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SDIR Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Sous-comité des droits internationaux de la personne du Comité permanent des affaires étrangères et du développement international


NUMÉRO 070 
l
2e SESSION 
l
41e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 12 mai 2015

[Enregistrement électronique]

  (1305)  

[Français]

    Bonjour, chers collègues. Je vous souhaite la bienvenue à cette 70 e séance du Sous-comité des droits internationaux de la personne du Comité permanent des affaires étrangères et du développement international. La séance d'aujourd'hui est télévisée.

[Traduction]

    Aujourd'hui, nous allons continuer notre examen sur le Vietnam, un sujet qui capte notre attention depuis quelques années.
    À titre de témoin, nous allons entendre Manh Hung Pham, qui est accompagné d'un interprète. Au cas où vous vous posiez la question, l'interprète traduira de l'anglais ou du français vers le vietnamien et du vietnamien vers l'une de nos langues officielles, puis il sera retraduit dans l'autre langue officielle par nos propres interprètes. Par conséquent, nos délibérations seront plus lentes que d'habitude, particulièrement pendant la période des questions et des réponses. Malheureusement, le temps dont nous disposons s'en trouvera réduit, mais je vais vous demander de faire preuve de générosité et de tenir compte du fait qu'il n'est pas encore tout à fait 14 heures, et je vous prierais également de partager votre temps avec vos collègues pour que ceux qui doivent nous quitter plus tôt puissent poser leurs questions, mais tout cela va attendre un peu.
    D'ici là, je souhaite la bienvenue au comité à notre témoin. Nous sommes heureux de vous accueillir aujourd'hui, et nous vous invitons à commencer votre exposé.
    Merci.
    Mesdames et messieurs, je vous remercie.
    Nous sommes le 12 mai 2015. Je suis ici sur l'invitation du comité des droits de la personne du Parlement du Canada. C'est pour moi un honneur personnel d'être ici, comme c'en est un pour mes amis qui se battent ou se sont battus pour les droits de la personne et la liberté au Vietnam.
    Mesdames et messieurs, avant d'entrer dans les détails de la situation des droits de la personne au Vietnam, j'aimerais vous parler brièvement de moi.
    Parce que j'ai participé, avec beaucoup de mes amis aux manifestations pacifiques de 2006, afin de protester contre les autorités chinoises qui avaient ouvert le feu et tué beaucoup de pêcheurs vietnamiens dans les îles Paracel et Spratly, les autorités du Parti communiste vietnamien ont fermé mon commerce informatique et m'empêchent d'obtenir un autre emploi.
    J'ai ensuite écrit un livre intitulé « La vérité doit éclater », qui a été publié sur Internet et imprimé, sur la vérité historique du Vietnam, si bien que je suis opprimé et pourchassé par les autorités.
    Même après ma fuite vers la Thaïlande, le Parti communiste vietnamien m'a accusé faussement de nombreux crimes que je n'ai pas commis pour taire la vérité. Heureusement pour moi, grâce à l'aide du gouvernement du Canada, du sénateur Thanh Hai Ngo, du HCR et d'Amnistie Internationale, je suis ici pour vous raconter la vérité sur les autorités du Parti communiste vietnamien. Merci, Canada, et merci à tous les amis qui m'ont aidé à traverser ces moments difficiles.
    L'une de mes meilleures amies n'a pas été aussi chanceuse que moi; après avoir participé aux manifestations pacifiques afin de réclamer la protection de nos pêcheurs, la blogueuse Pham Thanh Nghien, qui a essayé de défendre la liberté et la démocratie pour le Vietnam, a été condamnée à la prison. À sa sortie de prison, en septembre 2012, elle a été assignée à résidence, une autre forme d'emprisonnement, pour trois années consécutives, et sa vie est très difficile.
    Mesdames et messieurs, elle est longue la liste des crimes commis par les autorités du PCV, et je ne peux pas vous la donner au complet aujourd'hui, en raison du temps limité dont je dispose pour cette audience. J'aimerais donc me limiter aux actes des autorités du PCV qui constituent des atteintes aux droits de la personne commises entre 2014 et 2015.
    Dans son rapport sur la situation des droits de la personne de 2015, qu'elle a publié le 29 janvier 2015, l'organisation américaine de défense des droits de la personne Human Rights Watch a déclaré que la situation des droits de la personne au Vietnam était toujours alarmante en 2014. Bien que le nombre de militants et de blogueurs arrêtés ait diminué depuis 2013, les forces de sécurité de l'État avaient intensifié de diverses façons leurs mesures de harcèlement et d'intimidation à l'encontre de ceux qui critiquent le gouvernement.
    En réalité, le Vietnam a refusé de mettre en oeuvre de grandes recommandations comme la libération des prisonniers politiques et des personnes détenues sans accusation formelle ni procès et une réforme judiciaire pour mettre un terme aux peines à dessein politique prononcées contre des personnes qui exigent pacifiquement le respect des droits de la personne fondamentaux. Le régime communiste du Vietnam évoque encore souvent des justifications comme « atteinte à la politique d'unité nationale » et « abus des libertés démocratiques pour nuire aux intérêts de l'État » pour faire taire les voix politiques dissidentes.
    Les journalistes indépendants, les blogueurs et les défenseurs des droits de la personne sont fréquemment l'objet d'intimidation et de harcèlement de la part des policiers, d'arrestation arbitraire et de détention pendant plusieurs jours sans aide juridique ni visite familiale. La brutalité policière est répandue, à un point tel qu'elle cause des décès en détention, dans une proportion presque effarante. En 2014, même le média d'État, qui est soumis à un contrôle strict, faisait souvent état de violence policière. Beaucoup de détenus affirment avoir été battus par les autorités pour obtenir une confession de force, même s'ils n'avaient pas commis les crimes dont ils étaient accusés. Il y a même des enfants parmi les victimes battues. Dans bien des cas, les personnes mortes en détention policière ne seraient mortes qu'à cause d'une petite erreur. La police explique les décès en détention par le suicide, un prétexte souvent peu crédible qui lance un signal de camouflage systématique.
    En 2014, le Vietnam avait toujours les caractéristiques d'un régime à parti unique, comme des verdicts judiciaires à dessein politique, le refus d'accorder leurs pleins droits aux ouvriers, la brutalité policière endémique et des confiscations de terres injustes ou déraisonnables. Le gouvernement vietnamien limitait toujours étroitement la liberté d'expression et la liberté d'association.

  (1310)  

    Les blogueurs, les défenseurs des droits de la personne, les militants pour les droits des travailleurs et les propriétaires fonciers qui se font confisquer leurs terres, de même que les défenseurs de la liberté religieuse et de la démocratie continuent de subir harcèlement, intimidation, agressions, détentions sans procès et emprisonnement.
    La police continue d'entraver les déplacements pour empêcher les gens de participer à des événements liés aux droits de la personne et de surveiller les sections non approuvées par l'État des temples Cao Dai ou bouddhistes Hoa Hao, des églises protestantes et mennonites, ainsi que les lieux de culte dans les maisons. Au cours des neuf premiers mois de 2014, au moins 20 personnes ont été condamnées pour avoir participé à des groupes religieux non approuvés par les autorités. Il n'y a pas de liberté de religion; seules les religions qui peuvent être contrôlées par l'État sont permises.
    Le syndicat indépendant a été interdit par la loi, et les droits des travailleurs sont gravement bafoués. Dernièrement, presque 100 000 travailleurs ont manifesté, en mars et en avril 2015, pour protester contre les autorités communistes parce qu'elles refusaient de leur verser un salaire juste dans un délai convenable. Parallèlement, le syndicat d'État est l'outil qu'utilise le PCV pour opprimer les travailleurs.
    Mesdames et messieurs, en tant que blogueur et réfugié communiste, j'aimerais vous parler plus en détail de la situation des blogueurs au Vietnam. Au Vietnam, tous ceux d'entre nous qui rédigent des blogues pour raconter la vérité dans la société, décrier les injustices ou exiger la liberté et la démocratie se font jeter en prison par le PCV. Beaucoup de journalistes ou de compositeurs n'ayant écrit qu'une seule chanson faisant l'éloge du patriotisme ont été emprisonnés, comme Mme Ta Phong Tan et des musiciens comme Viet Khang et Tran Vu Anh Binh, et les violences contre les blogueurs, les journalistes indépendants et les musiciens nourrissant des idéaux patriotiques ont continué à un rythme effarent en 2014.
    Je vais vous donner quelques exemples particuliers. La correspondante Anna Huyen Trang du journal des Rédemptoristes de Saïgon, s'est vu interdire de quitter l'aéroport Tan Son Nhat à 21 h 30 le 13 avril 2014. À 23 h 30, les gardes de sécurité sont arrivés et l'ont battue, l'ont saisie par le cou et l'ont traînée à l'extérieur en présence d'une très grande foule et d'amis de la journaliste.

  (1315)  

    En raison des blogues qui exposent la corruption des représentants de l'État, le Tribunal populaire de Hanoï a condamné le 19 mars dernier l'auteur et blogueur Pham Viet Dao à 15 mois de prison pour avoir abusé de ses libertés démocratiques aux termes de l'article 258 du Code pénal. Pham Viet Dao, lui-même, avait travaillé au département de la cinématographie du ministère de la Culture, puis comme inspecteur du département jusqu'en 2007.
    M. Dao faisait partie de l'association des rédacteurs de l'État et avait traduit beaucoup d'ouvrages en roumain. Il avait étudié à l'étranger et détenait un diplôme collégial en littérature. Le lundi 9 juin 2014, la Cour d'appel, en audience secrète, a révisé sa sentence, l'a approuvée et a confirmé le verdict original de 15 mois d'emprisonnement pour l'auteur Pham Viet Dao. Le plus déplorable dans l'histoire, c'est que le tribunal n'avait même pas informé son épouse et ses enfants de l'appel, si bien que son épouse et ses enfants n'étaient pas présents et qu'il n'avait pas d'avocat. Il a dû se défendre lui-même.
    En février 2014, les militants Bui Thi Minh Hang, Nguyen Thi Thuy Quynh et Nguyen Van Minh ont été arrêtés en route vers le domicile de Nguyen Bac Truyen, un autre militant, au motif fabriqué d'obstruction de la circulation. Ces trois personnes ont été condamnées en août 2014, sur la base d'accusations de troubles de l'ordre public, à deux à trois ans d'emprisonnement.
    La répression contre les blogueurs se poursuit. Je souligne en particulier qu'en mai 2014, les autorités ont emprisonné l'éminent blogueur Nguyen Huu Vinh, mieux connu sous le nom d'Anh Ba Sam, et son collaborateur Nguyen Thi Minh Thuy, qu'ils accusaient d'avoir contrevenu à l'article 258. Au total au moins 10 personnes ont été trouvées coupables d'infraction à l'article 258 en 2014.

  (1320)  

    En outre, sachez que les défenseurs des droits de la personne sont violemment battus. C'est une situation alarmante et très courante. Par exemple, des voyous à la solde de la police ont attaqué et gravement blessé l'ancien prisonnier politique et blogueur Truong Minh Duc en novembre 2014, ce qui lui a valu une hospitalisation de plusieurs semaines.
     À 10 h 30, le 29 novembre 2014, les services de sécurité et d'enquête de Hô Chi Minh-Ville ont procédé à l'arrestation du blogueur Hong Le Tho et l'ont inculpé en vertu de l'article 258. M. Tho est né en 1949 et il était un résident permanent du 32, rue Cuu Long, dans le quartier 15 du district 10 de Hô Chi Minh-Ville. Il était populaire et avait un blogue, le Nguoi Lot Gach. En fait, il écrivait sur la situation sociale et les problèmes de corruption des fonctionnaires.
     Le blogueur Nguyen Quang Lap, du réputé blogue Que Choa, s'est fait perquisitionné son domicile le matin du 12 juin 2014 et a été arrêté le jour même, à 14 heures, à Saigon. Son ordinateur a été confisqué parce qu'il rédigeait constamment des articles sur les faiblesses de la société en s'opposant à l'État. Il a été arrêté en application de l’article 258, pour utilisation abusive des libertés démocratiques, mais il a été condamné en vertu de l'article 88, pour propagande contre l'État.
    Le blogueur Nguyen Ngoc Gia a été arrêté le 27 décembre 2014. Son véritable nom est Nguyen Dinh Ngoc. Il est né en 1966. Il a écrit pendant six ans, de façon régulière, sur les prisonniers d'opinion, les pétitionnaires condamnés injustement et les critiques des politiques du Parti communiste du Vietnam. Au moment de son arrestation, la police de l'État a indiqué sur son site web qu'il avait été arrêté sans toutefois spécifier la raison de son arrestation ni le lieu où il se trouvait.
    Plus récemment, un jeune blogueur, Nguyen Viet Dung, a pris part à une manifestation pacifique à Hanoï, en compagnie de ses amis, afin de protester contre l'abattage de milliers d'arbres. Ces personnes ont fait l'objet d'une enquête par les services policiers du district de Hoan Kiem et ont été poursuivis en application de l'article 245 du Code pénal pour avoir troublé l'ordre public.

  (1325)  

    Mesdames et messieurs, sachez qu'il y a bien d'autres actes de répression commis par le gouvernement du Vietnam en violation des droits de la personne et de la liberté d'expression dans ce pays, mais nous ne pouvons pas tous les énumérer, faute de temps. Je voulais tout de même vous faire part d'une petite partie de ces violations commises par les autorités communistes afin de sensibiliser le Parlement canadien et les comités de défense des droits de la personne et de la démocratie de partout dans le monde devant l'urgence de la situation au Vietnam.
    Un pays comme le Vietnam qui s'est joint au Conseil des droits de l'homme doit également respecter les droits de la personne. Par conséquent, s'il continue de supprimer la liberté et la démocratie, j'aimerais que le Parlement du Canada et d'autres pays, ainsi que les Nations unies, imposent des sanctions efficaces aux autorités du PCV. Il ne faudrait pas que le Vietnam prenne part au Partenariat transpacifique car il ne respecte pas les exigences relatives aux droits de la personne. Vous devez également exercer des pressions sur le gouvernement afin qu'il respecte la liberté d'expression et de la presse ainsi que la démocratie. Il doit libérer tous les prisonniers d'opinion, abolir l'article 4 de la Constitution et tenir des élections libres.
     Si le Vietnam continue de bafouer les droits de la personne, le gouvernement canadien devrait songer à réduire l'aide qu'il apporte au régime communiste.
    Si j'ai bien compris, les droits de la personnes prévus dans toutes les déclarations internationales sont les droits naturels de tous et chacun. Nous sommes ici aujourd'hui pour convaincre les organisations internationales de défense des droits de l’homme, de même que le Parlement canadien, que les droits de la personne au Vietnam ne peuvent pas être ainsi lésés.
    Nous pensons également que le gouvernement du Canada, et particulièrement le comité des droits de la personne, devrait former une délégation indépendante qui surveillerait la situation des droits de la personne au Vietnam afin de constater l'ampleur des violations dans ce pays. Le peuple vietnamien aimerait pouvoir jouir des mêmes droits de la personne et des mêmes libertés que tout le monde.
    Enfin, de notre côté, nous continuerons de suivre de près les violations des droits de la personne commises par les autorités communistes et nous en informerons le Conseil des droits de l'homme et le Parlement canadien lorsqu'il y aura lieu d'intervenir pour défendre les droits légitimes du peuple vietnamien.

  (1330)  

    Je vous remercie de votre attention.
    Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant passer à la période de questions. Nous nous en tiendrons à des séries de questions de quatre minutes. Advenant que vous obteniez une brève réponse à votre question, vous pourrez en poser une deuxième; autrement, je crains qu'on doive se limiter à une question par intervenant.
    Monsieur Sweet, c'est vous qui ouvrez le bal.

  (1335)  

    Merci, monsieur le président, et merci, monsieur Pham, pour votre témoignage. J'ai une question à deux volets.
    Monsieur Pham, j'ai entendu la longue série de violations des droits de la personne que vous avez énumérée et j'aimerais vous lire un extrait d'un article de Reuters publié le 11 mai dernier. Cet article se lit comme suit:
Tom Malinowski a dit que le Vietnam faisait preuve d'un peu plus de retenue cette année, en détenant moins de prisonniers politiques et en n'engageant pas de nouvelles poursuites contre des dissidents, mais que les progrès étaient fragiles et que des « problèmes très importants » perduraient.
Malinowski, secrétaire d'État adjoint à la démocratie, aux droits de l'homme et au travail, a indiqué aux journalistes, à l'occasion d'un dialogue annuel sur les droits de la personne, que le « Vietnam avait parcouru beaucoup de chemin, mais qu'il lui en restait encore beaucoup à faire. »
    Tout d'abord, êtes-vous d'accord avec le secrétaire d'État adjoint pour dire que la situation s'améliore?
    Ensuite, lorsqu'on voit de telles violations, croyez-vous que les services de police travaillent sous les ordres du Parti communiste du Vietnam ou de façon indépendante?
M. Manh Hung Pham (Interprétation):
    Je ne suis pas d'accord avec lui.
    Selon vous, la police agit-elle de façon indépendante? Autrement dit, est-ce qu'elle a ses propres raisons d'arrêter ces gens ou si elle est dirigée par le Parti communiste du Vietnam?
M. Manh Hung Pham (Interprétation):
    Je ne suis pas de cet avis car j'estime que la police au Vietnam est un outil du gouvernement et elle ne peut rien faire sans l'approbation des autorités.
    Enfin, vous avez indiqué qu'une vingtaine de personnes avaient été emprisonnées pour avoir pratiqué leur religion au cours des premiers mois de 2014. Est-ce qu'on persécute un groupe en particulier ou s'il s'agit de n'importe qui qui pratique une religion au Vietnam?
M. Manh Hung Pham (Interprétation):
    Ces 20 personnes n'appartiennent pas à une religion en particulier, mais ce sont des adeptes d'organisations religieuses et de sociétés qui ne sont pas approuvées par le gouvernement.
    J'ai bien peur que ce soit terminé.
    Monsieur Marston, la parole est à vous.
    Merci, monsieur le président.
    Je vous souhaite la bienvenue et je vous remercie de votre témoignage. Je vais vous poser une question légèrement différente de ce que je pose en temps normal. Au cours des dernières années, j'ai été pressenti par un groupe, le Viet Tan. J'aimerais savoir ce que vous pensez de ce groupe, parce que ses rapports me semblent presque identiques à ce que vous nous dites aujourd'hui.

  (1340)  

M. Manh Hung Pham (Interprétation):
    Monsieur, sachez que je suis un militant indépendant au Vietnam et que mon travail n'est pas du tout lié au Viet Tan, mais selon moi, le Viet Tan est également un parti qui lutte pour la liberté et la démocratie au Vietnam.
    Je suis ravi de l'entendre. C'est également l'impression que j'avais lorsque je les ai rencontrés, mais c'était ma chance d'avoir un deuxième avis.
    Je suis préoccupé par le nombre de journalistes et de blogueurs qui ont été arrêtés ces dernières années. Les magistrats peuvent-ils juger les cas de façon indépendante ou sont-ils entièrement sous l'emprise du gouvernement?
    Les juges sont-ils indépendants du gouvernement? Sont-ils en mesure de rendre des décisions en toute objectivité?
M. Manh Hung Pham (Interprétation):
    Je dirais qu'au Vietnam, les juges qui aimeraient être indépendants ne sont habituellement pas autorisés à présider les procès des habitants de l'endroit et des militants.
    L'une des choses que l'on remarque, c'est qu'avec la montée fulgurante d'Internet, des blogues et des outils de communication sur le Web, on s'en prend plus rapidement aux médias traditionnels et à la télévision dans les différents pays. On a du rattrapage à faire au chapitre de l'Internet. Est-ce le cas au Vietnam? Parce que dans d'autres pays, on semble accuser un certain retard, particulièrement en Corée du Nord, par exemple.
    En sommes-nous au point où tout est intercepté sur Internet? La télévision et tous les autres médias traditionnels sont beaucoup plus faciles à contrôler qu'Internet. Par conséquent, les méthodes d'intervention sont-elles devenues plus sophistiquées?
M. Manh Hung Pham (Interprétation):
    En fait, les autorités vietnamiennes exercent un contrôle strict d'Internet depuis longtemps. Au sein de la police, une section spéciale est chargée de gérer et de surveiller les activités sur le Web. On a également installé un pare-feu pour empêcher les gens d'obtenir des nouvelles de l'extérieur. Il y a aussi un décret, signé par le premier ministre lui-même, qui interdit les gens d'utiliser Internet pour faire passer des messages de démocratie et de liberté.

  (1345)  

    Merci, monsieur le président.
    Merci.
    Je cède maintenant la parole à Mme Grewal.
    Merci, monsieur le président, et merci, monsieur Pham, de votre témoignage aujourd'hui devant notre sous-comité.
    Le gouvernement du Vietnam continue d'enfreindre les droits de la personne et se classe parmi les pires contrevenants dans le monde. En fait, le Vietnam se situe au 174e rang parmi 180 pays, selon le Classement mondial de liberté de la presse de 2014 de Reporters sans frontières. En 2014, les autorités ont engagé des poursuites contre au moins 29 dissidents et activistes et les ont condamnés à un total de 129 années d'emprisonnement. Elles ont également procédé à l'arrestation d'au moins 13 autres défenseurs des droits de la personne, qui font actuellement l'objet d'une enquête ou attendent leur procès.
    Monsieur Pham, pourriez-vous nous parler des engagements volontaires que le Vietnam a pris devant le Conseil des droits de l'homme des Nations Unies? Dans quelle mesure le gouvernement vietnamien a-t-il respecté ses engagements volontaires à l'égard des Nations Unies?
M. Manh Hung Pham (Interprétation):
    Mesdames et messieurs, avant de se joindre au Conseil des droits de l'homme des Nations Unies, le Vietnam a promis des tas de choses. Il a notamment promis de tenir des élections libres, de ne pas punir les blogueurs et d'accepter la liberté d'expression et la liberté de la presse. Toutefois, jusqu'à présent, aucun de ces engagements n'a été honoré, même si parfois, juste pour la parade, le gouvernement va relâcher un blogueur ou un dissident, mais en arrêtera trois ou quatre fois plus par la suite.
    Ces gens se sont vus imposer de longues peines d'emprisonnement et, même lorsqu'ils sont libérés, ils sont assignés à résidence, ce qui est une autre forme d'emprisonnement, sans les barreaux.
    J'aimerais ajouter que le Vietnam a également signé la Convention des Nations Unies contre la torture, sauf qu'il continue de pratiquer la torture et a même refusé la visite d'une délégation de la commission.

  (1350)  

    Madame Sgro.
    Merci, monsieur le président, et merci à vous deux et aux autres représentants de votre communauté. Soyez les bienvenus. Je suis ravie que vous soyez parmi nous aujourd'hui. À vous entendre parler, je suis encore plus heureuse que vous soyez au Canada.
    Dans le peu de temps dont je dispose, j'aimerais vous poser une question au sujet du Partenariat transpacifique que le gouvernement négocie actuellement avec le Vietnam. Selon vous, devrions-nous lier les questions des droits de la personne à cet accord?
M. Manh Hung Pham (Interprétation):
    Absolument, madame. Comme je l'ai indiqué dans ma déclaration, les négociations entourant le PTP doivent définitivement englober les questions des droits de la personne au Vietnam. C'est également l'avis qu'a récemment exprimé le président Obama, lorsqu'il a déclaré que le PTP devait impliquer les syndicats indépendants et les questions des droits de la personne au Vietnam.
    Y a-t-il des questions dont le gouvernement du Vietnam ne voudra pas discuter, au chapitre de la libre expression et de l'échange d'idées? Y a-t-il des sujets précis que le gouvernement vietnamien ne voudra pas aborder et dont vous pourriez nous parler?
M. Manh Hung Pham (Interprétation):
    Oui, il y a beaucoup de choses, mais permettez-moi de rappeler certains faits liés à Ho Chi Minh lui-même. Sachez qu'il a dirigé le Vietnam, mais qu'il a aussi commis de nombreux crimes, et le plus grave est sans doute la campagne de réforme agraire dans laquelle des centaines de milliers de personnes ont été tuées. Je connais bien cette situation, et j'ai d'ailleurs écrit à ce sujet, mais c'est un sujet tabou au Vietnam.
    C'est tout. Quatre minutes pour le deuxième tour.
    Monsieur Hillyer, allez-y, je vous prie.
    Vous avez recommandé certaines sanctions. Évidemment, ce qui complique les choses, c'est l'incidence que ces sanctions peuvent avoir sur les gens qui vivent dans le pays en question. Habituellement, nous n'hésitons pas à imposer des sanctions quand nous savons qu'elles toucheront uniquement les personnes à l'origine du problème, mais ici, nous ne voudrions surtout pas aggraver le sort des personnes qui font déjà l'objet de violations.
    Qu'en pensez-vous? Comment pourrions-nous bien faire la part des choses?

  (1355)  

M. Manh Hung Pham (Interprétation):
    En réalité, sachez que la majorité de la population vit dans la pauvreté. Tout l'argent qui découle de la récente aide étrangère, des investissements étrangers et de la prospérité économique aboutit entre les mains des personnes qui détiennent l'autorité au Vietnam. Étant donné qu'au Vietnam, il n'y a qu'un seul parti, le gouvernement contrôle les entreprises. Quels que soient les avantages, ce sont les autorités qui en profite et non pas la population. Par conséquent, si on applique des sanctions, le peuple vietnamien en général, qui vit déjà dans la pauvreté, n'en souffrira pas énormément.
    Ensuite, si nous n'imposons pas de sanctions et que, malgré tout, nous continuons d'accepter le Vietnam dans le cadre du Partenariat transpacifique, ce pays tiendra pour acquis que nous n'accordons pas d'importance à ces violations. Il continuera de réprimer la liberté, d'harceler les dissidents et de priver les gens de leurs droits à la liberté et à la démocratie.
    Malheureusement, c'est tout le temps dont nous disposons pour cette série de questions.
    Monsieur Benskin.
    Merci, et merci de votre témoignage.
    Comme mon collègue l'a dit plus tôt, ce que vous dites correspond exactement à ce que nous ont dit d'autres témoins, alors je vous en remercie.
    Il y a quelques questions qui me viennent à l'esprit, mais tout d'abord, j'aimerais revenir sur ce que vous venez de dire, car selon mes notes, le taux de pauvreté au Vietnam est passé de 58 % en 1993 à 11 % en 2012. Pourtant, vous venez tout juste de dire que la majorité de la population vietnamienne vit toujours dans la pauvreté.
    Pourriez-vous nous en dire davantage à ce sujet?
M. Manh Hung Pham (Interprétation):
    Avez-vous dit 58 %?
    Oui, 58 % en 1993 et 11 % en 2012.

  (1400)  

M. Manh Hung Pham (Interprétation):
    J'ai deux choses à dire. Premièrement, les statistiques au Vietnam sont souvent douteuses, et deuxièmement, grâce aux investissements étrangers et à l'aide qu'ont apportée de nombreux pays au cours des dernières décennies, le PIB s'est accru considérablement, mais il n'en demeure pas moins que la distribution des richesses est déplorable. Les richesses se trouvent entre les mains d'une petite minorité. Lorsqu'on parle du PIB par habitant, c'est plus élevé, mais lorsqu'on regarde la situation de plus près, on constate qu'il y a des segments de la population qui ne bénéficient aucunement de cette prospérité.
    Merci.
    En ce qui a trait aux blogueurs, vous dites que c'est un groupe sur lequel on s'acharne. D'où les blogueurs tirent-ils leur information? Ont-ils accès à Internet? L'Internet est-il facilement accessible au Vietnam ou si les blogueurs ont trouvé un moyen détourné d'y avoir accès?
M. Manh Hung Pham (Interprétation):
    Exactement. Comme je l'ai dit dans ma déclaration, le gouvernement exerce un contrôle très strict d'Internet. Les blogueurs et d'autres gens ont de la difficulté à transmettre les vraies informations au reste de la population. Le premier ministre du Vietnam a signé trois décrets qui limitent l'utilisation de l'Internet et qui assujettit la diffusion des renseignements à un contrôle très strict.
    Cela dit, nous exhortons le Canada et d'autres pays ainsi que les organisations qui militent pour la protection des droits de la personne à venir en aide au peuple vietnamien qui réclame une société plus libre et des moyens d'expression.

  (1405)  

    Merci beaucoup.
    Merci, chers collègues, de votre présence, et merci à notre témoin d'avoir témoigné aujourd'hui et surtout d'avoir fait preuve de patience malgré les problèmes de logistique attribuables à la barrière de la langue. Nous vous sommes très reconnaissants d'avoir été des nôtres aujourd'hui.
    Chers collègues, il est passé 14 heures, ce qui est notre heure habituelle, alors la séance est levée.
    Merci.
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