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HESA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent de la santé


NUMÉRO 015 
l
2e SESSION 
l
39e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 4 mars 2008

[Enregistrement électronique]

  (1110)  

[Traduction]

    J'aimerais tout d'abord remercier les témoins d'être des nôtres.
    Nous accueillons aujourd'hui deux groupes de témoins; nous devons donc procéder assez rapidement.
    M. Fletcher fera des observations préliminaires, je crois.
    Il y a rappel au Règlement.
    Il y a rappel au Règlement ?

[Français]

[Traduction]

[Français]

    Merci, monsieur le président, de me donner la parole.
    Je remercie les témoins d'être ici aujourd'hui. Mes propos ne signifient pas que je ne suis pas contente de les voir ici aujourd'hui.
    Je regarde la liste des témoins, et il y manque des groupes qui auraient dû être ici ce matin. Je voudrais savoir comment il se fait qu'il n'y ait aucune personnalité de la communauté gaie et lesbienne. Je sais qu'on a essayé de les joindre depuis le mois de janvier, mais j'ai entendu dire que la lettre ne s'était pas rendue. C'était important que Gai Écoute soit ici ce matin. Ce sont des intervenants qui ont été sollicités pour la mise sur pied du règlement. Ils ont poussé à la roue pour avoir ce règlement.
    J'espère qu'il y aura une autre séance, parce que ça ne me satisfait pas de voir qu'une partie des témoignages concernant les effets sur la communauté gaie et lesbienne ne seront pas entendus ce matin. En effet, ce qui nous a d'abord interpellés, c'est l'aspect discriminatoire d'un article du règlement.

[Traduction]

    C'est une bonne remarque. Je crois que Carmen, notre greffière, sera en mesure d'expliquer ce qui s'est passé.

[Français]

    Madame Gagnon, j'ai envoyé une lettre d'invitation à M. McCutcheon il y a quelques semaines. Je ne me souviens pas de la date exacte, mais c'était au mois de février, il y a au moins deux semaines. Je n'ai rien reçu de sa part. J'ai essayé de téléphoner, mais il n'y avait pas de boîte vocale. Je n'ai pu joindre personne par téléphone. J'ai envoyé un rappel pour demander qu'on me réponde, mais encore là, je n'ai rien reçu.
    On a parlé à M. McCutcheon.
    Je poursuis le même rappel au Règlement. M. McCutcheon dirige un organisme qui s'appelle Gai Écoute. Je communique avec cet organisme trois fois par semaine, alors je ne comprends pas que vous n'ayez pas réussi à joindre ces gens. S'ils ne sont pas là, on laisse un message sur un répondeur. Cela m'apparaît douteux que vous n'ayez pas réussi à joindre un organisme national comme celui-là.
    Je me joins à ma collègue Mme Gagnon pour exprimer ma déception de me retrouver devant un groupe de spécialistes institutionnels. Nous ne remettons pas en cause sa pertinence, mais ce matin, il aurait été intéressant d'avoir une variété de points de vue. Or, nous ne sommes pas outillés pour entendre une variété de points de vue. Nous en sommes très déçus.

[Traduction]

    Monsieur Ménard, j'aimerais que vous donniez à la greffière les numéros de téléphone de ces groupes de témoins. Nous ferons tout en notre pouvoir pour veiller à ce qu'ils soient convoqués. Nous aurons une autre séance à une date ultérieure pour nous assurer d'entendre ces témoins.

[Français]

    J'avais aussi demandé que M. Tremblay de l'Association Canadienne des Dons d'Organes soit ici. Vous nous aviez dit qu'il y aurait trop de témoins et qu'on ne pouvait pas en convoquer d'autres. Voilà encore un autre type de témoignage qu'on aurait aimé entendre ce matin. C'est ce qu'on m'a donné comme réponse quand j'ai souhaité recevoir ce témoin à la table ce matin. Je suis un peu déçue.
    Je suis contente que vous soyez ici. Vous allez répondre à certaines de nos questions, mais vous ne représentez pas une communauté particulièrement ciblée par une certaine discrimination qu'on peut lire dans les normes qui ont été établies lors de la consultation pour le règlement.
    Merci.

[Traduction]

     J'ai parlé à notre greffière, et il est proposé qu'à la fin ou au début de la réunion de jeudi, nous prenions du temps pour discuter des travaux du comité et nous mettre d'accord sur une date à laquelle ces témoins comparaîtront devant le comité, si c'est ce que choisit le comité.
    Une voix: Ou devant le comité de direction.
    Le vice-président (M. Lui Temelkovski): Le comité de direction ne se réunit plus, parce que nous avons déjà fait notre travail.

[Français]

    Il y a une chose que je ne comprends pas. La semaine dernière, j'ai demandé pourquoi on n'avait pas encore contacté M. McCutcheon. On m'a répondu qu'on lui avait envoyé une lettre et qu'il n'y avait pas répondu. Il a reçu un courriel vendredi, à ce que je sache. Le délai était alors vraiment trop court. On pouvait le joindre autrement que par une lettre. S'il a pu lire un courriel vendredi, il aurait pu... Je trouve qu'il y a eu un peu de laisser-aller quant au choix du témoin.

[Traduction]

    Monsieur Fletcher.
    Tout d'abord, j'aimerais souhaiter à M. Ménard la bienvenue à notre comité aujourd'hui. C'est comme le bon vieux temps, lorsque vous étiez le porte-parole du Bloc en matière de santé.
    Chers collègues, j'aimerais vous informer — comme le président ne peut malheureusement être des nôtres aujourd'hui, c'est à moi de le faire — que le Parlement est tenu par la loi d'entreprendre un examen de l'accord des premiers ministres de 2004 sur le renouvellement des soins de santé, intitulé Un plan décennal pour consolider les soins de santé. Le ministre de la Santé a demandé que le comité remplisse ce mandat.
    Je vais vous lire le paragraphe principal:
Étant donné que le Comité permanent de la santé est autorisé à faire une étude et à présenter un rapport sur toutes les questions relatives au mandat, à l’administration et au fonctionnement de Santé Canada, j'estime qu'il lui serait approprié d'entreprendre l'examen conformément à la loi susmentionnée.
    La lettre se poursuit — et je suis sûr que la greffière la déposera ou en distribuera des exemplaires — mais le message principal, c'est que nous devons examiner cette loi avant la fin mars.
    Par conséquent, lorsque nous discuterons de notre ordre du jour, peut-être jeudi, nous pourrons déterminer comment cela pourrait entrer dans notre horaire. Il faudra probablement le faire la semaine prochaine. Je sais que les fonctionnaires de Santé Canada seront disposés à venir témoigner.

  (1115)  

    Merci beaucoup, monsieur Fletcher.
    Nous examinerons cette question jeudi et nous essaierons de l'intégrer dans notre calendrier de travail le plus tôt possible pour nous assurer de votre satisfaction.
    Maintenant, conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, nous avons une séance d'information sur la nouvelle réglementation régissant les donneurs d'organes. Nos premiers témoins viennent du ministère de la Santé: Mme Ballantyne, sous-ministre adjointe, et Liz Anne Gillham-Eisen, gestionnaire d'unité.
    Nous allons commencer tout de suite par votre exposé, puis nous poursuivrons avec les autres témoins. Nous sommes à court de temps, comme vous pouvez le voir.
    Merci.

[Français]

    Avant de commencer, j'aimerais remercier le comité de nous donner, à nos fonctionnaires et à moi, l'occasion de répondre à ses questions concernant le règlement de Santé Canada sur la sécurité des cellules, des tissus et des organes humains destinés à la transplantation.

[Traduction]

    Je suis responsable de la Direction générale des produits de santé et des aliments, une unité de Santé Canada qui réglemente, en vertu de la Loi sur les aliments et drogues, la sécurité, l'efficacité et la qualité des produits thérapeutiques, ce qui comprend les cellules, tissus et organes.
    Aujourd'hui, je suis accompagnée de Liz Anne Gillham-Eisen, qui pourra vous fournir des renseignements plus précis sur le règlement en tant que tel et sur le processus de don d'organes. Mme Gillham-Eisen est une infirmière autorisée qui travaille dans le domaine du don d'organes et de tissus depuis 19 ans, comme coordinatrice de la transplantation de l'Hôpital Civic d'Ottawa. En 1992, elle a établi le Programme de don d'organes et de tissus à l'hôpital d'Ottawa, qu'elle a géré pendant dix ans. En tant que présidente de l'Association canadienne de transplantation, elle a participé comme experte à l'élaboration des normes nationales. En 2002, nous avons eu la chance de l'accueillir à Santé Canada, où elle a dirigé l'élaboration du règlement fédéral relatif à ces normes.
    J'aimerais attirer l'attention du comité sur trois points. Premièrement, je tiens à affirmer sans équivoque que, contrairement à ce qu'ont prétendu certains médias, le règlement n'interdit pas aux homosexuels mâles ni aux autres personnes chez qui on a relevé des facteurs de risque de faire un don d'organes. On n'empêchera aucun Canadien de devenir un donneur d'organes en raison de son sexe, de sa race ou de son orientation sexuelle. Les organes sauvent des vies, et bien trop de gens dont la vie dépend d'un don d'organe se trouvent sur des listes d'attente pour une transplantation. Certains vont même mourir en attente d'un don d'organes.
    Deuxièmement, j'aimerais souligner que le point de mire de ce règlement est la sécurité — en gardant à l'esprit le receveur. Nous avons fait beaucoup de progrès depuis le scandale du sang contaminé. Ces leçons ne doivent jamais être oubliées.

[Français]

    Nous avons fait beaucoup de progrès depuis que nous avons tiré ces leçons, et il est important de continuer à apprendre.

[Traduction]

    La prévention de la transmission de maladies aux receveurs de transplantation est le point de mire de ce règlement.
    Troisièmement, la gestion du risque fondée sur des données scientifiques et valides est au centre de notre cadre réglementaire, ce qui correspond aux pratiques internationales.
    Permettez-moi de clarifier les principes fondamentaux qui ont guidé l'élaboration et la mise en oeuvre du Règlement sur la sécurité des cellules, tissus et organes humains destinés à la transplantation.
    La science ne cesse d'évoluer. C'est pourquoi Santé Canada, de concert avec des scientifiques indépendants, des professionnels de la santé, des organisations de normalisation et d'autres organismes de réglementation de partout dans le monde, continue de s'assurer que notre travail repose sur les données scientifiques les plus récentes.
    C'est le milieu de la transplantation qui a d'abord demandé à Santé Canada d'établir un règlement — plus précisément, un règlement basé sur des normes nationales. C'est aussi le Comité permanent de la santé qui a recommandé, dans son rapport de 1999 intitulé « Le don et la transplantation d'organes et de tissus: Une approche canadienne », de rendre obligatoires des normes sur la sécurité des cellules, tissus et organes dans le cadre d'un règlement pris aux termes de la Loi sur les aliments et drogues.
    Santé Canada a donc pris l'engagement d'élaborer un cadre réglementaire basé sur des normes pour la sécurité des cellules, tissus et organes destinés à la transplantation.

  (1120)  

[Français]

    Les experts dans le domaine de la transplantation, de l'éthique et des receveurs de transplantation ont été rassemblés afin de rédiger ce qu'ils croyaient que ces normes nationales devaient contenir.

[Traduction]

    Parmi ces experts, on comptait des représentants du Réseau universitaire de santé, de l'Association canadienne de transplantation et de la Société canadienne de transplantation.
    L'Association canadienne de normalisation a été retenue comme entité indépendante afin de transformer les grandes lignes de ces normes provisoires en normes nationales. Ces normes ont servi de base à l'élaboration du règlement de Santé Canada.
    Les gens ayant besoin de cellules, de tissus ou d'organes sont extrêmement vulnérables. Leur santé est compromise. Les organes et tissus d'un donneur peuvent servir à plus d'une centaine de transplantations. Il va de soi qu'un seul donneur atteint d'une maladie infectieuse aura un impact potentiel énorme sur la santé des Canadiens.
    On doit donc évaluer les donneurs pour détecter la présence d'états pathologiques et de risques pouvant transmettre une maladie à un receveur. Cette évaluation se fait par une combinaison de méthodes: un examen physique du donneur, une interrogation de ses proches et un examen de ses échantillons sanguins. Nous devons nous rappeler que, dans le cas d'un donneur décédé, tout ce processus se déroule après la déclaration de mort clinique.
    On considère que les donneurs présentent un risque plus élevé de transmettre des maladies comme le virus de l'immunodéficience humaine ou l'hépatite s'ils se sont livrés à certains comportements tels que des rapports sexuels entre hommes, l'usage de drogues intraveineuses, le commerce du sexe et certaines pratiques de perçage et de tatouage. Le facteur de risque lié à la pratique de relations sexuelles entre hommes s'applique à tous les donneurs mâles, peu importe leur orientation sexuelle.
    Les données de surveillance de l'Agence de santé publique du Canada, que l'on contrôle de façon continue, montrent clairement que les hommes ayant eu des relations sexuelles avec un autre homme affichent toujours la proportion la plus élevée de tests positifs pour le VIH chez les adultes canadiens chaque année. Ce taux se chiffrait à 40 p. 100 en 2006-2007. Viennent ensuite les utilisateurs de drogues intraveineuses, à 19 p. 100, et le contact sexuel avec une personne à risque, à 12 p. 100 en 2006-2007. Ces trois facteurs de risque ont représenté, à eux seuls, 70 p. 100 des nouveaux cas de VIH en 2006-2007 et, de façon cumulative, ils constituent 85 p. 100 des résultats de tests positifs pour le VIH depuis 1985. Tous ces facteurs de risque sont évalués durant le processus de sélection des donneurs.
    Bien que les tests administrés aux donneurs d'organes soient sensibles, ils ne sont pas fiables à 100 p. 100, et il existe toujours une faible possibilité de faux résultat négatif. Il y a, entre autres, la période de latence, durant laquelle le donneur peut transmettre la maladie sans que cette dernière ne soit détectée par les tests. Pour cette raison, la sélection des donneurs selon les facteurs de risque continue d'être un élément essentiel du processus d'évaluation des donneurs.
    Pourrions-nous poser un autre type de question, comme le genre de pratiques sexuelles auxquelles le donneur s'est adonné? Il existe différents points de vue là-dessus, mais je dois souligner que le don après décès a souvent lieu dans des conditions de détresse émotionnelle intense et doit être traité comme étant le plus généreux cadeau qu'un être humain puisse offrir à un autre. Ce n'est pas le donneur lui-même qui doit répondre à ces questions délicates, mais les membres de sa famille durant une période de chagrin intense.
    Dans ces conditions, certaines familles pourraient se sentir d'autant plus mal à l'aise et ne plus vouloir procéder au don. Les donneurs potentiels eux-mêmes pourraient changer d'avis s'ils apprenaient que leur famille ferait l'objet d'une telle interrogation.
    Comme je l'ai dit au tout début, Santé Canada n'empêche personne de devenir un donneur d'organes. Malgré l'établissement des facteurs de risque basés sur des données scientifiques, la disposition du règlement relative à la distribution exceptionnelle permet la transplantation d'un organe provenant d'un donneur considéré comme étant plus à risque, à condition que le médecin transplantologue juge que cette procédure sera dans l'intérêt supérieur du patient et que le receveur donne son consentement éclairé. Le receveur, de même que les pourvoyeurs de soins après la chirurgie, peuvent ensuite prendre leurs propres décisions concernant les précautions à prendre et les tests de suivi.
    Il est important de noter que le processus de sélection des donneurs selon des facteurs de risque comportementaux existe au Canada et aux États-Unis depuis 1994, bien avant que l'un ou l'autre des pays n'ait adopté de loi rendant cette procédure obligatoire. Par conséquent, la mise en œuvre du règlement n'a rien changé à la sélection des donneurs au Canada.
    Dans le cadre de l'élaboration de ces normes et du règlement, on a mené de nombreuses consultations durant lesquelles les membres du milieu de la transplantation et le grand public ont eu l'occasion de s'exprimer sur ces facteurs de risque. Les participants n'ont formulé aucune observation ni préoccupation concernant le facteur lié à la pratique de relations sexuelles entre hommes ou tout autre facteur de risque.

  (1125)  

[Français]

    Tout changement aux exigences de la norme sera basé sur des données scientifiques valides avec, comme toujours, la protection des receveurs d'organe en tête.

[Traduction]

    Sur ce, mesdames et messieurs les députés, je vous remercie de votre attention. Nous nous ferons un plaisir de répondre à d'autres questions.
    Merci beaucoup, madame Ballantyne.
    Nous allons maintenant entendre les représentants de l'Association canadienne de normalisation: Suzanne Kiraly, présidente, et Marc Germain, président désigné.
    Bonjour. Je m'appelle Suzanne Kiraly et je suis présidente de l'Association canadienne de normalisation, ou CSA.
    Je suis ici aujourd'hui pour décrire le rôle de la CSA en matière d'élaboration et de mise à jour des normes nationales relatives aux cellules, aux tissus et aux organes destinés à la transplantation.
    La CSA est un organisme indépendant sans but lucratif constitué de membres dont les activités visent à répondre aux besoins du milieu des affaires, de l’industrie, du gouvernement et des consommateurs du Canada et du monde entier. Fondée en 1919, la CSA est l'une des quatre organisations accréditées par le gouvernement du Canada pour élaborer des normes nationales. Notre organisation tient à jour plus de 3 000 normes, codes et produits d'information liés à la sécurité, à la conception et au rendement dans un large éventail de domaines comme les soins de santé, l’environnement et la sécurité du public. Nous mettons au point des normes en matière de santé depuis plus de 40 ans.
    En tant qu'organisation chargée d'élaborer des normes, la CSA agit à titre de tierce partie neutre, fournissant un cadre dans lequel les comités d'experts travaillent selon un processus rigoureux et accrédité. Nos comités techniques sont formés selon le principe de la représentation équilibrée de façon à combiner de façon optimale les forces de chacun des membres ainsi qu'à éviter la prédominance d'un groupe d'intérêts quelconque sur un autre. Le comité technique qui a rédigé les normes relatives à la transplantation était composé de professionnels de la santé, d'organismes de réglementation, de membres d'intérêt général, y compris un receveur de transplantation, et un expert en éthique.
    Quand un projet de norme est achevé, il est soumis à un examen public pour que toute personne ou organisation intéressée puisse formuler des observations. Le projet est modifié au besoin, puis présenté au comité pour qu'il l'approuve officiellement.
    Une fois qu'une norme est publiée, la CSA continue de la tenir à jour et d'apporter les modifications au besoin pour ce faire. Chaque norme est révisée au moins tous les cinq ans.
    La CSA n'est pas une entité gouvernementale et n'a pas le pouvoir de rendre une norme obligatoire. Une norme devient loi seulement si une administration municipale, provinciale ou fédérale la cite dans la loi. Pour les normes relatives à la transplantation, Santé Canada a cité des sections précises dans son nouveau règlement, les rendant ainsi obligatoires.
    Plus précisément, la CSA a commencé à travailler sur ces normes relatives aux cellules, aux tissus et aux organes destinés à la transplantation en 2000, à la demande de Santé Canada. Au début de 2002, les projets de norme ont été affichés sur Internet pour que le public puisse les examiner, et plus d'un millier de commentaires ont été reçus. Les normes ont été achevées au début de 2003 et ont été approuvées comme normes nationales par le gouvernement.
    Ces normes ont été créées pour accroître la sécurité et l'efficacité pour les donneurs, les receveurs et le personnel des soins de santé. Elles sont le fruit des efforts des meilleurs experts au Canada, mettant à profit les connaissances combinées et les pratiques exemplaires des plus importantes organisations nationales et internationales dans ce domaine.
    La série est composée d'une norme générale qui s'applique à l'ensemble des cellules, des tissus et des organes et de cinq normes additionnelles qui prévoient des exigences pour des types précis de matériel de transplantation. Ces normes établissent des exigences minimales pour les organisations ou les personnes concernées dans tous les aspects de la transplantation. Elles sont conçues pour fournir un cadre de gestion commun. Les organisations peuvent les utiliser pour élaborer leurs politiques et leurs procédures, embaucher et former du personnel et gérer leurs activités. Le but, c'est que toutes les parties concernées assument leurs responsabilités de manière sécuritaire, conséquente et organisée.
    Les normes de la CSA sont révisées pour tenir compte des exigences changeantes et des technologies émergentes. Le comité technique examine actuellement les documents, dont les nouvelles éditions sont prévues pour 2009. Nous sommes résolus à mettre à jour et à améliorer les normes pour qu'elles soient toujours adaptées aux réalités. Nous accueillerons avec plaisir les commentaires et les suggestions de toutes les organisations et personnes intéressées.
    Merci.
    Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant entendre les représentants du Conseil canadien pour le don et la transplantation, Mme Kimberly Young et le Dr Graham Sher.
    Ah, êtes-vous aussi l'un de nos prochains intervenants?

  (1130)  

[Français]

    Bonjour. Je m'appelle Marc Germain. Je témoigne aujourd'hui à titre de président entrant du Comité technique sur la sécurité des cellules, des tissus et des organes destinés à la transplantation et à la reproduction assistée. Dans le cadre de mon travail régulier, je suis aussi vice-président et directeur médical de la division des tissus humains à Héma-Québec. Je remercie le comité de me donner l'occasion de venir dire quelques mots ce matin.
    Comme l'expliquait ma collègue Mme Kiraly, les normes de l'ACNOR sur les cellules, tissus et organes ont été élaborées sur une période de plusieurs années, selon un processus rigoureux et très bien encadré. Je voudrais profiter de l'occasion pour insister sur quelques points très précis concernant les normes, en particulier les critères appliqués pour qualifier les donneurs de cellules, tissus et organes.
    D'abord, même si on l'a déjà dit, il est important de rappeler que le but des critères de qualification, que l'on appelle parfois critères d'exclusion, est de diminuer le risque de transmission de maladies par la transplantation et de faire en sorte que les cellules, tissus et organes soient aussi sécuritaires que possible pour les receveurs.
    On a aussi mentionné un point que je prends la peine de répéter, à savoir qu'en matière de maladies transmissibles, les critères de qualification basés sur l'évaluation des activités à risque ne sont qu'une des nombreuses mesures appliquées pour réduire le risque de transmission de ces maladies. Parmi les autres mesures, il y a notamment les tests effectués sur le sang du donneur pour détecter la présence de certaines infections transmissibles. Cependant, je pense qu'il est important de rappeler, pour les raisons mentionnées précédemment, que l'évaluation des comportements à risque demeure une composante essentielle de toutes les mesures visant à assurer une sécurité optimale des cellules, tissus et organes transplantés.
    En troisième lieu, je veux souligner que lors de l'élaboration des normes sur la sécurité des cellules, tissus et organes, le comité technique a pris en considération le consensus existant et les meilleures pratiques dans le domaine de la transplantation. En particulier, le comité a essayé, lorsque la situation le justifiait, d'harmoniser les normes avec ce qui existait dans ce domaine ou dans des domaines connexes, tant au pays qu'à l'échelle internationale. D'ailleurs, il faut souligner qu'en matière de comportements à risque, les critères d'exclusion retenus dans les normes de l'ACNOR sont tout à fait comparables à ce que l'on retrouve dans des normes semblables, tant au pays qu'ailleurs dans le monde.
    Un quatrième point qui a été mentionné mais qu'il est très important de répéter est le suivant: le comité technique de l'ACNOR et tous les intervenants concernés ont reconnu dès le début du processus d'élaboration des normes que le don d'organe représentait une situation vraiment particulière. La quantité d'organes est et sera probablement toujours limitée. Les organes peuvent très souvent sauver la vie d'un receveur potentiel. C'est pourquoi les normes prévoient, en vertu d'un processus dit de libération exceptionnelle, la possibilité de prélever des organes chez des donneurs qui ne répondent pas à tous les critères de qualification. Cette procédure exige seulement que le médecin transplanteur et le receveur soient avisés de cette situation, pour leur permettre de prendre une décision éclairée quant à la possibilité d'accepter un organe obtenu d'un donneur qui ne se qualifie pas entièrement selon les critères énoncés dans la norme.
    Pour terminer, je veux souligner que le choix des meilleurs critères de qualification, en particulier les critères d'exclusion basés sur les activités à risque, a toujours fait l'objet d'intenses discussions au fil des ans. Certains parmi vous sont entièrement au fait de ces discussions. Très récemment, soit en 2006, une rencontre scientifique parrainée par la FDA américaine a eu lieu afin de discuter de façon très spécifique de ces questions, tant du point de vue du don de sang que de celui du don de cellules, tissus et organes. Plusieurs intervenants concernés par cette question étaient présents, y compris des représentants du Canada, dont moi-même. Il s'agit donc d'un domaine très surveillé, et je peux vous assurer que le comité technique de l'ACNOR continuera à effectuer une surveillance attentive de la situation.
    Je tiens encore une fois à vous remercier de votre attention. Je serai heureux de répondre à vos questions.

[Traduction]

    Je me ferai un plaisir de répondre à vos questions en anglais aussi.
    Merci.
    Merci beaucoup, docteur Germain. Pardonnez-moi de vous avoir sauté.
    Nous allons poursuivre avec Mme Young.
    Je vais commencer par présenter notre organisation et fournir de l'information.
    Je m'appelle Kimberly Young et je suis chef de la direction du Conseil canadien pour le don et la transplantation. Le CCDT est un organisme à but non lucratif constitué en vertu d'une loi fédérale. Il a été fondé par la Conférence des sous-ministres de la Santé pour l'aider à coordonner et à améliorer les activités relatives au don et à la greffe d'organes et de tissus, ou DGOT, au Canada.
    Conformément à la vision du CCDT, chaque Canadien en attente d'une transplantation devrait disposer d'un accès équitable et opportun à des tissus et à des organes sûrs; chaque Canadien désireux de faire un don d'organes doit être examiné judicieusement et soutenu, dans la mesure du possible; et chaque don devrait être compassionnel, sans danger et efficace.
    À compter du 1er avril 2008, la Société canadienne du sang, ou SCS, sera responsable de certains services nationaux relatifs au don et à la transplantation d'organes et de tissus. Une partie des fonctions relevant actuellement du CCDT lui seront ainsi confiées. Permettez-moi donc de vous présenter le Dr Graham Sher, chef de la direction de la Société canadienne du sang.

  (1135)  

    Les témoignages que vous allez entendre aujourd'hui vous feront probablement prendre conscience des nombreux défis liés au don d'organes et de tissus au Canada, pas uniquement ceux liés aux critères d'exclusion des donneurs. Le message que je souhaite vous communiquer, c'est que des progrès ont été récemment réalisés à cet égard. Les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux ont indiqué qu'ils confieront à la Société canadienne du sang le mandat d'organiser les services nationaux pour le don et la transplantation d'organes et de tissus au Canada. Les gouvernements ont jugé que la Société canadienne du sang était la mieux placée et la plus compétente pour assurer de tels services dans les chaînes d'approvisionnement nationales d'organes et de tissus, car elle dispose d'une infrastructure nationale et d'un modèle de prestation des services, possède de l'expérience en ce qui a trait au recrutement et à la recommandation de donneurs, à la fabrication et au traitement de produits biologiques et à la gestion de ses systèmes d'information et de registres de donneurs. C'est aussi en raison de sa structure de gouvernance indépendante et de sa crédibilité auprès des intervenants canadiens et du grand public.
    D'après nous, cette audience portera avant tout sur les critères d'exclusion établis par le nouveau règlement relatif à la sécurité des cellules, des tissus et des organes humains destinés à la transplantation. Bien que n'ayant pas contribué à la définition de ces critères, la Société canadienne du sang est l'une des principales parties intéressées, car elle y sera bientôt assujettie.
    Nous sommes habitués à fonctionner dans un domaine strictement réglementé, puisque le sang est assujetti à des règlements semblables en vertu de la Loi sur les aliments et drogues, où des décisions difficiles doivent souvent être prises pour la santé des patients. Nous avons la réputation d'être ouverts, de faire preuve de transparence et de ne pas ménager les efforts pour inclure les Canadiens dans nos processus décisionnels. Nous prenons actuellement part à des discussions approfondies portant sur l'exclusion des donneurs de sang, sujet semblable à celui dont nous traitons aujourd'hui. Nous sommes convaincus que cette audience continuera de veiller à ce que le règlement sur les CTO soit défini dans le même esprit.
    Je veux partir d'ici avec l'impression que tout en travaillant avec les communautés de don et de transplantation partout au Canada à améliorer le rendement de ces aspects essentiels du système de soins de santé, nous continuerons à faire participer tous les intervenants dans les nombreuses décisions complexes qui nous attendent. Je suis extrêmement encouragé par les possibilités qui s'offrent à nous et le fait que le Canada puisse commencer à améliorer le rendement médiocre qu'il enregistre actuellement en matière de don et de transplantation d'organes et de tissus.
    Merci.
    Je vous cède maintenant la parole, Kim.
    Avant d'évoquer le nouveau règlement, je tiens à vous expliquer le rôle joué par le CCDT dans son élaboration.
    Premièrement, avant l'existence du CCDT, des personnes faisant actuellement partie de son conseil ou de son personnel avaient formellement recommandé d'établir des critères nationaux dans ce domaine.
    Deuxièmement, plusieurs membres du conseil et employés du CCDT, dont moi-même, faisaient et font encore aujourd'hui partie des comités de l'Association canadienne de normalisation.
    Enfin, un représentant de Santé Canada a pris part à des réunions du conseil du CCDT afin d'informer ses membres au sujet de l'élaboration et de la mise en application du règlement relatif aux cellules, aux tissus et aux organes, ainsi que des possibilités de consultation, ceci dans le cadre de leurs fonctions.
    Cette information étant communiquée, j'aborderai maintenant le nouveau règlement relatif aux donneurs d'organes sous l'angle du CCDT. Au vu de la controverse médiatique et des questions figurant dans l'invitation, il semble que nous soyons ici aujourd'hui pour répondre à deux grandes questions.
    Tout d'abord, le nouveau règlement est-il bien fondé et a-t-il été défini en concertation?
    Le CCDT l'envisagera essentiellement sous l'angle du système de santé, bien qu'étant conscient que l'élaboration et l'instauration d'un tel règlement ne sont pas chose facile et peuvent avoir des répercussions juridiques, éthiques et sociales. Plusieurs principes sous-tendent le besoin de réglementation, notamment de critères d'exclusion, en ce qui concerne le don et la transplantation de cellules, de tissus et d'organes. Permettez-moi de vous en citer quelques-uns.
    La sécurité des greffés est primordiale. Bien qu'il doive tenir compte des intérêts des donneurs actuels et éventuels, le règlement vise avant tout à limiter les risques pour la santé des Canadiens devant faire l'objet d'une greffe.
    Toute personne doit avoir la possibilité de se proposer pour faire un don et bénéficier d'une explication si elle ne répond pas aux critères établis.
    Le choix des organes et des tissus à greffer est une décision clinique et médicale prise en concertation avec le patient ou des membres de sa famille.
    Le système de santé et les soins médicaux doivent être transparents, ce qu'un règlement et des pratiques reconnues peuvent favoriser.
    Les normes et règlements jouent un rôle déterminant dans la gestion des risques. Les normes et règlements gouvernementaux sont essentiels au bon fonctionnement du système de santé canadien, notamment en matière de don et de transplantation d'organes et de tissus.
    Les contribuables doivent bien comprendre les normes et règlements gouvernementaux afin d'être certains que le gouvernement utilise leur argent à bon escient.
    Je vais maintenant répondre aux questions en me fondant sur les principes présentés.
    Premièrement, le règlement et les critères d'exclusion relatifs aux cellules, tissus et organes sont-ils justifiés?
    Compte tenu des principes qui viennent d'être mentionnés, le CCDT estime qu'il importe d'instaurer un règlement fédéral dans ce domaine. Un tel règlement constituera non seulement un gage de sécurité, mais favorisera aussi la transparence et la normalisation du système de santé en ce qui a trait au don et à la transplantation d'organes et de tissus. À notre avis, le règlement est justifié en ce sens qu'il est axé sur les patients, repose sur des éléments probants et permet aux équipes médicales de soupeser les risques et les avantages de la transplantation avec les patients, à savoir l'octroi et la distribution exceptionnelle.
    Pour chacun de ces secteurs, je vais décrire plus en détail ce qui a motivé le CCDT à adopter une approche axée sur les patients.
    En matière de soins de santé, des décisions sont prises au quotidien pour dispenser aux patients le traitement le plus approprié. De telles décisions relèvent des responsabilités légales des médecins. Elles sont prises au car par cas, en concertation avec les patients et les équipes de soins.
    Les critères d'exclusion énoncés dans le règlement sont indispensables en matière de don. Ils visent à protéger les patients contre des risques qui pourraient annuler les effets bénéfiques de la transplantation.
    Le CCDT estime qu’il appartient aux médecins et aux équipes médicales de décider des organes et tissus à greffer en se fiant à leur jugement professionnel et ce, conformément à la loi, au règlement et aux politiques hospitalières. La procédure de distribution exceptionnelle prévue par le nouveau règlement leur offre la marge de manoeuvre nécessaire à cet égard.
    Le CCDT a pour mandat, entre autres, d’étudier des questions délicates de manière approfondie en se fondant sur des recherches préliminaires, des analyses de la conjoncture et des études internationales. Il a également pour fonction de formuler des recommandations consensuelles fondées sur des données fiables, en collaboration avec des spécialistes ainsi qu’avec les parties concernées par le don et la transplantation d’organes et de tissus. Nous avons réussi à rédiger et à publier un certain nombre de ces rapports. À la connaissance du CCDT, le règlement concernant les cellules, les organes et les tissus a été élaboré selon un processus analogue.
    Enfin, en plus de l'application du règlement et des critères d'exclusion, dans la pratique, un coordonnateur de greffe remplit, avec le donneur ou son plus proche parent, un questionnaire portant sur les antécédents médicaux, sexuels et sociaux du donneur, dans le cadre de l’examen préalable au don. Ce questionnaire permet de savoir si les tissus ou organes de la personne sont appropriés pour une greffe. En règle générale, les tissus sont refusés si le donneur est visé par l’un des critères d’exclusion.
    En ce qui concerne les organes, la pratique actuelle consiste à soupeser les avantages de la greffe pour le patient et les risques de contamination. Les organes étant plus recherchés que les tissus, les risques acceptables font l’objet d’une plus grande attention lorsqu’il s’agit de greffes d’organes. Si l’on juge que la greffe présente plus d’avantages que de risques, le chirurgien et le patient doivent tous deux consentir à l’intervention pour qu’elle puisse avoir lieu.

  (1140)  

    Maintenant, la deuxième question et la raison pour laquelle nous sommes ici. Le règlement concernant les cellules, tissus et organes a-t-il été défini en concertation avec les parties intéressées?
    L'élaboration de ce règlement a été entamée à la demande des parties concernées par le don et la transplantation d'organes et de tissus au Canada, il y a plus de 10 ans. Santé Canada a créé un groupe de travail composé d'experts pour élaborer des normes de sécurité pour les cellules, tissus et organes. En 2000, Santé Canada a accordé un contrat à l'Association canadienne de normalisation, comme nous venons juste de l'entendre. Cette dernière a créé un comité technique, ayant une large représentation, qui était responsable de l'élaboration simultanée de la norme générale et des sous-ensembles d'exigences particulières.
    Avant le processus d'élaboration et de concertation, Santé Canada a rédigé un document d'orientation à l'intention des parties concernées.
    Une consultation internationale a été entreprise pour assurer la comparabilité avec d'autres pays. Des consultations, faisant intervenir des personnes et des organisations, auxquelles nous avons participé, ont eu lieu d'un océan à l'autre. En mars 2003, un examen national des établissements qui manipulaient ou traitaient des cellules, tissus ou organes a également été réalisé pour évaluer le respect des exigences fondamentales en matière de sécurité.
    Pendant tout le processus d'élaboration, les parties concernées ont été invitées à faire part de leur opinion sur un site Web et dans la Gazette du Canada. En outre, un processus a été instauré par l'intermédiaire du comité technique de l'Association canadienne de normalisation afin d'étudier les commentaires des parties intéressées.
    Par conséquent, à la lumière de ce qu'on vient de voir, nous sommes d'avis que ce règlement a été défini en collaboration avec les intéressés. D'après ce que nous avons récemment pu lire dans la presse, certains groupes et particuliers auraient toutefois le sentiment de ne pas avoir été informés et consultés. À notre connaissance, Santé Canada a largement consulté la population, mais nous ne sommes pas suffisamment renseignés pour affirmer que l'avis des personnes touchées par les critères d'exclusion a été directement sollicité.
    En terminant, au nom du Conseil canadien pour le don et la transplantation, permettez-moi, avec tout le respect que je vous dois, de vous faire les suggestions suivantes.
    Premièrement, le CCDT est d'avis qu'il convient d'avaliser le règlement, notamment les critères d'exclusion dont le but consiste à protéger les greffés en sélectionnant les cellules, les tissus et les organes destinés à la transplantation au Canada. Nous estimons que ce règlement et ces critères reposent sur des données scientifiques fiables, résultent d'une vaste concertation et visent à garantir, dans toute la mesure du possible, la sécurité et la transparence du système. Par ailleurs, l'exclusion de donneurs n'est pas systématique, puisqu'une procédure de distribution exceptionnelle a été prévue.
    Deuxièmement, il faudrait veiller à ce que le processus d'examen périodique décrit dans le règlement soit mis en pratique pour analyser les données de l'heure et les pratiques prédominantes, afin que les critères d'exclusion demeurent pertinents et viables tels qu'ils ont été énoncés.
    Troisièmement, il est souhaitable d'entretenir le dialogue avec les leaders d'opinion et les organisations exprimant des préoccupations au sujet des critères d'exclusion.
    Quatrièmement, il serait bon de favoriser une stratégie de communication pour informer la population, notamment les groupes intéressés, en ce qui concerne le besoin permanent de dons d'organes et de tissus.
    Je tiens à vous réitérer mes remerciements pour le temps que vous avez bien voulu m'accorder et de l'occasion qui m'a été donnée aujourd'hui de discuter de ce règlement.

  (1145)  

    Merci beaucoup, madame Young, et tous ceux et celles qui ont fait des exposés.
    Nous allons maintenant passer aux questions. Monsieur Thibault, s'il vous plaît.
    Merci, monsieur le président.
    Merci à tous et à toutes de votre présence.
    Il y a quelques points qui me préoccupent à ce sujet. Je pense que nous sommes tous d'accord pour dire que nous avons besoin d'une norme de soins sécuritaire, de sécurité dans l'approvisionnement, de sécurité dans la chaîne et de sécurité en matière de manipulation. Ce qui m'inquiète un peu, c'est que lorsque je serai sur mon lit de mort et que j'aurai besoin d'une transplantation, je veux pouvoir être en mesure de prendre un risque éclairé. Je ne vais pas m'inquiéter que cela me rend malade si cela me garde en vie.
    Deuxièmement, pour prendre ce risque éclairé, il doit y avoir un approvisionnement. Il me semble qu'avec les mesures qui ont été prises, nous avons réduit la disponibilité de l'approvisionnement. Nous éliminons tout un groupe de personnes de la société qui pourraient, du point de vue de l'innocuité de leurs organes, ne pas poser de risque plus important que moi. Mais à l'heure actuelle, ces personnes ne peuvent signer leur carte de donneur à cause des critères qui ont été fixés. Si ces personnes devaient mourir des suites d'un accident, ou si elles devaient mourir rapidement, leurs organes ne seraient pas disponibles pour qu'un patient puisse prendre un risque éclairé.
    Alors, notre travail consiste à voir s'il n'y a pas une meilleure façon d'atteindre le même objectif. C'est de voir si nous pouvons modifier ce que vous avez fait de manière à atteindre ces deux objectifs.
    La première question que j'adresserai à Mme Ballantyne est la suivante: lorsque ce règlement a été publié dans la Gazette du Canada, est-ce que la norme générale était incluse avec le règlement? Est-ce que les personnes qui vérifiaient le règlement avaient accès aux deux?
    Non, la norme générale n'était pas incluse, mais il y avait un renvoi à la norme à la CSA, parce que c'est la pratique actuelle du gouvernement pour ce qui est de l'incorporation par renvoi. Alors, la norme n'est pas incluse dans le règlement, mais dans le règlement, vous faites un renvoi à la norme de la CSA.
    Madame Kiraly, est-ce qu'on pouvait consulter la norme sur votre site Web à ce moment-là?
    On pouvait consulter la norme aussi bien avant sa publication qu'après.
    Durant le processus de publication dans la Gazette du Canada, lorsqu'elle a été consultée, vous avez dit, par quelque 1 000 personnes, ou pendant toute cette période, et non pas uniquement durant la période de publication dans la Gazette du Canada, est-ce que l'annexe E était incluse?
    Oui.
    J'ai eu de la difficulté à faire le suivi sur Internet, pour aller dans tous ces endroits de manière à tout voir. Cela ne m'a pas semblé trop convivial, que si je vérifiais le règlement, j'étais amené automatiquement à l'annexe E. Si je regarde le règlement du ministère de la Justice conformément à la Loi canadienne sur la santé et qu'ensuite, je regarde la norme générale, dans le règlement, on m'envoie à l'article 13.1.3. Ensuite, je lis l'article 13.1.3 et je ne vois rien de blessant. Ensuite, si je vais plus loin et que je regarde l'annexe, je peux voir pourquoi les gens sont préoccupés, parce que cela soulève certaines questions, à mes yeux, qui pourraient ne pas nécessairement...
    Je sais, et cela a été dit dans les exposés, que vous pouvez utiliser une clause d'exonération de responsabilité pour contourner le problème. Alors, avec la bonne clause d'exonération de responsabilité, n'importe qui peut être un donneur, et je crois comprendre que c'est une pratique courante dans la communauté de la transplantation que de faire signer une clause d'exonération de responsabilité à presque tous les patients. On leur demande de signer une clause d'exonération de responsabilité. Mais cela ne fait pas disparaître le problème de la disponibilité, parce que si je regarde, la première chose que je vois, c'est que les hommes qui ont eu des relations sexuelles avec un autre homme au cours des cinq dernières années ne peuvent figurer sur la liste des donneurs. Ils ne seraient pas encouragés à signer une carte de donneur. Nous savons certainement que cette communauté a maintenant été réduite. Alors, cette condition serait modifiée.
    Pourquoi ne pas inclure « si cela pose un risque »? Je pourrais peut-être comprendre si quelqu'un avait eu de nombreux partenaires et était actif dans la communauté, qu'il pourrait y avoir un risque accru. Mais si quelqu'un vit une relation monogame, pourquoi le risque serait plus élevé dans son cas que dans celui d'un couple hétérosexuel marié depuis 20 ans et qui a des relations sexuelles anales?

  (1150)  

    Je suppose que cette question s'adresse à moi.
    Il y a deux éléments dans votre question. Le premier élément concerne la dernière partie de votre question, et c'est le cas non seulement pour le don d'organes, de cellules et de tissus, mais également pour le don de sang.
    Lorsque nous évaluons le risque d'un donneur particulier, nous partons du principe que nous n'évaluons pas le risque qui est particulier à cette personne. Nous évaluons le risque qui existe dans le groupe de personnes auquel appartient cette personne. Évidemment, une personne donnée est infectée ou elle ne l'est pas. Idéalement, nous aimerions avoir cette information, l'information précise, en main lorsque nous déterminons si le donneur est admissible ou non pour n'importe quel type de don.
    Nous n'avons pas cette information. Nous devons travailler avec de l'information de base. Un des éléments d'information de base, c'est est-ce que cette personne a certains types de comportements qui la mettent à risque? Un des types de comportements que nous examinons — et il s'agit d'un consensus très large au sein de la communauté —, c'est la question des hommes qui ont des relations sexuelles avec d'autres hommes. Alors, voilà le problème fondamental.
    Je pense que des gens pourraient ne pas être d'accord avec vous, monsieur Germain. Les gens pourraient ne pas être d'accord pour dire que deux hommes, vivant ensemble dans une relation monogame depuis 40 ans, ne faisant pas usage de drogues pas voie intraveineuse et n'ayant pas eu les oreilles ou le corps percés avec des instruments partagés, présenteraient un risque plus élevé de VIH que le public en général.
    Je suis parfaitement d'accord avec vous. Dans la situation que vous décrivez, il est plus probable que ce soit le cas. Le problème, c'est que dans une situation réelle où vous devez évaluer l'état de risque d'un donneur particulier, il est possible que vous n'ayez pas en main tous les détails que vous venez de donner. Premièrement, surtout dans le cas du don d'organes, de cellules et de tissus, le donneur est souvent décédé au moment du don.
    Je suis d'accord, monsieur Germain, qu'il est possible que vous n'ayez pas tous ces détails, mais la communauté de la transplantation m'a informé qu'avant de procéder à une transplantation, il y a une entrevue avec la famille du donneur. Il y a des questions que l'on peut poser pour obtenir ce genre d'information et établir le risque dans la mesure du possible.
    Et c'est pourquoi la procédure de distribution exceptionnelle existe. Une fois que vous avez l'information de base indiquant que cette personne pourrait avoir un risque accru de transmettre une maladie infectieuse d'après l'évaluation qui est présentée dans la norme, si vous avez la possibilité d'examiner le dossier du donneur, de parler aux membres de sa famille, vous pouvez raffiner votre évaluation de l'état de risque et, ensuite, décider d'aller de l'avant avec le don d'organe par le biais de la procédure de distribution exceptionnelle. Et je dirais que c'est ce qui se fait quotidiennement.
    Je comprends cela, mais je dis que vous éliminez de la liste des donneurs potentiels des personnes avec lesquelles vous pourriez avoir ce genre de considération.
    Mme Gagnon peut probablement continuer dans la même veine.

[Français]

    Dans les différents témoignages que j'ai entendus ce matin, rien ne me convainc de la nécessité d'exclure certains types de personnes qui ont eu des comportements à risque par rapport à d'autres types d'individus qui ont aussi des comportements à risque, comme les hétérosexuels qui ont des partenaires différents.
    Je comprends qu'il faille être blindé par rapport à la qualité de l'organe qu'on donne à un receveur, qui est aussi très vulnérable. Si une personne hétérosexuelle est à risque, pourquoi, au lieu de cibler une communauté en particulier — parce que les personnes à risque font surtout partie de la communauté gaie —, ne pas avoir fait une généralisation des comportements à risque, y compris ceux des personnes hétérosexuelles? Pourquoi cibler seulement cette communauté dans une exclusion?

  (1155)  

    Je vais revenir sur ce qui a déjà été exposé par Mme Ballantyne. Elle a expliqué que l'identification de certains groupes jugés davantage à risque pour ces maladies vient d'études scientifiques très sérieuses, qui sont très largement acceptées dans la communauté. Par exemple, ces études démontrent que c'est chez les hommes ayant eu des relations sexuelles avec d'autres hommes, de façon générale, que la prévalence ou le risque de l'infection au VIH, en particulier, est le plus élevé dans la communauté.
    Encore une fois, ça ne veut pas dire qu'une personne qui appartient à ce groupe à risque sera nécessairement infectée. Là n'est pas la question. Il s'agit d'identifier un groupe à risque. C'est vrai pour les hommes ayant eu des relations sexuelles avec d'autres hommes. C'est aussi vrai pour les gens qui ont fait usage de drogues intraveineuses. C'est vrai pour des hétérosexuels qui ont eu des relations sexuelles avec des gens reconnus comme étant à risque pour le VIH, que ce soit des hommes ayant eu des relations sexuelles avec d'autres hommes ou des gens ayant fait usage de drogues intraveineuses.
    Ces groupes sont jugés à risque plus élevé. Les autres groupes auxquels vous faites référence n'ont pas un type de risque plus élevé que celui de la population générale. C'est la base scientifique épidémiologique sur laquelle on s'est fondé pour établir les critères qui sont appliqués tant pour le don d'organes, de cellules et de tissus que pour le don de sang.

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    Pour ce qui est de savoir qui devrait signer pour être donneur, je pense que tout Canadien devrait le faire. Vous n'êtes pas automatiquement exclu comme donneur d'organes à cause de ce critère de risque élevé. Je pense que cela doit être clair.
    Concernant les comportements à risque élevé, je pense qu'ils sont très difficiles à interpréter. Comme l'a dit la SMA, les données statistiques les plus récentes montrent que 40 p. 100 des nouveaux cas de VIH ont été observés dans le groupe des hommes ayant des relations sexuelles avec d'autres hommes. Je pense que beaucoup de gens ont interprété cela comme signifiant que c'est moins de la moitié, 60 p. 100 des autres cas étant observés dans l'autre groupe.
    Cette donnée statistique nous dit que 40 p. 100 des nouveaux cas sont observés dans un groupe qui représente environ 5 p. 100 de la population. Si l'on estime que la communauté gaie et lesbienne est d'environ 1 sur 10 — 10 p. 100 d'entre nous sont des gais ou des lesbiennes —, environ la moitié sont des gais, alors cela veut dire 40 p. 100 des cas pour 5 p. 100 de la population, comparativement à 60 p. 100 des cas pour le reste de la population, soit 95 p. 100. C'est ce qui en fait un facteur de risque.
    Encore une fois, cela ne veut pas dire que tout homme gai s'adonne à des activités sexuelles risquées, à des relations non protégées, etc. La question se situe à ce niveau parce que c'est là-dessus que nous avons des rapports. Nous dépendons des connaissances scientifiques. La science fait rapport sur la catégorie des hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes, alors c'est ce que nous devons utiliser.
    Alors, comme l'a dit la SMA, quand posons-nous réellement ces questions et à qui les posons-nous dans le cas d'un don d'organes? Nous posons des questions aux plus proches parents. Nous les posons à un membre de la famille qui vient tout juste de perdre peut-être la personne la plus importante de sa vie. La question de savoir si un être aimé, un homme, a eu des relations sexuelles avec un autre homme est quelque chose que ces personnes peuvent ne pas être en mesure de répondre, mais je pense que c'est le niveau le plus élevé lorsque vous parlez à un parent ou encore, à un frère ou à une soeur.
    En tant que mère d'un homme gai de 21 ans, je ne pourrais pas vous dire dans une entrevue si mon fils a des relations sexuelles protégées. Je ne sais pas quand il a eu des relations sexuelles pour la dernière fois. Je ne sais pas combien de partenaires sexuels il a. Je ne sais pas s'il a des relations sexuelles anales. Je n'ai pas cette information. Mais je peux très clairement et sans hésitation vous dire que mon fils est un homme qui a des relations sexuelles avec d'autres hommes.
    Dans le contexte du don d'organes, dans le cas des donneurs décédés, voilà quel est le problème. L'intention n'est pas d'être discriminatoire; le tout est fondé sur des données scientifiques. Nous en sommes encore au point où 40 p. 100 des nouveaux cas sont observés dans environ 5 p. 100 de la population. C'est un fait très important.
    Merci.

  (1200)  

    Vous avez une minute.

[Français]

    Madame Young, vous avez dit que Santé Canada avait largement consulté la population, mais que vous n'étiez pas suffisamment renseignée pour affirmer que l'avis de personnes touchées, visées par les critères d'exclusion, a été directement sollicité. Cela m'inquiète un peu. C'est un peu heurtant et c'est pourquoi j'aurais vivement souhaité rencontrer ce matin la communauté qui est visée par l'un des critères d'exclusion.
     Vous dites que vous n'êtes pas au courant en ce qui a trait à Santé Canada. Quelle a été votre méthode de consultation?

[Traduction]

    Il y a eu deux types de consultation pour l'élaboration de cette norme. Le premier a été le processus consultatif qui a été entrepris par la CSA. Ce processus consultatif comprenait la publication dans des sites Web. On a dénombré plus de 1 000 programmes, établissements et groupes de défense des patients qui ont reçu la norme par courriel ou par Postes Canada, etc.
    Comme l'a signalé la CSA, plus de 1 000 observations ont été reçues. La CSA a traité la totalité des 1 000 observations et elle a dû les examiner dans le cadre du processus d'élaboration du règlement.
    Comme on l'a signalé au début, ce règlement a été réclamé par la communauté elle-même. Le projet de norme existait dès 1995. Il y a eu des consultations à la fois sur une base formelle et informelle, parce que de nombreuses personnes intervenant dans le domaine du don et de la transplantation ont participé à ces comités.
    La consultation sur le règlement a été sans précédent. Étant donné que la communauté n'est pas habituée à la réglementation, nous avons fait des réunions en face à face et nous avons envoyé des exemplaires du règlement. Nous avons préparé des trousses d'information expliquant le règlement et l'incorporation de la norme. Il s'est fait énormément de choses. Nous avons parcouru le pays d'un bout à l'autre, nous avons créé le site Web et nous avons fait toute la question autour de la publication dans la Gazette du Canada et la période de commentaire de 75 jours et nous avons répondu...
    Merci beaucoup.
    Madame Wasylycia-Leis.
    Merci, monsieur le président, et merci à vous tous de vos exposés.
    J'aimerais commencer par Mme Gillham-Eisen.
    Vous venez juste de dire qu'il n'y a rien dans tout cela qui empêche les gens de donner leurs organes, pourtant il me semble que la façon dont tout cet exercice a été mené a eu exactement cet effet. Il décourage les gens d'offrir leurs organes et en plus, pour beaucoup de gens, il laisse un goût amer dans la bouche, dans ce sens qu'ils ont l'impression de faire l'objet de discrimination.
    Est-ce que cela a été fait de cette façon pour obtenir effectivement une interdiction, mais également pour éviter une contestation en vertu de la Charte.
    Non. Les critères sont fondés scientifiquement et nous examinons ce qui a été déterminé comme étant un facteur de risque. La distribution exceptionnelle est utilisée pour les hommes qui ont des relations sexuelles avec d'autres hommes — elle est utilisée pour d'autres. Dans notre pays, nous utilisons les organes provenant d'hommes qui ont des relations sexuelles avec d'autres hommes, mais encore une fois, nous reconnaissons cela comme étant un facteur de risque plus élevé.
    Dans notre pays, nous permettons à nos patients de prendre leurs propres décisions fondées sur la santé et sur ce qu'ils sont prêts à faire, le suivi, etc. Alors, ce n'est absolument pas l'intention derrière cela. Nous utilisons une terminologie dans la norme et dans le règlement qui a été utilisée et qui est en pratique depuis le milieu des années 1990. Cela n'a jamais été perçu comme un problème auparavant.
    Je pense que l'attention soulevée par les médias qui ont rapporté que nous avions interdit les donneurs gais est un facteur dans cette histoire. Lorsque nous lisons le règlement, il n'interdit pas aux hommes homosexuels de donner leurs organes.

  (1205)  

    Je comprends ce que vous dites. C'est peut-être vrai au niveau de la rédaction, mais au niveau de la communication et de l'effet sur toute la question du don, c'est une autre histoire.
    Concernant ce qui nous préoccupe tous, il y avait certainement une autre façon de faire. Il me semble qu'une possibilité aurait été de laisser votre article 13.1.3 comme base pour prendre les décisions. Pourquoi avez-vous estimé que vous deviez aller plus loin et établir une liste de critères d'exclusion qui pointait précisément du doigt les hommes gais et les placer tout au haut de la liste? Il devait sûrement y avoir un autre façon de faire. Qu'y avait-il de mal à vous en tenir à l'article 13.1.3 tel quel?
    Ce règlement, et en particulier la norme, ont été élaborés par la communauté, par les spécialistes de la transplantation. Laisser quelque chose dans le règlement sans lui donner plus de contexte... Encore une fois, cette question est fondée sur les données scientifiques. Nous devons revenir à la question des données scientifiques et des facteurs de risque.
    Laissez-moi poser des questions au sujet des données scientifiques. Peut-être devrais-je m'adresser au spécialiste des transplantations.
    Pouvez-vous nous citer des études scientifiques précises sur les 10 critères d'exclusion? Pouvez-vous déposer ces études devant le comité? Je ne m'attends pas à ce que vous nous donniez une réponse détaillée maintenant. Pouvez-vous déposer devant le comité des études qui lient chacun de ces critères d'exclusion à des organes contaminés?
    Dans le cas précis des hommes ayant des relations sexuelles avec d'autres hommes, il a été affirmé auparavant qu'il y a des études épidémiologiques démontrant que le risque d'infection par le VIH dans ce groupe est plus élevé que dans la population générale.
    Pouvez-vous faire parvenir certaines de ces études au comité?
    Certainement. En fait, elles sont incluses dans les références qui ont été...
    Je me demande simplement si la science a suivi l'évolution qui a eu lieu dans les activités sexuelles. Sachant quelle est la transmission du VIH et du sida aujourd'hui et connaissant les nombreux facteurs de risque en cause — partenaires multiples et relations non protégées —, est-ce que la science a suivi l'évolution? Pourquoi ne pas simplement inclure le fait d'avoir des partenaires multiples et des relations non protégées dans la liste des critères d'exclusion? Si c'est la meilleure façon de décrire le risque qui est en cause, pourquoi ne pas faire tout simplement cela?
    Veuillez m'excuser, pourquoi ne pas tout simplement faire quoi?
    Pourquoi ne pas mettre dans vos critères d'exclusion les gens qui ont eu des partenaires multiples et des relations sexuelles non protégées au cours des cinq dernières années?
    Au mieux de mes connaissances, il ne s'agit pas d'une situation où nous savons avec certitude qu'il y a un risque accru. Le simple fait d'avoir des partenaires multiples ne signifie pas nécessairement que vous avez un risque plus élevé. Cela dépend des partenaires en question.
    L'autre facteur, c'est qu'il a toujours été très difficile de définir exactement ce qui constitue des partenaires sexuels multiples. Il n'y a pas de définition opérationnelle de cette expression. Quel est le chiffre? Est-ce 2, 5, 10,15? Nous ne le savons pas et il n'y a pas de données pour appuyer une valeur limite qui pourrait être utilisée dans les activités quotidiennes de dépistage des donneurs de cellules, de tissus et d'organes ou des donneurs de sang qui permettrait de reconnaître de manière fiable ceux qui comportent un risque plus élevé. Les groupes qui sont énumérés dans l'annexe E correspondent à des groupes de gens pour lesquels on a démontré qu'il y avait un risque plus élevé comparativement à la population générale.
    Vous auriez pu vous en tenir à l'article 13.1.3 qui précise les personnes ayant le VIH, le VHB ou le VHC. Pourquoi ne pas en être resté là? Pourquoi vous embarquer dans une terminologie qui est...

  (1210)  

    Parce qu'on ne peut pas utiliser cela de manière opérationnelle. Les gens à risque plus élevé de VIH, qu'est-ce que cela signifie? Comment définissez-vous qui est à risque plus élevé de contracter le VIH? Vous devez examiner les situations particulières où vous pouvez dire, oui, la personne appartient à un groupe à risque plus élevé ou, non, elle n'appartient pas à un tel groupe. C'est la raison d'être de l'annexe E. C'est pour préciser très clairement ce que nous voulons dire par risque plus élevé. Cela ne dit pas que quelqu'un qui appartient à ce groupe sera infecté; cela signifie simplement que ce groupe a été reconnu comme étant à risque plus élevé.
    Les personnes qui ont reçu des facteurs de coagulation à l'époque où les produits sanguins n'étaient pas sûrs à l'égard du VIH sont jugées comme étant à risque plus élevé. Elles ne sont pas toutes infectées; c'est simplement qu'en tant que groupe, elles sont à risque plus élevé. Par conséquent, nous devons prendre cet élément en considération lorsque nous évaluons le risque.
    Merci beaucoup, docteur Germain.
    Nous allons maintenant donner la parole à M. Fletcher.
    Merci, monsieur le président.
    Cette discussion me rappelle l'accident d'auto qui aurait pu faire de moi un donneur d'organes multiples. J'ai plutôt reçu une transfusion sanguine. Dieu merci, le sang que j'ai reçu n'était pas infecté. Toutefois, bien des personnes à l'époque ont reçu du sang contaminé et ont contracté l'hépatite C. Ces personnes ont vécu une longue saga avant d'être indemnisées pour avoir contracté une maladie qu'elles n'auraient jamais dû contracter au départ. Toutefois, telle était la situation. Il a fallu attendre le gouvernement actuel pour que des indemnités d'un milliard de dollars soient versées aux victimes d'avant 1986 et d'après 1990.
    Après avoir réfléchi au passé du système canadien de collecte et de distribution de sang, je me demande si nos témoins peuvent commenter ce qui surviendrait — et, soit dit en passant, beaucoup de sang contaminé par l'hépatite C venait de groupes à risque élevé, si j'ai bien compris — si, comme il a été proposé, nous nous écartions des faits scientifiques sur lesquels vous fondez vos décisions.
    Monsieur Fletcher, je suis disposé à répondre à cette question en tant que chef actuel du système pancanadien de collecte et de distribution du sang, exception faite du Québec.
    Votre question est importante, selon moi, et je pense effectivement, comme mes collègues l'ont dit tout à l'heure, qu'il n'est pas nécessaire de se fonder sur les connaissances scientifiques ou sur les faits autant qu'on pourrait le croire. Toutefois, de par leur nature, ces critères d'exclusion sont larges et généraux, et je pense effectivement, comme M. Germain l'a dit plusieurs fois, qu'ils ne tiennent pas compte de l'être individuel lorsque les critères sont appliqués, mais adoptent plutôt une approche générale à l'égard de groupes de personnes qui peuvent peut-être poser un risque.
    Vous avez bien fait valoir vos points, selon moi. La situation actuelle au Canada est attribuable à la médiocrité passée de nos méthodes de dépistage sanguin dans une composante importante du système de santé publique, notamment du programme de collecte de sang. Cependant, en parallèle, dans ce programme, il faut faire une légère distinction, en ce sens qu'on a un approvisionnement beaucoup plus grand de matière première que dans le cas des organes. Le critère d'exclusion actuellement appliqué dans le système de collecte et de distribution du sang est encore plus rigide que celui qui est envisagé pour la réglementation des cellules, des tissus et des organes, où tout d'abord il y a la politique quinquennale actuelle et, ensuite, la composante de distribution exceptionnelle, justement pour mettre en équilibre l'équation risque-avantages dont discuteront le clinicien et le transplantologue lorsqu'ils s'entretiendront avec le receveur d'organe.
    Cette disposition de distribution exceptionnelle n'existe pas dans le programme de collecte de sang, parce que nous avons un approvisionnement beaucoup plus large dans lequel puiser et que nous pouvons fournir au patient qui en a besoin un produit de substitution. Cependant, je crois que la prémisse de votre question est que, si nous n'avions pas ce genre d'approche rigoureuse, scientifique et fondée sur l'épidémiologie et la preuve relativement aux critères d'exclusion, nous pourrions peut-être nous retrouver avec des receveurs d'organes infectés tout autant qu'il y a eu dans le passé des receveurs de sang contaminé.
    Ma dernière observation, en guise de conclusion, est que, bien que j'appuie toutes les questions et les observations faites par les membres du comité, si vous allez inviter d'autres témoins devant le comité, je vous suggérerais d'entendre des transfusés et des transplantés de même que d'autres donneurs, particulièrement des groupes de personnes exclues ou d'éventuelles personnes exclues.
    Voilà un excellent point.
    Monsieur le président, j'ai une autre question à poser, après quoi je laisserai Mme Davidson utiliser le temps qu'il me reste, s'il y en a.
    Il y a quelques mois, en novembre 2007, à Chicago, quatre receveurs d'organes ont contracté le VIH et le VHC de donneurs à risque élevé. Quelle a été la réaction de Santé Canada? Le règlement à l'étude est-il une réaction à ce fait ou s'appuie-t-il sur l'expérience canadienne?

  (1215)  

    À nouveau, c'était une situation qui, selon moi, a mis en valeur le besoin de faire des examens préliminaires des donneurs.
    Dans ce cas particulier, il y avait un donneur d'organe qui, essentiellement, a été identifié comme ayant un comportement à risque élevé, un risque de transmettre une maladie. Le transplantologue a décidé d'aller de l'avant et de transplanter les organes.
    Les médias ont rapporté que tous les receveurs n'étaient pas conscients que leur organe présentait un risque légèrement élevé. Dans les reportages médiatiques, un receveur en particulier a dit qu'on ne lui avait pas donné l'occasion de discuter du fait que le donneur était à risque légèrement élevé.
    Comme nous l'avons souligné, par la voie de ce règlement d'application de la Loi sur les aliments et drogues, il faudrait que le receveur soit informé que le donneur présente un risque légèrement plus élevé. Toutefois, à nouveau, cela fait ressortir qu'un résultat de test négatif ne signifie pas toujours que le donneur n'est pas infecté, qu'il faut repérer ceux qui sont à risque plus élevé et qu'il y ait une discussion entre le transplantologue et l'éventuel receveur.
    La situation fait ressortir justement la raison pour laquelle nous avons ce règlement qui prévoit la distribution exceptionnelle et l'importance de faire des examens préliminaires des donneurs.
    Je vous remercie.
    Monsieur le président, si je peux avec votre permission répondre à la question, non, le règlement n'a pas été une réaction à l'incident de Chicago.
    Comme nous l'avons déclaré, le règlement date du milieu des années 90 quand ont été amorcées les consultations. Il a essentiellement formalisé et rendu obligatoires les pratiques actuelles dans le domaine des transplantations. Nous avons suivi le processus de publication dans la Gazette du Canada, d'abord dans la partie I, ce qui exige un délai de 75 jours pour commenter. Ensuite, nous avons publié le règlement dans la partie II de la Gazette du Canada et nous avons demandé l'entrée en vigueur six mois plus tard. Le processus de publication dans la Gazette du Canada a pris fin en juin 2007, mais le règlement n'est pas entré en vigueur avant décembre, pour donner au milieu le temps de s'adapter et de s'enregistrer auprès de nous. Soit dit en passant, les dix organismes de don et de transplantation du pays se sont inscrits et connaissent le règlement.
    Je vous remercie.
    Merci beaucoup.
    Madame Davidson, je suis navré. Vous aurez l'occasion de prendre à nouveau la parole lorsque nous entendrons le second groupe de témoins.
    Je tiens à remercier vivement tous les membres du groupe, les témoins, de leur contribution au débat.
    Si nous pouvions amorcer le deuxième tour de table au plus tôt, ce serait super. Pendant que tous se préparent, j'aimerais simplement faire quelques observations.
    À ceux qui nous ont présenté un mémoire, un texte à l'avance, si possible, je leur demanderais de raccourcir leur déclaration puisque nous l'avons déjà par écrit. Ce serait avantageux puisque nous aurions plus de temps pour poser des questions. L'information passe aussi bien durant la période des questions que durant les déclarations. Nous vous serions donc reconnaissants d'écourter un peu votre témoignage.
    Nous allons commencer par entendre Dr Levy, directeur du programme de transplantation d'organes multiples, Réseau universitaire de santé.

  (1220)  

    Merci, monsieur le président. Je tiens à remercier le Comité permanent de la santé de m'avoir invité à témoigner aujourd'hui.
    Je m'appelle Gary Levy. Je suis le directeur médical du programme de transplantation de l'Université de Toronto et de ses hôpitaux affiliés. À l'intention de ceux qui ne connaissent pas notre programme, je précise que nous effectuons plus de 600 transplantations d'organes pleins chaque année et que nous soignons entre 5 000 et 7 000 patients.
    La transplantation d'organes pleins est vraiment l'un des grands succès médicaux canadiens qui permet à des Canadiens qui seraient morts autrement de vivre. Les résultats actuels après un an et cinq ans dépassent 90 et 80 p. 100, montrant ainsi qu'il s'agit vraiment d'un traitement remarquable.
    La plupart des transplantés sont dans la force de l'âge, c'est-à-dire qu'ils ont entre 30 et 50 ans, et ils ont des familles qui dépendent d'eux.
    Actuellement, plus de 3 500 patients répartis un peu partout au Canada attendent un don de coeur, de foie, de rein et de pancréas. Le milieu de la transplantation, dont bon nombre de membres sont à mes côtés aujourd'hui, a travaillé vraiment très fort avec le gouvernement et le grand public à essayer d'accroître le taux de dons d'organe et d'aider ceux qui ne survivraient pas sans ce traitement.
    Je suis venu discuter avec vous de ce récent règlement de Santé Canada dont j'ai décrit les grandes lignes dans mon mémoire, mais par manque de temps, je vais sauter cette partie. Vous trouverez une description du règlement dans la partie II de la Gazette du Canada. Il est entré en vigueur en décembre 2007.
    Le règlement énumère les critères d'exclusion. Tous comprennent ce que signifie le mot « exclusion ». Il signifie que vous êtes exclu si vous avez les maladies ou les problèmes de santé suivants: le VIH, le VHB et le VHC; si vous vous êtes injecté des drogues par voie intramusculaire ou sous-cutanée au cours des cinq années qui précèdent, si vous avez des tatouages et si vous êtes un homme qui a eu des rapports sexuels avec un autre homme au cours des cinq années qui précèdent.
    Je tiens à souligner — et d'autres témoins l'ont dit — que ces critères sont utilisés dans d'autres juridictions, et c'est vrai. Je les ai apportés avec moi. Je vous les laisserai avec plaisir. Cependant, au sein d'aucune autre juridiction y a-t-il des règles ou des lois. Il s'agit simplement de directives.
    Elles permettent de suivre un processus efficace dans le cadre duquel, au cas par cas, l'information au sujet d'éventuels risques est communiquée par un spécialiste de l'approvisionnement en organes à un spécialiste de la transplantation, et c'est à ce moment qu'on décide si ces organes seront utilisés ou non, s'il y a danger et qu'on communique les faits à l'éventuel receveur. Ces directives sont en place au Canada depuis les années 90, et nous faisons effectivement signer à tous les éventuels receveurs un consentement pour tous les organes, parce qu'il n'existe pas d'organes absolument sans risque.
    Avec l'adoption du règlement à l'étude, le Canada a pris la décision sans précédent de donner effet de loi aux directives. Résultat, désormais, on ne pourra plus utiliser les organes correspondant à ces critères d'exclusion qu'en ayant recours à la distribution exceptionnelle tel que décrit à l'annexe E, et je vous en épargne la lecture, par souci de brièveté.
    Ainsi, le nouveau règlement va bien au-delà de ce que font d'autres juridictions où le passé du donneur sert de guide aux transplantologues et aux chirurgiens qui, en fin de compte, de concert avec d'autres spécialistes, professionnels de la santé, infirmiers et éthiciens, prennent la décision dans l'intérêt de l'éventuel receveur.
    Tout d'abord, je tiens à féliciter Santé Canada du travail qu'il effectue sans relâche pour continuer d'améliorer la santé des Canadiens. J'estime que le règlement a pour objet d'améliorer la sécurité des donneurs. Bien qu'il y ait au sein du comité consultations et représentation des praticiens de la transplantation — soit dit en passant, j'ai fait partie de ce comité jusqu'en 2001 —, les directeurs des programmes de transplantation, dont bon nombre sont ici aujourd'hui, n'ont pas été directement consultés. Nous ignorions tout de ce règlement ou de cette loi. Je n'en savais rien jusqu'à ce qu'un membre des médias me l'apprenne.
    Le règlement, dans sa version actuelle, n'améliorera pas la sécurité des organes par rapport à la pratique courante, pour les raisons que je vais maintenant vous donner. Je vais limiter mes commentaires au critère d'exclusion le plus troublant, celui qui vise particulièrement les hommes qui ont eu des rapports sexuels avec d'autres hommes, critère tout à fait discriminatoire.
    En premier lieu, nos connaissances au sujet du VIH se sont accrues de manière exponentielle depuis son éclosion au début des années 80. J'étais en fait étudiant en médecine et j'ai vu les premiers cas de VIH. Bien que la prévalence du VIH soit plus forte chez les hommes qui ont des relations homosexuelles, des données récentes du comité, de Santé Canada, publiées en 2006 révèlent que l'épidémiologie a changé. Mondialement, la moitié des nouveaux cas sont d'origine hétérosexuelle.
    Au Canada, les femmes âgées de 15 à 24 ans comptent pour 40 p. 100 des nouveaux cas. La plupart d'entre elles sont de jeunes femmes immigrées de régions où il y a forte endémie.

  (1225)  

    En deuxième lieu, actuellement, les nouvelles techniques de dépistage du VIH, y compris les tests sérologiques de troisième génération qui mesurent la réponse anticorps, l'ARN et l'ADN par PCR, donnent à nos transplantologues de bien meilleurs outils pour faire un examen préliminaire d'éventuels donneurs et organes. Bien utilisées, ces techniques rendent extrêmement improbable la transmission du VIH. Au Canada, notre système de transplantation actuel assure cette sécurité, en grande partie grâce à ces nouvelles techniques. Si Santé Canada souhaite réduire davantage la possibilité que des personnes dont les tests sérologiques sont négatifs, ce qui signifie la présence d'anticorps, puissent être infectieuses, je vous conseille de rendre obligatoires les tests d'ADN et d'ARN par PCR. N'attendez pas qu'il y ait un autre cas de contamination. J'ai cru comprendre, après avoir discuté avec des experts du VIH à Toronto, à Montréal et à Vancouver que si c'était fait, le risque de transmission, même sans connaître le passé du donneur, serait de un sur un million.
    En troisième lieu, le nouveau règlement sera difficile à appliquer avec certitude, puisqu'il sera presque impossible d'obtenir les renseignements que vous exigez de nous. D'après mon expérience, les membres de la famille et les connaissances n'ont pas l'information que vous voulez obtenir d'eux. Ils trouvent cela insultant. Pourquoi quelqu'un se porterait-il même volontaire pour fournir de pareils renseignements? Pour quelle raison quelqu'un présumerait-il d'offrir de l'information concernant la possibilité qu'un mâle ait eu des rapports sexuels au cours des cinq dernières années? Qui sait ce qu'a fait quelqu'un en cinq ans?
    En quatrième lieu, le règlement pourrait faire baisser les dons d'organes. En fait, depuis que la controverse a envahi la scène publique, les dons d'organes ont diminué partout au Canada. En raison de ce recul, la semaine dernière, dans notre centre, trois jeunes gens sont morts, faute d'organes.
    En cinquième lieu, la loi telle qu'elle est actuellement libellée fait de l'exclusion. Je sais ce que signifie le mot « exclusion »: les hommes gais ne peuvent donner des organes. Ils peuvent faire un don seulement si le transplantologue approuve une distribution exceptionnelle. Le règlement à l'étude cible un groupe particulier de la société en fonction de son orientation sexuelle.
    Plutôt que de cibler des personnes ou des groupes de personnes, nous devrions cibler les comportements à risque élevé, pour plusieurs raisons. Des lois qui ciblent certains groupes ajoutent une dimension morale et politique, alors qu'on devrait s'appuyer strictement sur les connaissances médicales et les meilleurs soins de santé possibles pour la société canadienne. Plutôt que d'isoler un groupe, peut-être à tort, le règlement devrait se concentrer sur le comportement comme étant le seul critère dont on tient compte pour faire un jugement professionnel. Le risque, dans ce cas-ci, est d'avoir eu des relations sexuelles avec un partenaire qui est infecté au VIH. Cela n'a rien à voir avec le fait d'être homosexuel ou hétérosexuel.
    En tant que spécialiste qui travaille dans le domaine de la transplantation depuis plus de 30 ans, je crois que cette controverse a eu un impact négatif sur les dons d'organes. En raison de la couverture médiatique et des malentendus qui ont suivi, il est plus que probable que la population sera moins disposée à donner des organes. Je sais que le taux de dons en Ontario a diminué depuis décembre 2007, car j'en parlais justement hier avec nos experts du service d'approvisionnement.
    Je vous encourage vivement à réexaminer le règlement à l'étude et à le modifier pour que son objet énoncé, soit d'améliorer la sécurité des organes conformément à nos connaissances scientifiques actuelles en matière de VIH, de VHC et de papillomavirus. Vous me demandez ce que je recommande, alors voici:
    Primo, modifier le règlement en fonction des faits scientifiques.
    Deuzio, créer un organisme national solide de transplantation d'organes. J'ai parlé à M. Graham Sher et je sais que c'est son intention.
    Tertio, faire une large consultation des experts avant d'instituer des changements dans la loi.
    Je vous remercie de m'avoir invité à vous exposer mon point de vue.
    Monsieur Levy, merci.
    Nous allons maintenant entendre le président de la Société canadienne de transplantation, Dr James Shapiro.
    Merci, monsieur le vice-président et mesdames et messieurs du comité.
    Je suis un chirurgien transplantologue de l'University of Alberta et le président sortant de la Société canadienne de transplantation. Je suis accompagné aujourd'hui de Mme Lori West, de M. Tom Blydt-Hansen, de Mme Lee-Ann Tibbles et de M. Marcelo Cantarovitch, tous des membres exécutifs du conseil de la Société canadienne de transplantation.
    Vous vous demandez probablement ce que fait la société. Elle représente ses membres, soit les 560 principaux dirigeants, chirurgiens, médecins, infirmières et gestionnaires de toutes les provinces et de tous les programmes au pays. Nous sommes la voix de la transplantation au Canada.
    L'exclusion visant les donneurs homosexuels représente un problème très important. Elle marginalise des Canadiens, ce qui est inacceptable. Les relations monogames ne sont pas associées à un risque accru. Dans les faits, les organes sont utilisés, et les lois permettent effectivement leur transplantation en vertu de cet acte de distribution exceptionnelle, qui doit être signé par le receveur avant la transplantation. Les nouvelles normes de l'ACNOR sont devenues si strictes, du moins en Alberta, que la majorité des transplantations d'organes chez nous doivent désormais se faire en ayant recours à la distribution exceptionnelle. À l'occasion, cela peut compromettre l'anonymat du donneur.
    Toute la question concerne un enjeu beaucoup plus fondamental, soit l'absence d'une infrastructure nationale pour les transplantations au Canada. Le fait que les soins de santé sont une compétence provinciale n'a pas permis d'assurer une coordination et une reddition de comptes nationales adéquates sur le plan des transplantations. Les dons d'organes ont passé à travers les filets provinciaux et, de ce fait, le Canada ne performe pas aussi bien qu'il le devrait à cet égard. Nous avons besoin d'une structure nationale qui rend des comptes au public canadien et au gouvernement du Canada.
    Le Canada est l'un des seuls pays occidentaux à ne pas avoir de stratégie nationale relative au don d'organes et à leur transplantation. L'International Transplantation Society et l'Organisation mondiale de la Santé nous ont pris à partie et ont souligné que, pour réduire les tendances du tourisme de transplantation, chaque pays doit faire en sorte qu'il existe un approvisionnement suffisant en organes provenant de dons pour répondre aux besoins de sa population.
    Actuellement 4 167 Canadiens attendent une transplantation d'organe, une donnée qui est demeurée constante presque depuis 2000 — et il s'agit d'une sous-évaluation. Toutefois, il n'y a eu que 492 donneurs décédés au Canada en 2007. C'est un taux de donneurs par tête de 14,7 par million d'habitants. Le taux de donneurs décédés du Canada est la moitié de celui d'autres pays comme l'Espagne, où le taux se situe aux alentours de 32 par million.
    Le taux de donneurs décédés dans certaines provinces est inacceptable. Par exemple, en Colombie-Britannique, il était de 5,9 par million et, au Manitoba, de 5,1 par million, contre une moyenne de 14,7 par million. Ces renseignements valent pour l'année 2005. Ils sont bien en deça de notre moyenne nationale.
    Le Canada fait, par tête, 40 p. 100 moins de transplantations de rein de donneurs décédés que les États-Unis. La situation était identique il y a 20 ans. Le taux actuel de transplantations de rein de donneurs décédés au Canada est le même que celui de la Croatie. Ce faible taux coûte des vies: 146 Canadiens sont morts en 2007 en attendant un don d'organe. Le coût réel de la perte de vie ne se mesure pas facilement.
    Les transplantations sauvent des vies. Les transplantations évitent des coûts au système de soins de santé. Le coût de la dialyse et d'autres soins de prolongation des organes est énorme. Chaque transplantation de rein fait économiser, en termes nets, 100 000 $. Nous aurions dû faire au-delà de 500 transplantations de rein de plus l'an dernier, ce qui aurait fait épargner à nos systèmes de santé 50 millions de dollars annuellement.
    La Société canadienne du sang —  et vous avez entendu le témoignage de Graham Sher, ce matin — assumera la tâche initiale d'élaborer un cadre national. La Société canadienne de transplantation s'est engagée dans ce processus de concert avec la Société canadienne du sang et appuie vivement cette initiative. La Société canadienne du sang  a obtenu l'appui du gouvernement fédéral et des gouvernements provinciaux pour les cinq prochaines années. La Société canadienne de transplantation félicite chaudement le gouvernement fédéral du Canada de sa vision dans ce processus. C'est là un point de départ important, mais il pourrait ne pas suffire.
    Donc, au nom du public canadien, du milieu de la transplantation, de la Société canadienne du sang et de la Société canadienne de transplantation, nous estimons que votre Comité permanent de la santé doit charger un groupe de travail de collaborer avec la Société canadienne du sang. Le groupe de travail devrait produire un rapport définissant les lacunes du Canada sur le plan des dons et de la transplantation et offrir d'éventuelles solutions.
    Il faudrait que le groupe de travail voit ce qui se fait au Royaume-Uni, par exemple, où le ministère de la Santé a récemment achevé son rapport, rédigé par le Organ Donation Taskforce. Il devrait aussi examiner ce que font les États-Unis, par l'intermédiaire du United Network for Organ Sharing, UNOS, et du National Organ Transplant Act, (NOTA) et d'autres pays, comme l'Espagne, qui sont en tête du peloton.
    Nous avons le devoir à l'égard de la population canadienne et de nos gouvernements de rétablir nos taux de rendement en matière de transplantation. Les solutions devront être axées sur le principe de défendre les intérêts de nos patients, d'établir des points repères avec d'autres pays et avec les provinces, de réunir des données fiables, de distribuer des organes au besoin et de prendre des engagements auprès d'autres organismes internationaux.

  (1230)  

    Je vous remercie de nous avoir invités à témoigner aujourd'hui.
    C'est nous qui vous remercions vivement.
    Un autre membre de votre groupe a-t-il une déclaration à faire? Non? D'accord.
    La parole va maintenant à l'Association canadienne de transplantation, représentée par Mme Raylene Matlock.
    Bonjour à tous. Merci de nous avoir invités à témoigner. Je vous présente mon collègue, Jan Emerton, président élu de l'Association canadienne de transplantation.
    Nous vous sommes reconnaissants de nous avoir invités à prendre la parole concernant les critères d'exclusion des normes générales canadiennes qui sont annexées au règlement de Santé Canada relatif à la sécurité des cellules, tissus et organes. L'Association canadienne de transplantation représente les professionnels de la santé dans le domaine des dons et de la transplantation depuis 21 ans. Au fil des ans, les membres de l'association ont participé aux travaux de comités de direction et de comités consultatifs subséquents créés pour élaborer ces normes.
    Le règlement à l'étude a pour objet de réduire au minimum les risques éventuels pour la santé des receveurs de cellules, de tissus et d'organes. La composante la plus importante du processus de dons d'organes est celle de l'évaluation du donneur. On obtient ainsi l'information requise pour décider si l'on accepte ou rejette des organes aux fins de transplantation.
    Dans l'exposé qui va suivre, nous allons vous décrire deux des principaux aspects de l'évaluation, notamment l'évaluation de la fonction et du risque de l'organe, deux évaluations essentielles au médecin qui fait la transplantation pour décider s'il va utiliser l'organe.
    La composante relative à la fonction de l'organe engage un examen des analyses passées et actuelles en laboratoire pour déterminer la fonction spécifique à l'organe de même que des tests directs et indirects supplémentaires, dont l'examen de radiographies, des électrocardiogrammes, des échocardiogrammes, des bronchoscopies, des cathétérismes cardiaques et des procédures de visualisation pour le diagnostic.
    On examine aussi les antécédents médicaux de l'éventuel donneur afin d'établir si des maladies précises sont présentes qui pourraient directement ou indirectement nuire à la fonction de l'organe. Par exemple, si le donneur souffre d'hypertension, a un taux de cholestérol élevé, est diabétique, a des maladies pulmonaires chroniques ou le cancer.
    L'évaluation des risques repose sur l'utilisation de deux outils principaux en vue de repérer tout potentiel de transmission de maladie. Tout d'abord, on fait des tests sérologiques ou sanguins pour déterminer la présence de maladies infectieuses comme l'hépatite B, l'hépatite C, les virus T-lymphotropes humains de types I et II, le virus Epstein-Barr, le cytomégalovirus ou le virus de l'immunodéficience humaine, c'est-à-dire le VIH, qui cause le sida.
    En plus des analyses sérologiques, une entrevue pour dresser l'historique médico-social a également lieu en vue d'identifier les facteurs de risque. Plusieurs questions sont posées, allant de visites à l'hôpital passées à des voyages récents et au comportement social. Par exemple, si le donneur est allé récemment dans des régions où le climat est chaud, il présente peut-être un risque plus élevé d'avoir contracté le virus du Nil occidental. Sur le plan statistique, certaines activités sociales ont été identifiées comme accroissant l'éventuel risque d'hépatite B et C et de VIH, identifiés à l'origine par les Centres for Disease Control dans un document de 1994.
    Toutes ces activités ont été adoptées comme outils d'évaluation préliminaire standards par l'American Association of Tissue Banks, par le Eye Bank Association of America et, plus récemment, soit en 2003, par l'Association canadienne de normalisation. Cependant, nous avions en place un processus d'examen préliminaire depuis 1996.
    L'historique médico-social est fait par des coordonnateurs formés dans un contexte privé. Le passé de l'éventuel donneur est passé en revue avec son plus proche parent, un partenaire de vie important ou d'autres personnes compétentes, en utilisant un questionnaire normalisé. Une entrevue portant sur le passé médical et social a ensuite lieu et elle est menée avec doigté, discrétion et respect. L'objet de l'entrevue est expliqué au moyen d'une brève description du genre de questions qui seront posées à ces personnes. Le processus permet au présumé historien de décider s'il est la meilleure personne pour répondre à ce genre de questions ou si l'on devrait faire appel à une autre personne.
    L'entrevue peut se faire en personne ou au téléphone. La personne qui fait l'entrevue devrait préciser qu'en raison de la nature personnelle des questions, seules les personnes qui répondent aux questions devraient être présentes. Par contre, à la demande de la famille, les autres peuvent demeurer dans la pièce. Toutefois, il est utile que la personne qui fait l'entrevue demande aux autres personnes de quitter la pièce, ce qui évite un malaise à l'éventuel historien.
    La personne qui fait l'entrevue connaît bien le questionnaire visant à faire l'historique médico-social et pose toujours les questions avec délicatesse. Quand elle reçoit une réponse affirmative, la personne qui fait l'entrevue cherche à en savoir le plus possible. Cela pourrait inclure des citations directes de la personne interrogée. La personne qui fait l'entrevue est toujours consciente de la gestuelle, par exemple de regarder ailleurs, de tousser et de ne pas tenir en place, ce qui pourrait indiquer que la personne interrogée ne répond pas aussi franchement qu'elle le pourrait ou qu'une autre personne présente a d'autres renseignements qu'elle préfère ne pas fournir en présence des autres.

  (1235)  

    Parfois, il sera peut-être utile de demander à la personne interrogée de recommander une autre personne qui pourrait peut-être fournir l'information au coordonnateur. L'exemple typique serait le donneur qui est un jeune adulte; les parents fourniraient l'information sur son passé médical, et les amis ou frères et soeurs y ajouteraient la dimension sociale.
    De plus, la dernière question posée consiste à demander à la personne interrogée de réfléchir aux facteurs de risque que pose le comportement du donneur et de dire s'il y a une raison pour laquelle le don d'organes et de tissus ne devrait pas se faire. Aucune explication n'est nécessaire de la part de la personne interrogée. Mais la question vise à donner l'occasion aux proches, au partenaire de vie important et à d'autres la possibilité de mettre fin au processus de don s'ils hésitent à communiquer des renseignements délicats concernant le donneur.
    Si la réponse est affirmative et que la personne interrogée ne souhaite pas donner plus de précisions, le donneur sera écarté. Toutefois, à nouveau, le médecin qui fait la transplantation peut décider d'utiliser quand même les organes et les juger acceptables si le risque de ne pas recevoir un organe est plus grand que celui de contracter une maladie, en autorisant une distribution exceptionnelle, ce qui inclut le consentement éclairé et vérifié du receveur.
    En résumé, j'aimerais dire que l'Association canadienne de transplantation a appuyé l'élaboration du règlement de Santé Canada durant la dernière décennie. Sa principale préoccupation est de maximiser la sécurité tout en minimisant le risque pour le receveur de l'organe. Nous estimons que le règlement ne fait pas de discrimination à l'égard de quiconque souhaite donner des organes, mais qu'il fait plutôt en sorte que sont pleinement évalués les éventuels donneurs de manière à mieux outiller les médecins de transplantation pour porter un jugement professionnel concernant les risques et les avantages.
    Je vous remercie d'avoir invité l'association à prendre part au débat d'aujourd'hui.

  (1240)  

    C'est nous qui vous remercions beaucoup.
    Nous allons maintenant passer aux questions.
    Madame Bennett, vous avez cinq minutes. Chaque parti aura droit à cinq minutes.
    Oui, et je dois dire, monsieur le président, que c'est un peu frustrant. Nous avons tant de témoins à entendre et tant de questions à poser qu'il est impossible de tout faire en une seule matinée.
    Docteurs Levy et Shapiro, je vous suis très reconnaissante d'avoir fait des recommandations très claires concernant ce que vous aimeriez voir figurer dans le rapport du comité, soit de créer le groupe de travail ou, sûrement, de faire coïncider le règlement avec les connaissances scientifiques et la réalité pratique sur le terrain.
    Je compatis énormément avec Mme Gillham-Eisen qui nous a raconté l'histoire de son fils. Par contre, étant donné que, la plupart du temps, le clinicien va devoir rejeter un organe provenant d'un homosexuel qu'il sait être monogame, il me semble ridicule que nous ayons en réalité à subir... Vous savez, deux de mes meilleurs amis vivent ensemble depuis aussi longtemps que mon époux et moi, depuis 29 ans. Ils connaissent parfaitement bien les habitudes sexuelles de l'autre. Je n'arrive tout simplement pas à comprendre comment nous pourrions nous retrouver, littéralement, à faire de mauvaises lois en ayant des exigences trop rigoureuses.
    Je n'ai aucune idée d'où viennent les connaissances scientifiques qui ont servi à la plus grande partie de l'annexe. Qu'arrive-t-il si les enfants ont été vaccinés contre l'hépatite? Qu'arrive-t-il si, en termes de personnes... connaissez-vous le comportement des prisonniers? Il me semble simplement que ces questions sont trop diverses, puis qu'il faille franchir toutes ces étapes seulement pour rejeter un organe... J'avoue que je m'y perds un peu.
    J'ai été ministre et, lorsque les fonctionnaires du ministère me disaient qu'ils avaient consulté les gens, je passais les deux semaines suivantes à découvrir que ceux qui auraient dû être consultés ne l'avaient pas été.
    Donc, je ne suis pas heureuse de tout ceci. Il est presque impossible de tout accomplir aujourd'hui.
    Je serais ravie d'avoir, de la part de n'importe quel membre de votre groupe, des recommandations quant à ce que nous devrions faire, comme prochaine étape, de manière à respecter les connaissances scientifiques et à évaluer le risque réel plutôt que d'appliquer une idéologie. Le fait est que nous sommes tous des adultes. Si mon fils avait besoin d'un organe, j'espère que cela se ferait par la voie de consultations auprès de Dr Levy et de Dr Shapiro, non pas en passant à travers une liste de critères concoctés au sein d'un comité quelconque. Je m'attends donc que vous nous laisseriez décider ensemble si nous percevons cela comme un risque acceptable.
    Je fais appel à vos lumières pour décider de ce que nous devrions faire.
    Avec votre permission, j'aimerais simplement dire que, bien que le processus de consultation ait pu être large, la Société canadienne de transplantation n'a pas été consultée en tant qu'organisme...
    J'ai une liste longue comme le bras de personnes qui affirment ne pas avoir été consultées.
    Des personnes membres de notre société ont peut-être été consultées, mais l'organisme comme tel ne l'a pas été. De plus, je vous suis reconnaissante de nous écouter.
    J'aimerais savoir si je dois inscrire sur ma carte de dons d'organes la dernière fois que j'ai eu des relations sexuelles. C'est tout à fait ridicule. On nage dans l'absurdité.
    Cela découragera clairement les dons d'organes, ce que nous ne pouvons pas nous payer. Je traite des enfants qui mourront sûrement sans une transplantation. Il n'existe pas d'autre traitement pour ces enfants et, si nous diminuons notre performance déjà pas trop reluisante en dons d'organes, nous continuerons de ne pas...

  (1245)  

    Un de mes commettants a suggéré qu'il devrait y avoir, dans la déclaration de revenu, une case qu'on pourrait cocher pour signaler qu'on est disposé à donner ses organes et qu'on devrait avoir droit à un petit crédit d'impôt pour ce geste. Qu'en pensez-vous?
    Cela me semble une bonne idée.
     Puis-je faire un commentaire?
    J'aimerais simplement faire observer que, tout d'abord, j'ai eu des discussions avec le ministre de la Santé et je crois que l'objet était d'améliorer la sécurité. Je ne crois pas que quiconque, dans la salle, l'ait fait pour faire de la discrimination ou pour décourager les dons d'organes. Je ne souscris tout simplement pas à cet argument.
    Par contre, je soutiens que cela ne nous mènera pas à l'objectif recherché. Le grand public a mal interprété tout cela ou l'a interprété comme il le voulait bien. Je ne crois pas que quiconque dans la salle souhaite faire partie d'un groupe d'exclusion. Je ne crois pas que quiconque estime que pour aller de l'avant... qu'ils sont exclus, mais nous avons l'option de les faire passer dans ce que nous appelons le « bon camp ».
    Je conviens avec vous qu'il faut se fonder sur des faits scientifiques. J'ai largement consulté la communauté d'experts du VIH, d'un océan à l'autre. Je crois que la loi, comme l'a fait remarquer Dre West, voire des experts antérieurs, a été rédigée en 1994. Le VIH a changé depuis lors. Ce n'est pas la même maladie.
    Ce que nous voulons éviter à tout prix, selon moi, c'est de mettre des entraves qui limiteront notre capacité d'aider les plus infortunés de notre société.
    Je vous remercie beaucoup, docteur Levy.
    La parole va maintenant à Mme Davidson.
    Merci, monsieur le président. Je n'ai pas beaucoup de questions à poser.
    Je pense que tous les membres de ce groupe-ci de témoins et du groupe précédent ont été très clairs: la sécurité du patient passe en premier, ce à quoi nous sommes tous favorables, et nous tentons de freiner la transmission de maladies et nous ne voulons pas qu'il y en ait à cause d'une transplantation.
    Tous aussi ont parlé du caractère scientifique de la décision et qu'il faut que la décision s'appuie sur de bonnes connaissances scientifiques. J'aimerais revenir sur cette question un peu, parce qu'à mon avis, docteur Levy, vous avez cité des données statistiques sur le VIH qui sont un peu différentes de ce dont a parlé Mme Gillham-Eisen.
    J'aimerais donc lui demander si elle peut nous faire connaître ses vues à ce sujet.
    Les données statistiques dont nous disposons viennent de l'Agence de la santé publique du Canada. C'est elle qui les collige et qui en fait rapport tous les six mois. L'information dont nous disposons, fondée sur les rapports de surveillance de l'Agence de la santé publique du Canada, est essentiellement très différente de celle du Dr  Levy. Donc, je ne suis pas sûre de la source de ces données statistiques, mais à nouveau, nous comptons sur l'Agence de la santé publique pour nos données statistiques.
    Jusqu'en juin 2007, au sein du groupe identifié comme étant composé d'hommes qui ont des rapports sexuels avec d'autres hommes, l'incidence était en réalité de 42,6 p. 100. L'autre groupe où l'incidence est élevée est celui des utilisateurs de drogues injectables, dont le taux est de 22,8 p. 100. Les hétérosexuels qui n'ont pas de rapports sexuels avec des travailleurs du sexe ou quelqu'un que l'on sait être infecté ou qui a utilisé des drogues injectables ne figurent pas vraiment dans cette statistique particulière produite par l'Agence de la santé publique du Canada.
    Je répète qu'elle nous communique de l'information en fonction du critère fondamental d'hommes qui ont des rapports sexuels avec d'autres hommes, de sorte que les données ne sont pas ventilées. C'est une autre raison pour laquelle il faut aller de l'avant. Il n'y a pas de ventilation en fonction du fait que les relations sont protégées ou non. Ce n'est pas une information dont nous disposons. Voilà où en sont nos connaissances scientifiques.
    D'accord. Je crois que Dr Levy a indiqué que tous sont en faveur d'aller de l'avant et d'essayer d'améliorer la situation, mais qu'il faut protéger le bassin de donneurs dont nous avons si désespérément besoin au Canada. Donc, si nous n'empruntons pas cette voie de l'exclusion, qui, nous l'apprenons ce matin, a causé des difficultés et peut-être des malentendus au sein de la population, que faut-il faire?
    Tout d'abord, avant l'entrée en vigueur du règlement, nous avions des balises dont nous nous servions, et le milieu les acceptait. Soit dit en passant, ce qui est devenu loi ou règlement, d'après certains, n'est pas très différent de ce que nous avions auparavant.
    Donc, il faudrait savoir quelle est la différence entre une directive et un règlement. Une directive n'est qu'un avis qui nous est donné. C'est ce que font les États-Unis. Nous sommes avisés d'un comportement à haut risque — une situation qui correspond beaucoup à ce dont nous avons entendu parler ce matin. Nous obtenons les résultats des tests sérologiques, comme nous l'avons souligné, pour détecter les infections aux virus de l'hépatite B, de l'hépatite C, et ainsi de suite.
    Il faudrait aussi que vous sachiez que nous ne travaillons pas à contre-courant; nous aussi souhaitons avoir un système sécuritaire — et il l'est effectivement. Nous avons donc utilisé des mots comme « exclusion » dans la loi, un mot qui n'avait jamais été utilisé jusqu'ici. Nous avons recouru à des termes très durs. Je soutiendrais, tout d'abord, qu'il est nécessaire de parler du comportement à risque élevé. Après tout, quand il a été question des hommes qui ont des rapports sexuels avec d'autres hommes, c'est peut-être un des comportements à surveiller. Je n'irai pas jusqu'à vouloir définir un groupe ou quoi que ce soit. Je crois qu'il faut laisser les gens décider. Je ne crois pas qu'on souhaite forcément se voir définir comme groupe.
    Il faudrait aussi que vous sachiez, en ce qui concerne l'affaire de Chicago — qui est devant les tribunaux et au sujet de laquelle j'ai été consulté de sorte que je ne peux en parler davantage —, qu'il y a eu manque de communication des données. Voilà ce qui est arrivé. Le système a fait défaut. On n'aurait pu rien faire pour protéger... La loi à l'étude ne l'empêchera pas. C'est une défaillance du système.
    Madame Bennett, vous avez demandé à savoir ce que nous souhaitions. Primo, nous avons besoin de modifier le texte pour refléter ce que nous tentons d'accomplir, et je vous encourage à exiger le recours au meilleur critère possible.
    En ce qui concerne le virus de l'hépatite C, soit dit en passant, dont a parlé M. Fletcher, le Canada n'a pas opté pour la voie de la réussite. On ne s'est pas servi de l'épreuve indirecte. Je ne parle pas du gouvernement actuel, de sorte que je m'excuse si vous avez supposé que j'étais une bête politique. Ce n'est pas le cas. Je suis tout à fait apolitique. Je défends les intérêts de mes patients. Cependant, la réalité est que le gouvernement du Canada d'alors n'avait pas suivi les meilleurs conseils donnés par les médecins. Il aurait fallu inclure les épreuves indirectes. Les États-Unis l'ont fait et ils n'ont pas eu à subir les mêmes coûts.

  (1250)  

    Je vous remercie beaucoup.
    La parole va maintenant à M. Ménard.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Il est clair que ce règlement est discriminatoire et qu'il ne passerait certainement pas le test de la Charte. En même temps, personne ne veut compromettre l'approvisionnement en dons d'organes et créer un scandale comme celui du sang contaminé.
    J'aurais bien aimé qu'on fasse revenir M. Germain à la table pour qu'il puisse réagir à l'intervention de M. Levy. J'aimerais que vous expliquiez en quoi les tests de dépistage du VIH de troisième génération nous permettraient de maintenir les critères de sécurité auxquels on souscrit tous. C'est trop facile de dire, comme d'autres personnes, d'autres témoins l'ont déclaré avant vous, que c'est « la » communauté scientifique, comme si elle existait avec un grand « je » et que tout le monde pensait la même chose.
    D'ailleurs, entre le moment où les conservateurs de Brian Mulroney ont déposé leur première stratégie de lutte contre le sida et le moment où le ministre Pettigrew l'a renouvelée, le visage du sida avait changé. Les deux statistiques, tant celle de Mme Gillham-Eisen que celle de M. Levy, concordent. Les gens qui s'infectent au Canada ne sont pas majoritairement des hommes ayant des relations sexuelles avec d'autres hommes. Ça fait au moins trois ans que ce n'est plus le cas. Par conséquent, les statistiques et les données qui nous ont été présentées par les témoins avant vous ne sont pas rigoureusement défendables.
     Dites-nous en quoi ces tests de troisième génération, particulièrement le test PCR ARN, nous permettraient d'avoir les standards de qualité que vous maintenez, et expliquez-nous la différence entre un don d'organe lorsque la personne est vivante et qu'elle consent à le faire et un don d'organe lorsqu'une personne est décédée. Expliquez-nous également comment, dans les deux cas, ça peut être opérationnel.
    Monsieur le président, j'aimerais bien savoir quel est le point de vue de M. Germain. Peut-on le faire revenir à la table?

  (1255)  

[Traduction]

    Voulez-vous que je commence?
    Allez-y, puis ce sera au tour du Dr Germain.
    Très bien, je suis heureux de commencer. Je sais que votre temps est limité; je ne ferai donc pas un exposé scientifique aujourd'hui.
    En réalité, nous pouvons mesurer votre réaction immunitaire au virus, qui est un anticorps, à l'aide de ce que nous appelons la technique ELISA, à laquelle le Dr Germain a fait allusion, mais il y a maintenant une nouvelle génération de tests ELISA, appelés Luminex ou ELISA luminescence, dont la sensibilité est plus élevée. Par exemple, si je regarde par terre, il y a peut-être une punaise, mais je ne peux la voir qu'avec un microscope. C'est le même phénomène.
    Les dosages par luminescence pour la sérologie réduiront de 21 à 14 jours le délai entre le moment où la personne est exposée et celui de l'intervention, mais cela n'est pas assez. Nous savons maintenant que lorsqu'une personne est infectée, c'est un virus, et nous pouvons raffiner les résultats. Nous avons la possibilité d'utiliser une technique par laquelle nous pouvons prendre un échantillon de sang du patient et l'analyser dans un délai de quatre heures, afin d'accroître l'efficacité. Évidemment, c'est onéreux. Vous devriez donc en parler avec le Dr Sher. C'est votre représentant. Nous pourrions effectuer le test d'ADN, s'intéresser à la partie du génome du virus, ou celui de l'ARN, qui fait aussi partie du génome, et en utilisant ces techniques, nous éliminerions la quasi totalité des risques. Le Dr Wainberg, à Montréal, ainsi que d'autres personnes ont indiqué que la connaissance des antécédents ne serait plus nécessaire; vous seriez capable de détecter le génome.

[Français]

    En terminant, est-il possible de faire venir à la table le Dr Germain afin de savoir quel est son point de vue spécifiquement là-dessus? Accepterait-il de réagir très brièvement à l'intervention de son collègue M. Levy?
    Monsieur Germain, accepteriez-vous? Je ne veux pas vous mettre mal à l'aise.

[Traduction]

    Nous allons bientôt conclure.
    Combien de temps m'accordez-vous, et devrais-je répondre en français ou en anglais? Je vais parler en anglais, pour faciliter la discussion avec le Dr Levy.
    J'invoque le Règlement, monsieur le président. J'aimerais que cela ne m'empêche pas de poser des questions. Pouvons-nous dépasser le temps prévu?
    Nous prendrons cela en considération. Merci.
    Chaque ronde est distincte.
    Je serai très bref. Les tests utilisés pour dépister les maladies infectieuses chez les donneurs ont été constamment améliorés avec les années. Nous avons commencé avec des tests qui ne détectaient pas certaines infections récentes, ce que nous appelons la fenêtre sérologique; les nouveaux réussissent mieux à identifier ces types d'infections. De plus, la sensibilité globale des tests de dépistage utilisés pour les donneurs de sang et de tissus humains, par exemple, ne cesse de s'améliorer.
    Nous avons aussi ajouté, récemment, en ce qui concerne les dons de sang et de tissus humains, le test des acides nucléiques, ou PCR, comme vous l'avez appelé. Il réduira la durée de la fenêtre sérologique et diminuera ainsi les risques.
    Je désapprouve totalement l'idée de renoncer à l'évaluation des comportements à risque élevé. Nous effectuons ces tests de dépistage, qui sont très efficaces pour les dons de sang, et nous évaluons encore les risques pour nos donneurs car, même aujourd'hui, il y a des exemples concrets... pas au Canada, heureusement, mais il a été démontré, aux États-Unis, que même en utilisant la meilleure technologie, il peut encore arriver que le sang d'un donneur soit analysé durant une période où le test n'est pas aussi efficace que prévu parce que l'infection est encore au premier stade ou je ne sais quoi.
    Actuellement, les tests ne sont pas parfaits, et ils ne le seront jamais. Nous devons toujours prendre en considération les comportements à risque.
    Je vous remercie beaucoup.
    J'aimerais remercier le groupe d'experts...
    Monsieur le président, pourrions-nous prendre cinq minutes supplémentaires?
    Ces cinq minutes, madame Wasylycia-Leis, permettraient aux conservateurs de poser une question.

  (1300)  

    C'est une nouvelle ronde.
    Nous n'avons pas le temps. Il y a une autre réunion à 13 heures.
    Vous auriez donné la prochaine aux conservateurs. C'est un autre débat et un nouveau groupe d'experts.
    La séance est levée.