'excavation et le transport des roches pour construire la route. Le terrain et la topographie ne sont pas différents entre la Première Nation d'Hollow Water et Berens River et Poplar River et St. Theresa Point.
    Nous envisageons de lancer un projet qui peut être financé dans le cadre d'un modèle de PPP et d'obtenir la participation des collectivités concernées pour l'élaboration du projet, etc. Nous souhaitons demander au Comité de nous appuyer en ce qui concerne tous les points que vous voyez sur notre carte et la proposition que nous avons présentée aujourd'hui.

  (1650)  

    Je tiens à dire à ceux qui ne vivent pas isolés que, aujourd'hui, les répercussions de l'isolement sur notre société sont beaucoup plus pénibles qu'il y a 50 ans, parce que, grâce à l'accès général à l'Internet et au réseau WiFi, notre jeunesse, dans nos communautés, se sent exclue du reste du monde, qui lui est inaccessible. La route nous ouvre le Sud et elle donne l'espoir, l'espoir d'un avenir meilleur. C'est ce que cherche la jeunesse. Dans nos communautés, plus de 45 % de la population a moins de 45 ans.
    Je ne saurais trop insister sur le fait que cette route offre aussi le moyen d'échapper à une situation intolérable pour les habitants du nord-est du Manitoba. Elle conduira facilement à cette population concentrée, et vous pouvez le voir, elle conduit directement vers le sud.
    Au nord, vous pouvez voir des embranchements routiers, de routes essentiellement hivernales. C'est-à-dire pour traverser Thompson puis suivre la route 6. Eh bien, il faut 16 heures pour se rendre à Winnipeg par cette route, tandis que, en direction du sud via Berens River, il faut 8 heures. Le chemin le plus court vers le sud, par Berens River, est, comme vous voyez, situé entre St. Theresa Point et Berens River, parce que la route est déjà à Berens River.
    La route change tout dans les communautés. Son arrivée à Berens River y a apporté des changements positifs. Comme je l'ai dit, nous n'avons plus de problèmes de suicide comme avant. Touchons du bois; Dieu soit loué! Elle nous a apporté d'énormes changements. C'est comme le jour et la nuit. Les gens sont heureux. Heureux de leur route.
    La nation de la rivière Poplar en veut une, et furieusement, parce que nous sommes voisins et qu'elle constate les avantages que nous apporte la route.
    Pas plus tard que vendredi, le gouvernement de la province a annoncé des compressions de 2 millions de dollars dans les budgets d'entretien des aéroports de toutes les communautés du Nord. Par exemple, le chef et son conseil qui essayaient de se rendre par avion à Tadoule Lake en route vers la nation de Barren Lands, ont dû rebrousser chemin, faute de pouvoir atterrir, parce que, d'après le pilote, la piste était trop enneigée. Ils se sont retrouvés à Thompson.
    À Ottawa, chaque régime conservateur, c'est avéré, nous a fait descendre l'échelle. D'après nous, c'est l'occasion, pour le gouvernement libéral, d'aider notre région.
    Dans notre mémoire, ici, nous démontrons que la construction de la route coûtera maintenant le moins, en raison des faibles taux d'intérêt, de l'essence bon marché et ainsi de suite. Dans 30 ans, ses coûts seront simplement astronomiques. C'est le bon moment, c'est historiquement l'occasion pour le gouvernement libéral d'intervenir pour mettre fin à l'isolement ici, parce que nous constatons bien, étant une Première Nation, ce qui arrive sous un régime conservateur dans la province. Rien ne va. Tout ce qu'on nous réserve, c'est des compressions.
    Actuellement, les compressions touchant l'entretien des aéroports sont extrêmement inquiétantes. La rumeur veut que six aéroports soient actuellement à vendre à des intérêts privés.
    Nos gens dépendent de certains services. Le rôle du gouvernement est de les leur fournir et non de présider à des privatisations dans le Nord. Dans les communautés éloignées, c'est illogique.
    Nous vous demandons donc d'envisager le projet de route comme étant l'un des moyens les plus importants d'influer sur tous les aspects de la vie de nos gens dans cette région du Canada.
    Merci.

  (1655)  

    Merci beaucoup pour votre exposé.
    M. Robillard entamera la période de questions.

[Français]

     Merci, madame la présidente.
    Je remercie les témoins de leurs excellents témoignages.
    Je vais poser mes questions en français.
    En 1986 et en 1988, il y a donc 30 ans, j'étais au Nunavut. J'ai enseigné pendant deux ans à Kuujjuaq et à Akulivik. Je connais donc un peu le sujet dont nous allons discuter.
    Mes questions s'adressent à Mme la mairesse d'Iqaluit.
    Le Conseil national de développement économique des Autochtones stipule qu'il est plus difficile d'entretenir et de construire des infrastructures dans le Nord en raison de plusieurs facteurs, dont l'environnement et la courte période de construction.
    Comment allez-vous vous adapter à ces facteurs dans l'éventuelle construction d'un port en eau profonde à Iqaluit? Comment le gouvernement fédéral pourrait-il vous aider dans cette optique?

  (1700)  

[Traduction]

    Je remercie le député de sa question.
    Effectivement, le port en eau profonde d'Iqaluit permettra de décharger en moins de jours les navires qui nous arrivent entre le début de juillet et le milieu ou la fin d'octobre. Il ne sera pas ouvert toute l'année. Ce détail a échappé à bon nombre de nos politiciens fédéraux ou locaux. Nous en sommes conscients. Les transporteurs maritimes devraient économiser 75 000 $ par jour, ce que leur coûte un déchargement plus long. Idéalement, nous pourrions et nous aurions peut-être dû envisager la construction d'un port en eau profonde ouvert toute l'année, ce qui aurait exigé la construction d'une route. Cette nouvelle infrastructure aurait transformé non seulement Iqaluit, mais toute la région.
    Nuuk, notre communauté soeur au Groenland, est ouverte toute l'année. Ça lui permet de faire venir des matériaux de construction, de l'équipement de bureau et des marchandises et, bien sûr, des denrées, y compris périssables, toute l'année. Ici, ces denrées auraient pu être acheminées ensuite par avion vers les petites communautés de notre région. Nous saisissons bien les enjeux, parce que c'est mieux que de ne pas avoir le port projeté en eau profonde, mais je voudrais que nous cessions le saupoudrage, pour favoriser des projets qui transforment davantage les communautés, qui changeraient les choses, non seulement accélérer le déchargement des navires, mais qui transformeraient nos infrastructures, nos services et le coût de la vie pendant des décennies et des siècles, comme nous le voyons se produire dans d'autres pays arctiques.
    Merci.

[Français]

    Il existe trois types d'infrastructures particulièrement importantes dans le Nord: le transport, l'énergie et les télécommunications. Des investissements dans ces types d'infrastructures pourraient stimuler le développement économique.
    Iqaluit a un financement limité. Comment le gouvernement fédéral devrait-il établir l'ordre de priorité des projets à appuyer?

[Traduction]

    Merci.
    Il importe vraiment de réunir les personnes compétentes pour une discussion sur les investissements nécessaires à court, moyen et long terme dans nos infrastructures.
    Le problème que j'ai constaté, notamment à la faveur de mon travail auprès de la Commission de vérité de Qikiqtani, dans son enquête historique, est qu'il n'y a jamais eu de stratégies convenables pour aucune infrastructure.
    Tout est donc très dominé par la politique, découpé en périodes de quatre ans, pas toujours en fonction des besoins communautaires. Nous devrions réunir des fonctionnaires fédéraux, provinciaux et territoriaux, les élus municipaux, les représentants autochtones, nos sociétés de développement — et même les partisans du secteur privé qui veulent investir dans notre pays et la construction de notre nation — pour qu'ils évaluent les infrastructures. Quelles sont-elles? Quel en est l'âge et l'état? Quels sont les véritables besoins? Où sont les lacunes? Ensuite, nous doter d'une stratégie convenable, pour éviter le financement des projets non prioritaires et un point de vue uniquement régional, mais plutôt pour tenir compte de tout le territoire, de la totalité du nord des provinces, vu la portée interrégionale de certains projets, comme vous le savez. Pourtant, le financement n'obéit pas à ce schéma.
    Merci.

  (1705)  

    Il ne me reste qu'une minute 34 secondes. Si vous n'y voyez pas d'objection, je la laisse au suivant.
    Oh, voilà qui est révolutionnaire. J'ignore si nous pouvons le faire.
    Des députés: Oh, oh!
    La présidente: Monsieur Waugh.
    Je remercie nos deux témoins.
    En février, j'étais à Iqaluit. Il y fait très froid, et, en dépit du témoignage selon lequel la température ne descend pas à -40, il fait plus froid. Toute la semaine, il a fait -53.
    De toute façon, l'aéroport a changé la donne. Il est merveilleux. Grâce à lui, votre communauté est désormais la porte du Nord, du Nunavut particulièrement. Je tiens à vous féliciter. En même temps, j'ai visité le port ou ce qui était censé le devenir. L'été dernier, pour essayer de faire démarrer le projet, vous avez effectué quelques dynamitages.
    Où en sommes-nous dans ce projet? Beaucoup d'habitants, là-bas, n'ont pas l'impression d'avoir été bien consultés. Veuillez nous en parler, et des consultations qui n'ont pas vraiment eu lieu. Il y en a eu, mais j'épluche vos journaux et je crois comprendre que votre communauté s'est sentie un peu exclue, vu les promesses du port.
    Merci.
    Comme je l'ai dit plus tôt, le premier problème est que le port ne sera pas ouvert toute l'année. Ensuite, il y a la route qui y conduira et qui en partira. Puis les emplois locaux créés ou pas. Ensuite...
    À l'étranger...?
    J'essayais seulement d'être diplomate.
    Bon, dans ce cas je lâche le morceau.
    Des députés: Oh, oh!
    Les gouvernements se sont bornés au présent. Le port, de la taille projetée, ne répond pas à toutes les possibilités à venir, comme il le pourrait et comme il aurait dû, ce qui fait que tout, depuis le débarquement du poisson, qui a actuellement lieu au Groenland...
    Au Groenland et au Labrador...
    ... ou, dans le Sud, dans les Maritimes. Woodward, une compagnie du Labrador, est en très bonne position pour fournir des services supplémentaires de transport maritime, parce qu'elle peut le faire à meilleur marché.
    On aurait pu mieux s'y prendre. Encore une fois, nous devons cesser d'agir chichement, en faisant peu de consultations, en excluant des joueurs, en n'écoutant pas les gens, en sous-investissant, sans vision d'avenir. Ça ne répare pas grand-chose.
    Non. Est-ce qu'il sera inauguré en 2020?
    C'est l'objectif. L'entrepreneur fait beaucoup de dynamitages, tous les jours, presque 24 heures par jour, avant l'arrivée du mauvais temps. Malheureusement, je ne peux pas prévoir l'avenir.
    Je sais.
    Comme je l'ai dit, j'ai passé huit ou neuf jours là-bas, et il y avait beaucoup d'excitation. Les télécommunications... Vous avez absolument raison. Il n'y a pas de plan de télécommunications pour le Nord, pas de plan énergétique non plus, pas de plan des transports. Le logement est déplorable, et le problème doit être résolu par tous les gouvernements, pas seulement l'actuel, d'après ce que j'ai vu. J'ai visité sept ou huit communautés. J'ai parlé à des dirigeants de mines. Ils injectent des milliards de dollars — pas des millions, des milliards. Malheureusement... Eh bien, votre aéroport est maintenant très fréquenté, parce que ça arrive d'abord du Québec, en route vers Baker Lake ou ailleurs.
    Je tiens à interroger un autre témoin. Monsieur Kemp, vous avez un très beau site Web. Je l'ai visité. La route semble fantastique. Je vois qu'elle a coûté 200 millions. Elle a certainement ouvert votre région à l'extérieur.
    Je ne vois pas beaucoup d'emplois ni d'offres d'emploi. Le dernier, sur le site Web, ici, remonte au 7 septembre 2018, mais je vois que vous essayez vraiment d'encourager vos jeunes à terminer leurs études. Je tiens à vous en féliciter, mais il faut des occasions d'emploi dans votre région, comme vous l'avez dit. On compte de 20 000 à 30 000 habitants isolés, et c'est quand on s'ennuie qu'on s'attire des ennuis.
    Peut-être pourriez-vous nous parler des infrastructures. Vous avez dit que l'Internet est à peine accessible, s'il l'est, et c'est mentionné dans ce rapport.
    Avant de faire partie de ce comité, j'ai fait partie de celui du patrimoine. Nous avons essayé de brancher toutes les communautés d'ici 2020. Je sais que ça n'arrivera pas, certainement pas dans le Nord, mais qu'en est-il de votre région? Y a-t-il une chance que cette route amène des sociétés de télécommunications là-bas? Maintenant que Bell Média a pris le contrôle de MTS — il l'a racheté il y a un an et demi — votre région est-elle susceptible de recevoir le service?

  (1710)  

    Merci, monsieur Waugh.
    Oui. La route qui est arrivée à Berens River recouvrait un câble à fibres optiques. Notre chef et le conseil ont été en contact avec Bell Média, et le service devrait être fourni l'été prochain.
    À ce que je sache, il existe aussi une entreprise autochtone, Clear Sky Connections, qui caresse le projet de desservir toute la province. Je suppose qu'on pourrait dire qu'il y a de la concurrence à Berens River. Quand j'étais chef, Bell Média nous a dit que nous devions payer pour tout l'équipement monté dans une tour pour obtenir le service cellulaire. Il a changé de discours, mais je suppose qu'il a vu la menace. La concurrence a donc du bon.
    Espérons que, à l'achat de MTS, l'accord prévoyait la fourniture du service au Manitoba rural.
    Je suis à court de temps. Je tiens à vous questionner sur votre réunion du 3 avril, qui a porté sur le remplacement de votre pont. Vous y avez discuté de voirie et vos autres besoins, mais qu'en est-il de ce pont? Il semble y avoir beaucoup de consultations et de... Eh bien vous pouvez nous informer sur le remplacement du pont.
    D'accord. la route qui aboutissait à Berens River a été inaugurée l'année dernière, le 6 décembre, je crois. Le pont, qui permet de gagner la rive nord, est toujours là. Soixante-quinze pour cent de notre population habite la rive nord, et toutes les entreprises s'y trouvent. Notre pont date de 1982. C'est un ancien pont ferroviaire que nous avons acheté en Saskatchewan et installé nous-mêmes.
    Il est très étroit. La travée est surmontée de poutres, qui empêchent le passage des semi-remorques. Le nouveau pont devrait faire l'objet d'un appel d'offres pendant l'hiver, et la construction devrait débuter au printemps.
    Combien coûterait-il?
    Autour de 15 millions de dollars, je crois.
    D'accord. Qui paie?
    Services aux Autochtones Canada.
    Monsieur Waugh, votre temps est écoulé.
    Très bien. Merci.
    Il cherche à en obtenir plus.
    M. Kevin Waugh: J'essaie.
    Yves lui en a donné.
    Bon.
    Autour de Niki Ashton.
    Merci, madame la présidente.
    Je remercie nos témoins. Madame Redfern, je vous remercie de votre exposé. Monsieur Kemp, merci d'être parmi nous pour nous parler de votre travail, celui que vous avez accompli pendant de nombreuses années et celui qui reste à faire désormais, ainsi que de vos recommandations limpides. Je l'apprécie certainement.
    Ayant souvent circulé sur la route hivernale de Berens River, je peux seulement imaginer l'énorme changement apporté par la nouvelle route toute-saison. J'apprécie certainement les divers éléments que vous avez soulevés, surtout la question de vie et de mort, comme vous l'avez dit. C'est indéniable, quand on se fait dire que, depuis l'ouverture de la route ou même en attendant son ouverture, il ne s'est commis aucun suicide. Je pense qu'il est évident que nous avons besoin de construire des routes toute-saison dans le nord-est du Manitoba.
    Je me demande si vous pouvez nous faire part de vos réflexions sur le caractère indispensable de ce réseau de routes toute-saison, quand il s'agit de problèmes comme les feux de forêt. Cet été, nous avons bien sûr vécu une situation très stressante, à Little Grand Rapids, autre communauté qui était censée faire partie du réseau de routes toute-saison, où, à la dernière minute, les habitants ont vraiment été abandonnés à leur sort, jusqu'à l'intervention de l'armée. Les dirigeants m'ont bien expliqué qu'une route toute-saison aurait permis aux habitants de partir au moment choisi. Visiblement, nous avons encore besoin d'un plan d'évacuation d'urgence, mais une route aurait changé beaucoup de choses.
    Je pense qu'aucun citadin ou habitant de la campagne desservi par une route ne peut comprendre cette réalité.
    Pourriez-vous dire en quelques mots, comment ça aurait changé les choses dans cette situation aussi?

  (1715)  

    Merci, Niki.
    Vous avez vu ce qui s'est passé l'an dernier quand Wasagamack a dû être évacué. Il n'y avait même pas de route reliant le village à l'aéroport. L'aéroport, là-bas, est construit sur une île. En plein milieu de la nuit, ils ont dû évacuer le village de l'aéroport de St. Theresa Point. En cas d'urgence, les routes toutes saisons peuvent aider beaucoup à réduire les répercussions et le recours au transport aérien. Et ce n'est pas que pour évacuer les gens. Comme on l'a vu à Little Grand Rapids, quand un incendie éclate et crée des dommages dans une communauté comme celle-là, comment peut-on y emmener les équipes hydro? Comment peut-on transporter là-bas 1 200 réfrigérateurs et cuisinières parce que ceux qui étaient là contenaient des aliments qui ont pourri? Il y a toutes sortes d'autres conséquences qui se posent après le feu aussi. C'est le genre de choses qui se passe.
    Dans notre région, au nord de Berens River et d'Island Lake, il a fallu, en 1997, organiser un énorme transport aérien pour assurer l'approvisionnement de la communauté en nourriture et en carburant, quand les routes d'hiver ont dû fermer à cause du changement climatique. Chaque année, ce risque augmente. Nous n'avons encore revécu rien qui se rapproche des événements de 1997, mais un jour, nous n'aurons plus de routes d'hiver.
    On ne peut plus se fier à la glace de nos jours. Nos routes d'hiver traversent beaucoup de lacs et de rivières. Une catastrophe environnementale va finir par arriver, quand les camions-citernes vont commencer à transpercer la glace pour se renverser dans nos rivières et nos lacs.
    Les routes toutes saisons ont toutes sortes de fonctions auxquelles les gens ne pensent pas normalement, parce qu'ils ne vivent pas là-bas. Ils ne comprennent pas tout ce qui se passe dans nos communautés parce que nous sommes isolés. Il y a deux jours, un jeune de 15 ans s'est suicidé à St. Theresa Point. Cela passe sous silence. Vous n'en entendez pas parler, mais si vous regardez un peu les statistiques sur le suicide au Manitoba et dans le reste du Canada, vous verrez que nous affichons les taux les plus élevés, et de loin. Regardez un peu les statistiques sur les services à l'enfance et à la famille, les pires sont celles de la circonscription de Churchill-Keewatinook. Il y a une raison à ça.
    Toute cette idée que nous avons des services modernes, Internet... Les gens se demandent quand nous obtiendrons Internet et le reste. La vie continue, mais nos jeunes aspirent à plus, ils aspirent à une vie meilleure, et ce n'est pas possible quand on est isolé. On ne peut pas leur offrir de débouchés économiques. Il y a une route qui a été ouverte à Berens l'an dernier, qui nous permet maintenant d'aller travailler à différents endroits, dans notre industrie de la pêche commerciale, dans notre industrie forestière. Il y a un nouveau parc du patrimoine international de l'UNESCO dans notre région.
    Il n'y a même pas de route à Poplar River. En 2016, un permis environnemental a été délivré pour la construction d'une route entre Berens River et Pop River. Quand le gouvernement conservateur est arrivé au pouvoir, il a arrêté le projet. Tout avait été approuvé. Il y a un projet prêt à être réalisé entre Berens River et Pop River. Les gens de Pop River se demandent quand ils seront reliés à la route. Mais on dirait bien que s'il n'y a rien qui se fait maintenant, avec un gouvernement plus favorable aux Premières Nations, il n'y aura pas de route jusqu'à Pop River avant 30 ou 40 ans. Ce n'est pas possible, pas avec le changement climatique qu'on observe actuellement au Manitoba.
    Nous avons un gouvernement qui disait avoir un déficit d'un milliard de dollars. Le vérificateur vient de dire qu'il n'était que de 345 millions de dollars. Oui, c'est une dette, mais les coupes à répétition pèsent lourd sur nos communautés du Nord. Le projet d'aménagement de la route du côté est a avorté. Il y a deux mois, il y a eu une grande annonce à Red Sucker Lake, un peu au nord de chez nous. Sur la carte, vous pouvez voir Red Sucker Lake. On y a découvert de l'or, et il y a un projet d'exploration qui y est mené actuellement. On estime qu'il y aurait plus de quatre milliards de dollars d'or là-bas.

  (1720)  

    Chaque fois que nous voyons des routes toutes saisons aménagées, c'est toujours pour l'extraction de ressources. Et nous, le peuple? Nous sommes là. Regardez-nous. Il y a 20 000 personnes dans une région concentrée qui souffrent. Ce n'est pas nécessaire. Il faut arrêter de penser ainsi dans ce pays dès aujourd'hui.
    Merci, aîné Kemp.
    Merci, Niki.
    Je donne la parole au député Will Amos.
    Je remercie nos deux témoins. Je m'excuse de ne pas avoir pu être là pour vos exposés, mais je me sens chanceux, d'une certaine façon, parce que l'an dernier, j'ai eu l'occasion, pour la première fois, de visiter Iqaluit et l'est de l'île.
    Il y a déjà 20 ans, j'avais eu la chance de rencontrer le chef de Poplar River, le chef Louie à l'époque, puis de descendre la rivière Bloodvein en canot avec lui. Nous avions pris l'avion de Poplar River, après avoir visité les communautés là-bas, donc je sais exactement de quoi vous parlez quand vous mentionnez l'impression d'isolement.
    J'aimerais vous poser à tous les deux une question similaire. Nous savons qu'il y a une longue liste de grandes priorités pour les investissements en infrastructure, que ce soit pour les routes, l'infrastructure numérique ou les ports. La liste est très longue, et les fonds ne suffiront jamais pour tout faire.
    J'aimerais savoir un peu plus comment vos communautés s'adonneraient à l'exercice de fixer trois ou quatre grandes priorités pour l'infrastructure nordique. Comment déterminez-vous qu'il faut privilégier A, B et C? Comment notre gouvernement pourrait-il mieux évaluer ses priorités?
    Merci.
    Pour la municipalité, je dois dire que l'eau est une priorité, tout comme les mesures pour nous adapter au changement climatique, étant donné le changement du permafrost et le bris de tuyaux.
    Pour notre capitale — où nous nous trouvons à demeurer —, j'accorderais la priorité aux télécommunications et à une ligne de fibre optique entre Iqaluit et Nuuk. Nous consommons de 70 à 75 % de la bande passante pour la totalité du territoire, même si nous ne sommes qu'une communauté parmi 25 et que notre population représente 25 % de la population totale. C'est au point où l'on ne peut pas assurer l'administration des affaires publiques, l'organisation ou les affaires compte tenu de l'état actuel des télécommunications et ce, malgré l'augmentation minime que nous venons de recevoir en financement. Nous utilisons toujours la technologie satellite.
    Je dirais que l'autre priorité, pour la capitale, est l'énergie. Nous avons besoin d'une source d'énergie stable et abordable. Avec l'achat récent par De Beers de la mine qui se trouve près de la ville, il y aurait possibilité de trouver une solution en matière d'énergie. Ce ne sera pas l'éolien, ce ne sera pas le solaire. C'est la réalité dans notre région. Ce pourrait être l'hydroélectricité ou les PRM, les petits réacteurs modulaires. Nous devrons analyser tout cela de plus près.
    Enfin, je dirais que notre dernière priorité pour l'ensemble de la région serait l'université. Nous devons développer nos ressources humaines. Nous avons besoin de personnes éduquées pour administrer notre gouvernement et s'acquitter des obligations gouvernementales de haute direction ou de gestion intermédiaire. Il y a énormément de recherches qui se font sur l'Arctique, mais ce n'est pas parce qu'il y a une université dans le Nord. Ces études se font dans les universités du Sud, en Alberta, au Manitoba ou en Ontario. Par conséquent, je dois dire qu'elles ne sont pas toujours aussi bonnes qu'elles pourraient ou devraient l'être.
    C'est un énorme facteur économique, mais c'est également important pour le développement d'une société civile essentielle, d'une population dotée d'un bon sens civique. Les gens éduqués sont beaucoup plus enclins à se préoccuper des différents ordres de gouvernement, de la démocratie et d'y participer. Pouvez-vous imaginer de quoi vos régions auraient l'air sans une université? L'Ontario? Le Manitoba? Le Québec? Imaginez un peu l'état de la gouvernance, des affaires, de l'innovation, de tout. C'est la situation dans laquelle nous nous trouvons, et sans une université dans le Nord, nous ne pourrons pas faire cet investissement si important dans les personnes.

  (1725)  

    Monsieur Kemp, voulez-vous répondre à cette question?
    Oui, merci, honorable Amos.
    Dans notre région, le Nord-Est du Manitoba, l'aménagement de routes toutes saisons pour éliminer l'isolement serait la priorité numéro un. Tout le reste, les améliorations, la rénovation, la reconstruction ou la construction de nouvelles infrastructures est lié à l'accès. Les communautés situées au nord de notre village ne sont accessibles que par avion. Quand on veut y construire de nouvelles écoles, des égouts ou de l'infrastructure d'eau, on est toujours limité par une petite fenêtre de 30 ou 40 jours pendant l'hiver. Tous les coûts triplent quand il faut emprunter une route d'hiver, tant à cause des coûts de construction eux-mêmes qu'à cause des délais. Dans les communautés des Premières Nations isolées du Nord du Manitoba, les dépassements de coûts sont systématiques dans tous les projets.
    C'est extrêmement lourd pour nos chefs et nos conseils de bande, parce que nous sommes toujours coincés. Quand on entreprend un grand projet, auquel on ne veut pas dire non, parce qu'on sait qu'on a besoin d'infrastructure, on ne peut s'empêcher de s'enliser dans les dépassements de coûts quel que soit le projet, en raison de l'isolement. Il n'y a pas de route empruntable pour y transporter le matériel.
    Il y a beaucoup de gaspillage. Le béton expédié au nord de Winnipeg arrive souvent en gros sacs ronds de trois ou quatre pieds de long, par trois ou quatre pieds de haut. Nous n'avons nulle part où les entreposer, et le béton est sensible à l'humidité. Il arrive par une route d'hiver en mars, et les sacs sont déchargés au sol, parce que nous n'avons pas d'entrepôt ni d'infrastructure pour les protéger de l'humidité, puis quand on est prêt à construire en mai, une fois le gel au sol terminé, tout est dur. Il faut ensuite attendre tout une année pour recevoir de nouveaux matériaux.
    C'est un cycle sans fin. On gaspille énormément de ressources à essayer de construire de l'infrastructure dans le Nord. On ne peut rien construire adéquatement sans un accès adéquat. C'est la raison pour laquelle je dis que les routes sont la priorité numéro un. La deuxième serait les services aux communautés, donc les routes communautaires, les égouts, les systèmes d'eau, l'infrastructure du genre. Mais nous avons besoin de voies d'accès.
    Meegwetch.
    Merci.
    Meegwetch à tous les deux pour avoir participé à notre séance d'aujourd'hui. Je sais qu'elle fut brève et qu'il y aurait encore tellement à faire. Notre rapport se fondera sur les témoignages recueillis. Nous le soumettrons à la Chambre des communes, puis à tous les Canadiens.
    Je vous remercie infiniment d'avoir participé à nos délibérations. Je vous souhaite bonne chance.
    La séance est levée.
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