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PACC Rapport du Comité

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CHAMBRE DES COMMUNES
OTTAWA, CANADA
K1A 0A6


Conformément à l’article 108(3)e) du Règlement, le Comité permanent des comptes publics de la Chambre des communes a l’honneur de présenter son

VINGT-TROISIÈME RAPPORT

Le Comité permanent des comptes publics a étudié le chapitre 7 du Rapport de décembre 2001 de la vérificatrice générale du Canada (Agence des douanes et du revenu du Canada — L’administration de l’impôt international : les non-résidents assujettis à l’impôt sur le revenu du Canada), et a convenu de déposer le présent rapport.

INTRODUCTION ET CONTEXTE

Chaque année, l’Agence des douanes et du revenu du Canada (l’ADRC ou l’Agence) traite l’impôt retenu à la source et les déclarations de revenus de plus de 1,7 million de non-résidents qui ont gagné des revenus au Canada. En effet, les non‑résidents paient l’impôt sur le revenu du Canada sur leurs gains au Canada provenant d’emplois ou de placements et d’autres sources de revenu imposable. En vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu, les personnes qui versent de tels revenus à des non‑résidents sont tenues d’effectuer des retenues à la source au titre de l’impôt, et les non-résidents peuvent être obligés de produire une déclaration de revenus. La Loi et les conventions fiscales bilatérales précisent comment calculer les montants que les payeurs doivent retenir. Dans certaines circonstances, l’impôt à retenir peut être réduit ou supprimé avec l’autorisation de l’Agence.

L’Agence offre un vaste éventail de services relativement à l’impôt international, notamment le traitement et la vérification des déclarations de revenus des non-résidents. Elle aide aussi les non-résidents à s’acquitter de leurs obligations en matière d’impôt sur le revenu et à comprendre et respecter les lois et règlements fiscaux qui les concernent. En 2000-2001, l’Agence a signalé que plus de 1,7 million de non-résidents avaient touché plus de 42 milliards de dollars de revenus de toutes sortes au Canada et avaient payé environ 3 milliards de dollars d’impôt sur le revenu. Les activités d’exécution de l’Agence à l’égard des non-résidents ont permis d’identifier 350 millions de dollars additionnels en impôt.

La vérification a permis de déceler des lacunes dans les activités d’administration de l’impôt international de l’Agence, notamment sur le plan de l’évaluation des risques et de la vérification de l’observation de la loi. Les activités de vérification de l’observation de l’impôt sur le revenu des non-résidents ne sont pas guidées par un mécanisme officiel d’évaluation des risques ni une stratégie globale d’observation, et il y a des lacunes en particulier en ce qui concerne la vérification de l’impôt sur les gains en capital dû par les émigrants et l’administration des non-résidents à revenu élevé qui ne produisent pas de déclaration de revenus. En outre, on a constaté que certaines conventions fiscales bilatérales, en particulier l’Accord Canada-Barbade en matière d’impôt sur le revenu créaient des possibilités de planification fiscale sophistiquée qui mettent à rude épreuve la capacité de l’Agence d’exécuter la loi et pouvaient entraîner d’importantes réductions imprévues de l’assiette fiscale.

Le Comité des comptes publics a trouvé très préoccupantes les lacunes de l’administration de l’impôt international par l’Agence, et il a décidé de se réunir le 12 mars 2002 pour entendre des témoignages à ce sujet. Ont comparu pour le compte du Bureau du vérificateur général du Canada M. Shahid Minto (vérificateur général adjoint) et M. Barry Elkin (directeur principal). Étaient également présents, représentant l’Agence des douanes et du revenu du Canada, M. William Baker (sous-commissaire, Direction générale des programmes d’observation) et Mme Jeanne Flemming (directrice générale, Direction de l’impôt international, Direction générale des programmes d’observation).

OBSERVATIONS ET RECOMMANDATIONS

Le Comité s’est penché essentiellement sur les activités d’observation de l’Agence, notamment sur l’Accord Canada-Barbade relatif à l’impôt sur le revenu et sur les lacunes de l’administation de l’impôt des non-résidents.

Le Comité est très préoccupé par les stratagèmes conçus pour éviter l’impôt en exploitant les conventions fiscales conclues avec d’autres pays, en particulier dans le cas de l’Accord Canada-Barbade en matière d’impôt sur le revenu. Généralement, le Canada signe des conventions fiscales avec d’autres pays pour éviter la double imposition. Or, aux termes de l’Accord Canada-Barbade, un résident de la Barbade peut réclamer une exemption de l’impôt du Canada sur des gains en capital qui seraient autrement assujettis à l’impôt canadien[1]. Cependant, comme la Barbade n’impose pas les gains en capital, les personnes visées par l’Accord peuvent éviter de payer de l’impôt lors de la réalisation d’un bien. La vérification a permis d’identifier un certain nombre de stratagèmes qui ont permis d’éviter de payer de l’impôt sur les gains en capital réalisés sur la vente d’actions de sociétés canadiennes. Dans certains cas, la société fermée en question appartenait à une fiducie étrangère ou à une société résidant dans un havre fiscal. Selon le rapport des vérificateurs, l’Agence a identifié 53 exemples d’un
stratagème ayant permis de transférer plus de 800 millions de dollars de gains en capital du Canada à la Barbade. L’ADRC examine actuellement la situation pour voir si elle peut s’y opposer avec succès
[2].

Le Comité a demandé à l’Agence ce qu’elle faisait pour contrer les stratagèmes d’évitement de l’impôt et comment elle comptait faire exécuter les dispositions fiscales, contester ces havres fiscaux et percevoir l’impôt dû. Les témoins ont affirmé que l’Agence s’en remettait largement à des sources d’information nationales et étrangères pour identifier les stratagèmes en question et les suivre de près. Le Canada a déjà pris l’initiative en établissant un groupe de travail réunissant des représentants de sept pays qui recueille et diffuse de l’information et élabore des outils pratiques pour déceler et surveiller les havres fiscaux. Par l’intermédiaire de l’ADRC, le Canada exploite les dispositions courantes des conventions fiscales pour diffuser de l’information, mener des travaux de recherche et déterminer la meilleure manière de composer avec les paradis fiscaux étrangers.

Abstraction faite des conventions fiscales courantes, l’ADRC s’efforce de contrer ces stratagèmes en invoquant les dispositions anti-évitement de la Loi de l’impôt sur le revenu et s’efforce de fixer de nouvelles cotisations et de percevoir le plus d’impôt possible. L’Agence a établi un projet consacré expressément à l’Accord Canada‑Barbade qui vise certains des stratagèmes d’évitement de l’impôt. Elle n’en est pas encore à l’étape de l’établissement de nouvelles cotisations concernant cet Accord en particulier, mais elle a déjà effectué une réévaluation des impôts d’autres fiducies étrangères. Compte tenu de la complexité des stratagèmes d’évitement de l’impôt et des conventions fiscales internationales, l’établissement des cotisations fiscales et la perception de l’impôt dû par les non-résidents continuent de faire problème et l’ADRC est consciente de ces difficultés. Un des problèmes consiste à instituer le bon cadre législatif et le bon niveau de retenue de l’impôt à la source et à créer un mécanisme qui placerait le fardeau de l’établissement de la cotisation fiscale sur les épaules du contribuable et non sur celles de l’administration fiscale. Le problème est encore plus grand au niveau de la perception même des impôts. L’ADRC a institué un groupe de travail sur les havres fiscaux et un groupe d’étude de la perception fiscale.

M. Shahid Minto a dit que, s’il était certes important que l’ADRC ne relâche pas son effort pour résoudre les problèmes que pose l’imposition des non-résidents, cet effort exige des ressources rares en temps et en compétences qui pourraient être affectées à des questions plus importantes. Selon lui, il vaudrait peut-être mieux envisager de modifier les conventions fiscales. M. William Baker a fait savoir au Comité que le gouvernement du Canada était actuellement en train de renégocier ses traités fiscaux avec 23 pays (notamment le traité Canada-Barbade), mais qu’il faudrait encore beaucoup de temps avant que cela ne soit terminé et qu’on en voie les résultats.

Le Comité, conscient de la complexité des questions entourant les conventions fiscales internationales, formule les recommandations suivantes :

RECOMMANDATION No 1

Le Comité recommande que lAgence des douanes et du revenu du Canada intègre à son rapport sur les plans et les priorités, à partir de celui portant sur lexercice se terminant le 31 mars 2003,une section sur les problèmes que posent les traités fiscaux internationaux et quelle y indique le nombre des traités en cours de renégociation, les problèmes qui restent à résoudre et, dans la mesure du possible, le montant estimatif des cotisations de l’impôt sur le revenu qui reste à percevoir sur le revenu des non-résidents.

RECOMMANDATION No 2

Le Comité recommande que l’Agence des douanes et du revenu du Canada intègre à son rapport sur le rendement, à partir de celui portant sur l’exercice se terminant le 31 mars 2003, une section sur les problèmes que posent les traités fiscaux internationaux et qu’elle y indique le nombre des négociations qui ont abouti, de même que les problèmes réglés et ceux qui exigeront d’autres pourparlers, ainsi que le montant total de l’impôt perçu auprès de non-résidents et le montant estimatif des cotisations de l’impôt sur le revenu qui reste à percevoir sur le revenu des non-résidents.

Le Comité trouve aussi très inquiétant le manque d’uniformité observé dans l’administration de l’impôt des non-résidents. Pour une situation fiscale donnée, le contribuable doit pouvoir s’attendre à être traité de la même manière par n’importe quel bureau des services fiscaux au Canada. Pour que les contribuables soient traités de manière uniforme, l’administration centrale doit communiquer de façon efficace ses lignes directrices aux bureaux locaux. Les vérificateurs ont cependant observé plusieurs disparités entre les bureaux des services fiscaux pour ce qui est de certaines pratiques de fonctionnement et d’établissement des nouvelles cotisations[3]. Les membres du Comité ont discuté du manque d’uniformité apparent dans l’administration de l’impôt des non-résidents et ont demandé si l’ADRC avait pris des mesures correctives à ce sujet. M. William Baker a dit au Comité que l’Agence faisait de son mieux pour garantir l’application uniforme des lois fiscales, mais qu’en raison du grand nombre de bureaux des services fiscaux et des spécialités différentes des agents qui y travaillent, il pouvait arriver que surviennent de subtiles différences dans l’administration de l’impôt sur le revenu à la suite d’interprétations divergentes des lois et politiques fiscales. M. Baker a ajouté que l’Agence est très sensible à la perception qu’a la population de l’équité de l’impôt et qu’elle s’efforce, à l’aide de programmes de surveillance et de mesure du rendement, d’appliquer la Loi de l’impôt sur le revenu de manière uniforme.

Plus précisément, les vérificateurs ont observé que, dans certains cas, l’Agence n’avait pas identifié, estimé, ni perçu l’impôt sur le revenu canadien dont certains contribuables non-résidents étaient peut-être redevables en plus des sommes retenues à la source pour des services rendus au Canada. Le Bureau du vérificateur général a recommandé que l’Agence adopte une procédure plus systématique à l’égard des non‑résidents qui ne se conforment pas aux exigences en matière de production de déclaration de revenus. L’Agence convient du bien-fondé de la recommandation et a fait savoir que, au moment où la vérification était effectuée, elle procédait à un examen de l’observation par les non-résidents sur les plans de la politique, des procédures, des systèmes et de la législation en vue d’améliorer les efforts d’observation et d’exécution visant les non-résidents[4]. Le Comité a voulu se renseigner sur l’état d’avancement de cette étude. Mme Jeanne Flemming a dit au Comité que les conclusions de l’étude étaient connues et qu’un plan d’action avait été dressé. Cela amène le Comité à formuler la recommandation suivante :

RECOMMANDATION No 3

Le Comité recommande que lAgence des douanes et du revenu du Canada dépose auprès du Comité permanent des comptes publics de la Chambre des communes, au plus tard le 31 décembre 2002, un rapport sur son étude de lobservation de limpôt par les non-résidents, de même que son plan daction à cet égard et son calendrier de mise en œuvre.

CONCLUSION

Le Comité est très préoccupé par les questions soulevées dans le rapport au sujet de l’administration de l’impôt international par l’Agence des douanes et du revenu du Canada. Nous trouvons particulièrement inquiétants le manque d’uniformité dans l’administration de l’impôt des non-résidents et les stratagèmes d’évitement de l’impôt associés à certains traités fiscaux bilatéraux.

Le Comité estime que l’application uniforme de la Loi de l’impôt sur le revenu est vitale pour l’Agence comme pour les contribuables canadiens et non-résidents. L’idée que se fait la population en général de l’équité et de l’uniformité de l’application de l’impôt sur le revenu a des répercussions directes sur la crédibilité de l’Agence et sur son aptitude à percevoir l’impôt. L’Agence sera d’autant mieux capable de percevoir l’impôt sur le revenu que les contribuables seront persuadés que la législation fiscale est interprétée intelligemment et appliquée uniformément.

Le Comité est conscient du fait que l’Agence a à cœur l’équité fiscale et loue la diligence qu’elle met à résoudre les problèmes qui demeurent au niveau de l’observation et de l’exécution de l’impôt sur le revenu des non-résidents. Il s’attend que l’Agence
mènera à bon terme les initiatives courantes visant à remédier aux lacunes décelées dans l’administration de l’impôt des non-résidents et fera rapport au Parlement des progrès réalisés à ce chapitre en temps opportun.

Conformément à l’article 109 du Règlement, le Comité demande que le gouvernement dépose une réponse globale au présent rapport.

Un exemplaire des procès-verbaux pertinents (séances nos 43 et 56) est déposé.

Respectueusement soumis,

 

 

Le président,

 

JOHN WILLIAMS, DÉPUTÉ

 



[1]       Bureau du vérificateur général du Canada, Rapport 2001, Agence des douanes et du revenu du Canada — L’administration de l’impôt international : les non-résidents assujettis à l’impôt sur le revenu du Canada, Ottawa, 2001, p. 23-34.

[2]       Ibid., p. 24.

[3]       Ibid., p. 19.

[4]       Ibid., p. 22.