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TRAN Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent des transports, de l'infrastructure et des collectivités


NUMÉRO 019 
l
2e SESSION 
l
41e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 1er avril 2014

[Enregistrement électronique]

  (0845)  

[Traduction]

    Pendant la première heure, nous avons des représentants du Bureau de la sécurité des transports. Merci beaucoup de vous être déplacés.
    Sur ce, je vous cède la parole. Je suis certain que vous avez des remarques liminaires à faire.
    Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, je tiens tout d'abord à vous remercier d'avoir invité à comparaître le Bureau de la sécurité des transports du Canada.
    Je suis accompagnée de trois collègues possédant une solide expérience. M. Jean Laporte, administrateur en chef des opérations du BST, fait partie de notre équipe depuis sa fondation en 1990 et connaît parfaitement notre mandat et nos processus. Mme Kathy Fox est membre du bureau depuis 2007. Elle possède plus de quatre décennies d'expérience dans le secteur de l'aviation et elle est experte des systèmes de gestion de la sécurité. M. Kirby Jang est notre directeur, Enquête rail et pipeline. Il est la personne tout indiquée pour fournir plus de contexte et d'information sur les enquêtes du BST dans le secteur du rail, ainsi que les statistiques que nous conservons et la raison pour laquelle nous le faisons.
    Nous comparaissons devant vous relativement à l'examen que vous faites du transport des matières dangereuses et du rôle des systèmes de gestion de la sécurité.
    Plusieurs accidents médiatisés, ici et chez nos voisins du Sud, ont attiré l'attention du public sur la sécurité ferroviaire et le transport du pétrole brut. Ces accidents nous ont contraints à réexaminer si nos activités sont suffisamment sûres et, si ce n'est pas le cas, à déterminer les mesures nécessaires pour corriger la situation.
    Nous ne pouvons que constater aujourd'hui une inquiétude accrue et, nous devons bien l'admettre, une érosion de la confiance du public. Il y a cinq ans, la quantité de pétrole que l'on transportait par rail au Canada pouvait remplir 500 wagons-citernes, soit l'équivalent de cinq ou six longs trains. Mais l'an dernier, ce nombre a atteint 160 000 et sera sans doute plus élevé dans les années à venir. Le public sait que ce pétrole est en grande partie volatile.
    Aucun accident n'illustre aussi bien ces risques que celui survenu en juillet dernier à Lac-Mégantic, où le déraillement d'un train qui transportait du pétrole brut a causé un incendie¸ et fait 47 victimes. Nous en avons encore pour plusieurs mois à mener cette enquête à terme et à en faire rapport.
    Cela dit, dès le début de cette enquête, nous avons constaté d'importants enjeux de sécurité, que nous avons communiqués aux organismes de réglementation. Puis, vers la fin janvier, dans une démonstration de collaboration transfrontalière sans précédent, le National Transportation Safety Board, ou NTSB, et le BST ont formulé plusieurs recommandations qui visaient à accroître la sécurité du transport du pétrole brut à l'échelle de l'Amérique du Nord.
    Au Canada, nous avons demandé l'adoption de normes plus strictes concernant les wagons-citernes de catégorie 111 car à Lac-Mégantic, le train en cause était entièrement composé de wagons-citernes plus anciens non protégés, et presque chacun d'eux s'est rompu, alimentant l'incendie.
    Sur cette photo, vous pouvez constater à quel point le wagon qui se trouvait au milieu du train est endommagé. Même les wagons-citernes de la queue du train, ceux qui se déplaçaient à une vitesse relativement lente au moment du déraillement, ont été gravement endommagés. On en a tiré la leçon qui s'impose.
    À l'heure actuelle, le secteur du rail examine l'adoption d'une nouvelle norme pour les wagons-citernes de catégorie 111 de service général, et c'est très bien. Pourtant un retrait progressif des wagons-citernes plus anciens est tout simplement insuffisant. Une telle approche fait persister un trop grand nombre de risques dans le système. C'est pourquoi nous affirmons sans hésitations que les marchandises qui posent d'importants risques doivent être expédiées dans des contenants sûrs, et le plus tôt possible.
    Notre deuxième recommandation porte sur la façon dont les chemins de fer planifient leurs transports, notamment le choix des itinéraires pour transporter le pétrole et d'autres matières dangereuses, et comment ils veillent à la sécurité des activités sur ces routes. En ce sens, nous devons examiner de manière exhaustive de nombreuses variables d'un bout à l'autre du réseau. Nous devons tenir compte de tout ce qui se trouve le long de chaque itinéraire, déterminer ceux de rechange et choisir ceux qui présentent le moins de risque. Cela signifie, par exemple, s'assurer que les voies sont entretenues selon les normes les plus strictes, que les trains circulent à la vitesse indiquée et que des systèmes de détection sont installés aux bons endroits le long des voies. Nous demandons également un suivi des évaluations des risques, afin de nous assurer que les mesures qui sont prises garantissent la sécurité de nos collectivités.

  (0850)  

    La dernière de nos recommandations initiales concernant l'enquête sur l'accident à Lac-Mégantic vise à s'assurer que si un accident se produit, malgré toutes les mesures de prévention possibles, des ressources suffisantes soient en place pour réduire la gravité et l'incidence d'un déversement. Nous avons donc demandé la mise en place de plans d'intervention d'urgence lorsqu'on expédie d'importantes quantités d'hydrocarbures liquides, comme le pétrole.
    Nous attendons ce mois-ci une réponse à nos recommandations. Par ailleurs, nous trouvons encourageante la réponse de la ministre à nos communications initiales concernant l'accident à Lac-Mégantic. En effet, la ministre semble comprendre les risques liés à l'accroissement du transport du pétrole par rail, les enjeux et l'impératif d'aborder les risques soulignés par le BST. J'espère qu'en réponse à nos recommandations, la ministre mettra en oeuvre des initiatives qui aborderont systématiquement ces trois importants enjeux de sécurité.
    J'aimerais maintenant aborder l'un des autres moyens d'assurer la sécurité optimale de notre système de transport. Il s'agit du deuxième sujet que votre comité est chargé d'examiner, soit le système de gestion de la sécurité ou SGS. Comme l'a si bien dit ma collègue Kathy Fox, les systèmes de gestion de la sécurité aident les entreprises à cerner les problèmes avant qu'ils ne surviennent. Soyons clairs, ils n'ont rien d'une panacée. Il s'agit plutôt d'un très bon outil qui aide à cerner les plus grands risques, afin que l'on prenne à l'avance les mesures nécessaires pour les réduire.
    Au Bureau de la sécurité des transports, nous estimons que les SGS sont si importants qu'ils faisaient partie de notre première liste de surveillance, déjà en 2010. Pour être honnête, les principaux chemins de fer au Canada ainsi que plusieurs chemins de fer d'intérêt local ont fait de grands pas dans la mise en oeuvre de SGS. Mais 12 ans plus tard, bon nombre de ces systèmes n'ont pas encore atteint leur maturité. Cela signifie qu'ils ne rapportent pas encore les dividendes attendus. Je parle ici de la nécessité de vérification et d'une rigoureuse surveillance réglementaire. Je parle d'inspections fondées sur les risques et, lorsque la situation l'exige, la mise en place de mesures nécessaires pour faire respecter la réglementation. Le rapport du vérificateur général réaffirme l'importance de tous ces éléments, et le BST est entièrement d'accord.
    Avant de conclure, permettez-moi de souligner que nous avons récemment mis à jour notre règlement, de façon à moderniser les règles de signalement des incidents au BST et à aligner notre règlement sur les seuils indiqués dans la réglementation sur le transport de matières dangereuses. Cela entraînera un plus grand nombre de signalements d'incidents de train; par exemple, tous les déraillements mineurs d'une ou deux roues doivent désormais être signalés au BST. De plus, selon notre nouveau règlement, tout déversement de matières dangereuses qui entraîne des conséquences telles qu'une perte de vie, une blessure, une collision, un déraillement, un incendie ou une explosion ou toute autre menace à la sécurité doit être signalée, quelle que soit l'ampleur du déversement.
    Voilà donc où nous en sommes aujourd'hui. Aucun des enjeux de sécurité ne va se résoudre dans un avenir rapproché, et votre comité a tout un défi à relever. Pas simplement celui d'examiner les enjeux des SGS et du transport de matières dangereuses; pas uniquement de tenir des audiences pour trouver des façons d'assurer la plus grande sécurité possible de nos chemins de fer, de nos voies navigables, de nos pipelines et de nos espaces aériens, mais aussi celui de formuler des recommandations qui mèneront à des mesures concrètes pour renforcer et rétablir la confiance ébranlée du public. Nous tous au BST partageons ces mêmes objectifs. Nous avons pour mandat de promouvoir la sécurité des transports. Nous y avons consacré plus de deux décennies et vous pouvez être certains que nous sommes engagés, informés, et prêts à collaborer.
    Merci, monsieur le président.
    Merci beaucoup, madame Tadros.
    La photo que vous avez là — vous savez, les photos ne disent pas tout —, mais le fait d'y être allé l'été dernier me rappelle que c'était une terrible tragédie, une situation épouvantable.
    Merci beaucoup pour vos remarques liminaires.
    Sur ce, vous avez sept minutes, monsieur Mai.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Je remercie les témoins d'être venus nous rencontrer aujourd'hui. Je les remercie surtout pour le travail qu'ils accomplissent au sein du Bureau de la sécurité des transports du Canada.
     Pour nous, au NPD, toutes les recommandations que vous faites sont très importantes. En conclusion, vous avez dit que nous avons besoin d'action. Quand le Bureau de la sécurité des transports du Canada a-t-il soulevé les problèmes liés aux wagons-citernes DOT-111? Quand avez-vous signalé la première fois qu'il y avait des problèmes à cet égard?

  (0855)  

[Traduction]

    Nous avons signalé pour la première fois les problèmes que présentaient ces wagons il y a une vingtaine d'années. Ils ont commencé à faire surface dans nos enquêtes. Nous avions souligné des points très précis sur ces wagons. Au fil du temps, nous en avons appris davantage. Je dirais que cet accident nous a donné la possibilité d'apprendre énormément, car tout le train était composé de wagons-citernes de catégorie 111. Nous avons pu étudier chaque wagon-citerne pour en constater la performance et les défaillances. C'est la raison pour laquelle nous avons présenté une recommandation très stricte le 23 janvier.

[Français]

    Je vous remercie beaucoup de vos recommandations.
    Concernant les vieux wagons-citernes DOT-111, vous avez dit qu'il fallait les retirer. Concernant le retrait graduel de ces vieux wagons, nous n'avons toujours pas d'échéancier.
    Le gouvernement dit que nous devons travailler avec nos voisins du Sud, soit les États-Unis. D'après vous, est-il possible de formuler une recommandation selon laquelle les vieux wagons-citernes DOT-111 seraient visés par un interdit de circulation dans les endroits densément peuplés, par exemple, dans les centres-villes? Ne serait-ce pas une recommandation acceptable d'ici à ce que le gouvernement fixe au moins un échéancier?

[Traduction]

    Je ne suis pas certaine que ce soit possible d'un point de vue systémique. Lorsque je constate ce qui est transporté partout au Canada et les itinéraires qu'empruntent ces marchandises, je ne suis pas convaincue qu'il soit possible d'éviter toutes les régions urbaines. Nous aimerions davantage voir une approche systémique selon laquelle ces anciens wagons seraient éliminés progressivement afin que les wagons qui passent par nos collectivités soient plus sécuritaires.

[Français]

    Je sais que la ministre des Transports a dit qu'un échéancier de 10 ans, comme le proposent les États-Unis, est trop long. Nous savons que le Canadien National a dit que son échéancier est d'environ quatre ans. La compagnie pétrolière Irving a fait mention d'un échéancier d'un an. Êtes-vous en mesure de formuler une recommandation concernant l'échéancier? Autrement, souhaitez-vous laisser au gouvernement la responsabilité d'établir son propre échéancier?

[Traduction]

    Nous avons dit que le plus tôt sera le mieux. Plus nous attendons pour retirer ces wagons de la circulation, plus le risque perdurera. La situation est très complexe et vous avez tout à fait raison de mentionner la nécessité de coordonner notre action avec les Américains. La circulation transfrontalière étant constante, on ne peut pas distinguer les wagons américains des canadiens. C'est impossible.
    Nous avons dit aux organismes de réglementation « c'est à vous de trouver une solution et de présenter un échéancier qui verra l'élimination de ces wagons ». Le plus tôt sera le mieux.

[Français]

    Vous dites que vous avez discuté avec le ministère des Transports concernant vos recommandations en vue d'un plan. Êtes-vous au courant si le ministère a un plan spécifique en ce qui concerne l'échéancier?

[Traduction]

    Pour ce qui est des recommandations du BST, la ministre a 90 jours pour répondre à nos recommandations. Ce délai arrive le 23 avril. Nous allons surveiller la réponse de très près.

[Français]

    À la suite de la tragédie de Lac Mégantic, vous avez dit que le ministère des Transports devrait exiger des plans d'intervention d'urgence pour le transport de grandes quantités d'hydrocarbures liquides? N'est-ce pas actuellement le cas? Quelles sont les lacunes et pour quelles raisons devez-vous faire ce type de recommandations alors qu'il aurait été normal que cela existe déjà? Est-ce qu'il y a présentement des lacunes de la part du gouvernement à cet égard?

[Traduction]

    Pour certains produits, il faut un plan d'intervention d'urgence, mais ce n'est pas requis pour le pétrole brut à l'heure actuelle. Nous disons qu'il faut que cela s'applique au pétrole brut.

  (0900)  

[Français]

    Le Bureau de la sécurité des transports a-t-il exprimé des inquiétudes? Nous savons que Transports Canada a récemment effectué des études sur le classement du pétrole brut dans une catégorie. Le BST a-t-il déjà soulevé que le pétrole brut est aujourd'hui plus dangereux en raison des additifs qu'on y ajoute? Si oui, depuis combien de temps?

[Traduction]

    C'est en septembre que nous avons soulevé pour la première fois la question des propriétés du pétrole brut dans les wagons-citernes de Lac-Mégantic. Le gouvernement a exigé des tests et la classification appropriée de ces produits.

[Français]

    J'aimerais revenir à la question des SGS dont vous avez parlé. À votre avis, pour que les municipalités puissent agir et puissent se préparer, ne faudrait-il pas qu'elles soient bien informées des produits qui circulent sur leur territoire pour s'assurer qu'elles ont les ressources nécessaires pour prévenir ou pallier tout accident ou tout événement grave?

[Traduction]

    C'est une question qui revient aux municipalités, aux provinces et à Transports Canada. Notre souci, c'est d'avoir un plan d'intervention d'urgence, ainsi que les ressources et le matériel adéquats en cas de catastrophe.
    Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant passer à M. McGuinty, pendant sept minutes.
    Bonjour à tous. Merci d'être là.
    J'aimerais brièvement vous poser une question concernant l'enquête à Lac-Mégantic. Le Bureau de la sécurité des transports a-t-il les ressources financières nécessaires pour mener à bien ce travail?
    Absolument. Au BST, nous menons notre action en fonction du budget qui nous est alloué, mais en cas de circonstances extraordinaires, nous pouvons demander des ressources supplémentaires au Conseil du Trésor. Nous pouvons en faire la demande. Nous l'avons fait dans le cadre de cette enquête et ces fonds ont été approuvés.
    D'accord.
    Cette enquête est une de nos priorités absolues.
    Ma deuxième question porte sur les notes que vous avez distribuées et le discours que vous avez prononcé madame Tadros. Cela porte sur les SGS. Vous dites que les SGS sont un très bon outil pour prendre les mesures à l'avance. Vous dites ensuite que vous voyez d'un mauvais oeil la façon dont les systèmes de gestion de la sécurité font l'objet de surveillance par l'organisme de réglementation, soit Transports Canada. Vous dites qu'il faut effectuer des vérifications et qu'il doit y avoir une surveillance réglementaire rigoureuse. Vous citez le rapport du vérificateur général. Je crois que la majorité des Canadiens comprennent; ils comprennent qu'il existe un partenariat entre l'organisme de réglementation — le gouvernement — et les compagnies ferroviaires.
    Jusqu'où êtes-vous prêts à aller? Que doit-on faire ici au comité pour renforcer la surveillance réglementaire? Que pouvez-vous nous donner comme conseils.
    Je vais demander à Mme Kathy Fox de vous répondre parce que c'est son domaine de spécialité.
    Les systèmes de gestion de la sécurité sont très importants pour un mode de transport ou un organisme afin de cerner et de gérer les risques. Cela dit, il faut tout de même une surveillance rigoureuse. Cette surveillance peut prendre la forme d'inspections approfondies pour confirmer la conformité ou un audit pour connaître l'efficacité des processus. Le deux vont de pair. Les SGS ne devraient pas remplacer la réglementation ou la surveillance.
    Pourriez-vous donner à ce comité et aux Canadiens trois idées pratiques pour renforcer les SGS dans le cadre de la relation et l'interface entre le secteur privé et l'organisme de réglementation? Quelles sont les deux ou trois choses que nous devrions faire?
    Il faut d'abord vraiment voir comment les entreprises ont mis en oeuvre les SGS. Malheureusement, certaines entreprises les perçoivent comme un manuel et non pas un processus global qui doit être en oeuvre dans toute l'entreprise et qui fait en sorte que les gens pensent constamment à chercher ce qui pourrait aller mal. Tout d'abord, j'estime que l'organisme de réglementation doit examiner la façon dont les entreprises ont mis en oeuvre les SGS et non pas se contenter de vérifier si elles ont un processus en place. Il doit vérifier l'efficacité du processus.

  (0905)  

    Je vais peut-être changer de sujet pour parler de la responsabilité civile.
    Depuis l'accident à Lac-Mégantic, de nombreux Canadiens se sont demandés qui est responsable, qui aurait dû savoir et qui assurera les opérations de nettoyage. Nous n'en avons aucune idée, nous ne savons réellement pas quels seront les coûts à long terme. Nous n'avons aucune idée par exemple des coûts écologiques et environnementaux et du dommage causé aux cours d'eau.
    Un grand nombre de Canadiens m'ont écrit pour demander à ce que ce comité se penche sur la responsabilité civile et ont même été jusqu'à dire que la responsabilité devrait être partagée. Ils ont mentionné qu'il fallait inclure ceux qui importent, ceux qui sont propriétaires des matières dangereuses. Si, par exemple, une raffinerie de pétrole importe du bitume dilué, ou dans ce cas-ci, du pétrole brut de Bakken, et qu'il se produit un incident majeur, la responsabilité devrait être partagée non seulement avec le gouvernement fédéral, le gouvernement provincial et les compagnies ferroviaires, mais également avec le propriétaire du brut qui se trouvait dans le wagon-citerne. Vous êtes-vous penchés sur cette question?
    Non et nous n'allons pas nous pencher sur cette question, car cela ne fait pas partie de notre mandat. La loi qui nous régit est très claire, le Bureau n'est pas là pour attribuer le blâme ou la responsabilité. Nous n'abordons pas ces questions. On s'en remet à l'OTC. On s'en remet également aux tribunaux. On s'en remet à ceux qui élaborent des politiques au sein du gouvernement. Nous nous concentrons seulement sur les questions de sécurité.
    Je ne demande pas au Bureau de la sécurité des transports d'attribuer le blâme; je demande si le Bureau de la sécurité des transports a étudié la question de responsabilité dans un contexte d'amélioration de la sécurité. Si la responsabilité était partagée plus directement avec les propriétaires de matières dangereuses qui causent le problème, cela aurait-il une incidence par exemple sur la façon dont le propriétaire de ces produits pose des questions plus pertinentes aux expéditeurs et porte une attention beaucoup plus précise sur le mode d'expédition de ces produits? Cela augmenterait-il la sécurité?
    Il faudrait clairement prouver qu'il y a un lien étroit avec les questions de sécurité dans une enquête particulière avant que nous n'envisagions la possibilité.
    Est-ce quelque chose que vous envisagez en ce moment dans le cas de Lac-Mégantic?
    C'est une enquête en cours, alors en ce moment nous nous penchons sur tous les éléments et je ne peux pas révéler de détails.
    Vous avez parlé des PIU, les plans d'intervention d'urgence. Lorsque le gouvernement a annoncé de concert avec la Fédération canadienne des municipalités qu'ils étaient arrivés à une entente concernant la divulgation, un grand nombre de personnes étaient franchement ahuries d'apprendre que les compagnies ferroviaires allaient devoir divulguer ce qu'elles transportaient à travers une municipalité 90 jours après coup. Beaucoup de Canadiens sur le terrain, des conseillers, des maires et des citoyens demandaient pourquoi nous n'allions pas exiger une divulgation 90 jours à l'avance des matières qui passent à travers leurs municipalités afin qu'ils soient mieux préparés et que leurs premiers intervenants puissent être au courant et que tous les enjeux que vous avez soulevés puissent être traités.
    Avez-vous dit quoi que ce soit à ce sujet ou êtes-vous intervenu dans ce processus? Pourriez-vous nous aider à comprendre pourquoi c'est après coup et non pas avant?
    Nous n'avons pas participé à ce processus. Je crois que c'est un enjeu qui relève des politiques publiques et concerne les citoyens, les municipalités, le gouvernement et les compagnies ferroviaires. Nous intervenons lorsqu'il s'agit de questions de sécurité. Il existe une question de sécurité relativement aux premiers intervenants. Il faut absolument qu'ils sachent à quoi s'en tenir. Ils doivent absolument avoir les bonnes ressources en place en cas d'accident majeur. Voilà l'idée principale de notre troisième recommandation, qui préconise les plans d'intervention d'urgence.
    Merci.
    Je vais maintenant céder la parole à M. Watson pendant sept minutes.
    Merci à vous madame Tadros et à votre équipe dévouée. Nous sommes ravis que vous soyez ici au moment où nous commençons une enquête importante pour mieux comprendre comment améliorer les systèmes de gestion de la sécurité dans le transport des matières dangereuses. J'aimerais vous remercier ainsi que votre équipe pour le travail que vous réalisez, surtout dans cette enquête difficile sur le tragique accident à Lac-Mégantic.
    Tout d'abord, nous n'avons évidemment pas encore de rapport final. Savez-vous à quel moment il pourrait être prêt? Il est fort probable qu'il contiendra des recommandations supplémentaires?

  (0910)  

    J'hésite toujours à donner une date car sitôt que vous en donnez une, elle ne tient plus.
    Cette enquête est une de nos priorités absolues. Nous avons une équipe qui s'y consacre entièrement et de façon exclusive. Nous sommes à la troisième phase d'une enquête en trois phases, c'est-à-dire l'analyse et la rédaction d'une ébauche de rapport. Nous avons ensuite certaines procédures que nous devons absolument suivre car elles sont imposées par la loi. Il faut notamment distribuer une ébauche et recueillir les commentaires. Nous avons également un grand nombre de rapports de laboratoire qui ont été terminés. Vous pouvez imaginer que c'est une tâche colossale, mais nous tentons de présenter les résultats aux Canadiens le plus rapidement possible.
    Très bien. Je comprends. J'apprécie la rigueur que vous accordez à cette question particulière.
    J'aimerais maintenant passer à la question des contenants, si vous me le permettez. S'agissant de Lac-Mégantic, je crois que le train descendait à grande vitesse avant le déraillement. Sait-on à quelle vitesse allait le train avant le déraillement?
    Les gens au laboratoire, les ingénieurs, ont fait l'analyse et la vitesse dépend du wagon en question et de l'endroit exact où il se trouvait.
    Vous souvenez-vous de la vitesse moyenne au début?
    La vitesse de pointe était d'environ 65 milles à l'heure. Mais comme je l'ai dit plus tôt, les wagons de queue allaient à une vitesse beaucoup plus lente et, à l'exception du dernier wagon, vous pouvez constater qu'ils sont tous aussi endommagés que ceux qui allaient à grande vitesse. Nous ne croyons pas, et j'ai lu des articles de presse qui écartaient cette thèse... en effet, rien ne pouvait résister à une telle vitesse. Je rejette cette thèse.
    Je voulais justement vous poser cette question. Y a-t-il un contenant qui aurait pu y résister et si oui, quelles en seraient les caractéristiques? Cela nous orienterait bien sûr vers une norme, si vous voulez.
    Eh bien, je ne peux pas vous dire ce qui aurait pu y résister, mais je peux vous dire que si vous avez un wagon-citerne renforcé, il résistera beaucoup mieux. Les nouvelles propositions de l'Association of American Railroads contiennent des exigences en matière de renforcement.
    J'aimerais mieux comprendre votre position relativement aux normes des DOT-111. Nous croyons comprendre qu'il y en a deux catégories. La National Steel Car a témoigné ici et expliqué la différence entre ce qu'ils appellent les anciens wagons et les wagons plus nouveaux. La recommandation d'éliminer progressivement les DOT-111 s'applique-t-elle exclusivement aux anciens DOT-111 ou aux plus nouveaux également?
    J'essaie de bien comprendre votre recommandation.
    Nous avons dit au ministre des Transports que ces wagons doivent être le plus renforcés possible. Nous savons que les vieux wagons, les wagons qui se trouvaient à Lac-Mégantic, ne sont pas assez solides. Ils ne résistent pas aux collisions et aux déraillements et c'est ce que nous constatons depuis plus de 20 ans. Nous l'avons constaté ici et dans des accidents aux États-Unis.
    Une norme a été émise en 2011 qui est plus rigide que celle qui s'applique aux anciens wagons; nous avons cependant constaté que les wagons construits en fonction de la norme de 2011 ne résistent pas aux déraillements non plus. En fait, ces wagons sont munis d'un écran de tête de citerne et nous avons également parfois constaté des dommages à la tête du wagon.
    Nous avons suggéré au ministre de jeter un coup d'oeil à la nouvelle norme proposée par l'AAR.
    Je comprends car l'élimination progressive nous amène à nous poser la question d'une élimination pour nous orienter vers quoi, puisque nous n'avons pas de nouvelles normes. Manifestement si les anciens DOT-111 sont complètement inadéquats et que les nouveaux DOT-111 sont lacunaires, nous devons, de concert avec nos partenaires américains surtout, arriver à une nouvelle norme afin d'avoir une solution globale dans le cadre de cette élimination progressive.
    Lorsque nous aurons cette norme, j'estime que nous pourrons prévoir avec plus d'exactitude quelle devra être la période d'élimination progressive.

  (0915)  

    Oui.
    Je comprends.
    Les interventions en cas d'urgence sont une composante évidemment très importante du régime de transport de marchandises dangereuses. Comme nous le savons, dans une large mesure grâce à vos efforts pour nous orienter en ce sens, nous cherchons à combler les lacunes en ce qui concerne le pétrole brut. Le comité consultatif a déjà présenté un rapport au ministre, et des fonctionnaires s'efforcent de faire un examen dans les meilleurs délais des recommandations qui en découlent. Nous en entendrons parler sous peu.
    La question que j'aimerais vous poser, et je ne sais pas si le Secrétariat du Conseil du Trésor a un avis là-dessus ou préfère la neutralité, c'est si vous préféreriez que des plans d'action distincts soient élaborés pour les catégories de produits pétroliers en fonction de leur potentiel incendiaire ou de leur point d'éclair? Est-ce que le pétrole de Bakken devrait recevoir un traitement différent de celui, disons, de l'Alberta qui a été dilué?
    Avez-vous établi votre position à cet égard?
    De façon générale, il faudrait que le plan d'intervention en cas d'urgence soit fonction du risque que présente le produit, mais pour ce qui est de distinguer les types de pétrole, cette décision relève des politiques.
    M. Jang peut vous en parler.
    Les plans d'intervention en cas d'urgence ou PIU sont établis à la lumière d'évaluation des risques. Nous connaissons les propriétés du pétrole, du pétrole brut, des hydrocarbures liquides... Elles varient.
    Bien évidemment, les PIU reçoivent l'approbation de l'organe de réglementation. On s'attend à ce que ces risques soient examinés, et ce serait une bonne idée que l'on sache si l'on en tient compte de façon distincte ou globale étant donné qu'on pourrait avoir besoin des mêmes types de ressources et d'expertise, que ce soit par exemple pour les risques que présentent les matières du groupe d'emballage 1, 2 ou 3.
    Merci.
    Monsieur Braid, vous avez sept minutes.
    Je vous remercie, madame Tadros, ainsi que votre équipe, d'être ici et pour l'important travail que vous faites pour le compte des Canadiens.
    Madame Tadros, dans vos observations préliminaires, vous avez dit que la deuxième recommandation du BST porte sur la manière dont les compagnies ferroviaires planifient les transports. Vous dites ensuite qu'il faut examiner de manière exhaustive de nombreuses variables d'un bout à l'autre du réseau. J'aimerais que vous nous expliquiez un peu quelles sont ces variables et la complexité de cette recommandation particulière.
    En fait, cette recommandation comporte trois éléments. Le premier, c'est la planification groupée. On examine l'itinéraire et on choisit celui qui est le plus sécuritaire pour transporter ces matières dangereuses. S'il n'y en a qu'un, on passe au deuxième élément, soit l'examen des opérations ferroviaires pour nous assurer que les activités sur cet itinéraire, que ce soit l'itinéraire choisi ou le seul qui soit possible, est assujetti aux normes de sécurité les plus rigoureuses.
    On compterait sur la compagnie ferroviaire pour faire notamment les tests de voie, de vitesse, pour vérifier que l'équipement respecte les normes les plus élevées, ce genre de choses, pour s'assurer d'être absolument irréprochable sur ces itinéraires.
    Ensuite, on voudrait que toutes ces mesures ne soient pas statiques. Il ne s'agit pas de faire tout cela, puis de transporter des marchandises sur cet itinéraire pendant 20 ans. On veut qu'elles fassent un suivi avec des évaluations des risques continues pour s'assurer que les mesures de contrôle qu'elles ont mises en place sont efficaces. Un accident comme celui de Lac-Mégantic, avec les mêmes conséquences pourrait survenir, dont les causes seraient très différentes.
    Ce qu'il faut, c'est pour l'ensemble du système, réduire les risques d'accident, comme les déraillements. On veut diminuer globalement ces risques.

  (0920)  

    Dans quelle mesure est-ce que les compagnies ferroviaires mènent actuellement ces activités de leur propre chef?
    Certaines le font, surtout le Canadien National. Aux États-Unis, il y a certaines exigences, appelées OT-55. Si une grande compagnie ferroviaire a des opérations régulières aux États-Unis, celles-ci sont assujetties aux exigences établies. Le Canadien National entend appliquer ces exigences au nord de la frontière, donc au Canada. Nous leur demandons de faire un peu plus que ce qu'exige le règlement OT-55.
    Ce concept a, je pense, été bien accueilli.
    Passons à autre chose, les systèmes de gestion de la sécurité. Dans vos observations préliminaires, vous dites que les principaux chemins de fer au Canada ainsi que plusieurs chemins de fer d'intérêt local ont fait de grands pas dans la mise en oeuvre de SGS, mais que 12 ans plus tard, bon nombre de ces systèmes n'ont pas encore atteint leur maturité.
    Pouvez-vous nous dire pourquoi?
    Madame Fox.
    J'ai commencé à en parler tout à l'heure, certaines compagnies peuvent — je ne parle pas d'une compagnie en particulier, mais de façon générale — elles peuvent prendre une approche bureaucratique dans l'élaboration de leurs systèmes de gestion de la sécurité, en partant du principe que les documents ne sont qu'un guide, alors qu'en matière de gestion concrète de la sécurité, les meilleurs principes de gestion consistent à avoir des processus en place qui circonscrivent le risque, établissent de bons systèmes internes de signalement des incidents et de suivi avant qu'ils mènent à des accidents et aussi avoir une culture positive de la sécurité dans la compagnie.
    Certaines organisations, en partie à cause de l'infrastructure nécessaire pour l'appuyer, du savoir au sein de la compagnie ou peut-être des priorités qu'elle défend, ne vont peut-être pas aussi loin qu'elles le pourraient ou qu'elles le devraient ou que nous souhaiterions qu'elles aillent.
    D'une façon générale, toutefois, êtes-vous d'accord sur le fait que la mise en oeuvre des SGS il y a quelques années et leur évolution constituait un important pilier de la sécurité ferroviaire au Canada?
    Absolument. On ne saura jamais quels accidents ont été évités grâce à ces systèmes, et c'est pourquoi il est parfois difficile de mesurer les effets de certaines mesures à court terme mais à long terme, on peut s'attendre à une réduction des risques dans les réseaux, et cela se traduit par une diminution des accidents graves.
    Dans les divers examens et enquêtes que vous avez menés, vous avez certainement des systèmes de gestion de la sécurité qui constituent des exemples ou des modèles à suivre, n'est-ce pas? Comment, selon vous, pourrions-nous consolider cet important pilier de la sécurité ferroviaire au Canada?
    Nous n'avons pas fait de comparaison des systèmes de gestion de la sécurité entre les modes de transport ou entre les compagnies. Il est certain que dans chacune de nos enquêtes, nous examinons les systèmes de gestion de la sécurité des compagnies et nous cernons les éléments de risque.
    Pour terminer, si j'ai bien compris, le Bureau de la sécurité des transports a ce qu'on appelle une liste de surveillance. Pourriez-vous expliquer de quoi il s'agit, ce qui s'y trouve et comment elle évolue?
    C'est quelque chose qu'on a créé il y a quelques années pour attirer l'attention sur les enjeux liés à la sécurité qui nous semblaient les plus importants. Cette liste dénombre actuellement les neuf enjeux les plus importants en matière de sécurité dans le système de transport.
    Voulez-vous que je ne vous parle que des enjeux liés au transport ferroviaire, ou de tous?
    Surtout ce qui concerne le transport ferroviaire.
    Il y a les enregistreurs vidéo et de conversation de poste de pilotage, le respect de la signalisation et la collision de trains de passagers avec des véhicules dans le corridor ferroviaire à haute vitesse. Les deux premiers enjeux ressortent directement de l'enquête sur Burlington, et des recommandations qui ont été faites à cet égard. Pour ce qui est du troisième, beaucoup de collisions surviennent dans le corridor à haute vitesse aux passages à niveau, et c'est pourquoi c'est sur la liste. Ce sont en fait des problèmes que nous avons vérifiés, que nous avons analysés en profondeur pour parvenir à la conclusion que ce sont les enjeux les plus importants, et pour lesquels nous tenons à ce que des mesures soient prises.

  (0925)  

    Merci.
    C'est maintenant autour de M. Sullivan, qui a cinq minutes.
    Je tiens à vous remercier pour l'excellent exposé que vous avez fait, parce que vous avez ainsi dressé un tableau très succinct de l'objet de notre présence ici aujourd'hui.
    J'aimerais parler un peu des analyses et des risques que font les compagnies ferroviaires elles-mêmes. Aux États-Unis, les transporteurs ferroviaires doivent effectuer des analyses des risques. Est-ce que c'est aussi le cas au Canada, ou est-ce que ce n'est imposé qu'aux États-Unis?
    Comme cela touche le système de gestion de la sécurité, je vais laisser Mme Fox vous en parler. Elle a beaucoup d'expérience, particulièrement dans l'industrie de l'aviation, en matière de système de gestion de la sécurité, mais les principes sont les mêmes.
    Je tiens seulement à dire qu'il faut qu'une analyse soit faite en continu des opérations au jour le jour, notamment lorsque les opérations changent. Ainsi, des changements apportés au transport des matières dangereuses devaient nécessiter une analyse des risques en vertu du système de gestion de la sécurité. Les modifications d'itinéraire, les changements qui consistent à faire passer les marchandises par les montagnes plutôt que par les Prairies, par exemple, tout type de modification opérationnelle ou de changement important suppose une évaluation des risques.
    Est-ce que vous savez si les compagnies ferroviaires font rapport de ces analyses au gouvernement, ou à Transports Canada, ou au Bureau de la sécurité des transports, ou si elles sont laissées à elles-mêmes?
    Transports Canada, en sa qualité d'organe de réglementation, procède à la vérification du système de gestion de la sécurité des compagnies ferroviaires. Nous n'interviendrions que s'il y a une enquête. Si nous voulons examiner le fonctionnement d'un système de gestion de la sécurité, ce serait dans le contexte de la compagnie qui fait l'objet de l'enquête et de cet accident.
    Donc, vous ne savez pas si les transporteurs du Canada ont fait une nouvelle analyse des risques parce que le transport de pétrole brut dilué a été multiplié par 400, par exemple?
    Je ne sais pas.
    J'ai vu une recommandation datée du 23 janvier du Bureau de la sécurité des transports des États-Unis, semblable à la vôtre. Elle dit en gros ce qui suit:
Les transporteurs ferroviaires... doivent tous les ans faire une analyse des risques pour la sécurité des itinéraires de transport à la lumière de 27 facteurs, comme le volume... le type de voie, la catégorie...; les calendriers d'entretien; la courbure des voies, les zones écosensibles ou écologiquement importantes; la densité démographique le long des voies; la capacité d'intervention en cas d'urgence...; les zones de grande conséquence le long des voies... Elles doivent identifier des voies alternatives qu'elles sont autorisées à emprunter et faire une analyse comparative des risques que présentent ces voies.
    Ensuite, la FRA, la Federal Railroad Administration, fait une analyse de ces risques et détermine s'il convient de les réviser, si en fait, ces itinéraires sont les plus sécuritaires.
    Nous ne faisons rien de tel au Canada, n'est-ce pas?
    Je ne pourrais pas vous dire qu'on ne le fait pas au Canada, parce que je ne sais pas ce que fait chaque compagnie ferroviaire en matière d'analyse des risques. Nous demandons la même chose dans notre deuxième recommandation. Cependant, rien n'empêcherait une compagnie ferroviaire de procéder à ce genre d'analyse dans le cadre de son propre système de gestion de la sécurité.
    Des membres du public ont demandé pourquoi les voies ferrées ne contournent pas les grandes agglomérations? Cette mesure pourrait faire partie de l'analyse des risques, qui permettrait de déterminer si c'est trop onéreux, si c'est possible ou praticable. Je sais qu'aux États-Unis, il est interdit par la loi de transporter des matières dangereuses, par exemple, aux abords de la ville de Washington, D.C.
    Il n'y a rien de tel au Canada, n'est-ce pas?
    Je ne le sais pas, mais il faut tout de même penser à l'aspect logistique. Ces voies ferrées ont été construites à travers le Canada, et les villes se sont établies autour d'elles. Elles s'y sont établies parce que c'est là que se trouvaient les industries.
    Par exemple, si vous voulez que les marchandises contournent Montréal, alors qu'elles doivent se rendre au port de Montréal, on va se retrouver avec une voie ferrée — je ne sais pas — loin au nord ou au sud de Montréal, mais alors comment est-ce que les marchandises pourraient y entrer? Il faudrait que ce soit par camion.
    Je pense que les solutions faciles ne soient pas toujours les meilleures. Il faut penser au réseau. Il faut penser aux réalités sur le terrain, et réduire les risques au sein du réseau qui existe.

  (0930)  

    Parlons maintenant des wagons-citernes DOT-111, dont nous savons depuis 1991 qu'ils ne sont pas sécuritaires pour le transport de matières dangereuses. Nous continuons pourtant de les utiliser à cette fin.
    Quand le train de Mississauga a déraillé en 1979, la réaction de l'organe de réglementation a été de réduire la vitesse à 15 milles à l'heure, jusqu'à ce qu'on ait déterminé que c'était sécuritaire, autrement dit, jusqu'à ce qu'il y ait suffisamment de points d'inspection le long de la voie pour pouvoir raisonnablement en conclure qu'elle était sécuritaire. Il est maintenant largement reconnu que le transport de matières dangereuses dans les wagons DOT-111 n'est pas sécuritaire. Puisqu'on ne peut pas les arrêter, peut-on au moins les faire ralentir? Est-ce qu'il serait possible d'imposer la limite de vitesse de 15 milles à l'heure au DOT-111 dans les zones densément peuplées?
    Dans le cadre de l'analyse qui est faite de la voie ferrée, on se penche aussi sur la vitesse. C'est l'un des facteurs de risque. C'est certainement quelque chose qui devrait être examiné, mais quelle était la vitesse...?
    J'interrogeais M. Jang au sujet des derniers wagons. Pour ce qui est des wagons qui sont très endommagés, ceux qui ont déraillé, l'analyse a démontré qu'ils n'allaient qu'à environ 20 milles à l'heure, donc très lentement. Le problème avec ces wagons-citernes, c'est qu'ils ne se comportent pas bien lors de déraillements ou de collision, même à faible vitesse.
    Merci beaucoup.
    Madame Young, vous avez cinq minutes.
    Je vous remercie d'être venus témoigner.
    Je remarque d'après les questions qui ont été posées, qu'il semble y avoir un écart entre les normes, disons, qu'appliquent les compagnies ferroviaires et les normes en vigueur. Est-ce que vous êtes d'accord?
    Tout est dans les détails. Je pense que cela dépendrait des faits précis de la situation dont vous parlez. Comme nous l'avons souligné, il y a certainement place à l'amélioration dans les normes qui s'appliquent aux wagons-citernes, aux opérations et à l'intervention d'urgence.
    Par exemple, il y a les SGS, les PIU, mais on n'a pas l'impression qu'il existe des méthodes uniformes pour s'assurer du respect des SGS ou d'un suivi des PIU, ou qu'ils sont constamment mis à jour, examinés ou appliqués. Est-ce que vous êtes d'accord?
    Nous n'avons pas examiné de PIU pour d'autres produits, mais ils doivent être présentés à Transports Canada, qui doit les approuver. Vous parlez de la vérification des SGS, et le vérificateur général en parlé dans son rapport.
    Ce que j'ai du mal à comprendre, c'est que vous nous dites qu'évidemment, on en sait beaucoup plus aujourd'hui qu'auparavant, ce qui est très bien. Nous avons ces systèmes, mais cela étant dit, d'autres témoins nous ont aussi dit qu'il n'y a pas de suivi de ce genre de chose, ou du moins de suivi régulier, etc.
    Qui examine les pratiques exemplaires pour s'assurer que ces mécanismes de sécurité sont mis en oeuvre et qu'un suivi constant en est assuré?
    C'est de prime abord la responsabilité des compagnies ferroviaires. L'organe de réglementation assure une surveillance, et à cet égard, fait des vérifications des SGS. Il fait aussi des inspections sur le terrain, et ces mesures doivent être le complément l'une de l'autre.
    Pensez-vous que des mesures suffisantes seront adoptées à la suite du rapport que vous avez déposé et comptez-vous faire un suivi pour vous assurer que ces lacunes ou négligences n'arrivent plus?
    Dans cette enquête, comme dans quasiment toutes celles que nous menons, nous nous penchons notamment sur la surveillance réglementaire. Nous allons examiner ces questions.
    Comment peut-on assurer au public que les systèmes de gestion de la sécurité font l'objet d'un suivi et sont assujettis aux normes les plus rigoureuses?

  (0935)  

    Kathy.
    Comme je le disais, le vérificateur a fait un examen approfondi de la mise en oeuvre des systèmes de gestion de la sécurité et de la surveillance que fait Transports Canada des SGS dans les compagnies ferroviaires.
    J'aimerais ajouter que tout système de gestion de la sécurité doit être fondé sur certains principes fondamentaux. Ceux-ci varient légèrement, selon le mode de transport, le transport aérien est quelque peu différent du transport ferroviaire, du transport maritime, mais tous les systèmes sont fondés sur les mêmes principes.
    Ce que nous avons pu constater dans nos enquêtes, c'est qu'il n'est pas toujours facile de prévoir la combinaison de circonstances qui peut mener à un accident, parce qu'il y en a toujours plus d'une, comme on a pu le voir dans le rapport sur l'accident du vol de First Air qui a été publié la semaine dernière. Les systèmes doivent atteindre une certaine maturité au fil du temps, alors que les gens prennent de l'expérience, mais c'est pourquoi une surveillance efficace est tellement importante.
    Notre comité a entendu des témoignages, par exemple, du milieu du transport aérien, mais ce que je trouve intéressant aujourd'hui, c'est que les compagnies ne semblent pas être assujetties à des exigences rigoureuses de déclaration. Dans le domaine aérien, tout accident doit faire l'objet d'un rapport. Ce que je lis ici, c'est que ce n'est pas le cas dans le milieu ferroviaire, mais nous allons néanmoins en ce sens, n'est-ce pas?
    Je vais demander à M. Laporte de répondre à cette question.
    Les normes imposées au transport ferroviaire sont tout aussi rigoureuses que celles du transport aérien ou maritime, ou par pipeline. Nos règlements prévoient 10 critères, et si l'un d'eux s'applique, il y a obligation de présenter un rapport sur l'incident ou l'accident quel que soit le cas. Le plus souvent, on constate que plusieurs des critères s'appliquent à une situation particulière, ce qui fait que quasiment toutes les occurrences font l'objet d'un rapport.
    Il y a eu depuis un an 1 000 de ces occurrences liées au transport ferroviaire. Ce chiffre a augmenté de 4 % comparativement à l'année précédente, c'est-à-dire en 2013 comparativement à 2012.
    Votre temps est écoulé.
    Monsieur Mai.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    En ce qui a trait à la tragédie de Lac-Mégantic, on savait qu'il n'y avait qu'un seul conducteur. Le ministère des Transports avait permis à seulement deux compagnies de n'en avoir qu'un. La MMA était l'une de celles qui pouvaient opérer les trains avec un seul conducteur. Avez-vous des recommandations à faire relativement à cela?

[Traduction]

    C'est l'un des nombreux enjeux sur lesquels nous nous penchons dans l'enquête qui se poursuit, sous l'angle de la sécurité.

[Français]

    En 2012, le BST a fait des recommandations concernant les systèmes de freinage automatique des trains. On sait que c'est considéré comme l'ultime mécanisme à sûreté intégrée. Cela a été mis en oeuvre aux États-Unis. Par contre, Transports Canada n'a pas encore proposé d'exigences pour les chemins de fer au Canada. Avez-vous des commentaires à faire par rapport à ce sujet? Avez-vous fait des recommandations au ministre? Pourquoi cela n'a-t-il pas été appliqué? Vous a-t-on dit pourquoi vos recommandations n'ont pas été suivies?

[Traduction]

    Aux États-Unis, le Congrès a exigé qu'il y ait des systèmes positifs de commande des trains, alors plusieurs compagnies ferroviaires des États-Unis sont en train de s'y mettre. À ce que j'ai compris, c'est tout de même un défi assez important sur le plan technologique et financier.
    Quand nous sommes venus examiner la situation au Canada à la suite de l'accident de Burlington, nous avons déterminé que divers systèmes exigeaient que nous n'allions pas être prescriptifs et exiger un système positif de commande des trains. Nous avons décrit le problème de sécurité et conclu que le résultat pouvait découler de divers facteurs, qu'il fallait régler le problème de sécurité.
    Je crois qu'un comité consultatif a été saisi de cette question et nous espérons que des mesures positives seront prises à cet égard.

[Français]

    Justement, il faut avoir un système intégré avec les États-Unis relativement aux wagons-citernes DOT-111. Dans le cas du freinage automatique, pouvez-vous nous confirmer que les États-Unis sont en avance sur le Canada en matière de mise en oeuvre de cette mesure de sécurité?

  (0940)  

[Traduction]

    Les États-Unis sont nettement en avance.

[Français]

    Soyons brefs, car je ne dispose plus de beaucoup de temps.
     Vous avez parlé du rapport du vérificateur général. Comme on le sait, il a été très cinglant envers Transports Canada. Il a souligné le manque de ressources permettant au ministère d'assurer le suivi des cas qui sont problématiques. Pourriez-vous nous dire rapidement quels sont les éléments du rapport du vérificateur général que vous appuyez?

[Traduction]

    Je ne pourrai pas entrer dans les détails, puisque nous avons peu de temps...
    Le président: Très rapidement.
    Mme Wendy Tadros: ... en fait, je pense que même le vérificateur général a relevé des problèmes dans la manière dont Transports Canada assure la surveillance des systèmes de gestion de la sécurité des transports. Si vous avez bien lu le rapport, vous avez vu que le vérificateur général souscrit entièrement aux concepts et aux principes du système de gestion de la sécurité.
    Je remercie les témoins d'être des nôtres. Vos interventions sont très instructives.
    La question des équipages de deux personnes a été soulevée à quelques reprises, et j'aimerais qu'on en parle brièvement. D'après ce que j'ai compris, à la suite de votre évaluation initiale de l'incident de Lac-Mégantic, vous avez émis une nouvelle directive en faveur de l'imposition permanente d'équipage de deux personnes. Est-ce exact? En ce qui concerne le transport de matières dangereuses, est-ce bien la directive qu'a émise la ministre?
    Nous allons devoir vérifier si c'est assorti d'une limite de temps. Oui, cette directive a été appliquée très rapidement, mais à savoir si elle est permanente, je ne le sais pas.
    D'après ce que j'ai compris, c'est une directive permanente...
    Seulement pour le transport des matières dangereuses; elle ne s'applique pas à tous les trains.
    C'est juste. Mais c'est un problème très important qui a été réglé assez rapidement à la lumière des recommandations initiales, ce qui est une bonne chose.
    Autre chose, dont j'aimerais parler un peu. Dans les recommandations qui découlent de l'examen que vous avez fait de nombreuses variables portant sur l'ensemble du système, vous parlez du transport de matières dangereuses et du traitement qu'en font les compagnies ferroviaires. Vous en donnez un bref exemple, le respect des plus hautes normes d'entretien des voies, et la vitesse appropriée. Comment cela pourrait-il s'appliquer à l'ensemble du réseau? Vous en parlez, de l'examen de toutes les variables de l'ensemble du réseau. Comment selon vous cela peut-il être appliqué à la suite de cette recommandation que vous avez faite, découlant des évaluations des risques? Comment peut-on s'assurer que ces mesures soient prises?
    De deux choses l'une. On peut demander aux compagnies ferroviaires de remettre leurs plans à Transports Canada, ou encore le ministère peut procéder à des vérifications dont les cibles sont choisies en fonction des risques les plus élevés. L'organe de réglementation a donc certains choix.
    Il est intéressant aussi de voir, d'après votre exposé, les changements qui sont survenus. Vous avez parlé des 500 wagons-citernes qui transportaient le pétrole il y a à peu près cinq ans, comparativement à 160 000 l'année dernière. Il y a eu tellement de changements, et pourtant, aujourd'hui, vous parlez aussi des difficultés qui se posent dans bon nombre de nos centres, que ce soit de petits ou grands centres urbains, qui se sont construits autour des voies ferrées qui, dans une large mesure, sont le centre de l'activité. En fait, les collectivités se sont rapprochées des voies ferrées plutôt que de s'en éloigner.
    Oui, c'est exact.
    C'est tout cela qui a fait qu'on a établi une réglementation qui tient compte de tous ces facteurs. On transporte beaucoup plus de produits dangereux au fur et à mesure de la croissance et de l'expansion, et pourtant, on voit aussi une croissance autour des chemins de fer.
    Comment est-ce que nous allons composer avec tout cela à l'avenir? Y avez-vous déjà réfléchi, ou auriez-vous des recommandations à faire à ce sujet?
    En fait, je pense que c'était un peu le sens des trois recommandations que nous avons faites en janvier.
    La première serait d'empêcher dès que possible les wagons-citernes de catégorie 111 de circuler dans nos collectivités. La deuxième serait la planification et l'analyse des itinéraires et un suivi de l'évaluation des risques pour qu'on puisse faire en sorte que les activités qui se déroulent sur ces voies où sont transportées des matières dangereuses se fassent de la façon la plus sûre possible. La troisième est de veiller à avoir les ressources nécessaires en cas d'accident pour pouvoir circonscrire le danger et les risques.

  (0945)  

    Merci. Nous manquons toujours de temps, mais nous sommes en fin de séance.
    Je remercie tous nos témoins d'être venus. D'autres témoins arrivent à l'instant et nous suspendons la séance deux minutes, pour les accueillir. Merci encore.

    


    

    Nous reprenons nos travaux pour la deuxième partie de notre séance.
    Je souhaite la bienvenue à M. Jeanes et à M. Gardner. Merci d'être là, messieurs.
    Sans plus tard, nous donnons la parole à M. Jeanes, qui a droit à 10 minutes maximum.
    Merci, monsieur le président.
    Transport Action Canada est un organisme national de bénévoles et un organisme caritatif inscrit. Nous avons été créés en 1976, pour répondre à l'invitation du gouvernement qui voulait que le public participe à la planification du transport par rail de passagers à l'échelle continentale. À l'époque, nous nous appelions Transport 2000. Nos champs d'intérêt sont maintenant tous les moyens de transport, les autocars interurbains, les traversiers et le transport en commun. Nous nous intéressons depuis longtemps à la sécurité dans les transports et répondons souvent aux questions des médias à ce sujet.
    Nous avons des organismes affiliés dans l'ensemble du pays. L'un de ceux-ci, le Groupe TRAQ, organise chaque année un colloque sur la sécurité ferroviaire à Québec. J'y étais la semaine dernière, de même que de nombreux experts du secteur et du gouvernement. Nous nous occupons aussi de la sécurité aérienne, pour les passagers. Cet intérêt remonte à l'écrasement du Vol 111 de Swissair en 1998. À l'époque, avec d'autres groupes, nous avons fondé un groupe sur la sécurité des passagers aériens qui continuent d'interagir avec Transports Canada.
    Les statistiques montrent que les transports aériens et ferroviaires, qui sont habituellement de régie fédérale, sont très sûrs. Toutefois, l'attention des médias est nécessairement attirée par les accidents, particulièrement s'il y a de multiples décès, des déversements de produits dangereux ou des incendies importants. Cela inquiète les Canadiens. Les collisions entre des trains et des véhicules routiers, ou avec des piétons, aux passages à niveau ou sur les chemins de fer sont très peu nombreuses comparées aux accidents de la route. Il reste qu'à notre avis, la sécurité aux passages à niveau doit demeurer une préoccupation pour le gouvernement fédéral et particulièrement ici, à Ottawa. Rappelons qu'en septembre dernier, un accident évitable a causé la mort de six passagers d'un autobus à deux étages. Nous espérons connaître bientôt les causes précises de cet accident.
    Nous croyons beaucoup en l'expertise et l'indépendance du Bureau de la sécurité des transports du Canada, et apprécions particulièrement son ouverture dans le cadre d'enquêtes en cours. Nous comprenons l'importance de ne pas présumer des causes d'un accident, tant que l'enquête du BST n'est pas achevée. Des points ont déjà fait l'objet de discussions aujourd'hui qui font partie de la liste de contrôle du BST. Il y en a un qui nous tient particulièrement à coeur, et c'est la commande intégrale des trains. Madame Tadros a parlé de progrès effectués par suite de mesures législatives adoptées aux États-Unis. Dans bien d'autres pays, la commande intégrale des trains est la norme plutôt qu'un objectif à envisager. Le BST l'a vivement recommandée, particulièrement depuis l'accident de VIA Rail à Saint-Charles-de-Bellechasse, au Québec, en février 2010, et depuis l'accident de Burlington, en 2012.
    En passant, au sujet de la commande intégrale des trains, je signale que j'ai personnellement participé à la planification du O-Train d'Ottawa, le seul chemin de fer de réglementation fédérale qui dispose de ce genre de commande. Pour le O-Train, il n'y a qu'un conducteur. Un système allemand veille à ce que le train ne dépasse pas les vitesses permises aux gares et qu'il ne puisse franchir les signaux d'arrêt. Grâce à cette technologie, il n'y a eu aucun décès ou blessure chez les passagers depuis plus de 12 ans. Aujourd'hui, 14 000 passagers prennent le train d'Ottawa chaque jour. Il serait bon que cette même technologie soit appliquée à d'autres chemins de fer au Canada.
    Nous sommes aussi fort préoccupés par l'interprétation erronée de la signalisation ferroviaire, dont a parlé Mme Tadros. La signalisation moderne, particulièrement sur les tronçons à haute vitesse comme à Burlington est purement visuelle. Il n'y a pas de signal de rechange, et c'est une signalisation dont l'interprétation par les équipages est très complexe ce qui nuit aux réactions. Dans ce contexte, on voit l'importance de la recommandation du BST relative à la surveillance vidéo et audio des mécaniciens de locomotive dans la cabine, ainsi que du contrôle de ce qui se passe devant le train, au moyen de caméras.
    Nous avons participé à divers événements relatifs à la sécurité ferroviaire. Nous avons présenté un mémoire à la Commission d'examen de la sécurité ferroviaire qui a présenté son rapport en 2007. Nous avons comparu devant le comité de la Chambre, soit votre comité, au sujet de la sécurité aérienne. Nous avons aussi comparu devant le comité sénatorial qui étudiait les modifications à la Loi sur la sécurité ferroviaire, où nous avons dit notre appui marqué pour l'adoption de systèmes de gestion de la sécurité.

  (0950)  

    En mai dernier, nous avons prononcé une allocution sur la sécurité des systèmes dans le transport ferroviaire, à une conférence de l'International System Safety Society of Canada. En janvier dernier, nous avons participé à un séminaire du Groupe de recherches sur les transports au Canada. Il portait sur la sécurité ferroviaire et le transport de matières dangereuses. Et je le répète, nous étions à la conférence de TRAQ, à Québec, la semaine dernière.
    Parlons d'une autre recommandation du BST, au sujet des itinéraires de rechange pour le transport de produits dangereux. Nous sommes fort préoccupés actuellement par l'abandon de tronçons de chemins de fer principaux historiques, qui risquent de compromettre le réseau ferroviaire national. Ainsi, lorsque le Canadien Pacifique a vendu ses lignes qui passaient par le nord du Maine pour aller à Saint John au Nouveau-Brunswick, cela a réduit notre réseau ferroviaire à une seule voie à l'est de Québec, et a complètement perturbé le transport ferroviaire entre le Port de Halifax et le centre du pays, lorsqu'il y a eu un déraillement important à Montmagny, il y a quelques années.
    Au cours des deux dernières années, nous avons assisté à l'abandon de voies transcontinentales historiques dans la vallée de l'Outaouais, ne laissant que les lignes qui passent par la grande région de Toronto pour relier l'est et l'ouest du Canada, sans itinéraire de rechange pour éviter cette région populeuse. On s'apprête cette année à abandonner le segment historique du chemin de fer intercolonial entre Newcastle et Bathurst, au Nouveau-Brunswick. Il n'y aura plus qu'une ligne de chemin de fer pour aller au Nouveau-Brunswick. Cela devrait préoccuper vivement le gouvernement fédéral et le Parlement.
    Revenons à notre principale préoccupation, la sécurité des passagers. Depuis la collision entre deux trains à Hinton en 1986, qui a causé le décès de 23 personnes, VIA Rail a un excellent bilan. Seulement trois décès de passagers se sont produits dans des accidents depuis: deux à Coteau, au Québec, en 1992 et un à Biggar, en Saskatchewan, en 1997. Il y a eu des accidents causant le décès de membres d'équipage de train. Trois personnes sont décédées à Burlington en 2012 et deux mécaniciens de locomotives à Kemptville, en Ontario, en 1999. Il reste que le train est un moyen de transport extrêmement sûr au Canada.
    Pour l'investissement dans la technologie, les chemins de fer doivent continuer d'améliorer la technologie et les processus de systèmes de gestion de la sécurité. Rappelons que l'omission de le faire a causé l'accident du métro de Toronto de 1995, causant trois décès, lorsque la technologie d'arrêt automatique vieille de 40 ans n'a pas fonctionné correctement. Dans ce cas-là, ce n'était pas un réseau de réglementation fédérale, mais c'est tout de même un exemple de ce qui se produit quand on n'adopte pas des technologies modernes.
    En fait, à l'étranger, là où une technologie moderne de commandes automatiques de train est employée, il y a tout de même eu des accidents graves, en raison de défectuosités. Les deux accidents les plus graves se sont produits en Grande-Bretagne, à Ladbroke Grove en 1999, avec 31 décès. Une collision frontale entre deux trains a été causée par le défaut d'observer la signalisation et d'employer les commandes intégrales existantes. Un autre accident s'est produit plus tôt, en 1988, causant 35 décès, et résultant de la défectuosité d'un système de signalisation désuet. L'an dernier en Espagne, à Saint-Jacques-de-Compostelle, une collision ferroviaire a causé un grand nombre de décès. Elle était le produit d'une interface mal conçue sur une toute nouvelle voie, entre deux systèmes de signalisation différents et incompatibles. Il est important d'investir dans la technologie.
    Pour conclure, Transport Action appuie les systèmes de gestion de la sécurité et leur intégration à la Loi sur la sécurité ferroviaire. Nous avons déjà formulé des préoccupations au sujet des ressources dont disposent les petits chemins de fer lorsqu'il s'agit de se procurer le matériel nécessaire à la mise en oeuvre de ces mesures. Il est clair toutefois que les grands chemins de fer ont choisi de faire les investissements nécessaires pour promouvoir la culture de la sécurité. L'accident à Lac-Mégantic pourrait avoir pour cause l'omission d'appliquer un système de gestion de la sécurité, mais il faudra attendre les conclusions du BST.
    Je signale que ces préoccupations, particulièrement au sujet de l'accès au SGS pour les petites entreprises, ont déjà été soulevées par le juge Virgil Moshansky qui présidait la commission d'enquête sur l'écrasement d'Air Ontario à Dryden, en Ontario, en 1989, il y a bien longtemps. Le juge Moshansky s'était exprimé à ce sujet en 2007 devant la Commission d'examen de la Loi sur la sécurité ferroviaire et de nouveau, plus récemment, sur la possibilité de mettre en oeuvre efficacement, partout, de bons régimes de sécurité.
    Ce sont les principales choses que j'avais à dire et je répondrai volontiers à vos questions.

  (0955)  

    Vous êtes pile à l'heure, monsieur Jeanes. Merci beaucoup.
    Monsieur Gardner, vous avez tout au plus 10 minutes.
    Bonjour à tous.
    Dans un monde idéal, je vous donnerais mon exposé en anglais, mais il faut que je me réchauffe pendant une heure avant que mon anglais soit assez bon et je pense que nous ne serons plus ici dans une heure, alors permettez que je m'exprime en français.
    Très bien.

[Français]

    Bonjour à tous et à toutes.
    On m'a invité, mais on ne m'a pas dit pourquoi. Alors, je vais être perspicace. Puisque je suis un spécialiste de la responsabilité civile, de l'assurance et de l'évaluation des dommages, je suppose que c'est pour parler davantage d'indemnisation que de prévention.
    Depuis ce matin, on a beaucoup parlé de sécurité et de prévention. C'est extrêmement important et on doit le faire. Cela dit, on ne pourra jamais avoir un risque zéro en matière d'accidents ferroviaires, pas plus qu'en matière d'accidents de la route ou d'accidents aériens. Il faut donc penser, après la catastrophe de Lac-Mégantic, à se doter un système d'indemnisations qui soit meilleur que ce qu'on a présentement.
    La preuve va être douloureuse pour les proches des 47 victimes décédées. Il s'agit d'un processus d'indemnisations qui va prendre plus d'une décennie et qui va donner un résultat extrêmement décourageant. Je prédis même que les indemnités offertes aux victimes, s'il y a une engagement au chapitre de la responsabilité, risquent d'être tout à fait nulles au terme du processus puisqu'il n'y aura pas de couverture d'assurance suffisante.
    Posons une règle fondamentale. La fameuse couverture d'assurance suffisante n'est pas la réponse à tous les maux. Même si on remplaçait la MMA dans l'accident de Lac-Mégantic par le CN ou le CP, qui ont des couvertures d'assurance de 1 milliard ou 1,5 milliard de dollars selon le type de catastrophe, on se retrouverait toujours devant le même problème. Le problème en est un de responsabilité. L'assurance, le mot le dit, c'est une assurance de responsabilité.
    Donc, ce qu'il faut changer et qui n'a pas été fait à ce jour en matière de transport ferroviaire, ce sont les règles relatives à responsabilité. Le transport ferroviaire est le dernier grand système qui n'a pas fait l'objet d'une rénovation des règles d'indemnisation. Cela a été fait en matière de transport aérien, en matière, évidemment, de transport routier — qui est davantage de compétence provinciale — et en matière de transport maritime. Ce n'est qu'en matière de transport ferroviaire que rien n'a encore été fait. Il fallait une catastrophe comme celle de Lac-Mégantic pour éveiller les consciences sur cette question.
    Je vous ai préparé un résumé d'une page et demie avec une traduction maison. S'il y a des erreurs, je les assume. Il s'agit d'un résumé de ce qui pourrait être mis en place de manière très simple.
    Il y a toutes sortes de solutions possibles. On pourrait introduire, comme dans certains États australiens, un système d'indemnisations automatiques pour les victimes d'accidents ferroviaires. Cela demanderait un changement dans les structures. Je peux en discuter avec vous si vous le voulez, mais j'aimerais être davantage pragmatique et être le plus efficace possible. Dans les structures actuelles, il est possible de rénover le système d'indemnisations pour les victimes d'accidents ferroviaires de manière relativement simple en s'inspirant des règles qui existent depuis 2003 en matière de transport aérien.
    Je dis que ce serait facilement réalisable, puisque l'Office des transports du Canada, qui s'occupe du transport ferroviaire, supervise également le transport aérien. Ce serait donc le même organisme qui pourrait superviser ces nouvelles règles d'indemnisations, des règles qu'il connaîtrait d'ailleurs déjà très bien.
    Comment cela fonctionne-t-il? En gros, dans le domaine du transport aérien, il y a eu la Convention de Montréal. Elle a été signée en 1999 et est entrée en vigueur en 2003. Plus d'une centaine de pays sont signataires de la convention, dont les États-Unis et le Canada, évidemment. Cette convention prévoit un régime de responsabilités en deux temps pour le transporteur. Vous allez voir qu'on peut faire facilement l'analogie avec le transporteur ferroviaire.
    Dans un premier temps, comme il s'agit d'une convention internationale, on ne s'exprime pas en dollars, mais plutôt en droits de tirage spéciaux, soit les DTS. Dans la Convention de Montréal, il y a un premier palier d'indemnisation qui a été fixé à 100 000 DTS, ce qui correspond aujourd'hui à 175 000 $ canadiens. Évidemment, cela varie selon les pays.
    Pour ce premier niveau d'indemnisation, la responsabilité du transporteur est automatique. Le seul moyen que le transporteur aérien puisse utiliser pour se disculper de ne pas avoir à payer — en fait, pour que son assureur n'ait pas à payer — est de prouver la faute de la victime. Si nous transposions cela dans le domaine du transport ferroviaire, ce serait, par exemple, les cas d'intrusion sur les voies ferrées. À ce moment-là, le transporteur aurait le droit d'invoquer la conduite fautive de l'intrus pour éviter d'avoir à donner une indemnisation à la suite de blessures ou de mort.
    Ce premier niveau assure une indemnisation quasi automatique, sauf s'il y a la preuve d'une conduite fautive de la part de la victime.

  (1000)  

    Au-delà de ce premier palier, la responsabilité du transporteur peut toujours être engagée, mais il dispose de plus de moyens pour être exonéré. Je vous parle de ce qui se passe actuellement chez les transporteurs aériens. Il peut toujours invoquer la faute de la victime et sa propre absence de faute. Il peut dire qu'il a pris toutes les mesures raisonnables pour éviter cet accident ou que l'accident a été causé par la faute d'un tiers.
    Nous voyons donc qu'il est encore présumément fautif, mais plus responsable. L'indemnisation pourra encore être accordée sans plafond puisque la Convention de Montréal a aboli les précédents plafonds pour l'indemnisation dans le cas d'accidents aériens. L'indemnisation sera encore possible, mais le transporteur disposera de plus de moyens pour être exonéré.
    Cela, mesdames et messieurs, est tout à fait transposable dans le domaine du transport ferroviaire. Il s'agirait simplement de séparer, d'une part, les atteintes à la personne, les cas de blessures corporelles ainsi que les décès et, d'autre part, les dommages matériels. Le problème actuel est que le système traite ensemble, dans la même couverture d'assurance-responsabilité, les dommages aux personnes et aux biens.
    C'est mon opinion profonde. Il me semble que le slogan « la personne avant toute chose » devrait être notre manière de penser en matière d'indemnisation des victimes d'accident. Il est bien que l'on puisse payer pour les dommages environnementaux et reconstruire les immeubles qui ont été détruits, mais il faut d'abord et avant tout que l'indemnisation des personnes soit la priorité. C'est pourquoi il faut instaurer un régime d'assurance-responsabilité des transporteurs ferroviaires dédié aux cas de dommages corporels pour s'assurer de ne pas dépasser la limite, ce qui ferait en sorte que les victimes ne se retrouvent avec rien. Le but est également d'axer l'attention, d'abord et avant tout, sur les victimes.
    En ce qui a trait à ce terrible accident de Lac-Mégantic, imaginons qu'on trouve l'argent et les responsables et que dans 15 ans, par exemple, ce soit finalement réglé et que les victimes soient indemnisées. Il sera malheureusement trop tard parce que les orphelins seront majeurs et que les gens seront décédés ou auront passé à autre chose. Les gens ont besoin d'argent maintenant, tout de suite.
     Vous connaissez tous la maxime anglaise qui dit ceci:.

[Traduction]

    Justice différée est justice refusée.

[Français]

    Elle s'applique tout à fait en matière d'accidents avec dommages corporels et décès. Il faut absolument changer le système et s'assurer de diriger d'abord l'attention sur les personnes et, par la suite, sur les choses. Si nous le faisons, nous allons nous rendre compte que c'est non seulement faisable, mais c'est aussi ce qui coûte le moins cher.
    C'est terrible à dire, mais dans le cas d'une catastrophe comme celle de Lac-Mégantic, les dommages les plus importants ont été causés à l'environnement et dépasseront probablement, et de loin, le demi-milliard de dollars. Il y a ensuite les dommages causés aux immeubles et aux véhicules automobiles qui se situaient au centre-ville de Lac-Mégantic. Le dernier poste est l'indemnisation des ayants droit des 47 victimes décédées.
    Comme vous le savez, je suis un spécialiste des dommages corporels et j'ai fait des calculs rapides. Même si je ne connais pas la situation particulière des 47 victimes, je peux vous garantir que si, demain matin, on payait pour la réparation intégrale du préjudice, comme cela se fait devant les tribunaux ordinaires et si on indemnisait les proches des 47 victimes, le total serait inférieur à 25 millions de dollars. Ce serait probablement même moins de 15 millions de dollars. C'est une goutte dans l'océan des coûts représentés par un accident comme celui de Lac-Mégantic.
    Je voudrais insister sur la faisabilité économique d'un changement de système comme celui-là. Cela peut se faire très rapidement. La preuve est qu'avec un système semblable, depuis plus de 10 ans, on fonctionne très bien en matière de transport aérien. Les primes d'assurance peuvent être prévisibles, fixées et assumées par les compagnies d'assurances. Malheureusement, comme on le dit, la vie humaine n'a pas de prix, mais elle a un coût en droit qui est limité.
     Merci.

  (1005)  

[Traduction]

    Merci beaucoup, monsieur Gardner.
    Nous passons maintenant à M. Sullivan, qui a sept minutes.
    Merci, messieurs Jeanes et Gardner.
    Monsieur Gardner, je vais laisser mes collègues vous poser des questions et je vais me concentrer sur M. Jeanes.
    Je pense que nous sommes ici à cause de l'accident de Lac-Mégantic, mais de manière plus générale, pour parler du transport des matières dangereuses. Vous avez parlé de l'abandon d'un chemin de fer dont certains qui me semblaient importants et qui ne passaient pas par la ville de Toronto, mais plutôt dans la vallée de l'Outaouais. Cela s'est produit après le début de la croissance du transport de brut. Vous savez peut-être, ou peut-être pas, si les sociétés de chemin de fer n'ont pensé qu'à leur bilan financier, lorsqu'il s'est agi de déterminer s'il fallait ou non abandonner ces lignes de chemin de fer. Ont-elles pris en compte la sécurité, ont-elles analysé le risque du transport de produits dangereux par Toronto, à cause de l'abandon de ces lignes?

  (1010)  

    La ligne du Canadien Pacifique dans la vallée de l'Outaouais évitait les régions densément peuplées, en passant au sud d'Ottawa, par Smith Falls. Il y a bien sûr de nombreuses petites villes le long des lignes de chemin de fer. Certaines, comme la ville de Lac-Mégantic, doivent leur existence au chemin de fer. On ne peut pas éviter complètement les endroits où vivent les gens.
    Mais nous sommes préoccupés par la concentration le long de corridors très étroits. À l'est de Toronto, les seuls chemins de fer reliant l'est et l'ouest du Canada passent à quelques centaines de verges les uns des autres, à travers la ville de Port Hope, et il n'y a pas d'autres voies pour relier l'est et l'ouest du pays.
    J'ai parlé du déraillement de Montmagny, qui a détruit le pont de la rivière du Sud. Il a complètement bloqué la seule route pour conteneurs du Canadien National, entre le port de Halifax et le reste du Canada.
    Il faut aussi penser à l'efficacité de notre réseau, en plus de la sécurité des collectivités. Depuis le déraillement de Mississauga dans les années 1980, nous savons quels risques sont associés au transport de produits dangereux. Nous l'avons dit plus tôt, des mesures ont été prises, principalement une réduction des vitesses permises et une plus grande automatisation du contrôle du fonctionnement des roues, des essieux et autres matériels ferroviaires.
    Nous pensons qu'avant d'abandonner des tronçons de chemin de fer pour des raisons économiques, il faut aussi que le gouvernement songe à l'intégrité du réseau ferroviaire national, afin que nous ayons les mesures de rechange souhaitées par le Bureau de la sécurité des transports.
    Jusqu'ici, ce gouvernement et celui qui l'a précédé ont été relativement muets au sujet de l'idée du maintien de l'intégralité de la structure.
    En outre, le gouvernement fédéral et celui du Nouveau-Brunswick sont tout à fait muets au sujet de l'abandon du Chemin de fer Intercolonial entre Bathurst et Newcastle au Nouveau-Brunswick, ce qui coupe l'itinéraire pour les passagers de VIA Rail entre Montréal et Halifax. Cela élimine un itinéraire de rechange pour le fret vers le Nouveau-Brunswick, en cas de rupture de la principale ligne de fret d'Edmundston, comme celui qui s'est produit récemment, lors d'un déraillement important du CN sur cette ligne.
    Le Bureau de la sécurité des transports a fait des recommandations par le passé et nous nous attendons à ce qu'il y en ait d'autres bientôt. Il en a fait le 23 janvier pour le déraillement de Burlington, le plus récent incident du réseau VIA Rail. Il y avait trois recommandations bien précises: d'abord, un système de commande intégrale, ensuite, des enregistreurs vidéo dans les trains et, enfin, la construction d'une cabine suffisamment robuste pour protéger ses occupants en cas de déraillement.
    Jusqu'ici, le gouvernement n'a adopté aucune de ces mesures de manière rigoureuse. VIA Rail a dit vouloir s'y conformer volontairement.
    Le Bureau de la sécurité des transports ne devrait-il pas pouvoir forcer le gouvernement à imposer ces nouvelles règles?
    Nous pensons que oui. Aux États-Unis, le Congrès s'est acquitté de cette responsabilité en adoptant des lois relatives au contrôle intégral des trains. En raison de problèmes logistiques, on ne sait pas quand ce sera complètement mis en oeuvre, mais les chemins de fer investissent déjà massivement pour respecter cette obligation.
    Ailleurs dans le monde, ces investissements ont déjà été faits. Le système de contrôle intégral des trains aux États-Unis remonte aux années 1920, lorsqu'est née cette idée. Au Canada, à part l'O-Train d'Ottawa, dont j'ai parlé, aucun chemin de fer de transport de voyageurs réglementé par le fédéral ne dispose de ce système.
    Il faut donc une intervention du gouvernement fédéral. On avance trop lentement. On attend de voir comment les choses fonctionnent aux États-Unis une fois que les chemins de fer auront les investissements nécessaires, y compris dans les chemins de fer de propriété canadienne. Le CN et le CP ont fait ces investissements pour les parties américaines de leur réseau.
    Le gouvernement doit agir.

  (1015)  

    Mais ces investissements sont transfrontaliers puisque les locomotives traversent les frontières, équipées de la commande intégrale...
    Non, malheureusement...
    ... c'est dans les locomotives mêmes...
    Dans les locomotives, mais c'est...
    ... mais pas sur le...
    Il ne sert à rien s'il n'y a pas aussi les systèmes nécessaires le long de la voie ferrée...
    Forcément.
    ... et c'est un élément coûteux à mettre en oeuvre, même s'il s'agit uniquement de fonds privés.
    Le service ferroviaire est le seul moyen de transport qui doit payer toutes ses infrastructures. Une solution serait peut-être de ne pas s'en remettre uniquement aux chemins de fer et à leurs programmes d'investissement. Je pense qu'il faut une participation gouvernementale, surtout compte tenu de notre retard par rapport au reste du monde.
    Dans le rapport du Bureau de la sécurité des transports sur le déraillement de Burlington, on concluait que la cause était une signalisation qu'on n'avait pas vue et qu'il s'agissait d'une erreur humaine. On fait fi de la signalisation des centaines de fois par jour au Canada, mais ce n'est que dans peu de cas qu'une collision se produit.
    Je ne dirais pas que c'est des centaines de fois par jour, parce que...
    Des centaines de fois par année, mes excuses. Des centaines de fois par année.
    Des centaines de fois par année, mais peut-être une fois par jour, je pense.
    Bon nombre de ces incidents se produisent à des vitesses très basses dans des dépôts de rails, par exemple, mais ce n'est pas seulement à cause d'une erreur d'inattention du conducteur; l'interprétation de ces signaux est extrêmement complexe. Il existe de nombreuses couleurs différentes de signaux lumineux. La couleur et la position des feux sont les seuls éléments qui permettent d'avancer. Dans la locomotive, aucun indicateur n'explique la signification des signaux, contrairement à ce qui se fait ailleurs dans le monde, et il n'y a pas de remplaçant, si l'équipage, pour une raison ou une autre... Et nous ne connaîtrons jamais la raison de l'accident de Burlington, parce que nous ne savons pas exactement ce qui se passait dans la locomotive, d'où la recommandation concernant les caméras et les enregistrements audio.
    En ce qui concerne la troisième recommandation sur la protection de la cabine du conducteur en tant que tel, l'accident s'est produit de façon tragique, et la locomotive est entrée en collision avec un édifice en béton à côté de la voie ferrée. Cet élément est important, mais selon nous, il est loin d'être aussi important que la nécessité d'un système de commande intégrale des trains.
    Merci.
    Monsieur McGuinty, vous avez sept minutes.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Professeur Gardner, j'aimerais revenir sur ce que vous avez proposé. Vous parlez de l'importance de considérer la personne avant toute chose et, dans cette optique, vous proposez un nouveau régime de compensation pour les personnes qui ont été victimes d'un accident. Or dans l'étude qui est à l'ordre du jour aujourd'hui, nous parlons surtout d'améliorer la sécurité ferroviaire pour éviter qu'il y ait des accidents. Je comprends très bien ce que vous proposez dans le cadre de ce régime de compensation, mais j'aimerais que le problème ne soit pas abordé ex post facto, mais plutôt qu'il soit évité, de sorte qu'une tragédie comme celle de Lac-Mégantic ne se reproduise plus.
    Au Canada, les compagnies ferroviaires sont obligées de transporter tous les produits qui leur sont confiés, y compris les matières dangereuses. On comprend donc que le Canadien National et le Canadien Pacifique aient chacun une assurance-responsabilité civile qui totalise environ 1 milliard de dollars. Que pensez-vous de l'idée que les propriétaires des matières dangereuses soient eux aussi forcés de partager la responsabilité civile?
     Dans le cas de Lac-Mégantic, la compagnie Irving était propriétaire de la marchandise. D'après ce que je comprends, cette compagnie n'a absolument rien à faire. Autrement dit, ce n'est pas elle qui défraie les coûts du nettoyage à Lac-Mégantic. Ce n'est pas elle qui est chargée de la compensation à l'échelle locale. Enfin, ce n'est pas elle qui paie les factures liées à l'assainissement écologique.
     Êtes-vous d'avis qu'il est maintenant temps que les propriétaires de ces matières assument des responsabilités? Quelle est votre opinion sur cette question?
    Je vais vous surprendre, mais cela existe déjà au Québec, et ce, depuis 1978. Ce n'est pas récent. Depuis 1978, la Loi sur la qualité de l'environnement fait en sorte que tout propriétaire d'un contaminant — et une liste de contaminants figure évidemment dans la loi, dont le pétrole qui était transporté lors de la tragédie de Lac-Mégantic —, même s'il n'en a pas le contrôle au moment de l'accident, demeure responsable des coûts de nettoyage. D'ailleurs, l'ordonnance a été émise par le ministre de l'Environnement.
     Vous dites qu'Irving était propriétaire du pétrole le 6 juillet dernier, soit au moment de la tragédie. Or si on se fie à certaines tractations qui ont lieu présentement dans le cadre du recours collectif, il semblerait que cette question soit en litige. Est-ce que c'était World Fuel Services, la compagnie propriétaire au départ, qui en était encore propriétaire jusqu'à l'arrivée du pétrole dans le port de Saint John, au Nouveau-Brunswick, ou est-ce que c'était Irving? À ma connaissance, l'avis a été envoyé aux deux propriétaires présumés.
    Comme vous voyez, ce genre de mesures existe déjà, mais malheureusement, cela ne profite qu'au ministre de l’Environnement. Cela ne porte que sur les dommages environnementaux. Pour tout ce qui touche l'indemnisation des victimes, notamment dans le cadre d'un recours collectif, on ne peut pas invoquer cette disposition.
    Est-ce que ce serait faisable? Certainement. Est-ce que cette disposition, qui a fait l'objet d'une ordonnance, va être contestée par le propriétaire, probablement jusque devant la Cour suprême, pour qu'elle soit jugée inconstitutionnelle? Fort probablement. Est-ce que ces gens vont réussir? À mon avis, non, comme dans le cas des cigarettiers qui ont perdu leur cause à l'époque lorsque des lois particulières permettant de les poursuivre ont été adoptées.
    Il reste que pour cette question à elle seule, on en a pour 10 ans. C'est le temps que prendrait une contestation portant sur la constitutionnalité de cette disposition. Je ne sais pas si une telle disposition existe dans d'autres provinces, mais celle-ci existe depuis 1978 au Québec.

  (1020)  

    À la suite des événements de Lac Mégantic, est-ce que le Québec est en train de repenser le fait que la responsabilité civile commence et se termine strictement avec des questions écologiques et environnementales?
    Comme vous le savez, le domaine du transport ferroviaire est largement un domaine de compétence fédérale. Donc, même si le Québec voulait intervenir dans le cadre d'un accident comme celui de Lac Mégantic, il ne peut le faire. On l'aurait fait il y a longtemps si cela avait été possible. Par exemple, la Loi sur l'assurance-automobile, qui a un régime d'indemnisation automatique, exclut les trains simplement pour une question de partage des compétences, alors que dans d'autres États comme l'Australie — je prends l'exemple de l'Australie qui a un régime fédéral qui ressemble au nôtre —, on couvre non seulement les accidents d'auto par un régime d'indemnisation automatique, mais également les accidents de train.
    Il s'agit vraiment d'une question de partage des compétences. À la limite, le gouvernement québécois pourrait le faire pour ses voies ferrées internes pour lesquelles il a la compétence. Le problème ou l'avantage est que les voies ferrées internes, qui relèvent de la compétence du Québec, traversent des endroits qui sont très peu habités, alors que ce sont les voies ferrées sous juridiction fédérale qui passent à travers les villes et les villages du Québec. C'est là où il y a plus de risques que se produisent des conflagrations créant des victimes de dommages corporels et des victimes de dommages matériels.
    Selon votre témoignage d'aujourd'hui, ce serait possible que le fédéral revoit complètement la question de responsabilité civile et qu'il partage cette responsabilité avec le soi-disant propriétaire, soit la compagnie qui sera éventuellement touchée.
    Il y a deux façons d'entrevoir les choses. La première étant de rendre le transporteur l'unique responsable, mais les tarifs de transport varieraient selon le degré de dangerosité du produit et tout le monde serait assujetti à cette assurance obligatoire.
    La deuxième façon est de rendre le transporteur directement responsable — au bout du compte, c'est son assureur qui devra verser l'indemnité —  et de lui accorder un droit de recours subrogatoire spécial contre le propriétaire qui, lui, aurait à assumer la responsabilité partagée liée à ce bien. Peu importe la manière dont on le fait, je pense que dans la logique des choses, on pourrait rendre davantage responsable le propriétaire d'un produit dangereux par rapport au propriétaire de poulets ou de grains, comme cela se passait auparavant dans le transport ferroviaire.
    C'est une question de partage des risques, que cela se fasse directement dans le cadre de l'implantation du régime où le propriétaire paie une partie de la prime d'assurance ou encore qu'on mette face au propriétaire un régime de responsabilité où il devra répondre par la suite.
    L'important, c'est que les victimes n'aient pas à se débattre dans le dédale du « qui dois-je poursuivre et à qui dois-je demander une indemnisation ». Donc, le transporteur ou son assureur doit payer automatiquement.

[Traduction]

    Merci, monsieur McGuinty.
    Passons maintenant à M. Watson.

[Français]

    Merci beaucoup.

[Traduction]

    Excusez-moi, je ne voulais pas interrompre les interprètes. Je vous présente mes excuses.
    Allez-y, monsieur Watson.
    Je l'apprécie. Je suis en train d'écrire ce que les interprètes disaient à l'instant, parce que ce dernier point est important et portait — si j'ai bien compris — sur les victimes qui sont indemnisées par rapport à la question de la responsabilité partagée entre le transporteur et une tierce partie. C'est la dernière chose qui a été dite.
    Bien sûr, je remercie nos témoins de comparaître aujourd'hui. Nous apprécions vos contributions. Manifestement, nous entreprenons, à la demande de la ministre, une étude importante sur la façon dont nous pouvons améliorer les systèmes de gestion de la sûreté et le système de transport des marchandises dangereuses également.
    En ce qui concerne la question de la responsabilité, je sais que nous tenons davantage compte de ce que nous faisons pour améliorer les systèmes de responsabilité dans le secteur maritime, par exemple, au moment où un important rapport d'un groupe de travail est prévu. Les recommandations sont examinées rapidement par le gouvernement et nos fonctionnaires. J'imagine que nous entendrons parler davantage du pétrole brut en particulier. Nous examinons également notre état de préparation en ce qui concerne les matériaux dangereux dans le secteur du transport maritime, de sorte que tout cela arrive à point nommé.
    Monsieur Gardner, votre contribution concernant la question de la responsabilité est très importante pour notre comité.
    J'ai une question au sujet de la consultation de l'Office des transports du Canada sur le règlement sur l'assurance-responsabilité civile relative aux chemins de fer. Avez-vous participé ou apporté une contribution à cet effort particulier déployé par l'OTC?

  (1025)  

[Français]

    La semaine dernière, j'ai appris qu'il y avait eu une consultation. En plus d'enseigner, je me déplace partout dans le monde. Au début du mois, je suis notamment allé en France pour parler d'accidents ferroviaires. En mai prochain, je serai en Espagne pour parler de la tragédie de Saint-Jacques-de-Compostelle. Je n'ai su qu'hier, ou à peu près, une demande avait été déposée et que la date limite était le 21 mars.
    Je suis en retard et c'est simplement parce qu'on ne m'en a pas averti. Il semble y avoir des choses qui ne se rendent pas jusqu'en milieu rural au Québec.

[Traduction]

    Il ne s'agit pas de pointer qui que ce soit du doigt, monsieur Gardner. Je comprends. Je voulais seulement savoir si vous étiez au courant ou si vous aviez eu la chance d'y aller. Bien sûr, votre témoignage ici est très important. Il est public, et il est important que nous l'étudiions également.
    Si vous souhaitez également déposer un mémoire pour notre comité, nous vous en serions reconnaissants. Si vous souhaitez formaliser certaines de vos idées ou rédiger un mémoire plus complet pour le comité, il est certain que nous en serions heureux.
    J'imagine que ce document pourrait également être distribué.

[Français]

    Oui.

[Traduction]

    Je pourrais en remettre une copie à la ministre, au sujet de l'autre processus.
    Monsieur Jeanes, vous avez comparu devant notre comité auparavant. Je fais partie du comité depuis 2007. Nous sommes heureux que votre organisation et vous continuiez à être actifs et à comparaître devant le comité.
    Je ne veux pas à avoir l'air tatillon, si vous voulez, au sujet de cette question, mais j'aimerais obtenir des précisions sur un point en particulier. C'est au sujet du système de commande intégrale des trains. Mme Tadros était ici un peu plus tôt, et je pense avoir compris, par sa réponse, que la recommandation du BST ne portait pas précisément sur le système de commande intégrale des trains, mais plutôt sur les méthodes de contrôle du freinage. Cela signifie qu'il existe d'autres façons d'y arriver que le système de commande intégrale des trains.
    Le NPD continue de revenir à cette question et de soutenir qu'il s'agissait d'une recommandation en faveur du système de commande intégrale des trains, ou PTC, et je pense avoir entendu la même chose, monsieur Jeanes. À titre de précision, il existe d'autres mécanismes de contrôle des trains à sécurité intrinsèque que le PTC. Est-ce exact?
    Le problème avec le PTC, c'est qu'il s'agit d'un terme générique pouvant avoir différentes significations, selon l'endroit où l'on se trouve dans le monde. Il existe des applications très précises de différents types de systèmes de commande intégrale des trains.
    Au Japon, le train shinkansen est équipé d'un système de commande automatisé des trains dans la cabine, système qui ne dépend pas des signaux le long des chemins de fer. Ces trains existent depuis 1964. Comme je l'ai mentionné, même les chemins de fer à vapeur américains dans les années 1920, comme le Pennsylvania Railroad, par exemple, étaient munis de systèmes de commande intégrale des trains, tout comme la Great Western Railway et d'autres chemins de fer au Royaume-Uni.
    La technologie se présente sous de nombreuses formes et a évolué de nombreuses façons. Dans des situations comme celles de Saint-Jacques de Compostelle, en Espagne, un système plus ancien devait interagir avec un système moderne, et l'interaction elle-même entre les deux systèmes a en partie causé l'accident.
    Au Canada, nous n'avons que des signaux visuels, et les deux mécaniciens dans la locomotive les vérifient. Dans le cas de Burlington, ça n'a pas fonctionné. Il y avait un troisième mécanicien qualifié dans la cabine. Même s'il était en formation, il était qualifié et expérimenté. Cela n'a pas empêché les signaux d'être mal interprétés dans ce cas-là.
    Lorsque je parle d'un système de commande intégrale des trains, je parle d'un système qui constitue une seconde ligne de défense, de sorte que si une erreur est commise ou si un signal fonctionne mal, comme cela s'est produit à Saint-Charles-de-Bellechasse lorsque le train de Via Rail a déraillé en raison d'un signal partiellement caché, il existe une deuxième ligne de défense. C'est la recommandation du BST.

  (1030)  

    Très bien. Je comprends. J'établis cette distinction simplement parce que Mme Tadros l'avait fait également, monsieur Jeanes.
    S'il existe différents modèles, selon vous, lequel Transports Canada devrait-il mettre en oeuvre ici? Celui adopté aux États-Unis? S'agit-il d'un modèle différent? À titre de précision, lorsque vous parlez du système de commande intégrale des trains et que vous formulez des recommandations, quels modèles nous demandez-vous d'examiner?
    Étant donné que le réseau ferroviaire est entièrement intégré entre le Canada et les États-Unis, que les deux compagnies de chemin de fer canadiennes exploitent un réseau important aux États-Unis et que les chemins de fer équipent leurs locomotives afin de répondre aux normes américaines, je pense que nous devons observer cette intégration.
    Ce qui se fait en Europe est utile. La technologie allemande dont j'ai parlé, Indusi, est utilisée dans l'O-Train d'Ottawa, la seule compagnie de chemins de fer fédérale qui l'utilise. Elle est également utilisée dans les systèmes de trains légers à Calgary et à Edmonton, par exemple, pour assurer la sécurité.
    Mais nous ne pouvons pas simplement acheter un système européen, parce qu'il ne fonctionnerait pas dans toute l'interface entre le Canada et les États-Unis.
    Merci beaucoup.
    Passons maintenant à M. Toet, pour sept minutes.
    Monsieur Jeanes, j'aimerais également revenir à la question du système de commande intégrale des trains. Il semble y avoir un peu d'incompréhension quant à ce qui se passe exactement aux États-Unis à l'heure actuelle dans ce domaine.
    Êtes-vous au courant qu'à l'heure actuelle, un projet de loi a été déposé aux États-Unis afin d'élargir l'application complète de système de commande intégrale des trains?
    Oui.
    Il s'agit d'une question administrative parce que les compagnies de chemins de fer ont indiqué au gouvernement qu'elles ne pourraient pas respecter l'échéance originale de 2015, qui avait été enchâssée dans une loi du Congrès. On ne sait toujours pas quand ce sera fait. On sait toutefois que ça se fera. C'est en cours, et les compagnies de chemins de fer investissent beaucoup. La seule question qui demeure est celle de savoir quand la conversion aura lieu. Manifestement, cette question doit faire l'objet de discussions. Mais au Canada, il n'y a encore aucun programme.
    Cependant, l'un des défis aux États-Unis par rapport à l'échéance de 2015, c'est que la technologie n'est pas vraiment prête. Ils y travaillent toujours.
    De plus, la Federal Railroad Administration estime que le PTC préviendra peut-être 2 % des collisions et des déraillements et coûtera plus de 10 milliards de dollars à mettre en oeuvre. Cet argent n'est pas utilisé pour d'autres mesures de sécurité. On croit que l'effet serait de plus de 2 %, mais parce que les chemins de fer investissent autant dans le PTC actuellement, il faut s'assurer que les fonds vont au bon endroit.
    Cela ne veut pas dire que le PTC pose problème et qu'il ne faut pas songer sérieusement à ce système, mais je crois qu'il est important de tenir compte de ces facteurs et que cette exigence législative a imposé un réel fardeau aux chemins de fer. Il y a d'autres mesures de sécurité qu'ils n'ont pas mises en oeuvre parce qu'il y a tant d'argent dirigé maintenant vers cette initiative.
    Il est bon et important de tenir compte de ce genre de choses.
    Je voulais également vous poser une question concernant les systèmes de gestion de la sécurité. Dans votre exposé préliminaire, vous avez dit brièvement que vous appuyez les systèmes de gestion de la sécurité. Je suis ravi de l'entendre. J'aimerais que vous nous disiez ce que vous pensez de l'ajout des SGS au cadre de sécurité du transport ferroviaire canadien et de son incidence. Peut-être pourriez-vous nous parler de l'effet qu'il a eu sur la sécurité au Canada.
    L'important, c'est que les chemins de fer pourraient avoir leur propre culture de sécurité; la sécurité doit relever du plus haut niveau de gestion. Il ne s'agit pas seulement de répondre aux problèmes soulevés par les enquêteurs du gouvernement, mais cela doit faire partie de la culture d'entreprise. C'est quelque chose qui exige des investissements permanents de la part des chemins de fer. J'ai déjà dit que les chemins de fer doivent investir dans leur propre infrastructure parce que les gouvernements, comparativement aux autres modes de transport, ne paient pas pour les chemins de fer en général, à l'exception, bien sûr, des améliorations aux infrastructures pour VIA Rail, qui est une société d'État et qui a donc besoin des investissements du gouvernement pour améliorer son infrastructure.
    Généralement, ce que l'on a constaté, et c'est ce qui a été démontré dans les exposés que j'ai entendus lors des différents événements auxquels j'ai participé... J'ai parlé du Forum canadien de recherche sur le transport qui a eu lieu plus tôt cette année, où l'on a entendu des exposés de représentants des chemins de fer principaux et secondaires et du secteur de la distribution. C'était la même chose à l'assemblée de l'International System Safety Society à laquelle j'ai participé et où j'ai fait un exposé l'an dernier, et au congrès du TRAQ.
    Les chemins de fer sont tous extrêmement conscients de l'importance de la sécurité. Je pense que l'arrivée des SGS a mené à une meilleure prise de conscience. Il faut plutôt s'interroger sur les ressources des plus petites entreprises, et si des sociétés comme la MMA, la Montreal, Maine and Atlantic, au sujet de Lac-Mégantic, peuvent se permettre de bien mettre en oeuvre le cadre de sécurité nécessaire. Nous ne le savons pas encore parce que nous n'avons pas encore vu le rapport du BST pour savoir si la culture de gestion de la sécurité chez MMA était ou non déficiente. On attend de le savoir.

  (1035)  

    Je crois qu'elles ne peuvent pas se permettre de ne pas le faire.
    Il y a des conséquences tragiques si elles ne le font pas.
    Oui.
    À ce sujet, lorsque vous avez répondu à la question, vous avez dit que les SGS sont essentiels au niveau de la gestion. La semaine dernière, j'ai visité l'une des grandes installations de chemin de fer avec le président de la société et le président du syndicat. J'ai pu constater l'omniprésence dans toute la structure des systèmes de gestion de la sécurité. Les travailleurs doivent également y participer et les trouver importants.
    Pourriez-vous nous parler de son importance? Il est important que la gestion y participe, mais pourriez-vous nous parler de l'importance pour les travailleurs, parce que la culture n'est pas vraiment suffisante si elle ne se rend pas à ceux qui sont sur le terrain, n'est-ce pas?
    Non. L'employé des chemins de fer qui est dans le camion qui fait les inspections de routine le long du chemin de fer est aussi important que l'agent principal de la sécurité de la société pour le fonctionnement de ces systèmes. Par exemple, si les travailleurs hésitent à dénoncer des problèmes de sécurité, alors l'agent principal de la sécurité ne pourra pas faire son travail.
    Il est essentiel que cette ouverture soit présente et que tout le monde dans la société comprenne que la sécurité fait partie de la culture d'entreprise et n'est pas seulement une question de gestion et de reddition de comptes. Je pense que l'on comprend que les SGS exigent qu'une telle culture soit créée.
    Il vous reste 40 secondes.
    J'ai une brève question à ce sujet. Dans le cadre de notre examen des systèmes de gestion de la sécurité, pourriez-vous nous dire brièvement quel est l'élément le plus important des systèmes de gestion de la sécurité que notre comité devrait étudier?
    Eh bien, il faut surveiller l'efficacité. Le vérificateur général a déjà exprimé des préoccupations, et s'il y a des inquiétudes au sujet de la mise en oeuvre des systèmes de gestion de la sécurité qui sont soulevées par les rapports du BST que nous attendons, il faudra y répondre rapidement.
    Merci beaucoup.
    Madame Boutin-Sweet, vous avez trois minutes.

[Français]

    Merci beaucoup, messieurs.
    Étant donné que je ne dispose que de peu de temps, mes deux questions vont s'adresser à M. Gardner.
    Vous avez beaucoup parlé d'indemnisation, de droit civil et ainsi de suite mais, pour ma part, j'aimerais vous parler du côté humain. Pour vous citer, vous avez dit: « La personne avant toute chose », ce que j'ai bien apprécié.
    Dans un article de La Presse canadienne du mois d'août, vous avez parlé de l'obligation morale. Ma première question est la suivante. Qu'entendez-vous par cette expression?
    Vous n'y êtes pas allé non plus avec le dos de la cuillère en parlant du Bureau de la sécurité des transports du Canada, le BSC, et de Transports Canada. Vous avez dit qu'ils avaient échoué et fait preuve de laxisme dans le cas de la tragédie du Lac Mégantic. Ma deuxième question est la suivante. Qu'est-ce qu'ils auraient dû faire, qu'est-ce qu'ils ne font pas et qu'est-ce qu'ils devraient faire?
    À votre première question concernant l'obligation morale, je vous rappelle simplement ce qui s'est déjà passé au Canada il y a une vingtaine d'année dans le cadre du scandale du sang contaminés. Dans ce cas précis, la responsabilité civile du ministère de la Santé n'a jamais été établie devant un tribunal du gouvernement fédéral.
    Toutefois, à un moment donné, on s'est rendu compte collectivement, à la suite de pressions politiques, que c'était intenable pour les victimes du sang contaminé d'être laissées dans des méandres de recours juridiques qui n'en finiraient pas puisqu'elles allaient mourir bien avant que cela arrive à terme. Finalement, l'obligation morale et la solidarité nationale commandaient de mettre en place un régime d'indemnisation qui, sans indemniser complètement les victimes en raison de plafonds fixés par la loi, prévoyait au moins le versement plus rapide d'indemnités raisonnables.
    Pour ma part, sans engager la responsabilité de l'État fédéral dans la catastrophe, je crois que la tragédie de Lac Mégantic a été un élément déclencheur pour tout le monde. Nous avons constaté jusqu'à quel point le monde du le transport ferroviaire avait évolué et comment les limites d'assurance, les mesures de contrôle et autres demandaient à être remises à jour. Elle est arrivée cette tragédie qui a fait 47 morts.
    Comme je l'ai déjà dit, les coûts d'indemnisation seraient relativement peu élevés pour l'État si, pour des motifs de solidarité nationale, il indemnisait les victimes sans que ce soit d'une manière complète comme le feraient les tribunaux civils. L'État pourrait assurer à ces personnes qu'elles n'attendront pas 15 ans avant de toucher une indemnité. C'est ma réponse à votre première question.
    La deuxième question est intéressante puisque le l'Office des transports a été le dernier à être ajouté à la liste des intimés dans le recours collectif intenté au Québec par les représentants des victimes. L'Office des transports est-il responsable de ce qui s'est passé d'un point de vue juridique?
    Il est évident qu'il est impossible d'attaquer l'Office des transports, l'OTC, en disant que la réglementation était insuffisante. Il s'agit d'une décision de nature politique et, heureusement, les juges ne se mêlent pas de questions de politiques, à savoir quelle réglementation doit être adoptée.
    L'office a-t-il mal appliqué la réglementation existante? C'est le point qui a été plaidé dans le cadre de l'amendement présenté pour engager la responsabilité de l'OTC. Je n'ai absolument aucun fait ni d'un côté ni de l'autre qui m'indique que l'OTC a fait preuve d'un aveuglement volontaire dans l'application de la réglementation, qu'il aurait laissé aller les choses et que c'est ce qui pourrait être la cause du déraillement en question.
    On s'entend certainement pour dire que la loi était insuffisante considérant la règle actuelle du Règlement sur l'assurance-responsabilité qui proposait une limite suffisante, quand on sait que certaines de ces entreprises étaient assurés pour moins de 100 millions de dollars et même beaucoup moins que 50 millions de dollars. Quand nous pensons aujourd'hui aux conséquences possibles de ces accidents étant donné la dangerosité des produits, de toute évidence, la loi était insuffisante. Le problème est que cela n'engage pas pour autant la responsabilité civile de l'État.

  (1040)  

[Traduction]

    Merci. Je suis désolé de vous interrompre, mais nous arrivons à la fin de votre temps de parole, et je pense que nous avons obtenu une réponse.
    Monsieur Komarnicki, vous avez les dernières trois minutes.
    En ce qui concerne l'indemnisation, je crois que vous disiez que la justice différée constitue un déni de justice. J'imagine que vous proposez un processus plus rapide. Quel genre de tribunal ou processus suggérez-vous? Il faut que cela soit quasi judiciaire ou comme une cour, parce que l'on traite de problèmes de fait et de droit, entre autres. Par rapport aux tribunaux normaux, qu'est-ce qui permettrait d'accélérer le système?

[Français]

    Prenons le cas où on implante un régime à deux paliers. Comme je l'ai dit, sauf dans le cas où c'est la faute de la victime, le transporteur est automatiquement responsable. L'actuelle Loi sur le transport aérien prévoit la possibilité d'une indemnisation en cas d'accident aérien. Il suffirait de la rendre obligatoire dans le cas du transport ferroviaire. Il faudrait qu'une provision soit remise à la victime rapidement, dans les mois qui suivent l'accident, jusqu'à concurrence de ce premier palier. C'est ce que je propose dans le résumé que je vous ai fait. En cas de déraillement et de collision, comme il y aurait responsabilité automatique, une provision serait remise rapidement à la victime et, par la suite, on pourrait tenir un procès pour l'excédent, s'il y a lieu.

[Traduction]

    Vous ajoutez un autre problème, et c'est de savoir si la négligence de la victime a provoqué les dommages ou y a contribué. Lorsque l'on se met à examiner cette question, et disons que c'est surtout la négligence de la victime qui est en cause, ne doit-on pas passer par un certain processus avant qu'une indemnisation soit versée? On ne pourrait plus aller chercher les fonds ensuite. Une fois le processus amorcé, il faut déterminer les faits, les responsabilités, et tout le reste.
    N'est-il donc pas réaliste de s'attendre à une indemnisation s'il faut juger ce point supplémentaire?

  (1045)  

[Français]

    Transposons ce qui se fait actuellement dans le domaine du transport aérien au domaine ferroviaire. S'il y avait un écrasement d'avion au décollage ou à l'atterrissage, le transporteur n'irait certainement pas devant les tribunaux pour plaider contre la victime. Il serait évident que les passagers n'auraient commis aucune faute. Ce serait exactement la même chose en cas de collision entre des trains ou de déraillement de train.
    Je vous ai parlé de l'hypothèse de l'intrusion, par exemple quelqu'un qui se place sur une voie ferrée. À ce moment-là, il y aurait un procès pour déterminer si la victime est responsable. Dans le cas de la catastrophe de Lac-Mégantic, le transporteur n'a absolument aucune possibilité d'invoquer la faute des victimes. Il n'est donc pas question de délais pour contester l'application de la première tranche de l'indemnisation.

[Traduction]

    Merci beaucoup, monsieur Gardner et monsieur Jeanes. Nous n'avons jamais assez de temps, et c'est tout le temps que nous avions pour cette séance. Merci beaucoup d'avoir participé à notre étude sur la sécurité ferroviaire.
    La séance est levée.
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