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FAAE Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent des affaires étrangères et du développement international


NUMÉRO 041 
l
2e SESSION 
l
41e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 27 janvier 2015

[Enregistrement électronique]

(1100)

[Traduction]

    Bonjour à tous. Conformément à l'article 108(2) du Règlement, nous étudions la réaction du Canada face à la violence, aux persécutions religieuses et aux bouleversements perpétrés en Irak, en Syrie et dans la région par l'État islamique en Irak et au Levant.
    Nous allons commencer. Je crois que tout le monde voit la caméra. Notre réunion est enregistrée par CTV. Les gens seront donc ici durant toute la réunion.
    Je souhaite la bienvenue à nos témoins, qui représentent le ministère des Affaires étrangères, du Commerce et du Développement. Je vous les présente en commençant par ma gauche. Nous accueillons Mme Leslie Norton, directrice générale de la Direction de l'assistance humanitaire internationale; M. Mark Gwozdecky, directeur général de la Direction générale du Moyen-Orient et du Maghreb; M. Andrew Bennett, ambassadeur du Bureau de la liberté de religion; et Mme Donica Pottie, directrice, Politique des conflits et Secrétariat de la cohérence en matière de sécurité.
    Bienvenue. Nous sommes ravis de vous accueillir.
    Nous allons commencer. Monsieur Gwozdecky, je crois que vous serez le seul témoin à présenter un exposé. Nous allons tout d'abord vous écouter, et les députés de l'opposition et du gouvernement vous poseront des questions au cours de l'heure et demie qui suivra.
    Je vous cède la parole, monsieur. Nous avons hâte d'entendre votre exposé.
    Monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du comité, je vous remercie de me donner l'occasion de comparaître devant vous aujourd'hui.
    Je vais commencer par vous donner un aperçu de la situation dans laquelle se trouvent l'Irak et la Syrie. Je parlerai ensuite des activités du gouvernement du Canada visant à s'opposer à l'EIIL et à aider le peuple et le gouvernement irakiens.
    Ce qu'on appelle l'État islamique en Irak et au Levant, ou l'EIIL, est un groupe qui cause des ravages dans la région. Il fait grandement souffrir des gens qui ont déjà été frappés par des guerres civiles et des conflits. L'EIIL s'organise, se mobilise et progresse sur la base de l'adhésion à une idéologie tordue qui vise à éliminer des prétendus non-croyants, désignés comme tous les gens qui refusent de se convertir à une forme pervertie de l'islam.
    Essentiellement, c'est un conflit qui repose sur la persécution religieuse et qui est nourri par la haine religieuse, ce qui a mené à une catastrophe humanitaire. Elle représente l'idéologie de l'obscurantisme, c'est-à-dire qu'on veut empêcher de façon délibérée que les faits soient connus. On s'oppose aux libertés fondamentales, qui constituent la base de notre société, à tous les aspects de tolérance et de pluralisme, et même à la seule idée du droit à la dignité humaine.

[Français]

     Pour contrer les récits extrémistes au Moyen-Orient, incluant en Irak et en Syrie, nous devons promouvoir une vision alternative à celle soutenue par l'État islamique et les autres groupes extrémistes. Nous devons offrir une alternative à la peur de l'oppression, de la discrimination, de la marginalisation et des abus qui sont souvent perpétrés par les gouvernements en place, des facteurs ayant permis aux idées extrémistes de se propager.
    La seule solution possible à long terme est l'inclusion politique, une meilleure gouvernance ainsi qu'un respect des libertés religieuses et des droits humains. Cette solution politique doit venir des Irakiens et des Syriens, mais le Canada s'est engagé à faire des efforts politiques et diplomatiques à long terme à l'appui de cet objectif.
    Même si l'on constate que des progrès encourageants ont été faits en Irak, nous savons qu'atteindre cet objectif va prendre du temps. C'est pourquoi le Canada appuie les forces locales qui combattent l'État islamique en Irak. Le Canada demeure également prêt à fournir de l'assistance en ce qui concerne la réconciliation à long terme et la réforme politique.
    Les événements tragiques qui ont eu lieu à Paris au début du mois, qui mettaient en cause des extrémistes ayant des liens avec des organisations terroristes transnationales basées au Moyen-Orient, démontrent clairement que nos efforts font partie d'une lutte plus large.
    Alors que nous travaillons avec nos amis et alliés pour combattre la menace que pose cette idéologie à travers le monde, il est essentiel de demeurer engagés dans le but de défaire les gains militaires de l'État islamique, de rétablir l'aide humanitaire, de protéger les droits fondamentaux et de réaffirmer l'autorité de l'Irak sur les territoires actuellement sous le contrôle de l'État islamique.
    Pour ce faire, les États-Unis ont fondé une coalition de plus de 60 pays soutenant une intervention militaire contre l'État islamique. Cette coalition fournit des conseillers et du matériel militaires.
(1105)

[Traduction]

    Au sein de la coalition, le Canada fait partie d'un groupe central qui participe dans une mission de combat en menant des frappes aériennes contre l'EIIL en Irak. Les alliés du Canada participent aux frappes aériennes. Parmi ces alliés, 10 sont des pays du Moyen-Orient. Dans le cadre de l'opération Impact, les Forces armées canadiennes soutiennent la coalition avec les éléments suivants: chasseurs, aéronefs de patrouille et aéronef de ravitaillement pour les opérations aériennes contre l'EIIL.
    Des conseillers et des planificateurs militaires des Forces canadiennes aident les forces de sécurité irakiennes. Nos forces fournissent également des avions de transport pour le transport de matériel militaire. Vous en saurez davantage à ce sujet au cours de la semaine lorsque les ministres Nicholson et Baird comparaîtront devant votre comité. Pour aider les Forces armées canadiennes dans leur rôle, le MAECD et plusieurs autres ministères et agences contribuent considérablement pour faire en sorte que les gens qui sont sur le terrain aient les meilleures chances de battre l'EIIL.
    Permettez-moi de répéter que la crise humanitaire à laquelle nous assistons découle d'une situation permanente de conflit entre les forces gouvernementales et un certain nombre de groupes armés, et tout particulièrement de la campagne violente de l'EIIL, qui persécute des minorités religieuses de même que des musulmans chiites et sunnites qui rejettent la conception déformée de l'islam qu'a l'EIIL. Les activités du Canada visent à aider la population irakienne à combattre les différentes manifestations de cette violence.
    Permettez-moi de commencer par le volet de la sécurité. Dans le cadre de son Programme d'aide au renforcement des capacités antiterroristes et du Fonds pour la paix et la sécurité mondiales, le ministère fournit 10 millions de dollars d'aide non létale aux forces de défense et de sécurité kurdes. Nous apportons notre aide en fournissant de l'équipement de protection essentiel, comme des casques, des gilets pare-balles et des engins télécommandés de détection d'explosifs, de même que du soutien logistique, dont des véhicules de transport, des jumelles, des ordinateurs et des récepteurs GPS.
    Pour mieux cibler l'EIIL et d'autres groupes extrémistes de la région, dans le cadre du Programme d'aide au renforcement des capacités antiterroristes, une initiative pluriannuelle de 5 millions de dollars pour soutenir les efforts régionaux visant à restreindre l'entrée de combattants étrangers et d'extrémistes violents est mise en oeuvre. Des activités seront menées pour accroître les capacités régionales de repérer et d'intercepter des combattants étrangers dans des pays sources, de transit et de destination.
(1110)

[Français]

     Des diplomates canadiens et des organismes de sécurité publique du Canada se sont réunis dans la région avec des partenaires pour offrir cette aide de façon optimale. Nous veillons à ce que l'investissement du Canada ajoute un complément aux initiatives locales et soutienne le travail des donateurs aux vues similaires.
    Le Canada collabore également avec des partenaires régionaux comme le Centre Hedayah des Émirats arabes unis pour mettre en oeuvre des projets visant à contrer la propagande extrémiste. Des récits extrémistes encouragent l'intolérance et le recours à la violence, surtout auprès de populations comme les jeunes marginalisés et dissidents, qui risquent d'être influencés et mobilisés par ce genre de propagande.
    Si nous voulons vaincre l'extrémisme, nous devons mener une bataille idéologique, une bataille qui dénonce la propagande extrémiste pour ce qu'elle est, à savoir des appels pervers à une légitimité religieuse et historique dépourvue de substance et ancrée dans l'intolérance et la lâcheté. En même temps, la communauté internationale doit se mobiliser davantage pour aider ces populations en trouvant une solution aux facteurs qui les rendent si vulnérables à l'extrémisme.
    Par conséquent, le Canada contribue aux efforts qui visent à répondre aux besoins humanitaires immédiats, à tenir pour responsables les auteurs de violations des droits de la personne et à encourager le rétablissement, la stabilisation et le développement à long terme des collectivités touchées par les conflits. Ces efforts peuvent contribuer à donner à ces populations vulnérables l'envie certaine de vivre dans un Irak démocratique où les droits fondamentaux sont protégés et respectés.
    Depuis le début de 2014, le Canada a offert une aide humanitaire de 67,4 millions de dollars pour les Irakiens déplacés. Il a également accordé 400 millions de dollars pour soutenir les interventions humanitaires dans le cadre du conflit en Syrie, dont 9,5 millions de dollars pour les réfugiés syriens en Irak.
     Cette aide, offerte avec l'aide de partenaires humanitaires d'expérience, permet de répondre aux besoins urgents de millions de civils en matière de santé, de refuge, d'alimentation, d'éducation et de protection, y compris contre les violences sexuelles et liées au genre.

[Traduction]

    Ce sont particulièrement les femmes et les filles qui sont victimes de la brutalité de l'EIIL. On a fait état d'un grand nombre d'agressions sexuelles, et il est de plus en plus évident que cela fait partie d'une campagne délibérée de persécutions contre des groupes religieux minoritaires. À cause des préjugés qui entourent le viol, la plupart des incidents ne sont pas signalés. Même lorsqu'ils le sont, les familles et les communautés blâment la victime. Malheureusement, les répercussions de la violence sexuelle durent longtemps après la fin du conflit.
    Par conséquent, le Canada prend des mesures concertées pour aider les victimes de violence sexuelle et d'autres violations des droits de la personne commises par l'EIIL. Le 6 octobre dernier, le ministre Baird a annoncé que le Canada verserait 10 millions de dollars destinés à prendre des mesures pour réagir aux actes de violence sexuelle et à d'autres actes de violence connexes infligés à des femmes et à des filles. Ces fonds seront utilisés principalement pour deux aspects.
    Tout d'abord, le Canada veut que les choses s'améliorent pour ce qui est de la responsabilisation quant aux documents pour faire en sorte que les auteurs de crimes soient tenus responsables de leurs gestes.
    Le Canada a fait une contribution pouvant atteindre 5 millions de dollars pour l'intervention rapide au service de la justice, une initiative intergouvernementale visant à déployer rapidement des professionnels en service actif du domaine de la justice pénale ou d'un domaine connexe faisant partie d'une liste de disponibilité. L'intervention rapide au service de la justice forme des premiers intervenants sur le terrain et définit des activités de communication, dont l'aide aux victimes de violence sexuelle.
    Le Canada a également fait une autre contribution de 5 millions de dollars au Haut-Commissariat aux droits de l'homme des Nations Unies afin de mieux lutter contre les crimes de violence sexuelle et autres violations des droits de la personne, de les documenter et de faciliter les enquêtes à cet égard. Le Canada se concentre sur la prévention et l'aide aux victimes de violence sexuelle et d'autres actes de violence connexes, et 5 millions de dollars ont été alloués pour renforcer la protection des femmes et des enfants vulnérables contre la violence sexuelle et d'autres violations des droits de la personne.
    L'automne dernier, un représentant du MAECD était sur le terrain pour cibler des initiatives permettant d'aider les victimes de crimes de violence sexuelle commis par l'EIIL. L'aide humanitaire du Canada soutient déjà un certain nombre d'organismes humanitaires qui aident les victimes de violences sexuelles et basées sur le genre, ou VSBG, en leur donnant accès à des services: soutien psychologique, traitements médicaux, séances d'information, service de consultation, formation, programmes d'autonomisation et soins cliniques. Les personnes déplacées sont particulièrement vulnérables aux VSBG. C'est pourquoi le Canada appuie le Fonds des Nations Unies pour la population, le Haut-Commissaire pour les réfugiés, le CICR et Plan Canada pour la prévention de la violence sexuelle en Irak et l'intervention. Ces organismes établissent des centres pour femmes et offrent des traitements médicaux, de même que des services d'aide psychosociale et de l'assistance judiciaire aux victimes.
(1115)

[Français]

    En Syrie, le Canada soutient le Fonds des Nations Unies pour la population, afin de répondre aux besoins des femmes et des filles, incluant celles qui ont survécu aux violences sexuelles. Grâce à ce soutien, 2,3 millions de filles et de femmes auront accès à des mécanismes améliorés de prévention et de réponse à la violence sexuelle et liée au genre, incluant, entre autres choses, du soutien psychosocial et des services médicaux.
    De plus, le Canada dénonce le problème de la violence sexuelle en tant qu'arme de guerre. En plus de fournir une aide très nécessaire et de la protection aux réfugiés dans la région, nous montrons la voie à suivre en nous assurant que le recours à la violence sexuelle par l'État islamique, notamment contre les membres des minorités religieuses, demeure une priorité mondiale, y compris au G7 et à l'Organisation des Nations Unies.
    En ce qui concerne la question globale des réfugiés, le Canada entend faire sa part pour régler la crise causée par la violence en Irak et en Syrie. En plus de fournir une aide très nécessaire et de la protection aux réfugiés dans la région, le Canada a accepté 20 000 réfugiés irakiens et il en acceptera 3 000 de plus cette année, ainsi que 5 000 autres provenant de la Turquie d'ici 2018.
     Le Canada s'est également engagé à établir plus de 11 000 réfugiés syriens dans le cadre de son programme humanitaire.
     À long terme, le Canada entend contribuer à la stabilité et au développement de l'Irak. Le ministère travaille à l'établissement d'un programme de développement bilatéral pour répondre aux besoins à court terme ainsi que pour soutenir à long terme la résilience et la prospérité en Irak.
    Finalement, par l'entremise du Bureau de la liberté de religion du Canada, nous travaillons à moyen et à long terme à promouvoir le dialogue interconfessionnel, à encourager la compréhension et le respect entre les communautés religieuses irakiennes et à aider à bâtir un cadre politique et social de nature à permettre à tous les Irakiens d'exprimer leurs croyances librement et sans crainte. En ce sens, le gouvernement a récemment annoncé une nouvelle initiative avec le groupe Minority Rights Group International, qui a pour but de documenter les violations des droits de l'homme visant les groupes vulnérables en Irak. Cette initiative mettra l'accent sur les communautés religieuses et offrira du soutien aux défenseurs des droits de la personne qui travaillent avec les minorités religieuses.
    Le Bureau de la liberté de religion du Canada collabore aussi étroitement avec ses partenaires afin d'identifier des possibilités additionnelles de travailler avec les communautés religieuses qui sont directement touchées par la situation en Irak et en Syrie.
(1120)

[Traduction]

    Nous sommes heureux de constater que le nouveau gouvernement irakien tend la main à toutes les communautés religieuses et ethniques en Irak afin de bâtir un pays plus inclusif. La marginalisation des sunnites en Irak est à la source de la réapparition de l’EIIL au pays. Donc, on ne saurait trop insister sur l’importance de l’inclusivité.
    Nous sommes tout aussi heureux de voir que Bagdad a pris des mesures pour lutter contre la corruption au sein des forces de sécurité et du gouvernement et mettre fin à certaines disputes avec le gouvernement régional Kurdistan.
    En terminant, je tiens à rappeler que le Canada déplore les actes de terrorisme perpétrés par l’EIIL contre les civils et qu'il s'est engagé à travailler avec ses partenaires, y compris le gouvernement irakien, pour que cessent ces actes ignobles et pour calmer les souffrances des victimes de l’EIIL. Tous les aspects de l’approche multidimensionnelle du Canada sont importants et complémentaires. Le Canada est fier d’appuyer les Irakiens dans la lutte contre le terrorisme et est impatient de travailler avec eux et ses partenaires internationaux à la stabilisation et à la reconstruction de l’Irak.
    Merci. Mes collègues et moi serons heureux de répondre à toutes vos questions.
    Merci beaucoup, monsieur Gwozdecky.
    Nous allons amorcer notre première série de questions. Les intervenants disposeront de sept minutes chacun. Commençons par M. Dewar.
    Monsieur, vous avez la parole.
    Merci, monsieur le président.
    Merci aux témoins d'avoir accepté notre invitation.
    J’aimerais revenir sur une chose que nous avons demandée après ma visite en compagnie du ministre Baird et de mon collègue, M. Garneau, et notre évaluation de la situation. En tant qu’opposition officielle, nous avons demandé un soutien pour les victimes de violences sexuelles, mais aussi à ce que les responsables soient poursuivis. Je suis heureux que vous en ayez parlé. Cette question a été mal reçue à la Chambre des communes lorsque je l'ai soulevée. On m'a accusé de vouloir envoyer uniquement des avocats traiter avec l’EIIL, mais je suis heureux de voir que le gouvernement a décidé d’agir. Il est très important de recueillir des preuves, car, à un certain moment, il faudrait que justice soit rendue. J'aimerais donc donner crédit au gouvernement pour ce projet et les 10 millions de dollars qu'il a promis.
    J’aimerais également revenir sur certains points que vous avez soulevés au sujet de l’importance de l’aide humanitaire. Vous avez énuméré les sommes investies ou promises. Je crois que c’est important. Cela faisait partie de nos recommandations, non seulement pour la protection des victimes de violences sexuelles et la documentation, mais aussi pour appuyer ceux qui souffrent parce qu’ils ont dû fuir leur pays. Le Programme alimentaire mondial et la préparation pour l’hiver, notamment, sont très importants. Selon nous, c’est ce sur quoi il fallait s’attarder.
    Je remarque que l’autre ministère n’a pas été aussi transparent. Il serait intéressant de voir combien nous dépensons du côté militaire — si vous avez ces données. C’est important, non seulement sur le plan de la transparence, mais aussi pour déterminer le meilleur investissement. Si vous savez combien le gouvernement envisage d'investir dans la mission militaire, si vous avez des chiffres à cet égard, ce serait très utile.
    J’aimerais vous poser quelques questions au sujet des engagements qui ont été faits. Un de ces engagements me préoccupe particulièrement, en raison de ce que nous avons constaté sur le terrain. Je parle ici de la préparation pour l’hiver. Voici les engagements pour 2015: 8 millions de dollars pour l’initiative de l’Unicef « Non à une génération perdue »; 10 millions de dollars pour le Programme alimentaire mondial; et 9 millions de dollars pour la préparation pour l’hiver. Je n’ai pas besoin de vous dire à quel point la préparation pour l’hiver est importante, car c’est déjà l'hiver là-bas.
    Si j’ai bien compris, ces sommes n'ont toujours pas été transférées, malgré les engagements. J’aimerais que vous fassiez le point sur les engagements concernant l’initiative de l’Unicef, le Programme alimentaire mondial et, le plus important, ou au moins aussi important que les autres, les 9 millions promis pour 2015 qui n’ont toujours pas été versés.
    Savez-vous si ces sommes ont été transférées?
    J'aimerais d'abord préciser que l’annonce était de 40 millions pour les Irakiens touchés par le conflit. Effectivement, 10 millions de dollars ont été promis pour le PAM et 9 millions pour l’HCNUR, le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés. Vous avez raison. Les 8 millions pour l’initiative de l’Unicef ont été annoncés en octobre. Tous ces fonds ont été transférés aux organisations concernées.
    Au sujet des 40 millions, en raison de l’évaluation du risque fiduciaire de la situation actuelle de certaines des ONG avec lesquelles nous sommes partenaires, il est possible qu’il reste deux ou trois paiements à faire. Toutes les ententes de subventions et les accords ont été signés. La plupart des fonds ont été transférés. Toutefois, en raison du risque fiduciaire, il est possible qu’il reste deux ou trois paiements à faire à certaines organisations, mais pas en ce qui concerne l’HCNUR, l’Unicef ou le PAM.
(1125)
    Donc, toutes ces sommes ont été versées. Merci de ces informations.
    En ce qui concerne la préparation pour l’hiver, et nous en avons déjà parlé, les engagements ont été faits, l’hiver est passé et aucune somme n’a été versée. Je crois qu’il s’agit d’un enjeu sur lequel nous devons nous concentrer, tout en tenant compte, bien entendu, du risque fiduciaire.
    J’aurais une question à vous poser. Notre engagement de six mois envers cette mission se terminera en avril. Selon ce que vous dites, vous travaillez selon un calendrier différent en ce qui concerne nos engagements, de l’aide humanitaire au soutien de la gouvernance.
    Quel est votre échéancier? A-t-il été repoussé d’un an? De six mois? Quel est votre échéancier en ce qui concerne l’Irak?
    Comme vous le savez, la motion parlementaire était pour une durée de six mois avec possibilité de prolongation. J’aimerais que vous me donniez la position du ministère.
    Ma collègue, Mme Norton, pourra vous parler de l’aspect humanitaire.
    En ce qui a trait à nos efforts, je reviendrai à ce que j’ai dit dans mon exposé, soit que nous avons pris un engagement politique et diplomatique à long terme envers l’Irak qui inclut toutes sortes de soutiens auquel je fais référence. Puisque notre objectif à long terme est de stabiliser l’Irak dans la région, nous avons également intérêt à long terme, comme l’a souligné le premier ministre, à réduire les capacités de l’EIIL. À cette fin, nous devons appuyer le gouvernement irakien, car au bout du compte, les Irakiens sont les mieux placés pour régler ce problème. Toutefois, comme en font foi les récents événements survenus au Canada, nous avons également intérêt à ce que ces capacités soient réduites, car nous ne sommes pas à l’abri de la menace croissante en Irak et en Syrie.
    En ce qui a trait aux divers programmes, nous pouvons vous parler des calendriers établis, mais nous avons pris un engagement à long terme envers l’Irak et nous désirons renforcer cet engagement, car, selon nous, c’est dans l'intérêt des Canadiens.
    Leslie.
    Comme vous le savez, nous réagissons aux crises humanitaires en fonction des besoins. L’appel actuel de l’ONU est pour 2014 et 2015. Donc, nos fonds seront répartis sur l’ensemble de l’année civile 2015.
    Nous semblons nous diriger vers une crise prolongée en Irak. Nous évaluerons les besoins lors du prochain appel de l’ONU. Si l’appel actuel est prolongé, nous analyserons la situation et formulerons des recommandations.
    Merci.
    Merci beaucoup.
    Monsieur Anderson, vous avez la parole pour sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je tiens à remercier les témoins d’avoir accepté notre invitation.
    Au début décembre, les partenaires de la coalition se sont réunis à Bruxelles. Après leur rencontre, ils ont publié une déclaration commune sur les priorités à adopter, soit: soutenir les opérations militaires, renforcer les capacités et offrir de la formation; enrayer le flot de combattants terroristes étrangers; bloquer l’accès à des fonds et à du financement pour l’EIIL et Daesh; s’attaquer à l’aide humanitaire connexe en cas de crises; et révéler la vraie nature de l’EIIL et de Daesh en ce qui concerne leur idéologie.
    En fait, j’aimerais procéder en ordre inverse sur cette question.
    Ambassadeur Bennett, que fait le Bureau de la liberté de religion? Nous en avons déjà parlé, mais quelle est notre approche pour révéler les idéologies extrêmes de ces gens?
    J’imagine que nous avons tous pris connaissance des résultats d’un sondage sur le sujet qui montre qu’une partie de la population partage les croyances de l’EIIL. Semble-t-il que certains groupes locaux appliquent les mêmes peines.
    Alors, doit-on aborder cette question comme une question théologique? Est-ce une question plus large? Est-il davantage question de démocratie et de pluralisme? Quelle est notre approche?
(1130)
    Comme vous pouvez l’imaginer, la réponse est multidimensionnelle, tout comme beaucoup de nos efforts. D’un côté, nous tentons d’encourager les pays dans la région à s’intéresser, comme nous, à une plus grande sécurité dans la région et à stopper la progression de l’EIIL en parlant plus directement de la façon dont l’EIIL déforme l’islam au profit de ses objectifs et de son idéologie extrémiste. Nous discutons avec d’autres pays dans la région, notamment ceux qui ont une approche plus équilibrée — je dis bien une approche plus équilibrée, et non une approche modérée — quant à l’interprétation de l’islam. À cet égard, la Jordanie est un allié important.
    J’espère me rendre en Jordanie au début février. J'y rencontrerai des chefs religieux ainsi que des représentants du gouvernement afin de discuter de la façon de procéder pour susciter une compréhension particulière de l’islam qui se veut ouverte au pluralisme et qui favorise le dialogue interconfessionnel. C’est un des objectifs du projet que nous mettons sur pied avec le Groupement pour les droits des minorités afin d’assurer la tenue d’un dialogue interconfessionnel en Irak, mais aussi dans des pays que j’appellerai des migrations proches, comme la Jordanie et le Liban, où il y a une grande concentration de chrétiens, mais aussi des yazidis, des chiites, des sunnites et des musulmans. Nous voulons travailler avec divers partenaires afin de solliciter la participation de ces collectivités dans ces pays de façon à assurer la tenue d’un dialogue entre les chrétiens et les musulmans, notamment.
    Le Bureau de la liberté de religion a récemment organisé une table ronde à Toronto. Celle-ci fut animée par le ministre Paradis et le ministre Alexander et réunissait les chefs religieux de diverses églises apostoliques, de la communauté juive, de la communauté musulmane et de la communauté yazidi. Une des principales préoccupations soulevées par tous les participants était que ces groupes religieux minoritaires ne peuvent pas disparaître de cette région. Selon le rabbin Frydman-Kohl, de Beth Tzedec, à Toronto, le Moyen-Orient ne serait pas le Moyen-Orient sans chrétiens, et c’est la même chose en ce qui concerne les yazidis et les autres minorités.
    Nous poursuivons le dialogue, au Canada, avec des chefs religieux afin de mieux définir les approches possibles à adopter pour assurer le maintien de ces collectivités dans la région. Nos collègues de CIC travaillent à des programmes de réinstallation des réfugiés pour ceux qui se sentent obligés de fuir. Le ministre Alexander en a fait l’annonce il y a environ deux semaines.
    Donc, monsieur Anderson, il s’agit d’un engagement à deux volets: des mesures dans la région avec des alliés et des pays qui, nous l’espérons, dénonceront avec plus de vigueur l’EIIL et ses activités, et des mesures ici, au Canada.
    Depuis le début de nos audiences, les collectivités ont clairement dit qu’elles voudraient être sur place pour participer à ces efforts, si possible. Bien entendu, il y a la question de l’immigration, mais, comme nous tous, les membres de ces collectivités aimeraient passer du temps dans leur pays d'origine.
    Je vais remonter la liste et laisser le soin à Mme Brown de répondre aux questions d’aide humanitaire et d’accès, puisque ce sont des domaines qu’elle connaît bien. Pourriez-vous nous parler des mesures adoptées pour bloquer l’accès au financement? Nous en avons déjà parlé également au comité. J’aimerais savoir si vous avez des informations au sujet des mesures prises à cet égard.
    Nous ne pouvons pas vous fournir beaucoup de détails à ce sujet. Ce que je peux confirmer, c’est que, bien entendu, l’EIIL a été ajouté à la liste des groupes terroristes en vertu du Code criminel. Par conséquent, les institutions financières canadiennes doivent faire preuve d’une diligence raisonnable supplémentaire et transmettre toutes les informations nécessaires aux organismes de l’application de la loi. Par l’entremise du Groupe d’actions financières de l’OCDE et de Manama Meeting on Combating the Financing of Terrorism, nous travaillons avec nos partenaires afin de bloquer les ressources financières à l’EIIL. Si les membres du comité veulent plus de détails à ce sujet, nous pourrons leur en fournir par écrit.
(1135)
    Avons-nous réglé la question de la vente des produits pétroliers, notamment? Ce fut, au début, une source de revenus pour l’organisation.
    Monsieur le président, je suis désolée, mais je n’ai pas beaucoup de détails ou d’informations d’ordre général à ce sujet, mais nous pourrons faire parvenir plus de détails au comité, si vous le voulez.
    J’aurais quelques questions à vous poser au sujet de la Syrie.
    La situation là-bas fait en sorte que les gens peuvent circuler librement. Avons-nous une solution à court ou à moyen terme en ce qui a trait à la Syrie et qui pourrait nous aider en Irak?
    Aussi, nous avons beaucoup parlé du renforcement de la capacité et de la force militaire en Irak. J’aimerais savoir où nous en sommes à cet égard. Nous nous réunissons depuis environ quatre mois pour discuter de ce dossier et, au début, il s’agissait d’une question importante. Avons-nous réussi à mettre sur pied une force supérieure à ce qu’il y avait auparavant ?
    Une réponse brève, s’il vous plaît, car le temps est presque écoulé.
    En fait, votre réponse à ma deuxième question serait plus importante pour moi.
    La deuxième question, sans vouloir vous offenser, est une question que j'aimerais que les ministres abordent à la réunion de jeudi. Cette réunion portera davantage sur l'aspect militaire. Aujourd'hui, nous sommes prêts à discuter de tous les aspects non militaires de nos activités.
    Pour ce qui est de la Syrie, cette question attire peut-être moins l'attention des médias, mais malgré tout, des mesures sont prises. Il y a des discussions constantes qui se tiennent, par l'entremise d'intermédiaires, avec le régime syrien et d'autres. En fait, je crois que les Russes ont convoqué une réunion, qui se déroule aujourd'hui à Moscou. Plusieurs membres du régime syrien et quelques représentants de l'opposition se réunissent. Il ne s'agit pas d'une réunion officielle entre gouvernements visant à rétablir la paix, mais plutôt d'une réunion semi-officielle, qu'on qualifierait de « réflexion 1.5 ». C'est l'une des rares fois où les deux camps se retrouvent assis à la même table. Je ne prévois pas un règlement du conflit à court terme, mais chose certaine, la diplomatie déploie de grands efforts.
    Merci.
    Monsieur Scarpaleggia, je vous souhaite la bienvenue au sein du comité. Vous disposez de sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    J'aimerais simplement poursuivre sur la question que M. Anderson a soulevée ou plutôt sur les observations que vous venez de faire au sujet de cette réunion tenue avec des représentants du régime syrien et des membres de groupes de l'opposition en Syrie. Vous avez employé l'expression « réflexion 1.5 ». C'est une expression que je ne connais pas du tout. Je ne suis pas un membre permanent du comité, alors vous pourriez peut-être me dire en quoi cela consiste.
     Pour les non-initiés à cette diplomatie sur le terrain, pourriez-vous nous dire de quoi il est question à ce type de réunion?
    J'aimerais pouvoir vous donner plus de détails, mais c'est une réunion au sujet de laquelle les Russes ne fournissent pas beaucoup d'informations.
    Je comprends.
    Ils veulent rester discrets par rapport à cet événement, alors je n'ai pas grand-chose à vous dire là-dessus.
    Une réunion du type « réflexion 1.5 » est différente d'une négociation habituelle entre gouvernements où les représentants officiels du gouvernement de plusieurs États se trouvent autour de la table. Dans ce cas, à ma connaissance, l'opposition syrienne officielle n'est pas représentée, mais on y retrouve des représentants des divers groupes de l'opposition. Par conséquent, ces gens ne sont pas là à titre officiel, mais plutôt à titre personnel. C'est ce qui distingue cette réunion d'une réunion conventionnelle entre gouvernements...
    Quel est l'objectif d'une telle réunion? Vous l'avez peut-être dit dans votre réponse, mais j'aimerais simplement savoir quel est le but de cet événement du point de vue des Russes ou de qui que ce soit d'autre.
    Je ne veux pas parler au nom du gouvernement russe, mais je présume qu'il veut mettre un terme à la violence et favoriser la réconciliation...
    En Syrie.
    ... ce qui pourrait mettre fin au conflit.
    Pour ce qui est d'aider les réfugiés syriens, je sais que le gouvernement a annoncé qu'il en accueillerait davantage, après avoir subi de grandes pressions, toutefois. Si nous consacrions plus de ressources à cet aspect de la crise — c'est-à-dire à l'aide aux réfugiés —, serait-ce possible de faire venir des réfugiés syriens au Canada plus rapidement? Quelles sont les entraves à cette opération? Est-ce que ce sont des obstacles financiers ou plutôt des problèmes administratifs? Est-ce le processus normal? Pourriez-vous nous en dire davantage là-dessus?
(1140)
    Sauf votre respect, je crois que cela va bien au-delà de notre mandat et je vous invite à poser cette question à nos collègues de CIC.
    Très bien.
    En ce qui concerne le Bureau de la liberté de religion, je comprends l'objectif, mais pourriez-vous me décrire un scénario étape par étape?
    Que cherchez-vous à faire concrètement lorsque vous vous rendez sur place, monsieur Bennett, dans le cadre de votre mandat, qui est fort louable et noble? Vous rencontrez différents groupes religieux partout dans la région, et qu'allez-vous leur demander de faire exactement? Il me semble qu'on se retrouve dans une situation où règnent l'incertitude extrême et le chaos et où la principale préoccupation demeure la survie et la protection contre les violences qui ont cours.
    Vous avez une tâche très difficile, et vous êtes très courageux, mais quelles sont les mesures concrètes que vous allez prendre?
    Permettez-moi de vous parler franchement. Au Bureau de la liberté de religion, nous avons compris qu'il faut éviter la naïveté. Que ce soit au Moyen-Orient ou au Pakistan ou dans bon nombre d'autres pays où la persécution religieuse et les violations de la liberté de religion sont chose courante, que ce soit par des hostilités sociales, des restrictions gouvernementales ou l'intervention ou l'inaction du gouvernement, dans bien des cas, on parle d'apporter un changement sur plusieurs générations.
    Dans le cas de l'Irak — et par extension la Syrie —, les deux sont liés. Les persécutions qui ont lieu en Irak sont particulières. En Syrie, on les retrouve dans un contexte de guerre civile.
    Quand je me rends là-bas, j'essaie d'avoir une meilleure idée des besoins immédiats de ces communautés, surtout les communautés religieuses minoritaires, qui ont été déplacées de la Syrie et de l'Irak vers des pays voisins, le Liban et la Jordanie. J'essaie de savoir ce dont elles ont besoin pour demeurer dans la région si c'est ce qu'elles choisissent de faire. Comment devons-nous mobiliser nos alliés tels que les Jordaniens, les Libanais et les autres? Que pouvons-nous faire pour les aider?
    Souvent, cela se passe dans le cadre d'activités de petite envergure. Il peut aussi s'agir d'activités de sensibilisation à l'échelle internationale ou par l'intermédiaire d'organismes multilatéraux — notamment les Nations Unies. Nous sommes en train d'établir un groupe international auquel participeront des pays aux vues similaires afin de faire progresser la liberté de religion.
    Ce ne sont pas seulement des démocraties libérales occidentales qui y participent, mais également les Jordaniens, les Indonésiens, les membres de plusieurs pays de l'Afrique subsaharienne, les Marocains et les Tunisiens. Si nous arrivons à bien comprendre la liberté de religion, nous pourrons travailler à la fois au sein des institutions multilatérales et ensemble au sein d'un groupe afin de sensibiliser les gens à la situation. Je crois qu'il faut également mobiliser les pays dans la région qui auraient besoin d'un peu plus de soutien.
    Parfois, il s'agit de s'adresser à la bonne personne pour faire bouger les choses et venir en aide à un groupe persécuté. Ce sont des petits miracles qui se produisent.
    C'est exact.
    Merci. Parfaite synchronisation.
    Nous allons maintenant entreprendre une deuxième série de questions au cours de laquelle chacun se verra accorder cinq minutes. Madame Brown, c'est vous qui commencez.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je vous remercie de votre présence. Le comité est saisi de cette étude depuis maintenant quelques réunions, alors votre expérience et votre contribution nous sont très utiles.
    Madame Norton, j'aimerais vous donner la possibilité de nous parler de la situation humanitaire. Je sais que vous avez passé du temps sur le terrain et que vous en savez beaucoup sur ce qui se passe là-bas.
    Le Canada contribue généreusement à cet effort, et nous remercions les contribuables canadiens de leur appui, mais sachez que les besoins humanitaires y sont énormes. J'aimerais que vous me parliez des partenaires avec qui nous travaillons, des autres pays qui sont également donateurs et de la façon dont nous collaborons.
    On entend souvent dire que les sommes promises ne se rendent pas toujours à destination. Pourriez-vous nous dire comment on peut s'assurer que les fonds qu'on s'est engagé à verser se rendent à bon port et nous parler des partenaires humanitaires avec qui nous travaillons?
    Il s'agit d'une question de longue haleine.
(1145)
    Je vous remercie beaucoup pour vos nombreuses questions. Je vais commencer en disant qu'on estime à 5,2 millions le nombre de personnes ayant besoin d'aide en Irak. De ce nombre, 1,5 million de gens sont considérés comme étant hors de portée puisqu'ils se trouvent dans des régions difficiles d'accès.
    Comme M. Gwozdecky l'a mentionné dans son allocution, le Canada a fourni plus de 67,4 millions de dollars pour répondre aux besoins humanitaires des Irakiens. Nous sommes actuellement le quatrième donateur en importance dans cette crise humanitaire. Selon les chiffres actuels, l'Arabie saoudite, les États-Unis et le Royaume-Uni occupent les trois premiers rangs.
    Lorsque nous nous trouvons dans des situations aussi complexes, comme vous le savez, nous travaillons avec des partenaires de confiance et d'expérience. Les conditions de sécurité dans plusieurs régions d'Irak témoignent de l'importance de travailler avec ces partenaires expérimentés. Parmi nos partenaires, mentionnons les organismes des Nations Unies tels que le Programme alimentaire mondial, le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés, l'UNICEF dans le cadre de l'initiative Non à une génération perdue, la Croix-Rouge, principalement le CICR — c'est d'ailleurs cet organisme qui a accès aux régions plus éloignées — et un certain nombre d'ONG. Quand je suis allée dans la région en octobre, je me trouvais à Dohuk et à Erbil et, à ce moment-là, j'ai remarqué que nous avions peu de partenaires. Encore une fois, c'est évidemment en raison des difficultés liées au contexte.
    Nous savons que nos partenaires obtiennent des résultats. Par exemple, le Programme alimentaire mondial a pu nourrir 1,5 million de gens. Nous savons également qu'on a offert un refuge à 1,26 million de gens, à qui on a remis des articles ménagers essentiels. Nous savons également que 500 000 personnes déplacées et enfants vivant dans les communautés d'accueil ont accès à l'éducation. Cela découle directement de l'aide du Canada en collaboration avec les autres donateurs.
    L'Irak n'est pas la Syrie, et on n'a pas de conférences annuelles d'annonces de contributions organisées par le gouvernement du Koweit. Cependant, le profil est différent. Nous ne nous réunissons pas, à titre de donateurs, quatre fois par année pour rendre des comptes quant aux contributions qui ont été faites. C'est un contexte différent.
    J'ai parlé de nos partenaires. Quant aux autres donateurs, j'ai mentionné les quatre plus importants. Cependant, à Bagdad et à Erbil, on a établi un groupe de coordination des dons. Même si nous n'avons pas un fonctionnaire responsable de l'aide humanitaire établi définitivement dans le Nord de l'Irak, il y a des gens qui s'y rendent depuis Amman à intervalles réguliers. J'ai également une équipe qui se rend sur place quatre à six fois par année. Nous visitons le pays régulièrement.
    Lorsque j'y étais, effectivement, nous nous réunissions avec les ONG et le CICR, et nous avons également rencontré les organismes des Nations Unies qui se trouvent là-bas. Les Nations Unies ont activé le système en grappe, de sorte qu'on tienne des réunions régulières pour assurer la coordination.
    En terminant, nous nous assurons que les fonds humanitaires sont acheminés comme prévu, encore une fois, en travaillant avec des partenaires d'expérience. Ils ont mis en place de rigoureuses mesures de reddition de comptes pour veiller à ce que les fonds soient utilisés de manière efficace et adéquate.
(1150)
    Merci.
    Merci, madame Norton.
    Je vais de nouveau céder la parole à M. Dewar pour cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    J'aimerais comprendre comment les activités sont coordonnées.
    Je comprends, monsieur Gwozdecky, qu'en ce qui concerne l'aspect militaire, vous vouliez laisser les ministres répondre aux questions. Toutefois, comme on l'a déjà mentionné en comité, dans ce dossier, comme dans d'autres, on semble avoir adopté une approche pangouvernementale. Je crois savoir que des consultations ont lieu entre les ministères. Vous pourriez peut-être nous dire de quelle façon le MAECD est consulté sur la mission et comment cela fonctionne.
    J'ai porté attention à la terminologie que vous avez employée dans votre allocution. Vous avez indiqué que les objectifs étaient de nous opposer à l'EIIL et d'appuyer la population; c'est excellent. Cependant, nous entendons aussi d'autres termes, comme affaiblir et détruire, de la part d'autres représentants du gouvernement, et même que nous sommes dans une guerre sans précédent, selon certains membres principaux du Cabinet. Un plan stratégique doit être mis en oeuvre, et c'est ce que vous devez nous décrire ici aujourd'hui.
    Premièrement, est-ce que le ministère de la Défense nationale vous consulte sur la stratégie à adopter? Deuxièmement, quels sont vos indicateurs de réussite? Beaucoup de gens regardent la situation et se demandent comment on s'y prend pour mesurer les progrès. Lorsqu'il s'agit du Programme alimentaire mondial, ce n'est pas un problème puisqu'il y a des chiffres, mais lorsqu'on parle des objectifs généraux, en tant que représentants du gouvernement, avez-vous des indicateurs ou des façons d'évaluer le travail qui se fait?
    Donc, tout d'abord, à quoi ressemblent les consultations avec le MDN et l'armée? Ensuite, qu'est-ce que vous évaluez exactement, et s'il y a une façon de le faire, pourriez-vous nous parler des résultats obtenus?
    J'aimerais tout d'abord parler de l'objectif stratégique, pour lequel je vais m'en remettre au premier ministre, puisqu'il l'a énoncé clairement. Permettez-moi de vous rappeler ses propos. Il a dit que nous comptons « affaiblir considérablement les capacités de l'État islamique », freiner sa progression dans la région et entraver sa capacité de lancer des attaques terroristes en dehors de la région. Cela ne va pas éliminer l'EIIL, ni faire en sorte qu'une autre forme de gouvernance sera en mesure d'occuper l'espace actuellement contrôlé par l'EIIL en Irak ou en Syrie, mais cela donnera la possibilité à d'autres de le faire.
    Je pense que cette déclaration comporte deux objectifs. Il y a tout d'abord les missions militaires qui, comme il l'a indiqué, visent à créer un espace pour que les gouvernements irakiens et syriens puissent prendre le contrôle de leurs territoires et établir la gouvernance pour tous. Cette mission militaire a déjà été définie et fera l'objet d'une discussion ce jeudi, mais comme je l'ai déjà dit, nous sommes engagés dans un processus à long terme. Nous voulons établir une relation mutuellement bénéfique avec les gouvernements importants du Moyen-Orient. C'est un objectif continu. Cela ne va pas prendre fin après six mois; c'est tout simplement dans notre intérêt de le faire.
    Pour ce qui est des consultations, sachez que nous communiquons régulièrement avec la Défense nationale et tous les autres organismes gouvernementaux. Ce ne sont pas tous les renseignements qui sont transmis chaque fois; cela dépend de nos mandats respectifs. Au bout du compte, il revient aux ministres et au premier ministre de décider de notre orientation stratégique, selon les conseils qu'ils reçoivent des fonctionnaires.
    C'est très pertinent.
    Vous a-t-on consultés pour savoir si on devait aller ou non en Syrie? Est-ce quelque chose dont ont discuté les représentants du ministère et les dirigeants militaires? Je parle ici du volet militaire.
(1155)
    Je ne suis pas sûr de vouloir parler au nom de l'ensemble du ministère des Affaires étrangères, du Commerce et du Développement. Comme vous pouvez le voir ici, il y a de nombreux intervenants concernés. Je vous rappelle qu'on tient des consultations de façon régulière, mais je ne vais pas aborder toutes les décisions...
    Eh bien, non. Je dis tout simplement que parce que nous avons été guidés... Le gouvernement a la motion du Parlement, et l'une des options était celle de la Syrie. Je cherche seulement à comprendre comment les choses fonctionnent dans cette mission et à savoir s'il y a eu des consultations avec le ministère. De toute évidence, il y a une question d'ordre diplomatique. C'est une question d'affaires étrangères, en plus d'être une affaire militaire. Je signale que la porte avait été ouverte, puis refermée par notre ministre, ce qui m'avait fait grand plaisir. C'est ce que nous espérions.
    J'essaie juste de comprendre comment cela fonctionne et de savoir si le ministère a été consulté à propos de la Syrie.
    Il y a énormément de consultation et de coordination à l'échelle du gouvernement. Mais comme je l'ai dit, au bout du compte, c'est aux ministres et au premier ministre qu'il appartient d'imprimer l'orientation stratégique.
    Merci.
    M. Goldring va conclure le deuxième tour.
    Vous avez cinq minutes, monsieur.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Le premier ministre précédent d'Irak a été accusé d'alimenter les tensions sectaires, et on lui reproche d'avoir marginalisé la minorité sunnite d'Irak. Cela semble être à la source de toutes sortes de difficultés et de problèmes, qu'il soit question de la gouvernance du pays, de l'armée et de la sécurité, ou de la conjugaison des forces mises à profit.
    Avec le nouveau gouvernement d'unité assermenté en septembre de l'année passée, est-ce qu'il y a eu de grandes améliorations? Est-ce qu'il s'est passé assez de temps pour qu'on puisse constater de réelles améliorations sur le plan du leadership et de la cohésion? Si c'est le cas, est-ce que ça s'est rendu au niveau le plus élémentaire de la sécurité et des forces militaires, de manière à rétablir le degré de cohésion et la façon d'aborder les choses du passé en Irak?
    J'aimerais revenir sur la façon dont nous en sommes arrivés là. Vous avez mentionné ce que nous avons dit dans notre exposé sur la façon dont le gouvernement précédent du premier ministre al-Maliki avait marginalisé une bonne proportion de la population et, en fait, avait créé les conditions nécessaires pour qu'elle se sente totalement exclue.
    J'étais ambassadeur en Irak, à cette époque, sous le régime al-Maliki, et j'avais antérieurement été affecté à la Syrie. Ce que je peux vous dire, c'est que ces deux sociétés sont fondamentalement modérées. Elles sont très progressives. Elles sont incroyablement diverses. L'EIIL n'est pas une entité qui obtiendrait le soutien de la population dans des circonstances normales.
    Le nouveau gouvernement d'Irak est véritablement un gouvernement inclusif comptant des représentants, des ministres, de tous les grands partis — sunnite, chiite, kurde. Il y a même un ministre chrétien. Le gouvernement s'est doté d'une plate-forme inclusive, exactement conforme à ce que la communauté internationale lui demandait de faire. Cependant, il est trop tôt pour dire si c'est un succès ou non. Il y a des éléments prometteurs, mais nous sommes encore loin de la mise en oeuvre complète de cette plate-forme de sorte qu'elle donne lieu, entre autres effets, à une armée non seulement représentative de la population, mais aussi efficace. Nous savons qu'il y a beaucoup à faire avant qu'elles puissent réellement jouer ce rôle.
    Le gouvernement a énoncé un programme progressif concernant l'élimination de la corruption. Le début est prometteur, mais il reste beaucoup à faire pour prétendre à la victoire sur ce front.
    En ce qui concerne les divers pays, les 25 pays, qui offrent leur aide, est-ce que la Turquie participe activement à ces efforts?
    Je ne veux pas caractériser le rôle de la Turquie; je crois qu'il leur appartient de le faire. La Turquie est un intervenant important au Moyen-Orient. Elle fait certainement partie d'un vaste effort visant à résoudre ce problème.
    Pour ce qui est de l'importance du rôle qu'elle joue dans la coalition, c'est autre chose.
(1200)
    Ici, au Canada, nous tendons vers la séparation de l'église et de l'État, alors que dans bien des pays du Moyen-Orient, il n'y a presque pas de séparation. Je pense qu'on peut dire cela. Quels autres pays...? Parmi les 25 pays, la Russie joue-t-elle aussi un rôle parce qu'elle se soucierait de ce qui se passe?
    Encore là, je ne veux pas parler au nom du gouvernement russe.
    Comme vous tous le savez, la Russie a joué un rôle important et visible dans le soutien du gouvernement du président Assad, en Syrie, et ce n'est manifestement pas notre cas. Nous travaillons à faire comprendre à d'autres que le président Assad a perdu sa légitimité en Syrie, aux yeux de son peuple, à cause de la brutalité de son régime. Nous nous efforçons de faire comprendre à d'autres qu'il faut un changement là-bas.
    En Irak, je pense que même les Russes admettraient que le nouveau gouvernement mérite un appui. C'est un nouveau gouvernement qui veut gouverner pour tous les Irakiens, et presque tout le monde, comme nous, veut encourager cela.
    Merci beaucoup.
    Nous allons faire un troisième tour, à commencer par M. Anderson.
    Monsieur, vous avez cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    J'aimerais poursuivre sur ce que M. Dewar a soulevé au sujet de l'objectif de dégrader la capacité de l'EIIL, ou de l'intérêt de le faire. Pourriez-vous nous parler un peu des effets de l'EIIL dans le secteur? Ils ont menacé l'Égypte et la Jordanie et ont exercé des pressions sur le Liban. Pourriez-vous nous dire si leur influence s'accroît ou si elle diminue? Quelles menaces font-ils peser en ce moment sur ces nations?
    Nous croyons qu'ils représentent une menace non seulement en Irak et en Syrie, mais aussi dans l'ensemble de la région. En réalité, mondialement, ils représentent une menace pour nous tous.
    Je rappelle au comité que l'EIIL est un groupe sunnite extrémiste dont le but est de créer un État islamique transnational unique fondé sur la charia. Ils veulent recréer le califat qui existait il y a plus de 1 000 ans et qui englobait tous les pays du Moyen-Orient, de l'Espagne au sous-continent. C'est l'objectif qu'ils ont énoncé.
    Ils remportent un certain succès dans d'autres pays de la région. On constate qu'il y a adhésion ici et là, un peu partout, y compris au Canada, comme nous le savons. Mais je crois que sur le plan militaire, ils sont en perte de vitesse. L'intervention militaire a fonctionné en ce sens qu'elle a mis un frein à leur percée et qu'elle les a fait reculer dans certains cas. Encore là, à ce sujet, j'aimerais, jeudi, laisser les ministres parler du succès des mesures prises contre l'EIIL.
    Pouvons-nous parler du Kurdistan, alors? Nous avons eu des témoignages au sujet de cette région. En fait, nous avons eu des témoignages contradictoires de la part de la communauté yézidi. Certains groupes semblaient très contents de la réception qu'ils avaient obtenue. Un groupe s'est dit moins satisfait de la réception qu'il avait eue en arrivant dans ce secteur. Les communautés chrétiennes semblaient plutôt contentes de pouvoir y trouver un sanctuaire.
    Pourriez-vous faire le point pour nous sur ce qui se passe réellement en région kurde, au fur et à mesure que l'hiver avance?
    Pendant de nombreuses années, y compris pendant que j'y étais, de 2010 à 2013, le Kurdistan était un refuge pour les milliers d'Irakiens qui estimaient avoir besoin de se mettre à l'abri. Cela ne fait qu'augmenter depuis la plus récente crise.
    Je ne sais pas si je peux dire d'une communauté qu'elle est plus heureuse qu'une autre. Selon mon expérience, la région du KRG, le gouvernement régional du Kurdistan, est la communauté la plus accueillante et la plus tolérante de toutes, et offre un soutien dépassant même ce qu'ils sont en mesure de donner. C'est la raison pour laquelle les gens choisissent de trouver refuge là-bas. Ils savent que la menace y est moindre.
    Ma collègue va vous parler des façons dont nous aidons ces communautés.
    Leslie.
(1205)
    En ce moment, 40 % des Irakiens déplacés à l'intérieur de l'Irak se trouvent dans la région du KRG. Cela représente une baisse de 47 % par rapport à l'année passée. Cependant, cela reste un nombre remarquable de personnes qui résident au sein de communautés hôtes ou qui vivent dans des églises, des mosquées ou des immeubles inachevés. Environ 33 % d'entre eux vivent dans ce genre de lieux.
    Pour ce qui est de notre aide, comme je l'ai dit, l'aide humanitaire est offerte par l'intermédiaire de partenaires de la région. Quand j'ai visité Dohuk, nous nous sommes rendus jusqu'à la frontière turque. Nous avons alors vu des réfugiés syriens traverser. Ils s'étaient rendus en Turquie, emmenés là par autobus, puis on les faisait entrer dans la zone kurde.
    Mis à part les personnes déplacées à l'intérieur de leur propre pays...
    Est-ce que le gouvernement turc facilitait cela?
    Oui, il facilitait cela.
    Outre les 40 % de personnes déplacées à l'intérieur du pays qui résident dans cette région, il y a aussi plus de 200 000 réfugiés de Syrie, et le gouvernement continue de se montrer très généreux et ouvert à accueillir les personnes qui ont besoin d'aide.
    J'ai aussi rencontré les gouverneurs d'Erbil et de Dohuk, et ils continuent de se montrer ouverts et généreux.
    Merci beaucoup.
    Nous passons à M. Saganash, pour cinq minutes.

[Français]

     Merci, monsieur le président.
     Je veux à mon tour de saluer les témoins qui sont présents aujourd'hui et les remercier. Je profiterai du temps qui m'est alloué pour poser deux brèves questions.
    Tout d'abord, M. Gwozdecky a parlé de notre engagement à long terme en Irak parce que nous y avons des intérêts. Je crois que  ce sont les mots qu'il a utilisés. L'opposition officielle a demandé une augmentation de l'aide offerte dans la région pour les minorités, les réfugiés et les victimes d'actes de violences sexuelles.
     Tous les jours, à la télévision, on voit les dommages que les bombardements ont causé aux infrastructures, aux ponts, aux hôpitaux, aux écoles et j'en passe. D'après les connaissances que vous avez sur le terrain, a-t-on évalué l'aide nécessaire à long terme dans cette région pour subvenir aux besoins primaires comme le logement, la nourriture, la santé et l'éducation? A-t-on une idée de la forme d'aide dont la région aura besoin à moyen et à long terme? C'est une question qui me préoccupe particulièrement.

[Traduction]

    Je vous remercie beaucoup de votre question.
    À long terme, je ne crois pas que l'Irak aura besoin d'aide de l'extérieur, car c'est un pays riche. Normalement, c'est un pays capable de répondre à tous ses besoins. En ce moment, il a besoin de l'aide de ses amis et des partenaires étrangers, et c'est ce à quoi nous nous sommes engagés.
    Avez-vous quelque chose à ajouter, Leslie?
(1210)

[Français]

    Lors d'une crise, on fournit d'abord de l'assistance humanitaire. Lorsque le conflit prend fin, on passe à la reconstruction et au développement à long terme. Pour l'instant, on n'en est pas là, mais quand on y sera, on entamera alors des discussions avec la Banque mondiale et le PNUD. Ce sont des acteurs en matière de développement.
     Nous sommes en train d'élaborer des scénarios, mais tous reconnaîtront que ce n'est pas le moment de commencer la reconstruction dans les parties de l'Irak où il y a un manque d'infrastructures.
    J'aimerais poser une question à M. Bennett.
    Je crois que dans les résolutions 2170 et 2178 du Conseil de sécurité des Nations Unies, l'ONU appelle les États membres à travailler par l'intermédiaire d'institutions d'éducation, d'institutions culturelles et d'institutions religieuses pour faire en sorte de contrer l'incitation au terrorisme.
    Un peu plus tôt, vous avez brièvement parlé de votre travail et des efforts que vous faites là-bas et ici. Vous avez aussi parlé de la tenue d'une table ronde à Toronto. Comment s'engage-t-on avec les groupes à risque en Irak et en Syrie? Quel travail est effectué sur le terrain? Des efforts sont-ils déployés dans la région?
    Ces questions s'adressent à M. Bennett.

[Traduction]

    Pour ce qui est des activités menées sur le terrain, comme je l'ai déjà mentionné, nous nous efforçons le plus possible de travailler avec les pays de la région qui sont ouverts à l'idée de favoriser la liberté de religion. Encore une fois, je fais allusion aux Jordaniens, notamment au Prince Ghazi, qui a travaillé très activement à promouvoir des réformes de l'islam.
    Les Jordaniens se consacrent depuis maintenant un certain temps à une de leurs importantes activités, celle de rédiger le message d'Amman. Ce faisant, ils cherchent à collaborer avec l'islam sunnite à dégager une approche commune à l'égard du pluralisme et à élargir la question de la liberté de religion s'agissant de l'interprétation que l'on fait de la sharia et de l'islam. Nous joindrons nos efforts à ceux des Jordaniens dans le cadre de cette initiative en particulier.
    Comme nous l'avons annoncé, nous avons un nouveau projet en Irak avec Minority Rights Group International dans le cadre duquel nous chercherons à travailler avec différentes communautés en vue de favoriser un meilleur dialogue interconfessionnel, car la persécution religieuse résulte souvent de la rupture de ce dialogue. Notre bureau essaie toujours de cerner les questions fondamentales qu'il faut aborder pour éviter ou limiter le degré de persécution religieuse. Pour ce faire, il faut donc encourager ce type de dialogue et l'éducation qui vise à promouvoir une optique pluraliste plutôt qu'à diaboliser l'autre.
    Comme M. Gwozdecky l'a mentionné, les sociétés irakienne et syrienne sont très diverses au plan religieux. Lorsque nous faisons la promotion de la liberté religieuse dans une optique canadienne, nous favorisons le pluralisme. Il s'agit de pays qui se prêtent parfaitement à ce type de perspective. Cependant, il est clair que nous devons tenter de composer avec ces crises importantes de concert avec nos alliés dans la région.
    Nous faisons aussi appel à un certain nombre de communautés religieuses et d'ONG capables de travailler avec nous dans les pays de cette région, comme le Liban et la Jordanie, et aussi Israël et d'autres parties de la région, pour essayer de créer un environnement dans lequel nous pouvons promouvoir des concepts comme le dialogue, une meilleure éducation et le pluralisme avancé, souvent dans le cadre de très petits projets susceptibles d'avoir une incidence à grande échelle.
    Nous continuons de collaborer avec différentes communautés religieuses, dont celles qui ont la capacité de faire ce type de travail, comme le Comité central mennonite, l’Association catholique d’aide à l’Orient et la Fondation pour la foi de Tony Blair. Nous continuons de faire appel à eux pour trouver de nouvelles approches.
    Merci.
    Nous allons terminer la troisième ronde de questions avec Mme Brown. Vous avez cinq minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Monsieur Bennet, j'aimerais simplement enchaîner sur cette question avec deux ou trois commentaires et ensuite savoir ce que vous en pensez.
    En décembre dernier, nous avons entendu le témoignage de Thomas Farr, qui est le directeur du projet sur la liberté religieuse à l'Université Georgetown. Vous serez très heureux d'apprendre qu'il a dit que la politique canadienne en matière de liberté de religion est très importante et que nous devrions fournir des ressources au Bureau sur la liberté de religion et donner à l'ambassadeur tout ce dont il a besoin pour élaborer des politiques. Je suis certaine que vous êtes ravi de l'entendre dire.
    Il a parlé du besoin de former les diplomates et tous les membres de nos services diplomatiques aux questions de liberté religieuse. Il a dit qu'une bonne diplomatie garantirait la paix. Cela dit, pendant cette même réunion, nous avons aussi entendu Jonathan Halevi, du Jerusalem Center for Public Affairs, qui a affirmé que l'objectif de l’État islamique en Irak et en Syrie était de conquérir Rome et le Vatican, centre de la chrétienté.
    Alors, si nous voulons former nos diplomates comme M. Farr l'a suggéré — il en a parlé comme de l'élément central — comment devrions-nous procéder selon vous? Quelle sorte de formation devrions-nous leur offrir? Comment votre bureau peut-il nous aider à le faire? Le Canada peut-il prendre des mesures supplémentaires?
(1215)
    J'ai toujours su que Tom Farr était un homme d'une grande sagesse. Cela ne fait que le confirmer.
    Des voix: Oh, oh!
    M. Andrew P.W. Bennett:Un certain nombre de pays, dont le Canada, ont reconnu l'importance de former les diplomates à la question de la liberté de religion. Cela nous ramène à un point que non seulement nos bureaux, mais aussi nombre de mes collègues ont observé lorsqu'ils ont été en poste à l'étranger ou même dans le cadre de leur travail à Ottawa. Ils ont constaté que la grande majorité des pays ont des valeurs religieuses très marquées. La religion et la foi dominent ou occupent une place non seulement dans le dialogue culturel que l'on perçoit, mais aussi dans le dialogue politique et socioéconomique où elles jouent un rôle social de premier plan.
    Nous vivons dans des sociétés relativement séculaires. Je crois que mes collègues, des collègues d'autres pays occidentaux et moi-même avons reconnu que nous risquons de nous retrouver avec un sérieux angle mort diplomatique si nous n'arrivons pas à comprendre cette réalité, celle de ces pays où la religion joue un rôle dominant — souvent positif, mais parfois négatif. Alors, depuis la création du bureau, nous avons élaboré des modules de formation pour nos diplomates.
    À l'occasion de notre première séance de formation d'une journée l'an dernier, nous avons cherché à souligner l'importance de promouvoir la liberté de religion dans le contexte des droits universels de la personne ainsi que dans le contexte canadien de promotion du pluralisme, de la démocratie et du développement démocratique dans le monde. Nous espérons offrir cette formation sur deux jours cette année puisque nous avons eu plus de candidats que nous pouvions en prendre l'an dernier aux Affaires étrangères; cela nous permettra de donner aux diplomates la chance de se pencher sur diverses études de cas. Cette année, je pense que l'une d'elles portera sur la situation en Irak et en Syrie et sur la façon de faire face à des conflits très persistants qui ne découlent pas seulement du contexte actuel, mais aussi d'antécédents historiques qu'il est important de comprendre.
    Chaque année, je m'entretiens aussi avec les chefs de missions sortants. Nous discutons de liberté de religion et de la façon d'aborder la question lorsque nous avons affaire à des pays où de graves violations des droits à la liberté de religion sont commises. Nos alliés, dont les Américains, les Britanniques et ceux d'un certain nombre d'autres pays, disposent maintenant de programmes de formation qui reconnaissent la nécessité de munir les diplomates de la terminologie dont ils ont besoin pour parler sans crainte de religion, même si nous sommes souvent conditionnés à ne pas le faire dans nos sociétés séculaires. Dans ces pays, nous devons comprendre cette question, alors nous estimons qu'il soit crucial de former nos diplomates à composer avec cette réalité.
    Cela met fin à nos trois rondes de questions.
    Il nous reste une dizaine de minutes. Est-ce que tout le monde veut avoir une ronde supplémentaire? Ça vous semble logique?
    Pourquoi ne pas commencer par donner la parole à M. Dewar pour environ quatre minutes et terminer par M. Scarpaleggia? Si nous avons des questions plus courtes, nous pouvons terminer.
    Peut-être que je vais simplement continuer à interroger M. Bennett.
    J'ai été heureux d'apprendre qu'une grande partie de l'aide promise a été versée, mais nous nous préoccupons de nos priorités militaires par rapport à nos priorités au plan humanitaire. Je me demandais simplement si vous pouviez nous aider, car on a un besoin immédiat de vastes ressources sur le terrain, et il est important de réagir rapidement pour obtenir des résultats sans tarder. Je me demande où vous en êtes avec votre budget.
    La dernière fois que nous nous sommes entretenus avec vous, une importante partie de votre budget n'avait pas encore été affectée. J'estime que sur le terrain, il est besoin de protéger les minorités, les Yazidis, les Mandéens et autres, plutôt que de donner des ateliers en tant que tels — pas que j'aie quelque chose contre eux. Où en êtes-vous avec votre budget? En 2013-2014, je pense que 69 % de vos ressources n'avaient pas été affectées. Investissez-vous ce financement sur le terrain ou cela vous pose-t-il toujours problème?
(1220)
    Petite précision: il s'agissait des chiffres de 2013-2014.
    C'est exact. Désolé, je me suis mal exprimé. C'était en 2013-2014. Je veux parler de votre budget actuel.
    D'accord. Comme je l'ai déjà mentionné au comité, lorsque le bureau a été créé en février 2013, nous avons dû prendre le temps de lancer les opérations de programme. Nous avons dû élaborer le processus opérationnel et un certain nombre de choses, alors nous n'avons pas utilisé une bonne partie de notre financement pendant cet exercice. Cette année, nous sommes sur la bonne voie de dépenser la majeure partie du financement de 4,25 millions de dollars qui nous a été accordé pour promouvoir la liberté de religion. De toute évidence, nous mettons la dernière main à quelques projets vers la fin de l'exercice, alors nous espérons avoir affecté la majeure partie de ce financement.
    Une partie du financement est affectée à des projets pluriannuels, alors il y en aura certainement de dépensé cette année, mais il en restera aussi pour les prochaines années. Le projet sur les droits des minorités en Irak est du nombre.
    D'où proviennent-ils, en passant? Je veux simplement savoir autour de quoi ils gravitent.
    Il faudra que je vous revienne là-dessus. Je ne m'en souviens pas par coeur.
    D'accord. Je fais remarquer que nous avions une institution très solide, Droits et Démocratie, qui avait l'habitude de mener ces travaux d'ici. Je suis curieux, car vous avez mentionné la fondation Tony Blair et je ne suis pas aussi au courant de ses activités; j'aimerais savoir ce que ce groupe fait.
    Peut-être que vous pourriez nous transmettre l'information plus tard, car je crois que mon temps est écoulé.
    Oui, nous serions ravis de le faire. Je serais heureux de vous parler.
    Merci.
    Monsieur Anderson.
    Je laisse la parole à M. Schellenberger.
    Monsieur Schellenberger.
    Merci beaucoup à nos témoins.
    Il a été question de l'imposition de taxes religieuses dans certaines régions sous le contrôle de l'EIIL. Pouvez-vous nous donner des détails à ce sujet?
    Certainement. Il en a été question dès que l'EIIL a gagné du terrain en Irak et en Syrie. Cette taxe devait être imposée aux chrétiens, aux yézidis et à d'autres minorités. En gros, il y avait trois options pour les membres de groupes minoritaires comme les chrétiens, les yézidis et les mandéens: se convertir à l'islam, payer une taxe ou mourir. C'était brutal comme choix. Comme nous le savons, bien des gens ont été torturés et ont connu une fin atroce aux mains des membres de l'EIIL. D'autres ont pris la fuite. Les yézidis se sont réfugiés sur les monts Sinjar. Les chrétiens se sont enfuis dans la région du Kurdistan pour rejoindre les diasporas déjà présentes dans d'autres pays — au départ la Syrie, mais ensuite au Liban et en Jordanie.
    Au bout du compte, la question pour eux est de savoir s'ils resteront fidèles à leurs croyances. À l'échelle internationale, on interprète la liberté de religion comme la liberté de pratiquer sa foi sans être contraint de se convertir. La conversion doit se faire librement.
    Alors oui, l'EIIL imposait une taxe aux membres des minorités religieuses qui avaient refusé de se convertir, mais il arrivait souvent que l'on meure au lieu de payer une taxe.
    Quel effet cette persécution religieuse a-t-elle sur les pays limitrophes des territoires sous le contrôle de l'EIIL?
    Peut-être pourriez-vous préciser votre question.
    Lorsque les réfugiés se rendent dans d'autres pays, que ce soit en Turquie, au Liban ou ailleurs, cela a-t-il une incidence sur la liberté de religion dans ces régions?
(1225)
    La situation varie beaucoup dans la région. Comme je l'ai mentionné, il est clair que des pays comme la Jordanie et le Liban accordent déjà une très grande liberté de religion et font preuve de beaucoup de tolérance. Ils ont accueilli un grand nombre de membres de minorités religieuses.
    Encore une fois, nous vous encourageons à consulter nos collègues de CIC sur ce point, mais si j'en juge par les rapports que j'ai reçus du Bureau de la liberté de religion, il est clair que ces communautés minoritaires ont été bien accueillies et ont trouvé à se loger dans ces pays environnants. Cependant, les besoins sont élevés et ils exercent évidemment des pressions sur les ressources jordaniennes et libanaises. Voilà pourquoi certains des programmes que le bureau espère mettre en place se feront par l'intermédiaire de partenaires comme le Comité central mennonite, comme je l'ai mentionné, ou l’Association catholique d’aide à l’Orient et divers groupes que nous consultons régulièrement. Rien n'a été conclu, mais nous poursuivons les consultations. Nous espérons offrir de l'aide à ces communautés minoritaires déplacées pour veiller à ce qu'elles puissent continuer à pratiquer leur religion et à vivre dans le pays où elles ont immigré.
    On m'a aussi dit que divers chrétiens étaient allés en Iran. J'ignore dans quelle mesure ils y sont bien accueillis, mais il semblerait qu'ils n'y soient pas persécutés; la persécution ne touche que ceux qui se convertissent dans ce pays. C'est bien cela?
    Je pourrais certainement me renseigner pour vous. Je ne suis pas au courant de nombres importants, ou même de petits nombres, de chrétiens qui se seraient réfugiés en Iran pour fuir la situation avec l'EIIL en Irak, mais il est clair que l'Iran a l'un des pires bilans au monde en matière de persécution religieuse, et que les chrétiens y souffrent énormément, tout comme les bahaïs, les zoroastriens et les musulmans chiites qui rejettent l'idéologie du régime iranien.
    J'ignore s'il y a des groupes importants, mais je serais ravi de trouver la réponse à cette question pour le comité et pour vous, monsieur Schellenberger.
    Merci.
    Merci, monsieur Schellenberger.
    Nous allons terminer par M. Scarpaleggia.
    Je serai bref: nous entendons beaucoup parler du besoin pour le Canada et d'autres pays d'aider à renforcer ou à consolider les institutions politiques irakiennes. Je me demande simplement si vous pourriez nous éclairer un peu sur ce que nous pourrions faire à cet égard.
    Je crois qu'il y a un bon moment, Bob Rae a conseillé l'Irak sur sa nouvelle constitution. Si je ne m'abuse, cette constitution est toujours en place et opérationnelle. Quelles autres mesures ou démarches le Canada pourrait-il prendre pour renforcer les institutions politiques irakiennes?
    Je peux dire que le Canada et les Canadiens participent à cet effort depuis un certain temps. La mesure que je connais le mieux a été prise par un groupe ottavien appelé l'Institut sur la gouvernance. Pendant de nombreuses années, cet organisme avait un contrat — toujours valide aujourd'hui — avec l'UNDP pour appuyer les efforts du gouvernement irakien en vue de comprendre et de mettre en oeuvre un fédéralisme semblable à celui que nous pratiquons au Canada. Dans le cadre de ce programme, l'institut a permis à plusieurs groupes d'études de hauts fonctionnaires irakiens de venir au Canada pour se renseigner sur notre modèle de fédéralisme. On s'y intéresse grandement.
    J'avais l'habitude de plaisanter et de poser cette devinette aux gens: « Si je vous parle d'un pays d'environ 30 millions d'habitants, multiethnique, multireligieux, avec une économie stable fondée sur l'énergie, et une région ou plus qui aspire à l'autonomie, de quel pays s'agit-il? » Cette description s'applique à la fois au Canada et à l'Irak. Les Irakiens estiment avoir beaucoup à apprendre de nous; ce programme leur a d'ailleurs été très profitable.
    On envisage d'autres interventions, mais je crois que c'est la principale en ce moment.
    Je remercie nos témoins du ministère des Affaires étrangères. Nous vous savons gré du temps que vous nous avez accordé ce matin.
    Je vais suspendre la réunion pour que nous puissions passer au huis clos et quitter la pièce. Encore une fois, merci beaucoup.
    [La séance se poursuit à huis clos.]
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