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ACVA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent des anciens combattants


NUMÉRO 092 
l
1re SESSION 
l
42e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 14 juin 2018

[Énregistrement électronique]

  (1105)  

[Traduction]

     Je déclare ouverte la 92e  séance du Comité permanent des anciens combattants.
    Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, nous étudions les besoins et les enjeux propres aux vétérans autochtones. Il s’agit de la dernière réunion de la session, alors je préviens tout le monde que nous ne serons pas ici la semaine prochaine. Nous allons terminer nos travaux aujourd’hui et j’espère que nous passerons d’excellentes vacances ou que nous ferons du bon travail dans nos circonscriptions.
    Dans ce premier groupe de témoins, nous accueillons Brian Black, président et vice-président du conseil des anciens combattants de la Nation métisse de l'Ontario et Shelly Claus, représentante des femmes. Bonjour.
    Randi Gage, présidente, Unified Veterans of Manitoba; Mme Gage est un vétéran de la guerre du Vietnam qui était spécialiste de l’approvisionnement en blindage dans l’armée américaine. Mme Gage a toujours défendu les droits et la santé des vétérans autochtones et de tous les anciens combattants, afin de s’assurer qu’ils reçoivent le soutien qu’ils méritent. Dans les années 1990, elle a travaillé sans relâche à la désignation d'une journée spéciale de reconnaissance pour les anciens combattants autochtones. Le 8 novembre 1993, la première Journée des anciens combattants autochtones a eu lieu partout au Canada. En 1994, cette journée a été officiellement reconnue par le gouvernement du Manitoba.
    Nous allons commencer ce matin par accorder 10 minutes à chacun de nos invités. Nous passerons ensuite aux questions.
    Nous allons commencer par Mme Gage.
     Merci. Vous m’avez enlevé tout ce que j’avais à dire. Quelqu’un a fait des recherches.
    Des voix: Ha, ha!
    Mme Randi Gage: Je dois vous avertir à l’avance que je suis une pleureuse, retenez cela.
    [Le témoin s’exprime en ojibwa.]
    Est-ce que tout le monde a compris ce que je viens de vous dire?
     Vous avez dit : « Bonjour »...
    D’accord.
    ... et vous avez dit que vous êtes heureuse d’être ici.
    Non.
    Quelqu’un peut-il traduire ou interpréter ce que je viens de dire?
    Pouvez-vous répéter.
    Et encore et encore. Je vais le faire dans un instant.
     C’est un exemple de l’énorme problème auquel les anciens combattants autochtones et métis sont confrontés depuis le début. Je viens de vous dire qui je suis, quelle était la position de ma famille au sein de ma collectivité — je ne sais pas ce qu'il en est aujourd’hui — quel est mon travail et d’où je viens. C’était en 11 mots ou moins.
    Ce que j’ai dit, c’est : « Bonjour, salutations », comme vous préférez. Certains disent que c’est vraiment un mauvais français, mais ce n’est pas le cas; c’est de l’ojibwa. Je m’appelle Eagle Woman. Je suis du clan des huards. Je suis une guerrière. Mon clan est le clan qui parle pour le peuple. Nous avons deux clans, le clan de la grue blanche et le clan des huards, qui sont en quelque sorte les deux clans politiques. Les grues blanches, c’est vous. Vous êtes les grues blanches. Vous allez là-bas et faites tout le rinçage, le pliage et tout le reste. Le clan des huards est le porte-parole du peuple. Ils viennent et disent: « Il ne m’écoutera pas. » Ensuite, je leur dis: « Écoutez maintenant. »
    C’est le début des problèmes et de la confusion auxquels notre peuple a toujours été confronté.
    Je ne vais pas vous raconter les histoires habituelles que vous avez sûrement entendues un million de fois. Je m’excuse auprès des francophones, mais mon français se limite à « oui » et à « escargot » et aucun de ces mots ne sera utile ici.
    Je vais vous lire une petite déclaration.
    Il s'agit du paradoxe d’être une femme soldat autochtone — un énorme paradoxe — et de ce qui est difficile pour une femme qui entre dans l’armée. En tant qu’enfants autochtones, nous sommes libres d’apprendre de notre mère la Terre et des choses qu’elle nous offre. Bien sûr, nous sommes instruits des dangers et des choses qui peuvent nous nuire, mais dans l’ensemble, nous sommes libres — du moins, je l'étais. J’étais une enfant un peu sauvage.
    Nous avions très peu de règles. Si quelqu’un prononçait votre nom, vous pensiez « oh » et s’il claquait des doigts, vous vous arrêtiez immédiatement. S’il disait « baissez-vous », vous vous baissiez immédiatement. Vous ne posiez pas de questions, vous vous baissiez. Une fois que vous saviez que vous étiez en sécurité, vous demandiez: « Papa, de quoi s’agissait-il? » Pas avant. Avant, vous écoutiez. Il y avait des règles.
    Nous, femmes autochtones, avons reçu dès notre plus jeune âge un enseignement à propos de notre corps et ce qu'il fallait ou ne fallait pas en faire. Ce n’était pas comme aujourd’hui. On nous a enseigné à quoi servait notre corps et ce que l’on attendait de nous. Nous étions respectées pour le don que le Créateur nous a fait, pour être comme notre mère la Terre et apporter la vie. Nous étions considérées comme des créatures douces et fortes et comme les protectrices de la vie. Nous avons appris à quel point notre visiteur mensuel — bien que pénible — était précieux, car c’était la raison pour laquelle nous étions ici, pour apporter une nouvelle vie au monde. Vous voyez? Je vous l’avais dit. Je pleure.
    Pour moi, décider de devenir soldate était facile, parce que j’avais toujours voulu suivre les traces de mon père. Mon projet, comme nous tous, était d’obtenir un diplôme d’études secondaires, d’obtenir un diplôme d'infirmière, d’entrer dans l’armée et obtenir une qualification de saut en parachute pour devenir infirmière aéroportée. Eh bien, cela n’a pas tout à fait fonctionné de cette façon. J’ai obtenu mon diplôme. Je suis entrée en soins infirmiers et j’en étais au point où nous avons choisi nos spécialités. Il y en avait une que je voulais. Je ne l’ai pas obtenue, parce que la nièce de l’instructeur était dans la classe et c'est elle qui l’a eue. Je me suis fâchée et je suis partie.
     J'ai traversé la rue pour me présenter au recruteur des marines, mais il était impoli, alors je suis parti. Je suis allé voir l’armée de l'air et je n’ai pas aimé les uniformes. Je me suis retrouvée chez le recruteur de l’armée, il s'est trouvé qu'il faisait passer l’examen d’entrée à ce moment-là, alors j’ai passé l’examen d’entrée. Je l’ai eu, en ratant une question. Encore aujourd’hui, je suis irritée de ne pas avoir répondu correctement à cette question. Je connaissais la réponse, mais j’ai donné la définition civile.
    Deux semaines plus tard, je quittais la sécurité de ma petite collectivité du Nord du Michigan pour aller dans la ville de Detroit. J’étais une petite fille de la campagne qui se rendait dans la grande ville de Detroit, où je me souviens d’avoir traversé la ville, descendu des ruelles obscures, à 3 heures du matin, pour aller à l’hôtel. Oui, je n’étais pas très maligne à l’époque.
    Lorsque je me suis intéressée à tout cela — et en réalité, avant même d’entrer en service —, je savais qu’il y avait des règles et des règlements, des commandements, etc., mais je n’avais pas prévu les abus. Je n’ai jamais anticipé les abus.
    J’avais des cheveux longs et foncés qui ont été coupés, parce que seuls les Autochtones hawaïens pouvaient conserver leurs cheveux longs. Nous, pauvres Ojibwas, avons été tondus comme des moutons. J’ai une photo pour le prouver. On nous piquait avec des seringues, on nous poussait. On nous hurlait dessus d'une façon tout simplement incroyable. Au lieu de donner un ordre, ils... Nous étions couverts de postillons. Et les uniformes empesés... Quand nous étions enfants, nous ne portions pas de vêtements — des chaussures, peut-être, mais les vêtements étaient facultatifs. Ensuite, on entrait dans ces uniformes et ils devaient être comme ceci et comme cela et il fallait que votre lit soit fait sans un pli — il fallait faire l'impossible.
    Tout cela était étrange. Je sais, même si je n’en ai pas fait l’expérience, que c’est à peu près la même chose dans les Forces canadiennes. Il y a des règles et des règlements et des gens qui hurlent. Je crois qu’on les appelle des sergents-chefs. Ils aiment vraiment crier après vous. C’est un monde très étrange pour un Autochtone quand il se lance soudainement dans cette aventure.
    Pendant la formation de base et la formation avancée, on vous apprend ce que sera votre travail. Tout le monde est formé pour tirer et poignarder. Pendant 6, 8, 10 ou 12 semaines, votre être civil vous est retiré et votre être militaire prend vie. Il faut apprendre une nouvelle langue. Il faut apprendre une façon de marcher. Il faut apprendre à se plier aux exigences et aux commandements. On apprend à dormir debout, ce que j’ai fait à maintes reprises. On apprend combien il y a de pommes de terre dans un sac de 45 kilos, ce que j’ai vu à maintes reprises.
    Vous apprenez à suivre les ordres les plus déraisonnables et une épaisse callosité se forme sur votre langue à force de la mordre pour éviter de demander pourquoi ou de dire à un officier à quel point il a tort. Le civil heureux, innocent et insouciant qui s’est enrôlé en rêvant de gloire est remplacé par une attitude militaire de survie, endurcie et sans une lueur de gloire. Vous oubliez qui vous étiez et quels étaient vos rêves, parce que vous avez maintenant subi un lavage de cerveau et que vous êtes devenu un tueur militaire bien entraîné.
    Rappelez-vous, dans ma vie civile, j’étais une femme autochtone qui a été élevée pour donner la vie. Je suis maintenant une tueuse et on attend de moi que je fasse ce devoir sans relâche lorsque l’on me dit d'appuyer sur la gâchette.
    Je dois dire qu’au fil des ans, vous vivez beaucoup de choses merveilleuses, mais il y a aussi des choses vraiment déchirantes que vous devez faire ou dont vous êtes le témoin. Tout n’est pas mauvais. Vous apprenez à accepter les mauvais côtés et à passer à autre chose dans votre vie de militaire. Désormais, vous êtes déconnectée de la femme civile que vous étiez durant les 18 ans qui ont précédé votre entraînement de base. Vous pouvez démonter un fusil et le remonter dans le temps imparti. Je pouvais conduire à peu près n’importe quoi, sauf un char d’assaut — je n’ai jamais compris ces engins.
    Vous apprenez à gérer votre visiteur féminin, entouré d’un groupe d’hommes. Vous n’avez le droit à aucune intimité à ce moment-là, puisque vous êtes un soldat, pas une femme. Vous faites l'objet de blagues et parfois on ne vous donne même pas un endroit privé pour changer de protection. Je suis ici devant vous et je vous dis que c’est encore le cas aujourd’hui pour les soldats des Forces canadiennes. Des femmes qui en sont sorties me l’ont dit à maintes reprises.
    Lorsque vient la démobilisation, il n’y a pas 6, 8, 10 ou 12 semaines pour faire un bilan et retrouver son être civil. C’est une démobilisation: « Au revoir, à plus tard ». On vous remet un billet pour rentrer chez vous, quelques dollars et une poignée de main. Non, rien. « Bonne chance. Au revoir. Appelez si vous avez besoin de nous. »
    Mais vous savez quoi? Vous oubliez de nous donner un numéro de téléphone qui fonctionne. On nous montre la porte et on nous laisse évaluer ce que la vie peut nous offrir et, plus important encore, ce que la vie ne peut pas nous offrir.

  (1110)  

     Bien sûr, vous êtes enthousiaste à l’idée de sortir du chaos et vous pensez que les choses seront les mêmes qu’à votre départ, mais ce n’est pas le cas. Le monde a changé et vous aussi, alors vous éprouvez une sorte de choc et cela prend quelques semaines ou même des années pour s'en remettre.
    Le soutien est difficile à trouver, s’il existe; et si c’est le cas, ce n’est pas culturellement approprié — j’insiste là-dessus — que vous soyez membre d’une Première Nation, Métis ou Inuit, ou même proche de quoi que ce soit de traditionnel. Les membres du groupe qui se tiennent devant vous ou qui sont assis sur une chaise à côté de vous ont fait leur apprentissage dans les livres et, pire encore, leur apparence même cause un traumatisme. Posez-moi des questions à ce sujet tout à l'heure.
    Ceux qui ont servi pendant la Première Guerre mondiale, la Seconde Guerre mondiale, la guerre de Corée et la guerre du Vietnam ont reçu peu ou pas de soutien. Pour les soldats autochtones, il y en avait encore moins et encore moins que cela pour les femmes autochtones. Beaucoup ont essayé de noyer les fureurs de la guerre dans l’alcool; certains ont choisi la drogue et d’autres ont fait de leur mieux pour essayer d’agir de façon normale dans un monde qui ne l’était pas. Les soldats autochtones d’aujourd’hui sont confrontés à bon nombre de ces problèmes parce qu’il n’y a pas de services de soutien approuvés par le gouvernement qui soient culturellement adaptés.
    Vous voyez, dans votre infinie sagesse de gouverner, vous refusez de permettre à quiconque n’a pas un bout de papier d’une de vos institutions reconnues de faire du travail de soutien. Toute personne qui aide les soldats doit respecter vos normes, même si elle ne connaît strictement rien à la spiritualité et aux traditions autochtones, qu’il s’agisse des Premières Nations, des Métis ou des Inuits.
    Comment ai-je fait pour me débarrasser des fureurs de la guerre? À vrai dire, je n’ai pas totalement réussi. Je les ai amadouées. Je leur dis de partir et de me laisser tranquille. Cependant, j’ai obtenu beaucoup de soutien non approuvé de la part de personnes qui connaissaient et respectaient ma culture et mes traditions. J’ai parcouru des centaines de milles pour me rendre à des pow-wow, dans des huttes de sudation et à des cérémonies jusqu’à ce que je me considère de nouveau comme un civil et que je ne plonge plus pour me mettre à l’abri lors des feux d’artifice du 1 juillet ou quand la porte claque. J’ai travaillé dur et j’ai pris ma vie en main, ma vie qui approche maintenant de son crépuscule, mais ne vous leurrez pas: il me reste beaucoup de combativité.
    J’espère que d'avoir vu, brièvement, les choses à travers le regard d’une femme soldat autochtone vous ouvrira les yeux et l'esprit aux besoins uniques, non seulement des soldats autochtones, mais aussi des femmes soldats et des femmes autochtones en particulier.
    C’est là que je vais pleurer. Merci.
    Pour terminer, puisque le gouvernement actuel préconise la réconciliation avec les peuples autochtones, je lui demande de reconnaître officiellement cette année le 8 novembre comme étant la Journée des anciens combattants autochtones.
    Cette année, à Winnipeg, la seule ville au Canada à reconnaître officiellement le 8 novembre comme étant la Journée des anciens combattants autochtones, nous en célébrerons le 25e anniversaire. L’an prochain, le Manitoba, la seule province au Canada à reconnaître le 8 novembre comme étant la Journée des anciens combattants autochtones, en célébrera le 25e anniversaire.
    Il y a deux ans, Anciens Combattants Canada a reconnu le 8 novembre comme étant la Journée des anciens combattants autochtones en publiant cette date sur son site Web. N’est-il pas temps que le gouvernement canadien dans son entier reconnaisse officiellement cette journée?
    Merci.

  (1115)  

    Merci.
    Allez-y, monsieur Black.
    Chers membres du Comité, invités et amis, c’est un grand honneur pour moi d’être ici devant vous pour discuter des anciens combattants métis et de leurs problèmes.
    Les Métis se sont battus pour le Canada une première fois lors de la guerre de 1812, puis à nouveau pendant la Première Guerre mondiale, la Seconde Guerre mondiale, la guerre de Corée, la guerre du Vietnam, en Bosnie, dans le golfe Persique et en Afghanistan.
    J’ai suivi et écouté les réunions de votre comité pour cette étude sur les vétérans autochtones et je vais essayer de ne pas répéter certaines des choses qui ont déjà été dites, alors je vous demande d’être indulgent si je le fais malgré tout.
    En juin, il y a eu toute une série de journées de reconnaissance des forces armées. Le 21 juin est la Journée nationale des Autochtones. Le mois de juin est le mois de la sensibilisation au trouble de stress post-traumatique, le TSPT. La pertinence de mener cette étude ce mois-ci ne vous aura pas échappé. Nous serons heureux de vous faire part de nos sentiments et de répondre à vos questions.
    Je suis le président du conseil des vétérans de la Nation métisse de l'Ontario. J’ai servi dans les Forces armées canadiennes dans les années 1990. J’ai participé à la première guerre du Golfe et j'ai servi à nouveau comme soldat de la paix de l’ONU pendant le conflit en Haïti. Non seulement j’ai prêté le serment de servir mon pays, mais j’ai risqué ma vie deux fois dans ces conflits officiels. Je ne dis pas cela pour être admiré ou remercié, mais pour que vous compreniez que je parle en connaissance de cause.
    Notre conseil des vétérans métis compte six membres. Nous sommes répartis dans toute la province, de Windsor à Trenton, de Toronto jusqu’au nord de Midland. Vous comprendrez qu’il est parfois déjà assez difficile de réunir notre conseil.
    Le conseil des vétérans de la Nation métisse de l'Ontario est confronté à de nombreux défis. L’Ontario est une très grande province, et nos vétérans sont éparpillés un peu partout. Le premier problème évident est la géographie. La technologie est formidable et elle nous permet d'être reliés les uns aux autres, mais il y a des vétérans qui n’en veulent pas et qui vivent dans des régions éloignées.
    En qualité de Métis, nos peuples n’ont pas de réserves où vivre, de sorte qu’il n’y a généralement pas de lieux de rassemblement facilement accessibles pour nos vétérans. Nous avons des bureaux communautaires partout dans la province, mais leurs fonds limités sont destinés à la sensibilisation ou à aider nos vétérans, le cas échéant, dans ces collectivités.
    L’an dernier, notre conseil a organisé des collectes de fonds et nous avons fait venir des vétérans et des jeunes à Ottawa pour le 100e anniversaire de la bataille de la crête de Vimy. Nous avons amené les jeunes pour qu'ils voient de leurs yeux et partagent les expériences des vétérans. Chaque jeune a été chargé de parler aux vétérans tout au long de la fin de semaine et d’écrire un journal de leur expérience. Leurs journaux seront intégrés à notre deuxième livre, qui paraîtra bientôt. J’ai remis à chacun d’entre vous un exemplaire de notre premier livre. Je suis désolé qu’il n’y en ait pas de traduction française.
    L’été dernier, notre conseil des jeunes Métis a demandé à notre conseil des vétérans de participer à des ateliers sur le leadership lors de sa réunion nationale des jeunes. Nous accordons beaucoup d'importance à nos jeunes; nous les considérons comme étant très précieux. Ils mesurent aussi notre importance dans leur parcours.
    L’an dernier, nous avons appris qu’il y aurait une réconciliation pour les anciens combattants métis de la Seconde Guerre mondiale. Je vais vous demander ce qui se passe à ce sujet. Nous avons entendu cette annonce, puis plus rien — silence radio. Nos anciens combattants de la Seconde Guerre mondiale ne rajeunissent pas. Qu’attendons-nous?
    Je sais qu’il y a peut-être eu des discussions avec le ministère des Anciens Combattants et le Ralliement national des Métis, mais rien de tout cela n’a été rapporté au conseil provincial des Métis, aux conseils des vétérans ou aux comités. Cette question nécessite un deuxième engagement et une deuxième discussion avec les conseils et les comités provinciaux des vétérans métis et non avec le conseil national, qui ne connaît pas tous les besoins de nos anciens combattants.
    L’hiver dernier, j’ai assisté à un anniversaire marquant pour l’un de nos anciens combattants de la Seconde Guerre mondiale, ici en Ontario. Il a eu 105 ans, que Dieu le bénisse.
    Je veux vous donner quelques renseignements qui vous aideront à comprendre les problèmes des anciens combattants. Certaines de ces questions ne concernent pas uniquement les Métis, mais elles sont systémiques pour tous les anciens combattants.
    Lorsqu’un citoyen prête serment pour servir notre grand pays, la plupart croient qu’il n’y a pas de date d’expiration pour ce serment. À partir du moment où vous prêtez serment, vous êtes intégré à un ensemble. Au cours de l'entraînement de base, vous devez accomplir de nombreuses tâches en même temps. Vous êtes entraînés à changer de manière de voir les choses et à penser que vous ne pouvez pas tout faire vous-même. Vous devez compter sur vos camarades pour obtenir de meilleurs résultats et de meilleurs succès. Vous faites la file pour les repas ensemble, suivez des cours ensemble, prenez votre douche ensemble, nettoyez les planchers ensemble.

  (1120)  

    Nous n'avons aucune vie privée. Il y a toujours quelqu'un avec nous. Après l'instruction de base, les choses se relâchent un peu, mais l'idée générale reste la même. Nous avons toujours du soutien et du monde avec nous.
    Les soldats qui sortent des forces armées après avoir vécu dans ce contexte pendant des années se sentent très seuls. Ils ne savent pas quoi faire, ils n'ont pas de but dans la vie, et cela leur joue des tours. Je ne suis pas du tout expert du TSPT, de la dépression et de tout autre handicap intellectuel, mais une chose est certaine: si l'un de mes camarades souffre et si je peux lui rendre visite pour l'aider, je m'efforcerais de comprendre ce qui le fait souffrir et je l'aiderais à obtenir le soutien qu'il lui faut. La solitude mène trop souvent à la catastrophe.
    Nous les Métis, quand nous rentrons chez nous, non seulement sommes-nous très seuls, mais on nous isole. Certaines communautés sont prêtes à aider la plupart des vétérans, mais la plupart des vétérans refusent de s'ouvrir à des gens qui ne sont pas vétérans et qui ne pourront pas comprendre ce qu'ils ont vécu, et encore moins en discuter. Les interventions entre vétérans sont les meilleures solutions à ces problèmes.
    On dirait que les vétérans ont honte de demander de l'aide, alors il faut aller les chercher. Ils n'iront pas frapper aux portes pour demander de l'aide. Il n'existe pas un programme magique qui résoudra tous les problèmes de tous les vétérans; voilà pourquoi nous avons un si grand nombre d'excellents programmes.
    Je vais dire une chose qui va vous surprendre: à mon avis, le ministère des Anciens Combattants fait de l'excellent travail. On y fait du très bon travail avec les outils dont on dispose. Le ministère pourrait-il améliorer ce rendement? Il devrait l'améliorer, c'est certain, mais il est bien évident qu'il ne peut pas régler tous les problèmes de tout le monde. Il faut qu'il améliore ses partenariats avec des groupes comme notre conseil des vétérans, la Légion royale canadienne, la clinique DVA, ou Dignified Veteran Assistance, VETS Canada, Aboriginal Veteran Autochtones, AVA. Tous ces groupes travaillent en première ligne pour aider les vétérans. Ils font ce que le ministère ne peut pas faire. Ils ne reçoivent pas de soutien et aucun financement, ou très peu.
    Comme je l'ai dit tout à l'heure, le serment que nous avons pris ne s'accompagne pas d'une date d'échéance. Nous servons aussi longtemps que nous en sommes capables. Nos hommes et nos femmes — oui, n'oubliez pas le soutien et la contribution que nos combattantes ont apportés à ce service — s'engagent sans réserve à servir leur pays. Cependant, quand nous quittons les forces armées pour nous battre contre nos démons intérieurs et extérieurs, on nous dit que nous en demandons trop. En jargon militaire, c'est « insat ».
    Nous reconnaissons que le ministère des Anciens Combattants ne reste pas inactif; il a apporté des changements et il s'efforce d'améliorer la situation, mais il lui reste beaucoup à faire. Il doit améliorer la communication. La technologie et les médias sociaux sont bien beaux, mais rien ne vaut la communication face à face, le contact entre camarades. C'est ainsi que nous résoudrons les problèmes.
    Il y a quelques semaines, M. Scott Sheffield et M. Lafontaine ont témoigné devant vous. J'ai été estomaqué ce jour-là quand M. Lafontaine a dit qu'il est considéré comme étant entièrement métis dans tous les aspects de sa vie, sauf au ministère des Anciens Combattants. Cela ne devrait plus se produire.
    En conclusion, je tiens à préciser que je ne suis pas un historien métis ou un universitaire métis. Je suis un Métis. Je suis un vétéran de la guerre du Golfe. Je suis un vétéran des Forces canadiennes de maintien de la paix. Je travaille pour mes frères et soeurs métis et je m'efforce de prendre soin d'eux.
    Meegwetch.

  (1125)  

    Nous allons entamer des rondes de cinq minutes. Madame Wagantall, vous avez la parole.
    Merci, monsieur le président.
    Merci beaucoup d'être venus et de nous parler avec une telle franchise.
    Notre comité a récemment fait une tournée au Canada pour écouter particulièrement les Autochtones, les membres des Premières Nations et les Métis, mais pas encore les Inuits. Ils font face à des difficultés très spéciales qu'il faut aborder.
    Cela dit, une grande partie de ces difficultés, comme vous l'avez mentionné, monsieur Black, viennent du fait que ces gens sont membres des forces armées. D'autres découlent du manque de soins que reçoit la communauté métisse. Nous avons visité la ville métisse de Beauval, en Saskatchewan. Les gens nous ont présenté de nombreux commentaires positifs similaires aux vôtres.
    Toutefois, au sujet de la Journée des anciens combattants autochtones, le 8 novembre, nous avons entendu des commentaires différents. Les gens sont heureux de célébrer cette journée, mais ils voudraient qu'elle revête autant d'importance que le 11 novembre. Pourriez-vous nous dire ce que vous en pensez, madame Gage ou monsieur Black?
    Comme j'ai moi-même fondé cette journée, oui, bien sûr, je peux vous donner des détails.
    Si vous aviez consulté les documents aux archives, vous le sauriez. En 1992, nous étions rassemblés sur la Colline pour fonder l'Association nationale des anciens combattants autochtones — la bonne, pas l'association actuelle. Les vétérans présents, qui venaient de tout le Canada, ont dit qu'ils voudraient consacrer une journée pour parler de leur histoire dans leurs communautés. Je peux vous assurer que nous, les vétérans, tenons à passer le 11 novembre avec nos camarades. Que nous soyons à Winnipeg ou ici au cénotaphe, nous tenons à passer cette journée avec tous nos camarades.
    Nous en avons discuté, et certains ont mentionné le 21 juin. Mais les autres ont souligné que cette date marque la Journée nationale des peuples autochtones. Ils voulaient leur propre journée.
    Nous avons examiné toutes sortes de facteurs. Nous avons pensé au 8 novembre à cause du chiffre 8. Les gens disaient que ce serait une bonne occasion de sortir leur uniforme des boules à mites pour le faire nettoyer, de polir tout ce qui doit être poli et de se remettre à marcher dans la bonne direction pour souligner des souvenirs importants. Cette journée leur donnerait l'occasion de passer du temps précieux dans leur communauté, d'y remémorer des faits historiques, de parler à leurs enfants et à leurs petits-enfants de ce qu'ils ont vécu. Ils se sont dit qu'ils auraient ainsi le temps de bien se préparer pour les célébrations du 11 novembre.
    Voilà comment nous avons fondé cette journée. Tout le monde le sait maintenant. Les gens ne comprennent pas cela parce qu'ils ne nous demandent pas de leur donner les raisons. Les gens de la Légion étaient tout à l'envers jusqu'à ce que j'aille en personne leur expliquer les raisons. Nous n'enlevons rien aux célébrations du 11 novembre.

  (1130)  

    Excusez-moi, madame Gage, je crois que nous nous engageons dans une voie à laquelle je ne pensais pas. Il ne s'agit pas d'une compétition, et nous comprenons parfaitement la valeur de cette journée. Nous entendions ces propos dans la communauté métisse.
    Oui, je comprends. C'est justement ce que je disais.
    Mme Cathay Wagantall: Parfait.
    Mme Randi Gage: En instaurant cette journée, nous n'avions aucunement l'intention d'enlever quelque chose. Nous tenions à souligner le fait que nos communautés oubliaient qui sont les vétérans autochtones. Elles perdent leurs vétérans. Les anciens combattants meurent. Ils ne sont plus avec nous.
    J'ai remarqué dans votre invitation que vous ne mentionniez pas la Première Guerre mondiale; ce n'est pas bien. Posez-moi des questions à ce sujet.
    Nous visions à maintenir ces connaissances dans les communautés et en parler.
    Merveilleux. Merci.
    Mme Randi Gage: Avez-vous d'autres choses à me demander?
    Non, je crois que vous avez décrit cela à la perfection.
    Nous voulions une journée pour reconnaître nos contributions particulières. Nous voulions aussi la distinguer des cérémonies du 11 novembre, que nous tenons à passer avec nos camarades. Nous avons des expériences extraordinaires à raconter de la Première et de la Deuxième Guerre mondiales. Les Autochtones se sont enrôlés, et d'un seul coup, ils avaient un bon emploi et trois repas par jour. On les traitait comme tous les autres soldats; ils apportaient leur contribution, et tout le monde collaborait, sans faire de distinctions. Les distinctions ont apparu quand ils sont rentrés au pays. Voilà pourquoi nous tenons à célébrer les deux journées.
    Je comprends tout à fait. Les représentants d'associations de tout le pays nous ont dit qu'il est important de célébrer dans les communautés, puis de participer aussi aux célébrations du jour du Souvenir. Je tenais à ce que cela figure au compte rendu de la séance d'aujourd'hui.
    J'ai quelque chose pour vous ici.
    Mme Cathay Wagantall: Merveilleux.
    Nous y reviendrons plus tard. Merci.
    Monsieur Fraser, vous avez cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je vous remercie tous d'être venus aujourd'hui. Vos allocutions m'ont beaucoup intéressé.
    Ma première question s'adressera à vous, madame Gage. Vous avez parlé de services de soutien non approuvés qui vous ont aidée à vous réadapter à la vie civile. Vous avez parlé de pow-wow et de sueries. Dans le cadre de cette étude, nous avons déjà entendu parler de certains services offerts aux anciens combattants autochtones et de leur grande utilité.
    D'abord, voudriez-vous préciser ce que vous voulez dire par « non approuvés »? Ensuite, selon vous, que pourrions-nous faire pour contribuer au développement de ces partenariats?
    C'est toute une question que vous me posez là.
    Cela vient de ce que j'ai constaté en travaillant auprès des vétérans qui ont le TSPT et le traumatisme indirect; nous avons là aussi tout un problème qu'il faudra vraiment aborder. Ces vétérans ne peuvent pas aller voir un aîné autochtone pour demander du soutien parce qu'ils n'ont pas l'argent pour payer le déplacement. Je vais vous donner un exemple.
    Il s'agit d'un mari et de sa femme qui ont tous deux fait plusieurs tours en Afghanistan et qui ont maintenant quitté les Forces armées canadiennes. Ils souffrent tous deux du TSPT. Ils se sont tous deux présentés à la 17e Escadre parce qu’à Winnipeg, c’est là que les anciens combattants doivent aller pour se faire examiner ou pour obtenir d'autres services.
    On leur a dit d'aller consulter des personnes « approuvées ». Ils sont allés au centre Deer Lodge pour participer à un cercle de partage ou de soutien, je ne sais pas comment ils appellent ces services. Quand ils sont arrivés, tout d’abord, ils ont été accueillis par... excusez-moi, je ne suis raciste envers personne, mais l'homme qui les a accueillis portait un turban. C’était traumatisant, parce qu’en Afghanistan, qui était dans leur mire, quels genres d'hommes portaient un turban? Ensuite, quand ils se sont joints au cercle pour prendre part à la discussion, on a demandé à l'épouse de partir parce que ce cercle s'adressait aux hommes souffrant de TSPT. On n'a pas parlé de soldats atteints de TSPT, mais d’hommes. Elle a dû attendre dans le hall d'entrée pendant que son mari, avec qui elle avait servi côte à côte, participait à la discussion de ce cercle. Les hommes ne voulaient pas qu’elle entende ce qu’ils avaient vécu.
    Vraiment? Un mois auparavant, elle tirait du même fusil que ses camarades hommes. C'est terrible que les femmes ne soient pas admises à ces cercles de soutien. Lorsqu'on leur permet d'y prendre part, les autres participants hésitent à s'exprimer devant elles.
    Elle voulait aller voir... eh bien oui, moi. Mes cheveux blonds vous trompent peut-être, mais je suis vieille, j'ai 70 ans, alors j'ai accumulé pas mal d'expérience. Je comprends bien des choses. Je respecte et je connais bien nos traditions et notre culture. Elle voulait venir me consulter, mais elle habite à deux heures d'auto de chez moi. Elle ne demandait qu'un peu d'argent pour payer l'essence de ces déplacements. On lui a répondu que comme je n'étais pas une personne approuvée, autorisée, comme je n'ai pas de morceau de papier de l'Université de Guelph ou autre, elle ne pouvait pas me consulter.
    Il faut que cela cesse.

  (1135)  

    Merci beaucoup pour cette réponse.
    Monsieur Black, pendant le temps qu'il me reste, je voudrais discuter de ce que vous venez de mentionner, la nécessité d'établir de meilleurs partenariats. Vous parliez de partenariats avec Anciens Combattants et éventuellement avec votre conseil des vétérans et avec la Légion. Vous avez aussi mentionné deux ou trois autres organismes, je crois. Ces organismes sont très importants, parce qu'ils nous servent de ressources sur le terrain et ils atteignent beaucoup plus de vétérans que tous les ministères seraient en mesure de le faire.
    Pourriez-vous nous décrire un peu comment nous pourrions améliorer ces partenariats et ce que vous nous recommanderiez de faire pour que ces services puissent se maintenir, éventuellement avec un soutien gouvernemental?
    Comme vous l'avez dit, ces organismes sont en première ligne. Par exemple, la semaine dernière, VETS Canada a envoyé des gens pour chercher des vétérans parmi les sans-abri ici à Ottawa, mais je n'en ai eu vent que vendredi dernier. Anciens Combattants pourrait peut-être afficher à son site Web une page d'annonces des événements, si je peux l'appeler ainsi...
    À propos de cette recherche, qui vous a appris qu'elle avait eu lieu?
    Je l'ai vu dans Facebook.
    Je comprends.
    Nous pourrions ainsi avertir les gens pour qu'ils puissent peut-être venir aider.
    La même chose se produit dans le cas des activités d'Anciens Combattants. Nous n'apprenons qu'elles ont eu lieu que le lendemain, ou alors des gens vous disent qu'ils y ont participé et que c'était fantastique. On ne nous avise pas que ces activités vont avoir lieu. Cette absence de communication, de préavis, est la plus grave défaillance que je constate.
    Merci.
    Monsieur Johns, à vous la parole.
    Merci pour vos témoignages et merci d'être venus. Surtout, merci pour les services que vous rendez.
    Pourriez-vous continuer à parler des partenariats, monsieur Black? Quels types de services pensez-vous pouvoir offrir aux vétérans, si Anciens Combattants vous fournissait les ressources nécessaires?
     Avec les conseils personnels que nous donnons et ce que nous faisons, nous n’avons pas l’infrastructure nécessaire pour offrir les services que fournissent certaines de ces associations, alors nous collaborons avec elles. Quand elles organisent quelque chose, nous leur offrons des ressources pour les soutenir et les aider. Si nous avions su d’avance que VETS Canada allait effectuer une recherche auprès des sans-abri dans les rues d’Ottawa, nous aurions communiqué avec tous nos anciens combattants locaux pour leur demander d'aller aider.
    Tout repose sur la communication. C'est l'un des plus graves problèmes, et nous nous y heurtons dans tout le système. Il faut absolument établir de meilleures voies de communication. Le ministère utilise les médias sociaux beaucoup mieux qu'avant, il communique un peu mieux, mais son approche a encore besoin d'amélioration.
    Nous nous sommes efforcés d'améliorer l'approche d'Anciens Combattants dans le cadre des commémorations qu'il organise. Au bout de plusieurs années, nous commençons enfin à recevoir des annonces, mais il demeure extrêmement difficile de trouver cette information. Le ministère la diffuse librement et désire nous la remettre, mais nous ne savons pas à qui nous adresser pour l'obtenir.
    À ce propos justement, vous avez dit que la communication en personne et entre vétérans est la plus efficace.

  (1140)  

    Oui, absolument.
    Les États-Unis exigent qu'au moins 30 % de leurs travailleurs sociaux soient des vétérans, si je ne m'abuse. Je ne pense pas que le Canada insiste pour que les vétérans soient suivis par des travailleurs sociaux vétérans. S'agit-il d'une des améliorations que vous désirez, l'augmentation du pourcentage de vétérans autochtones, de Premières Nations, métis et inuits qui servent parmi les travailleurs sociaux d'Anciens Combattants?
    Madame Gage, je crois que vous avez mentionné la nécessité de respecter la culture en fournissant ce soutien, pour que les vétérans soient bien compris. Voudriez-vous que le ministère rehausse ce pourcentage?
    Absolument. Comme je le disais, les vétérans semblent avoir peur de demander de l'aide. Quand je parle à l'un de mes camarades, je vois dans son visage qu'il ne va pas bien. J'essaie d'orienter la conversation pour qu'il me dise ce qui ne va pas. Suivant de qui il s'agit, je peux lui dire d'aller parler à quelqu'un, et il me répond qu'il ira peut-être, ou peut-être pas. Mais il a absolument besoin de parler à quelqu'un. Nous savons aborder ce niveau de sensibilité pour prendre soin de nos vétérans. Nous pouvons les soutenir tout au long de leur cheminement. S'ils veulent que je les accompagne, j'irai avec eux.
    À ce niveau-là, il faut trouver les gens qui ont besoin d'aide, parce qu'ils ne sont pas évidents. Personnellement, je vous dirai que j'allais m'asseoir au fond de la salle d'une assemblée communautaire organisée par Anciens Combattants et que j'écoutais les gens parler. À la fin de la réunion, je trouvais que rien n'avait changé et que le ministère n'offrait rien pour m'aider. Alors je m'en allais, c'est tout.
    Exactement.
    Les vétérans se découragent si personne ne va leur parler pour leur tirer les vers du nez.
    Madame Gage, vous pourriez peut-être nous dire aussi ce que vous en pensez. Vous avez parlé de personnes qui ne sont pas agréées ou accréditées. Mais en réalité, ces personnes le sont, parce qu'elles comprennent la culture et la respectent. Vous pourriez peut-être nous suggérer ce que le ministère pourrait faire pour établir ces ressources.
    C'est comme le petit exemple au sujet d'une femme qui a ses règles. Dans la société en général, ce n'est rien. Vous savez que cela arrive, d'accord, alors vous allez acheter... Mais dans notre culture, cela a une tout autre signification, et le fait de pouvoir en parler avec une ancienne combattante qui peut dire: « Oui, d'accord; maintenant, voici ce que nous allons faire... »
    Il est important de disposer d'outils qui sont culturellement appropriés, d'avoir une connaissance de la tradition que l'on ne trouve pas dans les livres et de pouvoir compter sur une ou plusieurs personnes qui peuvent parler à l'ancien combattant, femme ou homme, qui comprennent les petites nuances ou les... particularités, je suppose. Il faut comprendre que vous avez affaire à une femme autochtone qui allait se marier, avoir des enfants, être une grand-mère, et tout le reste, à qui vous donnez une arme pour qu'elle tue, même cette personne a été entraînée à tirer avec une arme à feu dès l'âge de trois ou quatre ans, mais c'était pour survivre, pour manger, pas pour prendre la vie de l'enfant d'une autre femme. Il faut comprendre que lorsque cette personne confie ses états d'âme à un — excusez-moi — psychologue ou psychiatre formé dans les livres de façon classique, cette personne semble narcissique.
     Merci.
    C'est au tour de Mme Lambropoulos.
    Je vous remercie d'être parmi nous pour partager vos expériences et nous aider à améliorer les choses.
    Monsieur Black, vous avez dit qu'un témoin précédent — je crois que c'était un témoin précédent, parce que je l'ai déjà entendu aussi — avait mentionné qu'il se considérait comme un Métis partout, sauf auprès d'Anciens Combattants Canada. Je me demandais si vous pouviez nous expliquer cela davantage. Quelle est la différence? Pourquoi le fait d'être un Métis serait-il un désavantage pour lui?
    Je ne suis pas certain. Il n'a pas vraiment donné de détails à ce sujet. Ce que j'ai retenu de son témoignage, c'est qu'en raison de son service, il ne prenait pas soin de lui-même. Il voulait s'occuper des autres. Ce n'était qu'une affirmation de sa part. Je n'ai pas entendu s'il a donné des détails, mais il a dit qu'il avait des problèmes avec Anciens Combattants Canada, qui ont cessé lorsqu'il a dit ou laissé entendre qu'il n'était pas un Métis.
    Connaissez-vous d'autres personnes qui ont connu des problèmes semblables?
    Pas ces dernières années, non.
    Vous avez également mentionné que les anciens combattants en général ne se sentent pas à l'aise de s'ouvrir aux autres lorsqu'ils n'ont pas nécessairement vécu les mêmes expériences, par exemple, s'ils n'ont jamais tué personne ou s'ils n'ont pas fait ce qu'il fallait lorsqu'ils étaient en service.
    Selon vous, que peut faire le gouvernement du Canada pour améliorer cette approche entre anciens combattants?

  (1145)  

     M. Johns a parlé de la participation d'un plus grand nombre d'anciens combattants en tant qu'intervenants sur le terrain, de les amener à identifier... Les anciens combattants ne vont pas s'asseoir en rond dans une salle et exprimer leurs sentiments. Il n'y a pas un programme unique qui convient à tous les anciens combattants, et c'est pourquoi il y a autant de ces groupes. Il est certain que l'approche de pair à pair, d'ancien combattant à ancien combattant, donnerait de meilleurs résultats. La façon de procéder ne relève pas de ma compétence.
    Madame Gage, vous êtes la première ancienne combattante autochtone que nous rencontrons. Je peux me tromper, mais je pense que oui. Vous êtes la première à vraiment vous exprimer...
    C'est dommage pour vous.
    Nous avons entendu beaucoup d'hommes, et ils nous ont dit que lorsqu'ils étaient en service, ils avaient un fort sentiment d'inclusion. Ils avaient l'impression que les choses allaient bien pour eux lorsqu'ils étaient dans l'armée. Vous parlez d'une expérience très différente, et je me demande si c'est parce que vous êtes une femme et parce que la culture des forces armées doit changer pour que les femmes aient le sentiment d'être à leur place. En tant que femme autochtone également, vous avez une expérience complètement différente, et compte tenu de l'éducation que vous avez reçue, le choc culturel a peut-être été encore plus grand pour vous.
    Selon vous, que pouvons-nous faire pour améliorer la situation des femmes en général et tenir davantage compte des différences culturelles? Je sais que nous nous sommes améliorés à cet égard, et que l'on fait maintenant appel à des aînés à l'occasion pour aider à former les gens qui travaillent dans les forces armées. Que pourrions-nous faire d'autre, selon vous?
    Un million de choses. La première chose, selon moi, c'est de mettre en garde tous les responsables, à tous les niveaux de la hiérarchie au ministère des Anciens Combattants, pour qu'ils fassent attention à qui ils choisissent comme aînés. Il faut qu'ils soient vraiment reconnus par leur peuple comme des aînés, et non pas par n'importe qui. C'est très important, parce qu'il y a beaucoup de gens qui s'improvisent aînés. Donnez-leur de l'argent et ils seront là. Ce n'est qu'une mise en garde.
    Quand j'étais dans l'armée, c'était un peu différent d'aujourd'hui, parce qu'il y avait deux services distincts. Il y avait l'armée régulière et le service féminin. Cela n'existe plus. C'est un tout. Pour ce qui est de la camaraderie, quand on est un soldat en uniforme, on est à peu près accepté jusqu'à ce que certains petits aspects de la vie fassent en sorte que les femmes soient traitées un peu différemment. Si un officier veut faire taper quelque chose, il ne va pas demander à Doug de le faire. Il va s'adresser à Randi et lui demander de le faire. Bien sûr, je suis une secrétaire, et il a peut-être un diplôme en affaires. Comment dois-je répondre?
    Il faut bien comprendre que, lorsqu'on est un soldat, on est un soldat. L'un des problèmes d'un soldat, c'est justement le fait d'être un soldat. Vous êtes un camarade. Vous êtes pareil. C'est au moment du déploiement que les vraies différences ressortent, parce qu'une petite chose simple... Il faut s'occuper du déploiement et s'assurer que des choses sont en place pour les femmes soldats déployées, par exemple, un peu d'intimité au moment d'aller aux toilettes, un seau et une couverture.
     Monsieur Eyolfson, vous avez quatre minutes.
    Merci. Je partage mon temps avec Mme Romanado, alors je vous laisse commencer.
    D'accord, merci. Meegwetch, meegwetch. C'est un réel plaisir de vous rencontrer toutes les deux.
    Je voulais parler un peu de l'unité familiale. Vous avez toutes les deux servi dans l'armée américaine et dans les Forces armées canadiennes.
    Avez-vous servi également?
    Meegwetch. Je suis désolée que nous n'ayons pas eu l'occasion de vous entendre.
    Je tiens à vous remercier des services que vous avez rendus à nos deux pays, bien sûr, en tant que Canadiennes qui ont servi aux États-Unis.
    Je voulais parler un peu de la façon dont nous pourrions aider les familles des anciens combattants autochtones. Je pense que c'est vraiment important, parce que j'ai des militaires dans ma famille. J'ai deux fils qui sont dans les Forces armées canadiennes, alors c'est un élément dont j'aimerais vous entendre parler, parce que nous avons entendu dire que nous devons faire participer les familles, surtout au moment de la transition de la vie en groupe à une vie très solitaire. Comme vous l'avez dit, une fois que vous sortez, vous êtes laissé à vous-même.
    Que pourrions-nous faire pour aider et quels sont les besoins particuliers des familles autochtones lorsqu'il s'agit d'aider leurs anciens combattants?

  (1150)  

    Je vous remercie de m'accueillir ici aujourd'hui. Il m'a fallu un certain temps pour être reconnue comme une ancienne combattante malgré ma présence dans cette salle avec vous. J'ai fait l'expérience de cela depuis que j'ai quitté l'armée après 10 ans de service. Je faisais partie des forces chargées du maintien de la paix. Je fais face au même problème encore aujourd'hui. J'ai déjà été présentée comme une ancienne combattante métisse, pour me faire dire que cela ne faisait pas de différence.
    À notre époque, cela doit cesser. Je suis fière d'être mère. Mon fils a 26 ans et il est né le jour décrété Journée internationale de la paix par les Nations unies. Mon mari faisait aussi partie des forces chargées du maintien de la paix lorsque nous étions en mission. J'étais à la frontière israélo-syrienne, sur le plateau du Golan, pendant la guerre du Golfe, ce qui a pris une tout autre signification. J'ai des histoires que je pourrais raconter, mais je vais être brève.
    Je suis une mère. Ma carrière militaire de 10 ans a été fantastique. J'ai choisi d'être mère et j'ai choisi de sortir de l'armée à ce moment-là, sans savoir ce qui allait m'arriver après coup. Un jour, vous êtes au travail, vous avez vos bottes, vous êtes au mess, vous prenez une bière, vous faites partie du groupe, vous vous racontez des histoires et vous avez du plaisir. Le lendemain, vous êtes chez vous avec un jeune bébé, en pantoufles, sans famille, sans personne à qui parler. Je ne savais pas quoi faire de moi-même, parce que j'avais l'habitude d'aller travailler. Je ne savais pas comment être la mère de mon premier enfant, et je ne disposais d'aucun soutien. Je n'étais plus une militaire. J'étais maintenant une civile et je ne savais plus quoi faire de ma vie.
    Pour ce qui est de mes origines métisses et en tant qu'ancienne combattante métisse, je n'ai appris que j'étais une Métisse qu'il y a une vingtaine d'années. Je suis la plus jeune d'une famille de neuf enfants, et nous vivions dans le nord de l'Ontario. On nous a caché nos origines. Nous avions des coutumes métisses. Je m'en rends compte maintenant. Je pouvais piéger des lièvres et aller vérifier mes pièges après l'école avec un fusil à plombs. Je suis allé à la chasse à l'orignal avec mes frères. Je récolte encore aujourd'hui. Je vais dans la région de North Bay — je ne dis pas où — et je fais la récolte, avec de bons résultats chaque année. Je campe et j'aime notre vie traditionnelle, même si je ne l'ai pas apprise étant jeune. Maintenant que mon fils a 26 ans, j'essaie de lui enseigner nos façons de faire traditionnelles, tout comme à mes nièces et à mes neveux.
    Dans notre collectivité, qui n'est pas une Première Nation à part entière, je ne vais pas dans une hutte de sudation. Je ne demande pas aux aînés de m'aider dans mon cheminement. À ma connaissance, je n'ai pas de trouble de stress post-traumatique, mais j'essaie de rester en contact avec les anciens combattants métis, que ce soit par téléphone ou en organisant des événements dans ma région à leur intention. J'ai participé à des défilés, du jour du Souvenir, habillée en militaire, avec mes médailles, et on m'a demandé si j'étais une ancienne combattante, une ancienne combattante métisse, mais aussi pourquoi je portais mon foulard autour de la taille.
    Je pense que tout ce que nous voulons, c'est être reconnu. Certains des symboles sont faciles à reconnaître, comme un béret bleu parmi tout le monde le jour du Souvenir. Nous sommes fiers de porter le béret.
    Il y a des anciens combattants qui refusent de porter leurs médailles, qui en sont incapables. À cause de leur trouble de stress post-traumatique, peu importe où ils ont servi, ils ne veulent pas être reconnus comme anciens combattants. Lorsque nous allons dans les collectivités ou dans les établissements civils, comme je les appelle, et que nous essayons d'expliquer cela aux gens, ils ne comprennent tout simplement pas.
    Merci.
    C'est au tour de M. Kitchen.
    Merci, monsieur le président.
    Merci à tous de votre présence ici et merci pour les services que vous avez rendus.
    Je pourrais continuer à en parler pendant des heures, mais nous manquons de temps.
    Madame Gage, en réponse à cette question, pourriez-vous nous parler aussi un peu de vos antécédents, et très rapidement également? Au cours de nos voyages des dernières semaines, nous avons rencontré beaucoup d'anciens combattants qui ont servi aux États-Unis. D'après ce que vous nous avez dit jusqu'à maintenant, je crois comprendre que vous êtes née au Michigan, et je vois le lien, mais il y a beaucoup plus de gens d'ici, au Canada, qui sont allés aux États-Unis, et je me demande si c'était la même chose pour les Métis.

  (1155)  

     Dans les territoires métis traditionnels, il y a le territoire numéro trois dans le Nord, qui va jusqu'aux environs de Winnipeg et de la rivière Rouge, et s'étend certainement jusqu'aux États-Unis, alors je suis sûr que cela s'est produit, mais je n'ai pas les détails en tête. Je sais que cela est arrivé, mais je ne peux pas vous dire dans quelle mesure.
    Je sais que certains ont dit qu'ils voulaient se joindre aux Marines, et que c'était la seule raison. Une question d'équipement, notamment. Êtes-vous d'accord avec cela?
    Ai-je le droit de dire ce que vous me demandez de dire sans...
    Bien sûr. Oui.
    Personne ne va appeler la sécurité, n'est-ce pas?
    Quand vous entrez dans l'armée américaine, vous devenez un soldat. Vous devenez un soldat qui prend une arme et tire sur des gens. Vous êtes déployé là-bas et vous foncez. Rappelez-vous que le mouvement allait dans les deux sens à ce moment-là. Il y avait des gens aux États-Unis qui faisaient tout pour venir ici, et des gens d'ici qui faisaient tout pour aller là-bas.
    Ici, nous avons vraiment une mentalité de maintien de la paix, une approche plus conciliante. Là-bas, c'est « Ôtez-vous de mon chemin. Je passe. » Je pense que beaucoup d'entre eux sont allés pour se battre — ceux que je connaissais, parce qu'il y en avait pas mal là où je travaillais —, pour qui c'était l'unique raison. Ils sont allés là-bas dans ce but précis.
    Merci.
    Nous avons déjà fait des études sur la transition. L'une des choses dont nous avons parlé à ce sujet, c'est que nous dépensons des centaines de millions de dollars pour former des soldats. Ils font leur service, et une fois qu'ils ont terminé, comme vous l'avez dit, on leur montre la porte assez rapidement.
    Et on leur donne le mauvais numéro de téléphone...
    C'est exact. Nous ne prenons pas le temps de les déprogrammer pour qu'ils redeviennent des civils.
    Nous en avons parlé un peu au sujet de nos forces en général, mais diriez-vous qu'il y a une différence? Si quelqu'un devait mettre sur pied un programme pour que les soldats redeviennent des civils, y aurait-il une différence d'approche avec les Métis, avec les anciens combattants autochtones, ou devrait-il s'agir du même type de programme?
    Comme je suis une civile, cette question est complexe. Redevenir un civil...?
    Je pense que votre question est un peu tendancieuse. Je vais revenir aux anciens combattants de la Deuxième Guerre mondiale, lorsqu'ils ont quitté le service. Ils n'auraient pas dû être traités différemment des autres anciens combattants. Vous demandez la même chose, et je dirais que non.
    Les centres de ressources pour les familles des militaires lancent un excellent programme de transition, et personne ne devrait en être exclu.
    Je suis d'accord.
    Ce devrait être la même chose, mais seriez-vous d'accord pour dire que c'est ce que nous devrions faire?
    Oui.
    Certainement. La culture devrait être reconnue, mais il ne devrait pas y avoir de différence pour les anciens combattants qui entrent ou qui sortent, peu importe de qui il s'agit.
    D'accord.
    Parce que ce n'est pas différent quand on entre.
    Je sais, et je vois que c'est ce que vous faites. Voyez-vous, c'est l'un des problèmes lorsque vous faites venir des Autochtones pour vous donner l'information dont vous avez besoin, c'est « sst, sst ».
    C'est moi qu'il regardait, cependant.
    Oui, eh bien...
    Quoi qu'il en soit, vous devez garder cela à l'esprit. Je suis ici jusqu'à 16 heures si quelqu'un veut poursuivre cette discussion.
    Pour ce qui est de mes antécédents, je suis une technicienne en génie biomédical qui en avait assez des machines, des hôpitaux et des médecins. Je suis une spécialiste certifiée en soins palliatifs, et plus précisément en rétablissement des personnes endeuillées.
    Merci beaucoup.
    Merci.
    Malheureusement, c'est tout le temps que nous avions. Nous allons devoir suspendre la séance.
    J'aimerais remercier les témoins d'aujourd'hui pour tout ce qu'ils font pour les hommes et les femmes qui ont servi et qui continuent de servir. Si vous voulez ajouter quelque chose, vous pouvez le faire par courriel à la greffière. Je sais, Randi, que vous nous avez fait parvenir un excellent résumé, et il sera inclus dans nos documents.
    Nous allons suspendre la séance et accueillir notre prochain groupe de témoins. Merci.

  (1155)  


  (1205)  

     La séance reprend.
    Dans ce deuxième groupe, nous accueillons Victor Sanderson, un ancien combattant de l'Afghanistan. Il se joint à nous par vidéoconférence depuis Saskatoon.
    Nous accueillons Lissa Smith, ministre des Anciens et vice-présidente, ainsi que Tanya Davoren, directrice de la santé et du sport et directrice des vétérans de la Métis Nation British Columbia.
    Monsieur Sanderson, vous avez 10 minutes.
    Merci.
    Merci, monsieur le président.
    Je veux tout d’abord remercier les grands-pères et le Créateur de m’avoir permis d’être ici aujourd’hui et d’avoir fait un voyage sans embûches.
    Depuis la Guerre des Boers jusqu’à la Deuxième Guerre mondiale, nos anciens combattants, vos frères d’armes, ont été vraiment laissés-pour-compte par le gouvernement et, à leur tour, ont laissé-pour-compte beaucoup de nos gens.
    Pendant tout le temps que nous avons passé avec vous et avant, nous avions une société guerrière. La société guerrière, de bien des façons, protégeait notre peuple, et on l’oublie. Des excuses solennelles de la part du Canada nous suffiraient amplement à progresser en tant que peuple. En oubliant notre société guerrière, nous nous oublions, avec le résultat que nous ne savons pas comment marcher au combat. C’est pourtant quelque chose qu’il faut pour que les soldats acceptent de se battre.
    Nous nous sommes tournés vers nos grands-pères pour nous orienter et trouver des passages sûrs dans ces pays déchirés par la guerre où nous sommes allés. À notre retour, nous avons eu de la difficulté à progresser, parce qu’on nous a relégués dans les réserves. Nous avons eu de la difficulté avec les agents des Affaires indiennes, qui n’étaient pas en rapport direct avec Anciens Combattants Canada. C’était un cercle vicieux avec eux, les agents des Affaires indiennes et ACC. Ils se renvoyaient sans cesse la balle, et nos gens ne bougeaient pas.
    Nos anciens combattants de la Deuxième Guerre mondiale ont constitué un groupe de revendication, devenu la Saskatchewan First Nation Veteran Association, dont je suis maintenant membre. Il m’a fallu beaucoup de temps pour m’y décider en raison de tous les sentiments qui m’habitaient après avoir quitté l’armée. Je me sentais laissé-pour-compte et rabaissé. Je me suis senti humilié d’avoir porté l’uniforme à cause des réactions négatives de mon peuple. Mon peuple se disait qu’en servant dans les forces canadiennes, je l’avais trahi.
    En réalité, je sentais en moi un appel plus élevé que d’être un guerrier et un soldat pour le pays. Peu importe que ce soit les États-Unis ou le Canada. C’est à cause du traité Jay que nous avons servi dans les forces armées de ces deux pays qui occupent l’île de la Tortue. C’est ainsi que nous appelons notre terre. Nous avons toujours dit que c’était l’île de la Tortue. Ce n’est ni le Canada ni les États-Unis.
    Si vous allez dans une réserve et tentez d’obtenir de l’aide des services de santé, vous ne trouverez rien. Les services de santé sont très restreints, et il n’y a pas d’aide particulière pour les anciens combattants. On nous dit alors de nous adresser à Anciens Combattants Canada, qui nous renvoie à Santé Canada. C’est toujours le cercle vicieux dans lequel nous nous retrouvons quotidiennement. Lorsque nous essayons de mettre sur pied des programmes d’éducation, nous apprenons que rien n’existe en matière d’éducation pour les anciens combattants, et nous sommes renvoyés chez vous. Nous nous battons avec nos chefs traditionnels, mais ils savent bien que, pour l’éducation, nous recevons moins de 3 % du total des fonds dans l’ensemble du pays. À cet égard, le Canada doit se retrousser les manches et nous donner plus de fonds pour l’éducation.
    L’association des anciens combattants n’offre rien qui puisse améliorer la qualité de vie. Dans les réserves, nous n’obtenons aucune aide de nos propres gens, pas plus que de Santé Canada. Individuellement, nous éprouvons des souffrances et sommes victimes de douleurs chroniques graves. C’est un problème que j’ai également, de même que le trouble de stress post-traumatique. Quand les deux surviennent en même temps, je me retrouve dans un cercle particulièrement vicieux. Moi-même, dans mon corps, et ma famille le payons très cher, et bien souvent, je disparais dans mon esprit, mais avec l’amour de ma femme... Elle comprend. Elle s’est instruite elle-même, sans l’aide du ministère des Anciens Combattants ou de quelque autre organisme de soutien aux familles. Le ministère des Anciens Combattants n’offre rien de tel en Saskatchewan.
    Nous savons qu’un bureau vient d’ouvrir, qui fera probablement beaucoup pour nous aider, mais il reste encore beaucoup à faire.

  (1210)  

    Il y a une très grande pauvreté dans les réserves. Beaucoup d’anciens combattants âgés n’ont pas de moyen de transport pour se rendre où que ce soit, même pas à la clinique de santé. Quand ils y vont, ils préfèrent s’exprimer dans leur langue. Nous avons quatre nations distinctes en Saskatchewan. C’est très difficile pour eux de parler à Anciens Combattants parce qu’ils préfèrent leur propre langue. C’est la meilleure façon pour eux de faire valoir leur point de vue, puisque l’anglais brisé qu’ils ont acquis pendant leur service militaire ne leur sert pas beaucoup. Si le gouvernement acceptait de se joindre à nous et tâchait d’embaucher nos propres gens par l’entremise d’ACC, par l’entremise de ces bureaux — il y en a neuf dans tout le pays —, nous pourrions progresser comme jamais auparavant. Pour le moment, nous n’allons nulle part. Nous tournons simplement en rond. C’est un cercle vicieux, et nous en avons assez. J’en ai assez.
    J’ai visité de nombreux endroits au pays. J’ai vécu dans des différentes réserves. Lorsque, handicapé par le trouble de stress post-traumatique et la douleur chronique, j’ai été inscrit dans la liste pour la première fois, j’étais à Vancouver. Les services étaient vraiment bons, excellents même. Je recevais de l’aide. Je progressais. Malheureusement, j’ai dû rentrer chez moi parce que mon père était malade et je que voulais rester avec lui le reste de son séjour ici, sur la Terre mère. À mon retour, j’ai reçu la visite d’une dame âgée du ministère des Anciens Combattants. Elle est venue et a vu comment je vivais et tout le reste. Elle m’a suggéré de m’adresser à Santé Canada et de m’aider moi-même, parce que l’argent qu’elle versait comme contribuable suffisait à payer les services comme ceux de Santé Canada à tous les autres membres de la réserve, puis de ficher la paix au ministère des Anciens Combattants. Cela m’a vraiment déconcerté. Par la suite, aucun représentant du ministère des Anciens Combattants n’a été invité chez moi en raison de tout ce qui m’avait été enlevé, tous ces services. Et tout cela à cause du racisme, parce que j’étais un Autochtone vivant dans ma réserve. Du point de vue de cette dame, je profitais de l’argent des contribuables. Mais les contribuables ne se rendent pas compte que ma vie est importante pour ma famille, tout comme la vôtre.
    Une voix: Merci, monsieur.
    M. Victor Sanderson: Nous avons servi ce pays. Nous avons tout sacrifié: notre sang, notre gagne-pain et notre identité en tant que peuple distinct. Lorsque nous avons revêtu l’uniforme, nous étions tous des bleus, mais j’ai quand même ressenti du racisme à mon endroit. Le mot « chef » ne m’a pas dérangé, pas plus que « pillard de diligences », ni d’autres expressions aussi dures. J’ai appris à m’adapter et à surmonter tous les obstacles posés par le racisme.
    Cependant, j’ai éprouvé beaucoup de difficultés depuis que j’ai quitté l’armée à cause de mon sentiment d’insécurité, d’inutilité et de honte et parce que ma famille ne comprenait pas qui j’étais, ce que j’étais devenu. J’étais plutôt un robot, aurait-on dit, parce que, si on me donnait un ordre, je l’exécutais sur-le-champ, sans poser de questions. C’est ainsi que nous avons été formés, à nous protéger les uns les autres.
    En tant que sapeur de combat, j’ai travaillé dans les champs de mines en Yougoslavie. J’ai vu beaucoup de haine là-bas, 900 ans de haine des Blancs. C’est lorsque je suis revenu dans ma réserve que j’ai pris conscience que nous en avions aussi. Il y a trois bandes dans la réserve. Deux d’entre elles sont des entités reconnues, puisqu’elles sont toujours en pourparlers sur la Colline du Parlement et avec le Canada lui-même. C’est une chaude lutte. La haine est très distincte, comme ce que j’ai vu en Yougoslavie. La haine est très pure. Si les revendications territoriales sont réglées, nous pourrons peut-être un jour rétablir la paix dans ma propre communauté.
    La vie est très difficile dans nos communautés, et nous essayons de trouver de l’aide pour nos anciens combattants.

  (1215)  

    Comme je l’ai mentionné, la dame m’a suggéré d’essayer d’obtenir de l’aide de Santé Canada et d’Anciens Combattants Canada, dans des communautés éloignées où il y a des infirmières autorisées. Il y a maintenant Télésanté. Certaines de ses technologies sont désuètes, mais les gens peuvent dépenser un peu pour faire en sorte que les psychiatres puissent voir les jeunes anciens combattants se trouvant dans ces communautés éloignées et n’ayant aucun moyen d’en sortir. Étant donné les coûts dus à l’éloignement de ces communautés, il est impossible d’obtenir un remboursement immédiat. ACC avait un programme de remboursement immédiat, de sorte qu’après avoir vu votre psychiatre ou psychologue, vous n’aviez qu’à présenter votre carte de visite à Anciens Combattants, qui vous remboursait immédiatement. Cette formule a bien fonctionné en Saskatchewan.
    Aujourd’hui, je dois, chaque fois, payer de ma poche et attendre six ou huit semaines pour me faire rembourser. Lorsque je touche le remboursement, il sert à rembourser la personne à qui j’ai emprunté pour payer l’essence. Cela se produit encore ici en Saskatchewan, dans les régions rurales de la province, où nous en sommes réduits à de telles pratiques.
    Merci, monsieur Sanderson.
    Nous allons passer à notre prochain groupe de témoins pour 10 minutes, puis nous vous reviendrons pour les questions. Merci de votre témoignage.
    J’invite Mme Smith à prendre la parole.
    J’aimerais commencer en saluant les occupants ancestraux, les Algonquins de l’Ontario, des territoires non cédés où nous nous rencontrons aujourd’hui. Nous les remercions de nous avoir permis d’être des visiteurs sur leur territoire pour tenir cette importante discussion aujourd’hui.
    Je tiens également à remercier le Comité permanent de nous avoir invitées, moi-même et notre directrice Davoren, à comparaître cet après-midi pour parler des besoins et des enjeux propres aux anciens combattants métis.
    Je m’appelle Lissa Smith. Je suis métisse. Mes origines familiales sont à Moose Factory, en Ontario, et à la colonie de la rivière Rouge, au Manitoba. Ma famille s’est donc déplacée vers l’ouest. Mon arrière-arrière-grand-père métis a pris épouse dans la Première Nation de Lytton. Nous avons fini par nous établir sur l’île de Vancouver. Du côté écossais de ma famille, neuf générations se sont succédé sur l’île de Vancouver. Nous y sommes depuis les années 1860.
    J’en suis à mon troisième mandat de quatre ans à titre de représentante élue de la Métis Nation British Colombia, dont je suis actuellement vice-présidente provinciale. J’ai la charge du portefeuille des anciens combattants métis au conseil provincial depuis maintenant 10 ans. J’ai commencé à travailler avec les anciens combattants autochtones en 2002.
    C’est un honneur pour moi d’être ici aujourd’hui. Je suis accompagnée de Tanya Davoren, qui est directrice des anciens combattants à la Métis Nation British Colombia. Elle est également citoyenne métisse et a servi sept ans dans l’armée de réserve comme membre d’équipage de char d’assaut avec les British Columbia Dragoons à Vernon, en Colombie-Britannique.
    Nous vous présentons les excuses de Dave Armitt, président du comité Métis Veterans British Colombia, qui est en déplacement. Le président Armitt est déçu de ne pas pouvoir être présent aujourd’hui et participer à cette réunion. Il voulait discuter de cet important sujet au nom de tous les anciens combattants métis de la Colombie-Britannique. Il est en voyage avec plusieurs de ses collègues pour célébrer le 50e anniversaire du Régiment aéroporté du Canada, à Edmonton, en Alberta.
    Le président Armitt voulait que je vous dise combien il est troublé par le sort des nombreux anciens combattants autochtones — les Métis, les Premières Nations et les Inuits de partout au pays —, et de leur famille qui, touchés par le trouble de stress post-traumatique, se sont enlevés la vie. Il félicite le Comité d’avoir entrepris cette étude sur les anciens combattants autochtones et de chercher des solutions pour régler des problèmes comme celui-là.
    Je vais vous donner un bref aperçu du peuple métis de la Colombie-Britannique.
    L’article 35 de la Constitution du Canada reconnaît les Métis comme l’un de trois peuples autochtones distincts. La présence des Métis a été attestée en Colombie-Britannique dès 1793. Il y a aujourd’hui, près de 90 000 Métis, s’étant identifiés comme tels en Colombie-Britannique, soit le tiers de la population autochtone de la province.
    La Métis Nation British Colombia est l’un des cinq membres dirigeants du Ralliement national des Métis. La Métis Nation British Colombia est reconnue par les gouvernements provincial et fédéral comme l’organe directeur officiel représentant les Métis en Colombie-Britannique, y compris plus de 17 500 Métis qui ont demandé et obtenu la citoyenneté métisse.
    L’un des défis liés à la mise en place de services pour les Métis, c’est que l’histoire et le patrimoine uniques des Métis ne correspondent pas nécessairement à la perception traditionnelle de l’identité autochtone. Nous, les Métis, nous avons donc dû nous battre pour faire reconnaître nos droits et notre identité unique.
    Je passe le relais à ma collègue. Merci de votre attention.

  (1220)  

    Une petite précision: il y avait trois autres femmes qui suivaient le même stage de formation que moi, mais j’ai été la première à me qualifier. Cela fait de moi la première conductrice de char Cougar dans l’Ouest canadien.
    Nous sommes heureuses d’avoir l’occasion de vous informer de certaines de nos préoccupations au sujet des problèmes auxquels sont actuellement confrontés les anciens combattants métis en Colombie-Britannique et de vous donner des pistes de solution.
    À l’heure actuelle, les anciens combattants métis n’ont accès à aucun financement pour des campagnes de sensibilisation, pour prendre contact avec les anciens combattants. Il n’y a aucun service de santé, aucun effort pour obtenir la participation des anciens combattants et aucun soutien pour les anciens combattants dans le besoin ou pour leur famille.
    Métis Veterans British Colombia, dont la ministre Smith est la représentante politique et Dave Armitt, le président, ne bénéficie d’aucun financement. Il s’agit d’un comité de 10 personnes composé d’anciens combattants de partout en Colombie-Britannique. Le comité ne se réunit au complet que deux fois par année. Il ne dispose pas de fonds pour des réunions régionales, si bien que ses membres ne peuvent pas communiquer avec les anciens combattants dans les sept régions pour travailler, établir des liens ou des contacts personnels avec eux.
    La solution que nous proposons, c’est que Métis Veterans British Colombia reçoive un financement d’Anciens Combattants Canada pour mener à bien son travail qui, comme l’a dit le président Black de Métis Nation Ontario, est un travail de contact personnel avec les anciens combattants et d’effort pour susciter leur engagement.
    Nous avons un deuxième point à soulever. Nous voudrions être reconnus par Anciens Combattants Canada en tant que représentants des anciens combattants métis de la Colombie-Britannique afin de cerner les lacunes qui existent et les corriger, d’agir et de soutenir les anciens combattants métis et de jouer un rôle d’appoint dans les efforts du Ralliement national des Métis.
    Nous reconnaissons que la Métis Nation British Colombia a une structure officielle de représentation des anciens combattants, tout comme nos collègues de Métis Nation Ontario. Les autres organes de gouvernance de l’Alberta, de la Saskatchewan et du Manitoba pourraient réussir aussi bien s’ils étaient financés. Nous avons la chance d’avoir des dirigeants politiques qui défendent les intérêts des anciens combattants métis et qui veillent à ce qu’ils aient la possibilité, au moins une fois par année, de se réunir. À titre de solution, nous proposons qu’Anciens Combattants Canada invite Métis Veterans British Colombia ainsi que Métis Nation Ontario.
    La Métis Nation British Colombia est préoccupée par l’apparition de groupes irréguliers d’anciens combattants métis et autochtones qui prétendent représenter tous les anciens combattants autochtones du Canada. La Métis Nation British Colombia n’accorde aucun soutien à Métis Veterans of Canada, ni à l’Association canadienne des vétérans et membres actifs autochtones. La Métis Nation British Colombia et notre comité, Métis Veterans British Colombia, entretiennent une relation, d’ailleurs fructueuse et cordiale, qu’avec Aboriginal Veterans Autochtones, ou AVA.
    La solution que nous proposons, qui va dans le sens de la réconciliation, est d’obtenir que notre nation soit traitée séparément des autres peuples autochtones et de travailler avec le Ralliement national des Métis et nos cinq membres dirigeants pour faire reconnaître que la Métis Nation British Colombia et la Métis Nation Ontario ont chacune leur propre comité responsable des anciens combattants métis et seraient les mieux placées pour répondre aux besoins des anciens combattants métis dans leur province respective si elles disposaient des ressources adéquates pour leur offrir des programmes d’approche communautaire.
    Nous recommandons fortement au gouvernement fédéral, en collaboration avec les gouvernements provinciaux et métis et le Ralliement national des Métis, de mettre en œuvre et de financer une stratégie nationale ayant pour but de soutenir la participation tant souhaitable des anciens combattants métis dans les provinces et d’assurer l’inclusion des Métis dans le bon travail accompli par Anciens Combattants Canada.
    Nous recommandons que des fonds soient accordés pour assurer une collaboration et une consultation réelles des anciens combattants métis et de leurs familles au niveau communautaire en vue d’élaborer et de mettre en œuvre des plans provinciaux individualisés. Nous recommandons également que cette stratégie nationale comprenne des plans provinciaux individualisés pour l’élaboration et la prestation de services adaptés à la culture des anciens combattants métis et de leurs familles et répondant aux besoins physiques, mentaux, émotionnels et spirituels qui sont le tribut des services passés, présents et futurs rendus à notre grand pays, le Canada.

  (1225)  

    En terminant, nous tenons à vous remercier du temps que vous nous avez consacré et de l’attention que vous porterez à ces points lorsque vous discuterez des besoins des anciens combattants autochtones. Nous avons également présenté un mémoire qui contient des renseignements plus détaillés sur la Métis Nation British Colombia et la structure de gouvernance de Métis Veterans British Colombia.
    En terminant, nous tenons à vous remercier du temps que vous nous avez consacré et de l’attention que vous porterez à ces points lorsque vous discuterez des besoins des anciens combattants autochtones. Nous avons également présenté un mémoire qui contient des renseignements plus détaillés sur la Métis Nation British Colombia et la structure de gouvernance de Métis Veterans British Colombia.
    Merci de votre attention.
    Merci .
    Nous passons maintenant à une ronde de questions de quatre minutes, en commençant par Mme Wagantall.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je suis heureuse de vous entendre tous. Je représente la circonscription de Yorkton—Melville, en Saskatchewan. Je suis heureuse d’avoir entendu ce que vous aviez à dire aujourd’hui, monsieur, au sujet de votre situation particulière.
    Très souvent, dans ce Comité, nous remarquons que les gens, en parlant de collectivités rurales et éloignées, pensent au Nord canadien, au Nord de l’Ontario ou de la Colombie-Britannique. Nous, en Saskatchewan, ne semblons être quelque peu oubliés.
    Je pense qu’il est important que ce que vous avez dit aujourd’hui figure dans le compte rendu, à savoir qu’il y a autant de difficultés pour nos anciens combattants autochtones dans les régions éloignées et rurales de la Saskatchewan que dans ces autres régions. Pourriez-vous répondre, très brièvement, à ma remarque? Est-ce ainsi que vous voyez les choses?
    Le système de santé de la Saskatchewan a beaucoup de chemin à faire avec notre peuple, avec Santé Canada et avec Anciens Combattants. Si nous nous réunissions plus souvent avec les deux et avec les cliniques de santé de la Saskatchewan et des collectivités du Nord, nous serions en mesure d’aider ces autres anciens combattants dans le Nord.
     Si nous pouvons obtenir que les dirigeants de la Saskatchewan First Nations Veterans Association les aident à s'installer là-bas, c’est pour cela qu'ils sont là. Nous comptons sur cette association pour beaucoup de choses.
    L’une des choses que nous devrions développer — et pas seulement chercher de l’argent pour trouver une autre façon de tenir une réunion —, c’est de trouver des moyens d'aider ces anciens combattants de la jeune génération, ceux qui ont fait l’Afghanistan, qui sont coincés dans leur maison. J’ai été dans cette situation pendant longtemps. J’ai moi-même été mal en point pendant des années, sans aide, sans rien. Je veux que ces jeunes obtiennent ce qu’ils méritent.
    Je comprends que vos préoccupations vous dépassent. Il s’agit d’aller de l’avant et de s’assurer que nous leur donnons le soutien et les soins dont ils ont besoin, après leur retour à la maison. Je vous en remercie.
    Nous avons parcouru le pays. Nous sommes allés à Beauval, en Saskatchewan, puis en Colombie-Britannique, en Ontario et à Halifax. C'est intéressant qu'on parle surtout de l’Ontario et de la Colombie-Britannique. Ces provinces sont assez bien organisées comparativement à beaucoup d’endroits. Dans les demandes que vous adressez à ACC, pourquoi ne pas encourager cette camaraderie et cette association à prendre de l’expansion en Saskatchewan et dans d’autres régions?
    Les provinces de l’Ouest font toutes partie du Ralliement national des Métis. Nous encourageons certainement les autres provinces.
     À l’heure actuelle, les provinces sont toutes à des niveaux différents. Je vis à Victoria, en Colombie-Britannique. Nous avons la base navale et la base aérienne sur l’île de Vancouver, et nous avons donc une forte population de militaires actifs et d'anciens combattants de la jeune génération.
    Lorsque nous nous sommes rencontrés là-bas, nous avons rencontré votre association. Trois associations métisses différentes étaient représentées à notre réunion.

  (1230)  

    Est-ce que c'était à Victoria?
    Oui. C’est vous.
    C’est intéressant. Tanya a effectivement décrit... Je crois que trois des membres du Comité étaient présents.
    Non, on avait l’impression dans la salle que tout le monde ne représentait pas nécessairement tout le monde. C’était la difficulté.
    Je ne sais pas qui étaient les deux autres.
    Pas de problème.
    La Légion était également représentée. Je ne me souviens pas des détails, mais son représentant a dit qu'elle n’aidait pas les Autochtones à leur retour de la guerre et qu’elle n’était pas financée par le gouvernement pour faire le travail qu’elle fait. On avait l’impression dans la salle qu’ils avaient pourtant reçu du financement.
    Je ne peux parler que de ce que je sais, à savoir que ce sont l’Ontario et la Colombie-Britannique — les « serre-livres », comme on dit — qui ont fait le plus de travail pour le Ralliement national des Métis dans nos comités d’anciens combattants. Les autres provinces emboîteront le pas, et nous espérons qu’elles copieront tout ce que nous avons, toute la documentation, les politiques et les procédures. Cela va de soi.
     Très bien.
    Nous sommes la nation métisse de la Colombie-Britannique, reconnue par le gouvernement provincial et par le gouvernement fédéral.
    D’accord.
     Nous appuyons tous les Métis et nous sommes la nation reconnue.
    Merci. Je vous remercie de le dire officiellement.
    Monsieur Samson, vous avez quatre minutes.
    Merci beaucoup à vous trois — d’avoir servi, d’abord, et aussi d’être venus témoigner ici aujourd’hui.
    Comme vous pouvez le constater, nous avons si peu de temps qu'il faut essayer d'aller rapidement au coeur du sujet, mais il semble que certains enjeux soient très semblables. En Colombie-Britannique, on nous a dit que la solution passait entre autres par ce dont vous avez parlé aujourd’hui, le financement du réseautage. Il faudrait également que les Métis soient représentés au ministère des Anciens Combattants. Ensuite, il y a la question des relations avec vos groupes, si on peut dire. Je parle des trois groupes d’anciens combattants autochtones, les deux autres étant évidemment les Inuits et les Premières Nations.
    Les francophones minoritaires emploieraient les mots « par et pour », c'est-à-dire « par nous et pour nous ». Cela veut dire qu’il faut confier le travail à ceux qui sont sur le terrain et qui comprennent les défis à relever. C’était très intéressant et important. Je garderai cette remarque à l'esprit.
    J’aimerais parler un peu plus avec M. Sanderson au sujet de quelques questions extrêmement importantes. Tout au long de nos déplacements, il nous est apparu évident que, quand des Autochtones sont rentrés de la Deuxième Guerre mondiale, de la guerre de Corée ou d’une autre guerre par la suite, comme l’Afghanistan ou ailleurs, nous n’étions pas vraiment équipés pour aider ces anciens combattants. Que pourrions-nous faire à l’étape du retour dans la réserve? Que pouvons-nous faire dans le cadre des services offerts dans la réserve par Anciens Combattants Canada?
    Je vais m’arrêter ici, mais, si j’ai le temps, la prochaine question portera sur les services, dont vous avez parlé. Nous avons ajouté beaucoup de services en éducation et en soins de compassion. Êtes-vous au courant? C’est l’autre volet de la sensibilisation.
    Je vais vous laisser commencer, et, si nous avons le temps, je vous en dirai un peu plus.
    Ce sont les trois questions.
    Allez-y, je suis désolé.
    Mes démêlés avec le ministère des Anciens Combattants ont toujours porté sur les services. Il est très difficile, quand on n'a pas affaire aux communautés, d’obtenir quoi que ce soit du ministère des Anciens Combattants. Je leur ai déjà dit qu’ils ne pouvaient plus venir chez moi à cause de ce qu’ils m’avaient fait. J'ai tout compris quand j'ai constaté qu’aucun de nos membres n’obtiendrait d’aide du ministère des Anciens Combattants en raison de la stigmatisation dont nous faisons l'objet au Canada.
    Si nous voulons lutter contre la stigmatisation, nous devons travailler ensemble et trouver un terrain d’entente. Et il faut commencer quelque part. À mon avis, ce devrait être dans le domaine de la santé ou dans les cliniques de santé.
    Les cliniques de santé sont très importantes, en effet. Je vous remercie.
    Utilisez-vous votre compte ACC? Savez-vous ce que c'est?
    Je sais ce que c'est, mais je n’ai pas d’ordinateur à la maison.
    Je vois.
    C’est l’une de mes difficultés en ce moment. Nous n’avons qu’un seul revenu. J’essaie d’obtenir une allocation pour perte de revenus, mais cela aussi, c'est un « on verra ». J’ai aussi entendu des histoires d’horreur au sujet de ce programme.
    D’accord.
    Comme je l’ai dit, le bureau vient d’ouvrir lui aussi, et nous devons attendre de voir comment les choses se déroulent

  (1235)  

     Insistez et posez les questions.
    Connaissez-vous le programme de prestations de compassion ou d’aide à l’éducation? Si vous êtes dans l’armée depuis 6 ans, vous obtenez un financement de 40 000 $ pour l’accès à l’éducation ou, après 12 ans de service, c’est 80 000 $. Êtes-vous au courant?
    Non, je n’en ai pas fait partie en 1996 lorsque j’ai quitté l'armée. J’ai été laissé pour compte. On m’a tout simplement laissé partir. « Merci de vos services. Merci d’être venu. »
    Dans votre dossier ACC...
    Il n'y avait pas de programme de transition à l’époque.
    Très bien, merci.
    Merci à tous d'avoir servi. C’est formidable de voir des gens de l’île de Vancouver et de la Colombie-Britannique ici également.
    Monsieur Sanderson, vous avez parlé des cliniques de santé et de la nécessité d’en avoir plus. Le comité consultatif, le groupe consultatif de la ministre sur la santé mentale, a recommandé la création d’un centre de soins en consultation interne pour les patients souffrant de TSPT. Pensez-vous qu’une mesure de ce genre serait utile aux anciens combattants autochtones ou est-ce qu'il faudrait des services de santé culturellement adaptés? Nous vivons dans un grand pays, et beaucoup de services sont éloignés, mais croyez-vous qu’un établissement de ce genre serait utile aux anciens combattants?
     Je crois que oui, parce que nous vivons à une époque marquée par l'électronique, et mon peuple en apprend plus sur le monde que moi à l'époque. Quand je me suis enrôlé, j’étais naïf. Nous n’avions que deux chaînes, et elles ne m’intéressaient pas beaucoup. Tout ce que je voulais, c’était partir et participer à quelque chose de plus grand, et c'est ce que j’ai fait. À mon retour, j’étais plein de faux espoirs. Il n’y a pas eu de transition pour les anciens combattants. Il n’y avait rien pour personne au retour. On a enfin ouvert des bureaux, après le suicide de 160 ou 164 personnes — des hommes et des femmes qui avaient servi notre pays.
    Il y a beaucoup de lacunes dans la Nouvelle Charte des anciens combattants, et ce n'est pas à l'avantage des anciens combattants. L’ancienne charte était très intéressante, mais, dans les années 1990, le gouvernement libéral a décidé de la remplacer par la Nouvelle Charte des anciens combattants. Puis, lorsque les libéraux sont partis, les conservateurs l’ont mise en oeuvre. Ils l’ont fait pendant que nous faisions la guerre.
    Maintenant, la guerre est terminée, et ces hommes sont diminués et brisés, tout comme moi. Il m’a fallu plus de 20 ans pour recommencer à parler. Si je l’ai fait, c’est parce que le ministère des Anciens Combattants me harcelait et s’attaquait à moi et à ma famille. Un travailleur de première ligne s'est attaqué à ma femme en disant qu’on allait nous priver de services parce qu’on ne pouvait pas communiquer avec moi. Où est le professionnalisme là-dedans?
    Je suis très sensible à votre témoignage, monsieur Sanderson. C’est très éloquent, et je suis heureux que vous parliez. Je suis heureux que vous soyez ici pour nous faire part de vos réflexions.
    Il y a une question que je me pose, et je vais peut-être m’adresser aux deux groupes à ce sujet. Aux États-Unis, 30 % des gestionnaires de cas sont des anciens combattants. On fait appel à des anciens combattants qui comprennent les problèmes des anciens combattants. Une mesure de ce genre aiderait-elle les anciens combattants au Canada, si nous pouvions atteindre cette proportion? De plus, y aurait-il un avantage, selon vous, à ce qu'il y ait des anciens combattants autochtones parmi ces gestionnaires de cas ou parmi les employés d'ACC, qui sauraient de mesures de soutien culturellement adaptées vous avez besoin?
    Oh, oui, c'est certain.
    Très bien, excellent.
    Qu’en pensez-vous, madame Smith ou madame Davoren?
    Oui, absolument. Ce serait un avantage énorme sur le plan culturel et sur le plan de la santé mentale. Je pensais aux autorités sanitaires de la Colombie-Britannique et à la façon dont elles élaborent leurs plans de sécurité culturelle, leurs plans de santé pour les Autochtones, et ainsi de suite. Il faut donc absolument aborder la question dans le contexte autochtone.
    Monsieur Sanderson, voulez-vous ajouter quelque chose?
    Non. C’est clair.
    Très bien.
    Vous avez parlé d’obtenir des ressources pour les choses dont vous avez besoin — sensibilisation, réunions régionales. Madame Davoren et madame Smith, y a-t-il des choses que vous estimez prioritaires?
    Les déplacements, c'est certain. Nos régions sont grandes. L’Ontario est une grande province, la Colombie-Britannique aussi, et il y a beaucoup de régions éloignées. Les déplacements sont un enjeu énorme dans la possibilité d'atteindre nos anciens combattants et ces petites collectivités.
    Oui, M. Sanderson en a parlé également. Merci.
    Merci. C'est au tour de M. Bratina.
    Monsieur Sanderson, votre témoignage m'inquiète, et, croyez-moi, nous vous écoutons attentivement.
    Je ne sais pas si le nom de « Ron Lancaster » vous dit quelque chose. C'était le quart-arrière des Roughriders et le directeur des Tiger-Cats. Nous avons eu de nombreuses conversations. L’une des choses qu’il disait des jeunes recrues, c’est que ces joueurs devaient commencer à penser à leur avenir immédiatement.
    Pensez-vous qu’il serait utile d'offrir aux jeunes soldats des possibilités de consultation tout au long de leur carrière et à mesure qu’ils approchent...? Ils seront tous des anciens combattants un jour ou l'autre. Étiez-vous complètement ignorant des étapes suivantes de votre carrière? Est-ce qu'il serait utile de discuter avec quelqu’un qui dirait : « Vous devez penser à ceci et réfléchir à cela »?

  (1240)  

    Mon engagement devait durer 30 ans. Je voulais que ce soit pour la vie. C’était ma vocation. C’est ce que je voulais. C’est pour cela que je me suis effondré et que je me suis senti dégoûté, humilié et blessé, parce que j’ai perdu ma carrière.
    Quelle était la question encore?
     Dans le cas des jeunes recrues, on ne leur donne pas de conseils sur ce qui se passe après le service dans l'armée.
    Quand j’étais sapeur, au début, les gars plus âgés parlaient toujours de la fin de vie. C’est à peu près ce dont ils parlaient, leur carrière. Ils nous ont suggéré d'y réfléchir très tôt, contrairement à eux.
    D'accord.
    Dans le métier du génie de combat, c’était toujours une leçon enseignée par les plus âgés aux plus jeunes. Comme je l’ai dit, nous sommes une famille. Nous sommes un genre à part des autres métiers des armes de combat ou d’autres groupes professionnels des Forces armées canadiennes. Ils ont toujours fait de leur mieux pour nous aider, pour que nous restions conscients de la situation globale.
    Je vois.
    Quand quelqu’un ne voulait rien savoir, nous comprenions et nous le laissions tranquille.
    Tanya, dans votre carrière, cela a dû parfois être intéressant pour vous de descendre de votre Cougar. Est-ce qu'il arrivait que quelqu'un vous regarde et vous demande ce que vous faisiez là?
    En effet.
    Je jouais avec les gars, si j'ose dire... J’ai servi de 1990 à 1997. Lorsque je suis tombée enceinte de mon premier enfant, j’ai décidé que tout cela était très amusant, mais que c'était fini.
    J’aimerais soulever un point. Notre témoin précédent, Randi, a parlé des produits de toilette sur le terrain. J’ai fini par recevoir un diagnostic de syndrome de choc toxique en 1995 parce qu’il n’y avait aucune possibilité, au milieu de Wainwright, en Alberta, de prendre soin de ce dont j’avais besoin à l’époque. C’est une préoccupation très réelle pour les femmes de l'armée, c’est certain.
     J’ai beaucoup aimé mon expérience. Il y avait de la camaraderie. C’est une famille, je suis d'accord. J’étais réserviste, mais pas entièrement engagée, et je faisais mes études en soins infirmiers en même temps. Si j’avais été intelligente, je l’aurais fait par l’entremise de l’armée, mais j’ai plutôt choisi un prêt étudiant.
    J’ai vraiment aimé être dans l'armée. C’était différent d’être une femme parmi les hommes, surtout parce que je ne faisais pas partie d’une unité administrative ou médicale; j’étais dans une unité blindée.
    C'est au tour de M. Eyolfson.
    Je tiens d'abord à vous remercier tous de vos témoignages.
    Monsieur Sanderson, j’ai une question pour vous. De toute évidence, ce que vous décrivez est très difficile. J’aurais certainement du mal à parler de ce que vous nous dites.
    Pouvons-nous vous aider, vous personnellement, à ce stade? Y a-t-il quelque chose que nous puissions faire pour vous aider?
    De quelle façon?
    C’est ce que je vous demande. Pensez-vous avoir besoin d’aide en ce moment même?
     Oui.
    J’ai besoin d’aide pour la demande d’allocation pour perte de revenus que je remplis — la paperasse et tout le reste. J’ai un gestionnaire de cas ici à Saskatoon, enfin, et nous obtenons des résultats, mais il faut du temps pour faire passer cette paperasse. Les anciens combattants autochtones n’ont pas le temps. Nous attendons depuis toujours et nous en avons assez d’attendre.
    Il faut accélérer le processus. Nous avons toujours été séparés dans ce pays. Si vous voulez faciliter la déségrégation, accélérez le traitement de nos demandes. Nos revendications ont été retardées en Saskatchewan et partout ailleurs où nous devons les envoyer. Cela prend beaucoup de temps. Cela prend une éternité, et l’argent est un gros problème quand on doit parcourir de longues distances pour aller voir son psychiatre, son psychologue ou tout autre fournisseur de soins dont on a besoin.
    Je crois comprendre que le ministère des Anciens Combattants a groupé toutes les situations en catégories, et il est très difficile de les relier entre elles, parce qu’elles sont toutes distinctes. Chaque blessure est une entité distincte. Par exemple, le TSPT et les maux de dos chroniques sont des catégories différentes, mais il y a toujours ce cercle vicieux de la douleur chronique qui me saisit l'esprit et qui cause beaucoup de ravages là-dedans, et c'est là que le TSPT se met de la partie, sans aucune raison, et, tout d’un coup, je reste dans mon garage pendant une semaine et demie ou deux, sans ma famille et sans désir de la voir.
    Je n’ai aucun soutien pour ma femme et ma famille, car il n’y a rien ici pour eux, ni ailleurs au Canada, en fait. J’ai entendu des témoignages au sujet de femmes qui attaquent les ministres à Ottawa pour essayer d’obtenir de l’aide.
    Ce sont là des choses très difficiles à faire pour elles, et il est humiliant de se présenter devant ce comité et de parler des moyens, des échappatoires et des tracasseries administratives. La paperasse est l’une des choses les plus difficiles auxquelles se heurtent les anciens combattants. Si on élimine cela et qu'on accélère le processus pour tout le monde...
    Nous ne demandons pas grand-chose, comme dit le premier ministre. Vraiment pas. Nous voulons retrouver notre qualité de vie. Nous voulons pouvoir respirer sans brusques retours en arrière, mais c’est presque impossible, parce que ça arrive tout le temps. Je vois encore des champs de mines dans mon jardin de temps à autre.
    J’en parle avec ma psychiatre. Elle me demande comment ça va aujourd’hui et si j’ai envie de tuer quelqu’un. Oui, c'est le cas, tous les jours. Ce n’est pas facile de s’en sortir. Le TSPT est là à vie. Vous n’êtes ici que pour quatre ans, mais nous sommes des anciens combattants pour toujours. Nous essayons d'être humbles et d’aider nos jeunes à avancer en fonction de ce que nous voyons et qu’ils ne voient pas.
    Tout ce que je peux faire, c’est observer et marcher. Je ne fais pas de sport ou quoi que ce soit d’autre pour m’aider à lutter contre ces choses, parce que ma situation est très bonne.

  (1245)  

    Merci.
    Monsieur Kitchen, c'est à vous. Vous avez quatre minutes.
    Merci, monsieur le président. Je remercie tous les témoins d'être venus et pour les services rendus.
    Madame Davoren, je suis très impressionné. En effet, mon père a fait partie des Dragoons. Il a commandé ce régiment. Dans ma jeunesse, je courais les blindés et aussi les Lynx et les Cougar. J’ai toujours rêvé d'être à la tourelle de ces engins.
    Peu importe, monsieur Sanderson, je viens moi aussi de la Saskatchewan. J’habite à Estevan. Vous avez parlé un peu de ce que plusieurs nous ont dit maintes fois au sujet des anciens combattants qui, du moins dans notre région, sont prêts à aller n'importe où pour recevoir des soins, peu importe la distance qu'ils doivent parcourir, puisqu'ils n'y ont pas accès en Saskatchewan. Il n’y a pas de clinique, ni rien d'autre.
    Ils nous ont aussi parlé des problèmes de remboursement. Vous avez dit que ce serait un avantage énorme — non seulement en Saskatchewan, mais aussi là où ils doivent sortir de leur région — si une fois arrivés à destination, ils pouvaient présenter une demande sur place à ACC, de sorte qu’ils seraient remboursés immédiatement. Est-ce exact?
    Oui, c’était ainsi au début.
    Donc, ce serait une bonne chose, et vous aimeriez peut-être que nous recommandions quelque chose du genre, n’est-ce pas?
    Oui, c’est exact, parce que c'est moi qui suis obligé de sortir l'argent de ma poche et que c'est autant que je n'ai pas pour mettre de la nourriture sur la table.
     En effet.
    La télémédecine est souvent une option envisagée de nos jours. Par contre, dans les régions rurales du Canada, elle n'est pas disponible.
    Pendant toute la semaine de consultations sur place et dans nos séances, nous avons entendu parler d'autres enjeux en lien avec les traitements de type aide non approuvés, tels les pow-wow, les aînés ou les sueries. Quelqu’un nous a parlé d’une suerie pour quelqu’un au comportement instable qui était à bord d’un navire. La recommandation était de l'envoyer chez lui consulter les aînés, au lieu de le renvoyer. Tout de suite après, la personne est revenue et a été un membre utile des Forces canadiennes pendant les quelque 20 ans qui ont suivi. J'aimerais avoir les commentaires des trois témoins.

  (1250)  

    Je vais commencer.
    La spiritualité est l'essence de notre vie. Lorsque nous nous effondrons, lorsque tout se déglingue parce qu'on est loin des siens et qu'on se trouve dans un groupe ethnique autre que le sien, par exemple les Blancs, que nous passons beaucoup de temps avec ce groupe étranger, parfois notre âme est mise à mal et nous devons rentrer chez nous. Ce que cette personne sur le navire a fait était la bonne chose à faire, parce que cela lui a permis de mettre de l'ordre dans ses idées.
    Nos cérémonies nous mettent en contact avec nos aînés et le Créateur. Elles sont importantes pour nous. Elles nous aident et elles nous font du bien, mais elles nous apprennent également que la route est longue, que rien ne vient seul. Notre médication vient de la terre. Pour la recevoir, il faut faire preuve d'humilité et ne pas être sous l'influence de l'alcool ou de drogues. Pour un ancien combattant, c'est très difficile de lâcher prise, parce que le TSPT peut être tellement grave que c’est ce dont il a besoin pour continuer à vivre, donc il s'adresse à vous et essaie de faire comme vous.
    Par la suite, nous revenons à notre mode de vie traditionnel pour retrouver notre humanité et aller de l'avant. Voilà qui nous sommes dans cette vie. Nous sommes des êtres humains, et nous avons fait de notre mieux pour être humbles, mais le racisme et tout le reste ainsi que les atrocités commises contre notre peuple rendent très difficile le processus de retour sur le passé.
    Sans les excuses des Forces canadiennes pour la façon dont elles ont traité les anciens combattants autochtones après les sacrifices consentis et pour les soldats morts et enterrés à l’étranger, il reste possible de les rappeler à notre mémoire et de les faire connaître. Seul Anciens Combattants peut faire cela. Nous, nous ne pouvons pas, parce que c’est vous qui nous avez fait cela. Si vous avez besoin d’aide, nous vous en apporterons, mais c’est à vous qu'il revient de présenter des excuses publiques à notre peuple. Tout le monde s'en trouvera bien à long terme parce que notre peuple voudra alors redevenir guerrier. Nous avions beaucoup de guerriers avant que nos deux peuples n'entrent en contact.
    Merci.
    Monsieur Fraser, nous allons terminer avec vous; vous avez quatre minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je vous remercie tous les trois de vous être joints à nous aujourd’hui et de nous avoir présenté des exposés précis.
    J’aimerais commencer par ces dames. Vous avez parlé un peu d'information sur le terrain. Évidemment, étant donné que la Colombie-Britannique est une grande province, il faut déployer beaucoup d’efforts pour rejoindre tous vos membres et les anciens combattants autochtones. Pourriez-vous nous parler un peu de ce que pourrait faire Anciens Combattants Canada pour soutenir le travail d'information que votre groupe ou d’autres organisations accomplissent dans une grande province pour rejoindre ces collectivités éloignées?
    Je sais que nous avons parlé un peu de la technologie et de ce en quoi elle pourrait être utile, mais je pense qu’il est important d'avoir parfois un soutien par les pairs sur le terrain pour effectuer ce travail de proximité afin d'amener les gens à comprendre ce que le ministère des Anciens Combattants peut faire pour les aider. Je crains que, parfois, les prestations et les services ne soient pas nécessairement connus de tous les anciens combattants qui pourraient avoir accès aux services qui pourraient les aider. Quel travail de proximité faites-vous et que pourrait faire Anciens Combattants Canada pour vous soutenir?
    L’un des sièges à notre comité des anciens combattants est occupé par un agent d’entraide; le travail de ces agents consiste à consulter les systèmes pour porter assistance aux gens qui ont besoin d'aide. Je crois qu’un de nos anciens agents d’entraide a permis à d'anciens combattants métis d'obtenir l'équivalent de 2,5 millions de dollars en services auxquels ils ne savaient pas avoir droit.
    C’est exact.
    Nous avons 38 communautés métisses en régie autonome en Colombie-Britannique, dans sept régions. Nous avons un représentant des anciens combattants pour chaque région, mais l'accès à ces communautés métisses pour localiser les anciens combattants et connaître leur nom nous faciliterait grandement le travail d'identification des anciens combattants métis.
    À l’heure actuelle, nous n’avons aucune ressource pour faire ce travail ou pour nous aider à identifier les anciens combattants métis en Colombie-Britannique. Pourtant, ce sont là des données importantes dont nous avons besoin pour mieux plaider en faveur de services destinés spécifiquement aux anciens combattants métis.
    Je vais laisser la parole à Tanya, si vous permettez.

  (1255)  

     Bien sûr.
    Si je puis me permettre, parmi les services actuellement offerts, la Ligne d’écoute d’espoir pour le mieux-être des Premières Nations et des Inuits s’adresse aux Premières Nations et aux Inuits en situation de crise ou de détresse. Elle n'est pas destinée aux Métis, donc le simple fait de mettre un numéro de téléphone à la disposition des Métis en situation de crise... J’ai composé le numéro pour voir ce qui allait se passer et on m'a répondu qu'on essaierait de m’aider, mais que je n’étais pas leur public cible.
    Quand on voit à quel point la technologie permet aux populations métisses de communiquer entre elles, il faut admettre l'extrême importance d’envisager d’autres moyens. Si Anciens Combattants Canada nous aidait à former notre agent d’entraide et à travailler avec lui pour concevoir plus de programmes de ce genre, je pense que nous pourrions vraiment offrir le meilleur service possible aux anciens combattants métis de la province.
    Dans votre exposé, vous avez dit souhaiter une invitation d’Anciens Combattants Canada à servir d'interlocuteur. Je n’ai pas bien compris ce que vous vouliez dire. Pourquoi l’invitation et à quel rôle pensiez-vous?
    Il s’agirait de travailler avec les comités ou d’avoir un meilleur accès aux services. Le Métis National Council nous représente auprès de la province, mais s’il y a des comités qui font ce travail et qui examinent les mesures législatives visant les agents d'entraide dans la province et la façon dont notre participation pourrait augmenter, nous aimerions beaucoup être au courant.
    On a dit plus tôt que nous étions les derniers de la liste, donc nous arrivons parfois un jour en retard. Le simple fait d'être mieux informés de ce qui se passe est très important, et c’est une énorme lacune à l’heure actuelle. Nous devons assurer cette communication.
    Dans le groupe de témoins précédent, M. Black, je crois, a très bien mis ce point en évidence. Il a parlé de la nécessité d'une meilleure communication et de l'importance d'une diffusion rapide de l’information. Je pense que c’est très important.
    Monsieur Sanderson, seriez-vous d’accord pour dire qu’il serait utile d’avoir une meilleure communication entre Anciens Combattants Canada et les gens sur le terrain qui s'occupent des anciens combattants dans les communautés métisses?
    Je pense que ça aiderait. Les civils qui travaillent là ne sont pas bienveillants, et il est très difficile de traiter avec eux parce que ce sont des bureaucrates. De parler à quelqu’un de bienveillant qui compatit aux souffrances d’un ancien combattant, qui est en mesure de le constater, nous ferait du bien. Le fait que 30 % du personnel soit d'anciens combattants, ça aussi, en tant qu’ancien combattant... Même dans les régions éloignées, pour les vieux vétérans, il faut que d'anciens combattants fassent partie des travailleurs de première ligne à Anciens Combattants Canada afin de briser les barrières linguistiques.
    À votre avis, est-ce qu'il faut profiter de la réouverture du bureau d’Anciens Combattants Canada à Saskatoon pour mettre en place ce genre de contacts dans votre secteur?
    Eh bien, oui, nous verrons comment les choses se passent à partir de maintenant. Le bureau vient tout juste de rouvrir et j'ai un tout nouveau conseiller. Le dernier remonte à 2009, donc le vide a été difficile à combler.
    En effet. Bien, je vous remercie.
    C’est tout le temps dont nous disposons aujourd’hui pour les témoignages.
    Au nom du Comité, j’aimerais vous remercier tous les trois d’avoir pris le temps de venir témoigner aujourd’hui. Les témoignages étaient excellents et, avec un peu de chance, ils nous aideront dans notre cheminement vers la fin de cette étude.
    Monsieur Eyolfson, vous voulez...?
    Merci, monsieur le président.
     J’aimerais simplement présenter un avis de motion. Je vais le distribuer.
    La motion se lit comme suit:
Que le Comité entreprenne une étude sur les défis auxquels font face les vétérans itinérants, sur les causes de l'itinérance chez les vétérans et sur les efforts déployés par Anciens Combattants Canada dans ce dossier; que le Comité fasse rapport à la Chambre de ses observations et recommandations au plus tard en décembre 2018; et que le Comité demande au gouvernement de déposer une réponse globale à ce rapport.
    Quelqu'un veut-il ajouter quelque chose au sujet de la motion?
    Je l’ai déposée.
    Vous l’avez déposée, donc vous allez ramener le sujet à la prochaine réunion? D’accord, très bien.
    Attendez, excusez-moi, qu'est-ce que vous dites?
    Ce n’est pas un avis. Vous avez déposé l'avis il y a deux jours.
    J'ai déposé l'avis il y a deux jours.
    Ce n’est donc pas un avis. D’accord, nous pouvons débattre du contenu de la motion. Désolé.
    Allez-y, Cathay.
    Monsieur le président, j’ai des rendez-vous qui m'attendent et la séance du Comité se termine, alors je propose que nous passions à l'étude de cette motion la prochaine fois que nous nous réunirons.
    Pourrions-nous tenir une réunion mardi prochain et régler cette question avant de suspendre nos travaux pour l'été? Quelle est la date prévue de notre prochaine réunion?
    Mardi, nous pourrions en tenir une. Oui, nous pouvons en avoir une mardi, alors nous nous réunirons ici à 11 heures mardi pour une séance régulière.
    Merci.
    La séance est levée.
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