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JUST Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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37e LÉGISLATURE, 2e SESSION

Comité permanent de la justice et des droits de la personne


TÉMOIGNAGES

TABLE DES MATIÈRES

Le mercredi 26 février 2003




¹ 1535
V         Le président (L'hon. Andy Scott (Fredericton, Lib.))
V         M. Bill Ryan (Centre d'études appliquées sur la famille, École de service social, Université McGill)
V         Mme Shari Brotman (Centre d'études appliquées sur la famille, École de service social, Université McGill)

¹ 1540
V         M. Bill Ryan
V         Mme Shari Brotman
V         M. Bill Ryan

¹ 1545
V         Mme Shari Brotman
V         Le président
V         M. Paul Harold Macklin (Northumberland, Lib.)
V         Le président
V         M. Paul Harold Macklin
V         Le président
V         Mme Lise Poulin (secrétaire générale, Confédération des syndicats nationaux)

¹ 1550

¹ 1555
V         Le président
V         Mme Mary Bennett (directrice exécutive, Conseil unitarien du Canada)

º 1600
V         R. P. Fred Cappuccino (Conseil unitarien du Canada)
V         Mme Mary Bennett

º 1605
V         R. P. Fred Cappuccino
V         Mme Mary Bennett
V         Le président
V         M. Derek Lee (Scarborough—Rouge River, Lib.)
V         Le président
V         Le président
V         M. Chuck Cadman (Surrey-Nord, Alliance canadienne)

º 1610
V         Le président
V         Mme Dominique Dubuc (Conseil central de l'Estrie, Confédération des syndicats nationaux)
V         Le président
V         Mme Mary Bennett
V         Le président
V         M. Bill Ryan
V         M. Chuck Cadman
V         Le président
V         M. Kevin Sorenson (Crowfoot, Alliance canadienne)

º 1615
V         Le président
V         Mme Dominique Dubuc
V         Le président
V         M. Richard Marceau (Charlesbourg—Jacques-Cartier, BQ)
V         Mme Mary Bennett

º 1620
V         Le président
V         Mme Shari Brotman
V         Le président
V         M. Bill Ryan
V         Le président
V         Mme Dominique Dubuc
V         Le président
V         M. John McKay (Scarborough-Est, Lib.)

º 1625
V         Le président
V         M. Bill Ryan

º 1630
V         M. John McKay
V         M. Bill Ryan
V         Mme Shari Brotman
V         Le président

º 1635
V         M. Kevin Sorenson
V         Mme Shari Brotman
V         M. Kevin Sorenson
V         M. Bill Ryan
V         M. Kevin Sorenson
V         Le président
V         M. Bill Ryan
V         Mme Lise Poulin

º 1640
V         Le président
V         M. Pat O'Brien (London—Fanshawe, Lib.)
V         Mme Lise Poulin
V         Mme Dominique Dubuc
V         M. Pat O'Brien

º 1645
V         Le président
V         M. Pat O'Brien
V         Le président
V         Mme Shari Brotman
V         M. Pat O'Brien
V         Mme Shari Brotman
V         M. Pat O'Brien
V         Le président
V         Mme Dominique Dubuc
V         Le président
V         M. Richard Marceau
V         Mme Dominique Dubuc

º 1650
V         Le président
V         M. Bill Ryan
V         Le président
V         R. P. Fred Cappuccino
V         Le président
V         M. Derek Lee
V         Mme Dominique Dubuc

º 1655
V         Le président
V         M. Derek Lee
V         Le président
V         M. Richard Marceau
V         Mme Dominique Dubuc
V         M. Richard Marceau
V         Mme Shari Brotman
V         Le président
V         R. P. Fred Cappuccino
V         Le président
V         M. Pat O'Brien

» 1700
V         Mme Dominique Dubuc
V         M. Pat O'Brien
V         Mme Dominique Dubuc
V         Le président
V         M. Vic Toews (Provencher, Alliance canadienne)

» 1705
V         R. P. Fred Cappuccino
V         M. Vic Toews
V         R. P. Fred Cappuccino
V         Le président
V         M. John Maloney (Erie—Lincoln, Lib.)
V         Mme Dominique Dubuc
V         M. John Maloney
V         Le président
V         Mme Mary Bennett
V         Le président
V         Mme Dominique Dubuc
V         Le président
V         Mme Lise Poulin

» 1710
V         Le président
V         M. Richard Marceau
V         M. Bill Ryan
V         M. Richard Marceau
V         M. Bill Ryan
V         Le président
V         M. Joe Peschisolido (Richmond, Lib.)

» 1715
V         Mme Shari Brotman
V         Le président
V         M. John McKay

» 1720
V         M. Bill Ryan
V         Le président
V         Mme Shari Brotman
V         Le président
V         M. Pat O'Brien

» 1725
V         M. Bill Ryan
V         M. Pat O'Brien
V         M. Bill Ryan
V         Le président
V         Mme Mary Bennett
V         Le président
V         M. Chuck Cadman
V         Le président
V         Le président
V         M. Pat O'Brien
V         Le président
V         M. Pat O'Brien

» 1730
V         Le président
V         M. Pat O'Brien
V         Le président
V         M. Pat O'Brien
V         Le président
V         M. Svend Robinson (Burnaby—Douglas, NPD)
V         Le greffier du comité (Patrice Martin)
V         M. Svend Robinson
V         Le président
V         M. Richard Marceau
V         Le président










CANADA

Comité permanent de la justice et des droits de la personne


NUMÉRO 023 
l
2e SESSION 
l
37e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mercredi 26 février 2003

[Enregistrement électronique]

¹  +(1535)  

[Traduction]

+

    Le président (L'hon. Andy Scott (Fredericton, Lib.)): Je déclare ouverte la 23e séance du Comité permanent de la justice et des droits de la personne. Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, nous poursuivons notre étude de la question du mariage et de la reconnaissance des unions de conjoints de même sexe.

    Nous recevons aujourd'hui trois groupes de témoins : les professeurs Shari Brotman et Bill Ryan de l'École de service social de l'Université McGill, Mme Lise Poulin, secrétaire générale et Mme Dominique Dubuc, du Conseil central de l'Estrie, pour la Confédération des syndicats nationaux, et de l'église unitaire du Canada, Mme Mary Bennett, directrice exécutive, et le révérend Fred Cappuccino.

    J'espère que vous savez tous que nous nous attendons à des déclarations d'une dizaine de minutes et que lorsque vous avez deux porte-parole, vous partagez ce temps. Vous avez peut-être lu des articles sur les travaux du comité. Nous convenons tous, ici sans doute, qu'on a un peu exagéré. Je crois que nous travaillons raisonnablement bien, mais je vous demande à tous d'être respectueux et je parle aussi aux membres du comité.

    Je donne d'abord la parole à l'École de travail social de l'Université McGill, soit aux professeurs Brotman et Ryan, qui ont 10 minutes.

+-

    M. Bill Ryan (Centre d'études appliquées sur la famille, École de service social, Université McGill): Merci beaucoup de cette occasion de parler au comité aujourd'hui. J'aimerais vous dire un peu qui nous sommes, puis vous décrire les points saillants du mémoire que nous vous avons présenté plus tôt ce mois-ci.

    Nous sommes deux universitaires qui effectuons des travaux de recherche et qui enseignons dans le domaine de la santé et des services sociaux. Nous avons reçu, et recevons encore, des fonds de recherche, homologués par nos collègues, des organismes suivants : les Instituts de recherche en santé du Canada, le Conseil de recherche en sciences humaines, le Conseil québécois de la recherche sociale, les Fonds de la recherche en santé du Québec, le Programme national de recherche et de développement en matière de santé et le Programme de subventions nationales au bien-être social. Nous avons aussi effectué des recherches dans les domaines suivants : le vécu des jeunes gais et lesbiennes, les rapports entre les jeunes gais, lesbiennes et bisexuels et leurs parents, l'accès aux soins de santé et aux services sociaux pour les gais, lesbiennes et bisexuels partout au Canada, le vécu d'hommes et de femmes autochtones gais, lesbiennes et bissexuels, le suicide chez les jeunes gais et lesbiennes, le vécu des gens âgés gais et lesbiennes pour ce qui est de l'accès aux services pour personnes âgées.

    Nous détenons des diplômes en théologie, en travail social et en éducation de divers établissements universitaires, au Canada et en Europe. Nous coprésidons un consortium universitaire national de recherche sur l'orientation sexuelle et la santé et les droits de la personne. Nous avons publié des articles sur la santé et les politiques sociales notamment dans The Gerontologist, le Canadian Journal of Community and Mental Health, le Canadian Social Work, le Journal of Gay and Lesbian Social Services ainsi qu'une série de rapports pour Santé Canada se rapportant à la discrimination et à l'orientation sexuelle.

+-

    Mme Shari Brotman (Centre d'études appliquées sur la famille, École de service social, Université McGill): Comme Bill l'a dit, nous sommes tous deux très heureux de pouvoir nous présenter devant vous aujourd'hui, afin de débattre d'une question si importante, c'est une question qui nous tient à coeur comme professionnels, comme personnes et comme citoyens du Canada, une question qui nous préoccupe depuis une vingtaine d'années, en qualité d'auteurs, d'éducateurs, de chercheurs et d'activistes.

    Si aujourd'hui notre attention se porte précisément sur la légalisation du mariage de conjoints de même sexe, nous devons voir cette question dans son contexte approprié, c'est-à-dire la reconnaissances des gais et lesbiennes ainsi que de leur droit à un traitement légal comme citoyens canadiens, tant dans les politiques que dans les lois. Nous devons donc examiner cette question sous l'angle de l'équité et de la justice sociale, parce que ce dont il est question ici, aujourd'hui, c'est ni plus ni moins que la fin de la discrimination contre des citoyens canadiens et l'affirmation, comme société, que nous croyons que tous les citoyens du Canada, quelle que soit leur orientation sexuelle, ont également le droit de faire partie de cette société et de voir leurs relations reconnues par elle.

¹  +-(1540)  

+-

    M. Bill Ryan: Nous traiterons cet après-midi de six points saillants de notre mémoire, sans lire le texte. Voici lesquels : Il faut se rappeler que les droits de la personne, la Charte canadienne des droits et libertés et ce comité de la justice qui s'occupe beaucoup d'affaires sociales existent pour protéger les droits des minorités. On ne peut pas invoquer les sondages pour justifier de ne pas protéger les droits des minorités. Si on se servait des sondages pour prendre des décisions, en matière de justice sociale, nous vivrions toujours dans une société qui accepterait l'esclavage, l'idée que les femmes ne sont pas des personnes et les restrictions sur le mariage interracial, entre autres.

    Deuxièmement, il ne faut pas oublier que le Canada est un phare en matière des droits de la personne, et certainement l'un des leaders, pour l'émancipation de ses citoyens gais et lesbiennes. Nous devons en être très fiers, sans toutefois oublier le chemin qu'il reste à parcourir.

+-

    Mme Shari Brotman: Tout en reconnaissant le droit des institutions religieuses d'établir leurs propres doctrines et de décider qui elles voudront marier, il ne faut pas oublier que le Canada est une démocratie pluraliste, sans religion d'État, où l'église et l'État sont séparés. Dans ce contexte, le mariage n'est pas qu'un acte religieux, c'est aussi un acte civil régissant les relations entre des personnes formant un couple, qu'ils choisissent ou non de célébrer cette union dans un contexte religieux. Dans ce contexte, le gouvernement fédéral doit fixer les politiques relatives au mariage, et cela, sans préjugé.

    Au cours des trois dernières décennies, dans le cadre d'action judiciaire ou de mesures politiques, le Canada a éliminé presque tous les vestiges de la discrimination légale institutionnalisée. La reconnaissance des couples de même sexe est toutefois une question à régler, comme l'ont affirmé les cours supérieures de trois provinces.

    Comme spécialistes des sciences sociales, nous pouvons vous dire que la discrimination a une incidence dommageable considérable sur la vie des gais et lesbiennes du Canada. Pour s'en convaincre, il n'y a qu'à voir les statistiques sur la violence motivée par la haine ainsi que sur le suicide chez les jeunes gais et lesbiennes. Des jeunes se suicident non parce qu'ils sont homosexuels, mais à cause de l'homophobie. La création d'une seconde classe de citoyens, et le fait de ne pas accorder l'égalité en droit aux couples de même sexe ne fait que renforcer la perception selon laquelle ne sont pas valorisées les vies, les relations et les familles des gais et des lesbiennes. Cela renforce la discrimination systémique, dont l'effet se répercute partout dans la société.

+-

    M. Bill Ryan: En outre, c'est présenter un bien faible argument pour justifier l'exclusion des couples de même sexe que de prétendre que le mariage hétérosexuel est le seul qui vaille la peine d'être validé, à cause de sa capacité procréative. Même les couples hétérosexuels ne sont procréateurs que pour une courte période de temps. Pour les couples qui durent longtemps, le gros de la vie sexuelle sert surtout l'expression de l'amour et du plaisir. Les couples qui se marient tard, qui sont stériles, ou qui choisissent de ne pas avoir d'enfants seraient exclus et pourraient faire l'objet de discrimination si on agissait exclusivement du point de vue de la nature procréative du mariage.

    Voulons-nous exclure ces couples-là aussi de notre vision du mariage? Ce serait logique, si on retient l'argument de la procréation. Nous risquerions aussi de stigmatiser ces hommes et ces femmes qui sont chefs de famille monoparentale. Quoi qu'il en soit, les arguments théologiques invoqués autrefois contre l'homosexualité, en raison de sa non-procréativité, interdisaient aussi la contraception, le sexe oral et la masturbation comme activités non procréatrices.

    D'autres, qui sont contre le mariage homosexuel, se disent préoccupés par la situation des enfants qui sont le fruit de ces relations ou qui y sont élevés. Disons simplement qu'après 25 années de recherches dans ce domaine par des chercheurs homologués par leurs pairs, en Amérique du Nord et en Europe, on conclut que le développement social, psychologique, affectif et sexuel de ces enfants ne souffre pas du fait qu'ils sont élevés par des ménages de même sexe. Pour le vérifier, vous pouvez lire la déclaration de l'American Academy of Pediatrics intitulée «Coparent or Second-Parent Adoption by Same-Sex Parents».

    Cet organisme a publié en 2002 un énoncé de politique qui confirmait clairement qu'il n'y avait pas de raison scientifique pour justifier les politiques contre l'homoparentalité. Toute stigmatisation des enfants élevés par des parents de même sexe est causée par la discrimination et doit être traitée de la même façon que les situations de racisme contre des enfants de groupes minoritaires : il ne s'agit pas de blâmer la famille victime, mais d'essayer d'éliminer le racisme ou, dans ce cas-ci, l'homophobie. Pourriez-vous imaginer qu'on prétende qu'à cause du racisme, les femmes et les hommes noirs ne devraient pas avoir d'enfants?

    Il convient aussi de souligner que les politiques familiales sont de compétence provinciale et que la plupart des provinces reconnaissent maintenant les familles homosexuelles et les couples homosexuels, et qu'elles accordent le droit à l'adoption et à la situation de famille d'accueil aux couples de même sexe.

¹  +-(1545)  

+-

    Mme Shari Brotman: En conclusion, nous voudrions citer une autorité plus éloquente que nous, sur l'importance de ce débat :

    Il est facile de dire que quiconque «nous» ressemble a droit à l'égalité. Chacun de vous trouve cependant plus difficile de soutenir que les gens «différents», sous un aspect ou un autre, doivent jouir des mêmes droits à l'égalité que nous. Pourtant, dès que nous affirmons qu'un groupe énuméré [...] ou un groupe analogue ne mérite pas la même protection et le même bénéfice de la loi, ou n'en est pas digne, toutes les minorités et toute la société canadienne se trouvent avilies. [...] La reconnaissance de ce droit aux minorités aurait pu, dans le passé, éviter les trop nombreuses tragédies qui ont ponctué l'histoire.

Il s'agit d'une citation de la Cour suprême du Canada, datant de 1998.

    Nous vous implorons donc, pour la suite du monde et pour la fin immédiate de la discrimination, d'accepter cette égalité plutôt que de laisser le pouvoir judiciaire vous forcer à le faire. Toute mesure moindre que l'accès au mariage indiquera aux gais et lesbiennes du Canada, qui sont avant tout des citoyens et des contribuables, qu'ils sont des citoyens de seconde zone dans leur propre pays.

    Merci.

+-

    Le président: Merci beaucoup.

    Monsieur Macklin, vous avez la parole.

+-

    M. Paul Harold Macklin (Northumberland, Lib.): J'invoque le Règlement : nous pourrions peut-être prendre quelques minutes pour clarifier une question, pendant que nous sommes en nombre suffisant. Il s'agit du projet de loi C-231, aussi appelé la loi de Lisa, dont nous sommes saisis. D'après notre calendrier, il me semble opportun de demander de nouveau au Parlement de prolonger nos audiences sur cette question d'une autre tranche de 30 jours de séance.

+-

    Le président: Y a-t-il des objections? Non?

    Des voix : D'accord.

+-

    M. Paul Harold Macklin: Merci.

+-

    Le président: Je tiens à remercier les témoins de l'École de travail social de l'Université McGill, qui s'en sont tenus à huit minutes, ce qui nous a permis de régler nos affaires.

    Nous passons maintenant à la Confédération des syndicats nationaux, avec Mmes Lise Poulin et Dominique Dubuc.

[Français]

+-

    Mme Lise Poulin (secrétaire générale, Confédération des syndicats nationaux): Je remercie beaucoup mes collègues; je vais pouvoir prendre les deux petites minutes qu'ils n'ont pas utilisées.

    Merci, monsieur le président, de permettre à la Confédération des syndicats nationaux d'apporter sa contribution à l'occasion de cette consultation sur le mariage et la reconnaissance des unions de conjoints de même sexe.

    La CSN est une organisation syndicale qui compte plus de 270 000 membres regroupés dans près de 2 600 syndicats répartis sur l'ensemble du territoire québécois et canadien et qui représente tous les secteurs de l'activité économique. La CSN est bien enracinée dans son milieu et elle oeuvre depuis ses origines à l'amélioration du sort non seulement de ses membres, mais aussi de toutes celles et de tous ceux qui subissent de la discrimination, cela dans une perspective d'égalité.

    La CSN s'est impliquée dans les débats et a pris position en faveur de la reconnaissance des conjoints et conjointes de même sexe depuis 1988 par le biais de prises de position en congrès, de la négociation de clauses dans les conventions collectives, et de la participation aux consultations gouvernementales sur la question et, dernièrement, à celles sur l'union civile au Québec. À cet égard, la CSN fait preuve de constance quant à ses objectifs: égalité des droits pour les gais et lesbiennes individuellement ou en couple, reconnaissance des couples et de leur famille, et protection égale pour leurs enfants.

    Depuis 1999, le dossier de la reconnaissance des couples de même sexe a connu une évolution importante par l'adoption, à l'Assemblée nationale du Québec, de la loi 32 et, à la Chambre des communes à Ottawa, de la loi C-23 et, de nouveau au Québec, de la Loi instituant l'union civile et établissant de nouvelles règles de filiation en juin 2002.

    Cette évolution a laissé croire à la population en général que l'égalité entre les personnes hétérosexuelles et homosexuelles était maintenant acquise. Malgré cette perception positive générale de la situation, dans la réalité, l'égalité n'est pas atteinte puisque les couples de même sexe n'ont toujours pas la possibilité de choisir le mariage, seul statut conjugal reconnu partout au Canada qui donne accès à des responsabilités et à des droits plus engageants des membres du couple l'un envers l'autre et envers leurs enfants, s'il y a lieu.

    Tout ce débat tourne autour de la reconnaissance. Les personnes homosexuelles existent et ont toujours existé, tout comme existent et ont toujours existé des personnes de couleur différente, des gauchers, etc. Se fermer les yeux, les oreilles et le coeur, et leur interdire certains droits parce que leur caractère minoritaire équivaudrait à une anomalie, c'est faire fausse route. Bien que minoritaire, leur présence fait partie de l'ordre normal des choses. La reconnaissance mène à l'acceptation qui, elle, mène à l'égalité. Les couples et les familles que les gais et lesbiennes forment ne sont pas moins valables et ne sont pas fondés sur des valeurs différentes de celles des couples que forment les hétérosexuels.

    Il est évident que la reconnaissance légale des mariages entre conjoints de même sexe sera un moteur pour changer les mentalités par rapport à l'homosexualité en général. En ce moment, la loi canadienne confirme explicitement que les homosexuels sont des citoyens de deuxième classe malgré les dispositions de la Charte.

    Le droit de vote pour les femmes n'a pas été la panacée pour régler la discrimination à l'égard des femmes, mais c'était nécessaire pour y parvenir éventuellement.

    Nous n'avons qu'à penser aux jeunes qui se questionnent sur leur orientation sexuelle. Devant l'intolérance de notre société, plusieurs sont tentés par le suicide, et trop d'entre eux passent à l'acte. Nous devons leur envoyer un message clair: les homosexuels et les hétérosexuels sont égaux et ils ont le droit d'aspirer au bonheur.

    Aussi, la situation actuelle fait en sorte qu'au Canada, les couples de même sexe et leur famille ont des droits différents d'une province ou d'un territoire à l'autre. Ces couples et ces familles existent et existeront. Des enfants en sont nés et en naîtront encore. Des enfants ont été et seront encore adoptés par des familles dont les parents sont de même sexe. Des enfants ont vécu et vivront dans de telles familles. On recherche ici l'égalité entre ces familles et celles des couples de sexe différent. Cette égalité a trait au statut, aux obligations et aux droits relatifs à leur relation de couple, et aux obligations et droits relatifs à la relation parents-enfants.

    Le mariage est bien connu de tous et toutes. Ses implications sont claires et sont reconnues également dans tout le pays. Le mariage garantirait l'inclusion immédiate des conjoints et des conjointes de même sexe dans les lois sociales, administratives et fiscales au même titre que les conjoints et les conjointes de sexe différent. La Loi fédérale sur le divorce est aussi bien connue de tous et accorde protection aux conjoints vulnérables et aux enfants. Ces lois représentent la meilleure et la plus complète des formules pour les couples de sexe différent et pour les gais et lesbiennes qui souhaitent encadrer officiellement leur engagement de couple. En vertu de la Charte canadienne des droits et libertés et en vertu du simple bon sens, force est de constater que tous les citoyens canadiens, y compris les citoyens homosexuels, sont a priori égaux entre eux.

¹  +-(1550)  

    Par souci d'équité et de justice, la CSN réclame donc que tous les citoyens homosexuels aient accès à l'institution du mariage, comme le soutiennent la Charte ainsi que les récents jugements rendus par les cours de l'Ontario et du Québec.

    Parmi les hypothèses proposées, celle voulant que le mariage demeure une institution visant deux personnes de sexe différent repose sur le principe que le mariage est une institution qui vise la fondation d'une famille et que cela en est la nature profonde. Elle repose aussi sur la présomption que seuls des couples mariés de sexe différent peuvent fonder une famille.

    La réalité actuelle est tout autre. Les couples qui se marient ne le font pas tous dans le seul but d'avoir des enfants. De nombreuses familles existent en dehors du mariage, fondées par des couples de sexe différent et par des couples de même sexe. Par ailleurs, plusieurs couples de même sexe souhaitent se marier pour fonder une famille ou consacrer celle qu'ils ont.

    Le statu quo implique le maintien de la discrimination en fonction de l'orientation sexuelle et la poursuite du débat juridique pendant plusieurs autres années. Le possible recours à la clause dérogatoire, qui n'est valable que pour cinq ans, ne ferait que reporter à plus tard la reprise du débat et donnerait l'impression d'une volonté de se défiler. De plus, l'utilisation de cette clause, événement exceptionnel en soi, enverrait un message très négatif aux gais et lesbiennes du Canada et risquerait de renforcer les mentalités homophobes, car l'argumentation de base de plusieurs demeure, subtilement ou non, que la réalité homosexuelle est par essence mauvaise et que les citoyens homosexuels, leurs couples et leurs familles sont donc de seconde classe. Pourtant, dans cette salle et partout au Canada, nous sommes tous des citoyens égaux et nous devrions être fiers de cette égalité entre citoyens et faire tout ce qui est en notre pouvoir pour qu'elle soit enfin vraie. Laisser les couples de même sexe se marier ne porte préjudice ni à des personnes particulières ni à la société canadienne en général. Les craintes exprimées reposent sur les préjugés et l'ignorance de la réalité homosexuelle, préjugés que bien d'autres groupes, minoritaires ou non dans la société, ont eu à subir au cours de l'évolution de l'humanité.

    Nous espérons que les membres du comité ont pris connaissance de nombreuses études qui répondent aux principales questions et déconstruisent les principaux mythes répandus. Nous vous référons, entre autres, à la position de l'Académie américaine de pédiatrie, à celle de l'Association américaine de psychiatrie, aux travaux du Dr Karine Igartua et du Dr Richard Montoro, et aux publications de la chercheure Danielle Julien de l'UQAM.

    Bref, non seulement le statu quo ne règle rien, mais en plus, il constitue une entorse flagrante à la Charte canadienne des droits et libertés et, de ce fait, cause un préjudice à chaque Canadien en remettant en cause l'universalité des protections qu'elle confère. De plus, de cette hypothèse pourrait découler la tentation ségrégationniste de créer une union spéciale pour les couples de même sexe. Cette union différente du mariage, même si elle était accessible à tous les couples, qu'ils soient de même sexe ou de sexe différent, perpétuerait la discrimination et l'inégalité d'une province ou d'un territoire à l'autre sous plusieurs aspects. De plus, les couples de même sexe et leur famille seraient toujours exclus de l'institution du mariage. Cette exclusion contribuerait au maintien des préjugés voulant que ces couples et ces personnes n'aient pas la même valeur que les autres. Bref, l'hypothèse du statu quo ne respecte ni les jugements des tribunaux ni les chartes, et ne devrait même pas être envisagée.

    Une autre hypothèse veut qu'avec la collaboration des provinces et des territoires, le Parlement laisse le mariage aux institutions religieuses. Cette approche nous apparaît très négative en soi. Nier à tous les couples le droit au mariage, institution inscrite dans les moeurs et les habitudes profondes de toute notre société et dans toutes les cultures qui la composent, pour éviter d'associer les couples de même sexe et le mariage nous semble un geste disproportionné, inacceptable et lourd de sous-entendus homophobes.

    Au Canada, le mariage est une institution légale dont la célébration peut être religieuse ou civile. Certaines Églises bénissent déjà des unions homosexuelles, d'autres s'y refusent. Il n'est pas question ici d'obliger ces dernières à le faire, et il existe des moyens pour les assurer du respect de leurs convictions. Il appartient aux institutions religieuses et à leurs fidèles de décider de la conduite de leurs affaires. Cette approche devrait donc être exclue d'emblée puisqu'en plus de ne rien régler, elle enlève le droit à une célébration civile à tous les citoyens canadiens.

    Le mariage pourrait également englober les conjoints de même sexe. Nous croyons fermement que cette option est la seule qui tienne. Elle règle le problème de la discrimination à l'égard des personnes homosexuelles, des couples de même sexe et de leur famille. Elle ne cause préjudice à personne et elle est la seule qui respecte les chartes canadienne et québécoise des droits de la personne.

¹  +-(1555)  

Elle est aussi la plus simple. Les lois, règlements et programmes fédéraux, provinciaux et territoriaux actuels visant les couples mariés n'auraient pas besoin d'être modifiés, mais s'appliqueraient simplement aussi au mariage entre deux personnes de même sexe.

    Les questions de filiation, d'adoption et de parentalité, qui relèvent des provinces et territoires, ne seraient toutefois pas réglées partout. Cependant, la reconnaissance claire, par le Canada, des époux de même sexe par le mariage rendrait très difficile une argumentation à l'encontre de leur reconnaissance automatique comme parents d'enfants issus de leur union. Par extension, cette même reconnaissance légale des deux parents devrait aussi être accordée aux parents conjoints de fait de même sexe.

    En conclusion, des pas ont été faits avec la loi C-23, qui a éliminé la discrimination à l'égard des couples de même sexe en union de fait dans les lois canadiennes, mais il reste que la loi canadienne demeure fondamentalement discriminatoire en ce qui a trait à la reconnaissance juridique des couples de même sexe et à tout ce qui en découle.

    Dans son message de présentation du dossier, le ministre de la Justice, Martin Cauchon, soutenait:

Le gouvernement du Canada estime que le Parlement est le meilleur endroit où nous devrions, à titre de société, traiter de cette question.

De plus, il rappelait:

...le Parlement a un rôle essentiel à jouer lorsqu'il s'agit de déterminer des questions sociales importantes. Les récentes décisions des tribunaux ont reconnu l'importance de ce rôle, et nous avons l'intention de le remplir de manière responsable.

    Il appartient au Parlement fédéral d'accorder la pleine reconnaissance sociale et juridique aux couples de même sexe et à leur famille afin d'éliminer à leur égard toute discrimination dans les lois. La seule voie possible, à notre avis, est de donner l'accès au mariage aux couples de même sexe, qui ne sont pas différents des autres couples quand ils décident de contracter un tel engagement. Toute autre hypothèse ne repose que sur des préjugés et de l'ignorance, et tente d'éviter la seule solution logique et juste.

    Même si beaucoup d'efforts restent à faire dans cette lutte aux préjugés et à l'ignorance, la population du Canada a quand même grandement évolué vers l'inclusion des groupes différents, et cela de façon très positive. Si le Parlement fédéral décidait de permettre le mariage aux couples de même sexe, reconnaissant ainsi ces couples et leurs familles, il suivrait et précéderait à la fois la poursuite de cette évolution. Nous le lui recommandons fortement.

    Merci beaucoup.

[Traduction]

+-

    Le président: Merci beaucoup.

    Et enfin, du Conseil unitaire canadien, Mme Mary Bennett, directrice exécutive, et le révérend Fred Cappuccino.

+-

    Mme Mary Bennett (directrice exécutive, Conseil unitarien du Canada): Merci.

    Je m'appelle Mary Bennett, je suis la directrice exécutive du Conseil unitarien du Canada, soit le bureau national de l'Église unitarienne canadienne.

    Je suis accompagnée du révérend Fred Cappuccino qui célébrera son 50e anniversaire de pastorat au mois de juin et son 50e anniversaire de mariage, au mois de juillet. Ils sont parents de 21 enfants : deux enfants directs et 19 enfants adoptés. Ils ont travaillé avec les enfants tout au long de leur vie adulte, au sein de l'église, et par le biais de deux organismes caritatifs qu'ils ont créés, le Families for Children et le Child Haven International. Le révérend Cappuccino et son épouse ont reçu de nombreux prix, le plus important étant celui de l'Ordre du Canada en 1996, ainsi qu'un prix de l'UNESCO pour l'enseignement des droits de l'homme en 1989.

    Nous sommes heureux de pouvoir présenter ici la position du Conseil unitarien du Canada. Nous allons parcourir notre mémoire, en sautant certains paragraphes et en en résumant d'autres.

    Le Conseil unitarien du Canada soutient vigoureusement la position d'EGALE qui a demandé au gouvernement fédéral d'adopter une loi visant à éliminer le critère d'hétérosexualité pour qu'un mariage soit légal, pour permettre ainsi aux couples de même sexe de se marier librement. En tant qu'organisme, nous avons toujours défendu les droits des gais et des lesbiennes, notamment avec l'adoption d'une résolution lors de notre réunion annuelle de 1984, qui soutenait les chefs religieux célébrant des unions entre gais et lesbiennes. Nous avons joint aux annexes A et B le texte complet de cette résolution ainsi que de celle de l'Association unitarienne universaliste.

    Soixante-quatre pour cent des unitariens au Canada appartiennent à des congrégations qui ont suivi le programme des congrégations ouvertes, qui affichent publiquement qu'elles accueillent les gais et les lesbiennes. Au cours de l'année écoulée, notre groupe de surveillance de l'identité et de la diversité sexuelles a fait des déclarations à ce sujet et a préparé une brochure que nous vous remettons en annexe, sur le mariage de conjoints de même sexe. Nous n'avons reçu que des commentaires positifs sur la brochure et sur notre position à cet égard.

º  +-(1600)  

+-

    R. P. Fred Cappuccino (Conseil unitarien du Canada): Nous poursuivons. Nous sommes maintenant au bas de la page 4, mais avant de continuer, j'aimerais vous décrire la raison très personnelle qui m'a amené ici.

    Mary a mentionné que ma femme et moi avons 21 enfants qui sont tous adultes maintenant. L'un d'eux avait cinq ans lorsqu'il est arrivé de l'Inde et que nous l'avons adopté. Alors qu'il était à l'école secondaire, il a entretenu une relation avec un autre jeune homme. J'ignore s'il était gai ou non, mais une semaine après le suicide de ce jeune homme, notre fils s'est suicidé. Moi, j'estime que c'est la société qu'il faut blâmer pour la mort de ces adolescents. C'est ainsi qu'ils avaient été créés. Tout cela a donc eu sur moi un effet tragique très personnel.

    Les 28 pasteurs unitariens du Canada sont prêts à célébrer des mariages homosexuels. Tous les couples ont besoin d'une aide extérieure de temps à autre. Si les couples homosexuels qui sont ensemble depuis un certain temps ne sont pas officiellement reconnus, ils ne trouveront aucun soutien au sein de la communauté pour les aider à maintenir des relations saines et durables. Nous croyons que l'État devrait trouver des moyens de fournir un soutien aux partenaires stables et déterminés à rester ensemble, car cela permettrait d'améliorer le bien-être de notre société. Or, une meilleure société, c'est aussi un meilleur pays et un meilleur monde. Lorsque ces couples ont des enfants, la stabilité et la reconnaissance sociale sont aussi très utiles, par opposition à la honte et au ridicule qui accompagnent souvent le fait d'avoir des parents de même sexe.

    Le passage suivant est extrait de la déclaration sous serment du révérend Mark Morrison-Reed, président du Conseil unitarien du Canada :

Mon travail auprès des paroissiens et de la communauté dans son ensemble m'a démontré que le mariage légal demeurait une institution importante aux yeux des Canadiens et de la société canadienne. La reconnaissance de l'union d'un couple par la loi et par la société en général est considérée par de nombreux couples et par d'autres acteurs de la société comme la confirmation et la légitimation de leur relation. En travaillant au sein de l'église, et particulièrement auprès des couples de même sexe, j'ai constaté que le fait d'exclure les personnes de même sexe de cette institution légale envoyait un message négatif à la société. Ce message revient à dire que l'amour que partagent les homosexuels est malsain et que leurs relations ne sont pas dignes du respect et de la protection que la société canadienne accorde aux couples hétérosexuels.

+-

    Mme Mary Bennett: La congrégation de Mark et de son épouse Donna est la première congrégation unitarienne de Toronto. Le 28 mai 2001, lors de son assemblée générale annuelle, cette congrégation a adopté la déclaration suivante concernant les couples de même sexe :

1. La première congrégation unitarienne de Toronto revendique l'égalité des homosexuels dans l'institution du mariage.

2. La première congrégation unitarienne de Toronto soutient la Metropolitan Community Church of Toronto qui utilise la publication des bans pour faire connaître les unions entre personnes de même sexe.

3. La première congrégation unitarienne de Toronto soutient ses pasteurs qui choisissent d'utiliser la publication des bans pour faire connaître les unions entre personnes de même sexe.

    En Colombie-Britannique, l'un des huit couples qui ont défié les tribunaux fait partie de l'Église unitarienne de Vancouver. Voici un extrait de la déclaration sous serment faite par Dawn Barbeau :

Je crois que notre idylle et notre relation n'ont rien d'exceptionnel ni de surprenant. Je ne comprends pas pourquoi notre amour pose un «problème». Pour moi, nous sommes un couple amoureux et il se trouve que nous sommes deux femmes. Nous voulons pouvoir nous marier comme tous les autres couples.

Je voudrais franchir une étape supplémentaire et oublier le statut de conjointe de fait. Je voudrais me marier de façon à émuler les modèles auprès desquels j'ai grandi, et de façon à ce que mon engagement soit reconnu et confirmé par ma communauté et que nos enfants puissent avoir des parents mariés. Je veux que notre famille incarne les valeurs familiales qu'on m'a transmises lorsque j'étais enfant.

    Voici ce qu'a dit le pasteur unitarien de Vancouver, le révérend Steven Epperson :

J'ai célébré environ six unions entre conjoints de même sexe aux États-Unis et j'ai trouvé qu'il s'agissait des moments les plus importants et les plus émouvants de ma carrière de pasteur. Pour moi qui venais de quitter une communauté religieuse dominée par une puissante élite homophobe—l'une des principales raisons qui nous ont poussés à quitter l'église des Mormons—, ce fut une expérience libératrice que de participer à la célébration d'un événement entre deux adultes aimants, qui devrait être un fait acquis et faire naturellement partie de notre culture actuelle.

º  +-(1605)  

+-

    R. P. Fred Cappuccino: Les aumôniers laïcs sont des membres de l'église unitarienne qui reçoivent une formation et sont nommés pour célébrer des mariages ainsi que d'autres rites de passage.

    Je vais tout de suite au résumé, à la page 11 de notre mémoire.

    Je suis fier de la position que ma religion a toujours adoptée en soutenant les droits de tous, quelles que soient les préférences sexuelles de la personne ou son identité. Je suis également fier que mon pays ouvre ce débat. Et je serai très fier lorsque le Canada légalisera enfin le mariage des conjoints de même sexe. Je sais que ça se fera, et plus vite ça se fera, plus je serai fier.

    Pour moi, c'est très clair. Les couples de même sexe jouissent maintenant de la plupart des droits des couples hétérosexuels. Ce que notre gouvernement ne peut pas leur donner, c'est la pleine acceptation dont bénéficient les couples hétérosexuels dans notre société. Ce qu'il peut leur donner par contre, c'est une affirmation indiquant que ce devrait être le cas.

+-

    Mme Mary Bennett: Je terminerai en citant de nouveau Linda Thompson sur ce que c'est que d'être une alliée :

Je connais l'importance de ma vie en tant que membre de l'église. En restant une femme d'église positive, j'espère pouvoir démontrer que nos congrégations sont des lieux dans lesquels les gens peuvent venir tels qu'ils sont, sans occulter un aspect de leur personnalité avant d'entrer, pour explorer leur spiritualité, pour se joindre à d'autres dans une réflexion éclairée sur les grandes questions auxquelles nous sommes tous confrontés et pour connaître la joie au sein d'une communauté qui se réclame de plusieurs religions.

+-

    Le président: Merci beaucoup. Je vous prie de bien vouloir nous excuser pendant que nous réglons quelques questions.

    Il y a à nouveau le quorum. Étant donné qu'il semble que nous risquons de perdre le quorum sous peu, je vous indique dès maintenant que j'aimerais pouvoir présenter au comité de liaison notre budget pour cette année qui sera de 50 000 $ plutôt que de 60 000 $. S'il nous faut plus d'argent, nous pouvons demander des fonds supplémentaires. S'il n'y a pas d'objection, j'aimerais pouvoir informer...

    Monsieur Lee, auriez-vous l'obligeance de...?

+-

    M. Derek Lee (Scarborough—Rouge River, Lib.): J'en fais la proposition.

+-

    Le président: Je serai ainsi en mesure d'informer le comité de liaison que nous présenterons notre budget pour l'an prochain.

    (La motion est adoptée [Voir le Procès-verbal])

+-

    Le président: Merci beaucoup, et je m'excuse encore une fois auprès de nos témoins, mais il n'y a pas moyen de faire autrement.

    Je cède la parole à M. Cadman, pour sept minutes.

+-

    M. Chuck Cadman (Surrey-Nord, Alliance canadienne): Merci. Je serai très bref. Je n'ai qu'une très courte question, mais j'aimerais d'abord remercier tous les témoins d'être venus aujourd'hui.

    Certains autres témoins ont dit craindre que, si le Parlement reconnaît le mariage homosexuel, d'autres groupes ne réclament les mêmes droits pour d'autres genres de relations, dont les relations polygames. J'aimerais savoir ce qu'en pensent les témoins. Seriez-vous d'accord pour qu'on accède à une telle demande? Croyez-vous qu'il est possible que d'autres réclament aussi ce droit?

º  +-(1610)  

+-

    Le président: Madame Dubuc, vous voulez répondre?

[Français]

+-

    Mme Dominique Dubuc (Conseil central de l'Estrie, Confédération des syndicats nationaux): La polygamie existe à certains endroits, mais ce n'est pas le sujet dont on parle aujourd'hui. Le sujet d'aujourd'hui est l'union entre deux personnes qui sont aussi valables que deux personnes hétérosexuelles. On parle ici d'égalité. Si on veut faire des digressions et aller dans d'autres directions, je dirai que cela fera éventuellement l'objet d'une autre étude. La polygamie est une chose qui n'a pas le moindre rapport avec le sujet dont on parle ici.

    La situation est très simple: nous sommes des citoyens égaux qui vivons des relations conjugales égales. Nous avons des enfants, et nos familles sont des familles égales. Tout cela est d'une simplicité extrême. Nous voulons accéder aux mêmes institutions légales pour encadrer ces relations que nous vivons déjà. C'est au niveau de l'égalité que le bât blesse en ce moment. C'est ce que je comprends de tout ce que j'ai pu lire sur Internet des compte rendus des audiences.

    On touche l'essence du débat. Vous me corrigerez si je fais erreur, mais les opposants, incluant certains honorables députés du Parlement, refusent d'admettre que nous sommes égaux--je parle des affirmations d'égalité auxquelles je faisais allusion plus tôt--, nous, en tant qu'individus homosexuels, en tant que couples et en tant que familles. Et pourtant, c'est un fait qui est clairement édicté par la Charte.

[Traduction]

+-

    Le président: Merci.

    Est-ce que quelqu'un d'autre voudrait répondre? Madame Bennett, vous avez la parole.

+-

    Mme Mary Bennett: J'étais présente le 12 février et on a alors soulevé cette question. Le Conseil unitarien du Canada n'a jamais adopté de résolution sur les mariages polygames et je ne crois pas qu'on ait jamais présenté de résolution sur ce sujet. Je ne connais pas non plus d'aumônier laïc ou de ministre du culte qui ait célébré un tel rite de passage. Si notre organisation décidait de se prononcer sur ce sujet, ce ne serait pas dans un avenir rapproché, car, dans le dossier qui nous occupe, nous avons commencé à élaborer notre position il y a plus de 20 ans.

+-

    Le président: À vous la parole, monsieur Ryan.

+-

    M. Bill Ryan: Nous abondons dans le même sens que Mme Dubuc : ce dont il est question en ce moment, c'est la reconnaissance d'un couple composé de deux personnes du même sexe.

+-

    M. Chuck Cadman: Si je peux me permettre de terminer par une observation, je ne suis pas tout à fait d'accord, en ce sens que nous devons envisager toutes les répercussions éventuelles de nos décisions. Cela fait partie de nos responsabilités. Je sais de quoi il est question ici, mais au nom de nos électeurs et du pays, nous devons aussi tenir compte de toutes les répercussions que pourrait avoir notre décision un jour. Voilà pourquoi nous posons ces questions.

    Merci.

+-

    Le président: Il reste encore trois minutes et demie, monsieur Sorenson, si vous les voulez.

+-

    M. Kevin Sorenson (Crowfoot, Alliance canadienne): Merci, monsieur le président.

    Je n'avais pas prévu poser une question tout de suite, mais puisque j'ai l'occasion de le faire, j'aimerais avoir votre opinion sur quelque chose que j'ai lu l'autre jour. Est-il nécessaire de protéger l'institution de l'union hétérosexuelle? Est-il nécessaire de définir cette institution? Je vais vous lire un extrait des propos d'un philosophe qui a dit :

À toute époque, certaines choses sont «concevables» et d'autres «inconcevables». Chaque époque est certaine, intellectuellement et émotivement, de ce qui est acceptable. Pourtant, à l'époque qui la suit, on décidera que ces «certitudes» sont inacceptables et d'autres valeurs les remplaceront. Sur le plan humaniste, les gens passent d'une génération à l'autre et ce qui est inconcevable moralement devient concevable au fil des ans.

    Ces changements sont parfois très positifs. Ainsi, il est bien que les mariages interraciaux qui étaient interdits dans le passé ne le soient plus et que l'on reconnaisse dorénavant même les mariages qui ne sont pas religieux.

    En 2020—c'est une année que je choisis au hasard, elle n'était pas dans la citation que je vous ai donnée—«on acceptera des choses qui semblent inconcevables et immorales pour la plupart des gens aujourd'hui. Très graduellement, ce qui était inconcevable deviendra acceptable».

    Nous avons entendu des témoins nous dire que bien des gens estiment que l'institution du mariage doit être protégée et que, par exemple, le relâchement des lois sur le divorce a nui à l'institution du mariage. Ils ne prétendent pas qu'il y a inégalité entre les homosexuels et les hétérosexuels, mais plutôt qu'il y a une différence.

    Il y a une différence dans les relations, et l'institution du mariage est définie comme étant l'union d'un homme et d'une femme. Nous ne prétendons pas que c'est mieux, nous ne prétendons que c'est la norme qui doit être imposée à tous, mais c'est la définition qui a cours. Nous ne prétendons pas que le mariage ainsi défini est le meilleur, mais plutôt que le mariage est ainsi.

    Bien des gens nous ont dit que le mariage ne sert pas à procréer, que le mariage se fonde uniquement sur l'amour. Le mariage n'est pas que l'amour de deux personnes. Ce n'est pas ça le résultat du mariage, mais bien l'union d'un homme et d'une femme à l'exclusion de tous les autres. Il s'agit de protéger la fonction reproductive. Il s'agit de protéger la société.

    J'aimerais savoir ce que vous en pensez, si vous avez envie de répondre.

º  +-(1615)  

[Français]

+-

    Le président: Madame Dubuc.

+-

    Mme Dominique Dubuc: Les protéger contre quoi? C'est ça, la question. Le jour où je vais avoir le droit de me marier avec ma conjointe, en quoi cela va-t-il avoir le moindre effet sur les conjoints hétérosexuels qui sont unis par les liens du mariage? En quoi est-ce que ça va avoir un effet sur la société? Sincèrement, je ne comprends pas comment on peut penser une seconde que ça puisse entraîner quelque chose de négatif pour le mariage. Au contraire, on adhère aux mêmes valeurs, aux valeurs de fidélité, d'engagement, d'amour et de désir de fonder une famille. C'est la même chose.

    Ce qui se cache sous tout ça et qu'il faut admettre, c'est que ce n'est pas l'homosexualité qui est le problème. Derrière tous les discours que j'entends, et je le dis très respectueusement, c'est l'homophobie qui est le problème. C'est sur ça qu'il faut s'ouvrir les yeux.

[Traduction]

+-

    Le président: Monsieur Marceau, vous avez sept minutes.

[Français]

+-

    M. Richard Marceau (Charlesbourg—Jacques-Cartier, BQ): Merci beaucoup, monsieur le président.

    D'abord, merci aux témoins qui sont venus nous présenter des mémoires très bien rédigés et de très bonnes présentations. Merci beaucoup. Félicitations aussi au révérend Cappuccino pour ses 50 ans de pastorat. Bravo! En passant, vous saluerez Mark et Donna Morrison-Reed, des personnes extraordinaires que j'ai eu l'occasion de rencontrer à Toronto, de très grandes personnes. Je ne peux pas en dire plus: ce sont des personnes extraordinaires.

    J'aimerais revenir un peu à ce que mon collègue Kevin Sorenson disait. Il y a un argument qui revient et qui est un peu circulaire, et sur lequel je voudrais entendre votre avis. On dit que le mariage est l'union d'un homme et d'une femme à l'exclusion de tout autre, et que parce que c'est comme cela, ça doit rester ainsi. La définition étant celle-là, on ne peut pas la changer. Selon vous, est-ce un argument valide?

    Deuxièmement, que répondez-vous à ceux et celles qui disent que donner aux conjoints de même sexe la possibilité de se marier, c'est fragiliser l'institution et l'amener au bord du gouffre, alors qu'elle est déjà très fragilisée par le divorce et le monde moderne? D'ailleurs, je vous dirai que les homosexuels n'ont pas grand-chose à voir avec le taux de divorce des hétérosexuels. Est-ce que, selon vous, c'est une institution si fragile que le fait de l'ouvrir aux personnes de même sexe ferait en sorte qu'elle disparaîtrait?

[Traduction]

+-

    Mme Mary Bennett: Les mots ont un sens dénotatif et une connotation. Dans les cercles unitariens, la connotation du mariage, c'est une relation entre deux personnes qui s'aiment et qui souvent élèvent une famille. Je vois donc mal comment le fait de reconnaître le mariage homosexuel mettrait le mariage en danger.

    Le fait que des gens luttent si vigoureusement pour obtenir le droit de se marier témoigne de l'importance qu'accordent les Canadiens à l'institution du mariage. Comme l'a indiqué Dawn Barbeau dans le mémoire que nous vous avons remis, elle et sa partenaire vivent comme un couple marié à bien des égards. Elles portent dorénavant le même nom, elles vivent ensemble et sont monogames. Elles sont propriétaires d'une maison entourée d'une clôture en lattis et d'une Volvo. Elles veulent néanmoins légitimer leur relation en partie en raison des antécédents de Dawn et à cette fin elles souhaitent se marier légalement.

    Pendant que je préparais le mémoire avec d'autres membres de mon organisation... j'ai deux fils qui sont, je crois, hétérosexuels. L'aîné l'est certainement. Lorsqu'il s'est marié il y a trois ans, j'ai compris que, s'il avait été homosexuel, j'aurais été privée de quelque chose comme parent. En l'occurrence, j'ai pu assister à son mariage. J'ai pu annoncer à mes amis que mon fils se mariait. Ce n'aurait pas été la même chose de dire que mon fils avait décidé de vivre en partenariat domestique, et ceux qui nous entourent n'auraient pas compris la profondeur de son engagement. À mon avis, permettre aux homosexuels de se marier renforcerait le mariage.

º  +-(1620)  

+-

    Le président: Vous avez la parole, madame Brotman.

+-

    Mme Shari Brotman: Je suis d'accord. C'est une célébration des valeurs du mariage, et non pas une érosion. C'est la première remarque que je voulais faire.

    Deuxièmement, il est vrai qu'on parle de modernisation, mais quand on emploie ce mot, parce que nous sommes une société plus ouverte et tolérante qu'auparavant, on risque de laisser entendre que la modernisation entraînera le déclin de notre civilisation. En réalité, nous constatons que ce n'est pas le cas pour la plupart d'entre nous. Quand on a décidé de protéger les droits des minorités, quand les femmes ont obtenu des droits, notre société est devenue plus ouverte et tolérante, notre société est devenue un milieu de vie plus agréable pour tous. Certains s'inquiètent qu'en ouvrant l'institution du mariage aux partenaires homosexuels qui veulent en fait célébrer le mariage comme tous les autres, on provoquera la fin du mariage ou le déclin de la civilisation telle que nous la connaissons, mais cette inquiétude n'a aucun fondement véritable.

    Le Canada est une société extrêmement ouverte et tolérante, et nous en sommes fiers. Les changements qui se sont produits au Canada et qui ont rendu notre société plus ouverte et tolérante, moins raciste et homophobe sont très précieux pour tous les Canadiens.

+-

    Le président: Monsieur Ryan, vous avez la parole.

+-

    M. Bill Ryan: J'ai deux courtes remarques à faire.

    Je ne suis pas juriste, mais d'après mes lectures en droit et en histoire du droit, je crois savoir que ce n'est que tout récemment que le Canada a défini le mariage en droit comme étant l'union d'un homme et d'une femme. Jusqu'à la dernière refonte, le Code civil du Québec définissait le mariage comme étant l'union de deux personnes. Dans une bonne part du reste du Canada aussi, la common law définissait le mariage comme étant l'union de deux personnes. Je crois savoir que ce n'est que lorsqu'on a refondu ces lois qu'on a modifié la définition de façon à ce que les couples homosexuels n'aient pas accès au mariage lorsque cela deviendrait un enjeu social. Mais en common law britannique et en droit civil, le mariage a souvent été défini comme étant l'union de deux personnes.

    Deuxièmement, sauf votre respect, bon nombre des mêmes arguments ont été avancés au sujet du mariage interracial. On prétendait que cela entraînerait l'effondrement de la famille, le déclin de la civilisation et la disparition de l'institution du mariage. Ces arguments ont aussi été invoqués au sujet de l'égalité des femmes au début du dernier siècle. On affirmait que si la femme devenait l'égal de l'homme, on assisterait à la disparition de la civilisation, de la famille et du mariage ainsi qu'il existait. J'espère qu'en examinant la situation sous cet angle, on pourra la voir un peu différemment.

[Français]

+-

    Le président: Madame Dubuc.

+-

    Mme Dominique Dubuc: Je ne suis pas non plus juriste, mais je crois en effet que la définition du mariage comme l'union d'un homme et d'une femme est apparue en 1866--ce serait à vérifier--pour éviter la polygamie. La première fois qu'on a dit

[Traduction]

«d'un homme et d'une femme à l'exclusion de toute autre personne»,

[Français]

c'était dans ce but. Mais ce serait à vérifier.

    J'aimerais revenir sur le point que j'ai mentionné tout à l'heure. On dit que nous allons entraîner la destruction du mariage, mais en même temps, l'une des hypothèses qu'on retrouve dans le document veut qu'on enlève à tous les Canadiens l'accès au mariage civil en donnant le mariage seulement aux autorités religieuses. Donc, plutôt que de souffrir que nous ayons accès au même statut que les hétérosexuels, plutôt que de souffrir notre présence à nous, homosexuels, au sein de l'institution du mariage, on préfère enlever cela à tous les citoyens canadiens. Et ensuite, selon ce que je comprends, on nous accuse d'entraîner la destruction du mariage, alors que nous avons les mêmes valeurs familiales et conjugales de fidélité et d'engagement. Vous avez entendu ce qu'ils ont dit tout à l'heure.

[Traduction]

+-

    Le président: Monsieur McKay, vous avez sept minutes.

+-

    M. John McKay (Scarborough-Est, Lib.): Merci, monsieur le président et merci aux témoins.

    Dans leur mémoire, les professeurs de l'Université McGill disent « nous vous implorons donc, pour la suite du monde et pour la fin immédiate de la discrimination, d'accepter cette égalité plutôt que de laisser le pouvoir judiciaire vous forcer à le faire ». J'insiste sur «laisser le pouvoir judiciaire vous forcer à le faire». Autrement dit, celui qui défend la définition traditionnelle du mariage est homophobe, ignorant, raciste et j'en passe. Bien des qualificatifs ont été lancés pendant les témoignages, mais tout cela voulait essentiellement dire que le Parlement ne peut tenir une discussion raisonnée sur le rôle du mariage dans la société, entendre des arguments raisonnés des deux camps et exclure les propos outrageux sans au bout du compte jouer son atout et laisser aux tribunaux le soin de trancher.

    J'aimerais aborder l'hypothèse qui sous-tend cet argument et qui, à mon avis, est une forme de libéralisme convergent. Autrement dit, tout le monde doit se comporter de la même façon, adopter le même point de vue et taire ses problèmes quand ils ne sont pas conciliables avec les vues de la majorité. Or, tout ne peut être concilié. Cela s'oppose d'une certaine façon au libéralisme pluraliste qui reconnaît l'existence de points de vue inconciliables, qui reconnaît qu'il faut prendre en compte différents de points de vue, qui reconnaît les divergences d'opinion et qui se fonde sur le respect mutuel. Dans ce dossier, les défenseurs du mariage homosexuel plaident la cause du libéralisme convergent qui mène au monisme et nie le véritable pluralisme de notre société.

    Honnêtement, je suis déçu de constater que les professeurs de McGill n'aient pas abordé ces questions. Votre mémoire aurait pu être écrit par une bande d'avocats. Si j'avais voulu entendre des avocats, nous en aurions invités. Vous ne vous êtes pas penchés sur les questions qui doivent être examinées du point de vue sociologique. Quelles sont les répercussions? Quelle serait l'incidence sur l'intérêt public?

    La documentation gaie existe. Je comprends la documentation gaie. Je comprends les arguments qui y sont avancés. J'ai lu cette documentation. Mais vous ne semblez pas avoir réfléchi aux conséquences que cette décision pourrait avoir sur les enfants. Vous ne traitez pas de ce que cela pourrait signifier pour les hommes et les femmes. Vous ne traitez pas de l'incidence que cela pourrait avoir sur d'autres groupes réclamant l'égalité. Pour être honnête, je trouve que vous n'avez pas su analyser, du point de vue de l'intérêt public, les arguments avancés par l'autre camp comme il vous incombait de le faire.

    Vous semblez tout à fait disposés à laisser aux tribunaux le soin de trancher. Vous faites valoir dans votre mémoire que les discussions du Parlement sont tenues pour la forme et ne sont pas pertinentes. Reconnaissez-vous à tout le moins que permettre aux homosexuels de se marier aura des répercussions sur l'institution du mariage? C'est un argument fallacieux que de prétendre le contraire. Et avez-vous réfléchi à ce que pourraient être ces répercussions?

º  +-(1625)  

+-

    Le président: Je crois que cette question s'adresse aux professeurs Ryan et Brotman.

+-

    M. Bill Ryan: Je ne crois pas que nous ayons suffisamment de temps pour répondre à chacune des questions contenues dans votre intervention, mais je vous dirai que nous voulions surtout examiner les effets de la discrimination et de l'exclusion dans notre mémoire.

    D'après ce que nous avons lu, il semble que votre comité a entendu ces dernières semaines de nombreux témoignages du point de vue de l'incidence que pourrait avoir la reconnaissance du mariage homosexuel sur la famille. Notre point de vue est le suivant : d'abord, il y a des membres de notre communauté et de notre société qui sont des citoyens canadiens mais qui sont exclus d'une institution régie par le Parlement du Canada. Ce segment de la population connaît un taux extrêmement élevé de suicides—surtout chez les jeunes—et de violence physique. Refuser d'accorder l'égalité à ces personnes contribue à la baisse de leur amour-propre et encourage ceux qui se croient autorisés par la société à considérer les gais et les lesbiennes comme inférieurs.

    Dans les pays européens où l'on reconnaît les couples de même sexe depuis de nombreuses années et dans les pays où ils peuvent se marier depuis quelques années, il n'a pas été prouvé que la société ait souffert, que la famille ait souffert, que les enfants aient souffert ou que les hommes et les femmes aient souffert. En fait, c'est plutôt la situation actuelle qui entraîne des souffrances pour les hommes, les femmes et les enfants qui sont exclus. Voilà ce que nous voulions souligner dans notre mémoire.

    Il est vrai que les lois sont discriminatoires. Pour ce qui est des tribunaux, dans ce débat-ci, les cours ont su respecter les droits des minorités bien davantage que d'autres institutions, y compris le Parlement, j'ai le regret de le dire. Ce n'est pas le cas au Québec où l'Assemblée nationale déploie des efforts pour tenter d'éliminer la discrimination à l'endroit des minorités. Les tribunaux n'ont pas pour rôle de se pencher sur ce qui est populaire, mais bien de faire respecter la loi et de protéger les droits des minorités.

º  +-(1630)  

+-

    M. John McKay: Mais vous serez certainement d'accord avec moi pour dire qu'une analyse purement judiciaire serait très étroite. Il est évident que le mariage est une institution discriminatoire. Je ne crois pas que le mariage l'était à l'origine. Au départ, quand on a créé le mariage, l'intention n'était pas d'en faire une institution discriminatoire, mais le fait est que, maintenant, il l'est. Cela ne fait aucun doute. La question est donc de savoir si cela se justifie dans une société libre et démocratique.

    Si j'ai bien compris vos arguments, la communauté gaie et lesbienne souffre de façon disproportionnée de divers problèmes et connaît un taux de suicide élevé parce que les gais et les lesbiennes ont très peu d'amour-propre; en conséquence, en permettant aux gais et aux lesbiennes de se marier, on pourra régler ces problèmes. Est-ce là essentiellement votre réponse?

+-

    M. Bill Ryan: De façon plus générale, nous faisons valoir que la Charte canadienne des droits et libertés comprend l'orientation sexuelle comme motif interdit de discrimination, et que la loi sur le mariage enfreint cette interdiction. Elle doit donc inévitablement être modifiée.

+-

    Mme Shari Brotman: Il faut quand même être prudent quand on invoque l'argument de l'amour-propre, parce qu'en parlant de la violence et du suicide, nous voulons surtout dire que les gais et les lesbiennes vivent encore dans un milieu extrêmement hostile et discriminatoire qui les rend victimes de violence plus souvent que d'autres. En accordant cette forme de reconnaissance aux gais et aux lesbiennes et à leur famille, on encouragera leur reconnaissance par la société en général. Mais cela ne mènera pas automatiquement à moins de discrimination à leur égard.

    Parfois, les lois et les politiques doivent être à l'avant-garde des perceptions du public. Quand les institutions de la société reconnaîtront les droits des gais et des lesbiennes et leurs relations et les considéreront comme des citoyens égaux aux autres, les gens ordinaires, l'entourage des gais et lesbiennes les accepteront mieux. Cela contribuera grandement à réduire les expériences qui minent l'estime de soi.

    J'aimerais ajouter une chose. Si je vous ai bien compris, vous avez fait une observation sur notre profession. Le travail social a une longue tradition d'étude des droits de la personne et d'étude de la société du point de vue des droits de la personne. C'est dans cette perspective que nous avons rédigé notre mémoire.

+-

    Le président: Merci beaucoup.

    Je cède la parole à M. Sorenson, pour trois minutes, mais, auparavant, je tiens à informer les témoins de nos règles et peut-être les rappeler aux membres du comité.

    Les membres du comité ont maintenant trois minutes pour leur intervention. Ces trois minutes sont censées inclure la question et la réponse. Lorsque l'intervenant prend deux minutes pour poser sa question et demande ensuite à tous les témoins de répondre, je me trouve dans une situation difficile. Je demande donc aux membres du comité d'adresser leurs questions, dans la mesure du possible, à un témoin en particulier pour limiter un peu les réponses. Je vous demande aussi de ne pas oublier que vous avez trois minutes.

    Monsieur Sorenson, allez-y.

º  +-(1635)  

+-

    M. Kevin Sorenson: J'aimerais que Mme Brotman précise sa réponse. Estimez-vous qu'il incombe au Parlement ou à la société de légitimer l'homosexualité en permettant le mariage homosexuel?

+-

    Mme Shari Brotman: Non, nous défendons tout simplement l'égalité. Si les lesbiennes et les gais sont considérés comme égaux aux autres, cela aura une incidence sur leur vie quotidienne. Il ne s'agit pas de légitimer quoi que ce soit.

+-

    M. Kevin Sorenson: Personne ne remet en question... nous ne débattons pas ici de la légitimité du style de vie homosexuel, mais bien de la question de savoir si les homosexuels devraient pouvoir se marier.

    Vous avez dit qu'en donnant aux homosexuels le droit de se marier, on contribuera à rehausser leur estime de soi. Mais qu'en est-il des personnes célibataires? Je connais des personnes qui ont peu d'estime d'elles-mêmes parce qu'elles ne peuvent trouver l'âme soeur, parce qu'elles se sentent coincées dans leur vie de célibataire et ne peuvent se marier ou croient qu'elles ne peuvent se marier.

    Vous avez parlé du suicide chez les gais et lesbiennes. Comment le mariage réduira-t-il le taux de suicide chez les gais et lesbiennes? Il y a des gens célibataires qui se suicident. Il y a des jeunes qui se suicident parce qu'ils sont obèses. Il y a des jeunes qui se suicident parce qu'ils n'ont pas d'amis. J'imagine qu'il y a aussi des personnes qui se suicident parce qu'elles sont prises dans un mariage malheureux. Comment l'octroi du droit de se marier aux homosexuels réduira-t-il le taux de suicide?

+-

    M. Bill Ryan: Compte tenu de la règle qui vient d'être expliquée, je vous répondrai très rapidement.

    L'égalité change la dynamique dans laquelle les gens vivent leur vie sociale. Cela ne changera pas nécessairement la vie d'un adolescent de 15 ans en 2003, mais cela changera la façon dont cette personne assumera son homosexualité puisqu'elle saura que, dans ses politiques, le Canada ne fait pas de discrimination fondée sur l'orientation sexuelle, y compris dans sa loi sur le mariage.

+-

    M. Kevin Sorenson: Mais nous faisons déjà de la discrimination. M. McKay l'a souligné. Nos lois sont discriminatoires. Il y a discrimination, par exemple, à l'égard de ceux qui voudraient se marier à un certain âge. Il y a discrimination à l'égard de ceux qui voudraient se marier avec un parent proche. Nous interdisons le mariage entre frères et soeurs. Ce n'est peut-être pas directement lié au sujet du mariage, mais il y a discrimination... d'une certaine façon, nous conférons à certains des droits que d'autres n'ont pas, même dans le Code criminel. Par conséquent, pour protéger une institution, nous ne prétendons pas qu'il ne faut pas reconnaître les différences ou qu'il y a égalité ou inégalité. Nous disons simplement que les unions homosexuelles sont différentes, égales mais différentes.

+-

    Le président: Monsieur Ryan et madame Poulin.

+-

    M. Bill Ryan: Dire que ces relations sont égales mais différentes n'est pas une réponse légitime du point de vue de la politique sociale. Nous vous demandons tout simplement d'éliminer la discrimination existante.

[Français]

+-

    Mme Lise Poulin: Dans la question qui se pose ici, on parle de deux hommes ou de deux femmes qui veulent se marier, qui ont l'âge de raison et qui ne sont pas de la même famille. Voilà la question à laquelle on doit répondre. Pour la famille et pour les enfants, c'est une préoccupation. Vous êtes nos représentants à la Chambre des communes, et nous sommes ici pour éliminer les discriminations qui existent dans certaines lois qu'on adopte. Le mariage est discriminatoire et est reconnu par les tribunaux. Ce n'est pas le débat juridique qu'on doit faire ici, mais le débat sur la reconnaissance sociale des couples de même sexe. Si on reconnaît que ce sont des couples, ils doivent avoir les mêmes droits que les hétérosexuels.

    Quant aux jeunes, je vous dirai que le message qu'on leur lance est positif à partir du moment où le modèle unique n'est plus celui d'un homme et d'une femme aux yeux bleus, à la peau blanche, qui ont deux enfants blonds, un garçon et une fille.

    Dans la société--on l'a dit dans notre mémoire et d'autres l'ont dit--, quand les femmes ont obtenu le droit de vote, ce n'était sûrement pas pour se faire plaisir. Cela a eu pour effet que des droits ont été acquis. Aujourd'hui, la société en général, dans toutes les provinces du Canada, a fait des pas de géant. On dit aujourd'hui qu'il faut que cette discrimination cesse, car la Charte canadienne des droits et libertés dit qu'on naît tous égaux en droits et en libertés.

    Il me semble qu'on doit répondre à la question et qu'on doit surtout envoyer un message positif aux jeunes. Même si les statistiques ne sont que des statistiques et que je n'ai pas très envie d'entrer dans ça, il est prouvé que les jeunes qui découvrent leur homosexualité ont des taux de suicide et de décrochage plus élevés que tous les autres jeunes, cela parce que les modèles qu'on leur offre dans ce domaine n'ont rien de positif.

    Je pense que le mariage entre deux hommes ou deux femmes transmettrait des messages beaucoup plus positifs à nos jeunes, qui ont déjà beaucoup d'autres raisons d'avoir des difficultés. Celle-ci à tout le moins serait alors réglée.

º  +-(1640)  

[Traduction]

+-

    Le président: Merci.

    Monsieur O'Brien, vous avez trois minutes.

+-

    M. Pat O'Brien (London—Fanshawe, Lib.): Merci, monsieur le président. J'ai beaucoup de questions à poser. Je vais en poser le plus possible maintenant et espérer avoir de nouveau la parole plus tard.

    Je remercie les témoins. Je suis désolé d'être arrivé en retard. Je tente d'assister à deux réunions en même temps, ce que nous devons parfois faire ici.

    Je suis désolé d'entendre autant d'hyperboles. Je partage la préoccupation de M. McKay. Depuis que je suis arrivé, j'ai entendu au moins deux fois les mots «préjugé» et «ignorance». Cette exagération m'inquiète. Je ne me souviens pas avoir entendu des députés prédire la fin du mariage ou la fin de la civilisation. Je crois au mariage et à la civilisation et je n'ai jamais employé ces expressions et ne le ferai jamais. Un ou deux témoins ont peut-être fait de telles déclarations, mais les deux camps font dans l'hyperbole. Nous en avons entendu aujourd'hui.

    Ma première question s'adresse à vous, madame Poulin. Je regrette que vous ayez décidé de jouer la carte de l'homophobie. C'est votre choix, mais ça ne me plaît pas particulièrement. J'aimerais savoir si vous connaissez les vues—et je mentionne leur orientation sexuelle parce qu'on a crié à l'homophobie si souvent aujourd'hui—d'un grand théoricien et professeur à l'Université Yale, William Eskridge, un homosexuel pratiquant, et de Ladelle McWhorter, une importante théoricienne lesbienne, qui reconnaissent tous les deux très franchement que changer la définition du mariage changera presque certainement la nature de l'expérience hétérosexuelle et même la famille? Connaissez-vous ces personnes? Si oui, que pensez-vous de leurs opinions?

[Français]

+-

    Mme Lise Poulin: Je ne les connais pas.

+-

    Mme Dominique Dubuc: Je ne connais pas non plus ces études. Évidemment, la communauté gaie n'est pas d'un bloc. Je comprends très bien qu'il y a des hétérosexuels qui sont en faveur du mariage des homosexuels, comme il y a des gais qui peuvent avoir des opinions différentes.

[Traduction]

+-

    M. Pat O'Brien: Puis-je me permettre de vous interrompre? Vous avouez bien honnêtement que vous ne les connaissez pas. Par conséquent, je passe à autre chose. Je ne les citerai pas, mais je peux vous faire parvenir leurs déclarations, si vous le souhaitez. Je pourrais aussi les citer, comme je l'ai fait lors d'autres séances.

    À mon sens, lorsqu'un des principaux théoriciens et probablement l'éminence dans son domaine, le professeur Eskridge, lui-même un homosexuel pratiquant, nie que cela n'aura pas d'incidence sur le mariage et la famille, on a tort de plaider l'homophobie; les membres du comité connaissent ces vues que vous dites ne pas connaître.

    Monsieur le président, ma deuxième question s'adresse au professeur Brotman. J'ai un article tiré du Globe and Mail dont j'aimerais citer un extrait. On y cite le professeur Brotman qui aurait dit à la Gazette de Montréal : «Nous préférerions qu'aucun témoin expert ne témoigne au nom du gouvernement contre le mariage homosexuel».

    Ce sont là des propos qu'on vous attribue. J'aimerais d'abord savoir si vous avez effectivement fait cette déclaration et, dans l'affirmative, si vous ne croyez pas qu'il incombe à notre comité—comme l'a souligné M. McKay—de tenir le débat le plus complet, le plus approfondi et le plus respectueux possible. Si ce sont bien là vos propos, comment pourrions-nous avoir un tel débat si nous n'entendons qu'un seul camp et si on qualifie d'homophobes tous ceux qui s'opposent à leurs arguments? Je trouve cela plutôt déplorable. J'aimerais avoir votre réponse.

º  +-(1645)  

+-

    Le président: Vous poursuivrez lors de votre prochaine intervention, monsieur O'Brien.

+-

    M. Pat O'Brien: Merci, monsieur le président. C'est ce que je ferai.

+-

    Le président: Professeur Brotman suivi de Mme Dubuc.

+-

    Mme Shari Brotman: Avez-vous lu cet article dans le Globe and Mail ou dans la Gazette de Montréal?

+-

    M. Pat O'Brien: C'est un article qui a paru dans le Globe and Mail et l'on vous attribue ces propos.

+-

    Mme Shari Brotman: Il s'agit d'une citation textuelle, je discutais à ce moment-là avec un journaliste. Cette situation, dans le contexte de cette conversation avec ce journaliste, était simplement l'expression d'un désir, soit que personne ne s'oppose à la légalisation du mariage homosexuel et que nous vivions dans une société qui avait lutté pour l'égalité des gais et des lesbiennes. C'est ce que j'entendais par ces propos. Ça ne veut certainement pas dire que je ne voulais pas que qui que ce soit vienne témoigner ou que si certains s'opposaient à la légalisation, je ne voulais pas qu'ils en parlent. Je voulais simplement dire que j'espérais que nous vivions dans une société où personne ne s'opposerait à la légalisation des mariages homosexuels.

    Je vous demanderais si vous voulez bien de répéter le commentaire que vous avez fait avant de poser cette question parce que dans ce document, je n'ai certainement pas dit que ceux qui n'étaient pas du même avis que moi devraient se taire.

+-

    M. Pat O'Brien: Je n'ai pas dit que c'est ce que vous aviez dit.

+-

    Le président: Madame Dubuc.

[Français]

+-

    Mme Dominique Dubuc: Au sujet de la fameuse carte homophobe et des différences d'opinions et du respect, je crois qu'il y a une énorme différence dans l'impact que peuvent avoir les divergences d'opinions qui sont exprimées ici, parce que les différences d'opinions que j'entends ont un effet flagrant sur ma vie et sur celle de mes enfants. Il est clair pour moi que le fait que nous n'ayons pas accès au mariage et les arguments qui sont présentés sont de la ségrégation, de la non-reconnaissance de notre égalité. Les effets des différences d'opinions sur ma vie sont concrets, alors que l'opinion que j'ai sur le mariage n'a pas le moindre effet sur la vie de qui que ce soit ici.

[Traduction]

+-

    Le président: Monsieur Marceau, pour trois minutes.

[Français]

+-

    M. Richard Marceau: Merci.

    On s'entend sur le fait qu'on parle de mariage civil et non de mariage religieux. Ceux d'entre vous qui ont assisté aux séances du comité ont vu que certaines personnes ou certaines organisations craignaient que le fait de permettre aux conjoints de même sexe de se marier ne soit une atteinte à leur liberté de religion. En effet, on craint que l'État ne force une Église ou une dénomination particulière à marier les conjoints de même sexe sous prétexte qu'étant donné que les Églises ont accès à des déductions fiscales, l'État les soutient de façon indirecte. Comme elles sont un peu les agents de l'État, elles pourraient être forcées de marier les conjoints de même sexe. Pensez-vous que c'est une crainte valable? C'est ma première question.

    Deuxièmement, si jamais le comité suggérait de légaliser le mariage des conjoints de même sexe, est-ce qu'un article comme l'article 367 du Code civil du Québec vous conviendrait, c'est-à-dire un article qui dirait clairement qu'un ministre du culte ne peut être forcé de faire une cérémonie allant à l'encontre des dogmes de sa foi?

    Ma troisième question s'adresse spécifiquement au révérend Cappuccino et à Mme Bennett. Est-ce que cet argument-là ne pourrait pas être renversé? Est-ce qu'en imposant la définition du mariage comme étant l'union d'un homme et d'une femme à l'exclusion de tout autre, on empiète sur votre liberté de religion, vu que votre religion vous permet de marier des conjoints de même sexe?

    Les deux premières questions s'adressent aux gens de l'Université McGill et de la CSN, et la troisième question s'adresse aux gens de l'Église unitarienne.

+-

    Mme Dominique Dubuc: Je pense que plusieurs intervenants ont répondu à maintes reprises à la question. Il n'est absolument pas question de forcer quelque religion que ce soit à célébrer une union sur laquelle elle n'est pas d'accord, et les religions ont déjà le pouvoir de faire cette différence, par exemple dans le cas des conjoints divorcés. Je pense que cela a été dit et redit à plusieurs reprises, et je n'aurais absolument aucun problème avec un article comme l'article 367 du Code civil du Québec.

    Quant à la création d'un partenariat enregistré quelconque, d'une union civile fédérale, de nombreux problèmes de logistique seraient associés à cela, et il faudrait quand même que le mariage soit ouvert aux personnes de même sexe. On peut créer de nouvelles institutions, mais il faut qu'elles soient ouvertes et non discriminatoires.

º  +-(1650)  

[Traduction]

+-

    Le président: Monsieur Ryan puis monsieur Cappuccino.

+-

    M. Bill Ryan: Pour poursuivre dans la même veine, à notre avis aucun organisme religieux ne devrait être tenu de célébrer un événement qui va à l'encontre de sa doctrine. En fait, ils peuvent déjà décider quelle personne ils acceptent de marier. Mais nous parlons ici d'un mariage civil et il existe des organisations religieuses, faisant partie de la tradition juive et de la tradition chrétienne, qui seraient prêtes à célébrer des mariages homosexuels, pour en faire des unions légales et religieuses.

+-

    Le président: Monsieur Cappuccino.

+-

    R. P. Fred Cappuccino: Depuis que je suis ministre du culte, j'ai célébré quelque 1 000 mariages, quoi que j'ai oublié le nombre exact. Pendant sept ans, j'ai été ministre du culte au Québec. Il y avait deux ministres unitariens, deux congrégations. Lorsque nous sommes arrivés en 1967, il n'y avait pas de mariage civil. Au Québec, une personne devait être mariée par une institution religieuse reconnue. Les ministres unitariens étaient prêts à le faire, et mes collègues et moi-même avons célébré tous les mariages des Hindous ou des autres groupes confessionnels qui n'étaient pas reconnus par la province. Nous sommes ceux qui ont travaillé très fort pour aider les Québécois et le gouvernement à accepter les mariages civils, parce que nous étions trop occupés et que nous devions faire tout ce travail. Mais il y a eu une certaine résistance.

    Je ne pense pas que le fait d'avoir des mariages civils au Québec, une notion qui est enchâssée dans la loi, ait nui à l'institution du mariage. Je pense que c'était une bonne chose, et les autres groupes religieux ont progressivement été reconnus et ont pu alors célébrer leurs propres mariages.

    Pour en venir à mon fils, son suicide nous a anéantis, ma famille et moi. Évidemment. Si lui et cet autre type—et je ne sais pas s'il était homosexuel—voulaient se marier, je pense que c'est une question de droits de la personne.

+-

    Le président: Merci.

    Monsieur Lee, vous avez trois minutes.

+-

    M. Derek Lee: À la fin d'une de ses réponses, un des témoins—c'était Mme Dubuc ou Mme Poulin—a dit que le vrai problème c'était l'homophobie. Je pense que j'ai bien compris. Je ne sais pas à laquelle des deux témoins adresser cette question, parce que je ne me souviens plus de l'auteur de ces commentaires. Cependant, je regrette que l'on pense que le problème est un problème d'homophobie parce que nombre d'entre nous jugent que ce qui est en jeu c'est l'institution du mariage.

    Je vous demanderai à l'une ou à l'autre de répondre à ma question. N'est-il pas possible qu'un particulier ou un législateur qui participe à ce débat juge que ce qui est en jeu c'est l'institution du mariage et non pas l'équité des droits pour les gais, les lesbiennes, les homosexuels, une question qui a fait l'objet d'une longue lutte? N'est-il pas possible que les législateurs qui participent à ce débat ne soient pas vraiment l'ennemi, qu'ils ne soient pas homophobes, qu'ils désirent en fait faire tout ce qu'ils peuvent pour l'institution du mariage? J'aimerais bien entendre la réponse de celle qui avait tenu ces propos.

[Français]

+-

    Mme Dominique Dubuc: Je pense qu'on l'a dit un peu toutes les deux, mais je vais prendre la parole quand même.

    Il y a une différence entre être homophobe et tenir des propos homophobes. Notre société est homophobe. Plus vite on s'en rendra compte, mieux ce sera. On est élevés dans cette homophobie. Les homosexuels qui se découvrent homosexuels se détestent au départ, parce qu'on baigne là-dedans tous les jours. Il est tout à fait normal que l'homophobie se manifeste partout dans la société. On veut lutter contre cela. On aimerait mettre en lumière les fois où elle se manifeste. Lorsqu'on nous dit que, parce que nous sommes des conjoints de même sexe, nous n'avons pas suffisamment de valeur pour accéder à l'institution du mariage, nous ne pouvons pas interpréter cela autrement que comme étant de l'homophobie.

    Comprenez-vous qu'il y a une différence entre le fait d'accuser tout le monde d'homophobie et cette homophobie latente dont il faut prendre conscience pour évoluer dans notre société?

º  +-(1655)  

[Traduction]

+-

    Le président: Merci, monsieur Lee.

+-

    M. Derek Lee: Merci.

+-

    Le président: Monsieur Marceau.

[Français]

+-

    M. Richard Marceau: Si vous aviez à nous dire en une phrase ou deux quel est, selon vous, l'objectif, l'essence, le but du mariage, que nous diriez-vous, dans l'ordre ou dans le désordre? Allez-y.

+-

    Mme Dominique Dubuc: Personnellement, je veux me marier avec ma conjointe. C'est ma situation actuelle. Je veux me marier avec elle parce que je l'aime. Je veux fonder une famille avec elle et m'engager avec elle. Je lui jure fidélité. Nous nous sommes unies civilement à l'été. Nous avons fait cette partie-là. Pour nous, c'est clair. On ne demanderait pas à deux personnes hétérosexuelles d'écrire une dissertation sur les raisons pour lesquelles elles veulent se marier. Ce n'est surtout pas, tel que je l'ai entendu dire, juste une question d'aller chercher des bénéfices, car il faut être conscient que le mariage entraîne aussi beaucoup, beaucoup de responsabilités.

+-

    M. Richard Marceau: Si je pose la question, c'est qu'on a dit ici que l'essence du mariage était la vie sexuelle d'hétérosexuels. On a dit que l'essence du mariage était une vie sexuelle. Je suis curieux d'entendre vos commentaires là-dessus.

[Traduction]

+-

    Mme Shari Brotman: Je suis hétérosexuelle et je suis mariée; je pourrais vous donner mes raisons personnelles. Elles ne sont certainement pas celles que vous venez d'énoncer. J'ai vécu avec mon mari avant notre mariage, alors le mariage en soi n'était pas l'objectif de notre cohabitation. Ce mariage visait simplement à reconnaître et célébrer notre union, avec nos familles, nos amis et notre société. Nous voulions être reconnus comme couple, et la façon publique de le faire est d'être mariés. Voilà pourquoi.

+-

    Le président: Monsieur Cappuccino.

+-

    R. P. Fred Cappuccino: Ma femme et moi sommes mariés depuis près de 50 ans. La vie sexuelle était importante, mais nous pensons tous deux que deux personnes qui sont unies, dans notre cas par le mariage, peuvent faire plus de bien pour l'humanité comme équipe qu'ils ne pourraient le faire de façon distincte et séparée. Actuellement, ma femme est au Népal, où nous avons un foyer pour enfants qui accueille un millier d'orphelins. Il y a beaucoup de foyers là-bas, et elle y passe la moitié de son temps. C'est un résultat de notre mariage.

    Lorsque nous nous sommes mariés en 1953 nous avons également décidé que nous aurions deux enfants naturels, pas plus. Évidemment c'était terrible. Certaines agences d'adoption ne voulaient pas nous laisser adopter d'enfants parce que... les choses changent et il en va de même pour la façon de penser des gens. Nous avons décidé qu'au lieu d'accroître la population mondiale nous adopterions un ou deux enfants. Mais ma femme n'a pas su se retenir, et c'était toujours un de plus, un de plus, et nous en avons adopté 19. Une fois les enfants grands, elle a jugé qu'elle avait encore beaucoup d'énergie alors la voici maintenant au...

    Je lui ai parlé hier matin. Elle revenait par voie de terre de notre orphelinat au Tibet. Un porteur l'a transportée sur son dos sur quelque 30 mètres de neige parce que notre Land Rover ne pouvait traverser ce terrain.

    J'en connais un peu sur le mariage et je crois fermement en cette institution.

+-

    Le président: Merci beaucoup.

    Monsieur O'Brien.

+-

    M. Pat O'Brien: Merci, monsieur le président.

    Madame Dubuc, j'ai écouté vos derniers commentaires sur la caractérisation des gens. Je dois vous dire que je passerai en revue le texte de ces délibérations parce que vous n'étiez peut-être pas consciente de la nature hyperbolique des commentaires que l'on faisait quand je suis arrivé—je pense tout particulièrement aux propos de Mme Poulin. Il est très clair que si vous avez une opinion contraire sur la question—en d'autres termes, si vous voulez défendre la notion de mariage telle qu'elle est reconnue actuellement—les termes employés étaient «préjugé», «ignorance» et «homophobie», et ces termes ont été utilisés à plusieurs reprises de façon accusatoire, à mon avis tout au moins. Vous n'en n'êtes peut-être pas consciente, mais c'est certainement l'impression que j'ai eue. Je suis donc heureux d'entendre des propos un peu plus modérés.

    Ma question s'adresse à vous, madame Dubuc, parce que vous avez reconnu, avec franchise, que vous n'étiez pas consciente des opinions des professeurs Eskridge et McWhorter. Je vous remercie de votre honnêteté. Leurs opinions permettent certainement d'écarter l'argument d'homophobie qu'on a présenté aujourd'hui, parce que ces deux intervenants sont des experts homosexuels.

    J'aimerais parler de polygamie, une question que j'ai déjà abordée, comme mes collègues d'en face, lors des réunions de ce comité. C'est triste, mais nos commentaires ont été interprétés, par un ou deux des députés membres de ce comité, comme étant des commentaires haineux et tout à fait inappropriés. C'est ridicule. Comme les députés l'ont signalé à quelques reprises aujourd'hui, et plusieurs fois auparavant, ce comité doit...

    Voici la différence, madame. Vous avez dit que vos opinons n'ont aucun impact sur nos mariages, mais nos opinions ont un impact sur les vôtres. Sans vouloir vous contredire, j'aimerais signaler que nous sommes des membres élus du Parlement à qui on a confié une tâche très importante, et c'est notre responsabilité. C'est la différence entre nos opinons et les vôtres. Nous devrons probablement voter sur cette question au comité et peut-être même à la Chambre des communes. Vous avez dit un peu plus tôt que vous pensiez que cette affaire était réglée d'avance, qu'il s'agissait simplement de mariage homosexuel, et j'en déduis que les autres témoins sont du même avis. Pourtant, le professeur Eskridge que j'ai cité un peu plus tôt a dit lui-même que ce n'était pas aussi simple, que changer la définition du mariage pourrait fort bien créer une situation où l'on demandera que les mariages polygames soient reconnus.

    Étiez-vous consciente de cette opinion d'un expert, homosexuel et professeur à Yale? Qu'en pensez-vous? Ne voyez-vous pas que c'est pas aussi simple que cela? Je suppose que si votre opinion était exacte, les choses seraient assez simples pour notre comité, mais des témoins experts ont dit que ce n'était pas le cas et qu'une décision en ce sens pourrait avoir des ramifications énormes.

»  +-(1700)  

[Français]

+-

    Mme Dominique Dubuc: Plusieurs experts ont aussi rétorqué que ce n'était pas nécessairement ce qui allait se passer. Il ne faut pas prendre que les propos de ces experts-là. Ce n'est pas parce qu'ils sont gais ou lesbiennes qu'ils ont la bonne parole. Je ne les connais pas et je persiste à dire que la polygamie n'est pas le sujet dont on parle ici; on parle de deux adultes égaux devant la Charte.

[Traduction]

+-

    M. Pat O'Brien: Vous ne semblez pas comprendre mon argument. Nous parlons en partie de la polygamie. Et c'est sur cette question que nous sommes vraiment en désaccord. D'après ce que des témoins experts ont dit au comité, l'adoption de vos propositions pourrait avoir pour résultat que certains demanderaient que les mariages polygames soient reconnus. Il faut en tenir compte. Comprenez-vous?

[Français]

+-

    Mme Dominique Dubuc: Absolument pas. Je ne vois pas comment on peut faire ce lien. On parle de deux personnes en ce moment. Deux hétérosexuels, deux personnes de sexe différent ont le droit de se marier. Nous, on est de même sexe. On n'a absolument pas l'intention d'avoir une troisième ou une quatrième femme, ou un homme, ou quoi que ce soit. C'est complètement irrelevant.

[Traduction]

+-

    Le président: Merci.

    J'ai une longue liste des gens qui veulent intervenir, et j'ajoute sans cesse de nouveaux noms.

    Monsieur Toews.

+-

    M. Vic Toews (Provencher, Alliance canadienne): Je m'excuse de ne pas avoir pu être présent pour la plus grande partie des questions. J'espère que je ne répéterai pas des choses qui ont déjà été dites.

    Je m'intéresse beaucoup aux commentaires que vous avez faits en réponse aux questions de M. Marceau sur l'objet du mariage, monsieur Cappuccino. Vous nous avez parlé d'une manière fort touchante de vos rapports avec votre femme et du travail important et des bonnes oeuvres que vous avez faites. Nous devons vous en féliciter. Vous avez dit que vous formiez une merveilleuse équipe, et c'est extraordinaire. Le mariage peut faire une grande équipe. Il peut faire bien d'autres choses, mais il peut quand même permettre de créer une très bonne équipe.

    Je ne suis pas théologien, mais je me souviens de passages de la Bible où le Christ a envoyé ses disciples, deux par deux. Il ne leur a pas ordonné de se marier. Pour faire le travail du Christ, il n'est pas nécessaire d'être marié. Il est possible d'avoir une équipe efficace sans que les membres de cette équipe soient mariés.

    Je me demande si nous confondons le rôle fondamental du mariage et la création d'une bonne équipe. Je suppose que le Christ aurait pu envoyer un homme et une femme pour faire équipe. Je suis convaincu qu'il l'a fait. Je me demande simplement pourquoi il est nécessaire dans ce contexte de dire «Je vais vous envoyer deux par deux, mais vous devriez également être mariés».

»  +-(1705)  

+-

    R. P. Fred Cappuccino: C'est un bon argument, monsieur Toews.

    Pour en revenir à mon propre mariage, je dois vous rappeler qu'il y a une caractéristique d'exclusivité à nos rapports. Ma femme est partie la moitié du temps, et je n'ai pas à m'inquiéter et à me demander si je l'ai perdue ou des choses du genre. Lorsque nous nous sommes mariés, nous avons fait voeu de fidélité, et je crois que c'est important. Quant aux disciples qui étaient envoyés deux par deux, ce n'était pas une mauvaise chose non plus. Si deux personnes jugent qu'elles veulent se dévouer exclusivement l'une à l'autre en plus de faire le travail de Dieu, c'est une bonne chose.

    Je ne sais pas si j'ai répondu à votre question.

+-

    M. Vic Toews: Je ne faisais que penser à voix haute. Vous avez peut-être répondu à ma question, mais je vais y penser encore un peu plus. De toute façon, je vous remercie de votre réponse. Merci beaucoup.

+-

    R. P. Fred Cappuccino: Merci.

+-

    Le président: Merci beaucoup, monsieur Toews.

    Monsieur Maloney.

+-

    M. John Maloney (Erie—Lincoln, Lib.): La réponse que vous avez donnée à la dernière question de M. Marceau était fort intéressante. Les trois personnes qui ont répondu à la question sur l'objectif du mariage ont donné des réponses bien différentes. Je suppose que si on faisait un sondage dans cette salle, tous les répondants donneraient une définition différente des objectifs du mariage. Il faut se demander si le fait d'interdire les mariages homosexuels vous empêche de réaliser ces objectifs dans une union homosexuelle. Je demanderais donc aux trois personnes qui ont répondu tout à l'heure de répondre à cette question. En fait, n'importe qui peut y répondre.

[Français]

+-

    Mme Dominique Dubuc: Pouvez-vous répéter la question?

[Traduction]

+-

    M. John Maloney: J'essaie de cibler ce mot magique «mariage». Des objectifs que vous avez donnés du mariage, en est-il que vous ne pouvez atteindre si vous êtes dans un mariage homosexuel? J'ai l'impression que vous pouvez vivre tout ce que vous nous avez décrit aujourd'hui dans un mariage homosexuel comme dans un mariage hétérosexuel.

+-

    Le président: Madame Bennett.

+-

    Mme Mary Bennett: Cela m'a pris du temps, mais j'ai trouvé ma définition : «déclaration publique et reconnaissance d'un engagement à vie». Le caractère public fait une grande différence. Dans notre culture, le mariage a un sens particulier. Les gens qui assistent à un mariage ont une certaine idée de ce que cela signifie et si l'on ne va pas jusqu'au mariage, ce caractère public est diminué et la reconnaissance est donc moins grande. C'est ainsi que je perçois la différence.

+-

    Le président: Madame Dubuc.

[Français]

+-

    Mme Dominique Dubuc: Elle vient de dire en partie ce que je voulais exprimer et ce que Mme Brotman a dit aussi dans sa définition du mariage. À ce compte-là, pourquoi les couples de sexe différent auraient-ils besoin du mariage, eux? Au fond, on peut inverser la question. Nous pouvons effectivement tout faire, être une équipe, être engagées et tout sans le mariage, mais les conjoints de sexe différent ont l'option du mariage, dont l'aspect public, social et la tradition sont reconnus. Ce sont des aspects positifs auxquels nous aimerions aussi avoir accès. Comprenez-vous que si le mariage est si peu important, les couples hétérosexuels...?

[Traduction]

+-

    Le président: Mme Poulin voulait également répondre.

[Français]

+-

    Mme Lise Poulin: Pour répondre à votre question, je dirai oui. Je suis hétérosexuelle, je ne suis pas mariée, j'ai 55 ans et j'ai une vie de couple et une vie sexuelle très dynamiques. Le mariage, pour moi, n'est pas un choix. S'il y avait deux mondes, les hétérosexuels d'un côté et les homosexuels de l'autre, je dirais peut-être, mais il y a un monde, et on est tous égaux en droit. Si je décide de me marier, cela m'est accessible. Mon conjoint et moi avons décidé de nous marier à 65 ans parce que c'est trop compliqué quand on est jeunes. C'est un choix qu'on fera plus tard. C'est une question de droit et non une question de...

»  +-(1710)  

+-

    Le président: Monsieur Marceau.

+-

    M. Richard Marceau: J'ai une question pour les professeurs Ryan et Brotman. Depuis que la Hollande a permis le mariage des conjoints de même sexe, a-t-on vu une baisse du nombre de couples hétérosexuels qui se marient?

[Traduction]

+-

    M. Bill Ryan: La reconnaissance et l'autorisation du mariage de couples de même sexe en Hollande est un phénomène relativement récent. D'après ce que j'ai lu, aucun ouvrage ou aucun rapport ne dit que cela a entraîné une crise dans les mariages hétérosexuels ou que cela a eu un effet négatif pour la famille ou la société. Cette mesure a permis à bon nombre de personnes dont les relations n'étaient pas reconnues—je parle de reconnaissance sociale et légale, puisque c'est de cela qu'il s'agit dans le mariage—ont pu faire reconnaître ces relations. Mais rien n'indique que les hétérosexuels ont cessé de se marier à cause de cela.

[Français]

+-

    M. Richard Marceau: Vous avez entendu des gens dire, même aujourd'hui, qu'il faut que les membres de ce comité réfléchissent sur les effets sociaux, politiques et autres. Au fond, même si c'est très récent en Hollande, une fois que tout ce qui touche les bénéfices est réglé... On a eu le C-23 et, au Québec...

    Vous savez, madame Dubuc, qu'en tant que couple homosexuel, vous avez à peu près les mêmes droits qu'un couple hétérosexuel, qu'il s'agisse de la pension, des assurances, etc. Quand on parle d'effets, on entend toujours un roulement de tambour: on dit que les effets seront importants, et patati, et patata. Est-ce que ces effets seraient aussi importants si une partie de la population qui n'a pas accès au mariage y avait accès aujourd'hui? S'il n'y a pas de problèmes de bénéfices, de reconnaissance ou d'adoption--c'est réglé au Québec, entre autres--, quels pourraient être ces effets qui , selon certaines personnes, pourraient être si dramatiques? Je les cherche. Je vous pose la question en toute innocence, au sens premier du terme. Quels pourraient être ces effets, même dans le pire des scénarios? Je cherche.

[Traduction]

+-

    M. Bill Ryan: Je suppose que 20 ans après que le Canada aura permis aux couples de même sexe de se marier, nous nous interrogerons sur le tollé de protestations que cette mesure a engendrées parce que cela ne changera pas la dynamique des relations hétérosexuelles. En autorisant les conjoints de même sexe à se marier, nous leur donnons accès à l'institution sociale qui accorde aux couples le plus haut degré de reconnaissance dans notre société, du point de vue civil. C'est ce que nous offrons à une population qui en a été privée jusqu'à maintenant.

+-

    Le président: Monsieur Peschisolido.

+-

    M. Joe Peschisolido (Richmond, Lib.): Merci, monsieur le président.

    Je tiens d'abord à remercier tous nos témoins d'être venus nous rencontrer. Ce qui m'a frappé à plusieurs reprises, durant notre discussion, c'est que nous nous critiquons les uns les autres. Quand on veut accomplir une tâche, il faut s'astreindre à certaines règles.

    M. McKay a posé à M. Brotman et à M. Ryan une question sur la fonction du mariage. Pour ma part, j'estime que le mariage est une institution sociale. D'un côté de la discussion ou de l'analyse, on fait valoir que le mariage a toutes sortes de fonctions à titre d'institution sociale. À première vue, c'est effectivement une institution discriminatoire, mais cette discrimination est justifiée par d'autres fins et d'autres éléments de cette institution. Vous avez dit que ce qui vous préoccupe, dans cette institution sociale, c'est son caractère exclusif et discriminatoire.

    D'autres font valoir—la question a été discutée dans le milieu de l'enseignement et j'aimerais avoir votre avis à ce sujet à titre de spécialistes des sciences sociales—que les écoles réservées uniquement aux filles sont une institution sociale valable car elles permettent aux jeunes femmes de se trouver dans un milieu où elles peuvent développer leur estime d'elles-mêmes. Mais ce concept est lui-même discriminatoire parce que les jeunes garçons qui pourraient bénéficier de ce genre de milieu en sont privés.

    Monsieur Ryan et monsieur Brotman, pourriez-vous utiliser ce genre d'arguments dans votre analyse des institutions sociales et les appliquer à d'autres institutions sociales? Et dans ce cas, diriez-vous qu'une institution sociale comme des écoles réservées aux filles est valable? Même si elle crée une discrimination, elle sert une fonction primaire et élémentaire dans la société.

»  +-(1715)  

+-

    Mme Shari Brotman: J'aimerais répondre à quelques-unes de ces questions. Tout d'abord, si nous parlons d'éducation et d'écoles réservées aux garçons ou aux filles, il ne faut pas oublier que la création d'écoles réservées aux filles était en fait une réaction à un milieu discriminatoire. L'histoire de l'éducation démontrera que les filles n'étaient pas éduquées de la même façon que les garçons, et la création d'écoles réservées aux filles dans le but de créer l'environnement qui leur permettrait de s'épanouir était clairement une réaction face à l'inéquité du système. Nous nous sommes peut-être écartés du sujet, mais c'est quand même un aspect important. C'est mon premier commentaire.

    De plus, les écoles réservées aux filles n'existent que parce qu'il y a des écoles réservées aux garçons. Il faut se demander si les écoles elles-mêmes sont égales les unes aux autres dans le système d'éducation. L'institution en soi n'est pas l'école pour filles, n'est-ce pas? L'institution est un établissement d'enseignement et il y a, d'après l'exemple que vous donnez, des écoles qui accueillent des filles spécifiquement et d'autres écoles qui n'accueillent que des garçons.

    J'aimerais également signaler que souvent dans les écoles ségréguées—je ne sais pas si les écoles réservées exclusivement aux garçons ou aux filles seraient un bon exemple, parce qu'elles sont habituellement des écoles privées plutôt que des écoles publiques—, les écoles n'ont pas accès aux mêmes ressources. Si nous parlons des écoles ségréguées, celles qui sont réservées aux Noirs plutôt qu'aux Blancs, par exemple, nous savons, car l'histoire l'a démontré, que ces écoles, dans les grandes villes, ne reçoivent pas le même financement et n'ont pas accès aux mêmes ressources que les écoles réservées aux Blancs ou les écoles du secteur privé.

    Je suppose que vous voulez extrapoler et demander pourquoi on ne pourrait pas avoir des écoles qui seraient réservées exclusivement aux gais et aux lesbiennes et d'autres écoles qui seraient réservées aux hétérosexuels, d'accord? Je comprends ce que vous dites, mais si vous parlez du parapluie créé par l'institution même, c'est l'institution du mariage. C'est comme si vous disiez que l'institution en soi est l'établissement d'enseignement. Il ne s'agit de l'équité de...

    En fait, ce que je veux dire revient à des notions de «égal, mais différent». Nous parlons ici de reconnaissance, mais si c'est présenté de façon différente, ça ne suffit pas.

+-

    Le président: Merci beaucoup, monsieur Peschisolido. Il nous reste 10 minutes. J'ai encore plusieurs noms sur ma liste, et vous avez pris quatre minutes et demie.

    Monsieur McKay.

+-

    M. John McKay: Monsieur Ryan, j'aimerais revenir à votre commentaire quant à ce qui suscite toutes ces discussions et sur le fait que dans 20 ans on se demandera pourquoi on avait fait tout un plat. Monsieur, je pense qu'il y a 20 ou 30 ans, sous la direction d'un ancien premier ministre qui était alors ministre de la Justice, nous nous sommes penchés sur le mariage, soit en étudiant la Loi sur le divorce. D'aucuns diront que les résultats ont été catastrophiques pour notre société. Il y a moins de mariages, un nombre beaucoup plus élevé d'enfants sont élevés dans des familles monoparentales, et il existe un plus grand chaos social. Je ne veux pas m'étendre trop longtemps sur cet argument, mais ce que nous faisons ici aujourd'hui est, on peut dire, tout aussi important que la modification de la Loi sur le divorce en 1968. Je crois que les parlementaires seraient irresponsables s'ils n'étudiaient pas soigneusement cette question.

    J'aimerais parler de cet argument selon lequel si on n'autorisait pas les homosexuels à se marier, on les exclurait, on les dénigrerait et on leur imposerait des relations dévalorisées, si je peux m'exprimer ainsi. On fait l'analogie en disant que l'exclusion fondée sur la race est du racisme et que l'exclusion fondée sur l'orientation sexuelle est en fait une façon d'imposer l'hétérosexualité. C'est l'argument présenté par les couples homosexuels qui veulent atteindre l'étalon or des relations, le mariage.

    À mon avis le mariage n'est pas une panacée pour qui que ce soit, et il ne peut pas être l'exemple parfait pour toutes les relations sans qu'il perde sa signification intrinsèque pour la culture humaine. En fait, l'institution du mariage ne vise aucunement à dénigrer, à exclure, ou à écarter d'autres relations en les jugeant peu dignes. Je vous demanderais de dire quelques mots sur cet argument de dévalorisation, si vous voulez, sur cette idée que si on est exclu on fait partie d'une relation dévalorisée, d'une relation de deuxième ordre réservée aux gais et aux lesbiennes.

»  +-(1720)  

+-

    M. Bill Ryan: Je voudrais exprimer la même réaction que nous avons vue de la part de Mme Dubuc il y a quelques instants dans sa réponse à une question. Imaginez si la situation était l'inverse et si nous avions ce débat dans une société où seuls les couples de même sexe se voyaient accorder le droit de se marier, tandis que les couples hétérosexuels venaient demander au Parlement d'examiner la loi pour leur permettre d'accéder au statut du mariage. Je trouve qu'il serait alors clair...

    Nous parlons ici d'une institution qui confère la reconnaissance la plus haute aux relations et aux couples, socialement et légalement, qu'une société puisse offrir sur le plan civil. Dès lors qu'un groupe de couples dont la loi actuelle reconnaît qu'ils sont dans une relation de couple n'a pas le droit d'avoir accès à cette institution, pour moi, c'est clairement discriminatoire.

+-

    Le président: Professeur Brotman, allez-y.

+-

    Mme Shari Brotman: Je suis entièrement d'accord Bill Ryan là-dessus. Je ne suis pas sûr d'avoir grand-chose à ajouter, sauf pour dire que dans le document que nous vous avons présenté, nous avons mis un certain nombre de citations à la fin. Ce sont des gens qui ont exprimé leur opinion dans le cadre de travaux que nous avons faits à McGill. La dernière citation est d'une femme qui va bientôt se «marier» avec celle qui est son amante depuis 10 ans, dans le cadre d'une cérémonie d'engagement. Sa mère refuse d'y assister parce que ce ne serait pas considéré comme un mariage authentique. La reconnaissance juridique du mariage aiderait cette femme à recouvrer le respect de sa mère et à rétablir ses relations avec elle.

    Nous pouvons donc en discuter sur le plan abstrait, mais dans la vie des gens qui vivent véritablement cette situation, qui ont pris cet engagement l'un envers l'autre—dans le cas de cette citation, il s'agit d'un couple qui vit ensemble depuis 10 ans—, ce sont des relations qui existent bel et bien, et ces gens-là cherchent à obtenir la reconnaissance des membres de leur famille, pas seulement de la société dans son ensemble. Je pense que nous ne devons pas l'oublier. Quand on parle d'équité, on parle de gens, de particuliers et de leur vie.

+-

    Le président: Merci.

    M. O'Brien posera la dernière question.

    Avant de lui donner la parole, j'aimerais que tout le monde reste quelques instants. J'aurai quelques observations à faire sur notre horaire de voyage, et je vous demande donc de rester.

    Je m'adresse maintenant aux témoins; si vous n'y voyez pas d'inconvénient, je vous demanderais de rester. Tous les membres du comité voudront vous serrer la main après la séance, et j'aimerais donc qu'ils restent pendant que nous traitons cette affaire.

    Monsieur O'Brien.

+-

    M. Pat O'Brien: Monsieur le président, nous savons que le professeur Ryan a raison et que le mariage tel que nous le définissons est discriminatoire. La question n'est pas là, parce que c'est admis. La question est de savoir si cette discrimination est justifiée, et certains d'entre nous estiment que c'est le cas.

    Madame Bennett, j'ai noté avec intérêt votre définition du mariage en huit mots. Si j'ai bien entendu, c'est une «déclaration et reconnaissance publiques d'un engagement pour la vie». C'est intéressant, mais je vous ferai remarquer que l'État pourrait accorder cela sans avoir à changer la définition de mariage. Vous pourriez faire inscrire votre définition dans la loi, peut-être par notre comité et par le Parlement, sans avoir à changer la définition du mariage.

    C'est une question sérieuse dont nous discutons. La plupart des intervenants n'accepteraient pas votre définition, parce qu'ils veulent rien de moins qu'un changement à la définition du mariage. Pour moi, il n'en est tout simplement pas question, et j'espère que les Canadiens dans leur ensemble pensent comme moi. Je voulais seulement faire cette observation, mais j'ai maintenant une question à poser au professeur Ryan.

    Professeur, dans vos observations de tout à l'heure, il m'a semblé que vous avez tenté de dire, d'une manière ou d'une autre, que la nature hétérosexuelle du mariage ne date pas de très longtemps, et vous avez fait allusion à la common law. Je ne suis pas avocat, mais il y a beaucoup d'avocats ici, et même d'excellents avocats, qui sont membres de notre comité, des deux côtés de la table, mais il me semble que la pratique au Canada, depuis la Confédération, a été de ne pas marier les personnes de même sexe. Pour moi, c'est cela, la common law. N'est-ce pas le cas? Avez-vous des exemples de personnes du même sexe qui ont été mariées dans notre pays?

»  +-(1725)  

+-

    M. Bill Ryan: Non, je disais simplement, avec une certaine ironie, que dans certaines parties de notre pays, il fut un temps où l'on définissait le mariage comme l'union de deux personnes. Le Code civil du Québec, qui a été révisé il n'y a pas longtemps, disait en fait que le mariage était l'union de deux personnes. On ne disait pas un homme et une femme, on disait deux personnes. Ce libellé a seulement été révisé avec l'adoption du nouveau Code, qui dit que le mariage existe entre un homme et une femme. Donc, la définition en elle-même semble avoir été plus ouverte à un moment donné, et il est évident que l'on entendait exclure les couples de même sexe dans cette définition pourtant plus ouverte.

+-

    M. Pat O'Brien: Mais la pratique juridique depuis la Confédération a été d'exclure les gens. Vous concédez ce point.

+-

    M. Bill Ryan: Oui, absolument.

+-

    Le président: Nous allons donner le mot de la fin à Mme Bennett.

+-

    Mme Mary Bennett: Je voulais dire que dans cette définition, j'estime qu'il faut faire ressortir le mot «public». Pour ce qui est de ce que l'on permet à l'heure actuelle pour les couples de même sexe, c'est moins public, à mon sens, et je trouve que c'est important.

+-

    Le président: Votre définition compte donc huit mots, dont l'un est souligné.

    Maintenant, je voulais vous faire part de deux ou trois choses. Premièrement, j'aimerais remercier M. Robinson d'avoir déposé notre rapport d'hier relativement au report de l'échéance pour le projet de loi C-250.

    Je fais cela aujourd'hui parce que cela touche le premier lundi à notre retour. Je veux annoncer que le ministre de la Justice comparaîtra lundi après-midi, ce qui n'est pas un créneau habituel pour nous. Ce sera donc le lundi 17 mars 2003, à 15 h 30, sur le projet de loi C-22.

    Nous siégerons donc tout de suite après la Saint-Patrick, monsieur O'Brien.

    Je veux aussi signaler qu'à la prochaine occasion, nous discuterons du renvoi de la motion M-192, qui traite de la législation sur la sollicitation. Cela nous a été envoyé et l'un des membres du comité a proposé que l'on forme un sous-comité. Je vous demanderais d'y réfléchir. Je ne vais pas mettre cela en discussion aujourd'hui, mais je veux donner publiquement préavis que nous aurons une discussion là-dessus, et je vous invite à y réfléchir.

    Au sujet des voyages, je voudrais dire que le 1er avril, nous serons à Vancouver, et que nous irons ensuite à Edmonton, Moose Jaw, et Steinbach, au Manitoba, du 1er avril au 4 avril. Le 7 avril, nous serons à Halifax, à Sussex, au Nouveau-Brunswick—j'ignore pourquoi vous insistez pour écrire «Nouveau-Brunswick», parce que tout le monde sait où se trouve Sussex—et à Sudbury, et ensuite nous passerons deux jours à Toronto, pour la simple raison que nous recevons un très grand nombre de demandes de gens qui veulent comparaître à Toronto. Il y aura ensuite deux semaines de travail dans nos circonscriptions, et puis le 28 avril, le 29 avril et le 30 avril, nous serons à Rimouski, à Montréal et à Iqaluit. Je dis tout cela à l'intention de ceux d'entre vous qui aimeraient faire part au personnel du comité de témoins potentiels que vous aimeriez inviter à comparaître, car c'est ce que nous vous invitons à faire, et vous savez tous comment vous y prendre.

    Voilà donc essentiellement ce qui est prévu pour notre voyage et, comme je l'ai dit, cela a été approuvé aujourd'hui.

    Monsieur Cadman.

+-

    M. Chuck Cadman: Êtes-vous en train de me dire que, durant la fin de semaine des 5 et 6 avril, nous serons pris à Steinbach?

    Une voix : Il y a une vieille rengaine qui dit : «Nous voici encore pris à Lodi».

+-

    Le président: À l'ordre. Nous faisons patienter les témoins, et ce n'était pas mon intention. Je pensais que tout cela irait beaucoup plus vite.

    Le révérend Cappuccino en est probablement conscient, ayant été le père de 21 personnes.

    Des voix : Oh, oh!

+-

    Le président: Monsieur O'Brien, allez-y.

+-

    M. Pat O'Brien: J'invoque le Règlement, monsieur le président. Ai-je bien entendu que le ministre viendra témoigner un jour qui n'est pas habituel, un lundi, et le jour de la Saint-Patrick, de surcroît?

+-

    Le président: Oui, lundi.

+-

    M. Pat O'Brien: Eh bien, en tant que député ministériel, monsieur le président, je dois dire que je ne trouve pas cela acceptable. Il vient témoigner devant le comité à un moment inhabituel. Je vais donc devancer les députés de l'opposition et dire que je trouve cela inacceptable, et je pense que le secrétaire parlementaire doit retourner voir le ministre et lui demander de venir témoigner à l'un des créneaux habituels de notre comité.

»  -(1730)  

+-

    Le président: Vous devriez blâmer la présidence en premier.

+-

    M. Pat O'Brien: Je me fiche de savoir qui est à blâmer, mais ce n'est pas acceptable.

+-

    Le président: Le ministre nous a donné deux dates, le 17 mars et le mois de mai. J'ai insisté pour qu'il vienne le 17 mars parce que c'était plus tôt que le mois de mai. Donc, je m'adresse aux députés ministériels, il s'agit là d'une prérogative de la présidence.

+-

    M. Pat O'Brien: Si je peux finir, monsieur le président, je ne trouve pas les choix offerts par le ministre acceptables non plus. Très franchement, j'ai déjà présidé des comités, j'ai siégé à un certain nombre de comités, parfois avec les mêmes collègues qu'aujourd'hui, et j'ai trouvé que les ministres étaient un peu plus accessibles que cela, davantage prêts à accéder au desiderata des comités. Je trouve qu'il faudrait dire au ministre que le choix qu'il nous donne n'est pas bon et que nous voulons lui proposer d'autres dates qui correspondraient aux créneaux habituels de notre comité, dans les plus brefs délais.

+-

    Le président: Monsieur Robinson, allez-y.

+-

    M. Svend Robinson (Burnaby—Douglas, NPD): Je voulais seulement soulever une autre question. C'est vrai que le rapport du comité a été déposé aujourd'hui et, si je comprends bien, cela donne effectivement à notre comité jusqu'au 15 mai, n'est-ce pas?

+-

    Le greffier du comité (Patrice Martin): Non, il doit être adopté avant le 15 mai.

+-

    M. Svend Robinson: Il doit être adopté avant le 15 mai.

    Quoi qu'il en soit, à la lumière de cela, je voulais seulement suggérer que nous envisagions de tenir des audiences sur mon projet de loi sur la propagande haineuse au cours de la première semaine de mai, simplement pour s'assurer que nous aurons suffisamment de temps après les audiences pour étudier la question et faire rapport à la Chambre.

+-

    Le président: La présidence prend bonne note de cette nouvelle question que l'on a soulevée, mais je dois d'abord régler une foule d'autres questions.

    M. Marceau veut intervenir au sujet du voyage.

[Français]

+-

    M. Richard Marceau: Oui, mon intervention porte sur le comité. On avait envisagé la possibilité d'aller à Paris, à Amsterdam et à Bruxelles. Apparemment, ça ne sera pas le cas. Si on n'y va pas, j'aimerais qu'on envisage la possibilité de recevoir des témoins experts des pays qui ont permis cela, entre autres la Belgique et la Hollande. Je sais que la Grande-Bretagne envisage la possibilité de reconnaître les conjoints de même sexe, et j'ai donné le document à M. Martin. Si on n'y va pas, j'aimerais qu'on envisage la possibilité de convoquer des gens pour qu'ils nous expliquent ce qui s'est fait, comment ça s'est fait et quels ont été les effets de ce qu'ils ont fait.

[Traduction]

-

    Le président: C'est notre intention.

    Je devrais peut-être donner congé aux témoins. Je ne les empêchais pas de partir, mais je croyais que tout cela irait beaucoup plus vite.

    Il y a une autre séance dans cette salle dès maintenant, et je vais donc remettre le reste de l'ordre du jour à demain.

    La séance est levée.