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TRAN Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON TRANSPORT

LE COMITÉ PERMANENT DES TRANSPORTS

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le jeudi 4 mai 2000

• 0906

[Traduction]

Le président (M. Stan Keyes (Hamilton-Ouest, Lib.)): Bonjour chers collègues et chers invités.

La séance est ouverte. Le comité reprend ses travaux conformément à un ordre de renvoi de la Chambre en date du 31 mars 2000, portant examen du projet de loi C-26, Loi modifiant la Loi sur les transports au Canada, la Loi sur la concurrence, la Loi sur le Tribunal de la concurrence et la Loi sur la participation publique au capital d'Air Canada et modifiant une autre loi en conséquence.

Nous allons avoir une journée chargée. Nos premiers témoins représentent les Lignes aériennes Canadien Limitée: le nouveau président, Paul Brotto; le premier vice-président, affaires générales et gouvernementales, Stephen Markey; et le directeur, affaires gouvernementales, Scott Bradley.

Messieurs, bienvenue au Comité permanent des transports. Nous attendons avec intérêt votre exposé, qui devrait durer de cinq à huit minutes, afin que les députés présents puissent poser ensuite des questions.

Monsieur Brotto.

M. Paul Brotto (président, Lignes aériennes Canadien Limitée): Merci, monsieur le président et mesdames et messieurs les membres du comité.

J'aimerais tout d'abord vous remercier de l'occasion que vous m'offrez de comparaître devant vous. J'ai un bref exposé à faire; après cela nous serons heureux de répondre à vos questions.

J'aimerais débuter en mentionnant que l'histoire des lignes aériennes Canadien justifie qu'on en soit fier. Le patrimoine canadien en matière d'aviation commerciale est unique et les lignes aériennes Canadien, ainsi que ses employés hors pair, en font partie. Je suis fier d'être à la barre de ce transporteur, mais les responsabilités et les enjeux sont de taille.

Le stress que vivent les employés du secteur est réel et le seul fait d'attirer votre attention sur cet aspect de la question me laisse croire que cette démarche n'est pas vaine. Pourtant, en dépit de toute cette incertitude, les employés des Lignes aériennes Canadien continuent de servir les clients la tête haute.

Je sais également, monsieur le président, d'après les commentaires reçus et les rapports des médias, que l'intégration des transporteurs est à l'origine de certaines inquiétudes dans les collectivités et chez les voyageurs. Au cours des quelques minutes qui me sont accordées, je voudrais tout de même vous rassurer. J'aimerais vous rassurer sur le fait que la société Lignes aériennes Canadien continue de se concentrer sur la sécurité et le service à la clientèle, accomplissant de l'excellent travail dans toutes les collectivités qu'elle dessert.

Nous entendons respecter nos engagements à l'endroit de ces collectivités, des voyageurs et de nos employés. Cependant, il n'y a pas à douter que les changements seront de taille. Peut-être sommes-nous même à l'aube de la refonte la plus fondamentale au pays dans le secteur de l'aviation commerciale. Nous reconnaissons qu'il s'agit d'une période difficile. Il faut donc accepter que, pour cette raison, le parcours sera sinueux. Je m'engage néanmoins à régler tout problème éventuel le plus rapidement possible.

Quiconque a récemment pris un avion reconnaîtra que la situation est désormais bien différente dans les aéroports. Les voyageurs évoluent dans un milieu en pleine mouvance. Dans cette optique, je reconnais que les niveaux de service dans certaines collectivités changent, la plupart du temps pour le mieux. Pour certaines liaisons, la surcapacité était évidente et le service a été réduit. Nous comprenons le point de vue des collectivités ainsi touchées, mais nous ne pouvons continuer de subir des pertes et devons tenter de mettre un frein aux excès du passé.

Depuis nombre d'années, la situation financière de Canadien est peu reluisante. C'est ainsi que mon prédécesseur, Kevin Benson, pour qui j'ai le plus grand respect, a conclu qu'il fallait absolument fusionner les transporteurs.

En 1999, Canadien a perdu quelque 220 millions de dollars. Pour les huit derniers exercices, la perte cumulative de Canadien s'établira à plus de 1,5 milliard de dollars. En l'an 2000, nous avons la ferme intention de mettre fin à cette tendance. Il n'en reste pas moins qu'au cours du premier trimestre, compte tenu de la hausse fulgurante du prix du carburant et d'un trafic moindre, ce qui était prévu mais demeure quand même décevant, nous avons perdu plus de deux millions de dollars par jour. Permettez-moi d'insister là-dessus: deux millions de dollars par jour. En fait, au cours des trois premiers mois de l'an 2000, nous avons perdu plus de 250 millions de dollars, presque 150 millions de dollars de plus que pour le désastreux exercice 1999.

Il faut donc apporter des changements en profondeur. Nous avons supprimé des vols non rentables là où nous perdions de l'argent, ce qui signifie un service moindre à certains endroits. Nous avons déclaré un moratoire sur les paiements à nos créanciers et entrepris notre démarche dans le cadre de la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies, ce qui nous a permis de commencer à renégocier des contrats d'approvisionnement, surtout lorsque Canadien devait payer davantage que ses concurrents.

• 0910

À ce jour, nous avons renégocié plus de 90 p. 100 de la dette et des baux de location d'appareils de Canadien, permettant des économies supérieures à 300 millions de dollars sur la durée de ces baux. Nous avons réalisé des gains rapides d'au-delà de 85 millions de dollars grâce à l'interruption des vols non rentables et à la réduction des dépenses relatives aux contrats. Les économies les plus appréciables sont le fruit de la planification d'un horaire conjoint avec Air Canada, qui a permis de réduire le nombre de nos vols non rentables, la plupart du temps tout en maintenant ou même en améliorant les choix offerts à nos clients. Ces modifications nous ont aussi permis de mettre au rancart de vieux DC10 dont l'entretien et l'exploitation coûtaient cher.

Des progrès énormes ont été accomplis sur bien des fronts. Par exemple, les entretiens que nous avons avec nos créanciers sont très encourageants et je continue de croire que nous pourrons rapidement les conclure avec succès.

Les prix fixés dans le cadre de nombre d'ententes avec des clients étaient marginaux. Ils pouvaient parfois tenir compte des coûts variables mais non des coûts globaux—pas plus d'ailleurs qu'ils ne permettaient de réaliser un bénéfice. Une telle recette n'est certainement pas gage de succès.

Je souligne ces points pour bien mettre en lumière le besoin urgent de changement. Cela étant dit, nous sommes et continuerons d'être prêts à travailler à l'expansion du réseau avec les collectivités. Un certain nombre de mes collègues à Canadien rencontrent des représentants de collectivités de tout le pays pour évaluer le marché. Plus notre situation financière est solide, mieux nous serons en mesure de servir les collectivités canadiennes.

Je voudrais aussi expliquer pourquoi nous avons pris certaines décisions commerciales et quelles en sont les justifications, sans égard au fait que nous avons désarçonné certains de nos fournisseurs et certaines sociétés avec lesquelles nous traitons, qui vous ont aussi présenté un mémoire, parce que nous ne pouvons poursuivre dans la veine d'ententes trop généreuses que nous avions conclues dans le passé.

C'est d'ailleurs là, monsieur le président, une des raisons pour lesquelles nous avons recours à la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies. Il s'agit de la seule façon constructive de permettre à Canadien de renégocier ses contrats non commerciaux. Comme je l'ai dit, Canadien paie trop pour certains produits et services, alors qu'elle ne demande pas assez pour les siens.

Bon nombre de nos fournisseurs ont reconnu les avantages à long terme d'être associés de près à un gros transporteur financièrement stable et bien des contrats ont été renégociés. En fait, la semaine dernière, nous avons finalisé les modalités d'une entente avec AirMiles, un de nos plus importants partenaires. Les négociations ont été ardues mais fructueuses car, en fin de compte, les deux parties ont reconnu les inconséquences économiques de l'ancien contrat.

Malheureusement, d'autres fournisseurs souhaitent seulement que rien ne change, même au risque de mettre en péril 16 000 emplois à Canadien et 25 000 autres emplois connexes, sans mentionner l'abandon possible de certaines dessertes. Quant aux commentaires de concurrents qui nous ont précédés, nous ne sommes tout simplement pas disposés à leur offrir des services comme nous le faisions dans le passé. Canadien ne doit pas subventionner ses concurrents, dont la structure des coûts est moindre, simplement parce qu'ils se sont habitués à cette situation. Par analogie, il serait impensable de demander à McDonald de subventionner les frites de Burger King.

La restructuration nous a également permis de renégocier ou de résilier des contrats non valables au plan économique, notamment pour des services fournis par AMR Corporation, des ententes avec American Express, des baux de location d'aéronefs et des emprunts. Dans nombre de cas, ces fournisseurs proposaient leurs services à prix accrus en raison de la situation financière peu enviable de Canadien. Il faut à tout prix mettre un terme à de telles ententes, faute de quoi Canadien ne tiendra simplement pas le coup.

Cela serait une injustice pour nos employés, nos clients et les collectivités que nous desservons. Notre avenir financier et commercial doit être reluisant si nous voulons éviter de revivre ce qui s'est produit dans le passé. Il n'y aura pas de gain sans changement, mais le changement est souvent peu prisé. Il est essentiel de préserver Canadien et de faire en sorte de solidifier ses assises financières.

Nous croyons que notre vision s'imposera d'elle-même et se révélera digne du Canada. Nous vous demandons donc d'être patients et compréhensifs. Plus important encore, nous demandons votre soutien et votre confiance alors que nous nous affairons à mettre sur pied un nouveau transporteur aérien.

[Français]

Monsieur le président, nous vous remercions du temps que vous consacrez aujourd'hui à Canadien et à ses employés.

[Traduction]

Le président: Merci beaucoup, monsieur Brotto, de cet exposé présenté au comité.

Mes chers collègues, j'ai une observation à faire. Nous allons être très occupés ce matin. Chacun veut poser ses questions. Essayez de faire de courtes interventions pour poser de nombreuses questions. Je serai un peu plus impitoyable aujourd'hui qu'à l'habitude et vous me pardonnerez si je vous coupe la parole, mais il faut que nous puissions poser le plus grand nombre possible de questions.

• 0915

Val Meredith.

Mme Val Meredith (South Surrey—White Rock—Langley, Alliance canadienne): Merci, monsieur le président, et merci, monsieur Brotto et monsieur Markey, de comparaître devant nous.

J'ai écouté vos explications, en particulier sur les motifs pour lesquels vous pourriez annuler les accords commerciaux avec des tiers qui sont vos concurrents, mais je ne parviens pas à comprendre pourquoi une compagnie qui se trouve dans une telle situation financière renoncerait à des millions de dollars de recettes par an en supprimant, par exemple, les services de manutention au sol fournis a une autre compagnie qui, pour l'essentiel, peut être en concurrence avec Air Canada, mais n'est pas véritablement en concurrence avec Canadien.

Je voudrais donc savoir si l'annulation des accords commerciaux vient de Canadien ou si les instructions ou les changements d'orientation à ce sujet viennent d'Air Canada, qui est désormais le transporteur dominant.

M. Paul Brotto: J'aimerais vous répondre en vous disant tout simplement que les mesures prises par Canadien sont le fait de cette compagnie. Elle ne sont pas ordonnées par Air Canada.

Depuis quatre mois que je travaille chez Canadien, j'ai mis l'accent strictement sur l'évaluation de la situation commerciale, la recherche des contrats qui ne sont pas de nature compensatoire et les changements qu'il faut apporter.

En ce qui concerne votre affirmation, je crois que vous faites référence à certains des contrats de manutention au sol qui liaient Canadien à Canada 3000 et à Air Transat. J'ai considéré ces contrats et j'ai constaté, comme je l'ai dit, qu'ils comportaient des coûts variables. Ils ne couvraient pas tous les coûts obligatoires. Si je devais en réévaluer le prix, il serait beaucoup plus élevé, sans doute le double des montants demandés à ces clients.

Nous les avons avertis. Conformément aux conditions des accords, nous leur avons donné les préavis convenus et nous leur avons indiqué qu'ils pouvaient chercher ailleurs. Depuis lors, et je vous l'annonce avec plaisir, Canada 3000 aussi bien qu'Air Transat ont trouvé d'autres fournisseurs pour la manutention au sol, et sans doute à des tarifs inférieurs que celui que Canadien leur demanderait si elle leur appliquait des prix compensatoires.

Mme Val Meredith: Merci.

Vous avez indiqué que vous ne recevez pas d'instructions d'Air Canada, que vous agissez de votre propre initiative et que vous prenez vos propres décisions, dont vous assumez la responsabilité.

J'ai ici un certain nombre de lettres que je ne vais pas dévoiler parce qu'elles sont très détaillées, mais je dois vous expliquer que de l'avis de certains clients, vous avez totalement éludé vos responsabilités envers eux alors qu'ils ont payé pour obtenir un service.

L'une de ces lettre provient d'un voyageur qui avait réservé plusieurs mois à l'avance pour effectuer un voyage d'affaires en Extrême-Orient sur un vol de votre compagnie, qui s'était organisé pour avoir des vols directs et pour obtenir le type d'avion et les services correspondant à ses désirs et à ceux de sa femme. Je ne sais pas si vous avez reçu cette lettre de Rainbo International Ltd., mais c'est une véritable histoire d'horreur, notamment en ce qui concerne le traitement des passagers à qui on a dit qu'il n'y aurait pas de vol, alors qu'il y en a eu. Leurs bagages se sont rendus à destination, mais deux jours plus tard, après toutes sortes de péripéties. Les voyageurs n'ont pas pu se rendre à des réunions d'affaires et à des expositions auxquelles ils devaient participer pour défendre les intérêts de l'industrie canadienne sur le marché d'Extrême-Orient. Votre compagnie a véritablement refusé d'assumer ses responsabilités et ses obligations.

Il y a eu de la surréservation et les voyageurs estiment qu'on les a fait descendre sans ménagement d'un avion sur lequel ils avaient acheté des places; à l'enregistrement, on leur a dit qu'ils avaient des places, et ils ont été totalement laissés à eux-mêmes.

J'ai une autre lettre de quelqu'un qui s'est rendu à Mexico, qui a essayé de revenir et qui, après bien des difficultés, après être allé à l'aéroport pour constater qu'il n'y avait là personne de votre compagnie, ni d'Air Canada, du reste, pour fournir des explications, a constaté que les services à Mexico avaient été supprimés. Canadien ne desservait plus cette ville et le voyageur en question n'avait aucune possibilité de revenir avec le même billet.

Le président: Il vous reste une minute.

Mme Val Meredith: Ce que l'on constate, c'est que pour les voyageurs, même si Canadien affirme... Vous me dites que vous prenez vos décisions vous-mêmes et que vous en assumez la responsabilité. Dans ce cas, monsieur, vous êtes responsable des mauvais traitements infligés actuellement aux voyageurs canadiens. Ils ont l'impression que c'est Air Canada qui a annulé les vols vers Mexico, mais vous me dites que c'est vous qui l'avez décidé, et non pas Air Canada.

• 0920

M. Paul Brotto: Tout d'abord, je dois dire que j'éprouve une grande empathie envers ces clients. Nous allons régler leur problème. J'apporterai les amendements nécessaires. Je me consacre entièrement aux mesures qui s'imposent pour satisfaire les clients. C'est l'objectif exclusif de Canadien et de ses 16 000 employés. Si nous avons imposé de tels inconvénients à ces voyageurs, je peux vous assurer que je vais apporter tous les amendements nécessaires.

On se heurte toujours à des obstacles. Nous avons eu des problèmes d'informatique dans les communications entre les deux compagnies, et c'est ce qui explique une partie de cette surréservation. Nous avons travaillé nuit et jour pour tout régler, et c'est maintenant chose faite. Il y aura d'autres obstacles, mais nous progressons le plus vite possible, en nous consacrant entièrement à la satisfaction du client.

En ce qui concerne Mexico, nous avons toujours une liaison avec cette ville, mais les horaires ont changé. Je dois m'en excuser auprès de ce client, mais nous allons régler le problème.

Le président: Merci, Val.

Joe Fontana.

M. Joe Fontana (London-Centre-Nord, Lib.): Merci, monsieur le président.

Je suis sûr, monsieur Brotto, monsieur Markey et monsieur Bradley, que mes collègues vont vous parler de l'énorme déception parmi les clients, vos clients, quant à cette intégration et aux défis que vous devez relever.

Malheureusement, je ne suis pas certain que vos réponses puissent satisfaire qui que ce soit et je considère—je suis certain que M. Milton est ici—qu'alors que notre pays traverse cette période de chambardement des transports aériens, l'argent ne devrait pas être le premier facteur de motivation, en particulier dans la mesure où les forces combinées d'Air Canada et de Canadien vont accaparer de 80 à 85 p. 100 du marché intérieur et 90 p. 100 de notre marché international. Vous ne pouvez que faire des profits à long terme, puisqu'en pratique, vous n'aurez plus de concurrents.

Il me semble donc que le client devrait avoir la priorité absolue, et qu'on devrait en particulier lui épargner les problèmes internes auxquels Air Canada et votre compagnie sont confrontées.

J'aimerais bien comprendre la situation. Vous appartenez à une compagnie à numéro. Et cette compagnie à numéro, elle appartient à qui? Qui en sont les actionnaires? Est-ce qu'elle a un seul actionnaire, à savoir Air Canada?

M. Paul Brotto: La compagnie à numéro appartient pour 90 p. 100 à Paul Farrar et pour 10 p. 100 à Air Canada.

M. Joe Fontana: Bien. Lorsque vous avez négocié sur la proposition d'Air Canada, nous pensions que Canadien allait continuer d'exister en tant qu'entité distincte et qu'indépendamment des gains d'efficacité et d'une certaine forme d'intégration, Canadien continuerait de fonctionner en tant que filiale appartenant à 100 p. 100 à Air Canada, et que dans la pratique, elle resterait un concurrent d'Air Canada, une autre compagnie aérienne complémentaire par rapport à Air Canada.

Val vous a demandé qui tirait les ficelles et vous dites que Canadien peut faire ce qu'elle veut et planifier ses affaires en conséquence, mais soyons sérieux. Tout le monde sait qu'Air Canada contrôle Canadien. De l'horaire des vols aux réservations, du déploiement du personnel à l'utilisation des avions et la mise en oeuvre des services dans la communauté, tout est décidé par Air Canada.

Pouvez-vous nous dire simplement et brièvement, comment Canadien fonctionne aujourd'hui et comment elle va fonctionner demain indépendamment d'Air Canada? Si elle n'est pas indépendante, pourquoi ne pas le dire franchement au public canadien, pourquoi ne pas dire qu'au plan pratique, il n'y a plus qu'une compagnie aérienne et que c'est cela qui nous attend? Pour l'instant, le nom «Canadien» existe toujours, mais ne nous faisons pas d'illusion, tôt au tard, ce sera «Air Canada».

M. Paul Brotto: Tout d'abord, sur la conduite des affaires chez Canadien, Canadien et Air Canada coordonnent leurs activités dans tous les domaines, que ce soit l'horaire des vols, la planification des ventes, les activités commerciales, l'exploitation, etc. C'est délibérément que nous procédons ainsi, puisqu'à long terme, il est prévu que Canadien fusionne avec Air Canada.

Pendant un certain temps, Canadien sera gérée de façon autonome, et non pas en concurrence avec Air Canada, mais en coopération avec cette compagnie. La situation de Canadien est telle que cette compagnie ne pourrait pas survivre de façon indépendante. Canadien est à proprement parler une compagnie en faillite et la seule façon d'assurer la survie de la compagnie et de ses 16 000 employés, de desservir les localités qui dépendent de nous et de préserver la base de notre clientèle loyale, c'est de travailler conjointement avec Air Canada sur tous ces fronts. De ce point de vue, vous avez raison, nous sommes en train d'harmoniser de nombreuses activités avec Air Canada, mais nous le faisons de façon tout à fait délibérée.

• 0925

Je reconnais aussi avec vous qu'il y a eu des problèmes au cours des derniers mois, et que cette situation risque de perdurer encore quelques mois. À mon avis, c'est la démarche de restructuration la plus gigantesque jamais entreprise dans notre pays, non seulement dans le secteur de l'aviation, mais pratiquement dans n'importe quel secteur d'activité. Nous sommes actuellement en chantier et je dois donc m'excuser des inconvénients que nous subirons tous encore pendant quelques mois.

Le président: Il vous reste trente secondes.

M. Joe Fontana: Qui contrôle Canadien régional? Est-ce que c'est vous?

M. Paul Brotto: Canadien régional est une filiale à 100 p. 100 de Canadien.

M. Joe Fontana: Bien. Que se passe-t-il en ce qui concerne la cession annoncée de cette compagnie aérienne qui, d'après le contrat que vous avez passé avec le Bureau de la concurrence, aurait dû se produire il y au moins un mois? Que se passe-t-il dans ce dossier? Y a-t-il des jeux de coulisse en ce qui concerne la cession de cette compagnie aérienne?

M. Paul Brotto: Absolument pas.

M. Joe Fontana: Où est-ce que ça bloque?

M. Paul Brotto: Nous essayons de progresser le plus vite possible dans ce dossier. Finalement, tout tourne autour de la détermination de la juste valeur de Canadien régional. Comme vous le savez, cette compagnie sert de garantie à des obligations émises par Canadien pour un montant de 150 millions de dollars US. Nous ne pouvons pas verser ces 150 millions de dollars US aux détenteurs d'obligations, puisque c'est Canadien régional qui sert de garantie, pas plus que nous ne pouvons céder gratuitement cette compagnie. Sa valeur doit être déterminée conjointement en toute équité par nous-mêmes et par le Bureau de la concurrence.

M. Joe Fontana: Mais cela risque de durer des années. Les termes du contrat sont assez précis. Il y a effectivement l'évaluation de la société, mais il se peut aussi que votre prix soit tellement élevé que personne ne voudra acheter la compagnie, et l'intégration de votre système peut être telle que personne ne voudra l'acheter parce qu'il n'aura plus aucune valeur. Pourtant, les conditions du contrat sont bien précises. L'opération devrait déjà être réalisée, d'après le contrat passé entre Air Canada et le Bureau de la concurrence. Je le répète, on risque donc d'être encore là...

Le président: Pouvez-vous terminer, monsieur Fontana?

M. Joe Fontana: ... dans plusieurs années, à vous demander pourquoi vous ne vous êtes pas encore défait de Canadien régional.

M. Paul Brotto: Nous voudrions le faire le plus rapidement possible. Rien ne nous rendrait tous plus heureux que d'avoir un peu de certitude. Les employés de Canadien régional subissent actuellement énormément de stress et de pression de toutes parts et ils aimeraient connaître avec plus de certitude leur avenir. À vrai dire, le problème a été jusqu'à maintenant d'essayer d'établir la juste valeur. Nous en sommes au point où le Bureau de la concurrence et nous-mêmes avons décidé qu'un tiers décidera du prix, ce qui nous permettra d'aller de l'avant.

Le président: Monsieur Guimond, vous avez la parole.

[Français]

M. Michel Guimond (Beauport—Montmorency—Côte-de-Beaupré—Île-d'Orléans, BQ): Monsieur Brotto, je veux vous dire dès le départ que les chiffres que vous nous avez donnés pour 1999 et 2000 me font sympathiser avec les travailleurs et les travailleuses de Canadien qui, depuis plusieurs mois, subissent un stress incroyable et sont mis au défi de demeurer en affaires.

Par contre, je vous dirai respectueusement que je mets en doute, monsieur Brotto, la réponse que vous avez donnée à la question posée par Mme Meredith, à savoir que vous êtes le seul et unique décideur de la gestion. Je m'explique.

Si c'est le cas, on peut remettre vos décisions en question. On pourrait parler de la décision de ne plus donner la possibilité à Air Transat de desservir Whitehorse. On pourrait remettre en question votre décision de ne plus permettre à Canada 3000 d'utiliser les services de formation de Canadien qui sont actuellement disponibles au Canada, alors que les employés de Canada 3000 doivent recevoir leur formation aux États-Unis. Pourtant, vous en avez la possibilité.

Je pense que, dans la situation financière qui est la vôtre, on n'a pas avantage à se priver de revenus, à moins que cela ait été du bien-être social déguisé ou à moins que vous leur ayez fait une faveur et que cela ait été une subvention déguisée.

Je vais vous donner un exemple plus précis. Air Alma avait une entente depuis plus de 20 ans avec Canadien pour desservir la région du Saguenay—Lac-Saint-Jean et de Chibougamau. Elle se fait dire que cette entente ne pourra pas être maintenue.

• 0930

C'est vrai que les lettres ont été signées par Canadien, mais permettez-moi, monsieur Brotto, de vous dire que je ne vous crois pas et que quelqu'un d'autre, à un autre niveau, tire les ficelles.

J'aimerais que vous m'expliquiez la situation particulière d'Air Alma, parce que je vais poser exactement la même question à M. Milton plus tard.

[Traduction]

M. Paul Brotto: Tout d'abord, sachez que je ne suis pas le seul à prendre les décisions à Canadien. Ce serait imprudent de le croire. Nous avons une solide équipe de gestion dont tous les membres ne veulent qu'une chose: redresser le plus vite Canadien.

Il faut faire vite, car Canadien ne peut continuer à perdre 2 millions de dollars par jour. Pour ce qui est des contrats conclus avec Air Transat, Canada 3000 et d'autres encore, Air Transat a présumé que nous continuerions à lui fournir les services de manutention au sol à Whitehorse. Elle ne nous a jamais demandé à l'avance si ce serait le cas ou pas. Depuis, elle a trouvé d'autres services de manutention au sol qui la satisfont, car nous ne pouvions continuer à la subventionner.

Pour ce qui est d'Air Alma, nos rapports avec elle remontent à bien des années, et il se peut que nous en ayons à nouveau qui dureront aussi longtemps. Pour l'instant, nous nous occupons à restructurer la situation. S'il devenait logique, à un moment donné, de renouer les liens avec Air Alma, nous le ferions sans aucun doute.

[Français]

M. Michel Guimond: Si vous êtes intéressés à maintenir la relation avec Air Alma, pourquoi la dernière lettre qui lui a été expédiée disait-elle qu'après le 31 mai, vous ne seriez plus en mesure de perpétuer le contrat?

Si vous êtes intéressés à conserver cette entente avec Air Alma, pouvez-vous conclure une entente à plus long terme, par exemple pour un an ou deux, le temps qu'il faudrait à votre compagnie pour se restructurer et au transport régional du Québec de se restructurer lui aussi? Si vous décidez de mettre un terme à l'entente commerciale que vous avez avec Air Alma depuis plus de 20 ans, cela signifie que certains transporteurs régionaux ne pourront plus demeurer en opération. Air Nova se trouverait alors en situation monopolistique dans les régions du Québec, ce qui serait totalement inacceptable.

InterCanadien est décédé. Certains transporteurs régionaux qui étaient affiliés avec vous dans l'Ouest sont décédés depuis quelques mois. Est-ce bien ce qu'on veut?

Donc, si vous êtes vraiment des décideurs autonomes, vous avez l'occasion, et je suis persuadé que vous le ferez dans les prochains jours, de conclure une entente commerciale à beaucoup plus long terme avec les transporteurs régionaux anciennement affiliés à Canadien.

[Traduction]

M. Paul Brotto: Notre objectif, c'est d'établir le réseau le plus vaste possible au Canada, pour que le plus grand nombre possible de localités alimentent nos plaques tournantes partout au pays. Certaines de ces villes sont desservies différemment. Et Air Nova a en effet pris une place de plus en plus grande sur le marché québécois, pour compenser, notamment, pour la défaillance d'InterCanadien.

Il y a aura d'autres accords qui devront être modifiés avec le temps, mais ce ne sont pas tous les accords qui seront maintenus tels quels. Il faudra évidemment consentir à des alignements, pour que nous puissions continuer à nous concentrer sur la mise en place du meilleur et du plus fort réseau qui soit, afin de desservir toutes les localités du pays et de leur offrir des liaisons dans le monde entier.

Certains des alignements auxquels nous songeons nous obligerons à changer notre façon de faire. De plus, les relations que nous avions bâties devront évoluer elles aussi. Ce n'est pas quelque chose de statique: c'est plutôt un cheminement, c'est évolutif. Mais je vous répète que nous nous engageons à offrir les meilleurs services qui soient à toutes les localités du Canada, à les relier et à trouver le plus grand nombre possible de partenaires pour cimenter cette relation.

Dans le cas d'Air Alma ou de certains autres partenaires, c'est un phénomène évolutif. Certains marchés qu'il était peut-être logique d'exploiter auparavant devront être abordés différemment. Mais nous n'avons nullement l'intention d'abandonner le marché. Ce que nous voulons faire, c'est édifier le meilleur réseau qui soit pour tous les Canadiens, dans tout le pays.

Le président: Merci, monsieur Guimond.

• 0935

Une précision, monsieur Brotto. À la lumière de ce que vous avez répondu à M. Guimond, il saute maintenant aux yeux que les dirigeants de Canadien ont négocié des contrats à bas prix et subventionné les autres compagnies aériennes pour les services de manutention des bagages et la formation.

La correspondance entre Canada 3000 et les Lignes aériennes Canadien, dont les membres du comité ont reçu copie, ne proposait aucunement, de la part de Canadien, de s'asseoir à une table de négociation et de rouvrir les discussions pour savoir combien il en coûterait à la première compagnie d'obtenir les services de manutention des bagages. La correspondance de Canadien informait tout simplement l'autre compagnie qu'on ne lui offrirait désormais plus le service. Vous pouvez comprendre les membres du comité qui ont du mal à vous croire lorsque vous affirmez que personne d'autre n'intervenait dans les décisions chez Canadien. Après tout, vous affirmez, d'une part, que vous avez eu besoin d'argent et que c'était la meilleure solution pour Canada 3000, mais vous dites aussi dans toute la correspondance envoyée à Canada 3000 et aux autres compagnies aériennes que vous aviez simplement décidé de cesser de leur offrir le service. Dans la correspondance que nous avons lue, on ne proposait pas de s'asseoir à la même table pour discuter des coûts réels ou pour discuter de ce qu'il en coûterait désormais à la compagnie régionale pour utiliser vos services de manutention des bagages dans les aéroports régionaux.

M. Paul Brotto: Notre décision a été prise uniquement en fonction de critères économiques. Nous voulons faire ce qu'il faut faire pour rendre Canadien rentable. Nous nous demandons comment nous allons réaffecter les ressources au sein de Canadien afin de...

Le président: Monsieur Brotto, vous éludez ma question. Je vous ai demandé pourquoi votre correspondance ne proposait pas d'abord aux autres compagnies aériennes de renégocier l'entente plutôt que de leur annoncer de but en blanc que le service cesserait, surtout si c'est d'argent donc vous avez besoin.

M. Paul Brotto: D'abord, j'aimerais affirmer que notre intention, c'est de répondre aux besoins de Canadien, ce qui signifie que nous devrons redéployer nos ressources, que ce soit du côté de la formation, des ressources au sol, ou de l'enregistrement, afin de répondre à nos besoins. Je ne puis dire si je serai en mesure de fournir des ressources à l'un ou l'autre des transporteurs régionaux, car, pour l'instant, je m'attaque au problème de la restructuration de notre compagnie, et c'est aussi l'objectif de toute l'équipe de gestion.

Dans six mois, je serai peut-être en mesure d'offrir certaines ressources excédentaires à ces transporteurs, mais à un prix radicalement différent. Pour l'instant, je m'occupe surtout de redresser Canadien, ce qui signifie redéployer les actifs et notre capacité en termes de ressources.

Quant aux besoins d'Air Transat, de Canada 3000 ou toute autre compagnie aérienne, il fallait qu'elles sachent sans avoir à attendre un ou deux mois si nous allions leur fournir des services de manutention au sol. Pour l'instant, cela ne nous est pas possible, car j'en suis toujours à restructurer notre compagnie.

Le président: Monsieur Sekora, allez-y.

M. Lou Sekora (Port Moody—Coquitlam—Port Coquitlam, Lib.): Merci beaucoup, monsieur le président. Vous venez de mettre le doigt sur le bobo. Ce que j'entends, c'est de la foutaise, et je ne suis pas du genre à écouter une telle foutaise sans réagir. Milton vous a envoyé ici ce matin pour que vous le devanciez et que vous puissiez essuyer les critiques avant lui. C'est ce qui explique que vous deviez en supporter l'odieux.

Vous avez quand même fait des choses stupides. Comme je vous l'ai déjà dit plus tôt, je suis sûr que vous vous y êtes mis à plusieurs, pour trouver ces solutions, car jamais un seul cerveau n'aurait réussi à faire autant de bêtises que cela. Vous annulez des vols à la dernière minute—et je parle ici de vols entre Ottawa et Vancouver, par exemple. Quelqu'un qui a un vol à 18 heures sur Canadien et qui a retenu sa place depuis déjà trois semaines peut fort bien se faire dire que le vol est annulé. Est-ce que l'on vous aurait par hasard réservé un siège sur un autre vol? Bien sûr que non. Si l'on se présente à l'autre compagnie aérienne, on se fait dire: «Désolé, mais il n'y a plus de place.»

Qu'est-ce que c'est que cette façon de traiter les clients? À Kitimat, il y avait des vols quotidiens de 600 places, ce qui était peut-être beaucoup, mais on a désormais réduit le nombre de sièges à 150. Que font ceux qui souffrent du cancer ou d'une autre maladie et qui doivent prendre l'avion pour aller se faire soigner ailleurs? Et c'est ce que vous appelez du service?

Lorsque M. Milton a comparu au comité, il y a de cela quelques mois, il a affirmé à la télévision qu'il n'avait que de bonnes nouvelles à annoncer, pour toutes les régions du Canada et pour toutes les villes canadiennes. Quant aux mauvaises nouvelles, je me demande bien ce qu'elles pourraient être! Les employés d'une compagnie sont montés contre ceux de l'autre.

• 0940

Vous devez maintenant payer 11 c. pour chaque dollar aux créanciers, ce qui est bien. Si ce n'est pas là du remaniement, qu'est-ce que c'est?

Comme le disait notre président, vous avez annulé vos ententes avec les autres compagnies aériennes sans leur expliquer pourquoi. Laissez-moi vous le dire à vous pourquoi vous les avez annulées. Je suis, moi aussi, dans les affaires. Je ne suis peut-être pas aussi avisé que vous, mais si vous avez annulé les ententes, c'est pour pouvoir retirer à ces gens tous les services de façon à ce qu'ils ne puissent plus vous concurrencer. Voilà ce que vous avez fait! Ce n'est pas une question de coûts.

C'est ce qu'ont dit les contribuables, les touristes, les gens d'affaires, et les députés de tous les partis, de la Colombie- Britannique et des autres régions du Canada qui ont été laissés en rade. Ce sont les 45 personnes qui sont laissées en rade dans un aéroport qui n'a pas d'avion à leur offrir. Vous achetez ces gens- là à coup de 300 $ ou de 500 $, et vous leur offrez un billet aller seulement pour n'importe quelle destination dans le monde. Si vous êtes capables de vous permettre ce genre de choses, c'est que vous êtes en train de faire beaucoup d'argent! Et pourtant, vous affirmez vouloir économiser.

Vous essayez de faire des économies, mais vous êtes loin du compte à mon avis; vous faites plutôt des bêtises. Nous sommes tous très frustrés, et je ne suis pas le seul député dans ce cas, et nous aimerions beaucoup savoir quand on peut espérer que les choses reviendront à la normale et que...?

M. Collenette doit déposer un projet de loi devant la Chambre, et d'un simple paraphe il peut faire venir d'autres compagnies aériennes, ce qui me plaît énormément, car nous n'avons pas l'intention de tolérer la situation actuelle très longtemps. Si cela continue, une motion sera déposée pour attirer d'autres compagnies aériennes, peut-être même pour inviter des compagnies américaines et voir quel genre de service elles peuvent nous offrir.

En attendant, nous souffrons tous de la situation. Je sais bien que vous devez vous restructurer, mais quand peut-on espérer en voir les résultats?

Le président: Merci, Lou.

Monsieur Brotto.

M. Paul Brotto: C'est précisément la raison pour laquelle nous avons essayé d'agir le plus vite possible. Si nous avions eu un plan parfait, nous aurions pu, en l'espace de deux ou trois ans, apporter des changements progressifs. C'est certainement ce que nous aurions préféré, mais ce n'est pas possible. Au lieu de cela, nous sommes forcés de précipiter les choses, et vous avez raison, il y aura des erreurs. Nous allons faire tout notre possible pour les rectifier, mais quand on perd deux millions de dollars par jour, le temps n'est pas un allié. On n'a pas le choix, il faut rectifier la situation le plus vite possible.

Nous avons 16 000 employés qui sont en péril, 25 000 emplois, et 50 collectivités que nous desservons et qui pourraient souffrir beaucoup de cette faillite de Canadien. Nous devons agir le plus vite possible, et je vous assure que nous pensons en priorité aux clients, et lorsque nous ferons des erreurs, nous le corrigerons.

Le président: Bev Desjarlais, c'est à vous.

Mme Bev Desjarlais (Churchill, NPD): Merci, monsieur Brotto.

Cela m'étonne toujours, mais chaque fois qu'un nouveau directeur de l'une de ces compagnies comparaît devant nous, il commence toujours par chanter les louanges de celui qu'il l'a précédé. Nous n'avons jamais vu des compagnies dans une situation aussi désastreuse, et pourtant, vous continuez à vous congratuler mutuellement. Cela m'étonnera toujours.

Vous nous avez dit que votre situation financière était très grave, que vous perdiez deux millions de dollars par jour. Vous continuez à essayer de restructurer une compagnie qui éprouve de très graves difficultés financières, et cela depuis très longtemps; personne ne s'attendait à ce que cela réussisse, mais c'est la raison d'être de cette fusion.

Vous avez dit qu'à un moment donné il y aura une fusion d'Air Canada et de Canadien, et j'aimerais savoir pourquoi vous ne commencez pas tout de suite, pour en finir une bonne fois pour toute, pour rendre à vos employés une certaine stabilité d'emploi—et je vous parle de tous les employés—et pour rendre aux Canadiens un système de transport aérien qui fonctionne. Pourquoi continuez-vous à traîner les pieds?

M. Paul Brotto: Rien ne nous ferait autant plaisir. En fait, si nous avions une baguette magique, c'est précisément ce que nous ferions. Toutefois, vous avez soulevé des problèmes particulièrement complexes.

L'intégration des listes d'ancienneté des employés des deux compagnies échappe au pouvoir des administrateurs de Canadien ou d'Air Canada.

Mme Bev Desjarlais: Vous n'avez même pas amorcé le processus.

M. Paul Brotto: Oh, mais certainement, nous avons commencé. Nous travaillons nuit et jour en coulisses avec les syndicats pour essayer de régler ce problème, mais c'est très complexe et seuls les syndicats peuvent s'en occuper.

Nous avons essayé de travailler avec le syndicat national de l'aérospatiale, et nous avons signé des ententes de principe avec eux au nom des agents aux réservations et à l'enregistrement dans les aéroports, à la fois à Canadien et à Air Canada. Il s'agit de leur donner à tous la même convention, les mêmes règles de travail et les mêmes barèmes salariaux pour pouvoir regrouper tous ces travailleurs et pour pouvoir les utiliser indifféremment, quelle que soit la compagnie pour laquelle ils travaillaient à l'origine. Or, ce qui s'est produit...

• 0945

Mme Bev Desjarlais: Que fait-on d'ordinaire quand on ne réussit pas à convaincre deux groupes de travailler ensemble et qu'on ne trouve pas de solution? Quelles sont vos options? Est-ce que vous faites venir un médiateur ou un arbitre de l'extérieur pour régler la question, ou bien est-ce que vous continuez à traîner les pieds et à vous chamailler?

M. Paul Brotto: Seuls les syndicats peuvent faire appel à un médiateur ou à un arbitre de l'extérieur, ce n'est pas une option pour la direction. Les lois canadiennes du travail nous l'interdisent.

Mme Bev Desjarlais: Voulez-vous dire que notre comité devrait prévoir dans cette loi un processus qui permette de forcer une fusion et qui empêche ces compagnies de continuer à traîner les pieds, au risque d'innombrables emplois?

M. Paul Brotto: Tout ce qui pourrait nous aider à rectifier la situation serait bienvenu, mais il ne faudrait pas oublier que cela cause une anxiété considérable aux employés. Ils sont extrêmement inquiets au sujet des listes d'ancienneté et personnellement, j'ai l'impression qu'il faut avant tout gagner la bonne volonté et le soutien des employés. Combien de temps faudra-t-il? J'espère que cela se fera très vite, mais nous avons vraiment besoin de leur soutien. En effet, sans leur bonne volonté, c'est une entreprise qui est vouée à l'échec.

Mme Bev Desjarlais: À la page 3 vous dites que vous êtes très «sensibles» aux besoins des collectivités que vous desservez. Dans quelle mesure avez-vous eu des discussions avec elles avant de changer les horaires ou de supprimer des appareils? Est-ce que vous vous êtes entretenus avec les dirigeants de ces communautés?

M. Paul Brotto: Absolument, nous avons d'importantes discussions.

Mme Bev Desjarlais: Pourriez-vous nous donner des détails sur ces discussions? Nous entendons dire qu'il n'y en a absolument pas eu. Si vous avez eu des discussions, par exemple avec le maire de Penticton, ou d'ailleurs, pouvez-vous nous dire comment les choses se sont déroulées dans ces communautés?

M. Paul Brotto: Je vais demander à Steve de répondre car il s'est occupé personnellement du cas de Penticton.

M. Stephen Markey (premier vice-président, Affaires générales et gouvernementales, Lignes aériennes Canadien Ltée): Nous sommes allés dans tout le pays, chaque fois que nous l'avons pu, et nous avons parlé à des représentants des collectivités, mais il faut se souvenir que nos ressources sont limitées. En effet, nous n'avons pas pu...

Mme Bev Desjarlais: Donnez-moi plus de précisions.

M. Stephen Markey: Certainement.

Mme Bev Desjarlais: Donnez-moi le nom des collectivités, dites-moi à qui vous avez parlé...

M. Stephen Markey: Je vais le faire.

Évidemment, nous n'avons pas parlé à tout le monde, mais nous sommes certainement allés à Penticton. Nous sommes allés à Regina, Saskatoon et Winnipeg, je crois. Dans l'Est, nous sommes allés entre autres à St. John's, Moncton, Fredericton...

Mme Bev Desjarlais: Quels sont les représentants de ces collectivités auxquels vous avez parlé?

M. Stephen Markey: À Fredericton, je crois que nous avons parlé au maire; à Penticton, nous avons rencontré neuf maires des communautés régionales ainsi que les députés fédéral et provincial de la région.

Mme Bev Desjarlais: Est-ce que vous avez-fait cela avant les changements...

M. Stephen Markey: Non, c'est après la première modification de l'horaire.

Mme Bev Desjarlais: Je tiens absolument à ce que les choses soient claires; je vous demandais quelles discussions aviez-vous eues avant les changements. Est-ce qu'avant d'apporter ces changements vous avez eu des discussions avec les dirigeants de la communauté, oui ou non?

M. Stephen Markey: Je ne le pense pas, pas de discussions approfondies, mais si vous prenez l'exemple de Penticton...

Mme Bev Desjarlais: En quoi est-ce que cela prouve que vous êtes «sensibles» aux besoins des collectivités?

M. Stephen Markey: Eh bien, dans le cas de Penticton, nous avons eu avec eux une discussion qui a duré six heures. Nous avons apporté des changements à notre horaire...

Mme Bev Desjarlais: Mais c'était après coup.

M. Stephen Markey: Oui, mais nous avons essayé d'être sensibles à leurs besoins, nous sommes revenus sur ce que nous avions décidé. Nous avons augmenté la capacité à Penticton et je me suis personnellement engagé, de même que certains de nos collègues, à retourner à Penticton dans environ trois semaines pour revoir ces gens-là et nous assurer que nous avons donné suite à toutes leurs demandes, car ils en avaient plusieurs. Ils organisent des triathlons dans cette communauté, il y a plusieurs autres manifestations qui les préoccupent.

Comme nous l'avons dit à beaucoup d'autres dirigeants de municipalités canadiennes, il faut surveiller de très près les marchés pour être certains de répondre à cette demande. Sinon... Il ne faut pas rater le coche. Nous voulons desservir efficacement ces collectivités. Nous ferons tout ce que nous pouvons malgré les limites de nos ressources.

Le président: Merci, Bev.

Joe Comuzzi, s'il vous plaît.

M. Joe Comuzzi (Thunder Bay—Superior-Nord, Lib.): Merci, monsieur le président.

Bienvenue.

Monsieur Brotto, la dernière fois que nous avons discuté avec M. Benson, lors de sa dernière comparution... Je ne veux pas discuter de ce que nous aurions dû faire à cette époque. Je m'intéresse davantage à ce qu'il faut faire à partir de maintenant.

J'ai toujours pensé que si Canadien voulaient procéder de façon méthodique, vu ses problèmes financiers, la première chose à faire était tout naturellement d'avoir recours aux mesures de protection sous le régime de la Loi sur le désintéressement des créanciers. C'est ce que je pensais en août ou en septembre dernier. Votre prédécesseur m'a dit que ce n'était pas possible.

• 0950

Il semble aujourd'hui qu'un tel recours aurait pu permettre d'éviter la situation tragique dans laquelle nous nous trouvons aujourd'hui, alors que nous essayons de tout faire dans un délai très serré. La succession aurait pu se faire de façon ordonnée avec l'approbation des tribunaux sur une période de plusieurs mois, sur 10 ou 12 mois, selon les besoins.

Vous avez maintenant réclamé la protection sous la régime de la Loi sur le désintéressement des créanciers. Je ne comprends pas pourquoi Canadien ne peut se prévaloir des mêmes mesures de protection maintenant pour que vous ayez davantage de temps pour régler vos affreux problèmes. J'ajouterai que nous nous en prenons un peu à vous aujourd'hui, mais le gouvernement n'est pas sans blâme; notre conscience n'est pas sans taches.

Ma question est la suivante: Puisque vous avez recours aux mesures de protection de la Loi sur le désintéressement des créanciers, pourquoi la transition ne se fait-elle pas plus facilement?

M. Paul Brotto: Pour commencer, j'ai participé à plusieurs discussions au sujet d'une fusion avec les Lignes aériennes Canadien. J'ai participé aux négociations de 1992, qui ont échoué. Si ces négociations ont échoué, c'est entre autres parce que les participants n'arrivaient pas à s'entendre sur la nécessité de restructurer la dette de Canadien. L'année dernière, j'ai pris part à des discussions secrètes entre Air Canada et Canadien, sur une autre fusion possible. Ces discussions ont également échoué car tous n'étaient pas d'accord sur le fait que Canadien allait faire faillite ou qu'elle pourrait survivre à une restructuration financière. Air Canada estimait que non seulement ce n'était pas nécessaire, mais que c'était impossible.

Nous nous retrouvons maintenant, pour toutes sortes de raisons, à réunir ces deux sociétés à la dernière minute, à devoir tout faire très rapidement. La Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies nous laisse très peu de temps pour faire la restructuration, et même s'il nous est permis de modifier les contrats, le processus est très limité. Dans une situation aussi pénible, il faut agir aussi rapidement que possible. Nous n'avons pas le temps de faire les choses à la perfection. Ce n'est pas possible.

M. Joe Comuzzi: Merci, monsieur le président, je n'ai plus d'autres questions.

Le président: Merci, monsieur Comuzzi.

Monsieur Casey, s'il vous plaît.

M. Bill Casey (Cumberland—Colchester, PC): Merci beaucoup, monsieur le président.

Je ne comprends pas très bien. Je croyais que dans la proposition initiale permettant à Air Canada d'être le transporteur aérien dominant, les Lignes aériennes Canadien seraient conservées comme entité distincte d'Air Canada, des transporteurs régionaux et d'un transporteur à rabais. Dites-vous aujourd'hui que Canadien finira par disparaître et qu'il n'y aura rien de changé? Les avions seront tous peints de la même façon, les employés seront les mêmes, de même que les syndicats et tout...? C'est bien ce qui est prévu?

M. Paul Brotto: C'est exact.

M. Bill Casey: Quel sera l'échéancier pour tout cela?

M. Paul Brotto: Quelques mois pourraient suffire à faire cette intégration totale des opérations. Pour ce qui est de l'intégration des employés, de la fusion des listes d'ancienneté avec tout ce que cela entraîne, ce sont les syndicats qui décideront de l'échéancier. Cela pourrait se faire très rapidement cette année ou cela pourrait prendre plusieurs années. Il faudra entre-temps trouver des solutions qui soient absolument sans heurts pour le client. Nous n'en sommes pas encore là.

Canadien continuera d'exister en tant que marque distincte tant que les syndicats n'auront pas résolu cette question. Il faudra attendre que les employés soient satisfaits et prêts à fusionner les listes d'ancienneté selon une méthode qui leur convient... Nous devons conserver la société en tant qu'entité distincte...

M. Bill Casey: Outre les problèmes financiers non réglés, la seule chose qui empêche une fusion complète, c'est la liste d'ancienneté des syndicats. Est-ce exact?

M. Paul Brotto: Ce sera le dernier obstacle à franchir.

M. Bill Casey: Que se produira-t-il si vous n'arrivez pas à régler les problèmes financiers et que la proposition n'est pas acceptée?

M. Paul Brotto: Tout d'abord, je dois avouer que je suis absolument persuadé que nous allons l'emporter. Seule une minorité de créanciers s'y opposent. La majorité des créanciers comprennent que la proposition est dans leur intérêt et qu'il est également dans l'intérêt de la société d'accepter le plan de restructuration. Je suis convaincu que le plan sera adopté le 26 mai par une majorité écrasante, car l'alternative... Le tribunal a nommé un surveillant, un superviseur indépendant. D'après lui, si le plan était refusé, les créanciers recevraient moins d'un cent par dollar.

• 0955

M. Bill Casey: Vous n'avez pas expliqué ce qui se produirait si le plan était rejeté, cependant. Décrivez-moi ce qui en serait.

M. Paul Brotto: Si jamais le plan était rejeté, nous prendrions tout simplement les avions, les employés et les clients, nous les amènerions ailleurs et nous lancerions les Lignes aériennes Canadien 2000 Inc. dès le lendemain.

M. Bill Casey: Bonne réponse.

La société Lignes aériennes Canadien régional semble laissée pour compte dans tout cela. Ses employés ne semblent pas avoir beaucoup d'espoir. Croyez-vous que leur problème sera résolu?

M. Paul Brotto: Je puis vous assurer que non seulement chaque employé m'a écrit, mais j'ai également tenu des séances d'information pour discuter avec eux. Ils souhaitent tous demeurer au sein de l'entreprise.

M. Bill Casey: Souhaitez-vous qu'ils demeurent au sein de l'entreprise? Préféreriez-vous conserver la société Lignes aériennes Canadien régional?

M. Paul Brotto: Il est dans l'intérêt du pays de la conserver. Toutefois, nous avons fait une promesse que nous allons respecter. Nous mettrons Canadien régional en vente pour la période de 60 jours, et si un acheteur fait une offre supérieure à la valeur marchande, la société sera vendue.

M. Bill Casey: Qui est votre évaluateur indépendant actuel?

M. Paul Brotto: Canadien et Air Canada ont leurs propres évaluateurs et le Bureau de la concurrence a le sien; les deux n'arrivent pas à s'entendre. On a maintenant nommé un tiers indépendant qui fera une évaluation objective, puisque les deux évaluations actuelles sont très différentes.

M. Bill Casey: Pouvez-vous nous dire quelles sont les différences? Que disent les deux évaluations? Pouvez-vous nous le dire?

M. Paul Brotto: Le problème, c'est la définition de la juste valeur marchande. Si vous lisez le dictionnaire, on définit la juste valeur marchande comme le prix fixé par un vendeur prêt à vendre et par un acheteur prêt à acheter. Pour Canadien, la juste valeur marchande se calcule en fonction de la valeur de Canadien régional par rapport à ce qu'il en coûterait de ne pas avoir Canadien régional. Le nombre comporte neuf chiffres et pour nous, c'est la valeur de l'entreprise.

Le Bureau de la concurrence voit les choses différemment. Pour lui, ce n'est pas le vendeur qui peut établir la valeur, mais l'acheteur. Nous estimons à l'heure actuelle que si ce principe s'appliquait, il s'agirait davantage d'une expropriation que de la vente de Canadien régional.

M. Bill Casey: Quel pourcentage votre valeur représente-t- elle, comparativement à celle fixée par le Bureau de la concurrence...

Le président: Merci, monsieur Casey.

Monsieur Dromisky, s'il vous plaît.

M. Stan Dromisky (Thunder Bay—Atikokan, Lib.): Merci beaucoup, monsieur le président.

J'aimerais connaître votre opinion sur le projet de loi, dans sa version actuelle, sans amendement.

M. Paul Brotto: Je dois avouer qu'il m'est difficile de répondre à cela.

Canadien pourrait probablement s'accommoder de sa version actuelle. Le projet de loi nous impose des obligations que nous sommes prêts à respecter et que nous sommes en mesure de réaliser. Le projet de loi comporte toutefois deux difficultés à mon avis.

Il faudrait préciser davantage la définition de ce qui est anticoncurrentiel. Je ne comprends pas très bien cette définition actuellement, puisque les règlements ont été rédigés mais que d'autres pourraient encore s'ajouter par la suite pour définir ce qui est concurrentiel et anticoncurrentiel. Je veux m'assurer de ne jamais commettre d'infraction, ni moi ni mes employés, de ne jamais rien faire d'anticoncurrentiel. Nous serons toujours de bons concurrents pour les autres sociétés aériennes et nous ne voulons jamais rien faire d'illégal. Nous ne voulons pas poser des actes qui pourraient par la suite être jugés illégaux. Je veux toujours savoir quelles sont les règles.

M. Stan Dromisky: D'accord, merci beaucoup.

J'ai une autre question qui porte sur les observations formulées par bon nombre de témoins au cours des derniers jours. À plusieurs reprises, la correspondance que nous avons reçue et les exposés qui nous ont été faits ont révélé que le style de gestion était grandement douteux.

Voici mes questions: Pourquoi n'a-t-on pas répondu aux lettres et aux courriers électroniques? Pourquoi n'a-t-on pas répondu aux appels téléphoniques? J'ai l'impression que nous avons consacré une bonne partie de notre temps à des problèmes de ce genre, des choses liées directement au fait qu'il n'y a pas eu de communication. Nous avons consacré beaucoup de temps à cela.

• 1000

Bon nombre des problèmes dont notre comité a dû traiter étaient liés au processus et au système de restructuration de l'aviation. La loi aurait pu être éliminée s'il y avait eu une forme quelconque de gestion qui aurait permis la communication entre toutes les parties en cause. Il semble que ces communications n'ont pas été possibles depuis longtemps. Il est très difficile de les rétablir.

M. Paul Brotto: Je tiens à déclarer que nous avons mis l'accent sur la communication. Je suis d'accord avec vous. Il faut qu'il y ait de meilleures communications entre toutes les parties, avec les clients, les fournisseurs, les employés, les localités, les législateurs, le comité, etc. Il faut davantage de communications. Canadien et Air Canada ont mis sur pied des équipes qui se sont totalement consacrées aux communications, mais il faut avouer que la tâche était énorme.

Oui, les clients ont posé de nombreuses questions. Nous travaillons sans arrêt pour répondre à leurs questions et pour leur expliquer ce qui en est. Les gens ne comprennent pas. Il est arrivé que des gens se présentent à un terminal alors que le vol était effectué à partir d'un autre. Nous espérons que tous ces problèmes seront résolus le mois prochain. Nous ferons de grands efforts pour améliorer nos communications.

Nous voulons écouter les clients et les localités. Nous sommes très sensibles à leurs préoccupations. Je reçois des appels et des courriers électroniques des clients et je comprends leurs problèmes. Nous faisons de notre mieux pour communiquer avec eux et leur expliquer la situation. Mais pour nous, les choses sont également en pleine évolution. Nous avions élaboré des solutions, nous avons commencé à les mettre en oeuvre et la réalité nous amène à modifier nos solutions et à les ajuster au besoin.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Dromisky.

M. Stan Dromisky: Merci.

Le président: Dans la même veine, monsieur Brotto, certains témoins ont réclamé un ombudsman qui serait chargé d'examiner les plaintes des clients, par exemple. Croyez-vous que le projet de loi devrait être amendé de façon à instaurer un poste d'ombudsman?

M. Paul Brotto: J'ai déjà 16 000 ombudsmans pour les clients. Air Canada en a 21 000. Canadien et Air Canada, de même que tout leurs employés, axent leurs services sur la clientèle, afin d'offrir à celle-ci de bons services qui répondent à ses besoins et à ses préoccupations.

Le président: Croyez-vous qu'il faille ajouter un ombudsman dans la mesure législative?

M. Paul Brotto: J'estime que c'est inutile.

Le président: Merci, monsieur Brotto.

Monsieur Bailey, s'il vous plaît.

M. Roy Bailey (Souris-Moose Mountain, Alliance canadienne): Monsieur le président, messieurs, ce qui a surtout retenu notre attention, c'est le sentiment de colère et de frustration qui existe et que vous avez reconnu. Permettez-moi d'aborder les choses sous un angle différent. Il n'y a pas d'aéroport dans ma circonscription, même si j'habite environ 32 milles au sud de Regina. J'ai toutefois dû pendant plus d'un an résoudre des problèmes avec la clientèle dans un autre secteur. Par conséquent, je suis peut-être plus sensible à ce genre de problèmes que connaît actuellement le transport aérien.

Ce dont je parle, c'est de la différence qui existe entre Canadien et Air Canada, c'est-à-dire des centaines de travailleurs qui vivent dans l'incertitude, dans la crainte de perdre ce qu'ils possèdent, de perdre leur emploi, et de vivre dans l'insécurité.

Pour moi, l'un des problèmes—et je le répéterai à M. Milton si j'en ai l'occasion... Vous avez déclaré, monsieur, que vous souhaitez voir réaliser cette amalgamation aussi rapidement que possible, en fonction de l'entente sur les listes d'ancienneté, etc. Si comme Air Canada l'a promis, cela se fait en deux ans, cinq ans ou dix ans, toute cette incertitude ne nuit pas seulement à vos clients, mais aussi à tous vos employés, car elle cause des difficultés et un stress qui ne devraient pas être permis au Canada.

• 1005

Je veux insister sur ce qui suit: si les gens n'arrivent pas à s'entendre, le gouvernement devrait-il intervenir? C'est un désastre. Ce qui est en cause, c'est l'emploi de milliers de gens. Le gouvernement devrait-il maintenant se montrer plus dur et obliger les parties à s'entendre?

Ne laissons pas les voyageurs, les consommateurs, les fournisseurs et tous les autres vivre cette situation pendant deux, cinq ou dix ans. Ce n'est pas acceptable pour cette industrie.

Que pensez-vous de la possibilité d'une intervention, d'un grand coup de poing sur la table pour dire que c'est assez.

M. Paul Brotto: Je ne crois pas que ce soit le bon moment. Nous sommes très sensibles à toutes ces questions. Nous savons que cela provoque beaucoup de stress. Nous savons que dans certains cas, cela divise des employés qui doivent travailler ensemble. Nous savons que cela nuit au moral des employés et que cela influe sur leurs relations avec les clients.

Je passe chaque jour des heures avec des employés pour expliquer comment nous devons travailler ensemble et trouver une solution. Et j'ai toutefois l'impression qu'imposer une solution ferait actuellement plus de mal que de bien. Il faut amener les gens à négocier. Il faut que les employés commencent à se faire confiance et à travailler ensemble. Notre mission, à court terme, est de les faire travailler ensemble cet été afin qu'ils voient qu'il n'y a pas de différence entre un employé de Canadien et un employé d'Air Canada, que nous travaillons tous pour un objectif commun, que nous essayons tous de créer un avenir intéressant pour les clients, les employés et les collectivités.

M. Roy Bailey: Permettez-moi une dernière observation.

Je ne pense pas que cela se produira. Sauf le respect que je vous dois, monsieur, je pense que pour les employés de Canadien en particulier, dans ce cadre de deux, cinq et dix ans, vous n'obtiendrez pas de solution rapide. Je pense qu'il vous incombe, à vous et à Air Canada, de dire que vous allez rendre cela possible, et que vous les aiderez. Vous pouvez les aider à prendre cette décision et à le faire rapidement. Autrement, qu'est-ce qui se passera? Eh bien, la même chose continuera jour après jour, indéfiniment. Il n'y aura pas de solution.

M. Paul Brotto: Je peux seulement vous dire que nous avons examiné les 24 fusions survenues dans le transport aérien dans le monde au cours des 20 dernières années, et nous avons constaté que seulement deux avaient réussi. Les deux fusions qui ont réussi sont celles où les syndicats ont participé et où les gens ont pu se mettre d'accord rapidement. Les fusions qui ont échoué sont celles où les syndicats ne sont pas parvenus à s'entendre, de sorte qu'on a dû leur imposer des choses et que les employés ont essentiellement refusé de donner leur accord.

Prenons le cas de British Airways, l'une des entreprises qui a le mieux réussi sur le plan de l'intégration, non seulement à l'époque de la fusion entre BOAC et BEA, mais au cours de la dernière décennie, lorsque British Airways et British Caledonian ont fusionné. La plupart des syndicats ont rapidement conclu qu'ils devaient s'unir, mais leurs agents de bord, des années après la fusion, ont encore deux syndicats distincts parce que ces employés n'ont pas pu en arriver à voir les choses du même oeil.

Nous devons les amener à s'unir le plus rapidement possible, mais les forcer à le faire aujourd'hui serait plus préjudiciable à mon avis.

Le président: Merci, monsieur Bailey.

Monsieur Hubbard, je vous en prie.

M. Charles Hubbard (Miramichi, Lib.): Merci, monsieur le président.

En ce qui concerne les employés, on nous a dit qu'ils seraient assurés d'avoir un emploi, qu'il y aurait probablement une réduction d'effectif par attrition dans votre compagnie, des rachats d'emplois, et d'autres mesures de cette nature. Ce qui s'est passé en réalité, c'est que vous avez réduit considérablement les services, en ce qui concerne le nombre de vols et le nombre d'employés utilisés pour vos opérations. Que se passe-t-il vraiment? Combien d'employés avez-vous perdus dans les six derniers mois, disons?

Deuxièmement, vos employés sont-ils occupés à plein temps? Avez-vous beaucoup d'employés qui ne travaillent pas suffisamment pour respecter leurs obligations en vertu de leurs conventions collectives?

M. Paul Brotto: Je dois dire que le taux d'attrition chez Canadien au cours des six derniers mois a certainement été plus élevé que la normale. C'est en partie dû à l'incertitude. Le taux d'attrition, en particulier du côté de l'administration, a été élevé et c'est en partie parce que nous savons tous qu'une fois le processus terminé, il y aura beaucoup de redondance au niveau de l'administration. Il y a donc des administrateurs qui quittent l'entreprise volontairement parce qu'ils ont trouvé une occasion d'emploi ailleurs.

• 1010

Nous nous sommes cependant engagés envers tous les employés à ne pas imposer de mises en disponibilité ou de mutations involontaires. Si nous avons des excédents dans certains secteurs, nous organiserons un programme de recyclage et de réaffectation. Je dirais que d'une manière générale à l'heure actuelle, nous avons besoin de la plupart des employés. Pendant la période de transition, nous avons même besoin de beaucoup d'employés pour aider à la planification. Nous avons besoin d'un grand nombre d'employés pour aider à la transition et nous avons besoin de plus d'employés pour s'occuper des problèmes de communication et des relations avec la clientèle.

M. Charles Hubbard: Ainsi, alors que vous gardez plusieurs de vos appareils au sol, vous n'avez pas vraiment beaucoup d'employés préposés à l'entretien qui n'ont rien à faire. C'est ce que je demande.

M. Paul Brotto: Non.

M. Charles Hubbard: Combien d'employés avez-vous perdus, par exemple, au cours des six derniers mois, sur les 16 000 ou 17 000 que vous aviez au départ?

M. Paul Brotto: Plusieurs centaines.

M. Charles Hubbard: Seulement plusieurs centaines.

J'ai une dernière question à poser.

Je lisais le Globe and Mail d'aujourd'hui, où l'on parle de votre restructuration. Je suppose que vous pouvez n'en faire aucun cas, si vous n'aimez pas ce qui est offert. Dans votre exposé ce matin, vous signalez qu'au cours des trois premiers mois—et je sais que les trois premiers mois de l'année constituent la période la plus difficile pour générer des revenus et faire un profit—, vous avez perdu environ 250 millions de dollars, dont 80 millions sont des charges liées à la restructuration. Ensuite j'ai lu le rapport d'Air Canada, où vous avez déjà travaillé, où vous avez acquis beaucoup plus d'expérience. Au comité, ce qui nous préoccupe, c'est que Canadien réussisse.

D'après ce que divers témoins nous ont dit, Air Canada a joui d'un quasi-monopole. L'entreprise a augmenté ses prix, et elle a réduit le nombre de ses vols. Au cours des derniers mois, elle a eu la meilleure occasion, probablement jamais vue, de faire des profits, mais vos deux entreprises ont perdu de l'argent au cours de cette période de trois mois.

Vous êtes un cadre qui a beaucoup d'expérience dans le transport aérien. Est-il possible d'y gagner de l'argent au Canada? Nos transporteurs aériens peuvent-ils survivre? Retardons-nous simplement l'inévitable en passant tout ce temps à examiner les compagnies de transport aérien et à chercher à les restructurer? Les représentants des deux compagnies nous disent ce matin que ni l'une ni l'autre n'a fait de profits dans le dernier trimestre. Comment voyez-vous la situation qui prévaudra après la restructuration, disons deux ans après? Pouvons-nous avoir un secteur du transport aérien viable dans ce pays?

M. Paul Brotto: Je dois répondre catégoriquement oui. Le premier trimestre est toujours le plus difficile pour les entreprises de transport aérien, et c'est encore plus vrai au Canada. Le marché est beaucoup plus accentué, les gens voyagent beaucoup plus en été qu'en hiver, comparativement aux États-Unis ou ailleurs dans le monde. C'est certainement plus difficile ici. Nous avons un climat très rigoureux, par exemple.

Cependant, si je regarde deux ans en avant, je suis persuadé que nous pouvons avoir un secteur de services aériens réguliers prospère au Canada. Pas seulement Air Canada; je m'attends à voir WestJet devenir très prospère dans l'ensemble du pays, et je prévois que de nouveaux transporteurs verront le jour. Nous accueillons favorablement la concurrence, car elle nous force à rester vigilants et nous permet de continuer à innover et à concentrer nos efforts sur l'amélioration des services pour notre clientèle et le maintien des prix à un niveau abordable.

En ce qui concerne les prix au Canada, ils n'ont pas augmenté pendant le premier trimestre, en dépit du fait qu'aux États-Unis on a connu deux augmentations de tarif à cause de la hausse du prix du pétrole brut, qui est passé de 10 $ le baril à un peu plus de 30 $. Au Canada, on a volontairement limité les hausses de tarif jusqu'ici cette année à cause de la situation délicate créée par l'intégration des transporteurs aériens.

Le président: Merci, monsieur Hubbard.

[Français]

Monsieur Asselin, s'il vous plaît.

M. Gérard Asselin (Charlevoix, BQ): Vous savez comme moi que le Canada est censé être un pays bilingue dans lequel un grand transporteur comme le vôtre se doit de servir sa clientèle dans les deux langues officielles reconnues par le gouvernement. Le client francophone qui s'embarque sur le vol d'un de vos appareils est en droit de recevoir les mêmes services, en matière de services généraux et en matière de sécurité, dans sa langue. Le billet d'avion de ce client a la même valeur que celui d'un client anglophone.

• 1015

En l'an 2000, vous avez un effectif total de 1 258 pilotes. Seulement 71 d'entre eux sont francophones. Donc, 5,6 p. 100 de vos effectifs parlent français. Quelle est la politique de Canadien ou quelle a été sa politique pour qu'il existe une telle disproportion? Lorsque vous embauchez un pilote d'avion, vous préoccupez-vous de vous assurer qu'il peut s'exprimer dans les deux langues officielles? Ne tenez-vous pas à ce que l'agent de bord puisse assurer le service dans les deux langues officielles?

En ce moment, on se retrouve avec seulement 71 pilotes francophones sur les 1 258 qui sont à l'emploi de Canadien International, soit 5,6 p. 100. Est-ce que dans votre plan de gestion, ou dans votre plan d'intégration ou de fusion, vous allez faire des démarches pour que les pilotes francophones soient aussi favorisés que les pilotes anglophones?

[Traduction]

M. Paul Brotto: Comme je suis chez Canadien depuis quatre mois seulement, je ne peux pas faire beaucoup de commentaires au sujet de ce qui se faisait dans le passé. Je peux cependant vous dire que Canadien a l'intention d'adopter la norme établie à Air Canada et de respecter pleinement la Loi sur les langues officielles. Ce sera la même chose chez nos transporteurs aériens d'apport. Nous avons l'intention d'être en mesure de servir tous nos clients dans la langue de leur choix en tout temps.

[Français]

M. Gérard Asselin: Pour le service à la clientèle, vous démontrez de la bonne volonté. Cependant, j'aimerais que vous preniez note du fait qu'on ne parle pas du passé, mais du présent. Nous sommes en l'an 2000, et sur 1 258 pilotes à votre emploi, il n'y en a que 71 qui sont francophones, soit 5,6 p. 100. Je pense que cela va exiger un certain redressement ou une certaine équité entre les francophones et les anglophones.

[Traduction]

M. Paul Brotto: Nos pratiques en matière d'embauche seront certainement conformes à celles d'Air Canada, qu'il s'agisse des pilotes ou de tout autre groupe d'employés. Nous nous assurerons de toujours embaucher les meilleurs employés possible possédant les compétences nécessaires pour servir la clientèle dans l'une ou l'autre langue.

M. Stephen Markey: De fait, nous avons une équipe de recruteurs qui est à Vancouver cette semaine pour embaucher des agents de bord. L'une des compétences que nous cherchons est la capacité de parler les deux langues officielles.

M. Gérard Asselin: Et qu'en est-il des pilotes?

M. Paul Brotto: Nous ferons...

M. Gérard Asselin: [Note de la rédaction: Inaudible]

M. Stephen Markey: Non, mais il y a beaucoup de gens à Vancouver...

[Français]

M. Gérard Asselin: Le Canada ne se limite pas à Vancouver.

[Traduction]

M. Stephen Markey: Pourtant, on recrute à Vancouver. C'est là qu'on recrute cette semaine. Je ne dis rien d'autre.

Le président: Merci, monsieur Asselin.

Monsieur Brotto, monsieur Bradley et monsieur Markey, je vous remercie beaucoup pour votre intervention devant le comité. Vous avez répondu à nos questions et nous vous en sommes reconnaissants. Nous en aurons probablement d'autres à votre intention et nous espérons que vous accepterez d'y répondre.

Chers collègues, nous allons suspendre la séance pendant cinq minutes pour permettre aux témoins suivants de prendre place.

Merci messieurs.

• 1019




• 1030

Le président: Chers collègues, nous reprenons nos travaux.

Notre témoin suivant, qui représente Air Canada, est Robert Milton, le président et chef de la direction; il est accompagné par son premier vice-président aux affaires de l'entreprise et relations gouvernementales, M. Douglas Port; Lise Fournel, la vice- présidente générale aux affaires commerciales, et Rob Peterson, vice-président général et premier conseiller financier.

Monsieur Milton, encore une fois bienvenue devant le Comité permanent des transports. Nous vous donnons entre cinq et huit minutes pour présenter votre exposé, après quoi les membres du comité vous poseront leurs questions.

À votre convenance.

M. Robert A. Milton (président et chef de la direction, Air Canada): Monsieur le président, honorables députés, mesdames et messieurs,

[Français]

Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, au nom d'Air Canada, je vous remercie de me donner l'occasion de m'adresser à ce comité.

[Traduction]

Je suis heureux de pouvoir vous fournir aujourd'hui un compte rendu du processus d'intégration en cours à la société Air Canada et la société Lignes aériennes Canadien.

Comme vous l'avez dit, je suis accompagné aujourd'hui par plusieurs des principaux cadres d'Air Canada. Si nous voulons entrer dans le détail de certains dossiers, ce sont eux qui, à mon avis, sont les experts en la matière au Canada: Lise Fournel, notre vice-présidente générale aux affaires commerciales, Doug Port, premier vice-président aux relations gouvernementales, Calvin Rovinescu, vice-président général au développement et à la stratégie, et Rob Peterson, vice-président général aux finances et directeur général des finances.

Je tiens d'abord à vous dire à quel point je suis fier des femmes et des hommes qui travaillent pour Air Canada et les Lignes aériennes Canadien partout au pays et dans le monde. Les quatre derniers mois ont été extrêmement ardus et exigeants pour tous les employés. Ceux-ci ont entrepris avec professionnalisme et détermination l'immense défi que constitue l'intégration de deux transporteurs aériens pour créer un transporteur unique au service des Canadiens et des collectivités canadiennes.

Nous n'avons pas choisi une tâche facile. Le regroupement de deux transporteurs tels qu'Air Canada et Lignes aériennes Canadien pour créer de façon réussie une entreprise de 10 milliards de dollars serait un défi monumental et extrêmement ambitieux pour n'importe quelle société. Et c'est à n'en pas douter une démarche d'une ampleur sans précédent dans l'histoire de l'industrie de l'aviation canadienne.

Les fusions passées de transporteurs aériens ont clairement montré que la vitesse de progression pendant les six premiers mois est déterminante pour la réussite du projet. En tenant compte de cette indication, nous avons franchi un certain nombre d'étapes clés au cours des 90 premiers jours.

Sur le plan financier, nous sommes en bonne voie de mener à bien la restructuration de la dette de Canadien. En travaillant avec nos collègues de Canadien, nous avons découvert de nombreuses synergies et élaboré un plan d'ensemble pour l'intégration. Tout va également pour le mieux du côté de nos engagements.

À titre d'exemple, j'ai le plaisir d'annoncer au comité que 170 nouveaux postes de comptabilité seront créés à Winnipeg, principalement grâce au rapatriement des tâches de comptabilité qu'effectuait AMR Corp. aux États-Unis.

Le 2 avril, nous avons mis en oeuvre avec succès un horaire d'été intégré offrant aux consommateurs canadiens 32 nouvelles liaisons, 12 nouvelles destinations et plus de 2 000 vols quotidiens.

L'horaire revêt une signification particulière. Il montre qu'Air Canada et Canadien peuvent travailler ensemble et fournir des services et des produits améliorés aux collectivités canadiennes. Les premiers signes de l'impact de l'horaire sont particulièrement positifs du côté de Canadien où les coefficients d'occupation et les réservations anticipées augmentent. L'horaire d'été est un catalyseur pour accroître la rentabilité des deux transporteurs.

Voilà qui laisse présager une industrie canadienne du transport aérien stable et rentable, plutôt qu'un perpétuel problème pour le gouvernement et un fardeau potentiel pour les contribuables canadiens. Comme le savent les membres du comité, cette restructuration s'effectue sans le moindre recours à l'argent des contribuables.

• 1035

Les paramètres du processus d'intégration continuent d'être guidés par les engagements fermes que nous avons pris, et auxquels nous demeurons fidèles, au moment où nous bâtissons un transporteur puissant au service des Canadiens.

Lorsque je me suis présenté pour la première fois devant le comité, la moitié des questions posées portaient sur l'engagement d'Air Canada envers les employés, les collectivités et les consommateurs. Nous respectons chacun de ces engagements. Vous l'aurez remarqué, j'espère, les consommateurs canadiens continuent de bénéficier des soldes de places. Nous avons en effet lancé deux soldes de places à l'échelle du réseau durant le premier trimestre de l'année en cours.

Tous ces engagements, de même que ceux contractés auprès du commissaire à la concurrence, sont tenus et font partie intégrante des prochaines étapes de notre plan d'intégration.

Ici, monsieur le président, je veux vous dire à quel point ces questions me touchent. J'ai à coeur de réussir cette fusion. Je suis conscient du rôle important que joueront les parlementaires dans le présent dialogue tout au long de la période où Air Canada se transformera en un transporteur plus grand. Je tiens tout cela à coeur pour nos employés et nos clients. Chaque collectivité que nous desservons me tient à coeur, tout comme l'énorme héritage de confiance qui lie Air Canada à son glorieux passé de compagnie nationale canadienne. Nous sommes en train d'écrire un nouveau chapitre de l'histoire et je veux que l'avenir témoigne de notre profond engagement en ce sens.

Je voudrais maintenant aborder certaines questions qui ont été soulevées par les témoins et les membres du comité, particulièrement en ce qui a trait au niveau des services offerts aux consommateurs et à la desserte des collectivités. Air Canada a également reçu des commentaires et a été informée de sujets de préoccupation parmi les clients et les collectivités à l'égard de choses qu'elle fait—ou qu'elle ne fait pas. Nous travaillons assidûment à résoudre ces problèmes.

Au moment où nous entreprenons la création d'un des plus grands transporteurs du monde, les intérêts des Canadiens au Canada sont pour nous une priorité. Lorsque nous avons mis en oeuvre notre nouvel horaire, certaines collectivités se sont plaintes du manque de capacité ou des réductions de service. Certains clients, eux, se sont plaints des niveaux de service et de démêlés avec les programmes de fidélisation. Nous prenons note de toutes ces remarques et nous apportons déjà des changements.

Nous allouons davantage de places et de ressources pour répondre à la demande accrue en matière de primes-voyages. À Calgary, nous avons réagi aux critiques en remaniant les horaires et en ajoutant des sièges. Au Nouveau-Brunswick, nous avons également prêté une oreille attentive aux préoccupations des collectivités et nous avons accru la capacité.

Je suis certain que nous apporterons d'autres changements en fonction des commentaires des clients et des informations recueillies au cours de vos audiences. Nous ne faisons peut-être pas toujours exactement ce qu'il faut, mais je vous assure que nous travaillons sans relâche pour y parvenir.

Permettez-moi d'ajouter ici que nous allons consacrer beaucoup de temps et d'attention à des questions de ce genre. Nous savons que les clients sont exposés à de profonds changements pendant qu'ils essaient de s'adapter au nouveau monde d'Air Canada. De même, nous savons que certaines collectivités voudraient revenir à l'époque où il y avait un excès de capacité. Bien que cela soit impossible, nous devons continuer d'expliquer les faits tels qu'ils sont, en prenant soin de le faire toujours mieux et plus ouvertement. Nous devons expliquer aux clients les changements qui sont apportés à leur programme de fidélisation. Enfin, nous devons montrer à nos clients que nous travaillons dur pour bâtir un nouveau transporteur aérien et, pendant que nous nous attachons à cette tâche, nous avons besoin de leur patience, de leur compréhension et de leur soutien.

À mesure que progressera l'intégration, nous nous attendons à devoir surmonter d'autres obstacles au cours des prochains mois. Comme je l'ai déjà dit, c'est inévitable lorsqu'on entreprend une tâche de cette envergure. Nous savons que nous nous engageons dans un chemin semé d'embûches, mais nous sommes déterminés à atteindre notre but.

Parlons maintenant de la législation. Je ne puis dire que le projet de loi C-26 me satisfait entièrement. Nous comprenons l'importance de la législation et nous voulons collaborer avec vous pour établir une politique et une infrastructure équilibrées et maniables; toutefois, nous sommes d'avis que certains changements aideraient à atteindre l'équilibre recherché.

Les réserves que nous avons à l'égard du projet de loi C-26 ne concernent ni sa finalité, ni ses objectifs, mais bien les nouveaux processus et les mécanismes de réglementation coûteux et compliqués qui risquent d'en découler.

Si la loi va trop loin sur le plan de la reréglementation et de l'administration, elle pourrait entraîner l'opposé de la réaction désirée. La reréglementation pourrait contribuer à diminuer la concurrence sur le marché, les nouveaux produits et services ainsi que la croissance économique auxquels les autorités aéroportuaires, les collectivités et les gouvernements s'attendent. La reréglementation de l'industrie serait en outre un énorme pas en arrière qui n'irait pas de pair avec les initiatives réussies du Canada en matière de libéralisation du marché et de libre-échange.

• 1040

À Air Canada, nous considérons l'immense réussite de l'accord de libéralisation des services aériens entre le Canada et les États-Unis comme un modèle à suivre pour créer des emplois, des occasions d'affaires et des avantages économiques. Nous croyons fermement qu'il est possible de générer des bénéfices semblables pour le Canada et les Canadiens en encourageant la croissance dans d'autres marchés internationaux. Il serait vraiment regrettable que les possibilités inhérentes à ce nouveau transporteur aérien soient anéanties avant que nous ayons eu la chance de les exploiter.

À mesure qu'avance l'année 2000, nous nous attachons résolument à faire de l'intégration un processus sérieux et adaptable, qui se solde par une réussite. C'est pour cette raison que nous déposons aujourd'hui auprès du comité un dossier contenant nos recommandations et nos suggestions à l'égard des changements à apporter au projet de loi. Nous sommes heureux d'avoir pu partager avec vous notre point de vue sur le processus d'intégration et nous répondrons avec plaisir aux questions et préoccupations que vous pourriez avoir.

Nous sommes entièrement conscients de l'ampleur des responsabilités et des possibilités qui nous ont été présentées. Nous agirons de manière responsable et nous ne laisserons pas tomber le Canada. Je vous en donne ma parole. Merci.

Le président: Je vous remercie, monsieur Milton, pour l'exposé que vous venez de faire au comité permanent.

Chers collègues, je voudrais simplement vous rappeler que votre temps de parole à chacun est limité à cinq minutes. Si nous respectons ce rythme, nous pourrons avoir plus d'un seul tour de questions. Par conséquent, plus vous serez longs, moins votre collègue aura de temps pour ses propres questions.

Val Meredith, vous avez la parole.

Mme Val Meredith: Je voudrais vous souhaiter la bienvenue au comité en vous disant que je suis désolée de n'avoir que cinq minutes. Je vais rapidement essayer de faire le tour des problèmes que je perçois.

Vous avez dit faire confiance à un marché libéralisé, vous voulez par ailleurs que le marché reste déréglementé et vous aimez également l'actuel accord de libéralisation des services aériens entre le Canada et les États-Unis qui a été une réussite. Pouvez- vous me donner une bonne raison pour laquelle le gouvernement ne devrait pas donner suite à certaines des recommandations formulées par le commissaire à la concurrence et ouvrir totalement le marché à vos concurrents en encourageant tout le monde, même les compagnies étrangères, à accroître la concurrence?

M. Robert Milton: À mon sens, à la toute fin de l'an dernier, nous avons entamé des négociations importantes et ardues à la fois avec le Bureau de la concurrence afin de déterminer lequel serait pour nous, pendant la période de transition, le meilleur cadre de travail possible. Nous sommes arrivés à un accord, et cet accord nous le respectons intégralement selon les paramètres arrêtés par le Bureau de la concurrence.

Mme Val Meredith: Je pense que je vous avais plutôt demandé si vous pouviez me donner une seule bonne raison pour laquelle le gouvernement ne devrait pas ouvrir ce secteur aux intervenants étrangers afin que les Canadiens puissent bénéficier d'une certaine concurrence dans le domaine du transport aérien. Pourriez-vous me donner une bonne raison de ne pas le faire?

M. Robert Milton: Comme vous le savez, nous avons déjà préconisé une augmentation du nombre d'actions de transporteurs canadiens pouvant appartenir à des intérêts étrangers, jusqu'à hauteur de 49 p. 100. Je ne suis donc pas contre.

Mme Val Meredith: Vous ne dites donc pas que le gouvernement ne devrait pas le faire.

M. Robert Milton: Notre position est parfaitement connue.

Mme Val Meredith: D'accord, je vous remercie.

Je me souviens du moment où vous aviez comparu devant nous à l'époque où il y avait deux protagonistes qui s'affrontaient dans l'éventualité d'une fusion d'Air Canada et de Canadien. Je me souviens très précisément de ce que vous aviez dit à propos des conséquences possibles d'une fusion pour les voyageurs canadiens, des conséquences possibles d'une telle fusion pour les employés dans le secteur canadien du transport aérien. Vous nous aviez lancé un avertissement en nous disant qu'il y avait sur la scène un fier- à-bras du nom de Don Carty, avec American Airlines, qui risquait fort bien de détruire toute l'industrie canadienne du transport aérien sous sa forme actuelle si Onex finissait par avoir gain de cause.

Il semble maintenant, quatre ou six mois plus tard, qu'il y a bien un fier-à-bras sur la scène, mais que ce n'est pas Don Carty avec American Airlines, mais plutôt Robert Milton avec Air Canada. Tout semble montrer que vous faites tout ce que vous pouvez au-delà de la loi—puisque la loi n'est pas en vigueur—pour limiter la concurrence, pour faire en sorte que les transporteurs canadiens qui risqueraient de s'opposer à Air Canada soient, sinon interdits, du moins vivement encouragés à n'en rien faire.

Ce que vous ne parvenez pas à faire passer par la grande porte, vous essayez peut-être de le faire passer par la petite porte grâce à votre pouvoir d'achat et à votre situation dominante auprès des administrations aéroportuaires. Comme vous contrôlez le marché, ces administrations sont moins bien disposées à l'égard de vos concurrents.

• 1045

Pouvez-vous expliquer à nos compatriotes pourquoi, à votre avis, American Airlines et la proposition d'Onex auraient eu des effets pires encore pour les voyageurs canadiens, et pourquoi c'était bien eux et non pas vous les requins dans la mare?

M. Robert Milton: Mais certainement. Pour revenir à la période en question, je parlais à l'époque surtout du fait qu'il s'agissait manifestement d'une évolution obligée de l'industrie canadienne du transport aérien qui la mettrait entre les mains d'une seule compagnie américaine—American Airlines. C'était donc là un élément spécifique. Mais par ailleurs, comme je le disais alors, étant donné que le réseau qui en aurait résulté aurait été aligné sur American Airlines, il y aurait eu un rétrécissement très net de l'activité d'ensemble pour l'industrie canadienne du transport aérien et «Air Canada nouvelle version» qui en aurait été le produit.

Je pense qu'il faut absolument garder à l'esprit que l'horaire que nous venons de mettre en oeuvre est caractérisé par une croissance de 2 p. 100. Ce n'est donc nullement une industrie ou un marché en rétrécissement, mais bien le contraire, un marché qui affiche une croissance.

Mme Val Meredith: Monsieur Milton, je prends l'avion pour venir de Vancouver et je peux vous dire que sur la liaison Vancouver—Ottawa, il n'y a aucune croissance, bien au contraire. Je le sais parce que les gens d'un peu partout en Colombie- Britannique et au Canada m'ont dit qu'ils n'avaient constaté aucune croissance, bien au contraire. Il y a des transporteurs qui n'existent plus. Il y a des avions qui ne volent plus. Les files d'attente s'allongent. Les surréservations se multiplient. Les gens pensent avoir un siège, ils se pointent à la porte d'embarquement et ils apprennent que ce même siège a déjà été attribué deux ou trois fois.

Les Canadiens ne constatent donc aucune croissance, au contraire ils constatent une réduction des services, comme vous en aviez brandi la menace au moment ou Don Carty et American Airlines étaient dans l'arène.

M. Robert Milton: Ne vous déplaise, et les faits le prouvent, la capacité globale d'Air Canada et de Canadien confondues augmente. Et dans le cas d'espèce que vous citez, vous êtes également dans l'erreur dans la mesure où il y a actuellement trois vols quotidiens Ottawa—Vancouver, dont l'un se fait maintenant sur un appareil 767 qui offre 191 sièges, ce qui ne s'était jamais vu auparavant. La situation réelle est donc extrêmement mal comprise.

Je sais que le changement est difficile à accepter pour tout le monde. Et il s'agit en l'occurrence d'un changement extrêmement profond qui survient après que ces deux compagnies aériennes aient existé pendant 60 ans sous une forme qui, depuis au moins 40 ans, aurait exigé une intégration selon ce que les gens en disaient.

Je pense donc que les exemples et ce que nous présentons ici... Il serait plus utile de s'en tenir aux faits, et c'est ce que je me propose avec plaisir de faire.

Mme Val Meredith: Si vous voulez parler de faits, monsieur Milton, le fait est que les gens qui voyagent se scindent en deux catégories. Lorsque je prends l'avion à Vancouver pour aller à Ottawa sans escale, je ne peux pas choisir ma compagnie. Mais je constate que lorsque je veux profiter d'un surclassement ou lorsqu'un client veut utiliser ses primes-voyages, il y a effectivement deux catégories. Si vous appartenez au système d'Air Canada et si c'est sur Air Canada que vous voyagez, la façon avec laquelle on vous traite est tout à fait différente de la façon avec laquelle on traite avec un client de Canadien, surtout si celui-ci veut par exemple utiliser ses primes-voyages.

Il y a deux poids deux mesures. Je ne peux pas choisir de voyager sur la compagnie que j'aurais préférée, et je n'aime pas, et je ne suis pas la seule, être traitée comme un voyageur de deuxième classe.

M. Robert Milton: Je suis désolé que vous ayez cette impression, mais je peux vous assurer que du point de vue commercial, du point de vue des procédures que nous utilisons, ce favoritisme n'existe pas.

Mais ce que je tiens à affirmer très clairement—et je l'ai déjà dit aux médias—c'est que nous nous débattons avec d'importants problèmes de transition, notamment des problèmes d'interface informatique entre le réseau informatique d'Air Canada et celui de Canadien, qui s'inspirent du système américain, et que nous faisons tout notre possible pour résoudre ces problèmes le plus rapidement possible et passer de procédures manuelles à des procédures fortement informatisées.

Je vous le répète, je suis incroyablement fier de ce que nos collaborateurs ont fait et accomplissent encore face à cette tâche colossale. Plus de 2 000 vols par jour ont été modifiés. Effectivement, il y a eu certaines mésaventures, et nous nous en excusons, mais si vous songez qu'Air Canada et Canadien transportent en tout de 32 à 35 millions de passagers cette année, avec environ 5 transactions en moyenne par individu, vous comprenez bien que sur 160 millions de contacts avec les clients il y aura forcément quelques plaintes. Je vous demande de m'en excuser à l'avance.

• 1050

Il est aussi pertinent de souligner que certaines des informations qui ont monté en épingle cette idée qu'il y avait des problèmes sont des informations erronées publiées par l'Office des transports du Canada, qui avait dit qu'il y avait eu une augmentation du nombre de plaintes et s'en est maintenant excusée. En fait, l'office a reçu moins de plaintes au cours du premier trimestre de cette année qu'au cours de l'année précédente.

Nos collaborateurs font un travail fantastique, mais nous savons bien qu'il y a des limites. Nous savons que certains passagers ne peuvent pas embarquer sur certains vols durant une période où nous redressons la barre de la compagnie Canadien qui perdait auparavant 2 millions de dollars par jour.

Permettez-moi de vous rappeler l'époque où vous me cribliez de questions l'année dernière pour savoir si je voulais sincèrement protéger les emplois des employés de Canadien. J'étais sincère. Les Lignes aériennes Canadien se sont trouvées à court d'argent l'an dernier. Si la compagnie avait fait faillite, vous seriez confrontés à une calamité infiniment plus grande que les petits problèmes que nous essayons de rectifier et que nous rectifions le plus vite possible. Nous avons investi beaucoup d'argent, nous avons redonné vie aux employés de cette compagnie. Ce sont des gens incroyablement compétents et dévoués, et nous allons les faire gagner.

Le président: Merci, monsieur Milton.

Monsieur Calder.

M. Murray Calder (Dufferin—Peel—Wellington—Grey, Lib.): Merci beaucoup, monsieur le président.

Monsieur Milton, vous devez bien comprendre que nous sommes ici pour faire toute la lumière sur ce problème et trouver la bonne solution. Dans ma circonscription, j'ai quelque 6 000 employés d'Air Canada et de Canadien qui sont inquiets eux aussi. Nous constatons qu'Air Canada et Canadien sont sur le point de fusionner, et j'aimerais que vous me disiez si cela va se passer d'ici deux ou trois ans. Nous avons prévu ici des dispositions concernant les déplacements ou les licenciements d'employés, avec un délai de deux ans. S'il faut plus de deux ans pour réaliser cette fusion, je m'inquiète pour l'avenir de ces employés, car je pense que la fusion va se faire, et vous y avez déjà fait allusion.

Ce que je vous demande donc, c'est ce que vous allez faire si cette fusion prend plus de deux ans. Comment allez-vous fusionner les listes d'ancienneté? Allez-vous vous servir des syndicats? Allez-vous faire appel à la Commission des relations industrielles ou à d'autres organismes? Voilà les deux questions qui me viennent spontanément à l'esprit.

M. Robert Milton: Personnellement, ce que je vois, c'est une perspective de croissance colossale non seulement pour Air Canada et Canadien et leurs employés, mais aussi pour les choix que pourront faire nos clients et pour notre pays—je crois que ce sera la première, et je prévois que ce sera la seule occasion que le Canada aura d'implanter avec succès à l'échelle mondiale une compagnie aérienne efficace et puissante. Donc, si nous faisons les choses correctement, nous allons nous développer.

Comme je viens de vous le dire, nous ne travaillons pas dans une optique de rétrécissement. En général, quand on regroupe deux entreprises quelconques, on essaie de réduire les coûts, de réduire les effectifs, de réduire l'infrastructure. Mais nous avons contribué à développer ces compagnies aériennes. Nous engageons des pilotes, nous engageons des employés un peu partout. Si nous faisons les choses correctement, nous avons là une perspective extraordinaire de succès pour le Canada. Voilà ce que nous essayons de faire.

Pour ce qui est de la question de l'ancienneté, il y a des gens dans les deux compagnies qui revendiquent à grands cris des positions qui me paraissent extrêmes. Il y a des gens à Air Canada qui estiment que tous les employés de Canadien devraient passer derrière eux. J'estime que ce n'est pas juste. Il y a aussi des gens chez Canadien qui estiment qu'on devrait s'en tenir à la date de recrutement dans tous les cas. Je ne pense pas non plus que ce soit juste.

En fin de compte, ce n'est pas moi qui prendrai la décision, ce sera un organisme officiel qui pourra superviser tout l'exercice de détermination des critères d'intégration en vertu de l'ancienneté. À mon avis, si les choses se passent correctement, on ne se contentera pas de prendre des engagements pour deux ans, ce qui serait une pratique commerciale rétrograde, mais on prendra au contraire un engagement à long terme qui garantira plus d'emplois, plus de sécurité et de meilleurs revenus que les employés de ces compagnies n'auraient jamais pu en avoir si les deux compagnies avaient continué à se massacrer l'une l'autre.

M. Murray Calder: Quand nous avons discuté de cela l'an dernier, nous nous demandions si c'était 2 500 ou 5 000 emplois qui allaient disparaître. Vous me dites que la question ne se pose plus, que nous n'avons plus à nous demander si ce sont 2 500 ou 5 000 emplois qui vont disparaître, que vous allez au contraire avoir encore plus d'employés? C'est cela que vous êtes en train de me dire?

• 1055

M. Robert Milton: Absolument. Nous avons bien l'intention d'appliquer le programme de paiements forfaitaires que nous avons proposé. Si certains employés préfèrent bénéficier d'un paiement forfaitaire pour prendre une retraite anticipée, c'est parfait. Ils sont gagnants, la compagnie est heureuse, et nous allons rajeunir les effectifs.

Ce que nous envisageons maintenant, c'est donc quelque chose de très différent de ce que nous avions au départ. Souvenez-vous, l'an dernier, c'était United contre American. Ce que je disais, c'est que United nous proposait quelque chose de beaucoup plus attrayant sur le plan de la protection des emplois, de la croissance et de la stabilité de notre industrie aéronautique. Finalement, nous avons abouti à une liaison non seulement avec United, mais aussi avec American Airlines. Par conséquent, le potentiel de croissance, les perspectives de stabilité que nous avons sont bien plus grands encore que ce que j'imaginais à la fin de l'année dernière.

En plus, au cours de toute cette négociation, de cet exercice de corde raide auquel nous nous sommes livrés à la fin de l'année dernière lorsque nous étions en négociation avec ces deux énormes compagnies américaines, nous avons réussi à nous ménager aussi la possibilité, si nous le voulons, d'avoir une entente avec Delta Airlines.

Nous avons donc un potentiel de croissance phénoménal. Je collaborerai avec nos employés. Je vais essayer de leur faire comprendre que notre avenir, ce n'est pas le monde d'aujourd'hui avec une croissance de 2 p. 100. Si vous comparez l'industrie canadienne et l'industrie américaine, vous voyez bien que les compagnies américaines desservent actuellement 80 marchés dans le monde, alors que ni Air Canada, ni Canadien ne peuvent le faire efficacement à l'heure actuelle. Si nous pouvons pénétrer ces marchés, ne serait-ce que la moitié de ces marchés, cela veut dire que nous avons potentiellement 5 000 employés de plus.

Nous avons là une perspective de réussite phénoménale pour le Canada, à condition de ne pas tout gâcher, de ne pas tout entraver, de ne pas sombrer dans la médiocrité et nous engluer dans la paperasserie et l'indifférence.

M. Murray Calder: Il me reste un peu de temps?

Le président: Trente secondes.

M. Murray Calder: Parfait.

Hier soir, nous avons entendu les agents de voyages. Pouvez- vous nous parler de la négociation de la commission des agents de voyages. Ce qu'ils nous ont dit aussi, c'est que leur commission était facturée séparément. En gros, le client achète son billet, et ensuite il doit rédiger un autre chèque correspondant au montant de la commission de l'agent de voyages, ce qui n'est pas très pratique, c'est le moins qu'on puisse dire, quand on est homme d'affaires. Vous avez des frais d'aéroport qui sont inclus dans le billet. Pourquoi la commission des agents de voyages ne serait-elle pas incluse aussi dans le billet, de manière à ce qu'il y ait une seule facture?

M. Robert Milton: Vous voulez dire qu'il faudrait une case où figureraient les frais prélevés par les agents de voyages?

M. Murray Calder: Oui.

M. Robert Milton: C'est une question qui relève de l'IATA: les billets sont conçus suivant un modèle universel.

Lise, vous avez quelque chose à ajouter? Vous connaissez bien le sujet.

Mme Lise Fournel (vice-présidente générale, Affaires commerciales, Air Canada): C'est effectivement une question qui relève de l'IATA, comme l'a dit Robert. Il n'y a déjà plus de place pour ajouter quelque chose sur les billets. Nous sommes en discussion avec l'IATA, mais nous n'avons toujours pas trouvé de solution.

M. Murray Calder: Donc vous essayez de trouver une solution à ce problème?

Mme Lise Fournel: Ce n'est pas pour tout de suite, je peux vous le garantir.

M. Murray Calder: Pourtant, il me semble qu'il suffirait d'ajouter une petite case sur le billet où l'on inscrirait les frais de l'agence de voyages. Cela ne doit pas être si difficile que cela.

Mme Lise Fournel: Les choses sont beaucoup plus complexes en fait, et il faut tout d'abord obtenir l'accord de tous les transporteurs. Il ne suffit pas qu'Air Canada le demande; il faut que tous les transporteurs soient d'accord, et c'est très compliqué.

Le président: Merci, monsieur Calder.

M. Robert Milton: Il faudrait que les Nations Unies soient d'accord pour modifier la présentation des billets.

Le président: Merci, monsieur Milton.

Monsieur Guimond.

[Français]

M. Michel Guimond: Monsieur Milton, je débuterai en vous souhaitant bonne chance dans la tâche gigantesque, sinon titanesque dans laquelle vous êtes plongé depuis quatre mois. Je vous souhaite bonne chance au niveau de sa réalisation finale.

Je voudrais aussi dire quelque chose pour votre gouverne et celle de certains collègues qui sont autour de la table. Depuis trois semaines, on a entendu passablement de témoins qui nous ont raconté des histoires d'horreur au sujet de la gestion depuis la fusion d'Air Canada et de Canadien. Comme je n'aurais pas assez de cinq minutes pour vous donner tous les exemples que je veux vous donner, je vais vous en donner seulement quelques-uns.

• 1100

Certains de mes collègues m'ont dit: «Tu avais appuyé Air Canada au lieu d'appuyer Onex. Vis avec ta décision.» Je veux préciser que si je dénonçais le projet d'Onex, c'est que je le considérais illégal, ce qui a été confirmé par la Cour supérieure du Québec. Je n'étais pas nécessairement contre Onex, mais je considérais illégal son projet d'acquisition.

Les choses étant clarifiées, je veux vous dire, monsieur Milton, que ma perception à l'heure actuelle, à la lumière de tous les témoignages d'horreur qu'on a entendus, c'est qu'Air Canada se sert de Canadien International et des filiales d'Air Canada, propriétés à 100 p. 100 d'Air Canada, pour faire indirectement ce qu'elle ne peut pas faire directement. Je pourrais vous donner beaucoup d'exemples de cela. Bien sûr, comme président et chef de la direction, vous ne pouvez pas être au fait de chacun des détails de chacune des problématiques, mais je vais vous donner des exemples. Je veux aussi vous dire que je vais déposer des amendements. J'espère que mes collègues autour de la table les appuieront, parce que les engagements que vous avez pris le 21 décembre devant le commissaire à la concurrence doivent être étendus aux filiales d'Air Canada. Je peux vous dire que j'ai reçu des plaintes sérieuses à l'endroit d'Air Nova. Vous pourrez me dire que nous avons rencontré M. Randell lundi et que M. Randell en a pris note, mais vous êtes le dirigeant numéro un et c'est à vous d'apporter les correctifs nécessaires. On va vous aider à apporter les correctifs nécessaires en modifiant la loi de manière à ce que vos filiales, y compris Canadien International, ne se comportent pas de façon à tuer la concurrence.

Vous savez que depuis l'acquisition, de nombreux transporteurs régionaux de l'Ouest qui avaient des ententes avec Canadien ont cessé leurs opérations. Si rien ne se fait, dans l'Est, d'autres transporteurs régionaux devront cesser leurs opérations. Donc, on va éliminer la concurrence. Je pourrais vous donner l'exemple d'Air Alma, qui avait un contrat depuis plus de 20 ans avec Canadien et qui s'est fait dire qu'à partir du 31 mai, il n'y aurait plus possibilité de renouveler ce contrat. Air Alma est la concurrence d'Air Nova au Saguenay—Lac-Saint-Jean. Je pourrais vous donner l'exemple de Régionnair, qui veut offrir les points grand voyageur sur la Côte-Nord et en Bas-Saint-Laurent—Gaspésie et qui se fait dire: «On vous donnera des nouvelles seulement au mois d'octobre, une fois que ce sera implanté.» Monsieur Milton, Air Alma va faire faillite avant cela. Ce sont des délais déraisonnables. Monsieur Milton, je pourrais donner l'exemple d'Air Nova qui, à l'aéroport de Baie-Comeau, a utilisé presque tous les comptoirs excédentaires, qui étaient auparavant à InterCanadien, pour ne laisser à Régionnair que des miettes. Je pourrais donner l'exemple d'Air Transat à Whitehorse. Je pourrais donner l'exemple de Canada 3000, qui ne peut plus faire former son personnel au Canada et qui doit l'envoyer aux États-Unis.

[Traduction]

Le président: Michel.

[Français]

M. Michel Guimond: Je ne veux pas que vous me répondiez dans les grands détails. Je termine en vous posant ma question. Serait-il possible qu'Air Canada et ses filiales ainsi que Canadien International prennent des engagements en vue d'assurer une réelle concurrence dans les régions? Vous avez terminé votre présentation en disant: «Nous agirons de manière responsable et nous ne laisserons pas tomber le Canada.» J'espère qu'on doit comprendre que vous ne laisserez pas tomber les résidants des régions éloignées du Canada et les petits transporteurs partout au Canada.

[Traduction]

M. Robert Milton: Merci.

Vous avez parlé des exemples qui ont été cités, et vous dites que je ne suis peut-être pas au courant de l'actualité... Je serais tout à fait d'accord pour discuter avec vous d'un exemple de l'actualité et de vous expliquer ce que nous faisons et pourquoi. Si je ne peux pas le faire, j'ai auprès de moi des personnes qui en sont tout à fait capables.

• 1105

On dirait que c'est dans un autre millénaire qu'il y avait la question de savoir si on allait protéger les employés et les Lignes aériennes Canadien etc., car vous n'avez pas l'air de nous reconnaître le mérite, dans le cas d'Air Nova, d'avoir... InterCanadien a coulé, mais quels étaient les problèmes? Air Canada et ses filiales sont intervenues, nous avons protégé les intérêts du public, il n'y a pas véritablement eu d'interruption du service, et nous avons réagi au problème une fois de plus comme nous le faisons toujours dans ce genre de situations. Il y avait un risque de crise. Nous avons réagi exactement comme nous l'avons fait face aux problèmes des Lignes aériennes Canadien, et ce n'est pas nous qui risquions de provoquer une crise mais, à mon avis, le gouvernement, qui n'a pas cessé d'envenimer la situation, pas seulement ces dernières années, mais depuis de nombreuses années, en insistant pour perpétuer un duopole qui n'était pas viable.

J'estime donc que nous essayons en fait de rectifier des problèmes résultant de l'intervention malencontreuse du gouvernement sur le marché pendant de très nombreuses années. Nous nous attaquons à ces problèmes, et les cas d'Air Nova et d'InterCanadien, ce que nous avons fait au Québec, n'en sont qu'un exemple de plus.

À propos du certain nombre de petits transporteurs qui ne sont plus affiliés à Air Canada ou à Canadien, oui, c'est vrai, mais selon moi, et j'ose croire que vous serez d'accord, cela se défend tout à fait du point de vue logique lorsque vous considérez qu'Air Canada et Canadien avaient des liens avec deux entreprises différentes et étaient deux organisations de marketing et compagnies aériennes distinctes, de sorte que lorsque le système a été intégré, il y a évidemment eu capacité excédentaire. Cela signifie que les transporteurs affiliés à l'une ou à l'autre sans lien de propriété ont dû faire un choix.

Dans ces cas-là, je peux vous dire que Joe Randell est allé voir Alberta Citylink et CMA, et nous avons offert de l'aide aux employés pour qu'ils viennent s'installer dans l'est du pays, où nous avions besoin d'une plus grande capacité. Nous avons essayé de le faire avec le plus de sensibilité possible. Évidemment, on ne nous en reconnaît aucun mérite. On ne reconnaît pas nos efforts quand nous essayons de traiter les gens avec compassion. Mais encore une fois, tel est le lot d'Air Canada.

Chaque fois qu'il y a une crise dans le monde, que ce soit un glissement de terrain en Amérique centrale ou un séisme en Turquie ou au Japon, nous sommes les premiers sur place. Nous offrons nos avions. Nous ne recevons rien du gouvernement. Nous envoyons des secours. L'atmosphère est telle aujourd'hui qu'on pourrait envoyer un avion de secours là où il y a eu un séisme et des gens comme ceux qui sont autour de la table se moqueraient de nous.

Des voix: Oh, oh!

M. Robert Milton: Avec le temps, des compagnies comme Régionnair seront invitées à participer à notre programme Grands voyageurs, comme nous nous y sommes engagés auprès du Bureau de la concurrence. Mais comme je l'ai dit, nos systèmes TI subissent d'énormes pressions. L'arriéré de ces systèmes touche toutes sortes de choses. Cela signifie qu'incorporer une nouvelle compagnie comme Régionnair au programme des Grands voyageurs serait très difficile actuellement, mais nous l'avons promis. Nous allons l'incorporer et nous serons heureux de le faire.

En ce qui concerne les aéroports, il est impossible pour moi en tant que chef de la direction d'Air Canada d'être responsable de la hausse ou de la baisse d'activité aux aéroports dans le pays. L'activité monte et descend. Je veux bien être responsable de ce que je peux faire pour aboutir à des solutions heureuses, mais être responsable de tous les aéroports du pays, à mon avis, ce n'est pas raisonnable.

À propos de votre dernière question, concernant l'engagement d'Air Canada mais aussi de toutes ces filiales, y compris les Lignes aériennes Canadien, tout à fait, cela fait partie de nos engagements. Cela vaut pour Air Canada dans son entier.

Le président: Merci, monsieur Milton.

Monsieur Fontana.

M. Joe Fontana: Merci, monsieur le président.

Je vous souhaite la bienvenue à nouveau, monsieur Milton. J'ai écouté votre discours et j'imaginais un chevalier en blanc, des violons en fond sonore et l'hymne national canadien et je vous entendais dire combien vous n'êtes pas appréciés pour toutes vos bonnes oeuvres.

Je veux revenir sur votre allocution.

Le président: Vous vous appelez Joe et vous êtes canadien, on le saura.

Des voix: Oh, oh!

• 1110

M. Joe Fontana: En ce qui concerne la compassion et l'attachement, monsieur Milton, lorsque vous avez comparu devant le comité le 27 octobre, vous avez dit que vous alliez écouter et penser avant d'agir. Vous avez dit que vous teniez tout à fait à redynamiser et à rebâtir les Lignes aériennes Canadien et que le plan d'Air Canada respecte et surpasse les cinq principes énoncés par le ministre concernant le choix et les points de Grands voyageurs... Vous avez dit que votre plan garantit un service régional à toutes les localités desservies par l'une ou l'autre des grandes lignes aériennes et qu'il favorise la concurrence dans l'industrie. Les promesses s'empilent les unes sur les autres comme ce n'est pas possible, même aujourd'hui.

J'aimerais vous poser ces questions. Lorsque nous avons commencé le processus, vous avez dit que vous alliez traiter les Canadiens et en particulier les clients de Canadien avec ménagement. D'après ce que nous disent les clients, les maires, les citoyens et les concurrents, monsieur Milton, désolé, mais la réalité ne correspond pas à votre perception ou à votre description. Vos prix et vos coûts augmentent. Les consommateurs doivent payer plus. Le prix du transport des marchandises et des voyageurs monte.

Vous avez littéralement jeté dehors un avion de Canada 3000 avant que des réparations convenables puissent y être apportées dans votre hangar. Vous avez décidé de mettre fin aux ententes avec les compagnies tierces sur préavis de 30 jours. Nous avons appris qu'après que vous ayez réduit votre capacité de Moncton à Toronto, il se trouve que du moment où WestJet a fait son apparition, vous avez augmenté la capacité et abaissé vos coûts. Vous ne desserviez même pas Stephenville. J'étais heureux que vous le fassiez avant. Mais dès que vous avez eu un concurrent, vous avez décidé d'ajouter de la capacité pour faire disparaître un concurrent tout petit.

Nous avons aussi su que vous avez fait un discours magnifique à la plupart de vos employés dans un hangar de Vancouver, pointé du doigt l'avion de votre concurrent et promis que ses appareils n'auraient plus le droit d'entrer dans le hangar.

Monsieur Milton, ça ne ressemble pas à une compagnie pleine de compassion qui tient vraiment à ses clients.

On vous a octroyé un privilège dont les autres entreprises et industries du pays ne peuvent que rêver: 80 p. 100 du marché intérieur et 75 p. 100 du marché étranger. Au cours des trois ou quatre derniers mois, comme je l'ai déjà dit, vous nous avez montré ce qu'un monopole ne devrait pas être.

Je voudrais votre réponse à propos des prix et de vos pratiques anticoncurrentielles des trois derniers mois, y compris vos pratiques d'éviction et vos efforts pour évincer certains concurrents, comme le fait de faire payer British Airways parce qu'elle n'est plus affiliée à Canadien ou de gonfler ou afficher des prix qui vont l'évincer du marché dans les faits, pour certains voyageurs.

Monsieur Milton, vous auriez pu profiter de cette période pour écouter et pour faire les choses comme il se doit. Ce qui me tient à coeur, moi, ce sont les clients et les citoyens, à qui vous avez fait des promesses.

Ma question a plusieurs volets, mais j'aimerais que vous répondiez à chacune des questions que j'ai soulevées. Ensuite, j'en aurai d'autres, si on me permet de continuer.

M. Robert Milton: J'ai pris des notes le plus vite possible sur tous ces points.

En ce qui concerne la question de prendre le temps qu'il faut pour faire les choses comme il faut, je pense qu'encore une fois il faut voir les choses en perspective. Encore pendant le premier trimestre de l'année, les Lignes aériennes Canadien perdaient essentiellement 2 millions de dollars par jour. Le gouvernement va- t-il nous donner un demi-milliard de dollars pour le temps que cela prendra.

M. Joe Fontana: Monsieur Milton...

Le président: Joe, écoutons le témoin.

M. Robert Milton: Nous faisions fasse à une crise. Canadien aurait cessé de voler à la fin de l'an dernier si nous n'y avions pas injecté des sommes considérables. Ç'aurait été la catastrophe: quantité de gens auraient perdu leur emploi à la veille de Noël et une compagnie aérienne aurait disparu.

Nous prenons le temps. Nous prenons des décisions sur des questions commerciales comme les horaires à l'aide de renseignements très détaillés et factuels, et non des anecdotes, et non en fonction de ce que nous pensons ou de ce qui nous arrive, mais comme une entreprise d'une valeur de 10 milliards de dollars qui traite avec plus de 30 millions de voyageurs par année.

Vous dites...

M. Joe Fontana: Monsieur Milton...

M. Robert Milton: Je réponds à vos questions.

M. Joe Fontana: Monsieur Milton, je veux des renseignements précis. Votre discours, je l'ai entendu. C'est du réchauffé que vous...

M. Robert Milton: Je suis sur le point de parler de British Airways.

• 1115

M. Joe Fontana: Non, je veux que vous déposiez ici vos prix en date du 27 octobre, lorsque vous avez fait toutes sortes de promesses et quand vous avez dit que vous alliez être juste à l'endroit du consommateur. Êtes-vous prêt à déposer tous vos horaires et tous vos prix ici pour que nous puissions les comparer à ce qu'ils sont aujourd'hui et à ce qu'ils seront le 1er juin. Je veux des renseignements précis.

M. Robert Milton: Tout à fait. Je pense que cela montre très bien que nous avons agi de façon responsable. Comme Paul Brotto l'a dit plus tôt, nous n'avons pas augmenté le prix de nos vols intérieurs cette année. Voilà les faits. Je sais que les frais peuvent être dérangeants dans certains cas, mais ce sont les faits.

Voici un autre fait. British Airways est de toute évidence un puissant concurrent à l'échelle mondiale. C'est une compagnie qui est plus grosse qu'Air Canada et Canadien réunies. Ces derniers mois, British Airways et ses partenaires de Oneworld ont eu l'occasion, s'ils l'avaient voulu, d'injecter des capitaux dans Les lignes aériennes Canadien pour que la compagnie reste en activité, et British Airways aurait pu garder ses liens avec le Canada. Elle a délibérément décidé de ne pas le faire. Quant à nous, nous avons décidé d'investir dans Canadien et de bâtir une compagnie puissante.

British Airways au Canada a accès aux principaux marchés du Canada et du Royaume-Uni grâce à ses liaisons: Vancouver, Toronto deux fois par jour, et Montréal. Elle a accès à 77 p. 100 du marché dominant entre les deux pays.

British Airways a cité des exemples ridicules qui ne correspondent même pas à son fonctionnement; par exemple, elle a parlé d'un tarif de 1 100 $ entre Toronto et Ottawa pour désigner la correspondance que doit faire un voyageur allant de Londres à Ottawa. En fait, dans ses systèmes de réservation automatisés, British Airways affiche un circuit Londres—Ottawa via Montréal où on vous met sur un autocar jusqu'à Ottawa. Le tarif le plus élevé d'Air Canada pour un vol entre Toronto et Ottawa est 389 $—classe affaires sans restriction. Si British Airways est assez sotte pour payer 1 100 $ sur un billet que nous vendons au plus cher 389 $, c'est son problème.

British Airways peut si elle le veut augmenter de façon spectaculaire dès demain son service au Canada. Elle peut exploiter deux fois plus de vols au Canada demain si elle le veut, parce que sur la plan bilatéral elle n'est assujettie à aucune restriction et c'est elle qui détient le plus grand nombre de créneaux à l'aéroport Heathrow de Londres. British Airways n'a donc qu'à prendre quelques-uns de ces créneaux, de les déplacer et de les affecter à des vols vers le Canada.

Je vous prie de noter que le prédécesseur de Paul Brotto à Canadien, Kevin Benson, m'a dit que lorsque Canadien commençait à être en sérieuses difficultés à la fin de l'an dernier et que British Airways voulait acheter les créneaux de Canadien à Heathrow, Canadien a dû quitter Heathrow. La priorité de British Airways pour ces créneaux était de transférer son vol vers Sao Paulo au Brésil de l'aéroport Gatwick à l'aéroport de Heathrow.

Ce n'est pas le Canada qui les intéresse. Il est avantageux pour le Canada de ne pas avoir renoncé à des créneaux à l'aéroport où il est le plus difficile d'en obtenir au monde, celui de Heathrow à Londres.

Vous avez aussi lancé les chiffres de 80 p. 100 du marché intérieur et de 75 p. 100 du marché étranger. Nous n'avons pas 75 p. 100 du marché étranger. Pour moitié nous sommes un transporteur transfrontières et pour l'autre un transporteur étranger.

En ce qui concerne le marché intérieur, j'aimerais que vous vous rappeliez que ces chiffres représentent les recettes provenant des agences de voyages et réglées au moyen du système de règlement bancaire ici au Canada. L'activité totale des compagnies de vols nolisés n'y figure pas. Une partie des vols réguliers vendus par les systèmes de réservation informatisés et le système de règlement bancaire y figurent. Mais nous ne possédons pas le degré de concentration intérieure que l'on laisse entendre ici.

En ce qui concerne les marchés comme celui de Stephenville, non, ce n'était pas dans notre réseau. Nous avons aujourd'hui tous ces appareils de Canadien. Nous essayons de conserver des emplois et de maintenir l'activité économique. Voilà un marché que le réseau d'Air Canada ne dessert pas. Vous avez tous ces avions et vous voulez les employer à quelque chose. Nous nous sommes engagés à fournir le service aux marchés de façon constante. Nous avons commencé là. Il se trouve que quelqu'un d'autre a commencé là. Les deux dirigeants des deux compagnies aériennes se connaissent et ils ont trouvé un arrangement avec l'autre compagnie, Air Labrador, qui assure maintenant des liaisons dans notre système et cela nous convient.

En ce qui concerne la publicité sur la capacité à Moncton et tout ce qu'on a dit à propos de pratiques d'éviction... Comme nous savons qu'on nous tient à l'oeil, serait-il sensé pour nous de faire quoi que ce soit qui ressemblerait à des pratiques d'éviction? Cela faisait évidemment allusion à Moncton et à WestJet. WestJet est une excellente compagnie, rentable et agile qui fait d'excellentes choses. Si nous voulions lui nuire, pourquoi aurions-nous tant réduit notre capacité dans l'ouest du pays, ce qui va augmenter énormément sa rentabilité?

• 1120

Nous desservons Moncton depuis 60 ans. Nous avons maintenant fusionné deux lignes aériennes qui allaient toutes deux à Moncton. Lignes aériennes Canadien se rendaient à Moncton via Halifax, mais elles transportaient encore tous les jours des gens de Moncton à Halifax et à Toronto. Elles avaient 120 places. Année après année, nous avons ajouté un vol de plus au moyen d'un F-28. Nous avions un DC-9 qui contenait 91 sièges. Il y a maintenant un 737 de Canadien avec 100 sièges. Donc les deux DC-9 sont devenus deux 737 et un F-28, pour une augmentation de pas moins de 73 places par jour, ce qui est loin de valoir ce que WestJet offre dans un seul 737. Mais nous avons perdu toute la capacité qu'InterCanadien et Canadien avaient dans ce marché.

Lorsque nous comblons les exigences au niveau des capacités, nous ne faisons donc rien de différent que ce que nous faisons dans tous les marchés du pays. En fait, au Nouveau-Brunswick, des dirigeants municipaux de Saint John, Fredericton et Moncton nous ont écrit exprès, comme d'autres villes l'ont fait partout au pays, pour nous demander d'élargir notre capacité. Nous avons effectivement élargi notre capacité dans des villes comme Moncton. Ces dirigeants nous ont d'ailleurs écrit pour nous remercier d'avoir élargi notre capacité, tout comme nous l'avons élargie pour les circuits Calgary—Vancouver et Calgary—Toronto.

Au début, lorsque nous avons annoncé nos horaires, il y avait une diminution de 19 p. 100 dans la capacité intérieure. Nous pensions qu'il fallait réduire la capacité de 19 p. 100 pour stabiliser la demande. Nous avons refait nos calculs plusieurs fois et constaté que la demande évoluait—et soit dit en passant, il semble que nous soyons, en dépit du PIB qui a été annoncé le mois dernier, au beau milieu de ce qui est en fait une très forte période pour les déplacements, étant donné qu'il y a eu augmentation considérable de l'achalandage.

Qu'est-ce que je disais? J'étais bien parti.

M. Douglas D. Port (premier vice-président, Affaires de l'entreprise et Relations gouvernementales, Air Canada): Vous disiez essentiellement que les gens nous remerciaient pour ce que nous avons fait.

M. Robert Milton: Ah, oui. Il y en a un au moins qui écoute.

À l'origine, nous avons dit que nous diminuerions notre capacité de 19 p. 100, puis qu'elle serait réduite de 15 p. 100 parce qu'il nous fallait l'élargir ailleurs. Nous en sommes maintenant à 11 p. 100. Donc nous réajustons constamment le tir, nous élargissons notre capacité là où le marché le commande, et nous allons continuer de faire cela. C'est la restructuration massive de toute une industrie qui est en cours, et nous nous adaptons; nous agissons.

Le président: Merci, monsieur Milton.

Bev Desjarlais, s'il vous plaît.

Mme Bev Desjarlais: Merci. Je vais changer de sujet.

Au sujet du traitement des employés des deux lignes aériennes, je suis l'une des nombreuses personnes qui vous ont entendu dire aux employés des deux lignes qu'il ne leur arriverait rien de mal, que tout irait comme un charme, que les deux entreprises pourraient fusionner, et que ce serait formidable. Ce n'est évidemment pas le cas. Et l'on admet que la tâche n'est pas facile, particulièrement étant donné que l'ancienneté influence de nombreux aspects différents du travail. Qu'il s'agisse de l'avancement, des horaires de vols, des pratiques de recrutement, des congés, peu importe, l'ancienneté joue toujours un rôle. Cependant, nous admettons tous qu'on a réglé des problèmes par le passé lorsqu'il y a eu des fusions, que cela est dont faisable.

On a dit que l'on comptait fusionner les deux entreprises un jour ou l'autre. Lignes aériennes Canadien n'existera pas toujours; Air Canada n'existera pas toujours non plus. On veut ici combiner les deux.

Je crois comprendre que vous êtes en train de négocier des accords, disons, avec le syndicat d'une ligne aérienne mais pas avec le syndicat de l'autre ligne aérienne. Donc on négocie une convention collective ici, alors qu'un autre syndicat refuse, si bien que la convention collective ne s'applique pas à lui. Dans les secteurs où l'on admet que les licenciements sont plus probables, on sait que dans l'une de ces conventions collectives, l'on va prolonger de deux ans la période de licenciement. Ce n'est pas chez vous que ça va se faire. Cependant, ce même accord ne s'applique pas à l'autre ligne aérienne.

Je sais également que vous recrutez en ce moment des agents de bord—et cela a été dit aujourd'hui. Et j'ai entendu dire qu'on allait engager entre 800 et 1 000 agents de bord. Parallèlement, à ma connaissance, il y a un surplus d'agents de bord du côté de Lignes aériennes Canadien. Pourquoi n'allez-vous pas de l'avant avec la fusion de ces deux groupes, au lieu d'aggraver le problème en engageant davantage d'agents de bord et en essayant ensuite de trouver de la place pour les autres?

• 1125

M. Robert Milton: C'est une excellente question qui illustre la complexité du problème parce que nous avons ces divers syndicats avec leurs membres, et nous tâchons de négocier ces accords au niveau national avec les syndicats, à l'exception des associations qui représentent les pilotes, qui sont deux groupes distincts. Mais nous travaillons avec eux, et dans l'exemple que vous mentionnez...

Mme Bev Desjarlais: Pourquoi négociez-vous avec un syndicat alors que vous n'avez pas réglé le problème? Pourquoi concluez-vous une convention collective avec une ligne aérienne et pas avec l'autre?

M. Robert Milton: Faites-vous allusion à la convention des TCA, que les employés de Lignes aériennes Canadien ont ratifiée mais non les employés d'Air Canada?

Mme Bev Desjarlais: Avez-vous conclu un tel accord, où le syndicat d'une ligne a signé mais pas l'autre?

M. Robert Milton: Non. Essentiellement, tout était lié. Nous sommes donc retournés à la case départ et nous avons négocié avec les TCA et les employés pour faciliter les choses. C'était notre objectif. Je veux...

Mme Bev Desjarlais: On n'a donc pas négocié de convention collective avec une ligne aérienne et non avec l'autre? Est-ce que l'on négocie une convention collective avec une ligne aérienne et non avec l'autre?

M. Robert Milton: Je peux vous répondre syndicat par syndicat. Je ne peux pas vous donner de réponse simple.

Par exemple, l'AIM...

Mme Bev Desjarlais: Monsieur Milton, pourquoi ne pouvez-vous pas donner de réponse simple? Est-ce que vous négociez une convention collective avec le syndicat d'une ligne aérienne et non avec l'autre?

M. Robert Milton: S'il vous plaît, laissez-moi terminer.

La convention de l'AIM qui sera en vigueur jusqu'en 2002 a été négociée avant même que nous connaissions l'issue de cette affaire. Cette convention a donc été négociée avant même que cette situation ne se présente.

Au même moment, comme il n'y a pas eu d'entente, le groupe AIM d'Air Canada, qui a été très positif, dont les chefs sont influents dans la mesure où ils font avancer les relations de travail, a accepté une prolongation de son contrat jusqu'à six ans.

Je réponds donc à votre question très franchement, mais les choses ne sont pas simples. Oui, nous avons deux accords d'une durée différente, mais ils ont été conclus à diverses étapes du processus et le groupe national AIM a agit en parfaite connaissance de cause. Dans tous les cas, tout ce que nous faisons est porté à la connaissance du groupe national.

J'ai été très clair lorsque nous avons négocié ces conventions; selon moi, pour le même travail et la même ancienneté, vous devriez toucher la même rémunération. Nous avons toujours été d'accord pour dire que nous allions abaisser les salaires de Canadien au niveau d'Air Canada, de telle sorte qu'il n'y ait aucune discrimination...

Mme Bev Desjarlais: Je ne veux pas que mes cinq minutes soient consommées par une longue réponse. Ce qui me préoccupe, c'est qu'on n'a pas réglé ce problème. Des ententes différentes, des conventions différentes, sont conclues avec une ligne aérienne et une autre. En même temps, vous essayez d'amalgamer tout cela.

À mon avis, notre comité, et le Parlement du Canada veulent que l'industrie aérienne fonctionne bien et avec une certaine stabilité. Nous ne voulons pas que ces problèmes nous reviennent dans deux, trois ou quatre ans parce qu'ils n'ont pas été réglés aujourd'hui. Très franchement, si l'on en juge d'après ce qu'on voit maintenant, deux conventions collectives différentes sont conclues, avec chaque ligne aérienne, et nous n'allons pas régler le problème. La question reste donc posée.

Ce qui me préoccupe aussi, encore une fois, c'est qu'on laisse entendre que l'ancienneté et toute cette question de la fusion constituent un problème pour les syndicats. C'est aux syndicats d'y voir. Ce sont eux qui doivent régler ce problème. Si tel est le cas, et si vous êtes d'accord pour dire qu'il appartient aux syndicats de régler le problème, allez-vous rester à l'écart de ce processus? Est-ce qu'Air Canada ou Lignes aériennes Canadien—les deux ne font plus qu'un dans mon esprit—va rester à l'écart et se laver les mains de tout cela en disant: ce que vous proposerez conviendra parce qu'il vous appartient à vous de décider et de fusionner ces groupes?

M. Robert Milton: La réponse à cela est non. Nous avons la participation des syndicats, la participation des employés, et la participation active du groupe des relations de travail d'Air Canada, pour tenter d'arriver à une solution.

Je suis tout à fait d'accord avec vous...

Mme Bev Desjarlais: Pourquoi avez-vous besoin du représentant d'Air Canada dans ce dossier si vous vous en remettez entièrement aux syndicats, si vous leur confiez la responsabilité du dossier de l'ancienneté?

M. Robert Milton: La solution comportera une augmentation des coûts et il faut donc que la direction ait son mot à dire, quant à savoir si c'est même réalisable.

Mme Bev Desjarlais: Dans ce cas, je pense qu'il faut dire franchement ici qu'il n'appartient pas aux syndicats de s'occuper de tout cela, parce que ce ne sont pas eux qui ont le dernier mot, mais bien Air Canada. Donc, si l'on veut résoudre cette question...

M. Robert Milton: Écoutez, soyons honnêtes. Ce sont eux qui possèdent l'ancienneté. Je ne peux pas dicter quoi que ce soit. Si vous voulez des bouleversements...

Mme Bev Desjarlais: Vous ne pouvez pas...

Le président: Bev, laissez le témoin répondre d'abord à la question.

Mme Bev Desjarlais: J'ai seulement cinq minutes.

M. Robert Milton: Si vous voulez des bouleversements majeurs, alors nous pouvons adopter l'approche que vous préconisez, qui consiste à foncer dans le tas en disant à tout le monde: Voici ce qui va se passer. Ce que je veux, parce que je pense que c'est une grande victoire pour toutes les parties prenantes, c'est que tout le monde travaille ensemble pour bien comprendre ce qu'il y a à gagner et pour réaliser cela en collaboration. Mais je suis d'accord avec vous: je ne veux pas moi non plus de bouleversements dans deux ans. Je fais donc de mon mieux pour obtenir un résultat favorable pour tout le monde, et nous y travaillons très fort.

• 1130

Quand vous parlez des deux séries de négociations, je ne sais pas si vous voulez parler des groupes de pilotes, mais si c'est le cas, il est évident que ce ne sont pas deux séries, parce que ce sont deux syndicats différents.

Mme Bev Desjarlais: Monsieur Milton, ce que je crains, c'est que l'on ne résolve rien. Tout est laissé en plan et dans deux ans, nous devrons nous attaquer de nouveau à ces questions.

Je suis très inquiète, parce que même si vous dites que ce sont les syndicats qui possèdent l'ancienneté, vous avez dit vous- même que vous ne procéderez pas sur la base de la date d'embauche. Comment pouvez-vous dire que les syndicats sont propriétaires de l'ancienneté quand vous avez dit dès le départ...

M. Robert Milton: Non, ce n'est pas ce que j'ai dit. J'ai dit que je ne peux pas dicter quoi que ce soit. J'ai donné deux extrêmes qui, me semble-t-il, ne sont pas justes et j'ai dit que dans mon esprit, sans l'ombre d'un doute, le résultat sera une forme quelconque d'arbitrage, une décision quant à savoir ce qui va se passer, et je n'ai pas directement mon mot à dire là-dessus. Alors quand vous dites...

Mme Bev Desjarlais: Êtes-vous donc disposé à laisser les choses se dérouler ainsi et à permettre à un arbitre de l'extérieur d'intervenir dans le dossier?

M. Robert Milton: Le dossier évolue. Nous avons un dialogue avec tous les syndicats. Nous donnons notre appui. Ce que je veux, c'est que chaque employé en sorte gagnant et c'est à cela que je travaille.

Le président: Merci, Bev.

Lou Sekora, vous avez la parole.

M. Lou Sekora: Merci beaucoup.

En cheminant dans la rue pour venir ici, je n'ai pu trouver qu'une centaine de mètres de mouchoir pour éponger les larmes et je savais que ce ne serait pas assez pour vous aujourd'hui.

En tout cas, j'ai une question. Il y a quelques mois, vous avez dit à la télévision que vous étiez très fier. Si vous aviez réussi cela, j'aurais été fier, moi aussi, de votre réussite. Vous avez dit qu'il n'y aurait que de bonnes choses pour toutes les villes du Canada. Vous avez fait des compressions de personnel, vous avez supprimé le service aérien dans quelques villes, vous avez violé vos propres ententes avec le gouvernement du Canada: trouvez-vous que tout cela est bon? Parlez-nous des choses mauvaises qui sont arrivées.

Voici une citation de la Fédération canadienne des municipalités, la FCM:

    La FCM ne croit pas qu'elle peut avoir pleinement confiance dans les garanties offertes par la Société Air Canada.

C'est ce que pensent toutes les municipalités du Canada. Voilà qui doit vous faire vraiment plaisir.

Comme l'a dit Val Meredith, au sujet des réductions de services aériens entre Ottawa et Vancouver, oui, parce qu'il y a eu des réductions. Vous aviez autrefois un vol à 18 heures et un autre à 18 h 30, et les deux étaient complets. Celui de 18 heures a été supprimé.

M. Robert Milton: Oui, mais il y en a maintenant un à 17 heures, et un autre à 19 heures.

M. Lou Sekora: Vous avez donc supprimé ce vol.

Pour ce qui est des surclassements à transférer d'une ligne aérienne à l'autre, vous ne l'acceptez pas; je l'ai essayé moi-même la semaine dernière, en vain.

C'est vous, Air Canada et United Airlines, qui avez enlevé une partie de leurs commissions aux pauvres agents de voyages qui essaient de survivre; leur commission est passée de 10 à 5 p. 100, et encore, le 5 p. 100 est plafonné à 50 $. Vous-mêmes, vous ne pourriez imprimer ces billets pour 50 $; ce serait plutôt 150 $ à 200 $. Pourtant, vous vous attendez à ce que quelqu'un d'autre le fasse à votre place... ou s'occupe de vos problèmes.

Ce sont des choses qui me dérangent énormément.

À Penticton, vous avez éliminé tous les services aériens, sauf ceux de Beaver. J'ai reçu un appel du député provincial, à Penticton, et j'ai pris le téléphone pour appeler M. Collenette et nous avons constaté que vous aviez enfreint...

Mais, vous voyez, c'est ce qui arrive. Vous saccagez tout sur votre passage, monsieur Milton, puis vous dites: Oh! désolés si nous avons enfreint une règle, c'est bien dommage; mais nous sommes les rois et nous continuerons à le faire.

Je constate que vous avez beaucoup de propositions d'amendements au projet de loi C-26. Je vais vous dire une chose. J'en ai regardé quelques-uns, et ce que vous voulez est effrayant. Je ne sais pas si vous voulez avoir davantage le pouvoir de saccager et de détruire tout le monde, sur votre passage, dans votre milieu. Il y a des luttes intestines au sein du personnel, sans que cela vous déplaise. Je me demande quel genre d'être humain vous êtes.

Je dois vous dire que j'ai reçu des appels de vos actionnaires qui me disaient que j'étais contre Air Canada. Je ne suis pas contre Air Canada. Ils me disent qu'ils veulent que leurs actions leur donnent des profits. Cela va de soi. Je suis un homme d'affaires. Je ne m'attends à rien d'autre. Mais il faut se demander à quel prix, et à quel coût pour les voyageurs canadiens?

Oui, nous avons le projet de loi C-26. Il n'est pas suffisamment strict. Vous voulez beaucoup de mesures législatives. Vous ne les aurez pas. Si vous avez quelque chose, c'est un resserrement des règles à votre endroit.

Je vais vous dire une chose: Je suis prêt à endurer cela encore quelques mois, mais pour ce qui est du service au Canada, les réductions, et l'abandon de 45 passagers, l'autre jour, à l'aéroport de Vancouver, vous pouvez parler d'ordinateurs ou de toute autre excuse. Je me fous des ordinateurs. C'est votre problème, pas le mien. Vous laissez des gens en rade, un peu partout.

• 1135

Vous êtes allé à Penticton, mais comme je le disais, vous n'avez parlé ni au maire, ni au conseil municipal. L'intervenant précédent m'a dit que vous étiez allé voir le maire et le conseil. Après mes démarches, vous êtes allé voir le maire de Penticton. Avez-vous vu quelqu'un à Kitimat? Non, personne. Maintenant, vous vous y précipiterez.

Voilà le genre de choses... Tout ce que vous faites, c'est nuire, nuire, nuire et détruire, détruire, détruire. Monsieur Milton, il faut que cela cesse. Je suis prêt à passer les prochains mois au comité à vous observer, et si je vois pendant un instant que vous ne progressez pas, que l'on régresse, que vous détruisez des villes et des collectivités, des entrepreneurs, des voyageurs, des bureaux de tourisme, je serai ravi de présenter une motion, ici même, pour la libéralisation des services aériens au Canada. Je serai le premier à le faire, mon cher monsieur.

Le président: Monsieur Milton.

M. Robert Milton: Il va de soi que je comprends votre point de vue. Calin peut peut-être vous répondre. Comme je me sens un petit creux à l'estomac en ce moment, je ne suis pas sûr de pouvoir répondre à ces questions.

M. Calin Rovinescu (vice-président général, Croissance et stratégie de l'entreprise, Air Canada): Merci.

Après avoir écouté cette série de commentaires, et sans vouloir reprendre les arguments formulés ce matin par M. Milton, j'aimerais d'abord parler de ce que M. Milton a déjà dit lui-même, et des promesses et de toute la personnalisation qui, bien franchement, pour un débutant comme moi, sont assez difficiles à comprendre. Les décisions prises par Air Canada font l'objet d'une réflexion en fonction des circonstances, et ne sont pas menées uniquement par Robert Milton.

Deuxièmement, une chose semble être constamment perdue de vue, peut-être à cause de la quantité d'information et de la rapidité de l'intégration. C'est M. Fontana, peut-être, qui a demandé: «Êtes- vous l'un des créanciers? Est-ce que vous les encouragez?» Une chose est claire, Canadien a manqué de fonds à la fin de l'année dernière, comme chacun sait, et Air Canada a investi 250 millions de dollars pour acquérir et soutenir Lignes aériennes Canadien depuis le début de l'année.

Pour le premier trimestre, on a donc jusqu'ici dépensé 250 millions de dollars, autrement dit. En fait, s'il fallait soutenir Lignes aériennes Canadien pour encore beaucoup plus longtemps, cette somme augmenterait. Voilà pourquoi M. Milton a dit: «Si nous prenons notre temps et que nous faisons une intégration plus en douceur, qui assumera le coût de l'intégration visant à conserver en place les employés de Canadien et à préserver ses vols, pendant l'intégration?»

Presque toutes les questions soulevées jusqu'ici ont fait l'objet de discussions aux plus hauts niveaux de l'organisation, parce que pour chacune, il y a un obstacle, comme l'a dit l'intervenant précédent. J'ai travaillé très étroitement avec Air Canada pendant l'offre d'Onex, l'an dernier, et pendant de nombreuses années avant la privatisation, même si je ne fais partie de cette société que depuis 30 jours. Je peux vous dire qu'une question revient constamment: le service à la clientèle.

Nous rappelons souvent que nous ne sommes pas ceux qui ont commencé tout ça il y a un an. J'ignore si cela a plu ou déplu à nos actionnaires, mais chose certaine, le client n'y était pour rien. Nous reconnaissons que le client n'a jamais demandé qu'il y ait une offre d'Onex, que vienne ensuite l'échec des Lignes aériennes Canadien et que les deux choses se conjurent. Le service à la clientèle est donc la priorité absolue de la haute direction d'Air Canada. Chacune des questions soulevées par M. Sekora fait l'objet d'un examen et je pense qu'on est en train de les régler.

Le président: Merci.

Monsieur Casey, s'il vous plaît.

M. Bill Casey: Merci beaucoup.

Monsieur Milton, je peux à peine imaginer ce que vous vivez. Je ne peux pas parler au nom de tous, mais je pense que le problème vient en partie du fait que nous pensons qu'Air Canada doit tenir compte de l'intérêt public dans ses décisions, puisque la société a réussi à obtenir un quasi-monopole.

• 1140

Je pense que vous devez présenter la philosophie d'Air Canada comme un équilibre entre les intérêts des actionnaires et ceux du public. C'est ce que nous pensons, du moins, c'est ce que je pense certainement. Autrement, vous continuerez de vous faire constamment harceler par des personnes comme nous qui s'immisceront dans vos affaires. Il est certain que si on vous accorde ce monopole, vous aurez l'obligation d'intégrer dans toutes vos décisions des considérations relatives à l'intérêt public.

Dans son témoignage, M. Brotto a dit que toutes les décisions reposaient uniquement sur les facteurs économiques. Si vous adoptez cette attitude, notre comité et ceux qui lui succéderont ne cesseront de vous harceler que lorsque vous penserez autrement.

Vos arguments sont contradictoires à ceux que d'autres nous ont présentés. On vous a accusés de pratiquer des prix d'éviction et j'aimerais m'attaquer à ces deux questions, par curiosité. British Airways prétend que le prix des vols de correspondance est passé de 389 $ à 1 143 $; est-ce exact? Répondez-moi simplement par un oui ou par un non.

À propos de WestJet, on nous a dit que dès que WestJet a lancé son service de Moncton à Hamilton, Air Canada a réduit ses tarifs d'une manière spectaculaire sur ce seul vol, pas sur celui de Moncton à Montréal ou de Halifax à Toronto. Il nous a dit que ce n'était pas un exemple de prix d'éviction; mais que c'est là la définition de prix d'éviction.

J'aimerais simplement que vous nous donniez des explications sur ces deux exemples précis et peut-être aussi nous exposer votre philosophie. Toutes décisions prendront-elles en compte l'intérêt public?

M. Robert Milton: À mes yeux, la nécessité d'inclure le Canada dans toutes nos initiatives ne fait aucun doute. Il est clair que chaque fois que je parle des parties intéressées, j'englobe nos actionnaires, nos clients, nos employés et le Canada. Je mets clairement sur le même plan les opportunités et les obligations.

Nos obligations, les engagements que nous avons pris envers le pays, incluent non seulement les engagements envers les employés mais les engagements de service envers les collectivités. Mais encore une fois, il y a des millions de pièces—365 appareils et 40 000 employés—les problèmes à régler sont donc d'une complexité énorme et cela ne fait que 120 jours que nous avons commencé à nous y attaquer.

Je vous remercie d'en comprendre la difficulté mais ils restent énormes et nous y travaillons. Je suis totalement obsédé par la nécessité d'offrir un bon service au pays car je trouverais totalement illogique qu'Air Canada réussisse en maltraitant une ou l'autre de ses parties intéressées. C'est absurde. Donc quelle que soit la manière dont nous traitons un de nos actionnaires, un de nos clients, ou la question des services nationaux ou celle des employés, elle doit reposer sur un principe d'équité.

Si je considère certains des points que vous avez soulevés concernant cette définition de pratiques d'éviction, je ne suis pas d'accord. Je pourrais peut-être demander à Calin de vous donner notre définition de pratique d'éviction et je crois qu'elle serait compatible avec les normes internationales mais je trouve étrange qu'on veuille que nous ne puissions pas rivaliser, dollar pour dollar, avec un quelconque concurrent.

WestJet est une compagnie aérienne qui marche très bien et ses dirigeants viennent de dire qu'ils allaient mettre en service 60 ou 100 appareils pour couvrir tout le pays d'un océan à l'autre. Très bien. Cependant la loi nous impose de servir pratiquement toutes les localités du pays pendant trois ans. Comment WestJet peut-elle augmenter sa flotte de 60 ou 100 appareils sans nous concurrencer dans tous les coins du pays? Je crois que la nouvelle réalité qu'ils vont devoir comprendre, comme tous les autres nouveaux transporteurs, comme CanJet, entre autres, c'est que s'ils veulent s'agrandir et concurrencer Air Canada, Royal, Air Transat, Canada 3000 et les transporteurs américains, ce ne sera plus comme avant où le passe-temps favori était de profiter de la faiblesse de Lignes aériennes Canadien; la réalité sera toute autre. Désormais WestJet devra être compétitive, un point c'est tout, mais nous n'userons pas de pratiques d'éviction.

Pour ce qui est de l'exemple de British Airways, oui, c'est ainsi que ça s'est passé mais ce n'est pas nouveau. Le nombre de voyageurs qui auraient à payer un tel prix de billet est infime. Il reste que cela a toujours existé. C'est comme quand nous offrons le même genre de billet en coopération avec British Airways ou d'autres compagnies... Nous avons toujours eu des ententes comprenant une formule qui stipule, généralement sur la base d'un simple prorata, comment le tarif se répartit.

• 1145

Ce n'est donc pas du tout un cas unique; c'est tout simplement un excellent exemple. S'ils sont en mode de gesticulation... ce qui les intéresse probablement c'est de faire perdre à Air Canada, et au Canada, ses créneaux d'aéroport à Heathrow.

Le président: Une toute petite dernière.

M. Bill Casey: Revenons à l'exemple de Moncton. Comment pouvez-vous justifier le maintien d'un tarif élevé pour la liaison Halifax—Toronto quand du simple fait de l'arrivée de WestJet à Moncton vous pouvez sans problème baisser le prix.

Est-ce que vous subventionnez cette réduction avec vos tarifs élevés sur Halifax—Toronto et Moncton—Montréal? Est-ce que vous subventionnez cette liaison bon marché pour empêcher WestJet de prospérer?

Avant de finir, je tiens à dire, car mon temps est presque fini...

Le président: Non, il est déjà fini.

M. Bill Casey: ... que lorsque je reçois des plaintes, votre compagnie y répond très rapidement et je vous en sais gré. J'ai demandé à ce qu'on m'envoie des plaintes et j'en ai reçues. Je tiens à dire que lorsque j'appelle pour communiquer ces plaintes, la réponse est toujours très satisfaisante.

Quoiqu'il en soit, revenons à Moncton. Pourquoi faites-vous ça?

M. Robert Milton: Je vous remercie de votre dernier commentaire.

Nous tous, à Air Canada et à Canadien, au cours de la dernière heure et demie de discussion...

Calin, vous pourriez peut-être répondre à cette question sur les prix d'éviction.

M. Calin Rovinescu: Je crois que cette notion de prix d'éviction prête à confusion, surtout lorsqu'on entend tous les discours faits à son propos. Alignez ses prix sur celui d'un concurrent n'est pas, de toute évidence, en soi, pratiquer des prix d'éviction. Il y aura toujours des gens pour le prétendre. S'aligner sur le prix d'un concurrent, voire offrir un prix inférieur, n'est pas pratiquer des prix d'éviction quand on prend en considération toute la notion du coût du service offert. Il s'agit de coûts fixes qui sont variables. Quel est le coût de ce service?

Utiliser des termes à tort et à travers, c'est bien gentil mais s'aligner sur le prix d'un concurrent ce n'est pas pratiquer des prix d'éviction. Comme Robert l'a déjà dit, compte tenu du nombre d'engagements que nous avons déjà envers toutes ces collectivités, pour chacune de ces destinations où il y aura concurrence, il y aura concurrence au niveau du prix. C'est comme ça qu'on fait des affaires.

Le président: Merci, Bill.

Mais monsieur Rovinescu, pour faire suite aux remarques de M. Milton, lorsqu'il a dit: maintenant que nous avons absorbé Canadien, nous devons travailler avec ces gens et essayer de sauver les emplois. Moncton c'est Moncton. Quand Air Canada a-t-elle décidé qu'il était temps de servir les bonnes gens de Moncton?

M. Robert Milton: Si je peux me permettre de répondre, il est évident que c'est pour des raisons concurrentielles. C'est comme les stations services des deux côtés de la même rue qui abaissent leurs prix en même temps, c'est comme Wal-Mart qui réagit aux baisses de prix de K-Mart. C'est comme ça que le monde fonctionne.

Le président: Voilà pourquoi je vous pose la question, monsieur Milton. Vous ne cessez de répéter: «notre objectif est de servir la collectivité»; «c'est pour le bien du pays»; «nous protégeons les intérêts du public voyageur». Malgré tout, vous avez fini par dire, dans votre dernière réponse, à propos de l'expansion et de la concurrence de WestJet ou d'autres compagnies aériennes nationales, que l'époque où on pouvait profiter de la faiblesse de Canadien international était révolue. C'est une excellente nouvelle, et elle répond en vérité à ma question.

Monsieur Rovinescu, il n'y a pas que cette question de tarif inférieur à celui de WestJet pour le service à Moncton. Ce n'est pas toute la réponse. La vérité, c'est qu'en février vous avez réduit votre capacité entre Toronto et Moncton de 10 p. 100. Puis, le 28 février, quand WestJet a décidé d'ouvrir une liaison entre Hamilton et Moncton, vous avez décidé d'augmenter votre capacité, comme l'a indiqué M. Milton, ce qui correspond à une augmentation d'environ 51 p. 100.

Laissons pour le moment de côté la guerre des tarifs. Pas plus qu'ils ne pourront, comme l'a fait remarquer M. Milton, profiter de la faiblesse de Canadien, soyons francs, ils ne pourront pas plus profiter d'une faiblesse quelconque d'Air Canada puisqu'Air Canada aura absorbé Canadien. Pourquoi tourner autour du pot? Les Lignes aériennes Canadien et Air Canada ne feront plus qu'une. Ce sera désormais un transporteur en position de monopole.

Si un concurrent national, WestJet, s'installe à Moncton, les administrateurs de ce transporteur en position de monopole décréteront que c'est inacceptable, qu'il est temps de montrer qui est le patron sur ce marché.

• 1150

Laissons donc de côté la chute de tarif de 605 $ à 129 $ et parlons seulement de la capacité. Air Canada dit qu'elle va mettre en service deux 737 ainsi qu'un Falcon. Est-ce vraiment dans l'intérêt de la collectivité? Est-ce vraiment bon pour le pays? Non. C'est seulement une mesure anticoncurrentielle.

En fait, vous forcez WestJet ou tout autre transporteur national qui désire faire des affaires de façon honnête et directe... Ils sont prêts à ne rien dire au sujet de vos tarifs. Vous voulez offrir des tarifs comparables? Allez-y. Mais n'allez- pas réduire votre capacité en février puis, à la fin du mois, l'augmenter de 51 p. 100 dans le seul but de détourner tous ces passagers vers Air Canada et, tant pis pour WestJet.

M. Robert Milton: Pourrais-je répondre à plusieurs questions, s'il vous plaît?

Le président: Certainement.

M. Robert Milton: Tout d'abord, pour ce qui est de la capacité, cela fait des années qu'Air Canada a un vol Toronto—Moncton qui part vers 2 heures de l'après-midi, et un autre tard dans la soirée. Ces deux DC-9 sont en service depuis très longtemps.

Comme je l'ai dit, nous avons révisé nos horaires au début de l'année. Le nouvel horaire est entré en vigueur le 2 avril et nous le modifierons de nouveau lorsque nous aurons changé d'aérogare, à Toronto, le 3 juin.

Nous avons donc toujours offert ces vols. Comme je l'ai dit, notre capacité a été réduite de 19 p. 100, puis de 15 p. 100 et ensuite de 11 p. 100. Nous avons toujours réorganisé nos vols en fonction des six vols par semaine de WestJet à destination de Moncton, alors que seulement 45 p. 100 environ de notre clientèle de ce marché se déplace entre Moncton et Toronto.

C'est une question de réseau. Nous sommes présents mondialement, et pas seulement sur la ligne Moncton—Toronto... Nous nous préoccupons de la situation d'ensemble, et ce dont vous parlez ne correspond pas à la réalité.

Je remarque également que Bill Lamberton, le vice-président de la commercialisation chez WestJet, a déclaré, il y a quelques semaines: «Air Canada nous a toujours concurrencés sur le plan des tarifs. Cela ne nous dérange pas vraiment. Nous réussissons à la concurrencer de façon rentable».

Je vous demanderais donc d'en tenir compte également. Nous nous ferons un plaisir de vous communiquer les lettres que nous avons reçues des collectivités qui nous demandent de réviser nos horaires. Nous l'avons fait un peu partout, comme je l'ai déjà dit, et nous continuerons.

Pour ce qui est d'aligner nos tarifs, nous les avons certainement révisés.

Lise, peut-être pourriez-vous répondre à cela. Le tarif de 129 $ qu'ils offrent n'est pas différent du tarif aller et retour...

Mme Lise Fournel: Comme vous le savez, le tarif dépend de divers facteurs. Nous offrons au public divers tarifs pour répondre à divers besoins. Sur la ligne Toronto—Moncton, nous avons toujours un tarif aller et retour à 259 $, pour lequel certaines conditions sont fixées. Cela commence à 259 $ et va jusqu'à...

Le président: Mais j'ai déjà reconnu, et vous aussi, que WestJet ne parlait pas des tarifs. Il n'est pas question ici du prix du billet. WestJet est prêt à vous concurrencer.

Et je ne parle pas non plus de réorganiser les horaires, monsieur Milton. Nous parlons de la capacité, car cela constitue une pratique d'éviction. C'est ce que vous avez fait à Moncton, et de façon flagrante. De toute façon, vous allez devoir justifier ces pratiques d'éviction au commissaire...

M. Robert Milton: Comme je l'ai dit, nous avons reçu des lettres. Je me ferai un plaisir de discuter de la situation beaucoup plus en détail avec vous, car la présence de Canadien disparaît complètement de l'équation en ce qui concerne la capacité. Canadien desservait Moncton par l'entremise d'InterCanadien. Cette capacité ayant disparu, nous l'avons reprise en passant par Toronto.

En fait, c'est beaucoup de bruit pour rien. Nous nous ferons un plaisir d'en discuter plus tard avec vous, ou avec tout membre du comité qui cela intéresse.

Le président: Monsieur Comuzzi, s'il vous plaît.

M. Joe Comuzzi: Merci, monsieur le président.

Monsieur Milton, avez-vous vieilli depuis votre dernière comparution devant le comité?

Des voix: Oh, oh!

M. Robert Milton: Charmant monsieur.

M. Joe Comuzzi: Nous devons examiner la situation dans son contexte. Depuis plusieurs années, pour revenir sur ce que M. Rovinescu a dit tout à l'heure, vous étiez plongés dans une guerre économique contre Canadien. Bien entendu, Canadien a perdu cette guerre, et notre gouvernement est intervenu pour une raison ou une autre.

En août, je ne pense pas que vous ayez participé de votre gré aux événements résultant de cette intervention, mais vous avez fini par l'emporter. En fait, je ne sais pas si vous sortez vraiment victorieux de la lutte, car cela vous a coûté 1,2 milliard de dollars, avec le rachat des actions, etc.

• 1155

Étant donné ce contexte, et la raison pour laquelle nous sommes ici aujourd'hui... Monsieur Milton, vous avez fait une déclaration et je suis d'accord avec vous, mais sans doute pour des raisons différentes. Vous n'êtes pas satisfait du projet de loi C- 26. Je n'en suis pas satisfait non plus, mais pour d'autres raisons. C'est un projet de loi bien formulé, mais je lui reproche de placer un tampon entre Air Canada et le consommateur, avec une certain protection gouvernementale. Je crains que cette protection ne soit pas accessible.

Je viens de Thunder Bay. Je ne vois pas comment les gens de Thunder Bay pourraient avoir accès au Bureau de la concurrence ou à l'Office des transports du Canada. Premièrement, si vous êtes une compagnie aérienne très rentable, vous aurez une armée d'avocats toujours prêts à vous défendre. C'est votre rôle. Je ne pense pas que le Canadien moyen ait la capacité ou les moyens économiques de contester ce que vous faites. Pour cette raison, je ne vois pas comment cette loi va protéger vos clients, comme certains d'entre nous se l'imaginent autour de cette table.

Nous n'avons pas consacré de temps aujourd'hui aux solutions de rechange. Est-il trop tard, comme nous sommes intervenus trop tard dans le cas de Canadien? Existe-t-il une autre solution? Pouvons-nous faire autre chose que de construire...? C'est une véritable Mecque pour les bureaucrates, comme je l'ai déjà dit, mais un cauchemar pour Air Canada. Je peux envisager d'énormes problèmes au cours des quatre ou cinq prochaines années. Avons-nous exploré toutes les autres solutions avant de recourir à ce genre de loi pour offrir une protection aux consommateurs?

Je dois vous parler d'une chose qui a donné de bons résultats. De nombreux pays ont des protocoles d'entente. Air Canada est une compagnie très réputée. Notre ministre a une excellente réputation. Ne pourrions-nous pas trouver une autre solution, à part cette loi, pour définir les prix d'éviction et protéger les employés, pour maintenir le service aux collectivités? C'est une entente conclue entre Air Canada et la population que dessert la compagnie. Je crois que si nous pouvions trouver ce genre de solution...

Je ne le dis pas parce que vous êtes là. Je crois qu'Air Canada est sur le point de devenir l'une des grandes compagnies aériennes au monde, si nous pouvons commencer à nous occuper des 92 p. 100 de gens qui se trouvent à l'arrière de l'avion, car je crois qu'ils sont importants.

Voilà ma question, monsieur le président.

M. Robert Milton: Je vous remercie de vos observations et de votre question. En ce qui me concerne, je voudrais certainement passer à l'action et faire en sorte que ce projet réussisse. Je dois dire que je suis ouvert aux idées nouvelles. Une idée qui a été lancée plus tôt aujourd'hui à Paul Brotto était celle d'un ombudsman. Un ombudsman qui me ferait rapport et veillerait sur les intérêts des passagers est une idée dont je crois utile de discuter avec les membres du comité, peut-être après cette réunion.

Je suis certainement prêt à trouver des moyens de fournir les garanties que nous voulons vraiment. Malgré ce qu'en pensent les sceptiques, tout ce que nous faisons part du désir d'entretenir des relations positives avec tout le monde, y compris le pays.

Le président: Merci, monsieur Comuzzi.

Monsieur Bailey, s'il vous plaît.

M. Roy Bailey: Merci, monsieur le président.

• 1200

Monsieur Milton, je voudrais vous poser une ou deux questions rapides, dans une veine légèrement différente. Comme vous le savez, de nombreux groupes ont comparu devant le comité et tous étaient aussi convaincants que vous. Nous savons également que nos responsabilités vont au-delà de notre région ou de notre province, car c'est une question d'intérêt national.

Comme M. Comuzzi, je crois que votre compagnie est en passe de devenir l'une des plus grandes compagnies aériennes au monde et, en tant que son président, vous tenez certainement à ce que sa réputation reste intacte. Cela risque d'être difficile dans les circonstances actuelles.

Je voudrais mentionner deux accusations qui ont été formulées devant notre comité. Elles sont parfaitement crédibles. Je vais vous les rapporter rapidement en vous demandant d'y répondre.

Premièrement, on vous accuse d'avoir retardé la fusion d'Air Canada et de Canadien dans votre propre intérêt. Je vais vous dire quelles seraient vos raisons.

Comme vous le savez, le Syndicat canadien de la fonction publique représente deux groupes différents d'employés d'Air Canada et de Canadien. Ces employés ne sont pas en mesure de régler eux- mêmes leurs divergences de vues. Si j'ai bien compris, ils sont dans l'impasse. Comme nous ne savons pas exactement quand cette fusion doit se faire, ces groupes et d'autres témoins nous ont dit que cela prendrait deux, cinq ou dix ans. J'estime que c'est tout à fait inacceptable.

On vous accuse d'avoir le pouvoir de retarder les choses pour contrer l'opposition ou les difficultés devant lesquelles des milliers d'employés se trouvent actuellement. Je vais vous laisser répondre à cela, mais je vais d'abord vous faire part de l'autre accusation formulée contre vous.

Monsieur Milton, nous avons également reçu un groupe de témoins qui nous ont dit très clairement qu'un transporteur dominant comme Air Canada, qui offre des services complets, ne pouvait pas en même temps exploiter une compagnie à tarifs réduits, comme WestJet. On nous a cité des exemples dans d'autres pays. J'aimerais que vous répondiez à cela, car ce sont des exemples assez positifs.

J'aimerais savoir ce que vous avez à répondre à ces deux questions, monsieur.

M. Robert Milton: En ce qui concerne la situation syndicale, je tiens toujours à ce que le résultat soit très positif pour tous les employés. Je crois que ce sera long. Il faudra dialoguer activement. Quel que soit le résultat, il faudra l'appui des syndicats, des employés et de la compagnie.

Nous entendons le point de vue des protestataires les plus véhéments, qui sont généralement minoritaires. Je ne voudrais pas que les objectifs de la minorité l'emportent sur les intérêts de la majorité. Reconnaissez que le processus n'est entamé que depuis 120 jours. Je crois que la victoire est en vue pour tout le monde, mais qu'il nous faut du temps pour résoudre les problèmes, parler aux gens au lieu de nous affronter.

Pour ce qui est de la compagnie à tarifs réduits, je ne suis pas du tout d'accord. Ce genre de compagnies ont proliféré. Elles sont structurées différemment en ce sens que le nombre de sièges par avion est plus grand, qu'elles desservent généralement des marchés secondaires et que les contrats de travail conclus avec les employés reposent sur des bases différentes. Ce sont quand même de bons employeurs. Les meilleurs exemples de succès sont notamment United Shuttle et Delta Express, aux États-Unis. Elles suivent exactement le modèle de Southwest Airlines en ce sens que les avions de Delta Express sont entièrement en classe économique, que les vols sont fréquents, et que ces compagnies ont un mode de fonctionnement très novateur.

• 1205

Elles prennent de l'expansion. United Shuttle a maintenant plus de 50 appareils. Delta Express en a une trentaine.

Vous pouvez aller dans des pays aussi éloignés que le Japon ou All Nippon Airways ou Japan Airlines a JAZ. KLM a buzz. Ces compagnies sont partout. Elles n'ont rien de particulier, mais elles s'adressent à une clientèle différente. En général, notre clientèle veut pouvoir se rendre à l'aéroport chaque heure, choisir de voyager en classe affaires, obtenir des points de fidélisation, et ainsi de suite. L'autre clientèle voyagerait normalement par la route. En offrant de très bas tarifs, vous détournez cette clientèle de la route, et c'est ce que font les divisions des grandes compagnies aériennes du monde entier.

Je vous remercie.

Le président: Merci, Roy.

Charles Hubbard, s'il vous plaît.

M. Charles Hubbard: Merci, monsieur le président.

Tout d'abord, monsieur Milton, lorsque vous dites qu'Air Canada n'est pas appréciée... Nous sommes une quinzaine autour de cette table et nous avons tous des antécédents différents, certains dans le milieu des affaires, d'autres dans le domaine social, etc. Rien qu'autour de cette table, il est probable que nous représentons environ un million de Canadiens qui nous font tous part de leur opinion, directement ou indirectement.

Vous devriez sans doute relire la transcription du discours que vous avez prononcé devant notre comité, lorsque vous vous êtes plaint de ne pas être assez apprécié. Ce que j'ai entendu n'était pas très flatteur.

Quoi qu'il en soit, pour faire suite à ce qu'a dit M. Casey, je dois dire que dans la région de l'Atlantique, nous avons trouvé qu'Air Canada et Air Nova répondaient assez bien aux besoins. Nous avons entendu des plaintes, mais dans l'ensemble, le travail a été fait, et il faut dire que les problèmes entraînés par le déclin et l'arrêt d'InterCanadien ont rendu la situation difficile pour tout le monde.

Monsieur le président, notre comité ne doit pas oublier qu'il est question ici d'Air Canada et de ce que le transport aérien représente pour notre pays. Je sais que certains groupes ont comparu devant nous. J'ai été assez étonné par le témoignage de British Airways. En fait, j'ai essayé d'obtenir des réponses de ses représentants. Mais il faut reconnaître que certaines compagnies vous prennent certaines de vos routes les plus lucratives et veulent votre soutien pour desservir les tronçons qui sont souvent coûteux pour Air Canada. Bien entendu, pour ce qui est du développement économique et du développement des collectivités, nous devons compter sur Air Canada et ses filiales pour fournir un service aérien satisfaisant aux gens des petites localités du pays.

Nous apprécions vraiment... Je suis originaire de la Miramichi, dans le nord-est du Nouveau-Brunswick. Vous avez récemment annoncé votre venue à Charlo et à Miramichi. Il est très important pour notre économie de pouvoir offrir aux visiteurs et aux gens d'affaires de la région, un accès aux grandes villes du pays.

Monsieur le président, pour ce qui est des routes rentables et des plaques tournantes du pays, un grand nombre de compagnies peuvent les desservir à tarifs réduits et créer une concurrence importante. Ceux d'entre nous qui ont une certaine expérience du milieu des affaires savent que, lorsqu'on a de la concurrence, il faut s'y mesurer. Si vous allez chez Wal-Mart et que vous voyez qu'une autre compagnie fabrique le même produit, vous devez être concurrentiel. La meilleure façon de l'être est sur le plan des prix et ensuite sur le plan des services.

Je peux vous assurer, en ce qui concerne vos réserves au sujet du projet de loi C-26, pour ce qui est de la réglementation, que nous allons examiner la question. Mais si vous lisez la petite page que j'ai insérée dans le rapport, vous verrez qu'en tant que représentant d'une région rurale, je suis tout à fait d'avis qu'une compagnie qui devient un monopole, soit assujettie à une certaine réglementation sur le plan des tarifs et des services qu'elle offre aux collectivités.

C'est pourquoi j'espère, monsieur Milton, que le groupe de cadres supérieurs qui vous accompagne aujourd'hui, et vous-même, comprendrez que certains d'entre nous, autour de cette table, apprécions Air Canada. Nous savons que la compagnie fait l'objet de nombreuses critiques, lesquelles sont pour la plupart sans doute justifiées. J'espère toutefois que vous comprendrez bien que nous, parlementaires, représentons un grand nombre de gens. Nous espérons que les sociétés auxquelles nous accordons notre bénédiction, si je puis dire, en vertu des lois que le Parlement adopte, agiront dans l'intérêt supérieur des Canadiens. En tant que législateurs, nous devons veiller à ce que les projets de loi que nous approuvons à la Chambre, tiennent compte de leurs préoccupations.

Je vous remercie donc de votre présence. J'espère que vous avez pris note de mes remarques.

• 1210

M. Robert Milton: Merci.

Le président: Bien dit. Merci, Charles.

Michel Guimond.

[Français]

M. Michel Guimond: Monsieur Milton, je relis encore une fois la dernière phrase de votre présentation: «Nous agirons de manière responsable et nous ne laisserons pas tomber le Canada.» Je suis persuadé qu'on pourrait aussi lire que vous ne laisserez pas tomber les francophones du Canada.

À ce propos, monsieur Milton, je vous cite les propos tenus par un de vos prédécesseurs à Air Canada, M. Pierre Jeanniot, qui disait:

    Pour être une compagnie aérienne vraiment canadienne, nous croyons que les employés d'Air Canada des groupes des deux langues officielles devraient refléter la communauté, la province et le pays tant par leur nombre que par leur représentativité à l'intérieur d'Air Canada.

Monsieur Milton, je sais que vous êtes un Américain. Les Américains ont parfois une très grande sensibilité à l'endroit des autres cultures à l'intérieur du Canada. Le Canada étant un pays officiellement bilingue, vous faites des efforts pour apprendre le français. Je sais aussi que nous aurions besoin d'un engagement ferme de votre part au niveau de l'accroissement du pourcentage de francophones chez Air Canada.

Monsieur Milton, les francophones représentent 24,6 p. 100 de la population canadienne. On devrait donc être en droit de s'attendre à ce que 24,6 p. 100 de vos effectifs soient francophones.

Monsieur Milton, je ne veux pas que vous me disiez que les annonces de Vancouver à Hong Kong sont en chinois, en japonais et en mandarin. J'approuve cela car c'est la langue d'usage de certains de vos passagers, mais nous sommes au Canada, qui est un pays officiellement bilingue, un pays où les francophones et les anglophones peuvent cohabiter.

En 1967, le thème du centenaire du Canada était Canada: Stand Together, Understand Together. S'il y a de la place pour tout le monde, j'aimerais que vous m'expliquiez pourquoi les francophones chez Air Canada, toutes fonctions confondues, représentent seulement 17 p. 100 de vos effectifs. Maintenant que vous êtes propriétaire de Canadien International, je veux vous dire qu'il y a seulement 5,6 p. 100 de pilotes francophones chez Canadien International.

En dernier lieu, je vais prendre l'exemple des plaintes contre VIA Rail au sujet de l'application de la Loi sur les langues officielles. VIA Rail est une compagnie de transport nationale, une compagnie qui se promène de Halifax à Vancouver. En 1998, il y a eu trois plaintes contre VIA Rail quant à des manquements à la Loi sur les langues officielles, alors qu'il y en a eu 251 contre Air Canada. Pourquoi? Qu'est-ce que ça signifie?

Pour votre gouverne, je veux vous dire que 39,9 p. 100 des employés de VIA Rail sont francophones.

[Traduction]

J'ai une deuxième question.

[Français]

Dans un tout autre domaine, la compagnie WestJet nous a dit qu'elle avait de la difficulté à entrer aux aéroports de Montréal et qu'Aéroports de Montréal lui offrait la possibilité d'aller à Mirabel. Est-ce une décision qui relève strictement d'ADM ou si Air Canada y est pour quelque chose? J'aimerais vous entendre sur les difficultés qu'éprouve actuellement WestJet à offrir le service à partir de Dorval. Mme Pageau-Goyette nous a dit que les vols intérieurs devaient maintenant être tous faits à partir de Dorval. Je ne sais pas pourquoi on offre à WestJet d'aller à Mirabel.

[Traduction]

Le président: Merci, Michel.

Monsieur Milton.

• 1215

M. Robert Milton: Pour répondre à votre dernière question, je ne connais absolument pas le dossier. Vous pourriez peut-être poser la question aux responsables d'ADM.

Pour ce qui est des vols intérieurs réguliers offerts par d'autres compagnies aériennes qu'Air Canada, il y a Royal, Air Transat et Canada 3000 qui exploitent des vols réguliers. En fait, Royal offre actuellement jusqu'à six vols par jour entre Montréal et Toronto. Je ne vois donc vraiment aucune raison pour que WestJet ne puisse pas desservir Dorval, si elle le souhaite.

Quant à la comparaison que vous faites entre VIA Rail et Air Canada, je ne peux rien y répondre car je ne sais pas comment la compagnie ferroviaire en est arrivée là.

Je peux affirmer sans réserve notre engagement à nous conformer totalement à la Loi sur les langues officielles. Nous avons entamé un dialogue constructif à ce sujet avec le commissaire aux langues officielles, pour déterminer ce qu'il convient de faire.

Là encore, pour ce qui est du nombre de lettres reçues, cela se fonde, je le répète, sur près de 160 millions de communications avec la clientèle. Bien sûr, j'aimerais qu'il n'y ait plus du tout de plaintes. Toutefois, il y a des questions de... Même l'exemple que vous avez cité, ou la question que vous avez soulevée, quant à la proportion des employés. Air Canada a 1 000 employés en Europe. Il y en a presque autant aux États-Unis. Nous en avons également en Asie. Les chiffres sont donc légèrement faussés. Je m'engage toutefois à offrir continuellement un service dans les deux langues, et nos pratiques d'embauche seront fonction, comme il se doit, de la compétence des candidats, un point c'est tout.

Le président: Merci, Michel.

Stan Dromisky.

M. Stan Dromisky: Merci beaucoup, monsieur le président.

Monsieur Milton, je vous écoute depuis le début de la séance, et toute cette scène me rappelle de nombreuses expériences que j'ai vécues par le passé avec ma famille. Je pense à mes petits-enfants et à mes enfants, qui étaient extrêmement nerveux avant un rendez- vous chez le dentiste. Je leur disais de ne pas penser à ce qui allait se passer pendant qu'ils étaient chez le dentiste mais plutôt de se concentrer sur le sentiment merveilleux qu'ils allaient éprouver une fois sortis de là. Cela me fait vraiment penser à la situation dans laquelle vous vous trouvez à l'heure actuelle.

Or, pour faire en sorte que vous ne soyez pas accablé par des idées et des sentiments négatifs lorsque vous quitterez cette salle, je tiens à vous dire que cela fait 51 ans que je prends l'avion. J'ai commencé avec TCA et ensuite, depuis de nombreuses années, je voyage sur Air Canada, et encore à ce jour. En tant que grand voyageur, je dois vous dire que, lorsque vous affirmez à plusieurs reprises que «cela vous tient à coeur», une telle déclaration ne veut rien dire si elle ne se concrétise pas dans l'attitude et la qualité du service offert pas vos employés à tous les passagers à bord de vos avions. Et je peux vous dire que, à Thunder Bay, vous avez une équipe formidable. Mon collègue, Joe Comuzzi, pourra le confirmer. Il y a dans ma ville des gens formidables et bien intentionnés qui travaillent pour votre société. Est-ce que je me trompe?

M. Joe Comuzzi: Stan, j'aurais aimé dire la même chose.

M. Stan Dromisky: Je sais que, dans l'entente que vous avez conclue avec le Bureau de la concurrence, il n'est pas question du partage des codes. À ce sujet, certains disent que cela vous inquiète un peu pour des raisons liées à la concurrence. Toutefois, je constate que ce genre de partenariats, de partage des codes entre Air Canada et Bearskin Airlines, a une incidence très positive, enrichissante et productive sur le nord-ouest de l'Ontario. J'aimerais donc savoir ce que vous pensez de l'idée d'un partage des codes, à l'avenir, entre Air Canada et les transporteurs régionaux.

M. Robert Milton: D'accord. Tout d'abord, merci de vos observations concernant nos employés, car ils sont sensationnels. Nous traversons une période difficile. Lorsque nous avons conclu ce marché au début de l'année, nous nous sommes réjouis de voir les Lignes aériennes Canadien recevoir le prix de la meilleure compagnie aérienne décernée par le Official Airline Guide, car, fait intéressant à noter, c'est Air Canada qui avait gagné ce prix l'année précédente. Il s'agit d'un sondage effectué auprès des grands voyageurs du monde entier. Malgré certaines critiques assez acerbes, Air Canada et Canadien sont reconnues comme étant deux des meilleures compagnies aériennes qui existent au monde. C'est pourquoi je vous remercie.

• 1220

En ce qui concerne la discussion relative au partage des codes qui a eu lieu avec le Bureau de la concurrence, nous avons abordé diverses questions. Tout cela est très complexe. Avec quelle compagnie y a-t-il vraiment lieu de partager notre dénomination au Canada?

En second lieu, étant donné que les normes d'exploitation constituent une question très sérieuse... Je suis extrêmement fier de nos employés car, là encore, nos normes d'exploitation sont connues dans le monde entier. Du point de vue des normes techniques et opérationnelles, ainsi que du service à la clientèle, nous avons une réputation irréprochable. Il nous est difficile de distribuer notre code—la désignation de deux lettes qui représente notre crédibilité, pour ce qui est des normes en matière de sécurité, de service à la clientèle, et en fait tous les aspects du service—à n'importe qui. En fait, c'est simple: les lettres AC, c'est nous. Avant d'autoriser d'autres compagnies à utiliser ce code, il faut tenir compte de toutes sortes de facteurs, et notamment des normes. Nous en sommes là dans notre discussion.

M. Stan Dromisky: Merci.

Le président: Merci, Stan.

Bev Desjarlais.

Mme Bev Desjarlais: La première question s'adresse à M. Milton. Ce n'est pas un sujet à développer, mais une question à choix multiples: je vous demanderais de choisir l'une des réponses suivantes.

Combien de temps faudra-t-il pour intégrer les effectifs et résoudre les problèmes d'ancienneté: deux, quatre ou six ans?

M. Robert Milton: Quand j'ai commencé...

Mme Bev Desjarlais: Non, non, à choix multiples, monsieur Milton. Deux, quatre ou six ans?

M. Robert Milton: Quand j'ai commencé l'université...

Le président: Bev, même si vous n'aimez pas la réponse, les témoins ont la faculté de répondre à la question du mieux qu'ils peuvent, d'accord?

Mme Bev Desjarlais: Je n'ai que cinq minutes.

Le président: Laissez le témoin répondre à votre question.

M. Robert Milton: Quand j'ai commencé l'université, j'avais un super professeur de science qui m'a époustouflé, après avoir fait mes études secondaires en Asie. Il nous a fait remplir un questionnaire à réponses à choix multiples où il y avait: réponse A; réponse B; C: «ne sais pas»; et D: «s'en moque».

Je ne sais pas quelle est la réponse, mais je m'efforce d'obtenir les meilleures conditions possibles pour les employés et j'ai besoin de temps.

Mme Bev Desjarlais: Monsieur Milton, vous avez la responsabilité d'exploiter un monopole au Canada, et il vous est impossible de me dire s'il vous faudra deux, quatre ou six ans pour intégrer les listes d'effectifs?

M. Robert Milton: Je n'en sais rien. Mais je crois, et c'est mon souhait, que cela se fera le plus rapidement possible. Il serait formidable de pouvoir le faire en deux ans, et même moins, mais à condition que cela satisfasse nos employés.

Mme Bev Desjarlais: Vous auriez pu me répondre «deux ans» sans faire ce long préambule.

Madame Fournel, en ce qui concerne les frais qu'on ajoute sur le billet, vous avez dit que cette question relève de l'IATA. Pouvez-vous me dire s'il a été difficile à l'IATA d'ajouter sur les billets les frais perçus par NAV CANADA?

Mme Lise Fournel: Oui, cela a posé beaucoup de problèmes. En effet, les gens ont l'impression que les prix ont augmenté. Nous n'avons pas augmenté le prix. Les transporteurs hésitent toujours à inclure sur le billet des frais supplémentaires, car les voyageurs ont tendance à croire que c'est le prix du billet qui a augmenté.

Mme Bev Desjarlais: Cela fait partie intégrante du problème. Ce n'est donc pas simplement parce qu'il est impossible d'ajouter une case sur le billet, mais vous craignez que les gens aient l'impression que le prix du billet d'avion a augmenté.

Mme Lise Fournel: En outre, il y a également les frais de NAV CANADA, la taxe aéroportuaire, les agences de voyage...

M. Robert Milton: Cette question ne concerne pas seulement notre compagnie, mais l'ensemble de l'industrie.

Mme Lise Fournel: C'est une question qui touche toute l'industrie.

Mme Bev Desjarlais: [Note de la rédaction: inaudible]... il conviendrait de préciser que ce n'est pas impossible à faire, mais qu'il existe souvent cette impression parmi la population.

M. Robert Milton: [Note de la rédaction: inaudible]... si vous le vouliez, mais nous ne pouvons pas obtenir...

Mme Lise Fournel: Il y a aussi les problèmes liés au SRI—le système de réservation informatisée.

Mme Bev Desjarlais: Très bien. Je vous remercie.

Ma question suivante porte sur les préoccupations exprimées par les gens dans tout le pays au sujet de la suppression de certains vols, de la diminution des services. Mon collègue de Saskatoon—Rosetown—Biggar était là plus tôt, et il espérait obtenir des explications. Vous avez dit que vous pouviez nous donner des détails dans certains cas précis.

À Saskatoon, en Saskatchewan, le maire de la ville et les gens d'affaires sont extrêmement inquiets. Il y a un grand nombre de congrès et d'autres événements qui doivent avoir lieu, et le nombre de vols assurés par semaine a diminué, passant de 157 à 118, soit 2 000 places de moins. Ces gens là sont très inquiets car ils entendent déjà parler de problèmes de la part des hôteliers et des organisateurs de congrès qui n'arrivent pas à trouver des places pour les gens.

Pourriez-vous me dire si c'est vraiment le cas? Y a-t-il eu une réduction considérable du service à Saskatoon?

M. Robert Milton: Doug Port s'est rendu à Saskatoon pour discuter avec les dirigeants locaux, mais je dois dire que, d'après moi, il y a eu effectivement diminution du nombre de places. Par contre, si vous vérifiez les heures de départ, il y avait tellement de chevauchement que cela ne change rien pour ce qui est de la capacité réelle, car notre horaire est bon. Nous sommes en train également de mettre en service un plus grand nombre d'avions à réaction pour remplacer les turbopropulseurs. Il y a donc des avantages.

• 1225

Je dois dire toutefois, avant que Doug ne prenne la parole, que notre horaire en Saskatchewan ne me satisfait pas. Je suis convaincu que Lise va y apporter des modifications, car il ne me plaît pas.

M. Douglas Port: Si vous le permettez, je viens de répondre à M. Gruending par écrit que j'ai rencontré le ministre Sonntag de la Saskatchewan la semaine dernière pour parler du service à Saskatoon. Je dois vous dire que nous avons surveillé la situation de très près pendant les premières semaines d'avril. Les coefficients de remplissage moyen sont de l'ordre de 57 p. 100 et 69 p. 100 dans l'ensemble des marchés desservis à partir de Saskatoon, outre celui de Toronto, où le taux atteint 83 p. 100.

Pour revenir sur ce qu'a dit M. Milton, il semble être d'avis que cette capacité est insuffisante.

Nous faisons à Saskatchewan exactement la même promesse que celle que nous avons faite pour les marchés du Nouveau-Brunswick et de Calgary. Si nous ne trouvons pas la situation idéale la première fois, nous allons y remédier.

Mme Bev Desjarlais: Je me réjouis d'apprendre que vous avez répondu à cette lettre, car j'en avais une autre à vous soumettre. Je suppose que les députés jouent actuellement le rôle de protecteurs des passagers. C'est apparemment la seule façon qu'ont les gens d'obtenir des réponses, et je dois vous dire que j'aimerais mieux m'occuper d'autre chose.

Il devait s'agir d'une autre lettre, puisque la première a été envoyée le 6 avril et que l'on n'avait toujours pas obtenu de réponse à cette question. Je me réjouis donc d'apprendre que vous avez depuis...

M. Douglas Port: Elle est arrivée la semaine dernière.

Soit dit en passant, M. Gruending nous a écrit en sa qualité d'actionnaire.

Mme Bev Desjarlais: D'accord. Il pensait peut-être obtenir une réaction plus rapide à ce titre. Vous n'avez donc pas pu y répondre encore si la lettre a été envoyée simplement le 6 avril...

Le président: Merci beaucoup, Bev.

Joe Fontana, s'il vous plaît.

M. Joe Fontana: Merci, monsieur le président. Je voudrais revenir à deux ou trois questions déjà abordées. Je trouve également que vos transporteurs régionaux sont dignes d'éloges. Je crois qu'ils font de l'excellent travail, surtout le groupe Air Ontario et Joe Randell.

Vous pouvez peut-être répondre à ceci, même si ce n'est pas ma question la plus importante. Pourquoi les PDG des transporteurs régionaux sont-ils relégués à un rang inférieur, puisqu'ils relèvent de la vice-présidente aux Affaires commerciales d'Air Canada plutôt que directement de vous, monsieur Milton, si vous croyez réellement que le réseau régional est important pour vous et très important pour les petites localités?

Je vous laisse réfléchir à cela.

Deuxièmement, pour ce qui est des clients—et j'espère que nous nous intéressons à cela—je voudrais vous communiquer une lettre. Je songe à l'exemple des Jeux du Canada qui se tiendront à London, en Ontario, en 2001. D'habitude, pour ce type de Jeux, les accords sur le transport aérien sont conclus 18 mois à l'avance. Or, cette fois-ci, personne, ni Air Canada ni un autre transporteur, n'a pris la peine d'offrir des vols à ces 3 000 jeunes Canadiens qui seront les compétiteurs de ces Jeux les plus importants du Canada.

Je vais vous communiquer cette lettre, parce qu'elle est extrêmement vexante. Vous auriez dû intervenir il y a un mois. Il n'y a pas d'autres preneurs. Je ne sais pas ce qui arrive à l'industrie du transport aérien, mais vous avez une clientèle à entretenir et, chose encore plus importante, il y a des jeunes qui doivent parvenir aux sites des Jeux et auxquels les transporteurs, y compris les vôtres, n'ont même pas encore répondu.

Je voudrais parler des prix. Je crois que Mme Fournel s'est dit prête à remettre au comité, avant octobre si j'ai bien compris, toute la documentation voulue sur les prix. J'aimerais bien avoir ces renseignements, parce que vous avez dit, au sujet de notre projet de loi, que vous ne voulez pas que nous donnions des pouvoirs de réglementation à l'Office des transports du Canada pour qu'il examine les prix et toutes les autres dispositions. Vous dites croire que nous ne pouvons pas revenir à l'époque de la reréglementation.

Si vous ne voulez donc pas, monsieur Milton, que nous accordions cette protection aux consommateurs dans le projet de loi—puisque nous sommes les seuls à pouvoir protéger l'intérêt du public—qu'êtes-vous prêt à dire à vos clients, dès aujourd'hui, au sujet des prix? Je sais que le prix du carburant et d'un tas d'autres choses augmentent, mais êtes-vous prêt à figer les prix pour l'année ou les deux années à venir? Êtes-vous prêt à garantir au public qu'il n'y aura pas d'augmentation des prix supérieure à l'augmentation de l'IPC?

Vous ne voulez pas que le gouvernement vérifie si vous allez augmenter les prix et, veuillez m'en croire, nous n'avons pas le temps de le faire. Les prix changent 12 000 fois par semaine ou aux quinze jours, et nous ne connaissons pas vos contraintes commerciales. Mais vous ne voulez évidemment pas qu'on désigne un organisme responsable de vous surveiller. Quel engagement êtes-vous prêt à prendre envers la clientèle d'Air Canada et les Canadiens, au sujet des prix?

En dernier lieu, parce que je n'ai pas très bien compris ce que disait M. Brotto lorsqu'il parlait des engagements que vous avez pris au sujet de Canadien, vous engagez-vous à faire de Canadien une entreprise distincte, qui aura sa propre marque de commerce? Allez-vous permettre à cette entreprise de croître. Ce sont les promesses qui nous ont été faites, que l'on a fait aux employés de Canadien, à savoir que Canadien continuera d'exister, séparément d'Air Canada. Vous reconnaissez toutefois qu'il y a une seule entreprise et qu'il y a toutes sortes d'économies à réaliser.

• 1230

Est-ce encore ce que vous maintenez aujourd'hui? Dans les faits, prenez-vous des dispositions pour créer un seul transporteur aérien, une seule marque de commerce? C'est tout à fait différent de ce que j'avais entendu auparavant.

Ma dernière question, que je trouve importante, porte sur Canadien régional. Monsieur Milton, vous avez signé une entente avec le Bureau de la concurrence, selon laquelle Canadien régional aurait dû, au point où nous en sommes, être déjà vendue. Nous avons entendu dire que, oui, les difficultés tiennent à l'évaluation. Je crois que nous en sommes à la troisième personne qui va tâcher d'évaluer l'actif. J'ai entendu M. Brotto dire que la valeur s'exprime probablement par un nombre de neuf chiffres. Bien sûr, vous avez pris des engagements et vous continuez à financer cette entreprise, et j'espère que vous continuerez de le faire, mais au bout du compte, dites-le nous franchement, allez-vous procéder à l'aliénation de Canadien régional? En fait, souhaitez-vous plutôt l'intégrer à l'ensemble de votre réseau, et vous sentez-vous contraint de céder cette entreprise parce que le Bureau de la concurrence vous a demandé de le faire?

Soyons francs avec les Canadiennes et les Canadiens. Prenons enfin les moyens de nous doter d'une bonne compagnie de transport aérien, en nous assurant que les clients aient des choix et qu'ils soient traités avec équité. Cessons de nous livrer à ces jeux, où vous dites que cette entreprise vaut 130 millions, ou quelqu'un d'autre dit qu'elle ne vaut que 20 millions, et où on se demande encore si vous allez finir un jour par vendre Canadien Régional. Je vous laisse répondre à ces questions.

Le président: Merci, Joe.

Monsieur Milton.

M. Robert Milton: Le rapport hiérarchique entre le réseau régional et notre vice-présidente exécutive aux affaires commerciales, est tout à fait semblable à celui qu'entretiennent d'autres grandes compagnies de transport aérien. Étant donné que j'estime que Lise Fournel, qui m'accompagne, est au nombre des cadres supérieurs les plus compétents de notre entreprise, je trouve tout à fait approprié que le réseau régional relève d'elle.

Pour ce qui est de notre réponse à la demande pour les Jeux du Canada, nous agissons manifestement beaucoup trop lentement. Nous devons donner une réponse, et je vais prendre les moyens pour qu'elle soit donnée.

Du point de vue de la protection du consommateur contre l'augmentation des prix, le Bureau de la concurrence estimait que, lorsqu'on commence à hausser les prix de façon exagérée, on fait face à de la concurrence. C'est donc une bonne chose. En ce qui me concerne, le marché est un protecteur naturel du consommateur quant aux prix.

Nous cherchons à atteindre de hauts niveaux d'intégration pour obtenir les avantages de la synergie. Toutefois, tant que nous n'aurons pas régler la question des employés, et je l'ai déjà dit à plusieurs reprises, nous sommes tout à fait prêts à maintenir l'existence des deux unités opérationnelles distinctes, des deux marques de commerce. Mais j'envisage qu'un jour elles vont fusionner, et j'envisage cette fusion se produisant le plus rapidement possible, avec l'adhésion enthousiaste des employés, mais j'ai du pain sur la planche.

En ce qui concerne l'aliénation de Canadien régional, j'ai dit et répéter que je ne voulais pas y consentir. Nous avons fini par y consentir, mais je ne veux pas vraiment vendre Canadien Régional. Je pense que c'est un élément important de notre réseau mondial. Cela dit, nous avons accepté de le faire, nous sommes convenus d'un processus et ce processus continue de se dérouler. Nous avons de la difficulté à tomber d'accord sur un prix, mais le dialogue avec le Bureau de la concurrence se poursuit. Il y a un mécanisme de recours à une tierce partie pour nous aider à évaluer le prix de cette entreprise. Lorsque nous parlons d'un nombre de neuf chiffres, comme l'a fait Paul Brotto, il ne s'agit pas d'un prix qui ne s'appuie sur rien. Il se fonde sur les évaluations de la valeur de Canadien régional, faites par les détenteurs d'obligations garanties de Canadien régional. C'est à ce prix-là que Canadien régional a été évalué, et c'est le prix que nous voulons en obtenir s'il faut la vendre. Cela dit, pour cela comme pour tout le reste, nous tiendrons nos promesses.

Le président: Monsieur Casey.

M. Bill Casey: J'ai dit un peu plus tôt que, lorsque je transmets une plainte à Air Canada, j'ai le sentiment qu'on y répond très rapidement. Le problème tient au fait que les consommateurs n'ont pas accès au système. Vous avez entendu le mot «ombudsman» à quelques reprises. En fait, je crois que vous l'avez vous-même prononcé ici, un peu plus tôt. C'est bien cela, vous l'avez dit. On dirait que vous avez changé d'avis. En effet, il y a une semaine environ, vous m'avez écrit, déclarant que vous rejetiez l'idée d'un ombudsman. Après ce que vous avez entendu ici, reconnaissez-vous maintenant qu'Air Canada devrait peut-être collaborer avec notre comité pour établir les règles touchant un éventuel poste d'ombudsman?

M. Robert Milton: C'est ce que j'ai dit. En me fondant sur ce que j'ai entendu aujourd'hui et sur les sentiments exprimés, je suis certainement prêt à entamer un dialogue sur la nécessité, pour notre compagnie, d'avoir un ombudsman.

M. Bill Casey: Vous proposez un ombudsman payé par l'entreprise et relevant...

M. Robert Milton: Je crois que cela fait partie du dialogue en question. Nous devrions en parler et voir quelles sont les options.

M. Bill Casey: Nous allons parler du principe. Cela me semble vraiment positif.

Quelle est la situation pour votre compagnie de transport aérien à tarifs réduits?

• 1235

M. Robert Milton: Nous tenons toujours à passer à l'action, et nous avons l'intention de le faire. Comme vous le savez, le Bureau de la concurrence nous impose des contraintes avant de procéder. Voilà encore un exemple de notre volonté d'offrir des tarifs réduits un peu partout. Toutefois, nous avons accepté certaines conditions et nous espérons que, d'ici à la fin de l'année, cette compagnie de transport aérien sera établie et offrira ses services de vols intérieurs dans divers endroits du pays, sauf peut-être à l'est du Manitoba.

M. Bill Casey: Si vous mettez sur pied votre compagnie à tarifs réduits, ce sera pour le Manitoba et l'Ouest?

M. Robert Milton: Et pour les destinations aux États-Unis.

M. Bill Casey: Tout à l'heure, j'ai posé une question à M. Brotto sur la différence de prix entre ce que vous demandiez pour Canadien régional et le prix du Bureau de la concurrence et je ne vous demande pas des chiffres mais quel pourcentage du prix que vous souhaitez représente le prix du Bureau de la concurrence? Est- ce la moitié?

M. Robert Milton: Je ne veux pas discuter de prix mais peut- être que Rob pourrait vous donner quelques précisions.

M. Rob Peterson (vice-président général, directeur général des finances, Air Canada): Comme l'a dit ce matin M. Brotto, il y a une différence, dans définition de la juste valeur commerciale, entre le Bureau de la concurrence et ses conseillers et nous et nos conseillers, et cela mène évidemment à des évaluations sensiblement différentes de cette société puisque la définition est différente. Donc, en décembre dernier nous nous sommes mis d'accord pour désigner un arbitre tiers qui décidera d'un prix que respecteront les deux parties, et c'est là où nous en sommes. Il y a donc un gros écart mais c'est essentiellement dû à une question de définition plutôt que d'évaluation. Canadien régional en soit est une ligne aérienne rentable. Elle est une valeur.

M. Bill Casey: L'évaluateur tiers ou le négociateur a-t-il été trouvé?

M. Rob Peterson: On est en train de le sélectionner en ce moment même.

M. Bill Casey: Merci beaucoup. Je sais que M. Milton a faim et je ne voudrais pas le retenir.

Le président: Monsieur Calder, s'il vous plaît.

M. Murray Calder: Je ne voudrais pas empêcher les gens d'aller déjeuner en les retenant trop longtemps et je ne poserai donc que deux brèves questions qui font suite à ce que disait Mme Desjarlais.

Nous savons que ces deux sociétés vont finalement fusionner. Il faut donc se demander si l'on peut fusionner ces deux lignes aériennes sans fusionner la liste d'ancienneté ou s'il va falloir attendre que cette liste soit fusionnée avant de fusionner les deux sociétés? Quelle est la charrue et quels sont les boeufs?

M. Robert Milton: À mon avis, l'aspect le plus important de la synergie qui existe entre les deux est la coordination des horaires. À partir du 2 avril de cette année, nous avons coordonné les horaires. Nous avons deux lignes aériennes et un seul horaire, si bien que c'est déjà chose faite.

M. Murray Calder: Donc, vous pouvez les fusionner n'importe quand...

M. Robert Milton: Lorsque les employés seront enthousiastes, qu'ils diront que cela marche, qu'ils vont y gagner, je serai content. Je veux qu'ils voient comme moi qu'il s'agit là d'une magnifique réussite mondiale, et les questions d'ancienneté, d'ici un an ou... ne seront plus un problème parce que leurs carrières auront avancé beaucoup plus qu'ils ne l'avaient jamais prévu, car il s'agit là vraiment d'une réussite mondiale, et non pas d'une compagnie qui s'inquiète de savoir qui obtient quelles destinations, etc comme ce fut le cas pendant tant d'années. C'est une chance énorme pour les employés.

M. Murray Calder: Monsieur le président, je pense que j'en resterai là.

Le président: Merci, monsieur Calder.

Val Meredith, s'il vous plaît.

Mme Val Meredith: Merci, monsieur le président. J'ai deux problèmes. D'une part, vous avez dit à propos des services dans l'Est du Canada et de la nécessité d'ajouter des avions: «Pourquoi pensez-vous que nous avons tellement réduit la capacité dans l'Ouest pour la mettre sur le marché de l'Est?» Je ne sais pas si vous comprenez l'importance historique de ce qui s'est produit dans notre pays mais les gens de l'Ouest avaient adopté Canadien pour une raison bien précise, parce que nous estimions que le service qu'offrait Air Canada dans l'Ouest n'était pas suffisant.

La première chose qui se produit s'est qu'on retire tous les avions de l'Ouest du Canada, en particulier chez les transporteurs régionaux mais également chez Canadien, et que cette réduction de service est très visible dans l'Ouest. Ces avions ont été déménagés dans l'Est, encore une fois, alors comprenez bien pourquoi les Canadiens de l'Ouest se sont rabattus sur Canadien, c'est parce que Air Canada offrait un traitement préférentiel à l'est du pays.

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L'autre chose sur laquelle je voulais revenir, c'est sur ce que vous avez dit à propos de l'économie de marché et de l'absence de réglementation gouvernementale. Vous estimez que le projet de loi qui nous occupe présente un certain nombre d'aspects réglementaires que vous jugez inutiles. Vous aimez les ententes «Ciel ouvert» avec les États-Unis.

Ma question est la suivante. La Loi sur la participation publique au capital d'Air Canada devrait-elle rester dans les livres dans le marché d'aujourd'hui? Êtes-vous d'accord pour relever de 25 à 49 p. 100 la participation étrangère? Que pensez- vous de permettre à des compagnies aériennes exclusivement canadiennes, mais appartenant à des intérêts étrangers, d'opérer sur le marché, d'éliminer la réglementation gouvernementale et l'ingérence gouvernementale et de libéraliser le marché? Que les consommateurs et la concurrence décident du reste.

M. Robert Milton: Tout d'abord, à propos de cette question du transfert de la capacité de l'Ouest vers l'Est, le foyer de concurrence et de pertes qu'est l'ouest du Canada pour les compagnies aériennes ou il y a une surcapacité énorme ne pouvait être négligée. Nous avons maintenu un service horaire ou même toutes les demi-heures sur certaines lignes clés de navette, etc. où nous offrons un excellent service. Mais nous avons déplacé une certaine capacité vers les États-Unis et d'autres marchés internationaux aussi.

Donc, si vous considérez les transferts de capacité, vous constaterez que l'Ouest du Canada est tout à fait dans le tableau. Ce qui a changé, c'est la capacité transcontinentale. Vous verrez une forte capacité dans l'Est et parce que nous voulons continuer à développer Toronto. Nous voulons une plaque tournante massive et puissante face à Detroit, Cleveland et Chicago de sorte que le Canada, une fois pour toutes, ait une véritable plaque tournante compétitive. C'est pour ça que nous avons ajouté une foule de destinations aux États-Unis à partir de Toronto ainsi que sur le marché international. C'est une autre raison qui explique ce transfert de capacité.

Ne vous y trompez pas, toutefois, ce n'est pas comme si l'on avait volé au marché de l'Ouest canadien pour donner à ceux de l'Est. Cela concerne des destinations internationales. Aucun aéroport n'a plus bénéficié d'un surcroît de capacité que celui de Vancouver. Mais là encore, cela fait partie de la capacité réduite dans l'Ouest du Canada. Nous avons, par exemple, pris un A-319 qui faisait le tour de l'ouest du Canada pour le mettre sur une ligne telle que Vancouver—Mexico, à partir du 5 juin. Nous avons ajouté de nouvelles lignes vers l'Asie et partout. C'est donc très positif, en matière d'accès international, pour l'ouest du Canada et l'ensemble du pays.

Pour ce qui est de la participation étrangère au capital, j'ai déjà dit que je serais favorable à un accroissement à 49 p. 100. Je crois vraiment que pour certaines des autres questions que vous avez posées quant à des lignes canadiennes qui appartiendraient à des intérêts étrangers et à d'autres possibilités pour les transporteurs américains, par exemple, cela revient pour une bonne part à ce dont on discutait à l'automne: voulons-nous une industrie au Canada? Il est évident que nous aurons de toute façon des services aériens au Canada. Je dirais simplement que, si ce sont les compagnies aériennes américaines qui contrôlent cela, il y aura énormément de service sur toutes les destinations courantes mais pour les villes secondaires et les localités moins importantes, inutile d'y penser. Ce ne sera pas durable si ce n'est pas subventionné par l'État.

Alors, souhaitons-nous avoir une industrie aérienne canadienne indépendante, comme nous l'avons actuellement, qui pourrait devenir une grosse compagnie aérienne internationale, ou souhaitons-nous que ce soit des Américains qui contrôlent cette industrie? C'est la façon dont je voudrais répondre à votre question. À l'heure actuelle, je dirais que si les Américains veulent s'en occuper, il faudrait que ce soit sur une base de totale réciprocité et ce n'est qu'ainsi à mon avis que le Canada pourrait l'envisager. Ce doit être absolument réciproque.

Mme Val Meredith: Que pensez-vous de la Loi sur la participation publique au capital d'Air Canada qui porte sur la réglementation et l'ingérence du gouvernement dans les transactions non seulement de votre compagnie mais également de l'industrie aérienne en général au Canada?

M. Robert Milton: Pour ce qui est de passer de 10 p. 100 à 15 p. 100, là encore, ça revient à la question de savoir si nous voulons que cette industrie soit domiciliée ou non au Canada.

Étant donné que Calin a aidé à rédiger le projet de loi, peut-être qu'il peut vous dire ce qu'il en pense.

Mme Val Meredith: Il s'agit de la participation canadienne au capital d'une société; il ne s'agit pas de participation étrangère.

M. Calin Rovinescu: Désolé, votre question porte sur la participation canadienne au capital de...

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Mme Val Meredith: Il s'agit de la Loi sur la participation publique au capital d'Air Canada, qui porte sur la participation canadienne à une compagnie canadienne, et non pas de la participation étrangère. Il en est question dans un autre...

M. Calin Rovinescu: Vous parlez de la participation individuelle maximum.

Mme Val Meredith: Je demande seulement s'il devrait exister une loi intitulée Loi sur la participation publique au capital d'Air Canada qui régit la façon dont une compagnie dirige ses affaires. Il s'agit de réglementation et j'avais l'impression que M. Milton disait ne pas vouloir de réglementation. Que vous vouliez que le gouvernement sorte du marché.

M. Calin Rovinescu: Si vous choisissez qu'il n'y ait pas de réglementation et que vous voulez réellement la déréglementation dans ce secteur, vous avez raison. C'est sûr que s'il ne doit pas y avoir de réglementation, c'est la déréglementation. Il n'y a plus besoin de protectionnisme d'un maximum de 10 p. 100 de participation, pas besoin du protectionnisme qui consiste à dire que les bases d'entretien doivent être à Montréal et Winnipeg, ni du protectionnisme que représente la Loi sur les langues officielles. Le problème c'est que c'est un doux mélange. Certaines de ces choses sont très bonnes et d'autres favorisent...

Comme vous le savez, la Loi sur la participation publique au capital d'Air Canada contient beaucoup plus de choses que de simples restrictions concernant la participation au capital. Si vous considériez cela comme un spectre, vous diriez qu'à une extrémité de ce spectre vous avez la réglementation totale, comme il y a des années lorsque les prix étaient réglementés, qu'il s'agissait de sociétés d'État qui rendaient compte au Parlement par l'intermédiaire du ministre des Finances, etc., et à l'autre extrémité l'absence totale de réglementation. Je dirais que le modèle d'Air Canada va plutôt dans le sens de l'absence de réglementation, reconnaissant qu'il existe certains compromis politiques, qui se trouvent déjà dans ce projet de loi.

Mme Val Meredith: Ne diriez-vous pas que ce projet de loi fait également partie de ces compromis politiques, qu'il s'inscrit entre ces deux extrêmes, que la population aimerait peut-être bien savoir pourquoi ce projet de loi a été rédigé de cette manière pour figurer dans nos recueils de lois et qu'il est peut-être aussi important que la Loi sur la participation publique au capital d'Air Canada, comme vous l'avez mentionné?

M. Calin Rovinescu: Ce qu'il faut savoir, c'est quel environnement réglementaire est contre-intuitif pour une société privée? Je dirais qu'il est plus difficile de gérer une société privée comme Air Canada qu'une société cotée en bourse, et de la diriger en fonction de certaines contraintes réglementaires concernant les prix et l'intervention à ce niveau. Ces contraintes sont plus difficiles à gérer que les restrictions relatives à la participation au capital, les contraintes touchant les bases d'entretien ou celles relatives aux langues officielles. C'est donc simplement une question de degré.

Mme Val Meredith: Mais ne diriez-vous pas que dans l'intérêt public, il est plus important pour un gouvernement de s'inquiéter davantage des prix et du service dans les régions éloignées de notre pays et de ce genre de choses, que du nombre d'actions qu'un Canadien peut détenir dans une société canadienne et du lieu où se trouve son siège social et ses installations d'entretien? J'estime que ces aspects de la réglementation, qui n'existent pas forcément pour le bien public mais plus pour des raisons politiques, sont une entrave plus grande pour une compagnie que les tarifs, le service et ce genre de choses. J'estime que ce projet de loi s'inscrit dans la perspective des gouvernements qui estiment qu'ils doivent instaurer une sorte de réglementation dans certains cas qui ne semblent pas forcément encourager le libre accès à une économie de marché.

Le président: Merci, Val. Dans un monde parfait, comme on dit.

Monsieur Milton, monsieur Rovinescu, monsieur Port, madame Fournel et monsieur Peterson, je tiens à vous remercier de vos exposés devant le comité et d'avoir répondu à toutes nos questions. Il faut que vous compreniez que nous aussi nous nous débattons avec ces dossiers importants, que nous voulons garantir la protection du public, celle des employés et veiller à ce que les régions sont bien desservies, etc. Nous essayons tous de parvenir aux mêmes résultats. Nous vous remercions d'avoir accepté de répondre à d'autres questions que nous pourrions avoir à vous poser alors que nous entamerons l'étude article par article du projet de loi, la semaine prochaine. Merci beaucoup de vos interventions et d'avoir répondu à nos questions.

Chers collègues, la prochaine séance aura lieu lundi à 15 h 30.

La séance est levée.