Passer au contenu
Début du contenu

CHPC Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.

Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.

Publication du jour précédent Publication du jour prochain
Passer à la navigation dans le document Passer au contenu du document






Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent du patrimoine canadien


NUMÉRO 107 
l
1re SESSION 
l
42e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 3 mai 2018

[Enregistrement électronique]

  (0855)  

[Traduction]

    Vu le nombre de témoins, la matinée sera occupée. Avant de commencer, je tiens à prendre un moment pour saluer Gord Brown, l'un de mes prédécesseurs à la présidence de notre comité et grand ami des arts.
    Pierre et moi avons pu collaborer avec lui à un comité ou à un caucus de la musique et je tiens à prendre un moment, avant de commencer, pour reconnaître son travail acharné pour notre comité et les arts et pour nous inspirer de sa flamme dans notre poursuite de cette étude et dans celles qui suivront.
    Aujourd'hui, nous accueillons des témoins pour l'étude de la parité hommes-femmes dans les conseils d'administration et au niveau des postes de cadres supérieurs des organismes artistiques et culturels canadiens. Il s'agit, par vidéoconférence, de Mmes Heather Allin et Ferne Downey, qui représentent l'ACTRA. Merci.
    Nous accueillons ici Mme Susannah Rosenstock d'Art Toronto.

[Français]

    Nous accueillons aussi Sophie Brière, de l'Université Laval.
    Nous allons commencer par ceux qui témoignent par vidéoconférence. Comme il y a parfois des difficultés techniques, c'est mieux de procéder de cette façon.
    Nous allons commencer par la présentation des représentantes de l'ACTRA.

[Traduction]

    Merci beaucoup, madame la présidente. Je remercie aussi les membres du Comité pour leur invitation à comparaître dans le cadre de votre étude. Je vous remercie aussi de l'hommage éloquent que vous venez de rendre à M. Brown.
    Je me nomme Ferne Downey. Je suis une actrice canadienne. J'ai présidé l'ACTRA, l'Alliance of Canadian Cinema et Television and Radio Artists et je préside la FIA, la Fédération internationale des acteurs. Je suis accompagnée de Heather Allin, actrice canadienne et présidente du comité national des femmes de l'ACTRA.
    Ferne et moi sommes aujourd'hui les porte-parole des membres de l'ACTRA, qui rassemble 25 000 interprètes professionnels de langue anglaise. 2018 est une date historique de notre syndicat, qui célèbre sa 75e année d'existence comme fédération nationale. Il représente depuis 75 ans les interprètes qui vivent et travaillent au Canada. Ces acteurs jouent un rôle essentiel en prêtant la vie aux personnages des récits canadiens dans les films, les émissions de télévision et de radio et les médias numériques. Comme beaucoup de secteurs au Canada, le cinéma et la télévision de langue anglaise ne sont pas à l'abri des inégalités entre les sexes. Nous, à l'ACTRA, avons longtemps combattu avec acharnement celles qui sévissent dans notre industrie. C'est la raison de notre présence aujourd'hui: cerner les problèmes et formuler des recommandations pour un changement.
    En plus de mon rôle d'ancienne présidente de l'ACTRA, je suis également fière de présider les CUES, les Canadian Unions for Equality on Screen, c'est-à-dire les syndicats canadiens pour l'égalité au cinéma et à la télévision. Les CUES sont un groupe de représentants de syndicats et de guildes dont l'objectif est de rassembler et d'analyser des données pour mieux comprendre les occasions et les difficultés que présente à toutes les femmes l'industrie de la production et d'élaborer des recommandations et des outils pour augmenter le nombre de femmes à tous les niveaux de production. Depuis leur début, vers 2012, les CUES ont publié deux rapports de l'universitaire canadienne Amanda Coles, pour s'attaquer à ces problèmes.

  (0900)  

    Après examen approfondi des statistiques sur l'industrie fournies par les syndicats sur leurs membres qui travaillent devant et derrière la caméra, le premier rapport des CUES a constaté que les femmes étaient fortement sous-représentées à presque tous les niveaux de production de l'industrie canadienne du cinéma et de la télévision.
    Trois ans plus tard, alors que les chiffres sont restés à peu près constants, un deuxième rapport interrogeait les statistiques pour expliquer cette inégalité. Il constatait que, pour bien comprendre le problème, il ne faut pas seulement analyser la discrimination contre les femmes, mais aussi l'avantage systémique accordé aux hommes. Dans l'industrie canadienne du cinéma et de la télévision, cela signifie que les femmes doivent travailler plus fort et faire constamment mieux.
    Par exemple, l'évaluation du risque financier d'un projet n'est pas sans conséquence sur l'un des deux sexes, même si on n'a trouvé aucune preuve de discrimination sexuelle comme outil de gestion du risque en production télévisuelle et cinématographique. Les réalisateurs passent pour visionnaires et inventifs, les réalisatrices pour exigeantes et difficiles. Un modèle de travail hiérarchique et rigide préside encore aux opérations de la production cinématographique et télévisuelle indépendante au Canada.
    Pour mettre fin à leur exclusion systémique, les femmes ne doivent pas seulement s'investir dans la recherche de solutions, mais aussi occuper paritairement des postes clés de direction et de décision.
    Des études le confirment. En 2016, la Fondation Rockefeller a ainsi constaté que la présence de femmes aux postes de direction contribuerait sensiblement à attirer une population active plus diversifiée, et, d'après une étude de cas de Condition féminine Canada, les entreprises où des femmes siégeaient dans les conseils d'administration étaient mieux en mesure d'attirer et de retenir d'excellentes employées. Cette étude a aussi révélé que les femmes sont attirées par les entreprises où des femmes siègent déjà dans les conseils d'administration, parce qu'elles voient que des possibilités d'avancement existent pour elles. Cependant, malgré l'importance de la parité dans les conseils d'administration, nous devons souligner qu'elle n'est pas la bonne façon de combattre l'inégalité en soi entre les sexes.
    En octobre dernier, les syndicats et les guildes membres des CUES ont été les premiers à signaler que les modestes recommandations pratiques qu'ils avaient mises en oeuvre en s'inspirant du premier rapport des CUES avaient déjà permis de changer de façon remarquable ce qui se passait dans leurs organisations.
    Le deuxième rapport des CUES a franchi un pas de plus. Une recommandation adressée aux organisations membres était qu'elles s'efforcent, à la grandeur de l'industrie, d'adopter l'égalité entre les sexes comme principe de base pour l'élaboration d'une politique, sa mise en oeuvre, et pour la surveillance et l'évaluation subséquentes. Depuis la publication du rapport, en 2016, les CUES ont élargi leur rayonnement au-delà de leurs propres organisations membres et ont collaboré avec succès avec des organismes canadiens de financement à l'élaboration et à la mise en oeuvre de ces pratiques.
    Après le lancement de sa première politique de parité, en 2016, Téléfilm Canada s'est attiré les reproches des CUES et d'autres joueurs de l'industrie pour son absence d'objectifs quantifiables. Avec le concours de l'industrie, il a révisé sa politique et annoncé des mesures précises de parité pour le financement de la production de longs métrages, qui lui permettraient de rassembler au plus tard en 2020 un portefeuille équilibré, par le nombre, de films réalisés, scénarisés et produits par des femmes. À peine un an plus tard, nous apprenions avec plaisir que sur les 60 films et plus qu'il s'était engagé à financer jusque-là, au cours de l'année, 44 % étaient réalisés, 46 % étaient scénarisés et 41 % étaient produits par des femmes.
    Voilà des nouvelles réjouissantes, mais Téléfilm Canada a reconnu que les films d'un budget de plus de 1 million de dollars continuent de ne pas attirer autant les réalisatrices. Il s'est cependant engagé à continuer de collaborer avec des partenaires de l'industrie pour y remédier et il est convaincu qu'il finira par atteindre son objectif.
    D'autres organismes canadiens de financement ont aussi pris leurs propres engagements pour la parité, grâce à la création de fonds spéciaux ou à des modifications apportées aux fonds existants, notamment CBC/Radio-Canada, l'Office national du film et le Fonds des médias du Canada. Nous attendons avec impatience les progrès réalisés.
    Bien que le travail que nous avons entrepris dans notre industrie ait contribué à notre quête de parité, nous avons l'impression de seulement commencer. Nous voudrions terminer notre exposé en demandant au gouvernement fédéral de jouer son rôle en appliquant les trois recommandations suivantes:
    D'abord, s'assurer de la parité dans les conseils d'administration comme ceux de CBC/Radio-Canada, de l'Office national du film et de Téléfilm Canada ainsi que dans ses nominations au Fonds des médias du Canada.
    Ensuite, exhorter toutes les organisations qu'il finance à établir un objectif pour l'atteinte de la parité dans les postes créatifs essentiels des productions qu'elles financent.
    Enfin, recommander vivement à ces organisations de faire le suivi de leurs progrès et d'en publier un rapport.
    Nous vous remercions de votre temps et attendons vos questions avec impatience.

[Français]

    Merci beaucoup.

  (0905)  

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    Entendons maintenant Mme Rosenstock, d'Art Toronto.
    Mesdames et messieurs les membres du Comité, bonjour. Je vous remercie de votre invitation à venir témoigner sur ce sujet important. Je suis honorée de me trouver ici et de vous faire part de mes réflexions.
    Il serait utile que je me décrive un peu. Je suis originaire des États-Unis et j'ai obtenu mon baccalauréat en histoire de l'art à l'Université Columbia, à New York, puis ma maîtrise, dans le même domaine, à l'Institute of Fine Arts de l'Université de New York. Depuis plus de 20 ans, je travaille dans les arts visuels, à New York et à Toronto. Je suis arrivée à Art Toronto en 2010 et j'en suis devenue la directrice en 2014.
    Fondé en 2000, Art Toronto est l'unique salon international d'art moderne et contemporain au Canada. Si on compte plus de 300 salons commerciaux d'art dans le monde et des dizaines aux États-Unis, le Canada n'en possède qu'un. D'une durée de cinq jours, s'adressant aux consommateurs et se déroulant au Palais des congrès du Toronto métropolitain, Art Toronto est la plus grande et la plus importante des manifestations annuelles consacrées aux arts visuels au Canada. C'est devenu un lieu de rencontre et une manifestation de réseautage incontournables pour les professionnels de l'art de tout le pays.
    Le salon réunit une centaine de galeries canadiennes et internationales d'art moderne et contemporain ainsi que des stands pour les musées d'art et d'autres espaces artistiques sans but lucratif, les périodiques d'art et les projets organisés et préparés. Un programme de discussions et de visites animées par des personnalités éminentes du monde de l'art coïncide avec lui.
    En 2017, plus de 23 000 collectionneurs d'art, professionnels de l'art et amateurs d'art l'ont visité et ont injecté plus de 10 millions de dollars dans l'économie des arts à la faveur de ventes d'oeuvres d'art, en sus des montants dépensés par les touristes dans la ville au cours de ces cinq jours. Sa soirée inaugurale permet le financement du Musée des beaux-arts de l'Ontario, grâce à l'obtention, annuellement, de près de 400 000 $ pour les expositions et les programmes du musée.
    Art Toronto est la propriété de la multinationale Informa, dont le siège est au Royaume-Uni et dont les 7 500 employés sont dispersés dans le monde entier. C'est une entreprise de pointe dans les secteurs de la veille stratégique, de l'édition universitaire, du savoir et de l'organisation d'événements.
    Pour me préparer à mon témoignage sur la parité dans les conseils d'administration des institutions culturelles canadiennes et chez les chefs de file artistiques du Canada, je me suis renseignée sur les politiques et programmes d'embauche qu'Informa a instaurés pour atteindre ses objectifs de diversité chez ses employés. J'ai appris avec plaisir que 56 % des employés de l'entreprise étaient des femmes, mais le taux, dans les groupes de direction de hauts niveaux, descend à 27 % et touche même le plancher de 22 % chez les directeurs au plus haut niveau. Le taux de directrices, dans les bureaux canadiens d'Informa, est cependant plus élevé.
    On peut observer une tendance semblable dans les musées d'art américains et canadiens. En 2018, cependant, je ne crois pas qu'on puisse se contenter de la parité dans ces institutions et dans le secteur des arts au Canada, sans aussi englober la diversité ethnique.
    Les États-Unis et le Canada se distinguent notamment l'un de l'autre par la parité dans les postes de directeurs des musées en fonction de l'importance des budgets de fonctionnement de ces établissements. La majorité des musées dont le budget est inférieur à 15 millions de dollars ont une directrice, et c'est le contraire dans les musées dont le budget est supérieur. La représentation des directrices est inversement proportionnelle à l'importance du budget.
    Dans une étude publiée par le magazine Canadian Art, en avril 2017, intitulée « Hard Numbers: A Study on Diversity in Canada's Galleries », on constate non seulement un écart entre les sexes mais aussi dans les tranches démographiques du personnel des musées en fonction du titre de l'emploi. Alors que les postes de directeur au sommet sont plutôt occupés par des hommes, l'étude constate que les minorités visibles et les peuples autochtones sont gravement sous-représentés à tous les niveaux de l'administration des musées, notamment chez les conservateurs et les directeurs.
     Si ces chiffres exercent divers effets dans l'ensemble de l'organisation, l'effet est peut-être des plus évidents dans la ventilation des expositions solos présentées dans ces établissements selon le sexe et l'ethnie de l'artiste. Un rapport publié en 2015 par le même magazine, Canadian Art) a porté sur ces expositions, de 2013 à 2015 dans un établissement majeur par province et au Musée des beaux-arts du Canada, en s'arrêtant au sexe et à la race des artistes vivants. La moyenne nationale établie par cette étude a révélé que 56 % de ces expositions avaient été accordés à des Blancs, 33 % à des Blanches, 8 % à des Non-Blancs et 3 % à des Non-Blanches. C'est donc dire que ce qui se produit au sommet influe sur ce que les visiteurs voient et éprouvent dans ces établissements.
    Informa a instauré de nouveaux programmes à la grandeur de l'entreprise, ces dernières années, pour améliorer la parité dans la haute direction et augmenter la diversité dans l'ensemble de l'entreprise. On pourrait transposer certaines de ces initiatives dans des établissements culturels canadiens et dans leurs conseils d'administration.

  (0910)  

    Il y a plusieurs années, Informa a créé un programme de bourses d'études supérieures et un programme de formation pendant l'apprentissage ainsi qu'un programme de développement du leadership pour accroître les compétences professionnelles en leadership, favoriser le réseautage et la collaboration et favoriser la planification de la relève, toutes des activités essentielles dans toute institution.
    Je pense que ce dernier point sur le leadership, le mentorat et la planification de la relève est essentiel à la formation de futurs dirigeants dans le secteur artistique canadien, qui seront représentatifs de la diversité et de la pluralité de la population canadienne au XXIe siècle et des communautés pour le service desquelles ces institutions existent. Le manque de ressources affectées à la formation au leadership qui a sévi jusqu'ici au Canada a notamment servi à expliquer pourquoi beaucoup de directeurs généraux embauchés récemment au Canada et plus précisément à Toronto, notamment au Musée des beaux-arts de l'Ontario, au Musée royal de l'Ontario et à la galerie McMichael, étaient tous des étrangers.
    Je connais deux excellents programmes de formation au leadership qui, à l'instar de ceux d'Informa, peuvent être considérés comme des exemples et des occasions à saisir par les Canadiens. Le Clore Leadership Programme, au Royaume-Uni, favorise la croissance professionnelle du personnel des musées, tandis que, aux États-Unis, le Getty Leadership Institute aide les dirigeants de haut niveau des musées et du milieu de la culture de partout dans le monde à devenir de meilleurs chefs, l'objectif étant de renforcer les capacités de leurs propres institutions tout en faisant la promotion du secteur muséal international.
    On peut notamment se réjouir de l'offre de nouveaux programmes de leadership au Canada, notamment au centre Banff, au Conseil des ressources humaines du secteur culturel et par l'entremise du Monde des affaires pour les arts. C'est un début, mais il faut plus pour faire bénéficier des ressources de la formation au leadership plus de candidats du secteur culturel et rejoindre particulièrement les femmes, les Autochtones et les minorités visibles.
    Les ressources fédérales pourraient aider à renforcer ces programmes, et le gouvernement pourrait collaborer avec d'autres partenaires pour multiplier les occasions à saisir, par exemple, avec des institutions partenaires de tout le Canada comme le Remai Modern, l'Université Ryerson, le Musée des beaux-arts et Les Salles, à élaboration d'un programme canadien de leadership dont les candidats, à chacun de ces endroits, se réuniraient annuellement pour un sommet sur le leadership, en ayant l'occasion de présenter des idées, de les mettre en commun et de rencontrer des chefs de file nationaux et internationaux du secteur des arts. Ces programmes pourraient être élaborés de manière à cibler précisément les femmes et divers candidats représentatifs de la population canadienne et ils pourraient créer une nouvelle génération de dirigeants canadiens dans le secteur des arts et de la culture.
    On m'a aussi demandé de faire part de mes réflexions sur la parité dans les conseils d'administration des institutions d'arts visuels. Il faut se réjouir d'y constater une majorité de femmes, bien que, encore une fois, les minorités visibles et les Autochtones y soient très sous-représentés. Il faut que ça change.
    En plus de mon travail à Art Toronto, je suis aussi membre fondatrice du conseil d'administration de la Toronto Biennial of Art, une nouvelle manifestation artistique présentée en plusieurs endroits, qu'on devrait lancer en 2019. Dans le recrutement des administrateurs, nous nous sommes donné la tâche d'obtenir un conseil d'administration diversifié, talentueux et passionné pour les arts, conformément aux valeurs centrales de notre organisation.
    Compte tenu des modalités éventuelles de la collaboration fédérale avec des partenaires pour diversifier ces conseils d'administration, je pense que son action pourrait être des plus efficaces par le processus de demande de subventions. Le Conseil des arts du Canada a récemment actualisé ses politiques de financement en insistant davantage sur la diversité comme critère de financement. Dans le même esprit, on pourrait privilégier les organismes de charité ou les organismes sans but lucratif qui travaillent à améliorer la diversité de leur représentation. Ces organismes pourraient être admissibles à un appui plus généreux de leurs projets, ce qui pourrait, à son tour, les amener à diversifier les rôles des conseils d'administration. Ils encourageraient ainsi la participation d'une gamme plus large d'administrateurs potentiels.
    Merci de votre invitation.

[Français]

    Nous allons maintenant entendre Mme Sophie Brière, de l'Université Laval.
    Bonjour, tout le monde.
    Merci de m'avoir invitée ce matin.
    Comme tout bon professeur, j'ai préparé une présentation PowerPoint.
    Je ne suis pas du tout une spécialiste des arts. C'est ce que j'ai dit aux personnes qui m'ont invitée. Par contre, je me suis beaucoup penchée sur la question de la présence des femmes dans les conseils d'administration et de leur incidence sur ceux-ci, principalement au Québec, dans divers secteurs d'activité tant du secteur public que du secteur privé. Aujourd'hui, je souhaite vous entretenir des leçons apprises à la suite de ces projets de recherche. Comme tout bon professeur, j'en aurais pour deux ou trois heures, mais je vais essayer de me limiter à 10 minutes. Comme vous pouvez le voir, à la fin de ma présentation, j'ai ajouté la liste des publications. Nous avons publié quatre ou cinq rapports sur ce sujet. Donc, il y aurait beaucoup de choses à dire.
    J'ai essayé de répondre aux quatre questions qu'on m'a posées.
    Tout d'abord, la parité entre les sexes est-elle un enjeu dans les organisations, les conseils d'administration et la haute direction? La réponse est oui. Je ne veux pas vous donner des chiffres ce matin, parce que je pense que tout le monde les a déjà. On sait que le pourcentage de femmes qui siègent aux conseils d'administration est d'environ 20 %. C'est un peu le même chiffre en ce qui concerne les conseils d'administration de grandes sociétés cotées en bourse.
    Dans le gouvernement du Québec, ce pourcentage a augmenté parce qu'il a adopté une loi à cet effet et établi un quota il y a quelques années.
    Bref, c'est un enjeu persistant, malgré le fait qu'il y a une présence majoritaire de femmes dans les universités et les collèges.
    Ce que je veux vous dire ce matin, c'est que ce n'est pas un problème de bassin de compétences. Je suis convaincue que toutes les compétences existent, principalement dans le domaine des arts. Il y a un problème de bassin de compétences dans le secteur des sciences et du génie, car moins de femmes font des études dans ce domaine, et cela représente un enjeu. Dans tous les autres domaines, cependant, par exemple la médecine, le droit et l'administration, les femmes sont présentes et elles sont compétentes, même si on entend dire qu'on ne trouve pas toujours de femmes pour occuper certains postes.
    Il y a aussi une perception selon laquelle l'égalité est atteinte dans les secteurs féminisés. Les gens me demandent d'ailleurs pourquoi je travaille là-dessus, puisqu'il y a plein de femmes dans les arts, les bureaux d'avocats, les hôpitaux. C'est vrai, mais elles ne sont pas représentées suffisamment dans les postes de décision. Vous savez comme moi qu'il y a encore des iniquités salariales importantes, et ce, pour toutes sortes de raisons dont on pourra reparler. Il y a encore beaucoup de choses à faire à cet égard. Oui, on a l'impression que la parité existe, mais dans les faits, ce n'est pas encore le cas.
    Quand je rencontre des présidents, des présidentes ou des membres de conseils d'administration, ils disent tous être en faveur de l'égalité et de la diversité. Le discours, c'est très intéressant. Je n'ai jamais entendu personne dire qu'il était contre cela. Par contre, quand on demande aux assemblées d'actionnaires, à des membres de conseils d'administration ou aux associations qui gravitent autour de poser des gestes concrets, c'est une autre histoire. Il y a des choses qu'on pourrait faire; je pourrai y revenir plus tard.
    On a pensé que la nomination de femmes aux conseils d'administration aurait un grand effet sur la haute direction des organisations, mais ce n'est pas le cas. Mon collègue Jean Bédard et moi menons actuellement des études sur la parité au sein des conseils d'administration et nous suivons les statistiques. La situation est stagnante, sauf au gouvernement et dans les sociétés d'État.
    Les gens nous disent que c'est facile de nommer des gens à des conseils d'administration, mais que le vrai défi se situe au niveau de la haute direction des organisations, parce que c'est surtout là que les décisions se prennent. Je ne dis pas que les conseils d'administration ne sont pas importants, loin de là, mais le gros du travail se fait beaucoup au niveau de la haute direction des organisations. Les deux ne vont pas nécessairement de pair.
    Par ailleurs, les femmes ne sont pas automatiquement profemmes. On me dit souvent que, puisqu'on a nommé des femmes, c'est réglé. Je dis souvent que si on ne change pas le système et les pratiques organisationnelles, même si des femmes auront été nommées, il n'y aura pas nécessairement de changement. C'est un peu la même chose en ce qui concerne la diversité. Si le moule reste le même, cela ne changera pas. Cela ne veut pas dire automatiquement que les femmes feront la promotion de sujets différents et qu'elles auront une influence différente. Des gens m'ont dit avoir nommé des femmes et que, heureusement, cela n'avait rien changé.
    Les conseils d'administration sont des organisations assez traditionnelles. Si on veut de vrais changements, il faut que les gens qu'on y nomme veuillent faire de vrais changements et travailler dans un vrai contexte de diversité et d'égalité.
    En outre, il y a clairement un manque de suivi des données. Lorsque nous demandons des données aux organisations, ce qui inclut de grandes sociétés, nous avons de la difficulté à obtenir le pourcentage de femmes à la haute direction et à connaître l'évolution du pourcentage de femmes au sein des conseils d'administration. C'est important et c'est ce que nous faisons présentement: nous suivons les données pour déformer la perception d'égalité qu'on retrouve constamment lorsque les gens croient que la question est réglée.

  (0915)  

    J'aborde maintenant la deuxième question: pourquoi ne demande-t-on pas aux femmes de se joindre aux conseils d'administration?
    Il y a encore beaucoup de stéréotypes. C'est incroyable le nombre de stéréotypes qui existent selon lesquels les femmes sont comme ceci et les hommes sont comme cela.
    Il y a beaucoup de stéréotypes qui sont liés à la conciliation travail-famille. Certaines personnes sont un peu lasses d'en entendre parler, mais il faut effectivement en parler parce que ce n'est pas réglé.
    C'est un enjeu majeur pour les femmes, mais aussi pour les hommes, notamment les jeunes hommes, comme on l'entend de plus en plus. Les gens manquent de temps. Siéger à un conseil d'administration, c'est un surplus qui s'ajoute à d'autres activités, bien souvent. Les postes de direction demandent qu'on y consacre du temps. Parfois, les gens n'accepteront pas un poste de décision parce qu'ils se disent qu'ils ont déjà un travail, une famille, et donc qu'ils n'ont pas le temps d'en faire plus.
    Il y a donc cette perception. On ne va pas chercher à recruter certaines femmes, parce qu'on se dit qu'elles sont déjà assez occupées, qu'on ne peut pas leur demander cela en plus. Il y a aussi des femmes qui s'excluent elles-mêmes en se disant qu'elles sont assez occupées, qu'elles ne veulent pas en faire davantage, par égard pour leur conjoint, et que tout cela sera difficile à concilier.
    Par ailleurs, il y a des stéréotypes liés au déficit des compétences. J'entends encore des propos selon lesquels les femmes manquent de leadership, ont de la difficulté à communiquer et n'ont pas assez de connaissances dans le domaine. Comme je vous le disais tantôt, je ne crois plus ce discours. Franchement, je pense qu'on n'en est plus là. Des compétences, il y en a énormément.
    Il faut aussi arrêter de renforcer les stéréotypes selon lesquels les femmes sont plus humaines et plus ouvertes au dialogue, ou selon lesquels les hommes sont plus ceci ou cela. Ce genre de discours renforce des stéréotypes, et cela ne nous mène pas très loin. Il faut plutôt travailler ensemble et arrêter de confiner les gens dans des rôles prédéterminés, par exemple les femmes au sein de comités de ressources humaines.
    On a aussi le réflexe de s'adresser aux personnes de son réseau. C'est courant dans les conseils d'administration: on va demander à ceux qu'on connaît, parce que c'est ce en quoi consiste le processus de nomination. Il faut donc renforcer de vrais profils de compétences à l'aide de vrais mécanismes de nomination. Cela aide énormément à sortir du bassin. Il y a des présidents et des présidentes de conseils d'administration qui m'ont dit qu'ils pouvaient trouver facilement quelqu'un en deux ou trois jours, mais que cela risquait de leur prendre deux ou trois semaines s'il fallait qu'ils trouvent des femmes ou des gens en particulier dans certaines communautés. C'est parfois plus long, mais il faut faire l'effort de sortir de ses réseaux.
    J'ai oublié de mentionner le discours sur la compétence. On entend souvent certaines personnes dire qu'elles ne choisissent pas les candidats en fonction du fait qu'ils sont des femmes, des jeunes ou des gens d'autres origines, mais plutôt en fonction de leurs compétences. Toutefois, ce discours sur les compétences nie un problème. Ce n'est pas parce qu'on choisit un homme ou une femme qu'on parle de compétences. Dans le fond, il faut reconnaître que les gens sont compétents, mais qu'à présent, il faut palier des inégalités au sein des conseils d'administration et qu'à un moment donné, il faut faire des choix précis. Cela ne veut pas dire que les gens ne sont pas compétents pour autant.
    Il y a aussi une rotation limitée des postes. Il faut en être conscient. Des gens m'ont demandé combien d'années il faudrait avant d'atteindre un quota qu'on déciderait d'imposer. Il faut tenir compte de la rotation des postes, qui se fait tous les quatre ou cinq ans. Si on veut nommer une femme, il faut tenir compte de cela.
    En outre, on demande souvent aux mêmes personnes de siéger aux conseils d'administration, et c'est vrai pour les femmes aussi. Il faut donc diversifier le bassin de candidats.
    Quant à savoir quelles sont les mesures organisationnelles, je vais en parler rapidement. Je pense qu'il faut parler ouvertement de cet enjeu. Il faut adapter les critères de sélection à ce qu'on veut vraiment obtenir. Il ne s'agit pas nécessairement de réduire les exigences, mais parfois de les modifier selon les expériences traditionnelles des femmes et des hommes aussi. Il faut permettre à tout le monde de se former à la gouvernance des conseils. Il faut arrêter de penser qu'on va seulement former les femmes parce qu'elles manquent de compétences. Il faut travailler sur les mesures organisationnelles plutôt que sur les stratégies individuelles.
    Enfin, que peut-on faire pour favoriser la parité? Il y a quelques moyens.
    Il faut collecter des données, comme je l'ai dit.
    Il faut éviter de travailler uniquement sur les stratégies individuelles. Arrêtons de dire que c'est le problème des femmes. C'est le problème des organisations. C'est ce que je voulais faire valoir ce matin.
    Avoir des mesures législatives donne des résultats un peu plus tangibles que le simple fait d'expliquer pourquoi l'organisation ne compte pas de femmes. Cela ne fait pas augmenter beaucoup la parité.
    Il faut éviter les recettes magiques.
    Il ne faut pas miser uniquement sur les conseils d'administration. J'en ai parlé.
    Il faut amener les organisations, les dirigeants et les dirigeantes à revoir leurs pratiques, et pas seulement demander aux femmes de s'adapter.
    Il faut prendre en compte l'impact de la maternité. Cela fait partie de la réalité. Dans un milieu culturel, il y a des gens qui ont des horaires atypiques, qui ont de la difficulté à trouver des gardiennes ou des gardiens pour s'occuper de leur enfant.
    Il faut mettre en place des stratégies de communication visant à dévoiler le taux de féminisation des conseils d'administration des organisations. C'est important.
    Il faut diffuser les expériences innovantes. Présentement, je travaille beaucoup sur les bonnes pratiques, si cela vous intéresse. Je fais des études de cas. Beaucoup de gens font des choses intéressantes, et il faut que cela soit répertorié dans les organisations.

  (0920)  

    Il faut éviter de penser que les choses vont se régler d'elles-mêmes. Je n'ai pas l'air si vieille, mais cela fait 25 ans que je travaille là-dessus et les choses ne se règlent pas.
    Enfin, il faut travailler en partenariat avec les acteurs du milieu. Ce que j'entends tout le temps, c'est que les nouvelles générations, dans deux ou trois ans, vont régler la situation. Ce n'est pas vrai, parce qu'elles vont utiliser le même moule. Si on ne travaille pas sur les organisations, les changements seront plus limités.
    Merci.

  (0925)  

    Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant commencer la période de questions et de réponses. Les intervenants disposeront de sept minutes.
    Nous commençons par vous, monsieur Breton. Je crois savoir que vous allez partager votre temps de parole avec M. Virani.
    Exactement.
    Je remercie grandement chacun des témoins. Je remercie Mme Downey et Mme Allin de leurs recommandations, ainsi que Mme Rosenstock. Par contre, comme je ne dispose que de trois minutes et demie, je vais m'adresser à Mme Brière.
    Je vous aurais bien écoutée pendant les trois heures que durent vos cours. Cela dit, nous avons encore quelques minutes ensemble.
    Je m'intéresse particulièrement à la performance des entreprises. Évidemment, nous sommes ici pour parler de la parité au sein des conseils d'administration des sociétés d'arts et de culture. Je ne sais pas si vous avez été en mesure d'en prendre connaissance, mais certaines études réalisées démontrent que le nombre de femmes au sein des conseils d'administration est directement proportionnel à la qualité ou à la performance des entreprises.
    J'aimerais entendre vos commentaires à ce sujet. Vous avez trois minutes pour en parler.
    Je vais vous répondre en trois secondes: c'est vrai.
    Honnêtement, je ne comprends pas pourquoi il faut justifier cela. Pourquoi les femmes ne seraient-elles pas performantes et n'aideraient-elles pas à améliorer la performance des entreprises? Poser la question autrement, c'est y répondre.
    Dans le fond, ce genre d'études évaluent le pourcentage de femmes et le chiffre d'affaires. Les grands chercheurs vont dire que ce lien de causalité est contestable. D'autres études essaient de démontrer que, finalement, ce lien n'est pas si fort qu'on le croit, car les résultats sont parfois différents quand on examine d'autres conseils d'administration où il y a des femmes.
    Personnellement, je suis convaincue que la diversité, l'égalité et la présence des femmes permettent d'améliorer la situation. Beaucoup de gens m'ont dit qu'ils n'allaient pas revenir à des conseils d'administration uniquement composés d'hommes blancs de 50 ans. Je n'ai rien contre les hommes de ce profil, je les aime beaucoup, mais on veut des gens ayant des expériences diversifiées. C'est vrai pour les femmes et pour d'autres groupes. Cela va de soi. Dans leur discours, les gestionnaires vont dire que c'est par là l'avenir, la rentabilité, la performance, la durabilité. C'est ce qui fait qu'une compagnie est socialement responsable.
    Je suis tout à fait d'accord là-dessus. Il faut déployer de l'énergie pour y arriver, plutôt que d'essayer encore de convaincre les gens que les femmes sont performantes. Je pense que cela va de soi.
    Pour avoir gravité autour de certains conseils d'administration, je peux dire que la mise en place de politiques claires au sein de ces conseils d'administration a amélioré les choses et mené à des résultats.
    Vous avez parlé de mesures législatives que le gouvernement pourrait prendre, par exemple adopter certaines lois. Ce sont de bonnes choses. Toutefois, à mon avis, les organisations doivent se prendre en main, mettre en place des politiques au sein de leur conseil d'administration et les respecter.
    Je voudrais vous entendre là-dessus.
    Vous avez tout à fait raison.
    Fixer un quota est une mesure tout à fait justifiée, correcte et efficace, mais ce n'est pas la seule. Si on ne fait que fixer des quotas, il y aura effectivement des nominations, mais, après quelques années, si les organisations n'ont pas mis en place quelque chose de durable, on va être obligé de recommencer.
    C'est sûr que si l'on fixe un quota, il y aura des femmes qui siégeront aux conseils d'administration. C'est un bon point de départ. Toutefois, si on veut voir de vrais changements au sein d'une organisation, il faut que les dirigeants veuillent changer les pratiques et favoriser un environnement de travail qui fera que les femmes vont demeurer dans l'organisation et qu'elles vont occuper des postes de décision.
    Je vais vous donner un exemple. Présentement, je travaille beaucoup avec les bureaux d'avocats...
    Je vous rappelle que le député partage son temps de parole avec M. Virani, alors vous devez être brève.
    D'accord. Je vais simplement terminer ma pensée.
    Il y a un très grand bassin de femmes avocates. Les facultés de droit regorgent de femmes. Pourtant, il n'y a presque pas de femmes dans les grands cabinets d'avocats.
    Même s'il y a un bassin de femmes, il faut les nommer et les garder. C'est un défi.
    Merci beaucoup.
    Monsieur Virani, vous avez la parole.
    Merci beaucoup à tous les témoins de leurs présentations.

[Traduction]

    Mes questions s'adresseront à l'ACTRA, et plus précisément à Ferne. Il y a un élément subjectif, car Ferne est une électrice de ma circonscription.
    Ferne, je vous souhaite la bienvenue au Comité. Nous sommes très heureux de votre présence. Manifestement, il y a de nombreux créateurs et artistes à Parkdale—High Park, et vous êtes l'une des plus prolifiques en raison de vos contributions. Nous vous remercions de vos contributions à l'ACTRA et maintenant à la Fédération internationale des acteurs, mais également pour votre travail au sein des Canadian Unions for Equality on Screen. J'aimerais vous poser quelques questions, si j'ai suffisamment de temps.
    Ma première question concerne votre deuxième recommandation, qui demande des exigences plus serrées pour les entités qui reçoivent du financement du gouvernement. Comme vous le savez, c'est une priorité de la ministre Joly. En effet, en janvier dernier, elle a annoncé l'examen des subventions et des contributions accordées par Patrimoine canadien à diverses entités d'acteurs pour veiller à ce qu'elles établissent des milieux de travail exempt de harcèlement. Cela a également été suivi, la semaine dernière, d'une annonce du Conseil des arts du Canada selon laquelle 500 000 $ seront offerts à différents organismes du pays pour faire la promotion des milieux de travail exempts de harcèlement.
    J'aimerais savoir si vous pensez que ce sont des pas dans la bonne direction. Deuxièmement, croyez-vous qu'une méthode ou un ciblage particulier devrait être utilisé pour ces fonds de 500 000 $, plus précisément pour répondre à certains des besoins que vous avez mentionnés dans votre exposé?

  (0930)  

    Je vous remercie d'avoir posé votre question. Je suis fière d'être de Parkdale—High Park.
    En ce qui concerne votre première question, oui, nous observons que le gouvernement s'engage dans la bonne direction. Nous avons abordé le problème du harcèlement sexuel dans l'industrie à l'échelle de l'industrie. Nous sommes reconnaissants de tout ce que le gouvernement fédéral fait pour atteindre cet objectif.
    Il est un peu difficile de déterminer exactement comment le Conseil des arts du Canada devrait faire son travail. Je crois que cet organisme mène ses propres analyses très efficacement. Nous sommes tout simplement heureux d'observer que des mesures directes et concrètes sont prises. Nous sommes des activistes. Nous devons obtenir du changement. Ce changement doit être systémique et à long terme.
    Nous ne prétendons pas que nous réussirons à faire changer les choses du jour au lendemain. Toutefois, les petits pas que nous faisons tous, dans la société et dans l'industrie, sont des pas dans la bonne direction, et dans 100 ans, nous ne croirons même pas qu'il a fallu avoir cette conversation, car les femmes seront respectées, elles seront respectées dans le milieu de travail, elles dirigeront des conseils d'administration, elles occuperont de nombreux postes de leadership et la société aura trouvé un équilibre qui lui manquait depuis très longtemps.
    Parfait. Merci beaucoup.
    La parole est maintenant M. Eglinski.
    J'aimerais remercier nos témoins d'aujourd'hui.
    J'aimerais d'abord m'adresser à Sophie Brière.
    Ce que vous avez dit au sujet de la perception de l'égalité m'intéresse beaucoup. Il y a quelques années, lorsque j'étais maire d'une ville de la Colombie-Britannique, nous devions trouver un chef de la direction ou un gestionnaire de la ville. Plusieurs femmes occupaient des postes de cadres supérieurs au sein de la municipalité, et je souhaitais examiner la possibilité d'embaucher une femme plutôt qu'un homme pour le poste de chef de la direction. J'ai embauché une agence de recrutement, et il a été extrêmement difficile de trouver des femmes qui pourraient poser leur candidature.
    L'un des plus gros problèmes consistait à trouver une personne qui pouvait quitter le poste qu'elle occupait à ce moment-là et qui avait accumulé suffisamment d'expérience pour faire le travail que nous lui demandions de faire. En fait, nous n'arrivions pas à trouver une telle personne. J'ai finalement réussi à trouver une femme à la retraite qui a accepté de revenir sur le marché du travail pour assumer ce rôle, et je suis heureux de préciser qu'elle a fait du très bon travail. Elle occupe toujours ce poste, 10 ou 11 ans plus tard.
    Pensez-vous qu'en raison du caractère unique de l'aspect féminin... Il pourrait s'agir d'une épouse, d'une mère, comparativement à l'homme qui se déplacera pour occuper un nouveau poste, et c'est pourquoi elles hésitent peut-être à faire ce gros changement.

[Français]

    Je pense que les femmes hésitent davantage à passer à l'action en raison de la conciliation travail-famille. Ce n'est pas une question de compétence. Les femmes se demandent comment elles pourront réaliser ces mandats tout en s'occupant de leurs enfants. Toutes les études démontrent qu'en dépit du partage des tâches domestiques, ce sont encore les femmes qui portent la plus grande part de cette responsabilité. C'est un réflexe chez les femmes. Cela s'observe beaucoup sur le plan de la mobilité des femmes, que ce soit à l'échelle régionale, nationale ou même internationale, comme vous l'avez bien dit. Les femmes s'excluent elles-mêmes lorsqu'il est question de faire des séjours à l'étranger, de déménager ou d'accepter de nouveaux défis, car elles craignent de ne pas pouvoir concilier ces défis et la famille.
    Si on ne trouve pas de façons de concilier le travail et la famille, cette situation va continuer d'être un obstacle pour les femmes. Je pense que c'est cette situation qui est en cause, davantage que la compétence ou l'intérêt. Effectivement, je ne pense pas qu'il y ait un manque d'intérêt.

  (0935)  

[Traduction]

    Merci.
    Madame Rosenstock, vous venez des États-Unis.
    Oui. Je suis au Canada depuis maintenant 11 ans.
    Vous êtes ici depuis 11 ans, et je crois que vous avez mentionné quelque chose au sujet de trois ou quatre autres grandes institutions artistiques du Canada dont les PDG viennent de l'extérieur du Canada. L'un des autres témoins a mentionné plus tôt que nous avons très peu de gestionnaires d'ici qui s'occupent de production de plus d'un million de dollars comparativement au nombre de gestionnaires qui s'occupent de productions aux budgets plus restreints.
    Pouvez-vous m'expliquer la raison de cette situation? Pourquoi embauchons-nous à l'extérieur du Canada? Y a-t-il un manque de compétences ou de qualifications au pays ou existe-t-il des compétences uniques que vous allez chercher dans d'autres pays, car vous faites cela depuis un peu plus longtemps?
    Je ne pense pas que c'est lié aux compétences. Je crois que c'est réellement le manque de formation, le manque de formation de la relève ici qui permettrait de confier ces postes à ces gens. Selon ce que je sais, des femmes dirigent des musées plus petits et des musées de taille moyenne et d'autres institutions artistiques d'un bout à l'autre du pays, mais pas aux plus hauts échelons. Je crois que puisque personne ne reçoit la formation nécessaire pour assurer la relève de ces emplois, les agences de recrutement cherchent habituellement à l'extérieur du pays. Elles cherchent aux États-Unis, ainsi qu'au Royaume-Uni.
    Je sais que vous avez récemment parlé à Heidi Reitmaier du Museum of Contemporary Art Toronto Canada. C'est une Canadienne. Elle est revenue au Canada pour occuper le poste de directrice du Museum of Contemporary Art Toronto Canada, mais elle a reçu la formation nécessaire ailleurs. Elle est allée aux États-Unis et au Royaume-Uni.
    Je crois qu'afin d'acquérir cette expérience, à ma connaissance, les gens doivent quitter le Canada, acquérir cette expérience et ensuite, ils l'espèrent, revenir pour occuper un emploi, mais il y a peut-être une façon d'offrir cette formation en leadership ici.
    Je ne crois pas que c'est une mauvaise chose d'embaucher des personnes à l'extérieur du Canada. Je ne crois pas que c'est une mauvaise chose d'embaucher des Canadiens et des Canadiennes qui ont suivi une formation ailleurs. Je crois qu'il peut certainement être avantageux d'embaucher des gens qui ont voyagé, qui ont vécu à l'étranger et qui ont reçu une formation ailleurs. En effet, ces personnes peuvent apporter leurs connaissances et leurs réseaux au Canada, mais à ma connaissance, je crois qu'il y a un manque de leadership pour confier ces postes à ces personnes au pays.
    J'aimerais revenir au témoin qui a mentionné les projets d'un million de dollars, et le fait qu'il y avait plus d'hommes que de femmes dans les échelons supérieurs.
    Pourriez-vous expliquer un peu plus en détail pourquoi, à votre avis, cela se produit?
    Ce sont des renseignements obtenus par l'entremise de l'étude menée par Téléfilm Canada. Ce que nous avons conclu et ce qui a été indiqué, c'est qu'il y a une plus grande diversité des genres et une plus grande inclusion dans les films qui ont des budgets d'un million de dollars ou moins. En effet, les femmes réussissent beaucoup plus à percer dans ce milieu, mais lorsque le budget est plus élevé, les circonstances changent de façon spectaculaire.
    Une étude menée au Royaume-Uni indique que 4 % des directeurs de productions dotées d'un budget de ce niveau sont des femmes. C'est donc un taux de réussite de 96 % pour les hommes et de 4 % pour les femmes. Je crois qu'une grande partie de cette situation s'explique par ce que disait Sophie au sujet du niveau de leadership, de la formation de la relève et des occasions offertes. Ce n'est pas que les femmes ne reçoivent pas la formation nécessaire pour faire ce travail; en fait, elles sont très bien formées et un grand nombre d'entre elles possèdent ces compétences.
    Merci, madame la présidente

[Français]

    La parole est maintenant à M. Nantel.
    Je remercie beaucoup tous les témoins.
    Je suis très heureux de voir Mme Allin et Mme Downey. Cela faisait longtemps que nous nous étions vus.

[Traduction]

    Merci beaucoup d'être ici aujourd'hui.
    En fait, j'aimerais remercier ma collègue, Mme Dzerowicz, d'avoir proposé ce sujet d'étude au Comité permanent du patrimoine canadien. Je crois que c'est vraiment le bon moment.

[Français]

    Dans l'édition de La Presse de ce matin, d'ailleurs, il y a un article de Mario Girard qui mentionne, comme le faisait Mme Rosenstock, que le Conseil des arts du Canada est évidemment en faveur de la parité. Il cite Simon Brault, du Conseil des arts du Canada: « La question de la place des femmes dans le domaine des arts, on se la pose actuellement. » On indique que Simon Brault insiste pour dire « qu'un travail important doit être fait dans le domaine de la musique classique, où les compositeurs sont très majoritairement masculins ». On ajoute ceci, et c'est très intéressant: « Ces mesures s'ajouteraient à la pratique des auditions à l'aveugle, adoptée par la plupart des grands orchestres classiques au pays. » Je ne savais même pas que cela existait. Il semble que cela « donne des résultats visibles ». M. Brault confie que le Conseil des arts du Canada « doit arriver avec un plan très bientôt » en matière de parité.
    Madame Brière, je vous remercie beaucoup de votre dynamisme. De toute évidence, tout le monde était très emballé par vos constats et vos analyses, et nous avons très hâte de lire vos documents. Vous soulevez par contre le fait que nommer des femmes aux conseils d'administration n'est pas la panacée pour atteindre la parité. D'ailleurs, je tirais mon chapeau à ma collègue Mme Dzerowicz à ce sujet. Vous suggérez plutôt d'aller vers la haute direction, c'est-à-dire les dirigeants et les conseils de direction.
    Vous avez également évoqué la conciliation travail-famille, et je crois sincèrement qu'une offre plus large de services de garde au Canada serait certainement un pas dans la bonne direction. En soi, on peut dire que cela aiderait certainement les femmes à prendre plus de place dans les postes de haut niveau. C'est aussi une incitation, et non un frein. Je suis allé faire un tour au Danemark et en Suède, cet automne, et j'ai constaté à quel point les services à la petite enfance y étaient beaucoup utilisés par les hommes. Je voyais beaucoup de papas sortir avec leurs enfants. C'était frappant; je n'ai pas passé mon temps à les dénombrer avec un compteur numérique, mais c'était évident.
    J'aimerais saisir l'occasion d'avoir parmi nous aujourd'hui des représentants de l'ACTRA pour leur poser une question. Dans toutes vos observations, une chose m'a frappé. Vous avez donné l'exemple des firmes d'avocats. La relève est là, mais il y a effectivement une espèce de modèle sociétal qui pourrait décourager cette aspiration à un poste de direction. Je pense que les gens de l'ACTRA sont directement collés aux plateaux de tournage et qu'ils peuvent le constater.
    Croyez-vous que l'on pourrait faire mieux dans les modèles que l'on montre à la jeunesse à la télévision et au cinéma? Devrait-on imposer des critères?
    Je suis sûr que Mme Downey a une position là-dessus, elle qui n'arrête pas de réclamer de meilleurs rôles pour tous les membres de son syndicat.
    Nous pouvons peut-être commencer par les témoins qui sont à distance, ce serait plus simple.

  (0940)  

[Traduction]

    Je vais répondre très rapidement. Nous croyons certainement la philosophie du Geena Davis Institute on Gender in Media selon laquelle si une femme peut voir quelque chose, elle peut aussi le faire. Il s'ensuit que Heather et moi-même, ainsi que notre syndicat, avons travaillé pour créer des occasions à tous les échelons, notamment à la direction du syndicat — Heather et moi-même avons toutes les deux été dirigeantes — pour diriger des acteurs et faire la promotion de changements de politique aux échelons les plus élevés. C'est une inspiration qui part d'en haut et qui descend tous les échelons pour la société, pour nos membres et pour les films.
    Nous espérons que notre syndicat a créé, pour les jeunes artistes émergents, des occasions qui leur disent: « C'est votre monde. Vous dirigerez le monde. Si vous souhaitez devenir le prochain président ou la prochaine présidente de ce syndicat ou diriger votre propre compagnie théâtrale ou jouer dans votre propre film, commencez dès maintenant. Vous êtes le changement. Vous êtes tout cela. »
    Nous offrons du mentorat. Nous créons des occasions. Toutefois, c'est l'expérience qui rend une personne heureuse de passer à l'étape suivante, n'est-ce pas? Il faut d'abord avoir une occasion, et les hommes profitent d'un tel avantage systémique dans notre industrie. À 36 ans, les femmes qui travaillent comme actrices dans notre industrie ne sont plus autant recherchées. Nous voyons la trajectoire. Des occasions continuent d'être offertes aux hommes de 70 ans et plus.
    Donc, lorsque nous disons que l'éducation peut être un changement ou un facteur, l'éducation est beaucoup plus insidieuse dans le milieu du divertissement. Elle offre aux femmes une perspective qui ne se trouve pas officiellement dans les livres, mais ce que vous voyez, c'est ce que vous percevez et c'est ce qui oriente les filles.
    Oui, et nous devenons donc des modèles de rôle, et cela modifie les histoires que nous racontons. Au bout du compte, cela devient vraiment... car nous voulons obtenir un changement systémique et à long terme. Nous voulons que les membres de la société se comportent différemment les uns avec les autres, et le désavantage est trop systémique depuis trop longtemps. Toutes ces choses doivent se produire en même temps — les occasions de leadership et ce que nous voyons.

[Français]

    Madame Brière, pensez-vous que le secteur du divertissement ait un rôle à jouer?
    Oui. J'aurais vraiment beaucoup de choses à dire, tellement les changements systémiques sont complexes. J'aimerais pouvoir vous indiquer ce qu'il faut faire et vous proposer un petit guide en 10 étapes, mais le fait est que, pour que certaines personnes occupent des postes de décision, il faut préparer tout le secteur et toute l'organisation. Or, cela prend 20 ans. J'ai étudié des cas où la proportion de femmes, qui était au départ de 20 %, était passée à 40 % ou 50 %. Par contre, cela avait pris une vingtaine d'années.
    Tout d'abord, il faut déterminer comment recruter les personnes et comment les former à leur arrivée. Souvent, une fois les gens recrutés, ceux-ci sont laissés à eux-mêmes. On leur demande qu'ils s'organisent eux-mêmes, sous prétexte que ce sont eux qui ont voulu faire ce métier. Or, il ne s'agit pas nécessairement de gens qui font ce métier depuis toujours.
    Ensuite, il faut voir quelles conditions de travail on leur offre. Dans tous les secteurs que j'ai étudiés, les gens qui avaient un premier enfant perdaient de la crédibilité et leur progression était ralentie. Je m'excuse de le dire, mais c'est la réalité.
    À l'heure actuelle, j'étudie le cas des policiers et des policières au Québec. Il y a là un très grand recul. En effet, lorsque les policières ont un premier enfant, on dit qu'elles ne sont pas carriéristes et qu'elles ne sont pas de vraies policières. Si elles en ont un deuxième, c'est pire encore. Si elles en ont un troisième, c'en est fait de leur crédibilité. Il faut savoir qu'elles continuent à accumuler de l'ancienneté même si elles ont été parties pendant trois ans sur un total de six ans, par exemple. Tous les autres policiers sont très frustrés à l'idée qu'on offre à ces femmes un poste de décision alors qu'elles ont été à la maison pendant trois ans. Selon eux, elles n'avaient qu'à ne pas avoir d'enfants. C'est ce que les gens nous disent.
    Il reste que c'est un choix de société. C'est la réalité: les femmes ont des enfants.
    Le problème se pose dans les bureaux d'avocats également. Les femmes qui ont des enfants perdent leurs dossiers. Ce milieu est si compétitif que le fait de vouloir des enfants est associé au fait de ne pas être carriériste. On considère que ce sera à ces femmes de se débrouiller lorsqu'elles reprendront le travail. Dans ce système, c'est la performance à tout prix.
    Pour arriver à vraiment changer les choses, il faut se concentrer sur ces valeurs. Si les personnes ont des enfants ou n'ont pas oeuvré dans le milieu du cinéma depuis 25 ans, il faut leur donner une chance, les accompagner et leur offrir de bonnes conditions de travail. Quand elles reviennent au travail, il faut les suivre, les intégrer, les aider et les accompagner vers des postes de décision. Vous verrez, cela va fonctionner pour les femmes, mais aussi pour les membres de communautés culturelles.

  (0945)  

    Merci beaucoup.
    C'est ce à quoi il faut travailler. Cela demande du temps.
    C'est bien dit.

[Traduction]

    La parole est maintenant à Mme Dzerowicz. Elle a trois minutes.
    J'aimerais remercier les témoins de leurs excellents exposés.
    J'aimerais saluer les témoins qui comparaissent par vidéoconférence.
    Bonjour, Ferne. Bonjour, Heather. Je suis heureuse de vous revoir.
    Étant donné que j'ai seulement trois minutes, je poserai quelques brèves questions. Ferne et Heather, vous avez formulé de merveilleuses recommandations. La deuxième suggérait que les groupes qui reçoivent du financement devraient recevoir du financement pour assurer l'égalité entre les sexes dans tous les rôles. Souhaitez-vous suggérer un échéancier particulier pour accomplir cela? Devrions-nous indiquer que nous devrions prévoir un échéancier ou devrions-nous indiquer que nous voulons simplement suivre les progrès?
    Ma deuxième question concerne le suivi et les rapports publics sur les progrès accomplis dans le cadre de cette recommandation. Croyez-vous qu'il suffit de publier des rapports publics à cet égard ou êtes-vous d'avis qu'une personne doit assumer un rôle de leadership pour exercer une surveillance et encourager les gens à s'efforcer vraiment d'atteindre...? Faut-il le dire publiquement ou faut-il...? Je ne suggère pas de fixer des quotas, mais qu'une personne assume un rôle de leadership pour exercer des pressions, afin d'obtenir des résultats...
    En ce qui concerne les rapports publics, nous collaborons étroitement avec les universitaires. La transparence des rapports fait partie intégrante du partage de la vérité avec l'ensemble de la société que nous tentons de changer.
    Vous avez tout à fait raison. De plus, il ne faut pas que ce soit seulement un petit point isolé dans un rapport quelconque. Il faut mener une activité systémique et permanente. Les politiques doivent changer. Les priorités doivent changer. Si l'inclusion et la diversité représentent des priorités, alors tout... Chaque jour, il faut faire une planification stratégique.
    Nous n'avons pas parlé d'un échéancier, mais j'aimerais faire référence à la campagne 2xMore, un projet lancé par Rina Fraticelli au sein de l'organisme Women in View en collaboration avec la Guilde canadienne des réalisateurs.
    J'aimerais souligner que dans les productions d'action réelle dirigées par des femmes, 55 % des quatre rôles principaux ont été accordés à des femmes, comparativement à 41 % dans les productions dirigées par des hommes. De plus, 58 % des quatre rôles principaux de productions écrites par des femmes ont été accordés à des femmes, comparativement à 40 % dans les productions écrites par des hommes.
    La campagne 2xMore a été conçue pour doubler le nombre de femmes dans les postes de direction de séries et de films sur une période de trois ans. Après deux ans, des progrès importants avaient été réalisés dans ces systèmes. C'était...

  (0950)  

    Je dois vous interrompre, car malheureusement, mon temps est écoulé. J'aimerais faire deux commentaires et je terminerai en 15 secondes.
    Le premier commentaire s'adresse à Mme Brière. À titre de femme qui a travaillé surtout dans les affaires et maintenant dans des postes de haute direction dans le domaine politique, et de personne qui fait la promotion des femmes dans des rôles de cadre depuis très longtemps, j'ai trouvé trois éléments supplémentaires à ce que vous avez déjà présenté. Si vous avez d'autres commentaires, je vous serais reconnaissante de nous les envoyer par écrit.
    Selon moi, ce n'est pas seulement de mentorat, mais de parrainage dont on avait réellement besoin. Si les femmes ne sont pas parrainées et qu'on ne les invite pas à la conversation, elles n'iront nulle part. Il y a l'encadrement. Cela va plus loin que la formation. Nous devons être encadrées. Il y a de nombreuses faiblesses. Les hommes le font automatiquement dans le monde des affaires. Ce n'est pas un processus automatique pour les femmes.
    La dernière partie concerne les femmes qui soutiennent les autres femmes. Vous en avez fait brièvement mention dans votre rapport, mais les femmes n'appuieront pas et ne feront pas participer automatiquement d'autres femmes.
    Je ne sais pas si vous avez d'autres commentaires à formuler. Vous ne pourrez pas les formuler maintenant, mais si vous êtes en mesure de répondre à cette question, cela m'intéresserait.
    Enfin, je tiens à remercier chaleureusement Mme Rosenstock. Vos commentaires sur la diversité sont très pertinents et nécessaires, et nous en tiendrons certainement compte dans le cadre de nos recommandations.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    La séance sera suspendue très brièvement. Je demanderais aux membres du Comité de rester près de la table pendant le changement de témoins, afin que nous puissions continuer.
    Merci beaucoup.

    


    

  (0955)  

    Nous reprenons les travaux, car nous avons quatre témoins dans cette partie de la réunion, et notre temps est déjà un peu serré.
    Nous entendrons d'abord les témoins qui comparaissent par vidéoconférence.
    Nous avons Mme Schirle.
    Nous avons Mme Young.

[Français]

    Nous recevons également Mme Angèle Bouffard, de la YWCA Québec, et Mme Catherine Benoit, de Spira.

[Traduction]

    Madame Young, veuillez livrer votre exposé.
    On ne m'a pas donné de directives précises sur les questions que vous souhaitez que j'aborde, à l'exception de l'égalité entre les sexes et la représentation des deux sexes dans les conseils d'administration des organismes artistiques et culturels. Je parlerai donc très brièvement de certains enjeux et je serai heureuse de répondre à vos questions.
    Tout d'abord, je crois qu'il est manifestement important d'être préoccupé par la diversité de la représentation au sein de ces conseils d'administration, surtout ceux qui reçoivent du financement du gouvernement fédéral. La nature de la reddition de comptes que le gouvernement doit fournir à l'égard de la représentativité et de l'équité des deux processus, mais également à l'égard du résultat de la composition des membres du conseil d'administration, est primordiale. Plusieurs pays commencent à adopter des quotas et des cibles liés à l'égalité entre les sexes. En effet, l'un des commentateurs a parlé d'une fièvre des quotas qui s'étend à l'échelle mondiale. Nous observons l'utilisation de quotas dans les systèmes électoraux et, de plus en plus, au sein des conseils d'administration d'entreprises. Le Canada a donc introduit une mesure, mais la Norvège est réellement le chef de file dans ce domaine, car ce pays exige maintenant que les conseils d'administration publics et privés soient composés à 40 % de femmes, en plus de la représentation électorale équitable.
    Il y a manifestement plusieurs études sur le processus de ces dotations et sur l'augmentation du nombre de femmes et sur ce qu'on est en mesure de dire sur les changements de perception à l'égard des femmes dans les rôles de leadership, ainsi qu'en ce qui concerne le processus décisionnel dans un établissement particulier. Nous pourrions en parler davantage.
    Je me spécialise en droit constitutionnel, ainsi qu'en droit et en théorie de l'égalité. Manifestement, on soulève toujours de grandes préoccupations liées à la question de savoir si l'idée qu'une source extérieure détermine le nombre de femmes au sein des conseils d'administration soulève des problèmes d'égalité plutôt que de représenter une solution aux problèmes liés à l'égalité. Je crois que nos lois sur l'égalité indiquent clairement qu'on trouve un grand soutien, sur le plan constitutionnel, à l'égard d'une notion d'égalité substantive qui prévoit différents types de traitements au nom de l'égalité et qui appuie les mesures d'actions positives comme caractéristiques de l'égalité.
    Je pourrais m'arrêter ici et répondre aux questions. Je ferais valoir qu'il est parfaitement évident qu'il est viable d'inclure un certain type de règlement gouvernemental sur la composition des membres des conseils d'administration dans la Charte canadienne des droits et libertés. Certaines personnes iraient plus loin en faisant valoir que le gouvernement pourrait avoir une obligation de prendre des mesures en matière d'actions positives, dans le cadre de ses obligations internationales en matière de droits de la personne qui visent à assurer la pleine participation des femmes à la vie publique, afin de veiller à ce qu'il y ait une plus grande représentation des femmes et d'autres groupes sous-représentés, d'autres groupes liés à l'égalité, dans ces types d'institutions et au sein de ces types de conseils d'administration.
    Merci beaucoup.

[Français]

    Nous allons poursuivre avec Mme Benoit.
    Bonjour, chers membres du Comité. Cela me fait plaisir de contribuer à votre étude.
    Premièrement, je tiens à me présenter afin de mettre ma présentation en contexte.
    Je suis la directrice générale de Spira depuis maintenant neuf ans. Je suis détentrice d'un MBA en gestion internationale et en développement international de l'Université Laval. Je suis la présidente du conseil d'administration de la coopérative Méduse, la secrétaire du conseil d'administration du Pôle des entreprises d'économie sociale de la région de la Capitale-Nationale et co-vice-présidente du conseil d'administration de la Table de concertation de l'industrie du cinéma et de la télévision de la Capitale-Nationale.
    Avant-hier et aujourd'hui, vous avez entendu plusieurs grandes organisations et spécialistes vous faire un état de la situation impressionnant et vous parler de leur réalité. Spira est un organisme de taille moyenne avec un budget de 600 000 $. Cela me fait plaisir de vous présenter la réalité d'un organisme comme le nôtre. Ces organismes ne sont pas à négliger. Ils sont majoritaires et essentiels dans le portrait des organismes culturels canadiens.
    De son côté, Spira est une coopérative vouée au cinéma indépendant issue de la fusion, en 2015, de Vidéo Femmes et de Spirafilm, deux organismes qui existaient tous deux depuis près de 40 ans. Son mandat principal est de soutenir la production et la distribution de films, qu'il s'agisse de courts ou de longs métrages. La coopérative compte environ 150 membres. Chaque année, elle est impliquée dans plus de 60 films et rejoint un public de 400 000 personnes. Financée par les conseils des arts, la coopérative est sans but lucratif. Ses revenus sont constitués à environ 75 % de subventions.
    À la suite de la fusion, afin de conserver la mission de Vidéo Femmes, Spira a tenu à mettre au centre de ses valeurs l'équité hommes-femmes. Comment cela se traduit-il concrètement?
    Chez Spira, 50 % des projets soutenus sont réalisés par des femmes, et un souci de parité est présent au moment de la constitution de nos comités et de nos projets collectifs.
    Le conseil d'administration de Spira est composé de six membres artistes et de trois membres externes. Sur ces neuf postes, au moins quatre doivent être occupés par des femmes, et ce, de façon obligatoire.
    L'équipe de la coopérative compte dix employés: cinq hommes et cinq femmes. Le poste de la direction artistique est occupé par une femme depuis 2009 et le poste de la direction générale est occupé par une femme depuis 2008.
    Le conseil d'administration de Spira est paritaire depuis 2012-2013, et le quota est implanté depuis 2015-2016.
    Il va sans dire que la parité entre les sexes est une préoccupation constante au sein de la coopérative.
    Spirafilm, dont j'étais la gestionnaire, était déjà soucieuse de la parité entre les sexes. Notre fusion avec Vidéo Femmes nous a forcés à implanter de façon plus officielle des procédures qui allaient nous permettre de conserver l'équité hommes-femmes.
    Trois ans après la mise en place de ces mesures, je me rends compte que cette réflexion était nécessaire, car il est clair qu'il n'est malheureusement pas encore naturel de penser à la parité. Sinon, nous ne serions pas ici aujourd'hui. Il s'agit d'un réflexe qui s'apprend et qui se développe.
    La première mesure qui fut adoptée est le quota de femmes au conseil d'administration de Spira. En effet, minimalement, quatre des neuf postes doivent être occupés par une femme. Toutefois, inversement, le conseil d'administration ne pourrait être constitué que de femmes: un minimum de trois hommes doivent y siéger.
    Il va sans dire qu'au début, nous avons trouvé difficile de respecter ce minimum de quatre femmes. Nous avions des craintes: et si nous ne trouvions pas de femmes compétentes? L'ancienne présidente de Vidéo Femmes nous avait avertis que cela demanderait des efforts.
    Trois ans après la mise en place de ce quota, le mécanisme est devenu naturel et bien ancré dans les actions du conseil d'administration. J'en parlerai un peu plus tard, mais l'éducation reste un point majeur pour maintenir l'importance de la parité.
    Les efforts pour atteindre la parité sont balisés et nous nous sommes dotés d'outils et de mécanismes.
    La première méthode est la recherche active de candidates. Nous participons à des activités de recrutement telles que « Un C.A. à l'heure du thé », activité organisée par la Chambre de commerce et d'industrie de Québec. Nous avons aussi fait appel aux gens de notre réseau et les avons informés sur le profil des candidates recherchées, l'idée étant de ne pas attendre à l'assemblée générale annuelle des membres pour avoir des personnes intéressées à siéger au conseil d'administration.
    Nous avons décidé de mettre en place une matrice de compétences sous forme de tableau Excel, qui est d'ailleurs celle proposée par la YWCA, laquelle inclut non seulement des objectifs à atteindre en matière de parité, mais aussi d'autres critères tels que la jeunesse, les compétences et la diversité culturelle. Dans les prochaines semaines, un appel de candidatures sera lancé et nous nous assurons ainsi d'avoir un important bassin de candidatures lors de l'assemblée générale annuelle.
    L'un des avantages de cette matrice de compétences est de faire la publicité des besoins et d'en faire un outil afin d'attirer les femmes et de leur démontrer qu'elles ont la possibilité de se joindre à un conseil d'administration. Cela leur ouvre une porte et leur indique qu'elles peuvent se joindre à notre conseil d'administration et que nous avons besoin d'elles.

  (1000)  

    Une autre action mise en place est le mentorat. Spira participe au programme de mentorat de la YWCA pour les jeunes administratrices. Une jeune femme peut ainsi être en formation pendant une année en siégeant au conseil d'administration. Cette idée pourrait facilement être adoptée par plusieurs autres conseils d'administration de petites ou grandes organisations.
    Nous transmettons aux membres du conseil d'administration et aux membres du personnel cette valeur qu'est la parité, afin qu'il soit plus facile de l'atteindre et que tous et toutes deviennent des porte-parole en la matière. Lors des réunions du conseil d'administration et de l'assemblée générale annuelle, nous informons nos membres de tous les efforts que déploie Spira pour atteindre la parité. Nous le mentionnons également sur les réseaux sociaux de façon sporadique. Sensibiliser nos membres et notre public est pour nous une manière de contribuer à notre société afin qu'elle devienne plus égalitaire.
    Nous savons aussi que l'atteinte de la parité repose beaucoup sur les personnes en place. Il est donc primordial que les organismes incluent la parité dans leurs procédures afin d'assurer la pérennité.
    J'aimerais porter à votre attention un autre enjeu majeur lié à la parité des conseils d'administration, soit celui de la présidence.
    Que des femmes se joignent à un conseil d'administration, c'est une chose, mais qu'elles réussissent à occuper des postes de décision au sein de la direction, c'en est une autre.
    Chez Spira, nous nous sommes récemment rendu compte que nous n'avions jamais eu de présidente. Nous allons donc établir en juin prochain une coprésidence paritaire. Cela permettra de mettre en pratique la passation des pouvoirs et le codéveloppement des compétences. Une autre façon de procéder consisterait à établir une alternance entre les mandats de la présidence afin que le poste soit occupé par une femme sur une base régulière.
    Nous croyons que la mise en place de mesures de facilitation telles que la flexibilité des horaires, la possibilité d'emmener un enfant aux réunions et la participation aux réunions à distance, autant pour le conseil d'administration que pour le personnel, peuvent faciliter la parité.
    Toujours dans le but de faire la promotion de la parité, Spira a adopté, depuis la fusion, la rédaction épicène et la féminisation lexicale.
    Je vais maintenant dire quelques mots sur les postes de direction artistique au sein des organismes culturels.
    Nous ne pouvons passer sous silence la question difficile des bas salaires au sein des petites organisations et de la pénurie de main-d'oeuvre. Ce problème limite notre choix de candidats et de candidates. Nous favorisons les candidats ou les candidates les plus compétents. Toutefois, dans le cas où l'un des deux postes clés de direction serait déjà occupé par un homme, nous considérerions avec une attention particulière les candidatures de femmes. J'oeuvre dans le milieu artistique depuis maintenant neuf ans, et j'ai remarqué que, dans les petites organisations, c'étaient souvent des femmes qui occupaient les postes de direction artistique, voire de direction générale, tandis que, dans les grandes organisations, il en allait autrement. La charge de travail est la même, mais les salaires sont moindres.
    En terminant, je vous soumets les recommandations suivantes.
    Il faut travailler avec des organismes nationaux comme l'Alliance des arts médiatiques indépendants pour en faire des porte-parole et des intermédiaires.
    Il faut mettre en oeuvre des programmes pour former les gestionnaires et faire du mentorat auprès des femmes, même dans les petites et moyennes organisations.
    Il faut augmenter le financement des organismes pour leur permettre d'offrir des conditions de travail adéquates qui pourront attirer des femmes compétentes vers les postes de direction artistique.
    Il faut favoriser la mise en vigueur de quotas. Comme madame le mentionnait plus tôt, en Norvège et en France, des quotas ont été imposés dans les organismes publics, et les résultats sont positifs. Ici, au pays, la SODEC, l'ONF et Téléfilm Canada ont mis en vigueur des mesures de ce genre, et, jusqu'à maintenant, les résultats semblent très positifs.
    Enfin, nous recommandons de faire des études pour connaître l'état de la situation et d'en faire connaître les résultats.
    Merci beaucoup. J'espère que mes commentaires sauront alimenter votre réflexion.

  (1005)  

    Merci.

[Traduction]

    Nous sommes maintenant en communication avec Mme Schirle par voie de vidéoconférence. Pourquoi ne pas vous écouter pour être certains de pouvoir vous garder si jamais il y a des difficultés techniques?
    Je suis désolée qu'il y ait des difficultés techniques. Merci de me donner l'occasion de témoigner.
    De façon générale, quand je témoigne devant des comités, mon temps de parole est limité à cinq minutes. Par habitude, donc, je serai peut-être un peu brève aujourd'hui, mais je me ferai un plaisir de prolonger la conversation plus tard.
    C'est correct. Je vous souhaite la bienvenue.
    Je voudrais commencer en indiquant clairement que je ne sais absolument rien de la gestion d'un organisme artistique ou culturel. Lorsque je me préparais en vue de notre rencontre, je me suis aperçu que je suis considérée comme l'équivalent du conseil d'administration d'un tel organisme, mais cela ne signifie pas que j'en possède les connaissances. Je suis plutôt professeure d'économie.
    Mes recherches portent sur les politiques et les marchés du travail, en ce qui concerne notamment l'écart salarial entre les hommes et les femmes et la participation des femmes au marché du travail. J'enseigne aussi l'économie et l'étude de genre à l'Université Laurier. Forte de ces connaissances, je voulais traiter de manière générale de la représentation des femmes dans les postes de direction.
    Je ne connais pas de statistiques canadiennes officielles sur la représentation des femmes au sein des conseils d'administration d'organismes artistiques et culturels. Nous savons toutefois que cette représentation est faible parmi les sociétés cotées à la Bourse de Toronto. Selon de récents rapports, les femmes occupent environ 15 % des sièges au sein du conseil d'administration de ces sociétés. J'ai l'impression que la situation est meilleure dans les organismes artistiques et culturels, mais la représentation des femmes n'est peut-être pas équitable aux postes de direction.
    Pour réunir de meilleurs renseignements sur les organismes artistiques et culturels, il faudra demander des rapports normalisés. Par exemple, l'Agence du revenu du Canada pourrait exiger que les organismes de bienfaisance rendent publique l'information sur le sexe des membres de leur conseil d'administration en plus des renseignements qu'ils publient déjà. Si cette information montre que les femmes sont sous-représentées, que devrions-nous faire?
    Les quotas hommes-femmes sont la première solution qui vient à l'esprit, et les économistes ont maintenant eu l'occasion d'étudier quelques exemples. L'article intitulé « Gender Quotas and the Crisis of the Mediocre Man » publié dans l'American Economic Review fournit un excellent exemple. Je dois dire que j'adore le titre de cet article.
    L'auteur a étudié les élections menées dans des municipalités suédoises où le conseil municipal est nommé selon le principe de représentation proportionnelle grâce aux listes fournies par les partis. Depuis 1993, les listes du Parti social-démocrate sont assujetties à des quotas contraignants qui obligent le parti à faire alterner des noms d'hommes et de femmes dans ses listes de candidats. Les sièges du parti sont dotés en fonction de ces listes, ce qui garantit la représentation des femmes au sein des sièges remportés.
    Il ressort clairement que ces quotas contraignants ont permis d'accroître le nombre de femmes élues et, surtout, le degré de compétence parmi les élus, principalement attribuable à l'amélioration de la sélection des candidats de sexe masculin. Pour dire les choses simplement, il semble que les hommes médiocres aient disparu des listes du parti, particulièrement aux postes de direction, et ont été remplacés par des femmes compétentes.
    Si cet article me plaît, c'est notamment parce qu'il répond au principal argument de ceux qui s'opposent aux quotas hommes-femmes, c'est-à-dire le fait qu'ils constituent une menace à la sélection de candidats aux postes de direction fondée sur le mérite. Cet article nous rappelle que bien d'autres facteurs influencent les nominations, ce qui n'est peut-être pas optimal.
    Les quotas que la Norvège a imposés en 2006 au chapitre de la composition des conseils d'administration des sociétés ont reçu plus d'attention. Nous avons constaté que la modification de cette composition aura une influence sur la stratégie des sociétés. Par exemple, les sociétés norvégiennes touchées semblent éviter les réductions d'effectif à court terme, ce qui a des répercussions sur les profits à court terme; voilà qui peut constituer un élément important dans le cadre d'une stratégie à long terme. La même étude a toutefois permis de constater que les quotas n'avaient aucune influence sur d'autres facettes des décisions des sociétés touchant les revenus et les coûts non liés à la main-d'oeuvre.
    Cependant, l'expérience de la Norvège montre que les quotas hommes-femmes n'ont peut-être pas beaucoup d'effet au-delà de la composition des conseils d'administration, et ne semblent pas améliorer la position des femmes qui ne sont pas nommées à de tels conseils ou influencer les décisions des jeunes femmes qui planifient leur carrière en affaires.
    Si on étudie la documentation en général, on constate que les preuves semblent indiquer que les quotas hommes-femmes qui modifient la composition des conseils d'administration peuvent avoir une influence sur la stratégie des organismes. Cette incidence peut être minime, mais je n'ai vu aucune preuve convaincante montrant clairement que cette incidence soit néfaste. Les quotas hommes-femmes peuvent accroître le degré de compétence au sein d'un organisme. Nous devons toutefois nous souvenir que les politiques comme les quotas hommes-femmes ne constituent qu'un petit morceau du casse-tête.
    Je vous remercie de votre attention. Je répondrai à vos questions avec plaisir.

  (1010)  

    Merci beaucoup.

[Français]

    Nous passons maintenant à Mme Bouffard, de la YWCA Québec, qui a aussi une présentation à faire.
    Vous pouvez commencer, madame Bouffard.
    Je suis Angèle Bouffard. Je viens directement de Québec, de la YWCA.
    Je prends quelques instants pour vous présenter notre organisation, la YWCA. Cela fait des années que nous travaillons à Québec à former des femmes pour les conseils d'administration. C'est un rôle qui a été conçu à Québec et qui est unique, puisqu'il n'existe dans aucun des autres établissements de la YWCA au Canada. Nous avons pour mission d'accompagner les femmes dans leur quête du meilleur d'elles-mêmes, ce qui veut dire que nous offrons des services d'hébergement aux femmes en difficulté tout autant que nous travaillons avec les femmes leaders qui occupent des postes importants.
    Nous avons bâti toute une stratégie, que nous appelons la formation « Leaders et décisionnelles ». Nous avons pu compter au tout début sur du financement du gouvernement du Québec, puis Condition féminine Canada est venu nous appuyer pour deux volets particuliers de ce programme. Nous avons formé à ce jour plus de 1 000 femmes pour qu'elles puissent siéger à des conseils d'administration. C'est quand même énorme pour la ville de Québec.
    Cela veut dire que les femmes sont prêtes à se former. Elles viennent passer 15 heures avec nous pour se donner les outils qui leur permettront d'être plus compétentes dans leur rôle au sein d'un conseil d'administration.
    Nous avons adapté la formation pour les jeunes de 17 à 25 ans. Nous travaillons avec des jeunes femmes dans les cégeps et à l'Université Laval. À ce jour, nous en avons formé plus d'une centaine, dont plusieurs sont des étudiantes étrangères qui souhaitent s'impliquer dans des conseils d'administration de toutes sortes. Elles voient cette implication comme une façon de s'intégrer à une organisation au Canada, d'acquérir de l'expérience dans la communauté et de redonner à cette communauté.
    Nous avons aussi mis en place un programme de mentorat. Nous avons une trentaine de dyades en cours. Mme Benoit fait partie des mentors. La particularité de notre programme est que chaque mentor accepte pendant un an la présence d'une observatrice à son conseil d'administration, qu'elle accompagne pour bien l'outiller afin qu'elle puisse mieux exercer son rôle. À la fin de cette période, il y a eu une réelle évolution, et les femmes se sentent encore plus prêtes.
    Il y a un an et demi, nous avons mené une étude auprès d'environ 800 de nos ex-participantes pour apprendre où elles étaient, ce qu'elles faisaient, où elles siégeaient et ce qui bloquait encore, le cas échéant. Nous avons constaté qu'elles étaient très contentes d'avoir suivi la formation, mais qu'il y en avait plusieurs qui hésitaient encore à se lancer dans l'aventure des conseils d'administration, et ce, même si elles avaient reçu ces 15 heures de formation. Pourtant, il est question ici de femmes qui sont déjà comptables, avocates, professionnelles ou fonctionnaires. Ce sont des femmes qui ont au moins un baccalauréat, voire souvent une maîtrise. Les étudiantes de l'Université Laval sont souvent des étudiantes de deuxième cycle en finance, en gestion ou en droit. Or ces femmes veulent se donner plus d'outils. Elles manquent de confiance. Elles souffrent aussi du syndrome de l'imposteur. Nous n'avions pas posé tellement de questions là-dessus, mais ce dernier constat est ressorti des réponses que ces femmes nous ont données. Après leur formation, elles veulent vivre une expérience concrète, et c'est pour cela que nous avons mis en place le programme de mentorat pour les accompagner.
    Nous avons aussi des groupes de codéveloppement, c'est-à-dire d'entraide professionnelle entre administratrices qui se donnent des bons trucs.
    Ce sont là nos stratégies pour aider les femmes à se former elles-mêmes et à devenir toujours plus compétentes. Cela, croyez-moi, elles ne cessent d'en redemander, car elles souffrent du syndrome de l'imposteur et elles croient toujours qu'il leur manque un petit quelque chose.
    Nous venons d'offrir avant-hier un cours avancé sur les états financiers pour la gestion des organismes à but non lucratif, lequel faisait suite à trois cours de gestion et de lecture d'états financiers. Ces femmes en redemandent, car leur but est d'être archi-compétentes avant de siéger à un conseil d'administration.
    Nous nous sommes rendu compte que le problème était au sein même des organisations. Qu'est-ce qui faisait que 1 000 femmes ne réussissaient pas toutes à se placer? Elles étaient prêtes, elles avaient des compétences extraordinaires, mais on ne les remarquait pas. C'est là que nous avons mis sur pied un programme d'accompagnement pour les organisations. C'est là que le bât blesse, c'est ce que nous appelons les obstacles systémiques. Cela, vous allez le constater dans les organismes culturels.
    Nous avons choisi de vous présenter des statistiques.

  (1015)  

    Nous parlons de zone paritaire lorsque de 40 à 60 % des membres d'un conseil d'administration sont des femmes. Pour d'autres, la parité n'existe qu'en présence d'un nombre égal de femmes et d'hommes. Nous pensons aux conseils d'administration, mais cela vaut vraiment pour toutes les sphères décisionnelles.
    Au Québec, il y a actuellement 18,8 % de femmes dans les conseils d'administration. Ce sont des statistiques qui datent un peu, mais qui sont encore assez valides. Les trois quarts des entreprises ont seulement de 11 à 25 % de femmes dans leur conseil d'administration.
    On pourrait penser que c'est différent dans le milieu de la culture, mais voici d'autres statistiques, et vous allez voir que nous avons fait bien nos recherches.
    La moitié des compagnies comprennent moins de 20 % de femmes. De plus, saviez-vous que 28 % des entreprises n'ont aucune femme dans leur conseil d'administration? À ce rythme, si l'on prenait des mesures concrètes comme celles qui existent pour accompagner les organisations, on n'atteindrait la parité qu'autour de 2034, selon une étude de Mme Brière et de Jean Bédard.
    Dans la réalité, si rien n'est fait et que l'on ne prend aucune mesure, compte tenu des fluctuations, des allées et venues, des avancées et des reculs, les calculs prédisent que l'on n'atteindra la parité qu'en 2200. On parle d'encore quelques générations, alors je forme peut-être des étudiantes de l'Université Laval pour pas grand-chose — je vous dis cela à la blague, bien sûr.
    Il y a plusieurs avantages à la présence de femmes dans les conseils d'administration, comme vous le verrez dans vos documents. L'idée ici est vraiment d'avoir une diversité d'expertises, de prendre en compte un certain nombre de questions et de couvrir tous les points de vue. Je vous le dis sans mentir, les femmes que nous envoyons dans les conseils d'administration sont plus compétentes que tout ce que j'ai pu voir, et je recruterais toutes les femmes que je forme pour les conseils d'administration auxquels je siège.
    Pour en revenir aux statistiques, nous sommes en train de compiler la composition de tous les conseils d'administration des milieux artistique et culturel de la ville de Québec, toutes catégories confondues. Pour la réunion d'aujourd'hui, nous avons analysé les données que nous avons obtenues jusqu'ici, et qui portent sur 113 organismes.
    Aujourd'hui, à Québec, seulement 30 % de ces 113 organisations des milieux de la culture et des arts ont plus de 30 % de femmes. On dit pourtant que le milieu des arts est majoritairement représenté par des femmes, mais ces chiffres viennent confirmer qu'elles ne sont pas dans les conseils d'administration. Elles se retrouvent à la base, mais ne parviennent pas à grimper les échelons.
    Par ailleurs, 70 % de ces organismes n'atteignent pas 50 % de femmes dans leur conseil d'administration. Nous avons réparti ces chiffres par catégories: de 0 à 20 %, de 20 à 30 %, et ainsi de suite. Vous avez ces chiffres en main, en date de cette année. Nous allons suivre leur évolution sur plusieurs années, car nous allons les solliciter dans notre démarche d'accompagnement. Il y en a 9 % dans le milieu culturel qui n'ont aucune femme à leur conseil d'administration.
    Du côté de la zone paritaire, qui commence à 40 % de femmes, seuls 52 % des organismes atteignent ce seuil. Du côté de la vraie parité, par contre, seuls 30 % des organismes atteignent 50 % de femmes.
    Ce sont les données des milieux artistique et culturel de Québec. Ce n'est pas obligatoirement la même chose partout au pays, mais nous avons au moins ces données à ce moment-ci.
    Nous nous assurons d'accompagner les organisations parce que nous voulons que cette égalité fasse partie intégrante de leur ADN, à tous les niveaux. Nous avons plusieurs mesures à vous suggérer pour faire augmenter le nombre de femmes dans les conseils d'administration. Il existe plusieurs modèles; nous en avons conçu. Je vous ai remis une pochette. C'est également disponible en ligne. Nous avons préparé le Guide pour une gouvernance paritaire — Pour des C.A. égalitaires, qui comporte un plan de match en huit étapes. Vous l'avez en version plus détaillée dans vos diapositives et dans votre document.
    Il y a tout un accompagnement à faire, en deux phases, mais ce que je vous suggère, c'est vraiment de suivre les étapes que nous avons déterminées.
    Tout d'abord, il faut s'assurer que les têtes dirigeantes sont présentes.
    Il faut aussi se doter de politiques officielles. C'est la base de tout. Si les objectifs et les critères ne sont pas mis par écrit dans une politique, il y aura trop de fluctuations et de reculs, et la démarche sera portée par des individus seulement, au lieu d'être portée par tout l'organisme.

  (1020)  

    Ensuite, il faut créer des comités de gouvernance qui ont pour rôle de recruter des personnes.
    De plus, on doit donner aux entreprises des outils et des matrices de compétences pour diversifier la composition du conseil d'administration, comme le genre de matrice qu'utilisent Mme Benoit et plusieurs organisations.
    Il faut également aider les organismes à utiliser des méthodes de recrutement différentes. Nous avons organisé une activité appelée « Un C.A. à l'heure du thé ». Au mois de mars de l'année dernière, 40 organismes recrutaient une centaine de candidates. Alors, il s'agit vraiment de faire du jumelage.
    En outre, on cherche à diversifier les façons de faire.
    Par la suite, il s'agit d'accompagner et de soutenir les nouvelles personnes.
    Finalement, le résultat que nous souhaitons atteindre, c'est que les organisations soient équipées pour accroître l'intérêt des femmes et pour les attirer. Cela dit, c'est aux organisations de changer leurs façons de faire, et non aux femmes d'acquérir encore plus de compétences.

  (1025)  

    Merci beaucoup.
    Nous commençons la période des questions et réponses. Les députés disposent de cinq minutes.
    Nous commençons par vous, monsieur Hébert.
    Merci, madame la présidente.
    Félicitations à toutes les participantes pour la qualité de leurs présentations.
    Ma première question s'adresse à vous, madame Bouffard.
    Dans votre Guide pour une gouvernance paritaire, il est mentionné que la proportion de femmes qui siègent à un conseil d'administration est de 19,8 % au Québec, derrière la Nouvelle-Écosse et la Saskatchewan, où ce chiffre est respectivement 25,7 % et 23,2 %.
    Vous voyez venir ma question. Comment se fait-il qu'il y ait un tel écart? Pourquoi est-ce moins élevé au Québec?
    Je vous dirais que c'est généralisé. Les mesures ne sont uniformes nulle part. Je pense que ce qui a fait augmenter le taux au Québec, c'est la loi de 2006, et ce sont les organismes publics et parapublics qui ont permis d'atteindre la parité. Tant que cela ne sera pas exigé par une loi, les choses ne changeront pas. Les quotas ne sont pas obligatoires, mais on demande aux organisations de se fixer des cibles volontaires.
    Je suis revenue d'Halifax hier. J'y ai travaillé avec des organisations de partout au Canada. Nous avons décidé de demander qu'il y ait une loi plus claire en la matière, parce que cela stagne. C'est très long avant de faire des progrès.
    Dans votre étude, vous dites que la parité présente plusieurs bienfaits pour une organisation, qu'elle soit artistique ou économique. J'aimerais que vous me parliez des bienfaits de la parité dans les conseils d'administration.
    Par la suite, Mme Benoit, qui a un conseil d'administration paritaire, pourra nous parler des bienfaits de la parité dans le fonctionnement de Spira.
    Plusieurs femmes siègent déjà à certains conseils d'administration, mais elles sont minoritaires. Cela prend une certaine proportion de femmes, environ un tiers, pour faire évoluer un conseil d'administration. Tant qu'il n'y aura pas cette proportion de femmes, il n'y aura pas d'avancées majeures au chapitre de la mécanique de gouvernance du conseil d'administration.
    Il y a aussi les matrices de compétences. Je siège à plusieurs conseils d'administration et j'en accompagne. Les matrices de compétences nous permettent de recruter des femmes qui correspondent vraiment aux critères établis et qui sont très fortes. Il y aura une période de flottement où les hommes qui seront encore en poste accuseront peut-être un certain retard parce qu'ils n'auront pas été recrutés sur la base de grilles de compétences énonçant plusieurs qualifications requises. Un rattrapage finira par se faire et tout le monde sera recruté sur la base des mêmes critères.
    Aujourd'hui, les femmes qui commencent à siéger à des conseils d'administration sont très fortes. Elles font avancer les organisations; je le vis à plusieurs endroits.
    C'est ce que j'ai déjà été à même de constater. Dans une autre vie, j'ai été maire de Dolbeau-Mistassini et j'ai vu des conseils d'administration. En fait, dans la MRC de Maria-Chapdelaine, à un moment donné, il y avait 33 % de mairesses autour de la table. Par la suite, malheureusement, ce chiffre est descendu à moins de 10 %, et j'ai été à même de constater la différence lors des rencontres.
    Madame Benoit, dans le court laps de temps qu'il reste, dites-moi quels bénéfices la parité a procurés à votre organisation.
    Il est sûr que la parité renforce l'intelligence collective du groupe. En fait, cela permet d'avoir une variété de points de vue, car il arrive que les femmes n'aient pas les mêmes préoccupations que les hommes. L'utilisation d'une matrice de compétences permet d'avoir un éventail de compétences au sein du conseil d'administration.
    Dans notre cas, il s'agit surtout d'avoir une vision qui soit représentative de nos membres, dont 50 % sont des femmes. C'est important que tous soient représentés.
    Merci.

[Traduction]

    Nous accordons la parole à M. Shields pour cinq minutes.
    Je vous remercie de nous avoir fourni tous ces renseignements aujourd'hui. C'est excellent. Je pense que deux d'entre vous ont indiqué qu'il fallait agir à l'échelle locale et expliqué certaines choses fondamentales que vous avez modifiées et instaurées.
    Je voudrais m'adresser à Mme Schirle. Que pensez-vous du recours aux agences de recrutement quand vient le temps de pourvoir des postes au sein des conseils d'administration?
    Je ne possède pas d'expérience particulière à ce sujet, mais il pourrait y avoir certains avantages à sortir de ses réseaux pour effectuer ces recherches.
    Si la diversité fait souvent défaut au sein des conseils d'administration ou d'autres groupes, c'est parce que les candidats sont souvent sélectionnés dans les réseaux sociaux des organismes. Quand un poste est ouvert, les responsables se demandent qui, parmi les gens qu'ils connaissent, pourrait convenir à ce poste.
    Quand on fait appel à une agence de recrutement, cette dernière étendra ses recherches au-delà des réseaux sociaux de l'entreprise. Si on leur indique clairement que l'on cherche à assurer la diversité des points de vue, elles pourraient mieux réussir mieux à trouver des candidats fort compétents que si l'entreprise cherche sur ses réseaux sociaux.

  (1030)  

    Voilà qui m'amène à ma question suivante. De qui relève la responsabilité d'élaborer les directives fournies à l'agence de recrutement pour que cette dernière n'en fasse pas seulement à sa tête?
    C'est là où le bât blesse. En l'absence de réglementation, il faut se fier au fait que le conseil d'administration a à coeur l'intérêt général. C'est à cet égard qu'il est souvent proposé de fournir une orientation quelconque, sous la forme de quotas hommes-femmes, par exemple. Voulez-vous vous fier au conseil d'administration lui-même pour prendre ces décisions afin de tenter de favoriser des choix plus optimaux ou tenterez-vous d'imposer une sorte de réglementation ou peut-être des lignes directrices à ces organismes?
    Il n'existe rien de tel dans le secteur privé, mais proposeriez-vous de prendre de pareilles mesures dans le secteur public, dont il est question aujourd'hui?
    Je pense ici aux secteurs public et parapublic. J'ai notamment en tête les organismes de bienfaisance. C'est pourquoi j'ai proposé d'utiliser les renseignements de l'ARC pour avoir une meilleure idée des chiffres. Ma réponse est donc « oui ».
    Madame Young, je sais que vous vous occupez un peu plus de la facette constitutionnelle, mais avez-vous une opinion à ce sujet?
    Permettez-moi d'ajouter quelque chose à cette discussion sur la relation entre les agences de recrutement et les conseils d'administration, relation qui devrait être étroite. J'ai participé à un certain nombre de processus de recrutement dans le cadre desquels on a fait appel à des agences. C'est vraiment au conseil d'administration qu'il incombe de faire clairement part de ses exigences à l'agence en ce qui concerne les candidats.
    Sachez en outre qu'il existe tout un spectre de mesures concrètes. Nous avons parlé d'un éventail de mesures. Si nous partons du postulat voulant que la sous-représentation des femmes au sein de ces importants sièges de prise de décisions et des organismes culturels constitue une véritable préoccupation, nous pouvons prendre un certain nombre de mesures. Nous pourrions notamment offrir de la formation aux femmes afin qu'elles possèdent les compétences pour occuper des postes de direction ou, comme on l'a déjà indiqué, proposer des programmes de sensibilisation afin d'inciter les entreprises à s'éloigner de leurs réseaux pour joindre des femmes qu'elles ne rencontreraient pas autrement et qui pourraient s'avérer d'excellentes candidates. On peut adopter une approche plus proactive afin d'encourager les femmes à postuler des emplois, leur accorder un traitement préférentiel lors du recrutement ou imposer des quotas.
    D'après mon interprétation de la documentation, un grand nombre de ces mesures sont de moindre efficacité. On peut également exiger la reddition de comptes sur la question, comme on le fait actuellement. Certains conseils d'administration doivent rendre des comptes sur les efforts qu'ils déploient pour accroître leur diversité ou sur leur composition. Les exigences en matière de rapports et la sensibilisation ne sont toutefois pas aussi efficaces que les quotas. Le processus stagne souvent quand on recourt à diverses mesures modérées afin de tenter de diversifier la composition des conseils d'administration, jusqu'à ce qu'on en arrive à imposer une forme de quota.
    En Norvège, par exemple, on a vu la présence des femmes bondir de 23 à 40 % dans les conseils d'administration soumis à la réglementation. L'imposition de quotas peut avoir une incidence substantielle sur un problème qui semble résister à d'autres mesures plus modérées. Je pense que c'est parce que nous sommes confrontés à de véritables obstacles qui nuisent à la diversité aux échelons clés de prise de décisions en raison de préjugés inconscients. Les stéréotypes de structure et les caractéristiques de chef que nous n'associons pas aux femmes, mais que nous associons aux hommes sont manifestement importants. Il existe de nombreux documents expliquant l'influence des préjugés inconscients et montrant à quel point il est difficile d'éliminer le problème.
    L'imposition d'un quota ou d'une sorte de cible afin d'accroître la présence de groupes actuellement sous-représentés aux échelons de prise de décision est une manière de modifier les présomptions stéréotypées que l'on a au sujet des femmes dans des postes de direction ou des rôles de prise de décisions.

  (1035)  

    Merci beaucoup.

[Français]

    Nous passons maintenant à M. Nantel.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    Merci à toutes de vos présentations.
    On peut dire que la ville de Québec est bien représentée dans les plus récents témoignages. Je ne sais pas si c'est un signe de sa vitalité économique qui finalement rejaillit du côté de la culture, des arts et de la parité, mais c'est fantastique. Je ne sais pas si la YWCA a cette même action aussi structurante partout au Québec et au Canada, mais c'est vraiment fantastique. Voir que cela est relayé par des organismes culturels comme celui de Mme Benoit, c'est encore mieux.
    À propos de Québec, je réitère qu'il faudrait traiter ma motion concernant le tableau Saint Jérôme entendant la trompette du Jugement dernier. Nous avons appris hier qu'il était possible que nous ne connaissions jamais la pénalité que nous devrons payer par l'entremise de nos impôts pour ce cafouillage. Je réitère que j'aimerais que nous votions à ce sujet.
    Connaissant très bien les organisations culturelles de Montréal, je pense que je peux dire que le monde culturel professionnel en général est un boys' club. Je me ferai sûrement des ennemis pour avoir dit cela.
    Madame Benoit, est-ce la même chose à Québec?
    Comme je le mentionnais tout à l'heure, ce que j'ai cru remarquer, c'est surtout une différence entre les petits et les grands organismes. Si je fais un balayage rapide des grands organismes culturels de Québec, je vois qu'il y a quand même beaucoup de femmes. En effet, peut-être est-ce un peu différent à Québec et à Montréal, mais je n'ai pas de statistiques à ce sujet.
    Avant de venir ici, j'ai regardé les sites Web de différents organismes. Nous faisons également des rencontres nationales avec des organismes de taille moyenne ou de petite taille, soit ceux ayant des budgets de moins de 1 million de dollars, et je remarque qu'ils comptent beaucoup de femmes. Je pense que c'est un problème qui est davantage lié aux grands organismes, comme les musées, les opéras, les ballets et les grands théâtres.
    Lorsque les organismes sont très professionnalisés, il y a effectivement une prédominance masculine. Je vois que Mme Bouffard hoche la tête.
    J'ai une question à poser à Mme Young et à Mme Schirle.

[Traduction]

    Entendez-vous l'interprétation, madame Young?
    Oui, je l'entends; vous pouvez donc parler dans la langue de votre choix.
    Parfait, merci beaucoup.

[Français]

    Le Comité permanent du patrimoine canadien traite d'enjeux culturels. Nous avons donc décidé d'étudier la question de la parité au sein des conseils d'administration dans le domaine culturel.
    Croyez-vous que c'est le genre de question qui devrait être étudiée dans chacun des comités sur la Colline du Parlement?

[Traduction]

    Certainement, et je crois comprendre que le gouvernement actuel a vraiment l'égalité entre les sexes à coeur. Lorsqu'on prend l'égalité entre les sexes au sérieux, cela devient un paramètre pris en compte dans chaque mesure prise au chapitre de la réglementation et de la législation. Il est manifestement approprié que l'égalité entre les sexes s'inscrive dans le programme des divers régimes de réglementation que les comités étudient.
    Vous saviez que c'est ce que je vous répondrais, alors voilà qui est fait.
    Merci, madame Young.
    Je suis certain que Mme Bouffard voudra ajouter quelque chose parce que vous avez parlé des paramètres.
    Madame Schirle.
    Je peux probablement tenir des propos assez semblables. Je pense que chaque comité a la responsabilité d'établir des budgets sexospécifiques et d'assurer une représentation des opinions et des priorités équilibrée entre les sexes. Notre gouvernement a la responsabilité de représenter tout le monde.
    Nous avons constaté que l'égalité entre les sexes constitue une priorité importante du gouvernement, notamment sur le plan de l'analyse comparative entre les sexes, et je pense que c'est une démarche importante qui devrait se poursuivre.

[Français]

    Madame Bouffard, voulez-vous ajouter quelque chose?
    Oui.
    Quand je disais que j'étais à Halifax il y a deux jours, c'était avec le Réseau d'égalité des genres Canada. Ce sont vraiment des enjeux marquants et on se penche sur les questions liées aux obstacles systémiques dans les organisations. Il faut sortir de la logique selon laquelle il faut modeler les femmes dans un certain moule pour qu'elles y arrivent. Elles sont prêtes, mais il y a encore beaucoup de plafonds de verre à percer.
    Je pense que vous n'auriez pas tort de soulever cela dans tous les comités. Cela devrait être examiné partout parce que, transversalement, cela se produit de façon similaire.
    Merci.
    Nous allons maintenant passer à Mme Dhillon pour cinq minutes.

[Traduction]

     Merci, madame la présidente.
    Je salue tous nos témoins. Merci de témoigner devant le Comité.
    Ma question s'adresse à Mme Young. Vous avez été présidente du comité du statut de la femme de l'Université de la Colombie-Britannique. Que pouvez-vous nous dire sur les défis auxquels vous et les femmes avez été confrontées au chapitre de l'accès aux postes de membres de conseils d'administration?

  (1040)  

    Je peux vous en dire beaucoup à ce sujet.
    J'ai aussi été présidente du comité du statut de la femme de l'Université de Victoria. En fait, je reviens à peine d'une réunion de l'Association canadienne des professeurs et professeures d'université, qui, à l'échelle nationale, se préoccupe beaucoup de la diversification et de l'inclusivité — ou du manque d'inclusivité — au sein de l'effectif universitaire, mais particulièrement dans le corps enseignant.
    Les problèmes sont difficiles à résoudre. On parle beaucoup de l'équité et de ce que cette dernière exige, mais pour ce qui est des chiffres, le progrès est lent. Dans la mesure où nous avons observé des progrès au chapitre de l'équité — je parle principalement ici des enseignants et de leur promotion à des postes de direction à l'université —, ces progrès ont surtout aidé un plus grand nombre de femmes blanches à obtenir des postes.
    Les femmes sont encore sous-représentées, mais celles qui sont racialisées le sont encore bien plus. Ce sont les femmes non racialisées qui ont profité dans une certaine mesure des progrès. Le problème est donc complexe dans l'éventail de dimensions que prend l'exclusion au sein du milieu universitaire. Le sexe est important; la racialisation aussi. Nous devons certainement mettre l'accent sur le maintien en poste des érudits autochtones et la promotion de professeurs autochtones à des postes de direction.
    Je ne veux pas dire que le sexe n'est pas important. C'est extrêmement important, et j'ai investi de nombreuses années de ma vie à travailler à l'amélioration de l'égalité entre les sexes dans le milieu universitaire. Cependant, la question inclut les femmes autochtones, racialisées ou handicapées.
    Les structures de pouvoir des universités sont le reflet de celles de la société canadienne en général, et ce n'est pas étonnant. Nous n'exploitons pas encore toute la richesse de l'expertise, de l'expérience et du talent que recèle la merveilleuse diversité de la société canadienne. Nous constatons certainement qu'à mesure qu'on gravit les échelons de la hiérarchie universitaire, passant des postes de professeur adjoint à ceux de professeur agrégé, de professeur titulaire et de doyen, ou de vice-président adjoint à vice-président et j'en passe, un nombre disproportionné de femmes et d'autres personnes appartenant à des groupes sous-représentés abandonnent en cours de route.
    Quels sont les principaux obstacles? Avez-vous tenté d'encourager un plus grand nombre de femmes à briguer des postes supérieurs? Avez-vous rencontré de la résistance? Quelles en sont les causes? Qu'est-ce qui justifie la résistance à l'égard des femmes en général et des minorités chez la femme?
    Vous savez, il s'agit d'un de ces problèmes vraiment épineux au sujet desquels on peut parler d'un certain nombre de caractéristiques qui font en sorte qu'on surestime la sous-représentation. Ici encore, je commencerai en faisant référence au concept de préjugé inconscient, un facteur qui s'est révélé très important à toutes les étapes d'entrée, à chaque échelon des établissements comme les universités en raison du fait qu'on associe aux femmes des caractéristiques qui ne vont traditionnellement pas de pair avec le pouvoir, sans égard aux compétences qu'elles peuvent posséder en réalité.
    Il faut comprendre que le pouvoir prend bien des formes et emprunte bien des styles. Certains styles de direction peuvent être bien plus efficaces en raison même de l'absence de caractéristiques traditionnelles qu'on associe aux dirigeants de sexe masculin. Il s'avère également que le caractère des postes de direction n'attire pas toujours les femmes.
    Nous en revenons constamment à la division du travail entre les sexes dans notre société, au manque de services de garde adéquats et au fait que le marché du travail n'est pas structuré de manière à ce que le parent qui s'occupe principalement des enfants puisse y être un travailleur pleinement rémunéré. Ce n'est pas le cas seulement dans les universités, mais ce l'est certainement dans les universités.
     L'atmosphère est de plus en plus tendue, pointue et concurrentielle dans les universités. Je suis professeure d'université depuis une vingtaine d'années et j'ai observé une évolution marquée de la nature et de la quantité des pressions exercées sur le plan de la productivité. À titre de parent et de travailleur, il est difficile d'avoir le genre de vie que nous voulons que tout le monde ait et de s'investir pleinement dans un poste de direction à l'université.
    Il arrive souvent que les femmes ne pensent pas vouloir entrer dans ce genre de milieu. Il existe pourtant de nombreuses femmes extrêmement compétentes et talentueuses, dotées de solides compétences de direction qui promettent vraiment de réformer nos établissements pour le mieux. Il nous reste maintenant à établir l'environnement qui leur permettra de s'épanouir. La situation s'explique par un éventail de raisons, qui sont presque toutes discriminatoires. Certains obstacles sont carrément intentionnels, mais il existe beaucoup de préjugés inconscients, comme l'ont indiqué les diverses études actuellement menées sur la question. Voilà qui constitue une force très puissante qui limite les occasions qui s'offrent à un certain nombre de groupes, mais particulièrement à celui des femmes.
    Pour ma part, j'ai lancé un programme de mentorat. Il a été démontré que le mentorat est extrêmement important, car il permet aux femmes occupant des postes de direction de servir d'exemple aux femmes pour qu'elles puissent s'imaginer atteindre des postes supérieurs et avoir ce genre de carrière. Le mentorat offre également du soutien et permet de comprendre ce que c'est que d'être une femme dans un établissement et de prodiguer des conseils. Le mentorat est un bon exemple, qui propose notamment des rôles inspirants.

  (1045)  

    Parfait.
    Je vais devoir vous interrompre ici, mais nous terminons notre séance sur une bonne note.

[Français]

    Merci à tous les témoins.

[Traduction]

    C'est ici que notre rencontre se termine.
    La séance est levée.
Explorateur de la publication
Explorateur de la publication
ParlVU