Passer au contenu
Début du contenu

TRAN Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.

Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.

Publication du jour précédent Publication du jour prochain

STANDING COMMITTEE ON TRANSPORT

LE COMITÉ PERMANENT DES TRANSPORTS

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mardi 23 novembre 1999

• 1842

[Traduction]

Le vice-président (M. Joe Comuzzi (Thunder Bay—Superior-Nord, Lib.)): Soyez les bienvenus à la 27e réunion du Comité permanent des transports.

Bonjour, monsieur Benson et monsieur Markey. C'est un plaisir que de vous revoir. J'occupe seulement le fauteuil pour quelques instants et je ne connais pas la procédure à suivre. Vouliez-vous nous faire une déclaration liminaire ou devions-nous passer directement aux questions?

M. Kevin Benson (président et chef de la direction, Lignes aériennes Canadien Ltée): Monsieur le président, si vous nous accordez quelques instants, je serais bien prêt à formuler quelques observations.

Le vice-président (M. Joe Comuzzi): Monsieur Benson, vous disposez de tout le temps dont vous avez besoin. Comme vous nous avez attendus, mettez-vous à l'aise et allez-y.

M. Kevin Benson: Je vais essayer de ne pas abuser de ce privilège. Merci.

Je vous remercie de m'avoir invité à revenir pour vous rencontrer à nouveau ce soir. Je n'ai pas l'impression qu'il s'est écoulé seulement quatre semaines depuis la dernière fois que nous sommes venus. J'ai plutôt l'impression qu'il s'est passé quatre mois, et c'est sans doute pareil pour un bon nombre d'entre vous.

Une voix: Trois ou quatre ans.

M. Kevin Benson: Trois ou quatre ans? Et on dit que le temps passe vite lorsqu'on s'amuse, n'est-ce pas?

Cette période a toutefois été très occupée pour tous les gens de notre secteur. Nous avons tous assisté à la surenchère entre Onex et Air Canada, une surenchère qui n'a sans doute pas déçu les actionnaires d'Air Canada.

Cette surenchère a pris fin lorsqu'un tribunal a déclaré que la proposition d'Onex était illégale. Bien entendu, Onex a maintenant retiré son offre et abandonné la partie, ce qui renouvelle l'attention pour l'offre qu'Air Canada a faite en octobre et qu'elle a postée à ses actionnaires il y a une huitaine de jours. Comme vous le savez, cette offre propose d'acquérir les actions ordinaires de Canadien à 2 $ l'action, d'effectuer une réorganisation et, d'après ce que nous avons compris, de fusionner les deux transporteurs.

Nous nous sommes prononcés en faveur d'un transporteur unique et nous maintenons notre position. En conséquence, nous sommes actuellement en pourparlers avec Air Canada pour essayer de comprendre l'offre qu'elle nous a faite, et surtout de comprendre les conditions de cette offre et le processus qui va sans doute en découler.

• 1845

Je souligne, monsieur le président, que nous en sommes encore au début de ce processus. Je crois que nous faisons des progrès, mais il reste encore beaucoup à faire. Nous devons développer une confiance mutuelle, nous devons comprendre et pouvoir expliquer l'offre d'Air Canada aux actionnaires de Canadien, nous devons obtenir l'assurance que les conditions imposées en ce qui concerne l'approbation du gouvernement et celle d'American Airline pourront être remplies.

Je souligne que nous y travaillons énergiquement. Nous sommes très conscients du délai du 7 décembre qu'Air Canada a imposé et nous ferons de notre mieux pour répondre à toutes ces questions d'ici là.

Entre-temps, les membres de Oneworld Alliance ont examiné l'appui et les droits relatifs à Air Canada que Star a obtenus. Ils se demandent si notre fusion avec Air Canada risque de les évincer totalement du Canada et se demandent s'ils devraient nous accorder leur appui.

American Airlines participe évidemment de très près à cet exercice et s'efforce de comprendre quelles conséquences les nouvelles ententes pourraient avoir pour elle. Elle nous a également demandé d'examiner une fois de plus nos besoins en capital, quels seraient nos besoins si nous restions indépendants.

Malheureusement, ces initiatives ne déboucheront pas avant deux semaines et je sais que vous aurez sans doute terminé votre rapport avant cela. Je voudrais donc, monsieur le président, conclure en faisant part de mon point de vue personnel.

En ce qui concerne la règle des 10 p. 100 pour la propriété d'Air Canada, une question qui a largement retenu l'attention ces derniers mois, j'estime que ce genre de restrictions sert beaucoup mieux la direction que les actionnaires, les clients ou les autres parties prenantes. Je crois qu'en fin de compte, les entreprises appartiennent à leurs actionnaires et que si on limite la propriété, ces restrictions devraient figurer dans les statuts de la société plutôt que dans une loi du Parlement. Ainsi, les actionnaires seront libres de se conformer à ces restrictions ou de les modifier s'ils le jugent souhaitable.

On a beaucoup parlé, ces dernières semaines, de la propriété étrangère qui est actuellement limitée à 25 p. 100. À cet égard, monsieur le président, je dirais que le transport aérien est certainement une industrie mondiale. Comme nous en avons eu la preuve ces dernières semaines, il existe souvent des façons de faire les choses indirectement lorsqu'on ne peut pas les faire directement.

Je crois que de nombreux Canadiens tiennent beaucoup à ce que le contrôle de ce secteur demeure au Canada, mais je dirais qu'à long terme nos compagnies aériennes, qu'il y en ait une ou deux, auront besoin d'avoir accès à l'énorme marché des capitaux américains, surtout si elles veulent concurrencer les gros transporteurs des États-Unis. Peut-être demanderais-je au comité de songer à recommander que cette limite de 25 p. 100 soit relevée.

Enfin, pour ce qui est des transporteurs régionaux, j'aimerais faire quelques observations à ce sujet. Je crois qu'on n'a pas grand-chose à gagner en demandant à un transporteur fusionné de se débarrasser de ses transporteurs régionaux. Il faudrait alors commencer par définir ce qu'est un transporteur régional. Le définit-on en fonction de la taille des avions? Dans ce cas, les transporteurs régionaux de Canadien utilisent des jets de 65 places tandis qu'Air Canada fait voler des jets de 50 places sur ses lignes principales. Ce n'est donc pas la définition.

Devons-nous tenir compte des routes? Là encore, Air Canada a tendance à se servir de ses transporteurs régionaux tandis que les nôtres desservent un grand nombre de routes principales sur courtes distances. Là encore, il faudrait se mettre d'accord pour définir les routes qu'ils desserviraient.

Dans bien des cas, nos deux compagnies se servent d'un transporteur régional pour développer une route, pour commencer à la desservir ou pour augmenter la fréquence de desserte au moyen d'un petit appareil pour ensuite la reprendre une fois qu'elle est bien lancée. Le système fonctionnerait-il ainsi si l'on a un transporteur distinct? Pourriez-vous développer cette route? Pourriez-vous étendre votre service sur une route donnée?

Enfin, du point de vue de la clientèle, je crois que les horaires du transporteur régional et du transporteur principal doivent être bien intégrés si vous voulez offrir le maximum de commodité aux passagers. Bien entendu, si un transporteur régional est indépendant, il ne sera peut-être pas incité à offrir un vol entre Sault Ste Marie et Toronto à 10 heures du matin pour assurer la correspondance avec les cinq ou six vols internationaux qui partent de Toronto. Autrement dit, ils obligeront peut-être un passager à arriver à 8 heures du matin pour prendre l'avion. En l'absence d'incitatif, ces transporteurs n'auront guère envie d'envoyer un avion peu chargé pour assurer la correspondance.

Monsieur le président, pour ces raisons et parce qu'il est nécessaire, au Canada, d'éviter au maximum les frais généraux inutiles, j'exhorte le comité, si possible, à ne pas recommander la cession des transporteurs régionaux.

• 1850

Monsieur le président, pour conclure, je tiens à exprimer, au nom de tous employés des Lignes aériennes Canadien, nos remerciements pour le temps et les efforts que vous avez consacrés à cette question, à nos problèmes, au cours des quatre dernières semaines. Je vous remercie.

Si vous avez des questions, je crois que nous sommes ici pour y répondre.

Le président (M. Stan Keyes (Hamilton-Ouest, Lib.)): Merci beaucoup, monsieur Benson, d'être revenu devant le comité et pour les grandes lignes de votre exposé. Nous comptons vous poser certaines des questions que nous avons également posées à d'autres témoins qui ont comparu devant nous au cours des deux dernières semaines. Nous avons préféré vous les poser directement ainsi qu'au représentant d'Air Canada qui comparaîtra après vous.

Madame Meredith, s'il vous plaît.

Mme Val Meredith (South Surrey—White Rock—Langley, Réf.): Merci, monsieur le président.

Monsieur Benson et monsieur Markey, je vous remercie d'être revenus répondre à nos questions.

Certaines des questions qui ont été soulevées ces dernières semaines portaient sur l'offre d'Air Canada. Selon plusieurs témoins, il semble qu'Air Canada deviendrait un transporteur national unique et que les transporteurs régionaux de Canadien desserviraient uniquement l'ouest du pays. C'est ce que certains témoins viennent de nous dire. Si c'est le cas, je voudrais savoir si Canadien peut survivre comme filiale d'Air Canada si elle n'est plus qu'un exploitant du réseau intérieur qui concurrencera les routes nationales d'Air Canada? Je crois qu'Air Canada n'envisage pas de réduire ses routes.

M. Kevin Benson: Monsieur le président, notre interprétation de l'offre d'Air Canada est peut-être un peu différente. Nous croyons qu'Air Canada ferait l'acquisition des actions de Canadien, la maison mère, et qu'elle ferait donc, du même coup, l'acquisition des actions du transporteur régional, Canadien Régional. La compagnie serait exploitée séparément, mais assurerait la coordination des horaires. Autrement dit, on chercherait à éliminer certains sièges vides et le gaspillage qui existe actuellement entre les deux compagnies. Canadien serait gérée comme une compagnie offrant des services complets et des routes internationales, des routes transfrontières et des routes nationales. Après s'être entendue avec les créanciers et avoir laissé suffisamment de temps, je suppose, pour que les employés comprennent les possibilités qu'offre une fusion, Air Canada songerait alors à fusionner les deux transporteurs.

D'après ce que j'ai compris, il ne s'agit pas du tout de faire de Canadien un simple exploitant du réseau intérieur. Ce n'est pas ce qui nous a été dit et ce n'est pas ce qui figure dans l'offre que nous avons reçue.

Mme Val Meredith: Croyez-vous que vos activités seront gérées à peu près de la même façon que maintenant, et seulement reliées à celles d'Air Canada du point de vue de la gestion?

M. Kevin Benson: Nous croyons qu'Air Canada fusionnerait très rapidement la planification du réseau et sans doute aussi la commercialisation et la vente. Pour ce qui est de la planification du réseau, cela permettrait d'établir un horaire pour les deux compagnies qui éviterait le gaspillage afin qu'il y ait un vol à 8 heures du matin et un autre à 10 heures du matin là où il y avait peut-être deux vols à 8 heures et aucun autre avant midi. Cette coordination se ferait rapidement, mais chaque transporteur continuerait à exploiter ses appareils et à recourir à son personnel pendant un certain temps.

Mme Val Meredith: Canadien a une flotte assez âgée. Si vous commandez du matériel neuf, qui va le recevoir? Air Canada sera-t-elle prête à donner à Canadien l'équipement neuf et les nouvelles routes et ses employés seront-ils prêts à l'accepter? Je ne vois pas comment cela peut fonctionner.

M. Kevin Benson: Monsieur le président, veuillez comprendre que nous en sommes encore au stade exploratoire et que nous nous posons la plupart de ces questions. Ce que je vous dis, c'est ma façon d'interpréter la proposition mais ce n'est pas nécessairement la réalité.

D'après ce que j'ai compris, tout d'abord, plusieurs appareils âgés des deux compagnies aériennes seront mis hors service. Les DC-10 de Canadien et les DC-9 d'Air Canada vont sans doute disparaître assez rapidement. Nous avons quelques 737 qui sont plus vieux que les autres et peut-être que certains d'entre eux seront également éliminés, ainsi qu'un bon nombre de petits jets F-28, qui commencent à se faire vieux.

Je crois qu'Air Canada a ensuite l'intention de rationaliser la flotte, autrement dit, de dire que si elle possède huit ou 10 appareils de tel type et nous-mêmes trois ou quatre, nous pouvons les mettre ensemble et les exploiter de cette façon pendant un certain temps, encore une fois, en cherchant des moyens d'optimiser l'utilisation des appareils de réserve et de prendre toutes sortes de mesures de ce genre. Mais Air Canada s'est d'abord et avant tout engagée à ne pas faire de mises à pied avant mars 2002. Tous les départs seront volontaires.

• 1855

Cela fait, elle devra utiliser le personnel actuel des compagnies aériennes. Je crois donc qu'il y a beaucoup d'avantages à sa proposition de partager la flotte et d'optimiser son utilisation.

Mme Val Meredith: Merci.

Le président: Merci beaucoup, Val.

Monsieur Calder, s'il vous plaît.

M. Murray Calder (Dufferin—Peel—Wellington—Grey, Lib.): Merci beaucoup, monsieur le président.

Kevin et Stephen, bon retour parmi nous.

Ces dernières semaines, j'ai ramené toute cette situation à 10 points que je vais aborder en fonction d'une certaine orientation politique. Je m'intéresse beaucoup à la façon dont cette fusion va se faire, mais nous avons été chargés d'élaborer une politique.

Vous avez déjà parlé du transporteur unique. Vous avez abordé la règle de propriété de 10 p. 100 et la règle de 25 p. 100 visant la propriété étrangère. Vous avez également abordé partiellement la politique à l'égard des transporteurs régionaux et parlé un peu des compressions d'effectifs au moyen de l'attrition, des indemnités de départ ou des autres dispositions qui seront mises en place lorsque les deux compagnies fusionneront. Je voudrais toutefois que vous nous parliez un peu de la politique concernant les créneaux dans les aéroports, les vols nolisés, le cabotage réciproque, les localités isolées et les programmes de fidélisation pour les grands voyageurs.

M. Kevin Benson: Je vais essayer d'y répondre, si vous le permettez, monsieur le président.

Je suppose que vous posez ces questions dans le contexte d'une fusion.

M. Murray Calder: En effet.

M. Kevin Benson: Ce n'est pas la seule option pour le moment, mais c'est certainement la principale.

M. Murray Calder: Oui.

M. Kevin Benson: Pour ce qui est des créneaux dans les aéroports, je crois qu'il y a seulement un ou deux aéroports du Canada où cela pose un problème. Il me paraît tout à fait raisonnable de demander à la nouvelle compagnie aérienne de libérer un certain nombre de créneaux pour permettre à la concurrence de s'implanter si elle le désire. Bien entendu, ces créneaux ont une valeur dans la mesure où il faut payer pour les obtenir et la compagnie mère devrait récupérer cet argent. Peut-être pourrait-on perdre ces créneaux si on ne les utilise pas. Si la compagnie aérienne qui en fait l'acquisition ne les utilise pas, les créneaux seront restitués à son propriétaire antérieur.

En ce qui concerne les affréteurs, je crois qu'il faudrait favoriser un système de libre entreprise et de libre marché. Si les affréteurs désirent offrir un service entre le point A et le point B et pensent pouvoir le faire de façon rentable, libre à eux. C'est ce qui incitera tous les transporteurs à rester honnêtes et concurrentiels.

Le cabotage me fait vraiment peur, même le cabotage réciproque. Comme je l'ai dit, nous sommes une très petite compagnie et le transporteur fusionné sera très petit lui aussi par rapport au moins à cinq grandes compagnies du sud de la frontière. Je crois que le cabotage réciproque se comparerait à une équipe de la Ligue nationale de football qui jouerait contre l'équipe d'une école secondaire. Cela nous ferait du tort. Je serais très inquiet.

M. Joe Fontana (London-Centre-Nord, Lib.): Parlez-vous de Green Bay ces jours-ci?

Des voix: Oh, oh!

M. Kevin Benson: Pour ce qui est des localités isolées, le système de libre marché fonctionnerait très simplement. S'il existe un débouché et un besoin, le système de marché tend à y répondre et je serais pour cette solution. Dans la mesure où une personne seulement se rend chaque jour entre le point A et le point B, dans tout système de libre marché, il est très difficile d'offrir un service. Mais s'il y a une demande solide, que ce soit pour un appareil à six places, 12 places, 18 places ou un gros avion exploité par le transporteur national, le marché répondra très rapidement à ce besoin. Je crois que tant que le marché est ouvert, et libre, il peut répondre au besoin.

À mon avis, les programmes de fidélisation pour les grands voyageurs sont d'une importance fondamentale pour tous. C'est un peu comme de l'argent en banque. Onex en a été consciente dès le début. Air Canada l'a admis également puisque, tant dans l'offre publique de rachat que dans l'offre qui a été faite, il est précisé que le système de points pour les grands voyageurs serait protégé.

M. Murray Calder: Merci.

Le président: Merci, monsieur Calder.

Michel Guimond.

[Français]

M. Michel Guimond (Beauport—Montmorency—Côte-de-Beaupré—Île-d'Orléans, BQ): Merci, monsieur le président. Ce soir, nous en sommes à notre 27e séance depuis le début de notre étude sur les transports aériens, et j'aimerais souhaiter la bienvenue au député libéral de Vaudreuil—Soulanges qui partage notre table pour la première fois. Je suis persuadé qu'il trouvera nos travaux intéressants.

Monsieur Benson, j'aimerais que vous nous traciez rapidement le bilan de la santé financière de Canadien en date d'aujourd'hui. Différents propos vous ont été prêtés et différentes interprétations ont été faites de ces propos. Comment qualifieriez-vous la santé financière de Canadien? Est-ce que le pire pourrait arriver d'ici la fin de l'année? Est-ce qu'on parle de six mois ou d'un an? Est-ce qu'American Airlines a garanti des fonds de façon illimitée, à peu près à la vitesse à laquelle coulent les chutes du Niagara? Comment se portent les finances de Canadien à l'heure actuelle?

• 1900

[Traduction]

M. Kevin Benson: C'est une question qu'on m'a posée à diverses reprises, et il doit m'être difficile de l'expliquer, car les journalistes ont tendance à déformer mes propos.

Je dirais tout d'abord que, de toute évidence, nous ne possédons pas aujourd'hui des liquidités suffisantes pour l'année prochaine. Nous dépensons environ 3 milliards de dollars par an et il va sans dire que nous n'avons pas cette somme en banque.

En revanche, tous les trimestres, nous évaluons notre situation de trésorerie, nous tenons compte des réservations prévues pour les 12 prochains mois, nous examinons les entrées de fonds que cela représente, faisons une comparaison avec nos dépenses prévues ou connues pour cette période de 12 mois, et, jour après jour, nous surveillons la situation pour voir à quel moment nous n'aurons pas les ressources suffisantes pour faire face aux sorties de fonds.

Lorsque nous avons procédé à cet examen en novembre pour le trimestre se terminant en septembre, nous avons constaté que, pendant une certaine période à la fin du premier trimestre et au début du deuxième, nous n'avions pas de ressources suffisantes pour faire face à nos obligations. American Airlines a accepté, à partir de la date de notre choix, de reporter certains paiements que nous leur devions jusqu'à l'été. Il est évident que c'est l'été et pendant le troisième trimestre que notre situation de trésorerie s'améliore, si bien qu'il nous sera possible de rembourser ce que nous devons à ce moment-là.

Un certain nombre de facteurs peuvent avoir des répercussions et ce, de façon assez immédiate. Tout d'abord, un changement dans les tendances de réservation de places. D'après mon expérience, c'est à la fin de 1996 que nous avons été témoins d'un changement radical et rapide de ces tendances, à l'époque où il y avait beaucoup d'incertitude quant à l'avenir de Canadien International, et les réservations ont presque toutes été annulées en environ deux jours. Il continuait d'y avoir un grand nombre de passagers à bord de nos avions, mais c'était tous des grands voyageurs qui utilisaient leurs points le plus rapidement possible. Cette situation peut évoluer très rapidement dès que les gens perdent confiance dans la compagnie aérienne.

Quant à l'appui d'American Airlines, cette compagnie fait preuve de prudence. Ses responsables savent que nous aurons les liquidités voulues pour faire face à nos obligations au cours du troisième trimestre et rembourser ce que nous leur devons pour les deux premiers trimestres. C'est pourquoi je pense qu'ils n'ont pas hésité à nous promettre leur appui dès que possible.

Sous peu, toutefois, nous allons évaluer notre situation pour la période de 12 mois se terminant en décembre 2000. Si nous devons faire appel à American Airlines pour obtenir de l'aide pour le quatrième trimestre sans savoir à quel moment nous pourrons rembourser, cela risque d'être beaucoup plus difficile. Les responsables ne se sont pas engagés à nous fournir cette aide.

Tout ce que je peux dire pour répondre à la question, c'est donc que tant que les gens continueront d'avoir confiance en la compagnie Canadien et en sa capacité de rester en activité, nous pourrons faire face à nos obligations. D'après les calculs effectués en octobre, nous pourrons le faire pour l'année prochaine. Toutefois, si le moindre changement survient, nous pourrions faire faillite en quelques semaines.

[Français]

M. Michel Guimond: Monsieur Benson, de nombreux observateurs qui se sont penchés sur la situation sont d'avis que ce qui intéresse principalement American Airlines au niveau de sa participation dans les Lignes aériennes Canadien, c'est l'allocation des routes internationales, particulièrement celles vers l'Asie. Êtes-vous d'accord avec moi que ces routes internationales n'appartiennent pas aux Lignes aériennes Canadien, mais qu'elles sont accordées par le gouvernement du Canada à la suite de négociations bilatérales avec des pays? Ces routes appartiennent donc aux contribuables canadiens, et non pas à une compagnie particulière. Ai-je raison de penser comme cela ou si les gens des Lignes aériennes Canadien et vous, comme président, estimez que ces routes appartiennent en propre aux Lignes aériennes Canadien?

[Traduction]

Le président: Merci, monsieur Guimond.

Monsieur Benson.

M. Kevin Benson: Monsieur le président, pour répondre à la question directe, les routes représentent manifestement les avoirs du Canada. Ce sont des avoirs qui ont été attribués à Canadien et, dans certains cas, à Air Canada, ainsi qu'à d'autres compagnies aériennes, et elles peuvent exploiter ces routes aux termes de la politique établie sur le transport aérien, et même aux termes de la législation canadienne en matière de transport. Ces routes appartiennent clairement au Canada, et Air Canada, Canadien, Air Transat et d'autres compagnies aériennes se prévalent de ces autorisations.

M. Stephen Markey (vice-président principal, Affaires corporatives et gouvernementales, Lignes aériennes Canadien Ltée): Et selon les modalités précises... [Note de la rédaction: Difficultés techniques]... qui définissent la manière dont il faut utiliser ces désignations de route.

Le président: Merci, monsieur Guimond.

Monsieur Fontana.

M. Joe Fontana: Merci, monsieur le président, et merci à vous, monsieur Benson.

Monsieur Markey, j'aimerais revenir à ce que vous avez dit. Cela me rassure de vous entendre dire aux clients de Canadiens et aux Canadiens en général que s'ils continuent à appuyer votre compagnie, vous pourrez éviter une crise immédiate, autant pour vous que pour l'ensemble du pays. J'aimerais parler pendant un instant des clients, car tout le monde se préoccupe des actionnaires, de ceci, de cela, mais en fin de compte, c'est le client qui doit avoir la priorité dans la politique que nous adopterons.

• 1905

Ainsi, si vous avez le temps, si les Canadiens continuent de vous soutenir en achetant des billets et si notre comité met en place la politique cadre qui tient compte des clients, de la concurrence, etc., ainsi que des prix, puisque vous avez dit que vos partenaires de l'alliance OneWorld vous demandent de vous débrouiller tout seuls, permettez-moi de vous soumettre cette hypothèse: si nous modifions la règle des 10 p. 100, si nous relevons le plafond de l'investissement étranger, si nous faisons un certain nombre de choses essentielles, essayez-vous de nous dire aujourd'hui qu'il sera possible à la compagnie Canadien de survivre aux termes d'une politique cadre ou d'un cadre réglementaire différent?

M. Kevin Benson: Je crains devoir d'entrée de jeu contester certaines de vos hypothèses. Je dois le faire, car comme je l'ai dit la dernière fois que j'ai comparu devant votre comité, notre santé financière dépend énormément de la perception qu'en ont les gens. Dès l'instant où nous signalons que nous avons un problème pour le mois de décembre de l'an prochain qui n'est pas garanti, pour une raison ou une autre, ce problème se pose immédiatement à plus court terme, car les clients retirent sur-le-champ leurs réservations; ils se détournent de notre compagnie. Le défi pour nous est de savoir comment éviter ce genre de choses.

M. Joe Fontana: Je pensais vous avoir entendu faire des remarques très rassurantes en disant que si les Canadiens continuent d'acheter des billets de votre compagnie, vous tiendrez le coup pendant au moins un an.

M. Kevin Benson: Nous tiendrons le coup pendant au moins un an jusqu'à la fin septembre. Toutefois, je le répète, dès l'instant où nous parlons d'un éventuel problème qui pourrait se poser en octobre prochain, le problème se pose dès le mois de janvier.

M. Joe Fontana: Vous ne devriez peut-être pas le dire.

Le président: Laissez M. Benson terminer sa réponse en premier.

M. Kevin Benson: Je n'ai pas de réponse.

Pour revenir à ce que nous disions, si OneWorld ou American Airlines décidait d'intervenir grâce à une injection de capitaux, suffisants pour nous permettre de refaire notre plan d'entreprise, alors là oui, nous essaierions sans hésiter de voler de nos propres ailes. Reste à savoir combien il nous faut. Il y a une tendance énorme à intervenir au jour le jour, à fournir assez pour tenir un mois et rien de plus. En tant que gestionnaires et que membres du conseil d'administration, il nous incombe de prendre du recul et de nous demander ce qui est dans l'intérêt supérieur des groupes d'actionnaires, et surtout de nos effectifs.

M. Joe Fontana: Si nous réussissions à élaborer la meilleure politique cadre qui soit tout en offrant un maximum de choix aux consommateurs, ce qui signifie une plus grande concurrence, la présence éventuelle de deux excellents transporteurs nationaux dominants, sans compter vos infrastructures régionales, les compagnies indépendantes et les transporteurs nolisés, c'est de toute évidence ce que nous voudrions. Je poserai la même question à M. Milton. Il va en fait racheter votre compagnie et la gérer comme une entreprise distincte, c'est-à-dire un peu comme à l'heure actuelle. J'aimerais savoir comment il pense pouvoir gérer Canadien dans les mêmes conditions qu'à l'heure actuelle et réaliser un bénéfice ou réussir à rendre votre compagnie viable. À moins qu'il ait des poches très profondes et accès à des capitaux énormes auxquels vous n'avez pas accès, je trouve cela plutôt étrange. Tout le monde parle d'un seul transporteur aérien, mais les responsables veulent maintenant gérer Canadien et Air Canada comme si rien n'avait changé.

Ce que je veux dire, c'est que si nous adoptons un cadre de politique publique susceptible d'attirer les investisseurs, où qu'ils soient, de sorte que les Canadiens jouissent d'une concurrence saine et de justes prix au niveau national, international et régional, ne serait-ce pas la meilleure chose pour eux?

M. Kevin Benson: Il y avait deux questions en une. Je répondrai par l'affirmative à la deuxième. Si vous pouviez créer deux entreprises saines qui se font concurrence, tout en offrant des services aux Canadiens, ce serait sans nul doute la meilleure des choses.

Je voudrais revenir si vous le permettez à ce que nous disions plus tôt, lorsque nous envisagions un seul transporteur aérien. L'énorme différence entre un transporteur unique et les deux compagnies aériennes qui se font concurrence aujourd'hui tient en une capacité excédentaire inutilisée. Cela coûte extrêmement cher. Chaque fois qu'un avion décolle, chaque fois qu'un avion atterrit, il consomme autant de carburant qu'il soit plein ou vide, et il est assujetti aux mêmes droits d'atterrissage qu'il soit plein ou vide. Ce sont donc des coûts réels. Les deux compagnies aériennes ont peur de modifier leur horaire en raison de la vieille théorie du fer à cheval selon laquelle le client opte pour le meilleur horaire. C'est pourquoi les deux compagnies exploitent à plusieurs reprises par jour de nombreux avions vides alors qu'un seul serait largement suffisant. Voilà comment un propriétaire unique pourrait réaliser des économies.

M. Joe Fontana: Soyons honnêtes, les dirigeants d'Air Canada et de Canadien se mènent une lutte acharnée depuis six ou sept ans, ce qui a eu pour effet d'affaiblir les deux compagnies, et la vôtre plus qu'Air Canada. Qu'y a-t-il de mal à collaborer dans l'intérêt du public? En d'autres termes, si vous voulez réduire la capacité, qu'y a-t-il de mal à dire à l'autre que vous devriez peut-être joindre vos efforts pour réduire la capacité et utiliser la flotte actuelle des deux transporteurs, de façon à offrir aux Canadiens la meilleure option possible? En avez-vous parlé lors de vos négociations? Est-ce possible? Pourriez-vous éclairer notre lanterne à ce sujet?

• 1910

M. Kevin Benson: Nous avons dû rêver que c'était possible. Nous avons amorcé des discussions avec Air Canada dès janvier dans l'espoir d'en arriver à ce genre de solution, mais nous voilà à la fin novembre et rien ne s'est encore fait. Cela se fera peut-être, mais l'histoire nous a prouvé le contraire.

Le président: Madame Desjarlais.

Mme Bev Desjarlais (Churchill, NPD): Monsieur Benson, certains ont dit que, en réalité, ce n'est pas tant le problème de la capacité mais bien celui de l'endettement de Canadien vis-à-vis d'American Airlines et d'autres parties qui est à l'origine de la crise que nous connaissons aujourd'hui. Est-ce vraiment le plus gros problème, l'endettement de la compagnie Canadien, ou s'agit-il uniquement d'un problème de capacité?

M. Kevin Benson: Je pense que c'est la même question, car vous tenez compte des recettes par rapport au coût de base. Dans la mesure où les recettes sont supérieures aux dépenses, il est possible de rembourser la dette.

Mme Bev Desjarlais: Vous êtes-vous endettés plus que vous n'auriez dû le faire?

M. Kevin Benson: Tout semble indiquer que nous avons une dette trop importante pour être en mesure de la rembourser convenablement.

Mme Bev Desjarlais: D'autres semblent croire que même si nous finissions par trouver une solution et conserver deux compagnies aériennes, ce qui semble pour bon nombre d'entre nous la meilleure solution en dernier ressort, il faudrait avant toute chose remplacer les gestionnaires de Canadien car, en matière de production et de relations de travail, les résultats sont acceptables, mais il semble que la direction n'ait pas su résoudre ce problème. Cette hypothèse vous paraît-elle juste?

M. Kevin Benson: Vous comprendrez si je vous dis que c'est tout à fait injuste et que je rejette catégoriquement cette hypothèse.

Mme Bev Desjarlais: Si nous finissions par avoir une compagnie aérienne principale serait-il logique de reprendre certaines routes internationales qui sont réparties entre les deux, et de ne pas permettre aux compagnies régionales d'être affiliées à la compagnie mère, si l'on peut dire, afin de garantir une certaine concurrence et un bon service pour les Canadiens?

M. Kevin Benson: Monsieur le président, je vous le déconseillerais fortement. Si vous vous rappelez les remarques que j'ai faites lors de mon témoignage devant votre comité il y a quatre semaines, j'ai indiqué que l'un des problèmes de notre pays, c'est que nous avons un énorme territoire pour une toute petite population et des concurrents très importants juste au sud de la frontière. Si nous réussissons à mettre en place le contexte dont vient de parler un des membres du comité et à établir un transporteur unique susceptible d'être fort et de représenter le Canada, pourquoi chercher à le démanteler dès le lendemain de sa création?

Mme Bev Desjarlais: Parce que ces deux compagnies n'ont pas su gagner le respect des Canadiens en collaborant pour leur offrir un service.

M. Kevin Benson: Je répondrai à cela que si nous collaborions entièrement, ce qui est interdit par la Loi sur la concurrence, je pense, les clients ou les consommateurs n'auraient pas les choix ou les prix avantageux qu'ils réclament aujourd'hui.

Mme Bev Desjarlais: La Loi sur la concurrence n'était pas respectée non plus il y a quelques mois, je tiens à vous le dire, monsieur Benson. Vous étiez tout à fait disposé à passer outre à la loi ou aux règlements sur la concurrence à ce moment-là et à invoquer l'article 47. Je pense donc que les règlements, s'ils nous permettent de créer une seule compagnie aérienne plus forte ou deux compagnies, pourront être mis en place de façon à permettre ce genre de chose tout en garantissant le service pour les Canadiens.

M. Kevin Benson: Je répondrai simplement que, tout d'abord, nous avons toujours respecté la Loi sur la concurrence. Si l'on a cessé à l'occasion d'appliquer certaines des dispositions de cette loi pour ouvrir de nouvelles possibilités, alors nous avons profité de ces dernières, et c'est exactement dans ce but que l'on suspend l'application de la loi.

Si, à l'avenir, on modifiait les lois sur la concurrence pour permettre aux compagnies aériennes, qu'il y en ait une, deux ou trois, de s'entendre et de planifier les tarifs, peut-être seraient-elles rentables, mais je doute que cela serait dans l'intérêt du consommateur et du client.

Mme Bev Desjarlais: Loin de moi une telle idée, mais en tout cas, ce serait une bonne chose si cela nous permettait de stabiliser l'industrie aérienne.

J'ai terminé. Je vous remercie.

Le président: Monsieur Comuzzi.

M. Joe Comuzzi: Monsieur Benson, je continue de croire qu'il existe encore des chances pour la compagnie Canadien International. Je sais que bien des gens pensent, et d'après votre premier témoignage et ce qu'a dit le ministre au sujet d'une compagnie aérienne dominante et son allocution liminaire... Je ne suis pas encore convaincu, tant que je n'aurai pas épuisé toutes les possibilités. À mon avis, Canadien a encore beaucoup trop à offrir aux consommateurs pour qu'on la laisse faire faillite ou être reprise. C'est à ce sujet que j'aimerais vous poser quelques questions aujourd'hui.

• 1915

Vous avez dit que vous aviez peut-être suffisamment de liquidités pour tenir jusqu'en décembre, ce qui est bon signe. Certaines des grandes compagnies aériennes du monde, aux États-Unis, ont invoqué les mesures de protection contre les créanciers. Il existe le même recours au Canada. Je ne pense pas qu'il y ait de honte à demander cette protection aux tribunaux. Cela donne à l'entreprise l'occasion d'améliorer sa situation au cours de la période que le tribunal lui accorde pour se restructurer. Avec vos excellents antécédents et grâce à vos excellents employés, je me demande pourquoi les gestionnaires de Canadien n'ont jamais envisagé cette possibilité.

M. Kevin Benson: Monsieur le président, j'ai deux remarques à faire, si vous le permettez.

Tout d'abord, j'appuie sans réserve les remarques au sujet de ma compagnie et du souhait de la voir prospérer et aller de l'avant.

Quant à la faillite, non, ce n'est pas du tout une question de fierté mal placée. Les lois en vigueur au Canada sont peut-être légèrement différentes du chapitre 11, que certains d'entre nous connaissent mieux que d'autres. D'après ce que je sais, et je ne suis pas avocat, le chapitre 11 donne à la direction la possibilité de présenter un plan. Celui-ci peut englober le non-paiement de certaines créances ou la modification de certaines autres règles. Le tribunal peut très bien convoquer des experts pour voir s'ils jugent ce plan valable. Si c'est le cas, le tribunal imposera la mise en vigueur de ce plan.

Ce n'est pas le cas au Canada. La première chose que vous devez faire quand vous faites appel à la CCAA, c'est déclarer que vous êtes en faillite. Vous devez mentionner cela dans votre déclaration, et vous cédez le contrôle absolu de la compagnie à vos créanciers. C'est ensuite aux créanciers de décider si cela leur plaît ou pas. Les avions sont des biens très mouvants, on peut les envoyer très rapidement un peu partout dans le monde, les remettre en service là où il y a une ouverture. À mon avis, les créanciers sont tentés de réagir de cette façon-là. Voilà pour une chose.

Deuxièmement, le simple fait de réaliser un compromis sur la dette ne rentabilise pas la compagnie aérienne. Elle doit faire des bénéfices suffisants avec son actif pour justifier des investissements futurs, et c'est ce qu'on cherche à faire avant toute mesure de service de la dette. Si nous injections 100 millions de dollars dans Canadien aujourd'hui, sans faire quoi que ce soit d'autre, cela nous permettrait seulement de couvrir les pertes pour l'année à venir. Cela ne fera pas changer la situation dans un an, à moins que beaucoup d'autres circonstances ne contribuent à un changement.

Ce qui m'inquiète dans votre déclaration, c'est que nous jouons avec la vie de beaucoup de monde. Si une offre valable est faite, une offre qui protège la majorité des emplois, la majorité des intéressés, nous avons beau vouloir protéger le caractère individuel de Canadien, nous devons également tenir compte de ces autres circonstances avant de risquer des emplois. En effet, Canadien pourrait ne jamais se sortir de cette faillite.

M. Joe Comuzzi: Une précision, monsieur Benson; le chapitre 11 relève du droit de la faillite aux États-Unis. Au Canada, nous avons une loi spéciale, la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies, qui offre nettement plus de protection à la société, en particulier en ce qui concerne la politique publique et le nombre des employés en cause.

Monsieur le président, depuis un an ou deux, nous avons pu constater que les tribunaux étaient particulièrement libéraux lorsqu'il s'agissait d'interpréter et d'appliquer certains aspects de la politique publique à certains types de réorganisation. Restons un instant sur ce sujet.

Ce dont Canadien a besoin, c'est de temps pour se réorganiser, pour reprendre des forces et finalement s'attaquer efficacement à cette renversante dette grâce à un plan que vous-même et vos directeurs soumettriez au tribunal. Monsieur Benson, je ne comprends vraiment pas pourquoi nous avons sauté sur l'article 47 alors que nous aurions dû considérer cet aspect-là.

Toutefois, c'est un aspect seulement, car nous n'avons pas donné à d'autres intéressés le temps d'intervenir. Je n'ai pas l'intention d'abandonner la cause de Canadien dès ce soir. En dépit de ce que vous dites, en dépit de ce que notre prochain témoin nous dira, je crois qu'il y a encore de l'espoir pour Canadien International au Canada.

M. Kevin Benson: Monsieur le président, j'ai cet espoir également. Si la possibilité s'offrait, je sauterais dessus à pieds joints. Toutefois, il faudrait que ce soit une bonne possibilité, une bonne solution. Il y a quatre semaines, nous avons commencé notre discours ici en disant qu'il y avait quelque chose de cassé dans l'industrie. Ce qu'il faut, c'est réparer ce secteur. Nous avons passé en revue toutes les raisons pour lesquelles, à notre avis, il y avait quelque chose de cassé et ce qui pourrait être fait pour le réparer.

À l'époque, l'élément clé, et c'est ce que nous avons essayé de faire valoir avec la notion d'un transporteur unique, c'était la nécessité d'aligner les possibilités de revenu sur les coûts de fonctionnement d'une compagnie aérienne. À notre avis, cela est possible avec deux compagnies distinctes, mais c'est en même temps très difficile, c'est un véritable défi. Peut-être qu'une meilleure solution pour tous les groupes d'employés, pour les actionnaires, pour les intéressés et pour les clients serait d'examiner très attentivement la viabilité d'une compagnie fusionnée. Est-ce qu'une fusion des compagnies aériennes ne donnerait pas ces possibilités, d'une part assurer le service de la dette et, d'autre part, faire des bénéfices comparables à ceux des compagnies aériennes américaines?

• 1920

Le président: Merci, monsieur Comuzzi.

Monsieur Casey, vous avez la parole.

M. Bill Casey (Cumberland—Colchester, PC): Merci beaucoup.

Une note personnelle. Je dois vous féliciter pour l'endurance dont vous avez fait preuve au cours de cet exercice, que très peu de cadres auront probablement à affronter, face aux médias et aux pressions que vous avez subies. De plus, votre dévouement envers les Lignes aériennes Canadien n'a jamais été mis en doute.

Aujourd'hui, vous avez publié un communiqué à propos duquel j'ai quelques questions. Vous dites que selon votre conseiller juridique, l'offre qui vous a été faite ne constitue pas, sous sa forme actuelle, une proposition autorisée, et que vous avez recommandé à vos actionnaires de ne pas vendre leurs actions. Prétendez-vous que l'offre d'Air Canada n'est pas légale?

M. Kevin Benson: Non. Ce que nous voulions dire, c'est que Canadien a un plan relatif aux droits des actionnaires; nous l'avons depuis plusieurs années. Ce plan vise à permettre à la compagnie, si elle recevait une offre avec un bref préavis, comme le 16 décembre, alors qu'il est difficile d'obtenir des avis juridiques et financiers ainsi que des offres concurrentielles, de contrer essentiellement cette offre au moyen d'une pilule empoisonnée, afin de se donner le temps de trouver une autre offre. Si une offre autorisée est faite, elle doit être valable pendant au moins 60 jours.

L'offre d'Air Canada, sous sa forme actuelle, n'est pas valable pendant 60 jours. Elle l'est pendant 21 jours, en fait le délai minimum exigé par la loi. Ainsi, en vertu de notre plan relatif aux droits des actionnaires, cette offre n'est pas autorisée. Le conseil d'administration peut évidement écarter ce plan et recommander aux actionnaires d'accepter cette offre, ou il peut écarter le plan et simplement dire qu'il n'a pas d'opinion.

M. Bill Casey: Un autre élément intéressant, c'est que vous recommandez à vos actionnaires de ne pas remettre leurs actions parce que vous envisagez d'autres solutions.

M. Kevin Benson: Comme je l'ai dit dans ma déclaration liminaire, nous devons tout d'abord nous familiariser davantage avec l'offre d'Air Canada, ce que nous sommes en train de faire. Deuxièmement, le conseil a l'obligation fiduciaire d'examiner toutes les options. Oneworld a exprimé le désir d'examiner l'option et ses répercussions. Tant que nous ne connaîtrons pas sa réaction, il serait inopportun de formuler une recommandation.

M. Bill Casey: Ma prochaine question s'adresserait peut-être davantage au prochain témoin, mais j'aimerais vous la poser également. Plusieurs compagnies aériennes sont sur la touche. Entre autres, InterCanadien, et elles sont très vulnérables. Elles ne participent pas au processus. Elles n'ont aucune idée de ce que leur réserve l'avenir. Elles sont exclues. Nous avons entendu le président d'Air Nova il y a un instant, et la seule conclusion que vous pourriez tirer est qu'InterCanadien ne fait pas partie de son projet. Ce n'est peut-être pas le cas, mais c'est certainement l'impression qu'il m'a laissée.

Quelle place l'offre d'Air Canada réserve-t-elle à InterCanadien et aux compagnies régionales privées?

M. Kevin Benson: Je crois que les petits transporteurs jouissent de certains avantages. Par exemple, leurs frais généraux sont plus faibles. De plus, ils ne sont pas tenus d'exploiter les vols réguliers au même titre qu'une compagnie aérienne nationale. Ils peuvent donc ouvrir des marchés, en particulier avec de petits aéronefs, occuper essentiellement des créneaux laissés vacants, pour servir une clientèle différente de celle des grandes lignes aériennes, comme WestJet l'a fait, avec d'assez gros aéronefs. Ce transporteur a identifié une clientèle qui n'était pas ciblée par les grandes lignes aériennes et fait de bonnes affaires en répondant à ses besoins.

M. Bill Casey: En fait, vous dites la même chose que le président d'Air Nova; c'est-à-dire que les indépendants ont des frais moins élevés que les filiales. Cela m'amène à vous demander pourquoi ne pas avoir une série de transporteurs régionaux indépendants plutôt que des filiales ayant une structure de coûts plus élevés?

M. Kevin Benson: Les transporteurs régionaux sont utiles à plusieurs fins. Premièrement, ils desservent des marchés trop petits pour les grands transporteurs, où l'on ne peut justifier l'emploi d'un aéronef de 100 ou 150 sièges. Deuxièmement, ils servent à créer de nouvelles liaisons, qu'ils exploitent jusqu'à ce que le volume devienne suffisamment important pour qu'un gros aéronef assure la liaison. Ils font donc partie intégrante de l'industrie. Ils ont simplement une structure de coûts différente et sont assujettis à un autre ensemble de règles. Cette structure de coûts et ces règles sont conçues afin de limiter autant que possible les coûts compte tenu de leur situation.

Ils font réellement partie intégrante de l'industrie aérienne, et il ne serait pas difficile de dire pourquoi ne pas retirer tous les aéronefs à fuselage étroit et forcer cette compagnie à exploiter des gros porteurs? Chaque fois qu'une décision de ce genre est prise, la capacité de la compagnie aérienne de s'adapter à la situation du marché est considérablement réduite.

• 1925

M. Bill Casey: Nous sommes censés formuler des recommandations, et comme M. Fontana l'a dit plus tôt, le consommateur est définitivement l'une de nos priorités. S'il existe un moyen plus économique de fournir aux passagers le service aérien dont ils ont besoin, pourquoi ne le faisons-nous pas? S'il existe une solution plus économique, au lieu d'essayer de tout garder sous un seul toit, sous une même structure cadre, pourquoi ne pas avoir une industrie aérienne plus diverse?

M. Kevin Benson: Je crois que ce que l'on envisage est de créer un seul transporteur international-national. Il s'agit du transporteur qui sert tous les marchés internationaux et nationaux, mais il ne peut pas desservir tous les clients au sein de ces marchés.

La proposition d'Onex—et je crois qu'Air Canada a une proposition semblable, et je suis persuadé que ses représentants pourront en parler eux-mêmes plus tard—consiste à créer une compagnie aérienne qui dessert tous les marchés, mais qui laisse à d'autres transporteurs la possibilité d'exploiter certains créneaux dans ces marchés. Des créneaux qui se justifient davantage par le coût que par le temps ou davantage par le coût que par l'horaire. Ils pourraient être disposés à exploiter des liaisons indirectement, afin de réduire les coûts. Il pourrait s'agir de créneaux où l'on ne met pas l'accent, par exemple, sur l'accès à des salons, ou sur l'accès à un service de concierge, à un service de repas à bord, à des téléphones, ou à toutes sortes de petits avantages que l'on peut retrouver chez un grand transporteur. Ils peuvent fournir ce genre de service en concurrence directe avec un grand transporteur.

Mais découper l'industrie aérienne uniquement dans le but de favoriser la concurrence ne peut à mon avis que créer des problèmes d'efficacité. Ce n'est rentable ni pour la compagnie aérienne, ni pour le client.

M. Bill Casey: Merci.

Le président: Merci, monsieur Casey.

Puisque nous avons terminé une ronde, je vais poser une brève question, si vous me le permettez.

Dans sa proposition visant à restructurer l'industrie aérienne, Air Canada dit vouloir exploiter les Lignes aériennes Canadien en tant que filiale en propriété exclusive. Est-ce comparable à la relation qu'Air Canada entretient avec ses compagnies régionales, en propriété exclusive?

M. Kevin Benson: Monsieur le président, je vais vous donner mon avis sur la situation.

Je crois qu'Air Canada comprend différentes questions d'ordre pratique qui entrent en jeu lorsque vous contrôlez la propriété de Canadien.

Premièrement, vous avez deux permis d'exploitation; vous avez deux règlements d'exploitation. Vous ne pouvez les combiner en toute sécurité. Vous devez les exploiter séparément jusqu'à ce que vous puissiez former le personnel et procéder à une reconfiguration. Cela prend du temps.

La deuxième chose qu'Air Canada comprend très bien, c'est que les employés des deux entreprises vont avoir besoin de temps pour se remettre du choc, pour comprendre que cette nouvelle compagnie aérienne présente des débouchés considérables.

Le président: Oui, mais j'essaie d'en arriver à la structure. Le lien entre Air Canada et vous serait-il le même qu'entre Air Canada et ses transporteurs régionaux qui lui appartiennent en totalité? Par exemple, Air Canada nommerait-elle les membres de votre conseil?

M. Kevin Benson: La réponse est oui.

Le président: Air Canada nommerait votre conseil?

M. Kevin Benson: Oui, une fois qu'elle aurait acquis...

Le président: Cela ne vous rendrait-il pas nerveux, étant donné ce qui s'est passé entre vos deux entreprises au cours des dernières années, compte tenu de la lutte que vous vous êtes livrée il y a à peine quelques semaines, et étant donné qu'Air Canada souhaite être le transporteur amiral—je ne crois pas qu'il y ait de doute à ce sujet—et soudainement la compagnie vous dit: «Nous allons vous acheter, et soit dit en passant, c'est notre conseil qui va être nommé au vôtre»?

Qui va décider, par exemple, si c'est Air Canada ou Canadien qui va assurer la liaison entre Toronto et Ottawa ou Montréal et Québec, dans le triangle le plus rentable? Et qui va prendre les décisions quant au fardeau de la dette? Air Canada va-t-elle acquérir une partie de cette dette, ou est-ce que toutes les dettes des Lignes aériennes Canadien vont incomber à cette dernière?

M. Kevin Benson: Monsieur le président, vous posez les mêmes questions que nous avons posées à Air Canada.

Je crois comprendre qu'un réseau combiné serait établi. Un réseau combiné qui attribuerait les liaisons en fonction de la configuration des aéronefs.

En bout de ligne, les liaisons rentables et les liaisons non rentables importent peu, d'après moi. Ce qui compte, c'est de savoir si toutes les liaisons vont être maintenues et si l'on peut garantir aux employés que les postes qui risquent de disparaître chez Canadien vont réapparaître chez Air Canada après la fusion.

Le président: Mais vous devez faire de l'argent. Vous devez être rentables. C'est bien beau de dire «tant que le client est servi...», mais vous devez être rentables, et par conséquent, des décisions vont devoir être prises. Je suppose que vous allez conclure un accord étanche qui vous assurera un traitement équitable afin de pouvoir être rentables.

M. Kevin Benson: Nous allons certainement veiller à ce que les actionnaires soient traités équitablement et à protéger leurs intérêts.

Je dois rappeler au comité qu'en fin de compte, la décision appartient aux actionnaires. Nous ne sommes pas en mesure de prendre la décision ou de la bloquer.

• 1930

Le président: Merci beaucoup.

Cela fait quatre minutes 30 secondes, Joe, à titre d'information.

Des voix: Oh, oh!

Le président: Monsieur Bailey, vous avez la parole.

M. Roy Bailey (Souris—Moose Mountain, Réf.): Merci beaucoup, monsieur le président et monsieur Benson.

Je partage un peu l'avis de mon collègue, M. Comuzzi. Je crois toujours que nous pouvons raviver Canadien.

Nous en sommes à notre 27e réunion, et nous avons entendu de nombreux témoins, mais deux des témoins ont donné des garanties, et ont dit qu'ils le feraient par écrit. L'un d'eux représentait Onex, M. Schwartz, et l'autre était Buzz Hargrove. Les deux ont dit par écrit qu'ils étaient disposés à offrir les mêmes garanties et qu'ils pourraient le faire par écrit aux employés de Canadien et d'Air Canada. C'était un des projets de fusion.

La question que l'on se pose dans les négociations est de savoir s'il est possible qu'Air Canada soit tenue de fournir la même garantie aux employés que celle fournie précédemment par Onex.

M. Kevin Benson: Il vous faudra poser la question à Air Canada.

M. Roy Bailey: Je le ferai.

M. Kevin Benson: S'ils acquièrent les parts de la compagnie, ils en seront alors propriétaires. Ils nommeront le conseil; ils formuleront les recommandations.

Je ne voudrais pas que le comité se méprenne. Si Oneworld ou une autre partie se présentait avec les capitaux nécessaires pour soutenir et donner un nouveau souffle à Canadien, en tant qu'équipe de gestion, nous prendrions la meilleure décision qui s'impose pour tous les actionnaires. Nous ne sommes liés à aucune décision.

À l'heure actuelle, il n'y a clairement qu'une seule offre, et cette offre reflète notre propre opinion au sujet des intervenants et des clients.

M. Roy Bailey: Donc, vous n'êtes pas au courant de l'existence d'une offre ou d'une entente autre que ce que propose Air Canada?

M. Kevin Benson: Il n'y a pour l'instant aucune autre offre que celle d'Air Canada.

M. Roy Bailey: Je vous remercie.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Bailey.

Monsieur Dromisky.

M. Stan Dromisky (Thunder Bay—Atikokan, Lib.): Je vous remercie, monsieur le président.

Monsieur Benson, jusqu'à maintenant, nous avons parlé surtout de choses plus ou moins hypothétiques. J'aimerais maintenant que nous nous penchions sur quelque chose de bien réel. Je parle d'un article paru hier dans le Globe and Mail. Il s'agit d'un article vraiment alarmant sur la façon dont American Airlines coupe l'herbe sous le pied des Lignes aériennes Canadien au sujet des itinéraires les plus lucratifs qu'elle possède à l'heure actuelle.

Selon l'auteur de cet article, pour desservir le marché asiatique, American Airlines utilisera la plaque tournante de Vancouver pour transférer plus de 100 000 de ses passagers à bord d'avions canadiens, et leur faire ainsi traverser le Pacifique. Plus de 100 000 passagers—cela représente d'énormes sommes provenant de vos plans à long terme, ce qui va faire baisser vos rentrées de fonds. Il n'y a aucun doute là-dessus.

On dit ensuite qu'il y a d'autres itinéraires où American Airlines et d'autres membres de l'alliance Oneworld font exactement la même chose. Ils évitent d'utiliser les avions de Canadien et se servent des leurs ou de ceux d'autres membres de l'Alliance pour transporter des passagers vers les marchés lucratifs de l'Asie et de l'Europe. J'aimerais savoir ce que vous pensez de cela?

M. Kevin Benson: Je tiens à réagir à ces propos de façon énergique et sans équivoque. Au cours de mon mandat chez Canadien, American Airlines a toujours été un partenaire compréhensif, prêt à nous appuyer et à négocier quand personne d'autre ne voulait le faire, prêt à nous offrir un financement ainsi que des connaissances techniques et du personnel qualifié quand personne d'autre ne voulait le faire.

Je crains que l'article que vous avez cité ne soit entièrement faux. Il est inexact. Il ne donne pas tous les faits. Il n'a certainement pas été précédé d'une recherche complète.

American a entretenu une relation d'affaires avec China Airlines pendant un certain nombre d'années, je ne saurais vous dire combien exactement. American desservait Taïwan avec China Airlines. American Airlines a récemment abandonné cette relation pour en entamer une nouvelle avec EVA. Je présume qu'ils l'ont fait parce qu'ils n'étaient pas satisfaits du service. Tout ce qu'a fait ce nouveau service, offert par EVA, a été de remplacer l'ancien service offert par China Airlines.

Ensuite, ce chiffre de 100 000 passagers par année dans les deux sens est le résultat d'une croissance. Il est passé de quelque 20 000 passagers, il n'y a que quelques années, en 1996, à plus de 100 000 cette année. Il s'agit de passagers d'American Airlines qui passent par Vancouver et qui prennent nos avions. Nous ne nous attendons à rien d'autre qu'une croissance additionnelle de ce chiffre. American n'a pris aucune disposition pour faire baisser ce chiffre. American n'a rien fait... En fait, c'est le contraire. Les gens d'American ont collaboré étroitement avec nous pour augmenter et faciliter le flot de passagers qui transitent par Vancouver.

• 1935

L'utilisation que fait ce journal de ce genre de choses est tout bonnement erronée. Exactement comme cette autre déclaration voulant qu'American Airlines ait nommé nos cadres supérieurs. C'est totalement faux.

M. Stan Dromisky: Merci beaucoup.

Le président: Merci, monsieur Dromisky.

Monsieur Guimond, je vous en prie.

[Français]

M. Michel Guimond: J'aimerais poser une courte question que vous pourriez peut-être noter, puisque je voudrais garder du temps pour une deuxième question.

Lors de la comparution des représentants de l'Association internationale des machinistes et des travailleurs de l'aéroastronautique, je m'étais dit que je vérifierais certains éléments auprès de vous, monsieur Benson, parce que vous êtes la seule personne de Canadien que je rencontre, bien que j'aie reçu paquet de lettres de bêtises. J'ai reçu toute la base de Hong Kong et toute la base du Japon, mais vous êtes la seule personne de Canadien que j'ai pu rencontrer.

Le syndicat des machinistes nous avait dit que depuis la prise de participation d'American Airlines dans Canadien, 384 postes de machinistes avaient été abolis à Calgary. Est-ce exact? C'est la première question à laquelle j'aimerais que vous répondiez tout à l'heure.

Ma deuxième question porte sur le rôle des transporteurs d'affrètement, qu'on appelle en latin les charters. Nous avons rencontré les présidents de Canada 3000, d'Air Transat et de Royal Aviation. De nombreux analystes nous ont démontré que pour accroître la concurrence, ces transporteurs d'affrètement qui offrent des vols nolisés pourraient représenter une partie de la solution. Nous pourrions leur donner la possibilité d'exploiter des routes régulières afin qu'il y ait une plus grande concurrence si le gouvernement décidait de donner son aval à un transporteur dominant.

Par contre, ces compagnies d'affrètement nous ont dit que, bien qu'elles soient prêtes à jouer un rôle, personne n'était intéressé à atterrir à Toronto à 11 h 30 ou à 12 h 30. Est-ce que notre comité devrait demander au gouvernement de prévoir, dans la politique-cadre qui sera définie, des créneaux horaires pour les nouveaux acteurs ou nouveaux joueurs qu'on pourrait avoir en vue de favoriser la concurrence?

[Traduction]

M. Kevin Benson: Je vais répondre à vos deux questions. Tout d'abord, en ce qui a trait à la première—et cela n'a rien à voir avec American Airlines—en 1995, les Lignes aériennes Canadien ont décidé qu'exploiter une base de maintenance à Calgary pour le transporteur de ligne principale était tout simplement trop onéreux. D'ailleurs, cette base n'était pas entièrement occupée. Canadien a donc décidé de regrouper ses opérations de maintenance à Vancouver. Les opérations lourdes de maintenance sont maintenant regroupées à Vancouver, et les deux lignes y sont exploitées.

Que je sache—et je n'étais pas PDG de la compagnie à ce moment-là, ce qui fait que je dois me fier à ma mémoire—, on a offert des emplois à la majorité des membres du personnel technique s'ils déménageaient à Vancouver. Bien entendu, le coût de la vie est plus élevé à Vancouver. Il y a beaucoup d'emplois offerts à Calgary, et bien des gens ont choisi de ne pas déménager. Mais cette décision n'a pas été motivée par American Airlines. Elle provenait simplement de l'incapacité d'exploiter à plein la troisième ligne, celle de Calgary, et, par conséquent, Canadien a choisi de la fermer.

En ce qui a trait au rôle des services d'affrètement, j'ai déjà dit qu'il y avait quelques aéroports au Canada qui manquent de créneaux. Je pense qu'il serait bien raisonnable de la part du gouvernement de prévoir une forme quelconque d'arrêté qui permettrait aux nouveaux transporteurs désirant utiliser ces aéroports d'y avoir accès.

J'aimerais également faire remarquer que, partout ailleurs dans le monde, une telle situation n'est pas normale. Nous aimerions beaucoup avoir accès aux aéroports de Heathrow, La Guardia, et O'Hare. Mais nous devons attendre notre tour. Nous devons acheter les places qui se libèrent. Pour les obtenir, nous devons négocier et faire des échanges. Mais comme point de départ, je pense qu'il serait très raisonnable que certains créneaux soient mis à la disposition de ces nouveaux transporteurs. Je recommanderais vivement, toutefois, qu'une telle mesure soit assortie d'une clause de péremption. Ainsi, une compagnie aérienne ne pourrait pas obtenir un créneau et l'échanger par la suite. Elle devrait l'utiliser ou le rendre à l'aéroport dont elle l'a obtenu.

Le président: Je vous remercie, monsieur Guimond.

Au tour de M. Hubbard, maintenant.

M. Charles Hubbard (Miramichi, Lib.): Je vous remercie, monsieur le président.

J'aimerais utiliser quelques chiffres, monsieur Benson. Vous déclarez au comité que, selon vous, la meilleure chose à faire pour les deux lignes aériennes serait de les unir sous une seule et même direction, un seul leadership. À l'heure actuelle, la valeur des actions des Lignes aériennes Canadien est de 2 $. Si on multiplie ce chiffre par le nombre d'actions, on peut estimer la valeur de Canadien à quelque 90 millions de dollars. Je suppose que la majeure partie de la dette de l'entreprise est détenue à l'extérieur du Canada.

• 1940

M. Kevin Benson: Environ 25 p. 100 de la dette est canadienne, et 75 p. 100 est détenue à l'extérieur du Canada.

M. Charles Hubbard: Quel pourcentage des recettes d'exploitation sert à amortir cette dette?

M. Kevin Benson: Les recettes d'exploitation s'établissent à environ 3 milliards de dollars par année. Pour ce qui est du service de la dette, je ne peux pas vous donner, comme ça, le total des baux. Il s'établit probablement à quelque 300 millions de dollars, plus ou moins. On doit également rembourser quelque 100 millions de dollars du principal de la dette.

Quand vous demandez quel pourcentage de... Les frais de propriété s'établissent autour de 500 à 600 millions de dollars par année, ce qui comprendrait l'amortissement, les baux et l'intérêt sur l'achat d'appareils, etc.

M. Charles Hubbard: Considérant l'état présent de votre compagnie—nous nous sommes penchés sur le cas d'Onex, et c'est fini maintenant—y avait-il d'autres parties au Canada ou ailleurs, qui auraient pu se porter acquéreur de Canadien à la place d'Air Canada?

M. Kevin Benson: Malgré tous nos efforts, nous n'avons pu trouver qui que ce soit d'autre.

M. Charles Hubbard: Si l'on songe à vos employés et à une rationalisation éventuelle des deux flottes, il semble que vous ayez un certain nombre d'appareils en trop, et que vous vous débarrasseriez probablement de quelques-uns d'entre eux. Après une fusion des deux lignes aériennes, il pourrait ne plus vous rester que 75 p. 100 de votre présente flotte. En tant que député, je trouve difficile de croire que vous pourriez vous débarrasser de peut-être 25 p. 100 de vos appareils, et conserver 100 p. 100 de vos employés. Même avec une perte de 5 p. 100 de vos employés, vous aurez encore beaucoup d'employés en surplus au sein de l'industrie. C'est un des points qui me préoccupent.

Ensuite, nous étudions le cas d'Air Canada, dont les représentants comparaîtront dans quelques minutes. Apparemment, cette compagnie est prête à faire l'acquisition de Canadien au coût de 2 $ l'action. À mon avis, le gouvernement doit se demander si, à long terme, le seul transporteur aérien qui restera pourra offrir des services et continuer d'exister tout en assumant la dette que les deux compagnies possèdent peut-être à l'heure actuelle.

Air Canada a bénéficié de faveurs considérables lorsqu'elle a été créée dans les années 80. C'est la raison pour laquelle cette compagnie a joui d'un avantage certain par rapport à Canadien, étant donné tout ce qu'on lui a remis en cadeau. Pourtant, Air Canada n'a pas rapporté tant d'argent que ça à ses actionnaires. En fait, elle n'a rien rapporté à ses actionnaires, à moins qu'on songe aux gains en capital, qui ont été peu nombreux.

D'après vous, à l'échelle de l'industrie canadienne, est-ce que ce transporteur unique, que nous évoquons et qui résulterait de la fusion des deux compagnies actuelles, pourrait être viable sans que le gouvernement se retrouve forcé de le soutenir financièrement dans un an ou deux d'ici?

M. Kevin Benson: Tout d'abord, au sujet des employés, je pense qu'Onex a reconnu qu'il y aurait des pertes d'emplois. On a promis que le tout se ferait par un processus d'attrition, soit par des départs volontaires, soit par des offres permettant des départs à la retraite anticipée. On a estimé à 5 000 le nombre d'emplois perdus.

Le plan d'Air Canada est légèrement différent. Je crois que cette compagnie estime le nombre d'emplois perdus à 2 500. Par contre, elle promet également que si l'acquisition se fait, elle ne procédera pas à des mises à pied. Elle comptera plutôt sur les départs volontaires et un régime d'encouragement à la retraite anticipée.

Donc, oui, notre personnel est excédentaire, mais je crois qu'il y a également beaucoup d'employés qui, si on leur en donne l'occasion, seraient prêts à laisser leur place à d'autres.

La dette, maintenant... Tout ce que je peux vous dire, c'est que, d'après moi, la préoccupation que vous avez exprimée était exactement celle d'Air Canada lorsque nous avons mis fin à nos discussions en avril. Nous croyions que le fait de dénicher une compagnie comme Onex, qui est bien connue pour sa capacité de reconnaître la valeur d'une entreprise et d'en tirer avantage, qui était prête à acheter les actions du public à un prix supérieur à celui du marché d'alors, et qui comptait, pour son profit, uniquement sur la hausse du cours de ces actions, nous croyions donc que tout cela montrerait aux investisseurs moins avertis qu'il existait une véritable occasion, et que cette ligne aérienne peut supporter la dette des deux compagnies.

Le président: Je vous remercie, monsieur Hubbard.

Bev Desjarlais, je vous prie.

Mme Bev Desjarlais: Monsieur Benson, disons qu'il y a deux compagnies aériennes, et que vous pouvez dresser votre liste de cadeaux de Noël. De quoi les Lignes aériennes Canadien ont-elles besoin pour survivre?

• 1945

M. Kevin Benson: Eh bien, 300 à 500 millions de dollars constitueraient un bon départ.

Mme Bev Desjarlais: Maintenant, en ce qui a trait au financement, s'il y a des règlements particuliers ou des règles—et de crainte que certaines personnes s'emportent en entendant le mot «règlements», nous les appellerons des règles—avons-nous besoin de certaines règles pour nous assurer que...?

M. Kevin Benson: Je crois que nous avons besoin de quatre règles de base. Tout d'abord, il faudrait supprimer toutes les restrictions sur la propriété. Ensuite, ce qui serait peut-être un ajout à la première règle, il faudrait supprimer toutes les restrictions sur la propriété étrangère, ou du moins augmenter de façon sensible le pourcentage de propriété étrangère qui est autorisé. On pourrait peut-être contrebalancer les effets de ce changement en exigeant un conseil d'administration dominé par des Canadiens. Il faudrait également protéger la capacité des principaux transporteurs de développer les transporteurs régionaux pour qu'ils puissent offrir aux consommateurs le genre de services dont ils ont besoin partout au pays. Enfin, ma foi envers le libre marché est très grande. Qu'il m'ait traité avec clémence ou non est sans importance. Ma foi dans ce système est très grande. Laissez, chaque fois que cela sera possible, le libre marché créer la concurrence, et encouragez cette concurrence, car elle ne manquera pas d'exister.

Le président: Merci, Bev.

Lou Sekora, je vous prie.

M. Lou Sekora (Port Moody—Coquitlam—Port Coquitlam, Lib.): Je vous remercie, monsieur le président.

Monsieur Benson, il pourrait très bien arriver qu'Air Canada vous achète et vous retire certains vols, certains avantages, certaines pièces d'équipement, tout en vous chargeant non seulement de votre propre dette, mais aussi de la sienne. Ce fardeau est insupportable, et vous vous effondrez. Croyez-vous que cela soit possible?

M. Kevin Benson: C'est une possibilité. C'est ce qui me réveille à quatre heures du matin ces derniers temps.

M. Lou Sekora: Je me suis moi-même réveillé en sueurs l'autre jour.

Une voix: Je n'ose pas demander pourquoi.

M. Lou Sekora: Ne le demandez pas.

Le président: À l'ordre.

M. Lou Sekora: Ce qui est le plus important pour moi, en tant que Canadien, c'est le service d'un bout à l'autre du Canada, les tarifs et les employés. En tant que représentants politiques, nous pouvons tout de même reconnaître que, si la règle de 10 p. 100 avait sa raison d'être il y a 10 ans, elle ne l'a peut-être plus aujourd'hui; de même, si la règle de 25 p. 100 avait sa raison d'être il y a 10 ans, elle ne l'a peut-être plus aujourd'hui. Si nous examinions à fond ces deux questions, nous pourrions peut-être nous retrouver avec de bonnes propositions qui permettraient aux deux lignes aériennes d'être tout à fait viables. Voilà donc où m'amène ma réflexion.

Je suis très intéressée par le fait que votre Alliance Oneworld passe par Vancouver, alors que l'Alliance Star passe par Los Angeles. Air Canada compte 24 000 employés, et Canadien en compte 16 000. Je n'inclus pas les transporteurs régionaux, car il y a 47 000 employés en tout.

J'ai demandé l'autre jour à M. Milton combien des 24 000 employés d'Air Canada prennent chaque année leur retraite. Il n'a pas pu me donner de chiffre exact, mais je lui ai demandé un pourcentage approximatif. Il m'a alors dit que c'était 3 p. 100. Je sais que le pourcentage est un peu plus élevé, mais 3 p. 100 de 24 000 donne 720 personnes. Si Canadien a 16 000 employés et que 3 p. 100 d'entre eux prennent leur retraite là aussi, cela fait près de 500 personnes.

Il y en a donc 1 200 ou 1 300 qui chaque année prennent leur retraite. Cela fait donc 6 000 personnes sur cinq ans. C'est bien plus que 2 500 ou 5 000. Je ne comprends donc pas l'argument selon lequel il y aurait d'énormes pertes d'emplois et qu'un transporteur s'en tirerait un peu mieux que l'autre. Ce ne sont là que des histoires. Dans cet optique, si vous avez 47 000 employés à vos deux et qu'ils prennent leur retraite à un rythme de 3 p. 100 par an, il est facile de faire le calcul. Cela fait plus de 1 300 par an—beaucoup plus. Ce chiffre est plus raisonnable.

Je n'arrive pas à comprendre ces pertes d'emploi, ces cessations d'emploi, ces mises à pied. Il n'y en a pas.

M. Kevin Benson: Si l'on attendait simplement que l'attrition fasse son oeuvre, ce serait effectivement le cas—l'attrition et les départs à la retraite. Il faudrait toutefois de sept à huit ans. Avec des incitations, on pourrait atteindre l'objectif bien plus rapidement. Il y a un certain nombre d'employés qui ne demanderaient pas mieux qu'on leur offre une indemnité de retraite anticipée. Bien entendu, il faudrait que le montant de l'indemnité et les avantages qui l'accompagnent soient intéressants. Dans la mesure où il serait possible de trouver une solution qui réponde aux besoins des deux, tout ce qu'a dit Onex et tout ce que dit maintenant Air Canada, c'est qu'il n'y a pas de raison de ne pas mettre en oeuvre cette solution. Si certains employés ne demandent pas mieux que de partir à la retraite dès aujourd'hui et que cela peut se faire de manière à tenir compte de l'intérêt de toutes les parties, pourquoi ne pas le faire? Qu'on le fasse dès aujourd'hui. Pour bien d'autres emplois il faudra réembaucher du personnel. Il faudra embaucher de nouveaux employés. Une fois le surplus éliminé, on recommencera à croître et à embaucher du personnel.

M. Lou Sekora: Merci.

Le président: Merci, monsieur Sekora.

Je dis cela à l'intention des témoins qui attendent: nous avons eu un vote à la Chambre des communes qui nous a retardés. Il ne reste plus que deux députés qui poseront des questions, après quoi nous passerons au groupe suivant.

Vous avez la parole, monsieur Casey.

• 1950

M. Bill Casey: D'après ce que j'ai compris de la proposition d'Air Canada, la société offre d'acheter les actions, non pas directement, mais par l'entremise d'une société à numéro. C'est une société à numéro qui achètera les actions, après quoi on essaiera de restructurer la dette, sujet qui nous occupe beaucoup ici.

Avez-vous discuté avec Air Canada de ce qui arrivera si elle ne peut pas restructurer la dette? Que fera-t-elle si les choses ne se passent pas comme elle le veut?

M. Kevin Benson: Nous en discutons justement, monsieur le président. Vous êtes simplement un tout petit peu en avance. Nous avons posé la question, et je crois qu'il s'agit d'essayer ensemble de trouver la réponse. Notre conseil d'administration aura besoin de certaines assurances quant à la nature de la restructuration, quant à son ampleur. Si ce qui est prévu est de demander à tous les créanciers d'accepter 80c. pour chaque dollar qui leur est dû, la proposition n'a guère de chances de les intéresser, et il faudrait que nous le sachions.

Par contre, je crois qu'il est un peu difficile pour Air Canada de nous dire exactement jusqu'où elle va aller tant qu'elle n'aura pas eu l'occasion d'examiner la dette et la garantie dont elle est assortie. Il ne sert à rien de demander à celui dont la créance est garantie à 120 p. 100 d'accepter un remboursement réduit. Il reprendra plutôt le bien donné en garantie.

Il y a donc un processus en cours que nous devons mener à terme avant que nous ne puissions vous fournir une réponse intelligente. C'est pour cette raison que la déclaration dont vous avez lu un extrait tout à l'heure ne contient pas encore de recommandation en faveur de l'acceptation de l'offre. Nous avons de sérieuses réserves à cet égard. Le plan de restructuration pourrait très bien n'aboutir à rien une fois l'acquisition faite.

M. Bill Casey: Nous poserons la question dans quelques minutes. Nous pourrons peut-être vous aider à obtenir une réponse.

M. Kevin Benson: Merci.

M. Bill Casey: C'est la question qui préoccupe tous les employés des Lignes aériennes Canadien: qu'arrivera-t-il si la restructuration échoue? Air Canada s'engage à acheter Canadien, mais elle garde un pied à terre et l'autre dans le bateau.

En tout cas, je vous remercie.

Le président: Merci, monsieur Casey.

Monsieur Johnston.

M. Dale Johnston (Wetaskiwin, Réf.): Merci, monsieur le président.

Merci pour votre exposé, messieurs.

Je crois que vous avez déjà répondu à une de mes questions, mais vous pourriez peut-être simplement me le confirmer. Je sais que la règle de 10 p. 100 ne touche pas Canadien, mais que la règle limitant la propriété étrangère à 25 p. 100 vous touche. Vous ai-je bien entendu dire que vous voudriez qu'il n'y ait pas de maximum dans un cas comme dans l'autre?

M. Kevin Benson: C'est bien ce que nous avons dit. Auparavant, Canadien était soumis à une règle de 10 p. 100 aux termes de la loi albertaine en vertu de laquelle la société a été créée. Nous avons fait supprimer la règle il y a environ trois ans. Nous ne sommes plus soumis à une limite à cet égard.

En ce qui concerne la limite sur la propriété étrangère, je comprends à quel point il s'agit d'une question délicate, mais je serais certainement heureux qu'on la relève. La suppression de cette limite ouvrirait des possibilités.

M. Dale Johnston: Je sais par ailleurs que vous êtes un partisan de la libre entreprise et vous ne recommanderiez donc pas la réglementation comme moyen de débarrasser le système de sa capacité excédentaire. Je voudrais toutefois savoir ce que vous proposeriez comme solution pour éliminer la capacité excédentaire.

M. Kevin Benson: Si la réglementation me répugne, c'est parce qu'elle ne conduit pas à l'efficience, et c'est bien d'efficience que nos avons besoin dans une industrie mondiale. Je le répète, je m'en remettrais au marché libre. Je crois fermement que, dans un contexte non réglementé, les participants au secteur viendront combler la demande, le cas échéant, viendront combler les lacunes laissées par le transporteur principal. Ainsi, toute forme de réglementation visant à déterminer le nombre de places attribuées aux divers transporteurs ne pourra faire autrement, à mon sens, que de conduire à des pertes d'efficience. Je ne crois pas que le client y trouve son compte. S'il y a beaucoup plus de clients d'Air Canada qui veulent aller du point A au point B, Air Canada devrait pouvoir répondre à leurs besoins. S'il y en a beaucoup plus qui veulent voyager avec Canadien, nous devrions pouvoir répondre à leurs besoins.

Je vous recommande donc fortement de ne pas vous lancer dans la voie de la réglementation, d'éviter la tentation de vouloir réglementer les routes.

M. Dale Johnston: Dans ce cas-là, vous pourriez peut-être me dire comment vous feriez pour régler le problème qui se pose évidemment du fait que la capacité dépasse les besoins et qu'on a des avions qui ne sont remplis qu'à moitié ou en partie?

M. Kevin Benson: La réponse que nous avons donnée il y a quatre semaines et notre réponse est toujours la même, c'est que le premier pas serait de créer un transporteur national unique qui répondrait aux principaux besoins des voyageurs. Ce transporteur, comme je l'ai dit tout à l'heure, ne pourra pas répondre à tous les besoins du marché; d'autres transporteurs pourront donc se tailler une place en deçà et autour du transporteur principal. Il est toutefois difficile d'imaginer que nous puissions continuer à avoir deux transporteurs qui se livrent une concurrence acharnée sur 82 p. 100 des routes, comme c'est le cas à l'heure actuelle, sur un marché qui est non seulement clairsemé, mais qui est orienté d'est en ouest—le marché est très linéaire, et il y a en outre la concurrence des cinq grandes lignes aériennes qui se trouvent juste de l'autre côté de la frontière.

Le président: Merci, monsieur Johnston.

Monsieur Discepola, c'est à votre tour.

• 1955

[Français]

M. Nick Discepola (Vaudreuil—Soulanges, Lib.): Merci beaucoup, monsieur le président. J'aimerais préciser que M. Guimond sait très bien que je ne suis pas un membre permanent de ce comité et que j'assume d'autres responsabilités au sein du Comité des finances et du Comité de l'environnement. Mais cela ne m'a pas empêché de faire mes devoirs comme député. Je remercie le président de m'accorder le privilège de poser une question même si je ne suis pas membre permanent de votre comité.

[Traduction]

Monsieur Benson, j'ai deux petites questions à vous poser. Je sais que le président veut passer au groupe suivant.

Je crains qu'il soit très tentant pour Air Canada, étant donné la façon dont son offre est structurée, de payer simplement les 92 millions de dollars qu'elle a offerts, sans plus. Le montant n'est pas très élevé quand on considère qu'elle pourrait ainsi se débarrasser de son compétiteur. Quelles garanties allez-vous demander à Air Canada pour vous assurer qu'elle ne pourra pas simplement acheter Canadien sans rien faire de plus?

Vous avez souvent dit que la règle de 10 p. 100 sert davantage l'intérêt de la direction que celui des actionnaires. Je suis toutefois préoccupé de constater que vous voulez qu'elle soit éliminée complètement. Comment peut-on justifier d'éliminer complètement la limite, au lieu de la relever et de la faire passer, mettons à 15 p. 100 ou à 20 p. 100 et de s'assurer que le contrôle de la société reste entre les mains des Canadiens? Il me semble par ailleurs que l'intérêt des consommateurs canadiens est bien mieux servi par une société dont le capital est largement réparti que par une société dont la propriété est concentrée entre les mains de quelques personnes seulement.

M. Kevin Benson: En ce qui concerne la propriété étrangère, si l'on juge qu'il faut garder le contrôle entre les mains des Canadiens, et c'est une position que j'appuierais, le plus efficace serait sans doute, comme je l'ai dit tout à l'heure, de le faire par le biais, non pas des actionnaires, mais du conseil d'administration. Ainsi, peu importe qui serait les actionnaires, les conseils d'administration devraient obligatoirement être composés principalement de Canadiens, les réunions devraient obligatoirement se tenir au Canada et le quorum devrait obligatoirement inclure une majorité de Canadiens. Toutes ces mesures seraient utiles à mon avis.

En ce qui concerne la règle de 10 p. 100, il y a toujours, bien entendu, un risque qu'un actionnaire principal acquière le contrôle de la société et en oriente l'activité de manière à servir son intérêt. Par contre, les sociétés sont essentiellement la propriété de leurs actionnaires. Dans la mesure où les actionnaires exigent un certain rendement de la direction ou une certaine réaction de la part de la direction, j'estime qu'ils sont bien mieux placés pour ce faire s'ils ont un bloc d'actions assez important pour mériter l'attention de la direction.

S'ils sont limités à 10 p. 100 des actions, les actionnaires doivent frapper à la porte avant de se présenter chez le chef de la direction, sinon ils n'obtiendront pas de rendez-vous. Il n'y a qu'à voir comme la direction a réussi à faire tomber la proposition d'Onex, même s'il ne s'agissait que d'une question de procédure, en ne permettant pas aux actionnaires de voter sur l'offre. Cela ne se serait peut-être pas produit si un actionnaire avait eu 40 ou 50 p. 100 des actions. Il faudrait peut-être voir quels seraient les avantages d'un côté comme de l'autre.

Le président: Merci, monsieur Discepola.

Chers collègues, monsieur Benson et monsieur Markey, merci beaucoup d'avoir pris le temps de venir de nouveau témoigner devant le Comité permanent des transports pour répondre aux nouvelles questions que nous avions à vous poser.

Si nous avons besoin d'éclaircissements quand nous rédigerons notre projet de rapport, il se peut bien que nous vous passions un coup de fil ou que nous vous envoyions une petite note.

M. Kevin Benson: Merci à tous les membres du comité pour le temps et l'énergie qu'ils consacrent à cette étude. Nous ne demanderions pas mieux que de revenir vous aider à rédiger le rapport, quand vous le voudrez.

Des voix: Ah, ah!

Le président: Chers collègues, nous allons nous interrompre deux minutes le temps d'accueillir nos nouveaux témoins.

• 1958




• 2005

Le président: Nous accueillons ce soir les représentants d'Air Canada. Nous souhaitons de nouveau la bienvenue au président et chef de la direction, M. Robert Milton; au premier vice-président, Affaires de l'entreprise et Relations gouvernementales, Doug Port; au vice-président et conseiller général juridique, John Baker; et au vice-président principal, Finances et chef des Affaires financières, M. Rob Peterson.

Je vous remercie, messieurs, d'être revenus témoigner devant le Comité permanent des transports.

Nous vous présentons nos excuses, monsieur Milton; nous avons été retardés à cause du vote. Je crois savoir que vous aviez d'autres engagements. Veuillez nous excuser pour cet inconvénient, mais comme vous le savez, la question nous tient à coeur et vous tient aussi à coeur, bien entendu.

Nous sommes impatients d'entendre votre court exposé, après quoi nous passerons aux questions.

Merci.

M. Robert A. Milton (président et chef de la direction, Air Canada): Tout à fait. Merci.

Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, nous sommes heureux de pouvoir de nouveau nous présenter devant ce comité pour parler du plan d'Air Canada pour l'avenir et, de façon générale, de la restructuration de l'industrie canadienne du transport aérien.

Comme je l'ai souligné en de multiples occasions, la restructuration actuelle de l'industrie comporte d'importantes et je dirais même de profondes répercussions d'intérêt public. Quoique ma principale responsabilité en tant que chef de la direction soit à l'endroit des actionnaires d'Air Canada, je reconnais que l'issue du débat actuel a une portée qui va bien au-delà des intérêts des actionnaires. C'est pourquoi le Parlement a un rôle crucial à jouer dans le développement d'un cadre stratégique et réglementaire qui protège l'intérêt public tout en contribuant à l'essor et à la rentabilité du secteur du transport aérien.

Je comprends l'importante responsabilité qui vous est dévolue. Je tiens à réitérer mon engagement à aider les membres du Parlement, tant ici qu'au Sénat, dans l'évolution du processus. Nous serons accessibles, nous serons francs et sincères et, ce qui est peut-être plus important, nous écouterons.

Il y a eu de nombreux événements depuis que je me suis présenté devant ce comité le 27 octobre. Malgré ces importants développements, il y a une chose qui n'a pas changé—notre engagement à mettre à exécution le plan novateur et réaliste que nous avons annoncé le 19 octobre. Cela comprend l'acquisition de Canadien et l'établissement d'un transporteur à bas prix ayant pour port d'attache Hamilton, en Ontario, deux éléments clés de notre plan pour l'avenir.

La semaine dernière, nous avons posté aux actionnaires de Canadien notre offre officielle d'acquisition du transporteur aérien. Nous avons distribué des exemplaires de notre offre à tous les membres de ce comité.

Le plan d'Air Canada pour l'avenir comporte de multiples facettes. Il est de bon aloi pour les actionnaires, et a aussi le mérite de tenir compte des intérêts des employés, des consommateurs et des petites localités. Bref, il respecte les cinq principes énoncés par le ministre des Transports et va même au-delà. Il prend aussi en considération les préoccupations soulevées par les représentants élus des gouvernements fédéral et provinciaux. Ces aspects ont été soigneusement soupesés dans l'élaboration de notre plan.

Au cours de ma plus récente comparution devant ce comité, mesdames et messieurs les députés ont avec raison exprimé leurs inquiétudes au sujet des répercussions de toute restructuration sur le personnel d'Air Canada et de Canadien. Personne n'a plus souffert ces derniers mois que les employés des deux transporteurs et leurs familles. Ils ont connu de fortes émotions et beaucoup d'incertitude. C'est sur la touche qu'ils ont assisté, impuissants, au débat sur leur avenir. Ils se sont inquiétés de leur sort et de leur emploi à l'issue du processus de restructuration.

Nous avons pris note de vos préoccupations et de celles des employés. Depuis le début, nous avons dit que personne ne perdrait involontairement son emploi par suite de l'opération envisagée. Récemment, je suis allé plus loin en mettant par écrit un engagement en sept points que j'ai fait parvenir aux chefs syndicaux des deux transporteurs aériens, ce qui comprend leurs filiales régionales. Des exemplaires de cette lettre ont été déposés auprès de la greffière de ce comité.

En termes simples, nous ne pouvons pas exploiter une société aérienne de manière rentable et nous ne pouvons pas restructurer l'industrie du transport aérien avec succès sans le soutien et la participation active des employés du secteur. Mais il y a plus derrière notre engagement que de simples calculs commerciaux. Nous croyons réellement possible de bâtir un grand transporteur aérien tout en respectant les aspirations des employés. La compassion et la compréhension sont des éléments essentiels de la culture d'entreprise d'Air Canada. Ces caractéristiques renforcent, sans la miner, notre capacité à concurrencer et devancer les joueurs sur la scène internationale.

Avant de répondre aux questions que vous voudriez me poser, je veux aborder brièvement deux points que mesdames et messieurs les députés ont soulevés lors de ma dernière présentation.

Premièrement, la question de la concurrence. Comme je l'ai dit au début de ce processus, nous nous réjouissons que le Bureau de la concurrence participe activement au processus par une étude approfondie de notre proposition. À cette fin, nous avons déposé un préavis de notre plan d'achat de Canadien auprès du Bureau pour qu'il en fasse l'examen et nous nous attendons à recevoir sous peu une demande de renseignements en vue de permettre au Bureau d'approfondir son étude. Nous croyons que notre plan offre le meilleur espoir de santé et de prospérité pour le secteur aérien.

• 2010

Le deuxième point que je veux aborder touche la restriction de 10 p. 100 sur la propriété individuelle contenue dans la Loi sur la participation publique au capital d'Air Canada. À ce jour, nous n'avons pas pris position quant à savoir si cette restriction devait être modifiée. Nous avons simplement maintenu que si la règle des 10 p. 100 doit être modifiée, cette modification ne peut avoir lieu qu'après un débat à fond de la question au Parlement. Nous avons toutefois accepté l'invitation du comité à examiner s'il y a lieu de modifier la règle.

La position de notre conseil d'administration, qui a étudié cette question avec attention, c'est que le plafond de participation individuelle devrait être porté à 15 p. 100, de façon à l'aligner sur le régime de propriété qui s'applique au CN. À notre avis, un maximum de 15 p. 100 est sage, car il hausserait l'intérêt des investisseurs pour Air Canada, mais il empêcherait ceux-ci d'exercer une influence exagérée sur l'entreprise. De plus, la limite de propriété de 15 p. 100 empêcherait une seule personne de contrôler le transporteur aérien chef de file du Canada et continuerait ainsi de respecter un important objectif d'intérêt public.

Selon les lois provinciales sur les valeurs mobilières, il est reconnu que 20 p. 100 de propriété donne le contrôle effectif. C'est le niveau auquel les prises de contrôle doivent être faites et auquel les blocs de contrôle sont définis. Étant donné que 20 p. 100 de propriété est également le niveau auquel les sociétés, du point de vue du droit sur l'actif, peuvent consolider les participations détenues, nous croyons qu'il ne serait pas pertinent de favoriser ce contrôle, vu les enjeux d'intérêt public en cause. En outre, la participation aux assemblées des actionnaires des entreprises à actionnariat diffus telles qu'Air Canada se situe généralement dans une fourchette de 35 à 50 p. 100 des droits de vote admissibles.

Nous avons aussi exposé notre position à l'égard de la limite de 25 p. 100 de propriété étrangère d'Air Canada. Nous croyons que la recommandation du commissaire de la concurrence de porter cette limite à 49 p. 100 est pertinente, car elle encouragerait un investissement accru dans Air Canada, toutefois, conjuguée à la limite de 15 p. 100 de propriété individuelle, elle éviterait qu'Air Canada ne tombe sous le contrôle d'un investisseur individuel, qu'il soit canadien ou étranger. Il y a une distinction importante à établir entre propriété et contrôle. La limite de 49 p. 100 respecte également les engagements du Canada dans le cadre de divers accords bilatéraux sur les services aériens.

Pour conclure, je tiens à dire au gouvernement fédéral et à tous les membres du Parlement que nous tous, à Air Canada, entendons collaborer avec vous pour mettre au point un cadre législatif et réglementaire viable. Un cadre qui protège effectivement l'intérêt public tout en permettant à l'industrie canadienne du transport aérien de croître, de prospérer et d'être concurrentielle sur la scène internationale.

Ces derniers mois ont été éprouvants pour tous ceux qui ont participé à ce débat historique; je crois réellement qu'il est temps de tourner notre regard vers l'avenir. Les blessures causées par ce débat guériront avec le temps—et avec un engagement sincère de tous les participants à écouter, à apprendre et à travailler ensemble. C'est un engagement que je suis fier de prendre au nom de tous à Air Canada.

Merci.

Le président: Monsieur Milton, je vous remercie infiniment de ce bref exposé.

Chers collègues, la liste des intervenants est longue; en conséquence, je vous prie d'essayer de vous en tenir à vos cinq minutes et de poser des questions aussi brèves que possible pour qu'un maximum puisse être posées.

Monsieur Comuzzi, nous commencerons par vous.

M. Joe Comuzzi: Merci, monsieur le président.

Soyez de nouveau les bienvenus, messieurs.

Simultanément à la reddition de son arrêt par la Cour du Québec, nous avons appris que la Caisse de dépôt et de placement du Québec avait investi 300 millions de dollars dans Air Canada sous forme d'obligations non garanties. Nous avons également appris que ces obligations étaient convertibles. Étant donné l'organisation du capital social d'Air Canada, si ces obligations étaient convertibles, elles conféreraient un degré de propriété supérieur aux chiffres que vous avez cités tout à l'heure, un degré maximum de propriété. Je crois que la Caisse détient désormais environ 7 p. 100 des actions si je ne m'abuse.

Monsieur Milton, qu'est-ce qui déclenche la convertibilité de cette émission d'obligations? Compte tenu de l'importance de cet investissement, la Caisse a-t-elle insisté pour être représentée par des administrateurs à votre conseil? Air Canada a-t-elle pris d'autres engagements pour décrocher cet investissement?

M. Robert Milton: Je demanderais à Rob Peterson de m'aider à vous répondre. Rob est notre chef des affaires financières.

• 2015

Pour l'essentiel, cela faisait déjà un certain temps que nous étions en pourparlers avec la Caisse avant de conclure une entente vendredi. En réalité, cette transaction a été conclue la semaine suivante. Étant donné l'environnement dans lequel nous nous trouvons, une escalade d'offres incessante, il n'y a pas beaucoup d'entreprises, surtout d'actionnaires, en mesure d'offrir rapidement quelque 300 millions de dollars de liquidités. La Caisse est un excellent actionnaire. Étant donné la situation dans laquelle nous nous trouvions, nous travaillions sur cette transaction et elle a été finalement conclue la semaine suivante.

Pour ce qui est du siège au conseil d'administration, nous serons absolument enchantés d'en discuter avec eux. Nous en sommes à la dernière phase de la transaction. Nous n'avons donc pas déjà mis tous les points aux «i» et toutes les barres aux «t» requis.

M. Joe Comuzzi: La Caisse vous a-t-elle demandé des sièges au conseil d'administration?

M. Robert Milton: Nous avons eu des discussions animées avec ses représentants, mais je dois vous avouer en toute honnêteté qu'ils n'ont pas fait cette demande mais nous y sommes ouverts.

M. Joe Comuzzi: Merci.

M. M. Rob Peterson (premier vice-président, Finances, et directeur financier, Air Canada): Vous avez posé des questions à propos de certaines provisions. En fait cette émission de 300 millions de dollars se compose de deux tranches de 150 millions chacune. Nous nous sommes engagés à prendre les 150 premiers millions de dollars. C'est nous qui pouvons exercer une option sur les 150 autres millions et non pas la Caisse.

Actuellement, à ma connaissance, la Caisse détient environ 20 p. 100 de nos actions sans droit de vote et environ 7 p. 100 de nos actions donnant droit de vote, si bien que de la manière dont cette transaction est structurée, si elle souhaitait convertir ses obligations en actions, elle pourrait convertir tout d'abord en actions donnant droit de vote jusqu'au montant maximum autorisé par la loi et ensuite il lui faudrait les convertir en actions sans droit de vote.

M. Joe Comuzzi: Y a-t-il eu d'autres engagements de pris que ceux dont vous venez de parler?

M. Robert Milton: Non.

M. Joe Comuzzi: Très bien.

J'aimerais parler de contrôle par réglementation. Vous n'ignorez pas qu'avec un transporteur en position dominante, il faudra qu'il y ait certains règlements. On peut le faire soit par le biais de recommandations proposées par notre comité ou—et je ne sais pas si vous y avez songé—en acceptant un représentant du gouvernement fédéral à votre conseil d'administration afin de veiller à ce que les règles garantissant la concurrence et d'autres éléments de la transaction, pendant un certain temps, soient respectées. Que pensez-vous de tout cela, monsieur Milton?

M. Robert Milton: Encore une fois, quoi que nous envisagions, nous comptons avec la participation du Bureau de la concurrence. On ne m'a pas encore parlé de la possibilité de la présence d'un représentant du gouvernement fédéral à notre conseil. Je ne serais ni pour ni contre pour le moment. Fervent partisan des forces du marché et de la déréglementation, ce n'est pas une chose à laquelle je songerais volontiers comme mécanisme approprié pour protéger les intérêts qui nous préoccupent—à savoir les intérêts des consommateurs. Mais encore une fois, en dialoguant avec le Bureau de la concurrence, nous devrions pouvoir aboutir à des mécanismes raisonnables pour la mise en place de ces garde-fous. Je suis tout à fait ouvert à une protection des intérêts des consommateurs sur une base raisonnable.

M. Joe Comuzzi: Merci.

Le président: Merci, monsieur Comuzzi.

Madame Meredith, je vous prie.

Mme Val Meredith: Merci, monsieur le président.

Merci, monsieur Milton.

Mes questions concernent votre accord avec Star Alliance. Vous devez comprendre que je représente une circonscription des alentours de l'aéroport de Vancouver si bien que ce qui m'intéresse c'est de voir continuer le développement de Vancouver comme plaque tournante. Je crains que votre accord avec United Airlines ne vous ait bloqué pour dix ans dans une entente qui verra les passagers asiatiques transiter par San Francisco et Los Angeles.

Mes questions sont donc les suivantes. Votre entente avec United Airlines est-elle exclusive? Est-ce qu'elle exclut d'autres Oneworld ou d'autres programmes de partage des codes de vol avec d'autres compagnies aériennes? Cet engagement de dix ans est-il irrévocable? Et quelles seront les ramifications pour l'aéroport de Vancouver?

M. Robert Milton: Je me ferai un plaisir de vous répondre car pour ceux qui comprennent vraiment comment fonctionnent les réseaux de compagnies aériennes, l'analyse qu'on en fait est souvent incroyable.

Pour répondre à votre première question, oui, c'est un engagement de dix ans avec Star Alliance. Star Alliance, cependant, au-delà du Pacifique, comprend également Singapore Airlines, qui sera membre l'année prochaine, et All Nippon Airways, qui possède une énorme plaque tournante à l'aéroport Narita de Tokyo, tout comme United Airlines. United a une plaque tournante aussi importante que Japan Airlines et ANA. Donc prétendre que Oneworld est supérieure pour Vancouver est absolument incorrect.

• 2020

Nous avons déjà exprimé, par ce biais, notre intention d'accroître nos services à Vancouver. Notre intention est d'offrir une liaison sans escale pour Shanghai; nous aimerions offrir une liaison pour l'Australie et je crois qu'il y aura aussi d'autres liaisons d'ajoutées.

À titre d'exemple, la liaison Vancouver-Tokyo pose depuis quelques années beaucoup de difficultés à Canadien. En un an ils sont passés d'un service en 747-400 à celui d'un 767, c'est-à-dire une capacité réduite de moitié. Leur incapacité à assurer une correspondance pour Tokyo diminue la viabilité de Vancouver. Air Canada, pouvant assurer la correspondance avec All Nippon Airways et United à Tokyo et avec Singapour Airlines à Singapour, renforcera Vancouver.

De plus, il importe de noter qu'American, le partenaire de Canadien jusqu'à maintenant, compte tenu de sa présence très limitée sur le Pacifique, n'a pas fait grand-chose pour stimuler la croissance de cette plaque tournante. Ils ont ajouté en cinq ans une liaison de New York à Vancouver. Dans notre cas, United est la principale compagnie aérienne transpacifique.

Mme Val Meredith: D'accord, mais monsieur Milton, ma question est la suivante. Je veux savoir si Air Canada prendra les passagers asiatiques à Toronto et les fera passer par Vancouver sur un avion de Canadien à destination de Singapour, Tokyo, Pékin ou que sais-je. Je veux que vous me disiez que vous ne laisserez pas United prendre ces passagers—qu'Air Canada assurera le transport de ces passagers de Toronto à Los Angeles ou à San Francisco et les mettra sur United ou sur l'autre compagnie aérienne à Tokyo. C'est ça que je veux savoir.

M. Robert Milton: Ce que je propose est nettement supérieur puisque vous allez passer d'une compagnie pratiquement inexistante sur le Pacifique, American Airlines, à une beaucoup plus grosse compagnie. United fera passer des tonnes de passagers par Vancouver. C'est une occasion incroyable pour Vancouver qui entraînera une énorme croissance. Nous apporterons donc définitivement un supplément à ce qui existe déjà à Vancouver et vous constaterez une énorme augmentation de l'importance de Vancouver, la plaque tournante transpacifique, qui n'est pas possible aujourd'hui. Et les cinq dernières années en ont fait la démonstration.

Mme Val Meredith: Donc votre accord avec Star Alliance et United vous permettra de faire passer ces passagers par Vancouver?

M. Robert Milton: Non seulement il le permet, mais de belle manière. Il n'y a pas de restriction, si c'est là votre question.

Mme Val Meredith: Merci.

Le président: Merci, Val.

Monsieur Fontana.

M. Joe Fontana: Merci, monsieur le président.

Monsieur Milton, j'aimerais vous parler un petit peu des consommateurs car c'est l'élément manquant dans cette équation. Tout ce qui est dit est bien beau. J'entends parler d'actionnaires et j'entends parler de tout un tas d'autres choses mais tout compte fait, ce sont les consommateurs, les passagers, qui vous font gagner votre vie, à vous, à Canadien, aux compagnies régionales et à tout le monde. Je tiens à m'assurer, sans équivoque, qu'ils seront protégés dans un marché où il n'y aura plus qu'un seul transporteur en position dominante.

Je vous poserai donc une question de nature philosophique sur la manière dont vous avez réellement l'intention de protéger les consommateurs et sur les règlements qu'il nous faudra mettre en place pour éviter auxdits consommateurs de se faire escroquer.

La proposition que vous faites vous permettra de contrôler aussi bien les vols nationaux qu'internationaux. Vous y faites figurer Canadien d'une manière ou d'une autre et certains voudront peut-être vous demander exactement quelles sont vos intentions. Troisièmement, vous allez contrôler toutes les compagnies régionales. Vous allez en devenir le propriétaire, vous allez les contrôler et elles prendront leurs instructions auprès des administrateurs que vous nommerez. Ensuite, votre intention est de créer cette compagnie aérienne à bas prix censée servir l'est du Canada. Vous allez être le caïd du quartier. Bien sûr, il y aura quelques compagnies indépendantes, mais...

Comment les consommateurs peuvent-ils se sentir à l'aise? Moi aussi, l'idée d'un dictateur bienveillant me plaît, à condition de pouvoir en trouver un, mais soit vous êtes extrêmement bienveillant et par conséquent vous allez promettre de ne pas exploiter tous ces consommateurs...

Vous serez le grand caïd. Vous pourrez fixer les prix, les horaires, les liaisons, etc. J'aimerais que vous disiez aux consommateurs comment vous pourrez vous arranger en définitive pour que les prix n'augmentent pas mais diminuent.

M. Robert Milton: Pour commencer, dialoguer avec le Bureau de la concurrence pour mettre en place des garde-fous appropriés pour défendre les intérêts des consommateurs est un principe auquel j'adhère totalement. Il importe de ne pas réglementer ou de surréglementer au point d'aboutir à des effets néfastes sur les compagnies aériennes canadiennes car nous voulons que le Canada et Air Canada puissent être compétitifs sur la scène internationale. Je suis donc tout à fait pour le dialogue avec le Bureau de la concurrence pour protéger les intérêts des consommateurs pour ces questions qui peuvent poser problème.

• 2025

Pour ce qui est des prix, en réponse au ministre des Transports et à certains de ses objectifs clés dans ce domaine, nous avons spécifiquement proposé cette idée de compagnie aérienne à bon prix, ce qui est une première pour Hamilton. Nous l'avons fait, et maintenant beaucoup de gens disent qu'ils veulent aussi le faire. Alléluia! qu'ils ne se gênent pas, qu'il y ait un maximum de concurrence et un maximum de tarifs bon marché pour les consommateurs. La concurrence ne fait pas peur à Air Canada. Nous l'avons montré sur la scène internationale.

Pour ce qui est de cette notion de caïd, je crois qu'il est très important, et je demande à votre comité de le faire, d'examiner les faits, y compris les faits de Statistique Canada, de la dynamique exacte du marché intérieur canadien. Ce sont les compagnies nolisées qui dominent le marché. Il vous intéressera peut-être de savoir que les transporteurs nolisés, toutes compagnies confondues, offrent plus de sièges avec leurs flottes que Canadien. Canadien reste dans notre tableau. Les compagnies nolisées ont crû à un taux de 30 p. 100 de 1992 à 1998, la concurrence est donc réelle. Elles sont rentables et ce sont elles qui fixent les prix dans ce secteur.

De plus, je crois, étant donné la géographie et l'éparpillement de la population du Canada, l'arme compétitive ultime contre Air Canada est d'ouvrir la possibilité de faire passer le trafic par les États-Unis. J'ai été tout à fait clair quant à ma volonté d'une base de réciprocité, et je crois qu'il est totalement inapproprié que certains proposent que le Canada renonce sans droits réciproques des États-Unis à la possibilité de faire passer le trafic canadien par les États-Unis. Mais s'ils y sont autorisés, je suis tout à fait prêt à concurrencer les Américains et c'est une magnifique arme compétitive.

Enfin, pour ce qui est des transporteurs régionaux, il importe de noter—concernant certains des scénarios abracadabrants à propos de ces transporteurs régionaux—que pour ceux qui comprennent les réseaux, y compris les opportunistes qui essaient de faire croire ces scénarios, ils savent que ce ne sont pas des réseaux en concurrence, ce sont des réseaux compatibles et les compagnies régionales sont des éléments critiques pour alimenter les lignes principales. Donc les petites communautés, en particulier, seront protégées car une compagnie comme Air Canada considère les petites communautés et les transporteurs régionaux sur une base globale et non pas sur une base locale.

Je pense donc que ce que nous préconisons est proconsommateur car tout compte fait, la proposition d'Onex signait la déconfiture de Canadien ou son arrivée irrémédiable dans les bras d'Air Canada. Dans notre proposition, Canadien fera partie d'Air Canada. L'autre chose dont on entend parler—apparemment parce qu'il n'y a pas d'autres solutions—c'est la déconfiture de Canadien. Quel que soit le scénario, la compagnie Canadien que nous connaissons aujourd'hui disparaîtra. Je suis tout à fait disposé à rencontrer les représentants du Bureau de la concurrence, et notre volonté sera de protéger les intérêts des consommateurs.

Le président: Merci, monsieur Fontana.

Monsieur Guimond, je vous prie.

[Français]

M. Michel Guimond: Monsieur Milton, je vous remercie de votre présentation. Depuis quand êtes-vous au service de la compagnie Air Canada, monsieur Milton?

[Traduction]

M. Robert Milton: Sept ans.

M. Michel Guimond: Sept ans?

M. Robert Milton: Oui.

[Français]

M. Michel Guimond: Vous vous rappelez probablement qu'en 1995, au moment de l'allocation des routes internationales, le ministre des Transports de l'époque, Doug Young, avait refusé de donner à Air Canada des vols vers Hong Kong et Tokyo à partir de Vancouver, ce qui nous aurait permis de développer Vancouver. On invoquait le fait que le nombre de passagers n'était pas suffisant. Vous avez probablement oublié de préciser ceci tout à l'heure, et j'aimerais le rappeler à notre mémoire aux fins de notre compte rendu.

Lors de sa comparution, M. Deluce avait ni plus ni moins demandé au gouvernement, dans l'éventualité de cette restructuration qui créerait un transporteur dit dominant, de faire en sorte que les transporteurs régionaux soient mis en vente et cédés. Je suis un avocat qui plaide en français et j'ai appelé cela de l'expropriation déguisée, mais apparemment, cette expression n'est pas bien choisie. Je ne voudrais pas revenir sur le débat sémantique au sujet du mot «expropriation». Êtes-vous d'accord sur la proposition qu'a soumise M. Deluce au nom de Regco, selon laquelle le gouvernement devrait vendre les transporteurs régionaux?

• 2030

[Traduction]

M. Robert Milton: Je crois que dans le langage universel on parle d'«expropriation déguisée». À mon avis, ce genre de choses nuit aux consommateurs.

Comme je l'ai dit plus tôt, Air Canada envisage d'aller prendre des passagers dans le monde entier dans le cadre du plus grand réseau du monde, Star Alliance. Par conséquent, si on considère des marchés comme Terrace ou Charlottetown, nous acheminons des passagers en leur fournissant un réseau d'itinéraires optimum vers ces destinations. Pour nous, c'est tout à fait différent d'acheminer cinq passagers entre Vancouver et Terrace, par exemple, parce que nous savons que nous pouvons les emmener aussi loin que Londres ou Hong Kong. Par contre, pour une compagnie aérienne régionale dorénavant totalement indépendante des principales lignes, c'est différent car pour elle, il est seulement question du trajet local, Vancouver-Terrace. Si la compagnie locale ne peut pas faire de bénéfices sur ce trajet, elle va le supprimer.

Je prie instamment le comité d'examiner très attentivement ces recommandations en réfléchissant aux conflits qu'elles pourraient provoquer. Par exemple, est-ce que la protection des prix est un facteur qui aide à protéger les services aux petites communautés? À mon avis, vous devez être très prudents car si vous protégez les prix, si vous empêchez les compagnies aériennes d'augmenter leurs prix, lorsque le carburant sera plus élevé qu'il ne l'a été depuis neuf ans, vous pourriez les forcer en même temps à supprimer des vols qui ne sont plus viables économiquement parlant. Voilà donc une petite collectivité qui n'est plus desservie à cause de la protection des prix.

Je vous encourage donc à examiner les causes et les effets que ces causes pourraient provoquer. Je suis convaincu que les réseaux régionaux sont un élément critique des grandes lignes. Je ne sais pas si c'est une bonne comparaison, mais c'est un peu comme de dire à General Motors qu'elle peut continuer à fabriquer des automobiles mais qu'elle doit céder sa division qui fabrique les moteurs. Cela n'a aucun sens.

[Français]

M. Michel Guimond: Dans la même foulée, monsieur Milton, que peut-on dire pour rassurer les 1 100 employés d'InterCanadien—environ 60 p. 100 d'eux sont au Québec et 40 p. 100 dans les Maritimes—qui sont inquiets? Est-ce qu'ils font partie de votre scénario? Je sais qu'InterCanadien est un concurrent direct d'Air Nova et Air Alliance.

[Traduction]

M. Robert Milton: Le problème, ce n'est pas le fait qu'ils constituent une concurrence directe. Le problème, c'est que dans un premier temps nous essayons d'acheter Canadien, ses filiales à 100 p. 100 et ses employés. Je crois comprendre qu'il y avait peu d'argent en jeu dans la transaction. La situation financière d'InterCanadien n'était par reluisante avant la cession et que je sache—quoique je n'en sois pas absolument certain—cette compagnie est encore en mauvaise posture financière.

Je suis prêt à discuter, mais ma première priorité a consisté à protéger Canadien, ses filiales en propriété exclusive et ses entreprises. Je n'ai pas d'opinion définitive en ce qui concerne InterCanadien ou les autres compagnies affiliées à Canadien dans les mêmes conditions. Je suis prêt à discuter. Mais je pense également qu'elles ont la possibilité d'essayer de conclure des ententes avec d'autres compagnies aériennes, qu'il s'agisse de charters, individuellement ou collectivement, ou bien des compagnies aériennes américaines. À mon avis, il y a beaucoup d'options, mais il faut d'abord que je comprenne mieux en quoi consistent précisément leurs relations avec Canadien, et pour l'instant, ce sont des aspects qui sont très mal connus.

[Français]

M. Michel Guimond: Je vous poserai une dernière question, monsieur Milton. Nous avons constaté que vous avez adopté une position ferme quant à la règle des 10 p. 100 sur la propriété individuelle. Vous prenez position carrément en faveur d'une augmentation à 15 p. 100.

Dans la version française de votre mémoire, on lit:

    La position de notre conseil d'administration, qui a étudié cette question avec attention, c'est que le plafond de participation individuelle devrait être porté à 15 p. 100...

Je me rappelle avoir lu, il y a trois semaines, un article dans le journal Le Devoir de Montréal qu'avait signé Marc Lalonde, ex-ministre libéral. J'ai questionné le ministre Collenette en Chambre là-dessus, et il m'a répondu qu'afin de protéger l'intérêt public, la règle devait être maintenue à 10 p. 100. M. Collenette m'a également indiqué que l'opinion de M. Lalonde pouvait être valide, mais que nous devions tenir compte du fait que ce dernier s'exprimait en tant qu'avocat d'Air Canada.

Pourriez-vous me dire si votre conseil d'administration s'est branché au cours des trois dernières semaines? Lorsque M. Lalonde faisait ces commentaire, était-il mandaté par le conseil d'administration?

• 2035

[Traduction]

M. Robert Milton: De toute évidence, lorsqu'il a déclaré cela, ce n'était pas en tant que membre du conseil d'Air Canada. J'ai déjà eu l'occasion de déclarer devant ce comité que pour un PDG comme moi, c'est une question particulièrement difficile, et que je suis très partagé. Du point de vue du PDG, du point de vue d'un actionnaire, ou du point de vue de l'ensemble des actionnaires, ces règlements ne sont pas favorables. C'est un obstacle pour le développement d'Air Canada.

Même à l'occasion de ce développement récent lorsqu'Onex et Air Canada ont essayé d'intervenir, deux parties bien différentes se jouaient. Une des compagnies faisait une offre en considérant que les règles seraient changées pour lui permettre d'acheter jusqu'à un tiers de la compagnie. De notre côté, nous partions du principe que la règle des 10 p. 100 resterait inchangée. Si nous avions réussi à préparer une offre dans le cadre de la loi—les tribunaux ont clairement décidé que cela n'était pas possible—j'aurais pu défendre les intérêts de nos actionnaires infiniment mieux en allant voir du côté du Lufthansa, United, de la Caisse, en me tournant vers toutes sortes de gens et en leur disant: «Eh, nous pouvons acheter un tiers de cette compagnie aérienne, allons-y.» Bref, les règles n'étaient pas les mêmes dans les deux cas.

Nous avons examiné les diverses structures et jugé que celle du CN était très attrayante. En fait, sur le plan de la valeur potentielle, la propriété étrangère à 100 p. 100 nous conviendrait. Pour moi, l'important pour le pays, c'est que ce soit une société à participation multiple, ce n'est pas l'identité des propriétaires. En fin de compte, les Canadiens seront propriétaires d'une bonne partie de la société, mais cela dit, si la propriété canadienne est établie à 49 p. 100, c'est en réalité à cause des accords bilatéraux qui existent entre beaucoup de pays et selon lesquels les compagnies aériennes doivent appartenir à des intérêts nationaux et être domiciliées dans le pays même.

À mon avis, tout ce que nous avons dit est logique. C'est également dans la ligne de ce que pense M. Lalonde, à cette exception près que pour nous, les 10 p. 100 pourraient être remplacés par 15 p. 100. Mais finalement, il dit au fond la même chose que nous, c'est-à-dire que l'important pour le Canada est la participation multiple. Les intérêts du pays sont très différents des intérêts des actionnaires d'Air Canada. C'est la raison pour laquelle nous avons jugé bon de demander des précisions au sujet de la loi, de demander des explications sur la différence inhérente qui existe entre les intérêts de ces deux groupes.

Le président: Monsieur Dromisky, je vous en prie.

M. Stan Dromisky: Merci beaucoup, monsieur le président.

Monsieur Milton, vous devez vous rendre compte qu'il y a beaucoup de gens qui sont impatients de voir les choses se calmer pour savoir qui restera le transporteur dominant et quelle place ils peuvent se tailler dans le système, quel nouveau service ils peuvent offrir, et tout cela, parce que l'industrie aérienne au Canada est en bonne santé. Vous dites toujours que vous êtes convaincu des vertus de la concurrence, mais pourtant, nous avons entendu tout à l'heure un de vos employés, qui représente les trois transporteurs qui sont sous votre contrôle exclusif, indiquer clairement qu'ils se retrouveraient dans une situation désespérée en présence d'un concurrent sérieux sur n'importe laquelle de leurs lignes. Autrement dit, ils survivraient beaucoup mieux si on les laissait tranquilles. J'aimerais savoir ce que vous pensez de ce genre de situation.

D'autre part, à l'intention des téléspectateurs, car notre séance est probablement télévisée en ce moment, j'aimerais que vous nous donniez des informations sur les garanties engagées par votre compagnie en ce qui concerne les employés et leurs emplois. Pouvez-vous nous donner des détails?

M. Robert Milton: Certainement. Pour commencer, j'imagine que vous faites allusion au témoignage de Joe Randell.

M. Stan Dromisky: Oui.

M. Robert Milton: Je n'ai pas eu l'occasion d'entendre Joe aujourd'hui. J'aurais du mal à interpréter cette déclaration car nos transporteurs régionaux se heurtent déjà à une vive concurrence dans des marchés comme Toronto et en Colombie-Britannique. Ils se débrouillent très bien et font maintenant partie d'un réseau très rentable d'Air Canada. J'ai donc beaucoup de mal à comprendre cette déclaration.

Quant à nos engagements envers les employés, je crois avoir soumis au comité des engagements par écrit. Je ne sais pas s'il est possible d'être plus sincère ou plus sympathique à cette cause. En fait, j'ai déclaré à un des employés de Canadien, avant qu'il ne me branche sur un détecteur de mensonges, que nous étions absolument déterminés à protéger les emplois des employés de Canadien. Toutefois, il faut qu'on nous en donne la possibilité.

Encore une fois, je vous demande de m'excuser pour l'impression que cela donne, car je sais que nous sommes en butte à beaucoup de critiques. Si je déclare que nous avançons à toute vapeur pour acquérir Canadien, alors tout le monde se met à dire qu'il va falloir réglementer ceci et cela, qu'il va falloir nous opposer tel et tel obstacle. D'autre part, si je dis que si les choses ne vont pas exactement comme nous le voulons nous sommes prêts à les laisser faire faillite... C'est une discussion dont je ne peux pas sortir gagnant, et tout ce que je peux dire, c'est que nous sommes convaincus de la valeur de marque de Canadien. Nous sommes déterminés à acheter cette compagnie, mais d'un autre côté, il faut qu'on puisse nous dire qu'American Airlines n'aura pas la possibilité de nous écarter grâce aux ententes que cette compagnie a déjà avec Canadien. Nous avons besoin de précisions à ce sujet. À mon avis, il est également raisonnable de bien savoir d'avance à quoi tout cela ressemblera sur le plan réglementaire lorsque le processus sera terminé.

• 2040

Encore une fois, je m'en excuse, mais c'est ce dont nous avons besoin, et j'ose croire que toute personne raisonnable jugera que c'est raisonnable.

M. Stan Dromisky: J'ai une dernière question au sujet du rapport qu'on nous a présenté cet après-midi quand nous avons abordé la question des transporteurs régionaux. Ils ont fait plusieurs fois allusion aux types d'appareils qu'ils ont sur certaines routes et il était très évident qu'ils aimeraient avoir plus d'avions à réaction sur ces routes. Maintenant, je sais qu'il y a une foule de facteurs, notamment des facteurs monétaires, mais dans la restructuration que vous envisagez, prévoyez-vous donner suite à ces demandes au sujet des types d'appareils? Je parle des services régionaux.

M. Robert Milton: Je suppose que vous voulez parler des dispositions de la convention collective des pilotes d'Air Canada qui traitent de la portée du travail et qui imposent des contraintes à nos transporteurs régionaux pour ce qui est de l'exploitation d'avions à réaction.

J'adore les pilotes d'Air Canada, mais je pense que cette mesure est mauvaise pour eux, et je crois—et ils savent que j'ai cette conviction—que je dois continuer à travailler pour en obtenir l'élimination. Un débat fait rage aux États-Unis sur ces dispositions dont on dit qu'elles nuisent à la concurrence et qu'il faudrait peut-être légiférer pour les éliminer. J'aimerais bien que le Parlement le fasse, parce que je pense que ce n'est pas bon pour l'industrie au Canada ni même pour les pilotes d'Air Canada.

Par contre, les Lignes aériennes Canadien ont la capacité de le faire et je suis donc convaincu qu'à l'avenir, les deux groupes de pilotes prendront conscience qu'il est dans leur intérêt supérieur de permettre l'exploitation d'avions à réaction sur les lignes régionales à la suite de la fusion des compagnies aériennes, et j'ai fermement l'intention de me lancer à fond dans cette voie. Air Canada a été la première grande compagnie aérienne au monde à acheter l'avion à réaction régional de Bombardier. Nous en avons prouvé la rentabilité. C'est maintenant un succès phénoménal. Nous voulons en acheter beaucoup plus, mais nous ne le ferons pas à moins que ces appareils puissent être exploités par nos compagnies régionales sur une base raisonnable.

Le président: Monsieur Solomon.

M. John Solomon (Regina—Lumsden—Lake Centre, NPD): Merci, monsieur le président.

Le moment est peut-être bien choisi pour mon intervention, car je veux justement aborder la question du service régional. Je représente une circonscription des alentours de Regina. Regina compte environ 200 000 habitants et est le centre d'un marché d'environ 350 000 personnes.

Au printemps 1997, monsieur Milton, le service entre Regina et Winnipeg et entre Regina et Calgary a été déclassé quand on est passé des appareils Airbus et DC-9 aux avions à réaction Canadair. J'ai écrit à ce moment-là à M. Durrett. Je voulais savoir si c'était une situation permanente et pourquoi on avait opéré ce déclassement. Il m'a répondu quelque chose du genre: vous pouvez vous considérer chanceux puisque c'est un avion à réaction fabriqué au Canada.

Depuis lors, nous avons subi un nouveau déclassement du service, non seulement vers les villes en question, mais aussi à destination et en provenance de Vancouver. Il n'y a plus de vol directs vers Vancouver à partir de Regina et nous volons maintenant à bord de Dash-8 pour aller à Winnipeg et à Calgary et pour en revenir.

Cet automne, Air Canada a encore une fois déclassé le service. Le vol de Toronto, assuré par un avion à réaction Airbus, atterrit maintenant à minuit au lieu de 22 heures. C'est un très gros inconvénient pour les gens d'affaires de Saskatchewan et en particulier ceux de Regina. C'est un gros inconvénient pour les consommateurs, parce que les gens atterrissent à minuit—en fait, l'avion est habituellement en retard de sorte que l'on atterrit entre minuit et une heure du matin, après quoi il faut conduire jusqu'à Moose Jaw ou Estevan et l'on arrive chez soi aux petites heures du matin. Le lendemain matin, on a une réunion d'affaires et l'on est fatigué.

En plus de cela, le prix du vol aller-retour Regina Ottawa, en classe affaires, est passé depuis six ans de 1 450 $ à 2 500 $, ce qui représente une augmentation de 72 p. 100, et le prix du billet plein tarif a augmenté d'autant, sinon plus.

Voici donc ma question, monsieur Milton: quel sort réserve-t-on à Regina? Pourquoi semblez-vous vous acharner sur Regina, qui est, soit dit en passant, la capitale de la Saskatchewan, en déclassant constamment le service? Quelles garanties allez-vous donner aux consommateurs du sud de la Saskatchewan, monsieur Milton? Leur donnerez-vous l'assurance qu'à l'avenir, on tiendra compte du fait que c'est une ville capitale, qu'il faut qu'elle puisse compter sur un bon service, et que l'on ne continuera pas à déclasser ce service mais qu'on l'améliorera au contraire en affectant à cette desserte des appareils convenables?

Le président: Merci, monsieur Solomon.

M. Robert Milton: J'essaie de répondre dans l'ordre.

• 2045

Ce qui est fondamental, c'est que nous devons fonctionner. Il suffit de voir les pressions que nous avons subies lors de la tentative d'OPA hostile, qui a été faite à un prix très bas. Nous devons rapporter de l'argent aux actionnaires. Nous sommes complètement privatisés, donc nous avons des clients qui attendent de nous un rendement confortable.

Les rendements obtenus sur la ligne Winnipeg-Regina avec les A-320 et les DC-9 n'étaient pas suffisants. Nous avons pensé prendre la bonne décision en mettant en service des avions de transport régionaux à réaction. On a critiqué nos activités diverses et le fait que nous n'avions pas de passerelles au terminal. Nous avons investi dans des passerelles. Cela n'a toujours pas marché. Il n'y avait pas assez d'appui. Nous avons alors opté pour des turbopropulseurs. Nous n'avons pas cessé d'essayer de rentabiliser la ligne. Finalement, cela s'est révélé difficile.

Toujours sur ce tronçon Vancouver-Regina, nous avons essayé de faire assurer le service par Air BC, mais cela n'a pas marché. Nous avons essayé. Nous avons fait l'investissement de l'avion. Nous sommes allés sur le marché, mais nous avons constaté qu'il n'y avait pas suffisamment d'intérêt. Cela n'a pas marché. Nous avons donc supprimé le vol Air BC 146 que nous avions il y a environ deux ans.

Pour ce qui concerne la liaison Toronto-Regina, il est important de souligner, je crois, que nous sommes la compagnie aérienne qui assure ce service deux fois par jour sans escale. Certes, nous avons récemment déplacé le vol 153—je crois que c'est le 153—à 21 h 15 ou quelque chose comme cela. Nous avons dû le faire parce que nous avons réorganisé notre plaque tournante de Toronto, nous avons remplacé le service omnidirectionnel—c'est-à-dire un service qui consiste à avoir des vols qui arrivent de toutes les directions et qui repartent aussitôt—par un service directionnel sur l'axe est-ouest, de manière à améliorer les correspondances et, nous l'espérons, la rentabilité de la ligne.

Nous pensons donc que nous avons fait quelque chose d'intéressant à Regina car il y aura maintenant une bonne correspondance à Toronto, en particulier pour les voyageurs arrivant de diverses destinations aux États-Unis. Nous estimons donc que nous avons amélioré l'accès à Regina. Toutefois, je tiens à vous assurer que si ce n'est pas le cas—car il n'est pas question d'abandonner la liaison Toronto-Regina sans escale—je rétablirai l'ancien horaire. Mais pour l'instant, nous pensons que, même si l'avion n'arrive qu'à minuit, nous améliorons l'accès à Regina.

Le président: Monsieur Calder.

M. Murray Calder: Merci, monsieur le président.

J'aimerais aborder quelques questions, notamment cette lettre par exemple, qu'on nous a remise et qui est datée du 1er novembre 1999, c'est-à-dire il y a 22 jours. Je sais que cette lettre était adressée à un certain nombre de «dirigeants de syndicats», notamment l'Association internationale des machinistes et des travailleurs de l'aérospatiale. Ensuite, deux semaines après, on a envoyé un communiqué de presse aux rédacteurs de publications financières et d'affaires, c'était l'offre d'achat des actions Canadien International, qui a été envoyée aux actionnaires, etc. Ce qui m'intéresse, c'est l'écart entre les deux.

La première question, c'est que dans la première lettre on peut lire:

    Aucun employé syndiqué actuel d'Air Canada, de Canadien et de leurs transporteurs régionaux respectifs ne fera l'objet d'une cessation d'emploi involontaire découlant directement de la restructuration de l'industrie.

Pourtant, 14 jours plus tard on lit dans le communiqué de presse qu'aucun employé de Canadien ou d'Air Canada ne sera licencié contre sa volonté.

Ce que je veux souligner ici, c'est l'opposition entre le licenciement d'une part et la cessation d'emploi d'autre part, car dans le deuxième texte, deux semaines après, on peut penser que l'employé ne sera pas licencié contre son gré, mais qu'il pourrait être victime d'une cessation d'emploi indéfinie, ce qui est exclu dans la première lettre. S'il ne peut pas y avoir cessation d'emploi, il est évident qu'il ne peut pas y avoir licenciement. J'aimerais que vous m'expliquiez cela.

M. Robert Milton: Certainement, avec plaisir. Peut-être notre conseiller général pourra-t-il aussi m'aider.

Mon intention, mon engagement est que personne ne soit obligé de perdre son emploi s'il souhaite le conserver. Je pense néanmoins qu'il y aura dans les deux compagnies un certain nombre de personnes qui souhaiteront profiter des indemnités de départ ou de retraite anticipée que nous pourrons leur proposer, et nous avons donc prévu 125 millions de dollars pour 2 500 personnes. Je suis en fait prêt à augmenter ce montant s'il y a un plus grand nombre de personnes intéressées. Notre idée, notre souhait, c'est de ne forcer personne à perdre son emploi ou à partir ailleurs.

Mais pour ce qui est du choix des mots, John, je ne pense pas qu'il y ait eu de noirs desseins.

M. John Baker (vice-président et conseiller général juridique, Air Canada): Je crois que ces termes ont été considérés comme équivalents.

• 2050

M. Murray Calder: Vous devez comprendre que mon travail est de déceler toutes les incohérences, et j'ai trouvé celle-ci.

Le point suivant, c'est ce dont vous venez de parler, c'est quelque chose qui ne figurait pas non plus dans la lettre du 1er novembre. Or, si ce document a été envoyé à toutes les organisations syndicales, il me semble que cette information aurait dû y figurer, à savoir qu'il y aura une réduction nette de 2 500 emplois environ et que cette réduction s'effectuera sous forme d'attrition, de programmes de retraite anticipée et d'offres de départ volontaire qui seront présentées aux employés.

Vous êtes même en train de nous dire ce soir que vous pourriez même surenchérir là-dessus, autrement dit vous pensez que ces mesures pourraient être étendues à plus de 2 500 emplois.

M. Robert Milton: Je n'exclus pas cela. Je ne dis pas que je souhaite que ce soit plus que ces 2 500 emplois, mais je pense que nous pourrions avoir plus d'offres que cela. Pour l'instant, je suis prêt à envisager de faire des offres d'indemnité de départ encore plus généreuses.

C'est dans l'intérêt de la compagnie dans la mesure où les employés souhaitent pouvoir profiter de telles offres, et c'est logique d'un point de vue économique puisqu'on peut recruter de nouveaux employés à des niveaux inférieurs. Nous sommes ouverts à cela, mais c'est une question d'ordre économique. Au minimum, nous nous engageons à offrir des indemnités de départ aux employés s'ils ne veulent pas continuer à exercer les emplois qui sont disponibles.

M. Murray Calder: D'ici combien de temps pensez-vous proposer ces offres de départ aux employés? Dans un an, deux ans, trois ans, cinq ans?

M. Robert Milton: Je ne pense pas que nous ayons fixé une date précise, mais ce sera certainement à court terme.

Avons-nous précisé le moment, Rob ou John?

M. John Baker: Je crois que nous avons dit que ces engagements seront valables durant la période de restructuration jusqu'à mars et avril 2001.

M. Murray Calder: Dans ce cas, donc, 2002, c'est le délai dans lequel vous pensez qu'Air Canada et Canadien fusionneront complètement. C'est ce que je pense comprendre de ce que vous nous dites.

M. Robert Milton: J'ai clairement dit que l'histoire des fusions de compagnies aériennes, des exercices d'intégration de compagnies aériennes, est jonchée de ruines de ces compagnies. Très peu de ces fusions ont été réussies, et les seules qui se soient bien déroulées sont celles où les compagnies avaient l'appui entier de leurs employés.

Canadien et Air Canada sont toutes deux de grandes compagnies aériennes avec toute une histoire derrière elles. Avant de nous occuper de l'intégration des deux compagnies, je tiens à m'assurer de la participation entière des employés et des syndicats. Je suis ouvert à cela. Je pense qu'il s'agit d'une évolution qui nous permettra de tirer vraiment profit de l'intégration.

J'estime donc que pour progresser, nous devons dialoguer. Je ne me prononce pas sur la configuration de la compagnie à l'avenir, et je me contente de dire qu'au départ, nous avons deux entités distinctes. Je ne sais pas à quoi nous aboutirons ni comment.

M. Murray Calder: Une dernière question?

Le président: Certainement.

M. Murray Calder: Quel genre de réponses avez-vous eues à cette lettre?

M. Robert Milton: Ça dépend du syndicat. Disons que nous avons eu une réaction très positive et très ferme d'au moins un des syndicats clés de Canadien, avec lequel nous dialoguons activement en ce moment avec le consentement de la compagnie Canadien. Nous dialoguons aussi avec d'autres syndicats de Canadien.

Encore une fois, nous espérons que nous pourrons rapidement, avec l'appui de Kevin Benson et de l'équipe de Canadien, bien faire comprendre que notre but sincère est de protéger les intérêts des employés de Canadien.

Le président: Monsieur Casey.

M. Bill Casey: Merci.

Dans la même veine, ce qui gêne le plus les employés de Canadien, c'est la façon dont vous avez structuré l'achat. Une société à dénomination numérique va se porter acquéreur, pas Air Canada. C'est presque comme si vous vouliez vous couvrir.

Voyez-vous ce que je veux dire? C'est l'impression que cela donne. Si ça ne fonctionne pas, vous avez déclaré vouloir notamment restructurer la dette de Canadien. Si vous ne réussissez pas à restructurer la dette et à apporter les autres changements que vous voulez faire, qu'arrivera-t-il à Canadien et à ses employés?

M. Robert Milton: Pour ce qui est de mettre les chances de notre côté, manifestement, nous tentons de mener à bien une transaction de façon que nous considérons raisonnable, vu l'endettement de Canadien. On comprendra qu'il y a certaines questions qui se posent, par exemple combien Canadien paie pour ses avions comparativement à ce que nous payons et combien elle paie pour emprunter comparativement à ce que nous payons. Nous considérons qu'il faut tenter de restructurer cette dette.

• 2055

Nous avons également affirmé que nous étions disposés à considérer un achat de l'actif, mais quoi qu'il en soit, nous commençons par ce plan, nous sommes disposés à prendre des engagements à ce sujet, d'une façon raisonnable, dans le but d'obtenir les routes et les franchises de Canadien et la protection absolue de Canadien.

Le problème, pour nous, comme je l'ai dit précédemment—et je ne veux pas qu'on croie à tort que je suis détaché ou distant—c'est que nous ne savons tout simplement pas à quoi nous attendre. Nous avons ouvert le dialogue et nous espérons, mettre les choses en place le plus rapidement possible de façon à mieux comprendre exactement quelle est la structure de Canadien et quelle est sa dette.

Nous ne pouvons pas prendre des mesures qui ne seraient pas raisonnables. Je pense que tous le comprendront. Mais nous sommes prêts à nous mettre au travail le plus rapidement possible et à nous engager pleinement à l'égard des employés de l'entreprise.

M. Bill Casey: Je comprends qu'il vous est très difficile de prendre certains engagements maintenant—vous êtes en cours de négociations—mais c'est ce qui inquiète le plus les employés de Canadien. Plus tôt ce soir, nous avons entendu le président d'Air Nova et d'Air Alliance et il nous a plus ou moins dit qu'il n'y a pas de place dans la nouvelle structure pour InterCanadien, un transporteur partenaire de Canadien.

Cela ne crée pas une bonne impression en ce qui concerne l'attitude à l'égard du personnel et de l'organisation de Canadien. Cela donne l'impression que dans ce partenariat, ils sont des citoyens de seconde classe.

M. Robert Milton: Pour revenir à la question précédente sur InterCanadien, je ne comprends pas tout à fait la structure d'InterCanadien. Je ne sais même pas, bien que nous ayons essayé de le découvrir, s'il s'agit en fait d'employés de Canadien qui ont été mutés, selon certaines modalités, par Canadien à InterCanadien.

J'ai déjà déclaré que mon engagement à l'égard des employés de Canadien et de ses filiales à part entière était absolu et catégorique. Toutefois, InterCanadien n'est pas à l'heure actuelle propriété de Canadien. Je dois donc choisir un point de départ et regarder l'ensemble—les 16 000 personnes, plus les employés du réseau régional qui appartient à part entière à Canadien.

C'est là le point de départ, avec les meilleures intentions du monde.

M. Bill Casey: Si c'était possible, je pense qu'il conviendrait que vous communiquiez avec InterCanadien.

M. Robert Milton: Très bien.

M. Bill Casey: Il y a après tout 1 100 employés chez InterCanadien et l'entreprise est complètement exclue des procédures. InterCanadien dépend complètement de son rôle comme compagnie d'appoint de Canadien. L'entreprise ne sait pas au juste quel rôle elle doit jouer.

M. Robert Milton: Avec le consentement de Canadien, c'est tout à fait raisonnable. Cela s'applique dans d'autres cas aussi tels que Canadian North et Ontario Express qui est en ce moment l'entreprise régionale de Canadien à Toronto. Diverses unités de Canadien ne lui appartiennent pas à part entière, à l'heure actuelle.

Il faut voir par exemple combien elles payent leurs avions en comparaison de ce que nous payons, combien elles payent pour le loyer de l'argent en comparaison de ce que nous payons. Nous pensons qu'il convient que nous tentions de restructurer cette dette. Je m'engage, avec le consentement de Canadien, à discuter avec ces compagnies-là.

M. Bill Casey: Pour les associer au projet.

M. Robert Milton: C'est ça.

M. Bill Casey: Je veux maintenant revenir un peu en arrière. Je ne sais pas si j'ai eu la réponse qu'il me fallait, ou même si vous pouvez me donner cette réponse. Je comprends bien que vous ne pouvez probablement pas tout nous dire. Mais compte tenu de l'engagement que vous prenez quant à l'aspect commercial et de ma suggestion que vous couvrez vos arrières, qu'arrivera-t-il si vous ne parvenez pas à restructurer cette dette et le prix des baux? Qu'arrivera-t-il si vous ne parvenez pas à réaliser tout ce que vous voulez faire?

M. Robert Milton: Nous avons fait cette offre en tenant compte de notre intention de tout restructurer. Toutefois, le succès de notre offre n'exige pas que nous réussissions à restructurer la dette. Nous allons faire de notre mieux pour y parvenir, mais notre offre ne repose pas là-dessus.

Je crois cependant que ce sera un exercice simple et couronné de succès, parce que nous avons beaucoup de fournisseurs en commun, et aussi beaucoup de bailleurs en commun, et cetera. Mais même si nous échouons dans notre tentative de restructuration, je m'engage quand même à acheter Canadien et à protéger ses employés—dans la mesure où nous le pouvons. Il y a aussi d'autres éléments. Par exemple, j'ignore quelles sont les intentions d'American Airlines.

Le président: Merci, monsieur Casey.

Nous avons fait un tour complet, chers collègues. J'aurais maintenant une question à poser moi-même.

Monsieur Milton, quand vous avez comparu devant le comité en octobre, vous avez dit que la règle des 10 p. 100 qui figure dans la Loi sur la participation publique au capital d'Air Canada est «hostile aux actionnaires». Qu'entendez-vous exactement par là? Je vous demanderais d'être bref.

M. Robert Milton: Il y a des primes pour acquisition, des primes pour exercer le contrôle, et la possibilité de lancer une surenchère, ou de mettre à l'encan le contrôle de la compagnie aérienne, tout cela débouchant probablement sur une flambée des prix. Il faut payer une prime pour acheter la compagnie.

Nous ne sommes pas en mesure de le faire. C'est intrinsèquement hostile aux actionnaires.

Rob, je ne sais pas si vous voulez ajouter quelque chose.

• 2100

Le président: Avant que vous commenciez, Rob, le problème réside en partie dans le fait que vous dites maintenant que 15 p. 100 serait logique parce que cela renforcerait l'intérêt des investisseurs à l'égard d'Air Canada, tout en empêchant les investisseurs d'exercer une influence exagérée sur la compagnie.

Quand vous dites cela, parlez-vous de la compagnie ou bien du conseil d'administration? Vous prêchez, la compagnie prêche et tout le monde prêche la mondialisation. Or la mondialisation signifie évidemment que les grandes compagnies aériennes de la plupart des pays du monde sont assujetties à des contraintes en matière de propriété étrangère, mais pas du tout quant à la propriété individuelle.

Au Canada, nous avons la règle des 10 p. 100 que vous voulez faire passer à 15 p. 100. Mais on nous a démontré que même à 10 ou 15 p. 100, on ne peut exercer aucun contrôle sur les dirigeants de la compagnie. Si les actionnaires veulent faire irruption dans une réunion du conseil d'administration et dire: «Milton, vous êtes un brave type, mais vous faites du mauvais travail et vous pouvez disposer», ils ne peuvent le faire même à 10 p. 100. Votre emploi est donc passablement assuré quand les actionnaires ont un pouvoir aussi dilué. Tout est dicté par la direction, et non pas par les actionnaires.

Les gens qui avancent l'argent, qui font les investissements et tout le reste n'ont pas vraiment leur mot à dire quant au poste de Milton ou de quiconque à titre d'administrateur, parce qu'ils n'ont que 10 p. 100. Très bien, mais est-ce que 15 p. 100 serait une menace pour le conseil d'administration? Pas vraiment. À 20 p. 100, ça commence à être dangereux et nous ferions mieux de ne pas aller jusque-là, même si dans le reste du monde et dans d'autres compagnies aériennes, on dit: «Vous savez, nous n'avons pas vraiment besoin de cette règle des 10 p. 100, nous avons confiance en nous et nous faisons confiance aux investisseurs et, bien franchement, nous n'en avons plus besoin». D'autres ont évidemment dit la même chose.

M. Robert Milton: Je suis heureux de vous l'entendre dire. Je me sens tous les jours comme si j'étais sur un terrain dangereux, alors je trouve cela très rassurant; c'est formidable.

Le président: Ce sont les actionnaires qui décideront si vous faites bien votre travail. Je ne possède pas d'actions.

M. Robert Milton: Parmi les autres pays, il n'y en a pas beaucoup qui ont cette règle des 10 p. 100, mais il y a bien des façons de protéger l'entreprise. Dans le cas d'Alitalia, de KLM, d'Air France et d'Iberia, le gouvernement a conservé une participation importante. Singapore Airlines, un des plus grands transporteurs aériens au monde, a une limite de 5 p. 100. Qantas a une action préférentielle. Il y a bien des façons différentes que les pays utilisent pour protéger leur industrie aérienne et en conserver la propriété chez eux.

De mon point de vue à moi, je gagnerais beaucoup d'argent si vous alliez à 100 p. 100—si vous supprimiez complètement la règle. Ce serait formidable. J'en serais très heureux, nous en serions tous très heureux. Le problème, cependant, c'est que ce qui est bon pour nous n'est pas bon pour le Canada, selon moi. L'industrie américaine est tellement importante et puissante que, si la règle était changée, je pense que notre industrie ne tarderait pas à être contrôlée à partir des États-Unis. C'est une éventualité que nous avons frôlée de près ces trois derniers mois. Si toutefois, après en avoir débattu, le Parlement décide d'aller à 100 p. 100 et de supprimer la limite complètement, tant mieux. Je ne crois pas pouvoir être plus clair que cela.

Le président: Mon temps de parole est écoulé, mais notre industrie n'irait pas chez nos voisins du Sud à cause de la limite de 49 p. 100.

M. Robert Milton: Si toutefois cette limite était supprimée, l'industrie pourrait bien aller chez nos voisins du Sud.

Le président: Manifestement, c'est tout ce que j'obtiendrai comme réponse.

Monsieur Hubbard, c'est votre tour.

M. Charles Hubbard: Merci, monsieur le président.

Je veux revenir à la situation évoquée par M. Casey, qui est ici, au sujet d'InterCanadien. Comme il nous l'a signalé, ce transporteur compte plus de 1 000 employés. Certains d'entre eux vous diront qu'ils ont 10 ou 20 ans d'ancienneté avec le transporteur. Je suis assez surpris qu'ils n'aient pas encore été inclus dans vos discussions. Je serais très préoccupé si, à la suite de notre discussion d'aujourd'hui, les nombreuses localités qui sont desservies exclusivement par InterCanadien dans l'est du Canada se trouveraient laissées pour compte.

Monsieur Milton, pouvez-vous nous donner plus ample confirmation que vous allez vous pencher sur ce problème des employés d'InterCanadien? Ils ne figurent sur aucune de vos pièces de correspondance, mais j'estime qu'ils doivent être tout aussi inquiets et concernés par la question que n'importe lequel des autres groupes dont nous parlons.

M. Robert Milton: Je me suis engagé auprès de M. Casey à rencontrer les gens d'InterCanadien. Nous avons reçu à tout le moins une lettre, à ma connaissance, d'InterCanadien. Je le répète, je ne suis pas au courant des engagements pris par InterCanadien envers ses employés. Je ferai même plus. S'il y a des localités desservies par InterCanadien où Air Canada n'offre pas de service et si InterCanadien décidait de cesser ses activités, je m'engage à offrir le service dans ces localités. Nous allons donc protéger les intérêts de toutes ces localités, même celles dont je ne sais pas si elles ont le service.

• 2105

Il y a un marché intéressant qui mérite notre attention. Joe Randell, qui était ici aujourd'hui, pour ceux d'entre vous qui le connaissent, est un des meilleurs exploitants de lignes aériennes qui soit. Il est au service d'Air Nova depuis le début. Air Nova est un transporteur dominant dans sa région géographique. Elle occupe 80 p. 100 du marché de sa région et a la réputation d'être un excellent compétiteur. J'aimerais penser qu'il s'agit là d'un bon exemple d'un transporteur qui occupe une part importante du marché, qui fait de bonnes affaires et qui offre un service très attrayant aux localités qu'il dessert.

M. Charles Hubbard: L'autre chose qui me préoccupe, ce sont les termes différents que nous utilisons pour parler de cette restructuration. Il y a l'achat, il y a aussi l'intégration dont vous parez et enfin il y a l'idée d'une fusion ou d'un regroupement des deux transporteurs.

Pour faire suite à la question de M. Comuzzi, Air Canada a présenté une proposition qui, si elle est acceptée, vous coûtera un peu moins de 100 millions de dollars. Vous disposez d'environ 300 millions de dollars. Bien sûr, cela est assujetti à la règle des 10 p. 100. Il semble aussi que vous avez passé des arrangements financiers avec le Québec.

En contrepartie, offrez-vous des garanties au Québec et à d'autres régions? Air Canada n'a jamais versé de dividendes. Vous demandez un gros investissement mais vous n'avez même pas versé 15c de dividendes dans les 10 dernières années. Comme investisseur, je me demande s'il est sage d'investir 300 millions de dollars dans une pareille aventure.

En ce qui concerne Canadien, avez-vous offert d'autres garanties à un quelconque groupe que les citoyens ignoreraient?

M. Robert Milton: Tout d'abord, en ce qui concerne la fusion et l'intégration, oui, beaucoup de termes ont été utilisés. Ce que je souhaite et compte faire, c'est optimiser l'allocation de la capacité des marchés pour permettre un rendement approprié. Nous allons donc tracer un très grand nombre de nouvelles routes internationales, au-dessus du Pacifique ou de l'Atlantique. Il y aura aussi un nombre très important de nouvelles routes vers les États-Unis. Nous voulons évidemment commencer par cette nouvelle compagnie aérienne à tarifs réduits à Hamilton, qui est un autre secteur de croissance.

De plus, par suite de la fusion des deux compagnies aériennes—c'est quelque chose dont il n'a pas été question—je suis fermement convaincu qu'il y aura un ensemble de nouvelles routes qui contourneront Toronto. Alors, que ce soit Ottawa qui obtienne trois vols par jour sur Winnipeg au lieu de deux ou trois vols par jour, grâce à la fusion, sur Calgary au lieu de deux, il sera beaucoup plus possible de contourner Toronto et de créer de nouvelles routes transcontinentales ou moyens-courriers au pays.

En ce qui concerne les garanties ou les engagements de financement, nos liquidités sont telles que nous avons amassé près de 2,7 milliards de dollars, qui sont à notre disposition. Une partie servira à verser 1,1 milliard de dollars à nos actionnaires. Il est donc révolu le temps où les actionnaires d'Air Canada ne touchaient aucun dividende. Nous remettons donc une somme énorme à nos actionnaires.

Sur les 300 millions de dollars, c'est 150 millions de dollars, et nous pouvons aller jusqu'à 300 millions de dollars. Mais il faut également signaler que dans cette opération récente nous avons obtenu 200 millions de dollars de nos associés à la Banque CIBC ainsi que 300 millions de dollars de Lufthansa et de United. Il y a donc beaucoup de sources de fonds. Air Canada traite avec les grands établissements financiers partout au monde. Nous n'hésitons pas à traiter avec qui que ce soit.

Rob, à propos des 310 millions de dollars, il y a Citibank et avec qui d'autre avez-vous traité?

M. Rob Peterson: La ligne de crédit, garantie par nos associés, sera financée par un groupe de banques canadiennes et européennes. Il ne s'agit donc pas uniquement de fonds du Québec; des capitaux provenant de partout dans le monde servent à financer notre portion du rachat—le 1,1 milliard de dollars—ainsi que l'acquisition de Canadien. Nous avions aussi des liquidités importantes en date du 30 septembre.

M. Robert Milton: J'ajouterais seulement que l'acquisition de Canadien ne représente pas seulement le prix des actions—92 millions de dollars. Nous estimons qu'actuellement la compagnie, dans ses mauvais jours, perd jusqu'à 1 million de dollars par jour. Elle arrive au bout de son sang et nous savons qu'il nous faudra lui transfuser des centaines de millions de dollars pour qu'elle devienne rentable de façon durable. Voilà donc pour le coût. Il y a aussi selon nous certains problèmes de financement de la caisse de retraite.

• 2110

Y a-t-il autre chose, Rob?

M. Rob Peterson: Les indemnités de départ et les retraites.

M. Robert Milton: Oui, il y a aussi les indemnités de départ; les besoins dépassent donc de beaucoup ces 92 millions de dollars. Nous payons beaucoup plus que cela pour Canadien.

Le président: Merci, monsieur Hubbard.

M. Charles Hubbard: [Note de la rédaction: Inaudible]... penser que vous allez investir de l'argent dans Canadien, ce qui est vraiment le gros...

M. Robert Milton: Absolument.

Le président: Monsieur Johnston.

M. Dale Johnston: Merci, monsieur le président.

Je veux vous poser quelques questions sur le personnel.

Quand vous allez devenir le seul transporteur national, tout arrêt de travail ou toute interruption de travail va porter un rude coup à l'économie canadienne et déranger énormément les voyageurs canadiens. Comment comptez-vous gérer toute forme d'interruption de travail?

M. Robert Milton: Nous venons de vivre des moments difficiles avec cet arrêt de travail important à Air Canada l'an dernier. Je serai franc, nos employés ont appris beaucoup au sujet d'Air Canada au cours des trois derniers mois, au sujet de ce que nous faisons, de l'intérêt des actionnaires, et de la nécessité de conserver une vision équilibrée des choses. Je pense que nous avons appris beaucoup, et j'ai confiance dans la capacité que nous avons d'avancer sur une base stable et raisonnable.

M. Dale Johnston: Eh bien, il n'y a rien comme la confiance. Si l'on peut atteindre le point où l'on n'a jamais d'arrêt de travail, ce sera formidable. Ce sera aussi probablement une première.

Vous allez devoir travailler avec plusieurs pilotes régionaux, et je sais que vous êtes au courant de leur inquiétude relativement à la fusion des listes d'ancienneté qui n'a pas été faite. Quelles mesures recommandez-vous ici?

M. Robert Milton: Là encore—et j'ai envoyé des lettres à tous les employés d'Air Canada—nous sommes au seuil d'une nouvelle ère, et nous allons tous devoir collaborer. J'ai la ferme conviction que le mariage des deux lignes aériennes vaudra tellement mieux pour tous les employés des deux entreprises, pour ce qui est de toutes les perspectives de croissance, pour ce qui est d'assurer la stabilité à chacun et de réaliser pleinement le potentiel de chaque entreprise, que l'on va constater la volonté et, franchement, le désir de contribuer à l'édification d'une ligne aérienne plus imposante et meilleure. Ce sera dans l'intérêt de tous les employés d'aller de l'avant, et croyez-moi, nous irons de l'avant.

M. Dale Johnston: Donc les employés, particulièrement les pilotes, des lignes aériennes régionales vont alors devenir des employés d'Air Canada?

M. Robert Milton: Je ne peux pas dire ça. Comme je l'ai dit plus tôt, cependant, je veux avoir un dialogue dynamique, ouvert, constructif, avec tous les syndicats et tous les employés. De toute évidence, nous transigeons avec les deux syndicats, l'Association des pilotes d'Air Canada—l'APAC—et l'ALPA, et il faudra bien que tout le monde pousse à la roue dans le même sens. Au bout du compte, étant donné les possibilités qui existent, je crois qu'on y arrivera et que l'on pourra enfin réaliser pleinement le potentiel de la ligne aérienne du Canada.

M. Dale Johnston: Merci.

Le président: Merci, monsieur Johnston.

Monsieur Fontana, s'il vous plaît.

M. Joe Fontana: Monsieur le président, M. Milton est fort, tout comme le film Analyze This était fort. Je vais poser mes questions d'abord, autrement, vous allez vous lancer dans de grands discours et je n'aurai même pas la chance de poser ma deuxième question. La dernière fois, je n'ai eu qu'une minute et demie, monsieur le président.

Une voix: Vous adorez vous plaindre, non?

M. Joe Fontana: Je veux revenir à ce sujet dont nous avons longuement parlé, à savoir la protection des localités isolées, des employés et des consommateurs. Je crois savoir, monsieur Milton, que lorsque viendra le moment de rédiger le rapport, pour nous assurer que toutes ces mesures sont bien en place, le comité tiendra probablement compte de ces mesures de protection. Il voudra s'assurer que l'Office des transports, le Bureau de la concurrence, un protecteur du citoyen, ou même un tribunal, sera en place, qu'il y aura une autorité qui s'assurera que tout fonctionne bien au cours des trois prochaines années, et que vous respectez les engagements que vous prenez. Vous opposeriez-vous à cela?

M. Robert Milton: Y a-t-il d'autres questions?

M. Joe Fontana: Ah, oui, j'ai d'autres questions, mais vous devriez répondre à celle-là par un oui ou un non.

M. Robert Milton: Désolé, je ne peux pas faire ça. Il me tarde de voir vos recommandations, mais comme je l'ai dit plus tôt, veuillez garder à l'esprit la compétitivité du Canada et de son industrie du transport aérien, ainsi que le fait que ces divers aspects réglementaires pourraient avoir des effets auxquels on n'aurait pas songé.

• 2115

M. Joe Fontana: Bien sûr.

Maintenant, il y a une chose que je dois comprendre, parce qu'en ce qui concerne les employés, je pense qu'on a posé un tas de questions sur les relations de travail et tout le reste. Vous avez créé ici une hiérarchie de quatre entreprises: Air Canada, Canadien, les transporteurs régionaux et ce nouveau transporteur à rabais. Toutes ces entreprises ont diverses conventions collectives et différentes catégories d'employés. Il vous faudra être très forts pour gérer l'ensemble, parce qu'il va s'agir d'un monopole. Vous allez pratiquement tout contrôler. Je sais que les transporteurs indépendants y seront. Je sais que les affréteurs aériens y seront, et qu'on va faire toutes sortes de choses formidables. Je suis d'accord avec 80 p. 100 de ce que vous disiez au sujet du cabotage réciproque, de la propriété étrangère et de tout le reste, mais c'est vous qui allez contrôler le marché, ce qui comprend ces quatre catégories différentes d'employés.

Je dois vous demander comment vous allez vraiment gérer tout cela. Pourquoi ne pas tout simplement traiter tout le monde sur un pied d'égalité? Vous avez déjà des difficultés avec des transporteurs régionaux. Vous êtes un employeur commun. Vous vous battez devant les tribunaux à ce sujet. Vous avez des groupes de pilotes qui ne s'entendent pas ou qui ne respectent pas ce que les autres font. Je suis seulement un peu inquiet de la manière dont vous avez procédé. Et il ne s'agit que des employés.

Troisièmement, j'ai des réserves au sujet de ce transporteur à rabais. Il se peut que vous fassiez cela parce que vous voulez prévenir la concurrence, même si vous ne cessez de parler de concurrence. De toute évidence, il s'agit d'une opération préventive qui vise à empêcher tous les autres de prendre pied sur le marché. Mais si vous êtes sérieux à propos de l'accès au marché, je pense que cela va nuire à vos transporteurs régionaux de l'est du Canada.

Vous avez longuement parlé de vos échanges suivis avec le Bureau de la concurrence. Lui avez-vous parlé de cette entreprise à rabais? Je crois savoir qu'en fait, le Bureau ne se fait malheureusement pas une très haute idée de ce transporteur à rabais qui serait basé à Hamilton. Vous n'avez qu'à venir à London...

Des voix: Ah, ah!

M. Joe Fontana: ...mais je m'en tiendrai à Hamilton et au transporteur à rabais de l'est du Canada à Hamilton. Vous pouvez peut-être m'expliquer ça. Je crois savoir que ça ne plaisait pas du tout au Bureau de la concurrence.

Deuxièmement, vous pouvez peut-être nous expliquer quels genres d'accords d'exclusivité vous avez concernant l'aéroport de Hamilton. Est-ce que ça veut dire que si une autre entreprise veut se servir de Hamilton pour offrir des rabais, par exemple, il lui faudrait aussi pouvoir se servir de l'aéroport de Hamilton? Au bout de quelque temps, Hamilton deviendrait tout simplement le centre de l'univers.

Le président: Ça m'a l'air d'une très bonne idée, monsieur Milton. Que répondez-vous à cela? Je suis tout oreille.

M. Robert Milton: Pour ce qui est de traiter tout le monde également, je pense que c'est une question importante.

Veuillez vous rappeler qu'Air Canada sera l'an prochain une compagnie valant entre 6 ou 7 milliards de dollars même si l'acquisition de Canadien ne se fait pas, et si cela se fait, elle vaudra plus de 10 milliards. C'est une grande entreprise. Elle renferme plusieurs unités. Nous avons déjà beaucoup plus d'unités, par exemple Vacances Air Canada et d'autres que vous n'avez même pas mentionnées. C'est déjà une entreprise très complexe et de très grande taille, mais qui est toute petite comparativement à d'autres grandes lignes aériennes du monde, comme Swissair ou British Airways, qui ont beaucoup d'unités et beaucoup plus de conventions collectives que nous. Veuillez garder à l'esprit l'échelle que nous avons relativement aux grandes lignes aériennes du monde. Nous ne sommes toujours pas dans cette catégorie.

M. Joe Fontana: Mais pas le cas des structures d'entreprise, monsieur Milton. Je peux me tromper, mais vous avez créé quatre structures d'entreprise différentes. Les transporteurs régionaux sont des filiales en propriété exclusive, qui sont la propriété d'une société à numéro, d'un holding. Vous avez une ligne aérienne à rabais qui sera la propriété de quelqu'un d'autre. Et vous parlez ici des employés.

M. Robert Milton: Si l'on me permet de citer Lufthansa ou Swissair, il s'agit d'exemples précis qui fonctionnent exactement comme nous entendons le faire. Il importe de mentionner également—parce que je ne sais pas dans quelle mesure l'on sait cela—que nous avons engagé un dialogue suivi avec l'un des principaux syndicats de Lignes aériennes Canadien, dans un sens que j'approuve entièrement, comme je l'ai mentionné plus tôt. Ces employés, avec leurs salaires et leurs syndicats communs, à l'exception des pilotes, toucheront les mêmes salaires que les employés d'Air Canada dans les quelques années qui vont suivre la conclusion de cette transaction. Nous tâchons de leur obtenir la parité salariale sur une base accélérée, ce qui est très profitable aux employés de Lignes aériennes Canadien. Je ne veux pas créer d'employés de seconde zone.

Je pense qu'il est également important de noter certaines discussions qui ont eu lieu plus tôt au sujet des transporteurs régionaux. L'une des raisons pour lesquelles leurs coûts sont plus bas tient au fait que leurs avions ont 36 et 37 sièges. Intrinsèquement, ils coûtent moins cher à exploiter. Les échelles de salaire sont plus basses parce que leurs aéronefs ne sont pas aussi gros. Les raisons à cela sont assez évidentes.

Nous aurons donc une structure simple, mais qui sera semblable à bon nombre des grandes lignes aériennes du monde.

Pour ce qui est de la ligne aérienne à prix modiques, je le répète, on ne fait rien de ce côté, et on n'a rien fait de ce côté. Au sujet de l'aéroport de Hamilton, j'ai vu un document qui avait été rédigé par l'aéroport de Hamilton et envoyé à votre comité. Et je ne l'ai vu que récemment; je n'en ai pas commandé la rédaction. Ça fait cinq ans que cet aéroport supplie les transporteurs de l'utiliser. Personne ne l'a fait. Air Canada veut le faire.

• 2120

Dans les sondages que nous avons effectués auprès du public canadien, les gens sont absolument et follement enthousiastes à l'idée de voir Air Canada exploiter cette ligne aérienne à rabais. Je sais qu'il y a aussi beaucoup d'opposition; j'ai lu ça dans les journaux. Mais le public veut qu'Air Canada intervienne massivement de ce côté parce que le consommateur y trouverait son compte.

Donc oui, j'ai lu que le Bureau de la concurrence n'aimait pas ça. J'ai dit que j'allais dialoguer avec le Bureau de la concurrence, mais ça ne veut pas dire que j'accepterai tout ce qu'il va dire. Nous avons discuté des choses à fond pour parvenir à des conclusions raisonnables sur ce qui est juste et indiqué et sur ce qui ne l'est pas.

Pour ce qui est de cet accord au sujet duquel on a maintes fois dit que plus personne ne peut obtenir désormais de créneaux à Hamilton, c'est absolument et catégoriquement faux. Nous nous sommes adressés à l'aéroport où personne d'autre ne voulait aller. Nous avons signé une entente pour l'utilisation des installations en prévision de faire cela, mais c'est un aéroport très peu utilisé. Il y a des tas de gens, comme vous dites, qui peuvent faire de Hamilton le nouveau foyer des transports aériens à rabais, et ce serait formidable.

Le président: Vous n'avez donc pas d'accord qui dissuaderait d'autres lignes aériennes...

M. Robert Milton: Absolument pas.

Le président: ...d'implanter un comptoir ou de réserver des créneaux?

M. Robert Milton: Non, il n'y a aucune restriction du point de vue des créneaux, et nous avons signé des accords qui nous donneront les installations voulues pour produire la qualité de services aériens que nous nous sommes engagés à fournir.

Le président: Mais pas à l'exclusion d'une autre entreprise comme CanJet qui voudrait y aller?

M. Robert Milton: Non. Si elle veut aller à Hamilton, qu'elle y aille. Les installations, comme vous savez...

Le président: Pourquoi le Bureau de la concurrence dit-il que l'idée ne lui plaît pas?

M. Robert Milton: Pour être franc, je ne crois qu'on en ait discuté avec le bureau—n'est-ce pas, John?

M. John Baker: Non, nous n'avons pas encore eu de pourparlers officiels avec le bureau au sujet de ce transporteur aérien à rabais.

M. Robert Milton: Mais nous avons lu ce que le bureau aurait dit, et encore là, nous ne sommes pas d'accord. Nous ne pensons pas, étant donné ce qui s'est produit avec la création de lignes aériennes à rabais dans cette partie du Canada, qu'on devrait nous interdire d'aller de l'avant avec notre projet. Nous pensons que nous devrions aller de l'avant.

Le président: Monsieur Guimond, s'il vous plaît.

[Français]

M. Michel Guimond: Monsieur Milton, tout à l'heure, M. Johnston vous a posé une très bonne question au sujet des pilotes régionaux et vous lui avez répondu avec respect. Vous vous êtes comporté comme Elvis Stojko dans ses meilleures années. Vous avez fait de la haute voltige. Vous me faisiez penser à un pilote de ces Snowbirds qui se croisent dans le ciel.

Je vais vous poser des questions précises et y aller straight to the point. Pourquoi Air Canada a-t-elle refusé d'appliquer la décision Picher, ce qui aurait empêché le recours qui est présentement devant le Conseil canadien des relations du travail?

Ce soir, êtes-vous prêt à vous engager, au nom d'Air Canada, à appliquer intégralement la décision qui devrait être rendue dans environ deux mois, qu'elle soit favorable aux pilotes régionaux ou qu'elle soit favorable à l'APAC, pour faire en sorte que cette saga cesse une fois pour toutes?

Il a fallu qu'Intair—la compagnie Intair, et non pas InterCanadien—de Québec attende neuf ans avant qu'on rende une décision. Je crois que les pilotes régionaux, qui sont aussi des professionnels, ont le droit que leur situation soit réglée une fois pour toutes. Vous devez assumer un rôle de leadership, et si la décision confirme l'employeur unique, vous devrez agir. Votre droit de gérance vous le permet et, de toute façon, vous y serez tenus. On ne devrait pas favoriser des appels, des appels et des appels, et attendre que tous les témoins soient morts. C'est une situation qui ressemble un peu à celle de la MIUF.

[Traduction]

M. Robert Milton: Tout d'abord, au sujet de Picher et de toute cette question, il y a un passé très lourd ici. J'ai dit dans mon allocution liminaire qu'à mon avis, il est maintenant temps de tourner la page. Notre passé est si lourd, et tant d'éléments de ce passé ne sont pas constructifs. J'ai la ferme conviction que ce qui s'est passé entre les pilotes d'Air Canada et les pilotes régionaux a nuit aux intérêts des deux groupes, et c'est ce que j'ai dit aux deux groupes. J'ai la ferme conviction qu'il est temps de tourner la page, comme je l'ai dit, et cela veut dire que je vais devoir me retrousser les manches.

• 2125

Je vous prie de vous rappeler que dans mes nouvelles fonctions, les lignes aériennes régionales n'ont commencé à me rendre des comptes qu'environ dix jours avant le dépôt de l'offre d'Onex. Je n'ai pas eu donc beaucoup de temps pour accorder l'attention voulue à cet aspect de notre ligne aérienne. Même si la plupart des éléments de la ligne aérienne me rendent des comptes, les transporteurs régionaux ne l'ont jamais fait.

Je suis décidé à tourner la page.

John, étant donné que vous avez été intimement lié à cela, avez-vous quelque chose à ajouter?

M. John Baker: Un mot seulement sur la décision Picher. Il faut se rappeler qu'il s'agit d'un conflit entre les groupes de pilotes eux-mêmes. Ce n'est pas un domaine où la direction peut imposer sa propre volonté. Il s'agit d'une question d'intégration des pilotes des deux groupes et de la désignation d'un seul employeur.

Nous attendrons, et nous attendons depuis longtemps, la décision de l'OCRI, et nous espérons la recevoir d'ici la fin du mois prochain. De là nous allons évidemment décider ce que nous voulons faire. Comme Robert vous l'a dit, nous voulons aller de l'avant avec tous nos groupes de pilotes et tous nos autres groupes, et avoir un seul ensemble cohérent qui fonctionnera en harmonie. Telle est notre intention.

[Français]

M. Michel Guimond: Vous n'êtes pas chanceux, monsieur Baker. Je suis moi aussi avocat de formation et j'ai travaillé pendant 16 ans dans le milieu des relations de travail avant d'être député. Je comprends très bien que c'était une lutte intrasyndicale ou intersyndicale. Lorsque l'arbitre lui dit de fusionner les listes d'ancienneté, l'employeur ne peut pas jouer à Ponce Pilate, se laver les mains et dire qu'il n'a pas d'affaire là-dedans. Il s'agit de l'ancienneté de ses employés.

En tout cas, on ne commencera pas un débat là-dessus, mais n'essayez pas de m'en passer une petite vite.

[Traduction]

Des voix: Ah, ah!

M. John Baker: Eh bien, le conseil d'administration tel qu'il est constitué à l'heure actuelle a le pouvoir d'imposer un plan d'intégration des listes d'ancienneté. L'ancien conseil d'administration, en vertu de l'ancienne loi, n'avait pas ce pouvoir, et c'était la loi en vertu de laquelle cette requête avait été entendue. Je tiens seulement à le signaler.

Le président: Merci, monsieur Guimond.

Chers collègues, il se fait tard, il y a maintenant une heure et demie que nous entendons M. Milton. Une dernière question de M. Comuzzi, de Bev, et de M. Casey.

M. Joe Comuzzi: Vous avez parlé de 15 p. 100, monsieur Milton, mais vous vous contenteriez très bien des 10 p. 100. Vous n'avez pas semblé trop véhément de ce côté.

M. Robert Milton: Il s'agit là d'une question que le public doit trancher, après que le public aura donné son avis et qu'un débat parlementaire aura eu lieu. Je suis donc disposé à accepter toutes règles qu'on imposera.

M. Joe Comuzzi: Oui, et ce n'est pas aussi important à cette étape-ci de l'affaire.

Il y a une chose dont je veux parler. Voici ma question. Dans une vie antérieure, j'assistais à une séance d'un conseil d'administration, à New York ou quelque part, et quelqu'un a proposé de vendre un produit que nous avions sur un marché inférieur et de lui donner un nom différent. Je me rappellerai toujours un vieux de la vieille qui était à l'avant—j'imagine que c'est ce que nous sommes nous-mêmes maintenant—et qui disait: «Il ne faut jamais diluer la soupe», sauf qu'il a employé des termes plus grossiers.

Pourquoi ne pouvons-nous tout simplement pas créer un transporteur à rabais et l'appeler Air Canada? Quels que soient les principes que l'on applique avec les transporteurs à rabais, pourquoi ne pouvons-nous pas créer ce transporteur et l'appeler Air Canada? Vous savez, cela ferait énormément l'affaire du consommateur dans notre pays. Dites-moi pourquoi on ne peut pas faire ça.

M. Robert Milton: C'est essentiellement un produit différent, à fréquence faible, plutôt qu'à fréquence élevée. Ce n'est pas un produit destiné aux voyageurs d'affaires, puisque les vols sont peu fréquents, à des heures inhabituelles, par exemple, pour un tarif très faible. Les sièges sont entassés. Il n'y a pas habituellement de classe affaires. Ce produit est destiné à un tout nouveau secteur du marché de voyageurs. C'est donc essentiellement différent.

En lui donnant un autre nom, qu'on annoncera sous peu, on fait exactement comme United l'a fait, je le répète, avec United Shuttle, et USAir, avec Metrojet. C'est un produit différent, et vous vous en rendez bien compte en montant dans l'avion. Voilà la raison. Ce sont des types de lignes aériennes fondamentalement différents.

Le président: Merci, monsieur Commuzi.

Bev.

M. Joe Comuzzi: [Note de la rédaction: Inaudible]

Mme Bev Desjarlais: Je ne peux pas commencer avant qu'il ait fini.

Le président: Son micro n'est pas allumé, mais le vôtre, oui. Le sien est éteint, il parle tout seul.

• 2130

Mme Bev Desjarlais: J'ai deux ou trois petites questions. Je vais les poser d'abord, puis vous y répondrez.

Je remarque que dans votre lettre, on dit: «Aucun employé syndiqué actuel d'Air Canada, de Canadian Airlines...». Est-ce que des employés non syndiqués perdront leur emploi, et s'il y en a, combien?

Deuxièmement, s'il n'y a pas de situation de monopole et que nous avons deux lignes aériennes qui fonctionnent dans une sorte de statu quo, pendant combien de temps Air Canada peut-elle survivre financièrement, étant donné l'alourdissement récent de sa dette?

M. Robert Milton: Je vais vous donner de brèves réponses.

J'ai l'intention de protéger les employés non syndiqués exactement de la même façon. La lettre était envoyée aux chefs syndicaux.

Je ne suis pas d'accord, lorsque vous parlez de monopole, et je crois qu'il importe de tenir compte de la définition de la concurrence et de son importance, particulièrement quand on songe à la concurrence provenant des affréteurs, des lignes aériennes à prix modiques de l'autre côté de la frontière, etc.

Air Canada est une ligne aérienne très rentable, qui gère bien sa dette. Si je considère les résultats du mois d'octobre, de même que ceux de septembre, et du mois de novembre où ils ont été forts, je puis dire que le Canada sera fier lorsqu'Air Canada annoncera ses résultats de fin d'année pour 1999. Nous sommes sur une trajectoire incroyablement positive.

Mme Bev Desjarlais: Vous avez répondu très vite. Puis-je poser une autre question?

Le président: Une autre.

Mme Bev Desjarlais: Au sujet du 1,2 milliard de dollars, comme vous avez dit, que vous allez rembourser aux actionnaires...

M. Robert Milton: C'est 1,1 milliard de dollars.

Mme Bev Desjarlais: Je suis étonnée que vous n'ayez jamais pu les verser auparavant, et que vous le pouvez maintenant. Je considère que c'est de l'argent qui a été emprunté pour les rembourser. Comment appelle-t-on cette façon de faire des entreprises?

M. Robert Milton: Comme je l'ai dit plus tôt, 500 millions de dollars de ce que nous avons obtenu ainsi est en actifs. Il s'agit essentiellement d'un cadeau que nos partenaires nous ont offert pour maintenir leur association avec l'une des plus grandes lignes aériennes du monde, Air Canada. Mais au coeur de cette question, il y a un fait bien malheureux: Air Canada a été forcée de recevoir cette offre, qui est contraire aux lois du Canada, parce qu'on ne savait pas très bien quelles étaient les règles du jeu et qu'il nous a fallu faire ce que nous avons fait, et que nous n'aurions pas fait autrement. C'est bien malheureux pour les affaires au Canada.

Le président: Monsieur Casey.

M. Bill Casey: Ce pourrait être la dernière question du comité, et ce n'est pas trop tôt.

Le président: Non, Val Meredith en a encore une. Faites vite.

M. Bill Casey: Après avoir dit tout ça, et fait tout ce qui a été fait, Canadien a envoyé un message aujourd'hui à ses actionnaires, leur demandant de ne pas offrir leurs actions à Air Canada, parce que d'autres options étaient encore possibles. Qu'arrive-t-il s'il y a remboursement? Tout cela aura été fait pour rien? N'y avait-il pas de crise?

L'autre grande question qui met tout le monde mal à l'aise c'est de savoir si, dans l'éventualité où votre projet va de l'avant, il y aura vraiment de la concurrence.

Voilà.

M. Robert Milton: Canadien a publié ce communiqué. La compagnie a recommandé il y a quelques mois d'accepter l'offre de 2 $. Cette offre est sur la table. J'espère qu'en dialoguant avec Canadien, la compagnie verra l'avantage de notre offre et qu'ensemble nous pourrons définir plus précisément de quoi elle est faite. Nous sommes prêts à investir pour remédier aux maux de Canadien. Nous sommes prêts à faire diligence et j'espère que son conseil d'administration répondra rapidement parce qu'au rythme où la compagnie perd de l'argent, la situation ne cesse de s'aggraver avec chaque jour qui passe, à raison d'un million de dollars de moins sur la table chaque jour.

Quant à la question de savoir s'il n'y avait pas vraiment de crise, je laisse à la population le soin de faire des conjectures, mais il me semble à moi que la situation reste grave. Voyons où cela va nous mener.

Quant à savoir si un autre repreneur se présentera, la grande inconnue actuellement c'est American Airlines. Il se peut qu'American fasse des avances. Ce serait dommage pour le pays d'avoir à subir cette crise alors qu'American Airlines était prête depuis le début à sauver Canadien. Si American ne songe qu'à maintenir Canadien en activité, je vous prédis que nous allons nous retrouver dans la même situation d'ici deux ans.

Dans la mesure où American Airlines se contente d'évincer Air Canada, je veux bien, et je souhaite du succès aux employés de Canadien et d'American et que le projet ira de l'avant en toute confiance. Mais je demande au Parlement, au ministre des Transports et à tous ceux qui ont de l'influence de laisser Air Canada une bonne fois pour toute exploiter les liaisons qui nous sont interdites dans le monde et que Canadien n'exploite pas parce que la sous-performance du Canada sur ce point est ridicule. J'aimerais que l'on règle cela.

• 2135

Pour ce qui est de la dernière chose que vous avez dite, je vous invite à examiner la dynamique de la concurrence du marché canadien parce que celui-ci est beaucoup plus compétitif que les gens ne le croient, je pense. Comme je l'ai déjà dit, les affréteurs ont déjà plus de sièges que Canadien. Dans le scénario que nous envisageons, nous songeons à réoptimiser la capacité et à faire une grande réussite canadienne.

Le président: Val Meredith, vous avez la parole.

Mme Val Meredith: Vous dites qu'American Airlines est le grand vilain, mais ce qui m'inquiète maintenant c'est que nous traitons aujourd'hui avec United Airlines, la plus grande compagnie aérienne au monde. Vous venez de le dire: laissez Air Canada exploiter les liaisons que Canadien ne peut pas exploiter. Mais vous nous avez dit que Canadien va devenir une compagnie qui va voler partout dans le monde. Aujourd'hui vous me dites à moi et au comité qu'Air Canada va exploiter les liaisons que Canadien a le droit d'exploiter.

Je m'inquiète du fait que vous avez signé un accord de dix ans avec United Airlines. Je regarde le tableau des vols et nulle part je ne vois un vol de United à proximité de Vancouver à partir de l'est des États-Unis ou du Canada. Je m'inquiète de voir que vous avez partie liée avec la plus grande compagnie au monde et qu'elle n'a aucune liaison avec l'ouest du Canada alors que c'est le cas pour American. American amenait des voyageurs en passant par Vancouver et American se servait d'une compagnie aérienne canadienne pour amener ses voyageurs américains vers l'Asie au départ de Vancouver.

Je suis désolée, monsieur, mais je pense vraiment qu'American n'est peut-être pas le grand vilain ici et qu'il s'agit plutôt de United. Je veux obtenir de vous l'assurance que Canadien pourra exploiter les liaisons qu'elle n'a pas pu exploiter jusqu'à présent parce que vous êtes censés faire une restructuration et la transformer en compagnie rentable, et que United ne va pas contrôler l'industrie aérienne canadienne.

M. Robert Milton: Je n'ai pas dû être clair sur quelques points, et je tiens à élucider mes propos.

Mme Val Meredith: Non, vous ne l'avez pas été.

M. Robert Milton: Tout d'abord, quand j'ai parlé de l'idée qu'Air Canada soit autorisée à exploiter les liaisons que Canadien n'exploite pas, ce serait dans le contexte où American Airlines investirait dans Canadien et remettrait le transporteur à flot sans qu'Air Canada n'y soit pour quoi que ce soit. Il y aurait donc deux transporteurs indépendants, car je ne saurais dire ce qu'American va faire ou ne va pas faire dans un scénario comme celui-là.

Je parle donc du contexte où Canadien demeurerait indépendant d'Air Canada et où American Airlines y investirait plus de fonds. À ce moment-là, je trouve inacceptable que, si American Airlines et Canadien n'offrent pas un service suffisant entre Toronto et Tokyo, Toronto et Hong Kong, ou encore vers l'Australie, la Thaïlande et l'Italie, nous ne serions pas autorisés à offrir le service sur ces liaisons simplement parce qu'elles leur appartiennent et que nos concurrents n'ont pas envie d'y offrir le service. Voilà pour le premier éclaircissement.

Si American est le bon, tandis que United est le méchant, j'aimerais vous signaler que c'est United qui est venu appuyer Air Canada, de concert avec Lufthansa, avec un chèque de 300 millions de dollars.

Mme Val Meredith: Cela fait partie de l'entente de dix ans.

M. Robert Milton: Il s'agit d'une entente de dix ans avec la première alliance du monde. Chez les autres, c'est la confusion totale. Les deux principaux transporteurs, British Airways et American, n'arrivent même pas à travailler ensemble.

Pour ce qui est de la configuration des liaisons dont vous vous parlez, United offre tout de même le service à partir de Chicago, qui se trouve pas mal à l'est de sa principale plaque tournante, et aussi à partir de Denver, qui est une autre de ses plaques tournantes. Il ne lui servirait pas à grand-chose de passer par Vancouver puisqu'Air Canada n'est pas autorisée à assurer le service vers le Pacifique. Si cette restriction était supprimée et qu'Air Canada, ou encore Canadien, sous l'aile d'Air Canada, pouvait assurer ce service, vous constateriez certainement un accroissement important des vols passant par Vancouver, comme c'est le cas pour l'ensemble de notre réseau.

Votre interprétation, avec tout le respect que je vous dois, est on ne peut plus inexacte. L'arrivée de United serait une véritable manne pour Vancouver à cause du dynamisme incroyable de son service vers le Pacifique, alors qu'American n'offre rien. Je le répète, vous n'avez qu'à voir ce qu'a fait American, vous n'avez qu'à voir les partenariats qu'elle a conclus avec des transporteurs asiatiques, achetant des avions qui volent au-dessus de Vancouver sans s'y arrêter; en l'espace de cinq ans, American n'a ajouté qu'un vol par jour de New York à Vancouver. Ce n'est pas là ce que j'appelle appuyer Vancouver.

• 2140

Mme Val Meredith: Pourquoi United passerait-elle par Vancouver, délaissant ainsi ses plaques tournantes de Los Angeles et de San Francisco? Pourquoi ferait-elle cela?

M. Robert Milton: À cause des différentes façons de configurer les liaisons. Combien de fois est-il arrivé aux membres de votre comité de se rendre à une destination de l'autre côté du Pacifique et d'en revenir à partir d'une autre ville, ou de se rendre dans une ville de l'autre côté de l'Atlantique et de revenir à partir d'une autre ville? C'est une question de choix, et le choix serait fait par le plus gros transporteur sur le marché. Nous avons aussi All Nippon Airways et Singapore Airlines. Pour ce qui est de Vancouver, vous n'avez qu'à en parler à Michael Tretheway, économiste chez YVR, qui j'en suis sûr vous dira que ce que nous proposons pour Vancouver est absolument fantastique.

Le président: Messieurs, monsieur Milton, merci beaucoup d'être revenus devant notre comité et de nous avoir présenté votre exposé.

Chers collègues, nous allons siéger à huis clos pendant deux minutes. Ne partez pas, je vous en prie. Deux minutes, c'est tout. Je le promets.

Messieurs, merci infiniment, encore une fois, pour votre exposé. Monsieur Milton, merci d'avoir pris le temps de venir nous rencontrer.

[Les délibérations se poursuivent à huis clos]