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FINA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent des finances


NUMÉRO 149 
l
1re SESSION 
l
42e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 1er mai 2018

[Enregistrement électronique]

  (1535)  

[Traduction]

     La séance est ouverte.
    Nous recevons cet après-midi des témoins dans le cadre de notre étude du projet de loi C-74, soit la loi d'exécution du budget — pour simplifier les choses —, qui porte sur le budget du 27 février 2018.
    Nous allons d'abord entendre les témoins qui sont parmi nous, en commençant par vous, monsieur Macdonald, pour le compte du Centre canadien de politiques alternatives.
     Merci, monsieur Easter, et merci aux membres du Comité de m'avoir invité à vous parler aujourd'hui du projet de loi C-74.
    Dans l'ensemble, je crois qu'il s'agit d'un budget positif, et le projet de loi d'exécution du budget prévoit des mesures que le Centre canadien de politiques alternatives préconise depuis plusieurs années dans le cadre de son alternative budgétaire pour le gouvernement fédéral.
    En particulier, l'analyse comparative entre les sexes a été un ajout judicieux et important au processus budgétaire, mais dans le peu de temps dont je dispose aujourd'hui, j'aimerais m'attarder sur deux éléments: la nouvelle Allocation canadienne pour les travailleurs et l'élimination des échappatoires fiscales utilisées par un petit nombre de sociétés privées.
    En ce qui concerne la Prestation fiscale pour le revenu de travail, qui a été transformée en l'Allocation canadienne pour les travailleurs, je me réjouis de voir que le budget permettra de tirer environ 70 000 Canadiens de la pauvreté grâce à cette mesure. Je crois que cette démarche s'inscrit dans le prolongement d'autres mesures, dont l'Allocation canadienne pour enfants et le Supplément de revenu garanti, qui, une fois mis en oeuvre dans leur intégralité, aideront près de 500 000 Canadiens à sortir de la pauvreté, sans toutefois perdre de vue qu'entre 3 et 5 millions de Canadiens vivent dans la pauvreté, selon l'année et les mesures utilisées. Il y a donc beaucoup de travail à faire.
    L'élimination de la pauvreté au Canada demeure un objectif important et valable. Il faut déterminer les répercussions des mesures prises à cet égard, et un tel suivi devrait faire partie des rapports budgétaires, comme c'était le cas pour la Prestation fiscale pour le revenu de travail, mais ce n'est pas toujours ce qui se passe.
    Je crois que la fonction d'inscription automatique à l'Allocation canadienne pour les travailleurs est une modification cruciale, quoique sous-estimée, dans le cadre de ce programme. Cette modification apparemment anodine représente un principe très important, et c'est loin d'être un attribut universel des prestations fédérales. J'espère que le Comité conviendra que l'inscription automatique devrait être prévue dans tous les programmes de transferts fédéraux, et pas seulement dans l'Allocation canadienne pour les travailleurs.
     On ne devrait pas avoir à faire une demande de transferts, étant donné que, pour beaucoup de personnes, la seule exigence est un revenu insuffisant, et l'ARC connaît souvent déjà cette information. J'encourage le Comité à mener une enquête sur n'importe quel programme fédéral de transferts ou de prestations dont le taux de participation n'est pas de 100 % et à déterminer comment faire pour y arriver. On pourrait commencer par l'Allocation canadienne pour enfants, qui n'est pas offerte de façon universelle aux familles à faible revenu dans les collectivités des Premières Nations en raison des faibles taux de déclaration de revenus dans les réserves.
    En ce qui a trait à l'Allocation canadienne pour les travailleurs, le seul point qui me préoccupe, c'est la distinction potentiellement dangereuse entre les « pauvres méritants » et les « pauvres non méritants ». À l'heure actuelle, le soutien aux familles à faible revenu n'est pas universel. Seules les familles qui travaillent ou qui ont des enfants ou qui sont des personnes âgées « méritent » un soutien. Si vous ne pouvez pas travailler, vous n'aurez droit à aucun soutien fédéral. Le seul appui qu'une famille recevrait par l'entremise du régime fiscal, c'est le crédit pour TPS, qui vaut tout au plus un peu moins de 300 $ par personne.
    Un des groupes qui passent entre les mailles du filet est celui des 50 à 65 ans qui n'ont plus d'enfants et qui vivent seuls ou en couple. Ils ne bénéficient pas de l'Allocation canadienne pour enfants, car leurs enfants ont quitté le foyer, et ils ne reçoivent pas non plus de prestations pour aînés, car ils ne sont pas assez vieux. La pauvreté dans ce groupe est attribuable aux taux élevés d'invalidité qui montent en flèche dans ce groupe d'âge, soit parce que ces gens ont travaillé dur et ont fini par se blesser, d'où leur incapacité de travailler, soit parce qu'ils doivent prendre soin d'un conjoint qui ne peut plus travailler. Souvent, le sort de ces familles s'améliore grandement dès que les personnes atteignent l'âge de 65 ans et ont accès à d'importants programmes, comme la Sécurité de la vieillesse et le Supplément de revenu garanti, mais entretemps, ces Canadiens se retrouvent souvent à l'aide sociale, et ce, à des taux qui sont souvent inadéquats dans la plupart des provinces.
    Dans notre alternative budgétaire pour le gouvernement fédéral, nous avons examiné la possibilité d'élargir la portée du crédit pour TPS et de créer un complément au crédit pour TPS pour appuyer les Canadiens à très faible revenu et venir en aide à ce groupe important qui est actuellement laissé pour compte. Le complément pourrait atteindre une valeur de 1 800 $ par personne, mais ce montant serait réduit plus rapidement que le crédit pour TPS afin de cibler les familles à très faible revenu. J'invite d'ailleurs les députés à lire une analyse plus détaillée dans notre rapport sur l'alternative budgétaire pour le gouvernement fédéral.
    En ce qui concerne les mesures prévues cette année pour éliminer les échappatoires fiscales dont profitent les sociétés privées, à savoir la répartition du revenu et la détention de placements passifs, je tiens à exprimer mon appui à cet égard, comme je l'ai fait dans le passé. Je crois qu'il existe des répercussions évidentes en matière d'équité, en ce sens que les particuliers bien nantis qui sont payés selon diverses méthodes particulières pourraient réduire leurs impôts, contrairement aux salariés ordinaires, qui finiraient par payer la note au moyen des impôts versés pour les services gouvernementaux dont nous bénéficions tous.
     Il est clair que ces abus se limitaient à un petit groupe de sociétés privées, incluant une poignée de petite entreprises qui étaient en cause, même si je ne vois guère de raison économique pour justifier la réduction du taux d'imposition des petites entreprises en guise d'une indemnisation quelconque. Le taux d'imposition des petites entreprises est établi pour une raison: encourager le réinvestissement des profits dans l'entreprise plutôt que leur retrait par les propriétaires.
     Ni la répartition du revenu ni la détention de revenus passifs dans des sociétés privées n'a quelque chose à voir avec le réinvestissement dans l'entreprise; ce ne sont que des moyens de réduire les impôts des particuliers. À ce titre, leur élimination aurait peu d'incidence sur les décisions des entreprises de réinvestir leurs profits. Au contraire, la disparité désormais plus grande entre le taux d'imposition des petites entreprises et le taux général d'imposition des sociétés risque d'encourager davantage d'autres formes de planification fiscale abusive, comme celles qui viennent d'être abolies.
    De façon plus générale, j'espère que le Comité mettra l'accent sur les échappatoires fiscales, non seulement en ce qui concerne les sociétés privées, mais aussi dans le cadre d'un examen plus approfondi des dépenses fiscales. J'espère aussi que le Comité continuera d'étudier la question de savoir qui profite des dépenses fiscales et d'évaluer les dépenses fiscales comme s'il s'agissait de dépenses de programme devant être soumises au même type d'analyse. De plus, il faut examiner l'analyse de l'impact distributif des dépenses fiscales dans le but d'éliminer ces dépenses fiscales et de recueillir plus de fonds pour d'autres programmes et d'autres services publics.
    Je remercie les députés de leur temps et j'ai hâte de répondre aux questions.
    Merci beaucoup, monsieur Macdonald.
    Nous passons maintenant à M. Russell, président et chef de la direction, Association canadienne du commerce des valeurs mobilières.
    Merci, monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du Comité. Je suis heureux de témoigner devant vous cet après-midi.

[Français]

     Je vous suis reconnaissant de m'avoir invité à présenter au Comité le point de vue de l'Association canadienne du commerce des valeurs mobilière, l'ACCVM, sur le projet de loi C-74, Loi portant exécution de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 27 février 2018 et mettant en oeuvre d'autres mesures.
    Je vais concentrer mes remarques sur la première partie du projet de loi, et plus particulièrement sur les dispositions qui ont trait au revenu passif d'investissement, au remboursement des impôts sur les revenus de placements et au saupoudrage des revenus.
    Nos remarques couvrent principalement l'impact des propositions d'imposition des entreprises privées sur le processus de formation du capital en ce qui a trait aux petites entreprises tout juste créées ou qui en sont au début de leur croissance. Des changements budgétaires récents liés aux propositions d'imposition ont donné aux petites entreprises qui y sont admissibles à des déductions grâce à leur statut une plus grande flexibilité et une meilleure vision de la gestion de leurs investissements financiers.
    Toutefois, les entreprises privées ne sont toujours pas encouragées à construire des actifs financiers et à s'engager dans le financement des besoins des petites entreprises et des activités des banques d'affaires.

  (1540)  

[Traduction]

    Selon la première mesure prévue dans le cadre des propositions fiscales, l'accès à la déduction fiscale pour les petites entreprises — à savoir, l'admissibilité à un taux d'imposition préférentiel de 10 % sur la première tranche de 500 000 $ du revenu admissible provenant d'une entreprise exploitée activement — sera éliminé progressivement pour les sociétés privées sous contrôle canadien et leurs sociétés associées qui dépassent le seuil de 50 000 $ en revenu de placement passif au cours de l'année d'imposition. Cela se fera selon une échelle mobile qui réduira la déduction accordée aux petites entreprises de 1 $ pour chaque 5 $ de revenu d'activité.
    Ce mécanisme d'élimination progressive limite complètement l'accès au taux d'imposition des petites entreprises une fois que le seuil de revenu passif atteint 150 000 $ par année. Bien que cette approche soit plus simple que les versions précédentes, de nombreuses sociétés ne sont pas admissibles au taux d'imposition préférentiel, à moins d'avoir un revenu passif inférieur au seuil de 50 000 $, ce qui pénalise injustement les propriétaires de petites entreprises en limitant le montant des investissements passifs qu'ils peuvent détenir pour faire face aux imprévus, acheter des actifs ou des biens d'entreprise et étendre leurs activités commerciales.
    La deuxième mesure limite les impôts remboursables que les sociétés privées reçoivent sur le montant de certains dividendes. En vertu de la politique actuelle, les sociétés privées qui sont admissibles au taux d'imposition préférentiel ou les entreprises imposées au taux général d'imposition des sociétés ont droit à un remboursement de l'impôt payé sur les dividendes provenant de revenus de placements passifs. Toutefois, les dispositions budgétaires limitent le remboursement d'impôt pour les dividendes non admissibles tirés de revenus passifs. Même si les nouvelles propositions constituent une amélioration, cette approche alourdira le fardeau administratif des petites entreprises qui seront désormais tenues d'établir des comptes distincts pour les dividendes admissibles et non admissibles.
    Nous exhortons le gouvernement à ne pas donner suite aux propositions fiscales concernant les revenus de placements passifs. Selon les estimations du gouvernement, ces propositions toucheront moins de 3 % de sociétés privées, soit environ 50 000 sociétés. Toutefois, nous n'avons pratiquement aucune idée de l'importance de ces sociétés pour l'économie canadienne. Elles pourraient être parmi les plus grandes et les plus dynamiques au pays. À notre avis, si le gouvernement décide d'aller de l'avant, les portefeuilles de revenus passifs devraient être protégés pour déterminer l'admissibilité à la déduction accordée aux petites entreprises, et l'échelle mobile devrait être indexée selon l'inflation.
    La troisième mesure concerne les règles sur le fractionnement du revenu. Nous croyons, dans ce cas-ci, que le gouvernement devrait envisager d'autres modifications aux règles ou, à tout le moins, retarder leur mise en oeuvre pour clarifier davantage les règles et laisser aux petites entreprises le temps de s'y conformer.
    Certains aspects des règles sur le fractionnement du revenu sont compliqués.

[Français]

     Les ajustements substantiels qui ont été faits aux propositions d'imposition des entreprises privées illustrent le fait que les nouvelles règles ont été introduites trop rapidement sans analyse préalable suffisante. Si le gouvernement met en avant ces nouvelles règles d'imposition modifiées, nous lui recommandons de surveiller de près l'incidence qu'elles auront sur l'expansion des entreprises privées actuellement en croissance et sur la migration de leurs affaires vers les États-Unis. Le Canada peut difficilement se permettre de perdre du capital disponible pour les petites et moyennes entreprises.
    Je vous remercie beaucoup de votre attention.

  (1545)  

[Traduction]

    Merci beaucoup, monsieur Russell.
    Nous passons maintenant à la Société canadienne du cancer, représentée par M. Cunningham, analyste principal des politiques.
    Allez-y, Rob.

[Français]

    Je vous remercie de me donner l'occasion de témoigner aujourd'hui.

[Traduction]

    Mon témoignage portera sur la partie 2 du projet de loi, plus précisément les articles 47 à 67, qui prévoient une augmentation des taxes sur le tabac de 1 $ par cartouche et qui modifient l'indexation relative à l'inflation pour les taxes sur le tabac en passant d'un rajustement quinquennal à un rajustement annuel. Nous saluons ces mesures et nous exhortons tous les membres du Comité à appuyer ces dispositions. Les produits du tabac demeurent la cause principale de maladies et de décès évitables au Canada; en effet, le tabagisme tue 45 000 Canadiens chaque année et est à l'origine d'environ 30 % de tous les décès attribuables au cancer.
    Par ailleurs, nous appuyons fermement les dispositions du budget fédéral qui prévoient un investissement accru dans la Stratégie fédérale de lutte contre le tabagisme. C'est essentiel dans le cadre des efforts déployés pour atteindre l'objectif de réduire l'usage du tabac à moins de 5 % d'ici 2035. N'oublions pas qu'il y a encore plus de cinq millions de Canadiens qui fument. Des adolescents commencent à fumer chaque mois. Nous avons accompli des progrès considérables, mais il reste beaucoup de travail à faire à cet égard.
    Les mesures budgétaires concernant les taxes sur le tabac et le financement de la stratégie sont complétées par le projet de loi S-5, adopté à l'étape de la troisième lecture par la Chambre des communes la semaine dernière, et par la réglementation à venir sur l'emballage neutre et uniformisé. L'emballage neutre, qui a déjà été adopté par huit pays, est une mesure importante pour protéger les jeunes et limiter l'utilisation des paquets de cigarettes comme moyen de promotion.
    La hausse des taxes sur le tabac est la stratégie la plus efficace pour réduire l'usage du tabac, surtout chez les jeunes qui ont moins de revenu disponible. Ils sont plus sensibles aux prix. Le fait que les taxes sur le tabac diminuent la consommation est reconnu par la Banque mondiale, l'Organisation mondiale de la santé, un grand nombre d'études menées au Canada et dans le monde entier, les gouvernements provinciaux et territoriaux partout au Canada, ainsi que les gouvernements fédéraux successifs. Les augmentations des taxes sur le tabac constituent une solution gagnante tant sur le plan de la santé publique que sur le plan des recettes publiques. D'après les prévisions du budget, les recettes devraient augmenter de 375 millions de dollars cette année seulement grâce aux modifications apportées aux taxes sur le tabac.
    L'indexation de la taxe sur le tabac en fonction de l'inflation a été instaurée dans le budget fédéral de 2014, qui prévoyait un rajustement tous les cinq ans. Ainsi, le premier rajustement en fonction de l'inflation serait censé avoir lieu en 2019. L'indexation fait en sorte que les taux de taxation du tabac demeurent inchangés après le rajustement en fonction de l'inflation. Dans son mémoire prébudgétaire, Imperial Tobacco Canada a recommandé une indexation annuelle plutôt que quinquennale parmi ses recommandations au Comité.
    Les taxes fédérales sur le tabac valent mieux que les taxes provinciales sur le tabac du point de vue de la contrebande, car elles s'appliquent dans les réserves. Il n'y a aucune différence entre les taux de taxation dans les réserves et hors réserve. Les activités de contrebande qui échappent aux taxes fédérales sur le tabac sont d'une bien moindre ampleur que celles qui échappent aux taxes provinciales sur le tabac.
    J'invite maintenant les membres du Comité à se reporter au document d'information qui leur a été distribué. Le premier graphique présente une comparaison des taux provinciaux et territoriaux de taxation du tabac. On voit que l'Ontario et le Québec affichent les plus bas taux de taxation au Canada, mais c'est aussi là où l'on trouve le plus de contrebande. C'est contraire à ce que l'industrie du tabac nous dit. En effet, l'industrie du tabac affirme que des taxes plus élevées font augmenter la contrebande. On observe que, dans l'Ouest canadien, les taux de taxation du tabac sont bien plus élevés, mais les activités de contrebande sont beaucoup moindres.
    Pourquoi y a-t-il plus de contrebande en Ontario et au Québec? C'est en raison de la proximité aux usines et aux sources d'approvisionnement illégales, mais nous pouvons constater le maintien des taxes plus élevées sur le tabac dans les provinces de l'Ouest et de l'Atlantique.
    Le graphique suivant montre la tendance des recettes fédérales et provinciales provenant des taxes sur le tabac. On observe que, même lorsque les taux de tabagisme sont réduits, les recettes provenant des taxes sur le tabac continuent d'augmenter, malgré une prévalence moins élevée du tabagisme. Au cours de l'année financière de 2017, une somme de 8,4 milliards de dollars a été recueillie, et ce montant est encore plus élevé lorsqu'on tient compte de la TPS, de la TVH et de la TVP sur les produits du tabac.
    Le graphique suivant présente l'évolution à long terme de la prévalence du tabagisme au Canada. En 1965, c'était de 50 % pour les Canadiens âgés de 15 ans et plus. En 2016, ce taux est passé à 17 %. Ces dernières années, nous avons observé une baisse constante. Voilà qui est très positif, mais c'est aussi pertinent lorsqu'on voit que les recettes fiscales prélevées sur le tabac continuent d'augmenter. Par conséquent, les taxes sur le tabac sont utiles pour les recettes publiques.
    Le dernier graphique montre les tendances parmi les adolescents, soit le groupe des 15 à 19 ans. On observe une diminution constante de la prévalence du tabagisme parmi les jeunes. C'est très bien. Les taxes sur le tabac et d'autres mesures ont contribué à cette baisse, mais nous voulons réduire ce taux encore plus. Les mesures annoncées récemment nous aideront à y parvenir.
    Nous tenons à remercier le gouvernement fédéral d'avoir mis de l'avant de nouvelles mesures de lutte contre le tabagisme, et nous nous réjouissons de l'appui de tous les partis. Nous avons hâte de continuer de réaliser des progrès.
    Je vous remercie.

  (1550)  

    Merci beaucoup, Rob.
    Nous allons maintenant entendre M. Giesbrecht, président-directeur général de la Fédération canadienne des services de garde à l'enfance.
    Bienvenue, Don.
    Au nom de la Fédération canadienne des services de garde à l'enfance et du secteur des services d'apprentissage et de garde des jeunes enfants, je tiens à vous remercier de cette occasion qui nous est donnée de faire cet exposé sur les dispositions relatives à l'Allocation canadienne pour enfants contenues dans la partie 1 du projet de loi C-74.
    Entre autres choses, le projet de loi C-74 demande de façon implicite que de nouvelles mesures soient prises par le gouvernement du Canada pour que soit indexée en date du  juillet 2018 l'Allocation canadienne pour enfants, l'ACE, afin d'assurer que ladite allocation reste en phase avec l'augmentation du coût de la vie. À l'instar de l'ACE elle-même, cette initiative en matière de supplément du revenu est une politique progressiste qui vise à aider les familles canadiennes à assumer les coûts qu'elles engagent pour élever leurs enfants, en particulier les familles de la classe moyenne et les familles à faible revenu. Comme pour d'autres programmes de prestations fédéraux — on n'a qu'à penser, par exemple, au régime de pension du Canada —, l'indexation des prestations de l'ACE est une mesure qui est pleine de bon sang et que les familles admissibles accueilleront avec joie.
     De plus, nous appuyons les mesures qui visent à assurer que les contribuables répondant au bon profil soient admissibles à l'ACE et à faire en sorte que l'information connexe soit communiquée à certaines fins aux provinces et aux territoires. Comme c'est le cas pour l'indexation de l'ACE, cette communication de l'information est pleine de bon sens et elle contribuera à faire en sorte que les personnes admissibles reçoivent leurs prestations ainsi que toute autre prestation qu'elles pourraient recevoir des provinces, des municipalités ou des territoires.
    En tant que supplément du revenu, l'ACE est un soutien important et fort apprécié pour les familles qui y sont admissibles. L'autre aide fédérale destinée aux familles canadiennes — ce que n'est pas l'ACE — est l'accord multilatéral du gouvernement fédéral sur l’apprentissage et la garde des jeunes enfants, lequel s'accompagne d'accords bilatéraux connexes avec les provinces et les territoires. Dans la même ligne, nous attendons toujours que soit officiellement signé l'accord multilatéral sur l’apprentissage et la garde des jeunes enfants avec les communautés autochtones. Cet accord s'ajoutera aux autres accords historiques déjà signés et permettra d'aider directement les enfants et les familles autochtones du Canada.
    Ces accords et ces cadres sont d'une importance névralgique puisqu'ils appuient directement cet autre besoin essentiel des familles canadiennes, soit celui de disposer de services de garde de qualité, abordables, inclusifs et accessibles. En fait, de façon tout aussi importante, ces accords et ces cadres nous permettent de nous attaquer à la crise nationale des services de garde au Canada. Le gouvernement du Canada s'est engagé à investir 7,5 milliards de dollars sur 10 ans — période qui a débuté au cours de la dernière année financière — afin de financer ces accords. Il faudra toutefois dépenser passablement plus que cela pour faire en sorte que le Canada soit au diapason de la marque de référence fixée par l'OCDE de 1 % du PIB sur une base annuelle.
    Un service de garde de qualité est l'élément clé de la sécurité économique de la vaste majorité des familles canadiennes et un élément central de l'économie canadienne dans son ensemble. Bien que l'ACE fournisse une aide financière directe aux familles, elle n'efface pas la nécessité de procéder à des investissements stratégiques importants et progressistes dans les réseaux de garderie, et elle ne s'attaque pas directement à l'abordabilité et à l'accessibilité des services de garde.
    Le Centre canadien de politiques alternatives a récemment publié un rapport sur la hausse des frais de garde dans l'ensemble du Canada où l'on apprenait qu'une famille typique avec de jeunes enfants consacrait environ le tiers de ses revenus à ces frais. Par exemple, en Ontario, les frais de garde pour un enfant peuvent atteindre 15 000 $ — et même plus dans la région du Grand Toronto —, soit plus du triple de ce qu'il en coûterait d'envoyer un enfant à l'université pendant un an, un système où l'offre est beaucoup mieux financée.
    Par conséquent, le financement de l'offre est la façon dont le Canada — ses provinces, ses territoires et ses communautés autochtones — devrait approcher l'abordabilité, le financement et les politiques des services de garde. C'est d'ailleurs exactement de cette façon que des provinces comme l'Ontario et la Colombie-Britannique ont décidé de bouger sur ces questions. Les annonces cruciales et historiques qu'elles ont faites cette année allaient exactement dans ce sens: elles ont l'intention de s'attaquer de front au coût excessif des frais de garderie dans leurs provinces respectives. En laissant tomber les bricolages superficiels pour une solution holistique et exhaustive axée sur les enfants et les familles, elles emboîteront le pas au Québec et à l'Île-du-Prince Édouard.
    Dans son bulletin électronique ministériel du 24 avril dernier, le ministre de la Famille, des Enfants et du Développement social, M. Jean-Yves Duclos a dit ceci:
Pour bon nombre de parents, l’accès à des services de garde de qualité constitue un défi de taille. En effet, seulement un enfant canadien sur quatre a accès à une place en garderie réglementée. La mise en place de systèmes d’apprentissage et de garde des jeunes enfants au Canada est l’un des meilleurs investissements que le gouvernement puisse faire pour aider à renforcer la société et l’économie du Canada et donner aux enfants le meilleur départ possible dans la vie.
    Nous sommes d'accord avec le ministre, et nous sommes d'avis que la prise en charge de la crise des services de garde au Canada nécessitera un financement direct du gouvernement fédéral ainsi que des politiques, un leadership et des partenariats avec les provinces, les territoires et les communautés autochtones. Ces démarches alliées aux initiatives de soutien comme l'Allocation canadienne pour enfants feront en sorte que le Canada pourra rejoindre les autres pays de l'OCDE à titre de meneur — en non de traînard — en ce qui a trait aux investissements à l'égard des enfants et des familles.
    Merci d'avoir pris le temps de m'écouter.

  (1555)  

    Merci beaucoup, monsieur Giesbrecht.
    Maintenant, nous entendrons M. Bartlett, qui est économiste en chef à l'Institut des finances publiques et de la démocratie de l'Université d'Ottawa.
    Soyez le bienvenu.
     Monsieur le président, monsieur le vice-président, distingués membres du Comité, bonjour. Merci de m'avoir invité à parler aujourd'hui dans le cadre de cette étude du projet de loi C-74.
    Comme on me l'a demandé, je vais focaliser mes observations sur la partie 1 du projet de loi C-74, et plus particulièrement sur la section qui traite du taux d'imposition des petites entreprises et des crédits d'impôt sur les dividendes. Je vais aussi parler des déductions accordées aux petites entreprises en ce qui a trait au revenu passif et de la prévention de la répartition du revenu.
    Pour aborder certaines des mesures fiscales particulières incluses dans le budget, j'aimerais d'abord toucher à certains concepts couramment utilisés lors de l'évaluation de la politique fiscale. Il s'agit entre autres de l'équité, de l'efficacité et de la facilité de gestion.
    Dans un article publié récemment dans Policy intitulé Cutting Taxes is Easy, Tax Reform is Hard, l'ancien directeur parlementaire du budget et actuel président de l’Institut des finances publiques et de la démocratie de l’université d’Ottawa, M. Kevin Page, affirmait ceci:
[Traduction] En ce qui concerne l'équité, les théoriciens de la fiscalité évoquent habituellement deux concepts. Tout d'abord, il y a l'équité verticale, qui, de façon générale, est comprise comme étant « plus vous faites de l'argent, plus vous devez payer ». Ensuite, il y a l'équité horizontale, qui veut que ceux qui sont dans des situations similaires doivent payer des montants similaires. Les libéraux ont effectivement fait valoir que les réformes qu'ils comptaient mettre en oeuvre pour bonifier l'assiette fiscale en ce que qui concerne la taxation des petites entreprises allaient leur permettre de « faire d'une pierre deux coups ».
    En effet, bien qu'elles soient impopulaires auprès de ceux qui verront leurs impôts augmenter, les modifications proposées à la taxation des petites entreprises améliorent l'équité du système fiscal dans une optique de théorie de la fiscalité. L'efficacité d'un système fiscal se mesure à son habileté à générer des recettes fiscales de la manière la moins bouleversante qui soit pour les mesures incitatives et les comportements, l'objectif étant de nuire le moins possible à l'activité économique.
    En ce qui a trait plus particulièrement au régime fiscal des petites entreprises, une étude de 2015 de l'Institut C.D. Howe — étude signée par Benjamin Dachis et John Lester, et intitulée Small Business Preferences as a Barrier to Growth: Not so Tall After All » — s'est penchée sur deux initiatives fédérales qui avaient pour fonction de fournir une aide spéciale à la petite entreprise, soit la déduction accordée aux petites entreprises et le programme de crédit d'impôt à l'investissement pour la recherche scientifique et le développement expérimental. En voici quelques extraits:
[Traduction] L'objectif de ces programmes est d'améliorer la performance économique de façon générale en atténuant les inefficacités du marché. Toutefois, comme l'obtention des avantages est conditionnelle au fait de rester petit, ces programmes pourraient bien être des obstacles à la croissance.
    Plus loin, les auteurs constatent qu'aucun des deux programmes n'a permis de stimuler l'investissement de façon importante. Entretemps:
[Traduction] [...] l'aide accordée aux petites entreprises a des coûts sociaux. Le plus important de ces coûts découle du fait que le gouvernement soit contraint de récupérer des recettes fiscales auxquelles il avait renoncé en comprimant les dépenses ou en augmentant les impôts ailleurs. Une façon plus efficace de stimuler la croissance économique est de réduire les taux d'imposition de toutes les sociétés plutôt que d'accorder des taux préférentiels aux petites entreprises.
    L'inefficacité du régime fiscal créé par le régime d'imposition des petites entreprises va encore plus loin. Plus précisément, les règles actuelles qui régissent les sociétés privées permettent de déplacer les recettes de la société quelque part entre le revenu personnel et le revenu d'entreprise, ce qui crée une situation propice aux évasions fiscales. En fait, les règles actuelles incitent les contribuables à structurer leurs entreprises de telle façon qu'ils pourront rendre compte des recettes de la façon qui les avantage le mieux. Ce n'est cependant pas l'intention proprement dite de la politique fiscale et le résultat en est que moins d'impôts sont perçus.
    Ce qui nous amène à la capacité qu'a le gouvernement fédéral d'administrer son régime fiscal selon l'esprit de la loi qui le gouverne. Cela donne parfois lieu à des situations difficiles, attendu que la lettre et l'esprit des lois fiscales ne sont pas toujours sur la même longueur d'onde. Pour combler cet écart, il convient parfois de modifier ces lois.
    Dans le contexte des modifications apportées aux règles fiscales applicables aux petites entreprises, ces changements ont été télégraphiés pour la première fois par le Parti libéral du Canada dans sa plateforme électorale de 2015. Puis, en juillet 2017, le ministre des Finances a amorcé ses consultations en matière de planification fiscale en s'adressant aux sociétés privées. Bien que le gouvernement fédéral devrait être salué pour ces consultations publiques, je suis certain que personne ici ne se fait d'illusion sur la tournure qu'a prise cet exercice. Les choses ne se sont pas bien passées.
    Le simple fait que les gens s'offusquent à l'idée de ne plus avoir accès à certaines préférences fiscales n'est pas une raison de jeter le bébé avec l'eau du bain. Bien qu'il y ait eu indéniablement des améliorations dans les modifications proposées concernant les règles de l'impôt sur les sociétés, il y avait aussi beaucoup de désinformation. En fin de compte, entre l'Énoncé économique d'automne 2017 et le budget de 2018, le gouvernement fédéral a mis de l'avant des modifications fiscales assorties de correctifs pour tenir compte de certaines des préoccupations entendues lors du processus de consultation. Même si certaines parties prenantes restent mécontentes, les fiscalistes à qui j'ai parlé sont d'avis que l'on a répondu à une bonne partie des préoccupations les plus flagrantes.
    Les règles fiscales qui gouvernent les sociétés privées avaient la réputation d'être injustes et inefficaces — c'est ce qu'en disaient les économistes —, et de compliquer l'administration. Les modifications qui ont été mises en oeuvre entendent corriger cela. Seul le temps nous dira si elles y parviendront et si elles auront une incidence sur les investissements des entreprises. Cela dit, il aurait été plus efficace d'inclure ces modifications dans une réforme plus vaste du régime fiscal, réforme qui aurait pu bonifier l'assiette fiscale tout en réduisant l'impôt moyen des sociétés et des ménages canadiens.
    Merci.

  (1600)  

     Merci beaucoup.
    Passons maintenant à Mme Kim Drever, de MNP S.E.N.C.R.L. Madame, soyez la bienvenue.
     Monsieur le président, distingués membres du Comité, je tiens à vous remercier de m'avoir invitée à venir vous parler aujourd'hui.
    MNP est d'avis qu'une réforme fiscale complète s'impose, sans quoi nous nous retrouverons avec un système fiscal plus complexe et onéreux qui portera préjudice aux Canadiens. Le système actuel a besoin d'être simplifié et modernisé.
    MNP représente plus de 150 000 petites entreprises au Canada, y compris 16 000 exploitations agricoles. Nous sommes les experts au pays en matière de fiscalité des petites entreprises. Personne au Canada ne travaille autant que nous avec les petites entreprises au quotidien.
    J'aimerais d'abord féliciter le gouvernement d'avoir pris le temps d'écouter les inquiétudes soulevées par le milieu concernant les propositions fiscales relatives aux sociétés privées. L'avant-projet de loi publié le 13 décembre 2017 concernant l'impôt sur le revenu fractionné ainsi que les propositions annoncées dans le budget fédéral de 2018 au sujet du revenu de placement passif ont permis de répondre à plusieurs des préoccupations que nous avons formulées l’été et l’automne derniers. Nous sommes toutefois d'avis qu'il y a encore lieu de préciser certains aspects.
     Étant donné le temps qui nous est imparti, je vais me focaliser sur l'impôt sur le revenu fractionné, ou l’IRF.
    Tout d'abord, les nouvelles règles relatives à l'IRF semblent cibler injustement les entreprises de service. Ces entreprises représentent aujourd'hui 78 % des petites entreprises canadiennes et elles sont exclues de façon explicite des certaines de ces règles.
    Il y a un nouveau critère de 20 heures en vertu duquel il sera possible de soustraire certains particuliers des règles de l'IRF. La plupart des entreprises familiales n'ont jamais tenu de feuilles de temps. Elles n'ont jamais vraiment gardé trace des heures travaillées par les propriétaires. Nous nous demandons comment l'Agence du revenu du Canada sera en mesure de se procurer les éléments de preuve qu'il lui faudra pour procéder à ces audits. Tout reposera sur des témoignages personnels. Cette loi pourrait s'appliquer rétroactivement, et les Canadiens pourraient être pénalisés pour ne pas avoir tenu des livres qu'ils n'avaient tout simplement pas le temps de tenir au moment où se faisait ce travail.
    Ensuite, il y a le critère du caractère raisonnable. Ces règles de l'IRF soumettent plusieurs nouveaux facteurs à la vérification du caractère raisonnable. La main-d'oeuvre est l'un des facteurs assujettis au concept du caractère raisonnable que nous voyons ailleurs dans la Loi de l'impôt sur le revenu, mais ce nouveau concept de caractère raisonnable brouille les lignes qui séparent l'investissement, le rendement sur l'investissement et la main-d'oeuvre. Nous nous retrouvons en terrain inconnu. Nous demandons qu'une approche équilibrée soit mise de l'avant, approche en vertu de laquelle le ministère des Finances et l'ARC fourniraient un cadre détaillé pour favoriser l'établissement de ce qui est raisonnable et de ce qui ne l'est pas. Cela permettra aux Canadiens et à l'ARC d'appliquer le cadre de manière uniforme.
    Permettez-moi de vous donner un exemple pratique.
     Voici l'exemple d'un client typique comme vous pourriez en voir n'importe où au Canada. Bob et Karen ont une entreprise qui se nomme BK Transport. De la petite compagnie de camionnage qu'elle était il y a 30 ans, BK Transport est devenue une entreprise de taille qui dispose maintenant d'un important capital. L'organisation compte plus de 250 employés et elle est active dans trois provinces. Karen est malade et elle a dû réduire ses activités normales au sein de l'entreprise. En fait, elle est rarement capable d'aller travailler. Comme beaucoup d'entrepreneurs, Bob et Karen ont choisi de se verser des dividendes plutôt que de se payer un salaire, et c'est ce qu'ils font depuis les 30 dernières années. Personne n'avait besoin de remplir de feuilles de temps, alors personne n'en préparait. Désormais, à cause des modifications apportées à l'impôt sur le revenu fractionné, les dividendes versés devront être calculés en fonction de la valeur du travail de Bob dans l'entreprise par rapport au travail de Karen dans l'entreprise.
    La première chose qu'il faut considérer, c'est s'il y a seulement lieu d'appliquer l'IRF. Attendu qu'ils travaillent tous les deux à l'entreprise et qu'ils en sont tous les deux actionnaires, l'IRF s'appliquera sauf si l'une des exclusions particulières est vérifiée. Pour Bob, il faudra commencer à comptabiliser ses heures de travail. Il devra satisfaire à la condition de la moyenne de 20 heures de travail par semaine. Il devra commencer à tenir compte de ses heures et à tenir des feuilles de temps. Cette condition ne pourra pas être satisfaite par Karen. Du reste, Karen n'a jamais rempli de feuilles de temps.
    Ensuite, BK Transport est une entreprise de service. Il s'agit de camionnage, ce qui est un service et, à ce titre, elle ne pourra jamais répondre au critère des actions exclues. Lorsque cette réalité a été exposée à Bob et Karen, ils n'arrivaient pas à comprendre comment leur entreprise de camionnage pouvait être touchée, alors qu'une entreprise oeuvrant dans le commerce de détail ou la construction — avec le même nombre d'employés et un capital semblable — s'en tirait haut la main.
    Aux termes de l'avant-projet de loi, la dernière façon de se sortir de cette situation est de satisfaire au critère sur le caractère raisonnable, un critère très subjectif s'il en est. Croyons-nous que les dividendes versés à Karen sont raisonnables? Oui. Avons-nous la certitude que l'ARC sera aussi de cet avis? Il n'y a rien de certain à cet égard.

  (1605)  

     Ce qui pourrait les aider serait d'avoir un peu plus de conseils administratifs sur ce qui est considéré comme étant raisonnable et des éclaircissements sur le type d'entreprises que l'on essaie d'intercepter. Nous sommes d'avis que le fait d'intercepter des entreprises comme BK Transport est une conséquence non intentionnelle de la façon dont le projet de loi est rédigé.
    En ce qui concerne le revenu passif, l'avant-projet de loi est une nette amélioration par rapport à ce qui a été publié en juillet 2017. Nous saluons l'engagement du gouvernement à trouver un équilibre acceptable à cet égard. Notre mémoire contient toutefois trois observations au sujet de ces propositions, observations que nous vous invitons à examiner.
    Pour terminer, nous sommes d'avis que le projet de loi C-74 est une nette amélioration par rapport à ce que nous avons vu en juillet dernier. Cela dit, nous pensons que l'impôt sur le revenu fractionné devrait être simplifié encore plus afin que les propriétaires d'entreprises soient en mesure de comprendre de quoi il retourne et de s'y conformer.
    Nous vous prions d'examiner nos trois recommandations. Premièrement, nous souscrivons sans réserve à une réforme fiscale exhaustive couvrant toutes les formes de taxation et pas seulement l'impôt sur le revenu. Deuxièmement, parce que les nouvelles règles relatives à l'IRF ciblent injustement les entreprises de service, nous croyons que ces dispositions devraient être réexaminées et que la pertinence d'exclure les entreprises de services devrait être réévaluée. Enfin, nous sommes ravis de voir qu'il y a une collaboration soutenue avec toutes les parties prenantes et les experts du milieu.
    C'est quelque chose qui devra se poursuivre dans nos efforts pour atteindre une équité fiscale pour tous les Canadiens. Je serai heureuse de répondre aux questions du Comité au sujet de l'impôt sur le revenu fractionné, des propositions sur le revenu passif et du nouveau régime de l'impôt en main remboursable au titre de dividendes.
    Merci.
    Merci beaucoup, Kim, et merci à tous nos témoins pour leurs exposés. Qui avons-nous sur la liste pour commencer?
    Monsieur Sorbara, nous vous écoutons.
    Merci, monsieur le président.
    Bienvenue à tous. Je suis content de revoir des visages familiers. J'aimerais commencer par M. Bartlett, de l'Institut des finances publiques et de la démocratie. Vous avez dit quelque chose sur les impôts et vous avez indiqué, si je ne m'abuse, votre préférence pour une diminution de la ponction fiscale. Je crois que c'est quelque chose que vous avez mentionné dans votre exposé. Je tiens à souligner pour les besoins du compte rendu que, lorsque nous sommes arrivés, nous avons réduit les impôts de la classe moyenne. Si vous regardez les choses dans une perspective quinquennale, cela représente un allégement fiscal de plus de 20 milliards de dollars dont bénéficieront collectivement 9 millions de Canadiens. C'est quelque chose que nous avons fait.
    Nous avons aussi augmenté les impôts de ceux qui peuvent se le permettre — c'est-à-dire les plus riches, le 1 % —, et cette mesure a été applaudie dans beaucoup de milieux. Nous avons également réduit les impôts des petites entreprises. Sur une période de 4 ans, les petites entreprises — qui constituent l'épine dorsale de notre économie — auront épargné 3 milliards de dollars. Dans la ville que j'ai le privilège de représenter avec deux autres députés, il y a plus de 13 000 entreprises et allégement fiscal total sera d'environ 3 milliards de dollars, ce qui, d'après moi, constitue un bon coup de pouce pour ces entrepreneurs. Je tenais à ce que ces chiffres soient consignés dans le compte rendu, et je n'ai pas l'intention de vous poser de question directe à ce propos.
    J'aimerais m'adresser à Jennifer Drever, de MNP. J'ai lu votre mémoire et je tiens à vous remercier pour ce passage où vous affirmez vous réjouir « des progrès que le gouvernement a réalisés jusqu'à maintenant, lesquels montrent bien que lorsqu'il travaille de concert avec les intervenants concernés, ce sont toutes les parties qui en bénéficient ».
    Je ne vais pas aborder la question de l'IRF, parce que l'impôt sur le revenu fractionné sera un sujet dont il sera intéressant de discuter dans une ou deux minutes et parce que c'est un sujet ardu. Je souhaite cependant parler du revenu de placement passif. J'aimerais entendre votre point de vue là-dessus, car je crois que nous sommes arrivés à un équilibre où les règles à ce sujet sont équitables et justes, et où l'on tient compte de la capacité qu'ont les gens d'épargner. Si vous souhaitez prendre un congé de maternité, vous pouvez épargner en conséquence. Si vous êtes un médecin et que vous souhaitez mettre jusqu'à 3 millions de dollars de côté ou l'équivalent en revenu de placement passif — 150 000 $ en revenu —, tout ce qui va se passer, c'est que votre taux d'imposition de petite entreprise va passer de 12 % à environ 25 ou 26 %, ce qui n'est pas si mal lorsqu'il s'agit de revenu passif, par opposition à un revenu actif.
    En général, les grandes sociétés ne sont pas imposées au même taux que les petites entreprises. Autrement dit, les personnes les plus aisées ne sont pas assujetties au taux d'imposition des petites entreprises puisqu'elles sont déjà imposées selon le taux d'imposition plus élevé des sociétés. Les entrepreneurs vont donc continuer de faire ce qu'ils font. Je ne demande pas de vérification, mais selon vous, ai-je raison de penser cela?

  (1610)  

    Cela me semble une évaluation juste de la situation. Dans l'ensemble, nous avons été agréablement surpris par ce que nous avons vu dans le budget.
    À mon avis, nous devrions nous pencher sur trois facettes du revenu passif. D'abord, le budget a été annoncé le 27 février, et des transactions donnant lieu à des gains en capital, comme la cession d'imposants portefeuilles ou des démarches semblables, peuvent avoir été effectuées en janvier et février. Ces activités menées avant le budget empêcheront certaines petites entreprises de bénéficier d'une réduction d'impôt en 2019. La mise en oeuvre de cette mesure pose quelques problèmes sur le plan de la date des transactions.
    Il faut aussi se demander s'il convient de fixer la limite inférieure à 50 000 $. Certains affirmeront que ce n'est pas tout à fait assez élevé. Enfin, le dernier problème relatif au revenu passif vient de l'interaction avec le régime d'impôt en main remboursable au titre de dividendes. Compte tenu de la complexité de ce régime, ce sera difficile à gérer pour les cabinets comptables et particulièrement pour les petites entreprises qui n'ont pas de conseillers chevronnés.
    Je m'adresserai maintenant à M. Macdonald, du Centre canadien de politiques alternatives.
    Vous avez indiqué que notre budget est axé sur l'égalité entre les sexes. Selon des estimations que nous avons reçues, notamment de la Banque Royale du Canada, si nous pouvions faire en sorte que la participation des femmes au marché du travail soit presque égale à celle des hommes, cela enrichirait notre économie de 150 milliards de dollars. Notre économie totalise environ 2 billions de dollars; c'est donc un montant substantiel. Je veux que vous nous donniez votre avis sur cette mesure, et nous disiez ce que vous pensez de l'Allocation canadienne pour enfants et de son importance pour les familles canadiennes.
    Comme je l'ai déjà indiqué, je pense que l'Allocation canadienne pour enfants sera très importante. Une fois que nous disposerons de toutes les données, lesquelles seront probablement publiées au cours de la prochaine année, nous observerons des réductions substantielles, notamment au chapitre de la pauvreté des enfants et des taux de pauvreté des parents de ces enfants. Bien entendu, nous mettons souvent l'accent exclusivement sur la pauvreté des enfants, mais la pauvreté est un concept familial; ainsi, si les enfants sortent de la pauvreté, les parents en font autant.
    Du point de vue de la réduction de la pauvreté, l'Allocation canadienne pour enfants constitue un volet important du projet global de revenu de base que le gouvernement a essentiellement amorcé. Cependant, comme je l'ai préconisé dans mon exposé, j'encouragerais certainement le Comité à envisager des mesures de soutien destinées aux familles sans enfant dont les membres, qui ne sont pas encore des aînés, se classent dans les catégories de faible revenu.
    Je doute que l'Allocation canadienne pour enfants ait une incidence sur le coût de la garde d'enfants, lequel est, à mon avis, l'élément qui nuit le plus actuellement à la participation des femmes au marché du travail dans la plupart des provinces du pays. C'est d'ailleurs quelque chose que le gouverneur de la Banque du Canada et d'autres personnes, comme le ministre Duclos, ont souligné.
    Comme Don l'a fait remarquer plus tôt, le cadre multilatéral fournit un certain financement. C'est la première fois que le gouvernement fédéral participe au financement de la garde d'enfants depuis un peu plus d'une décennie. C'est une démarche bénéfique, même si elle s'adressera aux familles à faible revenu.
    Je pense que si nous nous intéressons à la participation accrue des femmes au marché du travail, nous avons besoin d'un programme national qui établit des frais à l'échelle du pays, pas seulement au Québec, à l'Île-du-Prince-Édouard et au Manitoba, des provinces où les frais sont actuellement fixés. La réduction les frais favorisera la participation des femmes au marché du travail.
    En ce qui concerne les responsabilités des provinces et du gouvernement fédéral, nous avons, pour la première fois, des ententes avec les provinces concernant le cadre relatif à la garde d'enfants.
    Hier, nous avons conclu avec l'Ontario une entente de 4 milliards de dollars à propos d'une stratégie nationale de logement. Notre gouvernement réalise des progrès considérables par rapport à ce que je qualifierais de « décennie perdue », sous un autre gouvernement. Je ne veux pas avoir une attitude trop politique, mais je devais le dire.
    Monsieur Russell, pouvez-vous formuler des observations à ce sujet?
    Monsieur Sorbara, je n'ai de deux brèves observations à faire. Je pense que vous venez de soulever deux bons points.
    Vous avez fait remarquer que le seuil de revenu passif, établi à 50 000 $, se traduit par des actifs financiers de quelque 3 millions de dollars par année, et avez demandé si ce seuil est adéquat ou non. Nous pouvons débattre un peu de la question, mais cette mesure va certainement dans la bonne direction.
    Le Comité devrait toutefois prendre en compte deux éléments, notamment l'indexation. Un portefeuille de retraite de 3 millions de dollars convient peut-être pour un professionnel, mais je pense qu'il faudrait prévoir quelques mesures de protection contre l'inflation afin de maintenir ce taux moins élevé.
    L'autre élément est celui de la rétroactivité, un point dont le gouvernement s'est engagé à tenir compte avant de présenter les propositions. Si je considère qu'il importe peut-être que la rétroactivité soit prise en compte — autrement dit, que les propositions ne soient pas rétroactives —, c'est parce que les professionnels font l'objet d'un certain débat. La presse a notamment dénoncé le fait que les médecins étaient encouragés à envisager de constituer une société afin de compenser leur salaire et a traité des contrats financiers que la profession médicale a négociés.
    Ce sont là les deux éléments dont il faut tenir compte, et je pense que ma collègue de MNP a souligné avec justesse la complexité de l'affaire, ce qui est un autre problème. Je voulais simplement faire ces deux observations.

  (1615)  

    Merci, monsieur Russell. Vos remarques sont toujours bienvenues.
    Merci à tous.
    Monsieur Kmiec, vous disposez de sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Nous sommes heureux de revoir certains d'entre vous. Madame Drever, vous avez participé à la dernière séance.
    Je pense que la débâcle de l'impôt des petites entreprises a commencé il y a près d'un an maintenant. En fait, un éloquent député libéral a qualifié cette affaire d'« épouvantable ». J'aime souvent le citer; il n'écoute pas, mais c'est correct.
    Madame Drever, vous avez indiqué que ces propositions sont bien meilleures que celles que vous anticipiez initialement, affirmant être agréablement surprise. Je pense que le milieu de la comptabilité en général avait l'impression que le gouvernement entendait mettre en oeuvre toutes les mesures du budget.
    Je veux commencer par les règles relatives à l'impôt sur le revenu fractionné. Vous nous avez donné un exemple pour montrer à quel point il est complexe de tenter de prouver qu'un conjoint a ou avait une participation dans une entreprise, mais n'en a plus aujourd'hui pour des raisons de santé ou parce qu'il est passé à autre chose. J'ai entendu des propos semblables d'une entreprise médicale quand j'étais à Vaughan. Cette entreprise va changer sa structure et en établir une nouvelle afin d'éviter certains problèmes avec ces règles.
    Vos clients vous indiquent-ils qu'ils veulent créer de nouvelles compagnies pour tenter de gérer leur fardeau fiscal?
    Nous ne nous occupons pas tellement de cette question, mais le projet de loi accorde le droit de restructurer ses activités pour satisfaire aux exigences d'ici le 31 décembre 2018; ainsi, les règles relatives à l'impôt sur le revenu fractionné ne s'appliqueraient pas aux actions dans certaines situations. C'est notamment en raison de cette complexité qu'il faut procéder à une réforme fiscale exhaustive au pays. Nous devons assurer la prévisibilité, la certitude et l'équité afin d'orienter les comportements et l'économie comme nous l'entendons. À l'heure actuelle, il n'y a ni prévisibilité ni certitude à bien des égards dans la Loi sur l'impôt sur le revenu, et c'est une chose que notre cabinet voudrait voir changer.
    Je partage entièrement votre avis. Je ne suis pas professionnel de l'impôt ou avocat, mais je pense qu'il est plus que temps de régler la question. Mes électeurs m'ont indiqué qu'ils s'attendent à ce que le gouvernement revoie complètement la manière dont le régime fiscal fonctionne et s'intéresse probablement aussi aux personnes responsables de sa gestion et à la qualité des services offerts par l'ARC.
    Au point trois figurant à la page six, vous indiquez que, selon vous, le regroupement de diverses sources d'impôt en main remboursable au titre de dividendes, ou IMRTD, sera extrêmement complexe. C'est un domaine où je peine parfois à comprendre l'effet du regroupement et comment on peut se conformer à la loi en montrant à l'ARC d'où viennent les divers fonds et comment on les utilise. Pourriez-vous prendre quelques instants pour nous expliquer le regroupement et la complexité de cette opération?
    C'est en fait une excellente question. Il sera difficile de déterminer si le regroupement inclut des dividendes de sociétés admissibles, des dividendes admissibles correspondant à la partie remboursable de l'impôt ou d'autres sources, comme des gains en capital. Il sera fort complexe de colliger constamment ces renseignements pour les clients, et cela constituera un fardeau administratif.
    L'IMRTD a des répercussions sur un grand nombre d'entreprises. Elles n'ont qu'à vendre un actif pour une somme plus élevée que le prix d'achat pour être assujetties à ce régime. Chaque fois qu'une telle transaction aura lieu, nous devrons regrouper divers éléments. Nous devons déjà regrouper différents genres de dividendes; nous devrons maintenant regrouper divers remboursements de dividendes. Voilà qui constitue un certain fardeau administratif.

  (1620)  

    Votre cabinet se prépare-t-il à faire appel à la Cour de l'impôt au nom de ses clients? Selon l'évaluateur ou le vérificateur qui examine le dossier lors de sa réception à l'ARC, la décision pourrait varier, mais cette décision pourrait avoir des répercussions considérables. Vous pourriez devoir aller dans un sens ou dans l'autre, et exiger un jugement pour déterminer si la décision est raisonnable ou non. Votre cabinet se prépare-t-il à la possibilité qu'un de ses clients soit obligé de contester sa facture d'impôt?
    Selon moi, le caractère raisonnable des décisions pose quelques problèmes à certains égards, mais au chapitre de l'IMRTD, c'est en grande partie une question purement mathématique reposant sur des formules. Il suffit de se conformer aux méthodes de calcul et de gérer et de suivre les choses de manière continue. J'aurais de la difficulté à dire ce que nous ferions, car nous n'avons même pas vu de quoi les formulaires auront l'air et ne savons pas comment l'ARC exigera que nous agissions à cet égard.
    Monsieur Bartlett, vous avez indiqué que du point de vue économique et non politique ou autre, le mieux à faire consiste à avoir une assiette fiscale très large — et je fais ici une paraphrase — en prévoyant le moins d'exceptions possible pour que le régime soit global et facile à gérer et à appliquer pour éviter les distorsions.
    Cependant, le fait est que depuis près de 20 ans, les médecins en particulier ont été encouragés par leurs organes provinciaux à constituer des sociétés professionnelles, et je le sais parce qu'un hôpital se trouve dans ma circonscription et qu'il y a beaucoup de médecins généralistes et de cliniques qui gravitent autour. Cette situation ne se limite pas à l'Alberta et peut être observée à bien des endroits. Les cliniques sont des entreprises de services. Rares sont ceux qui cherchent à acquérir de telles cliniques. Les médecins ont donc été encouragés à profiter de la structure fiscale. Que faisons-nous pour eux?
    Que diriez-vous à ceux qui ont profité de la structure fiscale parce que les gouvernements provinciaux leur ont conseillé de le faire et que le gouvernement fédéral ne s'y est pas opposé? Que direz-vous à ces médecins, à ces généralistes qui doivent maintenant, dans certains cas, payer de nouveaux impôts assez élevés?
    Je crois que dans ce cas précis, la structure et la mise en place du régime fiscal présentaient des lacunes. Je ne crois pas qu'on doive continuer d'utiliser un système qui n'est pas particulièrement neutre parce que c'est ce qu'on utilisait par le passé. Je crois qu'il faut bien communiquer les changements fiscaux et les mettre en oeuvre de façon graduelle de sorte que les gens puissent modifier leur structure d'entreprise pour ne pas être immédiatement assujettis à un taux d'imposition plus élevé. Je ne crois pas que le recours à un système défectueux soit la solution.
    Puis-je vous poser une question sur le concept des droits acquis, alors? Bon nombre de ces gens ont pris des décisions pour leur retraite en fonction de ce modèle. Je sais que c'est ce que bon nombre de gens ont fait. Ils ont deux ou trois enfants à la maison. Parfois, leur conjoint renonce à sa carrière pour qu'ils puissent pratiquer la médecine. Certains de ces gens étaient des spécialistes dans une clinique. Ces gens ne peuvent pas retourner travailler très facilement, mais ils ont pris une décision de couple pour la retraite, puis après 20 ou 25 ans, le régime fiscal change et ils sont pris avec cela. Que répondez-vous à ces gens?
    Nous parlons souvent des fonctionnaires et de l'importance de ne pas changer leur pension, surtout celle des personnes retraitées qui vivent avec un revenu fixe. Que dites-vous à ces gens? Parce que, ce que vous proposez... Oui, nous pourrons leur communiquer les renseignements; nous avons des iPhone maintenant, nous pouvons communiquer l'information plus rapidement, mais ces gens se verront tout de même plus lourdement imposés et ils n'auront aucun moyen de s'en sortir. Ils ne peuvent pas restructurer facilement leur entreprise.
    Je crois que cela revient au besoin d'une mise en oeuvre graduelle des modifications fiscales et au besoin de consulter les intervenants dans le cadre du processus. Je ne sais pas exactement combien d'entreprises seront touchées. Quel est le niveau de revenu de placement passif associé à cela? Est-ce que nous continuons de maintenir la structure actuelle pour les entreprises à perpétuité... pas à perpétuité, mais pour une longue période afin de leur permettre de maintenir la structure?
    Disons qu'un jeune médecin a structuré son entreprise de cette façon et ne prendra pas sa retraite avant 20 ans, et qu'il a des droits acquis parce que son entreprise fait partie de la structure fiscale d'aujourd'hui. Je ne sais pas si c'était l'intention de la loi fiscale précédente en soi et si cela sera juste pour une personne qui entrera dans le domaine dans un an. Je crois qu'il faut adopter une approche graduelle. Il faut tenir compte des intervenants, mais je ne crois pas qu'on doive éviter une réforme du régime fiscal pour le bien de tous.

  (1625)  

    Merci. Nous avons largement dépassé le temps prévu.
    Monsieur Dusseault, vous avez la parole.

[Français]

     Merci, monsieur le président.
    Je vous remercie tous de votre présence parmi nous aujourd'hui.
    Ma première question s'adresse à M. Macdonald, du Centre canadien de politiques alternatives.
    En février, le ministre des Finances a fait un énoncé budgétaire, où il était question de l'équité salariale. En lisant le projet de loi C-74, avez-vous été déçu de constater qu'on n'y avait pas intégré de loi sur l'équité salariale?

[Traduction]

    Je crois que de façon générale, l'analyse sexospécifique du budget était un pas dans la bonne direction. Il n'y a pas encore de loi sur l'équité salariale, mais cela viendra, je l'espère.
    Par exemple, lorsqu'on pense qu'on n'adoptera pas un modèle d'assurance-emploi comme celui du Québec, c'est un peu décevant, mais je crois qu'on va dans la bonne direction. On peut certainement en faire plus. En fait, je crois que le budget était limité par le cycle électoral, que vous comprenez tous, bien sûr. On verra peut-être des propositions plus importantes dans le budget de l'année prochaine, qui sera un budget préélectoral.

[Français]

    Nous l'espérons.
    Je vais passer à un autre sujet. Vous n'en avez pas parlé dans votre présentation, mais avez-vous analysé la nouvelle formule du Régime de pensions du Canada? Cette formule tient-elle compte des années qu'une personne a consacrées à élever un enfant ou des années pendant lesquelles une personne ayant un handicap n'a pas travaillé? L'ancien régime excluait ces années alors que le nouveau régime prévoit un mécanisme d’attribution de montants. Selon ce mécanisme, au lieu d'exclure les années pendant lesquelles ces gens n'ont pas travaillé, on y attribue un montant correspondant à la moyenne des cinq années précédentes.
    Avez-vous analysé cette question? Plusieurs témoins n'avaient pas fait d'analyse formelle permettant de déterminer clairement qu'une formule est meilleure que l'autre. Avez-vous analysé cette question de votre côté?

[Traduction]

    C'est une question intéressante et le fait d'avoir une clause d'exclusion différente pour la bonification du RPC par rapport au RPC de base aura certainement une incidence, surtout pour les personnes visées par les dispositions sur l'invalidité, qui ne couvrent que 70 % du revenu moyen des cinq dernières années, par opposition aux dispositions permettant aux gens de quitter temporairement la population active pour élever des enfants, qui couvrent 100 % du revenu des cinq dernières années. On ne sait pas pour l'instant quelles seront les conséquences de tout cela, mais on sait qu'il y aura des effets sexospécifiques parce que les femmes seront plus susceptibles que les hommes de se prévaloir de ces dispositions.
    Il semble que l'opportunité d'adopter la loi plutôt que de renégocier avec les provinces ait justifié la modification des dispositions puisqu'elles n'avaient pas bien été établies au départ, mais nous allons étudier la situation à l'été et voir si elle a une incidence sur l'épargne-retraite.

[Français]

     Est-ce que l’attribution de montants faisait partie de l'entente avec les provinces?

[Traduction]

    Exactement. Il semble que l'approche fondée sur une moyenne, par opposition à la clause d'exclusion, permettait au gouvernement fédéral d'aller de l'avant avec la mesure législative sans devoir renégocier avec les provinces. J'espère que les conséquences ne sont pas importantes. À cette étape-ci, on ne sait pas encore quelles seront les conséquences, mais nous allons examiner la situation au cours de l'été.

[Français]

    D'accord.
    Je vais passer à un autre sujet, celui concernant des impôts des sociétés, étant donné que plusieurs témoins en ont parlé.
    Pas plus tard qu'hier, un témoin de l'organisme Canadiens pour une fiscalité équitable disait qu'en matière de revenu passif, un montant de 50 000 $ était un seuil trop élevé. Aujourd'hui, on entend dire que ce seuil est peut-être trop bas. Je me demandais donc si certains d'entre vous pouvaient commenter ce que représente un revenu passif 50 000 $. De quel montant doit être son investissement pour générer 50 000 $? Selon vous, s'agit-il d'un seuil adéquat?
    J'aimerais entendre n'importe lequel d'entre vous ayant une opinion là-dessus.

  (1630)  

[Traduction]

    Dans les documents budgétaires, on utilise un taux de rendement de 5 %, ce qui signifie 1 million de dollars pour 50 000 $ de revenus passifs. Je crois que c'est probablement trop bas, puisque bon nombre des entreprises ont besoin de cet argent pour surmonter les bouleversements économiques. Elles doivent économiser pour avoir l'argent nécessaire pour garder leurs employés, élargir leurs activités ou simplement maintenir le cap, alors 1 million de dollars ne sont probablement pas suffisants pour bon nombre de ces entreprises actives.

[Français]

    J'aimerais avoir votre opinion sur une autre question.
    Je fais de nouveau référence à un témoignage d'hier, celui du vice-président d'une firme de comptables professionnels agréés, qui disait que faire une exemption pour les époux pourrait être quelque chose d'intéressant.
    Je reviens ainsi à la question de la répartition du revenu. Il proposait d'exclure complètement les époux des règles de la répartition du revenu. Je me demande si certains d'entre vous ont des idées là-dessus ou ont des chiffres relatifs au nombre d'entreprises que cela concerne. Si on exclut les époux, dans quelle mesure cela réduit-il le nombre d'entreprises qui seraient concernées par ces changements?
    Je ne sais pas si certains parmi vous ont une opinion sur cette question.

[Traduction]

    Je crois que cela dépend de chaque cas.
    Pour les très petites entreprises, le conjoint joue un rôle déterminant. Il faut que la loi permette le fractionnement du revenu avec le conjoint et aussi avec les membres apparentés et les tiers... en d'autres termes, il faut qu'ils puissent prendre part aux dividendes. Il faut tenir compte de la contribution de ces entités à l'entreprise.
    Je crois que la loi devrait aller au-delà du propriétaire principal et qu'elle devrait prévoir un mécanisme simple et facile à suivre.

[Français]

    D'accord.

[Traduction]

    Avez-vous une petite question?

[Français]

    Je me demandais si quelqu'un d'autre avait une opinion. Mme Drever pourrait peut-être nous donner la sienne sur l'exclusion des époux dans la question de la répartition du revenu.

[Traduction]

    À l'heure actuelle, le critère du caractère raisonnable évalue la valeur relative du travail des deux conjoints. Il est parfois difficile d'accorder une valeur au travail d'un conjoint par rapport à celui de l'autre. Une exemption permettrait d'éviter cela. Il n'y aura pas ce concept selon lequel le travail d'une personne a une moins grande valeur pour l'entreprise que celui de l'autre.
    Merci.
    Avant de céder la parole à M. McLeod, j'aimerais vous poser une question sur la réforme fiscale complète dont a parlé Mme Drever, je crois. On en a déjà parlé.
    Comment procèderait-on? Est-ce qu'il y aurait une commission royale, un groupe d'experts? Dans le cadre de nos consultations prébudgétaires précédentes, le Comité avait recommandé une réforme fiscale complète, alors je ne crois pas que nous serions en désaccord avec cela.
    Comment serait-elle organisée, si je puis dire? Par quoi commencerait-on? La question serait éventuellement présentée devant un comité parlementaire, mais quel serait le point de départ?
    Ma question s'adresse à Ian ou à Kim, ou aux deux.

  (1635)  

    Nous ne croyons pas qu'une commission royale soit nécessaire, mais nous croyons qu'il faudra créer un comité — d'intervenants, des finances, d'experts et de parlementaires — et qu'il faudra travailler ensemble pour obtenir le résultat souhaité. Nous recherchons la prévisibilité, la certitude et l'équité. Nous ne savons pas ce qui ressortira de ce comité, mais nous savons qu'il faut examiner le système d'imposition dans son ensemble.
    À l'heure actuelle au Canada, nous avons un ensemble de règles qui a été créé en 1972. L'économie canadienne était complètement différente à l'époque. Les entreprises étaient différentes; les facteurs n'étaient pas les mêmes. Les choses et les temps changent. On peut comparer la situation à un pneu: lorsqu'un pneu est percé, on le répare. Les gouvernements ont fait la même chose. Nous avons réparé le pneu tellement de fois que nous réparons maintenant les réparations. À un certain moment, il faut tout simplement remplacer le pneu et c'est ce que nous proposons.
    J'aime votre comparaison.
    Allez-y, Ian.
    Je dirais tout d'abord qu'il faut que ce soit déterminé en fonction du mandat. Ensuite, on pourrait penser aux participants. Pour reprendre les propos de Kim, je crois que le mandat doit être exhaustif et vaste. Il doit aborder la question du revenu et des dépenses. On pense à la taxe sur les dépenses et à l'impôt sur les revenus.
    Comme on l'a dit plus tôt, nous avons un ensemble disparate qui date d'il y a 40 ou 50 ans. Je crois que le mandat doit être vaste et objectif. On pourrait passer par une commission royale, mais qui ne relèverait pas nécessairement du Parlement. En fait, je crois que ce serait mieux si elle ne relevait pas du Parlement, mais il ferait tout de même partie du processus. Il me semble qu'il serait essentiel d'avoir des représentants de tous les secteurs de l'économie et des représentants du public.
    Je suppose qu'on pourrait s'inspirer de la réforme faite aux États-Unis récemment. On pourrait aussi s'inspirer de la commission Carter de 1972 et de la commission royale Porter, qui visait la structure financière du Canada plutôt que l'impôt sur le revenu. Je crois qu'on pourrait s'inspirer de ces modèles intéressants.
    Je félicite le Comité de s'être engagé dans cette voie, parce que je crois que c'est ce dont nous avons besoin au pays.
    Allez-y, David.
    Je crois que le groupe de spécialistes mis sur pied l'automne dernier pour examiner les dépenses fiscales de façon particulière était un bon point de départ. Malheureusement, il n'a donné lieu à aucun rapport public.
    Un examen approfondi des dépenses fiscales représente certainement un bon point de départ en vue d'une réforme fiscale, pour déterminer si ces dépenses sont conformes à l'objectif souhaité, qui en profite et quelles sont les conséquences relatives à l'inégalité horizontale et verticale. Je crois qu'on examine ces éléments dans une certaine mesure, mais qu'il faudrait en approfondir l'examen. Bon nombre de ces dépenses fiscales sont beaucoup plus inégales que les propositions relatives au revenu passif et au fractionnement du revenu qui sont intégrées dans le budget, et valent beaucoup plus.
    D'accord. Merci.
    Monsieur McLeod, vous avez la parole.
    Merci, monsieur le président, et merci à tous les témoins.
    Je suis particulièrement heureux de voir un représentant de la Société canadienne du cancer nous parler des préoccupations relatives au tabagisme. Au pays, il y a encore d'importants segments de la population qui comptent de nombreux fumeurs. Dans les régions où il y a beaucoup de fumeurs, les taux de cancer des poumons sont élevés. Dans les Territoires du Nord-Ouest, au Nunavut, au Yukon et dans toutes les régions nordiques, le nombre de fumeurs est encore élevé. J'ai soulevé la question à la Chambre des communes et j'ai demandé ce que nous pouvions faire pour remédier à ce problème. Il faut prendre le contrôle. J'ai assisté aux présentations des intervenants en santé dans ma circonscription. J'ai vu les graphiques. Le cancer des poumons est deux ou trois fois plus important que toutes les autres formes de cancer, et est attribuable au tabagisme.
    J'ai trouvé cela intéressant de vous entendre dire qu'il fallait augmenter le coût des cigarettes pour décourager les gens de fumer. Je ne sais pas si je suis tout à fait d'accord avec cette idée, alors vous pourriez peut-être me l'expliquer. Comme je l'ai dit, je viens des Territoires du Nord-Ouest où une cartouche de cigarettes coûte 161,20 $. Je ne vois personne arrêter de fumer pour cela. Vous pourriez peut-être me donner les renseignements dont vous disposez, me parler des recherches qui prouvent l'efficacité d'une telle mesure.

  (1640)  

    Des études approfondies ont démontré que la consommation diminue lorsque les prix augmentent. Je crois que les prix peuvent varier d'une localité à l'autre dans les Territoires du Nord-Ouest. Dans certains cas, ils sont peut-être moins élevés que ceux que vous indiquiez. Notre ministre de la Santé a récemment déclaré à l'Assemblée législative qu'il voulait que les Territoires du Nord-Ouest aient les taxes sur le tabac les plus élevées au Canada. C'était le cas auparavant. C'est le Manitoba qui domine actuellement. Notre ministre va faire pression sur son collègue des finances pour qu'il hausse ces taxes.
    Les prix plus élevés touchent tout spécialement les adolescents, car ils ont moins d'argent et n'ont pas encore développé une accoutumance. Sans l'accoutumance à la nicotine, la consommation diminuerait. Il est toutefois bien évident que cette stratégie fonctionne. Nous avons en effet noté une certaine baisse du tabagisme chez les jeunes Autochtones, particulièrement à l'extérieur des réserves. Les taux de consommation demeurent toutefois trop élevés. Dans les Territoires du Nord-Ouest, les rabais de taxe dans les réserves ne sont pas aussi marqués que dans les provinces.
    C'est une grande source de préoccupation. Si les produits du tabac n'étaient pas taxés à ce point, les taux de tabagisme seraient encore plus élevés.
    J'ai été ministre pendant 12 ans au sein du gouvernement des Territoires du Nord-Ouest, et je crois qu'il n'y a pas un budget où nous n'avons pas augmenté le prix des cigarettes. Je ne suis pas persuadé que nous atteignions vraiment ainsi le but visé. Je suis sans doute l'un des rares députés à le faire, mais j'habite encore dans une petite collectivité autochtone. Les taux de tabagisme demeurent vraiment élevés. Nous ne devrions ménager aucun effort pour les faire diminuer. Je crois que le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest est également de cet avis.
    Nous avons discuté de la banalisation des emballages de cigarettes, une excellente idée que j'appuie totalement. Certains témoins nous ont toutefois exprimé leurs préoccupations à ce sujet en indiquant que cela pourrait inciter certains consommateurs à se tourner vers le marché noir, car celui-ci deviendrait probablement plus accessible. N'importe qui pourrait ainsi s'en procurer, car les vendeurs sur ce marché ne se posent pas trop de questions. Ils vendent leurs cigarettes aussi bien aux enfants qu'aux adolescents et aux adultes. Croyez-vous qu'il y a lieu de s'inquiéter à ce sujet?
    Non, la banalisation des emballages peut être extrêmement bénéfique. Les gens de l'industrie du tabac soutiennent qu'elle va donner lieu à de la contrebande, mais ils nous servent toujours cet argument. Ils l'ont fait lorsqu'on a augmenté la taille des mises en garde pour la santé sur les paquets de cigarettes. Le même argument a été avancé relativement à l'interdiction des étalages visibles. Nous avons toutefois plutôt noté une diminution des ventes de cigarettes de contrebande. Je pourrais d'ailleurs vous laisser ce document à ce sujet. Ce sont leurs propres déclarations. Le volume était beaucoup plus élevé, par exemple, en 2009 avec British American Tobacco et Philip Morris.
    L'Australie a été le premier pays à exiger la banalisation des emballages. Les Australiens ont indiqué ne pas avoir constaté une augmentation des activités de contrebande. KPMG a produit un rapport à ce sujet et a dû écrire au ministre de la Santé britannique pour se plaindre de l'utilisation que l'industrie du tabac faisait de ce rapport en indiquant qu'il était faux de prétendre que l'on y parlait d'une augmentation de la contrebande due à la banalisation des emballages en Australie.
    On a souligné par ailleurs n'avoir trouvé aucun emballage contrefait visant à ressembler à celui de cigarettes vendues sur le marché australien. Il y a effectivement eu contrefaçon d'une certaine quantité de Marlboros, mais c'est bien sûr différent, car ces cigarettes viennent d'un autre pays.
    Les allégations des gens de l'industrie du tabac se sont révélées infondées en Australie.
    Mes prochaines questions s'adressent au représentant de la Fédération canadienne des services de garde à l'enfance. Je me suis grandement réjoui, à l'instar de la majorité de mes concitoyens, je présume, des augmentations au financement octroyé pour l'Allocation canadienne pour enfants. Cette allocation est d'un grand secours pour les familles et les nombreuses collectivités qui arrivent difficilement à éponger les coûts à engager pour nos enfants.
    Vous avez indiqué voir d'un bon oeil l'entente conclue avec les gouvernements autochtones, mais croyez-vous que l'on en fait suffisamment en matière de soutien pour la garde des enfants?
    Comme je l'indiquais, l'Allocation canadienne pour enfants est certes une mesure très progressiste qui a sans doute aidé une portion très ciblée des familles canadiennes à assumer leurs dépenses courantes.
    L'autre aspect de la question est bien sûr l'offre de services de garde à des coûts raisonnables, et il faut faire bien attention de ne pas confondre les deux. Ce sont deux enjeux distincts. Il est bien certain que l'Allocation canadienne pour enfants aide les familles à payer leurs dépenses courantes, lesquelles incluent dans la majorité des cas les services de garde d'enfants, mais cela ne règle en rien les problèmes globaux et systémiques associés à la garde des enfants.
    Nous vivons une période marquante avec le retour à la table du gouvernement fédéral qui offre un leadership stratégique et une contribution financière pour la garde des enfants. Il faudrait simplement que nous en fassions davantage à ce niveau.

  (1645)  

    Je suis heureux de vous l'entendre dire, car c'est ce qu'on m'indique également dans ma circonscription — et c'est ce qu'ont dit aussi d'autres professionnels. Je représente des collectivités comptant d'importantes populations autochtones qui sont encore aux prises avec de nombreux problèmes systémiques.
    Plusieurs sont d'avis que nous devrions envisager la mise en place d'un programme nous permettant d'offrir de l'aide et des conseils aux jeunes femmes enceintes avec suivi après la naissance pour la nutrition et l'aide à la petite enfance. Ces aspects demeurent en effet très problématiques dans nos collectivités qui doivent notamment composer avec la toxicomanie et les séquelles des pensionnats indiens. Avec tous ces traumatismes, la situation n'est pas idéale pour élever des enfants dans certaines collectivités, sans compter tout le désespoir qui frappe nos gens dont certains vont jusqu'au suicide.
    Ils soutiennent qu'une stratégie d'aide à long terme s'inscrivant dans une approche holistique depuis le moment où la femme tombe enceinte jusqu'à ce que son enfant ait trois ou quatre ans nous procurerait de meilleurs résultats, surtout dans les collectivités autochtones.
    Avez-vous eu vent de ces théories?
    Oui, tout à fait. Il est très intéressant de constater que d'autres pays adoptent une telle approche holistique allant de la période prénatale jusqu'au décès. Le Canada accuse beaucoup de retard par rapport à bon nombre de ces mesures. Il serait certes donc très bénéfique que notre pays s'intéresse davantage au bien-être des mères et de leurs enfants, aussi bien avant qu'après leur naissance, en leur offrant l'accès — à la discrétion des parents, un autre élément primordial — à une gamme de services offerts dans la collectivité. Je crois que toutes nos collectivités en sortiraient gagnantes.
    Merci à tous.
    Monsieur Kmiec, vous avez cinq minutes.
    Merci, monsieur le président. Je vais laisser deux minutes de mon temps à M. Albas.
    J'aimerais m'adresser de nouveau à Mme Drever pour parler des règles relatives à l'impôt sur le revenu fractionné. On utilise pour ces règles le terme « entreprise » dont la loi donne une définition assez large et très inclusive, ce qui oblige à s'en remettre au sens établi par la common law. Les mesures fiscales prévues dans ce projet de loi peuvent être très coûteuses pour ceux qui sont visés par ces nouvelles règles.
    Dans le cadre de vos fonctions, conseilleriez-vous à vos clients de pécher par excès de prudence dans la mesure du possible, surtout pour les entreprises de services? J'ai l'impression que le gouvernement aurait notamment dû, particulièrement dans le paragraphe 248(1) proposé, fournir une définition très claire pour que chacun sache bien ce qu'on entend par « entreprise » aux fins de l'application des règles relatives à l'impôt sur le revenu fractionné.
    Ce serait une excellente idée. C'est le genre de correctif que l'on pourrait apporter dans le cadre d'une réforme globale du régime fiscal. Ces règles relatives à l'impôt sur le revenu fractionné créent beaucoup d'ambiguïté du fait qu'elles s'appliquent en fonction des actions exclues. On est aussi en droit de se demander pourquoi on prévoit un traitement particulier pour les entreprises de services. Pourquoi l'impôt sur le revenu fractionné va-t-il s'appliquer à ces entreprises, alors que vous n'y serez pas assujettis si vos actions représentent au moins 10 % des voix et de la valeur marchande dans d'autres secteurs?
    Une vaste proportion des entreprises privées canadiennes vont être touchées.
    Vous avez parlé des actions exclues, et c'est le prochain sujet que je voulais aborder. Dans la troisième version des règles proposées dans ce budget relativement à l'impôt sur le revenu fractionné, on continue de faire obstacle aux structures organisationnelles à plusieurs paliers et aux fiducies détenant des actions d'une entreprise. À mes yeux, cela s'explique uniquement par la volonté de cibler autant d'entreprises de services que possible ayant adopté une structure particulière. Certains agriculteurs seront aussi directement touchés lorsqu'ils voudront transférer la ferme à leurs enfants. Est-ce bien ce que vous constatez?

  (1650)  

    Suivant le critère établi pour les actions exclues, vous devez détenir directement au moins 10 % des votes et de la valeur marchande, ce qui fait que les actions détenues par l'entremise d'une fiducie familiale ne permettraient pas de tomber sous le coup des exceptions prévues pour l'impôt sur le revenu fractionné.
    Les répercussions ne se limiteraient effectivement pas aux seules entreprises de services et sociétés privées. Les entreprises qui seraient touchées sont celles qui ont misé sur des structures différentes, comme la fiducie familiale, qui est souvent utilisée à des fins de succession et de planification de la relève.
    Merci.
    Je laisse le reste de mon temps à M. Albas.
    Merci beaucoup, monsieur le président, de me permettre d'intervenir, et merci également à nos témoins d'aujourd'hui. J'aimerais que nous discutions à nouveau du revenu passif.
    Je m'adresse à Mme Drever à ce sujet. J'ai rencontré des promoteurs immobiliers de ma région de l'Okanagan qui sont bien sûr très préoccupés du fait que la province les a frappés d'un impôt sur la spéculation. Parallèlement à cela, de nouvelles règles hypothécaires s'appliquent depuis un an ou deux dans le contexte des investissements passifs. Il arrive souvent que ces promoteurs gardent leur argent dans des portefeuilles d'investissements passifs en attendant de pouvoir amorcer un projet de construction, car il leur faut parfois deux ou trois ans pour obtenir toutes les approbations municipales requises.
    Sommes-nous en train de dissuader les entreprises de constituer des épargnes? Croyez-vous que ce soit une bonne chose? Quelles autres répercussions risquons-nous de ressentir? Il m'apparaît illogique de leur accorder la déduction pour petite entreprise seulement lorsqu'un projet de construction est en cours, car ils n'auront pas les économies nécessaires pour le réaliser.
    Selon le libellé proposé, il y a effectivement des impacts sur la déduction accordée aux petites entreprises. Nous préférons ces propositions-ci à celles dont nous avons discuté l'automne et l'été derniers, car il n'est plus question d'un taux de taxation permanent dépassant les 73 % sur le revenu passif. Voilà au moins une bonne chose de régler.
    La perte de la déduction accordée aux petites entreprises pendant les années où l'on attend de pouvoir construire est la conséquence directe de la formulation actuelle. Quant à savoir si cela est équitable ou non, je laisse au Comité le soin de le déterminer.
    Voulons-nous encourager l'épargne et l'investissement? Je suppose que certains répondraient que nous voulons encourager seulement certains types d'investissements. Selon moi, une telle mesure d'application générale fera en sorte que bien des gens chercheront d'autres avenues et choisiront sans doute d'investir ailleurs.
    Je suis d'accord. Cette approche semble peut-être moins d'application générale maintenant qu'en octobre dernier alors que nous discutions des répercussions possibles de ces changements. En effet, la déduction accordée aux petites entreprises est établie sur une base annuelle. Vous pouvez donc en bénéficier une année, mais pas la suivante. Cela nous ramène toutefois à votre argument quant aux conséquences possibles lorsque vous économisez en vue...
    Je n'ai malheureusement pas de meilleures réponses à vous donner.
    Merci.
    Merci, monsieur Albas. C'est bien de terminer avec une si bonne question.
    Je vous ramène à la question du caractère raisonnable, car je crois que vous nous avez donné un très bon exemple. Je n'ai pas la solution à ce sujet moi non plus. Il arrive que les intentions visées par le ministère des Finances dans un projet de loi ne soient pas interprétées de la même manière par les gens de l'Agence du revenu du Canada. Je pense que nous avons tous été à même de le constater.
    Que pourrait-on faire pour mieux cibler ce critère du caractère raisonnable de telle sorte qu'il ne s'applique qu'à ceux que l'on souhaite vraiment viser?
    Nous ne demandons pas l'élimination du critère du caractère raisonnable. Je veux qu'une chose soit bien claire. Nous croyons que ce critère a son utilité pour compléter ceux établissant une démarcation très nette dans la loi. Nous en avons besoin. Nous aimerions que l'Agence du revenu du Canada et le ministère des Finances s'entendent quant à ce qu'ils considèrent raisonnable. Ainsi, les contribuables concernés pourraient en avoir le coeur net.

  (1655)  

    À mon avis, le critère du caractère raisonnable est extrêmement important. Vous avez tout à fait raison de préconiser la concertation.
    Vous vouliez ajouter quelque chose, Ian?
    Je voulais seulement enchaîner sur le même sujet. Selon moi, si le critère demeure vague et plutôt ouvert, cela crée de l'incertitude non seulement pour le contribuable, mais aussi pour l'administrateur du régime fiscal. Il faudra beaucoup de temps pour tirer les choses au clair et les précédents seront sans doute établis par l'Agence du revenu du Canada. Je ne crois pas qu'il soit souhaitable de procéder à une réforme fiscale de cette manière.
    Il serait avantageux que ceux qui rédigent les politiques, soit les gens du ministère des Finances, travaillent en étroite collaboration avec leurs collègues de l'ARC qui est chargée de les administrer. Il faut établir ces règles de façon aussi détaillée et claire que possible, d'abord et avant tout, afin de faciliter les choses au contribuable, mais aussi pour assurer l'équité et l'objectivité du régime. À mes yeux, c'est une responsabilité qui relève en fait du ministère des Finances qui devrait donc se remettre à la tâche avec toute la précision et la rigueur voulues pour que cette loi puisse avoir un maximum d'efficacité.
    Comme vous le savez sans doute, il ne nous est pas vraiment possible de formuler des recommandations lorsque nous nous penchons sur des mesures comme cette loi de mise en oeuvre du budget. C'est ce qui nous complique la tâche lorsque nous étudions une loi. Nous pouvons formuler des recommandations lorsque nous nous intéressons à d'autres enjeux et notamment à la suite des consultations prébudgétaires. Je ne sais pas vraiment comment nous allons nous y prendre, mais nous allons voir ce qu'il est possible de faire dans le sens de vos observations qui sont très appréciées.
    Monsieur Fergus.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je tiens à remercier tous nos témoins de leur présence aujourd'hui.
    J'ai d'abord une question que je veux adresser à Mme Drever et M. Macdonald après quoi, si le temps le permet, j'en aurai une autre pour M. Cunningham.
    Vous vouliez savoir comment le gouvernement en est arrivé au montant de 50 000 $ pour le revenu passif, sur quoi était fondé ce calcul. Si l'on essaie de considérer les choses sous un autre angle, on peut se demander en quoi la population bénéficierait-elle d'un plafond plus élevé. Est-ce que seuls les individus concernés en sortiraient gagnants? Est-ce que cela pourrait stimuler la croissance économique? Est-ce que cela favoriserait l'épargne par les personnes vulnérables qui ne pourraient pas le faire autrement? J'essaie simplement de comprendre.
    Monsieur Macdonald, vous voulez commencer?
    Il y a vraiment quelque chose qui accroche, car l'ARC et peut-être même ceux qui se servent de sociétés privées comme véhicules d'épargne ne savent pas à l'avance à quoi cet argent va servir. Il est possible qu'on l'utilise pour investir dans l'entreprise et faire croître ainsi l'économie canadienne, mais on peut aussi s'en servir comme régime d'épargne-retraite différée, ce qui n'est pas le but visé.
    Il s'agit surtout de déterminer comment faire la distinction entre les différents groupes. Pendant que certains investissent ces fonds à des fins productives, d'autres utilisent abusivement la structure d'entreprise comme mode d'épargne-retraite, ou pour combiner la répartition du revenu et les investissements passifs aux fins des études universitaires de leurs enfants, par exemple.
    On peut notamment considérer que cette répartition du revenu passif en application du seuil relativement élevé de 50 000 $, ce qui correspond à environ 1 million de dollars en actifs détenus dans l'entreprise, écarte la vaste majorité des sociétés privées, si bien que très peu de gens se retrouvent avec autant d'argent. En outre, ce n'est pas comme si vous alliez tout perdre aux mains du gouvernement à partir du moment où la valeur de vos actifs dépasse le million de dollars. Vous vous retrouvez simplement avec un taux d'imposition légèrement plus élevé. Si vous économisez pendant quelques années pour acheter une nouvelle machine ou en vue d'un projet de construction, par exemple, il est possible que vous payiez un peu plus d'impôt, mais encore là c'est difficile à déterminer et on ne peut pas vraiment savoir à quoi s'en tenir, qu'il s'agisse de 55 000 $ ou de 45 000 $.
    Il faut espérer que l'objectif soit d'empêcher les gens d'utiliser une société privée comme véhicule d'épargne-retraite. Je pense que cette ligne de démarcation nette permet de le faire assez bien sans toutefois punir indûment ceux qui économisent pendant quelques années supplémentaires en vue d'investir par la suite.

  (1700)  

    Merci.
    Madame Drever.
    On pourrait notamment essayer de déterminer quel pourcentage de la valeur totale de l'entreprise, ou de ses revenus totaux, cela représente. Si 50 000 $ équivaut à de la menue monnaie pour l'entreprise en question, elle ne devrait pas théoriquement être admissible à la déduction pour petite entreprise de toute manière, mais il faudrait tout de même s'assurer que ce n'est pas une mesure d'application générale au niveau inférieur.
    Je suis du Nord de l'Alberta. Dans la région de la rivière de la Paix où j'habite, l'économie est fortement axée sur les hydrocarbures, mais il y a aussi de l'agriculture et d'autres activités. Bien des entreprises se sont constituées un portefeuille d'avoirs passifs pouvant dépasser le million de dollars en prévision de la dernière récession que nous avons connue.
    Vous parlez d'investissements passifs produisant des revenus, n'est-ce pas?
    Ces entreprises ont pu survivre, car elles avaient les ressources nécessaires pour se maintenir à flot. Il faut se demander où est l'intérêt public. Des pertes d'emplois ont été évitées parce que ces employeurs ont pu faire le nécessaire. Il s'agit de voir si 50 000 $ est le montant qui convient.
    Il est vrai que c'est très difficile à déterminer. S'agit-il de 55 000 $ ou d'une autre somme?
    45 000 $.
    Est-ce 45 000 $? Quel est le montant?
    Merci beaucoup.
    J'ai une question très brève.
    Monsieur Cunningham, je vous remercie infiniment de votre exposé et de votre regard sur les taux de tabagisme. J'ai été particulièrement impressionné par votre analyse de la signification de la taxe d'accise fédérale dans les lieux où la contrebande de cigarettes est florissante.
    À la toute fin, vous avez parlé des taux de tabagisme chez les jeunes en fonction de l'âge. Votre organisme a-t-il ventilé ces données pour déterminer le taux de tabagisme chez les jeunes femmes de 15 à 19 ans par rapport aux jeunes hommes du même âge?
    Oui. Les taux sont à la baisse tant chez les garçons que chez les filles, de sorte que les nouvelles sont bonnes. Les taux diminuent également chez les jeunes adultes des deux sexes. Nous devons toutefois poursuivre nos efforts.
    Il n'y a donc pas de différence entre les deux.
    Non, pas ces dernières années. Si nous remontons à quelques décennies, nous remarquons qu'un changement s'est opéré. Le taux descendait chez les garçons, mais pas chez les filles. Plus le temps a filé, plus nous avons réalisé des progrès chez les filles. C'était très frustrant auparavant.
    Monsieur Albas.
    J'aimerais revenir sur ce qui a été dit plus tôt au sujet de la déduction accordée aux petites entreprises et de son seuil. À votre avis, quel devrait être le seuil?
    Je n'ai pas vraiment d'opinion sur la question. C'est une chose qui devrait être examinée dans le cadre d'une réforme fiscale globale. Les réponses proviendront du Comité ou de l'étude.
    Bien.
    Pour ce qui est de…
    Allez-y, monsieur Russell.
    Le seuil devrait être plus élevé. Comme l'intervenant précédent l'a dit quant à savoir si le seuil devrait être supérieur ou inférieur, il semble que les 50 000 $ représentent environ 1 million de dollars à un rendement de 5 %. Si des personnes comptent sur cette somme pour la retraite, 1 million de dollars demeurent un petit montant pour bien des gens.
    Tout d'abord, si la société est créée pour un particulier, un seuil de 50 000 $ par année me semble plutôt bas. Pour une petite entreprise, et même une entreprise admissible à la déduction fiscale accordée aux petites entreprises... Nous avons parlé du pétrole et du gaz, mais vous pourriez parler d'agriculture aussi. Si vous achetez des biens capitaux, vous constaterez que c'est assez cher. En fait, 1 million de dollars d'équipement n'est pas inhabituel, et cette somme pourrait être beaucoup plus élevée pour une petite entreprise.
    Ce que je veux dire, c'est qu'il vaudrait mieux envisager un seuil supérieur. J'aimerais également savoir comment les décideurs en sont arrivés à ce montant.
    Devrions-nous aussi examiner différentes catégories d'investissements passifs? Par exemple, si j'investis dans une obligation de société destinée à une entreprise productive, l'argent sert généralement à tirer profit de nouveaux projets, de nouveaux agrandissements d'usines, et ainsi de suite. On pourrait se demander si, en dehors d'une introduction en bourse, il y a effectivement une création de valeur pour l'action. Mais à mes yeux, quelque chose cloche quand nous disons que nous allons taxer davantage parce que de l'argent a été mis de côté. Économiser n'est pas comme cacher de l'argent dans son jardin ou sous son lit. En fait, les fonds participent toujours à l'économie.
     Monsieur Russell, avez-vous un commentaire?

  (1705)  

    Oui, je dirais que nous n'avons pas parlé des grandes entreprises privées. En réponse à votre question, je trouve cependant assez répressif l'impôt que nous devons payer sur l'épargne, comme vous le dites, ou sur l'investissement passif, pour avoir retiré l'argent. Le taux est de 75 %. L'argument présenté a trait au report d'impôt. Je doute que la mesure rétablisse vraiment l'équilibre, mais elle a un effet dissuasif et décourage les entreprises touchées.
    Le ministère des Finances dit maintenant que seulement 2,7 % des entreprises privées, je pense, sont touchées par ces règles. Cependant, si vous examinez ces entreprises — le directeur parlementaire du budget l'a fait —, vous constaterez qu'il y en a beaucoup dans le groupe. Un tiers d'entre elles ont un capital supérieur à 15 millions de dollars. Nous savons qu'il y a environ 250 milliards de dollars d'argent passif, et que 88 % de cette somme, ou presque la totalité, proviendra des entreprises visées par les nouvelles règles. Je pense que nous pouvons alors nous demander le rôle que jouent ces entreprises qui ont en fait des revenus passifs importants. Si vous regardez l'analyse du directeur parlementaire du budget, vous constaterez qu'il dit que plus de la moitié des entreprises de cette catégorie sont des sociétés de financement et d'assurances, ou des sociétés qui gèrent d'autres entreprises, comme des sociétés de portefeuille ou de biens immobiliers.
    Les entreprises assujetties à ces règles font partie intégrante du secteur des petites et moyennes entreprises au Canada en fournissant du financement, des services bancaires d'investissement et des participations dans des entreprises. Je trouve qu'elles jouent un rôle déterminant dans le processus de formation du capital et l'aide aux petites entreprises. Nous parlons encore une fois de capital énorme, à hauteur de plus de 200 milliards de dollars; qu'arrivera-t-il à la suite de cette modification importante du taux d'imposition réel sur les dividendes? Les entreprises vont-elles réduire leurs activités et faire autre chose, ou migreront-elles vers le marché américain?
    Je pense que ce sont des questions très légitimes à poser, et je ne crois pas que l'analyse a vraiment été effectuée.
    Je veux simplement passer à un autre sujet. Lorsque nous nous demandons si l'Agence du revenu du Canada, ou ARC, peut analyser convenablement un taux de rendement raisonnable pour une entreprise donnée, ne créons-nous pas une dynamique dans laquelle l'une des deux situations suivantes se produira? Les gens diront qu'il y a une zone grise et ne demanderont pas de déduction admissible, même s'ils y ont droit. Ainsi, ils vont simplement reporter la mesure ou ne pas en profiter. Pire encore, ne créons-nous pas une dynamique où l'ARC devra recueillir beaucoup plus d'information auprès des personnes qui appliquent les règles de l'impôt sur le revenu fractionné à leur situation, ce qui causera davantage de litiges? Encore une fois, le caractère raisonnable serait décidé par un juge dans cette situation. Je doute tout simplement que l'ARC possède cette expertise ou ait le temps, à ce qu'on peut en juger.
    Est-ce que quelqu'un veut nous dire si c'est une dynamique que nous souhaitons introduire dans le projet de loi?
    Nous sommes d'accord pour dire que le caractère raisonnable vise à compléter la ligne de démarcation. Puisque nous ne pouvons pas légiférer tous les scénarios possibles, nous avons besoin du caractère raisonnable en dernier recours. C'est absolument vrai, mais je conviens que nous allons nous en remettre aux tribunaux pour déterminer ce qui est raisonnable ou non, puisqu'il incombe au juge de trancher.
    Quand je parle à des propriétaires de petites entreprises et que je leur présente l'idée, ils demandent habituellement: « Combien vais-je devoir débourser pour aller en cour? Combien cela me coûtera-t-il? » Souvent, même si l'entrepreneur est très en colère contre le gouvernement parce qu'il estime ne pas devoir payer, il obtempère. N'allons-nous pas voir plus de situations semblables aussi?

  (1710)  

    Nous verrions ce genre de situation aussi. Il est coûteux d'aller en cours, tout comme il est coûteux d'embaucher des conseillers pour aider une personne dans ce contexte. Il y a probablement un grand nombre d'entreprises qui ne seront même pas conseillées sur la marche à suivre, de sorte que…
    Elles vont simplement laisser tomber.
    En effet.
    La parole est à Mme O'Connell, après quoi ce sera au tour de M. Dusseault.
    Merci, monsieur le président.
    Je vous remercie tous d'être ici.
    Monsieur Macdonald, vous avez commencé par parler du budget et de l'analyse comparative entre les sexes plus qui a été réalisée pour la première fois, et je sais que vous avez mentionné autre chose. Certains, et même le porte-parole conservateur en matière d'innovation, de science et de développement économique, ont laissé entendre que cela ne fait que suivre les exigences du genre et de l'intersectionnalité.
    Pouvez-vous expliquer pourquoi il est si important, d'un point de vue économique — et pas seulement moral —, de réaliser ce genre d'analyse lors de la budgétisation?
    Étant donné que la question touche la moitié de la population, comme vous le savez, il s'agit d'une part importante du travail des gouvernements. Ce n'est certainement pas d'hier que le gouvernement fédéral effectue des analyses comparatives entre les sexes. La nouveauté, selon moi, c'est que l'analyse est passée de l'échelle ministérielle aux documents budgétaires publics. Il s'agit à mon avis d'une analyse positive qui peut mettre en lumière des façons importantes d'augmenter la croissance économique, possiblement à un coût relativement bas.
    Comme nous le disions en réponse à une question précédente, le corollaire de la réduction des frais de garde d'enfants est une participation accrue à la population active, et c'était une des raisons initiales pour lesquelles le Québec a réduit ces frais dans la province. Ce processus a commencé dans les années 1990. Dans la province, le taux de participation des femmes au marché du travail est passé de l'un des plus faibles à l'un des plus élevés, dépassant même la moyenne canadienne. C'est en grande partie attribuable au fait qu'il y a plus de places, et que celles-ci sont plus abordables, ce qui permet aux femmes de travailler.
    Si cette approche était adoptée dans tout le pays, et pas seulement au Québec, à l'Île-du-Prince-Édouard et au Manitoba, où les frais sont fixes, des gains économiques substantiels pourraient être réalisés en aidant les familles, et plus particulièrement en donnant aux femmes qui désirent travailler les moyens de le faire, d'augmenter leur revenu familial et de réinjecter cet argent dans l'économie.
    C'est un exemple, mais il y en a plusieurs autres. L'assurance-emploi en est un bon, avec la normalisation du congé de paternité. Grâce au fait que le volet paternel doive être « utilisé ou perdu », je pense que cela réduira probablement à long terme la disparité entre les femmes et les hommes qui prennent congé pour s'occuper de leurs enfants, espérons-le. C'est une circonstance limitée à ce stade-ci, mais je trouve que c'est un important pas vers l'avant.
    Merci.
    En ce qui concerne vos commentaires sur l’Allocation canadienne pour le travail — et je vous remercie de reconnaître les changements et les répercussions —, vous avez suggéré des moyens d'améliorer ce programme, possiblement, surtout à l'avenir. Vous avez dit qu'il y a un écart pour les personnes de 50 à 65 ans.
    Avez-vous des idées qui permettraient de rectifier le tir? S'agit-il simplement d'offrir le programme à ce groupe d'âge, ou pensez-vous qu'il faut quelque chose de plus ciblé pour cette tranche d'âge? Vous avez mentionné divers problèmes, comme le départ des enfants, la retraite, l'invalidité et le fait que le Régime de pensions du Canada, ou RPC, n'est pas encore commencé à cet âge.
    C'est un groupe d'âge intéressant en ce sens que les aides fédérales et provinciales sont relativement substantielles pour les aînés en particulier. Dans l'ensemble du pays, nous avons établi des revenus de base de plus de 16 000 $ jusqu'à 19 000 $, selon la province, ce qui est relativement élevé. Il en va quelque peu de même pour les familles avec enfants, qui bénéficient de l'Allocation canadienne pour enfants ainsi que des compléments provinciaux.
    Mais il y a un autre groupe de personnes — celles qui n'ont pas d'enfants, qui ne sont pas âgées, qui ne travaillent pas, et qui ne peuvent donc pas bénéficier de l'Allocation canadienne pour les travailleurs. Encore une fois, si vous avez travaillé dur toute votre vie, mais que vous vous blessez, que votre conjoint se blesse et que vous ne pouvez pas travailler parce que vous devez vous occuper de lui, ou que vous ne pouvez tout simplement pas travailler, vous n'aurez essentiellement aucun soutien, en dehors de l'aide sociale.
    Nous pourrions adopter deux ou trois mesures pour mieux aider ce groupe. Tout d'abord, il pourrait y avoir une sorte de complément universel, une option que nous avons envisagée dans notre alternative budgétaire. Cela s'ajouterait à la TPS et coûterait environ 1 800 $, une somme qui diminuerait assez rapidement avec le revenu.
    Une autre option consisterait à réduire l'âge d'admissibilité à des programmes importants tels que le Supplément de revenu garanti et la Sécurité de la vieillesse, qui commencent actuellement à 65 ans. Les 20 % les plus pauvres de la population voient leurs revenus augmenter considérablement à l'âge de 65 ans, parce qu'ils peuvent alors bénéficier de ces programmes. Si ces programmes étaient offerts plus tôt, nous réduirions les taux de pauvreté, en particulier pour les personnes qui ne peuvent pas travailler et qui n'ont pas d'autres moyens de subsistance que l'aide sociale.

  (1715)  

    Merci. Je vous remercie de cette précision.
    Monsieur Cunningham, nous avons déjà entendu à notre comité que le tabac de contrebande est assurément un problème. Or, certains laissent parfois entendre que c'est ce sur quoi le gouvernement devrait vraiment se concentrer, et qu'un emballage neutre n'est pas vraiment nécessaire et n'aura pas l'effet souhaité de réduction du taux de tabagisme. Nous avons souvent une discussion sur d'autres États qui ont opté pour un emballage neutre, à savoir si c'est une réussite ou non.
    Je crois personnellement que c'est la bonne solution, et que nous devrions le faire. Pourriez-vous nous expliquer davantage pourquoi une solution n'exclut pas l'autre, et pourquoi l'emballage neutre est la prochaine étape que nous devons franchir?
    Nous avons besoin d'une stratégie globale qui comprend des taxes, des lois, des programmes de renoncement, de la sensibilisation et de la prévention de la contrebande. Les gouvernements de l'Ontario, du Québec et du fédéral peuvent en faire plus pour réduire la contrebande. Nous appuyons ces mesures parallèles. Les associations de dépanneurs qui font cela... elles sont financées par l'industrie du tabac. Des sociétés productrices de tabac en sont membres. Il n'y a pas souvent de bénévolat dans cette relation.
    Monsieur Dusseault.

[Français]

     Je vous remercie, monsieur le président.
    J'aimerais creuser un peu plus la question du revenu passif et essayer d'obtenir un chiffre qui montrerait l'importance de la déduction pour les petites entreprises qui serait perdue en atteignant un revenu d'investissement passif de 150 000 $.
    Y a-t-il quelqu'un, par exemple Mme Drever, ou d'autres, qui a fait le calcul pour savoir quel est l'impact monétaire réel de ce changement? Y a-t-il quelqu'un d'entre vous qui aurait un exemple type pour nous dire quel en est l'impact? En tant que parlementaire, je pense que ce serait intéressant de pouvoir mettre un chiffre là-dessus.

[Traduction]

    Tout dépend de la province dans laquelle se trouve chaque entreprise, mais les organisations commencent à perdre la déduction accordée aux petites entreprises lorsque leur revenu passif atteint 50 000 $. Elles n'y ont plus droit à 150 000 $. La perte est de 5 $ pour chaque dollar de revenu passif.
    La différence d'un point de vue fédéral est que nous parlons de 6 %, ce qui représente la perte de la déduction accordée aux petites entreprises. C'est sa valeur pour les petites et moyennes entreprises. Ajoutez-y les taxes provinciales, et cela peut représenter environ 16 % pour chaque dollar de revenu. Si 5 $ de revenus sont perdus, nous pourrions parler d'une somme de 60 000 $. C'est la valeur de la déduction accordée aux petites entreprises que ces entreprises pourraient perdre.
    N'oubliez pas que la déduction accordée aux petites entreprises est un report, et que lorsque nous avons une déduction accordée aux petites entreprises, les derniers dividendes sont considérés comme des dividendes non déterminés et sont imposés à un taux supérieur. Si nous payons un taux d'imposition des sociétés supérieur et que nous n'avons pas de déduction accordée aux petites entreprises, les dividendes sont alors considérés comme des dividendes déterminés, et le taux est beaucoup moins élevé. Sur 12 mois, ils finissent par être très similaires. Effectivement, si vous retiriez tout l'argent la même année, les taux d'imposition seraient très similaires.

[Français]

    Je vous remercie de cette clarification.
    Mon autre question porte sur la référence au 1er janvier 2018. Le projet de loi propose de mettre rétroactivement en application les mesures liées à la répartition du revenu. La société moyenne concernée devrait être au courant que, en date d'aujourd'hui, elle est censée avoir déjà commencé à modifier sa façon d'exploiter son entreprise pour se conformer à ce qui sera probablement adopté par le Parlement d'ici le mois de juin et qui va donc avoir un effet rétroactif.
    Cela vous inquiète-t-il? Voyez-vous cela comme un problème? Suggérez-vous de changer cette date dans le projet de loi?

  (1720)  

[Traduction]

    C'est une préoccupation pour bien des entreprises, car elles ne savent probablement pas dans quelle mesure elles seront touchées. Je serais d'accord. De nombreuses petites et moyennes entreprises ne savent pas comment ces règles de l'impôt sur le revenu fractionné vont s'appliquer à elles ou si elles y seront assujetties.
    Les dispositions législatives révisées ont été publiées le 13 décembre et devaient entrer en vigueur le 1er janvier. Voilà qui laissait très peu de temps à la plupart des entreprises pour s'y préparer. Devrait-on le reporter? Ce serait une bonne idée. J'ignore si c'est une option.

[Français]

     Je vous remercie.

[Traduction]

    Y a-t-il d'autres questions?
    Est-ce que les témoins aimeraient ajouter quelque chose pour conclure? Vous n'avez qu'à lever la main. Est-ce que tout le monde a terminé? Bien.
    Je vous remercie infiniment de votre témoignage et de vos réponses directes à nos questions.
    La séance est levée.
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