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CIIT Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent du commerce international


NUMÉRO 023 
l
2e SESSION 
l
41e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 8 avril 2014

[Enregistrement électronique]

  (1100)  

[Traduction]

    Nous remercions les gens du ministère d'être venus.
    Conformément à l'ordre de renvoi du lundi 31 mars 2014, nous étudions le projet de loi C-20, Loi portant mise en oeuvre de l'Accord de libre-échange entre le Canada et la République du Honduras. Il s'agit aussi d'accords dans les domaines de l'environnement et du travail entre le Canada et la République du Honduras et de l'Accord de coopération dans le domaine du travail entre le Canada et la République du Honduras. Pour la première heure, nous avons des gens du ministère; c'est la manière traditionnelle de nous lancer dans une étude. Nous entendrons ensuite des témoins pendant la deuxième heure.
    Sur ce, je pense que c'est Cameron MacKay qui va prendre la parole. Vous allez nous guider, et vous avez votre équipe avec vous. Bienvenue au comité. Nous sommes impatients d'entendre votre témoignage, puis de vous poser des questions. La parole est à vous.

[Français]

    Je remercie le comité de cette occasion qui m'est offerte de discuter du projet de loi C-20 portant sur la mise en oeuvre de l'Accord de libre-échange entre le Canada et la République du Honduras et sur les ententes parallèles dans les domaines du travail et de l'environnement.

[Traduction]

    J'occupe actuellement le poste de directeur général du Bureau des négociations commerciales au ministère des Affaires étrangères, du Commerce et du Développement et j'ai précédemment rempli les fonctions d'ambassadeur du Canada au Honduras de 2010 à 2012.
    Je suis accompagné de mes collègues du MAECD: Henri-Paul Normandin, directeur général du Bureau de l'Amérique latine et des Caraïbes; Paul Huynh, directeur adjoint, Direction des droits de douane et de l'accès aux marchés des marchandises; et Vernon MacKay, directeur, Direction de la politique commerciale sur l'investissement. Nous avons aussi Pierre Bouchard, directeur des Affaires bilatérales et régionales du travail à Emploi et Développement social Canada.
    Monsieur le président, les membres du comité savent très bien que, pour être concurrentielles et réussir sur les marchés mondiaux, tant dans notre hémisphère qu'ailleurs, les entreprises canadiennes doivent être sur un pied d'égalité avec leurs concurrents en ce qui concerne les droits de douane et l'accès aux marchés. L'Accord de libre-échange Canada-Honduras atteint cet objectif. Il démontre concrètement l'engagement du gouvernement à mener un plan ambitieux axé sur le commerce, tout comme notre Stratégie d'engagement dans les Amériques.

[Français]

    Le Honduras est bien sûr un partenaire commercial relativement petit, mais on y trouve un potentiel de croissance à long terme et plusieurs entreprises canadiennes mènent déjà des activités dans le pays.

[Traduction]

    En effet, notre commerce bilatéral enregistre déjà une croissance. Les échanges commerciaux bilatéraux avec le Honduras se sont accrus de 59 %, passant de 176 millions de dollars à 280 millions de dollars entre 2009 et 2013. Au cours de la dernière année seulement, de 2012 à 2013, les exportations du Canada ont augmenté de presque 17 %, et les importations ont connu une hausse de plus de 7 %. Pour appuyer les entreprises canadiennes présentes au Honduras, Exportation et développement Canada, EDC, est venu en aide à 28 entreprises canadiennes et a enregistré un chiffre d'affaires de plus de 23 millions de dollars au Honduras au cours de l'année 2013.
    Toutefois, les entreprises canadiennes doivent faire face à une concurrence féroce au Honduras. Des accords de libre-échange sont déjà en vigueur entre le Honduras et huit partenaires, soit les États-Unis, l'Union européenne, le Mexique, la République dominicaine, le Chili, Taïwan, le Panama et la Colombie. Le Honduras négocie également des ALE avec le Pérou et la Corée. Chacun de ces accords offre aux entreprises de ces pays un avantage concurrentiel mesurable au Honduras par rapport à leurs équivalents canadiens, dont des avantages réels sur les prix prenant la forme de droits de douane moins élevés. Une fois notre ALE en vigueur, les exportateurs canadiens pourront rivaliser sur un pied d'égalité.
    Aujourd'hui, les exportations canadiennes au Honduras sont soumises à des droits de douane moyens de 10,5 % sur les produits agricoles et de 4,8 % sur les produits non agricoles. Si le Parlement permet la mise en oeuvre de cet Accord de libre-échange, les entreprises canadiennes pourront tirer davantage profit de l'économie croissante du Honduras grâce à l’élimination des droits de douane sur presque 70 % des lignes tarifaires honduriennes et à la suppression progressive des droits restants sur une période de 5 à 15 ans.

[Français]

    La gamme de produits visés comprend les produits agricoles et agroalimentaires, les produits forestiers, les matières plastiques, les produits chimiques, les véhicules et les pièces automobiles ainsi que les machines industrielles.

  (1105)  

[Traduction]

    Cet accord sera avantageux pour diverses collectivités à l’échelle du Canada, particulièrement dans l’agriculture et l’agroalimentaire. À titre d'exemple, les producteurs de porc du Québec et de l'Ontario, les producteurs de produits à base de pommes de terre du Nouveau-Brunswick, de l'Île-du-Prince-Édouard et du Manitoba, les producteurs de lin de la Saskatchewan et les producteurs de bovins de l'Alberta profiteront tous de la suppression des droits de douane au Honduras, lesquels peuvent atteindre 15 % sur leurs produits.
    De plus, grâce à l'approbation par le Honduras des systèmes d'inspection du boeuf et du porc du Canada l'automne dernier, les producteurs et les exportateurs canadiens de boeuf et de porc peuvent profiter des réductions tarifaires dès la première journée de la mise en vigueur de l'Accord de libre-échange.

[Français]

    Cet accord éliminera aussi les droits de douane sur une grande variété de produits industriels exportés, comme les produits chimiques, le bois, les produits de pâtes et papiers, les véhicules et les pièces automobiles, en plus des poissons et des fruits de mer. Les gains liés à l'accès aux marchés des marchandises bénéficieront aux entreprises de divers secteurs partout au Canada.

[Traduction]

    Le secteur canadien des services pourrait également en bénéficier. L'ALE va plus loin que les engagements existants du Honduras en vertu de l'Accord général sur le commerce des services de l'Organisation mondiale du commerce dans les secteurs d'exportation d'intérêt du Canada comme les services professionnels et les technologies de l'information et des communications. Dans l'ensemble, l'ALE procurera aux fournisseurs de service canadiens un traitement sûr, prévisible et équitable.
    Les investisseurs en tireront aussi profit. L'Accord de libre-échange Canada-Honduras comporte des dispositions visant à protéger l'investissement bilatéral à l'aide d'obligations juridiquement contraignantes et à assurer le traitement non discriminatoire des investisseurs. Grâce à l'ALE, les investisseurs auront aussi accès à des règlements des différends transparents, impartiaux et contraignants. Les dispositions de l'accord établiront un cadre juridique protégeant les investissements du Canada au Honduras, et, inversement, garantissant le transfert de capitaux d'investissement tout en protégeant les investisseurs contre l'expropriation sans que des indemnités suffisantes ne leur soient versées promptement. Les dispositions relatives à l'investissement comprennent aussi un article sur la responsabilité sociale des entreprises qui reconnaît que les deux gouvernements encouragent leurs entreprises respectives présentes à l'étranger à respecter les normes reconnues internationalement sur la conduite responsable des affaires et s'attendent à ce qu'elles le fassent.
    L'ALE contient aussi des dispositions solides en ce qui concerne les marchés publics. Le Honduras compte de nombreux projets d'infrastructure en cours d'exécution reliés aux ports, aux aéroports et à la production d'énergie à partir de sources renouvelables. Ces projets visent notamment à améliorer l'accès, la qualité et la durabilité des services d'infrastructure pour les pauvres en milieu rural. L'ALE élargira l'accès des fournisseurs canadiens à ce genre de possibilités d'approvisionnement, réduira le risque associé aux affaires dans la région et créera des occasions attrayantes dans des domaines comme ceux des technologies de l'environnement, de l'ingénierie, des projets d'infrastructure et des services de construction.
    Enfin, conformément à son approche habituelle en ce qui concerne les accords de libre-échange, le Canada a négocié des accords parallèles de coopération dans les domaines du travail et de l'environnement. L'Accord de coopération dans le domaine de l'environnement — à l'image d'autres accords qui ont été signés par le Canada — engage le Canada et le Honduras à appliquer de façon efficace leurs lois respectives sur l'environnement et à veiller à ce qu'elles ne soient ni adoucies ni affaiblies dans le but d'encourager le commerce ou l'investissement. De façon similaire, l'Accord de coopération dans le domaine du travail veille à ce que les échanges accrus entre nos pays ne se fassent pas au détriment des droits des travailleurs.

[Français]

    Les entreprises canadiennes qui font des affaires à l'étranger respectent des règles commerciales justes, transparentes, prévisibles et non discriminatoires. Grâce à l'Accord de libre-échange entre le Canada et la République du Honduras, nous aidons à fournir aux entreprises canadiennes les règles dont elles ont besoin pour rivaliser et décrocher des marchés à l'étranger, ainsi que pour bâtir une économie canadienne plus forte.

[Traduction]

    Bien sûr, les Honduriens tireront également profit de cet ALE. Les entreprises canadiennes implantées au Honduras et les importateurs canadiens qui achètent des marchandises honduriennes offrent déjà des possibilités d'emplois et des occasions d'affaires. Au fil du temps, cet ALE créera les conditions favorables à davantage d'occasions de ce genre pour les Honduriens. Les membres du comité savent très bien que le Honduras éprouve des difficultés sur tous les fronts, entre autres en ce qui a trait à la pauvreté, à la violence, au trafic de stupéfiants et au respect des droits de la personne.
    Le Honduras a besoin d'aide, et le Canada réagit. Le Canada ainsi que le gouvernement, la société civile et d'autres donateurs internationaux sur le terrain s'engagent à aider les Honduriens à régler leurs problèmes relatifs aux droits de la personne, à la sécurité et au développement.

[Français]

    Le gouvernement canadien estime que la prospérité, la sécurité et la gouvernance démocratique — dont le respect total des droits de la personne — sont étroitement liées et se renforcent les unes les autres.

  (1110)  

[Traduction]

    Les gouvernements du Canada et du Honduras s'entendent pour dire qu'une prospérité accrue grâce aux échanges et aux investissements stimulés par un ALE solide peut contribuer à la réduction de la pauvreté et de l'exclusion sociale au Honduras.

[Français]

    Je vous remercie. Nous serons heureux de répondre à toutes les questions que pourraient avoir les membres du comité.

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    Avant de passer aux questions, je tiens à souhaiter un bon retour à tous ceux qui, la semaine passée, étaient au Pérou. Je vois que certains ont le teint un peu plus foncé qu'au départ. Je ne sais pas ce qu'ils y faisaient précisément. Quoiqu'il en soit, bon retour. Nous sommes impatients d'entendre les questions.
    Nous allons commencer par M. Davis, pour sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci aux fonctionnaires de leur présence aujourd'hui.
    En 2009, l'armée du Honduras renversait le gouvernement démocratiquement élu du président Manuel Zelaya. Après le coup d'État, le gouvernement militaire a suspendu les principales libertés civiles, dont la liberté de presse, d'expression et d'assemblée; il a répondu aux manifestations pacifiques des citoyens par la violence, causant ainsi des blessures et des décès, et par des arrestations arbitraires; il a fermé les organes d'information; et il a kidnappé et assassiné des opposants politiques. À peine quelques mois plus tard, en janvier 2010, les dirigeants du coup d'État étaient élus dans le sillage d'élections décrites comme étant illégitimes, et condamnées par toutes les nations d'Amérique latine, l'Union européenne, les États-Unis et l'Assemblée générale des Nations Unies.
    C'est le gouvernement qui est demeuré en place jusqu'en octobre 2013. Pouvez-vous me dire si le MAEDC a négocié avec ce gouvernement hondurien à compter de 2009?

[Français]

    À la suite des événements de 2009, le gouvernement canadien a tout d'abord condamné ce qui est survenu à ce moment-là.

[Traduction]

    Le gouvernement du Canada a été très actif dans les mois qui ont suivi et a travaillé avec d'autres pays d'Amérique latine, notamment avec l'Organisation des États américains, pour restaurer l'ordre démocratique et la paix au Honduras. À l'époque, le droit de participation du Honduras à l'OEA a été suspendu. Après beaucoup de travail réalisé avec l'OEA, y compris le travail de la commission de vérité et de réconciliation, le Honduras a finalement été de nouveau admis au sein de l'OEA par tous les membres de la région.
    Comme vous l'avez dit, il y a eu des élections en 2009, et il y en a eu d'autres plus récemment. Les observateurs ont jugé que les dernières élections avaient été généralement libres et justes. Il y a eu des problèmes qui ont...
    Monsieur Normandin, pardonnez-moi de vous interrompre. Je vais en venir à cela, mais ce que je demandais, c'est si le MAECD a négocié l'accord de libre-échange avec ce gouvernement, entre 2009 et 2013.
    Oh, négocier l'accord de libre-échange... je suis désolé.
    Nous n'avons eu aucun contact avec le gouvernement provisoire. Ce que je veux dire, c'est qu'entre le moment du coup d'État et les élections en 2009, il n'y a eu ni négociations, ni contacts.
    Vous avez négocié en 2010.
    Le gouvernement Lobo est entré en fonction en 2009 — ces élections ont été reconnues par le Canada, les États-Unis, l'Union européenne et la plupart des autres pays. Nous avons reconnu ce gouvernement et nous avons poursuivi les négociations avec ce gouvernement.
    Excusez-moi de vous interrompre. Je veux bien comprendre.
    Je pense que vous vous êtes mal exprimé. Il n'y a pas eu d'élections en 2009. Les élections ont eu lieu en 2010, n'est-ce pas? C'est alors que le gouvernement Lobo a pris le pouvoir...
    À l'automne 2009.
    ... et nous n'avons pas immédiatement reconnu ce gouvernement. Ces élections ont été condamnées.
    C'était à l'automne 2009, et le gouvernement est entré en fonction en 2010.
    Le président, je pense, est entré en fonction en janvier 2010, et nous avons reconnu ce gouvernement et avons travaillé avec lui, notamment pour l'accord de libre-échange.
    La seule question que j'ai posée est la suivante. Est-ce que le MAECD négociait un accord de libre-échange avec ce gouvernement, en 2010, en 2011 et en 2012? C'est tout ce que je demande.
    Avec le gouvernement Lobo, oui. Quand nous avons négocié, c'était avec le gouvernement Lobo.
    Nous avons mené des recherches sur le Honduras et avons consulté un vaste éventail de sources, dont le Département d'État américain, The Economist, Human Rights Watch, les Nations Unies, PEN et bien d'autres. Voici un aperçu de ce que nous avons trouvé.
    Le Honduras n'est pas considéré comme une démocratie, mais plutôt comme un régime hybride. Il a glissé du 74e rang au 85e rang de 2008 à 2012 et s'en va donc dans la mauvaise direction. Transparency International estime que le Honduras est le pays le plus corrompu d'Amérique centrale. Le Département d'État américain estime que 70 % de tous les envois de cocaïne en provenance d'Amérique du Sud, la région où il se produit le plus de cocaïne dans le monde, aboutissent au Honduras.
    Selon The Economist, les pays du triangle du Nord de l'isthme centre-américain, dont fait partie le Honduras, forment maintenant « la région la plus violente sur terre ». L'Office des Nations Unies contre la drogue et le crime signale qu'en 2011, les meurtres qui y ont été perpétrés sont au nombre de 92 par tranche de 100 000 personnes, ce qui en fait le pays le plus violent d'Amérique centrale. L'année suivante, en 2012, le Honduras est devenu la capitale mondiale du meurtre, avec ses 7 172 homicides. En 2013, l'année passée, il y a eu en moyenne 10 massacres par mois. On entend par « massacre » le meurtre d'au moins trois personnes en un seul événement.
    Selon le Groupe d'orientation politique pour les Amériques, moins de 20 % des homicides font l'objet d'enquêtes, et vous pouvez oublier les mises en accusation. D'après eux, ce degré élevé d'impunité sert à masquer la violence politique. Depuis 2010, il s'est commis au moins 200 meurtres de nature politique. Selon un rapport publié en 2013 par Human Rights Watch, le Honduras est l'endroit le plus dangereux pour les journalistes. La commission des droits de la personne du Honduras a indiqué que 36 journalistes ont été tués entre 2003 et 2013 — 29, depuis 2009, quand le président Lobo a pris le pouvoir illégalement, celui-là même avec lequel vous dites avoir négocié.
    Plus de 149 cas d'exécutions extrajudiciaires menées par la police ont été documentés, en 2011 et en 2012. Seulement au cours des 18 derniers mois, au moins 16 candidats et travailleurs du parti de l'opposition, Libre, ont été assassinés. En juin 2013, 94 membres du Congrès américains ont demandé au Département d'État de mettre fin à toute aide militaire...

  (1115)  

    Posez une question, parce que votre temps est presque écoulé...
    M. Don Davies: J'y arrive.
    Le président: ... et je veux qu'il reste du temps.
    ... et en janvier, le Rapporteur spécial des Nations Unies sur l'indépendance des juges et des avocats a dit du limogeage de quatre juges de la Cour suprême par le gouvernement hondurien qu'il s'agissait d'une violation des normes internationales et d'une « grave attaque contre la démocratie ».
    Je vais vous poser une question. Ce type de pays — un pays qui ne respecte pas la démocratie, qui viole les droits les plus fondamentaux de ses citoyens, qui intimide ses juges, qui commet des atrocités et viole les droits de la personne, qui assassine des journalistes et des dirigeants politiques, qui est corrompu, qui sert de carrefour à la contrebande de drogues, qui n'est pas capable de maintenir la primauté du droit —, est-ce le type de pays auquel le MAECD pense que le gouvernement devrait offrir un accès commercial préférentiel, aux yeux des Canadiens?
    Eh bien, je ne vais pas parler au nom du ministère. Permettez-moi de revenir sur certaines de vos allégations.
    Vous avez mentionné que le gouvernement Lobo était illégalement entré en fonction en 2009. Selon la position du gouvernement du Canada, qui est la même que celle des États-Unis, de l'Union européenne et d'autres pays industrialisés, les élections qui ont permis au président Lobo de prendre le pouvoir étaient légitimes. Nous reconnaissons ce gouvernement et avons travaillé avec lui — et nous ne sommes pas les seuls. D'autres pays de l'Ouest l'ont aussi fait. Nous avons travaillé avec eux dans le but de conclure un accord de libre-échange. Nous avons aussi travaillé avec eux pour mettre en oeuvre des programmes visant le développement, la coopération et la sécurité.
    Franchement, le Honduras souffre de toutes les choses que mon collègue a mentionnées: le cancer que représente le trafic de stupéfiants, la violence dans la région qui est presque hors de contrôle, les graves préoccupations relatives aux droits de la personne. C'est la raison pour laquelle le gouvernement du Canada, tout comme d'autres gouvernements ayant la même optique, travaille avec le gouvernement du Honduras à résoudre ces problèmes, aussi bien directement qu'au moyen d'outils comme la négociation, dans notre cas, d'un accord de libre-échange comme ceux que les États-Unis et l'Union européenne ont conclus avec le Honduras.
    D'accord. Merci beaucoup.
    Monsieur O'Toole.
    Merci, monsieur le président.
    Merci à vous tous d'être venus ce matin.
    Contrairement à mon collègue de l'autre côté, je vais poser des questions au lieu de faire un discours.
    Étant donné qu'il s'est concentré sur quelques années de relations avec le Honduras, pourriez-vous revenir un peu plus loin en arrière pour nous parler des origines de ces discussions? Je crois qu'elles remontent à l'engagement du Canada envers le Groupe des quatre de l'Amérique centrale. Pourriez-vous nous parler des origines des discussions qui ont mené à l'ALE d'aujourd'hui?
    Je vous remercie de votre question.
    Les négociations ont commencé en 2001 avec le Groupe des quatre de l'Amérique centrale: le Honduras, le Guatemala, El Savador et le Nicaragua. Les premières années, les négociations ont bien progressé. Peu de temps après le début de nos négociations, ce groupe a aussi entrepris de négocier un accord de libre-échange avec les États-Unis. Ils se sont laissés distraire un peu et n'ont pas pu poursuivre deux grandes négociations en parallèle. Ils ont conclu leur accord avec les États-Unis, qui a pris effet en 2006.
    Nous avons repris nos efforts pour négocier avec eux. Les négociations ont été intermittentes pendant quelques années. Vers 2008, nous avons recommencé pour de bon avec le Groupe des quatre de l'Amérique centrale. Encore une fois, ils se sont laissé distraire par leurs négociations avec l'Union européenne. En 2009, les négociations avaient encore progressé un peu avec les quatre pays. Puis il y a eu le coup d'État au Honduras, et le gouvernement canadien a coupé ses contacts avec le gouvernement hondurien pendant cette période. Quand les relations ont repris après des élections légitimes au Honduras, il était clair que nous n'allions pas pouvoir conclure un seul accord de libre-échange avec les quatre pays du groupe.
    Franchement, les trois autres n'étaient tout simplement pas assez ambitieux. Ils n'étaient pas prêts à offrir au Canada le même genre d'accès au marché que ce qu'ils avaient accordé aux États-Unis et à l'Union européenne. De l'autre côté, les Honduriens se montraient plus ambitieux dans leurs négociations. C'est pour cela que le gouvernement du Canada a poursuivi ses efforts et a conclu un accord bilatéral avec le Honduras.

  (1120)  

    Merci.
    Depuis 2001. Donc, trois gouvernements au Canada, ce qui ouvre des perspectives intéressantes.
    D'après le plan d'action sur les marchés mondiaux et l'orientation axée sur la diplomatie économique, au cours de la dernière ou des deux dernières années, le Honduras est l'un de nos 20 pays prioritaires. Aujourd'hui, nous discutons beaucoup d'échanges commerciaux et nous assistons certainement au couronnement de 13 années de négociations sous diverses formes, mais nous sommes aussi au troisième rang des pays donateurs bilatéraux pour l'aide au développement, la construction de capacités, le renforcement des institutions.
    Monsieur MacKay, pouvez-vous nous donner votre opinion d'ancien ambassadeur sur deux points, peut-être en prenant le temps qui me reste? D'abord, la présence du Canada, troisième donateur bilatéral, aide-t-elle à la construction de capacités? Ensuite, d'après votre connaissance du terrain et non d'après des recherches faites sur Google, l'intensification des échanges ou l'augmentation de l'activité économique améliorent-elles doucement le niveau de vie, la qualité de vie du Hondurien moyen?
    Merci de votre question.
    Quand j'étais chef de mission au Honduras, j'ai pu visiter plusieurs gros chantiers que nous avions entrepris là-bas. Comme vous avez dit, le Honduras figurait sur une liste de 20 pays prioritaires de l'ACDI, comme on l'appelait, en raison de ses besoins si criants. On y réalise des projets formidables pour la santé des mères, des nouveau-nés et des enfants. Nous collaborons directement avec la Croix-Rouge hondurienne pour appuyer les programmes du Programme alimentaire mondial, les programmes dits d'alimentation en milieu scolaire pour les enfants souffrant de malnutrition dans les régions rurales, qu'on attire maintenant à l'école pour qu'ils y déjeunent, grâce aux programmes alimentaires que le Canada parraine avec le Programme alimentaire mondial.
    Pour en venir à votre question sur les possibilités offertes par l'Accord de libre-échange, nous avons aussi des programmes de coopération pour le développement qui aident les producteurs honduriens de café à exploiter les marchés internationaux. Nous collaborons avec les producteurs de cacao pour les aider à mettre au point des méthodes plus durables de culture de leur produit local.
    Quant aux investissements canadiens dans ce pays, Gildan — je crois que vous entendrez ses représentants plus tard, aujourd'hui — est actuellement le premier employeur privé dans ce pays, avec environ 20 000 employés. Il y crée des emplois et il y offre des possibilités. C'est un employeur très recherché par les Honduriens. Le gouvernement du Honduras de l'époque appuyait beaucoup toutes les activités du gouvernement canadien dans le programme de coopération pour le développement que j'ai esquissé et les investissements privés de Gildan. Il voyait dans le Canada un partenaire très important, qui l'aiderait à relever certains des défis très graves qu'il devait affronter, comme cela a été dit plus tôt par un autre membre du comité.
    Voilà qui est intéressant: une compagnie canadienne... notre marque est là... le premier employeur du secteur privé. Est-ce que le taux de chômage, au Honduras...? Il doit certainement être élevé par rapport à nos critères, mais comment se classe-t-il par rapport à celui des autres pays d'Amérique centrale? Est-il élevé, faible ou tend-il à s'améliorer?

  (1125)  

    Je ne pourrais pas dire, comme ça, au pied levé.
    Je ne sais pas, Pierre, si, par hasard, vous...
    Mais je peux peut-être vous dire que l'emploi au Honduras et dans la région est une priorité de tous les gouvernements. Les taux de chômage sont d'ordinaire élevés, et la région offre peu d'emplois de qualité. Donc, le Honduras comme les autres pays de la région est toujours à la recherche d'investissements privés pour augmenter les possibilités d'emploi, et nous pensons que l'accord commercial aidera.
    Je pense que M. Bouchard a des chiffres à communiquer.
    Ce sont des chiffres du service de statistiques de l'Organisation internationale du travail, datant de juin 2012. Au Honduras, le taux de chômage est chiffré à 2,9 %, mais de larges pans de la population restent employés dans des secteurs non structurés, près de 73,9 %. Globalement, le taux d'activité reste relativement faible. Il se situe à environ 38 %.
    Très bien.
    Monsieur Pacetti, vous avez la parole.
    Merci, monsieur le président.
    Merci à vous tous d'être ici. C'est très intéressant.
    Monsieur MacKay, revenons un peu en arrière, avant que le Canada ne conclue un accord commercial. Quels sont les critères? Dans votre mémoire, vous déclarez aussi que le Honduras est un partenaire commercial relativement mineur. Est-ce le résultat final qui nous fait dire que nous pouvons probablement conclure un accord commercial, un accord dans le domaine du travail et n'importe quel type d'accord avec ce pays? Ou bien est-ce que nous partons du début en voulant cibler les pays les plus pauvres du monde? Pouvez-vous expliquer cela?
    Eh bien, au début de nos négociations avec le Honduras, en 2001 — et, à l'époque, ce n'était pas mon dossier — j'imagine que le gouvernement voyait alors un créneau dans la région tout en voulant renforcer ses liens économiques avec elle, qui avait été déchirée par la guerre civile et la révolution dans les années 1980 et qui, bien honnêtement, avait besoin des ouvertures économiques que la libéralisation des échanges, quand elle est appuyée par les autres programmes appropriés...
    Non. Je comprends. Je suis désolé de vous interrompre, parce que j'ai peu de temps.
    Je crois que vous avez dit que, au départ, vous aviez quatre pays. Votre objectif ne serait-il donc pas de finalement avoir des échanges avec les quatre? Je comprends qu'il est survenu des choses en cours de route, mais ne voudriez-vous pas conserver au moins un deuxième ou un troisième pays pendant cette période? Ce sont de petits, très petits partenaires commerciaux.
    Nous aurions préféré conclure un accord avec les quatre pays de l'Amérique centrale, mais, après 10 années de négociations, cela s'est révélé tout simplement impossible. Nous avons donc conclu un accord avec le pays qui, honnêtement, était disposé à négocier un accord ambitieux...
    Alors, où en sommes-nous avec les trois autres?
    Les négociations sont au point mort.
    D'accord. Est-ce que les trois autres ont conclu des accords de libre-échange avec les États-Unis ou l'Union européenne?
    Oui. Avec les États-Unis et l'Union européenne.
    Se sont-ils dit qu'il n'était pas important d'avoir d'échanges commerciaux avec le Canada? Quelle serait leur règle de conduite? Pourquoi n'avons-nous pas insisté?
    Pour conclure un accord commercial avec un pays qui, particulièrement, a déjà conclu un tel accord avec, disons, les États-Unis et l'Union européenne, comme c'est le cas ici, nous cherchons à obtenir, pour les sociétés canadiennes, des conditions leur permettant d'être sur un pied d'égalité avec leurs homologues américaines et européennes. Si le pays ne veut pas négocier ce genre d'accord avec nous, nous ne pouvons pas conclure un accord qui défavorise les exportateurs canadiens.
    Au Guatemala, on bafoue les droits de la personne, et il s'y trouve des compagnies canadiennes. Je ne comprends pas encore pourquoi nous ne chercherions pas à conclure un accord de libre-échange avec le Guatemala?
    C'était, franchement, ce que le Canada était disposé à faire. À l'époque où nous négociions activement avec ce pays, son gouvernement ne voulait simplement pas s'engager au niveau nécessaire pour conclure un accord commercial.
    Est-ce que le financement de l'ACDI suit ou précède...? Est-ce un facteur pris en compte dans la négociation d'un accord de libre-échange?
    Permettez-moi de revenir en arrière et de parler du Honduras. Comme j'ai dit, c'est l'un des 20 pays prioritaires pour la coopération canadienne pour le développement, et cela n'a aucun rapport avec des considérations d'ordre commercial.

  (1130)  

    En ce qui concerne les autres accords — par exemple les accords en matière de travail — est-ce un critère pour le libre-échange? Comment est-ce que ça fonctionne au ministère? Est-ce que tout se négocie en même temps ou bien est-ce d'abord les tarifs, puis l'environnement, puis le travail? Dans quel ordre cela se fait-il?
    Nous négocions simultanément les 23 et quelques chapitres de l'accord de libre-échange et les accords parallèles sur le travail et l'environnement. L'exercice mobilise vraiment tout le gouvernement. Il exige la participation d'une demi-douzaine de ministères, notamment Emploi et Développement social Canada et Environnement Canada.
    Notre objectif est de conclure l'ensemble des accords en même temps, ce que nous avons fait avec le Honduras et, avant, avec le Panama, le Pérou, la Colombie, etc. Nous utilisons effectivement ce modèle, auquel sont habitués les pays de l'Amérique. C'est l'usage dans notre hémisphère.
    Si vous entamiez des négociations sur le libre-échange, ce serait à condition qu'elles englobent le travail et l'environnement?
    Oui.
    D'accord, deux minutes de plus...?
    Non, il vous reste 20 secondes, mais profitez-en.
    L'une de vos dernières déclarations concernait la façon dont nous pouvons contribuer à la réduction de la pauvreté. Comment, d'après vous, pouvons-nous y contribuer dans un pays comme le Honduras? Je comprends, quand on passe par l'ACDI. Mais, par le libre-échange, comment cela arrivera-t-il?
    Je pense que la réponse se trouve dans tous les éléments que j'ai énumérés en réponse à une question antérieure d'un autre membre du comité. Les programmes de l'ACDI aident à soulager la pauvreté, à assurer une meilleure santé et une meilleure éducation aux Honduriens. C'est l'accord de libre-échange qui offrira plus de possibilités économiques...
    Avez-vous des points de comparaison?
    Nous avons plus de programmes qui favorisent la sécurité et la justice aussi, je dirais. Tous ces programmes s'appuient mutuellement.
    Les accords prévoient-ils des points de comparaison?
    J'autorise une réponse vraiment rapide. On étire l'élastique.
    Je ne suis pas sûr de comprendre.
    Y a-t-il des points de comparaison qui montrent que, d'accord, nous voulons...
    C'est terminé. Ça pourrait s'étirer indéfiniment, mais ça ne passera pas.
    Monsieur Cannan, vous avez la parole. Sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci, monsieur MacKay et merci à votre équipe. Nous vous sommes reconnaissants d'être ici et de nous communiquer des connaissances acquises directement pour éclairer le comité sur cet important accord de libre-échange avec le Honduras. Je sais que nous discutons en présence de son Excellence Sofia Cerrato, l'ambassadrice du Honduras au Canada, et de son équipe.
    Ces quelques dernières années, nous avons collaboré étroitement avec le bureau du Honduras pour nous assurer que l'accord ne profitera pas seulement à nos sociétés canadiennes, mais, aussi, qu'il se trouve ici des Canadiens compatissants qui examinent la responsabilité des entreprises canadiennes et qui implantent au Honduras ces comportements de responsabilité sociale des entreprises.
    Dans votre déclaration préliminaire, monsieur MacKay, vous avez dit qu'une disposition comprenait un article sur la responsabilité sociale des entreprises qui reconnaît que les deux gouvernements encouragent leurs entreprises respectives présentes à l'étranger à respecter les normes reconnues internationalement sur la conduite responsable des affaires et s'attendent à ce qu'elles le fassent.
    Nous croyons qu'il est important d'uniformiser les règles du jeu pour permettre la concurrence avec l'Union européenne et les États-Unis. Pourriez-vous dire au comité ce que le Canada fait pour s'assurer que les entreprises canadiennes se conduisent de manière responsable au Honduras?
    Je commencerai par vous donner un exemple très pratique qui remonte à l'époque où j'étais là-bas chef de mission. Nous avions organisé un séminaire d'une journée à San Pedro Sula, la capitale industrielle du Honduras. Il se trouve que c'est là aussi que Gildan s'est établi.
    Nous avons invité des représentants de sociétés canadiennes et d'autres compagnies, de la société civile et du gouvernement hondurien à assister au séminaire et à discuter de ce qu'est la responsabilité sociale des entreprises, à examiner les lignes directrices internationales sur la question et à déterminer ce dont le Honduras a besoin pour se doter de meilleurs programmes de responsabilité sociale des entreprises. Ce n'est qu'un exemple pratique du travail entrepris par l'ambassade canadienne pour rejoindre les intéressés avec l'appui de l'administration centrale.
    Je sais qu'un séminaire semblable a été organisé par mon prédécesseur, un an ou un an et demi à peine auparavant. Je crois que, depuis, d'autres ont aussi été organisés. La question de la responsabilité sociale des entreprises est donc perçue comme l'une des activités prioritaires de l'ambassade au Honduras, et ce travail se poursuit.
    Merci.
    J'ai eu l'honneur d'être l'un des membres du comité à se rendre au Pérou, la semaine dernière. Un voyage en Colombie, au Panama et, enfin, au Pérou pour constater directement les réalisations de nos fantastiques travailleurs canadiens sur le terrain et le beau travail des fonctionnaires de nos ministères est toujours instructif.
    Un ancien membre de votre personnel, Camille, qui était avec vous au Honduras et est maintenant au Pérou... nous avons donc eu la chance de parler un peu de certaines initiatives poursuivies pendant plusieurs années.
    Pourriez-vous nous en dire un peu plus sur le programme visant à doter le pays d'une capacité de lutte contre la criminalité et ce que le ministère, auparavant des Affaires étrangères et du Commerce international, et maintenant des Affaires étrangères, du Commerce et du Développement, fait, avec la police et le bureau du procureur général du Honduras pour assurer la sécurité de tous les Honduriens?

  (1135)  

    Monsieur le président, je confie à mon collègue M. Normandin, qui était récemment au Honduras, et qui s'occupe maintenant de ces questions, le soin de répondre à ma place.
    Comme nous savons, la justice, au Honduras, doit relever plusieurs défis, et une grande partie du travail du Canada consiste à la renforcer.
    Nous avons mis sur pied un certain nombre de projets de formation pour les représentants de la justice, des juges aux responsables de l'administration pénitentiaire en passant par les procureurs et la police, et ainsi de suite, de manière à leur donner plus de moyens pour combattre efficacement la criminalité et l'insécurité.
    Ce faisant, certaines de ces initiatives, alors que nous renforçons la capacité des institutions locales, peuvent aussi avoir un effet positif, grâce à une meilleure protection des droits de la personne, parce que les problèmes de droits de la personne soulevés au Honduras profitent de l'extrême faiblesse des institutions, notamment de la justice, et d'un climat d'impunité. En renforçant les institutions locales, nous n'améliorons pas seulement nos moyens de combattre le crime, mais également ceux de protéger les droits de la personne.
    On a donné beaucoup de formation aux représentants de la justice. Nous avons aussi fourni de l'équipement spécial et de la formation sur la conduite des enquêtes aux responsables de la justice criminelle.
    Monsieur le président, voilà les types d'activités qui ont été conduites à une échelle assez grande.
    Merci.
    Une dernière question. Nous, les Canadiens, nous avons essentiellement le choix. Nous pouvons isoler les Honduriens, les abandonner à leur sort et entendre parler d'eux au bulletin de nouvelles, quand il sera question de guerre civile et d'anarchie dans ce pays.
    Un de mes électeurs s'est fiancé là-bas, dans le temps de Noël. Il adore le pays, il veut y vivre et il veut y apporter son aide.
    Pouvez-vous en dire un peu plus sur les raisons pour lesquelles nous avons choisi le Honduras et quels sont les avantages, du point de vue du Canada, de votre point de vue, de cet accord commercial par rapport à l'isolement du Honduras?
    Je crois l'avoir déjà dit, mais nous avons eu une discussion productive au comité ce matin sur les problèmes auxquels le Honduras est confronté — la pauvreté, la violence… Le trafic de stupéfiants est une énorme préoccupation dans la région, notamment au Honduras. Tous ces obstacles menacent la prospérité, la sécurité et la bonne gouvernance du pays, soit les trois piliers de la Stratégie du Canada pour les Amériques — la prospérité, la sécurité et la gouvernance, sans oublier la démocratie.
    Nous avons le choix en matière de politique étrangère et de politique commerciale, entre autres. Nous pouvons prendre un pays comme le Honduras, avec tous ses problèmes, et dire aux dirigeants: « Vous n'en faites pas assez. Vous devez en faire davantage, après quoi nous pourrons travailler avec vous. » Nous pouvons aussi suivre la politique du gouvernement canadien, soit amorcer le dialogue avec le Honduras, et dire: « Nous sommes conscients que vous avez besoin d'aide sur tous ces fronts, alors, nous allons vous aider. »
    C'est dans cette optique que les programmes de coopération du développement du Canada conviennent à la situation au Honduras. Nous travaillons étroitement avec les autorités du pays à la création de programmes dans les secteurs de la sécurité et de la justice et à la mise sur pied d'un système juridique qui, un jour, permettra de changer cette culture d'impunité à laquelle mon collègue a fait référence. Grâce, en partie, à certains programmes de l'ACDI, nous travaillons avec elles à la prospérité du pays et apprenons aux cultivateurs de café et de cacao comment pénétrer les marchés internationaux. Nous sommes également à négocier avec le Honduras un accord de libre-échange qui permettra de libéraliser le commerce et l'investissement, qui fournira des règles adéquates et qui ouvrira la porte à plus de possibilités économiques, tant pour les Canadiens que pour les Honduriens. Idéalement, cet accord devrait être conclu prochainement.
    Merci beaucoup.
    Nos prochains intervenants seront M. Davies et Mme Liu, je crois.
    Si je ne m'abuse, vous allez partager votre temps de parole.
    Merci, monsieur le président.
    Le MAECI s'appuie-t-il sur des critères pour évaluer la situation d'un pays en matière de démocratie et de droits de la personne avant de décider si le Canada devrait lui accorder des avantages de commerce préférentiels?
    Autrement dit, existe-t-il un pays avec lequel le ministère ou le gouvernement refuserait de signer un accord commercial?

  (1140)  

    Ça revient à un point que j'ai souligné un peu plus tôt.
    Le MAECI ne signe pas d'accord commercial. C'est le gouvernement du Canada, après avoir reçu l'approbation du Parlement, qui met en oeuvre des accords commerciaux — je veux simplement être clair sur le rôle de la fonction publique par rapport à celui du gouvernement; c'est ce dernier qui prend ce genre de décision. Vous faites tous partie du processus.
    Donc, vous faites ce que le gouvernement vous dit de faire. Vous négociez avec le pays que vous indique le gouvernement. C'est ainsi que fonctionne le MAECI?
    Le gouvernement du jour fixe les priorités en matière de politique étrangère et commerciale…
    Je vous demande si le gouvernement s'appuie sur des critères pour évaluer la situation d'un pays en matière de démocratie ou de droits de la personne avant de négocier avec lui un accord de libre-échange. Encore une fois, y a-t-il un pays avec lequel…?
    Existe-t-il des critères? Le MAECI respecte-t-il certains critères à cet égard?
    Apparemment pas.
    Il n'y a aucun diagramme d'acheminement au ministère…
    C'est peut-être une question injuste. Vous posez à notre bureaucratie ce qui me paraît être une question politique.
    Allez-y.
    Je comprends.
    Je vais vous expliquer pourquoi je pose la question. Nous n'entretenons pas de dialogue avec la Corée du Nord, ni avec l'Iran — d'ailleurs, nous leur imposons des embargos —, ni avec le gouvernement Yanukovych en Ukraine, car ces pays ne respectent pas certaines normes internationales, pour diverses raisons. Je ne les compare pas. Lorsque des pays ne se comportent pas de manière civilisée, qu'ils n'affichent pas un comportement de base auquel nous nous attendons, habituellement, nous ne leur accordons pas d'avantages de commerce préférentiels.
    Contrairement à la caractérisation qu'a faite M. O’Toole des renseignements que j'ai fournis, les qualifiant de faits recueillis sur Google, la liste des faits soulignés, une liste longue comme le bras et provenant de sources fiables de toutes sortes, la situation en matière de démocratie et de droits de la personne au Honduras est simplement épouvantable. Et ce n'est pas uniquement dans la société civile; le gouvernement lui-même participe à ces violations des droits démocratiques et de la personne. Donc, je demande simplement…
    Certains diront que nous devrions nouer le dialogue avec tous les pays du monde, car c'est la façon d'améliorer les choses. Mais, ce n'est pas ainsi que nous menons notre politique étrangère. Nous ne prétendons pas qu'il faudrait négocier un accord commercial avec l'Iran, car ce n'est qu'en nouant le dialogue avec ce pays que les choses vont s'améliorer.
    Alors, qu'en est-il du Honduras? Avez-vous eu ce genre de réflexion ou de discussions?
    Il y a une différence qualitative entre certains États qui exercent quotidiennement la répression des droits de la personne, notamment — vous en avez nommé quelques-uns —, et le Honduras.
    Selon ce que j'ai vu sur place, les enjeux liés aux droits de la personne et les problèmes liés à la violence auxquels vous avez fait référence ne sont pas soutenus par l'État ou dirigés par le gouvernement avec l'ordre « d'arrêter tous les opposants politiques ». Ce n'est pas la situation au Honduras.
    Le pays est aux prises avec des problèmes différents. La violence est généralisée et alimentée, notamment, par le trafic de stupéfiants qui est presque hors de contrôle dans la région. Il s'agit d'une source de préoccupation importante. C'est pour cette raison que le Canada et ses partenaires d'optique commune, dont les États-Unis, l'Union européenne, le Japon, la Banque interaméricaine de développement et la Banque mondiale, les principaux donateurs au Honduras, collaborent avec le gouvernement hondurien afin d'éliminer ces problèmes. Notre accord de libre-échange, tout comme celui des États-Unis et de l'Union européenne, fait partie de ces efforts.
    Merci.
    Je vais laisser la parole à Mme Liu.
    Merci beaucoup d'avoir accepté de venir nous livrer votre témoignage.
    Monsieur MacKay, vous dites que l'élimination des tarifs douaniers et la création de meilleures conditions pour l'investissement au Honduras sont les facteurs qui ont motivé la négociation de l'Accord de libre-échange entre le Canada et la République du Honduras. Toutefois, en analysant les rapports internes du MAECI, notamment celui publié en octobre 2013, j'ai été surprise d'apprendre que la majeure partie des marchandises importées et exportées entre le Canada et le Honduras sont assujetties à des tarifs douaniers très faibles, soit moins de 5 %. Par ailleurs, les statistiques sur les investissements directs canadiens au Honduras ne sont pas accessibles au public.
    Nous savons que le Honduras, sur le plan de la valeur des exportations, pointe au 104e rang des marchés d'exportation pour le Canada. Selon des rapports internes du MAECI, les avantages que tirera le Canada de cet accord de libre-échange sont marginaux. En tant que parlementaire, j'ai beaucoup de difficultés à comprendre l'urgence et la nécessité de négocier un accord de libre-échange avec un pays comme le Honduras, notamment si l'on tient compte des violations endémiques des droits de la personne qui y sont commises.
    Mais, j'aimerais parler du secteur agricole au Honduras. Les bananes sont la deuxième marchandise en importance importée au Canada en provenance de ce pays. Selon Festagro, une fédération de syndicats agro-industriels, 31 syndicalistes et 52 travailleurs ruraux ont été tués depuis 2009. Selon certains rapports, des syndicalistes bien en vue, comme José Maria Martinez, de Festagro, continuent de recevoir des menaces de mort.
    Le MAECI est-il au courant de ces violations des droits de la personne? Que sait le ministère sur ces violations des droits de la personne et les menaces faites à l'endroit des syndicalistes?

  (1145)  

    J'aimerais revenir sur la première partie de votre question concernant la taille du marché hondurien et son importance. Nous sommes conscients que le Honduras est loin d'être le principal partenaire commercial du Canada. Comme je l'ai souligné dans mon exposé, notre commerce bilatéral ne s'élève qu'à 280 millions de dollars, ce qui se compare aux échanges commerciaux quotidiens avec les États-Unis. C'est donc très peu. Mais, 280 millions de dollars, c'est déjà cela. Pour les sociétés canadiennes qui cherchent à développer des possibilités dans ce marché, ce sont des revenus importants. Sans un accord avec le Honduras, nous serons désavantagés sur le plan commercial par rapport aux autres pays qui eux ont conclu un accord de libre-échange avec le Honduras. C'est pour cette raison…
    Est-ce vrai que le Canada accuse un déficit commercial avec le Honduras?
    Oui, mais l'accord commercial ne vise pas à combler ce déficit. Ce n'est pas l'objectif. L'objectif est de créer des conditions équitables.
    Au sujet des droits de la personne, notre ambassade au Honduras est bien au courant des violations des droits de la personne commises dans ce pays. Le taux de violence y est terriblement élevé. Vous avez parlé du meurtre de syndicalistes et de journalistes, notamment. J'ajouterai à cette liste des avocats, des comptables et des fonctionnaires. Je parie que le taux d'homicides est le plus élevé chez les jeunes, les hommes de 18 à 30 ans, sans emploi, qui participent au trafic de stupéfiants. Donc, notre ambassade et le ministère sont très au courant des enjeux en matière des droits de la personne auxquels le Honduras est confronté.
    Merci beaucoup.
    Monsieur Hoback, vous avez la parole.
    J'aimerais ajouter une chose, si vous me le permettez, monsieur le président.
    Oh.
    Nous travaillons à ces problèmes. Nous pouvons travailler avec le Honduras afin d'éliminer ces violations des droits de la personne, contrairement à certains des autres pays que vous avez mentionnés plus tôt. Nous pouvons discuter avec le gouvernement hondurien, et c'est ce que nous faisons. J'étais au Honduras il y a trois mois et j'ai soulevé la question des droits de la personne lors de mes réunions avec le ministre des Affaires étrangères. Nous pouvons participer à des projets en collaboration avec divers services gouvernementaux. Nous pouvons également appuyer la société civile, ce que nous faisons activement au Honduras.
    Toutes ces mesures sont possibles au Honduras, contrairement à certains des pays que vous avez mentionnés plus tôt. J'ai travaillé dans plusieurs pays à promouvoir activement les droits de la personne, et le Honduras est un de ceux où il est possible de travailler à l'élimination de ces problèmes.
    Très bien.
    Monsieur Hoback, vous avez la parole.
    Merci, monsieur le président.
    Merci, messieurs, d'avoir accepté notre invitation.
    Il est intéressant d'entendre les commentaires de mes collègues au sujet de cet accord et les raisons qu'ils avancent pour démontrer qu'il n'est pas bon. On dirait qu'ils ne veulent pas aider le Honduras. Selon moi, un des meilleurs programmes sociaux est un emploi. Maintenant, l'impact d'un emploi au Honduras peut se faire sentir de deux façons. Un emploi dans le secteur du trafic de stupéfiants entraîne la violence, les meurtres, les violations des droits de la personne et d'autres types d'activités illégales. Mais, on peut aussi offrir aux citoyens des emplois bien rémunérés et honorables.
    Monsieur MacKay, vous avez parlé de l'industrie du cacao. Pourriez-vous nous donner plus de détails sur les possibilités qui découleront de cet accord dans ce secteur et l'impact que cela aurait sur les Honduriens?
    Lors de ma visite au Honduras, on avait entrepris un projet de l'ACDI — et, si je ne m'abuse, il se poursuit toujours — pour aider les cultivateurs de cacao de la région. Il existe déjà une production locale. Nous avons travaillé en étroite collaboration avec des experts de la Colombie dans ce genre de production agricole. Nous avons sollicité leur aide pour prêter main-forte aux cultivateurs honduriens situés sur la côte. Un des principaux objectifs de ce programme, c'est d'offrir aux propriétaires des terres et aux travailleurs défavorisés d'autres possibilités économiques et d'emploi dans ces régions côtières sous-développées.
    S'ils ne peuvent pas profiter de telles possibilités économiques et s'ils ne peuvent pas gagner leur vie grâce à ce genre d'activité économique légitime, ces gens se tourneront vers des activités économiques illégales facilement accessibles, le genre d'activités qui mènent directement à la violence et aux violations des droits de la personne dont nous avons parlé. Je crois que ces programmes sont importants.

  (1150)  

    Vous avez parlé de la Colombie. J'ai visité la ville de Medellin, une ville semblable à Chicago, à bien des égards. Au début des années 1980, Medellin était perçue comme la capitale de la drogue. Il s'y produisait des choses horribles liées au commerce de stupéfiants. Aujourd'hui, la situation à Medellin et en Colombie est totalement différente. Croyez-vous que ce genre de changement soit possible au Honduras en raison de l'activité économique qui pourrait découler d'un tel accord de libre-échange?
    Je crois que c'est l'objectif du gouvernement hondurien et des pays donateurs. Encore une fois, comme je l'ai mentionné plus tôt, je ne parle pas ici uniquement du Canada, mais aussi des États-Unis, de l'Union européenne, de la Banque mondiale et de la Banque interaméricaine de développement. Tous ces donateurs savent très bien que le Honduras doit surmonter les mêmes obstacles que la Colombie a dû surmonter il y a 15 ou 20 ans. Je crois que tous espèrent qu'avec le temps  — et il faudra de nombreuses années —, la situation changera au Honduras et on parlera d'une réussite comparable à celle de la Colombie.
    Il reste encore du travail à faire en Colombie, mais la situation a beaucoup changé. Idéalement, le Honduras connaîtra le même succès.
    C'est intéressant, car, historiquement, le Canada a toujours aidé les gens dans le besoin, et ce, partout dans le monde. Nous travaillons dans des régions qui ne sont pas nécessairement accueillantes, et cinq ou 10 ans plus tard, les progrès réalisés portent l'empreinte du Canada. On peut voir ces progrès 20, 30, 40 même 50 ans plus tard.
    Croyez-vous que cela serait possible dans ce cas-ci?
    Je l'espère et je me croise les doigts. Je crois que c'est possible. Il y a 15 ou 20 ans, la Colombie était dans une situation très désespérée. Les choses vont beaucoup mieux aujourd'hui. Le Honduras a tout ce qu'il faut pour obtenir le même genre de résultats.
    Parlons du secteur agricole. Nous avons accès à des produits du boeuf provenant de l'Alberta. Soit dit en passant, la Saskatchewan produit elle aussi du très bon boeuf. Je voulais simplement le signaler. Il faudrait vraiment promouvoir le boeuf de la Saskatchewan.
    Le président: Vos propos sont presque irrecevables.
    Des voix: Oh, oh!
    M. Randy Hoback: Dans ce scénario, en tout cas, j'ai le président comme opposant.
    Comment, selon vous, l'élimination du tarif se fera-t-elle pour les produits agricoles? Quel sera l'impact de cette mesure au Canada et au Honduras?
    Puisque vous avez mentionné le boeuf, je dois dire que la question des industries bovine et porcine était très délicate pour les Honduriens étant donné que le pays est lui-même un producteur de boeuf et de porc. C'était un des objets de négociation sur lequel il a été le plus difficile de s'entendre. Dans le cas du boeuf, et plus particulièrement du boeuf de première qualité, puisque c'est normalement ce que nous exporterons dans la région, il a finalement été convenu qu'au moment de l'entrée en vigueur de l'accord, un quota de 500 tonnes s'appliquera au boeuf canadien de première qualité exporté au pays en franchise de droits. Ce chiffre sera majoré d'environ 25 tonnes par année pendant 15 ans. Les exportations de boeuf canadien au Honduras en franchise de droits finiront par être illimitées.
    Le porc sera probablement un produit d'exportation encore plus important pour le Canada. Les quotas seront plus élevés d'emblée, avec 1 600 tonnes d'exportations permises dès l'entrée en vigueur de l'accord. Ce chiffre augmentera d'environ 100 tonnes par année. Pour permettre aux producteurs honduriens de boeuf et de porc de s'adapter, les exportations canadiennes de porc en franchise de droits seront illimitées après 15 ans aussi. C'est une excellente nouvelle.
    Comme je l'ai dit dans mon exposé, les tarifs douaniers de bien d'autres produits agricoles, y compris l'huile de lin de la Saskatchewan, diminueront soit sur-le-champ, soit après un certain temps dans les secteurs plus délicats aux yeux des Honduriens.
    Je devrais préciser que l'accord commercial est asymétrique, puisque nous reconnaissons que le Honduras est confronté à des défis en matière de développement que le Canada n'a pas à relever. Nous acceptons donc de laisser tomber rapidement un plus grand nombre de tarifs douaniers, alors que les Honduriens auront plus de temps pour s'adapter.
    Le temps est écoulé.
    Je vous remercie d'avoir donné le coup d'envoi du projet de loi concernant cet accord de libre-échange avec la République du Honduras qui, nous l'espérons, sera adopté.
    Cameron MacKay, vous qui êtes directeur général des négociations commerciales, je vous remercie de votre témoignage et de ce qu'il représente pour nous.
    Henri-Paul, vous êtes maintenant directeur général de l'Amérique latine et des Antilles. Nous nous sommes rencontrés pour la première fois à Haïti, où vous étiez ambassadeur, et je tiens à vous remercier de votre travail là-bas.

  (1155)  

[Français]

    Merci.

[Traduction]

    Je remercie donc votre équipe et tous ceux qui étaient là pour vous appuyer.
    Je vais suspendre la séance sans plus tarder pendant que nous nous préparons à recevoir le prochain groupe d'experts.

    


    

  (1200)  

    Reprenons.
    Pour la prochaine heure, nous écouterons l'exposé de deux témoins, après quoi nous passerons aux questions et aux réponses. Accueillons Bertha Oliva, du Comité des familles de détenus et des disparus du Honduras.
    La parole est à vous, madame Oliva.
    Merci infiniment de me donner la parole 10 minutes. Je vais tâcher d'en faire le meilleur usage possible. Je vous parlerai de mon organisation, le COFADEH, et de ce qui nous inquiète en tant que défenseurs des droits de la personne.
    Permettez-moi de mettre les choses en contexte. La situation au Honduras est très inquiétante aux yeux du COFADEH. Les droits de la personne se sont nettement détériorés, et c'est pourquoi nous sommes ici. Le fait que vous nous écoutiez nous envoie le message prometteur que les droits de la personne ne sont pas que des mots sur papier; ils doivent se traduire dans la réalité. De plus, vous devez absolument savoir que la situation s'est détériorée depuis le coup d'État de 2009. Je suis persuadée que vous en êtes déjà conscients, mais n'oubliez pas que la démocratie ne peut pas fonctionner sans un profond respect des droits de la personne.
    Voilà pourquoi j'aimerais vous parler de ce que nous faisons et des raisons de notre inquiétude. Nous avons été occupés, et nous sommes bien sûr de plus en plus alarmés par les violations de plus en plus graves des droits de la personne.
    Le Honduras a des institutions nationales, mais elles ne fonctionnent pas vraiment. Il n'y a aucun cadre institutionnel. Je vous en informe en guise d'introduction puisque les investisseurs pourraient se demander comment il est possible d'investir dans un pays dont les institutions sont aussi inefficaces. Comment le rendement du capital investi peut-il être garanti?
    Un autre élément est essentiel à mes yeux lorsqu'on parle d'un pays comme le Honduras et de personnes comme vous: comment pouvez-vous croire que la situation en matière de droits de la personne n'est pas la priorité? Il faut y accorder la priorité. Voilà ce que nous avons à dire.
    Nos données sur les violations des droits de la personne nous donnent la chair de poule. Ces derniers temps — c'est-à-dire l'an dernier —, plus de 600 femmes ont été assassinées, meurtres qui ne sont pas uniquement attribuables à leur sexe, mais plutôt au fait que ces femmes se consacrent entièrement à défendre les droits dont on les a privées. Plus de 30 journalistes ont été assassinés. Ce n'était pas ainsi dans notre pays; nous n'étions pas touchés par ce phénomène auparavant. Voilà qui indique clairement une violation des droits à la liberté d'expression et à l'information.
    Plus de 400 jeunes ont été tués récemment, et plus de 120 paysans aussi dans la région de Bajo Aguan seulement. L'État et ses agents n'ont pas la moindre volonté de faire enquête sur ces meurtres. Lorsqu'aucune enquête sérieuse, indépendante et responsable n'est menée dans un pays, c'est l'impunité qui règne.
    Nous ne sommes pas ici pour parler du climat d'insécurité et de violence au pays, puisque le Honduras est un des pays les plus violents au monde, mais plutôt des violations graves des droits de la personne qui sont attribuables à la violence généralisée. La situation est encore pire que ne le laisse entendre l'information que je vous ai présentée. Des efforts sont déployés, mais ceux qui dénoncent la situation et qui essaient de changer les choses se heurtent à une culture de la peur.

  (1205)  

    Ceux qui défendent les droits de la personne se trouvent dans une impasse. Dans les médias, on dit que ces personnes ont un effet déstabilisant. Or, nous aidons les victimes et le peuple. Nous exprimons nos inquiétudes et essayons de renforcer la primauté du droit au Honduras.
    Pour l'instant, la primauté du droit est reconnue officiellement, mais pas dans les faits. Cette situation nous inquiète, car le respect des droits de la personne s'est nettement détérioré. Mais ce n'est pas tout. Avec le travail que nous réalisons depuis des années, nous pensions avoir mis un terme à l'intolérance politique et à la militarisation.
    N'oublions pas la pauvreté. Lorsque la population vit dans la pauvreté, la militarisation ne règle rien. Or, les interventions militaires se multiplient partout au pays. C'est très grave, et nous tenons à vous en faire part. Nous sommes inquiets puisque nous voulons renforcer l'État. Nous voulons permettre au peuple hondurien de vivre dans un pays qui respecte pleinement les droits de la personne, mais nous n'y sommes pas encore arrivés. Ce n'est pas ce dont nous sommes témoins. Nous constatons plutôt une consolidation du pouvoir par le parti en place, ce qui empêche l'indépendance de l'État du Honduras. La consolidation des pouvoirs est nécessairement une menace pour les droits de la personne, et c'est ce qui se passe à l'heure actuelle. C'est saisissant, et je tenais à vous en faire part.
    Ceux qui souhaitent investir au Honduras doivent savoir qu'il est impossible de garantir les investissements dans le contexte actuel. Les conditions ne sont pas réunies non plus pour augmenter la force du peuple — bien au contraire. Les collectivités tentent d'intensifier le plus possible leurs pressions puisqu'elles ne sont pas consultées, ce qui donne lieu à des violations des droits de la personne.
    J'aimerais aussi vous parler des déplacements de gens d'une collectivité à l'autre en raison du climat de terreur qui règne. Depuis les élections, certains de ceux qui s'opposent aux politiques ont aussi été victimes de meurtre. Nous n'inventons rien. C'est vraiment ce qui se passe.
    J'aimerais aussi attirer votre attention sur l'exode vers d'autres pays, non pas que les habitants souhaitent quitter leur pays, mais parce qu'ils craignent d'être assassinés. L'exode des Honduriens se poursuit, soit pour des raisons politiques ou parce qu'ils s'opposent à ce qui se passe, car ceux qui parlent sont persécutés, menacés et accueillis avec hostilité.
    La consolidation des pouvoirs de l'État donne actuellement lieu à un autre phénomène inquiétant, à savoir la persécution de la plupart des gens au moyen de mécanismes légaux. Il leur est donc impossible d'exercer leur droit de contester ce qui se passe au Honduras.
    J'ignore si les 10 minutes sont écoulées, mais je vais m'arrêter ici. Si vous avez des questions, je serai ravie d'y répondre.

  (1210)  

    Merci infiniment de votre témoignage.
    C'était très intéressant. Je suis persuadé qu'il donnera lieu à des échanges constructifs lors de la période de questions.
    Mais avant, nous allons écouter le témoignage de Peter, des Vêtements de sport Gildan.
    Je peux essayer de prononcer votre nom de famille, mais je vous invite à présenter votre exposé.
    Permettez-moi de commencer en exprimant ma profonde gratitude pour l'invitation à comparaître aujourd'hui. Nous avons énormément de respect pour les travaux de votre comité. Nous nous réjouissons plus particulièrement de pouvoir contribuer à votre étude de la Loi sur la croissance économique et la prospérité — Canada-Honduras.

[Français]

     Je m'appelle Peter Iliopoulos et je suis vice-président principal, Affaires publiques et corporatives, chez Gildan.

[Traduction]

    J'aimerais commencer par vous donner un bref aperçu des activités de Gildan. Fondée en 1984 par la famille Chamandy, notre société dont le siège social se trouve à Montréal, au Québec, est maintenant cotée à la Bourse de Toronto et au New York Stock Exchange.
    La société compte plus de 34 000 employés dans le monde et distribue ses produits dans plus de 30 pays. Nous sommes fiers de pouvoir livrer un produit de grande qualité à nos clients en misant sur nos pratiques sociales et environnementales de calibre et sur notre gouvernance d'entreprise canadienne.
    Nous sommes un fabricant de vêtements verticalement intégré, et notre principal centre manufacturier est situé au Honduras. Du côté de la fabrication, nous avons des installations au Honduras, en République dominicaine et au Nicaragua. Nous avons aussi récemment fait l'acquisition d'une petite usine de fabrication verticalement intégrée au Bangladesh.
    Dans le cadre de notre intégration verticale, nous possédons également des installations de filature aux États-Unis. Nous distribuons nos produits dans deux marchés principaux, à savoir les grossistes du Canada, des États-Unis et d'autres marchés étrangers, et, depuis peu, les détaillants des États-Unis. Nous vendons des tee-shirts, des chandails de sport et des vêtements en molleton dans le réseau de distribution en gros. Nous avons également élargi notre gamme de produits pour y ajouter des chaussettes et des sous-vêtements afin d'offrir une ligne plus complète au réseau de vente au détail.
    En ce qui a trait à nos activités au Honduras, elles ont commencé en 2001 et représentent le plus gros volet de notre production totale. Nous avons quatre installations de fabrication de textiles, deux installations intégrées de fabrication de chaussettes, quatre installations de couture et une installation de sérigraphie, lesquelles sont chargées de produire nos vêtements de sport, articles chaussants et sous-vêtements. Au total, cela représente plus de 700 millions de dollars de dépenses en immobilisations. Nous avons plus de 24 000 employés dans le pays, faisant de nous le plus important employeur privé de la région.
    Nous avons choisi le Honduras en raison de son emplacement stratégique pour servir notre principal marché aux États-Unis. Notre expérience nous a montré qu'il y avait une main-d'oeuvre très qualifiée là-bas, ce qui permet la mise en place d'une équipe de gestion locale et décentralisée robuste pour gérer nos activités. Nous pouvons aussi tirer parti de l'accord de libre-échange CAFTA-DR, qui donne au Honduras et à la République dominicaine un accès au marché américain en franchise de droits.
    Les négociations de l'Accord de libre-échange entre le Canada et la République du Honduras ont pris fin à l'été 2011, et la signature a eu lieu en novembre 2013. Nous attendons maintenant avec impatience la ratification de l'accord qui, lorsqu'il sera en vigueur, nous permettra d'alimenter efficacement le marché canadien de la vente au détail, surtout pour faire concurrence aux importations asiatiques.
    L'engagement véritable de Gildan pour l'intendance, ou Genuine Stewardship, est notre programme de responsabilité sociale d'entreprise, ou RSE, qui n'a cessé d'évoluer pendant plus de 10 ans et qui est basé sur quatre piliers: les gens, l'environnement, la communauté et le produit. La RSE représente un élément clé de nos valeurs et de notre stratégie d'entreprise globale, et nous pensons que nos pratiques nous placent en tête de l'industrie. Notre programme de conformité sociale inclut un code de conduite et d'éthique strict basé sur des normes reconnues à l'échelle internationale et un processus de vérification très rigoureux, notamment au moyen de vérifications régulières par un tiers indépendant dans chacune de nos installations.
    En 2007, Gildan était le premier fabricant de vêtements verticalement intégré à être accrédité par la Fair Labor Association, qui a servi de tremplin à notre programme aujourd'hui complet et solide de RSE. En outre, chacune de nos installations de couture a été certifiée par le programme Worldwide Responsible Accredited Production.
    Depuis 2009, Gildan est reconnue annuellement par Jantzi-Macleans comme étant l'une des 50 meilleures entreprises citoyennes au Canada. En 2013, Gildan a été inscrite dans le Dow Jones Sustainability World Index; elle est une des deux sociétés nord-américaines et la seule société canadienne du secteur du textile, du vêtement et des biens de luxe à faire partie de l'indice. L'examen annuel de l'indice est basé sur une analyse rigoureuse du rendement de l'entreprise et des volets économique, environnemental et social, en tenant compte de questions comme les normes de la chaîne d'approvisionnement et les pratiques de travail, les systèmes de gestion de l'environnement, la gouvernance d'entreprise et la gestion du risque.
    Pendant six années consécutives, Gildan a justement reçu le sceau de la fondation pour la RSE au Honduras, qui reconnaît nos normes rigoureuses et notre ferme engagement au pays en matière de RSE.

  (1215)  

    Les conditions de travail des employés de nos usines partout dans le monde comprennent des salaires concurrentiels largement au-dessus du salaire minimum dans l'industrie; l'accès 24 heures sur 24 à des cliniques en milieu de travail; une équipe de 22 docteurs et de 37 infirmières; le transport gratuit aller-retour du logement au travail; les repas subventionnés. Nous sommes aussi en train de mettre en oeuvre le meilleur programme d'ergonomie de sa catégorie en collaboration avec l'Ergonomics Center de la Caroline du Nord. La mise en oeuvre devrait prendre fin au Honduras d'ici la fin de 2014, puis le programme s'appliquera à toutes nos usines. Dernièrement, nous avons inauguré trois écoles de santé du dos au Honduras, une première pour notre industrie dans ce pays.
    En général, les conditions de travail de nos employés, qui représentent notre principal actif et notre meilleur gage de succès, revêtent une importance capitale pour nous. Après près de 15 ans dans la région, nous avons pris nombre d'initiatives qui favorisent grandement le mieux-être de nos employés et des collectivités. Je vais vous donner quelques exemples.
    Depuis 2003, Gildan est partenaire du ministère de l'Éducation du Honduras et de l'Agence américaine de développement international pour offrir l'éducation primaire et secondaire dans les régions défavorisées du Honduras, dont 900 de nos employés ont aussi profité. En 2010, Gildan a facilité l'ouverture d'une pharmacie adjacente à nos cliniques en milieu de travail au Honduras, qui a fourni plus 57 000 médicaments prescrits par nos médecins seulement en 2013. En 2011, une des infirmières de nos cliniques en milieu de travail a élaboré un atelier pour toutes les employées enceintes, auquel près de 500 employées ont participé.
    Sur le plan environnemental, nous appliquons une politique, un code d'usages et un système de gestion stricts. Comme pour notre programme de conformité du travail, nous menons régulièrement des vérifications environnementales dans toutes nos usines. Nos systèmes de traitement biologique secondaire sont très efficients, tout comme nos centrales à la biomasse de production de vapeur qui réduisent considérablement nos émissions de gaz à effet de serre.
    Nous mettons l'accent sur les partenariats avec les collectivités où nous travaillons, sur l'éducation des jeunes et sur l'aide humanitaire. En 2005, nous avons dirigé la mise en oeuvre d'une école technique au Honduras pour toute l'industrie. Jusqu'ici, notre investissement de plus de 1,6 million de dollars a permis à 7 000 étudiants de décrocher un diplôme à cette école.
    Concernant la durabilité, tous nos produits sont certifiés à la norme OEKO-TEX Standard 100, qui garantit aux consommateurs que nos produits sont sécuritaires et ne contiennent aucun produit chimique ou matière dangereuse.
    Malheureusement, je ne peux que résumer nos pratiques de responsabilité sociale à cause du temps dont je dispose.
    Je tiens à souligner l'importance de l'accord de libre-échange Canada-Honduras pour Gildan et nos activités au Canada. Lorsque cet accord sera mis en oeuvre, notre entreprise canadienne sera plus concurrentielle ici au pays, surtout par rapport aux importations asiatiques dont certaines profitent déjà d'un accès en franchise de droits. Cet accord nous permettra aussi d'entrer sur le marché de détail au Canada, ce que nous n'avons pas réussi à faire jusqu'ici. Présentement, nos ventes au Canada ne représentent que 3 % de nos ventes consolidées.
    Notre entrée sur le marché de détail au Canada profitera aussi aux consommateurs canadiens, qui auront une option moins chère pour les vêtements, les articles chaussants et les sous-vêtements. Surtout, les Canadiens auront accès à nos produits à bas prix haut de gamme fabriqués selon les meilleures normes reconnues en matière de responsabilité sociale des entreprises et de valeurs canadiennes.
    En terminant, nous avons hâte que l'accord soit ratifié et mis en oeuvre. Nous attendons le libre-échange entre ces deux pays depuis plus de 10 ans. Nous espérons donc qu'il sera mis en oeuvre rapidement.
    Je vous remercie encore de l'invitation et je suis prêt à répondre à vos questions.
    Merci.

  (1220)  

    Merci beaucoup.
    Monsieur Davies.
    La parole est à vous.
    Merci, monsieur le président.
    Madame Oliva, bienvenue au comité. Je vois que vous étiez en lice pour le prix Nobel de la paix. Nous sommes honorés d'entendre votre témoignage au Parlement aujourd'hui.
    Madame Oliva, je pense que vous étiez ici lorsque nous avons entendu les fonctionnaires du ministère des Affaires étrangères, qui ont donné l'impression que le gouvernement du Honduras n'est pas responsable des violations des droits de la personne, des crimes et de la violence qui sévit au pays. Les coupables seraient plutôt la société civile ou les narcotrafiquants. Ces fonctionnaires ont même dit qu'ils peuvent en discuter avec le gouvernement du Honduras.
    J'aimerais connaître votre point de vue. L'État du Honduras est-il responsable des violations des droits de la personne ou de l'oppression politique au Honduras?
    Merci.
    Nous voulons être très clairs. Nous ne comprenons pas la pauvreté extrême qui accable notre pays. Peter parlait de tout ce qui va bien, mais un certain nombre de graves violations des droits de la personne sont commises. Nous y travaillons, parce que le législatif ne prend aucune mesure, au pays. Nous avons exprimé nos préoccupations à la Cour interaméricaine des droits de l'homme, concernant l'entreprise Gildan. Il nous paraît fondamental de savoir que les jeunes femmes constituent l'essentiel de la main-d'oeuvre. Il y a un manque de vision claire sur les conséquences que le travail de ces femmes entraîne sur leur santé. Nous voulons tirer la question au clair sur le plan juridique et en bonne et due forme.
    En réponse à votre question, nous ne pouvons pas nier que le Honduras est victime de narcotrafic et de violence généralisée. C'est pourquoi on dit que c'est le pays le plus violent. Cela dit, notre travail ne porte pas sur le crime organisé ou le narcotrafic, mais sur les violations des droits de la personne commises par les autorités du pays contre les dissidents politiques. Nous voulons être très clairs là-dessus.
    C'est difficile de travailler dans le secteur des droits de la personne au Honduras de nos jours, car le taux de criminalité excède nos capacités. Le nombre de morts et d'arrestations ainsi que la persécution et les accusations politiques dans le système de justice découragent la population à formuler des demandes.
    Une escouade suit un schéma bien établi pour tuer les gens, avec l'aval ou dans l'indifférence des agents d'État ou des organismes. Nous dénonçons à répétition les lieux clandestins où les gens sont emmenés et torturés, comme à la naissance du COFADEH. Avec de la chance, ces gens sont libérés, mais ils sont tués la plupart du temps.
    Oui, nous ne pouvons pas nier ce qui a été dit ici. Des activités sont liées au narcotrafic, mais ne pouvons pas tolérer les graves violations des droits de la personne à cause de l'ampleur du narcotrafic. Dans la collectivité d'Ahuas, deux femmes enceintes, un mineur et un homme d'environ 40 ans ont été tués. Cette attaque est importante, car quatre personnes sont mortes, mais quatre autres ont été blessées dont deux mineurs. Ces gens ne peuvent plus mener une vie épanouie, en raison des dommages causés par cette attaque.
    De graves violations des droits de la personne sont passées sous silence à cause du narcotrafic. Ces attaques visent les dissidents politiques.

  (1225)  

    Nous sommes ici pour vous demander de réfléchir à la ratification du traité, de faire des recherches, d'aller sur place et de rencontrer les divers groupes sociaux au Honduras. Ne parlez pas seulement à ceux qui appuient ce projet.
    Il faut intégrer et créer la stabilité démocratique au Honduras. Cet exercice ne se réalisera pas en quatre ans seulement, parce que de graves violations des droits de la personne sont commises.
    J'ai une question brève.
    Soyez très bref, car vous allez manquer de temps...
    On nous a parlé de la Commission de la vérité et de la réconciliation. Ses recommandations ont-elles été mises en oeuvre?
    Veuillez répondre très brièvement.
     La Commission de la vérité et de la réconciliation est une farce que soutenait aussi le gouvernement du Canada... Nous avons dû créer une autre Commission de la vérité, dont j'ai le rapport sous la main.
    Mais je vais donner une réponse tout aussi concrète que votre question. Les recommandations ne sont pas toutes mises en oeuvre, sinon il n'y aurait plus de violations des droits de la personne. Aucune politique d'État ne porte sur ces violations, malgré la recommandation de la Commission de la vérité et de la réconciliation. Aucun commissaire national indépendant aux droits de la personne ne représente les divers groupes sociaux.
    Monsieur O'Toole, vous avez sept minutes.

  (1230)  

    Merci, monsieur le président. Merci aux deux témoins aujourd'hui.
    Madame Oliva, merci de témoigner. Votre biographie indique que vous avez beaucoup travaillé dans ce secteur depuis des dizaines d'années.
     Vous avez aidé à trouver le groupe en 1981 avec d'autres gens dont des membres de la famille sont décédés ou disparus. Dans quel domaine votre mari enseignait-il à l'université, avant les années 1980? L'économie fonctionnait-elle mieux et permettait-elle aux gens d'étudier à l'université pour ensuite participer à l'économie? La vie était-elle différente à l'époque?
    C'est une de nos préoccupations. Nous sommes revenus aux horreurs commises à la naissance du COFADEH, qui lutte contre les violations des droits de la personne perpétrées par l'État. L'intolérance politique entraîne une présence militaire partout au pays et, par conséquent, des violations des droits de la personne.
    Nous avons commencé notre travail dans les années 1980, dans ce contexte d'intolérance et de persécution des dissidents politiques, qui ont entraîné la pratique des disparitions forcées. C'est bien sûr un crime contre l'humanité.
    Nous sommes revenus à la même situation. C'est pourquoi nous sommes ici et que nous sommes si préoccupés. On parle de démocratie, mais au fond, des attaques sont perpétrées contre les dissidents, qui veulent parler de ce qui se passe et apporter des améliorations. Nous voulons avancer des propositions, mais c'est impossible.
    Le COFADEH travaille depuis nombre d'années et a recueilli beaucoup de preuves sur le traitement réservé à la population et à ceux qui manifestent contre les mines et les usines de vêtements. Ces dernières années, notre comité a étudié les cas de plus de 600 femmes dont les droits sociaux et le droit d'aider ont été violés.
    Nous travaillons à toutes ces questions et nous en parlons ici pour que vous en sachiez plus et que vous ne soyez pas surpris si notre organisation présente une revendication. Nous soutenons aussi la population de la vallée de Siria.
    Madame, mon temps est limité. Si vous permettez, ma dernière question va mettre l'accent sur la question typique à laquelle nous sommes confrontés. Nous en avons déjà entendu parler durant la première heure.
    Le Canada a un choix à faire. Dans notre hémisphère, nous pouvons commercer avec les autres pays — et les aider à renforcer leurs capacités — ou choisir l'isolationnisme. Je ne vois pas comment ce dernier choix peut aider une seule personne au Honduras. N'est-il pas juste de dire que la participation positive au commerce, à la diplomatie et au renforcement des capacités permettra de régler un certain nombre de problèmes que votre groupe soulève?
    Je ne vois pas comment l'isolationnisme peut soutenir vos efforts. Qu'en pensez-vous, en général?
    Nous ne proposons pas et ne voulons pas que le Honduras soit isolé du Canada ou du reste du monde. Nous demandons aux gouvernements partout dans le monde et au gouvernement du Canada de surveiller la situation plus souvent, de participer, de discuter et de rencontrer les gens des collectivités où les entreprises violent leurs droits, preuve à l'appui. Nous pouvons prouver qu'elles ont violé les droits de la personne.
    Les entreprises canadiennes qui violent ces droits doivent chercher à réparer les dommages. Personne ne peut affirmer qu'il lutte contre la pauvreté et ces problèmes si, au fond, les gens malades n'ont pas droit aux soins de santé.

  (1235)  

    Il me reste une minute. Vous estimez donc que le Canada doit mettre l'accent sur la diplomatie, le commerce ou le développement, comme nous le faisons pour améliorer le système de justice, au lieu d'opter pour l'isolationnisme, de refuser de participer et de mettre fin au commerce, n'est-ce pas?
    Non, je dis qu'il ne faut pas placer les entreprises au-dessus de l'amélioration, de la protection, de la défense et du respect des droits de la personne. Nous ne pouvons pas nous concentrer uniquement sur le progrès économique, si les droits de la personne sont bafoués.
    Toutes les parties prenantes doivent discuter des problèmes avec les collectivités et réparer les dommages causés dans des régions comme la vallée de Siria.
    Merci beaucoup. Je pense que vous avez bien expliqué votre point de vue.
    Monsieur Pacetti, la parole est à vous.
    Merci, monsieur le président.
    J'allais poser mes propres questions, mais il vaut peut-être mieux que je pose une question directe à Peter. Que pensez-vous des propos de Mme Oliva?
    Son témoignage semble quelque peu contredire votre point de vue. Avez-vous des commentaires?
    Je peux parler de notre expérience. Nous travaillons au Honduras depuis plus de 15 ans et nous avons investi des sommes considérables. Comme je l'ai dit dans l'exposé, notre programme de responsabilité sociale fait partie intégrante de notre stratégie globale.
    Dans les pays où nous travaillons comme le Honduras, nous nous assurons d'y exporter les valeurs canadiennes. Notre programme de responsabilité sociale est très solide et se fonde sur des normes internationales reconnues. Nous croyons fermement que nous sommes des chefs de file dans notre industrie, concernant la responsabilité sociale. Nos usines font l'objet de vérifications internes, externes et indépendantes fréquentes.
    Bon nombre d'organisations saluent notre programme de responsabilité sociale. Je répète que nous venons d'être cités dans l'indice Dow Jones...
    Je suis désolé de vous interrompre, mais les droits de la personne dans la collectivité où vous travaillez et de vos employés sont-ils bafoués? Êtes-vous témoins de ces violations? Le gouvernement fait-il de l'obstruction? Je ne sais pas quels exemples vous donner, mais constatez-vous ce dont Mme Oliva a parlé?
    Nous avons plus de 24 000 employés au Honduras. Notre expérience au pays et avec nos employés est très positive. Le meilleur exemple que je puisse vous donner, c'est les centaines de personnes qui se présentent aux foires de l'emploi dans nos usines et qui veulent travailler pour nous. C'est en raison de notre réputation comme employeur au pays et des sommes que nous avons investies dans les collectivités où nous travaillons au Honduras. Nous offrons d'importants avantages sociaux et les meilleures conditions de travail à nos employés.
    Je suis encore désolé de vous interrompre, mais je veux vous poser une question.
    Vous avez parlé d'intégration verticale à quelques reprises. Qu'est-ce que cela signifie dans votre industrie? L'intégration verticale fait-elle référence aux matières premières que vous achetez pour fabriquer des produits finis?

  (1240)  

    Grosso modo, nous achetons des matières premières pour fabriquer nos produits dans nos propres usines contrôlées.
    Les matières premières viennent-elles du Honduras?
    Elles peuvent venir de fournisseurs locaux en Amérique centrale. La principale matière première qui entre dans la composition de nos produits est le coton, qui vient surtout des États-Unis où sont situées nos filatures. Nos matières premières proviennent de diverses sources...
    D'accord. Je veux simplement poser une question à Mme Oliva.
    Merci encore, madame Oliva.
    Se peut-il que des industries, des secteurs, des collectivités ou des personnes en particulier soient privilégiés et ne soient pas affectés par les violations des droits de la personne que vous soulevez? Le gouvernement demande peut-être de ne pas importuner les entreprises canadiennes qui font du bon travail.
    Veuillez commenter la question. Le président vous fera signe lorsque mon temps sera écoulé.
    Je répète que la réglementation doit garantir le respect total des droits de la personne et qu'elle n'est pas mise en oeuvre à l'heure actuelle.
    Je ne suis pas ici parce que je suis fâchée contre quelqu'un. Je suis ici pour témoigner au nom de ceux qui souffrent de l'absence de mesures pour garantir les droits de la personne des employés dans les usines de vêtements.
    À San Pedro Sula, plus de 600 travailleuses ont signalé que cette entreprise a violé leurs droits. Nous examinons ces cas pour être entendus devant la Commission interaméricaine des droits de l'homme. Nous voulons nous assurer que la santé et la vie des travailleurs sont garanties. Nous ne demandons pas des mesures immédiates, mais les gens doivent réfléchir soigneusement à ce qui sera approuvé à long terme.
    Je suis aussi ici pour vous encourager à former une commission et à ne pas vous limiter à discuter avec les diplomates et les investisseurs. Vous devez parler aux divers groupes sociaux, à la société civile en général, aux travailleurs et aux représentants des organisations de défense des droits de la personne, parce que nous demandons le respect intégral des droits de la personne. Je ne comprends pas comment les investisseurs et les entreprises peuvent dire qu'ils luttent contre la pauvreté, alors que les taux de maladie sont élevés et que les droits des travailleurs sont bafoués. Je ne comprends tout simplement pas.
    Je pense que le renforcement des droits de la personne passe par le respect et la mise en oeuvre de ces droits, sans que les décisions soient imposées.
    Merci beaucoup.
    Monsieur Cannan.
    Je pense que vous allez partager votre temps avec M. Hoback.
    C'est exact. Merci, monsieur le président.
    M. Hoback, qui travaille fort, était aussi président de ParlAmericas. Il va donc nous parler de son expérience directe dans un instant.
    Peter, je crois que vous avez investi au Honduras en 2001, entre autres, car ce pays est situé à proximité des États-Unis.
    Pouvez-vous parler un peu de votre expérience depuis 2001? Bien sûr, vous menez toujours des activités là-bas. Qu'avez-vous fait pour prendre de l'expansion, et pourquoi êtes-vous toujours au Honduras?
    Je répète que nous avons une expérience très positive au Honduras. Nous avons pris de l'expansion depuis nos débuts en 2001 dans une usine de couture pour en arriver à investir plus de 700 millions de dollars dans quatre usines de textiles, deux usines de chaussettes, quatre usines de couture et une usine de sérigraphie. Nous employons plus de 24 000 personnes au pays. Le principal facteur qui nous a permis de nous démarquer, c'est que nous sommes parvenus à former une équipe de gestion locale et décentralisée très forte, grâce à la grande expertise que nous avons trouvée dans ce pays.
    Je répète également que notre stratégie est fortement axée sur la responsabilité sociale et qu'il est primordial pour nous d'exporter les valeurs canadiennes dans tous les pays où nous travaillons. Nous avons beaucoup investi dans les partenariats avec les collectivités où nous sommes établis et dans l'élaboration d'un programme de responsabilité sociale solide, qui est reconnu par nombre d'organisations internationales. Nous croyons fermement que ces pratiques font de nous des chefs de file dans l'industrie.
    Notre expérience au Honduras est très positive, et nous espérons poursuivre dans cette voie.

  (1245)  

    Merci.
    Ma question s'adresse à Mme Oliva.
    Merci de votre présence et de votre travail axé sur la défense et la compassion. J'ai lu une partie de votre biographie, qui décrit une situation horrible. Votre mari est disparu, et je suis convaincu que personne autour de la table ne peut comprendre cette situation ou s'identifier à votre parcours. Nous voulons aider la population au Honduras.
    Ma question fait suite au commentaire de M. O'Toole sur le retrait et l'isolationnisme ou notre participation à l'amélioration de la société et de la justice sociale, ainsi qu'aux projets de promotion des droits de la personne et au développement économique au Honduras. Pensez-vous que nous sommes dans la bonne voie?
    Concernant l'accord, nous avons parlé des droits des travailleurs. Le Canada et le Honduras ont négocié le chapitre sur le travail de l'accord de libre-échange, un accord parallèle sur la coopération dans le domaine du travail, ainsi que de vastes obligations d'application et des sanctions.
    En vertu de l'accord de coopération dans le domaine du travail, le Canada va travailler avec le Honduras pour promouvoir les normes de travail et pour mieux protéger les travailleurs. Le Canada fournit une aide technique en matière de travail pour aider le Honduras à assumer ses obligations aux termes de l'accord. Pensez-vous qu'il s'agit d'une initiative positive, en plus de la baisse des prix du boeuf et du porc? Devrions-nous nous retirer, quitter le Honduras et cesser de participer au développement?
    Nous pensons qu'il faut d'abord discuter et s'entendre avec les divers groupes sociaux et la population. Je ne parle pas des entrepreneurs locaux et internationaux et des gouvernements. L'entreprise de Peter qui est ici est profitable et ne viole pas les droits de la personne, mais nous avons constaté des cas différents. Je pense que c'est un bon point de départ.
    Nous devons savoir qui dit vrai, ce que nous pouvons améliorer et ce que nous devons accomplir. L'isolationnisme n'est pas la meilleure stratégie pour le Canada. Ce ne serait pas une bonne idée de couper les liens diplomatiques non plus. Je pense qu'il vaut mieux mettre une croix sur les gains majeurs et concentrer nos efforts sur les sacrifices et les violations des droits de la personne dans les usines de vêtements.
    Je vais vous accueillir les bras grand ouverts et vous montrer les cas de violations des droits de la personne signalés à maintes reprises par les femmes qui travaillent dans l'industrie des vêtements. Nous allons vous fournir toute l'information dont vous avez besoin concernant les violations des droits de la personne.
    Je ne veux pas vous interrompre, mais je dois laisser un peu de temps à M. Hoback.
    Merci beaucoup.
    Vous avez une minute et demie.
    Merci, monsieur le président. C'est peu de temps pour une question si importante.
    Monsieur Iliopoulos, j'ai eu le plaisir de visiter votre usine au Honduras avec le premier ministrepour voir comment vous menez vos affaires, et je vous félicite. Comme d'autres entreprises canadiennes qui font des affaires partout dans le monde, vous assumez votre responsabilité sociale.
    Pouvez-vous nous donner une idée des salaires que vous versez, des avantages que ces emplois présentent pour la collectivité locale, de ce qu'ils signifient pour la population au Honduras et de comment ces régions s'en tireraient si vous n'y faisiez pas des affaires?
    Les salaires que nous versons sont considérablement plus élevés que les salaires minimums dans l'industrie, mais cela ne s'arrête pas là. Nous offrons aussi des avantages sociaux considérables à nos employés et nous les bonifions d'année en année.
    Je répète que toutes nos usines comptent des cliniques avec des médecins et des infirmières. En cas de besoin, les examens ou les interventions sont réalisés dans ces cliniques. Nous subventionnons le transport aller-retour sécuritaire de nos employés, ainsi que les repas. En collaboration avec l'Ergonomics Center de la Caroline du Nord, nous sommes en train d'élaborer le meilleur programme d'ergonomie dans sa catégorie.
    Nous avons 39 employés qui s'occupent de santé et sécurité, ainsi qu'un comité de santé et sécurité et un comité d'ergonomie. Notre approche se fonde sur la cause des problèmes. Nous examinons les processus et les pratiques qui s'appliquent dans nos usines, pour corriger les problèmes sous-jacents avant qu'ils ne causent des blessures.

  (1250)  

    D'accord.
    Que feraient vos 24 000 employés sans ce travail?
    Je ne sais pas. Notre objectif, c'est de fournir des emplois au pays. Nous pensons que c'est primordial. C'est sûr qu'il y aurait moins d'emplois si nous n'étions pas là.
    Merci beaucoup.
    J'ai une question complémentaire.
    Y a-t-il un salaire minimum dans vos usines ou au Honduras?
    Il y a un salaire minimum dans l'industrie.
    Savez-vous à combien il s'élève? Je présume que c'est difficile d'établir une comparaison avec...
    D'après ce que je comprends, le salaire minimum dans l'industrie s'élève à environ 250 $ par mois. Les salaires que nous versons sont considérablement plus élevés, sans parler des importants avantages sociaux que nous offrons.
    Connaissez-vous le salaire moyen?
    Pour des raisons de concurrence, nous ne donnons pas ces informations publiquement, en général.
    Non, je parle du salaire moyen au Honduras.
    Je n'ai pas cette information à portée de main, aujourd'hui.
    D'accord, ce n'est pas grave.
    Je vous remercie de votre exposé et d'avoir répondu aux questions. Cette séance a été très utile.
    Nous allons suspendre la séance pour passer à huis clos, pendant les cinq dernières minutes.
    [La séance se poursuit à huis clos.]
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