Passer au contenu
Début du contenu

ENVI Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.

Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.

Publication du jour précédent Publication du jour prochain
Passer à la navigation dans le document Passer au contenu du document






Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de l'environnement et du développement durable


NUMÉRO 127 
l
1re SESSION 
l
42e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 25 octobre 2018

[Énregistrement électronique]

  (1535)  

[Traduction]

    Je déclare la séance ouverte.
    Bonjour à tous. Nous allons commencer. Bienvenue à nos remplaçants. Nous avons Lloyd Longfield, et je crois que nous allons entendre Ed dans un instant.
    Je souhaite la bienvenue au Comité de l’environnement à nos témoins. Nous allons passer directement à vos déclarations préliminaires. Vous aurez chacun 10 minutes. La sonnerie se fera entendre à 16 heures. Lorsque la cloche sonnera, nous devrons nous entendre pour poursuivre. Étant donné que nous sommes dans cette salle et que les votes auront lieu juste à l’étage supérieur, j’espère que nous pourrons poursuivre jusqu’à environ 16 h 15, mais nous réglerons cette question lorsque la cloche sonnera.
    Ensuite, nous passerons à notre période de questions habituelle, aussi longtemps que nous le pourrons. La session prendra fin lorsque nous irons voter.
    Je suis très reconnaissant aux témoins d’avoir fait preuve de souplesse quant aux lieux et aux heures de la séance aujourd’hui. C’est un plaisir de vous avoir parmi nous et de vous entendre.
    Sautons dans le vif du sujet. Nous commencerons par le Conseil canadien sur l’électricité renouvelable. Je vous accorde 10 minutes. Nous utilisons des cartons. Quand il ne vous restera plus qu’une minute, je vous remettrai le carton jaune, et lorsque votre temps sera écoulé, je vous remettrai le carton rouge. Essayez de conclure à ce moment.
    Nous allons commencer.
    Pardon; seriez-vous d’accord pour limiter votre déclaration préliminaire à sept minutes? Cela nous aiderait à resserrer les choses et à entamer une partie de notre échange.
    Oui. J’allais dire que nous nous étions chronométrés et que nous étions à sept minutes, alors nous devrions être en mesure de le faire.
    Merci.

[Français]

    Monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du Comité, bonjour. Je remercie M. Bigelow, le greffier du Comité, d'avoir fait du très bon travail pour faciliter notre comparution aujourd'hui.
    J'aimerais d'abord vous remercier de l'invitation à venir témoigner ici aujourd'hui, au nom du Conseil canadien sur l'électricité renouvelable, aussi appelé CanCORE, sur le leadership international du Canada en matière de croissance propre et de changements climatiques.
    CanCORE est une collaboration des quatre principales associations professionnelles nationales pour l'électricité renouvelable. Il s'agit ici d'énergie solaire, éolienne, marine et hydroélectrique. Ensemble, nos membres représentent plus de 65 % de toute la production d'électricité au Canada aujourd'hui.

[Traduction]

    Le Canada possède l’un des réseaux d’électricité les plus propres au monde grâce à son hydroélectricité abondante et, de plus en plus, à d’autres sources d’énergie renouvelable comme l’énergie éolienne, solaire et marine. Le Canada est vraiment un chef de file mondial en matière d’électricité renouvelable. Ainsi, l’électricité renouvelable est notre avantage concurrentiel en matière de lutte contre les changements climatiques.
    L’objectif global du CanCORE est de veiller à ce que le Canada atteigne sa cible nationale de 90 % d’électricité non émettrice d’ici 2030 et qu’il dispose d’un réseau d’électricité provenant presque entièrement de sources non émettrices d’ici 2050. Cela appuie nos objectifs nationaux en matière de lutte contre les changements climatiques et de croissance propre ainsi que nos obligations internationales en vertu de l’Accord de Paris, y compris une réduction nationale des émissions de 30 % sous les niveaux de 2005 d’ici 2030.
    À cette fin, CanCORE a trois messages clés à transmettre au Comité au sujet du leadership international du Canada en matière de croissance propre et de changements climatiques.
    Premièrement, le leadership international exige que des cibles et des objectifs nationaux ambitieux soient établis et atteints. D’ici 2020, le Canada n’aura pas respecté ses engagements internationaux en matière d’atténuation des gaz à effet de serre. C’est pour cette raison que nous considérons le cadre pancanadien et la voie dans laquelle il place le Canada comme une première étape monumentale.
    Deuxièmement, le cadre pancanadien suit une formule qui rend notre consommation d’énergie aussi efficace et notre production d’électricité aussi peu polluante que possible, et qui fait passer le plus grand nombre d’utilisations d’énergie possible à l’électricité non émettrice, comme le transport, les bâtiments et l’industrie. C’est pourquoi nous considérons que les objectifs nationaux fixés par le gouvernement pour que 90 % de notre électricité provienne de sources non émettrices d’ici 2030 sont l’un de nos principaux facteurs de réussite. Plus notre réseau est propre, plus notre décarbonisation est profonde dans tous les secteurs de l’économie. L’amélioration de notre position de chef de file dans le domaine de l’électricité non émettrice peut également aider nos voisins du Sud à décarboniser leur économie grâce aux exportations.
    En troisième et dernier lieu, avec le cadre pancanadien, nous avons maintenant pour la première fois une stratégie nationale sur le climat. Nous avons toutes les cibles et tous les objectifs dont nous avons besoin. La mise en oeuvre de cette stratégie créera d’importantes possibilités de développement économique et de création d’emplois au pays. Notre leadership national se traduira par d’énormes possibilités à l’échelle mondiale dans l’économie de l’énergie propre.
    Nous devons maintenant passer de la planification climatique à l’action climatique. Il est temps de bien mettre en oeuvre le cadre pancanadien.

[Français]

    Mon collègue M. Bateman va maintenant parler des politiques et des réglementations particulières qui pourraient influer considérablement sur notre capacité à atteindre 90 % d'électricité non émettrice d'ici 2030.

[Traduction]

     Merci, Anne-Raphaëlle, et merci aux membres du Comité de me donner l’occasion de comparaître aujourd’hui.
    Compte tenu des contraintes de temps, je me concentrerai sur deux secteurs clés du cadre pancanadien exhaustif sur la croissance propre et les changements climatiques qui sont importants pour le secteur de l’électricité renouvelable. Le premier consiste à mettre un prix sur la pollution par le carbone et le deuxième porte sur le leadership dont fait preuve le gouvernement fédéral en s’engageant à alimenter ses opérations en électricité entièrement renouvelable d’ici 2025.
    De plus, je parlerai du rôle des résultats d’atténuation transférés à l’échelle internationale, les ITMO, et du financement de la lutte contre les changements climatiques dans la stratégie globale du Canada sur les changements climatiques et la croissance propre.
    Le premier des quatre piliers du cadre pancanadien est la tarification de la pollution par le carbone. Le CanCORE croit qu’un signal pancanadien de prix propre, juste et efficace, assorti d’une politique à long terme qui déplace les investissements vers des sources de production d’électricité non émettrices, est notre principal facteur de réussite en matière de lutte contre les changements climatiques.
    La tarification du carbone permet de réduire les émissions dans le secteur de l’électricité. Par exemple, l’intensité des émissions du réseau électrique de l’Alberta a diminué de façon constante, en partie en raison du règlement provincial sur les émetteurs de gaz désignés adopté en 2007 et du règlement sur la concurrence en matière de carbone adopté en 2018.
    L’Alberta Climate Change Office a estimé qu’en 2018, les émissions provenant de la production d’électricité à partir du charbon auront été de 12 à 15 mégatonnes inférieures à celles de l’année précédente.
    La Regional Greenhouse Gas Initiative, ou RGGI, a été le premier programme de plafonnement et d’échange obligatoire aux États-Unis visant à limiter les émissions du secteur de l’électricité. La RGGI a été établie en 2005 et devrait aider les États à réduire leurs émissions annuelles dans le secteur de l’électricité de 45 % par rapport aux niveaux de 2005 d’ici 2020. Ces États se sont fixé comme objectif de réduire les émissions d’électricité de 30 % d’ici 2030.
    Ce sont des exemples de trois approches différentes et efficaces quant à la tarification du carbone dans une province canadienne et bientôt dans 11 États américains. Il y a de nombreux autres exemples dans le monde où la tarification du carbone est conçue et mise en œuvre pour tenir compte des différences régionales ou atteindre des objectifs politiques différents.
    Le CanCORE accueille favorablement la publication des détails préliminaires du filet de sécurité fédéral pour la tarification du carbone. Il s’agit d’un important pas en avant pour le cadre pancanadien et CanCORE continue de participer activement à la consultation d’ECCC sur la conception du système de tarification fondé sur le rendement.
    Nous saluons la nouvelle orientation proposée selon laquelle de multiples normes sont appliquées dans le secteur de l’électricité pour tenir compte de sa complexité, et nous continuerons de préconiser une norme qui assure l’envoi de signaux de prix clairs aux nouvelles installations de production d’électricité émettrices, y compris celles qui utilisent le gaz naturel.
    Un investissement sans entrave dans la production d’électricité à émissions pourrait aller à l’encontre de nos objectifs en matière de lutte contre les changements climatiques et de croissance propre, y compris notre cible de 90 % d’électricité non émettrice, et/ou mener au délaissement d’actifs. Nous continuerons de faire part de ces enjeux au ministère tout au long du processus de consultation.
    Enfin, le financement de la lutte contre les changements climatiques et les résultats d’atténuation transférables à l’échelle internationale sont des outils importants dont dispose le Canada pour faire preuve de leadership international tout en appuyant les technologies, les services et l’expertise du Canada en matière d’électricité renouvelable afin de jouer un plus grand rôle dans l’économie mondiale.
    Il faudra examiner attentivement la façon dont les crédits internationaux interagissent avec nos cibles et nos marchés nationaux en matière d’émissions. Des limites et un prix plancher pour le carbone pourraient faire en sorte que les signaux de prix provenant de la tarification du carbone ne soient pas indûment compromis.

  (1540)  

    En résumé, nous tenons à souligner que le Canada est vraiment un chef de file international en matière d’électricité renouvelable, puisque 65 % de notre production totale d’électricité provient de sources renouvelables, mais nous ne pourrons pas être un chef de file international à l’avenir sans atteindre les objectifs que nous nous sommes fixés. Notre richesse potentielle actuelle et future en ressources d’électricité renouvelable constitue notre principal avantage concurrentiel en matière de lutte contre les changements climatiques et de croissance propre.
    Le cadre pancanadien ouvre une voie solide vers des objectifs nationaux en matière de changements climatiques et de croissance propre. Chercher à obtenir 90 % de notre électricité de sources non émettrices d’ici 2030 est l’un de nos facteurs de réussite les plus importants. Il sera essentiel de garder cela à l’esprit lors de la conception et de la mise en œuvre d’outils d’atténuation des changements climatiques.

[Français]

    Je vous remercie encore une fois de l'invitation. Nous attendons avec impatience les questions des membres du Comité.

[Traduction]

    Merci, Anne-Raphaëlle Audouin et Patrick Bateman, de vos commentaires.
    Passons maintenant à Laurence Blandford, du Center for Clean Air Policy.
    Monsieur, vous avez sept minutes.
    Bonjour, mesdames et messieurs. Merci beaucoup de l’honneur que vous m’avez fait en m’invitant à comparaître devant le Comité.
    Je vais aborder deux de vos sous-thèmes aujourd’hui, soit le financement de la lutte contre les changements climatiques et la possibilité de transfert des résultats des mesures d’atténuation en vertu de l’article 6 de l’Accord de Paris.
    Je vais vous dire quelques mots à mon sujet pour que vous sachiez où je veux en venir.
    J’ai déjà été fonctionnaire au gouvernement fédéral. J’ai été négociateur en matière de climat pour le gouvernement pendant plusieurs années. Je suis maintenant indépendant et je travaille en étroite collaboration avec le Center for Clean Air Policy, un centre d’études et de recherche basé à Washington, mais aussi avec un certain nombre d’autres organisations. Au cours de la dernière année, j’ai collaboré à des projets qui ont été réalisés dans le cadre du Fonds vert pour le climat, un important fonds multilatéral pour le climat dont le Canada fait partie, et j’ai travaillé avec l’Agence suédoise de l’énergie et le Forum économique mondial. Or, divers organismes ont soit été mes clients ou bénéficié de mes de conseils.
    Je vais vous donner quelques messages clés sur chacun des sujets, puis nous pourrons peut-être passer aux questions.

[Français]

    Je m'adresse à vous en anglais, mais vos questions en français seront les bienvenues.

[Traduction]

     Quant au financement de la lutte contre les changements climatiques, je dirais que le message clé, du point de vue canadien, est de mettre l’accent sur la transformation à long terme dans les pays en développement, et non pas seulement sur le financement de projets.
    À cet égard, l’importance que le Canada accorde depuis longtemps à la mobilisation de fonds privés avec son financement de la lutte contre les changements climatiques demeure très valable. À l’avenir, il faudra peut-être modifier légèrement l’approche du Canada pour tenir compte de certaines des choses que nous avons apprises récemment au cours de cette phase. Par exemple, nous avons appris qu’un grand nombre d’instruments et d’institutions qui se concentrent sur la mobilisation des investissements privés dans la lutte contre les changements climatiques dans les pays en développement n’accordent probablement pas un soutien suffisant à des choses comme la capacité nationale, la création d’un environnement propice et des choses de ce genre, qui seront d’une importance cruciale pour faire une transition vers des investissements plus écologiques.
    Il est probable qu’une partie du financement qu’ils reçoivent des donateurs n’est pas suffisamment sous forme de capital-risque. Il y a encore trop de prudence dans le genre de financement que ces institutions internationales reçoivent pour avoir les impacts désirés. Par conséquent, ils ne comblent pas certains des écarts financiers qui sont vraiment importants — par exemple, la disponibilité de l’argent en devise locale, le financement en fonds propres à un stade très précoce pour la lutte contre le changement climatique, etc.
    Les efforts de préparation des projets sont un autre élément qui manque probablement. Autrement dit, une des grandes lacunes est qu’il n’y a pas suffisamment de projets. Il y a beaucoup d’argent et trop peu de projets à financer, ou il y a plusieurs projets qui ne correspondent pas nécessairement aux critères pour recevoir les fonds disponibles. À l’avenir, il sera très important de concevoir, d’élaborer et de mettre en oeuvre les projets. Soit dit en passant, au Canada aussi, cela a été un obstacle lorsqu’on a essayé de financer des projets auxquels participaient, par exemple, des partenaires canadiens. Il n’y a pas beaucoup de projets dans les pays en développement, sauf en Chine.
    Quant aux transferts en vertu de l’article 6 de l’Accord de Paris, le message important est que ces transferts doivent rehausser le niveau d’ambition. Il ne s’agit pas seulement de déplacer les émissions d’un pays à l’autre. À mon avis, les transferts doivent faire partie d’une stratégie globale qui comprend une importante volonté nationale et un financement de la lutte contre les changements climatiques pour des projets dans les pays en développement qui peuvent compter comme les efforts de ces pays. Ensuite, il y a aussi les efforts déployés pour réduire les émissions dans d’autres pays afin de nous aider à rehausser le niveau de nos propres ambitions. Il existe des approches qui sont gagnantes pour tous. Une cible robuste dans un pays comme le Canada peut être atteinte en partie en appuyant les réductions dans les pays en développement d’une manière qui les aide également à rehausser leurs propres ambitions en matière d’atténuation.
    Comme vous le savez, le GIEC a clairement dit que nous devons mettre en oeuvre un bien plus grand nombre de mesures d’atténuation qu’à l’heure actuelle. Si le Canada peut aider les pays à atteindre leurs objectifs en matière de financement de la lutte contre les changements climatiques et à réduire la production davantage grâce aux transferts en vertu de l’article 6, c’est très bien. Toutefois, comme je l’ai dit plus tôt, si on utilise la réduction d’un pays pour atteindre l’objectif du Canada, on ne met pas nécessairement en oeuvre une plus grande atténuation sur le plan global et, à la base, nous raterons en quelque sorte la cible d’atténuation globale pour atteindre nos objectifs.
    Si vous pensez à l’avenir, vous voudrez probablement réfléchir à certaines choses du point de vue canadien. Je pense que nous devons nous demander si les gens considéreront que la cible du Canada est suffisamment ambitieuse pour justifier notre recours aux réductions internationales.

  (1545)  

     C’est une question intrinsèquement politique, alors je ne vais pas vous donner mon opinion personnelle à ce sujet, mais comme vous le savez, il y a de nombreuses organisations qui ne considèrent pas les cibles du Canada comme particulièrement ambitieuses par rapport à celles d’autres pays.
    Aujourd’hui, dans l’Union européenne, nous avons vu que le Parlement européen a demandé à la Commission européenne de fixer un objectif de réduction de 55 % d’ici 2030 et de zéro émission nette d’ici 2050. Par conséquent, lorsqu’on se compare aux autres, il y a une question. Il y a un risque politique à emprunter cette voie pour le Canada.
    Deuxièmement, les réductions internationales devraient être considérées comme une façon de nous aider à passer outre au fait qu’il est plus difficile d’effectuer des réductions dans certains secteurs. Il ne s’agit pas de créer pour toujours une occasion de compenser les émissions au Canada, mais plutôt de nous donner le temps dont nous avons besoin à l’échelle nationale pour réaliser les réductions nécessaires. Les missions internationales peuvent en quelque sorte compléter cela, nous aider à combler cet écart et nous occuper des secteurs où la technologie n’est peut-être pas encore disponible pour des réductions à l’échelle nationale.
    À cet égard, comme le CCAP l’a fait remarquer par le passé, les périodes de crédit devront probablement être assez courtes. Les négociations internationales sont un peu vagues à ce sujet en ce moment, mais beaucoup de propositions laissent entendre que la période de crédit devrait être relativement courte, alors ce n’est pas comme si on pouvait nécessairement compter sur des crédits disponibles pendant 20 ou 30 ans après avoir pris l’engagement de les acquérir.
    Troisièmement, il est également important de penser à l’autre côté de l’équation. Les pays en développement voudront conserver certaines des réductions moins coûteuses pour qu’ils puissent atteindre leurs propres objectifs. Il n’est pas nécessairement évident que ces réductions bon marché seront largement disponibles pour que nous puissions tout simplement nous en emparer, mais voyons plutôt cela comme une sorte de partenariat, où l’ouverture du marché canadien aux crédits d’un autre pays peut être un moyen d’appuyer les pays en développement dans leurs propres efforts de transformation.
    Il y a beaucoup de questions techniques que nous pourrions aborder ici, si cela vous intéresse, mais je ne m’étendrai pas sur ce point dans mes remarques liminaires.
    Je vais faire une dernière remarque en terminant. L’argent consacré au financement de la lutte contre les changements climatiques et les sommes versées pour l’acquisition de crédits internationaux devraient être traités de façon assez distincte dans les rapports publics. L’engagement en matière de financement de la lutte contre les changements climatiques vise à aider les pays en développement. Il s’agit d’un engagement altruiste pris en vertu des conventions. L’argent qui sert à financer l’acquisition de crédits est quelque chose que nous ferions pour nous-mêmes, pour veiller à ce que nos propres réductions soient moins coûteuses.
    Encore une fois, vous pourriez vous poser des questions sur les risques politiques si vous commencez à utiliser les fonds destinés à la lutte contre les changements climatiques pour réduire le coût de votre cible. Lorsque vous formulerez des recommandations pour le gouvernement, assurez-vous de traiter assez séparément ces deux sources d’argent, et la façon dont elles sont communiquées.
    Merci beaucoup.

  (1550)  

    Excellent. Merci de votre déclaration préliminaire.
    Enfin, nous accueillons Michael Binnion, qui comparaît à titre personnel.
    Monsieur Binnion, vous avez sept minutes.

[Français]

    Bonjour à toutes et à tous. C'est un réel plaisir d'être parmi vous pour discuter de la politique climatique. Je vous remercie de l'invitation.
    Je m'appelle Michael Binnion. Je suis le chef et fondateur de Questerre Energy, le président de l'Association pétrolière et gazière du Québec, un conseiller de l'Association canadienne des producteurs pétroliers et le président de High Arctic Energy Services, une entreprise de forage.
    Ma compagnie a découvert les gisements de gaz de schiste d'Utica, au Québec. Il s'agit des plus vastes gisements de gaz naturel dans toute l'Amérique du Nord.

[Traduction]

     J’ai publié un article révisé par des pairs dans le journal Marine and Petroleum Geology et trois articles sur la politique sur les changements climatiques.
    Je tiens d’abord à rassurer les membres du Comité. Je connais très bien la physique de l’absorption du dioxyde de carbone et de la rediffusion de l’énergie infrarouge. Je sais aussi que l’activité humaine augmente la quantité de dioxyde de carbone dans l’atmosphère. Je ne souscris pas du tout à l’idée que le Canada est un petit pays qui génère peu d'émissions et qu’il ne peut donc pas faire de différence. On a toujours compté sur nous, les Canadiens, pour faire plus que notre part lorsqu’il y a un problème mondial et j’ai toujours été fier d’être Canadien pour cette raison.
    Cependant, pour faire la bonne chose, nous devons bien faire les choses et je crois qu’une politique sur les changements climatiques devrait être mesurée et évaluée en fonction du coût global pour l’économie divisé par la réduction nette des émissions mondiales ou, simplement, le coût par tonne d’émissions mondiales nettes réduites. À mon avis, la politique canadienne de tarification du carbone échoue à cet égard. Les coûts sont élevés et presque tous les promoteurs préconisent maintenant des « mesures supplémentaires », ce qui est un mot code pour décrire précisément ce qu'on était censé éviter avec la tarification du carbone.
    À titre d’exemple, le rapport Trottier a conclu qu’il faudrait imposer un tarif de 1 000 $ la tonne pour atteindre nos objectifs tandis que de l'avis du Conference Board du Canada, même à 150 $ la tonne, la politique ne réduirait les émissions que de 12 mégatonnes avant la fuite de carbone.
    Je suis en fait un décrocheur de la tarification du carbone. Si une chose coûte plus cher, on en obtient moins, c'est un principe élémentaire en économie et le marché est plus efficace que les mandats gouvernementaux. C’est simplement qu’en théorie, la pratique et la théorie sont les mêmes, mais pas en pratique. J’ai changé d’avis au sujet des politiques de tarification du carbone fondées sur l’esprit de clocher quand j’ai appris de première main comment une bonne idée en théorie était appliquée au Québec.
    Mon entreprise a mis au point, avec SNC-Lavalin, un projet de gaz propre au Québec pour utiliser l’hydroélectricité afin de créer la première installation de mise en valeur du gaz naturel au monde sans émissions, sans eau potable et sans fluides de fracturation toxiques. D'après une étude environnementale approfondie réalisée par Polytechnique Montréal, notre projet permettra de réduire de 65 % en moyenne 18 effets différents sur la santé et l’environnement et de plus de 70 % les effets sur le climat. Il s’agit de l’un des projets les plus écologiques au Canada à l’heure actuelle et il réduirait les émissions de plus d’une mégatonne avant même de tenir compte des possibilités de remplacement de combustible.
    Ce que j’ai appris, cependant, c’est que notre projet comportait une faille fatale en vertu de la politique sur les changements climatiques du Québec, c’est-à-dire que nous réduisions les émissions dans le reste du Canada, pas au Québec. Personne n'a encouragé un projet vert qui ne réduisait pas les émissions au Québec; on n’en voulait même pas. C’est ainsi que j’ai découvert le paradoxe vert, c'est-à-dire qu'une politique de réduction des émissions locales les augmente en fait globalement en raison des fuites de carbone.
    À présent, les experts au Canada vous diront rapidement que les allocations en fonction de la production, ou OBA, résoudront le problème que les fuites de carbone représentent pour le commerce. À mon avis, il s’agit d’un pansement pour camoufler le problème principal, c’est-à-dire essayer de régler un problème mondial en faisant preuve d’esprit de clocher. Les OBA créent des règlements complexes qui sont opaques pour le public. Très peu d’experts comprennent les modèles économiques utilisés pour estimer les crédits et ceux qui les comprennent comprennent aussi comment ils peuvent être manipulés. C’est un système très vulnérable à la politisation.
    Carbon Market Watch en Europe a estimé que le système d’échange européen a accordé 24 milliards d'euros de trop en OBA. Non seulement les entreprises ont-elles été pleinement créditées de leurs émissions, mais elles ont également reçu des crédits en prime de 24 milliards d’euros, ce qui a créé une manne pour les industries qui avaient le mieux joué le jeu de la modélisation économique.
    Pire encore, mettre un pansement sur un système occulte le véritable problème: la politique canadienne de tarification du carbone s’attaque à un petit problème, pas au grand problème. La tarification du carbone au Canada vise exclusivement à réduire de 1,5 % les émissions mondiales, ce qui est déjà le décile le plus élevé sur le plan environnemental. En tant qu’un des rares exportateurs nets de biens énergivores de l’OCDE, nous pourrions également travailler sur les 98,5 % d’émissions avec, par définition, seulement des normes environnementales moyennes. C’est la solution facile dont Laurence parlait. Nous n’avons qu’à réduire de 1,6 % les émissions mondiales grâce à nos exportations de produits et de connaissances pour faire la même différence que nous le ferions en éliminant complètement toutes les émissions du Canada.
    Je donne l’exemple du secteur canadien de l’aluminium qui, grâce à l’hydroélectricité et à l’électricité propre, dont Anne et Patrick ont parlé, génère seulement deux tonnes d’émissions par tonne d’aluminium produite, comparativement aux secteurs américain (11), australien (14) et chinois (17). Mon document sensé à propos de la politique sur les changements climatiques recommande de déréglementer et d'offrir des réductions d’impôt pour aider les industries canadiennes comme celle de l’aluminium, des industries qui ont des avantages comparatifs mondiaux en matière de carbone, à être plus concurrentielles sur les marchés mondiaux. J’aimerais savoir de quel pourcentage du marché mondial de l’aluminium le Canada devrait réduire ses émissions mondiales pour atteindre son objectif de Paris.
    Je prépare actuellement une nouvelle étude qui permettra de commencer à quantifier la façon dont le Canada pourrait jouer dans la cour des grands sur le plan de la réduction des émissions en exportant nos technologies propres, nos approches réglementaires et celles de nos ressources, comme l’aluminium, qui sont produites selon les meilleures normes au monde.
    Là où le Canada ne bénéficie pas d’avantages comparatifs en matière de carbone, je crois que des règlements souples comme les normes Corporate Average Fuel Economy, les normes CAFE, se sont avérés plus efficaces. Nous avons un problème mondial et je suis convaincu que la planète a besoin de plus de pays comme le Canada et de plus de technologies et de ressources propres, produites selon les normes les plus élevées au monde.
    Merci beaucoup de votre attention.

  (1555)  

     C’est excellent. Merci.
    Nous allons avoir un peu moins de temps aujourd'hui; je vais donc préciser qu'à la suite des questions, si l’un des témoins souhaite présenter un mémoire écrit, il peut le faire. Nous demandons que les documents fassent une dizaine de pages pour la traduction, mais nous accepterons les mémoires écrits, alors n’hésitez pas à le faire.
    Nous allons commencer par M. Fisher, du parti ministériel, pour six minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Merci beaucoup de tous vos témoignages et merci d’être venus et d’avoir été patients avec nos horaires fous. Je sais que vous avez été souvent déplacés aujourd'hui et nous vous en sommes reconnaissants.
    Commençons par Laurence, si vous me le permettez. C’est une question que j’ai posée à quelques reprises dans le cadre de cette étude et j’aimerais connaître votre point de vue à ce sujet. Les fuites de carbone préoccupent tous les pays qui agissent pour réduire les émissions. Je crois que, comme pays, nous pouvons demeurer concurrentiels et encourager les entreprises canadiennes à réduire leurs émissions, tout en conservant la production ici.
    Dans l'ALENA 2.0 ou l’AEUMC, il y a le chapitre exécutoire sur l’environnement visant à protéger les entreprises canadiennes contre les partenaires commerciaux qui ne veulent peut-être pas offrir le même niveau ou qui peuvent jouir d'un avantage injuste sur le plan de l'environnement. Tout d'abord, je pense que c’est énorme. Je pense qu’il était très important de le prévoir dans l'AEUMC. J’aimerais savoir quels sont les autres outils — je crois que l’un d’entre vous a mentionné la boîte à outils — que le Canada pourrait avoir pour atténuer les préoccupations relatives aux fuites de carbone. Que pouvons-nous faire d’autre? De plus, que pensez-vous de ce chapitre sur l’environnement?
    Je ne suis pas un spécialiste du commerce et j’hésite donc à faire des commentaires précis à propos des divers accords commerciaux.
    En ce qui concerne les fuites de carbone, c’est toujours un problème. Je crois que la question est peut-être parfois exagérée dans la documentation, d'après ce que j'en sais, mais il faut certainement penser aux effets négligeables des possibilités que nous envisageons comme les régimes de tarification du carbone.
    Mes connaissances concernant certaines des recherches sont certainement plus limitées que celles du témoin précédent. Je ferai cependant remarquer qu'à mon avis, nous devons être sceptiques quand nous affirmons que tout cela va entraîner des fuites. Le système du carbone n’est pas le seul facteur lié à la compétitivité du Canada et les raisons pour lesquelles les gens citent les investissements ne sont pas uniquement fondées sur la politique à propos des changements climatiques. Il y a d’autres aspects qui font du Canada un endroit de choix où investir et je pense que beaucoup d’entreprises y prêtent attention.
    L’autre chose qu’on entend souvent, c’est une observation qui a été formulée lorsque mes collègues et moi faisions de la recherche, par exemple, en vue de conseiller les responsables du Fonds vert pour le climat sur la façon dont ils devraient appuyer l'évolution du secteur privé dans ce domaine. Les entreprises veulent simplement que les politiques soient claires. Elles veulent comprendre l’environnement politique dans lequel elles évoluent et les règles auxquelles elles seront assujetties et elles souhaitent qu'elles soient appliquées avec équité et transparence.
    Cependant, je ne pense pas que ce soit toujours vrai que les entreprises s’opposent à la politique sur les changements climatiques en soi, même à une politique climatique ambitieuse ou même à des choses comme la tarification du carbone.
    L’autre point que j’aimerais faire valoir, c’est que le régime international et la tradition veulent que la comptabilisation des émissions climatiques soit fonction de la production et non de la consommation, de sorte que vous êtes responsable de ce qui est produit dans votre économie et non de ce que vous exportez.
    Vous pouvez évidemment réfléchir à la façon dont vous voulez stimuler le plus possible et coopérer avec d’autres pays et c’est à cela que sert le financement de la lutte contre les changements climatiques — les aider à améliorer leur contexte politique, à réduire leurs émissions et à relever leurs normes, et ainsi de suite. C’est tout à fait valable, mais les signataires de l’Accord de Paris et de la Convention des Nations unies sur le climat s’attendent toujours à ce que les réductions des émissions nationales soient prises en compte et c’est sur cela que repose la reddition de comptes. Ce n’est pas fondé sur ce que vous exportez. C’est peut-être malheureux d’un certain point de vue, mais c’est ainsi. C’est ce que dit le traité et c’est là que se situe la responsabilité du Canada en ce qui concerne ses propres émissions nationales.
    Merci.

  (1600)  

    Je voulais simplement intervenir, Darren. Il vous reste deux minutes et la sonnerie vient de se faire entendre.
    Oui.
    Les membres du Comité sont-ils d’accord pour poursuivre pendant une quinzaine de minutes? Cela donnera un tour aux conservateurs et un autre à Wayne, du NPD. Oui. D’accord, merci.
    Je vais m’adresser à Patrick ou à Anne-Raphaëlle, si vous me le permettez.
    Le Conseil canadien sur l’électricité renouvelable a déjà dit que le Canada doit redoubler d’efforts pour rationaliser les projets de transport transfrontalier de l’électricité et d’autres initiatives visant à accroître les exportations de technologies d’électricité renouvelable.
    Selon vous, qu’est-ce que le gouvernement doit faire pour faciliter ces efforts?
     Je peux mettre mon chapeau de l’hydroélectricité et parler de l’aspect de la transmission.
    Je pense que nous sommes en très bonne position au Canada pour ce qui est des exportations vers les États-Unis. Nous sommes un exportateur net, ce qui n’est pas le cas pour tout ce que nous exportons aux États-Unis. En fait, 80 % des 40 térawattheures que nous envoyons chaque année aux États-Unis sont de l’hydroélectricité. Nous envoyons beaucoup d’électricité propre chez nos voisins. Il y a beaucoup de points d’échange à la frontière — notamment au Manitoba, au Québec et en Ontario.
    Les possibilités sont là. Je pense que l’Amérique du Nord est bien placée pour examiner son bouquet énergétique en général et décarboniser. Nous n’en sommes qu’au début de cette conversation. Cela prend très rapidement une tournure politique pour déterminer qui dirige de chaque côté de la frontière. Je pense que c’est un aspect qui suscitera plus d’attention à l’avenir et que le Canada s'en tire déjà très bien.
    Il vous reste 30 secondes.
    Quelle politique environnementale le Canada devrait-il intégrer aux négociations commerciales?
    N’importe qui peut répondre.
    Je crois que c’est exactement ce que nous pouvons faire. Par rapport à cette comptabilité, l’Accord de Paris nous permet de réclamer des crédits compensatoires tant que cela se fait dans le cadre d'un accord commercial. Je pense que mon idée de politique repose sur l’utilisation très agressive de cette disposition dans les accords commerciaux afin que nous puissions obtenir des comptes pour... On me remet un carton rouge, mais peut-être que quelqu’un pourra répondre au reste de votre question.
    Excellent. Merci.
    Nous allons passer à M. Fast, pour six minutes, s’il vous plaît.
    Merci, monsieur le président. Je suis heureux d’être de retour au Comité.
    Avant de commencer, j’aimerais donner avis d'une motion pour discussion à notre prochaine réunion. Je vais le lire en anglais, mais il est dans les deux langues.
     Je propose que le Comité permanent de l’environnement et du développement durable demande à la ministre de l’Environnement, Catherine McKenna, de comparaître devant le Comité pour expliquer le régime de tarification du carbone récemment annoncé par le gouvernement.
    Merci à vous tous d’être venus. Je suis heureux de vous revoir, Michael.
    Permettez-moi de commencer par tirer les choses au clair, parce que des gens comme M. Binnion sont parfois étiquetés climato-sceptiques simplement parce qu’ils s’opposent à la taxe sur le carbone. On m’accuse de cela. Je regarde un gazouillis que vous avez envoyé, monsieur Blandford, à Mme McKenna elle-même. Vous dites, comme vous l’avez souligné à juste titre, que l’opposition à la taxe sur le carbone n’est en fait que du scepticisme caché au sujet de la réalité des changements climatiques et de la nécessité de s’y attaquer.
    Il y a au moins quatre personnes dans cette salle qui s’opposent à la tarification du carbone et qui ne sont pas climato-sceptiques. La plupart des gens avec qui je fais affaire et qui s’opposent à la taxe sur le carbone cherchent des solutions qui n’alourdissent pas le fardeau des contribuables canadiens et qui permettent à notre économie de demeurer concurrentielle compte tenu de l'exode historique de capitaux de notre pays.
    J’espère que c’est perçu comme une gentille réprimande. Loin de moi l'idée de vous mettre dans l’embarras. Si nous voulons avoir des discussions civiles sur des questions graves dans ce pays, nous devons utiliser des termes respectueux, nous traiter mutuellement avec respect et ne pas nous dénigrer les uns les autres avec ce genre de terminologie.
    Je donne la parole à M. Bateman. Vous avez dit qu’il fallait mettre un prix sur les émissions de GES. Pour que ce soit bien clair, lorsque vous parlez de pollution, vous parlez d’une tarification du carbone, n’est-ce pas? Nous ne parlons pas de pollution en général. Nous ne parlons pas des SOx, des NOx, des COV et de tous les autres composés qui ont une incidence sur la santé humaine et qu’on appelle polluants, mais qui ne sont pas visés par la taxe sur le carbone qui vient d’être annoncée. Ai-je raison?

  (1605)  

    L’unité est un équivalent en dioxyde de carbone. Il comprend à la fois le dioxyde de carbone et d’autres gaz à effet de serre.
    D’accord, merci.
    Vous avez vu le plan qui a été annoncé hier. Cette taxe de 50 $ la tonne d’ici 2022 est-elle suffisante pour atteindre les objectifs de Paris?
    Est-ce la taxe sur le carburant dont vous...
    Non, je parle de la taxe qui a été annoncée hier pour les quatre provinces qui n’imposeront pas de taxe sur le carbone et auxquelles le premier ministre a maintenant choisi d’imposer une taxe sur le carbone.
    Est-ce que cela, combiné à toutes les autres taxes sur le carbone ou à la tarification du carbone à l’échelle du pays, sera suffisant pour que nous atteignions nos objectifs de Paris?
     C’est une question complexe. Je dirais que le cadre pancanadien vise à combiner un ensemble de mesures stratégiques, réglementaires et d’investissement afin d’atteindre cette réduction de 30 %. La tarification du carbone en est un élément important.
    La taxe sur le carburant, qui est l’élément fiscal de la série de mesures de tarification du carbone, crée un incitatif pour compenser pour certains des avantages les plus faciles à obtenir. S’il est moins coûteux pour un émetteur de ne pas émettre, il le fera. S’il est plus coûteux pour eux de payer la taxe, alors ils ne le feront pas.
    Permettez-moi de reformuler ma question. Ce ne sera pas spécifique à la taxe sur le carbone qui a été annoncée hier.
    En ce qui concerne le plan que le gouvernement a mis de l’avant et les éléments qu’il contient jusqu’à maintenant, ces éléments sont-ils suffisants pour que nous puissions atteindre nos objectifs de l’Accord de Paris?
    Je crois qu’ils en ont le potentiel, oui.
    Non, je ne parlais pas de potentiel. Serons-nous en mesure d’atteindre nos objectifs de Paris avec ce qui est en place actuellement?
    Je pense que vous connaissez la réponse. Je pense que vous êtes un peu évasif avec moi, mais allez-y.
    Allez-y, je vous prie.
    Dans la mesure où je peux prédire l’avenir, je pense que c'est du domaine du probable. C’est le plus proche d’un oui ou d’un non que je puisse vous donner.
    Savez-vous que le gouvernement a déposé auprès du GIEC, ou de la CCNUCC, des documents indiquant que nous allons être bien en deçà de nos objectifs?
    Il y a beaucoup de détails concernant la mise en oeuvre qui ne sont pas encore réglés— par exemple, les ITMO en vertu de l’article 6 de l’Accord de Paris...
    Je ne peux pas parler des ITMO. Je n’ai pas beaucoup de temps.
    Vous avez parlé des ITMO et cela m’intéresse beaucoup. Pourriez-vous nous dire très rapidement quelles sont les possibilités qui s’offrent au Canada, les possibilités les plus faciles à saisir en ce qui concerne les ITMO?
    Les entreprises canadiennes d’électricité renouvelable connaissent déjà du succès partout dans le monde et les ITMO fournissent un cadre que le gouvernement fédéral pourrait utiliser pour mobiliser et aider ces fournisseurs de technologie, financiers, ingénieurs et autres à être plus actifs à l’échelle mondiale.
    Merci.
    Monsieur Stetski, vous avez la parole.
    Merci d’être parmi nous aujourd’hui.
    J’ai une question pour le Conseil canadien sur l’électricité renouvelable. Je sais que vous vous intéressez surtout à l’électricité, mais avez-vous également examiné l’incidence de la construction de nouveaux oléoducs de pétrole brut sur la capacité d’atteindre nos cibles climatiques?
    Nous ne l’avons pas fait.
    Pour le Center for Clean Air Policy, je m’intéresse toujours à l'idée d'acheter des contreparties de la fixation du carbone. Je me demande si vous avez des exemples.
    Je pourrais peut-être poser la même question au Conseil canadien sur l’électricité renouvelable. Avez-vous pensé à des exemples pratiques d’achat de contreparties de la fixation du carbone qui ont permis d'améliorer la qualité de l’air? En avez-vous?
    Les contreparties de la fixation du carbone ne permettent pas nécessairement d'améliorer la qualité de l'air, parce que la qualité de l'air est attribuable à des polluants autres que le CO2 proprement dit; c'est donc fonction de la nature du projet.
    Au départ, le Center for Clean Air Policy a été créé pour conseiller les gouverneurs sur le système d’échange de droits d’émission de SO2 établi aux États-Unis il y a plus de 30 ans, et c’est la raison pour laquelle il s'appelait le Center for Clean Air Policy. Nous nous concentrons maintenant sur...

  (1610)  

    Vous n’êtes donc pas au courant des investissements, mais il y a des avantages.
    Il y a de nombreux exemples de projets de contrepartie de la fixation du carbone qui réduiront les émissions.
    Ces projets amélioreront-ils la qualité de l’air?
    J’essaie de penser à un projet. Essentiellement, chaque fois qu’on remplace une activité qui produit du CO2, mais qui implique aussi d’autres polluants... Si vous remplaciez, par exemple, une centrale électrique alimentée au charbon par une centrale de production d’énergie renouvelable, vous réduiriez probablement les émissions de CO2 et amélioreriez considérablement la qualité de l’air. Il y a de nombreux exemples. Je dirais que, bien souvent, il y aurait probablement ce double avantage, mais c’est un avantage qui est ciblé quand on parle d’échange de droits d’émission de carbone, et non pas un avantage direct.
    Au Conseil canadien, avez-vous pris connaissance de moyens particulièrement efficaces?
    En vertu du règlement sur les émetteurs de gaz spécifiés de l'Alberta, il y a plusieurs exemples de projets d’électricité renouvelable qui ont été conclus à la fois par les revenus de l’électricité commerciale et par des compensations avec les grands émetteurs.
    En Colombie-Britannique, lorsque la tarification du carbone est entrée en vigueur il y a 10 ans, en 2007, nous avons tous reçu un chèque du gouvernement par la poste en prévision de l’entrée en vigueur de la nouvelle taxe. En 2008, lorsque la taxe est entrée en vigueur, l’argent a été versé dans un fonds commun et divers organismes ont pu présenter aux responsables une demande de fonds pour investir dans des initiatives vertes.
    J’ai été maire de Cranbrook pendant trois ans et à un moment donné, nous avons reçu la permission de réinvestir les coûts de nos contreparties de carbone dans notre collectivité plutôt que de les payer à la province. Tant et aussi longtemps que nous dépensions le montant équivalent au profit de la collectivité, nous étions autorisés à le faire. Je pense qu’ils ont fini par verser cet argent dans les recettes générales, ce qui est la pire chose à faire avec une taxe ciblée.
    Avez-vous une opinion sur la meilleure façon de mettre en place une tarification du carbone, une tarification de la pollution?
    Il y a encore quelques essais et erreurs. Les systèmes ne sont pas encore tout à fait au point. Il y a des exemples au niveau provincial qui démontrent que le système peut fonctionner, comme en Colombie-Britannique. Vous avez cité cet exemple. Nous sommes encore en train de le concevoir au niveau national et d’essayer de remplacer ce qui n’existe pas au niveau provincial et de mettre en place des mesures rigoureuses.
    L’expérience est la clé du succès dans ce domaine. C’est vraiment la première fois que le Canada essaie de le faire à l’échelle nationale. C’est à peu près tout ce que nous avons entendu jusqu’ici.
    Il n’y a pas de modèle particulier que vous préféreriez.
    Pour compléter ce qu'a dit Anne-Raphaëlle, il y a diverses options pour le recyclage des revenus et elles répondent à des objectifs différents. Du point de vue de CanCORE, la chose la plus importante pour la tarification du carbone est un signal de prix clair qui fera en sorte qu'à long terme, les investissements passeront de la production avec émissions à la production sans émissions.
    Les revenus et ce qu’on peut en faire sont aussi un sujet de conversation important et bénéfique, mais le signal du prix est l’élément le plus important.
    J’aimerais simplement ajouter que la nouvelle usine de gaz naturel liquéfié de Shell en Colombie-Britannique constitue une référence mondiale dans le domaine des usines GNL. Aux oubliettes le charbon et les autres usines GNL dans le monde; cette usine produit 50 % moins d'émissions et pourtant la taxe sur le carbone et la politique sur les changements climatiques de la Colombie-Britannique découragent la construction de cette usine.
    Eh bien, il nous reste 17 minutes avant la sonnerie. Compte tenu de la façon dont nous divisons les choses, je ne suis pas sûr qu’il vaille la peine d’essayer d’ajouter autre chose, parce que ce sera vraiment serré.
    Là-dessus, encore une fois, merci beaucoup à nos témoins de leur souplesse, des témoignages qu’ils nous ont présentés et de la brève discussion que nous avons eue. La séance est levée pour aujourd’hui. Tout le monde peut retourner à l’étage. Nous reprendrons les travaux la semaine prochaine. Merci.
    La séance est levée.
Explorateur de la publication
Explorateur de la publication
ParlVU