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FAAE Rapport du Comité

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RÉPONSE COMPLÈTE DU GOUVERNEMENT DU CANADA AU QUINZIÈME RAPPORT DU COMITÉ PERMANENT DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES ET DU DÉVELOPPEMENT INTERNATIONAL INTITULÉ

UNE LUTTE MONDIALE : APPUYER LES MESURES CONTRE LE TRAFIC SEXUEL EN ASIE DU SUD

INTRODUCTION

Le gouvernement du Canada a étudié soigneusement le rapport du Comité permanent des affaires étrangères et du développement international et remercie ses membres de lui avoir donné la possibilité de participer aux audiences qui ont mené au dépôt de ce rapport. Le gouvernement du Canada apprécie l’attention considérable que les membres du Comité et du Sous-comité des droits internationaux de la personne ont accordée à ce dossier majeur. Il remercie également les personnes qui sont venues témoigner puisque leur expertise a permis de dresser un portait plus complet de la situation en Asie du Sud.

Le Sous-comité des droits internationaux de la personne (qui fait partie du Comité permanent des affaires étrangères et du développement international) a étudié la question de la traite des personnes à des fins d’exploitation sexuelle en Asie du Sud et a envisagé des moyens pour lutter contre ce crime (moyens que le gouvernement du Canada pourrait intégrer à ses initiatives régionales). Dans son rapport déposé le 15 février 2018, le Comité a formulé quatre grandes recommandations à l’intention du gouvernement : promouvoir la mise en œuvre, par les pays d’Asie du Sud, de la Convention des Nations Unies contre la corruption; accroître la collecte des données dans la région qui pourraient être utilisées dans le cadre d’enquêtes et de poursuites; faire de la réduction de la vulnérabilité à la traite des personnes à des fins d’exploitation sexuelle une priorité et un objectif précis du Canada dans le cadre de son aide internationale et de ses relations bilatérales en Asie du Sud; apporter un soutien aux organismes non gouvernementaux (ONG) qui s’emploient à prévenir la traite des personnes et à soutenir les survivants.

La traite des personnes, y compris à des fins d’exploitation sexuelle, est l’un des crimes les plus ignobles qui soient. On le décrit souvent comme une forme moderne d’esclavage. Ce crime est non seulement intolérable au sein de la société canadienne, il doit également être exposé et éradiqué de l’ensemble des sociétés où il se produit. Les survivants, pour la plupart des femmes et des enfants, sont arrachés à leur vie normale, et ils sont contraints de travailler ou d’offrir des services sexuels par le biais de diverses pratiques coercitives, le tout au profit direct de leurs bourreaux. L’exploitation se fait souvent par l’intimidation, la force, les agressions sexuelles ou les menaces de violence contre les victimes ou leurs familles. Les répercussions physiques et psychologiques sur les survivants de cette forme d’abus peuvent être traumatisantes, profondes et durables.

Les cadres actuels du Canada en matière de politiques, de défense des droits et de programmes sont bien placés pour s’attaquer aux problèmes de base susceptibles d’engendrer la traite de personnes, y compris à des fins d’exploitation sexuelle. La Politique d’aide internationale féministe engage le gouvernement du Canada à s’attaquer aux taux élevés de violence sexuelle et sexiste subie par les femmes et les filles. La traite et l’exploitation des femmes et des filles sont une manifestation particulièrement horrible de la violence sexuelle et sexiste, et le Canada peut contribuer aux efforts de prévention, soutenir les survivants et tenir responsables les auteurs de ces actes.  

Dans l’ensemble, le gouvernement du Canada accepte les recommandations du Comité. Il propose de les appréhender dans le cadre plus large du travail qu’il fait en matière de politiques, de défense des droits et de programmes. La présente réponse fournit un cadre cohérent d’outils en matière de politiques, de défense des droits et de programmes qui existent déjà – principalement au niveau multilatéral – pour contribuer à la lutte contre la traite des personnes à des fins d’exploitation sexuelle en Inde, aux Maldives, au Népal et au Bhoutan, et pour élaborer des programmes en vue de s’attaquer aux problèmes sous-jacents et à la violence sexuelle et sexiste (en mettant plus particulièrement l’accent sur le Bangladesh et le Sri Lanka, où le Canada a encore des programmes consacrés à l’aide internationale). Dans sa réponse, le gouvernement reconnaît également l’importance de travailler de manière plus globale pour s’attaquer aux problèmes sous-jacents susceptibles d’engendrer la traite des personnes, notamment en prenant des mesures visant à promouvoir les droits de la personne (y compris les droits en matière de santé sexuelle et génésique), à renforcer les programmes publics d’éducation et de santé, à appuyer les droits du travail, à améliorer l’accès aux possibilités économiques pour les femmes et à renforcer les capacités d’application de la loi et du système judiciaire. La réponse se concentre en outre sur la nécessité de combler les lacunes en matière de données et d’éléments de preuve avant d’aller de l’avant avec de nouveaux programmes importants.   

RECOMMANDATION 1 : Lutte contre la corruption dans les efforts d’éradication du trafic sexuel en Asie du Sud.

Que le gouvernement du Canada se serve de tous les moyens pour encourager les États sud-asiatiques à s’acquitter de leurs obligations conformément à la Convention des Nations Unies contre la corruption et à porter leur attention sur les conséquences de la corruption sur les initiatives nationales entreprises contre la traite des personnes.

RÉPONSE : Dans l’ensemble, le gouvernement du Canada est d’accord avec cette recommandation.

Affaires mondiales Canada (AMC) participe activement aux efforts déployés par la communauté internationale pour mettre fin à la traite des personnes (notamment à des fins d’exploitation sexuelle), principalement en participant à des forums internationaux et en apportant un soutien à des projets de renforcement des capacités et de l’aide internationale. Le Canada est un ardent partisan des processus régionaux et multilatéraux, comme ceux des Nations Unies, de l’Organisation des États américains, de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe, de l’Organisation mondiale du Travail, de la Conférence régionale sur les migrations (CRM - Amériques), du Pacte mondial sur la migration, du Pacte mondial sur les réfugiés et du Groupe de Rome-Lyon du G7. Au sein de ces forums, le Canada partage des stratégies et des pratiques exemplaires pour lutter contre la traite des personnes, il encourage l’utilisation des instruments juridiques internationaux et il appuie le travail sur les nouvelles tendances (comme la traite des personnes dans les chaines d’approvisionnement mondiales, le long des routes migratoires, dans les zones de conflit ou durant les crises humanitaires). Plus précisément, le Canada souligne que le Bangladesh, le Bhoutan et le Népal ne sont pas parties au Protocole visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants. Le gouvernement du Canada continuera de saisir les occasions d’engagement bilatéral et multilatéral afin de plaider en faveur de leur adhésion à cet important instrument international.  

Pour ce qui est de la mise en œuvre de la Convention des Nations Unies contre la corruption (CNUCC), le principal engagement du Ministère auprès des pays mentionnés dans le rapport se fait par l’entremise de la Conférence des États parties à la Convention des Nations Unies contre la corruption (organisée tous les deux ans) et aux réunions de ses organes subsidiaires (dont des groupes de travail sur des sujets spécialisés, qui se réunissent habituellement une fois par année).

Le Canada est déterminé à s’attaquer à la corruption dans le cadre de ce forum ainsi que dans d’autres. Nous faisons cela parce que la corruption, comme la traite de personnes, constitue un crime qui ne respecte pas les frontières. Pour interdire la corruption de part et d’autre des frontières internationales et mener des enquêtes à cet égard, nous devons également nous assurer que le cadre de coopération juridique internationale est robuste et efficace. La Convention des Nations Unies contre la corruption fournit cette base, et le Canada continue d’encourager tous les pays à ratifier et à mettre en œuvre cet instrument. Le Canada continuera également de plaider en faveur de l’examen des liens entre la corruption et d’autres crimes, notamment la traite de personnes, car une bonne partie de la traite de personnes à des fins d’exploitation sexuelle est aidée et encouragée par la corruption des personnes qui profitent du sort des femmes et des filles prises dans ce piège, ou qui ferment les yeux sur ce problème.    

Le Canada peut également être perçu comme appuyant indirectement la mise en œuvre de la Convention des Nations Unies contre la corruption avec un projet de 2017 évalué à 811 000 dollars du Programme d’aide au renforcement des capacités de lutte contre la criminalité, ainsi que par l’entremise du financement du travail du Mécanisme d’examen de la mise en œuvre de la Convention. Le Mécanisme est un processus d’examen par les pairs dans le cadre duquel des experts formulent des recommandations sur ce que certains États parties à la Convention devraient faire pour renforcer sa mise en œuvre. Ces examens comportent deux cycles afin de répartir le travail requis dans le temps. Le premier cycle consiste à examiner la mise en œuvre du chapitre III (Incrimination, détection et répression) de la Convention, y compris la criminalisation de la corruption des agents publics (comme les policiers et les douaniers) et du chapitre IV (Coopération internationale). Pour le premier cycle, le travail est terminé pour le Bangladesh, les Maldives, le Népal et le Sri Lanka, et il est en cours pour le Bhoutan et l’Inde. Le deuxième cycle, qui a commencé en 2016, consiste à examiner la mise en œuvre du chapitre II (Mesures préventives) et du chapitre V (Recouvrement d’avoirs). Au moment de la rédaction de la présente réponse, aucun examen prévu dans le cadre du deuxième cycle n’était terminé pour les pays mentionnés dans le rapport. Un tirage permet de déterminer à quel moment ces examens sont réalisés. En avril 2018, seuls les examens du Sri Lanka et du Népal avaient commencé dans le cadre du deuxième cycle. L’examen des Maldives doit commencer à la mi-2018 et l’examen des pays restants (mentionnés dans le rapport) commencera à la mi-2020.

Plus globalement, le gouvernement du Canada continuera de souligner l’importance de la lutte contre la traite des personnes (y compris à des fins d’exploitation sexuelle) – par voie diplomatique et dans le cadre de ses efforts de défense des droits de la personne, particulièrement dans les pays de l’Asie du Sud où les violations de ces droits sont particulièrement graves. Il s’agira notamment d’interactions bilatérales avec des gouvernements étrangers, de la coordination des initiatives de défense des droits de la personne et de collecte d’information avec des missions de pays aux vues semblables à celles du Canada, de la mobilisation d’acteurs de la société civile qui se consacrent à la lutte contre la traite des personnes et à des enjeux connexes, et de la défense des droits de la personne dans le cadre de forums multilatéraux pertinents comme l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe, le Processus de Bali et le processus de l’Examen périodique universel réalisé par le Conseil des droits de l’homme des Nations Unies. Sur la scène internationale, le gouvernement du Canada recommande de catalyser les ressources pour mettre fin à toutes les formes de violence contre les enfants, y compris la traite des personnes. C’est d’ailleurs un rôle que la ministre du Développement international et de la Francophonie a joué en participant au conseil fondateur du Partenariat mondial pour mettre fin à la violence envers les enfants.

RECOMMANDATION 2 : Renforcement de la collecte de données et de la capacité de détection pour assurer la traduction en justice des responsables et la protection des survivants.

Que le gouvernement du Canada appuie concrètement les efforts déployés à l’échelle régionale pour recueillir des preuves et des renseignements sur la nature du trafic sexuel dans l’ensemble de l’Asie du Sud, et que l’accent soit mis sur le soutien des enquêtes et des poursuites à l’égard des responsables du trafic sexuel et sur la protection des victimes et des survivants.

RÉPONSE : Le gouvernement du Canada étudiera attentivement cette recommandation au moment où les décisions seront prises sur de possibles niveaux de financement, s’il y a lieu.

Le cadre du Programme d’aide au renforcement des capacités de lutte contre la criminalité (PARCLC) d’Affaires mondiales Canada est bien placé pour aider à combler le manque de données et à régler d’autres problèmes similaires associés à la traite des personnes à des fins d’exploitation sexuelle, dans la mesure où du financement est alloué pour surmonter cet enjeu et d’autres enjeux liés à la lutte contre la criminalité qu’il permet d’aborder.

L’objectif du PARCLC est de mettre en œuvre des initiatives de renforcement des capacités pour soutenir les pays ayant besoin d’aide dans leur lutte contre le crime organisé transnational, notamment la traite des personnes. Même si le PARCLC permet la mise en œuvre de programmes à l’échelle internationale, ses initiatives se concentrent pour le moment sur les Amériques. La traite des personnes et le passage de clandestins représentent l’une des six priorités thématiques du PARCLC. Ce dernier administre aussi les contributions volontaires annuelles du Canada à l’Organisation des États américains (OEA) et à l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (UNUDC), qui s’emploient à lutter contre la traite des personnes et la corruption.

Grâce à une allocation annuelle de 15 millions de dollars en financement de base provenant de l’enveloppe de l’aide internationale, l’aide du PARCLC en matière de renforcement des capacités est fournie par les ministères et organismes gouvernementaux canadiens ainsi que par des partenariats avec des organisations internationales, de proches alliés et des organismes non gouvernementaux. L’aide en matière de renforcement des capacités s’est révélée être un moyen flexible, adapté et rentable de s’attaquer aux menaces criminelles dans les pays d’origine et de transit. Le PARCLC n’a pas octroyé de financement pour des projets visant précisément à lutter contre la traite des personnes dans les pays concernés par le rapport du Comité. Cependant, à ce jour, certains grands projets de renforcement des capacités en matière de lutte contre le crime transnational financés par le PARCLC en Asie du Sud-Est (p. ex. Cambodge, Thaïlande, Malaisie et Myanmar) comportaient des sous-activités axées sur la lutte contre la traite des personnes. Les modalités du PARCLC permettent le financement de projets visant à lutter contre la traite des personnes, y compris à des fins d’exploitation sexuelle. Informé des conclusions du rapport du Comité, le PARLC restera à l’affût des possibilités viables de faire progresser cet aspect du programme de lutte contre la traite de personnes.

Compte tenu de l’apport du PARCLC dans la lutte contre la traite des personnes à l’échelle mondiale, Affaires mondiales Canada fait également rapport sur le nombre de personnes (selon le sexe et l’âge) qui sont victimes de la traite de personnes à l’échelle internationale, au moyen de renseignements compris dans le Rapport mondial de l’ONUDC sur la traite des personnes. Le gouvernement du Canada continue d’appuyer le renforcement de la collecte des données et la collaboration au sein des organisations internationales responsables de la collecte et de la communication des données concernant la traite des personnes, ainsi que le renforcement des capacités de partenaires de l’Asie du Sud, si possible, grâce aux mécanismes de sensibilisation et des programmes multilatéraux. De telles mesures supplémentaires en matière de collecte, d’analyse et de communication de données seront nécessaires afin de mieux éclairer les décisions prises en matière de programmes, et ce, afin de lutter contre un crime en grande partie caché. La GRC, en tant que service de police national du Canada, continuera de partager des renseignements avec les autorités policières étrangères approuvées, conformément à son mandat de lutte contre le crime transnational.

RECOMMANDATION 3 : Intégration de la prévention du trafic sexuel aux objectifs de développement et aux priorités des relations bilatérales dans la région.

Que le gouvernement du Canada fasse de la réduction de la vulnérabilité des femmes et des filles à la traite des personnes – et au trafic sexuel à des fins commerciales en particulier – un objectif explicite dans ses relations bilatérales avec les pays de la région et un indicateur servant à évaluer ses politiques et programmes d’aide internationale.

RÉPONSE : De façon générale, le gouvernement du Canada est d’accord avec cette recommandation de réduire la vulnérabilité des femmes et des filles à la traite des personnes, y compris à des fins d’exploitation sexuelle. Le gouvernement du Canada propose de donner suite à cette importante recommandation principalement en continuant de participer à la résolution des problèmes fondamentaux qui favorisent la prévalence de la traite des personnes en Asie du Sud, ainsi que par l’entremise de son approche globale visant à lutter contre la violence sexuelle et sexiste (VSS).

À la suite de vastes consultations transversales menées en préparation au lancement de sa politique d’aide internationale, le gouvernement du Canada a annoncé sa politique d’aide internationale féministe le 9 juin 2017. Le principal domaine d’action de la nouvelle politique est l’égalité des genres et le renforcement du pouvoir des femmes et des filles, ce qui comprend la lutte contre la VSS. Les autres domaines d’action (comme la dignité humaine, la croissance qui profite à tout le monde, les mesures relatives à l’environnement et au changement climatique, la gouvernance inclusive et la paix et la sécurité) comprennent aussi des mesures pour faire face à l’inégalité entre les genres, à l’exclusion, à la vulnérabilité et à la VSS.   

L’aide internationale du Canada contribue à la réduction de la vulnérabilité des femmes et des filles à la traite des personnes à des fins d’exploitation sexuelle dans la région principalement en s’attaquant aux enjeux sous-jacents et en luttant contre la VSS. La pauvreté, l’inégalité, l’absence de responsabilisation et de respect pour les droits de la personne, l’insuffisance des protections sociales et le manque de possibilités figurent parmi les causes profondes de la traite des personnes, augmentant ainsi les risques que les femmes, les enfants et les jeunes se fassent exploiter par les auteurs de ce crime. Dans l’ensemble, l’aide internationale du Canada permet de réduire ce risque notamment en faisant la promotion des droits de la personne, en renforçant les systèmes publics de santé, d’éducation et de protection de l’enfance, en appuyant les droits des travailleurs, les mesures de protection sociale et l’accès aux débouchés économiques pour les femmes et en améliorant les capacités au chapitre de l’application de la loi et du système de justice.

Par ailleurs, la Politique d’aide internationale féministe du Canada vise précisément à s’attaquer aux taux élevés de VSS, y compris la traite des personnes et l’exploitation. Son approche globale comprend des efforts de prévention, des services offerts aux survivants et la responsabilisation des auteurs afin d’aider à mettre fin à ces formes de violence. La lutte contre la VSS est un élément clé de l’initiative du Canada Sa voix, son choix, qui a été annoncée en 2017 et qui consacre 650 millions de dollars sur trois ans pour financer des programmes globaux en matière de santé sexuelle et génésique et de droits connexes. Par exemple, dans le cadre de cette initiative, les programmes-pays de lutte contre la VSS ont été approuvés pour le Bangladesh et le Sri Lanka. Cela comprend une initiative visant à accroître les services de protection et les mécanismes d’adaptation pour les femmes et les filles à Cox’s Bazar (au Bangladesh), en réponse à la crise des réfugiés rohingyas en cours, car l’absence de soutien économique et familial pour les femmes et les filles dans les camps les rend extrêmement vulnérables à la traite de personnes. En outre, le Canada collabore avec le gouvernement du Bangladesh et ses partenaires de la société civile afin de promouvoir et de protéger les droits des travailleuses domestiques au Bangladesh, compte tenu des risques de violence, d’exploitation et d’abus auxquels elles sont exposées.

Le programme Voix et leadership des femmes du Canada consacrera 150 millions de dollars sur cinq ans au soutien des organisations féminines locales afin de renforcer le pouvoir des femmes et des filles et de défendre leurs droits. Il s’occupera des enjeux et des secteurs qui figurent parmi les grandes priorités recensées par les organisations féminines locales et qui pourraient comprendre la question de la lutte contre la VSS et le fait d’aborder d’autres problèmes liés aux droits des femmes et des filles et au renforcement de leur pouvoir de manière à réduire leur vulnérabilité à la traite des personnes. Les pays de la région de l’Asie du Sud où Affaires mondiales Canada dispose de ressources en matière de développement sont admissibles aux initiatives prévues dans le cadre de ce programme. Le Ministère travaillera avec ses réseaux de la société civile afin d’encourager les organisations féminines locales qui font avancer l’égalité des genres à s’inscrire afin d’obtenir du financement dans les pays où les projets du programme Voix et leadership des femmes sont actuellement mis en œuvre.

Outre la lutte contre la VSS, les programmes d’aide internationale spécialisés du Canada au Bangladesh et au Sri Lanka contribuent par d’autres moyens à la réduction de la vulnérabilité des femmes et des filles à la traite des personnes. Par exemple, les responsables des deux programmes bilatéraux effectuent des investissements afin de soutenir les moyens de subsistance des femmes. Au Sri Lanka, des programmes fournissent aux jeunes femmes les compétences nécessaires à la formation professionnelle et appuient l’accès des femmes aux services financiers. Au Bangladesh, des projets aident à renforcer les mesures de protection des travailleurs et fournissent de la formation professionnelle aux femmes. Ces mesures d’aide sont accompagnées de programmes visant à améliorer l’accès des femmes et des enfants à des services de santé et à une éducation de qualité. Le Canada contribue également à réduire la vulnérabilité à la traite des personnes et à la VSS grâce au soutien institutionnel qu’il accorde à des organisations multilatérales comme le Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP), le Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF) et le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), qui sont toutes actives dans la région de l’Asie du Sud.

En ce qui concerne les recommandations du Comité sur les indicateurs, le gouvernement du Canada a choisi certains indicateurs servant à faire le suivi des progrès réalisés pour mettre en œuvre la Politique d’aide internationale féministe. Une composante clé de cette dernière consiste à contribuer aux efforts visant à mettre fin aux taux élevés de VSS que subissent les femmes et les filles, ce qui comprend la lutte contre la traite des personnes et l’exploitation; la violence familiale; la violence entre conjoints; les mariages d’enfants, mariages précoces et mariages forcés; et la mutilation génitale féminine. Par conséquent, Affaires mondiales Canada assure le suivi du nombre de personnes qu’il touche au moyen de ses projets qui aident à prévenir la VSS, à intervenir dans les cas de VSS et à y mettre fin. Le Ministère évalue actuellement la manière dont les données, qui font écho aux différentes formes de VSS, seront compilées aux fins de reddition de compte sur cet indicateur.

Un mécanisme distinct, le Fonds canadien d’initiatives locales (FCIL), permet aux missions d’appuyer des projets à petite échelle et à court terme, dont ceux qui portent sur la lutte contre la traite des personnes et les programmes connexes, souvent mis en œuvre de concert avec leurs politiques et travaux de défense des droits. Ce mécanisme est particulièrement utile dans les pays où Affaires mondiales Canada n’offre pas de programmes d’aide internationale spécialisés (p. ex. Bhoutan, Inde, Maldives et Népal). Le FCIL est un programme de contribution qui verse annuellement 14,7 millions de dollars aux pays admissibles à l’aide publique au développement selon le Comité d’aide au développement de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE). La valeur des projets du FCIL s’élève en moyenne à quelque 25 000 dollars chacun, et peut atteindre un maximum de 100 000 dollars; la majorité du financement du FCIL est aiguillé vers des organisations locales de la société civile. Les modalités du FCIL exigent que les projets cadrent avec les priorités du Canada en matière d’aide internationale.

Depuis 2012, on a mis en œuvre grâce au FCIL six projets dont la valeur totale était de 172 000 dollars et qui portaient sur la lutte contre la traite des personnes au Bangladesh, en Inde et au Népal. Ils étaient axés sur le renforcement des mécanismes de poursuite à l’égard des crimes liés à la traite; la prévention de la prostitution intergénérationnelle et de la traite des personnes; la prestation d’un soutien aux survivants de la traite des personnes; et le renforcement des capacités des organisations locales de défense des droits de la personne et des communautés locales de prévenir la VSS et la traite des personnes. Un projet de 2017 mis en œuvre dans le district de Kanchanpur dans l’ouest du Népal a abordé les questions de la traite de personnes grâce à une campagne de sensibilisation, à un soutien aux survivants, à l’amélioration de la surveillance aux frontières et au renforcement des capacités pour cinq comités de villages. Les missions du Canada en Asie du Sud soutiennent également d’autres projets liés à la traite des personnes, y compris ceux liés au renforcement du pouvoir économique et politique des femmes et à la lutte contre les mariages d’enfants, les mariages précoces et les mariages forcés ainsi que la VSS. Étant donné qu’il s’agit d’un programme décentralisé, la sélection annuelle des projets et le choix des priorités thématiques particulières à cibler sont déterminés à l’échelle des missions, en fonction des résultats d’une analyse du contexte local.

RECOMMANDATION 4 : Offre d’un soutien concret aux ONG qui luttent contre le trafic sexuel et participent à la réadaptation des survivants.

Que le gouvernement du Canada accorde en priorité, dans le cadre de ses programmes d’aide internationale, son soutien aux organismes non gouvernementaux qui se consacrent à la prévention du trafic sexuel et à la réadaptation des survivants en Asie du Sud. Le gouvernement du Canada devrait également encourager les organismes qui possèdent l’expertise voulue à étendre leurs programmes de prévention du trafic sexuel et de réadaptation des victimes et des survivants.

RÉPONSE : Le gouvernement du Canada est généralement en accord avec cette recommandation.

À l’heure actuelle, le gouvernement du Canada fournit son aide internationale en grande partie par l’intermédiaire d’ONG canadiens, internationaux et locaux de grande importance. Dans ce contexte et dans la mesure du possible, il  verse un soutien financier et technique aux ONG qui travaillent à l’élimination de la violence sexuelle et sexiste (VSS), y compris la traite des personnes à des fins d’exploitation sexuelle. Afin de veiller à la pertinence et à l’efficacité de ce financement, le soutien accordé par le Canada repose sur les priorités relatives à la lutte contre la VSS, déterminées par les ONG locaux eux-mêmes. Par ailleurs, le gouvernement du Canada collabore de près avec ses réseaux de la société civile pour recueillir des renseignements sur les principaux enjeux liés aux droits de la personne, y compris la traite des personnes, afin d’orienter ses propres stratégies de défense des droits. En outre, le Canada ne cesse de défendre l’espace accordé à la société civile dans la région afin que les militants et les organisations, y compris les ONG, puissent mener leurs activités sans se heurter à l’intimidation ou à des restrictions inutiles. Cette démarche consiste donc essentiellement à rendre l’environnement opérationnel plus favorable pour les ONG locaux qui travaillent à l’élimination de la traite des personnes aux fins de l’exploitation sexuelle.

Plusieurs mécanismes s’offrent aux ONG souhaitant obtenir un soutien pour leurs efforts en vue d’éliminer la VSS. Affaires mondiales Canada diffuse régulièrement des appels de propositions visant à ce que les ONG canadiens travaillent en partenariat avec des ONG locaux dans les pays admissibles à l’aide publique au développement. Par exemple, l’appel de propositions préliminaires Partenariats pour sa voix, son choix a été diffusé le 16 mars 2018. La lutte contre la VSS était l’un des domaines prioritaires pour cet appel et les pays d’Asie du Sud étaient admissibles. En outre, le premier appel de propositions préliminaires dans le cadre de l’initiative Petites et moyennes organisations canadiennes pour l’impact et l’innovation (qui fournira 100 millions de dollars sur cinq ans à de petites et moyennes organisations de la société civile canadienne) a été lancé en novembre 2017. Dans le cadre de cet appel, les propositions préliminaires étaient nécessaires pour contribuer à l’atteinte des objectifs de la Politique d’aide internationale féministe du Canada et correspondre à au moins l’un des six domaines d’action de cette dernière; on a encouragé les propositions de projets en Asie du Sud.

Le programme Voix et leadership des femmes (voir la réponse à la recommandation 3) constitue un autre mécanisme visant expressément les organisations de la société civile locale. Il appuiera les enjeux et les secteurs désignés comme priorités clés par les organisations locales de défense des droits des femmes, ce qui pourrait comprendre la lutte contre la traite de personnes à des fins d’exploitation sexuelle. De plus, il fournira un soutien financier et technique aux organisations de défense des droits des femmes afin de renforcer leurs efforts de défense, leur prestation de services, leur gestion, leurs réseaux et leur viabilité financière. Les pays de la région de l’Asie du Sud où Affaires mondiales Canada dispose de ressources en matière de développement sont admissibles aux initiatives prévues au titre de ce programme.

Le Fonds canadien d’initiatives locales (voir la réponse à la recommandation 3) permet aussi aux missions de la région de l’Asie du Sud de financer des projets de petite envergure et de courte durée, y compris ceux qui appuient les activités menées par des ONG en vue d’éliminer la traite des personnes et les problèmes connexes.

Les cadres actuels du Canada en matière de politiques, de défense des droits et de programmes sont bien placés pour s’attaquer aux problèmes susceptibles d’engendrer la traite de personnes, y compris à des fins d’exploitation sexuelle. Pour favoriser les propositions de projets les plus méritoires en Asie du Sud qui visent à aborder la question précise de la traite de personnes aux fins de l’exploitation sexuelle dans le cadre de ces efforts plus vastes, la réponse du gouvernement sera communiquée aux missions du Canada en Asie du Sud avec le message connexe visant à s’assurer que les représentants restent à l’affût des possibilités viables d’engager un dialogue avec les ONG locaux actifs sur le terrain sur cette question.

Bien que le gouvernement du Canada convienne du fait que l’aide internationale du Canada peut et devrait contribuer à la réduction de la vulnérabilité à la traite des personnes, l’ampleur et l’étendue de la pauvreté, de l’inégalité et du manque de possibilités dans la région exigent des ressources qui dépassent de loin celles que les pays donateurs peuvent offrir à eux seuls. La plupart des grands efforts pour mettre fin à la traite des personnes, y compris à des fins d’exploitation sexuelle, doivent être menés par les gouvernements nationaux, en partenariat avec le secteur privé et la société civile des pays. Cela est tout particulièrement vrai dans le cas des pays qui dépendent dans une moins grande mesure de l’aide internationale. Parmi les pays d’Asie du Sud faisant l’objet du rapport du Comité, le Canada a des programmes d’aide internationale spécialisés seulement avec le Bangladesh et le Sri Lanka; en effet, l’Inde a mis fin à ses partenariats d’aide de gouvernement à gouvernement en 2006, et le Canada n’a actuellement aucun programme d’aide internationale au Bhoutan, aux Maldives ou au Népal.

CONCLUSION

La traite des personnes, dont celle effectuée aux fins de l’exploitation sexuelle, constitue un crime odieux. Elle a des effets dévastateurs sur les survivants, qui en subissent des conséquences psychologiques et physiques toute leur vie. Comme le Comité l’a habilement démontré par son travail, le fait d’informer le public et de jeter un meilleur éclairage sur les activités clandestines constituent une première étape importante dans la lutte visant à mettre fin à la traite des personnes.

Évidemment, d’autres mesures doivent être prises pour éliminer ce crime caché en grande partie. Les gouvernements ne peuvent pas agir seuls. La collaboration et l’aiguillage entre les services clés, allant de l’application de la loi aux travailleurs du domaine de la santé, aux enseignants, aux employeurs et aux travailleurs sociaux, de concert avec des organismes non gouvernementaux dévoués à cette cause, peuvent changer les choses. La lutte contre la traite des personnes demeurera une priorité pour le Canada, qui restera à l’affût des possibilités viables de faire progresser ce programme dans les pays d’Asie du Sud. Grâce à ses relations bilatérales, le Canada plaidera pour que les gouvernements nationaux en fassent plus pour lutter contre la traite des personnes.