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ETHI Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de l'accès à l'information, de la protection des renseignements personnels et de l'éthique


NUMÉRO 114 
l
1re SESSION 
l
44e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 30 avril 2024

[Enregistrement électronique]

  (1100)  

[Traduction]

    Bonjour à tous. Je déclare la séance ouverte.

[Français]

     Bienvenue à la 114e réunion du Comité permanent de l'accès à l'information, de la protection des renseignements personnels et de l'éthique. Conformément à l'article 108(3)h) du Règlement, le Comité entreprend son étude sur les effets de la désinformation et de la mésinformation sur le travail des parlementaires.
    Avant de commencer, j'aimerais rappeler à tous les députés et aux autres participants à la réunion présents dans la salle les importantes mesures préventives qui suivent.

[Traduction]

     Afin d'éviter les problèmes de rétroaction acoustique pouvant causer des blessures, je rappelle à tous les participants en personne de tenir leurs oreillettes éloignées de leur microphone à tout moment.
     Conformément au communiqué du Président envoyé à tous les députés le lundi 29 avril, les mesures suivantes ont été prises pour prévenir les incidents liés à la rétroaction acoustique.
    Toutes les oreillettes ont été remplacées par un modèle qui permet de réduire considérablement les risques de rétroaction acoustique. Les nouvelles oreillettes sont noires, alors que les anciennes étaient grises. Veuillez n'utiliser qu'une oreillette noire homologuée.
    Par défaut, toutes les oreillettes non utilisées ont été débranchées au début de la réunion. Lorsque vous n'utilisez pas votre oreillette, veuillez la placer face cachée au milieu de l'autocollant prévu à cet effet, que vous trouverez sur la table, comme indiqué. Veuillez consulter les brochures sur la table pour vous familiariser avec les règles à suivre afin d'éviter tout incident acoustique.
    L'aménagement de la salle a été ajusté pour augmenter la distance entre les microphones, et réduire ainsi le risque de rétroaction provenant d'un écouteur ambiant.

[Français]

    Ces mesures ont été mises en place afin que nous puissions exercer nos activités sans interruption et pour protéger la santé et la sécurité de tous les participants, y compris les interprètes. Je vous remercie tous de votre coopération.
    La réunion d'aujourd'hui se déroule sous forme hybride. Conformément à notre motion de régie interne à ce sujet, je souhaite informer le Comité que tous les témoins ont effectué les tests de son requis avant la réunion.

[Traduction]

    Je vous demanderais d'attendre qu'on vous nomme avant de prendre la parole. Je vous rappelle également que tous les commentaires doivent être adressés à la présidence. Aucun député ne doit s'adresser directement à ses collègues.
    J'aimerais maintenant souhaiter la bienvenue à nos témoins pour la première heure.
    Nous avons le plaisir d'accueillir les invités suivants: M. Jakub Kalenský, directeur adjoint, COI Hybrid Influence, du European Centre of Excellence for Countering Hybrid Threats; M. Aengus Bridgman, professeur adjoint, Observatoire de l'écosystème médiatique; et M. Kenny Chiu, ancien député, qui comparaît à titre personnel.
    Merci d’être avec nous aujourd’hui.
    Monsieur Kalenský, vous disposez d'au plus cinq minutes pour présenter vos observations préliminaires au Comité. Veuillez commencer, je vous prie.
     Tout d'abord, permettez-moi de vous remercier de m'avoir invité ici. C'est un honneur pour moi et pour l'organisation que je représente.
    Dans le temps limité qui m'est imparti, permettez-moi de n'aborder que deux points très brefs. D'abord, ce qu'est le COI Hybrid Influence, et ce que nous mettons en place pour aider les États participants à contrer la menace de la désinformation. Ensuite, quelles sont les meilleures pratiques que nous avons identifiées en matière de lutte contre la désinformation.
     Le European Centre of Excellence for Countering Hybrid Threats est une organisation internationale qui comprend de nombreux États membres de l'UE et de l'OTAN. Jusqu'à récemment, nous étions également représentés par un collègue qui travaille pour le gouvernement du Canada. À l'heure actuelle, un total de 35 États participent aux activités de notre organisation. Il ne manque donc plus qu'un dernier pays membre de l'UE et de l'OTAN.
    Notre mandat est de renforcer la sécurité des États participants en leur fournissant de l'expertise et des formations en matière de lutte contre les menaces hybrides. Pour atteindre ces objectifs, nous disposons de différents produits, si l'on peut dire. Nous publions des rapports, et nous organisons des événements tels que des conférences, des séminaires et des ateliers. Nous élaborons des produits adaptés à notre clientèle, comme des formations et des ateliers. Nous disposons également de produits spécifiquement dédiés à la lutte contre la désinformation, un dossier qui relève directement de ma responsabilité.
     Nous avons récemment présenté un rapport concernant le rôle joué par l'humour dans la lutte contre la désinformation. Nous avons également publié un rapport sur les contre-mesures utilisées par l'Ukraine dans son combat contre la désinformation russe. Personne ici ne sera surpris d'entendre que l'Ukraine est le pays qui a accumulé le plus d'expérience en matière de désinformation russe. Nous avons aussi publié un rapport détaillant le succès des campagnes de désinformation russes, car nous avons constaté qu'il s'agit d'un enjeu auquel nos États participants sont souvent confrontés. La grande question qui oriente nos recherches est la suivante: de quelle manière pouvons-nous estimer les répercussions du travail mené par les propagandistes russes?
    Nous tenons également un atelier pour les praticiens de la lutte contre la désinformation. Chaque année, nous rassemblons à Helsinki les représentants des États participants, et nous leur permettons d'échanger à propos des meilleures pratiques, des enseignements tirés, de ce qui fonctionne ou non, des lacunes, et des améliorations potentielles. Nous sommes également en train de concevoir un tout nouvel exercice sur la désinformation, ce qui nous permettra de renforcer nos capacités, et de former jusqu'à 30, 40, voire 50 personnes.
     Je vais maintenant passer au deuxième sujet, à savoir les meilleures pratiques que nous avons identifiées. Permettez-moi de commencer par une observation. Je pense qu'il est nécessaire de mettre en œuvre plusieurs types de contre-mesures de manière simultanée. Plusieurs experts croient que la mise en place d'une seule grande contre-mesure suffira à résoudre l'ensemble des problèmes. Aux yeux de certains spécialistes par exemple, l'éducation aux médias serait la panacée. D'autres spécialistes ne jurent que par les communications stratégiques. Je me suis même entretenu avec des experts qui pensent que nous devrions tout miser sur une approche axée sur l'humour et la dérision pour lutter contre la désinformation. Pour ma part, je ne crois pas que la mise en place d'une seule stratégie suffira. Je pense que nous devons déployer différents types de contre-mesures, car chacune d'entre elles ne résoudra qu'une partie du problème. Les problèmes qui touchent l'ensemble de la société exigent des solutions qui mettent à contribution l'ensemble de la société.
     Parmi l'éventail des contre-mesures, nous avons identifié quatre groupes principaux, que j'appelle nos quatre lignes de défense. La première ligne de défense consiste à détecter et à documenter ce qui se passe dans l'écosystème de désinformation. Cette démarche peut paraître limitée, mais malheureusement, nous ne sommes pas encore parvenus à dresser un portrait général de la situation, surtout en ce qui concerne le volet quantitatif. Combien y a‑t‑il de canaux de désinformation? Combien de messages chaque canal est‑il en mesure de diffuser au quotidien? Combien de personnes ces messages parviennent-ils à influencer? Imaginez un instant lutter contre la pandémie de COVID sans savoir combien de personnes ont contracté le virus, combien de personnes ont été vaccinées, combien de personnes sont décédées, et ainsi de suite. Ce serait presque impossible. Malheureusement, nous nous trouvons dans cette situation en matière de désinformation. Il est très difficile de concevoir des solutions adéquates en l'absence de ce genre de données essentielles.
    La deuxième ligne de défense concerne la sensibilisation. Si, dans le premier cas, nous essayons d'obtenir davantage de données, dans le second, nous essayons de diffuser ce genre de renseignements auprès d'un plus grand nombre de personnes. À cet égard, je pense que le nombre d'acteurs est vraiment essentiel, car chaque acteur ne peut rejoindre qu'une population très limitée. Les populations sont aujourd'hui beaucoup plus fragmentées qu'elles ne l'étaient il y a 10 ou 15 ans, et nous avons donc besoin d'un plus grand nombre d'acteurs qui sauront comment s'adresser à elles.
    La troisième ligne de défense consiste à corriger les faiblesses systémiques de l'écosystème de l'information. C'est là qu'interviennent l'éducation aux médias et les communications stratégiques. Ces deux approches nous permettent en effet de réduire la méfiance de la population envers ses propres institutions, une faiblesse que les propagandistes ne se gênent jamais d'exploiter. C'est également là qu'intervient la pression sur les entreprises de médias sociaux, car l'environnement des médias sociaux demeure, hélas, une lacune exploitée là encore par les spécialistes de la désinformation.

  (1105)  

     Enfin, la quatrième ligne de défense...
    Je vous demande pardon, monsieur Kalenský. Nous avons dépassé le temps imparti.
    J'en suis désolé.
    Si vous souhaitez revenir sur un sujet en particulier, vous aurez l'occasion de le faire pendant la séance de questions et de réponses.
     Je vais maintenant céder la parole à M. Bridgman.
    Monsieur Bridgman, vous avez jusqu'à cinq minutes pour vous adresser au Comité. Allez‑y, s'il vous plaît.
    Merci à vous tous.
    Je m'appelle Aengus Bridgman. Je suis professeur adjoint à l'Université McGill, où je dirige l'Observatoire de l'écosystème médiatique, qui est le principal centre de recherche au Canada consacré à la compréhension et à la prise en charge des préjudices en ligne. Nous sommes également à la tête du Réseau canadien de recherche sur les médias numériques.
    Je vais me concentrer sur deux volets du sujet qui nous occupe aujourd'hui. Le premier volet concerne l'idée que la désinformation représente une menace existentielle pour nos démocraties modernes. Des sondages menés récemment à travers le monde suggèrent que la plupart des gens, y compris les parlementaires, sont très préoccupés par cette problématique.
     Les recherches que mon équipe, mes collègues et moi-même avons menées au cours des cinq dernières années ont démontré que la désinformation fait partie de l'écosystème médiatique au Canada. Les fausses nouvelles constituent un phénomène bien réel, et j'ai d'ailleurs hâte d'entendre les observations du troisième intervenant concernant leur impact potentiel. Toutefois, nos recherches montrent que la désinformation et la mésinformation ne parviennent pas à modifier de manière importante les attitudes et les comportements des Canadiens, et n'ont qu'une incidence limitée sur les résultats des élections.
    Il y a plusieurs raisons à cela. Tout d'abord, la plupart des Canadiens, et la plupart des gens en général, sont assez peu politisés. Par conséquent, les histoires exagérées ou carrément fausses ont tendance à passer inaperçues. Les Canadiens qui prêtent attention aux fausses nouvelles sont de toute façon souvent prédisposés à rechercher ce genre de contenu. Bref, la désinformation existe, mais son impact systématique réel est relativement limité. Nous avons étudié ce phénomène en analysant les données de traçage numérique à l'échelle nationale. Nous avons analysé les mégadonnées associées aux deux dernières élections fédérales et aux dernières élections au Québec. Pour ces trois élections, nous avons conclu que la désinformation et la mésinformation avaient joué un rôle relativement mineur, bien que nous ayons documenté de nombreux cas.
    Cela m'amène au deuxième volet du sujet, à savoir qu'il existe une tendance à considérer la désinformation et la mésinformation sous l'angle du préjudice et du renforcement de la sécurité. L'idée générale, c'est que les fausses nouvelles sont dangereuses, et qu'il faut donc s'en protéger. Ce genre de raisonnement a sa pertinence, mais ce n'est pas la seule façon de voir les choses. Je pense qu'il est très important de comprendre que la désinformation et la mésinformation font partie intégrante de l'écosystème médiatique et de la sphère politique, et que leur existence ne signifie pas que nous devons nécessairement les éradiquer, ou même les combattre. Le simple fait que ce phénomène naturel existe ne signifie pas qu'il doit être combattu à tout prix.
    Au lieu de nous braquer contre ce phénomène, nous pouvons prendre un pas de recul et essayer de comprendre l'écosystème médiatique canadien dans toute sa complexité. Nous serons alors mieux outillés pour sensibiliser la population et l'aider à parfaire sa connaissance des médias, et notamment des médias numériques. Nous pourrons ainsi améliorer notre compréhension collective des dynamiques médiatiques et politiques, ce qui permettra à la société d'évoluer.
    Pour résumer, la désinformation et la mésinformation existent bel et bien. Il s'agit certes d'un phénomène important, mais contrairement aux idées reçues, ce problème n'est pas existentiel, du moins pas encore au Canada. Nous devons étudier cette problématique sous tous ses angles, et y réfléchir de manière holistique, mais nous n'avons pas besoin de l'éradiquer. L'idée même que l'on puisse un jour éradiquer la désinformation et la mésinformation me paraît fallacieuse.
    Je serai ravi de revenir sur ces deux grands volets pendant la période de questions et réponses.

  (1110)  

    Je vous remercie, monsieur Bridgman.
    Monsieur Chiu, vous avez la parole pour les cinq prochaines minutes. Allez‑y.
     Je vous remercie, monsieur le président.
    Mesdames et messieurs, alors que nous essayons tous de nous retrouver à travers le labyrinthe de la désinformation et de la mésinformation, je me vois contraint de partager des expériences personnelles qui soulignent l'urgence de notre mission. Qu'elles soient concoctées par des acteurs étatiques, des groupes malveillants ou des individus, l'intention est très claire. Il s'agit de manipulation. Ces propagandistes cherchent à semer la discorde, à éroder la confiance de la population envers nos institutions, et à saper les fondements de la vérité. Lors des dernières élections fédérales, la vérité et la tromperie se sont affrontées, ce qui a laissé des séquelles profondes au sein de notre démocratie.
    En quoi consiste la désinformation? Prenons l'exemple des fusils d'assaut et de la distribution de documentation durant la dernière campagne électorale.
    Imaginez les rues tranquilles de Steveston—Richmond-Est, la circonscription que j'ai cherché à représenter lors des dernières élections. Des résidents chinois très inquiets se sont approchés de moi et de mes bénévoles dévoués. Ils ont brandi une carte envoyée par la poste. Il s'agissait d'un document apparemment inoffensif, rédigé dans leur langue maternelle, mais qui en réalité avançait une dangereuse fausseté. Ce tract de propagande affirmait qu'un éventuel gouvernement conservateur chercherait à abroger l'interdiction des fusils d'assaut. Cette perspective était effrayante aux yeux de nombreux membres de la communauté sino-canadienne, car ils sont issus d'une culture où les armes à feu sont strictement interdites.
    Mais voilà: tout cela n'était qu'un tissu de mensonges. Les conservateurs n'avaient pas cette intention, mais des renseignements erronés, comme un intrus furtif, se sont répandus dans notre communauté, semant ainsi les graines de la peur et de la méfiance.
    Laissez-moi vous raconter une autre histoire empreinte de cynisme. Cette fois, il s'agit de désinformation. Tel un architecte qui construit une façade élaborée pour mieux masquer un intérieur vide, la désinformation s'érige en structure colossale à partir de zéro pour tromper intentionnellement un public non averti.
    Permettez-moi maintenant de vous présenter l'adversaire que j'ai affronté lors de la dernière campagne électorale. À mon avis, son ascension au pouvoir n'a été rendue possible que par une campagne de désinformation. Il s'agissait peut-être d'une stratégie calculée ou, à tout le moins, d'une participation volontaire à une campagne de désinformation aujourd'hui avérée. Cet individu a accepté de propager de fausses allégations visant les conservateurs, y compris notre chef de l'époque, Erin O'Toole, et moi-même. Il nous a accusés de répandre des propos racistes et d'attiser un sentiment anti-asiatique. Ces allégations liées à des États étrangers ont alors essaimé sur plusieurs chaînes de médias et groupes de discussion biaisés.
    Si le fait de demander des comptes au gouvernement indien pour des agissements présumés en sol canadien n'est pas anti-indien, en quoi le fait de contrer la propagande du Parti communiste chinois au pays pourrait‑il être considéré comme anti-chinois?
    Mais ce n'est pas tout. Mon ancien adversaire s'est engagé publiquement devant la communauté sino-canadienne à ne pas soutenir la création d'un registre sur les agents d'influence étrangers. Cette promesse contredit directement l'annonce faite en 2022 et en 2023 par le ministre de la Sécurité publique de l'époque.
    Je me souviens des techniques insidieuses de propagande employées par les régimes autoritaires tout au long de l'histoire, qui consistaient à répéter les mensonges les plus éhontés jusqu'à ce qu'ils finissent par devenir une vérité acceptée. Les citoyens ordinaires, bombardés par cette propagande incessante, se retrouvaient pris au piège d'une réalité alternative. La haine et les préjugés se sont développés au fur et à mesure que la stratégie prenait racine.
    Aujourd'hui, nous sommes confrontés à un champ de bataille numérique plus vaste et complexe que jamais, où la désinformation prolifère. Au Canada, les différentes communautés culturelles et diasporas, souvent isolées, font les frais de ces campagnes de désinformation. Les médias dits ethniques et les applications étrangères, bien qu'essentiels aux yeux des membres de ces communautés pour maintenir des liens avec leur pays d'origine, les rendent vulnérables à la désinformation. Que des régimes étrangers cherchent à s'immiscer dans notre processus électoral ou que des agents nationaux complotent pour induire la population canadienne en erreur, les conséquences sont toujours désastreuses.
    Pour contrer la désinformation, nous devons nous faire les champions d'un écosystème médiatique dynamique et engagé. Cet univers médiatique doit établir la distinction entre les faits des allégations, favoriser les débats éclairés, et refuser que quiconque soit réduit au silence. Prenons en compte les leçons de l'histoire, fortifions nos défenses grâce à l'éducation aux médias, et tâchons de rester fermes face aux forces corrosives qui cherchent à manipuler nos esprits et à fracturer notre unité.
    Je vous remercie de votre attention. Puisse notre engagement en faveur de la démocratie nous guider vers un avenir où la lumière de la vérité dissipera les ténèbres de la désinformation et de la mésinformation.
    Je vous remercie, monsieur le président.

  (1115)  

    Merci, monsieur Chiu.
    Merci à nos témoins pour leurs observations préliminaires.
     Nous allons commencer notre première série de questions de six minutes. J'invite M. Cooper à prendre la parole en premier.
     Vous disposez de six minutes. Allez‑y.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Chiu, il est bien documenté que vous avez fait l'objet d'une campagne de désinformation dirigée par le régime communiste de Pékin durant les élections de 2021, campagne qui ciblait la diaspora chinoise de votre circonscription. Même si le gouvernement possédait des informations selon lesquelles vous étiez ciblé, il ne vous les a pas transmises, et les électeurs de votre circonscription ont été tenus dans l'ignorance.
    Selon votre expérience, diriez-vous que les mesures mises en place par le gouvernement libéral, supposément pour lutter contre l'ingérence étrangère, ont échoué?
    Je pense qu'on en a beaucoup parlé. Je suis d'accord avec certains commentaires pour dire qu'évidemment, c'était un coup monté par le gouvernement libéral pour prendre sur le fait les conservateurs qui auraient profité de la désinformation russe. Les libéraux ont toutefois été pris de court quand ils ont vu que la campagne des communistes chinois visait à les aider eux‑mêmes.
    La campagne de désinformation de Pékin visait à attaquer votre personnalité et à disséminer des mensonges patents sur votre position et celle du Parti conservateur sur toutes sortes d'enjeux.
    Pouvez‑vous nous en parler et dire quelle a été l'incidence de cette campagne de désinformation sur votre réputation dans votre collectivité?
    Je pense que votre question pose problème, monsieur, parce que vous laissez entendre que la désinformation et la mésinformation ne sont colportées que durant les périodes électorales, mais ce n'est pas vrai. Même durant les audiences de l'enquête publique sur l'ingérence étrangère, de la désinformation circulait.
    Par exemple, durant le témoignage du député Han Dong, on affirmait dans des articles de presse qu'il était persécuté au Canada en raison de ses origines chinoises. C'est tout à fait faux. En tant que Canadiens, nous le savons, mais bien des gens dans les communautés ne sont pas au courant, parce qu'ils vivent dans un monde parallèle.

  (1120)  

    Non seulement les mécanismes mis en oeuvre par le gouvernement libéral pour lutter contre l'ingérence étrangère ont échoué sur toute la ligne pour contrer la campagne de désinformation dans votre circonscription, mais d'après votre témoignage, c'est encore pire que cela. Selon ce que je comprends, le Parti libéral a tiré avantage de la désinformation de Pékin, l'a amplifiée et a même créé des produits de mésinformation et de désinformation complémentaires qui ciblaient la diaspora chinoise dans Steveston—Richmond-Est.
    Est‑ce bien ce qui est arrivé? Pourriez‑vous nous en dire plus?
    C'est ce que j'ai observé dans la circonscription où je me suis représenté, Steveston—Richmond-Est, en Colombie‑Britannique. C'est bien ce que j'ai observé et ressenti.
    Je me mets toujours dans la peau de mes adversaires. Si j'observais qu'on propage de la désinformation contre eux et qu'on cherche à les diffamer, je les défendrais, parce que ce n'est pas vrai. Ce n'est pas ainsi qu'on doit se conduire dans notre démocratie.
    Malheureusement, ce n'est pas ce qui s'est produit durant les élections de 2021. C'était clair qu'une campagne ciblée m'attaquait, et j'étais seul, au fond.
    C'est très troublant d'apprendre que le Parti libéral a activement amplifié la désinformation de Pékin. Les libéraux ne sont pas seulement restés les bras croisés devant cette campagne. C'est clairement pire que de détourner le regard.
    Il a été mis au jour dans l'enquête publique sur l'ingérence étrangère que durant les élections de 2019, le Cabinet du premier ministre, le CPM, avait détecté de la désinformation contre Justin Trudeau dans un article qui circulait sur Facebook. Le CPM a demandé à Facebook de retirer cet article, parce qu'il risquait de menacer l'intégrité des élections, selon lui.
    En revanche, lorsqu'on a demandé au CPM si de la désinformation vous avait ciblé, vous ainsi que le Parti conservateur, sur WeChat durant les élections de 2021 et pourquoi il n'avait pas demandé le retrait de cette désinformation, un représentant s'est défilé en disant que « ce contenu ne serait lu que par la diaspora chinoise ».
    Que comprenez‑vous de cette explication, et qu'est‑ce que cela dit de la façon dont fonctionne ce gouvernement?
    Cela touche à mon identité profonde, parce que j'ai toujours cru que le premier ministre se trompait en disant que le Canada ne pâtit pas de discrimination systémique et structurelle contre un certain groupe. Toutefois, ce que j'ai entendu durant les audiences m'a un peu troublé, parce qu'il semble que certains Canadiens ont plus de valeur et méritent plus d'être protégés que d'autres.
    Le Canada est une société multiculturelle, et c'est clair que tous les Canadiens méritent d'être protégés. Il semble que le mécanisme que les libéraux ont mis en place ne gère pas la désinformation et la mésinformation propagées dans d'autres langues que les langues officielles.
    Merci, messieurs Chiu et Cooper.
    Nous passons maintenant à M. Housefather pour six minutes.
    Allez‑y.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Kalenský, je vais vous poser ma première question. Le 7 octobre, les terroristes du Hamas ont attaqué Israël et ont commis le pire massacre de Juifs depuis la Deuxième Guerre mondiale et l'Holocauste. Depuis ce temps, il y a une forte hausse de l'antisémitisme partout dans le monde, y compris en Amérique du Nord, où des campus de collèges sont occupés par des gens qui répandent des messages antisémites. Quelle a été la participation de la Russie pour fomenter cette situation?

  (1125)  

    La Russie est toujours heureuse de saisir une occasion d'accroître la polarisation des publics cibles. Bien sûr, ce conflit constitue l'un des sujets les plus polarisants qui soient, donc les Russes s'en servent pour réaliser leur travail. Ils visent sans doute à élargir le sentiment anti‑occidental et anti‑américain. Les États‑Unis sont toujours la principale cible des campagnes de désinformation russes, sans doute parce qu'Israël est perçu comme le principal allié des États‑Unis.
    Je pense que leur motivation est à ce point primitive. Pour dénigrer les États‑Unis, les Russes vont disséminer un fort sentiment anti‑Israël.
    Ils se joignent à l'Iran dans cet effort. Quelle est la participation de l'Iran au financement des organisations terroristes que sont le Hamas et le Hezbollah? Comment les Iraniens travaillent‑ils avec la Russie pour disséminer de la désinformation sur les médias sociaux?
    Je dois admettre que je n'ai pas de bonnes informations sur leur collaboration. On a fait état d'une collaboration de la Russie avec la Chine dans le domaine de l'information, mais je n'ai pas entendu parler de collaboration avec l'Iran. Cela dit, je ne serais pas surpris qu'il y en ait une. La Russie est toujours heureuse de recevoir de l'aide.
    Lorsque les gens peuvent semer la division dans les sociétés d'Amérique du Nord, lorsque la Russie amplifie les tropes sur les médias sociaux qui affirment que les Juifs mènent le monde ou qu'ils sont plus loyaux envers Israël qu'envers leur propre pays, par exemple, comment cela aide‑t‑il à fomenter la dissension et la division en Amérique du Nord, et comment cela permet‑il à la Russie de détourner l'attention du monde de la guerre qu'elle a lancée contre l'Ukraine?
    C'est clairement une partie de la raison pourquoi la Russie agit ainsi. Si les gens s'intéressent surtout à ce qui se passe au Moyen‑Orient, ils seront moins nombreux à se concentrer sur ce qui se passe en Ukraine.
    La Russie cherche à augmenter la polarisation en diffusant des messages extrémistes, mais elle le fait parfois dans les deux camps. Par exemple, les Russes ont organisé des manifestations pro‑musulmans et anti‑musulmans aux États‑Unis. Ils répandent des messages radicaux pour et contre le féminisme, et disséminent du contenu pro‑migration et anti‑migration agressif.
    Le but, c'est de caractériser l'autre camp comme étant déraisonnable pour susciter le désaccord. Quand on exagère les exigences ou les déclarations de l'autre camp, on réduit la possibilité d'une discussion raisonnable.
    Avez‑vous vu des preuves que la Russie amplifie les messages et augmente son influence sur les médias sociaux depuis l'attaque du 7 octobre contre Israël?
    Je ne suis pas au courant de campagnes inauthentiques en ce sens, mais c'est peut‑être parce que je n'ai pas été assez attentif.
    Vous êtes cité dans un article publié dans Politico, en Europe, selon lequel l'organisation appelée Alliance for Securing Democracy compile des statistiques qui montrent que durant les sept premières semaines du conflit, « les comptes Facebook russes ont fait 44 000 publications par rapport à seulement 14 000 publications durant les sept semaines précédant le conflit ». Les Russes ont donc triplé leur nombre de publications. Cette « activité sur Facebook a été partagée près de 400 000 fois en tout, une multiplication par quatre du nombre de publications avant le conflit ».
    J'ai consulté un certain nombre d'études portant sur les médias sociaux — et je pense que nous entendrons un témoin là‑dessus ce jeudi — qui indiquent que la Russie tente de fomenter la dissension en Amérique du Nord, au Canada et aux États‑Unis. Elle veut nous dresser les uns contre les autres pour détourner l'attention de ses propres méfaits en Ukraine.
    Je pense qu'il ne me reste presque plus de temps, donc je vais vous permettre de faire un dernier commentaire, monsieur Kalenský.
    Je suis d'accord avec vous que les Russes font ce genre de choses, mais ils ne suivent parfois que le cycle des nouvelles. Durant la pandémie de COVID, ils se concentraient sur la COVID. Cela dit, comme les médias portent beaucoup d'attention au Moyen‑Orient, les Russes s'en servent, mais ils pourraient se remettre à parler d'autres choses dans quelques semaines.
    Il vous reste encore une minute, monsieur Housefather.
    Je n'étais pas conscient qu'il me restait une minute.
    Ma prochaine question s'adresse à vous, monsieur Bridgman. On ne vous a toujours pas posé de questions. Qu'avez‑vous à dire à propos de mes questions sur la Russie et ce qu'elle fait pour fomenter la désinformation en Amérique du Nord?

  (1130)  

    Oui, merci de me permettre d'y répondre.
    Je dirai très brièvement que c'est un phénomène avéré, tout à fait. La Russie, l'Iran et d'autres entités essaient bel et bien de manipuler l'écosystème de l'information dans un pays comme le Canada. C'est un phénomène avéré. Nous devons le comprendre et mieux l'étudier. Une partie de mon travail consiste à tenter de faire ressortir les liens entre les entités étrangères et leur pénétration de l'écosystème de l'information au Canada. Je peux certainement en parler plus.
    Une chose essentielle sur laquelle je veux mettre l'accent, toutefois, c'est que la mésinformation et la désinformation dont nous parlons, surtout concernant le travail des parlementaires, viennent en bonne partie de l'intérieur du pays. Ce n'est pas qu'un phénomène international qui accroît la polarisation, la toxicité et ce genre de choses dans nos débats. Ces entités cherchent à exacerber ce climat toxique. Comme M. Kalenský l'a dit, elles utilisent les brèches dans notre environnement politique — les événements et les moments où il y a de la tension politique au Canada, aux États‑Unis et dans d'autres pays — et tentent de renforcer la division.
    Nous devons tous déployer des efforts concertés pour cerner les moments où l'on cherche à nous polariser. Nous devons prendre un peu de recul. Nous sommes polarisés sur tel ou tel enjeu. Quand il y a un problème, nous allons tenir un débat enflammé.
    Ce n'est pas seulement à cause d'eux...
    Veuillez m'excuser, monsieur. Cette minute de grâce s'est transformée en minute de temps supplémentaire.

[Français]

     Madame Gaudreau, bienvenue au Comité. Vous avez la parole pour six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Chers témoins, merci beaucoup. C'est une étude très importante pour notre démocratie.
    Je cherche à mieux comprendre la situation. Nous savons que la mésinformation et la désinformation peuvent avoir des conséquences. On a brossé deux portraits différents, mais je vais commencer par demander d'où viennent ces activités, pourquoi elles existent et quelles en sont les causes.
    J'invite les deux témoins qui sont en ligne à répondre à cette question.

[Traduction]

    Commençons par vous, monsieur Bridgman. Allez‑y, monsieur.

[Français]

    Merci, monsieur le président.

[Traduction]

    Vous me demandez d'où viennent ces activités. Dans le discours politique habituel, il y a...

[Français]

    Vous pouvez me parler en français.
    Je le sais, mais, honnêtement, ce sera mieux pour tout le monde si je réponds en anglais.
    C'est moi qui ai posé la question et je l'ai posée en français, alors je préférerais avoir la réponse en français, s'il vous plaît.

[Traduction]

    D'accord.

[Français]

    Madame Gaudreau, si M. Bridgman n'est pas capable de répondre en français, il peut répondre en anglais.
    Oui, tout à fait.
    Monsieur Bridgman, j'ai arrêté le chronomètre.

[Traduction]

    Veuillez répondre dans la langue dans laquelle vous êtes à l'aise, monsieur. Allez‑y, je vous prie.

[Français]

    Par respect, je vais essayer de répondre en français.
     Vous voulez savoir quelles sont les sources de la mésinformation et de la désinformation. En politique, il y a tout le temps un débat sur les faits. La différence entre la mésinformation et la désinformation n'est pas tout le temps claire et nette. Parfois, comme M. Chiu le disait, il est très évident qu'il y a de la désinformation, mais il y a de vrais débats sur la plupart des faits, et c'est le rôle des politiciens, entre autres, de naviguer là-dedans, d'écouter, de parler et de trouver la vérité tous ensemble, ou bien d'accepter qu'ils aient des opinions divergentes. C'est cela, la politique. Il y a donc tout le temps de la mésinformation et de la désinformation que je qualifie d'ambiante dans le système…
    Je vous interromps, parce que je n'ai pas beaucoup de temps et je veux parler des résultats de votre sondage, qui me préoccupent.
    Vous dites qu'il va toujours y avoir des menaces, mais que ce ne sont pas des menaces existentielles qui peuvent changer le résultat d'une élection. Quel en est donc le résultat? Quand je lis les rapports, je n'ai pas l'impression que ça n'a aucun effet.
    Est-ce que vous connaissez le rapport de l'Association parlementaire du Commonwealth qui parle de répercussions importantes sur la démocratie? J'aimerais vous entendre là-dessus et sur les sondages que vous avez faits dans le cadre des deux dernières élections.
    En 2021, nous avons fait un sondage sur la base d'un échantillon représentatif de la population et, surtout, de la population canadienne d'origine chinoise. Nous avons prêté attention aux changements d'opinion des Canadiens pendant l'élection. S'il y avait eu une campagne de désinformation très efficace, c'est-à-dire qu'elle avait vraiment fait changer l'opinion des gens, nous l'aurions vu dans les résultats des sondages. Cependant, nous n'avons pas vu de grand changement. Cela ne veut pas dire qu'une circonscription n'a pas pu être touchée, et il y a des preuves qui démontrent que c'est arrivé. Toutefois, nous n'avons pas vu de changement d'opinion à l'échelle nationale. Il est donc très important de reconnaître que cela existe, mais les effets à plus long terme sont pernicieux…

  (1135)  

     Que voulez-vous dire par « à plus long terme »? C'est quelque chose d'important.
    Les études montrent, jusqu'à un certain point, qu'une des conséquences les plus importantes de la mésinformation est la diminution de la confiance en la politique. Il s'est opéré, au cours des cinq dernières années, un changement dans la confiance envers les médias, les politiciens et les journalistes. Ce changement non négligeable d'environ 10 points dans les sondages est principalement dû à la désinformation et à la mésinformation.
    Monsieur le président, j'aimerais demander à M. Bridgman de nous fournir les résultats des sondages et les répercussions si on a vu une évolution dont on parle. Ce serait très important et au bénéfice du Comité.
    J'aimerais parler des risques. Je n'ai pas entendu l'ensemble des informations de M. Kalenský sur les contre-mesures, la détection, la documentation, la sensibilisation au nombre d'acteurs, qui sont nombreux, et la réparation des faiblesses. Je l'inviterais donc à finaliser les quatre pratiques exemplaires.

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    Avant que je parle de la quatrième ligne, permettez‑moi de répondre brièvement à votre première question. Je suis désolé de ne pas pouvoir vous répondre en français. Mon français est horrible, même si j'ai passé trois ans à Bruxelles.
    Monsieur, il vous reste 45 secondes, donc allez‑y rapidement, s'il vous plaît.
    D'accord.
    Quel est l'objectif? Pour la Russie, il semble que ce soit une mesure non militaire prise pour atteindre des objectifs militaires; les Russes ne s'en cachent pas. Pour eux, cette mesure vise à faciliter les opérations militaires. L'annexion de la Crimée, à laquelle il n'y a eu presque aucune réaction, en est sans doute le principal exemple. Cependant, nous avons aussi vu les Russes réussir à influencer nos décisions à la suite de l'invasion à grande échelle en 2022. La Russie est très ouverte sur le fait que ses pseudo‑journalistes sont des militaires qui reçoivent des décorations militaires pour leur travail. La Russie nous le dit ouvertement.
    Ce que je n'ai pas mentionné, qui se trouve à la quatrième ligne, c'est qu'il faut limiter les agresseurs du domaine de l'information, les punir et les dissuader de sévir. Si les trois premières lignes portent sur nous‑mêmes et le renforcement de notre défense, la quatrième ligne vise à attraper l'agresseur. Les trois premières lignes ont pour objet de renforcer notre immunité, de faire de l'exercice et de manger sainement. La quatrième ligne vise à arrêter la personne qui met du plomb dans la tête des gens.

[Français]

    Merci, monsieur Kalenský et monsieur Bridgman.
    Monsieur Bridgman, concernant la demande de Mme Gaudreau, pouvez-vous envoyer les résultats des sondages au greffier du Comité d'ici vendredi? Je crois que ça vous laisse assez de temps pour le faire.
    Oui, absolument. Nous avons déjà publié une étude à ce sujet, et nous pouvons aussi rédiger quelque chose de plus précis sur cette question.
    D'accord. Merci beaucoup, monsieur Bridgman.

[Traduction]

    Nous passons à M. Green pour six minutes.
    Allez‑y, monsieur Green.

  (1140)  

    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je dois dire que j'ai eu l'impression de vivre dans un univers parallèle quand M. Bridgman a déclaré que la désinformation et la mésinformation ne constituaient pas une menace existentielle, selon lui.
    Je me demande, monsieur Bridgman, si dans le cadre de votre travail, vous avez vu une quelconque étude sur le phénomène des camionneurs qui ont pris contrôle de notre capitale, de la fermeture des ports et des ponts et du désordre civil qu'il y a eu pendant la COVID. Tout cela découlait en grande partie des théories conspirationnistes liées aux vaccins, à la mésinformation et à la désinformation intérieures et étrangères. Je me demande si vous pourriez nous en parler. Vos études tiennent‑elles compte de cet état de fait?
    Je dois vous dire que plus tard ce soir, je vais travailler avec un groupe qui s'intéresse particulièrement à la Loi sur les mesures d'urgence. Cette loi prescrit l'un des recours les plus sévères de notre démocratie. Après presque deux ans de réflexion, je dirais que son invocation découle de ce que j'appellerais une prévalence élevée de mésinformation et de désinformation.
    Pouvez‑vous nous parler du travail que vous faites et nous dire si vous avez examiné ce phénomène local et les nombreux acteurs étrangers qui y ont participé?
    Oui, je crains d'avoir donné l'impression que je ne pense pas que la mésinformation et la désinformation soient des menaces existentielles potentielles. Ce que je dis, en fait, c'est qu'aujourd'hui, au Canada, d'après nos observations des répercussions de la mésinformation et de la désinformation, elles n'ont pas encore atteint le niveau de menace électorale ou de menace existentielle à la démocratie.
    Vous avez parlé du convoi des camionneurs. C'est un excellent exemple d'un mélange de deux phénomènes. Le premier concerne la mésinformation et la désinformation. Encore une fois, je serai heureux de fournir ces renseignements au Comité. J'ai publié plusieurs articles universitaires sur la mésinformation et la désinformation pendant la COVID‑19. Celles‑ci découlaient en grande partie de la désinformation qui circulait aux États-Unis et de son incidence profonde sur l'écosystème numérique ici. C'est nettement ce que j'ai observé. C'est important. C'est corrélatif.
    Il y a aussi l'autre dimension, celle de la politique. Il ne faut pas confondre les deux. On ne peut pas dire, juste parce qu'il y a de la mésinformation et de la désinformation derrière un phénomène politique ou dans le cadre d'un phénomène politique, que ce phénomène politique n'existerait pas sans cette mésinformation et cette désinformation, qu'il ne se serait pas produit sans elles et que la solution à ce mouvement politique est d'éliminer, de réduire, de supprimer ou de contrer seulement la mésinformation et la désinformation. Ce n'est pas forcément vrai qu'on peut simplement...
    Permettez-moi de vous interrompre un instant.
    Bien que je comprenne la distinction entre la corrélation et la causalité, je pense qu'on peut dire sans se tromper que nous ne nous serions pas retrouvés, sans cela, à voir invoquer la Loi sur les mesures de guerre ou la Loi sur les mesures d'urgence pour la deuxième fois de notre histoire dans ce contexte. Il y a eu toute une conspiration fondée sur une désinformation manifeste au sujet des vaccins, combinée des tropes sur le contrôle mondial exercé par le Forum économique mondial et l'Organisation mondiale de la santé. Dans les faits, il y a assurément des acteurs politiques — particulièrement parmi nos amis du caucus conservateur — qui continuent d'épouser ce genre de théories du complot.
    À mon avis, il y a une pression sous-jacente qui s'exerce en ce sens. Si ce thème n'avait pas été abordé de cette façon, les politiciens à l'extrémité du spectre n'auraient pas eu le matériel nécessaire pour tenir le genre de discours ridicule qui a mené à la paralysie de notre pays et, en fin de compte, aux mesures extrêmes qui ont été prises en vertu de la Loi sur les mesures d'urgence.
    D'ailleurs, la logique veut que sans mésinformation ou désinformation sur lesquelles s'appuyer, les acteurs politiques malveillants de l'autre côté du spectre n'auraient pas ce qu'il faut pour attiser des braises qui finissent par poser des menaces existentielles. Je le dis parce que s'il est vrai qu'il y a eu une désescalade relativement pacifique à ce moment‑là, il est également vrai que cela a mené à une insurrection le 6 janvier aux États-Unis. Il y a de nombreux exemples dans le monde où la désinformation est utilisée pour alimenter la rhétorique génocidaire.
    Nous avons entendu parler de beaucoup d'acteurs étatiques différents ici. Nous en parlerons davantage au cours des prochaines séries de questions. Je me demande toutefois comment vous conciliez tout cela.
    J'ai deux choses à dire rapidement.
    Je suis tout à fait d'accord pour dire que la mésinformation et la désinformation peuvent exacerber énormément la colère politique et générer des mouvements comme celui du 6 janvier et le convoi des camionneurs. Ces mouvements peuvent être fortement liés à la mésinformation et à la désinformation.
    La mésinformation et la désinformation sont corrélatives. En fait, l'une des choses que nous avons démontrées à maintes reprises dans nos études, c'est qu'elles n'ont pas besoin de rejoindre l'ensemble de la population. Il suffit de rejoindre un petit segment assez actif et qu'il y ait un petit groupe de personnes très investies, animées de perceptions erronées et d'une énorme colère politique — en partie née de la mésinformation et de la désinformation. Cela peut avoir un impact politique énorme.
    Je suis tout à fait d'accord avec vous sur ce point.

  (1145)  

    Quand je parle de risque existentiel, il est clair que la mésinformation et la désinformation sont utilisées pour cibler les communautés en situation minoritaire. Je vais vous donner un exemple.
    Les nationalistes blancs et les néonazis au Canada diffament les musulmans, les minorités et les personnes trans, ce qui se traduit par des actes de violence. J'aimerais vous parler de l'attentat à la bombe commis à la mosquée d'Ibrahim Jame, ici même. Il y a des gens qui se radicalisent en ligne, alimentés par des campagnes de désinformation et de mésinformation.
    Je vous dirais également que les événements qui se sont produits parallèlement au convoi des camionneurs ont fait en sorte que les parlementaires ne se sentaient pas assez en sécurité pour se présenter au travail. Il y a à peine une semaine, une pierre a été lancée à ma fenêtre. Le climat politique violent dans lequel nous nous trouvons constitue un risque existentiel pour nos institutions démocratiques.
    N'êtes-vous pas d'accord?
    Le phénomène que vous avez décrit constitue effectivement un risque existentiel. Tout ce que je peux dire, c'est que nous n'avons pas encore observé de lien direct avec les résultats des élections. Cela ne veut pas dire que la mésinformation n'est pas potentiellement profondément préjudiciable ou dommageable pour la démocratie d'autres façons.
    Nous allons commencer notre deuxième série de questions de cinq minutes.
    Allez‑y.
    Merci beaucoup, monsieur le président, et merci à nos témoins d'être ici.
    Monsieur Chiu, l'information que vous avez fournie au Comité montre clairement qu'il y a deux poids, deux mesures entre la façon dont le Cabinet du premier ministre a traité une menace perçue de désinformation ciblant ses intérêts politiques et celle dont elle a traité une menace ciblant les intérêts de ses adversaires politiques, et il ne s'agit pas seulement du Cabinet du premier ministre, mais de tout l'appareil gouvernemental et des ressources énormes dont il dispose, soit directement grâce au Centre de la sécurité des télécommunications, soit par les services de renseignement, soit par les capacités de communications d'un gouvernement de la taille du gouvernement du Canada.
    Êtes-vous d'accord avec cela? De plus, auriez-vous quelque chose à ajouter au sujet de cette politique du deux poids, deux mesures?
    C'est en tout cas l'impression que j'ai moi-même. Les cinq personnes qui composent le groupe d'experts et les membres du Groupe de travail sur les menaces en matière de sécurité et de renseignements visant les élections sont des décideurs qui évaluent les renseignements agrégés qui leur sont fournis, de sorte qu'ils sont très loin de l'endroit où la désinformation et la mésinformation se produisent localement.
    Le Canada compte actuellement 338 circonscriptions. Il y a beaucoup de collectivités et de circonscriptions qui sont relativement isolées. Steveston—Richmond-Est, par exemple, se trouve dans la ville de Richmond, où plus de 55 % de la population est d'origine chinoise et les autres citoyens sont également d'origines multiculturelles. Il y a là amplement d'occasions pour des acteurs étrangers ambitieux d'influencer les résultats et de faire changer les gens d'avis.
    Si vous me le permettez, pour les 90 dernières secondes environ, je vais céder la parole à mon collègue, M. Brock.
    Vous avez parlé d'attaques contre votre intégrité. Seriez-vous disposé à faire part au Comité de certaines des attaques personnelles que vous avez vécues?
    Si vous pouviez vous en tenir à environ 45 secondes, je céderais ensuite la parole à mon collègue.
    Absolument. Même tout récemment, lorsque j'ai été convoqué à l'audience du Comité, il y avait encore de la désinformation qui circulait sur les ondes réglementées par le CRTC, selon laquelle je serais un menteur, il n'y aurait aucune preuve du génocide des Ouïghours que je dénonce et le registre que je propose pour contrer l'ingérence étrangère viserait uniquement à persécuter le peuple chinois.
    Ces attaques se poursuivent. J'imagine qu'ils craignent que je me présente à nouveau et par conséquent, que cela nuise à leur capacité de propager ces attaques.

  (1150)  

    Merci beaucoup de votre honnêteté avec le Comité. Je peine à imaginer les difficultés auxquelles quelqu'un comme vous et votre famille avez pu être confrontés à la suite de ces attaques.
    Je cède la parole à M. Brock.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Chiu, votre expérience est extrêmement troublante et alarmante pour les parlementaires et les Canadiens. Je suis vraiment désolé que vous ayez vécu une telle campagne de désinformation et de mésinformation de la République populaire de Chine et que votre propre gouvernement vous ait lamentablement laissé tomber.
    Cela dit, j'aimerais avoir de plus amples renseignements au sujet du candidat libéral qui a gagné cette élection. Vous avez parlé du fait qu'il a amplifié la mésinformation et la désinformation. Pouvez-vous me donner d'autres exemples de la façon dont il s'y est pris?
    D'après ce que je comprends, il a participé à des entrevues à la radio et à des événements communautaires, où il a annoncé publiquement qu'il n'allait pas appuyer ce qu'il a qualifié de « registre anti-asiatique de l'ingérence étrangère ». Il n'y avait aucune précision sur l'effet que le projet de loi C‑282, que j'avais proposé, aurait eu exactement. Il n'y avait aucune mention d'aucun pays, quel qu'il soit. Le fait est qu'il visait à injecter de la transparence dans les activités de lobbying politique, mais il n'a pas saisi ces occasions pour clarifier ces subtilités. Ce faisant, en ne m'aidant pas à rétablir ma réputation, il a contribué à perpétuer les tentatives d'assassinat à mon égard.
    Cela s'est‑il poursuivi tout le long du processus électoral?
    Oui.
    Merci.
    Nous entendrons M. Fisher pendant cinq minutes, puis les interventions suivantes seront de deux minutes et demie et deux minutes et demie. Nous passerons ensuite au deuxième groupe de témoins.
    Allez‑y, monsieur Fisher.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Merci à tous nos témoins d'être ici.
    Monsieur Kalenský, je suis très préoccupé par la façon dont la désinformation passe des recoins sombres d'Internet au grand public. Tout commence par un mensonge, probablement sur Internet. Celui‑ci est amplifié par de faux comptes et des médias bidon. Ensuite, cela devient un mot-clic. Il devient un peu plus légitime lorsque les médias de presse idéologiques le reprennent. Enfin, il finit par se retrouver dans les médias grand public ou dans le programme ou les discours d'un parti politique.
    En 2019, lorsqu'une famille syrienne établie à Halifax est décédée dans un incendie tragique, le premier ministre a retransmis mon message de condoléances, et tout à coup, mes comptes de médias sociaux ont été inondés de théories du complot racistes et de haine au sujet de cette famille et de cet événement tragique. De toute évidence, des acteurs malveillants et des robots sont entrés en jeu ici et se sont mis à propager de la désinformation haineuse.
    Cela me fait penser à Alex Jones, qui a mené une campagne aux États-Unis afin de nier le massacre d'enfants à l'école primaire Sandy Hook. Il a prétendu qu'il s'agissait d'une mise en scène et que les parents endeuillés étaient des acteurs. Les pages commémoratives des jeunes enfants tués ont été inondées de propos vitrioliques à l'endroit des parents et des personnes endeuillées.
    Il a récemment dit qu'il savait que ce qu'il disait n'était pas vrai; cependant, et c'est choquant, en 2022, un sondage publié dans The Economist a révélé que près de 20 % des Américains croyaient que des fusillades de masse comme le massacre de Sandy Hook étaient des mises en scène pour appuyer le contrôle des armes à feu.
    Monsieur Kalenský̓, comment cela est‑il possible? Comment une telle chose, un mensonge ignoble d'un exécrable théoricien du complot, peut‑elle s'incruster autant dans l'esprit de citoyens ordinaires?
    Je crains d'avoir du mal à vous répondre dans le peu de temps dont je dispose, car il s'agit d'un sujet très complexe.
    Je ne peux pas vous dire quel est le niveau de coordination entre Alex Jones et les très grands acteurs de la désinformation, principalement Moscou; cependant, cela ressemble beaucoup au genre de travail que la Russie aime faire partout dans le monde. Chaque fois qu'il y a une attaque terroriste en Europe, que ce soit à Bruxelles, à Paris ou à Londres, chaque fois, on voit les canaux prorusses se propager exactement de la même façon et prétendre que c'est une mise en scène. C'est une mise en scène destinée à imposer un plus grand contrôle à la population.
    Ce qu'Alex Jones a fait ici, c'est essentiellement le travail de la Russie. Je ne sais pas s'il l'a fait parce qu'il a été payé pour cela. Je ne sais pas s'il l'a fait parce que ce n'est qu'un idiot utile exploité par les désinformateurs russes, mais c'est essentiellement ce qu'il a fait.
    Si ces campagnes peuvent produire un résultat aussi spectaculaire, c'est surtout une question de nombres. Il ne s'agit pas seulement des médias sociaux, cela concerne aussi les médias traditionnels. L'écosystème contrôlé par l'État russe, l'écosystème de diffusion par procuration composé de sites comme Infowars, Breitbart, ZeroHedge et d'autres médias semblables, qui affirment toujours qu'ils sont la seule alternative indépendante au discours dominant, ne font habituellement que répéter la désinformation russe.
    De plus, il y a des acteurs locaux qui les aident à amplifier tout cela, qu'il s'agisse d'agents rémunérés ou non. Il y a beaucoup de preuves que la Russie paie des centaines de millions de dollars chaque année pour alimenter ces gens, afin qu'ils diffusent ses campagnes de désinformation: des politiciens, des influenceurs des médias sociaux, etc. Il peut aussi s'agir d'alliés idéologiques; il peut s'agir de simples idiots utiles. Parfois, il peut simplement s'agir de personnes cyniques qui savent qu'elles mentent, mais cela les aide à atteindre leurs objectifs politiques ou autres.

  (1155)  

    Monsieur Chiu, vous avez entendu l'histoire de la famille de Halifax, de la famille syrienne décédée. Vous m'avez entendu dire qu'Alex Jones niait l'assassinat d'enfants dans des écoles.
    Accepteriez-vous l'appui d'Alex Jones, ou rejetteriez-vous catégoriquement cet appui?
    Je ne suis pas vraiment au courant de ce qu'il a dit. Je ne prête pas beaucoup attention à Alex Jones.
    La seule chose qui me préoccupe, c'est d'imaginer ce qui se passerait si de la désinformation était diffusée sur WeChat dans une langue qui n'est pas l'une des langues officielles, et le type de discours qui s'ensuivrait. Quelle réaction verrions-nous dans une telle situation?
    Les parlementaires ne seraient même pas au courant de la désinformation et des fausses informations diffusées. C'est la raison pour laquelle je ne cesse de dire que les plateformes WeChat, TikTok et Douyin nous posent des problèmes, car elles sont contrôlées par des intervenants étrangers issus de régimes dictatoriaux qui souhaitent nuire à l'harmonie très pacifique qui règne au Canada.
    Je vous remercie, monsieur Chiu et monsieur Fisher.

[Français]

     Madame Gaudreau, vous avez la parole pour deux minutes et demie.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Considérant que j'ai deux minutes et demie de temps de parole, je pense que j'ai plus de requêtes que de questions.
    Monsieur Bridgman, vous avez parlé des études menées aux États‑Unis, et nous aimerions bien les recevoir au Comité, ainsi que toute autre information complémentaire, qu'il s'agisse d'une variation sur le plan de l'engagement à la vie démocratique. C'est ça qui nous préoccupe. Au bout du compte, nous voulons trouver des moyens pour pallier ce qui peut arriver éventuellement.
    On parle de réduire la désinformation. Au bénéfice du Comité, j'aimerais également que vous nous donniez les éléments qui nous permettraient de mieux légiférer.
    Monsieur Kalenský, j'ai bien compris les pratiques exemplaires en matière de défense. Dans la dernière partie, vous avez parlé des moyens pour réparer les faiblesses. Si on manque de temps, j'aimerais aussi vous inviter à nous fournir des informations supplémentaires, puisque vous n'avez pas eu le temps de tout expliquer dans vos remarques liminaires.
    Je vous cède la prochaine minute pour m'en dire le plus possible.

[Traduction]

    Si vous souhaitez obtenir plus de détails, je serais très heureux de vous envoyer un rapport d'environ 20 pages sur ces quatre lignes de défense.
    Lorsqu'il s'agit de remédier aux faiblesses systémiques, je pense que nous disposons d'outils tels que l'éducation aux médias. Dans les pays où le niveau d'éducation aux médias est plus élevé, par exemple la Finlande, la Suède et le Danemark, on constate que le problème de la désinformation est moins important. Il n'est pas inexistant, mais il est moins important.
    En ce qui concerne les campagnes de communication stratégique, il faut certainement dépolitiser l'effort visant à accroître la confiance du public dans les institutions. Ainsi, il ne peut s'agir d'un stratagème de promotion des dirigeants politiques en place. Nous observons que dans les pays où le système de communication stratégique fonctionne bien, le niveau de confiance de la population est plus élevé, mais il faut également s'efforcer de réduire la polarisation, les différences entre la région de la capitale et la campagne et entre les personnes aux revenus élevés et celles aux revenus plus faibles. Encore une fois, nous observons que le problème de la désinformation est moins important dans les pays où le niveau de polarisation est moins élevé.
    Ce sont donc les parties qui concernent les façons de remédier aux faiblesses, mais si vous souhaitez obtenir plus de détails, je serais certainement heureux de vous envoyer le document.

  (1200)  

[Français]

    Merci beaucoup.

[Traduction]

    Je vous remercie beaucoup, madame Gaudreau.
    La parole est maintenant à M. Green.
    Vous avez deux minutes et demie.
    Je vous remercie.
    Je tiens à approfondir le sujet afin que notre étude puisse déboucher sur des recommandations éclairées, monsieur Kalenský, et je vous demanderais donc de nous préciser les mesures législatives ou réglementaires qui, en Europe ou ailleurs, ont permis de lutter efficacement contre les campagnes de désinformation, en particulier celles qui touchent les parlementaires, que ce soit en période électorale ou tout au long de l'année.
    Je ne suis pas sûr que l'on puisse trouver des mesures législatives qui visent uniquement les campagnes de désinformation en période électorale. Je pense qu'elles auraient une portée plus générale et qu'elles seraient indépendantes du cycle électoral.
    Nous avons observé la prise des mesures les plus énergiques, comme les interdictions pures et simples. La plupart d'entre elles ont été prises en Ukraine, mais en Union européenne, il y a aussi une interdiction frappant Russia Today et Sputnik. L'Ukraine est allée plus loin en interdisant également les chaînes qui n'appartiennent pas à l'État, mais qui continuent à diffuser les mêmes fausses informations que les chaînes appartenant à la Russie — ces chaînes appartiennent à Victor Medvedchuk, un oligarque ukrainien.
    La plupart des pays européens ne leur ont pas encore emboîté le pas, mais ces interdictions pures et simples seraient probablement la solution la plus énergique.
    Il faut cependant apporter quelques éclaircissements à ce sujet. Quel que soit le propriétaire, en particulier dans le cas du secteur privé, par exemple Meta et X, si les informations sont à vendre de toute façon, est‑ce que nous devrions interdire toutes les plateformes, selon vous?
    Aux États-Unis, les républicains — et même certains démocrates, je pense — exercent des pressions pour l'interdiction de TikTok. Pourtant, lorsqu'on pense à Cambridge Analytica et à la période qui a précédé le 6 janvier, on peut conclure que cette insurrection ne se fondait certainement pas sur TikTok.
    Pourriez-vous nous dire si l'interdiction pure et simple de ces plateformes relève plus du geste symbolique que de l'application réelle d'une politique rigoureuse qui empêcherait ces plateformes de migrer simplement vers d'autres intérêts commerciaux comme Meta ou X?
    Les agresseurs de l'information s'adaptent certainement à ces mesures en migrant vers d'autres plateformes, mais certaines recherches, même si elles sont malheureusement anecdotiques, révèlent qu'ils perdent toujours au moins une partie de leur audience — pas toute leur audience, mais au moins une partie —, et c'est parfois…
    Très brièvement, avant de terminer, j'aimerais revenir sur la question des parlementaires.
    Pourriez-vous faire quelques commentaires à ce sujet? Selon vous, devrions-nous avoir la possibilité d'examiner la façon dont les partis politiques utilisent ces mesures? Dans le cas des interdictions, pourrions-nous envisager, selon vous, d'adopter des mesures législatives qui empêcheraient les partis politiques partisans d'utiliser ces types d'outils pour le profilage et le ciblage de personnes à l'aide d'algorithmes et de désinformation?
    Je ne pense pas pouvoir vous donner une réponse appropriée en seulement cinq secondes.
    Pourriez-vous faire parvenir une réponse au Comité plus tard?
    Oui, je serais heureux de réfléchir à la question.
    Je vous remercie beaucoup.
    Je vous remercie.
    Nous aimons travailler avec des échéances, monsieur Kalenský. Si vous pouviez nous faire parvenir votre réponse d'ici vendredi, je vous en serais reconnaissant au nom du Comité. Nous disposons de très peu de temps pour notre étude et nous devons donc nous assurer que tous les renseignements nous parviennent en temps voulu.
    C'est ce qui termine notre discussion avec le premier groupe de témoins d'aujourd'hui.
    Monsieur Kalenský, monsieur Bridgman et monsieur Chiu, nous vous remercions d'avoir pris le temps d'être ici aujourd'hui et de communiquer vos renseignements au Comité. Ils nous seront très utiles.
    Nous allons suspendre la séance pendant quelques minutes, le temps d'accueillir le prochain groupe de témoins.
    La séance est suspendue.

  (1200)  


  (1205)  

[Français]

     Nous reprenons maintenant la séance.
    J'aimerais souhaiter la bienvenue aux témoins qui comparaîtront pendant la deuxième heure de la réunion. Nous accueillons M. Patrick White, professeur agrégé de journalisme à l'École des médias de l'Université du Québec à Montréal, qui comparaît à titre personnel.

[Traduction]

    De HabiloMédias, nous accueillons Matthew Johnson, directeur de l'éducation et Kathryn Hill, directrice générale.
    Monsieur White, nous vous entendrons en premier.

[Français]

     Vous disposez de cinq minutes pour faire votre déclaration d'ouverture.
    Je remercie les membres du Comité de l'invitation.
    Je suis journaliste depuis 1990 et professeur de journalisme à l'Université du Québec à Montréal depuis 5 ans.
     Je crois que nous sommes à la croisée des chemins, en 2024, à l'égard de la désinformation et de la mésinformation. L'automatisation des contenus a été multipliée avec le lancement du robot conversationnel ChatGPT 3,5 en novembre 2022. Également, une étude du Massachusetts Institute of Technology, publiée en 2018, indique que les fausses nouvelles circulent six fois plus vite sur Twitter que les nouvelles vérifiées. Il y a donc de quoi s'inquiéter.
    La situation s'est aggravée sur X, anciennement Twitter, depuis 18 mois, c'est-à-dire depuis la prise de contrôle par l'homme d'affaires Elon Musk, et ce, à la suite de plusieurs annonces, notamment celle de la possibilité d'obtenir un crochet bleu, le statut officiel, uniquement en payant quelques dollars par mois, et la restitution de comptes comme celui de l'ex-président américain Trump, lui-même un grand vecteur de désinformation.
    Ces algorithmes des réseaux sociaux favorisent évidemment les contenus qui font le plus réagir, ceux qui génèrent des commentaires, des mentions « j'aime » et des partages, ce qui amplifie la portée des discours extrêmes dont vous avez été témoins au cours des dernières années.
    L'une des inquiétudes actuelles est le blocage des nouvelles au Canada par Meta depuis l'été 2023, sur Facebook et Instagram, qui contribue également à la croissance de la désinformation et de la mésinformation au pays en censurant les informations des médias du pays, sauf pour les nouvelles sportives et les nouvelles culturelles.
    Une étude publiée récemment et citée par l'agence Reuters dit ceci:

  (1210)  

[Traduction]

    les commentaires et les partages de ce qui est qualifié de sources « non fiables » ont grimpé à 6,9 % au Canada dans les 90 jours suivant l'interdiction, comparativement à 2,2 % dans les 90 jours précédant l'interdiction.

[Français]

    Selon moi, au plan politique, il faut tenter de débloquer les nouvelles sur Facebook et Instagram d'ici la fin de 2024, soit avant la tenue des élections fédérales canadiennes. Les implications de cette désinformation sont politiques. Par exemple, sur Instagram, il faut désormais cliquer sur un onglet pour voir des publications politiques. Elles sont bloquées ou limitées volontairement par Meta depuis quelques mois. Sur Facebook, l'expérience est désagréable pour les citoyens, alors qu'on voit de plus en plus de nouvelles insipides se substituer aux grands médias du pays sur le fil d'actualité des citoyens canadiens. Cela appauvrit l'expérience et nuit à la vie démocratique, sans oublier que cela amène aussi une baisse du trafic sur les sites d'information. Selon une étude publiée récemment par l'Université McGill et à laquelle notre collègue qui a témoigné tout à l'heure a contribué, les nouvelles sont remplacées par des mèmes sur Facebook. On parle de la disparition de cinq à huit millions de vues par jour au Canada sur des contenus informationnels.
    Sur la question de l'intelligence artificielle, le gouvernement canadien devra également agir rapidement en encadrant ou en interdisant la diffusion de contenus basés sur l'intelligence artificielle, comme les hypertrucages et les trucages audio. Le projet de loi C‑63 répond en partie à cela pour ce qui est des contenus préjudiciables, mais il ne va pas assez loin. Il faut plus de transparence dans le cas de contenus générés par l'intelligence artificielle.
    Il faut encadrer également la propriété intellectuelle de façon urgente. Le journal Le Devoir de Montréal avait un article là-dessus ce matin. Quelles sont les limites à tolérer? Je vous encourage à adopter une loi rapidement à ce sujet et à ne pas attendre 30 ans comme ce fut le cas pour le projet de loi C‑11.
    Les parlementaires canadiens doivent aussi déclarer la guerre aux fermes de contenu qui produisent des fausses nouvelles sur demande au sujet de notre pays ou encore d'autres pays. Des gouvernements étrangers comme la Chine et la Russie sont souvent derrière ce stratagème. Rappelons que 140 millions de personnes ont été exposées à de fausses nouvelles aux États-Unis dans le cadre de l'élection de 2020. Évidemment, dans le contexte de l'élection américaine prévue cet automne, c'est très inquiétant. À ce sujet, je trouve étonnant que le Canada tolère la diffusion de communiqués de presse de propagande du Parti communiste chinois sur le fil de presse de Cision au Canada, et ce, depuis des années.
    En conclusion, c'est avec plaisir que je répondrai à vos questions. Il faut que le Canada soit sur un pied de guerre vis-à-vis de la désinformation, qu'elle soit générée par l'intelligence artificielle ou manuellement. Il faut mieux encadrer l'intelligence artificielle générative et protéger la propriété intellectuelle des médias et des artistes canadiens, qui pourraient faire les frais de ces progrès technologiques dans les prochaines années.
    Je vous remercie.
    Monsieur White, je vous remercie de votre déclaration, et je vous remercie d'avoir respecté votre temps de parole.

[Traduction]

    Madame Hill, vous disposez de cinq minutes pour vous adresser au Comité.
    Vous avez la parole.
    Bonjour, mesdames et messieurs les membres du Comité. Je m'appelle Kathryn Hill et je suis fière d'être directrice générale de HabiloMédias. Notre bureau est situé sur un territoire algonquin anishinabe non cédé. Nous vous sommes reconnaissants de l'invitation à participer à votre étude aujourd'hui.
    Aujourd'hui, je suis accompagnée de Matthew Johnson, directeur de l'éducation chez HabiloMédias.
    Si vous n'avez pas encore entendu parler de nous, HabiloMédias est un centre canadien d'éducation aux médias numériques. Nous sommes un organisme de bienfaisance sans but lucratif et notre objectif est de donner à tous les Canadiens les moyens d’interagir avec toutes les formes de médias avec assurance et esprit critique.
    Pour atteindre cet objectif, nous faisons progresser l'éducation aux médias numériques par l'entremise de recherches de calibre mondial, de formations et de la sensibilisation et la mobilisation de la population. Grâce à nos programmes, les Canadiens apprennent à devenir des citoyens numériques actifs, engagés et informés.
    L'éducation aux médias numériques est essentielle pour que la population et l'électorat soient informés et engagés. Le Canada a particulièrement besoin d'une approche coordonnée qui va au‑delà d'une compréhension de l'éducation aux médias numériques fondée seulement sur l'accès et les compétences.
    L'augmentation récente de la désinformation visuelle, des images manipulées, des robots et de l'intelligence artificielle, ou ce que nous appelons les hypertrucages, exige que nous nous engagions sérieusement dans la lutte contre la désinformation.
    Un rapport récent de Statistique Canada confirme qu'environ 43 % des Canadiens se sentent dépassés par les énormes changements dans la technologie et l'information. Par exemple, les photographies et les vidéos utilisées pour prouver qu'une chose s'est produite ou s'est déroulée d'une certaine manière ne sont plus fiables. Des recherches révèlent que les personnes de tous âges et de toutes convictions sont vulnérables à la désinformation. Les gens de tous les secteurs, y compris les parlementaires comme vous, doivent savoir comment vérifier les informations et faire la différence entre les sources fiables et celles qui ne le sont pas.
    Nous devons faire en sorte que la vérification des informations devienne une norme sociale et une habitude bien ancrée au Canada. En effet, les citoyens qui connaissent et qui pratiquent les techniques de vérification des informations sont en mesure d'atténuer l'impact potentiel de la désinformation et des autres préjudices en ligne.
    L'éducation aux médias numériques s'est avérée être une approche efficace pour lutter contre la désinformation. Partout dans le monde, des interventions ont été menées avec succès auprès de groupes allant des élèves du primaire aux personnes âgées. Nos propres évaluations et celles réalisées par des évaluateurs indépendants ont permis d'établir que notre programme FAUX que ça cesse et son matériel sont efficaces dans ce domaine.
    Les cinq dernières années ont également montré que toutes les approches ne se valent pas. Plus important encore, il est essentiel de se concentrer sur le discernement plutôt que de miser sur la démystification. De nombreuses interventions qui visent uniquement à enseigner aux gens à reconnaître les fausses informations ont pour effet secondaire de réduire la confiance dans les sources fiables, car elles enseignent essentiellement aux gens à devenir cyniques plutôt que sceptiques.
    Par ailleurs, les évaluations ont cerné trois éléments essentiels d'une intervention réussie en matière d'éducation aux médias numériques.Tout d'abord, il faut mettre l'accent sur la pensée critique et l'humilité intellectuelle. Deuxièmement, il faut donner une formation pratique sur le triage de l'information. Enfin, les interventions réussies reconnaissent que dans le monde en réseau dans lequel nous vivons tous, nous ne sommes pas seulement des consommateurs d'information, mais aussi des diffuseurs d'information. L'éducation aux médias numériques est donc essentielle pour lutter contre la désinformation et la mésinformation.
    Pour les parlementaires, qui sont des personnalités publiques élues, les enjeux liés à l'authentification et à la vérification des informations en ligne sont encore plus importants, étant donné qu'ils ont un vaste rayonnement public et qu'ils sont considérés comme des sources d'informations fiables. Lorsqu'une source ou un dirigeant de confiance commet un faux pas et diffuse des informations erronées, les effets peuvent atteindre un vaste public canadien et éroder la confiance des gens dans les institutions, et plus particulièrement dans le gouvernement.
    Les parlementaires et leur personnel ont besoin d'aide pour renforcer leurs compétences en matière de médias numériques, afin d'être en mesure de vérifier les informations en ligne.
    Compte tenu de tout ce qui précède, j'aimerais conclure en formulant deux recommandations.
    Tout d'abord, nous recommandons que le Parlement, tant à la Chambre des communes qu'au Sénat, exige que tous les parlementaires et le personnel suivent une formation obligatoire sur la façon de vérifier l'information et de lutter contre la désinformation et la mésinformation.
    Deuxièmement, comme nous n'avons cessé de le faire depuis 15 ou 20 ans, nous recommandons au gouvernement du Canada d'élaborer une stratégie en matière d'éducation aux médias numériques qui aide tous les Canadiens à acquérir les compétences nécessaires pour explorer l'écosystème de l'information en ligne en toute confiance et avec un esprit critique.
    Je vous remercie.

  (1215)  

    Je vous remercie, madame Hill. Je vous remercie également d'avoir respecté le temps imparti.
    Nous entamons maintenant notre première série de questions de six minutes.
    La parole est à M. Brock.
    Je vous remercie, monsieur le président. Je remercie également les témoins d'être ici aujourd'hui.
    J'aimerais d'abord m'adresser à M. White.
    Je lis un article intitulé « AI-powered disinformation is spreading—is Canada ready for the political impact? » au sujet de l'impact politique, au Canada, de la présence accrue de désinformation amplifiée par l'intelligence artificielle. Au début de l'article, on parle d'une affaire liée aux élections nationales qui se sont tenues en Slovaquie à l'automne dernier.
Quelques jours avant les élections de l'automne dernier, un mystérieux enregistrement vocal a commencé à faire circuler un mensonge en ligne.
Le fichier manipulé donnait l'impression que Michal Simecka, chef du parti Slovaquie progressiste, discutait de l'achat de votes avec un journaliste local. Or, cette conversation n'a jamais eu lieu. Il a ensuite été établi que le fichier était un hypertrucage audio.
Le jour de l'élection, Simecka a perdu contre le candidat populiste pro-Kremlin Robert Fico, à l'issue d'une lutte serrée.
Bien qu'il soit pratiquement impossible de déterminer si cet hypertrucage a contribué aux résultats finaux, l'incident met en évidence les craintes croissantes au sujet de l'effet des produits de l'intelligence artificielle sur la démocratie dans le monde entier, ainsi qu'au Canada.
    Selon Caroline Xavier, cheffe du Centre de la sécurité des télécommunications Canada, on craint qu'il puisse y avoir une ingérence étrangère si grave que les résultats électoraux doivent être remis en question. Elle a ajouté que nous savons que la désinformation et la mésinformation constituent déjà une menace pour les processus démocratiques et que l’intelligence artificielle risque d'amplifier ce phénomène, ce qui est très inquiétant.
    Selon vous, quelles sont les mesures actuelles prises par le Canada pour faire face à cette menace ou quelles mesures le Canada devrait‑il prendre pour y faire face?

  (1220)  

    Le Canada déploie déjà de gros efforts dans le cadre des projets de loi C‑18 et C‑11 pour le contenu canadien. De plus, grâce au projet de loi C‑63, il va également lutter contre la désinformation et le contenu préjudiciable. Est‑ce suffisant? Probablement pas, mais l'intelligence artificielle représente à la fois une occasion et une menace.
    En ce qui concerne les hypertrucages, j'encourage vivement le gouvernement à légiférer sur cette question dans les 12 à 18 prochains mois, en particulier lorsqu'il s'agit des hypertrucages audio et vidéo, unenjeu que vous avez déjà mentionné.
    Nous aurons beaucoup à faire dans les 12 prochains mois au sujet de cette question, compte tenu des prochaines élections fédérales au Canada.
    C'est exact.
    J'aimerais maintenant m'adresser à Mme Hill et à M. Johnson.
    Je vous remercie de votre présence. J'ai beaucoup aimé la discussion que nous avons eue à mon bureau il y a quelques semaines.
    J'ai écouté très attentivement votre déclaration préliminaire, madame Hill. Vous avez formulé quelques suggestions à l'intention des parlementaires, par exemple une formation obligatoire et une stratégie en matière de médias numériques pour l'ensemble du gouvernement. Pouvez-vous étoffer cette suggestion, s'il vous plaît?
    Oui, certainement. Souhaitez-vous que je parle de la stratégie en matière d'éducation aux médias numériques?
    J'aimerais que vous nous parliez des deux.
    Nous savons que la plupart d'entre nous n'ont pas reçu de formation sur la façon de vérifier adéquatement les informations. Ceux d'entre nous qui ont dépassé un certain âge n'ont certainement jamais reçu ce type de formation. Cependant, l'environnement de l'information évolue très rapidement, tout comme le volume et la vitesse de l'information que nous recevons. De nos jours, on ne peut plus se fier aux caractéristiques qui garantissaient autrefois la fiabilité d'une source — et on ne peut plus se contenter de ne consulter qu'une ou deux sources. Nous avons maintenant accès à un énorme menu.
    Nous pensons que les personnes qui travaillent pour le gouvernement, c'est‑à‑dire les parlementaires et leur personnel, sont aussi vulnérables que n'importe lequel d'entre nous au risque de se laisser duper et de lire quelque chose sans savoir comment vérifier ces renseignements correctement et facilement, que ce soit dans leur vie personnelle ou dans leur vie professionnelle. Nous savons qu'il existe des compétences très simples que les gens peuvent acquérir très rapidement pour les aider à consommer des informations avec confiance, à déterminer la fiabilité d'une source et à partager ensuite des informations exactes. C'est ce qu'il nous faut.
    Quels sont vos commentaires sur la stratégie en matière de médias?
    D'autres pays, dont nous avons entendu parler plus tôt ce matin, ont mis en place des stratégies, dont certaines sont en œuvre depuis plus de 15 ans. Cependant, la plupart des pays adoptent des stratégies qui abordent le problème d'un point de vue holistique, en reconnaissant qu'il s'agit d'un problème complexe.
    De nombreux facteurs ont une incidence sur un grand nombre de ministères, et ce, à tous les ordres du gouvernement. Nous devons donc consulter tout le monde pour déterminer comment nous allons nous attaquer à ce problème, car il ne fera que s'aggraver.
    Je vous remercie, madame Hill.
    Je cède le reste de mon temps à mon collègue, M. Kurek.
    Merci beaucoup, monsieur Brock.
    Bienvenue aux témoins. Merci du travail que vous faites.
    Dans la même veine, lorsque nous avons discuté du développement d'une stratégie nationale, j'ai mentionné qu'il existait sous le gouvernement conservateur de Stephen Harper un cadre national de littératie financière qui pourrait constituer un bon modèle pour faire la promotion des questions que vous avez soulevées.
    Pour les Canadiens qui nous regardent, je vous demanderais simplement de nous dire comment faire pour accéder aux ressources destinées aux parents, aux enfants, aux adolescents et aux personnes âgées qui sont offertes par votre organisme?
     Tout ce que nous faisons est gratuit. Nous publions tout sur notre site Web à l'adresse mediasmarts.ca en anglais et à l'adresse habilomedias.ca en français. Merci de me permettre de le mentionner. Nous mettons notre contenu entièrement bilingue à la disposition des enseignants, des tuteurs et des parents. Certaines de nos ressources s'adressent même expressément aux jeunes.
    Si vous avez des questions sur les médias ou sur l'espace numérique, je vous encourage à consulter notre site Web. Vous y trouverez toutes les informations que vous cherchez.
    Merci, monsieur Kurek.
    Madame Damoff, vous avez six minutes. Allez‑y.
    Merci, monsieur le président. Merci aux trois témoins de leur présence parmi nous aujourd'hui.
    Monsieur White, je vais commencer avec vous. Mme Hill a parlé de « sources fiables ». Je crois bien que la plupart des Canadiens pensent que les partis politiques sont des sources fiables. Or, le Parti conservateur s'emploie activement à véhiculer des théories conspirationnistes dont certaines prétendent que la pandémie est un complot ourdi par les élites financières mondiales dans le but de restructurer notre économie. D'autres de ces théories postulent que les politiques climatiques sont des tentatives pour limiter la liberté de mouvement et pour créer des « villes 15 minutes » qui restreindraient les libertés personnelles. Elles déforment ainsi un concept d'urbanisme tout à fait valide. D'autres théories vont jusqu'à affirmer que le Forum économique mondial est une conspiration élitiste internationale qui contrôle les gouvernements partout sur la planète.
    Il y a quelques minutes, au comité des finances, lorsque Yvan Baker a demandé qui était le dictateur le plus dangereux au monde, trois députés conservateurs ont mentionné Justin Trudeau. M. Baker a rectifié le tir en disant qu'il s'agissait en vérité de Vladimir Poutine.
    En faisant la promotion de ce type de discours auprès de la population canadienne, les partis officiels alimentent la méfiance envers les institutions démocratiques. Pourriez-vous parler des dangers inhérents au fait que des sources fiables — ou qui devraient être considérées comme fiables — propagent ce type d'information?

  (1225)  

    La méfiance en général se manifeste à l'égard des institutions, notamment les médias et les politiciens. Un autre facteur à considérer est l'émergence et la hausse, au cours des dernières années, du phénomène de l'évitement des nouvelles, surtout après les deux longues années de pandémie. À mon avis, cette attitude adoptée par une partie de la population au pays est un phénomène très important à prendre en compte.
    Comment combattre le décrochage des nouvelles? Je crois que les programmes d'éducation aux médias — comme les programmes obligatoires annoncés par le Québec qui commenceront en septembre 2025 — pourraient constituer une solution pour lutter contre la désinformation diffusée dans la sphère médiatique et politique.
    Merci.
    Madame Hill, comme HabiloMédias fait ce travail depuis le milieu des années 1990, vous avez observé un grand nombre de changements au fil des ans. Pourriez-vous décrire la façon dont le paysage a changé et les répercussions de ces changements non seulement sur les politiciens, mais aussi sur la société dans son ensemble?
    Je vais commencer, et mon collègue pourra enchaîner.
     À propos des changements, eh bien, tout a changé. Une des choses qui peuvent vraiment aider à comprendre ce qui se passe est de penser qu'auparavant, nous recevions passivement les informations dont nous abreuvaient les médias. Nous faisions confiance à ces sources d'informations. Ensuite, les informations se sont multipliées à mesure que le réseau Internet a pris de l'ampleur. Je parle des informations, et non pas des nouvelles. Il est important de faire la distinction. Chacun d'entre nous est devenu le centre d'un énorme système et d'un immense réseau. Sans exagérer, ces réseaux sont incommensurables. Le contenu que nous publions dans les médias sociaux peut parvenir aussi bien à 10 destinataires qu'à 10 millions.
    Notre façon de communiquer s'est profondément transformée. Un autre facteur qui contribue à l'évitement des nouvelles est le volume d'informations et la rapidité à laquelle les gens en sont submergés. Le plus grand changement est la perte du luxe ou du privilège que nous avions de recevoir passivement les informations. Aujourd'hui, les gens doivent participer. Ils doivent s'informer et exercer une pensée critique. Ils ont la responsabilité de vérifier les faits et de déterminer eux-mêmes la fiabilité des sources. Il faut développer la résilience des membres du public pour que ces derniers acquièrent les compétences qui leur permettront de faire ce qui précède. Voilà le meilleur moyen de contrer le courant en question.
    Il faut établir une réglementation. C'est indéniable. Tous les secteurs de la société doivent contribuer, mais de notre point de vue, notre expertise porte sur ce qui fonctionne et sur ce qui aidera les gens sur le terrain. Nous savons que l'éducation fait partie de ces moyens.
     J'ajouterais que le changement majeur le plus récent est le recours aux recommandations et aux mécanismes de tri algorithmiques pour gérer l'écosystème de l'information.
    Nous avons délaissé un environnement où nous consommions des informations traitées en majeure partie par des humains. Même si nous n'avions pas nécessairement accès aux salles de nouvelles, des processus étaient établis et compréhensibles.
    Actuellement, il est impossible pour les consommateurs — et souvent pour les personnes qui exploitent lesdites plateformes — de savoir comment les informations sont gérées. Ces plateformes sont gérées par des algorithmes d'apprentissage automatique et d'intelligence artificielle dont les décisions sont souvent fondées sur des données directes ou indirectes qui peuvent être inexactes ou discriminatoires ou amener les personnes qui consomment déjà du contenu conspirationniste ou de la désinformation à s'enfoncer davantage dans ce vortex.
    De façon plus générale, ces algorithmes provoquent l'aliénation des membres du public par rapport à l'écosystème d'information, car ceux‑ci ne savent pas comment les décisions en question sont prises. Des études menées par nous et par d'autres démontrent que cette aliénation est évitable. Elles révèlent que la population possède les capacités de mieux contrôler les informations et de devenir ainsi plus résiliente à la désinformation.
    Je viens de vous mentionner l'ajout important le plus récent à notre programme de littératie sur les médias numériques, que nous modifions constamment en fonction des changements dans l'environnement et des nouvelles études.

  (1230)  

    Merci, monsieur Johnson.
    Merci, madame Damoff.

[Français]

     Monsieur Villemure, vous avez la parole pour six minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Madame Hill, vous avez parlé de la pensée critique: est-ce que c'est quelque chose qui est disparu de la société?

[Traduction]

    Je ne dirais pas que la pensée critique a disparu. C'est quelque chose qui est difficile à mesurer, mais comme Mme Hill le disait, nous savons que le fondement de la pensée critique est l'humilité intellectuelle. C'est la capacité de reconnaître que nous faisons parfois fausse route et d'établir des normes qui nous obligent à changer d'idée s'il le faut.
    De manière générale, l'environnement médiatique anglophone et l'environnement médiatique francophone pour autant que je sache se sont polarisés. C'est moins le cas au Canada qu'aux États‑Unis, mais les débats sont plus clivants qu'ils l'étaient dans le passé.

[Français]

    Merci.
    Monsieur White, je vous remercie beaucoup d'être ici aujourd'hui. Selon votre réputation, vous étiez la personne à inviter. Par contre, j'ai manqué le début de votre allocution. Est-ce qu'il serait possible de me donner vos notes?
    J'ai déjà transmis les notes au Comité et j'ai mis toutes les sources également. Ça me fera plaisir de les envoyer à votre bureau.
    Merci beaucoup.
    J'ai quelques petites questions rapides en rafale et des questions plus générales par la suite.
    Le Centre de recherche en informatique de Montréal a développé un algorithme qui va permettre d'identifier les hypertrucages avant qu'ils ne fassent du dommage. Est-ce que c'est crédible?
    Oui, absolument. Il y a également des outils pour tester la viralité des informations, comme CrowdTangle, auquel Meta va malheureusement bloquer l'accès de chercheurs et de collègues.
    Effectivement, il y a moyen, avec des technologies comme ça, d'identifier quelque chose qui pourrait devenir viral assez rapidement. Ça existe depuis plusieurs années. Les médias s'en servent souvent pour faire des choix par rapport à leur page d'accueil, ou encore pour sélectionner des informations qui vont être envoyées rapidement aux internautes, aux citoyens.
    Croyez-vous qu'une application comme TikTok peut conditionner certains segments de la population?
    Un des dangers de TikTok, en ce moment, est que ça devient un moteur de recherche pour les 10 à 30 ans, alors qu'on sait très bien que TikTok n'est pas un moteur de recherche. On sait également qu'il y a des risques majeurs de transmission des données d'utilisateurs canadiens au gouvernement du Parti communiste chinois.
     Les États‑Unis ont imposé un échéancier de 270 jours avant le blocage éventuel de TikTok, au début de 2025, et le Canada devrait entamer une réflexion à ce sujet. TikTok est devenu une source d'information importante chez les jeunes. C'est également devenu un moteur de recherche qui, pour bien des jeunes, remplace Google. Ça peut causer des inquiétudes importantes pour la suite des choses.
    Cependant, il faut avouer que TikTok est un réseau social de divertissement avant tout, et non un réseau d'information.
     Merci beaucoup.
    Croyez-vous qu'au fil du temps, avec les fausses nouvelles, les faits alternatifs et toutes ces choses-là, le mensonge est devenu socialement acceptable?
     Il est sûr que l'amplification des réseaux sociaux, la polarisation de la politique et la baisse de la confiance envers les médias contribuent à ce phénomène. Cependant, je n'irais pas aussi loin que ça.
    Dans le cadre d'études antérieures, on a fait remarquer que, le vrai n'étant pas à la portée de tous, le vraisemblable le remplaçait.
    Oui, effectivement. C'est pourquoi je milite ce matin pour l'établissement d'un programme obligatoire d'éducation sur les médias et les médias numériques dans les écoles primaires et secondaires du pays. On pourrait même offrir une formation aux personnes âgées. On pourrait parler ici d'éducation numérique.
    Savez-vous que, lorsque vous publiez quelque chose sur les réseaux sociaux, ça peut faire la une du National Post le lendemain matin et être lu par 10 millions de Canadiens? Si tous les citoyens le savaient, les gens y penseraient 70 fois 7 fois avant de publier des informations sur les réseaux sociaux. D'ailleurs, je n'utilise jamais l'expression « médias sociaux », parce que ce ne sont pas des médias.

  (1235)  

    Vous avez absolument raison.
    Facebook n'aura jamais de journalistes à Moose Jaw ou à Rimouski.
    On doit donc protéger les médias d'information. Je salue d'ailleurs le renouvellement du programme d'aide fédérale aux médias et l'importance qu'on accorde au soutien financier de nos médias. On ne veut pas les voir disparaître à court, à moyen ou à long terme.
    Je suis tout à fait d'accord. De notre côté, le soutien aux médias locaux est très important.
    Vous avez parlé un peu plus tôt de l'évitement des nouvelles. Les médias qui utilisaient Facebook comme principal moyen de diffusion se sont retrouvés coupés de son réseau. La décision de Facebook d'arrêter de relayer les nouvelles contribue-t-elle à cet évitement des nouvelles?
    Oui, absolument. C'est un geste qu'on doit considérer comme étant celui d'une mauvaise entreprise citoyenne. Il est inacceptable que les nouvelles soient bloquées au Canada. Nous sommes le seul pays du G7 où on n'a pas accès aux informations, par exemple, lorsqu'il y a des feux de forêt dans les Territoires du Nord‑Ouest. Les élections américaines auront lieu au début du mois de novembre et la prochaine élection générale au Canada aura probablement lieu l'année prochaine. Ce blocage devient effectivement un très gros problème pour l'ensemble de la société canadienne.
    L'usage d'hypertrucages dans un cadre électoral comme celui des élections américaines est-il prévisible?
     Oui, absolument. Souvent, on exige une transparence de la part des médias quant aux outils qu'ils utilisent. La plupart des médias ont maintenant une charte en vertu de laquelle ils doivent indiquer si un logiciel d'intelligence artificielle a été utilisé. Les médias, eux, sont donc transparents, mais il va aussi falloir exiger une transparence totale de la part des réseaux sociaux quant à leurs algorithmes.
     La bonne nouvelle, c'est qu'il y a des ententes sur le rôle des médias et la vérification des faits entre les grandes agences de presse internationales comme la Presse canadienne, Reuters, l'Agence France‑Presse et l'Associated Press. En quelques minutes ou en quelques heures, on pourrait donc déboulonner ces vidéos. Cependant, c'est extrêmement inquiétant pour la suite des choses, parce qu'il y aura effectivement des hypertrucages au cours de la prochaine élection fédérale.
    Merci beaucoup.
    Merci, monsieur Villemure.

[Traduction]

    Merci, monsieur White.
    Monsieur Green, vous avez la parole pour six minutes.
    Merci beaucoup.
    Je vais faire de mon mieux pour permettre à tous les témoins d'intervenir, car nous avons la responsabilité de recueillir des recommandations solides. Les témoins ont fait part de leurs recommandations dans leur déclaration liminaire, mais je voudrais leur donner l'occasion de les approfondir s'ils le souhaitent.
    Pourriez-vous fournir des exemples de pratiques exemplaires adoptées par d'autres pays pour contrer la désinformation, la mésinformation et la malinformation dans le travail des parlementaires?
    Nous pouvons passer de M. White aux autres témoins. L'ordre des interventions n'a pas d'importance.
    Je vais commencer.
    Je ne peux pas parler du travail des parlementaires en particulier, car nous n'avons pas fait de recherche sur le sujet. Nous avons examiné la société en général, l'ensemble des citoyens, y compris les parlementaires. Par conséquent, ce qui vaut pour les citoyens vaut pour les parlementaires et le personnel de leur bureau.
    Menez-vous une réflexion ou tenez-vous des discussions sur l'utilisation des outils en question par les partis politiques?
    Je suis désolée. Pourriez-vous reformuler la question?
    Vous utilisez vos études aux fins d'éducation du public, mais je me demandais si vos champs d'intérêt vous amenaient à vous pencher sur la manière dont les partis politiques pourraient se servir de ces outils et de ces tactiques pour accentuer les divisions et les bouleversements sociaux que nous observons actuellement.
    Nous n'avons pas fait ce travail.
    Seulement à titre de précision...
    Très bien. Nous passons à M. White, au sujet des pratiques exemplaires.
    Je recommanderais d'examiner ce que fait l'Union européenne et les efforts déployés par 28 ou 29 pays pour financer massivement les programmes d'éducation aux médias et les programmes de lutte contre la désinformation. Allez consulter leur site Web et les conférences qu'ils ont organisées au cours des dernières années. L'Union européenne est vraiment la référence que vous devriez étudier.
    Vos études démontrent-elles que les recommandations, les politiques ou les lois en place ont produit des résultats perceptibles? Existe‑t‑il un moyen d'évaluer l'efficacité de ces mesures?

  (1240)  

    Ils le font en France depuis des années. Ils ont imposé des amendes salées à Meta et à Google pour la violation de la vie privée ou pour d'autres infractions. Mentionnons également la revendication de redevances à verser aux médias d'information partout en Union européenne. Oui. Ces pays sont les chefs de file dans tous ces domaines.
    Les pays qui soutiennent des stratégies comme celles‑là possèdent les preuves que cela fonctionne, comme cela a été mentionné ce matin.
    La Finlande est un excellent exemple. Ils font ce travail depuis un certain temps. Leur approche consiste à sensibiliser toutes les catégories de la population, que ce soit les enfants d'âge préscolaire ou les personnes âgées. Ils tiennent à ce que les citoyens soient en mesure de déceler la mésinformation ou la désinformation. Ils ont réalisé des études et mis au point d'excellents mécanismes d'évaluation qui démontrent que la population résiste beaucoup mieux aux tentatives d'influence issues de la mésinformation ou de la désinformation. Les gens sont beaucoup plus compétents, et beaucoup mieux outillés.
    Dans le cadre d'une étude financée par le gouvernement du Canada, nous avons discuté avec sept ou huit pays des initiatives lancées chez eux. Nous serions heureux de vous remettre les études et les rapports. La Finlande, la Lettonie, l'Australie et le Royaume‑Uni ont réalisé des progrès phénoménaux au cours des quatre ou cinq dernières années.
    Le Canada est un chef de file de la littératie médiatique. Nous avons une tradition fabuleuse et nous aimerions qu'elle se poursuive. Nous sommes un peu en retard, mais nous avons la possibilité de rattraper et de dépasser les autres grâce aux experts remarquables que nous avons au pays.
    Je vais vous avouer bien humblement quelque chose que j'ai fait qui se rapporte à l'honnêteté intellectuelle dont chacun doit faire preuve.
    Il m'est arrivé de transmettre des messages sur Twitter qui n'étaient pas 100 % conformes aux faits et qui ont peut-être porté préjudice à certaines communautés. La plupart des personnes qui reconnaissent les erreurs de ce type veulent les corriger afin de réparer les torts qui ont été causés.
    Je me demandais, madame Hill, si vous pouviez vous pencher dans vos futurs travaux sur la mise au point de ressources qui aideraient les parlementaires à ne pas répandre de mésinformation, de désinformation et de malinformation.
    Madame Hill, monsieur White, pourriez-vous également réfléchir à des moyens de hausser le niveau de responsabilité dans le discours public pour que les parlementaires s'assurent que le contenu qu'ils véhiculent est bel et bien fondé sur des faits? Pourriez-vous peut-être fournir des règles qui obligeraient les élus fédéraux à observer un niveau de responsabilité plus élevé et des normes éthiques plus strictes? À propos des débats populistes — alimentés par la gauche ou la droite —, lorsque les informations se répandent très rapidement, je souhaiterais que le Comité présente des recommandations non partisanes qui feraient avancer la réflexion.
     Madame Hill, monsieur White, est‑ce quelque chose auquel vous accepteriez de contribuer?
    Veuillez répondre très rapidement.
    Oui. Nous serions enchantés de le faire.
    Nous allons nous pencher avec plaisir sur la question.
    Merci.
    Merci, monsieur Green.
    Il faut passer à la série de questions de deux minutes et demie, car je dois réserver du temps aux travaux du Comité. Nous devons terminer à 13 h 5.
    Monsieur Kurek, vous avez deux minutes et demie. Allez‑y.
    Merci beaucoup.
    J'espère que les représentants de HabiloMédias pourront nous aider.
    J'aurais une autre question.
    Les conversations sur l'information, la mésinformation et la désinformation prennent assez souvent une tournure politique parce que certaines personnes retirent un avantage stratégique en accusant leurs adversaires de mentir. Étant député d'une circonscription rurale, j'entends beaucoup parler de la controverse sur les armes à feu. Je ne vous demande pas de prendre position, mais c'est un sujet qui engendre énormément de mésinformation véhiculée notamment par les partis politiques ici présents.
    Comment mettre en place un programme de littératie numérique qui permettrait de contrer la mésinformation et la désinformation et qui reconnaîtrait la nécessité de tenir des débats valides dans le cadre de conversations difficiles sur les politiques publiques?
     Un aspect fondamental de la littératie numérique est la compréhension de la différence entre un fait et une opinion. C'est une des notions que nous enseignons à partir de l'école élémentaire, car c'est la base de tout débat éclairé, comme vous le dites.
    Au‑delà de cette distinction entre les opinions et les faits, la littératie numérique nous aide à déterminer les sources d'information fiables. Les débats peuvent se tenir seulement si nous pouvons établir la distinction entre les opinions et les faits et que tous les aspects de la question sont traités au moyen de sources d'informations fiables et vérifiables.

  (1245)  

    Je crois qu'il ne me reste presque plus de temps. Serait‑il utile d'inclure quelque chose sur ces sites dans nos recommandations? Nous pourrions simplement dire de quel algorithme il s'agit. Une certaine transparence algorithmique pourrait être bénéfique. Cette information pourrait au moins être présentée. Nos deux témoins pourraient peut-être répondre par oui ou par non. Est‑ce que des recommandations en ce sens pourraient être utiles?
    La réponse courte est que cela est compliqué, mais, oui, il est possible de le faire, et ce serait utile.
    Oui, et la transparence — la transparence absolue — est essentielle pour s'attaquer à l'opacité.
    Merci, monsieur Kurek.
    Monsieur Bains, vous avez la parole pour deux minutes et demie.
    Merci, monsieur le président, et merci aux témoins de se joindre à nous aujourd'hui.
    Je commencerai par Mme Hill de HabiloMédias. Quelle est la portée de vos initiatives? J'ai des enfants adolescents et cette question m'intéresse donc vivement. Je suis également chargé de cours à l'université et j'ai donné un cours de trois heures sur la façon de trouver des sources d'information de qualité. Dans le cadre de ce cours, j'ai parlé des gens qui pensent trouver de bons renseignements sur des sites comme Wikipédia, et qui croient que tout ce qui s'y trouve est crédible; j'ai dit qu'il faut approfondir ses recherches au sujet des renseignements que l'on trouve dans n'importe quel magazine ou n'importe quel site en ligne; j'ai aussi parlé de toutes les recherches qu'il faut mener soi-même pour trouver une source d'information solide et fiable. J'aimerais savoir quelle est votre portée au Canada et à quels groupes d'âge vous vous adressez. Décrivez-vous ces questions de cette manière? Il existe, bien sûr, une différence entre ce qui sera communiqué aux jeunes de la maternelle à la 5e secondaire et aux étudiants de niveau universitaire, qui comprennent mieux ces questions.
    Nous rejoignons beaucoup de gens, mais nous pourrions en rejoindre davantage. Notre organisme est petit et ne compte que 12 employés. Nous recevons du financement en fonction des projets que nous menons. Nous existons et survivons donc en répondant à des appels de propositions pour recevoir du financement pour des projets de littératie sur les médias numériques.
    Cela dit, ce que nous craignons le plus, c'est que les formidables ressources que nous créons restent sur un site Web que personne ne consultera. C'est pour cette raison que nous déployons beaucoup d'efforts pour accroître notre public. Nous savons que nos ressources pédagogiques, par exemple, sont consultées plus d'un million de fois par année. Bon nombre de nos projets ou de nos recherches, lorsque nous en faisons la promotion, sont consultés des dizaines de millions de fois, peut-être...
    Nous n'avons que peu de temps. Je sais que les enseignants sont au coeur de ce que vous faites. Vous leur parlez de votre programme et je me demande s'ils y souscrivent. Comment l'accueillent-ils et jusqu'où se rend le programme?
    Nous travaillons avec tous les ministères de l'Éducation de toutes les provinces et de tous les territoires. Nous tenons à jour une liste de contacts dans le domaine de l'éducation qui compte plus de 1 500 enseignants à tous les niveaux de tous les ministères, et nous faisons la promotion de nos ressources auprès d'eux. Nous savons que des milliers d'enseignants consultent nos ressources. Tout est disponible gratuitement. Tout est clairement défini, pour chaque province et territoire, pour chaque programme scolaire. Un enseignant de mathématiques de 8e année à Terre-Neuve ou un enseignant d'anglais de 3e année au Yukon peuvent tous deux trouver une leçon sur l'éducation aux médias.
    Alors quels sont les résultats...
    Merci, monsieur Bains. Cela fait deux minutes et demie.
    Merci, madame Hill.

[Français]

     Monsieur Villemure, vous avez la parole pour deux minutes et demie.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur White, nous sommes ici au Comité de l'accès à l'information, de la protection des renseignements personnels et de l'éthique. Nous aurons à faire dans notre rapport des recommandations au sujet de la désinformation et de la mésinformation. Je vous cède le peu de temps qu'il me reste, c'est-à-dire deux minutes, pour que vous nous disiez quelles seraient vos recommandations pour réduire les effets ou les conséquences négatives de la désinformation et de la mésinformation.

[Traduction]

    J'invoque le Règlement, mes excuses, j'aime beaucoup les interventions de M. Villemure, mais malheureusement, l'interprétation en anglais n'est pas diffusée sur le canal anglais.
    D'accord. Nous allons essayer de régler le problème. J'arrête le chronomètre.

  (1250)  

    J'entends l'interprétation maintenant.

[Français]

    Monsieur Villemure, veuillez recommencer. Vous avez deux minutes et demie.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Monsieur White, notre comité, le Comité permanent de l'accès à l'information, de la protection des renseignements personnels et de l'éthique, devra proposer des recommandations sur les conséquences de la désinformation et de la mésinformation. Je vous cède le reste de mon temps de parole afin d'entendre vos recommandations, qui devraient se retrouver dans notre rapport.
    Comme je l'ai dit plus tôt, il est très important d'adopter très rapidement une loi visant à interdire les hypertrucages, qu'ils soient sous format vidéo ou audio, et de nature pornographique ou non.
    Il faut mieux encadrer l'intelligence artificielle au Canada, en particulier l'intelligence artificielle générative, qui fait appel aux robots conversationnels. On doit obtenir des réseaux sociaux une transparence totale quant à leurs algorithmes et mettre fin à l'opacité actuelle.
    Un des quatre autres objectifs importants à viser à court, à moyen, et même à long terme serait d'offrir des cours d'éducation civique sur les médias, l'information et la désinformation, et ce, dans les écoles primaires et secondaires, les collèges et les universités. Par ailleurs, pourquoi ne pas en offrir aussi aux personnes âgées, qui ont connu l'informatique sur le tard? Pour ma part, je l'ai découverte avec Apple en 1984, et je n'ai pas eu de téléphone portable avant 2002 ou 2003.
    Pour finir, j'ajouterais qu'il faut continuer à appuyer financièrement les médias d'information pour s'assurer de préserver notre écosystème d'information.
    Les normes de l'Union européenne peuvent-elles être considérées comme un étalon valable pour la création de telles lois?
    Il est certain que l'Union européenne, qui représente une trentaine de pays, a beaucoup d'influence. Nous pourrions en effet nous inspirer de ce qu'elle propose, mais aussi de la loi adoptée par la France pour interdire les fausses nouvelles durant les campagnes électorales.
    Évidemment, nous ne voulons pas amplifier la censure au Canada, bien au contraire, mais nous pourrions nous inspirer de la loi française pour tenter de combattre la désinformation, en particulier durant les campagnes électorales fédérales, provinciales ou municipales.
    Merci beaucoup.
    Madame Hill, pouvez-vous nous dire en quelques mots quelles seraient vos recommandations pour atténuer les conséquences défavorables de la désinformation et de la mésinformation? Si vous n'avez pas le temps de terminer, vous pourrez nous les transmettre par écrit après la réunion.

[Traduction]

    Mes recommandations seraient presque les mêmes que celles de M. White.

[Français]

    D'accord.

[Traduction]

    De toute évidence, nous manquons d'objectivité, mais nous sommes fermement convaincus que la formation change la donne, et les faits le confirment. Nous devons offrir des formations aux citoyens: aux enfants, aux jeunes adultes et aux personnes âgées. Au cours des cinq dernières années, nous avons constaté, preuves à l'appui, que la formation fonctionne réellement et qu'elle fait oeuvre utile. Il nous suffit de rejoindre tout le monde et de leur offrir la possibilité d'apprendre.

[Français]

    Merci.

[Traduction]

    Monsieur Green, vous avez la parole pour deux minutes et demie.
    Merci.
    Je tiens à souligner qu'il y a eu d'autres problèmes avec la diffusion de l'interprétation, mais je m'écarte du sujet.
    Bien que la formation soit certainement une étape importante et proactive pour s'attaquer à la mésinformation et la désinformation, je me demande si les témoins pourraient nous dire ce qu'ils pensent, encore une fois, de la reddition de comptes. Quelles recommandations notre comité devrait‑il envisager — s'il manque quelque chose — pour fournir de meilleures réponses législatives, réglementaires et, dans certains cas, peut-être pénales, en ce qui a trait à la reddition de comptes dans les cas de diffusion délibérée de mésinformation et de désinformation? Je fais allusion à la manière dont elles sont parfois utilisées pour attiser la haine, inciter à la violence politique et sociale et cibler des groupes minoritaires. J'ai parlé de la communauté transgenre, de la communauté autochtone, de la communauté noire, de la communauté juive et de la communauté musulmane, mais il y en a d'autres.
    Pourriez-vous nous expliquer comment nous pouvons veiller à ce qu'il y ait une meilleure reddition de comptes? Cela pourrait inclure les plateformes ou les entreprises, de manière plus générale.
    À part la formation, nous n'avons pas de recommandations pour les politiques, car cela ne relève pas de notre mandat. Nos recherches révèlent que de nombreuses personnes qui ont été victimes de certains incidents que vous avez décrits se sont tournées vers les forces de l'ordre pour obtenir de l'aide, mais que ces dernières n'étaient pas assez bien informées au sujet de ces phénomènes.
    Il est important que les décideurs et les parlementaires reçoivent une formation sur ces questions, mais il est tout aussi important de soutenir les forces de l'ordre et de veiller à ce qu'elles reçoivent une formation sur ces questions. Ainsi, lorsqu'une personne viendra les voir pour signaler un problème de cette nature, ou, par exemple, pour signaler qu'elle a été victime d'hypertrucage pornographique — nous savons que cette technologie est le plus souvent utilisée à cette fin —, elles connaîtront les lois et les règlements qui s'appliquent. Les forces de l'ordre auront une connaissance suffisante de ce qui se passe dans le monde des médias numériques pour être en mesure d'apporter leur aide.

  (1255)  

    C'est bien. Merci beaucoup.
    Monsieur White, je vous écoute.
    Tout d'abord, nous devons protéger dès maintenant la propriété intellectuelle des médias et des artistes des effets de l'intelligence artificielle, et ce, partout au Canada. Cela aura une incidence énorme sur la propriété intellectuelle au Canada. Il faut interdire l'utilisation des hypertrucages le plus rapidement possible.
    Pour ce qui est des réseaux sociaux, il faut légiférer pour imposer et obliger une transparence totale des algorithmes pour mieux comprendre ce qui se passe sur le plan de la circulation de l'information et de la désinformation.
    Merci, monsieur White.
    Merci.
    Merci, monsieur Green.
    Voilà qui met fin à ce groupe de témoins.
    Je tiens à remercier tous nos témoins — Mme Hill, M. Johnson et M. White — de leur présence aujourd'hui, et de leur participation à cette étude importante. Au nom des Canadiens, je vous remercie du travail que vous abattez. Au nom du Comité, je vous remercie d'être venus. Je vous laisse quitter la réunion.
    Nous allons maintenant discuter des travaux du Comité. Comme vous le savez, le 26 avril, nous avons reçu une lettre du commissaire de la GRC, à la demande de M. Green. Cette lettre porte sur SNC‑Lavalin.
    Je voulais simplement informer le Comité que nous attendons toujours la traduction des documents que M. Wernick a envoyés. J'aimerais savoir ce que vous voulez faire, compte tenu des documents que nous avons reçus de la part du commissaire de la GRC, mais aussi de M. Wernick. Je m'attends à ce que nous recevions la traduction bientôt.
    Je sais que l'on devait consacrer une réunion à cette étude, mais si vous envisagez que l'on doive se pencher davantage sur cette question, j'aimerais que vous en teniez compte pour la suite des choses.
    J'ai un peu de mal à comprendre. Nous demandez-vous d'approuver quelque chose maintenant, avant même d'avoir reçu l'information?
    Non. Nous avons reçu l'information de la part du commissaire de la GRC. Nous recevrons les autres informations de M. Wernick. Nous n'avons pas terminé l'étude. En fonction de cela et de ce que M. Wernick nous enverra, j'aimerais savoir ce que le Comité veut faire au sujet de l'étude sur SNC‑Lavalin.
    Savez-vous quand nous recevrons les documents traduits?
    Nous devrions les recevoir bientôt. Nous pensions les recevoir le 29, donc hier. Nous devrions les recevoir bientôt.
    D'accord, merci.
    Monsieur Villemure, allez‑y.

[Français]

     J'ai une question de planification: j'aimerais savoir combien de temps est prévu pour la discussion sur les travaux au Comité, étant donné que notre présence est requise ailleurs. Allons-nous terminer la réunion à 13 heures?

[Traduction]

    M. Barrett aimerait dire quelque chose. Nous aurons terminé à 13 h 5.
    Allez‑y, monsieur Housefather.
    Monsieur le président, je voulais mentionner que j'ai trouvé que certains éléments de la lettre de la GRC étaient un peu étranges. En particulier, l'on dit que la guerre en Ukraine est à blâmer pour le retard dans la transmission de l'information. Serait‑il possible de leur poser plus de questions à ce sujet?
    Nous pourrions le faire.
    J'ai lu la réponse et je...
    C'est pour cette raison que j'en ai parlé aujourd'hui. Les membres du Comité avaient peut-être des préoccupations au sujet de quelques éléments. Si c'est le cas, veuillez en faire part à la greffière.
    Je le répète, tenez‑en compte au fur et à mesure que l'étude sur SNC‑Lavalin progresse, car nous n'avons pas terminé cette étude. Nous attendons de recevoir ces renseignements et d'autres renseignements de M. Wernick. Nous voudrons peut-être rappeler le commissaire Duheme. Nous voudrons peut-être apporter des éclaircissements. Nous nous sommes certainement mis à écrire des lettres au sein de ce comité ces derniers temps.
    Monsieur Barrett, la parole est à vous.
    Monsieur le président, il reste cinq minutes et j'aimerais présenter une motion.
Que conformément à l'article 108(3)(h) du Règlement et à la lumière des récents rapports des médias, le Comité entreprenne immédiatement une étude sur la contravention présumée du ministre Randy Boissonnault aux lois sur l'éthique et le lobbying; que le Comité invite le ministre Randy Boissonnault et Kirsten Poon à témoigner individuellement ainsi que tout autre témoin pertinent; et que le Comité fasse rapport de ses conclusions à la Chambre.
    Monsieur le président, la motion a été distribuée à tous les membres du Comité, dans les deux langues officielles. Je vais en parler brièvement, car je sais qu'il ne nous reste pas beaucoup de temps.
    Notre comité a pour mandat d'examiner les questions de cette nature, et cet incident s'ajoute à une série de tractations contraires à l'éthique de la part du gouvernement Trudeau. C'est une nouvelle qui a eu l'effet d'une bombe et qui a été révélée par Global News. Il s'agit d'un ministre du gouvernement Trudeau impliqué dans des activités de lobbying auprès du gouvernement. Il a peut-être contrevenu à la Loi sur le lobbying et, bien sûr, des questions relatives à la Loi sur les conflits d'intérêts et au Code régissant les conflits d'intérêts des députés se posent.
    Le ministre Boissonnault a perdu son siège aux élections de 2019, et il a relancé son entreprise, Xennex, pour faire du lobbying auprès du gouvernement Trudeau, au sein duquel il avait été député. Le ministre a tenté de dissimuler cette affaire au public en se cachant derrière son partenaire d'affaires qui est aussi lobbyiste. Leur seul client était l'aéroport international d'Edmonton. En 2021, ils ont reçu 25 millions de dollars du fonds de relance créé en raison de la pandémie, un mois avant que M. Boissonnault ne soit nommé candidat libéral et seulement deux mois avant les élections fédérales.
    Des réunions ont eu lieu en 2021 et en 2022. Elles ont débouché sur l'octroi de subventions fédérales d'une valeur de 110 millions de dollars à l'aéroport international d'Edmonton. On a appris que le ministre et son partenaire d'affaires lobbyiste ont toujours des liens. De fait, M. Randy Boissonnault a caché le nom de l'entreprise dont il recevait des paiements, et il a omis de divulguer le nom de Navis Group, qui est le nouveau nom de son entreprise. C'est un tour de passe-passe, monsieur le président: il y a la dénomination commerciale et la dénomination de société. Il faudrait que quelqu'un fasse une recherche dans les registres de l'entreprise pour déterminer que l'on a dissimulé cette information.
    Cette entreprise, qui lui verse des paiements, fait simultanément du lobbying auprès du gouvernement, y compris auprès du ministère des Finances, dont M. Boissonnault était le ministre associé des Finances. L'entreprise a obtenu un accès direct à la ministre des Finances et vice-première ministre lors d'une réunion au sujet de la mise en valeur des carburants à base d'hydrogène. Monsieur le président, quelques mois après la réunion, le ministre a fait une annonce à l'aéroport international d'Edmonton, accordant aux initiatives locales en matière de carburants à base d'hydrogène des fonds fédéraux totalisant 9,74 millions de dollars.
    C'est troublant. C'est inacceptable. Il va sans dire que les Canadiens n'accepteraient pas ce genre de pratique dans le secteur privé, mais c'est une habitude du gouvernement libéral de M. Trudeau. Une fois de plus, il est pris en flagrant délit de pratiques contraires à l'éthique avec l'argent des contribuables. Cela sape la confiance du public. C'est pourquoi nous devons tenir des réunions sur cette question, monsieur le président. J'espère que la motion sera adoptée rapidement.

  (1300)  

    Je veux m'assurer de bien comprendre. Vous présentez la motion, c'est bien cela?
    Oui, c'est juste.
    D'accord. Nous discutons des travaux du Comité. La motion a été présentée en bonne et due forme.
    Je suis désolé, monsieur Fisher. Je n'avais pas vu votre main plus tôt. Je vais vous donner la parole, mais nous sommes saisis d'une motion en ce moment. Vous souhaitez intervenir à ce sujet?
    Je devrai lever la séance à 13 h 5. Nous n'avons pas d'autres ressources, alors, que nous lancions le débat sur la motion ou pas, la réunion se terminera à 13 h 5.
    Vous disposez de deux ou trois minutes, après quoi je devrai vous interrompre.
    Dans l'article de Global, l'on a reconnu à plusieurs reprises que le ministre Boissonnault a toujours respecté toutes les règles d'éthique auxquelles il est soumis en tant qu'élu, ce que le Commissariat aux conflits d'intérêts et à l'éthique a également confirmé. Je crois même que Global a cité des experts qui affirmaient qu'il avait respecté ces règles.
    D'après ce que je peux voir dans l'article, le ministre Boissonnault n'a rien fait de mal. Je pense que vous exagérez avec cette motion, monsieur Barrett. Bien sûr, si les commissaires veulent examiner cette question et y jeter un coup d'œil... Nous n'avons pas présenté de motion pour lancer une étude sur Jenni Byrne — conseillère de Pierre Poilievre dans le bureau du chef de l'opposition conservatrice —, parce que la commissaire examine cette question. Nous attendrons de voir si elle découvrira quelque chose de concret.
    Pour l'heure, je ne pense pas qu'il s'agisse d'une question que le Comité doit... Vous savez, nous pouvons certainement ajouter des noms à cette étude, si le Comité y tient tant, et si les conservateurs sont si impatients d'entamer une conversation à ce sujet. Nous pouvons certainement proposer des noms — des gens affiliés à Forecheck — et approfondir cette étude. Cependant, je suis d'avis que si les commissaires pensent qu'il vaut la peine d'examiner cette question, ils y jetteront un coup d'œil. Monsieur Barrett, vous n'avez sans doute pas oublié que les commissaires ont dit que les députés pouvaient communiquer avec eux pour leur faire part de leurs préoccupations. Je ne pense pas que notre comité devrait entamer cette étude. Cela freinerait les travaux que nous avons commencés et perturberait le calendrier que nous avons établi pour les études que nous voulons effectuer.
    Merci, monsieur Fisher.
    Madame Damoff, votre nom figure sur la liste. Lorsque nous reprendrons le débat — si nous le reprenons —, vous serez la première à intervenir.
    Malheureusement, nous n'avons plus de ressources. Je dois lever la séance.
    Je tiens à remercier le greffier, qui remplace Mme Vohl aujourd'hui, ainsi que nos analystes et nos techniciens.
    La séance est levée.
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