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CIIT Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent du commerce international


NUMÉRO 015 
l
1re SESSION 
l
42e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 5 mai 2016

[Enregistrement électronique]

  (0845)  

[Traduction]

    Cette semaine a été dure pour plusieurs d'entre nous. Nous avons des amis, des parents et des connaissances à Fort McMurray, et Fort McMurray passe de très mauvais moments. Toutes nos pensées les accompagnent. Nous espérons que tout se déroulera pour le mieux pour eux dans les circonstances.
    Nous poursuivons notre étude du Partenariat transpacifique. Notre comité a été très occupé depuis le début de cette législature. Nous avons vu l'accord de libre-échange avec l'Union européenne, dont nous finissons l'examen. Nous avons examiné le bois d'oeuvre résineux et d'autres questions encore, mais le PTP est notre sujet principal. Ce comité tend la main aux intervenants et aux collectivités en général pour déterminer l'ampleur des retombées de cet accord commercial, non seulement sur les affaires et les sociétés, mais sur les Canadiens. Cet accord touchera tout le monde, d'une façon ou d'une autre. C'est ce que nous sommes en train de faire.
    Nous avons eu de nombreuses réunions ici à Ottawa, mais nous sommes aussi allés dans l'Ouest. Nous avons visité quatre provinces. La semaine prochaine, nous visiterons deux villes du Québec et deux de l'Ontario; ensuite nous irons dans les provinces atlantiques puis dans les territoires.
    Ceci étant dit, nous accueillons ce matin des témoins qui nous présenteront leurs points de vue, puis les députés auront la possibilité de poser des questions et de poursuivre le dialogue.
    Nous accueillons ce matin à titre personnel Jim Balsillie, PDG de Research in Motion. Nous aimons tous nos BlackBerry.
    C'est un plaisir de vous voir ici, monsieur.
    Nous avons aussi Michael Geist, titulaire de la chaire de recherche du Canada en droit d'Internet et du commerce électronique et professeur de droit à l'Université d'Ottawa.
    Bienvenue messieurs. Je vous prie d'essayer de vous en tenir à cinq minutes chacun, si possible, ce qui nous laissera beaucoup de temps pour l'interrogatoire — ce n'est pas vraiment cela, mais c'est ce que les députés font.
    Allez-y, monsieur.
    Merci beaucoup, monsieur le président. Je remercie aussi les vice-présidents, les membres du Comité et mes compatriotes. Bonjour, je vous suis reconnaissant de l'invitation à rencontrer le Comité et à présenter mon opinion du Partenariat transpacifique. C'est un honneur et un plaisir que d'être ici.
    Je suis un capitaliste artisan de sa propre réussite, et je crois au libre-échange et aux marchés libres. J'ai commercialisé une propriété intellectuelle canadienne dans 135 pays à un degré jamais atteint auparavant, ni depuis. Mon expérience des affaires mondiales est unique au Canada.
    J'aimerais faire écho à Jared Bernstein, ancien économiste en chef auprès du vice-président Biden, qui a fait appel à une troisième catégorie de critiques commerciaux: des gens qui croient au libre-échange et à la mondialisation, mais qui n'aiment pas ce que le PTP fait à nos pays, à nos classes ouvrières et à notre environnement.
    Le PTP n'est pas un accord de libre-échange conventionnel. Il est délibérément appelé un partenariat parce qu'il décrit un cadre économique pour la prospérité au XXIe siècle. Le PTP ne porte pas principalement sur la réduction des tarifs à nos frontières, mais plutôt sur les règles qui gouvernent la façon dont nous gérons notre économie souveraine actuelle, et la façon dont ces nouvelles règles de partenariat sont appliquées. Au XXIe siècle, la fabrication et l'exportation de matières tangibles ont cédé la place à une économie mondiale où la richesse vient de la conception et de l'exportation de produits immatériels: la propriété intellectuelle.
    Le graphique que vous voyez à l'arrière des documents représente bien ceci. En 1975, les biens immatériels représentaient le sixième de la valeur des sociétés évaluées selon l'indice S&P 500, contre cinq sixièmes en 2015.
     Contrairement au commerce conventionnel, l'économie des biens immatériels est régie par des règles et des restrictions sur les titres de propriété intellectuelle. L'économie des biens immatériels est le contraire du libre-échange. Elle est fondée sur des règles et des restrictions qui ont pour effet d'accorder un monopole temporaire aux détenteurs des titres de propriété intellectuelle de grande valeur. Lorsqu'un pays ratifie un accord bilatéral ou multilatéral qui régit la propriété intellectuelle, il s'engage à appliquer ces règles dans son marché intérieur. Il s'agit d'engagements très différents de ceux qui ont été pris dans le cadre d'accords commerciaux conventionnels antérieurs, car de tels accords définissent désormais nos engagements à l'égard d'autres pays et la façon dont sera régie l'économie canadienne.
    Le Canada n'est pas un grand exportateur de propriété intellectuelle, donc nous en importons une quantité démesurée. Le Canada détient et exporte très peu de titres de propriété intellectuelle, parce qu'il n'a jamais eu de stratégie nationale en matière d'innovation.
    L'autre partie que vous verrez ici illustre le fait que notre croissance de l'innovation est nulle depuis plus de 30 ans. Le Canada n'a jamais mis en place les capacités nécessaires pour évoluer dans l'économie mondiale du XXIe siècle, dans laquelle la richesse découle de la commercialisation de la propriété intellectuelle.
    Les études de modélisation les plus récentes au sujet du PTP démontrent que l'accord n'entraînerait que des résultats négligeables sur le plan du libre-échange conventionnel. Un aspect encore plus important est que toutes les études de modélisation du PTP ne tiennent pas compte des deux plus importants éléments: la propriété intellectuelle et le règlement des différends entre un investisseur et un État. Ce mécanisme de règlement est un tribunal qui supplante les lois de l'État dans un système qui n'offre aucune possibilité d'appel.
    En dessous des graphiques, vous pouvez voir quelques citations importantes du plus intelligent économiste du commerce que j'ai rencontré au Canada, Dan Ciuriak. Ne pas calculer les retombées économiques de la propriété intellectuelle et des différends entre un investisseur et un État est un peu comme établir un budget familial pour lequel on ne tient pas compte du loyer ou des frais de nourriture.
    Comme l'a souligné M. Paul Krugman, prix Nobel d'économie et spécialiste du commerce, la plupart des biens tangibles sont déjà exempts de droits. Il en va de même pour les biens immatériels. En effet, 97 % du commerce mondial des produits des technologies de l'information se fait déjà en franchise de droits, aux termes de l'accord sur les technologies de l'information de l'OMC.
    Sur quoi donc porte le PTP, s'il n'est pas lié au libre-échange? Le PTP vise à accroître la liberté d'action des chefs de file de l'économie de l'innovation et à imposer des restrictions à cet égard aux autres. La liberté d'action est, pour les entreprises de l'économie du savoir, un facteur fondamental de gestion stratégique et de gestion du risque. Les entreprises de pointe de ce secteur utilisent des stratégies de liberté d'action, du lancement de leurs activités de R-D jusqu'aux cycles de commercialisation et de distribution.
    À titre de PDG d'une entreprise canadienne du secteur de la technologie qui a émergé d'une simple idée pour atteindre une valeur de 20 milliards de dollars, ma principale préoccupation pendant deux décennies était d'accroître notre liberté d'action et de restreindre celle de nos concurrents. J'évalue les incidences du PTP sur la croissance des entreprises canadiennes de ce point de vue unique.

  (0850)  

    Le Canada s'est lancé dans les négociations du PTP sans avoir consulté un seul innovateur canadien et sans une quelconque stratégie quant à cet aspect fondamental de l'économie de l'innovation. Actuellement, au Canada, on ne retrouve aucun élément d'une stratégie efficace en matière de liberté d'action. Nous n'avons pas un bureau de l'innovation, pas de bibliothèque de documents portant sur les techniques antérieures, de communauté de brevet indépendante, d'expertise en matière de négociations bilatérales et multilatérales, de stratégie judiciaire à l'échelle provinciale, fédérale ou mondiale, de stratégie avancée en matière de normes ou de réglementation ni de cadre de collaboration visant à favoriser la commercialisation des idées canadiennes à l'échelle mondiale. C'est inexcusable.
    Nous n'aurions pas pu négocier pour garantir notre prospérité, parce qu'il est impossible de négocier une stratégie commerciale sans une stratégie d'innovation, et encore moins sans parler aux entreprises mêmes que de tels accords sont censés aider à croître. Si le Canada veut mettre en place des capacités adaptées à l'économie mondiale du XXIe siècle, il aura besoin de toutes ses capacités évoluées.
     Ce dont nous avons besoin au Canada, et ce que j'espère que ce comité favorisera en bout de compte, c'est un discours plus évolué sur le commerce et la prospérité. Débiter des vieilles théories de libéralisation du commerce ne suffit pas, quand nos propres meilleurs économistes du commerce nous ont dit que nous ne disposons même pas d'études de modélisation permettant de prendre en compte les aspects les plus percutants du commerce du XXIe siècle. Il ne suffit pas de faire examiner le PTP par des avocats à travers la loupe des formulations élégantes. Comme tout autre PDG de société de technologie mondiale, j'ai recruté et renvoyé des dizaines d'avocats en propriété intellectuelle dans le monde entier, et laissez-moi vous dire, ce ne sont pas les avocats qui commercialisent les idées. Ils traduisent les instructions de leurs clients en des termes juridiques.
    En conclusion, j'aimerais dire que j'apprécie partager cette session avec le professeur Geist, non seulement parce qu'il fait un excellent travail de sensibilisation du public au sujet du PTP, mais parce que dans son récent blogue, il a mis en relief le facteur le plus important peut-être que les Canadiens doivent prendre en considération, soit le fait que nos propres fonctionnaires savent que le PTP va à l'encontre de nos stratégies nationales premières. Un exposé élaboré à l'intention de la ministre Freeland, que vous lirez tous j'espère, établit clairement que nos fonctionnaires comprennent que le Canada préfère créer sa propre politique de PI dans le cadre de forums multilatéraux plutôt que de se voir imposer par les gros détenteurs de PI une série de nouvelles règles rigides.
    Après avoir lu le document publié par le professeur Geist, je qualifierais de palliative notre approche à ces accords commerciaux. Nous savons que nous allons perdre, donc, nous nous attachons à ralentir l'érosion inévitable.
    Permettez-moi de résumer ainsi mes préoccupations à l'égard du PTP. Nous avons signé un accord que nos fonctionnaires ont dit au ministre qui va à l'encontre des intérêts canadiens, après avoir procédé à des négociations en secret sans avoir consulté un seul innovateur canadien. Maintenant que l'accord est conclu, nous procédons à une étude économique d'évaluation de ces avantages, qui ne couvre pas les retombées les plus importantes sur la prospérité nationale. Ensuite, nous entreprenons des consultations auprès des intervenants pour en obtenir le point de vue. Nous suivons cela par la création d'une stratégie d'innovation qui est en retard de dizaines d'années. Tout ceci est à l'envers. C'est exactement le contraire de la façon dont un accord commercial devrait être conclu.
    Merci.

  (0855)  

    Merci, monsieur, de cet exposé.
    Vous avez déjà présenté le témoin suivant.
    À vous la parole, monsieur Geist.
    Si vous pouviez limiter vos observations à cinq minutes environ, nous l'apprécierions.
    Bonjour. Comme vous l'avez entendu, je m'appelle Michael Geist. Je suis professeur de droit à l'Université d'Ottawa, où je suis titulaire de la Chaire de recherche du Canada en droit d'Internet et du commerce électronique. Je comparais aujourd'hui à titre personnel pour présenter mon propre point de vue.
    Il y a beaucoup de choses à dire au sujet du PTP. J'ai écrit des dizaines d'articles et de blogues sur cet accord, et je suis en train d'écrire un livre sur le sujet, mais j'ai peu de temps, comme vous l'avez entendu; je me concentrerai donc sur quatre enjeux.
    Il y a d'abord le prix que le Canada a dû payer pour participer et la faiblesse du pays pendant les négociations. Vous n'êtes pas sans savoir que le Canada n'était pas un des participants initiaux aux négociations du PTP. Des groupes de pression des États-Unis ont exhorté le gouvernement américain à tenir le Canada à l'écart jusqu'à ce que nous ayons adopté une loi sur le droit d'auteur conforme à leurs demandes. Les demandes des États-Unis ont eu une incidence considérable sur la Loi sur le droit d'auteur adoptée par le Canada en 2012, surtout en ce qui concerne les règles restrictives de serrures numériques qui étaient au sommet de la liste des priorités politiques des États-Unis.
    Après avoir obtenu la certitude que le Canada satisferait à leurs demandes en matière de PI et de contrefaçon, les États-Unis ont imposé des conditions supplémentaires, y compris un engagement selon lequel le Canada ne retarderait pas les négociations pour un chapitre quelconque s'il était le seul opposant. Cette concession est devenue importante au chapitre de la PI, quand il y a eu certains problèmes au sujet desquels le Canada était le seul opposant et pour lesquels il a été forcé de céder.
     Au moment où les négociations étaient presque terminées, les hauts fonctionnaires du Canada ont été informés que le Canada était désavantagé en raison d'un manque de coordination et de transparence entre les négociateurs du gouvernement et les parties intéressées. Nous sommes tout de même allés de l'avant et avons conclu l'accord.
    Deuxièmement, qu'avons-nous accepté?
     Je commencerai par les changements à la loi sur la propriété intellectuelle. Un des exemples les plus connus est la durée du droit d'auteur. À l'heure actuelle, au Canada, cette durée correspond à la vie de l'auteur plus 50 ans, ce qui est conforme à la norme internationale établie par la Convention de Berne. C'est également la norme qui est adoptée dans la moitié de l'accord du PTP, y compris pour les pays comme le Japon, la Malaisie, la Nouvelle-Zélande, Brunei et le Vietnam. Le PTP exige que le Canada prolonge cette durée de 20 ans, ce qui représente d'importantes retombées pour les États-Unis et une perte nette considérable pour le Canada.
    De fait, le gouvernement néo-zélandais — pays qui fait face à une exigence semblable — a mené une étude sur le coût du prolongement de la durée et estime que ce prolongement fera perdre à lui seul 55 millions de dollars par année à la Nouvelle-Zélande. D'aucuns ont contesté les résultats de cette étude, mais la semaine dernière, une ébauche de rapport de la commission australienne sur la productivité a estimé que le prolongement de la durée, qui a eu lieu il y a plusieurs années, coûtera 88 millions de dollars australiens par année à l'Australie. Pour le Canada, le coût pourrait être encore plus élevé.
    Ce ne sont pas les seuls changements en matière de PI. Le PTP comprend des changements aux règles de verrouillage numérique, un prolongement de la période de protection des brevets, la criminalisation du droit en matière de secret commercial, des modifications au droit des marques, de nouvelles mesures frontalières et une exigence selon laquelle tous les pays doivent ratifier ou accepter jusqu'à neuf traités sur la PI.
    Troisièmement, ce n'est pas seulement une question de propriété intellectuelle. De fait, le PTP va bien au-delà de ça. Il touche aussi, par exemple, la culture, restreignant la capacité du Canada de prolonger la durée des politiques sur la contribution au contenu canadien. Cela signifie que, dans les faits, en dépit de la promesse récente de la ministre du Patrimoine canadien, Mme Joly, de réexaminer les politiques culturelles, les contributions visant à favoriser la création de contenu canadien sont bloquées au niveau actuel, le PTP empêchant les nouvelles politiques visant les nouveaux services et les nouvelles technologies.
    L'accord entraîne également, pour les industries des services, l'adoption d'un ensemble complexe de règlements qui aura presque certainement des conséquences inattendues. Les dossiers chauds comme la réglementation des sites de jeux de hasard en ligne ou des services de covoiturage comme Uber, dans les médias justement hier et aujourd'hui, pourront être réglés par le PTP et non pas par le gouvernement canadien, que ce soit à l'échelon municipal ou provincial.
    En ce qui concerne Internet, il inverse l'approche de laissez-faire que nous avons adoptée depuis longtemps pour la gouvernance d'Internet, et il est loin d'atteindre nos normes sur des questions comme la neutralité du Net. Il touche même aux questions liées à la protection des renseignements personnels en limitant la capacité des gouvernements d'imposer des restrictions sur le transfert des données ou d'exiger la localisation des données. Il établit un seuil très bas en matière de protection des renseignements personnels ou de règles antipourriel. Le Canada pourrait se trouver entre le marteau et l'enclume sur la question de la protection des renseignements personnels, coincé d'un côté par les exigences de l'Europe et, de l'autre, par celles du PTP.
    L'accord touche aussi le secteur de la santé et aura probablement pour effet de faire augmenter le prix des médicaments et de fixer la durée de la protection pour les produits pharmaceutiques de la prochaine génération, voire de déterminer les modalités d'un éventuel régime national d'assurance-médicaments.
    Quatrièmement, les risques et les coûts éventuels que représente la possibilité de se tromper dans la mise en oeuvre sont énormes. Le PTP a été négocié en coulisses, et présenté au public comme une chose à prendre ou à laisser.
    J'ai lu que certains députés affirmaient que le Canada avait déjà mené des consultations au sujet de l'accord, mais je connais peu ou pas d'experts qui ont été consultés durant les négociations. En fait, quand j'ai comparu devant ce comité en juin 2013, les députés du gouvernement de l'époque m'ont dit que toute préoccupation concernant le PTP était prématurée et que je devais, comme les autres, attendre la fin des négociations.
    Maintenant qu'elles sont terminées, j'entends dire que nous avons eu suffisamment de consultations, mais que nous devrons accepter le fait que le risque de se tromper dans la mise en oeuvre est énorme. Le mécanisme du PTP pour le règlement des différends entre un investisseur et un État peut exposer un pays à des risques considérables de réclamations de sociétés.

  (0900)  

    La ministre Freeland a déclaré que le mécanisme de règlement des différends entre un investisseur et un État décrit dans l'accord commercial Canada-Union européenne est l'étalon, mais que le PTP ne satisfait pas à cette norme. De plus, même si nous élaborons nos propres règles dans le PTP, cela pourrait être futile puisque les États-Unis maintiennent qu'ils ont le droit de décider comment le Canada ratifiera l'accord par le truchement de son processus de certification. Pour résumer, le Canada était nettement désavantagé dans les négociations du PTP, et cela paraît, avec des pertes majeures au niveau de la propriété intellectuelle, des politiques sur les technologies numériques et sur la culture, ainsi que la perspective d'obligations de réparer considérables dans le cadre du règlement des différends entre un investisseur et un État, et les États-Unis pouvant décider comment nous mettons l'accord en oeuvre. La question n'est pas de décider si on est pour ou contre le libre-échange. À mon avis, tout se résume au fait que c'est un mauvais accord qui devrait être renégocié ou rejeté, et que d'autres possibilités devraient être étudiées.
    C'est avec plaisir que je répondrai à vos questions.
    Merci, monsieur Geist.
    J'aimerais aussi accueillir quelques nouveaux membres. M. Picard est ici, ainsi que Mme May, et nous sommes heureux de vous revoir monsieur Lametti.
    Passons à un tour de questions, en commençant par les conservateurs et M. Hoback pendant cinq minutes.
    Merci, messieurs, de votre présence ce matin.
    Monsieur Balsillie, je vais commencer par vous. Vous avez parlé d'un problème d'innovation ici au Canada, de l'absence de politique en matière d'innovation et de l'absence de vision pour le secteur de l'innovation. Qu'est-ce qui, d'après vous, a contribué à ce manque de stratégies? Pourquoi n'avons-nous pas une bonne stratégie en place?

  (0905)  

    Le Canada a confondu de façon catastrophique la stratégie en matière de science et technologie, et la stratégie en matière d'innovation. Le fait que le concept de la liberté d'action soit introduit pour la première fois en mai 2016 signifie que la communauté d'élaboration des stratégies de ce pays a énormément à se reprocher. Nous pensions que la science et la technologie étaient de l'innovation. Nous pensions avoir une orthodoxie, qu'il suffisait d'avoir le libre-échange et un système bancaire stable, de donner beaucoup aux universités et de clairsemer quelques subventions ici et là, et que tout irait pour le mieux.
    Nous n'avons pas compris que le succès et l'innovation découlent d'une série d'exercices systémiques délibérés. Nous avons fait exactement le contraire de ce que les économies d'innovation prospères, comme l'Allemagne, Israël, les États-Unis, la Corée, le Japon et la Suède ont fait. Nous sommes allés d'un côté quand le reste du monde allait de l'autre. Si nous ne changeons pas nos approches, nous ferons ce qu'Einstein a décrit comme la folie, c'est-à-dire refaire sans cesse les mêmes choses.
    Il nous faut avoir une bonne stratégie d'innovation, qu'on ait le PTP, l'AECG ou n'importe quel autre accord commercial.
    C'est exact.
    Si on n'a pas une bonne stratégie d'innovation...
    Comme je l'ai dit, on commence par la stratégie, puis le commerce est un véhicule. Nous avons fait les choses à l'envers.
    Une chose m'intrigue ici. L'absence de stratégie d'innovation est un problème, certes, mais vous savez que nous avons cette absence de stratégie au moment de l'ALENA et au moment des accords commerciaux bilatéraux antérieurs. Comment le fait de signer le PTP va-t-il régler le problème de l'absence de stratégie?
    Non, j'ai parlé aux gens qui ont contribué à l'ALE et à l'ALENA, et la différence est qu'ils ont fait cinq ans d'études, de consultations et de stratégies, puis ont fait des études de modélisation sur tout ça et ensuite sont entrés dans les négociations.
    Mais on ne peut pas s'attendre... Là encore, on reproche au Canada d'être entré tard dans les négociations. Les négociations étaient déjà en cours, et si on tient compte du contexte économique canadien et de tout ce qui était en cause, on ne pouvait pas se payer le luxe de 5 ou 10 ans d'études pour analyser ce que nous devrions ou ne devrions pas faire. Il fallait décider si nous allions ratifier cet accord. Nous avons déjà signé, et donc, si nous allons réellement le ratifier, allons-nous créer une stratégie d'innovation valable? Qu'y a-t-il dans le PTP qui soit si différent de l'ALENA et des autres accords commerciaux pour qu'il nous empêche, en fait, d'établir une bonne stratégie d'innovation?
    Parce que le PTP est conçu d'une façon qui verrouille les positions des parties de façon permanente.
    Si vous êtes un innovateur ici au Canada et avez passé cinq ans à développer une nouvelle technologie, ne voudriez-vous pas bénéficier de cette protection? N'aimeriez-vous pas savoir que vous avez la possibilité de bénéficier d'un rendement du capital investi, d'un rendement de la recherche que vous avez faite? Ne voudriez-vous pas cela? Ne voudriez-vous pas vous assurer que personne venant d'un autre pays ne puisse venir vous enlever les meilleurs fruits de vos efforts?
    Non, non. Il n'y a pas une seule étude au monde qui dise que l'innovation se portera mieux avec l'ADPIC Plus sous le PTP plutôt que l'ADPIC sous l'OMC. C'est exactement le contraire...
    Une fois de plus, si je suis un innovateur, est-ce que je ne voudrais pas cette sécurité? Comment puis-je me protéger? J'ai conçu un nouveau produit, une nouvelle appli, supposons; comment puis-je protéger si je ne bénéficie pas de la protection du mécanisme de règlement des différends entre l'investisseur et l'État, si je ne bénéficie pas de la protection de la PI? Comment je traite avec la banque? Comment puis-je aller voir mon banquier et lui demander des fonds de recherche, lui garantissant qu'une fois que mon produit arrivera sur le marché, je sais que dans 5 ans — 5 ans, 10 ans ou n'importe quelle autre période —, je pourrai commercialiser ce bidule et voir mon investissement effectivement porter fruit?
    En tant que personne qui a fait le plus de commercialisation dans l'histoire de ce pays, je peux vous dire que ce n'est pas comme ça que le système fonctionne, pas du tout. C'est tout à fait le contraire. C'est diamétralement opposé. Avec ces règles rigides, on désavantage de façon massive les innovateurs canadiens.
    Vous dites que c'est à l'envers. Mais vous êtes dans un secteur qui a un roulement très rapide de nouveaux produits et de nouvelles versions — j'utilise ce terme à défaut d'un autre. Dans ce cas, avez-vous besoin de la protection de la PI si vous vous réinventez tous les six mois, offrant une nouvelle version mise à jour?
    La protection de la PI n'est pas liée à l'innovation; elle protège les intérêts établis en éliminant la possibilité que de nouveaux innovateurs n'interviennent. C'est exactement ce que Robert Reich...
    Elle les empêche de venir voler la première invention que quelqu'un a sué sang et eau à développer.
    C'est une fausse description de la façon dont l'économie d'innovation fonctionne.
    En quoi est-elle différente? Aidez-moi à comprendre qu'est-ce qui est faux dans ma description.
    C'est parce que le jeu est mené par des enchevêtrements de brevets et la décision de propriété est décidée à l'extérieur du Canada, dans des tribunaux qui sont...
    C'est la même chose avec l'ALENA et les autres accords que nous avons.

  (0910)  

    Non, la procédure de règlement des différends entre un investisseur et un État dans le cadre de l'ALENA reste au Canada. Dans le cadre du PTP, elle va dans le pays plaignant, qui est invariablement les États-Unis.
    On a toujours l'option de [Note de la rédaction: inaudible] en tant que pays, d'utiliser soit l'ALENA, soit le PTP.
    Monsieur Hoback, votre temps est écoulé.
    Je vous garantis qu'il n'y aura plus jamais une autre compagnie de technologie canadienne comme RIM sous le régime du PTP.
    Nous devons avancer. Le temps des conservateurs est écoulé pour ce tour. Nous passons aux libéraux, avec M. Dhaliwal pendant cinq minutes.
    J'aimerais rappeler aux membres de tâcher d'éviter d'entamer un long dialogue les cinq dernières secondes, parce qu'il m'est très difficile de vous arrêter.
    Allez-y, monsieur Dhaliwal.
    Merci, monsieur Geist et monsieur Balsillie. Je suis très fier du travail que vous faites tous les deux. Je vais poursuivre la conversation de M. Hoback. Vous dites que les Canadiens créent des innovations de calibre mondial, mais que nous n'arrivons pas à les commercialiser.
    Pouvez-vous nous dire un résumé, de sorte que le Canadien ordinaire puisse comprendre comment le PTP aura des retombées négatives sur l'innovation quand il s'agit de la commercialisation?
    Premièrement, l'innovation pour une société repose sur le principe de la liberté d'action. C'est le concept fondamental de la gestion. C'est la gestion des règles, des règlements, de la PI, des normes et de tous les accords et traités qui rendent un pays plus fort ou plus faible. Toutes ces choses créent l'environnement dans lequel on évolue. Ce sont des stratégies que nous n'avons pas et que tous les autres pays établissent en collaboration avec leurs innovateurs. Nous gardons les deux choses séparées, quand il faut que ce soit un dialogue quotidien incroyablement actif et continu. Nous échouons au niveau du premier principe, et le PTP est écrit de telle sorte que les autres pays deviennent plus forts, et rien dans le PTP ne contribue spécifiquement à l'avancement des entreprises canadiennes.
    Deuxièmement, la nature des dispositions de règlement des différends entre un investisseur et un État signifie que, dans le cadre de cet accord, le droit de propriété des technologies est décidé aux États-Unis dans leur système judiciaire de district, et appliqué au Canada en vertu des obligations découlant du PTP. Si une société à l'étranger, principalement aux États-Unis, n'est pas contente, elle nous ramène aux États-Unis dans une procédure qui n'est plus régie par le Canada. Que devons-nous faire? C'est une perte monumentale d'autonomie et d'autorité.
    Quand vous dites que cela nous confère une certitude, ça nous confère en effet la certitude que nous ne serons jamais forts, que nous ne serons jamais appuyés et que nous n'aurons jamais la souveraineté. La meilleure des choses à faire pour un innovateur canadien sous le régime du PTP est de déménager aux États-Unis.
    Y a-t-il quelque chose que nous puissions faire pour améliorer le PTP de sorte que nos innovateurs réussissent et n'aient pas à déménager dans le sud?
    Oui, en apportant quelques modifications stratégiques à l'accord, et en ne le prenant pas comme un accord noir ou blanc. Il n'y aura plus jamais de grandes sociétés de technologie canadiennes sous le régime du PTP.
    Quels changements faut-il apporter?
    S'attaquer aux dispositions de règlement des différends entre un investisseur et un État de l'AECG, modifier considérablement les dispositions sur la PI et la transparence, ainsi que sur le commerce électronique.
    Merci.
    Monsieur Geist, vous avez mentionné Uber. C'est un sujet très chaud en Colombie-Britannique, ma province d'origine.
    Pouvez-vous nous dire comment le PTP décidera de ce qu'il adviendra d'Uber et comment cela pourrait avoir un effet négatif sur notre industrie du taxi et sur les consommateurs?
    Je ne sais pas pourquoi, mais les gens pensent que le PTP et l'ALENA sont pareils. Ils sont radicalement différents. Assurément, du point de vue de la portée, le PTP porte sur une plus vaste gamme de sujets que l'ALENA.
    Mais au-delà de cela, le PTP aborde les services d'un point de vue très différent de celui de nos accords commerciaux conventionnels. Pour de nombreux accords commerciaux, on prend les services, on identifie les domaines de service précis que l'on veut libéraliser ou ouvrir. Le PTP inverse complètement cela en disant que nous allons ouvrir tout, puis chercher à déterminer quelles sont les choses que nous devons exclure.
    Les négociateurs, aussi intelligents soient-ils, ne pouvaient certainement pas identifier chaque type de service que nous devrions exclure du processus, surtout quand de nouveaux services voient le jour constamment. Dans le contexte des services de covoiturage comme Uber, nous avons des règles en place qui verrouillent efficacement la façon dont ils sont régis maintenant, au niveau municipal ou au niveau provincial, de sorte qu'ils sont exempts à compter de maintenant, mais pas à l'avenir.
    La Colombie-Britannique a de fait une loi sur le covoiturage, ce qui est inhabituel au pays. En général, le règlement est au niveau municipal. Mais dans ce cas, la réglementation est à la fois provinciale et municipale. Une fois le PTP instauré, il deviendra plus difficile pour ces administrations de changer leurs règles et leurs cadres.
    Cela s'applique à Uber, mais plus fondamentalement encore — et cela renvoie aux préoccupations de M. Balsillie au sujet de l'innovation —, au fur et à mesure que de nouveaux innovateurs entrent dans d'autres secteurs, on se heurtera à des règles qui sont déjà verrouillées en raison du PTP.

  (0915)  

    Merci, monsieur Dhaliwal. Votre temps est écoulé.
    Nous allons passer au NPD avec Mme Ramsey pendant cinq minutes.
    Merci beaucoup pour vos exposés.
    Il a été souligné maintes fois à ce comité que cet accord va au-delà du commerce uniquement dans le sens conventionnel où on l'entend. Il est clair, je crois, que seuls certains groupes ont été inclus dans les consultations menées par le gouvernement précédent.
    Bien respectueusement, je ne suis pas d'accord avec mon collègue, parce que ces négociations ont débuté en 2008. Nous avions amplement le temps de nous préparer avant de nous trouver devant un fait accompli et de devoir, à ce stade, décider si oui ou non nous ratifions.
    Monsieur Balsillie, je crois que vous gagnerez en effet de l'argent sous le régime du PTP, mais vous reconnaissez qu'il est si défectueux fondamentalement qu'il ne serait pas bon ni pour les Canadiens ni pour notre souveraineté.
    Pouvez-vous commenter spécifiquement le renvoi que vous avez fait à l'étude de Dan Ciuriak de l'Institut C.D. Howe, essentiellement au sujet de l'impact sur le PIB... qu'il serait négligeable si on ne ratifie pas le PTP. Je crois que d'aucuns pensent que si nous ne signons pas, nous allons être perdants.
    Affaires mondiales n'a pas d'études sur les répercussions économiques. Nous savons cela. Les études que nous avons vues de l'Université Tufts et du Peterson Institute aux États-Unis indiquent une plage de croissance de 0,2 % à 0 % d'ici 2030. Il n'y a pas de modélisation des retombées économiques qui soient favorables à notre engagement dans le PTP.
    Pouvez-vous nous parler de cela?
    J'ai une série de réseaux très avancés dans le monde et au Canada, et des gens très intelligents à mon bureau qui m'appuient dans ce que je fais. J'ai six lauréats du Prix Nobel avec qui je travaille à l'Institute for New Economic Thinking que j'ai fondé avec George Soros.
    Le Canada tient le discours le plus superficiel sur l'innovation que j'ai vu dans le monde. Nous acceptons comme credo qu'une protection plus rigide de la propriété intellectuelle est bonne. Nous avons ces faux mythes et fausses orthodoxies que nous acceptons, sans les contester.
    Pour répondre à la question sur Dan Ciuriak, franchement, les avantages du commerce sous le régime du PTP — modélisés, jugés par les pairs, que personne n'a contestés — sont une erreur d'arrondi. Ce que cela coûte de ne pas faire partie du PTP est une erreur d'arrondi.
    Il a aussi dit, et vous pouvez le lire dans les notes que j'ai ajoutées, que les deux aspects les plus importants n'ont même pas fait l'objet de modélisation. C'est comme si on achète une maison, on achète une entreprise ou on contracte un mariage sans aucun renseignement sur ce que l'on entreprend, étant donné que les maisons sont une bonne chose, les entreprises sont une bonne chose et le mariage est une bonne chose. Non, ce n'est pas toujours une bonne chose, n'importe quand et n'importe comment. Il s'agit de comprendre ce que la personne recherche et de s'assurer que ça fonctionne.
    Merci.
    Monsieur Geist, pouvez-vous nous en dire un peu plus au sujet de l'article selon lequel les fonctionnaires canadiens admettent que la politique de PI du PTP contrevient à la stratégie nationale privilégiée?
    Pouvez-vous nous parler de cela et peut-être présenter au Comité un peu de ce que vous avez constaté?
     Bien sûr. Le document dont il a été question, et M. Balsillie l'a mentionné également, se trouve parmi les documents obtenus au titre de la Loi sur l'accès à l'information, dans les notes d'information fournies à la ministre Freeland.
    Il s'agit, je pense, du fait que le Canada a reconnu depuis longtemps — et c'est encore le cas aujourd'hui — que nous sommes le plus efficaces quand nous élaborons des règles sur les politiques en matière de technologies numériques et sur les politiques en matière de propriété intellectuelle dans le cadre des forums internationaux. Notre contribution est considérable à ce niveau. Nous l'avons fait, par exemple, dans le cas du traité de Marrakech, et on vient de voir déposer un projet de loi visant à mettre en oeuvre cela, et les conservateurs ont tenté de faire la même chose. Le Canada a eu un rôle intégral à l'Organisation mondiale de la propriété intellectuelle dans le cadre de laquelle il a collaboré avec d'autres pays dans de nombreux forums multilatéraux ouverts.
    Dans le contexte d'un PTP, les choses sont complètement différentes, surtout quand on négocie à grande échelle certains des enjeux directement avec les États-Unis. Ils n'hésitent pas à présenter des demandes qui sont dans leur propre intérêt, et M. Balsillie nous a déjà expliqué pourquoi. En leur qualité d'exportateur important, leurs intérêts — qu'il s'agisse des intérêts d'Hollywood ou d'autres intérêts de PI ou de pharmaceutiques — ne s'harmonisent pas nécessairement avec les nôtres.
    Je crois que ce qui a été dit au ministre, ce que le gouvernement et, à dire franchement, ce que la plupart des experts savaient bien, est que pour le Canada, l'obtention d'une solution faite au Canada, ou tout du moins d'une solution qui tienne compte le mieux de nos intérêts nationaux, se produit dans le cadre de forums internationaux. Ce n'est pas ce qui se produit avec le PTP, surtout dans des négociations en coulisses, comme celles-ci.

  (0920)  

    Pouvez-vous nous parler brièvement de la prolongation de la durée des brevets, et quelle incidence cela aurait sur les pharmaceutiques et notre capacité d'avoir un programme d'assurance-médicaments?
    En ce qui concerne simplement la prolongation de la durée de protection qui peut être accordée dans le cadre de cet accord, ainsi que de l'AECG, c'est une chose qui se trouve dans l'accord européen, et qui est verrouillée fermement dans le PTP. Personne ne conteste le fait, je crois, que cela entraînera une augmentation des coûts pharmaceutiques. De fait, je crois que le ministre de la Santé et les fonctionnaires de ce ministère ont reconnu que ce sera effectivement le cas.
    Étonnamment, le chapitre sur la transparence comporte des règles qui s'appliquent aux programmes d'assurance-médicaments. Pourquoi un accord établirait-il à la toute fin — au chapitre 26 sur la transparence — les règles applicables aux programmes d'assurance-médicaments? La raison n'en est pas claire. Le chapitre reconnaît que le Canada n'a pas encore de tels programmes, mais il nous impose certaines règles immuables si nous devions en créer un. Que l'on convienne à ce stade de programmes potentiellement importants que nous n'avons même pas encore élaborés, et acceptions que quelqu'un d'autre en établisse les règles est tout simplement aberrant.
    Si vous permettez, j'aimerais appuyer justement ce...
    Je suis désolé, mais vous aurez peut-être l'occasion de revenir là-dessus plus tard.
    Nous passons maintenant aux libéraux. Monsieur Peterson, cinq minutes.
    Je vous remercie, messieurs, d'avoir répondu à notre invitation. Nous avons écouté, avec beaucoup d'intérêt, vos exposés et je vous félicite du travail qu'ils représentent.
    D'abord, monsieur Balsillie, il y a, très rapidement, une ou deux questions que je souhaiterais vous poser.
    Je suis plutôt de votre avis et que personne n'envisagerait en effet d'acheter une maison ou de s'associer en affaires, sans se livrer au préalable à une analyse économique de la situation et d'en étudier les divers facteurs. Je suis moins sûr, par contre, qu'il faille procéder à ce genre d'analyse avant de se marier, mais là, c'est à chacun d'en décider. Selon vous, les analyses qui ont été faites de cet accord n'ont peut-être pas tenu compte des questions que soulèvent la propriété intellectuelle et le règlement des différends entre les investisseurs et les États.
    Comment effectuer une telle analyse? Avez-vous, vous-même, effectué des analyses qui intègrent ces facteurs et, dans ce cas, à quels résultats êtes-vous parvenus?
    Non, je n'ai pas moi-même fait une telle analyse et ce n'est d'ailleurs pas à moi de le faire. C'est au gouvernement qu'il appartient d'effectuer ce type d'analyses.
    J'en conviens. Je me demandais simplement si l'on pouvait déjà se faire une idée de ce que cela va donner et si, selon vous, cela va, pour le Canada, représenter un avantage net, ou s'il va en résulter un solde négatif? À vous entendre, on peut penser que cela va donner un résultat peu avantageux.
    Je suis spécialiste de la vente d'innovations canadiennes à l'échelle du monde, et j'allais vous parler de l'industrie pharmaceutique et de la transparence. Ma perspective, concernant cet accord, est celle de quelqu'un qui vit ce genre de situations à l'étranger, et je sais déjà que nous allons faire face à des équipes d'avocats beaucoup plus étoffées que les nôtre et que nous allons être dépassés. J'estime que le Canada ne peut que perdre lamentablement et systématiquement dans le cadre de ces engagements.
    Supposons un instant qu'il n'y a pas de PTP, que rien encore n'a été fait et que l'on part de zéro, mais qu'on a une stratégie essentiellement axée sur l'innovation. Comment le gouvernement canadien pourrait-il s'y prendre pour faire en sorte qu'un éventuel accord joue à l'avantage des innovateurs, et non contre eux?
    Vous parlez là, par exemple, d'un traité comme l'accord économique et commercial global plutôt que comme le Partenariat transpacifique.
    Mais, même là, cela ne dépend-il pas des volets de l'AECG? Vous nous avez dit quelque chose du règlement des différends entre investisseurs et États, et, sur ce plan-là, préférez-vous les dispositions de l'AECG?
    Oui.
    Trouve-t-on dans l'AECG davantage de dispositions qui...?
    Je n'ai pas pris le temps de lire l'AECG. Je ne suis pas spécialiste du domaine, mais on a l'impression qu'il fait moins violence aux règles et aux rigidités de notre marché, la raison en étant que les pays européens auraient du mal à admettre un tel abandon de souveraineté. Il s'agit donc de voir comment on obtient de nous des concessions au plan de la propriété industrielle et de l'administration, et puis, au lieu de retenir la compétence de nos tribunaux, on instaure à l'extérieur du pays un mécanisme de règlement des différends entre investisseurs et États. Voilà ce qui m'inquiète tant dans le PTP.
    Mais d'après ce que je crois trouver dans l'AECG, et, encore une fois, je ne l'ai pas lu, alors que j'ai pris le temps de lire le PTP — il ne comprend pas de telles dispositions. Cela dit, M. Geist et les autres témoins connaissent mieux que moi le régime instauré par l'AECG.
    Je vous remercie. Ce dernier propos va nous servir de transition. J'aurais en effet une ou deux questions à poser à M. Geist.
    Dans votre exposé, vous avez indiqué que lors des négociations, le Canada a fait cavalier seul par rapport à certains enjeux. Pouvez-vous nous en donner des exemples?
     Il y a eu bon nombre de dossiers sur lesquels nous avons dû nous battre et on ne sait cela qu'en raison des documents qui ont fuité. Tous les chapitres n'ont pas fuité, mais dans le domaine de la propriété intellectuelle, le Canada a défendu aussi longtemps que possible sa législation interne. Dans ce type de négociation, notre objectif est souvent d'obtenir que l'on prenne en compte les règles applicables chez nous. Je précise que c'est ce que font la plupart des pays. Ils souhaitent voir leurs règles reprises afin de faciliter l'action de leurs entreprises à l'étranger.
    Or, sur ce point, nous avons souvent perdu. Nous avons perdu, par exemple, sur la prolongation de la période de protection des droits, sur la question des droits numériques en ce qui concerne l'information sur le régime des droits, questions que, là encore, nous étions les seuls à défendre.
    Il y a eu plusieurs autres questions que, parfois, nous défendions avec deux ou trois autres pays, mais d'autres où nous étions seuls. Mais si vous pouviez suivre comment le texte a évolué, ce qui n'est pas facile, car ce que nous en savons se fonde entièrement sur les parties qui ont fuité, vous verriez qu'en fin de compte nous avons fini par devoir céder.

  (0925)  

    Nous avons également parlé de la prolongation des périodes de protection, disant que si c'est dans l'intérêt des États-Unis, cela va nuire aux intérêts du Canada. Comment fait-on pour parvenir à conclure en ce sens?
    Il faut prendre en compte les coûts, l'augmentation des droits à acquitter puisque la période de protection est prolongée de 20 ans. Au Canada, à l'heure actuelle, l'oeuvre est protégée pendant toute la vie de son auteur, et pendant les 50 années qui suivent. Cela correspond à la norme internationale. Cette prolongation de 20 ans va naturellement entraîner des coûts supplémentaires. C'est ce qui est arrivé dans d'autres pays. La vaste majorité des économistes qui se sont penchés sur la question reconnaissent cependant qu'aucun auteur ne va renoncer à écrire le roman du siècle, simplement parce que les droits de ses héritiers ne seront protégés que pendant 50 ans, et non plus 70. La création ne dépend pas en effet de ce genre d'incitation.
    Mais, permettez-moi de revenir à la question du règlement des différends entre les investisseurs et les États. Vous m'avez demandé de citer quelques exemples. Eh bien, l'exemple se trouve dans ce que l'on voit déjà se passer au Canada. Notre pays est actuellement actionné par Eli Lilly, et risque de se voir condamné à verser des centaines de millions de dollars à cette entreprise pharmaceutique. Lorsqu'est instauré un de ces mécanismes de règlement, notre pays finit presque toujours par être actionné, et parfois il perd. Il nous faut reconnaître que les mécanismes de règlement des différends entre les investisseurs et les États font que les entreprises étrangères jouissent, dans notre pays, de pouvoirs dont sont privées nos propres entreprises. Il est un peu curieux de nous voir consentir à des règles qui permettent aux entreprises étrangères d'exercer contre notre gouvernement des recours dont sont privées nos propres entreprises.
    Je vous remercie.
    Nous avons terminé notre première série de questions, et, pour la deuxième série, nous allons commencer par les libéraux.
    Madame Lapointe, vous avez cinq minutes.

[Français]

     Merci, monsieur le président.
    Je vous remercie, monsieur Balsillie, d'être avec nous ce matin. J'apprécie le fait que nous ayons la chance d'avoir vos commentaires au sujet de l'entente touchant le Partenariat transpacifique.
    Dans votre présentation, vous avez dit ne pas avoir été consultés du tout quant à l'innovation. Il est assez étrange qu'on puisse penser être partie à une telle entente avec 12 pays alors que le secteur de l'innovation n'a pas été consulté.
    J'aimerais vous entendre à ce sujet.

[Traduction]

    Je tiens à dire, d'abord, que le Canada ne dispose pas pour faciliter l'essor d'une économie de l'innovation, des cadres de collaboration qu'il lui faudrait pourtant. Cela fait qu'entre innovateurs, il n'y a guère de collaboration ou de communication au sujet de ce qu'il leur faudrait faire pour réussir.
    Il nous faut bien comprendre que l'économie de l'innovation repose sur un ensemble de règles qui sont chaque jour changées ou modifiées des dizaines de fois. L'existence d'un marché dépend d'un certain nombre de règles. Ce qui permet l'éclosion d'une économie de l'innovation, c'est l'ajustement permanent de ces règles afin de favoriser le progrès des entreprises. Dans le cadre d'un accord comme celui-ci, on n'arrivera jamais à faire progresser nos entreprises si l'on n'entretient pas avec elles une relation très étroite de collaboration. Les États-Unis avaient formé 26 groupes de travail chargés d'étudier le texte en vue de le modifier. Nous n'avons pas fait de même et notre manque d'efforts à cet égard a entraîné des résultats catastrophiques. Sur le dossier de l'innovation, nous avons échoué.
    Dans d'autres secteurs, tels que l'industrie laitière ou l'agriculture, je suis persuadé que les entreprises ont beaucoup collaboré, et ont fait en sorte que les mesures qu'elles souhaitaient ont effectivement été défendues à la table des négociations, mais cela n'a pas eu lieu en ce qui concerne l'économie de l'innovation.

[Français]

    Je vous remercie.
    Un peu plus tôt, vous avez dit préférer de loin l'accord européen de libre-échange au PTP, en disant qu'il y avait dans celui-ci une énorme différence au chapitre de l'innovation. Vous préféreriez qu'on reste avec l'Europe.
    Vous avez aussi mentionné que des pays comme l'Allemagne, la Corée et le Japon sont des précurseurs en matière d'innovation parce qu'ils semblent avoir des politiques à cet égard qui ont du succès.
    J'aimerais comprendre ce qu'il en est à propos de cette question. À un moment donné, il faudra avancer et prendre des décisions. J'aimerais vous entendre à ce sujet.

  (0930)  

[Traduction]

    Ce n'est pas qu'il nous faudrait entretenir des relations commerciales avec certains pays seulement, mais je tente de définir l'approche que nous devrions adopter pour que les accords de commerce que nous signons favorisent nos stratégies de l'innovation.
    D'après ce que je peux voir, l'approche suivie pour l'AECG est bien préférable à ce qu'on a vu avec le PTP, et je souhaiterais que les règles sur lesquelles repose l'AECG soient reprises dans les nouveaux accords de commerce. D'après moi, alors que nous tentons de créer au Canada tout un écosystème qui alimente l'innovation, nous devrions prendre exemple sur les économies de l'innovation qui ont le mieux réussi.

[Français]

     En somme, si on avait la chance de retourner à la table de négociations, quelle suggestion feriez-vous? Vous parlez d'innovation, mais j'aimerais vous entendre à cet égard?
    Monsieur Geist, avez-vous quelque chose à mentionner à ce sujet.

[Traduction]

    En ce qui concerne la supériorité du modèle AECG, j'estime que cet accord est effectivement supérieur à certains égards, en raison notamment de meilleures dispositions en matière de règlement des différends entre les investisseurs et les États, et du fait que l'accord nous permet d'accéder à un marché avec qui nous n'avons actuellement pas signé d'accords de commerce aussi complets que ceux que nous avons conclus avec certains autres pays.
    Une des raisons pour lesquelles, selon certaines analyses économiques, nous ne tirerons pas grand-chose du PTP, c'est qu'avec la moitié des États en cause, nous avons déjà conclu des accords de commerce. Nous avons, en effet, déjà signé des accords de libre-échange avec les États-Unis, avec le Mexique ainsi qu'avec certains autres pays.
    Je suis, en fait, porté à penser qu'en matière d'accord commercial, le modèle à retenir n'est pas l'AECG, mais l'accord de commerce conclu avec la Corée du Sud, ce qui montre bien que nous pourrions, afin de nous placer sur les marchés asiatiques, envisager une autre stratégie commerciale basée, cette fois, sur ce qui se fait dans les économies asiatiques les plus innovatrices. Notre accord avec la Corée du Sud montre bien que nous pourrions en faire autant avec ces divers pays, mais il faut aussi reconnaître que les négociations que nous avons menées, et les résultats que nous avons obtenus font l'impasse sur certains des domaines abordés par le PTP. Là, nous tentons de voir où se situent nos intérêts respectifs afin de parvenir à un accord.
    Il y a donc un certain nombre de choses que nous pourrions faire, même en restant en dehors du PTP. Nous pourrions, ainsi que le Canada se propose de le faire, parvenir à nous implanter sur le marché chinois. Nous pourrions aussi ranimer les négociations commerciales avec le Japon. Nous pourrions poursuivre nos efforts en direction de l'Inde et finir par mettre en place dans la région un dispositif commercial plus stratégique et plus efficace nous permettant d'étoffer nos relations avec les économies les plus importantes, celles qui ont le taux de croissance le plus élevé, cela nous avantagerait même par rapport à certains pays du PTP.
    Merci, madame Lapointe. Il ne vous reste plus de temps.
    Nous allons maintenant passer la parole aux conservateurs, et à M. Ritz. Vous avez cinq minutes.
    Je tiens à vous remercier, messieurs, des exposés que vous nous avez présentés.
    Monsieur Balsillie, vous avez eu l'occasion de dire que si nous ratifions le PTP, il n'y aura jamais plus au Canada de grandes entreprises de technologie. Cela veut-il également dire qu'il n'y aura plus de grandes entreprises de technologie dans les 11 autres pays, puisqu'ils vont se voir appliquer les mêmes règles?
    Selon la manière dont j'interprète le PTP, en me fondant sur l'expérience que j'ai acquise en tant qu'entrepreneur en technologie sur le marché international, le cadre instauré par cet accord consacre les avantages dont jouissent actuellement les leaders, ainsi que la place qu'ils occupent sur le marché. Cela veut dire que les autres pays vont avoir beaucoup de mal à accéder au club des grands exportateurs de propriété intellectuelle.
    D'autres pays se proposent d'adhérer au PTP. Mais ça, c'est une autre question.
    Vous avez également dit que le Japon applique, en matière d'innovation, une stratégie qui a donné d'excellents résultats et dont pourra s'inspirer le Canada. Ne serons-nous pas mieux en mesure de le faire en adhérant à un accord multilatéral ou bilatéral avec des pays tels que le Japon?
    Non, c'est le contraire qui est vrai, car un tel accord consacre les positions respectives des pays signataires.
    Je ne vois pas pourquoi. Leurs brevets demeureront naturellement en vigueur, mais je ne comprends pas pourquoi cela empêcherait les nouvelles entreprises du secteur, de décider, au vu du climat politique canadien, ou de sa fiscalité, ou de son système bancaire, d'investir ici plutôt qu'au Japon...
    Mais ces facteurs-là...
    ... aussi parce que leurs investissements au Canada leur ouvriront les portes de l'AECG.
    Mais, pour une entreprise axée sur l'innovation, de tels facteurs sont sans importance.
    Ah, bon, je comprends.
    Vous avez, messieurs, tous les deux dit craindre que dans le cadre d'un accord tel que le PTP, les gouvernements renoncent à la marge de manoeuvre qu'ils avaient auparavant lors de la négociation d'accords de commerce. Selon vous, en effet, le PTP est trop ouvert et englobe un trop vaste éventail de questions. Mais le plan de développement de votre entreprise est-il encore ce qu'il était il y a 10 ans? Votre plan de cours est-il le même qu'il y a 10 ans? Pourquoi dire non à la flexibilité? Ne cherchez-vous pas à vous adapter aux changements qui naissent des activités des entreprises ou des universitaires?
    Mais bien sûr que l'on adapte, et l'une des difficultés que pose à nos yeux le PTP c'est que sur certains points, il gèle la situation actuelle et nous supprime la marge qui nous permet, justement, de nous adapter aux évolutions de la situation. Prenons l'exemple de la protection accordée aux produits biologiques. Comme vous le savez sans doute, on y voit la prochaine génération de produits pharmaceutiques. Nous en sommes actuellement aux toutes premières étapes du développement de ces nouvelles technologies...
    Leur période de protection va passer de cinq ans à huit.
    En effet, mais voici ce que je veux dire. Les États-Unis demandaient au début une période de protection encore plus longue, mais le gouvernement Obama souhaite maintenant ramener cette période à sept ans. Les Américains reconnaissent que la période de protection était trop longue et que cela augmentait sensiblement les coûts. Au Canada...

  (0935)  

    La période était de 12 ans.
    Je sais.
    Dans ses deux derniers budgets, le gouvernement Obama a essayé de ramener à sept ans cette période de protection, estimant que huit ans c'est trop long.
    Le PTP, lui, a opté pour huit ans.
    Ce que je veux dire c'est qu'on en est encore au début, car le PTP opte de manière décisive pour la solution cinq plus trois, donc huit au total. Mais le Canada va peut-être créer une puissante industrie des produits biologiques, et peut-être s'apercevoir qu'une période de protection de huit ans ne nous convient pas. Le PTP nous obligera néanmoins à nous en tenir à cela.
    C'est un aspect de la question qu'a d'ailleurs reconnu notre principal partenaire commercial, ainsi que de nombreux autres pays du PTP. Puisque chacun des partenaires a un point de vue différent, pourquoi conclure un accord ayant pour effet de geler la situation actuelle, et cela dans un secteur qui est le modèle même de l'innovation, alors que nous ne savons pas en fait quelle serait, en ce domaine, la durée optimale de la période de protection?
    Monsieur Balsillie, vous nous avez dit que l'AECG vous paraît infiniment préférable à la formule retenue dans le cadre du PTP. Ayant participé aux négociations dans les deux cas, je tiens à préciser qu'en matière de propriété intellectuelle, les dispositions de l'AECG sont à 95 % exactement les mêmes que celles du PTP. Il y a, bien sûr, de nouveaux détails, car les pays signataires sont différents.
    Et puis, vous avez demandé que des changements précis soient apportés au texte de l'accord. Pourriez-vous nous donner des exemples de ces changements précis? Sauf à tout recommencer à zéro, quels sont les changements précis que vous souhaiteriez voir adopter?
    Dans une économie de l'innovation, il y a de très nombreux facteurs à prendre en compte. Pour une entreprise, le principal c'est la liberté d'action. Il y a, à cette liberté, de multiples aspects, mais il s'agit de renforcer la propriété de ce qui est à vous, cette propriété que vous ne tenez que d'ensemble de règles abstraites. Il s'agit donc de défendre cette propriété contre ceux qui souhaiteraient se l'approprier.
    Et c'est pourquoi il existe des brevets et des droits d'auteur.
    Selon la manière dont j'interprète les dispositions concernant l'administration et l'application des règles de la propriété intellectuelle et selon l'interprétation que je fais des dispositions du PTP sur le règlement des différends entre les investisseurs et les États, j'estime qu'en cas de différend, nous risquons de perdre à tous les coups.
    Le Conseil canadien des chefs d'entreprise, la Chambre de commerce canadienne et les autres entreprises que nous avons interviewées, nous ont toutes dit: « C'est quelque chose de formidable. C'est exactement ce qu'il nous faut pour construire l'économie du XXIe siècle. Cela va créer des emplois, va nous aider à nous développer plus avant, et va assurer la prévisibilité et la stabilité des flux commerciaux. » Se trompent-ils tous, alors que vous seriez le seul à avoir raison?
    Puis-je vous renvoyer la question? Y a-t-il, parmi les gens qui sont venus témoigner devant le Comité, une seule personne qui ait permis à des réalisations canadiennes à prendre pied sur le marché mondial?
    Je ne peux pas vous répondre.
    Mais, moi, je le peux. Il n'y en avait pas.
    Votre temps de parole est écoulé.
    Monsieur Fonseca.
    Je tiens à remercier nos deux intervenants, M. Geist et M. Balsillie, pour l'excellence des exposés qu'ils nous ont présentés.
    Je tiens également à vous féliciter de la manière dont vous... L'optique dans laquelle vous présentez vos arguments est celle de la défense des intérêts du Canada et de sa population. C'est aussi notre mission à nous, en tant qu'élus, en tant que représentants de nos circonscriptions. Il nous faut donc adhérer à cet accord, s'il avantage le mieux le Canada et les Canadiens.
    M. Balsillie est à la tête d'une entreprise mondiale qui opère dans 135 pays. Après avoir réfléchi aux nombreux accords de commerce dans le cadre desquels ont eu à évoluer les activités de votre entreprise... Au plan du PTP, quels seraient les facteurs ou les aspects sur lesquels se baseraient les entreprises pour décider d'où elles entendent investir? À quels aspects s'intéresseraient-elles?
    Les entreprises se décident en fonction de la fiscalité, de la solidité du système bancaire, enfin de choses comme celles-là. Il est clair que certains facteurs interviennent dans leurs décisions d'investir, dans le cadre de leur stratégie de « création d'emplois ».
    Mais, lorsqu'il s'agit d'attirer les investissements nécessaires au développement de conceptions d'origine canadienne, on parle plutôt de « résultats de l'innovation ». Il y a une grande différence entre les résultats de l'innovation et la stratégie de création d'emplois.
    Lorsqu'une entreprise multinationale décide d'investir au Canada, elle s'intéresse à la productivité des travailleurs. Songez au tableau que je vous ai montré à l'arrière de la salle — il s'agit de quelque chose d'extrêmement important — vous voyez que la productivité des travailleurs canadiens a, tout au long des 30 dernières années, dépassé celle des travailleurs américains. La productivité du capital canadien a également été plus grande que celle des États-Unis. Or, au cours des 35 dernières années, les États-Unis ont enregistré, au niveau de la productivité multifactorielle en matière d'innovation, une croissance annuelle de 1 % alors que la nôtre n'a pas augmenté.
    Cela explique tous nos écarts de productivité par rapport aux États-Unis. Je n'ai pas le moindre doute que nous parviendrons à attirer les investissements qu'exigent la création d'emplois et divers autres aspects de notre économie, car le Canada a de très grands atouts. Mais cela va-t-il assurer aux idées canadiennes les résultats de l'innovation nécessaire pour accroître la richesse de notre pays? Or, cet écart revêt une grande importance pour la prospérité du Canada.
    Je ne dis pas que, dans l'accord envisagé, tout est mauvais. Mais je dis que cet accord est étonnamment mauvais au plan des résultats de l'innovation. Cela n'a absolument rien à voir avec la décision d'installer une usine au Canada, car une telle décision relève d'une stratégie de l'emploi.

  (0940)  

    Eh bien, nous avons, justement, accueilli des témoins de l'industrie automobile. Ils nous ont dit qu'avec le PTP, il sera extrêmement difficile d'attirer au Canada de nouvelles usines de montage-assemblage automobile.
    Je ne suis pas spécialiste du secteur de l'automobile. Il y a des gens qui pourraient vous en parler beaucoup mieux que moi et je ne voudrais donc pas entrer trop dans le détail. Mais, compte tenu de l'importance que ce secteur revêt pour notre économie, c'est une question qui mérite d'être étudiée.
    En ce qui me concerne, j'étudie la situation du point de vue des résultats de l'innovation. J'ai essayé de montrer, à partir du tableau de Standard and Poor, que, quel que soit son domaine d'activité, toute entreprise est aujourd'hui une entreprise de technologie; chaque entreprise est une entreprise d'innovation. C'est dans cette voie que s'orientent actuellement les secteurs de l'automobile, des produits forestiers, du pétrole et de l'agriculture. Veuillez comprendre que cette évolution est en cours. Si nous ne développons pas sur ce plan des capacités très achevées, même nos industries traditionnelles deviendront de moins en moins rentables, et cela vaut pour le secteur automobile.
    Selon vous, le PTP avantage les États-Unis, mais alors comment expliquez-vous que les candidats aux prochaines élections présidentielles aux États-Unis se sont insurgés contre cet accord?
    J'en connais plusieurs qui en sont partisans.
    Le PTP consacre les intérêts des actuels détenteurs de propriété intellectuelle et en cela les avantage. Le problème provient du fait que vu la place qu'il occupe en matière de propriété intellectuelle, le Canada sort perdant de ces négociations. L'accord crée une inégalité entre les pays qui détiennent un vaste portefeuille de propriété intellectuelle, et les pays dont ce n'est pas le cas. Mais il crée également des inégalités au sein même des pays. Je sais qu'aux États-Unis ceux qui critiquent cet accord s'inquiètent surtout de l'inégalité qu'il va créer au sein même des États-Unis. Je m'en inquiète moi-même pour la prospérité du Canada, car je vois déjà l'argent qui va sortir de notre pays. Dans les deux pays, les gens s'inquiètent des inégalités que cet accord va créer, mais nous avons, en matière d'inégalité, des optiques très différentes.
    Monsieur Geist, quel est votre avis?
    Je tiens simplement à ajouter que, compte tenu de ce qui se passe actuellement aux États-Unis, il nous faut ici, au Canada, écarter d'emblée l'argument voulant que nous devrions ratifier le PTP sans tarder. Nous ne savons pas en effet comment va évoluer la situation aux États-Unis.
     Comme vous le savez, le PTP ne peut pas entrer en vigueur tant que les États-Unis ne l'auront pas ratifié. Il serait tout à fait illogique de notre part d'accepter ce qui va être pour nous de très nets désavantages, alors que nous ne sommes même pas sûrs que le PTP entrera en vigueur.
    J'ajoute que l'opposition qui se manifeste actuellement à l'encontre de l'accord permet de penser que la renégociation de certaines de ses modalités pourrait également faire partie de la stratégie américaine. Certaines des déclarations des candidats à l'élection présidentielle porteraient à le croire. En théorie, le Canada va devoir accepter en bloc les modalités de l'accord, ou les rejeter en bloc. Or, j'ai l'impression que ce n'est peut-être pas comme cela que les choses vont se passer.
    Merci, monsieur.
    Nous avons assez de temps pour un dernier intervenant, et c'est au tour de M. Van Kesteren. Vous avez un temps de parole de cinq minutes.
    Je vous remercie d'avoir répondu à notre invitation.
    Nous sommes loin d'avoir le temps nécessaire, car vous soulevez de très nombreuses questions. Il existe, cependant, des zones d'ombre. Je ne sais pas trop bien comment formuler ma question, mais le temps m'est compté et je vais essayer de vous la poser de manière aussi précise que possible.
    Il va y avoir, dans tout cela, des gagnants et des perdants. Nous allons, dans certains domaines de l'économie où nous sommes en bonne posture, avoir l'occasion de nous développer encore plus. Vous y avez d'ailleurs fait allusion. Je sais que, depuis des années, les États-Unis le reconnaissent également. Vous avez parfaitement raison; ils concentrent leur activité sur ces domaines de haute technologie.
    Le fait que la période de protection des produits pharmaceutiques, actuellement de 12 ans, soit ramenée à 7 ans, ne retire-t-il pas beaucoup de force à vos arguments, Michael, en ce qui concerne les Américains? Cette mesure ne les désavantage-t-elle pas? Ne souhaiteraient-ils pas, au contraire, que la période de protection soit prolongée?
    L'accord ne choisit pas entre une période de 12 ans et une période de 7 ans, mais opte pour une protection de 8 ans, soit 5 ans et 3 ans de plus.
    Les États-Unis, ou du moins le gouvernement Obama, ont reconnu qu'ils s'étaient trompés. C'est du moins ce que je pense, étant donné que les Américains avaient souhaité voir réduire la durée de la protection.
    Ce n'est pas tant que cela les désavantage. D'après des études menées aux États-Unis, par le gouvernement, les produits biologiques n'ont pas besoin d'une protection renforcée, car le marché, dans son état actuel, incite déjà à la création. Il est en outre tellement difficile de développer, pour les produits biologiques, des équivalents génériques — ce qu'on appelle les biogénériques — que les produits biologiques bénéficient déjà, de ce simple fait, de mesures de protection efficaces. Il ne sera donc peut-être pas nécessaire d'augmenter la période de protection.
    D"après moi, nous aurions tort de penser que ce qui impulse l'innovation de pointe, ce sont les lobbys ou les politiques gouvernementales. On ne peut pas, en ce domaine, se laisser imposer des solutions immuables. C'est d'ailleurs ce que l'on peut constater même aux États-Unis. C'est également le cas de l'Australie. Une des questions les plus débattues est justement celle-ci, car on s'est déjà penché sur le rapport direct entre la durée de protection prévue et les conséquences que cela entraîne pour les dépenses publiques en matière de santé.

  (0945)  

    Monsieur Balsillie, vous avez créé quelque chose de formidable. Tout le monde est extrêmement fier de BlackBerry.
    En Finlande, la grande marque était, je crois, Nokia. Est-ce simplement que l'économie de ce pays n'avait pas atteint la masse critique, et ne permettait pas de mobiliser les effectifs nécessaires? Vous avez manifestement démontré que c'est bien le cas, mais ne devient-il pas de plus en plus difficile de fonctionner compte tenu de l'état actuel de l'économie mondiale. Ou bien, est-ce simplement que les Américains — et c'est, je crois, votre avis — tentent d'infléchir à leur avantage les règles applicables? Où se situe le problème?
    En fait, dans le secteur de l'innovation, tout le monde souhaite infléchir les règles. C'est un secteur qui appelle des règles qui favorisent la prospérité nationale. C'est dire que les acteurs tentent constamment et à toute heure du jour d'infléchir ou de contourner les règles. Cela fait partie du jeu.
    Prenez le cas de Nokia. À l'époque, ces règles mondiales n'existaient pas.
    Oui, il y en avait.
    Est-ce bien là la raison pour laquelle cette société a été ébranlée?
    Non. Tout d'abord, Nokia est une société qui a plus d'un siècle d'existence et elle possède toutes sortes d'innovateurs dans toutes sortes d'endroits, comme le fait la Suède. Les Scandinaves obtiennent donc d'excellents résultats. Il ne serait pas mauvais d'essayer de les imiter. Je ne parle pas d'une société en particulier; je parle d'une stratégie nationale en matière d'innovation pour les produits. Depuis plus de 30 ans, le Canada connaît une croissance égale à zéro pour ce qui est des nouveaux produits malgré les centaines de millions de dollars dépensés en intrants. Nous sommes premiers au monde pour les intrants, mais nous sommes les troisièmes au monde pour les produits. Nous sommes en train de négocier cet accord comme si nous étions un pays du tiers monde, un pays en développement qui veut obtenir des investissements et qui veut participer à tout cela.
    Je comprends ce que vous voulez dire. Prenons par exemple, notre agriculture. Nous voyons bien qu'il s'y fait de l'innovation. Nous avons réalisé d'énormes progrès dans le secteur pétrolier, dans l'industrie extractive. Il y a des sociétés à Calgary et à Edmonton qui ont fait des choses incroyables. Pourquoi cela ne pourrait-il pas se produire? Je comprends ce que vous dites au sujet des règles. Est-ce bien là la seule raison? Sont-ce les règles qui empêchent des sociétés comme la vôtre de...?
    Il ne s'agit pas de moi, il s'agit de l'économie canadienne. Je dirais que c'est l'expérience que j'ai eue. Au Canada, nous n'avons pas beaucoup de produits novateurs, c'est pourquoi notre rendement est très bas dans certains secteurs tels que l'agriculture et le pétrole. En matière d'économie, il faut miser de plus en plus sur l'innovation. Nous ferions bien de veiller à ce qu'il ne s'agisse pas seulement de produits technologiques, qu'il s'agira de tous les secteurs de l'économie. Vous dites qu'il y aura des gagnants et des perdants dans le jeu économique traditionnel, dans les secteurs traditionnels, mais Dan Ciuriak a dit que c'était à peu près pareil, de sorte, qu'en fait, ce n'est qu'une erreur de chiffres.
    Nous allons devoir mettre un terme à une première heure très intéressante. Je remercie encore une fois les invités d'être venus nous voir. Nous allons publier un rapport dans les mois qui viennent. Merci.
    Je rappelle aux députés que nous allons faire une pause de quelques minutes seulement et nous allons reprendre tout de suite après, de sorte que vous disposez de cinq minutes tout au plus.

  (0945)  


  (0955)  

    Bienvenue à tous, à notre deuxième heure de séance ce matin.
    Comme tout le monde le sait, nous sommes ici pour examiner le PTP et pour voir comment il va toucher les Canadiens. Nous avons tenu des séances un peu partout au Canada et nous allons entendre beaucoup de témoins ici à Ottawa.
    Nous allons entendre deux témoins pendant la deuxième heure: Lawrence Herman, de Herman and Associates et Barry Sookman, associé, McCarthy Tétrault.
    Bienvenue, vous aurez chacun cinq minutes.
    Monsieur Herman, voulez-vous commencer?

[Français]

    Je vous remercie de me donner l'occasion de témoigner devant ce comité aujourd'hui.

[Traduction]

    C'est un plaisir d'être ici pour vous présenter mon point de vue sur le TPT.
    Je suis avocat. Je m'occupe de politique et de commerce international. J'ai été, il y a bien des années, au cours des années 1970, un diplomate canadien. J'ai représenté le Canada auprès de nombreuses organisations et dans de nombreuses négociations internationales, notamment auprès du GATT, de l'OCDE et à la Conférence des Nations unies sur le droit de la mer, à l'OCDE, à l'OMCI, et je pourrais continuer longtemps. Pendant des années, après mon départ du gouvernement, j'ai pratiqué les politiques et le commerce international, c'est là que m'ont amené mes travaux.
    Permettez-moi de parler des points essentiels de mes commentaires introductifs et je me ferai ensuite un plaisir de répondre à vos questions. Je devrais dire que le véritable spécialiste qui est ici ce matin, certainement en ce qui concerne la PI, est Barry Sookman, un des grands experts canadiens dans ce domaine.
    Le PTP s'inscrit dans l'évolution des règles du commerce international dont l'origine est l'Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce et qui s'est poursuivie avec l'Organisation mondiale du commerce. Il fait partie d'une élaboration progressive des règles juridiques qui unissent les différents pays. Le PTP découle de l'ALENA et de toute une série d'autres accords commerciaux, multilatéraux et autres, auxquels le Canada est partie. Il est absolument nécessaire d'examiner le PTP dans ce contexte. Les principes de base du PTP découlent du système multilatéral que garantit l'accord sur l'OMC.
    Tout ceci est excellent. Lorsque je faisais partie du gouvernement, nous essayions d'élaborer des règles de droit international pour que le Canada, un État de puissance moyenne, puisse connaître au départ les règles du jeu — les règles juridiques — et pour qu'il ne soit pas écrasé dans les jeux de pouvoir que jouent les grandes nations. Il est bon d'avoir des règles. C'est là le but primordial de la politique canadienne en matière d'échanges et d'affaires extérieures: l'élaboration de règles. Il faut que ces règles soient bien conçues, il faut que ces règles respectent les intérêts canadiens, mais la tendance générale dans le domaine de la diplomatie commerciale internationale est la recherche de règles qui lient les États.
    Sur le plan interne, il y a eu des commentaires négatifs au sujet du PTP. Nous les avons entendus il y a quelque temps. Je n'ai pas l'intention de critiquer ces commentaires, mais j'aimerais vous fournir un point de vue plus général et, je crois, plus équilibré.
    Le Comité est chargé d'examiner le PTP et d'en arriver à une conclusion générale équilibrée. Il convient de l'évaluer sur le plan de l'équilibre qu'instaure cet accord. Cet accord ne se limite pas à la propriété intellectuelle. Bien sûr la PI en fait partie, c'est une partie importante, mais cela n'est qu'une partie. Pour bien évaluer le PTP, il faut tenir compte de nombreux autres aspects.

  (1000)  

    Je dirais que, selon une tradition bien canadienne, nous examinons les accords commerciaux internationaux d'un point de vue défensif; nous regardons ce à quoi nous devons renoncer ou les compromis que nous devons effectuer pour en arriver à un résultat négocié. Ce que nous ne faisons pas suffisamment, c'est d'expliquer nos points positifs, les gains que nous obtenons en adoptant des règles qui avantagent les fournisseurs canadiens de biens, de services et de capitaux sur les marchés étrangers. L'effet réel du PTP est en bref d'apporter une certitude aux sociétés canadiennes qui veulent exporter leur propriété intellectuelle, leurs biens, leurs services et leurs capitaux sur les marchés étrangers.
    Pouvez-vous conclure en quelques secondes?
    Je vais en rester là. Ce sont là mes commentaires préliminaires. Nous pouvons aborder des questions comme les préférences, les services, les mécanismes de règlement des différends entre les investisseurs et les États ainsi que les aspects importants qui touchent l'environnement et le monde du travail au cours de la période de questions.
    Oui, vous aurez probablement le temps d'aborder ces sujets au cours de la matinée.
    Nous allons donner la parole à M. Sookman, pour cinq minutes.
    Je suis un associé principal du cabinet d'avocats McCarthy Tétrault et l'ancien président de son groupe sur la propriété intellectuelle. Je suis professeur auxiliaire de droit de la propriété intellectuelle à la Osgoode Hall Law School, où j'enseigne la PI.
    Je suis ici en ma capacité personnelle et je ne représente aucun client.
    On a décrit le PTP comme étant le premier accord commercial du XXIe siècle. À mon avis, je peux dire que les chapitres qui touchent le commerce électronique et la PI justifient une telle affirmation.
    Le chapitre sur le commerce électronique est vraiment novateur dans la mesure qu'il réduit les barrières non tarifaires à l'utilisation de l'Internet et d'autres réseaux pour commercer. Cela donne aux entreprises canadiennes la possibilité de faire des affaires dans les 11 autres pays du PTP à partir du Canada et de préserver des emplois ici au Canada.
    Voici donc les points saillants du chapitre sur le commerce électronique:
    Il n'y a pas de droits de douane sur les opérations électroniques, même s'il est toujours possible de les taxer.
     Il y a des dispositions qui suppriment les obstacles à la reconnaissance des signatures et des documents électroniques, règles que le Canada a déjà adoptées. C'est un aspect très important pour les entreprises canadiennes qui veulent faire des opérations électroniques à l'étranger à partir du Canada.
    Il y a des dispositions qui interdisent de bloquer l'accès à un marché pour ce qui est des flux de données transfrontaliers, un aspect qui est, à mon avis, encore une fois très important.
    Ces dispositions, dont certaines touchent la vie privée, ont fait l'objet de critiques. À mon avis, le PTP est suffisamment souple pour permettre de préserver des objectifs de politique publique légitimes. Les exceptions qu'autorisait le GATT ont été préservées dans le PTP. Les parties sont tenues d'adopter des normes minimales en matière de protection des renseignements personnels et de lutte contre les pourriels. Certains ont prétendu que le traité n'allait pas suffisamment loin, mais ce n'est pas un traité sur la protection de la vie privée, ni un traité contre les pourriels, de sorte que les résultats obtenus sont ceux auxquels on pouvait s'attendre dans un traité de ce genre.
    Il contient des dispositions solides destinées à protéger la culture canadienne dans le cadre de l'exemption culturelle, contrairement à ce qu'a affirmé M. Geist.
    Le PTP prévoit des normes minimales pour la protection de la propriété intellectuelle. Le Canada a joué un rôle actif dans ces négociations.
    Le chapitre sur la PI a fait l'objet, comme vous l'avez entendu dire aujourd'hui, de nombreuses critiques. On reproche au PTP d'exiger que l'on apporte des changements importants au droit canadien, et que l'on emprisonne le Canada dans un carcan de PI très contraignant.
    Lorsque le Comité va évaluer ces affirmations, j'estime qu'il devrait tenir compte de ce qui suit:
    Le traité n'exige en fait que des modifications très mineures au droit canadien.
    Les répercussions qui ont été publiquement mentionnées ne sont pas, prises dans leur ensemble, très graves, en particulier par rapport au contexte général du traité et si l'on prend en considération les ententes que nous avons conclues avec l'AECG.
    Le Canada s'est déjà engagé à respecter la plupart des conditions du PTP en matière de PI, notamment, parce qu'il a conclu d'autres accords internationaux. Il semble peu probable que le Canada décide de répudier ou de se libérer de ses obligations ou qu'il soit obligé de changer de façon importante leur mise en application ici. Il semble également peu probable qu'un changement particulier que nous souhaiterions apporter justifie que le Canada rejette les obligations qu'il assume en vertu de traités existants ou justifierait qu'il n'adhère pas au PTP.
    Les règles en matière de propriété intellectuelle favorisent l'innovation et la commercialisation des produits de PI. Le XXIe siècle, et la quatrième révolution industrielle, dans laquelle nous devons nous engager, reposent sur la protection de la propriété intellectuelle dans le but d'obtenir des capitaux et de favoriser l'innovation et la commercialisation.
    Le marché canadien est bien trop étroit pour que les entreprises canadiennes puissent vraiment s'y épanouir. Il faut que les entreprises canadiennes puissent compétitionner sur la scène internationale, y compris avec nos principaux partenaires commerciaux, le Japon et les États-Unis. Les entreprises canadiennes doivent donc compétitionner sur les marchés étrangers en respectant les régimes de PI existants dans ces marchés étrangers, et ce, que le Canada décide d'adhérer ou non au PTP et que l'entreprise canadienne concernée déménage ou non aux États-Unis; c'est le régime à l'intérieur duquel elles doivent exercer leurs activités pour réussir.

  (1005)  

    Pouvez-vous conclure?
    Je vais faire deux remarques dans ma conclusion.
    Premièrement, il est difficile de concevoir comment les entreprises canadiennes pourraient être désavantagées à cause de l'adoption du PTP.
    Deuxièmement, je ne dis pas que les régimes de PI des autres pays sont parfaits, mais une bonne partie de leurs défauts ne sont pas des défauts que l'on retrouve dans le PTP, notamment le système judiciaire des États-Unis auquel M. Balsillie a fait référence. Ces éléments sont extérieurs au PTP et ne sont pas exigés par cet accord.
    Ma dernière remarque, monsieur le président, est que je suis loin d'affirmer que les dispositions en matière de PI que contient le PTP sont des conditions qui permettront au Canada d'obtenir de bons résultats. Je suis tout à fait d'accord avec M. Balsillie pour dire que nous devons adopter une stratégie en matière d'innovation et une stratégie en matière de commercialisation pour réussir, mais je crois que ces questions de stratégie sont distinctes.
    Je vous remercie tous les deux pour vos exposés.
    Nous allons commencer par les conservateurs.
    Monsieur Hoback, vous avez cinq minutes.
    Monsieur Herman, nous avons entendu M. Geist nous déclarer que nous avions déjà conclu des accords bilatéraux avec la plupart de ces pays et que nous n'avions donc pas besoin du PTP. Pouvez-vous m'expliquer quel sera le traitement préférentiel dont nous bénéficierons avec l'ALENA si nous ne signons pas le PTP et que les autres le fassent?
    C'est une bonne remarque.
    Les accords comme le PTP portent tous sur des questions de préférence. Le PTP a pour effet d'accorder aux Canadiens un traitement préférentiel dans les marchés des autres pays du PTP. Voilà ce dont il s'agit vraiment. Il s'agit de traitement préférentiel, d'un traitement plus favorable que celui qui est accordé sur ces marchés aux pays qui ne sont pas membres du PTP.
    Si nous adhérons au PTP, nous bénéficierions d'un traitement préférentiel sur le marché des États-Unis, plus favorable que celui que nous obtenons avec l'ALENA. Ce sera un traitement préférentiel qui nous sera accordé aux États-Unis — et je vais vous en donner quelques exemples dans un instant — par rapport à celui qu'obtiennent les pays qui ne sont pas partie au PTP, parce qu'il s'agit, dans tous les cas, de préférences.
    Si nous n'étions pas partie au PTP et qu'il entrait en vigueur, nous conserverions bien sûr les préférences prévues par l'ALENA. Nous bénéficierions toujours d'un traitement préférentiel sur le marché américain, plus favorable que celui qui est accordé à tous les autres pays qui ne font pas partie de l'ALENA, mais nous n'aurions pas accès à une préférence aussi favorable que celle dont bénéficieraient les autres pays du PTP.

  (1010)  

    Il y aurait donc une sanction si nous n'en faisions pas partie.
    Tout à fait. Je vais vous donner un exemple.
    Rapidement, parce que je n'ai que cinq minutes.
    Alors, je ne vous donnerai pas d'exemple.
    Monsieur Sookman, vous avez entendu M. Balsillie nous dire que nous n'avions pas de politique en matière d'innovation. Il a fait constamment des liens entre l'absence de politique en matière d'innovation et les répercussions de cette absence sur les politiques commerciales.
    Comment ces deux éléments sont-ils liés, à votre avis? Ne pouvons-nous pas obtenir les deux? Est-il impossible d'avoir une bonne politique commerciale et une bonne politique en matière de propriété intellectuelle?
    Je suis tout à fait d'accord avec vous. Je ne vois pas pourquoi nous ne pourrions pas le faire.
    Il est vrai que les Américains et les Japonais ont peut-être pris de l'avance sur nous sur le plan des stratégies d'innovation, mais ils ont besoin que la propriété intellectuelle soit protégée pour appuyer leurs innovations. Il ne s'agit pas simplement d'empêcher les autres de faire certaines choses; il s'agit en fait de protéger l'investissement et de créer les incitatifs dont ont besoin les sociétés pour qu'elles fassent des investissements et commercent mondialement. Ces deux choses-là vont ensemble. Il n'est pas possible d'avoir une bonne commercialisation, en l'absence de cadres efficaces qui favorisent l'innovation. Ces cadres comprennent à la fois la protection de la propriété intellectuelle et certaines des choses dont parlait M. Balsillie.
    Il parlait de la liberté d'action. Ne serait-ce pas plutôt la liberté de voler?
    La liberté d'action comporte plusieurs dimensions. Je pense que la plupart des entreprises qui ont investi lourdement dans le domaine de la propriété intellectuelle déploient beaucoup d'efforts pour la protéger. Si elles ne le font pas, alors elles vont se trouver à concurrencer leur propre technologie, et elles ne pourront pas profiter des investissements qu'elles ont effectués.
    Prenez le cas de Research in Motion; cette société avait entamé plusieurs poursuites pour protéger sa propriété intellectuelle, notamment au moment où M. Balsillie en était le coprésident. C'est parce qu'il faut protéger son marché, ses investissements, et ses emplois qu'il faut intenter des poursuites.
    Encore une fois, j'essaie toujours de comprendre tout cela.
    Si nous voulons voir de jeunes entreprises surgir au Canada, je voudrais qu'il y ait des règles pour qu'elles disposent d'une certaine période de stabilité pour récupérer leur investissement et pour qu'elles soient protégées grâce à la propriété intellectuelle. M. Balsillie affirme que, si vous agissez ainsi, aucune de ces entreprises ne s'établira au Canada et qu'elles iront toutes s'établir aux États-Unis.
    Comment cela se fait-il?
    Franchement, je ne vois pas pourquoi. Le régime canadien est tout à fait semblable à celui qui existe aux États-Unis. Du point de vue de la propriété intellectuelle, il n'y a pas grand avantage à se situer dans l'un ou l'autre pays. En fait, pour qu'une jeune entreprise canadienne puisse soutenir la concurrence, elle doit être en mesure de le faire aux États-Unis.
    Je me suis occupé de nombreuses jeunes entreprises canadiennes et pour elles, leur plus grand marché est celui des États-Unis. Elles veulent commencer au Canada et elles ont des rapports commerciaux au Canada, mais en fin de compte, la vraie réussite est celle qu'elles obtiennent aux États-Unis. Elles savent qu'elles doivent demander la protection de leur recherche aux États-Unis. En fait, le premier pays où elles demandent la protection de leurs brevets sont les États-Unis. Elles ont besoin de cette protection. Les investisseurs vérifient si leur PI est protégée, et si ce n'est pas le cas, cela pourrait les inciter à refuser d'accorder à ces sociétés le financement dont elles ont besoin. Il est important que les innovateurs canadiens aient accès à une protection solide de la propriété intellectuelle.
    Merci.
    Nous allons passer aux libéraux, avec M. Dhaliwal.
    Merci, monsieur le président, et merci aux témoins.
    Monsieur Herman, vous avez dit que nous devrions en arriver à une conclusion équilibrée au sujet du PTP. Le mécanisme de RDEI que contient l'accord du PTP a soulevé de nombreuses critiques et des préoccupations. Pensez-vous qu'il existe des solutions de rechange viables à ce RDEI?

  (1015)  

    Les dispositions en matière de RDEI s'inspirent du modèle de l'ALENA, ainsi que du modèle que le Canada a appliqué dans plus de 30 mécanismes de règlement des différends entre investisseurs et États, ou pour le dire différemment, l'Accord sur la promotion et la protection des investissements étrangers. Ces dispositions s'inspirent largement du modèle de l'ALENA. On y a ajouté quelques protections supplémentaires.
    Le PTP définit plus clairement les éléments susceptibles de faire l'objet d'un règlement. Le but est d'éviter que les arbitres rendent des décisions aux répercussions trop vastes. Ils doivent appliquer uniquement les règles du droit international quand ils prennent leurs décisions. L'AECG est différent. Il y a certains changements qui ont été faits dans l'AECG que l'on ne retrouve pas dans le PTP, mais dans l'ensemble, le PTP suit le modèle de l'ALENA. Certains ont parlé des nombreux différends avec le Canada que des investisseurs ont portés devant ces arbitres. Il est vrai qu'il est souvent arrivé que le Canada soit le défendeur dans ces affaires. Si nous renoncions au PTP, les dispositions de l'ALENA continueraient à s'appliquer. Je ne pense pas que l'on puisse vraiment soutenir que les réclamations émanant des investisseurs diminueraient si nous n'étions pas partie au PTP. Nos APIE conclus avec d'autres pays autorisent les investisseurs de ces pays à présenter des demandes contre le Canada. Ils ne l'ont pas encore fait, mais ces dispositions existent toujours.
    Il faut parler des avantages que cela donnera aux investisseurs canadiens dans des marchés comme le Japon, la Malaisie, le Vietnam, parce qu'ils pourront présenter eux-mêmes des demandes à titre d'investisseurs. Les investisseurs canadiens ont profité de nos APIE bilatéraux pour intenter des poursuites contre des pays comme le Venezuela, l'Argentine, le Kazakhstan, la Pologne et toute une série d'autres pays. Les investisseurs canadiens profitent de ces dispositions de RDEI. C'est un facteur important.
    M. Balsillie a soutenu que le PTP accorderait aux sociétés étrangères davantage de liberté au Canada. Souscrivez-vous à cette affirmation? Pouvez-vous dire pourquoi ou pourquoi pas?
    À mon avis, le PTP ne change pas grand-chose au droit canadien. Sur le plan pratique, il ne change pas la situation actuelle. Il y a la prolongation de la durée des brevets et il y a la possibilité d'une protection supplémentaire en matière de restauration des brevets. À part cela, il y a très peu de différences, si l'on considère l'ensemble des règles qui font partie du régime de propriété intellectuelle.
    Dans le domaine de la PI, le PTP modifie légèrement des dispositions auxquelles nous avons déjà adhéré dans l'accord sur les ADPIC de l'OMC, dans les accords multilatéraux de l'Organisation mondiale de la propriété intellectuelle et dans les traités comme la convention de Berne et la convention de Paris.
    Il y a effectivement de légères modifications, mais comme l'a dit M. Sookman, elles ne modifient pas de façon radicale les lois canadiennes. Je dois avouer que, d'après moi, une grande partie de ces critiques sont vraiment exagérées.
    Pensez-vous que le PTP pourrait avoir des effets négatifs sur le Canadien moyen?
    Il faudrait que cette réponse soit courte.
    Je n'en vois aucun.
    Moi non plus.
    Votre temps de parole est maintenant écoulé. Il est bon de respecter l'horaire, monsieur Dhaliwal. Merci.
    Nous allons maintenant passer au NPD avec Mme Ramsey, pour cinq minutes.
    Il me paraît tout à fait opportun que mon collègue ait posé cette question parce que je pense que le PTP aura de graves répercussions, en particulier dans ma circonscription d'Essex, où il y a un centre important du secteur de l'automobile. Sur les 58 000 emplois qui seraient perdus au Canada d'après le modèle économique de l'Université Tufts, 12 000 toucheraient la région du sud-ouest de l'Ontario. Cela a des répercussions massives pour les Canadiens moyens et les travailleurs canadiens, je vous le dis franchement.
     Vous avez dit que vous pensez que cela permettrait de conserver des emplois au Canada et bien sûr, il est difficile de comprendre comment une entreprise canadienne pourrait être désavantagée par le PTP, mais nous avons entendu d'autres témoins qui nous ont expliqué comment les Canadiens seraient désavantagés avec le PTP. Il est possible que les entreprises puissent profiter du Partenariat transpacifique, mais les Canadiens moyens et à faible revenu vont finalement devoir payer plus cher les produits pharmaceutiques. Ce serait là des répercussions qui les toucheraient.
    J'ai lu un de vos articles, monsieur Sookman, dans lequel vous disiez, « Les coûts de la non-participation du Canada seraient stupéfiants à long terme. » Je me demande sur quel modèle économique vous basez cette affirmation.

  (1020)  

    Tout comme M. Balsillie, je ne suis pas un spécialiste de l'industrie automobile, je ne peux donc pas faire de commentaire à ce sujet. Il y a des gens qui...
    Je faisais simplement référence au fait que d'après vous, il n'y aurait pas de répercussion sur les Canadiens.
    Je commentais les dispositions relatives à la PI. Je ne faisais pas de commentaire sur l'autre section. J'ai tenu pour acquis que c'était là le contexte de la question.
    Très bien. C'était plus général.
    Je me limitais à cet aspect; je suis désolé de ne pas avoir été suffisamment clair sur ce point.
    Lorsqu'on examine la situation du Canadien moyen, on constate que c'est une question assez compliquée, parce que le Canadien moyen veut avoir du travail, il veut avoir accès à de nombreuses possibilités et il souhaite pouvoir obtenir des biens et des services à des prix compétitifs. Il est évident qu'un certain nombre d'aspects du PTP le touchent, tant au niveau micro que macro-économique.
     Au niveau macro, ce qui est important, du moins pour ce qui est des dispositions en matière de PI, c'est d'avoir un cadre solide qui favorise l'innovation et les investissements, parce que cela crée des emplois bien rémunérés ainsi que des biens et des services compétitifs. À mon avis, si cela permet aux entreprises de réussir, je dirais que cela permet également aux Canadiens qui travaillent dans ces entreprises et également aux Canadiens consommateurs, de réussir.
    Je ne suis pas un spécialiste du secteur pharmaceutique. Il y a eu récemment une étude des répercussions sur le prix des médicaments des accords de libre-échange. Elle a examiné leur effet sur le prix des médicaments dans les pays avec lesquels les États-Unis ont conclu des ALE, et on a en fait constaté qu'il n'y avait pas eu d'augmentation sensible des prix. L'autre aspect que j'aimerais signaler, c'est que dans d'autres pays, comme en Europe, la protection des brevets est plus solide et pourtant, leurs prix sont inférieurs à ceux du Canada; il n'existe donc pas une relation directe entre ces aspects.
     Pour ce qui est du rétablissement des brevets, un changement majeur auquel nous avons déjà adhéré avec l'AECG — cela existe donc déjà —, on peut s'interroger sur la mesure dans laquelle on risque de constater une augmentation du prix des médicaments. La raison en est que cette disposition vise les délais nécessaires pour obtenir l'approbation des médicaments qui découlent du processus de réglementation, et qui ne sont pas causés...
    Lorsque nous parlons du rétablissement de la durée des brevets, pensez-vous qu'il serait bon pour le Canada de protéger davantage la propriété intellectuelle relative aux produits pharmaceutiques?
    Le cadre général des brevets est très peu modifié; il y a deux modifications. La première est la restauration des brevets à laquelle je faisais référence.
    Pour terminer le commentaire que je faisais à ce sujet, le Canada a les moyens d'accélérer l'approbation des médicaments. Si c'est bien le cas, on pourrait alors se demander si le fait de rationaliser le système entraînerait des coûts supplémentaires importants pour le Canada. C'est un aspect sur lequel nous pouvons agir.
    Avant que mon temps de parole soit écoulé, j'aimerais revenir à ma première question et à ma citation au sujet des coûts. Je vous ai demandé sur quel modèle de répercussions économiques vous basiez votre affirmation. Les centres C.D. Howe, Tufts et Peterson, utilisent des modèles qui ont tous démontré qu'il y aura parfois une croissance zéro et des pertes d'emploi importantes. Sur quoi vous vous basez pour dire que cet accord sera bon pour le Canada? Est-ce que cela vaut uniquement pour la PI?
    Il faudrait que les réponses soient brèves.
    Je vais demander à M. Herman de vous répondre parce que je sais qu'il a hâte de le faire.
    Monsieur le président, j'aimerais parler du volet automobile parce qu'il n'est pas seulement très important pour Mme Ramsey, mais aussi pour d'autres.
    Je ne veux pas vous interrompre, mais je crois que d'autres députés vont vous poser cette question et vous aurez beaucoup de temps pour y répondre. Cela serait préférable parce que vous êtes sur une bonne lancée et je ne voudrais pas vous arrêter. Nous y reviendrons.
    Nous allons maintenant passer à M. Peterson.

  (1025)  

    Merci, monsieur le président.
    Merci messieurs d'être venus aujourd'hui.
    Je tiens à signaler que j'ai fait un stage chez McCarthy Tétrault il y a des années à Toronto, il est donc agréable de vous revoir ici, monsieur Sookman.
    Vous avez la mémoire longue.
    Absolument.
    Monsieur Herman, vous avez brièvement parlé du mécanisme de RDEI, de sorte que j'aimerais revenir sur cette question. Nous avons entendu des témoins dire qu'ils étaient gravement préoccupés par la façon dont le RDEI nuirait au Canada, que le gouvernement canadien ne pourra pas réglementer librement les activités dans notre pays et qu'il y a des précédents, dans le cadre de l'ALENA, qui indiquent que nous sommes perdants dans les litiges associés au RDEI.
    Je me demande si vous souscrivez à cette affirmation et si vous pourriez nous en dire davantage sur la façon dont fonctionne actuellement le système RDEI.
    Il y a certains éléments du PTP qui constituent une amélioration par rapport à l'ALENA. Les dispositions en matière de RDEI de l'ALENA ont été interprétées par des tribunaux d'arbitrage d'une façon qui a grandement favorisé les lois et les règlements canadiens. Nous avons gagné de nombreux litiges importants avec l'ALENA.
    Le PTP définit, de façon plus précise, la notion fondamentale de traitement équitable. Aux termes du PTP, tout comme avec l'ALENA, les pays sont tenus d'accorder un traitement juste et équitable à tous les investisseurs. Le PTP restreint cette notion très importante et énonce que ce doit être une notion précise, reconnue par le droit international, et non pas une notion vague et imprécise que les arbitres peuvent appliquer.
    Il prévoit également que les changements dans la réglementation ne sont pas, par nature, contraires au traité. Autrement dit, un investisseur ne peut prétendre, pour la seule raison qu'il y a eu un changement réglementaire qui risque d'avoir des répercussions sur son investissement, qu'il a le droit de présenter une demande. Il y a également un certain nombre d'exclusions concernant les politiques publiques touchant l'environnement, la sécurité publique, la santé publique et d'autres aspects.
    Le PTP a pour effet de réduire sensiblement la portée du mécanisme de RDEI.
    Nous craignons qu'il s'agisse là d'un mécanisme privé de règlement des différends qui empêche le gouvernement canadien de légiférer. Ceux qui ont l'expérience du contentieux savent que les contrats de droit privé prévoient très souvent des mécanismes privés de règlement des différends. Je ne pense pas que cela entraîne un grand changement par rapport à ce qui existe déjà. Merci de l'avoir précisé.
    Les dispositions concernant la transparence, l'information et la divulgation de renseignements au public touchant le processus de règlement ont également été renforcées, ce qui est un progrès.
    Très bien, merci.
    J'aimerais revenir brièvement sur le commentaire de M. Sookman selon lequel il n'y aura pas beaucoup de changements législatifs si le PTP s'insère dans le monde du droit d'auteur et de la PI. C'est un régime législatif complexe. C'est la raison pour laquelle des gens comme M. Sookman gagnent leur vie à aider leurs clients à s'y retrouver.
    Pouvez-vous nous en dire davantage sur les changements qu'apporterait l'entrée en vigueur du PTP et peut-être signaler les différences qui existent entre les droits canadiens et américains en matière de PI et quel effet cela aura-t-il?
    Bien sûr.
    Merci d'avoir posé cette question et merci d'avoir bien démarré les choses chez Tétrault. Cela a bien tourné pour nous.
    Il y a des changements dans le domaine du droit d'auteur et plusieurs dans celui des brevets. Pour ce qui est du droit d'auteur, le principal changement est l'obligation de modifier la durée du droit d'auteur qui passe de 50 à 70 ans pendant la vie de l'auteur. Dans ce contexte, il y a déjà près de 90 pays au monde qui accordent une protection d'au moins 70 ans, de sorte que ce n'est pas un changement radical qui refléterait la situation unique des États-Unis. Cette durée est en fait en train de devenir la norme internationale.
    Pour ce qui est du coût de ce changement, auquel M. Geist faisait référence — ce montant de 55 millions de dollars — MM. Barker et Liebowitz viennent de publier une étude qui examinait l'étude néo-zélandaise qu'il a citée et ils en sont arrivés à la conclusion qu'elle était gravement viciée. En fait, lorsqu'il a examiné les coûts et les avantages, il a conclu que la Nouvelle-Zélande en retirerait quelques avantages. Il y aurait donc un changement.
    Il y a de nombreuses raisons de politique générale, que je ne vais pas aborder à cause des contraintes de temps — vous n'avez que cinq minutes — qui favorisent la prolongation de la durée. J'ai traité de cette question dans un blogue assez long.
    Il y a une autre modification qu'il faudrait apporter au droit relatif à la gestion de l'information. On a exagéré l'ampleur de cette modification. C'est en fait une modification très étroite qui érigerait en infraction pénale le fait de supprimer les droits de gestion de l'information dans un but lucratif, autrement dit, une entité commerciale qui faciliterait la piraterie. Il est difficile d'imaginer que cette modification puisse poser problème, du point de vue des politiques publiques.

  (1030)  

    Nous allons devoir nous arrêter ici. Désolé, nous avons largement dépassé notre horaire.
    Voilà qui termine notre premier tour.
    Nous allons maintenant passer à Mme Lapointe pour un second tour; vous avez cinq minutes.

[Français]

     Merci, monsieur le président.
    Je vous remercie, messieurs, d'être parmi nous aujourd'hui. Votre présence est très appréciée.
    Monsieur Herman, vous avez été interrompu et vous n'avez pas pu terminer votre présentation. Vous parliez de l'exportation de la propriété intellectuelle. Vous vouliez également aborder la question du marché du travail et de l'environnement. Qu'auriez-vous souhaité dire à ce sujet?
    J'allais dire que le Partenariat transpacifique, ou le PTP, comporte des dispositions visant à encourager les pays à mettre en vigueur des mesures solides au chapitre de l'environnement. Il ne s'agit pas de remplacer l'accord de Paris ou celui de Kyoto, mais d'exiger de tous les pays concernés par le PTP de mettre en vigueur des lois sur la protection de l'environnement. Les dispositions à ce sujet sont assez détaillées.
    C'est intéressant, d'autant plus que nous voulons marquer des points et nous améliorer en matière d'environnement.
    Sans nécessairement aborder la question de la propriété intellectuelle, dont nous avons beaucoup parlé depuis le début de la journée, pourriez-vous nous dire ce que vous aimeriez voir être modifié dans l'accord du Partenariat transpacifique si les négociations sur ce dernier étaient rouvertes?

[Traduction]

    Permettez-moi de répondre en disant...
    Je n'ai pas d'objection à ce que vous me répondiez en anglais, mais pour moi, c'est plus facile en français.

[Français]

     Je peux répondre en français.
    Il est hors de question d'améliorer ou de modifier le PTP.

[Traduction]

    Le PTP ne sera pas renégocié. S'il n'est pas approuvé par le Congrès des États-Unis, ce sera la fin, à mon avis, et nous nous retrouverons là où nous étions auparavant. Nous aurons perdu les gains espérés, et il y en a beaucoup, ainsi que les progrès que permettront le PTP. Il est tout à fait déraisonnable d'imaginer que les pays qui ont participé aux négociations vont se réunir encore une fois autour d'une table et modifier les dispositions du PTP. Si vous commencez à modifier certaines dispositions, je crois que c'est le tout qui va disparaître. Il y en a d'autres qui ne sont pas du même avis, mais c'est le mien.

[Français]

     Vous avez certainement entendu les propos des personnes qui ont témoigné avant vous. Elles ont suggéré, advenant le cas où nous ne signerions pas cet accord, d'établir une entente commerciale directement avec des pays, notamment avec le Japon et la Chine.

[Traduction]

    C'est hors de question. Si le PTP est approuvé par les États-Unis et que le Japon y adhère, ce pays n'aura aucun intérêt à négocier une entente bilatérale avec le Canada, à mon avis. S'il le fait, ce sera une entente qui sera basée sur le PTP. Pourquoi le Japon voudrait-il entamer des négociations bilatérales avec le Canada et accepter ensuite quelque chose qui est moins favorable pour lui que le PTP?
    Pour moi, il est trompeur d'affirmer que tout irait bien et que nous pourrions négocier une entente avec le Japon ou avec un autre pays. C'est une illusion.

[Français]

    Merci beaucoup.
    Je ne sais pas comment on dit «pie in the sky » en français.
    Merci beaucoup.
    Monsieur Sookman, vous avez parlé du commerce électronique. Or on se demande comment cela va fonctionner dans le cadre du PTP. Pour ma part, je me pose des questions à ce sujet. Vous disiez qu'il n'y avait pas de barrières. J'aimerais que vous nous en disiez davantage à ce propos.

  (1035)  

[Traduction]

    Merci d'avoir posé cette question. Veuillez m'excuser de répondre en anglais. J'ai grandi à Montréal, mais mon français est tellement rouillé que je ne voudrais pas communiquer le tétanos aux personnes présentes et je vais donc vous répondre en anglais.
    Les dispositions relatives au commerce électronique sont un aspect tout à fait novateur du traité. Il n'y en a pas dans l'AECG; il n'y en a pas dans l'ALENA; il n'y en a pas dans le GATT. L'accord reconnaît qu'au XXIe siècle, le commerce s'effectue différemment. Il y a aujourd'hui des géants dans la Silicon Valley — les Google, Facebook et autres — que nous espérons voir se développer au Canada. Ces entreprises sont très solidement établies dans les pays étrangers. Elles ont constaté que, dans certains pays, les gouvernements essayaient de leur bloquer l'accès à leur marché. Le but du chapitre relatif au commerce électronique était d'adopter le cadre du GATT, qui traite non seulement des barrières tarifaires, mais avait également commencé à traiter des barrières non tarifaires et d'examiner quelles seraient les barrières au XXIe siècle pour ensuite essayer de les atténuer, tout comme le GATT et d'autres traités l'ont fait avec d'autres barrières non tarifaires. De sorte que, lorsque l'on pense au commerce électronique, on constate que certaines barrières qui touchaient la reconnaissance des signatures et des documents, sont supprimées et que cela a été fait de façon très élégante en faisant référence à deux documents internationaux. Le PTP contient toute une série de règles dans une disposition, mais celle-ci a des répercussions et des avantages très importants pour les entreprises canadiennes.
    Elle a également des avantages pour ce qui est des flux de données transfrontaliers. Si vous pensez au Canada, vous savez que nous avons un secteur des TI qui est très sophistiqué et qui est spécialisé dans les réseaux. Il y a la possibilité d'utiliser ces technologies pour faire des affaires dans d'autres pays. En fait, en réalité, quelques-unes de nos grandes institutions financières exploitent des filiales à l'étranger à partir du Canada, de façon que nous voulons faire en sorte qu'elles puissent continuer à le faire.
    Le chapitre sur le commerce prévoit certaines exemptions pour les IF, mais d'une façon générale, il limite les barrières non tarifaires qui sont directement reliées au commerce électronique.
    Merci.
    Nous avons largement dépassé l'horaire. Nous avons reçu des plaintes parce que nous avions dépassé l'horaire la dernière fois et nous devons quitter la salle dans huit minutes environ; je pense donc que les conservateurs vont devoir se partager leurs cinq minutes de parole.
    Allez-y, monsieur Van Kesteren.
    Nous n'avons pas commencé à l'heure, monsieur le président, si vous permettez. Nous avons eu environ 10 minutes de retard.
    Vraiment?
    Très bien, allez-y.
    Merci.
    J'ai deux questions pour vous, monsieur Herman. J'aimerais que vous répondiez aux préoccupations que ma collègue a exprimées au sujet des travailleurs du secteur automobile. Cela fait partie aussi de mon monde à moi.
    La deuxième chose dont on nous a parlé est qu'il serait facile pour les travailleurs étrangers de venir au Canada et que le gouvernement canadien ne pourrait pas garantir que les travailleurs spécialisés respectent les normes canadiennes, ce qui a entraîné des pertes d'emploi massives pour les Canadiens dans, par exemple, le domaine de la construction. Vous pourriez peut-être répondre à ces deux commentaires.
    Pour ce qui est du secteur automobile, si nous ne faisons pas partie du PTP, nous allons nous trouver en concurrence sur le marché des États-Unis avec des fournisseurs à bas coût comme les Mexicains. Les usines et les investissements vont se déplacer au Mexique, parce que le Mexique pourra facilement faire entrer sans droits de douane leurs automobiles sur le marché américain, ou du moins à un coût inférieur, par rapport à ceux que nous devons assumer. Nous serons limités par les conditions qu'impose l'ALENA, à savoir un contenu de 62,5 % dans l'ALENA, dans le PTP. Si nous ne sommes pas là, les Mexicains auront moins de difficultés. Ils auront accès à des intrants à faible coût et pourrons nous concurrencer avec les automobiles à faible coût qu'ils fabriquent en concurrence avec nos producteurs canadiens, sur le marché des États-Unis.
    Je ne vois pas pourquoi une entreprise automobile ne voudrait pas que le Canada fasse partie du PTP. Voudra-t-elle subir la concurrence de produits plus coûteux que l'on trouve sur le marché américain? Nous vendons la plupart de nos automobiles sur le marché américain. Cela ne me paraît pas logique. Il ne faut pas non plus oublier les fournisseurs de pièces automobiles, comme Linamar et Linda Hasenfratz, par exemple, qui ont déclaré qu'ils admettaient que le PTP serait très avantageux pour les fournisseurs de pièces canadiens.
    Pour ces deux motifs, je pense que le PTP est avantageux pour nous et que nous devons penser aux inconvénients qu'il y aurait à ne pas en faire partie.
    Pour ce qui est de la mobilité des travailleurs, le PTP — et je ne sais pas si cela répond à toutes vos questions, monsieur Van Kesteren — vise à favoriser cette mobilité pour que les sociétés canadiennes puissent envoyer des spécialistes, des travailleurs et des techniciens à l'étranger pour exécuter des contrats de service sur des marchés étrangers. Le volet mobilité des travailleurs du PTP est très important. Il n'interdit pas au Canada de préserver certaines normes sur la mobilité des travailleurs, mais il permet à nos sociétés de transférer à l'étranger des techniciens, des employés, des spécialistes, ce qu'elles ne peuvent pas faire à l'heure actuelle. Cela me paraît tout à fait avantageux pour les employés canadiens et un gros avantage pour les emplois canadiens; j'espère que le Comité en tiendra compte.

  (1040)  

    Merci, messieurs, j'ai bien aimé vous écouter. Plutôt que de vous contenter de dire non, non, vous appuyez vos arguments sur la logique et la raison et je l'apprécie.
    La stabilité et la prévisibilité sont deux aspects essentiels du commerce. Avec l'OMC, il y a un article qui parle du statut de nation la plus favorisée et nous en avons bénéficié avec de nombreux pays, mais cela varie selon la volonté politique des dirigeants. Le PTP garantit le statut de nation la plus favorisée avec un ensemble de règles et cette prévisibilité va, bien entendu, faciliter les activités des entreprises canadiennes à l'étranger.
    On a beaucoup parlé du fait que le PTP allait compromettre la souveraineté canadienne. Je ne souscris pas à cette affirmation, et je me demande si vous avez des commentaires à faire à ce sujet.
    Toutes les ententes commerciales reposent sur des compromis. Il s'agit de donner quelque chose pour obtenir quelque chose et en fin de compte, il faut que le résultat soit conforme à l'intérêt national. Je pense que le Canada a déjà obtenu un traitement national et le traitement de la nation la plus favorisée avec les 11 autres pays — et nous l'avons, je le signale en passant, avec les États-Unis, mais nous perdrions notre préférence même avec un traitement de NPF. Nous n'avons pas de traitement préférentiel, ni même de garanties de NPF avec le Japon, par exemple.
    Monsieur Ritz, vous venez de Battlefords, et vous savez combien il est important pour l'agriculture canadienne d'avoir accès au marché japonais. C'est un avantage considérable. C'est un bon exemple d'une situation où le traitement national, et en particulier le traitement de NPF, qui revient à un traitement préférentiel, accorderait aux exportateurs canadiens de boeuf, de porc, de produits agroalimentaires, de produits agroalimentaires traités, un accès qu'ils n'ont pas actuellement au marché japonais, ni aux autres marchés de la zone Asie-Pacifique.
    J'aimerais ajouter un bref commentaire.
    Nous allons être obligés de passer à M. Fonseca maintenant. Il reste trois minutes. Vous réussirez peut-être à formuler votre commentaire.
    Monsieur Fonseca, vous avez trois minutes. Allez-y.
    Envoie-moi un mot, Barry.
    Merci, monsieur le président. Merci à M. Herman et à M. Sookman.
    Le grand intérêt de ces séances est qu'elles nous permettent de rencontrer des personnes comme vous, des témoins qui apportent une longue expérience et une grande expertise dans leur domaine, et aussi d'entendre des témoins dont les opinions sont tout à fait opposées. Nous vous avons écouté tous les deux, qui êtes très favorables au PTP et nous avons également entendu M. Geist et M. Balsillie qui nous ont dit que le PTP était la pire chose que nous puissions signer, ce qui nous amène à essayer d'équilibrer tout cela.
     J'aimerais revenir sur l'origine de tout cela. M. Balsillie a mentionné qu'aucun innovateur canadien n'avait été consulté au cours des négociations du PTP. J'aimerais vous demander si vous avez été consultés par le gouvernement précédent?
    J'ai en fait assisté à une séance de consultation, mais permettez-moi de répondre à votre question en faisant référence aux dispositions du PTP.
    Lorsque vous examinez ces dispositions, vous constatez qu'il est évident que le Canada les a grandement influencées.
    Évidemment, à ceux qui ne sont pas spécialistes de la PI, il s'agit uniquement de 6 000 pages et les dispositions du PTP en matière de PI ne représentent qu'une faible partie du tout. Je connais toutefois très bien un certain nombre de dispositions et si vous les examinez avec les notes de bas de page, si vous parlez ensuite aux négociateurs, vous constaterez que le Canada a adopté une stratégie très claire qui consistait à préserver la souplesse qui existait déjà dans nos lois. Elles contiennent un grand nombre de dispositions ou d'exceptions uniques.
    Je ne peux pas vous parler des consultations, mais je peux vous dire qu'en examinant les changements, qui sont mineurs, et en examinant comment le Canada en est arrivé à un point où très peu de changements sont exigés grâce à toutes ces exceptions et avertissements, il faut constater que nos négociateurs ont fait de l'excellent travail.

  (1045)  

    Rapidement, si l'on compare le processus qui a débouché sur l'AECG avec celui du PTP, que diriez-vous?
    L'AECG était un peu différent dans la mesure où les provinces y ont directement participé pour des raisons qui touchent le...
    Ce processus est-il meilleur?
    Cela est possible, pourvu que les provinces puissent parler d'une même voix.
    Il y a eu...
    Désolé de vous interrompre, mais c'est à cause du temps.
    Pensez-vous qu'il y avait plus de consultations à propos de l'AECG que...
    Eh bien, les provinces y participaient...
    Avez-vous été consulté, monsieur Herman?
    Parce que les provinces étaient impliquées, oui, j'ai été consulté.
    Les provinces y ont participé, ce qui change la dynamique, mais le processus de négociation du PTP a été précédé par de larges consultations. Un grand nombre d'intéressés ont participé au processus.
    En passant, si je ne l'ai pas déjà mentionné, je crois qu'il faut dire que nos négociateurs commerciaux sont les meilleurs au monde. Il est regrettable qu'il ait été dit que ce n'était pas le cas. Ils figurent dans le tiers supérieur de tous les négociateurs au monde. Je parierais en faveur de l'équipe de négociation canadienne en matière de commerce contre celle de n'importe quel pays au monde, y compris celle des États-Unis.
    Si l'on compare le mécanisme de règlement des différends de l'AECG et celui du PTP, lequel est préférable pour le Canada?
    L'AECG est une amélioration du modèle. Cela est évident, parce qu'il prévoit un groupe, une liste permanente d'arbitres et un mécanisme d'appel. C'est donc un modèle préférable à mon avis. Il n'a pas pu être introduit dans le PTP, au cours des négociations, parce que ce dernier s'inspire, si je peux le mentionner, du modèle normal des traités en matière de protection des investisseurs. Il est difficile de les comparer. Les dynamiques étaient différentes.
    Je préfère qu'il y ait un organisme d'appel, mais il n'y en a pas dans le PTP.
    Merci.
    Monsieur le président, pour ce qui est de la perte de souveraineté, il y a deux façons de concevoir ces dispositions en matière de règlement de différends. L'une est de dire qu'elles empêchent les gouvernements de faire certaines choses s'ils veulent respecter la loi et l'autre, qu'elles empêchent les gouvernements d'agir illégalement et protègent ceux qui subiraient un préjudice si les gouvernements agissaient de façon illégale.
    Je remercie les témoins d'être venus. Nous avons eu un excellent dialogue.
    Si vous avez des commentaires que vous n'avez pas pu nous transmettre, nous les accepterons avec plaisir.
    Merci à tous.
    Nous serons en déplacement la semaine prochaine.
    La séance est levée.
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