Passer au contenu
Début du contenu

PACC Rapport du Comité

Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.



CHAMBRE DES COMMUNES
OTTAWA, CANADA
K1A 0A6


Conformément à l’article 108(3)e) du Règlement, le Comité permanent des comptes publics de la Chambre des communes a l’honneur de présenter son

VINGT-QUATRIÈME RAPPORT

Le Comité permanent des comptes publics a examiné les chapitres 2 et 3 du rapport de décembre 2001 du vérificateur général du Canada intitulés Recruter pour la fonction publique canadienne de demain : Modifier le système et Modifier les pratiques. Il s’est mis d’accord sur le compte rendu suivant.

INTRODUCTION

Les méthodes et systèmes actuels de recrutement dans les ministères et organismes qui constituent le « noyau » de la fonction publique[1] sont considérés comme indûment complexes, lourds et onéreux. Selon un sondage récent, plus de 57 % des mesures d’embauchage à la fonction publique fédérale ont duré plus de trois mois et près d’un tiers, six mois ou plus[2]. Par conséquent, pour contourner les longs délais caractéristiques du processus officiel de dotation, l’habitude s’est créée dans ce « noyau » d’embaucher à court terme. Bien que cela ait permis de gagner du temps, une telle pratique sur aussi grande échelle n’attire probablement pas les employés talentueux et spécialisés, surtout aux postes professionnels et administratifs intermédiaires.

La préférence accordée au recrutement à court terme remet en question la capacité du gouvernement fédéral d’attirer et de maintenir en poste un nombre suffisant d’employés qualifiés et talentueux pour assumer ses obligations et assurer programmes et services à la population en général. Ces questions sont d’autant plus pertinentes que la fonction publique fédérale devra relever des défis considérables pour se renouveler au cours des années à venir. Il y aura sans doute pénurie de main-d’œuvre dans de nombreuses professions, une portion croissante de l’effectif fédéral arrivant à l’âge de la retraite. L’évolution de la nature du travail modifiera également la composition de la fonction publique fédérale, puisqu’une proportion moindre de personnel se consacrera à des tâches opérationnelles et de soutien et qu’un effectif plus important sera affecté à des fonctions scientifiques et techniques et des tâches de gestion et d’élaboration de politiques. Les autres facteurs entrant en ligne de compte sont l’évolution des attitudes du public à l’égard de l’attrait de la fonction publique comme employeur et la concurrence croissante livrée par le secteur privé et d’autres employeurs publics à l’égard des travailleurs qualifiés.

Le Comité des comptes publics s’intéresse toujours à la capacité du gouvernement fédéral de gérer efficacement ses ressources humaines. Récemment, il a examiné les questions liées au système de gestion des ressources humaines au gouvernement fédéral et à l’administration et la gestion du Programme de recrutement postsecondaire et déposé un rapport sur le sujet au Parlement. Il s’inquiète de la capacité du gouvernement d’être à la hauteur des défis que pose le renouvellement de la fonction publique fédérale.

Étant donné son intérêt continu pour la question, le Comité s’est réuni le 19 février 2002 pour analyser les conclusions du rapport de vérification et les commentaires des témoins sur les questions concernant les pratiques et systèmes de recrutement dans la fonction publique fédérale. Le bureau du vérificateur général était représenté par M. Michael McLaughlin (sous-vérificateur général), Mme Maria Barrados (vérificatrice générale adjointe) et Mme Kathryn Elliott (directrice principale). Du Groupe de travail sur la modernisation de la gestion des ressources humaines, étaient présents M. anald A. Quail (sous-ministre et chef) et Mme Monique Boudrias (sous-ministre adjointe et conseillère principale). Du Secrétariat du Conseil du Trésor étaient présents M. Frank Claydon (secrétaire du Conseil du Trésor et contrôleur général du Canada) et Mme Glynnis French (secrétaire adjointe, Planification et analyse stratégique, Direction des ressources humaines). La Commission de la fonction publique du Canada était représentée par M. Scott Serson (président), Mme Amelita A. Armit (vice-présidente, Direction générale des programmes de dotation et de recrutement) et M. Douglas Rimmer (vice-président, Direction générale des politiques, de la recherche et des communications).

OBSERVATIONS ET RECOMMANDATIONS

Le Comité s’inquiète beaucoup de la prédominance du recrutement à court terme dans la fonction publique fédérale Les membres ont interrogé à plusieurs reprises les témoins à propos des raisons de ce phénomène. Selon les vérificateurs, l’embauchage à court terme est devenu une méthode privilégiée pour contourner les procédures et systèmes de dotation officiels, considérés comme lourds, complexes et coûteux. Avec le temps, les mesures prises pour protéger les principes du mérite et de l’impartialité politique à la fonction publique ont paradoxalement conduit à un processus régi désormais par des règlements extrêmement contraignants et détaillés. Qui plus est, 30 années de jurisprudence ont transformé le processus d’appel et de recours en matière de dotation en un mécanisme quasi judiciaire, rendant le recrutement encore plus contraignant et mal aisé[3]. Pour éviter les appels de décisions en matière de dotation, les conseillers en ressources humaines suivent désormais fidèlement les règles et règlements, ce qui allonge et complique considérablement le recrutement. Néanmoins, la fonction publique fédérale doit continuer de recruter et de combler les postes vacants en temps voulu et de manière économique. C’est pour cela qu’un processus de recrutement à court terme informel en est venu à remplacer les procédures et systèmes officiels.

Dans certains cas, la Commission de la fonction publique a délégué tous les pouvoirs en matière de dotation aux ministères, permettant à ces derniers d’élaborer leur propre mode de recrutement et d’embaucher des groupes particuliers de professionnels hors de la fonction publique. Dans ces cas-là, les vérificateurs ont observé que le processus de dotation était plus efficient et plus rapide, la majorité des postes visés étant à durée indéterminée. Ils ont également observé les pratiques en matière d’embauche de certaines sociétés d’État et employeurs distincts non régis par la Loi sur l’emploi dans la fonction publique et ont remarqué que, bien que leurs principes et politiques en matière d’embauche ne soient pas foncièrement différents de ceux du noyau de la fonction publique, ces entités étaient plus habiles en dotation et comblaient plus rapidement les postes de cadre (de deux semaines jusqu’à trois mois[4]).

La Commission de la fonction publique a entrepris sa propre étude des mesures de dotation et du temps qu’il faut pour recruter à la fonction publique, en s’attardant aux concours fondés sur le mérite relatif, qui sont les plus complexes et, parfois, les plus lentes des procédures d’embauchage. Cette étude a révélé qu’en moyenne il fallait quatre ou cinq mois pour mener à bien une mesure de dotation au sein de la fonction publique fédérale; elle a également conclu que cette durée pouvait varier, puisqu’un quart des mesures de dotation prenaient au plus six semaines. La Commission a aussi analysé les pratiques en matière de recrutement de l’Agence des douanes et du revenu du Canada, employeur distinct non régi par la Loi sur l’emploi dans la fonction publique, et remarqué que cette agence avait amélioré son comportement pour ce qui est de la dotation, essentiellement en remaniant ses méthodes de recours et d’appels[5]. C’est pour ces raisons que le Comité recommande :


RECOMMANDATION 1

Que le Groupe de travail sur la modernisation de la gestion des ressources humaines dans la fonction publique envisage de modifier la Loi sur l’emploi dans la fonction publique et la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique de manière à rationaliser, simplifier et accélérer le processus d’appel et de recours en matière de dotation.

RECOMMANDATION 2

Que la Commission de la fonction publique réexamine son mandat législatif afin de déterminer si elle n’a pas trop délégué aux ministères et organismes ses responsabilités en matière de recrutement mettant ainsi en péril sa capacité d’assurer l’embauche d’une fonction publique non-partisane représentative et compétente.

Le Comité s’est également penché avec un grand intérêt sur les questions de rémunération, comme les primes au bilinguisme, le lien entre les salaires des hauts fonctionnaires et certaines normes du secteur privé, ainsi que la rémunération au mérite ou au rendement. Le Comité a interrogé à plusieurs reprises des témoins à propos d’une réforme de la structure de rémunération de la fonction publique visant, plus précisément, à abandonner le système fondé sur la classification des postes et l’ancienneté pour adopter un régime fondé sur le rendement ou le principe du mérite. Pour ce qui est de ce principe en matière de rémunération, M. Ranald Quail a indiqué au Comité que le mérite et la rémunération étaient en fait deux questions distinctes. Le mérite est régi par la loi et concerne les nominations impartiales du point de vue politique de personnes compétentes, alors que les questions de compensation relèvent en fait du Conseil du Trésor et sont déterminées dans le cadre du processus de convention collective[6]. M. Claydon a dit que la mise sur pied d’un système de rémunération fondé sur le mérite ou le rendement est régi par des mesures législatives pourrait se traduire, paradoxalement, par un système de rémunération rigide, incapable de s’ajuster rapidement à l’évolution du monde du travail ou du marché de la main d’œuvre[7]. Un des membres du Comité a suggéré que le principe de la rémunération au mérite ou au rendement pourrait faire l’objet de mesures législatives sans que l’on ne précise la structure de rémunération ou les échelles de salaire[8]. Le Comité formule les recommandations suivantes :

RECOMMANDATION 3

Que le Groupe de travail sur la modernisation de la gestion des ressources humaines dans la fonction publique établisse s’il est possible de modifier les lois pertinentes de manière à y incorporer le principe de la rémunération au mérite.

RECOMMANDATION 4

Que le Secrétariat du Conseil du Trésor établisse s’il est possible d’introduire un mode de rémunération au mérite dans la fonction publique et, ceci fait, présente les résultats de son analyse au Parlement, ainsi que les coûts et avantages attendus d’un tel régime de rémunération.

Le Comité s’est enquis de l’évolution de la réforme du système de classification des emplois. De nombreux membres craignent que le système actuel de classification, associé au processus de convention collective, n’ait compliqué les régimes de dotation, de rémunération et d’avantages sociaux de la fonction publique. Le gouvernement fédéral a déjà pris certaines mesures pour simplifier les règles et règlements et réduire le nombre de classifications des postes; il développe actuellement un système de classification, mais il reste encore beaucoup à faire. Le Comité recommande donc :

RECOMMANDATION 5

Que le Secrétariat du Conseil du Trésor achève dès que possible le développement d’un système de classification et, ceci fait, dépose un rapport au Parlement.

Le Comité s’est également inquiété des pratiques que suivent les ministères pour ce qui est du recrutement, et surtout de la planification des ressources humaines, et estime qu’ils devraient élaborer des stratégies de recrutement tenant compte de leurs plans de gestion des ressources humaines et de leurs plans stratégiques et opérationnels. Selon le rapport des vérificateurs, 22 % seulement des ministères sondés disposaient de plans officiels de ressources humaines les aidant à planifier leur recrutement[9], et un ministère seulement a indiqué avoir fait des progrès pour ce qui est d’intégrer son plan des ressources humaines et son plan d’activités. Les vérificateurs ont également signalé que les ministères ne traduisaient pas leurs plans en stratégies de recrutement précises comprenant des cibles, des plans de commercialisation ou des calendriers.


Le Comité s’est intéressé aux projets de la Commission de la fonction publique visant à mettre sur pied graduellement une zone de sélection nationale pour les concours publics dans la fonction publique fédérale. Pour que ce projet réussisse, il faudrait de meilleurs outils électroniques de recrutement de manière à pouvoir gérer le surcroît de demandes qui en découlerait. L’élargissement de la zone de sélection sans meilleurs  système et outils de recrutement pour l’appuyer serait contre-productif, de l’avis des vérificateurs, et se traduirait par un recours encore plus grand à l’embauche à court terme[10]. À la lumière de ces constatations, le Comité formule les recommandations suivantes :

RECOMMANDATION 6

Que le Secrétariat du Conseil du Trésor et la Commission de la fonction publique consultent les ministères et les organismes afin qu’ils développent des plans en matière de ressources humaines et veillent à ce que ces plans fassent partie intégrante de leurs plans d’activités.

RECOMMANDATION 7

Que la Commission de la fonction publique développe des politiques et procédures pour créer un mécanisme de sélection national sur le recrutement global dans la fonction publique et communique ses constatations dans un rapport au Parlement le 31 octobre 2002 au plus tard.

Les vérificateurs signalent, encore une fois, l’insuffisance de l’information fournie au Parlement et au public sur la gestion des ressources humaines. Trois organismes centraux, le Bureau du Conseil privé, le Secrétariat du Conseil du Trésor et la Commission de la fonction publique, signalent divers aspects du régime de gestion des ressources humaines dans la fonction publique. Le Bureau du Conseil privé fournit une orientation stratégique sur des questions d’ordre général ou des priorités de grande envergure liées à la fonction publique, mais offre peu d’informations précises sur le rendement attendu ou effectif. Le Secrétariat du Conseil du Trésor a récemment mis sur pied un cadre complet en vue d’assurer une saine gestion des ressources humaines, mais il doit faire plus pour que les ministères et les organismes fédéraux l’utilisent effectivement. La Commission de la fonction publique devrait consolider le contenu informatif de ces documents redditionnels, s’attacher moins aux activités de la Commission et plus aux résultats de ces dernières ainsi qu’aux défis que doit relever la Commission. Le Comité recommande donc :

RECOMMANDATION 8

Que le Bureau du Conseil privé fournit une orientation stratégique au Secrétariat du Conseil du Trésor et à la Commission de la fonction publique visant à clarifier leurs rôles et responsabilités concernant l’information fournie au Parlement et au public concernant les questions de gestion des ressources humaines.

RECOMMANDATION 9

Que le Secrétariat du Conseil du Trésor et la Commission de la fonction publique consolident le contenu de leurs documents redditionnels qui ont trait aux questions de gestion des ressources humaines, en insistant en particulier sur les résultats de leurs activités de gestion des ressources humaines et que ces rapports contiennent des renseignements sur les résultats attendus et obtenus. Que ces organismes commencent à présenter ces nouveaux renseignements dans ce nouveau format pour l’exercice se terminant le 31 mars 2003.

CONCLUSION

Le Comité reconnaît les efforts que déploie actuellement le gouvernement pour renouveler et consolider le régime de gestion des ressources humaines. Les procédures et systèmes de recrutement en vigueur sont devenus très complexes, lourds et onéreux, à telle enseigne que l’on recrute essentiellement à court terme pour contrer ces inconvénients. Cette pratique remet en question la capacité du gouvernement fédéral d’attirer et de maintenir en poste les employés talentueux et spécialisés dont il aura besoin pour continuer d’assurer des services et des programmes de qualité à la population. Pour simplifier les systèmes actuels de gestion des ressources humaines, il faudra réformer fondamentalement le cadre législatif et réglementaire régissant le régime de gestion des ressources humaines. Le Comité presse donc le Groupe de travail sur la modernisation de la gestion des ressources humaines de terminer dès que possible son examen des lois et règlements pertinents et de formuler les recommandations nécessaires au Cabinet. Cet examen doit être effectué correctement pour que la capacité de la fonction publique fédérale de relever les défis actuels et futurs en matière de ressources humaines ne soit pas compromise. Par ailleurs, le Comité presse également les organismes centraux visés par le régime de gestion des ressources humaines de corriger les lacunes observées dans les pratiques et procédures de recrutement, en consolidant notamment la planification globale des ressources humaines, en améliorant les outils de recrutement et en communiquant mieux les renseignements pertinents en matière de ressources humaines.


Conformément à l’article 109 du Règlement, le Comité demande que le gouvernement dépose une réponse globale au présent rapport.

Un exemplaire des procès-verbaux pertinents (séances nos 40 et 56) est déposé.

 

Respectueusement soumis,

 

 

Le président,

 

JOHN WILLIAMS, DÉPUTÉ



[1]        Le « noyau » de la fonction publique regroupe les employés fédéraux des 20 ministères et quelque 60 organismes régis au sein du cadre constitué de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, la Loi sur la gestion des finances publiques et la Loi sur l’emploi dans la fonction publique.

[2]        Bureau du vérificateur général du Canada, rapport 2001, chapitre 2, Recruter pour la fonction publique canadienne de demain : Modifier le système, Ottawa, 2001.

[3]        Bureau du vérificateur général du Canada, rapport 2000, chapitre 9, La rationalisation du régime de gestion des ressources humaines : une étude de l’évolution des rôles et des responsabilités, Ottawa, 2000.

[4]        Bureau du vérificateur général du Canada, rapport 2001, chapitre 2, Recruter pour la fonction publique canadienne de demain : Modifier le système, Ottawa, 2001.

[5]        Chambre des communes, Comité permanent des comptes publics, Témoignages, 1re session, 37e législature, 19 février 2002, 17:10.

[6]        Ibid., 17 h 00.

[7]        Ibid., 17 h 05.

[8]        Ibid., 17 h 15.

[9]        Bureau du vérificateur général du Canada, rapport de 2001, chapitre 3, Recruter pour la fonction publique canadienne de demain — Modifier les pratiques, Ottawa, 2001.

[10]      Ibid., p. 17.