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CIIT Rapport du Comité

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L’ACCORD DU PARTENARIAT TRANSPACIFIQUE : AVANTAGES ET DÉFIS POUR LES CANADIENS

INTRODUCTION

Étant donné l’absence de progrès dans la négociation d’un nouvel accord commercial multilatéral à l’Organisation mondiale du commerce (OMC), certains pays – dont le Canada – cherchent à conclure des ententes bilatérales et régionales de libéralisation du commerce. Parmi ces ententes, peu suscitent autant d’attention que l’Accord du Partenariat transpacifique, couramment appelé le PTP.

Le 4 octobre 2015, des ministres représentant les 12 pays du PTP[1] – dont le Canada – ont annoncé la conclusion des négociations. L’Accord, qui a été signé officiellement le 4 février 2016, fait plus de 6 000 pages, sans compter les lettres additionnelles[2]. Avec l’Accord économique et commercial global (AECG) entre le Canada et l’Union européenne (UE), le PTP est au nombre des accords de libre-échange (ALE) les plus médiatisés négociés par le Canada depuis l’Accord de libre-échange nord-américain (ALENA). Les pays du PTP représentent approximativement 40 % de l’économie mondiale et 25 % de la valeur du commerce mondial[3].

Le gouvernement du Canada et certains organismes disent du PTP qu’il est un « accord du XXIe siècle » parce qu’il traite non seulement de questions traditionnelles, comme les réductions tarifaires et les marchés publics, mais aussi d‘enjeux comme le développement, l’administration douanière, le commerce électronique, les entreprises publiques, la cohérence de la réglementation et la facilitation du commerce. Il prévoit aussi des mesures qui profiteront aux petites et moyennes entreprises (PME)[4].

Le PTP ne réunit pas tous les pays de l’Asie-Pacifique; la Chine, notamment, n’en fait pas partie, mais elle pourrait s’y joindre ultérieurement. Certains observateurs croient que le PTP pourrait permettre aux pays signataires, particulièrement les États-Unis, de faire contrepoids au pouvoir économique et politique de la Chine dans la région de l’Asie‑Pacifique[5]. Dans son allocution hebdomadaire à la nation du 10 octobre 2015, le président Obama a dit que « sans le PTP, ce sont des concurrents qui ne partagent pas nos valeurs, comme la Chine, qui dicteront les règles de l’économie mondiale[6] ».

La décision du Canada de prendre part aux négociations du PTP en 2012 n’a pas suscité une grande couverture médiatique, ni un débat public considérable, mais les partisans et les opposants du Partenariat ont, depuis, redoublé d’efforts pour faire valoir leur position auprès du gouvernement et du grand public. De plus, le PTP a été beaucoup discuté pendant la récente élection aux États-Unis, comme il l’avait été lors du scrutin fédéral de 2015 au Canada.

Après son élection en novembre 2016, le nouveau président des États‑Unis a demandé au United States Trade Representative de retirer les États-Unis du PTP[7]. Même si l’Accord ne peut pas entrer en vigueur sans la participation des États-Unis, le gouvernement est néanmoins confronter à une décision concernant la ratification du PTP et les mesures à prendre afin de promouvoir les intérêts commerciaux du Canada dans la région de l’Asie‑Pacifique.

Le 16 février 2016, le Comité permanent du commerce international de la Chambre des communes (ci‑après « le Comité ») a décidé d’entreprendre une étude sur le PTP. Cette étude a compris un processus de consultation publique dans le but premier d’évaluer la mesure dans laquelle la ratification du PTP serait dans l’intérêt des Canadiens.

C’est ainsi que, de février 2016 à février 2017, le Comité a tenu des audiences publiques à Calgary (Alberta), Charlottetown (Île‑du‑Prince‑Édouard), Québec (Québec), Halifax (Nouvelle‑Écosse), Montréal (Québec), Ottawa (Ontario), Saint John (Nouveau‑Brunswick), Saskatoon (Saskatchewan), St. John’s (Terre‑Neuve‑et‑Labrador), Toronto (Ontario), Vancouver (Colombie‑Britannique), Windsor (Ontario) et Winnipeg (Manitoba). Au cours de ces audiences, le Comité a entendu 312 représentants invités d’entreprises et d’associations commerciales, de syndicats, de PME, de sociétés multinationales, de la société civile et du milieu universitaire, entre autres.

Dans certaines villes[8], en plus de recevoir le témoignage des intervenants invités, le Comité a « ouvert le micro » aux membres du grand public qui souhaitaient exprimer leur point de vue sur le PTP; 103 personnes se sont prévalues de cette occasion de s’adresser au Comité afin de présenter leurs inquiétudes relativement à certains enjeux liés au PTP.

En outre, le Comité a invité les individus et les groupes à lui communiquer par écrit leur avis sur le PTP. Du 10 mars 2016 au 27 janvier 2017, le Comité a reçu 199 mémoires, ainsi que près de 50 000 courriels et lettres. La plupart des courriels et des lettres ont été envoyés à la suite de campagnes de la part de groupes tels que OpenMedia, le Conseil des Canadiens et À l’action.

Après avoir tenu dans leur circonscription une assemblée publique sur le PTP, quatre députés ont remis au Comité un compte rendu des commentaires entendus.

Les pages qui suivent exposent les résultats de l’étude du Comité sur le PTP. Après avoir mis en contexte les enjeux abordés, le rapport présente un résumé des témoignages entendus et les différentes recommandations qu’adresse le Comité au gouvernement. Six grands thèmes sont abordés plus particulièrement : les consultations fédérales avant, pendant et après les négociations du PTP; le commerce de marchandises; le commerce de services; l’admission temporaire des hommes et des femmes d’affaires; la protection de l’investissement; et les droits de propriété intellectuelle (PI).

CONTEXTE

Ce qu’on appelle aujourd’hui le PTP découle de l’entrée en vigueur, en 2006, de l’Accord de partenariat économique stratégique transpacifique [disponible en anglais seulement] entre Brunéi Darussalam, le Chili, la Nouvelle-Zélande et Singapour. Cet accord comportait une disposition invitant d’autres pays à se joindre au partenariat. De 2006 à 2013, huit États se sont ainsi ajoutés aux quatre premiers pour négocier l’Accord du PTP qui a été signé le 4 février 2016 : les États‑Unis, l’Australie, le Pérou et le Vietnam en 2008; la Malaisie en 2010; le Canada et le Mexique en 2012; et le Japon en 2013.

Les sections ci-dessous donnent un aperçu des relations en matière de commerce et d’investissement entre le Canada et les pays du PTP, ainsi que des étapes qui devront être franchies pour que l’Accord entre en vigueur.

Commerce et investissement entre le Canada et les pays du Partenariat transpacifique

Parmi les 12 pays du PTP, le Canada avait déjà des ALE avec le Chili, les États-Unis, le Mexique et le Pérou. L’ALENA, dont les États‑Unis et le Mexique sont signataires, est entré en vigueur le 1er janvier 1994. Les ALE du Canada avec le Chili et le Pérou sont entrés en vigueur le 5 juillet 1997 et le 1er août 2009 respectivement.

Le Canada et l’Australie se font mutuellement bénéficier d’un régime tarifaire préférentiel à l’égard d’un éventail de produits déterminé dans l’Accord commercial entre le Gouvernement du Canada et le Gouvernement du Commonwealth d’Australie, lequel est entré en vigueur en 1960 et a été révisé en 1973. Il en va de même pour le commerce entre le Canada et la Nouvelle-Zélande, aux termes de l’Accord de coopération commerciale et économique entre le Gouvernement du Canada et le Gouvernement de la Nouvelle‑Zélande, entré en vigueur en 1982.

De 2002 à 2007, le Canada et Singapour ont mené huit séries de négociations en vue de conclure un ALE, mais ont suspendu d’un commun accord les pourparlers en novembre 2009. Enfin, un accord de partenariat économique[9] est en négociation entre le Canada et le Japon depuis 2012.

L’article 30.4 du PTP énonce que tout État qui est disposé à se conformer aux obligations prévues par l’Accord peut y adhérer. Plusieurs pays se sont montrés désireux de se joindre au PTP, dont la Corée du Sud, la Thaïlande, les Philippines et l’Indonésie[10]. Les décisions sur l’adhésion sont prises par les pays signataires, par consensus.

Le tableau 1 donne des renseignements sur la population et des indicateurs économiques sélectionnés pour les 12 pays participants au PTP.

Tableau 1 : Données sur la population et indicateurs économiques sélectionnés pour les pays du PTP sur diverses années et périodes

Pays

Population (2015)

PIB en dollars américains en PPA (2015)

Pourcentage du PIB total des pays du PTP en PPA (2015)

Taux de croissance annuel moyen du PIB réel en devise nationale (2012–2015)

Taux de croissance annuel moyen prévu du PIB réel en devise nationale (2016–2019)

Australie

23,8 millions

1,1 billion

3,6 %

2,4 %

2,8 %

Brunéi Darussalam

423 200

33,2 milliards

0,1 %

-1,7 %

4,9 %

Canada

35,9 millions

1,6 billion

5,2 %

1,9 %

1,9 %

Chili

17,9 millions

401,5 milliards

1,3 %

2,7 %

2,6 %

États-Unis

321,4 millions

18,0 billions

59,2 %

2,2 %

2,1 %

Japon

127,0 millions

4,7 billions

15,5 %

0,6 %

0,6 %

Malaisie

30,3 millions

817,4 milliards

2,7 %

5,2 %

4,7 %

Mexique

127,0 millions

2,2 billions

7,2 %

2,0 %

2,6 %

Nouvelle-Zélande

4,6 millions

170,0 milliards

0,6 %

3,2 %

2,6 %

Pérou

31,4 millions

393,1 milliards

1,3 %

3,8 %

3,7 %

Singapour

5,5 millions

472,6 milliards

1,6 %

3,3 %

1,7 %

Vietnam

91,7 millions

553,4 milliards

1,8 %

6,0 %

6,2 %

Notes :    « PTP » signifie Partenariat transpacifique. « PIB » signifie produit intérieur brut. « PPA » signifie parité du pouvoir d’achat. Afin de tenir compte des différences de prix pour des produits identiques au sein de différents pays, un calcul du PIB en fonction de la PPA suppose qu’un produit ou service donné a le même prix dans tous les pays.

Sources : Les taux de croissance annuels moyens du PIB réel en devise nationale (2012–2015) et les taux de croissance annuels moyens prévus du PIB réel en devise nationale (2016–2019) ont été calculés à partir de données de la Banque mondiale et du Fonds monétaire international, respectivement. Toutes les autres données proviennent de la Banque mondiale. Les données ont été arrondies.

En 2015, le commerce de marchandises du Canada avec les autres pays du PTP se chiffrait à 771,9 milliards de dollars, soit 425,5 milliards de dollars en exportations, et 346,4 milliards de dollars en importations. La figure 1 illustre la valeur du commerce de marchandises et la balance commerciale du Canada avec les autres pays du PTP, de 1995 à 2015[11].

Figure 1 – Valeur du commerce de marchandises et balance commerciale du Canada avec les autres pays du Partenariat transpacifique, 1995-2015

Description: Le graphique montre l'évolution de la balance commerciale entre le Canada et les autres pays du PTP de 1995 à 2015, en milliards de dollars. Ces données ne concernent que le commerce des marchandises et n'incluent pas le commerce des services.

Source : Figure préparée à partir de données de Statistique Canada.

Les États-Unis sont de loin le plus important partenaire commercial du Canada au sein du PTP : en 2015, parmi les pays du PTP, les États-Unis ont été la destination de 94,5 % des exportations de marchandises canadiennes et à l’origine de 82,3 % des marchandises importées au Canada, sur la base de la valeur des expéditions.

En 2015, le pétrole brut et les véhicules automobiles étaient les marchandises exportées par le Canada aux pays du PTP qui avaient la valeur la plus élevée : combinés, ils représentaient 28,0 % de la valeur totale de ces exportations. La même année, les véhicules automobiles et les pièces automobiles étaient les importations canadiennes des pays du PTP qui avaient la plus grande valeur, soit 13,6 % de la valeur totale de ces importations. La figure 2 illustre la balance commerciale du Canada avec les autres pays du PTP, par catégorie, en 2015.

Figure 2 – Balance commerciale entre le Canada et les autres pays du Partenariat transpacifique, par catégorie, 2015

Description: Le graphique montre la balance commerciale de marchandises entre le Canada et les autres pays du PTP par catégorie de produits, en 2015, en milliards de dollars.

Source : Figure préparée à partir de données de Statistique Canada.

En 2015, le Canada a enregistré un surplus commercial avec les autres pays du PTP dans les catégories de marchandises suivantes : produits agricoles et alimentaires; métaux, mines et énergie; produits forestiers; et équipement de transport. Dans toutes les autres catégories de produits, le Canada a enregistré un déficit commercial cette année-là.

En 2014[12], le commerce de services entre le Canada et les autres pays du PTP s’est chiffré à 134,0 milliards de dollars; les exportations de services vers ces pays ont atteint 58,8 milliards de dollars, contre des importations de 75,2 milliards de dollars. Cette année-là, parmi les pays du PTP, les États‑Unis ont été les destinataires de 89,6 % des exportations de services et à l’origine de 89,3 % des importations de services du Canada, sur la base de la valeur des échanges.

Le stock d’investissement direct au Canada en provenance des autres pays du PTP s’est chiffré à 420,8 milliards de dollars en 2015; de ce montant, 387,7 milliards de dollars provenaient des États-Unis. Le stock d’investissement direct du Canada dans les autres pays du PTP a atteint la même année 527,0 milliards de dollars, dont 448,5 milliards de dollars se trouvaient aux États‑Unis.

Étapes à franchir en vue de l’entrée en vigueur du Partenariat transpacifique

Le pays qui signe un traité international signifie ce faisant son acceptation de principe des modalités du traité et son intention de s’y soumettre. Cependant, les pays signataires ne sont pas officiellement liés par un traité tant qu’ils ne l’ont pas ratifié et que celui-ci soit entré en vigueur. Avant que le PTP puisse entrer en vigueur, l’une des conditions suivantes devra être remplie :

  • Le PTP entrera en vigueur 60 jours après la date de ratification par tous les pays signataires originaux.
  • Si les pays signataires originaux n’ont pas tous ratifié l’Accord dans un délai de deux années suivant la date de sa signature, l’Accord peut tout de même entrer en vigueur 60 jours après l’expiration de ce délai s’il est ratifié par au moins six des signataires originaux qui représentent ensemble au moins 85 % de la valeur en 2013 du produit intérieur brut (PIB) combiné des signataires originaux.
  • Si aucun de ces scénarios ne se produit, l’Accord peut tout de même entrer en vigueur 60 jours après la date à laquelle au moins six des pays signataires originaux, représentant ensemble au moins 85 % de la valeur en 2013 du PIB combiné des signataires originaux, aient ratifié l’Accord.

Dans chacun des trois scénarios ci-dessus, il faudrait que les États-Unis et le Japon ratifient tous deux le PTP pour que celui-ci entre en vigueur. Or, puisque les États‑Unis ont annoncé récemment qu’ils retiraient leur signature de l’Accord, la possibilité s’offre aux 11 autres pays du PTP de négocier un nouvel ALE entre eux; un accord qui pourrait se fonder sur le texte du PTP.

Le gouvernement du Canada ne peut pas ratifier un traité international comme le PTP avant que les mesures nécessaires aient été prises afin que les dispositions du traité s’appliquent dans le droit canadien. Avant que le gouvernement ratifie l’accord, une loi de mise en œuvre doit être adoptée au Parlement et entrer en vigueur pour que les dispositions du traité puissent être mises en œuvre au Canada. Après la sanction royale, le Cabinet rédige un décret en vue d’autoriser un ministre à signer un instrument de ratification. Une fois que l’instrument est déposé auprès de l’autorité concernée, le traité est officiellement ratifié, et le Canada y est lié au moment de l’entrée en vigueur du traité; dans le cas du PTP, l’autorité concernée est la Nouvelle-Zélande.

CONSULTATIONS DU GOUVERNEMENT

Selon les documents remis au Comité par Affaires mondiales Canada[13], le gouvernement a, du 1er janvier 2012 au 19 octobre 2015, consulté les provinces et les territoires ainsi que d’autres parties prenantes – entreprises, milieu universitaire, société civile, centres de recherches et syndicats. Ces documents signalent aussi que, pendant cette période, le gouvernement a eu un total de 2 457 « interactions » sur le PTP avec 424 intervenants; il a aussi reçu 1 094 communications écrites ou électroniques sur le PTP, dont 314 du public.

Affaires mondiales Canada a aussi fourni au Comité des documents qui indiquent que, du 19 octobre 2015 au 31 janvier 2017, le gouvernement a tenu des consultations avec les provinces et territoires ainsi qu’avec des entreprises, des universitaires, des organisations civiles, des centres d’études, des municipalités, des groupes autochtones et des syndicats. Il a eu pendant cette période 778 interactions avec 576 intervenants au sujet du PTP, et a reçu 41 084 communications écrites ou électroniques, dont 40 917 du public.

Consultations avant la conclusion des négociations du Partenariat transpacifique

À quelques exceptions près, les témoins issus du milieu des affaires ont dit au Comité que le gouvernement les avait consultés avant la conclusion des négociations sur le PTP. Manufacturiers et exportateurs du Canada a dit « avoir été bien consultés du début à la fin ». De même, la Chambre de commerce du Canada a indiqué qu’elle avait « passablement dialogué » avec le gouvernement – quoiqu’elle ait ajouté que, de son point de vue, les consultations auraient pu être plus soutenues.

Les témoins du secteur agricole du Canada ont décrit le processus de consultation exhaustif entrepris par le gouvernement. La Canadian Cattlemen’s Association a déclaré que « [l]e gouvernement est prêt, et même disposé, à consulter les personnes qui ont des opinions, qui peuvent améliorer ces accords ». Les Producteurs de poulet du Canada ont dit avoir « participé activement aux consultations » et « tenu des discussions régulières avec […] les négociateurs ». De plus, le représentant de l’Association des vignerons du Canada a mentionné qu’il a participé à des conférences téléphoniques avec la négociatrice en chef au moins une fois tous les deux mois, et que des fonctionnaires fédéraux ont pris part à des réunions de son conseil d’administration.

Cela dit, certains des témoins du secteur privé ont déploré que les consultations du gouvernement n’aient pas été plus efficaces, ou plus soutenues. Ford du Canada Limitée a informé le Comité que « les consultations ont certainement été exhaustives. Nous avons au moins pu nous faire entendre. Malheureusement, on n’a pas tenu compte [de notre opinion dans] l’analyse finale. » De même, la Fédération canadienne de l’entreprise indépendante a observé que « nous n’avons probablement pas été consultés autant que [nous] l’aur[ions] souhaité ».

Dans son mémoire au Comité, l’Association canadienne des producteurs d’acier a donné à entendre que le processus de consultation du gouvernement n’a peut-être pas été aussi sincère qu’il aurait dû l’être : certaines des dispositions du PTP qu’elle jugeait préoccupantes étaient « au moins en partie le résultat de l’absence d’un dialogue véritable [du gouvernement] avec les secteurs touchés avant la conclusion de l’accord ».

L’Association des fabricants de pièces d’automobile a parlé de l’influence qu’ont eue les États‑Unis sur la négociation de certaines dispositions du PTP qui pourraient avoir un effet sur les fabricants de pièces d’automobile canadiens, particulièrement celles concernant les règles d’origine, les mesures de sauvegarde et le retour aux droits antérieurs dans le secteur de l’automobile. L’Association a indiqué au Comité que : « [c]'est là que réside le problème du PTP en ce qui concerne le secteur de la fabrication des pièces d’automobile au Canada. Personne en position d’autorité n’a investi dans des consultations avec l’industrie avant qu’on se fasse avoir par les principaux partenaires commerciaux qui ont fait fi des intérêts du Canada lorsqu’ils ont négocié l’accord en notre absence. »

Ce n’était toutefois pas l’avis d’Affaires mondiales Canada : « nous tenions beaucoup de consultations avec l’industrie des pièces automobiles, son association et les entreprises. Pour en arriver à notre entente qui, [nous] d[evons] l’admettre, n’a pas plu à tout le monde, nous avons tenu compte des priorités des fabricants de pièces automobiles, des pièces qu’ils fabriquent et de ce qu’ils considèrent comme étant leurs priorités. »

Dans un mémoire présenté au Comité, l’Union internationale des employés des services-Ouest a affirmé que le gouvernement n’a pas tenu compte de l’opinion des intervenants qui n’étaient pas de grandes entreprises : « Durant les négociations du PTP, une petite délégation de la société civile, du milieu syndical et de la petite entreprise a été invitée à donner son avis dans les rondes de négociation, mais à en juger par le texte du PTP, il est clair que bien que ces groupes puissent avoir été invités à la table, ce ne sont que les grandes entreprises qui ont bénéficié d’une oreille attentive. »

Certains témoins ont dit qu’ils n’ont pu ni rencontrer ni consulter des représentants du gouvernement pour discuter du PTP. Les Syndicats des métiers de la construction du Canada auraient tenté de rencontrer le gouvernement et le ministre du Commerce international pendant la négociation du PTP, mais leurs demandes auraient « toujours été refusées ».

Discutant des engagements pris par le Canada, dans l’Accord, relativement à l’admission temporaire de certains travailleurs des pays du PTP, l’International Union of Operating Engineers a dit que « le PTP sera le premier accord commercial national à viser les travailleurs de la construction du Canada. Malheureusement, on n’a pas consulté les travailleurs de la construction avant de les inclure dans cet accord. Si on l’avait fait, il aurait été possible d’aborder certaines de nos préoccupations, par exemple l’exécution de la loi, à ce moment-là. » Cela dit, le syndicat a reconnu qu’il n’a pas contacté le gouvernement : « Je sais qu'on nous a demandé pourquoi nous n'avions pas cherché à faire des représentations. Nous avons tout simplement présumé que le travail serait exclu de cet accord-ci. Puisqu'il avait toujours été exclu des accords précédents, nous n'avions aucune raison de nous préoccuper de cela ».

Affaires mondiales Canada a dit au Comité que, à sa connaissance, aucun membre de l’équipe de la négociatrice en chef n’a jamais refusé de rencontrer un intervenant ou de prendre un appel téléphonique si la personne souhaitait discuter du PTP. Cependant, les représentants du Ministère ont reconnu que certains intervenants ont dû signer des ententes de confidentialité avant de recevoir des renseignements confidentiels sur les négociations en cours. Quelques témoins ont indiqué qu’ils n’étaient pas à l’aise avec une telle exigence. Par exemple, OpenMedia a refusé de signer l’entente de confidentialité parce que « les Canadiens ont le droit de savoir de quoi nous discutons et quels genres de négociations nous tenons ».

 Affaires mondiales Canada a aussi précisé que les organisations syndicales, à l’instar des membres du public, ont eu la possibilité de présenter leur point de vue dans le cadre du processus lancé par l’intermédiaire de la Gazette du Canada, et qu’elles ont été invitées aux séances d’information publiques données par le gouvernement du Canada.

Par ailleurs, certains témoins ont avancé que le gouvernement n’avait pas consulté les groupes autochtones. Témoignant à titre personnel, Pamela Palmater, de l’Université Ryerson, a dit au Comité que les « Premières Nations n’ont pas été invitées à participer au processus [de consultation] et elles auraient dû pouvoir y participer parce que [le PTP] touche leurs terres, leurs ressources, leur propriété intellectuelle et leur environnement, toutes les choses qui protègent les Autochtones ». Mme Palmater a soutenu que cette absence de consultation contrevenait à la Constitution du Canada. L’Union of British Columbia Indian Chiefs a secondé l’opinion voulant que le gouvernement n’avait pas consulté les groupes autochtones et a dit que cette absence de consultation enfreignait la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones.

Consultations depuis la conclusion des négociations du Partenariat transpacifique

Affaires mondiales Canada a résumé comme suit les résultats des consultations menées par le gouvernement sur le PTP depuis novembre 2015 : « nous avons constaté que les gens d’affaires, au Canada estiment en règle générale que le PTP représente une importante occasion de diversifier les échanges commerciaux du Canada en permettant aux exportateurs et aux investisseurs canadiens d’avoir un meilleur accès aux marchés de la région Asie-Pacifique ». Selon le Ministère, « [l]es organisations de la société civile et les syndicats s’inquiètent des répercussions que le PTP aura sur les emplois au Canada, de la portée et de l’application du mécanisme de règlement des différends entre investisseurs et États ainsi que de certaines dispositions relatives à la propriété intellectuelle ».

Les témoins ont donné différents points de vue sur les consultations menées par le gouvernement du Canada sur le PTP depuis novembre 2015. Certains ont dit avoir entretenu une correspondance avec le gouvernement ou avoir rencontré des responsables du gouvernement à de multiples reprises. C’est d’ailleurs le cas de l’Association des fabricants de pièces d’automobile, qui a indiqué avoir rencontré des agents du gouvernement et maintenu une communication constante depuis ce temps.

Le Congrès du travail du Canada a dit qu’il n’avait pas été consulté avant l’annonce de la fin des pourparlers entre les pays du PTP, mais qu’il avait eu par la suite deux rencontres avec la ministre du Commerce international pour parler du Partenariat, et qu’il y avait « appris de nombreuses choses » de la part des employés du gouvernement du Canada qui ont participé aux négociations.

Certains témoins ont proposé des améliorations au processus de consultation du gouvernement concernant le PTP. Unifor a dit : « nous espérons que [la consultation] sera constructive et qu’elle ne sera pas menée derrière des portes closes ou au sein de conseils d’administration, mais plutôt dans les centres communautaires et les assemblées publiques ». Dans un mémoire, le Syndicat des Métallos a écrit : « Selon nous, de vraies consultations comprennent un examen public complet incluant une analyse indépendante et approfondie du texte du PTP, une évaluation des répercussions par le directeur parlementaire du budget et des consultations distinctes et constructives avec les syndicats, les Premières Nations et d’autres groupes de la société civile. »

Certains témoins ont mis en doute l’utilité des consultations du gouvernement sur le PTP. Dans son mémoire au Comité, le Syndicat national des employées et employés généraux du secteur public a dit du processus qu’il était « très limité » et qu’il « n’a été entamé qu’après la fin des négociations et la signature de l’Accord ». De même, la K’atl’odeeche First Nation a qualifié les consultations de « très faibles » et déploré que « l’accord est presque impossible à modifier, maintenant ». Cela dit, l’Assemblée des Premières Nations a dit du texte du PTP qu’il « n’est pas le texte définitif » et déclaré : « nous demandons que les gouvernements des Premières Nations soient invités immédiatement à participer pleinement à toute négociation à venir sur la mise en œuvre du PTP ».

RETOMBÉES ATTENDUES DU PARTENARIAT TRANSPACIFIQUE AU CANADA

Les témoins avaient des avis partagés concernant les retombées globales du PTP au Canada. Selon certains, l’Accord viendra accroître le taux de croissance économique national et la création d’emplois en procurant à certaines entreprises de nouveaux débouchés et un meilleur accès aux marchés d’exportation. Pour d’autres, le PTP ne sera pas aussi bénéfique pour l’économie canadienne que ne le soutiennent certains  de ses partisans, pourrait entraîner des pertes d’emplois, aggraver les inégalités économiques au Canada, renforcer l’influence des grandes sociétés sur les politiques publiques canadiennes et/ou saper les protections des droits de la personne au Canada et à l’étranger.

Avantages globaux attendus du Partenariat transpacifique au Canada

Son Excellence Tony Negus, haut-commissaire du Commonwealth d’Australie au Canada, a dit au Comité qu’on n’a pas conclu d’ALE aussi important que le PTP depuis 20 ans. Selon lui, l’Accord « créera d’autres débouchés pour les entreprises et réduira les prix que doivent payer les consommateurs ».

Au sujet des nouveaux débouchés qu’ouvrirait aux exportateurs canadiens la ratification du PTP, certains témoins ont évoqué la taille du marché combiné des pays du PTP. Par exemple, dans son mémoire au Comité, la BC Chamber of Commerce a écrit ce qui suit :

L’un des principaux avantages du PTP est qu’il regroupe 12 pays, notamment les États‑Unis et le Japon, dont la population totale compte quelque 792 millions de personnes et dont l’ensemble du PIB s’élève à 28 500 milliards de dollars. À l’heure actuelle, les membres du PTP représentent près de 40 % du PIB mondial et environ le tiers du commerce à l’échelle internationale. Compte tenu de telles données économiques, le Canada se doit d’être assis à la table des négociations.

De la même manière, le Conseil de la fédération a mentionné que le PTP « offre une importante possibilité d’améliorer l’accès des entreprises canadiennes à 40 % de l’économie mondiale. [Le PTP] contribuera à la croissance de l’emploi et entrainera d’autres retombées économiques ».

De nombreux témoins ont mentionné que les réductions tarifaires prévues par le PTP faciliteront leurs exportations; certains ont ajouté que le Partenariat aplanirait aussi les obstacles non tarifaires au commerce. La Chambre de commerce du Montréal métropolitain a fait observer que le PTP est « un traité qui aborde, avec plus de profondeur que les traités précédents, des aspects non tarifaires qui obstruent les démarches d’internationalisation de nos entreprises ». Par exemple, l’Accord devrait profiter au secteur des services en facilitant la délivrance de visas aux voyageurs d’affaires et l’admission temporaire de professionnels et de techniciens.

Bombardier Inc. a cité de nombreux enjeux non tarifaires qu’aborde le PTP : les entreprises d’État, la cohérence de la réglementation, la propriété intellectuelle, le commerce électronique et les marchés publics. La société a avancé que « les négociateurs du PTP ont beaucoup mis l’accent sur les défis commerciaux, nouveaux et émergents ».

De nombreux représentants du milieu des affaires canadien ont dit que, parmi les pays du PTP, les débouchés les plus importants seraient au Japon. De plus, le Cross‑Border Institute a mentionné que même si l’économie japonaise croît actuellement lentement, son « potentiel est fort considérable [et] les perspectives d’expansion commerciale avec le Canada sont bonnes ». Selon cet institut, la réduction des droits à l’importation imposés par le Japon prévue dans le PTP pourrait réduire le déficit commercial du Canada vis‑à‑vis de ce pays.

Plus d’un témoin a exprimé la conviction que le PTP permettrait au Canada d’expédier une plus grande part de ses exportations vers les marchés émergents. Ainsi, le Conseil canadien des affaires a signalé que les marchés émergents sont à l’origine de 80 % de la croissance économique mondiale, mais que 85 % des exportations du Canada sont destinées aux économies avancées, qui, elles, « tournent au ralenti ».Après avoir mentionné que l’Asie comptera 2,7 milliards de consommateurs de la classe moyenne d’ici 2030, UPS Canada a indiqué que « [l]orsque les consommateurs de ces marchés accèdent à la classe moyenne, ils commencent à s’intéresser aux biens et services qu’offre le Canada, non seulement aux produits alimentaires et énergétiques mais aussi aux services de construction, de gestion d’entreprise et de finances ». Selon la Chambre de commerce du Montréal métropolitain, le PTP offrira au Canada un accès préférentiel au « Vietnam et à la Malaisie, des pôles majeurs de l’économie mondiale, ayant pour 2016 des croissances respectives de 6,3 % et de 4,4 %, ainsi qu’à Singapour, un carrefour commercial qui offre beaucoup de potentiel pour le secteur des services ».

Même si le PTP ne réunit pas actuellement tous les pays d’Asie, plusieurs témoins ont rappelé que la liste des États membres du Partenariat pourrait s’allonger. Par exemple, le Cross-Border Institute a mentionné que l’Indonésie, un marché de 255 millions d’habitants, pourrait se joindre au PTP. Dans cette éventualité, il serait plus facile pour le Canada de percer le marché indonésien dans le cadre du PTP que de négocier un ALE bilatéral avec ce pays. De même, le Saskatchewan Trade and Export Partnership a fait remarquer que le Canada, s’il ne ratifiait pas le PTP, pourrait rater sa chance d’obtenir un accès préférentiel au marché de pays – p. ex. la Chine, l’Inde et l’Indonésie – qui pourraient adhérer au Partenariat ultérieurement.

Certains témoins ont avancé que le Canada attirera davantage l’investissement des entreprises s’il jouit d’un accès préférentiel aux marchés du PTP. Ainsi, le Conseil canadien des affaires a dit au Comité que, si le Canada ratifiait à la fois le PTP et l’AECG Canada-UE, il serait « le seul pays du G7 à échanger librement avec les États‑Unis, les Amériques, l’Europe et l’Asie-Pacifique, ce qui englobe trois des quatre plus grandes économies du monde. L’immense réseau commercial ainsi constitué ferait du Canada une plaque tournante de l’exportation dans le monde, ce qui se traduirait par des investissements et des emplois d’un bout à l’autre du pays ».

Outre l’importance de l’accès préférentiel aux marchés ouvert par le PTP et son potentiel de création de nouveaux investissements commerciaux au Canada, la Banque Scotia a affirmé que le libre-échange intensifie la pression concurrentielle sur les entreprises canadiennes, pour ainsi stimuler l’innovation et la croissance de la productivité – deux facteurs que la Banque a décrit comme essentiels au dynamisme à long terme de l’économie canadienne et au relèvement du niveau de vie des Canadiens. Cela dit, Jim Balsillie, de l’Institute for New Economic Thinking, qui a comparu à titre personnel, n’était pas d’avis que le PTP favoriserait l’innovation au Canada : « Je vous garantis qu'il n'y aura plus jamais une autre compagnie de technologie canadienne comme RIM sous le régime du PTP ».

Certains témoins ont dit que, dans l’éventualité où le PTP entrerait en vigueur sans être ratifié par le Canada, les exportateurs canadiens seraient désavantagés par rapport aux entreprises des autres pays membres du Partenariat, puisqu’ils n’auraient pas le même accès préférentiel aux marchés du PTP. La Greater Saskatoon Chamber of Commerce a dit : « [s]i le Canada décidait de se retirer de cet accord, nous nous retrouverions après un certain temps à avoir plus de difficulté à accéder même aux marchés traditionnels, sans parler de l’accroissement des débouchés et de la capacité de production que susciterait cette formidable région ». La Chambre de commerce du Montréal métropolitain a abondé dans le même sens : « [s]i les États‑Unis ont un avantage concurrentiel […] et que nous n’avons pas un tel avantage, cela va paraître, comme dans le cas de la Corée du Sud à l’époque où les États-Unis ont signé une entente avec ce pays. Nous n’avions pas un tel accord [avec la Corée du Sud] et nous avons perdu des parts de marché immenses ».

Coûts globaux attendus du Partenariat transpacifique au Canada

Certains des témoins n’étaient pas convaincus que le PTP apporterait au Canada des avantages économiques importants. Par exemple, le Centre canadien de politiques alternatives a indiqué que le Canada a actuellement un ALE avec quatre pays du PTP et que les droits de douane sont « déjà très faibles » avec les sept autres pays du PTP. De plus, le Centre a soutenu que « [n]ous jouissons déjà d'un accès en franchise de droits pour nos exportations. Actuellement, 98 % de nos exportations dans la région visée par le PTP concernent des pays avec lesquels nous jouissons déjà d’un accès en franchise de droits, soit en vertu d’un accord commercial ou, dans le cas de Singapour, parce que ce pays n'a pas conclu d'accords commerciaux. Ceux qui ont examiné l'accord sérieusement prédisent que l'impact sera minime, malgré certaines aberrations. » Selon le Centre, comme les importations en provenance des pays du PTP avec lesquels le Canada n’a pas déjà un ALE sont assujetties à des droits plus élevés que les exportations canadiennes dans ces pays, le PTP risque donc d’alourdir le déficit commercial du Canada vis-à‑vis de ces pays.

Pour certains témoins, le PTP entraînera des pertes d’emplois ou une réduction des salaires au Canada. Par exemple, le Syndicat des Métallos a prédit que le Partenariat fera chuter les salaires des travailleurs du Canada « en les mettant en concurrence avec des travailleurs étrangers mal payés, tant chez nous qu’à l’étranger ». Affaires mondiales Canada a donné un autre son de cloche : selon le Ministère, les professionnels étrangers qui viendraient travailler au Canada dans le cadre des engagements du PTP devraient « recevoir un salaire qui correspond au salaire en vigueur pour le même type de profession avec une expérience comparable sur le marché canadien, dans la région concernée ».

Par ailleurs, des témoins opposés à la ratification du PTP par le Canada ont avancé que le Partenariat creuserait l’inégalité au Canada, ou encore qu’il ne profiterait pas à la majorité des Canadiens. Par exemple, dans un mémoire, le Niagara Regional Labour Council a écrit que « les dispositions [du PTP] entraîneront la perte de milliers d’emplois, la hausse du chômage et la stagnation des salaires et, par conséquent, le maintien des inégalités ». Rosemary Pogue, dans un mémoire écrit au Comité à titre personnel, a soutenu que le PTP allait « avantager les grandes sociétés et les personnes très fortunées. Mon opposition découle des dispositions qui font passer le profit avant le bien-être de la plupart des citoyens ».

De plus, beaucoup de témoins se sont dits d’avis que le PTP augmenterait l’influence des grandes entreprises sur la politique publique au Canada. Dans un mémoire présenté à titre personnel, Gerry Haustein a écrit ce qui suit : « [l]’objectif véritable du PTP consiste à accorder [aux sociétés] une place et un contrôle plus grands sur le commerce, l’environnement, le droit d’auteur et d’autres lois. Vous ne pouvez accorder davantage de place et de contrôle aux sociétés sans priver les gens ordinaires de ces choses élémentaires ». Cela dit, Affaires mondiales Canada a offert une perspective différente en soulignant que les dispositions du PTP renforcerait le droit des pays membres « de légiférer dans l'intérêt public ».

Pour certains intervenants, le PTP est en outre contraire à la démocratie. Par exemple, Travailleurs et travailleuses unis de l’alimentation et du commerce Canada l’a qualifié d’« affront » à la démocratie parce que ses dispositions sur le règlement des différends entre investisseurs et États (RDIE) permettraient aux entreprises de poursuivre en justice des gouvernements élus démocratiquement. De même, dans un courriel où elle a exprimé son point de vue au Comité à titre personnel, Katherine Maas a écrit que le PTP « retire le pouvoir des mains de nos élus démocratiques pour le donner aux grandes sociétés ».

Certains témoins ont exprimé des préoccupations quant à l’impact éventuel du PTP sur les droits de la personne. Dans son mémoire au Comité, Amnistie internationale a signalé que le commerce peut « avoir une incidence positive ou négative sur la protection des droits de la personne ». L’organisme, sans se prononcer pour ou contre la ratification de l’Accord par le Canada, a avancé que le PTP pourrait avoir des répercussions sur un large éventail de droits de la personne, comme l’égalité entre les sexes, les droits des peuples autochtones, les droits du travail, le droit à la vie privée, la liberté d’expression, le droit à la santé ainsi que les droits liés à l’alimentation, à l’eau potable, à l’assainissement et au logement.

Enfin, quelques témoins ont parlé des répercussions potentielles du PTP sur les droits des peuples autochtones. Selon l’Assemblée des Premières Nations, « des investisseurs au titre du PTP […] pourraient considérer que plusieurs des mesures fédérales et provinciales visant à reconnaître les droits des Premières Nations constituent des expropriations indirectes », et « [l]e mécanisme RDIE [du PTP] oblige[rait] le Canada et les investisseurs à décider entre eux de la portée et de la teneur des droits des Premières Nations ». L’Assemblée a ajouté que le PTP aurait « des répercussions dramatiques sur l'autodétermination des Autochtones, surtout l'autonomie gouvernementale ».

Modélisation des répercussions économiques du Partenariat transpacifique au Canada

Certains témoins ont cité des études sur les répercussions probables du PTP pour l’économie canadienne. Ainsi, Affaires mondiales Canada, qui a réalisé une évaluation des répercussions économiques de la participation éventuelle du Canada au PTP[14], a résumé comme suit les résultats de cette étude, partagée au Comité le 9 septembre 2016 : « l’étude prévoit une croissance du PIB de 0,127 % si le Canada fait partie du PTP, ce qui amènerait une augmentation du PIB de 4,3 milliards de dollars à long terme. Si le Canada n’y participe pas, mais que les 11 autres pays mettent l’accord en application, l’étude prévoit une baisse du PIB de 5,3 milliards de dollars d’ici 2040. »

Selon certains témoins, le gouvernement du Canada n’aurait pas dû signer le PTP avant qu’Affaires mondiales Canada ne termine son évaluation des répercussions économiques. De plus, quelques intervenants qui ont comparu devant le Comité avant la publication des résultats de l’évaluation, ont dit qu’il leur était difficile – justement parce que ces résultats n’étaient pas encore disponibles – de prédire les avantages et les risques de la ratification du PTP par le gouvernement.

Les témoins ont cité différentes estimations des gains ou pertes économiques qu’entraînerait la ratification du PTP, mais les chiffres avancés présentaient des écarts considérables. Par exemple, le Conseil canadien des affaires a cité une étude réalisée par le Peterson Institute for International Economics, aux États‑Unis, selon laquelle le PTP augmenterait le revenu national canadien de 37 milliards de dollars d’ici 2030. La Chambre de commerce du Canada, quant à elle, a soutenu que les bénéfices économiques de la participation du Canada au PTP, selon les études d’impact, seraient de 5 à 10 milliards de dollars par année.

Dan Ciuriak, qui a présenté un mémoire à titre personnel, a fait état de retombées économiques plus limitées, à la lumière de l’étude qu’il a coréalisée pour le compte de l’Institut C.D. Howe. Selon cette étude, la mise en œuvre du PTP entraînerait pour le Canada une « légère » hausse du PIB de 0,07 % d’ici 2035, ce qui ferait augmenter d’environ 3 milliards de dollars le revenu des ménages.

Le Comité a également entendu les témoignages de deux auteurs d’une étude réalisée en 2016 au sujet de l’impact du PTP sur des indicateurs économiques, comme le PIB, l’emploi et l’inégalité de revenu[15]. L’un des coauteurs de cette étude, Alex Izurieta, des Nations Unies, a comparu devant le Comité à titre personnel. Il a affirmé que, au Canada, le PTP « n’aura pratiquement aucun effet sur la croissance du PIB », entraînera « la perte d’environ 60 000 emplois sur 10 ans », et creusera l’inégalité de revenu.

Jeronim Capaldo, de l’Université Tufts[16], un des coauteurs de M. Izurieta, a aussi comparu à titre personnel. Il a soutenu que l’évaluation des retombées économiques réalisée par Affaires mondiales Canada, au lieu de modéliser directement les répercussions du Partenariat sur l’emploi au Canada, présuppose un certain niveau d’emploi au lendemain de l’entrée en vigueur du PTP. Or, selon M. Capaldo, l’hypothèse du plein emploi retenu par le Ministère était invraisemblable, ce qui influe probablement sur son estimation de l’impact de la ratification du PTP sur le PIB du Canada.

Affaires mondiales Canada a reconnu que son évaluation des répercussions économiques du PTP ne modélise pas explicitement le marché du travail du Canada et s’intéresse plutôt à la réaffectation des ressources qui se produirait à l’intérieur de l’économie canadienne dans le sillage du PTP. Le Ministère a dit que « [h]abituellement, comme les politiques commerciales entraînent une réaffectation de ressources, les répercussions sur l’emploi global sont relativement faibles ». Il a ajouté que le modèle économique employé dans l’étude de MM. Izurieta et Capaldo part de projections de l’impact commercial du PTP pour estimer l’effet du Partenariat sur les indicateurs économiques comme l’inégalité de revenu. Or, selon le Ministère, ce modèle est structuré de telle façon qu’il y aura augmentation de l’inégalité de revenu, quel que soit l’impact projeté du PTP sur le commerce.

Enfin, certains témoins ont avancé que les évaluations des répercussions économiques du PTP ne tiennent pas compte de l’effet qu’auront certaines de ses dispositions. C’était l’opinion de M. Balsillie. Ce dernier a fait valoir que tous les modèles d’évaluation des répercussions économiques probables du PTP omettent de prendre en compte les dispositions sur la propriété intellectuelle et le RDIE, qui sont selon lui les aspects les plus importants du Partenariat.

LA RATIFICATION DU PARTENARIAT TRANSPACIFIQUE

Affaires mondiales Canada a avisé le Comité que les 11 autres signataires du PTP en sont à diverses étapes de leur procédure interne de ratification, mais que – au 6 octobre 2016 – aucun de ces pays n’avait encore ratifié l’Accord. Le Ministère a aussi expliqué que les signataires ont jusqu’en février 2018 pour faire entrer le PTP en vigueur.

Presque tous les courriels reçus par le Comité pendant son étude, la plupart ayant été envoyés dans le cadre de campagnes de courriels, s’opposaient à la ratification du PTP par le gouvernement, et c’était aussi la position de certains témoins. Par exemple, Ford du Canada Limitée a dit que le gouvernement ne devrait pas ratifier le PTP sous sa forme actuelle, mais plutôt travailler avec les autres signataires afin de l’« améliorer » pour l’industrie de l’automobile et les autres secteurs de l’économie canadienne.

En ce qui concerne la décision du Canada de ratifier ou non le PTP, le Centre canadien de politiques alternatives a partagé la constatation suivante : « Les recherches que nous avons effectuées jusqu'ici portent sérieusement à croire qu'il serait risqué pour le Canada de ratifier le PTP surtout parce que son impact négatif sur la capacité de nos gouvernements à mettre en place une réglementation dans l'intérêt public l'emporte largement sur les avantages. Même si certains secteurs ou groupes pourront peut-être en tirer profit, le PTP ne présente pas un avantage net pour le Canada. Nous recommandons donc de ne pas le ratifier. »

L’Alliance of Canadian Cinema, Television and Radio Artists a aussi recommandé à la Chambre des communes de rejeter le PTP, estimant que sa ratification « restreindra le droit du Canada de mettre en œuvre tout l’éventail des politiques culturelles dont les Canadiens ont besoin ». L’organisme a proposé les prochaines étapes suivantes :« [s]i les dispositions du PTP sont réexaminées ou en cas de tout nouvel effort afin d’appliquer cet accord à d’autres pays, [l’Alliance of Canadian Cinema, Television and Radio Artists] exhorte le gouvernement à rouvrir les négociations pour que le Canada obtienne une plus vaste exemption culturelle avant de ratifier l’accord ».

Par contre, d’autres témoins voulaient que le Canada ratifie le PTP, parfois dans de brefs délais. Son Excellence Daniel John Mellsop, haut-commissaire de la Nouvelle‑Zélande au Canada, a signalé que la Nouvelle-Zélande encourageait le Canada à ratifier le PTP. Son Excellence Kenjiro Monji, ambassadeur du Japon au Canada, s’adressant au Comité après que les États-Unis aient décidé de retirer leur signature du PTP, a dit : « le Japon demande aux autres signataires de procéder à la ratification, même après que les États-Unis ont dit qu'ils se retiraient. ». Plus précisément, il a exprimé l’espoir que le gouvernement du Canada « poursuivra ses consultations sur le PTP [en vue de la ratification de ce dernier] ».

 Alberta Beef Producers a dit que le gouvernement devrait ratifier le PTP rapidement, question de « maintenir l’élan vers une mise en œuvre générale de l’accord ». Et pour l’Association nationale des engraisseurs de bovins, « on peut faire valoir que le Canada devrait ratifier l’accord du PTP avant les États-Unis afin de mieux résister aux efforts de ces derniers pour lui arracher d’autres concessions ».

Cependant, certains témoins ont plutôt appelé le Canada à attendre l’issue de certains événements futurs avant de décider la ratification. Par exemple, dans un mémoire présenté à titre personnel, Robert Wolfe a avancé que l’un des objectifs de la politique commerciale du Canada était de maintenir l’accès au marché américain et aux chaînes d’approvisionnement centrées sur les États‑Unis à des conditions aussi favorables pour le Canada que pour les autres pays. Il s’est dit d’avis que le Canada ne devrait ratifier le PTP que si le gouvernement des États-Unis le fait en premier. Quant à la Chambre de commerce du Canada, elle a soutenu qu’il serait catastrophique que le Canada ne ratifie pas le PTP si ses partenaires de l’ALENA le font.

Dans un mémoire présenté à titre personnel, Lawrence Herman, du cabinet Herman & Associates, a dit que le gouvernement « ne devrait pas s’engager envers cet accord et prendre la voie de sa ratification tant que nous ne saurons pas clairement si le gouvernement américain consentira à ratifier l’accord, ainsi que les conditions qu’il posera ».

Certains ont dit au Comité que la décision des États-Unis de se retirer du PTP ne devrait pas empêcher les autres pays du PTP de conclure un ALE si c’est dans leur intérêt de le faire. Son Excellence Duc Hoa Nguyen, ambassadeur de la République socialiste du Vietnam au Canada, a dit ce qui suit :

D'aucuns affirment que le retrait de Washington a sonné le glas du PTP, mais certains pays ne partagent pas cet avis. Le Japon et Singapour ont déjà ratifié l'accord, et le Japon et l'Australie collaborent ensemble et travaillent avec d'autres partenaires pour aller de l'avant. Le Chili a proposé de tenir une réunion à la mi-mars et y a convié les 12 pays participants ainsi que la Corée du Sud et la Chine. Nous voyons cette idée d'un œil favorable, et nous sommes très sensibles à tous les efforts et toutes les initiatives qui visent à trouver de nouvelles manières d'aller au-delà du PTP.

De plus, Son Excellence Aminahtun Binti Hj. A. Karim, haut-commissaire de Malaisie au Canada, s’est dite d’avis que le PTP pourrait encore entrer en vigueur pourvu que les pays signataires en changent une des dispositions : « Dans la conjoncture, l'entrée en vigueur du Partenariat transpacifique ne saurait se produire sans la participation des États-Unis. Il serait possible d'aller de l'avant sans les États-Unis, mais il faudrait pour cela modifier l'article qui, dans l'accord signé, porte sur l'entrée en vigueur. »

Certains témoins ont proposé au gouvernement de continuer de négocier des ALE bilatéraux ou régionaux tandis qu’il examine s’il y a lieu de ratifier le PTP. M. Ciuriak a prôné la conclusion d’un ALE Canada-Chine et appelé le gouvernement du Canada à « promouvoir vigoureusement les cadres de commerce et d’investissements d’Asie‑Pacifique sous le régime de l’APEC ».

De même, un certain nombre de témoins ont indiqué que, s’il advenait que les États-Unis décident de ne pas ratifier le PTP ou que le processus de ratification dans ce pays soit retardé, le Canada devrait conclure des ALE bilatéraux avec les pays du PTP avec lesquels il n’a pas encore d’entente de libre-échange. Par exemple, l’Association nationale des engraisseurs de bovins a soutenu que si les États-Unis n’approuvaient pas le PTP, le Canada devrait conclure un accord bilatéral avec le Japon qui « donnerait ce que nous espérions obtenir » avec le PTP « et qui remettrait les producteurs canadiens sur un pied d’égalité avec les producteurs de pays ayant déjà conclu des ALE avec le Japon. » Dans son mémoire au Comité, Ontario Pork a offert le conseil suivant : « [a]dvenant que la mise en oeuvre du PTP soit indûment retardée, par exemple en raison d’une impasse politique aux États-Unis, nous recommanderions fortement au gouvernement canadien de mettre rapidement en place une stratégie dynamique de négociations commerciales bilatérales ou régionales pour les marchés hautement prioritaires comme le Japon et le Vietnam. »

Selon certains témoins, le gouvernement pourrait avoir de la difficulté à conclure des ALE avec les pays de l’Asie-Pacifique si le PTP entrait en vigueur sans que le Canada ne le ratifie. Par exemple, M. Herman a soutenu que, si le PTP était ratifié par les États‑Unis et le Japon mais non par le Canada, le Japon « n’aura aucun intérêt à négocier une entente bilatérale avec le Canada, à mon avis. S’il le fait, ce sera une entente qui sera basée sur le PTP ». Le Conseil commercial Canada-ANASE a fait une observation du même ordre dans son mémoire : les avantages des ALE bilatéraux étant considérés comme limités, les pays d’Asie, ou au moins certains d’entre eux, ne se bousculeront probablement pas pour en négocier avec le Canada si ce dernier décide de ne pas ratifier le PTP.

Enfin, dans son mémoire au Comité, le Conseil des Canadiens a fait valoir que le gouvernement devrait attendre que le directeur parlementaire du budget procède à une analyse indépendante du PTP avant d’envisager de le ratifier. Selon le Conseil, une telle analyse devrait comprendre des consultations avec les provinces, la société civile, les syndicats, les municipalités et les Premières Nations, ainsi qu’un examen des répercussions potentielles du Partenariat sur les droits de la personne et l’environnement[17].

LE SOUTIEN FÉDÉRAL AUX ENTREPRISES CANADIENNES

Un grand nombre de témoins ont fait des propositions visant à soutenir les entreprises canadiennes; la plupart concernaient des mesures fédérales qui permettraient aux entreprises de tirer le maximum d’avantages des débouchés à l’exportation attendus du PTP. Par exemple, la Fédération des chambres de commerce du Québec a insisté sur l’importance du soutien public à l’innovation. Elle a dit que l’économie canadienne ne peut profiter des ALE que si les entreprises offrent des produits et des services novateurs et de calibre mondial. Elle a prié le gouvernement de prévoir, dans le plan de soutien à l’innovation qu’il a promis, de l’aide pour les entreprises canadiennes qui veulent accéder aux marchés extérieurs.

Des représentants de l’industrie manufacturière du Canada ont mentionné que les réseaux de soutien au commerce pourraient être renforcés dans ce secteur, notamment par l’élargissement du Service des délégués commerciaux. Par exemple, l’Association canadienne des fournisseurs de chemin de fer a écrit dans son mémoire que, par l’accroissement de ce service, « les entreprises pourraient mieux édifier leur présence sur le marché de l’Asie-Pacifique », y compris en repérant « les distributeurs, les acheteurs, les agents [ou] les représentants ».

De nombreux représentants du secteur des marchandises ont dit au Comité que le Canada devrait améliorer son infrastructure de soutien au commerce, particulièrement dans le domaine du transport. L’Association des produits forestiers du Canada, en plus d’affirmer que des efforts collectifs devaient être faits au Canada pour que les entreprises canadiennes soient en mesure de profiter des ALE, a insisté sur l’importance d’« infrastructures suffisantes pour les nouveaux marchés, en particulier dans le cas des échanges commerciaux au-delà de l’axe nord-sud, vers un axe est-ouest ».

Certains intervenants des provinces de l’Ouest du Canada ont décrit les problèmes que leur pose l’expédition ferroviaire de leurs produits, et reproché aux chemins de fer du Canada de ne pas respecter leurs obligations de rendement. Selon Viterra, « [l]e Canada a besoin d’un réseau de transport ferroviaire de marchandises qui est axé sur la demande — s’il veut profiter des débouchés commerciaux qui s’offrent à lui — et qui est soumis à des responsabilités claires et à un barème de sanctions correspondantes en cas d’inexécution ».

La Whitehorse Chamber of Commerce a dit ce qui suit : « [a]fin que les secteurs de l’exploitation des ressources, du tourisme, ainsi que du savoir et de l’innovation puissent atteindre leur plein potentiel, stimuler le commerce international et devenir des contributeurs nets à l’économie canadienne, il nous faudra faire plus que signer des accords commerciaux ». Elle a proposé entre autres que le gouvernement contribue à la mise en place d’un programme pour la construction de routes et l’installation de réseaux de communication à haute vitesse et d’autres technologies dans le Nord, afin de faciliter la prospection des ressources. Pour l’Association minière du Canada, le gouvernement devrait établir un fonds réservé au Nord dans la Banque de l’infrastructure du Canada proposée. Ce fonds devrait s’inspirer du modèle de l’Alaska Industrial Development and Export Authority, qui aurait connu un franc succès selon l’Association.

Beaucoup d’intervenants ont dit au Comité que les entreprises canadiennes, particulièrement les PME, n’avaient qu’une compréhension limitée du PTP. Par exemple, la Fédération canadienne de l’entreprise indépendante a indiqué que « bien des petites entreprises ne savent pas grand-chose au sujet du PTP ». De même, selon Manufacturiers et exportateurs du Canada, « [l]a quasi-totalité des petites entreprises canadiennes n’auraient aucune idée de la nature ni des conséquences [du PTP] ».

La Fédération canadienne de l’entreprise indépendante a donné son appui conditionnel à certaines dispositions du chapitre sur les PME de l’Accord du PTP, notamment celles prévoyant l’obligation pour les États signataires de créer des sites Web accessibles pour ces entreprises. La Fédération a souligné que ces sites Web devraient être rédigés en langage clair.

Selon certains intervenants, le gouvernement devrait faire sa part pour que les entreprises, surtout les PME, soient informées sur le PTP et les possibilités qu’il leur ouvre. Par exemple, pour la Fédération des chambres de commerce du Québec, le gouvernement devrait faire en sorte que les PME « savent ce dont elles ont besoin, en ce qui touche la conformité, la capacité, le type de production nécessaire, en vue d’accéder [aux] marchés [des pays du PTP] ».

COMMERCE DES MARCHANDISES

Dans l’évaluation des répercussions économiques qu’il a soumise au Comité, Affaires mondiales Canada a estimé que « [l]’Accord du PTP permettrait de réaliser des économies tarifaires sur les exportations canadiennes dans sept nouveaux pays partenaires de libre-échange (de quelque 428 millions de dollars par année). Il est à noter que la majorité de ces économies proviendraient du Japon, du Vietnam et de l’Australie[18]. » L’évaluation notait également que « [c]es économies tarifaires procurent aux exportations canadiennes un avantage supplémentaire pour ce qui est des coûts par rapport à celles de pays qui ne sont pas signataires de l’Accord du PTP, et les résultats tarifaires du PTP mettent en place, d’une façon générale, des règles du jeu équitable pour les autres concurrents du PTP dans ces marchés. »

De plus, le Comité a été avisé que le PTP entraînerait l’abolition des droits de douane perçus par le Canada sur certains produits. Selon le Conseil canadien du commerce de détail, le PTP permettrait aux détaillants canadiens de fournir « une plus vaste gamme de biens à des prix concurrentiels aux consommateurs canadiens […] Plus des tarifs sont éliminés, plus il y aura de produits offerts aux consommateurs canadiens à des prix concurrentiels. » Le Conseil commercial Canada-ANASE a signalé que les réductions et les éliminations des droits de douane prévues par le PTP réduiraient le prix des biens de consommation, de même que celui des biens de production et d’équipement achetés par les entreprises.

Cependant, certains témoins de l’industrie de l’automobile ainsi que des secteurs agricoles soumis à la gestion de l’offre, ont indiqué que leurs secteurs seraient davantage exposés à la concurrence des importations ou encore perdraient une part du marché intérieur en raison des dispositions du PTP sur les droits de douane et les contingents. Unifor a dit que « [a]vec l'élimination des tarifs et l'abaissement des seuils [des règles d’origine], nos emplois dans les secteurs du montage et des pièces non seulement seront menacés par les pays signataires du PTP, mais ils seront également pénalisés par les importations de la Chine, de la Malaisie et d'autres pays qui n'adhèrent pas au PTP ». Les Producteurs laitiers du Canada ont abondé dans le même sens : « L’AECG et le PTP ont ouvert la porte aux produits des industries laitières hautement subventionnées des États‑Unis et de l’Europe, ce qui place les producteurs laitiers canadiens dans une situation désavantageuse dans leur propre marché. »

Certains témoins ont fait remarquer que les dispositions du PTP sur les droits de douane ne sont pas les seules qui toucheraient le commerce des marchandises. Par exemple, UPS Canada a expliqué dans son mémoire que le PTP viendrait simplifier et moderniser le régime douanier, notamment par la réduction du nombre de documents à remplir aux douanes et par le recours accru aux processus et autorisations qui se font électroniquement.

Selon la British Columbia Maritime Employers Association, les exportations destinées à la région de l’Asie-Pacifique, par comparaison avec celles vers les États-Unis, mettent davantage à contribution les installations portuaires du Canada et créent donc plus d’emplois dans ce secteur.

Certains représentants du secteur des marchandises ont aussi mentionné que l’accès à de nouveaux marchés pourrait favoriser les investissements dans leurs activités canadiennes. Ainsi, selon la BC LNG Alliance, les débouchés qu’ouvrent les ALE accroissent la compétitivité du secteur canadien du gaz naturel liquéfié; or, selon l’organisme, le secteur a justement besoin de cette compétitivité accrue pour réaliser en Colombie-Britannique des projets de gaz naturel liquéfié qui « sont susceptibles d’être à l’origine du plus important investissement en capital de l’histoire canadienne ».

Cela dit, plus d’un témoin s’est dit convaincu que le PTP viendra amplifier la dépendance du Canada à l’égard des exportations de matières premières, sans pour autant accroître les activités de transformation à valeur ajoutée de ces produits au pays. Par exemple, le Réseau québécois sur l’intégration continentale a indiqué au Comité que « [l]e PTP, en soi, favorise l’importation des produits manufacturiers à valeur ajoutée et favorise l’exportation des ressources naturelles […] L’accord ne stimule pas les secteurs d’innovation et ne favorise pas les politiques industrielles. »

Selon le Réseau pour le commerce juste, le PTP « avantagera forcément les entreprises qui misent sur une main-d’œuvre bon marché et des normes moins rigoureuses pour faire concurrence ». L’organisme a affirmé que, depuis l’entrée en vigueur de l’ALENA, le Canada a perdu des emplois « bien rémunérés » dans le secteur manufacturier au profit de pays où les salaires sont moins élevés. Il a ajouté que les ALE comme le PTP « augmente[nt] également notre dépendance à l’égard des exportations et de l’exploitation des matières premières ».

Cependant, certains représentants du secteur manufacturier canadien ont soutenu que le PTP ouvrirait de nouveaux débouchés aux exportations dans ce secteur. Selon Manufacturiers et exportateurs du Canada, « [s]ouvent, dans les accords commerciaux, les pays qui veulent nos ressources naturelles ne sont pas trop intéressés par nos produits finis ». Ces pays utiliseraient des mesures réglementaires pour bloquer l’importation des produits canadiens à valeur ajoutée, de sorte que le PTP contribuerait « grandement à uniformiser les règles du jeu » avec les autres pays du PTP. L’organisme a aussi dit que le PTP permettrait l’exportation de produits canadiens à valeur ajoutée et « pas seulement l’exportation de ressources naturelles ».

Agriculture et agroalimentaire

Répercussions globales du Partenariat transpacifique sur le secteur agricole et agroalimentaire du Canada

Selon Affaires mondiales Canada, le PTP « créera de nouveaux débouchés commerciaux pour le porc, le bœuf, les légumineuses, les fruits et légumes, le malt, les grains, les céréales, la nourriture pour les animaux, le sirop d’érable, les vins et spiritueux, les produits de boulangerie et de pâtisserie, les produits céréaliers et de légumineuses transformés, les confiseries à base de sucre et de chocolat, ainsi que les aliments et les boissons du Canada[19] ».

L’incidence du PTP sur les producteurs agricoles canadiens découlera principalement des aspects suivants de l’Accord : la réduction et la suppression de droits de douane, le recours aux contingents et les dispositions sur les mesures sanitaires et phytosanitaires ainsi que sur les produits issus de la biotechnologie moderne[20]. Notamment, le PTP permettrait à certaines exportations agricoles du Canada d’entrer en franchise ou d’être assujetties à des droits réduits dans les autres pays signataires ou, encore, de bénéficier d’un meilleur accès à ces marchés sous un régime de contingents.

Cela dit, le PTP prévoit également l’imposition progressive de contingents qui ouvriraient aux producteurs agricoles des autres pays signataires un nouvel accès aux secteurs canadiens soumis à la gestion de l’offre. Selon le gouvernement, ces contingents représenteraient les fractions suivantes de la production annuelle du Canada : 3,25 % pour les produits laitiers, 2,3 % pour les œufs, 2,1 % pour le poulet, 2,0 % pour le dindon et 1,5 % pour les œufs d’incubation de poulet à chair[21].

Dans l’ensemble, les témoins ont convenu que le PTP ouvrirait de nouveaux débouchés aux producteurs agricoles canadiens axés sur l’exportation (de façon générale, ceux dont les produits ne sont pas soumis à la gestion de l’offre) et les rendrait plus concurrentiels face aux producteurs étrangers dans certains marchés du PTP.

Afin d’illustrer l’importance des nouveaux débouchés, les représentants de certains secteurs agricoles canadiens axés sur l’exportation ont expliqué que le marché intérieur du Canada est modeste comparativement à l’ampleur de la production. Par exemple, Oxford Frozen Foods Ltd. a indiqué que « [l]e Canada produit deux tiers à trois quarts des bleuets sauvages commercialement viables du monde. Le marché domestique est très limité, et de ce fait 90 % des bleuets sauvages … sont exportés. »

Selon l’Alliance canadienne du commerce agroalimentaire, les nouveaux débouchés les plus importants qui s’ouvriraient aux exportateurs agricoles et agroalimentaires du Canada si le PTP était ratifié se trouveraient aux États‑Unis, au Japon, au Vietnam et en Malaisie. L’Alliance a aussi dit que le PTP préserverait « l’accès privilégié du Canada à notre principal partenaire commercial, les États-Unis. Il fournira un accès sans précédent aux marchés en plein essor de l’Asie-Pacifique, et nous permettra d’améliorer notre position concurrentielle dans la région et d’obtenir plus de valeur pour nos produits ».

De nombreux témoins ont souligné que la demande est forte et en croissance pour les produits agricoles canadiens dans les pays du PTP. Selon les Producteurs de grains du Canada, la région du PTP compte des marchés émergents qui importeront davantage d’aliments de haute qualité « dans les années à venir », et les producteurs agricoles du Canada sont « très bien placés » pour répondre à cette demande grandissante. De plus, Son Excellence Daniel John Mellsop a signalé que les exportations agricoles canadiennes sont réputées sur les plans de l’innocuité et de la sécurité alimentaires dans la région de l’Asie-Pacifique.

En général, les témoins représentant des producteurs agricoles canadiens qui misent sur l’exportation ont affirmé que les nouveaux débouchés ouverts par le PTP leur permettraient d’accroître leurs exportations vers les pays signataires. Certains témoins ont ajouté que le PTP accroîtrait l’emploi dans leur secteur. Par exemple, la Canadian Cattlemen’s Association a estimé que le PTP permettrait aux éleveurs de bovins de doubler ou de presque tripler la valeur des exportations de bœuf canadien au Japon. Selon la Saskatchewan Cattlemen’s Association, ce bond des exportations pourrait créer de 5 200 à 5 400 emplois au Canada.

Le Conseil canadien du porc a signalé que, selon l’étude qu’il a fait réaliser, les nouveaux débouchés ouverts par le PTP permettraient d’accroître d’environ 300 millions de dollars la valeur des exportations canadiennes de porc et de créer 4 000 emplois une fois l’Accord mis en œuvre dans son intégralité.

Selon la Western Barley Growers Association, l’amélioration de l’accès au marché japonais pour les produits du bœuf et du porc transformés du Canada profiterait également aux producteurs d’orge fourragère, puisqu’elle augmenterait la consommation de cette céréale au Canada. Le Barley Council of Canada a affirmé que les nouveaux débouchés japonais pour le fourrage, l’orge vivrière, le malt et les produits de bœuf et de porc transformés pourraient se traduire par la vente de 400 000 à 500 000 tonnes supplémentaires d’orge canadienne, soit des revenus supplémentaires pouvant aller de 75 à 100 millions de dollars. Quant à l’organisme Céréales Canada, il a indiqué que le PTP pourrait accroître de 20 % le volume des exportations de blé vers les pays signataires.

Les producteurs et exportateurs d’engrais ont eux aussi parlé des avantages que présenterait pour eux la ratification du PTP par le Canada. Par exemple, dans son mémoire au Comité, Fertilisants Canada a soutenu que le PTP élargirait l’accès aux marchés des producteurs agricoles et des producteurs d’engrais du Canada; or, quand « [l]es agriculteurs achètent des fertilisants, et quand leurs affaires vont bien, celles de l’industrie canadienne des fertilisants vont bien aussi ». De même, pour le Conseil canadien du canola, « [l]e PTP profitera aux sélectionneurs de semence. Une récolte plus rentable stimulera forcément l’innovation en matière de semence ».

Selon les témoignages de nombreux représentants de secteurs agricoles canadiens axés sur l’exportation, si le PTP entrait en vigueur sans la participation du Canada, ces producteurs seraient désavantagés vis-à-vis de leurs concurrents étrangers qui profiteraient d’un accès préférentiel aux marchés du PTP. Par exemple, l’Alliance canadienne du commerce agroalimentaire a dit que « [l]'agriculture canadienne n’a pas les moyens de revivre son expérience destructrice en Corée du Sud, où ce marché d’un milliard de dollars a pratiquement été réduit de moitié du jour au lendemain lorsque nos concurrents, les États-Unis et l’Australie, ont eu accès à ce marché avant nous ».

En ce qui concerne le secteur du bœuf, la Canadian Cattlemen’s Association a dit que « [s]ans le PTP ou un accord bilatéral avec le Japon, le Canada perdra probablement environ 80 % de ses exportations [de bœuf] vers le Japon ». Le Conseil canadien du porc a affirmé que le secteur du porc canadien perdrait le marché japonais et subirait de « graves » dommages si le PTP entrait en vigueur sans la participation du Canada. Selon Céréales Canada, « ne pas ratifier l’accord du PTP pourrait entraîner une diminution de 50 % des exportations canadiennes de blé vers la région [de l’Asie‑Pacifique] », tandis que pour la B.C. Seafood Alliance, la ratification de l’Accord par le gouvernement des États‑Unis mais non par celui du Canada serait « catastrophique » pour les membres de l’organisme.

Si la plupart des représentants des secteurs agricoles axés sur l’exportation croient que le PTP serait favorable à leurs exportations, la majorité des témoins issus des industries assujetties à la gestion de l’offre ont soutenu au contraire que le Partenariat ne leur ouvrirait probablement pas de débouchés extérieurs importants; la hausse des importations leur ferait même perdre leur part du marché national, ce qui entraînerait des baisses de production et des pertes d’emplois au Canada.

Selon les Producteurs de poulet du Canada, le PTP ouvrirait le marché canadien à des importations additionnelles de 26,7 millions de kilogrammes de poulet sur une base annuelle; il en résulterait une perte estimée de 2 200 emplois et une réduction de l’ordre de 150 millions de dollars du PIB canadien. De même, l’organisation Les Éleveurs de volailles du Québec a indiqué que le PTP allait accroître l’accès des importations de poulet au marché Canadien et, qu’en raison du PTP, l’accès passerait de 7,5 à 9,6 % de la production nationale. Dans leur mémoire au Comité, Les Éleveurs de dindon du Canada ont soutenu que le PTP aurait comme conséquence d’augmenter de 71,2 % l’accès des importations au marché canadien du dindon. Pour Les Éleveurs de volailles du Québec, l’accès additionnel au marché canadien de la volaille qui découlera de la mise en œuvre du PTP pourrait « générer la perte de 2 600 emplois et [amputer le] PIB de 175 millions de dollars ».

D’après les Producteurs laitiers du Canada, le PTP, augmenterait l’accès des importations au marché canadien des produits laitiers et cette augmentation serait entre 3,37 et 3,97 % de la production annuelle du pays, ce qui est supérieur à la proportion de 3,25 % calculée par le gouvernement et représenterait « une perte de revenus allant de 190 millions à 250 millions de dollars, selon le produit importé ».

Selon Les producteurs de lait du Québec, le Canada a « choisi de faire des concessions importantes garantissant un accès de 3 % à 4 % aux pays membres [du PTP]. Toutes proportions gardées, les concessions du Canada dans le secteur laitier sont plus importantes que celles qui ont été offertes par les autres pays ».

Dans l’évaluation des répercussions économiques qu’il a soumise au Comité, Affaires mondiales Canada a indiqué que le PTP pourrait causer une baisse de la production laitière au Canada et « des pertes au chapitre du bien-être économique, du point de vue des producteurs », mais ces pertes pourraient être compensées « par des gains ailleurs dans le secteur [laitier] attribuables aux produits laitiers importés[22] ».

La plupart des représentants des secteurs agricoles soumis à la gestion de l’offre ont soutenu que les nouveaux débouchés à l’exportation découlant du PTP risquaient d’être modestes. Par exemple, dans son mémoire au Comité, l’organisme Les Producteurs de lait du Québec a écrit qu’« [i]l est certes envisageable de faire quelques percées en misant sur des produits de créneaux et à valeur ajoutée, mais les masses en jeu sont loin d’être du même ordre que la somme des concessions faites par le Canada ». De même, le mémoire présenté par Les Éleveurs de dindon du Canada indique que le PTP n’ouvrirait pas des possibilités d’exportation « importantes » pour l’industrie canadienne du dindon.

Selon les Producteurs laitiers du Canada, les possibilités d’exportation que le PTP ouvrirait au secteur des produits laitiers sont limitées pour deux raisons : les coûts de production élevés au Canada « pour les fermes et la filière d’ouvraison »; et la décision d’un groupe spécial de l’OMC selon laquelle un produit est considéré comme subventionné s’il est vendu sur les marchés d’exportation à un prix moins élevé que le prix intérieur. Selon l’organisme, « [l]a promotion des activités et stratégies d’exportation ne peut connaître du succès que si elle se fait dans le cadre d’un partenariat entre les producteurs et les transformateurs et en collaboration avec le gouvernement ».

Droits de douane et contingents

Les représentants des secteurs agricoles axés sur l’exportation ont mis en lumière les nouveaux contingents ou les mesures de réduction ou d’élimination des droits de douane qui s’appliqueraient à eux si le gouvernement ratifiait le PTP; les représentants des secteurs soumis à la gestion de l’offre, de leur côté, ont discuté des contingents qui, selon eux, leur feront perdre une part du marché national au profit des producteurs des autres pays du PTP.

Selon le Cross-Border Institute, certaines des plus importantes réductions tarifaires prévues par le PTP concernent les produits agricoles, et ce dernier pourrait aider le Canada à accroître ses exportations agricoles au Japon. De même, Affaires mondiales Canada a affirmé que, si le PTP était mis en œuvre, le Canada obtiendrait « d’importants avantages » grâce à l’élimination des droits de douane imposés par le Japon « sur de nombreux produits agricoles ».

Le Conseil des viandes du Canada a dit que le PTP réduirait « sensiblement » – de 38,5 à 9 % – les droits de douane japonais imposés sur les importations de bœuf canadien. Le Manitoba Pork Council a soutenu quant à lui que la réduction des droits de douane au-dessus et en deçà du prix-seuil fixé au Japon se traduirait par une augmentation des exportations de porc canadien dans ce marché. Dans son mémoire au Comité, le Conseil canadien du porc a indiqué que les importations de porc au Vietnam pour consommation locale sont actuellement négligeables en raison des droits en vigueur, qui peuvent atteindre 34 %, mais que le PTP viendrait éliminer.

Au sujet de l’impact que la réduction des droits prévue par le PTP aurait sur les producteurs d’orge vivrière au Canada, la Western Barley Growers Association a affirmé que : « l’alimentation des Asiatiques contient beaucoup plus d’orge que celle des Nord‑Américains. L’usage alimentaire de l’orge représente un ajout important aux marchés traditionnels. Le PTP favoriserait cet essor étant donné qu’il ferait baisser les droits de douane que le Japon impose à l’orge vivrière de 45 % sur huit ans ».

Selon la Saskatchewan Barley Development Commission, le PTP augmenterait les contingents tarifaires pour le malt torréfié et non torréfié du Canada. Il éliminerait aussi les droits japonais de 113 $ par tonne métrique imposés à l’orge fourragère canadienne, ce qui pourrait accroître de 25 millions de dollars la valeur des exportations canadiennes d’orge fourragère au Japon.

D’après l’Alberta Wheat Commission, si le gouvernement ratifiait le PTP, les producteurs agricoles canadiens profiteraient d’un accès amélioré au marché du blé vivrier et fourrager au Japon grâce à l’élimination des droits de douane et à l’augmentation des contingents, ainsi que d’un accès accru au marché vietnamien à la suite de l’abolition des droits à l’importation de 5 % perçus sur les produits du blé canadien dans ce pays.

La Fédération des producteurs acéricoles du Québec a dit au Comité que le PTP éliminerait les droits de 3 % et de plus de 17 % qu’imposent respectivement le Vietnam et le Japon aux produits d’érable, ce qui permettrait aux producteurs canadiens de sirop et de sucre d’érable de « tirer parti du potentiel exceptionnel que représentent ces pays ».

Selon l’Institut canadien du sucre, le PTP augmenterait les contingents visant les produits contenant du sucre au Japon et fournirait de nouvelles possibilités d’exportation au Vietnam et en Malaisie. De plus, selon l’institut, grâce à ses dispositions relatives aux contingents, l’Accord « améliorera grandement l’accès [pour le sucre et les produits à teneur élevée en sucre] aux États-Unis; il doublera les exportations de sucre de betterave de l’Alberta et haussera de 16 % les exportations de produits contenant du sucre de l’Ontario ».

Plusieurs témoins ont signalé que le PTP permettrait aussi de réduire ou d’éliminer les droits de douane dans le secteur des produits de la mer. L’Association of Seafood Producers a fait observer que les droits de douane imposés aux produits de la mer dans les pays du PTP peuvent atteindre 34 %; pour l’Alliance de l’industrie canadienne de l’aquaculture, les droits prélevés au Japon, au Vietnam et en Malaisie « désavantagent » les aquaculteurs canadiens. Selon le Clearwater Seafoods Limited Partnership, le PTP éliminerait les deux tiers et la totalité, respectivement, des droits de douane que le Japon et le Vietnam appliquent aux produits de la mer.

Cependant, certains représentants du secteur canadien des produits de la mer ont exprimé des inquiétudes au sujet de la ratification possible du PTP par le gouvernement. Connors Bros. Clover Leaf Seafoods Company a souligné que « [l]a simple élimination des droits de douane, sans une résolution des autres problèmes de réglementation qui touchent nos opérations à [la conserverie de] Blacks Harbour », comme les restrictions à l’importation sur les matières premières qui y sont transformées, « risque de menacer la compétitivité de cette usine ».

De plus, la Grand Manan Fishermen’s Association a suggéré que le PTP pourrait réduire la viabilité des politiques actuelles du Canada relatives aux propriétaires exploitants et à la séparation de la flottille dans le secteur des pêches : « [l]es éléments cruciaux de notre politique concernant, par exemple, les propriétaires exploitants et la séparation de la flottille ainsi que le principe voulant que les ressources halieutiques du Canada soient un bien collectif seront sacrifiés pour que d'autres secteurs de l'économie, peut-être les producteurs de porc, puissent avoir accès aux marchés du PTP ».

Certains témoins représentant des producteurs agricoles canadiens misant sur l’exportation ont indiqué que les mesures de réduction ou d’élimination des droits de douane prévues par l’Accord accroîtraient leur compétitivité dans les marchés du PTP par rapport aux producteurs des pays non signataires. Par exemple l’Alberta Pulse Growers Commission a fait observer que le PTP se traduirait « par l'élimination des droits de douane là où les légumineuses n'en sont pas déjà exemptes » et conférerait aux producteurs canadiens de légumineuses « un avantage concurrentiel par rapport aux pays exportateurs de légumineuses qui ne font pas partie du PTP, car [ces derniers] devront continuer d’assumer des droits de douane plus élevés [dans les pays du PTP] ».

De plus, selon certains représentants des secteurs canadiens de l’agriculture axés sur l’exportation, la ratification du PTP par le gouvernement les aiderait à mieux soutenir la concurrence des producteurs des autres pays signataires. Par exemple, la Canadian Cattlemen’s Association a expliqué que, en vertu d’un traité commercial conclu en 2015 entre le Japon et l’Australie, le droit que Japon impose actuellement au bœuf canadien est plus élevé que les droits que celui-ci impose au bœuf australien. Si le gouvernement du Canada ne ratifiait pas le PTP, l’écart entre le taux tarifaire que le Japon impose sur le bœuf canadien et les taux tarifaires que le Japon impose sur le bœuf australien irait en se creusant, puisque ceux qui sont appliqués au bœuf australien connaîtront des réductions successives aux termes du traité de 2015.

Certains des témoins des secteurs agricoles canadiens axés sur l’exportation ont affirmé que les mesures de réduction et d’élimination tarifaires prévues par le PTP feraient augmenter les exportations canadiennes de produits agricoles transformés, ce qui stimulerait la fabrication de produits agroalimentaires au Canada. Par exemple, la Saskatchewan Association of Rural Municipalities a soutenu que le PTP viendrait dynamiser la croissance et l’investissement dans le secteur des produits agricoles à valeur ajoutée au Canada, « grâce à un accès accru aux marchés du Pacifique pour les produits transformés ainsi que l’huile de canola, le bœuf et le porc ».

Par ailleurs, le Conseil canadien du canola a signalé que les entreprises canadiennes de transformation du canola ne peuvent pas vendre leur huile de canola au Japon parce que les droits de douane y sont trop élevés. Selon le Conseil, le PTP éliminerait les droits imposés à l’huile et au tourteau de canola exportés au Japon et au Vietnam; pour la Canadian Canola Growers Association, ce changement « éliminerait le désavantage auquel l’huile de canola est actuellement confrontée au Japon vis-à-vis des oléagineux concurrents (p. ex., palme, graines de tournesol) dont les tarifs sont fixés à un taux plus faible ».

Des représentants du secteur du canola, dont le Conseil canadien du canola, ont dit que l’élimination des droits de douane sur l’huile et le tourteau de canola au Japon et au Vietnam augmenterait de 780 millions de dollars la valeur des exportations annuelles de ce secteur. La Canadian Canola Growers Association a fait valoir que, par l’accroissement des exportations canadiennes de produits du canola à valeur ajoutée, le PTP permettrait de créer des emplois dans les usines canadiennes de transformation du canola. L’Alberta Canola Producers Commission a précisé que les emplois dans ces usines sont « spécialisés, donc très bien payés ».

Enfin, au sujet des nouvelles possibilités qu’ouvrirait le PTP dans le secteur de la transformation du sucre, la Fédération de l’agriculture de Lambton a dit que « [l]es cultivateurs de betterave des comtés de Lambton et Chatham-Kent sont heureux du fait que le PTP permettra de nouveau la transformation locale du sucre, les États-Unis acceptant les importations. Toutefois, après un examen approfondi, il semble que le PTP ne parvient pas à garantir un accès accru au marché aux États-Unis qui permettrait […] la transformation au Canada ».

Obstacles non tarifaires au commerce des produits agricoles et agroalimentaires

Le PTP aurait également une incidence sur le secteur agricole axé sur l’exportation en raison des dispositions qui touchent aux enjeux commerciaux non-tarifaires. Par exemple, le chapitre 7 du PTP, qui porte sur les mesures sanitaires et phytosanitaires, a pour but d’assurer la protection de la vie et de la santé des personnes, des animaux et des végétaux, tout en facilitant le commerce. Entre autres, ce chapitre instaurerait des règles en matière de transparence et de consultation, qui prévoient l’établissement d’un comité sur les mesures sanitaires et phytosanitaires et l’obligation pour les pays du PTP de publier leurs projets de règlements sanitaires en vue de recueillir les commentaires du public.

De plus, l’article 2.27 du PTP, qui porte sur le commerce des produits issus de la biotechnologie moderne, établirait la procédure que doit suivre le pays qui détecte la présence en faible concentration d’organismes génétiquement modifiés dans des produits importés[23]. La plupart des dispositions de cet article concernent la communication de renseignements entre les parties concernées, dont l’importateur, le pays importateur, l’exportateur et le pays exportateur.

Les représentants de certains secteurs agricoles canadiens ont salué les dispositions du PTP qui portent sur ce qu’ils considèrent comme des obstacles non tarifaires au commerce, obstacles qui découleraient notamment des politiques gouvernementales sur la présence en faible concentration et de certaines mesures sanitaires et phytosanitaires, dont – dans certains cas – les limites maximales de résidus de pesticides[24].

Céréales Canada a soutenu que les mesures sanitaires et phytosanitaires devaient être abordées dans les ALE, puisque les gouvernements, lorsque les obstacles tarifaires au commerce sont supprimés, recourent à des moyens non tarifaires pour limiter les importations, comme des règles non scientifiques en matière de santé et de sécurité. Selon certains témoins, dont Grain Farmers of Ontario, les échanges commerciaux sont parfois perturbés par l’interaction entre les « cadres de réglementation à tolérance zéro » et les technologies « de plus en plus précises » de détection de la présence en faible concentration.

Selon la Canadian Canola Growers Association, les dispositions du PTP établiraient un « mécanisme permettant l’échange de renseignements, » contribuerait à l’adoption « de règlements fondés sur les données scientifiques », et ouvriraient « un espace propice à la discussion [… et à] chercher activement une solution à certains des enjeux que nous avons mentionnés concernant les [limites maximales de résidus] ou les cas de [présence en faible concentration] associés au canola ».

L’Association canadienne du commerce des semences a dit que l’article 2.27 du PTP procurerait une prévisibilité en établissant « un processus transparent [qui] permet d’aborder des questions touchant [la présence en faible concentration] ». Certains témoins se sont prononcés en faveur du groupe de travail sur les produits issus de la biotechnologie, dont l’établissement est prévu à l’article 2.27 de l’Accord. Selon Grain Farmers of Ontario et Soy Canada, ce groupe de travail pourrait « faciliter la coopération et l’échange de renseignements » sur les questions relatives à la biotechnologie, comme la présence en faible concentration. Pour Grain Farmers of Ontario, « [c]e sont là d’heureuses démarches qui contribueront à réduire la perturbation du commerce dans l’industrie des céréales et des oléagineux ainsi qu’à établir des règles commerciales prévisibles pour les membres du PTP ».

De façon plus générale, l’Alberta Pulse Growers Commission a mentionné que les échanges commerciaux pourraient être facilités par une consultation et une collaboration plus étroites entre les pays du PTP : « [g]râce au PTP, le Canada pourra prendre les devants » sur de nombreux enjeux non-tarifaires en ce qui concerne le commerce agricole, dont les limites maximales de résidus. La commission a maintenu que « [s]i un pays importateur faisait sien le niveau de tolérance d’un autre pays alors qu’en temps normal, il n’aurait toléré aucun résidu parce qu’il ne s’est encore doté d’aucune limite en la matière ou qu’il n’en a pas encore approuvé, une bonne partie des risques commerciaux liés aux limites maximales de résidus s’estomperait aussitôt. »

Par ailleurs, différentes dispositions non tarifaires du PTP recueillent l’appui de Canpotex, notamment celles sur la transparence exigeant que les gouvernements rendent leurs règlements accessibles et les tiennent à jour, ce qui permettrait d’éviter « de procéder à tâtons et de se perdre dans un dédale de règlements gouvernementaux qui pourraient influer sur les activités d’une entreprise étrangère ». Canpotex a ajouté que le PTP traite également « des sociétés d’État qui livrent une concurrence déloyale aux entreprises étrangères ».

Soutien gouvernemental aux producteurs agricoles du Canada

Certains témoins – dont les Producteurs laitiers du Canada, les Producteurs de poulet du Canada et d’autres organisations représentant des secteurs agricoles canadiens assujettis à la gestion de l’offre – ont affirmé qu’il était important que le gouvernement adopte des mesures pour atténuer l’impact du PTP et dédommager les producteurs dans ces secteurs. Dans le cadre d’une campagne d’envoi de courriels organisée par les Producteurs laitiers du Canada, certaines personnes ont indiqué au Comité qu’ils trouvaient très inquiétant « le manque de volonté du gouvernement » à l’égard des mesures d’atténuation et d’indemnisation promises à l’industrie de la volaille et des produits laitiers[25].

D’après les Producteurs laitiers du Canada, les mesures d’atténuation et de dédommagement promises antérieurement auraient « allégé le fardeau » que représente le PTP pour le secteur canadien des produits laitiers. Selon le Mouvement Desjardins, le gouvernement devrait rapidement clarifier les mesures de transition et de dédommagement qu’il entend prendre à l’égard des secteurs soumis à la gestion de l’offre si le PTP entre en vigueur : « [t]ant que ces mesures ne seront pas officiellement confirmées et mises en place, l’ensemble des acteurs du secteur agricole devra prendre des décisions d’affaires importantes dans un contexte d’incertitude ».

Sur le plan des mesures d’indemnisation, les Producteurs laitiers du Canada ont demandé au gouvernement du Canada d’investir au moins 4,3 milliards de dollars dans les secteurs sous gestion de l’offre, dont celui des produits laitiers[26]. De même, dans son mémoire au Comité, l’organisme Les Éleveurs de volailles du Québec a mentionné que les « programmes d’indemnisation » annoncés par le gouvernement « offriront un certain soulagement aux éleveurs et aux transformateurs ».

Certains témoins, dont ceux des secteurs agricoles canadiens sous gestion de l’offre, ont quant à eux demandé au gouvernement de lutter contre le contournement des mesures de contrôle à l’importation des produits laitiers et avicoles. Pour les Producteurs de poulet du Canada, il était « essentiel » que le gouvernement mette en œuvre, sans tarder, trois mesures annoncées relatives à l’importation : exclure les produits de la volaille du Programme d’exonération des droits, exiger la certification pour les importations de volaille de réforme, et empêcher les importateurs de contourner les contingents d’importation en ajoutant des sachets de sauce aux produits de poulet[27] ».

Dans son mémoire au Comité, l’organisme Les Producteurs de lait du Québec a proposé que le gouvernement s’assure « que les standards de composition traitent le lait diafiltré comme un ingrédient dont l’ajout aux recettes de fromage est plafonné », et « que des standards plafonnent aussi son ajout dans les autres produits laitiers où il serait susceptible d’être utilisé », comme le yogourt. L’organisme a aussi recommandé que les produits agricoles soumis à la gestion de l’offre soient exclus du Programme de report des droits du Canada (qui regroupe le Programme d’exonération des droits et deux autres programmes).

Dans les mémoires qu’ils ont adressés au Comité, les transformateurs de produits soumis à la gestion de l’offre ont également fournit des conseils en ce qui concerne le Programme de report des droits. Par exemple, l’entreprise Skotidakis Goat Farms a affirmé qu’elle ne serait pas en mesure de « fabriquer des produits d’exportation concurrentiels » sans le Programme de report des droits; elle a donc dit qu’elle voulait continuer de l’utiliser. Par contre, dans son mémoire au Comité, Les Aliments Maple Leaf a proposé que le gouvernement mette en œuvre chacune des trois mesures anti-contournement annoncées avec les autres initiatives d’atténuation et d’indemnisation en octobre 2015.

Certains témoins du secteur laitier du Canada, dont les Dairy Farmers of Prince Edward Island, ont demandé au gouvernement de fournir davantage de renseignements sur l’administration des contingents tarifaires du Canada aux termes du PTP. Dairy Farmers of Prince Edward Island a dit au Comité que le PTP « empêchera la Commission canadienne du lait d’importer [le volume de beurre qui serait prévu dans] le contingent tarifaire [canadien] du PTP pour le beurre, comme elle le fait actuellement pour le contingent de l’OMC. Il faut bien déterminer qui sera en mesure d’importer et clarifier le rôle que la Commission peut jouer pour limiter les incidences [du PTP]. »

Toujours au sujet de l’administration des contingents tarifaires, le Conseil canadien des fromages internationaux a affirmé dans son mémoire au Comité que la valeur de sa part du contingent tarifaire canadien pour le fromage sera diluée par le nouveau contingent du PTP sur le fromage. Il a donc proposé que le nouveau contingent du Canada aux termes de l’Accord soit attribué aux détenteurs traditionnels[28] (dont les membres du Conseil), en proportion de la part du contingent actuel détenue par chacun d’eux.

Certains témoins ont demandé de l’aide fédérale à l’innovation et à la mise en marché dans les secteurs de l’agriculture au Canada. Selon l’Union des producteurs agricoles, « [n]ous pouvons ouvrir des marchés, mais si nous ne sommes pas concurrentiels en raison d’investissements insuffisants en recherche-développement, c’est peine perdue […] Il est certain que, au bout du compte, l’ouverture des marchés ne profitera pas à notre économie si notre gouvernement n’agit pas en fonction de la compétitivité. » La Prince Edward Island Fishermen’s Association a proposé un programme analogue à Cultivons l’avenir[29] pour les producteurs canadiens de produits de la mer, et la Fédération agricole de la Nouvelle-Écosse a appelé le gouvernement à renouveler et à élargir le programme AgriMarketing afin de permettre le plein accès aux marchés d’exportation.

L’Association des vignerons du Canada a dit que le secteur vinicole du Canada devait « prendre de l’expansion au pays afin d’être en mesure de profiter des occasions que nous offre le Partenariat transpacifique. » L’Association a mentionné que la réduction des obstacles au commerce interne des produits du vin, combinée au soutien fédéral à l’innovation et à l’infrastructure vinicoles, permettrait aux vignerons canadiens d’accroître leurs ventes sur le marché intérieur.

Certains témoins ont expliqué que les secteurs agricoles canadiens axés sur l’exportation connaissaient des pénuries de main-d’œuvre. Dans son mémoire au Comité, le Conseil canadien pour les ressources humaines en agriculture a signalé que les producteurs et les transformateurs primaires ne pouvaient parfois pas tirer parti des possibilités d’exportation en raison du manque de travailleurs. Discutant des difficultés qu’elle a eues à ce sujet, la coopérative Victoria Co-Operative Fisheries Ltd. a dit ce qui suit : « En ce qui concerne la recherche de travailleurs, notre seule expérience jusqu’à présent est avec le programme des travailleurs étrangers temporaires. C’est un processus très coûteux […] Il faut réduire les coûts, réduire les formalités administratives […] Grâce à ces accords de libre-échange, nous avons l’occasion d’augmenter notre production, mais nous avons besoin de plus de gens dans nos collectivités rurales. »

Fabrication

Selon Affaires mondiales Canada, le PTP éliminerait « tous les droits de douane visant les exportations canadiennes de produits industriels, y compris les métaux et les minéraux, les produits chimiques et les matières plastiques, les machines industrielles, le matériel agricole, l’équipement de construction et les technologies de l’information et des communications[30] ».

Les témoins ont donné différents points de vue sur l’impact probable du PTP dans le secteur manufacturier du Canada. Manufacturiers et exportateurs du Canada s’est dit favorable à «l’adhésion du Canada au Partenariat transpacifique et la signature de celui‑ci » pour deux raisons : le marché intérieur est trop petit pour que les manufacturiers canadiens qui dépendent de l’exportation puissent y prospérer; et le PTP ouvrirait de nouveaux débouchés importants en plus de réunir les principaux partenaires commerciaux du Canada. L’organisme a toutefois mentionné que certains de ses membres avaient des réserves relativement à quelques aspects du PTP, en l’occurrence les règles d’origine dans le secteur automobile, la suppression graduelle inégale des droits de douane sur les importations canadiennes et américaines dans certains secteurs, et l’absence de mesures pour contrer les politiques privilégiant l’achat de biens américains dans les marchés publics aux États-Unis.

Des représentants du secteur de la fabrication du Canada ont dit que le PTP ne comportait pas de règles exécutoires qui permettraient d’empêcher les pays signataires de manipuler les taux de change; certains témoins ont réclamé que des règles de cette nature soient ajoutées à l’Accord. En particulier, Ford du Canada Limitée a affirmé que « [l]a manipulation des devises est peut-être le plus grave obstacle au commerce et risque auxquels font face les exportations canadiennes dans tous les secteurs ». L’entreprise a proposé que les principes du Fonds monétaire international en matière de manipulation des taux de change soient codifiés dans le PTP, et que les pays victimes de manipulation puissent rétablir leurs droits de douane sur les biens en provenance du pays manipulateur jusqu’à ce que la situation soit corrigée.

En ce qui a trait à la manipulation des devises, Son Excellence Kenjiro Monji a affirmé : « je crois comprendre que la question des devises n'est pas directement liée au PTP, mais que les dirigeants des pays du PTP ont discuté de ces questions pour renforcer la coordination des macroéconomies et des devises. Je pense que bien des gens s'en réjouissent ».

Outre ces observations générales sur le secteur manufacturier du Canada, les témoins ont discuté en particulier de l’industrie de l’automobile et des pièces d’automobile, ainsi que de divers autres secteurs de la fabrication.

Automobiles et pièces d’automobile

Des représentants du secteur canadien de la construction automobile et de la fabrication de pièces d’automobile ont donné divers points de vue sur l’impact potentiel du PTP dans leur industrie. Les opinions étaient particulièrement divisées quant à trois aspects précis du Partenariat : l’importance des nouveaux débouchés ouverts aux constructeurs canadiens d’automobiles; les règles d’origine s’appliquant aux automobiles et aux pièces; et l’élimination sur cinq ans des droits de 6,1 % imposés par le Canada aux voitures étrangères.

Certains témoins ont mis en doute que le PTP ouvre d’importantes possibilités d’exportation aux constructeurs automobiles du Canada, y compris au Japon. Dans son mémoire, Ford du Canada Limitée a écrit que « le PTP ne procure aucun avantage supplémentaire ou significatif aux exportations de véhicules produits au Canada étant donné qu’il n’entraîne aucune réduction de droits de douane dans les marchés qui représentent l’écrasante majorité des ventes de nouveaux véhicules puisque le taux de droit de ces marchés est déjà nul ». De même, l’Association canadienne des constructeurs de véhicules a dit que le PTP n’accroîtrait pas « de façon significative » les exportations canadiennes de véhicules à moins que des changements précis n’y soient apportés.

Certains témoins ont signalé que, même si les véhicules construits au Canada peuvent entrer en franchise de droits au Japon, les exportations de véhicules canadiens dans ce pays sont bien peu élevées. Par exemple, Ford du Canada Limitée a affirmé que 142 830 véhicules ont été construits au Japon et vendus au Canada en 2014 malgré des droits canadiens de 6,1 % sur ces importations, alors que le Canada n’a exporté la même année que 624 automobiles au Japon, malgré des droits nuls.

Unifor a évoqué des obstacles non tarifaires qui limiteraient les exportations de véhicules canadiens au Japon : « [l]e Japon manipule sa devise mieux que n’importe quel autre pays. C’est pourquoi son industrie de l’exportation, surtout dans le secteur de l’automobile, connaît autant de succès. En plus d’avoir une culture où si l’on achète un véhicule importé, il y a souvent des taxes à payer, il y a aussi une tout autre culture où les Japonais s’assurent d’acheter des véhicules japonais dans leur pays. »

Dans son mémoire au Comité, le Japan Automobile Manufacturers Association of Canada a nié l’existence d’obstacles à l’importation de véhicules étrangers au Japon. Selon elle, les constructeurs nord-américains ne produisent pas beaucoup de modèles de petites voitures, alors que ce sont ces modèles qui sont populaires au Japon. L’Association a affirmé qu’environ 90 % des automobiles vendues au Japon sont de « très petites voitures » dotées de moteurs inférieurs à 2000cc; or, les constructeurs d’automobiles ayant leur siège à Détroit n’offraient que 10 modèles dans ce segment du marché en 2014.

Selon l’évaluation des répercussions économiques du PTP qu’Affaires mondiales Canada a présentée au Comité, le Partenariat réduirait les exportations d’automobiles canadiennes aux États-Unis[31] : « [l]a libéralisation des marchés américain et mexicain pour d’autres membres du PTP éroderait l’avantage préférentiel dont jouit actuellement le Canada dans le cadre de l’ALENA sur ces marchés, ce qui entraînerait un déplacement des exportations canadiennes destinées aux États-Unis et au Mexique[32] », et « [p]lus de 80 p. 100 de la production automobile canadienne est exportée vers les États‑Unis actuellement et ce pourcentage serait appelé à diminuer[33] ». Cette diminution se produirait que le Canada mette en œuvre ou non le PTP[34].

En ce qui concerne les règles d’origine, l’évaluation des répercussions économiques soumise au Comité par Affaires mondiales du Canada a expliqué que, aux termes du PTP, de 30 à 45 % du contenu de certaines catégories de pièces d’automobile devrait être originaire de la région du PTP pour que la pièce soit admissible aux taux de droits préférentiels prévus par l’Accord; dans le cas des véhicules, le pourcentage serait de 45 %[35]. L’évaluation précise que, par contraste, l’ALENA exige une teneur en valeur régionale de 62,5 % pour les automobiles.

Plusieurs témoins ont indiqué qu’ils auraient préféré que le PTP exige une teneur en valeur régionale plus élevée. Certains intervenants, dont la section locale 444 d’Unifor, ont dit que les règles d’origine du PTP pourraient encourager les constructeurs automobiles à s’approvisionner dans les pays où les salaires sont peu élevés.

En outre, selon la WindsorEssex Economic Development Corporation, le PTP pourrait également encourager certains producteurs de pièces automobiles à établir des opérations à l’extérieur du Canada et à s’approvisionner à l’étranger :

Les [fabricants de pièces] du premier niveau, qui ont une envergure et des ressources matérielles considérables, pourront mettre en place des établissements dans certains des pays à faibles coûts, et […] bénéficier [du PTP]. Par contre, les PME qui se trouvent ici ne disposent pas de ces ressources, et seront donc laissées de côté […] [M]ême si les grandes entreprises en sortent gagnantes, leurs profits n’iront pas à l’économie locale, parce que quand elles font de l’argent, elles sont susceptibles d’utiliser plutôt les produits de certains pays étrangers.

De même, l’Association des fabricants de pièces d’automobile a soutenu que, « [m]ême si certaines grandes entreprises canadiennes ayant des chiffres d’affaires dans les milliards de dollars auront la chance de trouver de nouveaux clients, non seulement ceux-ci seront à l’étranger, mais l’entreprise embauchera des travailleurs à l’étranger et fabriquera, à l’étranger, ses produits destinés aux voitures ».

Magna International Inc. a estimé que le PTP aurait un impact neutre sur ses activités mondiales consolidées, mais elle a aussi mentionné :

Par une augmentation de la concurrence et l’atténuation des règles relatives à la teneur en valeur régionale, nous nous attendons à ce que les fabricants de pièces pour véhicules automobiles situés au Canada et dont les installations produisent des produits de faible valeur, gourmands en main-d’œuvre, sensibles aux coûts et qui peuvent être officiellement transportés à des fins d’exportation subissent des pressions additionnelles. Il se pourrait que l’effet sur les [PME] disposant d’un accès limité aux capitaux et dont la mobilité est moindre soit plus fort qu’il ne le sera sur Magna.

Dans son évaluation des répercussions économiques du PTP, Affaires mondiales Canada a estimé que, si le Canada mettait en œuvre le PTP, les règles d’origine permettraient au Canada de s’approvisionner davantage en pièces d’automobile auprès de pays non signataires du PTP (augmentation estimée à 1,8 milliard de dollars US[36]). Cette hausse compenserait en partie une diminution des importations de produits automobiles en provenance des pays membres de l’ALENA, diminution qui serait attribuable à l’érosion de l’avantage préférentiel de l’ALENA sur le marché canadien, si le Canada ratifiait le PTP[37].

Le Japan Automobile Manufacturers Association of Canada a indiqué au Comité que les pourcentages élevés de teneur en valeur régionale limitent les constructeurs d’automobiles lorsqu’il s’agit de décider de leurs fournisseurs éventuels, ce qui implique qu’une réduction des pourcentages de teneur en valeur régionale leur donnerait plus de flexibilité en ce qui concerne l’approvisionnement. L’Association a également soutenu ce qui suit :

Comme la plupart des constructeurs d’automobiles adoptent des procédés de fabrication « juste à temps » ou allégée, ainsi qu’une philosophie commerciale consistant à « construire là où ils vendent », soit à proximité des principaux fournisseurs, l’industrie canadienne des pièces d’automobiles obtient de bons résultats lorsque les usines des constructeurs situées au Canada sont solides et disposent de règles souples qui leur permettent d’être concurrentielles à l’échelle mondiale.

Sur la question de l’emploi, Unifor a estimé que les règles du PTP sur la teneur en valeur régionale pourraient entraîner la perte de 20 000 emplois dans le secteur de l’automobile et des pièces d’automobile au Canada. Par contre, dans son mémoire au Comité, le Japan Automobile Manufacturers Association of Canada a cité l’analyse de Mike Moffatt, du Mowat Centre, qui critique les hypothèses utilisées par Unifor.

Certains témoins ont décrit l’impact possible, sur les fabricants canadiens d’automobiles et de pièces d’automobile, des règles du PTP concernant la teneur en valeur régionale dans l’éventualité où le Partenariat entrerait en vigueur sans être ratifié par le Canada. Ce scénario est toutefois peu probable maintenant que les États-Unis ont retiré leur signature de l’Accord. Pour le Cross-Border Institute, il serait alors plus difficile aux producteurs canadiens de faire fonctionner les chaînes d’approvisionnement à la frontière. De son côté, M. Herman a prédit que, si le Canada ne ratifiait pas l’Accord, les constructeurs automobiles déménageraient au Mexique, d’où ils pourraient plus facilement exporter vers le marché américain, sans droits de douane, grâce aux règles du PTP sur la teneur en valeur régionale.

Selon l’évaluation des répercussions économiques fournie au Comité par Affaires mondiales Canada, les constructeurs automobiles américains seraient moins susceptibles de s’approvisionner auprès des fabricants de pièces canadiens si le PTP entrait en vigueur sans la ratification du Canada, puisque l’achat de pièces au Canada pourrait empêcher le produit final de respecter les règles du PTP sur la teneur en valeur régionale[38]. Dans l’éventualité où le PTP entrerait en vigueur, la production et l’investissement dans le secteur automobile canadien diminueraient davantage sans la participation du Canada au Partenariat qu’avec celle-ci[39].

Sur la question de l’élimination graduelle des droits de douane, de nombreux témoins ont fait remarquer qu’au Canada, les droits sur les automobiles seraient éliminés sur cinq ans, alors qu’aux États-Unis, ils le seraient sur 25 ans (pour les voitures) et sur 30 ans (pour les camions). Dans son mémoire au Comité, l’Association canadienne des constructeurs de véhicules a écrit que « les différences entre les dispositions canadiennes et américaines sur les périodes de réduction tarifaire dans le secteur de l’automobile remettront en question les motifs économiques des investissements réalisés dans la chaîne d’assemblage et d’approvisionnement de l’Ontario et du Canada ». L’Association a demandé que la période d’élimination progressive des droits de douane imposés aux automobiles japonaises importées soit la même que celle négociée par les États-Unis, et que l’élimination se fasse surtout vers la fin de la période. Ford du Canada Limitée a fait une proposition similaire.

Cependant, selon le Japan Automobile Manufacturers Association of Canada, étant donné l’ALE qui existe entre le Canada et la Corée du Sud, les importations de véhicules japonais seraient les seules à être assujetties à des droits au Canada si l’AECG Canada-UE entrait en vigueur et que le PTP ou un ALE Canada-Japon n’entraient pas vigueur. Pour l’association, cette politique tarifaire, « n’est pas seulement injuste puisque la Corée et les pays de l’Europe n’ont aucune usine de construction d’automobiles au Canada, mais envoie aussi un message négatif aux investisseurs japonais qui mènent d’importantes activités de fabrication au Canada ».

De plus, le Japan Automobile Manufacturers Association of Canada a affirmé que, sur 10 véhicules que ses membres vendent au Canada, 8 sont fabriqués en Amérique du Nord, et 2 sont importés du Japon. L’Association a ajouté que « l’élimination des tarifs pour le marché canadien aura peu ou pas d’incidence sur les activités de fabrication au Canada ».

Enfin, dans son mémoire au Comité, l’Association des industries de l’automobile a soutenu que les fabricants de pièces de rechange pourraient profiter « d’un accès en franchise de droits aux pays du PTP », mais qu’ils pourraient aussi « souffrir d’une concurrence accrue ». Toutefois, « [p]uisque le volume des échanges commerciaux dans le secteur des pièces d’autos du Canada avec des pays autres que les États-Unis et le Mexique (avec lesquels le Canada a déjà un accord de libre-échange) est très faible à l’heure actuelle, les répercussions ne seront vraisemblablement pas considérables ».

Autres secteurs de la fabrication

De nombreux représentants de compagnies canadiennes dans des secteurs manufacturiers autres que celui de l’automobile et des pièces d’automobile – produits chimiques, forestiers, nautiques, etc. – se sont dits d’avis que le PTP élargirait leur accès aux marchés étrangers. Par contre, certains intervenants, notamment les syndicats et les producteurs d’acier, ont évoqué l’impact négatif que le PTP pourrait avoir sur les secteurs manufacturiers autres que celui de l’automobile.

L’Association canadienne de l’industrie de la chimie a mentionné que le PTP aiderait les fabricants de produits chimiques du Canada à accéder aux marchés de l’Australie et du Japon. Dans son mémoire au Comité, la National Marine Manufacturers Association Canada a prédit que la plupart des fabricants de produits nautiques du Canada, tout comme leurs consommateurs et employés, tireraient profit de l’élimination et de la réduction des droits de douane prévues par le PTP.

Selon l’Association des produits forestiers du Canada, les nouveaux débouchés ouverts par le PTP permettraient aux producteurs forestiers de diversifier leurs marchés d’exportation : « [dans le secteur forestier, nous] avons appris à la dure, avec l’effondrement du marché de l’habitation aux États-Unis, que nous ne pouvions continuer à dépendre autant du marché américain ».

L’Association des fournisseurs de chemins de fer a affirmé que le PTP pourrait ouvrir de nouvelles possibilités d’exportation aux fournisseurs de chemins de fer. De plus, l’Accord pourrait accroître le volume des marchandises transportées sur les voies ferrées canadiennes, ce qui accroîtrait la demande de wagons, de locomotives et d’infrastructure ferroviaire au Canada « afin de soutenir la croissance des exportations dans la région de l’Asie-Pacifique ».

Par contre, certains intervenants ont dit que le PTP pourrait avoir des répercussions négatives sur les secteurs manufacturiers autres que celui de l’automobile. Ainsi, l’Association des fournisseurs de chemins de fer a expliqué que certains fournisseurs de chemins de fer se demandaient si le Canada pourrait faire équitablement le commerce des produits fabriqués avec des pays qui n’ont pas les mêmes politiques que lui en matière de main-d’œuvre, d’environnement et de fiscalité. L’Association a dit que le « commerce ouvert » avec des pays du PTP à bas salaires pourrait avoir des « conséquences imprévues pour les fournisseurs existants de fabricants d’équipements ferroviaires au Canada ».

Le Syndicat des Métallos a affirmé que le PTP « confinera davantage l’économie canadienne à un système d’exportation de matières premières à l’état brut, particulièrement dans nos secteurs minier et de la foresterie, parce que l’accord rendra plus difficile pour les gouvernements la mise en œuvre de stratégies de création d’emplois pour le traitement de matières premières au pays même ». En outre, Unifor a signalé qu’une lettre additionnelle signée par le Canada et le Japon dans le cadre du PTP pourrait obliger le Canada à délivrer sur demande des licences d’exportation en vue de l’expédition de billes de bois au Japon, ce qui pourrait avoir un impact sur les scieries canadiennes qui transforment le bois en produits fabriqués.

Dans son mémoire au Comité, l’Association canadienne des producteurs d’acier a affirmé qu’« il est très peu probable » que le PTP accroisse les exportations d’acier du Canada en Asie, vu « l’énorme excédent de capacité de production » de cette région. De plus, l’élimination des droits perçus par le Canada sur les automobiles risque de faire augmenter les importations au Canada de véhicules construits en Asie (surtout au Japon), « ce qui déplacera encore plus de production intérieure et réduira la demande d’acier produit au Canada ». L’Association a proposé plusieurs mesures pour aider les producteurs d’acier canadiens, dont la modernisation accélérée du régime de recours commerciaux du Canada pour remédier aux préjudices causés aux fabricants canadiens par les importations faisant l’objet d’un dumping ou de subventions.

COMMERCE DES SERVICES

À quelques exceptions près, le chapitre 10 du PTP obligerait chaque pays à accorder le traitement national et le traitement de la nation la plus favorisée aux fournisseurs de services des autres pays du PTP. De même, sauf dans certaines circonstances, aucun signataire de l’Accord ne pourrait imposer de limitations concernant : le nombre de fournisseurs de services sur son territoire; la quantité de services produits sur son territoire; l’emploi dans les secteurs de services sur son territoire. Par ailleurs, sous réserve de quelques exceptions limitées, un membre du PTP ne pourrait pas exiger des fournisseurs de services qu’ils établissent une présence locale comme condition pour la fourniture transfrontalière d’un service. Enfin, sauf dans des circonstances précises, les pays membres du Partenariat devraient permettre que les paiements pour la fourniture transfrontalière de services se fassent sans délai et au taux de change du marché.

Selon Affaires mondiales du Canada, le chapitre 10 du PTP renferme des obligations visant à garantir les niveaux actuels et futurs de libéralisation dans le secteur des services[40]. Entre autres, il contient une disposition rendant irréversibles certains engagements pris par les pays du PTP sur la base de leurs régimes nationaux en vigueur (le « mécanisme de statu quo »), ainsi qu’une autre disposition garantissant que lorsque des lois, politiques ou règlements sont libéralisés par un pays du PTP de façon à faciliter le commerce des services ou l’investissement dans son marché par des étrangers, ces mesures de libéralisation deviennent une obligation du pays en question aux termes du PTP (le « mécanisme de cliquet[41] »).

Certains témoins – dont le Syndicat canadien de la fonction publique, le Congrès du travail du Canada et Citizens against CETA – se sont opposés aux mécanismes de « statu quo » et de « cliquet » prévus dans le PTP au motif qu’ils compromettraient les services publics au Canada. Par exemple, le Congrès du travail du Canada a dit que « [l]e chapitre du PTP concernant les services publics verrouille la privatisation à son niveau actuel avec des clauses d'ajustement ou de suspension. Il sera donc encore plus difficile aux gouvernements de mettre en place des nouveaux services publics tels que l'assurance-médicaments ou des services de garderie sans s'exposer à des réclamations dans le cadre du RDIE ».

Comme la plupart des ALE conclus par le Canada, le PTP comporte un chapitre consacré exclusivement aux services financiers. Sous réserve de certaines exigences d’inscription, le chapitre 11 du PTP obligerait chaque pays signataire à permettre aux institutions financières des autres pays du PTP de fournir des services particuliers sur son territoire et de fournir tout nouveau service financier que le pays autoriserait ses institutions financières à fournir. En matière de réglementation des institutions financières, le chapitre 11 prévoit que les pays du PTP ne seraient pas empêchés d’adopter ou de maintenir des mesures pour protéger les déposants ou assurer la stabilité du système financier.

Les services constituent une part relativement petite, mais croissante du commerce international du Canada. La valeur totale des échanges de services entre le Canada et les autres pays du PTP s’élevait à 134 milliards de dollars en 2014, année la plus récente pour laquelle des données sont disponibles. Comme le montre la figure 3, ce montant comprend 58,8 milliards de dollars en exportation et 75,2 milliards de dollars en importation de ces pays au cours de cette année. Tout comme avec le commerce de marchandise, les États-Unis demeurent le plus important partenaire du Canada sur le plan du commerce des services parmi les pays membres du PTP. En 2014, 89,6 % de la valeur des exportations canadiennes de services destinées aux pays membres du PTP est allé aux États-Unis, tandis que 89,3 % de la valeur des importations canadiennes de services des pays membres du PTP provenait des États-Unis.

Figure 3 : Valeur du commerce des services du Canada et solde commercial en matière de services avec les autres pays du partenariat transpacifique, 1994 à 2014

Description: Le graphique montre la balance commerciale entre le Canada et les autres pays du PTP dans le secteur des services pour la période 1994-2014, en milliards de dollars.

Note :  Puisque les données concernant les échanges de services du Canada avec Brunéi Darussalam et le Pérou ne sont pas disponibles pour 2014, la valeur des échanges de services entre le Canada et ces pays n’est pas incluse dans la figure.

Source : Figure préparée à partir de données de Statistique Canada.

Même si le secteur des services forme un important pan de l’économie du Canada, la question du commerce transfrontalier des services n’a été abordée que par un petit nombre de témoins. Dans l’ensemble, les intervenants qui ont discuté de l’impact potentiel du PTP sur le commerce des services au Canada ont mis l’accent soit sur les débouchés à l’exportation que l’Accord ouvrirait aux fournisseurs canadiens, soit sur les risques que la ratification du PTP présenterait pour les services publics et sociaux.

Sur la question des débouchés extérieurs, certains témoins – dont le Conseil canadien des affaires et la Banque Scotia – ont dit que ce sont les fournisseurs de services financiers qui bénéficieraient le plus du PTP. La Fondation Asie Pacifique du Canada a expliqué que les fournisseurs de services financiers canadiens connaissent déjà du succès en Asie, et que la suppression des obstacles au commerce dans ce domaine profiterait aux banques et aux compagnies d’assurances du Canada.

Dans son mémoire au Comité, l’Association canadienne des compagnies d’assurances de personnes a avancé que le PTP ouvrirait des débouchés importants aux compagnies d’assurances du Canada parce qu’il fournirait des « règles rigoureuses et transparentes pour régir le commerce international » dans la région de l’Asie‑Pacifique et élargirait l’accès aux marchés à croissance rapide. L’Association a aussi signalé que les assureurs sur la vie et la santé du Canada comptent sur la circulation transfrontalière sûre et ininterrompue des données pour plusieurs fonctions commerciales et administratives, y compris les services à la clientèle et la création de produits. À cet égard, les dispositions du PTP qui limiteraient l’adoption de restrictions sur les transferts de données transfrontaliers ou interdiraient l’exigence de localisation des données et l’imposition de droits de douane sur le commerce électronique démontrent, selon l’Association, que le PTP serait un instrument novateur dans plus d’un secteur et établirait de « nouvelles règles axées sur le marché ».

Dans son mémoire au Comité, l’Internet Association a souligné que « [l]a libre circulation des données aide les entreprises canadiennes de toutes tailles à offrir des services numériques continus partout dans le monde ». Elle a ajouté que les engagements relatifs au cybercommerce prévus dans le PTP, qui feraient la promotion de la libre circulation de l’information et des données et limiteraient les exigences en matière de stockage de données local, représenteraient la plus haute norme convenue à l’échelle internationale jusqu’à maintenant. Selon l’Association, « [l]e PTP permettra aux entreprises de déplacer des données comme bon leur semblera, à condition de se plier à des mesures de protection appropriées, comme la protection des renseignements personnels ».

Le Regroupement des ordres d’architectes du Canada a dit que le PTP aiderait le Canada et les autres pays signataires à négocier des ententes de reconnaissance mutuelle de l’autorisation d’exercer certaines professions. Par exemple, l’organisme a dit que « [le PTP] faciliterait la négociation d’autres [accords de reconnaissance mutuelle]. L’année dernière, nous avons discuté avec le Japon, et on nous a fait savoir qu’il ne serait possible de conclure un [accord de reconnaissance mutuelle] qu’une fois le PTP ratifié. »

Mais pour d’autres témoins, le PTP risquerait au contraire de nuire au commerce des services. Par exemple, certains ont avancé que, parce que tous les services sont assujettis à l’Accord à moins d’être l’objet d’une exemption formelle (approche de la « liste négative »), le Canada serait empêché d’exclure ultérieurement certains services, même s’ils répondaient à une fin publique. Dans leur mémoire au Comité, le B.C Government and Service Employees’ Union, l’Association des sciences de la santé de la Colombie-Britannique, la Health Sciences Association of Alberta et le Syndicat des employés de la fonction publique de l’Ontario ont parlé de la protection des services publics et de la « liste négative » :

Le Canada a bien négocié une réserve pour les services réputés répondre à une fin publique, mais la liste des services sociaux figurant à l’annexe II de l’accord est extrêmement limitée. Non seulement elle ne comprend pas les divers services auxiliaires qui appuient le fonctionnement de ceux énumérés, mais encore les services imprévus qui seront réputés répondre à une fin publique plus tard ne seront pas protégés par cette réserve.

Le Syndicat des employés des secteurs public et privé du Nouveau-Brunswick a lui aussi affirmé que les divers services auxiliaires qui assurent le fonctionnement des services publics ne font pas l’objet d’une exception. Par conséquent, dans le domaine de la santé, les services auxiliaires que sont les services de nettoyage, d’entretien et d’administration seraient assujettis aux dispositions du PTP.

De même, l’Association des infirmières et infirmiers du Canada a fait remarquer que la formation dispensée par des fournisseurs privés aux membres de cette profession serait exclue du champ d’application de la réserve prévue à l’annexe II de l’Accord du PTP. Or, selon l’Association, le nouvel examen d’admission produit par une entreprise privée américaine suscite des préoccupations vu la mauvaise traduction du contenu français, le manque de documents de préparation pour les étudiants francophones et l’alignement insuffisant entre l’examen et les compétences nécessaires pour exercer la profession infirmière dans le système de soins de santé canadien. L’Association a dit craindre que, en raison du PTP, les décideurs politiques préfèrent passer sous silence, par crainte de litiges, les problèmes liés à l’examen.

Dans son mémoire au Comité, le Syndicat des travailleurs et des travailleuses des postes a signalé que le chapitre 10 du PTP comprend une « annexe détaillée sur les services de livraison express dans le cadre de laquelle des contraintes beaucoup plus explicites que celles prévues dans l’ALENA et l’[Accord général sur le commerce des services de l’OMC] seraient imposées à l’autorité gouvernementale concernant les services postaux et les activités de Postes Canada ». Selon le Syndicat, « [c]es nouvelles règles ne limiteraient pas seulement la capacité de Postes Canada d’élargir la gamme des services qu’elle offre actuellement, comme ceux de Xpresspost et de sa filiale Purolator, mais elles menaceraient aussi la capacité de la société de maintenir son modèle d’affaires actuel, soit l’intégration des services de livraison express et de courrier ». Ces restrictions, combinées à d’autres dispositions du PTP, dont celles sur les entreprises d’État et le RDIE, mettraient « sérieusement en péril la capacité de Postes Canada de continuer à offrir des services de courrier et de colis de qualité aux Canadiens, peu importe où ils vivent, et de demeurer un service public viable sur le plan financier ».

ADMISSION TEMPORAIRE DES GENS D’AFFAIRES

L’Accord du PTP prévoit des engagements permettant l’admission temporaire des gens d’affaires de certains pays membres du PTP dans d’autres pays partenaires. Cela inclurait des types de gens d’affaires non visés par des ALE déjà négociés par le Canada, comme des travailleurs dans des corps de métier particuliers.

Le chapitre 12 de l’Accord du PTP donne la liste des engagements relatifs à l’admission temporaire de gens d’affaires dans les pays partenaires. L’annexe du Canada précise les conditions et les restrictions entourant l’admission et le séjour temporaires, notamment la durée du séjour, pour les différentes catégories de gens d’affaires de certains pays du PTP. Le Canada prendrait des engagements concernant l’admission temporaire de quatre catégories d’hommes et de femmes d’affaires : les hommes et les femmes d’affaires en visite; les personnes mutées à l’intérieur d’une société; les investisseurs; les professionnels et les techniciens. Ces engagements du Canada s’appliqueraient généralement aux gens d’affaires de pays partenaires ayant pris des engagements particuliers à l’égard de l’admission sur leur territoire de certains hommes et femmes d’affaires canadiens. Tous les pays du PTP, à l’exception des États‑Unis, ont pris des engagements concernant l’admission temporaire des gens d’affaires.

Affaires mondiales Canada a parlé au Comité de l’approche – qu’il a qualifiée de prudente – adoptée par le Canada durant les négociations de l’Accord du PTP concernant l’admission temporaire de professionnels. Le Ministère a expliqué que les engagements du Canada à l’égard des professionnels ne s’appliqueraient qu’à ceux ayant déjà un contrat, comme une offre d’emploi, et un certain niveau de scolarité. Le Ministère a précisé que, pour que le Canada accorde aux professionnels hautement qualifiés l’admission temporaire sur son territoire en vertu de l’Accord du PTP, ceux-ci devraient « recevoir un salaire qui correspond au salaire en vigueur pour le même type de profession avec une expérience comparable sur le marché canadien, dans la région concernée, qu’il s’agisse de l’Alberta, de Toronto ou de Victoria ».

Certains témoins ont parlé des possibilités qu’auraient les entreprises canadiennes d’invoquer les dispositions de l’Accord du PTP sur la mobilité de la main‑d’œuvre pour envoyer des spécialistes, des travailleurs et des techniciens terminer des travaux effectués à forfait dans des pays partenaires. Selon M. Herman, le PTP permettrait aux entreprises canadiennes de transférer à l’étranger des techniciens, des employés et des spécialistes, ce qu’elles ne peuvent faire actuellement. M. Herman a dit : « Cela me paraît tout à fait avantageux pour les employés canadiens et un gros avantage pour les emplois canadiens. »

Le Comité a appris que les dispositions de l’Accord du PTP relatives à l’admission temporaire des gens d’affaires pourraient aider les secteurs canadiens confrontés à une pénurie de main‑d’œuvre. D’après Affaires mondiales Canada, lorsque le gouvernement a mené des consultations au sujet du PTP, « des représentants d’entreprises ont fait état de la difficulté de trouver de la main-d’œuvre qualifiée au Canada Ils sont donc favorables aux accords de libre-échange qui facilitent l’accès à des travailleurs étrangers temporaires qualifiés pour répondre à des besoins particuliers ». Cela étant, le Ministère a aussi indiqué qu’en vertu de l’Accord du PTP, « l’accès au marché du travail canadien ne serait facilité que pour les travailleurs hautement qualifiés qui ont investi des capitaux importants au Canada ou qui ont des contrats préalables ou des offres d’emploi au Canada ».

Québec International a souligné un autre avantage possible de l’augmentation de la mobilité de la main‑d’œuvre entre les pays du PTP, soit une meilleure compréhension des cultures et des langues des pays partenaires, ajoutant que cette plus grande ouverture permettrait de faire des produits plus novateurs et mieux adaptés aux préférences locales.

Malgré ces avantages potentiels, la plupart de ceux qui se sont exprimés – que ce soit en personne devant le Comité ou en envoyant des mémoires ou des courriels – au sujet de l’admission temporaire des gens d’affaires se sont concentrés sur les risques de perturbations que fait peser l’Accord du PTP sur le marché du travail canadien. Leur plus grande inquiétude vient de la disposition suivante de l’annexe du Canada sur l’admission temporaire de gens d’affaires, à savoir : « Le Canada autorise l’admission temporaire des professionnels et techniciens et leur fournit un permis ou une autorisation de travail sans : a) subordonner l’autorisation d’admission temporaire à des validations de l’offre d’emploi ou à d’autres procédures ayant un objectif similaire; b) imposer ou maintenir de restrictions numériques relativement à l’admission temporaire[42]. »

D’après l’Alberta Federation of Labour, cette disposition signifie que les gouvernements canadiens ne pourraient pas imposer un critère de nécessité aux employeurs voulant faire entrer des travailleurs temporaires au Canada. À son avis, « les travailleurs étrangers visés par le Partenariat transpacifique auront le droit d’occuper des emplois au Canada même si des travailleurs canadiens sont facilement disponibles pour occuper ces emplois, et ce, sans égard au taux de chômage ».

À propos du chapitre 12 de l’Accord du PTP, le Conseil des Canadiens a affirmé que l’impossibilité d’imposer une étude d’impact sur le marché du travail comme condition préalable à l’admission dans le pays et à la délivrance d’un permis de travail retire au Canada sa capacité de réglementer son marché du travail et de contrôler le nombre de travailleurs étrangers qui entrent sur son territoire. Il a déclaré que ces aspects « inquiétants » du PTP obligeraient les travailleurs canadiens à rivaliser avec des travailleurs étrangers pour des emplois au Canada, quelle que soit la situation de l’emploi.

Par ailleurs, certains témoins ont fait valoir que dans l’Accord du PTP, le Canada a pris des engagements envers certains corps de métier, chose qu’il n’a pas faite dans d’autres ALE. Selon les Syndicats des métiers de la construction du Canada, « [j]amais auparavant les travailleurs manuels comme les gens de métier n’avaient été directement nommés dans un accord commercial du Canada ou touchés par un tel accord. Personne ne peut comprendre comment les dispositions sur l’immigration du PTP se répercuteront sur les travailleurs du Canada. Personne ne sait combien d’entreprises de construction du Japon ou du Chili viendront ici avec leurs propres effectifs. Personne ne le sait, parce que le Canada n’a jamais tenté de faire cela auparavant. »

Le Syndicat des Métallos a abondé dans le même sens, disant qu’en comparaison avec d’autres ALE déjà conclus par le Canada, un plus large éventail de professionnels et de techniciens sont visés par l’Accord du PTP, incluant des travailleurs peu qualifiés. Selon le Syndicat, cela pourrait avoir d’énormes répercussions sur certains métiers, comme ceux de charpentier ou de mécanicien.

Pourtant, Affaires mondiales Canada a dit au Comité que les engagements que prend le Canada dans l’Accord du PTP à l’égard de l’admission temporaire des gens d’affaires sont semblables à ceux figurant dans d’autres accords qu’il a signés récemment. De l’avis du Ministère, ces ALE n’ont pas entraîné de hausse sensible du nombre de travailleurs étrangers au Canada. Le Ministère a expliqué qu’en vertu des ALE conclus avec la Corée du Sud, le Pérou et la Colombie, en 2015, le Canada n’a admis respectivement que 13, 14 et 45 travailleurs en provenance de ces pays.

Même si d’autres pays membres du PTP ont pris des engagements concernant l’admission temporaire de certains types de professionnels et de techniciens canadiens, certains témoins ont affirmé que peu de Canadiens profiteraient des occasions d’aller travailler dans d’autres pays partenaires. Par exemple, l’International Union of Operating Engineers prédit que seul un petit nombre de travailleurs de la construction canadiens irait travailler dans les autres pays signataires du PTP. Selon ce syndicat, « [c]e n’est pas seulement en raison des problèmes de langue; en effet, les normes de sécurité et de travail sont beaucoup moins élevées dans la plupart de ces pays, et les salaires sont beaucoup plus bas que ceux gagnés par les travailleurs de la construction au Canada. Pourquoi, dans ce cas, nos gens souhaiteraient-ils travailler dans ces pays? »

Selon les témoignages qu’a recueillis le Comité, le pays susceptible d’intéresser le plus les travailleurs de la construction canadiens, et celui que privilégient la plupart des entrepreneurs canadiens qui veulent faire des affaires à l’étranger, c’est les États‑Unis; or, il s’avère que ce pays n’a pris aucun engagement concernant l’admission temporaire des gens d’affaires. La Fraternité internationale des ouvriers en électricité a dit à ce propos : « Il se trouve toutefois qu’un pays qui brille par son absence est le plus grand partenaire commercial du Canada : les États-Unis d’Amérique. Évidemment, ce pays n’a vu aucun avantage pour lui dans l’accord, alors qu’y a-t-il pour nous? »

Les Syndicats des métiers de la construction du Canada ont laissé entendre que les engagements du Canada relatifs à l’admission de travailleurs de la construction des pays du PTP pourraient compromettre la capacité des travailleurs d’ici de profiter des contrats canadiens visant des projets d’infrastructures. Selon eux, « [d]ans l’état actuel des choses, alors que des entreprises étrangères peuvent obtenir des contrats et réaliser des projets ici, elles doivent embaucher une main-d’œuvre canadienne. Le PTP change la donne. Selon les dispositions de cet accord, lorsqu’une entreprise étrangère décroche un contrat, rien ne garantit que les travailleurs de l’Ontario ou d’une autre province se verront offrir ces emplois, et le financement de l’infrastructure publique, l’argent versé par les contribuables canadiens, en passant, est versé à l’étranger plutôt que d’être injecté dans notre propre économie ».

Cependant, dans un mémoire soumis au Comité après leur comparution, les Syndicats des métiers de la construction du Canada expliquent que « [b]ien qu’il y ait une possibilité d’afflux de travailleurs internationaux à cause du PTP, il convient de rappeler que, selon ConstruForce Canada, pour répondre à l’ensemble des exigences en matière de travail et de demande du marché de 2016 à 2025, le secteur de la construction devra recruter 35 000 travailleurs des autres secteurs et de l’extérieur du Canada ».

Certains témoins ont affirmé que les engagements pris par le Canada dans l’Accord du PTP en ce qui a trait à l’admission temporaire des gens d’affaires pourraient compromettre la sécurité du public ainsi que celle des travailleurs sur les chantiers de construction au Canada. L’International Union of Operating Engineers a expliqué au Comité que la catégorisation de certaines professions faite au chapitre 12 de l’Accord du PTP pourrait être trop large. De son point de vue, un « entrepreneur pourrait être autorisé à mener des travaux liés à l’équipement lourd, ce qui signifie qu’on pourrait se retrouver avec des opérateurs de grue mal formés et sous‑qualifiés dans notre pays ». Le syndicat a ajouté que rien, dans l’Accord du PTP, n’obligerait les éventuels travailleurs de la construction à parler français ou anglais, ce qui pourrait s’avérer très dangereux, parce que les travailleurs en question ne seraient pas capables de communiquer ou de se comprendre pendant des opérations de déplacement ou d’utilisation d’équipements lourds ou imposants, par exemple.

En revanche, pour ce qui est des qualifications des travailleurs, Affaires mondiales Canada a précisé que – dans le contexte du PTP – « [c]e qui est demandé aux Canadiens est aussi demandé aux étrangers ». De même, les Syndicats des métiers de la construction du Canada ont expliqué que « même une fois qu’un travailleur a la voie libre pour se joindre à la population active grâce au PTP et aux formalités complétées d’immigration, il doit se soumettre à tous les examens, accréditations et autres exigences nécessaires à la pratique d’une profession dans le pays concerné ».

PROTECTION DES INVESTISSEMENTS

Incidence globale des dispositions sur l’investissement

Les dispositions sur la protection des investissements contenues dans le chapitre 9 de l’Accord du PTP reposent notamment sur l’engagement à traiter les investisseurs des autres pays partenaires de manière juste, équitable et non discriminatoire. Ainsi, les membres du PTP seraient tenus de payer une compensation, dans certaines circonstances, s’ils ne respectent pas leurs obligations en vertu du chapitre 9. De plus, les pays signataires doivent permettre que les capitaux se rapportant aux investissements puissent être transférés librement et promptement.

Comme le montre la figure 4, le stock d’investissement direct canadien à l’étranger dans les autres pays du PTP était estimé à 526,9 milliards de dollars en 2015, tandis que le stock d’investissement direct au Canada provenant de ces pays s’élevait à 420,8 milliards de dollars.

Tout comme le commerce des marchandises et des services, les États-Unis restent la source et la destination la plus importante en matière d’investissement direct à l’étranger parmi les pays membres du PTP. En 2015, 85,7 % du stock d’investissement direct canadien à l’étranger se trouvait aux États-Unis, et 92,2 % du stock d’investissement étranger direct au Canada par les autres pays du PTP provenait des États-Unis.

Figure 4 : Stock d’investissement étranger direct, Canada et pays du PTP, 1995 à 2015

(en milliards de dollars)Description: Le graphique montre la valeur totale de l'investissement canadien aux autres pays du PTP et de l'investissement des autres pays du PTP au Canada pour la période 1995-2015, en milliards de dollars.

Note :  « PTP » signifie Partenariat transpacifique. Les données pour certains pays ne sont pas disponibles pour toutes les années.

Source: Figure préparée à partir de données de Statistique Canada.

Selon Canpotex, les dispositions sur l’investissement des ALE – comme l’Accord du PTP – contribuent à instaurer des conditions équitables pour tous, de sorte que les entreprises canadiennes peuvent s’attendre à ce que les règles sur les marchés étrangers soient claires et prévisibles. Canpotex a aussi indiqué qu’il est « utile que les pays se soient entendus sur un ensemble de règles qui prévoient les conséquences de la non‑conformité ».

Dans le même ordre d’idées, la Western Grain Elevator Association a fait observer que les dispositions sur le règlement des différends entre investisseurs et États contenues dans l’Accord du PTP envoient aux investisseurs le message que leurs investissements seront protégés contre toute mesure gouvernementale imprévisible dans les autres pays partenaires. Elle a dit : « Nous devons savoir que l’endroit où nous faisons ces investissements n’est pas constamment en train de changer. Nous devons être en mesure de prédire l’environnement dans lequel nous investissons, et comprendre que, pour plusieurs raisons, il peut changer, mais il [ne] peut changer du jour au lendemain d’une manière qui nuit aux prémisses qui sous-tendent nos investissements et qui reposent sur des décisions gouvernementales. »

En revanche, M. David Schneiderman, de l’Université de Toronto, qui comparaissait à titre personnel, a contesté l’idée que les traités sur l’investissement protègent les investisseurs canadiens à l’étranger et améliorent le climat d’investissement dans les pays signataires. Selon lui, « [a]ucune de ces allégations ne repose sur des données probantes. Selon une méta‑analyse de toutes les données empiriques[43], la corrélation qui existe entre le fait de signer des traités d’investissement et d’attirer de nouveaux investissements de l’étranger est à ce point négligeable sur le plan économique qu’elle est considérée comme inexistante. » Croyant que le Canada pourrait « très bien se passer de traités d’investissement », il a suggéré la réalisation d’une évaluation indépendante des traités sur l’investissement ou des chapitres des ALE qui sont consacrés à ce domaine.

Certains témoins ont indiqué au Comité que, au lieu d’éliminer les obstacles au commerce international, les récents ALE – comme l’Accord du PTP – ont pour principal objectif de protéger les droits des investisseurs. Selon la Social Justice Cooperative of Newfoundland and Labrador, « [à] la base, le PTP vise moins à accroître le commerce qu'à garantir les droits des investisseurs commerciaux ».

Mécanisme de règlement des différends entre investisseurs et États

Les dispositions du mécanisme de règlement des différends entre investisseurs et États (RDIE) de l’Accord du PTP ressemblent à celles prévues dans la plupart des traités bilatéraux en matière d’investissement et ALE négociés par le Canada, dont l’ALENA[44]. Cela dit, le chapitre sur l’investissement de l’Accord du PTP contient des dispositions intégrant certaines leçons tirées par les pays partenaires de l’utilisation des mécanismes de RDIE. Par exemple, l’Accord du PTP prévoit le rejet rapide des demandes non fondées et interdit à un demandeur d’entamer des poursuites auprès d’instances parallèles.

La plupart des témoins qui ont parlé au Comité des dispositions sur l’investissement du PTP se sont concentrés sur le mécanisme proposé de RDIE. Certains ont prédit des conséquences fâcheuses pour le Canada et estiment que le fait de donner aux investisseurs étrangers le droit de recourir à l’arbitrage international pourrait coûter cher au gouvernement, et même affaiblir la démocratie dans notre pays.

Affaires mondiales Canada a expliqué que, dans le cadre de ses consultations entourant le PTP, de nombreux Canadiens ont exprimé des inquiétudes à l’égard de l’étendue et de l’application du mécanisme de RDIE de l’Accord du PTP. Plus particulièrement, certains redoutent que les dispositions du RDIE permettent à des sociétés de poursuivre le gouvernement du Canada, si elles estiment que des lois ou des règlements portent préjudice à leurs pratiques ou pourraient leur faire perdre des profits. Selon le Ministère, beaucoup de Canadiens « craignent que le mécanisme de RDIE du PTP ne limite la capacité du gouvernement de légiférer dans l’intérêt public ». Le Ministère a néanmoins tenu à souligner que certains Canadiens sont favorables aux dispositions sur le RDIE de l’Accord du PTP, croyant « que des règles d’investissement contraignantes, l’accès à un marché prévisible et des mécanismes de règlement des différends contribuent à l’amélioration du climat d’investissement international ».

Plusieurs témoins ont laissé entendre que la fréquence à laquelle des investisseurs ont lancé des poursuites contre le Canada en vertu du mécanisme de RDIE des ALE en vigueur – notamment l’ALENA – et l’issue de ces poursuites donnent des raisons de s’opposer à l’adoption d’un mécanisme de RDIE dans l’Accord du PTP. À ce propos, le Réseau pour le commerce juste a dit ceci :

À cause de ce genre de mécanisme de RDIE, le Canada est maintenant le pays développé le plus poursuivi en justice. Trente-cinq poursuites d’investisseurs contre le Canada ont été déposées dans le cadre de l’ALENA, et le nombre ne cesse d’augmenter. Nous avons déjà essuyé six revers et avons dû verser plus de 200 millions de dollars de l’argent des contribuables en sanctions pécuniaires, sans compter les dizaines de millions de dollars en frais d’avocat connexes […] À mesure que l’ALENA s’élargit, intègre neuf autres pays et devient le PTP, le Canada court le risque de voir sa mauvaise expérience du mécanisme de RDIE de l’ALENA se répéter à plus grande échelle.

À ce jour, le Canada a reçu 40 avis d’investisseurs exprimant leur intention de soumettre un différend à l’arbitrage[45]. À une exception près, tous ces avis ont été présentés en vertu du chapitre 11 de l’ALENA[46]. Des 40 affaires, 26 sont allées en arbitrage[47], et le Canada a été condamné à payer une indemnité à l’issue de 4 de ces affaires : 6 millions de dollars CAN plus les frais à S.D. Myers Inc. en 2000, 460 000 $ US plus les frais à Pope & Talbot Inc. en 2012, 13,9 millions de dollars CAN plus l’intérêt à Mobil Investments Canada Inc. et 3,4 millions de dollars CAN plus l’intérêt à Murphy Oil Corporation en 2016, et 25 millions de dollars CAN à Windstream Energy LLC en 2016[48].

Le gouvernement a aussi réglé deux affaires avant que le tribunal ne rende sa décision aux termes du chapitre 11 de l’ALENA : il a versé 13 millions de dollars US à Ethyl Corp. en 1998 et 130 millions de dollars CAN à AbitibiBowater Inc. en 2010[49].

Bien que ces sommes soient considérables, il est important de tenir compte du fait que le stock d’investissement étranger direct au Canada atteignait 768 milliards de dollars en 2015. De ce montant, 388 milliards de dollars venaient des États-Unis – le pays d’origine de tous les investisseurs, sauf un, qui ont déposé une plainte contre le Canada jusqu’à présent[50]. En 1994, année d’entrée en vigueur de l’ALENA, le stock d’investissement étranger direct au Canada totalisait 155 milliards de dollars; de cette somme, 103 milliards de dollars venaient des États-Unis[51].

Certains témoins ont évoqué la possibilité de poursuites lancées en vertu du mécanisme de RDIE du PTP, et avancé que le fardeau financier qui en découlerait pourrait susciter un « gel réglementaire » ou rendre les gouvernements réticents à adopter de nouveaux règlements. Chris Brand, qui a comparu à titre personnel, a affirmé que « [l]a présence de mécanismes de règlement des différends entre les investisseurs et les États et le fait que les sociétés étrangères sont de plus en plus portées à les utiliser ou à menacer de les utiliser ont l'effet d'un gel réglementaire sur le gouvernement et l'amènent à pencher du côté de la protection des sociétés étrangères plutôt que de la protection des Canadiens, étant donné que des coûts importants sont en jeu, même si le Canada gagnait sa cause ».

Même si les groupes spéciaux d’arbitrage formés conformément aux dispositions de l’Accord du PTP relatives au RDIE ne jouiraient pas de la prérogative d’invalider des lois nationales, beaucoup de témoins ont dit au Comité que le pouvoir qu’auraient ces groupes spéciaux d’accorder une compensation aux investisseurs en cas de non‑respect des dispositions relatives aux investissements du PTP risque de dissuader les gouvernements d’adopter des mesures dans l’intérêt du public, notamment en matière de protection environnementale. Par exemple, dans un courriel adressé au Comité, Dustin Carey, qui s’exprimait à titre personnel, a indiqué que le mécanisme de RDIE du PTP limiterait grandement la capacité des gouvernements canadiens d’adopter des politiques et des règlements facilitant la transition vers une économie non dépendante des combustibles fossiles.

La Fédération du travail du Manitoba a dit que l’expérience du Canada dans le contexte de l’ALENA montre que les mesures de protection environnementales pourraient être contestées aux termes du PTP, et que « selon le Congrès du travail du Canada, près de 40 % des contestations judiciaires soulevées au titre de l’ALENA l’ont été par des entreprises opposées aux politiques environnementales des gouvernements, comme celles d’interdire les additifs d’essence et les [biphényles polychlorés ou BPC] ou d’appliquer des mesures de protection de l’eau ». La Fédération a ajouté que le PTP empêcherait les gouvernements de prendre « les mesures nécessaires en ce qui touche les changements climatiques et la transition vers une économie plus faible en carbone ».

Dans le même ordre d’idées, l’Association canadienne du droit de l’environnement a laissé entendre que si les pays partenaires adoptent des mesures environnementales susceptibles de nuire au commerce ou aux investissements, ces mesures pourraient être contestées en vertu du chapitre sur l’investissement de l’Accord du PTP. Selon l’Association, les « répercussions environnementales négatives » du mécanisme de RDIE ne seraient pas contrebalancées par les dispositions du chapitre sur l’environnement de l’Accord du PTP. Toujours d’après elle, « [l]e caractère vague et discrétionnaire des formules employées dans le chapitre sur l’environnement est illustré par la section des engagements généraux qui autorise chacune des parties à déterminer ses propres niveaux de protection environnementale intérieure ainsi que ses propres priorités en matière d’environnement ».

Pour ce qui est du « gel réglementaire », des témoins ont dit au Comité qu’il est difficile de déterminer l’étendue de ce phénomène. Gus Van Harten, de l’Université York, qui a comparu à titre personnel, a expliqué que les risques liés aux mécanismes de RDIE sont mal compris. Selon lui, il n’est pas facile de mesurer les coûts de tels mécanismes, car il est compliqué de voir les nombreuses implications de la pression que ces mécanismes exercent sur les gouvernements pour qu’ils modifient leurs décisions en faveur d’un investisseur étranger. Il a donné l’exemple suivant :

Par le passé, le Canada a retiré une loi interdisant un additif pour l’essence lorsqu’il a été poursuivi dans le cadre du RDIE, en vertu de l’ALENA. Le Canada a donc eu dans son essence un additif chimique [le méthyl cyclopentadiényl manganèse tricarbonyl ou MMT] pendant environ six ans, alors qu’il n’y en avait pas dans l’essence aux États-Unis. L’industrie automobile pensait que cet additif nuisait au bon fonctionnement de ses nouvelles technologies de réduction des émissions d’automobiles. Divers coûts associés à ce résultat — largement attribuable au RDIE — n’ont jamais vraiment été examinés et dépistés.

Dans un mémoire qu’il a envoyé au Comité après sa comparution, M. Van Harten a expliqué que l’Accord du PTP se fonde sur des réserves, des exceptions et des exclusions pour assurer que les États conservent la latitude voulue en matière de réglementation. À son avis, il ne s’agit pas de la bonne façon de procéder, et ce, pour deux raisons : d’une part, l’on semble partir du principe que le droit de réglementer des gouvernements est une exception à la protection des investissements, plutôt qu’un objectif égal; d’autre part, les exceptions et exclusions ne s’appliquent normalement pas à tous les engagements des parties signataires relatifs à la protection des investisseurs étrangers, et elles se limitent à un secteur ou à un champ de compétence déterminés.

La Chambre de commerce du Canada a émis une opinion différente et a laissé entendre qu’un mécanisme de RDIE ne devrait pas poser de problème tant que les gouvernements nationaux traitent les investisseurs étrangers de manière non discriminatoire, d’autant plus que le Canada n’a pas l’habitude d’appliquer des mesures différentes selon la nationalité des investisseurs.

Des témoins ont parlé de la transparence des procédures de RDIE et du processus de sélection des arbitres appelés à siéger dans les groupes spéciaux de RDIE. Selon eux, ce processus de sélection ne garantirait pas suffisamment l’impartialité des arbitres. D’après l’Association québécoise pour la taxation des transactions financières et pour l’action citoyenne, comme les plaintes ne pourraient être déposées que par des investisseurs, les arbitres auraient intérêt à trancher en leur faveur s’ils veulent être choisis pour d’autres causes.

OpenMedia s’est aussi exprimé au sujet du processus de sélection des arbitres devant faire partie des groupes spéciaux de RDIE, affirmant que ceux-ci « ne présentent aucune des caractéristiques d’un système juridique et d’un système judiciaire canadien que nous considérons comme étant ouvert, transparent et responsable ». Selon M. Van Harten, l’Accord du PTP « n’intègre pas les mesures de sauvegarde de l’indépendance judiciaire qui sont présentes au sein des tribunaux judiciaires de niveau national et international », comme la sécurité du mandat des arbitres, ainsi que leur rémunération préétablie et une méthode objective d’attribution des dossiers.

Étant donné que l’Accord du PTP a été négocié parallèlement à l’AECG entre le Canada et l’UE, des témoins ont comparé les dispositions relatives au RDIE des deux accords, d’autant plus que celles de l’AECG ont été modifiées à la suite d’un examen juridique du texte de l’Accord[52]. Pour M. Herman, les dispositions relatives à la RDIE dans l’AECG Canada-UE sont meilleures que celles du modèle habituellement suivi dans les ALE antérieurs du Canada, parce qu’elles prévoient une liste permanente d’arbitres et un mécanisme d’appel. M. Herman a ajouté qu’il aimerait bien que l’Accord du PTP prévoie un tel mécanisme, mais qu’il est difficile de comparer l’Accord du PTP et l’AECG, car les dynamiques de négociation étaient différentes.

M. Ciuriak a quant à lui expliqué que « le cadre de RDIE du PTP est le deuxième meilleur; il est devancé par celui élaboré au cours des négociations de l’Accord économique et commercial global (AECG) entre le Canada et l’Union européenne, qui a répondu ingénieusement aux vives critiques concernant les mécanismes conventionnels de RDIE et a proposé un cadre réformé ». Cela dit, M. Schneiderman a fait observer que les dispositions concernant le RDIE de l’AECG Canada-UE ne constituent qu’une modeste amélioration par rapport aux dispositions de même nature qu’a négociées le Canada par le passé « en raison de l’immense pouvoir discrétionnaire qui, dans le cadre du modèle de l’AECG, est encore attribué aux avocats spécialisés en placements ».

Concernant le type de mécanisme de règlement des différends qui lui semblerait approprié pour les ALE négociés par le Canada, M. Van Harten a déclaré qu’un mécanisme d’arbitrage entre États calqué sur le mécanisme de règlement des différends de l’OMC serait plus adéquat qu’un mécanisme de RDIE, parce que le mécanisme de l’OMC ne prévoit pas de versements de dommages‑intérêts rétrospectifs et, de ce fait, il est moins susceptible d’avoir un effet inhibiteur sur le plan réglementaire. Pour M. Van Harten, il faudrait que les investisseurs soient tenus de s’adresser aux tribunaux du pays où se trouve le gouvernement contre lequel ils souhaitent déposer une plainte. Ce témoin a dit que les « investisseurs étrangers devraient choisir judicieusement le pays dans lequel ils investiront en fonction des risques commerciaux que tous les investisseurs évaluent avant d’investir dans des pays similaires ». Il a ajouté que si les investisseurs ne sont pas convaincus de la fiabilité des tribunaux dans un pays donné, ils peuvent se procurer une assurance-risque politique ou négocier des clauses d’arbitrage dans leurs contrats.

Mesures de contrôle du tabagisme

L’article 29.5 de l’Accord du PTP permettrait aux pays partenaires d’empêcher les investisseurs, sous le régime de RDIE, de déposer une plainte concernant une mesure de contrôle du tabagisme. La Société canadienne du cancer est favorable à l’exclusion proposée des mesures de santé publique concernant le tabagisme des dispositions relatives au RDIE de l’Accord du PTP, car elle estime que « l’industrie du tabac est dépourvue de scrupules. Elle cherche à utiliser les accords internationaux sur le commerce et l’investissement pour passer outre les mesures de santé publique prises de bonne foi pour lutter contre le tabac et qui s’appliquent de manière uniforme aux compagnies canadiennes et étrangères ».

Cela dit, pour l’Unité de recherche sur la mondialisation et l’équité en santé de l’Université d’Ottawa, l’exclusion concernant les mesures de contrôle du tabagisme montre que les pays du PTP craignent les conséquences éventuelles des dispositions relatives au RDIE sur les mesures de santé publique. Elle se demande donc pourquoi cette exclusion ne pourrait pas s’appliquer aussi à toutes les mesures de santé publique non discriminatoires qu’un pays pourrait adopter. Dans le même ordre d’idées, l’Association canadienne des médecins pour l’environnement se demande pourquoi il existe une exception particulière pour le tabac, si les exceptions générales pour la santé publique prévues dans l’Accord du PTP sont aussi efficaces que le disent les partisans du PTP.

DROITS DE PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE

Le chapitre 18 de l’Accord du PTP porte sur les droits de propriété intellectuelle (PI) et prévoit des engagements en matière de droit d’auteur, de brevets et de marques de commerce. Il comporte aussi des dispositions permettant d’assurer la conformité avec d’autres ententes internationales en matière de PI, et plus particulièrement l’Accord sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce de l’OMC.

La protection de la PI a été l’un des sujets les plus souvent abordés par les témoins, notamment à l’égard des dispositions de l’Accord du PTP relatives à la protection des brevets et du droit d’auteur. Affaires mondiales Canada a expliqué que l’objectif premier des chapitres des ALE sur la PI est de « garantir aux innovateurs que leurs innovations feront l’objet d’une certaine protection lorsqu’ils les commercialisent à l’échelle internationale ». Selon le Ministère, étant donné que les entreprises canadiennes sont bonnes pour innover, mais ont du mal à commercialiser leurs innovations, la protection de la PI prévue dans ces chapitres est importante.

Pour Barry Sookman, de McCarthy Tétrault, qui a comparu à titre personnel, « la quatrième révolution industrielle, dans laquelle nous devons nous engager, [repose] sur la protection de la propriété intellectuelle dans le but d’obtenir des capitaux et de favoriser l’innovation et la commercialisation ». M. Sookman a aussi fait remarquer que « le marché canadien est bien trop étroit pour que les entreprises canadiennes puissent vraiment s’y épanouir [...] Les entreprises canadiennes doivent donc compétitionner sur les marchés étrangers en respectant les régimes de PI existants dans ces marchés étrangers, et ce, que le Canada décide d’adhérer ou non ».

Cela dit, selon M. Balsillie, le « PTP vise à accroître la liberté d’action des chefs de file de l’économie de l’innovation et à imposer des restrictions à cet égard aux autres [...] À titre de PDG d’une entreprise canadienne du secteur de la technologie qui a émergé d’une simple idée pour atteindre une valeur de 20 milliards de dollars, ma principale préoccupation pendant deux décennies était d’accroître notre liberté d’action et de restreindre celle de nos concurrents. J’évalue les incidences du PTP sur la croissance des entreprises canadiennes de ce point de vue unique. » M. Balsillie a affirmé également que le « PTP consacre les intérêts des actuels détenteurs de propriété intellectuelle ». De son point de vue, le « problème provient du fait que vu la place [qu’occupent les titulaires de PI canadiens], le Canada sort perdant de ces négociations ».

Plusieurs témoins ont évoqué l’influence des États‑Unis dans les négociations entourant le chapitre sur la PI du PTP et fait remarquer que, de ce fait, l’Accord avantage surtout les titulaires de PI américains. Michael Geist, de l’Université d’Ottawa, a dit que les États-Unis « n'hésitent pas à présenter des demandes qui sont dans leur propre intérêt […] En leur qualité d'exportateur important, leurs intérêts — qu'il s'agisse des intérêts d'Hollywood ou d'autres intérêts de PI ou de pharmaceutiques — ne s'harmonisent pas nécessairement avec les nôtres. » Dans un mémoire qu’il a soumis au Comité à titre personnel, Matias Rocha dit que l’entrée en vigueur de l’Accord du PTP exigerait que les pays partenaires mettent en œuvre « les parties les plus controversées et les plus vulnérables » des lois américaines sur la PI, sans appliquer les mesures de protection limitées que les États‑Unis ont adoptées à l’égard de leurs politiques en matière de PI.

Protection des brevets visant les produits pharmaceutiques

Selon un résumé technique publié par Affaires mondiales Canada, le chapitre de l’Accord du PTP consacré à la PI correspond « aux régimes, aux systèmes et aux lois du Canada en ce qui touche : aux mécanismes de liaison avec les brevets; à la protection des données des essais cliniques; aux exceptions relatives à la fabrication anticipée », ainsi qu’au « résultat obtenu dans l’Accord économique et commercial global (AECG) avec l’Union européenne[53] ».

L’organisme Médicaments novateurs Canada a laissé entendre que l’Accord du PTP n’étendra pas la protection de la PI dans le domaine des sciences de la vie au‑delà des dispositions contenues dans l’AECG conclu entre le Canada et l’UE, tandis que plusieurs autres témoins étaient d’avis que, si les changements à la protection des brevets visant les produits pharmaceutiques proposés dans l’AECG Canada‑UE et l’Accord du PTP sont pris ensemble, la prolongation de la durée des brevets existants sur les produits pharmaceutiques au Canada pourrait entraîner une hausse du prix des médicaments. L’Ontario Health Coalition a affirmé que les dispositions de l’Accord du PTP feraient augmenter les coûts pour les acheteurs publics et privés de produits pharmaceutiques, ce qui aurait pour effet de restreindre les options politiques futures des gouvernements. Voici ce qu’elle en a dit :

Les défenseurs du régime de santé public et les experts commerciaux s’unissent pour mettre en garde la population que la conséquence la plus néfaste du PTP sur le régime de santé au Canada serait la hausse des coûts des médicaments. Cette conséquence aurait des répercussions sur l’ensemble du régime de santé, en entraînant des demandes concurrentes sur les ressources limitées, en exerçant une pression pour réduire les services dans le régime de santé, en accélérant la privatisation des services, en augmentant les coûts que les patients doivent débourser, et en aggravant les inégalités et les souffrances des malades et des personnes âgées.

En ce qui concerne les dispositions de l’Accord du PTP prévoyant que la durée des brevets visant les produits pharmaceutiques pourrait être prolongée d’au plus deux années pour tenir compte des retards dus au processus réglementaire, l’Association canadienne du médicament générique a indiqué que cela se traduirait par une augmentation des coûts – mais pas forcément des prix – des médicaments au Canada. Selon l’Association, les « prix des médicaments n’augmenteront pas nécessairement, contrairement aux coûts. Lorsque vous devez acheter un produit à 100 % du coût d’un produit d’origine au lieu de payer 18 ou 25 ¢ pour un médicament générique, pendant deux années supplémentaires, cela hausse les coûts ».

Plusieurs témoins ont donné une estimation de l’augmentation des coûts des médicaments attribuable à la prolongation proposée de la durée des brevets dans l’Accord du PTP. Par exemple, l’Association des infirmières et infirmiers du Canada a dit qu’« [e]n raison du prolongement des brevets de médicaments, ce qui retarderait la mise en marché de médicaments génériques moins coûteux, le coût des médicaments pourrait augmenter de 636 millions de dollars au Canada d'ici 2023, ce qui représente 5 % du coût annuel des médicaments brevetés au pays. Simultanément, le fait que des médicaments vitaux ne soient plus abordables aurait un effet néfaste sur la santé de la population en général. » D’autres organismes, comme le Centre canadien de politiques alternatives, l’Alberta Federation of Labour et la Coalition canadienne de la santé, ont abondé dans le même sens et indiqué qu’une prolongation de deux ans entraînerait une augmentation des coûts annuels des médicaments brevetés au Canada de 5 %, ou de plus de 600 millions de dollars.

Pour l’Alliance de la fonction publique du Canada, la hausse des coûts en santé subséquente à la mise en œuvre du PTP par le Canada signifierait que « le coût du Régime de soins de santé de la fonction publique augmenter[ait] également pour les fonctionnaires et les aînés ayant pris leur retraite de la fonction publique ».

Trade Justice PEI estime qu’avec le PTP, les résidents de l’Île‑du‑Prince‑Édouard devraient payer de 2 à 3 millions de plus annuellement pour leurs médicaments. L’organisme prédit qu’une hausse des coûts des médicaments exercera des pressions supplémentaires sur le budget en santé de la province, compromettant ainsi les services de soins de santé.

En outre, certains témoins ont indiqué au Comité que l’entrée en vigueur de l’Accord du PTP pourrait favoriser la pratique de « modification progressive des médicaments » – consistant à modifier légèrement la formule de médicaments brevetés pour en faire de nouveaux médicaments qui seraient à leur tour brevetés. Le Mouvement de soutien des grands‑mères est d’avis que les fabricants de médicaments de marque pourraient ajouter de nouvelles indications pour un médicament existant ou en modifier légèrement la formule, même si cela ne procure aucun bienfait thérapeutique, et ainsi maintenir leur monopole pendant 20 ans de plus. Selon un mémoire de la Support Our Health Care Society, une telle pratique est « inadmissible et n’a pas de place légitime » dans le PTP.

De plus, plusieurs témoins ont indiqué au Comité que la prolongation proposée de la durée des brevets visant les produits pharmaceutiques dans les pays partenaires pourrait nuire à l’accès aux médicaments abordables dans les pays en développement et les pays les moins avancés. Le Centre international de solidarité ouvrière a fait remarquer que les dispositions sur la PI de l’Accord du PTP pourraient empêcher les populations les plus pauvres du monde de se procurer des médicaments génériques permettant de traiter des maladies comme le VIH/sida ou la tuberculose.

Pour Médecins Sans Frontières, les dispositions sur la PI de l’Accord du PTP pourraient avoir pour conséquence de maintenir les prix des médicaments à des niveaux élevés pendant plus longtemps en limitant un peu plus la concurrence exercée par les produits pharmaceutiques génériques. À leur avis, « si l’entente de Partenariat transpacifique (PTP) est adoptée dans son état actuel, elle restera dans l’Histoire comme l’accord commercial le plus préjudiciable jamais signé en matière d’accès aux médicaments pour les pays en développement ». De même, le Réseau juridique canadien VIH/sida a signalé au Comité qu’en 2001, tous les membres de l’OMC – y compris le Canada – ont adopté une déclaration visant à « préserver la latitude des pays de concevoir leurs politiques d’intérêt public afin d’améliorer l’accès à des médicaments abordables pour tous, et cela comprend un certain nombre de mesures qui, dans certains cas, seront plus difficiles à appliquer aux termes du PTP[54] ».

Le représentant de l’Unité de recherche sur la mondialisation et l’équité en santé de l’Université d’Ottawa a expliqué qu’« un groupe de haut niveau de l’ONU réclame de nouveaux modèles de développement des technologies de la santé et des médicaments qui vont au-delà des régimes de brevets, afin d’établir un meilleur équilibre entre les intérêts commerciaux et industriels, d’une part, et les enjeux liés aux droits de la personne et à la santé publique, d’autre part ». Il a ajouté que dans ce contexte, « le renforcement des dispositions relatives aux brevets pharmaceutiques semble quelque peu déphasé par rapport à ces autres discussions multilatérales visant à garantir l’accès à des médicaments d’importance vitale ».

Prolongation de la durée du droit d’auteur

L’Accord du PTP prévoit que les pays partenaires devront protéger une œuvre, une prestation ou un phonogramme pendant au moins 70 ans après le décès de l’auteur, ou 70 ans après la première publication ou la première prestation, selon le cas. Au Canada, la Loi sur le droit d’auteur a été modifiée récemment afin de prolonger la durée de protection des droits sur les enregistrements sonores jusqu’à 70 ans après la date de leur publication, mais d’autres changements seraient requis pour permettre au Canada de respecter les engagements pris dans l’Accord du PTP. Actuellement, la Loi prévoit une protection pendant 50 ans après le décès de l’auteur pour d’autres catégories d’œuvres ou de prestations.

Pour ce qui est du rôle des fournisseurs de services Internet à l’égard des violations du droit d’auteur en ligne, les pays du PTP devront mettre en place un régime d’« avis et retrait » exigeant que ces fournisseurs de services bloquent l’accès au matériel après réception de l’avis du détenteur de droits qui s’estime lésé. Cela dit, conformément à l’annexe 18-E de l’Accord du PTP, le Canada serait autorisé à continuer d’appliquer son régime de « transmission d’avis volontaires », selon lequel les fournisseurs de services Internet envoient un avis à un éventuel contrevenant au droit d’auteur après réception d’une plainte de la part du détenteur de ces droits.

M. Geist a informé le Comité que la durée du droit d’auteur au Canada – qui correspond à la vie de l’auteur plus 50 ans – est conforme à la norme internationale établie par la Convention de Berne pour la protection des œuvres littéraires et artistiques[55], et que la prolongation de cette durée de 20 ans représenterait « d’importantes retombées pour les États‑Unis et une perte nette considérable pour le Canada ». Il a fait référence à des études – notamment un projet de rapport de la Commission australienne sur la productivité – selon lesquelles la prolongation de la protection du droit d’auteur pendant 20 ans de plus entraînerait des pertes financières pour les consommateurs[56]. M. Geist a indiqué que, selon ce projet de rapport, une telle prolongation, en vertu de la loi australienne, a donné lieu à des transferts nets des consommateurs australiens aux détenteurs de droits étrangers d’environ 88 millions de dollars australiens par année.

Aussi, selon l’Association des bibliothèques de recherche du Canada, la prolongation de la durée du droit d’auteur au Canada prévue dans l’Accord du PTP n’apporterait aucun avantage économique direct aux créateurs canadiens, parce que notre pays est un importateur net de PI. L’Association estime que les principaux bénéficiaires des dispositions du PTP qui concernent le droit d’auteur seraient les éditeurs ainsi que les producteurs de films et de musique étrangers. Elle a ajouté que la prolongation de la durée du droit d’auteur au Canada mettrait une bonne partie de l’histoire culturelle de notre pays hors de la portée du public, et pourrait avoir des effets néfastes sur l’économie du savoir au Canada. Enfin, elle a dit que « [l]es enseignants et les élèves ne seront pas autorisés à numériser ou photocopier des livres ou des œuvres artistiques dont le tirage est épuisé […] [L]e travail que font les bibliothèques, les archives et les musées pour préserver notre patrimoine culturel deviendra plus difficile ».

De même, OpenMedia a indiqué que « [s]'il est ratifié, le PTP prolongera la durée de validité des droits d'auteur de 20 ans au Canada, ce qui — de nombreux experts l'ont démontré dans une multitude d'études internationales — coûte de l'argent aux consommateurs et fera en sorte qu'il sera plus difficile pour la prochaine génération d'artistes et de créateurs de créer de nouvelles œuvres ».

Dans ce contexte, M. Geist a déclaré que la « vaste majorité des économistes qui se sont penchés sur la question reconnaissent cependant qu’aucun auteur ne va renoncer à écrire le roman du siècle, simplement parce que les droits de ses héritiers ne seront protégés que pendant 50 ans, et non plus 70. La création ne dépend pas en effet de ce genre d’incitation ».

Devan England, qui s’est exprimé à titre personnel lors de la séance « à micro ouvert » du Comité à Charlottetown, à l’Île‑du‑Prince‑Édouard, a dit que les innovateurs actuels ne tireraient aucun avantage d’une prolongation de la durée du droit d’auteur au Canada. Selon lui, la prolongation proposée ne profiterait qu’aux détenteurs de droits « d’innovateurs du passé décédés depuis longtemps ».

Quelques témoins ont donné des exemples précis de l’incidence que pourrait avoir sur les consommateurs la prolongation du droit d’auteur jusqu’à 70 ans après la mort du créateur. Dans un mémoire soumis au Comité à titre personnel, Benjamin Carlisle dit que les Canadiens profitent des avantages de cette différence de 20 ans dans la durée du droit d’auteur entre le Canada et les États‑Unis. Il a illustré son propos ainsi : « Cette année, par exemple, le festival de théâtre de ma ville natale de Stratford, en Ontario, présentera une adaptation de la pièce The Lion, The Witch and The Wardrobe de C.S. Lewis. L’auteur de ce livre est décédé en 1963 et ses œuvres sont entrées dans le domaine public au Canada en 2014. Les organisateurs du festival peuvent donc reproduire cette œuvre sur scène sans craindre d’être poursuivis en justice par Disney. Aux États-Unis, le droit d’auteur protégera cette œuvre jusqu’en 2034. »

Aussi, dans un mémoire présenté au Comité, les Guides du Canada (GGC) ont dit qu’en vertu de l’actuelle Loi sur le droit d’auteur, l’organisme a été en mesure de partager et de célébrer de nombreuses œuvres de ses collections; à son avis, ce partage sera plus difficile si on prolonge de 20 ans la durée du droit d’auteur. GGC a aussi évoqué le 100e anniversaire de la vente de biscuits des Guides du Canada en 2027, et indiqué qu’en vertu de la Loi sur le droit d’auteur actuelle, la photographie historique des filles vendant des biscuits des Guides ferait partie du domaine public en 2025. GGC a toutefois ajouté qu’une prolongation de 20 ans du droit d’auteur empêcherait GGC d’utiliser cette photographie avant 2045 et l’organisation manquerait ainsi l’occasion de le faire pour le 100anniversaire.

Certains témoins avaient une opinion différente des conséquences d’une prolongation de la période de protection du droit d’auteur sur les consommateurs et les détenteurs de droits canadiens. Par exemple, M. Sookman a dit que la prolongation de la protection du droit d’auteur jusqu’à 70 ans après le décès de l’auteur est en train de devenir la norme internationale, et que près de 90 pays accordent déjà une protection de cette durée ou plus longue.

Aussi, Ysolde Gendreau, de l’Université de Montréal, qui a comparu à titre personnel, a dit : « Plus de 90 pays offrent une durée de protection à vie, plus 70 ans. Nous n’en sommes pas au début de cette tendance, où une telle position pourrait être intéressante. Le train est arrivé, et il ne serait pas logique pour nous de ne pas embarquer. Est-ce que c’est excellent? Pas nécessairement, mais il ne sert à rien d’en faire tout un plat. Il y a des enjeux beaucoup plus importants à régler relativement aux droits d’auteur. » Mme Gendreau a aussi fait remarquer que la prolongation de 20 ans de la protection du droit d’auteur ne s’appliquerait qu’à un nombre limité d’œuvres canadiennes.

À propos de l’incidence sur les consommateurs de la prolongation de 20 ans de la durée de la protection du droit d’auteur, dans son mémoire au Comité, la Société canadienne des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique a cité un rapport de PricewaterhouseCoopers concluant qu’il n’y a aucune différence statistique dans le prix de la musique protégée ou non par droit d’auteur au Royaume‑Uni. La Société a donc indiqué que « toute critique des extensions du droit d’auteur invoquant le coût pour le consommateur est mal avisée ».

À propos des détenteurs de droits d’auteur, plusieurs témoins ont dit qu’il est essentiel d’accorder une protection suffisante aux créateurs pour instaurer un climat propice aux investissements au Canada. Voici d’ailleurs ce qu’a déclaré l’Association canadienne des éditeurs de musique :

La prolongation de la durée de protection ne concerne pas les héritiers. Il n’est pas question de « 50 ans suivant son décès » voire de « 70 ans suivant son décès » et elle n’a pas pour objectif de faire en sorte que les arrière-arrière-petits-enfants qu’aurait eus un compositeur avec sa troisième épouse puissent profiter d’une manne considérable d’argent. Tel n’est manifestement pas le cas. L’objectif est de créer un instrument financier sécurisé dans lequel les éditeurs de musique — qui sont des entreprises canadiennes — puissent investir. La prolongation de la durée de la protection augmente la valeur de cet instrument financier, sur lequel ceux-ci peuvent ensuite s’appuyer pour réaliser des investissements.

L’Association canadienne des éditeurs de musique a aussi indiqué que certaines des études qui tentent d’évaluer les conséquences pour les consommateurs de la prolongation de la durée de protection du droit d’auteur, comme celle réalisée par la Commission sur la productivité du gouvernement australien, se fondent sur un modèle de consommation de la musique qui n’existe plus. Elle a insisté sur le fait que ces études partent du principe que la prolongation de la durée aura un coût pour les consommateurs parce qu’ils continueront de payer pour des produits matériels qui autrement relèveraient du domaine public. D’après l’Association, cette hypothèse est erronée, parce que le marché évolue « vers un modèle de diffusion en continu, un modèle de location, un modèle en ligne » selon lequel les gens n’achètent plus de produits matériels.

CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS

Pendant sa consultation publique sur le PTP, le Comité a entendu une large gamme de parties prenantes – entreprises privées, syndicats, groupes de la société civile, gouvernements provinciaux et territoriaux, universitaires, représentants des communautés autochtones et membres du grand public. Ces intervenants ont exprimé diverses perspectives sur le PTP, sur ses conséquences pour le Canada et les Canadiens et sur son éventuelle ratification par le gouvernement.

À quelques exceptions près, les entreprises qui ont participé à l’étude du Comité ont fait valoir que le PTP renforcerait leur capacité de faire des échanges commerciaux avec certains pays de la région de l’Asie-Pacifique, particulièrement le Japon, qui ne sont pas encore liés par un ALE avec le Canada. Beaucoup d’entreprises ont soutenu que le PTP supprimerait les obstacles tarifaires qui entravent leur capacité d’exporter au Japon, et certaines – surtout dans les secteurs agricoles axés sur l’exportation – ont indiqué que le Partenariat réduirait les obstacles non tarifaires qui limitent actuellement leurs exportations dans les pays de l’Asie-Pacifique.

Les témoins ont exprimé des opinions divergentes quant à l’impact qu’aurait le PTP sur l’économie du Canada, mais le Comité note que la mise en œuvre du PTP par tous les pays signataires originaux sauf le Canada pourrait avoir des répercussions négatives importantes sur l’économie du pays, surtout dans les secteurs comme la fabrication automobile, où les chaînes d’approvisionnement nord-américaines sont fortement intégrées.

Certains témoins, y compris ceux des secteurs assujettis à la gestion de l’offre, ont dit au Comité que si le Canada ratifiait le PTP et que celui-ci entrait en vigueur, les producteurs étrangers bénéficieraient d’un accès accru au marché canadien des produits agricoles visés par la gestion de l’offre. Le Comité estime que les producteurs canadiens des secteurs soumis à la gestion de l’offre apportent une contribution importante aux intérêts économiques du Canada. Par conséquent, il recommande au gouvernement du Canada de défendre les intérêts de ces producteurs dans le cadre de ses futures négociations commerciales. De plus, le Comité croit que le gouvernement devrait fournir le soutien qui s’impose pour atténuer les répercussions négatives que pourraient avoir les accords commerciaux sur les producteurs canadiens dans les secteurs soumis à la gestion de l’offre.

Tous les intervenants n’ont pas une opinion positive du PTP. Ainsi, certains individus ou groupes ont reproché aux accords comme le PTP d’être négociés « à huis clos » et de profiter surtout aux grandes sociétés, tandis que d’autres ont exprimé des réserves sur des éléments précis, notamment le mécanisme de RDIE du Partenariat et ses dispositions sur la propriété intellectuelle.

En ce qui concerne les mécanismes de RDIE, l’une des principales préoccupations soulevées par les témoins tenait au risque que les actions intentées contre un État par un investisseur – et le fardeau financier correspondant – ne dissuadent le gouvernement d’adopter de nouveaux règlements. En réponse à ces inquiétudes, le Comité estime que, dans les ALE que négociera à l’avenir le gouvernement du Canada, les mécanismes de règlement des différends entre investisseurs et États devraient être ouverts et transparents, et réaffirmer la capacité du gouvernement d’adopter des règlements conformes à l’intérêt du public.

Pour ce qui est de la propriété intellectuelle, les deux préoccupations les plus citées par les témoins concernaient la hausse potentielle du prix des médicaments au Canada, conséquente à la prolongation proposée de la durée des brevets des produits pharmaceutiques, et la possibilité que la durée prolongée du droit d’auteur au Canada ne désavantage le pays, qui est un importateur net de contenu lié à la propriété intellectuelle.

Les États‑Unis ayant annoncé en janvier 2017 qu’ils retiraient leur signature du PTP, le Canada doit maintenant développer ses relations commerciales avec les pays de l’Asie-Pacifique dans un contexte d’incertitude quant à l’avenir du PTP et à l’éventuelle signature d’un autre ALE entre certains des pays du PTP.

Le Comité sait que le gouvernement pourrait ratifier le PTP, comme le Japon l’a fait plus tôt cette année, mais l’Accord pourrait malgré tout ne pas entrer en vigueur. Dans cette éventualité, les entreprises canadiennes ne bénéficieraient pas d’un accès préférentiel au Japon et à certains autres pays de l’Asie-Pacifique, à moins que le gouvernement ne conclue avec eux de nouveaux accords de commerce ou d’investissement.

De plus, le Comité reconnait que le gouvernement pourrait obtenir, pour les entreprises canadiennes, un accès préférentiel à une partie des pays de l’Asie‑Pacifique en négociant un ALE avec certains des États signataires du PTP; ces accords bilatéraux ou régionaux pourraient se fonder sur le texte du PTP. Au mois de mars 2017, on ne sait pas encore quels sont les pays signataires du Partenariat ni combien d’entre eux seraient ouverts à négocier un ALE. On ignore également dans quelle mesure le texte d’un éventuel ALE ressemblerait à celui du PTP ou si d’autres pays seraient invités à s’y joindre.

Le Comité croit que le gouvernement devrait être proactif et négocier des accords de commerce et d’investissement bilatéraux avec un ou plusieurs pays du PTP. En ce qui concerne le Japon, le Comité sait que sept rondes de négociation en vue d’un accord de partenariat économique (APE) Canada-Japon ont eu lieu avant la fin de 2014, mais que le processus a été suspendu vu la participation des deux pays aux pourparlers du PTP. Si le Partenariat n’entre pas en vigueur, le gouvernement devrait reprendre les négociations d’un APE avec le gouvernement du Japon, afin d’offrir aux entreprises canadiennes un accès préférentiel à ce pays.

Les ALE constituent un moyen important d’augmenter la capacité des entreprises canadiennes à commercer avec les autres pays, mais le Comité sait aussi qu’il existe d’autres façons d’accroître le commerce international du Canada. Le gouvernement soutient actuellement – par divers mécanismes, dont le Service des délégués commerciaux et les programmes Cultivons l’avenir et CanExport – les entreprises canadiennes qui veulent se tourner vers l’exportation. Cela dit, le Comité constate que l’entrée sur les marchés étrangers peut engendrer des difficultés pour les entreprises canadiennes, surtout les PME. De nombreux outils et services sont disponibles pour les aider, mais le Comité croit qu’il faudrait mieux faire connaître ces ressources aux entreprises, particulièrement aux PME. Toujours dans le but d’accroître la capacité des entreprises canadiennes à commercer avec les pays du PTP, que le Partenariat entre en vigueur ou non, le gouvernement pourrait aussi enrichir ses programmes de soutien à l’exportation ou en créer de nouveaux.

Par conséquent, le Comité recommande ce qui suit :

Recommandation 1

Que le gouvernement du Canada, prenant acte du retrait des États-Unis du Partenariat transpacifique et déterminé à conclure des accords qui sont dans l’intérêt des Canadiens, poursuive activement une entente de commerce et d’investissement avec les pays signataires du Partenariat transpacifique, ainsi que d’autres ententes de commerce et d’investissement dans la région de l’Asie-Pacifique. Ces ententes devraient être une priorité, et elles devraient s’ajouter aux autres mesures visant à soutenir les activités de commerce et d’investissement des entreprises canadiennes dans la région de l’Asie-Pacifique.

Recommandation 2

Que le gouvernement du Canada continue de mobiliser les gouvernements provinciaux et territoriaux dans le cadre des négociations d’un accord de commerce et d’investissement avec les pays signataires du Partenariat transpacifique, ainsi qu’avec d’autres pays de la région de l’Asie-Pacifique.

Recommandation 3

Que le gouvernement du Canada tente de reprendre les négociations en vue de conclure un accord de partenariat économique avec le Japon.

Recommandation 4

Que le gouvernement du Canada veille à ce que tout accord de commerce et d’investissement conclu dans la région de l’Asie‑Pacifique ait pour éléments fondamentaux des dispositions progressistes, à la fois inclusives et exécutoires, relativement à l’environnement, à la santé, à la main d’œuvre et aux droits de la personne. Ces dispositions devraient faire l’objet d’une analyse comparative entre les sexes et s’inspirer de la norme élevée que représente, dans ces domaines, l’Accord économique et commercial global entre le Canada et l'Union européenne, plus précisément son mécanisme ouvert et transparent de règlement des différends entre États et investisseurs.

Recommandation 5

Que le gouvernement du Canada tienne des consultations publiques sur la négociation de tout accord de commerce et d’investissement dans la région de l’Asie-Pacifique. Ces consultations devraient être ouvertes, vastes et inclusives, et intégrer des intervenants qui n’ont peut-être pas été consultés dans le passé, comme les peuples et les collectivités autochtones.

Recommandation 6

Que le gouvernement du Canada incorpore aux futurs accords de commerce et d’investissement les engagements environnementaux pris à la Conférence sur les changements climatiques de 2015 tenue à Paris.

Recommandation 7

Que le gouvernement du Canada communique avec le public canadien, notamment avec toute la gamme des intervenants, afin d’exprimer et d’analyser les avantages – pour le Canada et pour la prospérité économique du pays – d’une économie ouverte et du commerce international. Ce dialogue devrait être soutenu, proactif, constructif et fondé sur des faits.

Recommandation 8

Que le gouvernement du Canada élabore un plan de communication pour faire connaître aux entreprises canadiennes – particulièrement les petites et moyennes entreprises – qui souhaitent exporter dans la région de l’Asie-Pacifique, les dispositions et les avantages de tout futur accord avec les pays signataires du Partenariat transpacifique ou d’autres pays de l’Asie-Pacifique.

Recommandation 9

Que le gouvernement du Canada prenne des mesures pour s’assurer que l’infrastructure canadienne de soutien au commerce soit adéquate et qu’elle réponde aux besoins des entreprises canadiennes qui font du commerce international.

Recommandation 10

Que, dans la mesure du possible et conformément aux consultations sur le Partenariat transpacifique menées par le Comité permanent du commerce international de la Chambre des communes, le gouvernement du Canada soutienne les entreprises canadiennes, particulièrement les petites et moyennes entreprises, et ce, de trois façons : offrir de la formation aux entreprises qui souhaitent exporter; accroître la visibilité des services et outils à la disposition de ces entreprises; et établir un « guichet unique » où ces entreprises pourraient accéder aux ressources d’aide au commerce.

Recommandation 11

Que, lorsqu’il négociera de futurs accords de commerce et d’investissement, le gouvernement du Canada défende vigoureusement les secteurs assujettis à la gestion de l’offre au Canada. De même, le gouvernement devrait, en plus de promouvoir l’innovation et la diversification, veiller à offrir des programmes et initiatives visant à réduire les répercussions négatives possibles des accords de commerce et d’investissement sur les producteurs et les transformateurs de ces secteurs.

Recommandation 12

Que le gouvernement du Canada identifie les obstacles non tarifaires qui nuisent à l’accès équitable aux marchés du Partenariat transpacifique.

Recommandation 13

Que le gouvernement du Canada évalue l’impact des accords de commerce et d’investissement sur les travailleurs, les entreprises et les secteurs de l’économie du Canada. Ces évaluations devraient éclairer l’élaboration de futurs accords de commerce et d’investissement progressistes.

Recommandation 14

Que le gouvernement du Canada, avant la ratification de tout accord de commerce et d’investissement, fasse connaître les effets attendus de cet accord sur les plans économique, environnemental et social, dans le domaine du travail et à tout autre point de vue.


[1]              Les États-Unis ne s’étaient pas encore retirés du PTP lorsque le Comité permanent du commerce international de la Chambre des communes a réalisé son étude du Partenariat. Par conséquent, et sauf indication contraire, les données et renseignements contenus dans le présent rapport supposent que les États-Unis sont un des pays du PTP.

[2]              Les lettres d’accompagnement servent à clarifier des questions bilatérales entre deux pays, mais n’ont pas d’incidence sur les droits et les obligations des autres parties au PTP.

[3]              Ministère des Affaires étrangères et du Commerce de l’Australie, TPP outcomes at a glance, 18 juillet 2016.

[5]              Par exemple, voir : Brock R. Williams et coll., The Trans-Pacific Partnership: Strategic Implications, Service de recherche du Congrès des États-Unis, 3 février 2016. Voir aussi Parlement européen, Trans‑Pacific Partnership: geopolitical implications for EU-US relations, 2016.

[6]              Barack Obama, Weekly Address: Writing the Rules for a Global Economy, Bureau de secrétaire de presse de la Maison-Blanche, 10 octobre 2015 [traduction].

[8]              Charlottetown (Île‑du‑Prince‑Édouard), Québec (Québec), Halifax (Nouvelle‑Écosse), Montréal (Québec), Saint John (Nouveau‑Brunswick), St. John’s (Terre‑Neuve‑et‑Labrador), Toronto (Ontario) et Windsor (Ontario).

[9]              L’expression « accord de partenariat économique » correspond à la terminologie habituellement utilisée au Japon pour désigner ce que l’on appelle normalement un « accord de libre-échange » au Canada.

[10]           Par exemple, voir : Joshua P. Meltzer, « Why China should join the Trans-Pacific Partnership », Brookings Institution, 21 septembre 2015. Voir aussi Prashanth Parameswaran, « Indonesia Wants to Join TPP: President Jokowi », The Diplomat, 27 octobre 2015.

[11]           Toutes les données dans la présente section, à l’exception du Tableau 1, viennent de Statistique Canada. Celles sur le commerce de marchandises se fondent sur les statistiques douanières; celles sur le commerce des services et l’investissement direct étranger sont calculées sur la base de la balance des paiements.

[12]           2014 est l’année la plus récente pour laquelle on dispose de données sur le commerce de services.

[13]           D’ici à ce que la Loi sur le ministère des Affaires étrangères, du Commerce et du Développement soit modifiée, l’appellation légale du Ministère demeure « ministère des Affaires étrangères, du Commerce et du Développement ». Cela dit, on utilise dans le présent rapport le titre d’usage utilisé actuellement pour désigner ce ministère, soit Affaires mondiales Canada.

[15]           Jeronim Capaldo, Alex Izurieta, et Jomo Kwame Sundaram, Trading Down: Unemployment, Inequality and Other Risks of the Trans-Pacific Partnership Agreement, janvier 2016 [disponibleEN ANGLAIS SEULEMENT].

[16]           L’Université Tufts est une université américaine privée située au Massachusetts.

[17]           Le directeur parlementaire du budget a pour mandat « de fournir au Parlement une analyse indépendante de l’état des finances du Canada, des prévisions du gouvernement ainsi que des tendances de l’économie nationale, et, à la demande d’un comité ou d’un parlementaire, d’évaluer le coût financier de toute mesure proposée relevant des domaines de compétence du Parlement ».

[19]           Affaires mondiales Canada, Ouvrir de nouveaux marchés pour les produits agricoles et agroalimentaires, 2015. Ces informations se trouvent sur Internet Archive.

[20]           Selon l’Organisation mondiale du commerce, on entend par « mesures sanitaires et phytosanitaires » les « mesures relatives à la sécurité sanitaire des produits alimentaires, à la santé des animaux et à la préservation des végétaux ».

[21]           Agriculture et Agroalimentaire Canada, Le gouvernement du Canada offre de nouveaux programmes aux industries sous gestion de l’offre, le 5 octobre 2015.

[23]           Affaires mondiales Canada, Chapitre 2 – Traitement national et accès aux marchés pour les produits, 2016. Selon Agriculture et Agroalimentaire Canada, « [l]a présence en faible concentration (PFC) désigne la présence non intentionnelle et à faible concentration de produits génétiquement modifiés (GM) non autorisés dans des grains, des aliments ou des aliments du bétail importés ».

[24]           Selon la Commission européenne, la limite maximale de résidus est « une concentration maximale du résidu d’un pesticide autorisée dans ou sur des denrées alimentaires ou aliments pour animaux ».

[25]           Le 5 octobre 2015, le gouvernement a annoncé l’investissement de 4,3 milliards de dollars dans quatre nouveaux programmes visant à aider les producteurs et les transformateurs soumis à la gestion de l’offre pendant la période de mise en œuvre du PTP et de l’AECG. Il a aussi annoncé qu’il « intensifierait » la lutte contre le contournement des contrôles à l’importation au Canada des produits sous gestion de l’offre.

[26]           Le 10 novembre 2016, le gouvernement du Canada a annoncé que, pour aider le secteur laitier du Canada au moment de l’entrée en vigueur de l’AECG, il consacrerait 250 millions de dollars sur cinq ans à un programme d’investissement dans les fermes laitières, et 100 millions de dollars sur quatre ans à un fonds d’investissement dans la transformation des produits laitiers.

[27]           Ces mesures sont au nombre de celles annoncées par le gouvernement du Canada le 5 octobre 2015. Cette série de mesures d’atténuation et d’indemnisation prévoyait l’exclusion de tous les produits sous gestion de l’offre du Programme d’exonération des droits.

[28]                 Conformément à l’avis aux importateurs n890 d'Affaires mondiales Canada, le Canada attribue son contingent d’importation de fromage aux détenteurs de parts « traditionnels » du contingent. Ainsi, l’allocation de chaque année se fonde sur celle de l’année précédente, sous réserve de modification en cas de sous‑utilisation.

[29]           Selon Agriculture et Agroalimentaire Canada, Cultivons l'avenir 2 est un « cadre stratégique » quinquennal pour le secteur agricole et agroalimentaire du Canada. Lancé en 2013, il représente un investissement de 3 milliards de dollars des gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux (FPT); de ce montant, 1 milliard de dollars sont fournis pour « stimule[r] la croissance axée sur les marchés dans le secteur agricole ».

[30]           Affaires mondiales Canada, Ouvrir de nouveaux marchés pour les biens industriels et les produits de consommation, 7 octobre 2015. Ces informations se trouvent sur Internet Archive.

[32]           Ibid.

[33]           Ibid.

[34]           Ibid.

[35]           Ibid.

[36]           Ibid.

[37]           Ibid.

[38]           Ibid.

[39]           Ibid.

[40]           Affaires mondiales Canada, Chapitre sur le commerce transfrontalier des services, 2015.

[41]           Ibid.

[43]           Les méta-analyses intègrent les résultats d’études multiples.

[44]           Les 34 traités d’investissement bilatéraux du Canada et 7 de ses 12 ALE qui sont entrés en vigueur prévoient ce mécanisme. L’Accord de libre-échange entre le Canada et les États-Unis, qui a été remplacé par l’ALENA et qui ne comporte pas de mécanisme de RDIE, fait partie de ces 12 ALE. En date du 28 février 2017, les projets de loi de mise en œuvre de l’AECG Canada-UE et de l’ALE Canada-Ukraine n’avaient ni l’un ni l’autre reçu la sanction royale.

[45]           Voir : Affaires mondiales Canada, « Poursuites contre le Gouvernement du Canada », ALENA – Chapitre 11 – Investissement, 22 novembre 2016 et Affaires mondiales Canada, Global Telecom Holding S.A.E. c. le gouvernement du Canada, 28 juin 2016.

[46]           Ibid.

[47]           Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement, Investment Dispute Settlement Navigator (banque de données), consulté le 16 février 2017.

[48]           Affaires mondiales Canada, « Mobil Investments Canada Inc. et Murphy Oil Corporation c. le Gouvernement du Canada », ALENA – Chapitre 11 – Investissement – Poursuites contre le Gouvernement du Canada; gouvernement de l’Ontario, ALENA Chapitre 11 Dans l’affaire de : Windstream Energy LLC c. le gouvernement du Canada; Affaires mondiales Canada, « S.D. Myers Inc. c. le Gouvernement du Canada », ALENA – Chapitre 11 – Investissement – Poursuites contre le Gouvernement du Canada; et Affaires mondiales Canada, « Pope & Talbot Inc. c. le Gouvernement du Canada », ALENA – Chapitre 11 – Investissement – Poursuites contre le Gouvernement du Canada.

[49]           Affaires mondiales Canada, « AbitibiBowater Inc. c. le Gouvernement du Canada », ALENA – Chapitre 11 – Investissement – Poursuites contre le Gouvernement du Canada; Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement, Ethyl Corporation c. le Gouvernement du Canada.

[51]           Ibid.

[52]         Une déclaration conjointe de la commissaire européenne au Commerce et de la ministre du Commerce international du Canada datant du 29 février 2016 indique que, dans le cadre de l’examen juridique de l’AECG Canada-UE, des modifications ont été apportées au chapitre sur l’investissement. D’après cette déclaration, avec ces modifications, le Canada et l’UE « renforcent les dispositions relatives au droit des gouvernements de réglementer, prévoient l’établissement d’un tribunal permanent, transparent et institutionnalisé de règlement des différends et la révision du processus de sélection des membres « du tribunal qui traitera les plaintes des investisseurs, énoncent des engagements plus détaillés en matière d’éthique à l’intention de tous les membres des tribunaux et prévoient l’inclusion d’un système d’appel ».

[53]           Le 31 octobre 2016, le Canada a présenté un projet de loi visant la mise en œuvre de l’AECG Canada‑UE. Le projet de loi C-30, Loi portant mise en œuvre de l’Accord économique et commercial global entre le Canada et l’Union européenne et ses États membres et comportant d’autres mesures, entraînerait des modifications législatives et réglementaires permettant au Canada de se conformer aux dispositions de l’AECG.

[54]           Organisation mondiale du commerce, Déclaration sur l’accord sur les ADPIC et la santé publique, 20 novembre 2001.

[55]           Organisation mondiale de la propriété intellectuelle, Convention de Berne pour la protection des œuvres littéraires et artistiques, 1886.

[56]           Gouvernement de l’Australie, Commission sur la productivité, Intellectual Property Arrangements : Productivity Commission Draft Report, avril 2016 [en anglais seulement].