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FOPO Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent des pêches et des océans


NUMÉRO 098 
l
1re SESSION 
l
42e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 1er mai 2018

[Enregistrement électronique]

(0845)

[Traduction]

     Bonjour à tous et bienvenue à la séance numéro 98 du Comité permanent des pêches et des océans. Conformément à l’ordre de renvoi du lundi 16 avril 2018, nous étudions le projet de loi C-68, Loi modifiant la Loi sur les pêches et d’autres lois en conséquence.
    Avant de donner la parole à nos témoins, j’aimerais simplement dire aux membres du Comité que nous devons nous occuper un peu des travaux du Comité pour approuver les budgets pour l’automne et je me demande si nous pouvions prendre cinq minutes de chaque heure et prendre 10 minutes à la fin de la séance.
    Ai-je votre consentement?
    Des députés : D'accord.
    Madame la présidente, d’après nos calculs, nous en sommes à la troisième réunion sur le projet de loi C-68 et nous n’avons pas encore vu la liste complète des témoins. Nous nous demandons s’il est possible de donner cette information aux partis.
    Oui, monsieur Doherty, nous allons le faire distribuer.
    Merci.
    À ce sujet, pour ce qui est de la liste maîtresse, je crois que nous avons tous soumis nos listes en priorité; j’ai examiné certaines de nos listes et je ne sais pas comment les témoins ont été convoqués. Chose certaine, lorsque nous regardons ceux qui ont été présentés au Comité, cela ne semble pas faire partie de la priorité que nous avons présentée. S’il y a une justification à la liste maîtresse, il serait utile de savoir comment est effectuée la sélection.
    Nous pourrons en parler lorsque nous aborderons les travaux du Comité.
    Merci.
    Merci.
    Nous allons commencer aujourd’hui avec nos témoins. Au cours de la première heure, nous entendrons par vidéoconférence Keith Sullivan, président du Syndicat des pêcheurs de Terre-Neuve-et-Labrador.
    Nous accueillons également Pierre Gratton, président et chef de la direction de l’Association minière du Canada et Justyna Laurie-Lean, vice-présidente, Environnement et affaires réglementaires.
    Nous accueillons également Joshua Laughren, directeur exécutif d’Oceana Canada.
    Nous allons commencer ce matin avec M. Sullivan, pour 10 minutes, s’il vous plaît.
     Merci à tous. Je remercie le Comité de me permettre de prendre la parole aujourd’hui. Je ne suis pas sûr d’avoir été le premier choix de M. Donnelly, mais quoi qu’il en soit, nous allons commencer. J’espère que tout le monde appréciera mes commentaires. J’aurais certainement aimé être là aujourd’hui en personne.
    Je m’appelle Keith Sullivan et je suis le président du Syndicat des pêcheurs de Terre-Neuve-et-Labrador. Nous représentons des travailleurs dans plus de 500 collectivités de la province de Terre-Neuve-et-Labrador et la plupart d’entre eux travaillent dans le secteur des pêches. Environ 10 000 d’entre eux sont en fait des pêcheurs.
    En fait, bon nombre de ces collectivités ont existé pendant des siècles. Si les gens vivent dans ces localités de Terre-Neuve-et-Labrador, c’est à cause de la pêche. J’ai grandi dans une petite communauté de pêcheurs de Calvert. Il y avait six générations de pêcheurs dans cette région avant moi et c’est un peu comme bien des histoires de nos membres. J’ai eu la chance de travailler dans un bateau de pêche pendant de nombreuses années.
    La pêche côtière est le principal moteur économique des collectivités côtières de Terre-Neuve-et-Labrador. C’est l’épine dorsale de la classe moyenne dans ces collectivités rurales. Sans la pêche côtière, les collectivités rurales de Terre-Neuve-et-Labrador ne survivraient pas.
    Notre industrie a connu une transformation importante au cours des dernières années, particulièrement au cours des 20 dernières années. Notre capacité de nous adapter, de nous transformer et de nous réinventer a été une preuve incroyable de résilience et d’innovation dans la pêche côtière. Nous traversons maintenant une autre période de transition et nous constatons une fois de plus une incidence considérable sur notre pêche. Le réchauffement de la température de l’eau a généralement entraîné une diminution des stocks de mollusques et de crustacés de très grande valeur et nous assistons à une résurgence de nombreuses espèces de poissons de fond. Bien que de nouvelles possibilités se profilent à l’horizon, à court terme, nos membres, qu’il s’agisse de pêche ou de transformation du poisson, devront relever des défis importants.
    Pour rétablir la pêche de fond à Terre-Neuve-et-Labrador et soutenir ces collectivités côtières, il faut que la gestion soit fondée sur les principes de la durabilité écologique, bien sûr, sociale, mais aussi économique.
    Les modifications récemment déposées à la Loi sur les pêches fournissent une grande partie du fondement essentiel nécessaire pour atteindre ces objectifs. La plupart de mes commentaires d’aujourd’hui porteront sur les dispositions du projet de loi C-68 relatives à la gestion des pêches, plus précisément sur la préservation et la promotion de la pêche par les propriétaires-exploitants indépendants.
    Dans notre province, il n’est pas exagéré de dire que le principe du propriétaire-exploitant et la séparation de la flottille sont les deux principes de développement économique les plus importants que nous avons dans nos collectivités côtières, particulièrement dans les régions rurales de Terre-Neuve-et-Labrador. Ces deux politiques ont permis de maintenir en place une flottille côtière viable et d'injecter des richesses importantes dans toutes les régions de la province. Encore une fois, je ne pense pas qu’il soit exagéré de dire que ces deux politiques combinées sont les outils de développement économique les plus importants que notre province a à offrir et je dirais que ce serait semblable dans de nombreuses régions rurales du Canada atlantique. C’est en raison du rôle essentiel que jouent les propriétaires-exploitants et les flottilles que le Syndicat des pêcheurs de Terre-Neuve-et-le Labrador (FFAW) exerce des pressions depuis 20 ans pour que ces politiques soient inscrites dans la loi.
    Bien que les pêcheurs côtiers, leurs familles et leurs collectivités reconnaissent l’importance de ces politiques, il y en a qui ne voient pas l’importance de protéger la pêche des propriétaires-exploitants indépendants. Dans le passé, nous avons constaté que les intérêts des entreprises ont influencé et entravé l’application et la réalisation des politiques sur les propriétaires-exploitants et la séparation de la flottille. Par conséquent, les sociétés ont pris le contrôle dans l'obtention des permis de pêche et siphonnent la richesse et les avantages non seulement des pêcheurs, mais aussi des collectivités côtières et des régions entières de notre province.
(0850)
     L’attaque contre le principe du propriétaire-exploitant, menée principalement par les grandes entreprises de transformation du poisson a eu, au cours des 20 dernières années, de graves répercussions économiques sur la pêche et nos régions côtières. L'impact des accords de fiducie sur le coût des permis de pêche est particulièrement préoccupant, ce qui a rendu l'accès à la pêche extrêmement difficile pour les jeunes. Cela devient de plus en plus fréquent et c’est vraiment un facteur clé pour la prochaine génération de pêcheurs. Il est également important de noter que les pêcheurs qui participent à ces accords de fiducie reçoivent moins pour leurs prises. La même concurrence n’existe pas pour ces pêcheurs, de sorte qu’ils reçoivent des salaires moins élevés, dans bien des cas.
    Les politiques relatives à la séparation de la flottille et aux propriétaires-exploitants ont été remarquablement faciles à contourner au cours des dernières années. Elles sont extrêmement essentielles, mais en même temps, elles ont été faciles à contourner. Les équipes juridiques des entreprises ont conclu des accords de fiducie ou de contrôle selon lesquels le titulaire de permis doit transférer l’intérêt bénéficiaire d’un permis à une autre partie qui n’a pas légalement le droit d’en détenir un— c’est-à-dire, la plupart du temps, une entreprise de transformation du poisson ou une grande société. Dans de telles transactions, le contrôle sur la façon dont la licence est utilisée, vendue ou gérée est également accordé à cette tierce partie. Encore une fois, pour le titulaire de permis dont la licence est possédée ou détenue en son nom seulement, le contrôle total sur cette licence et les avantages vont à ces sociétés externes. D'ailleurs, il peut s’agir d'une personne de l’extérieur du Canada, simplement parce que nous n’avons pas les moyens de faire respecter la loi. Voilà pourquoi les pouvoirs d’application de la loi sont si essentiels pour assurer la protection de la flotte des propriétaires-exploitants.
    La pêche par des propriétaires-exploitants indépendants est un atout stratégique pour l’économie canadienne. Les modifications à l’article 43 de la loi qui donnent au ministre le pouvoir de faire adopter des règlements pour le respect du propriétaire-exploitant et de la séparation de la flottille sont essentielles. Avec l’entrée en vigueur de la loi, ces politiques deviendront plus robustes, avec des conséquences juridiques pour les sociétés qui détiennent des pêcheurs dans le cadre d’ententes de contrôle.
    La seule politique, comme nous l’avons vu, est insuffisante pour protéger l’avenir social, économique et culturel des collectivités côtières. Ces politiques méritent d’être inscrites dans la loi et sont, comme je l’ai déjà dit, les piliers du développement économique pour des centaines de milliers de personnes et leurs collectivités dans le Canada atlantique. Au fil des ans, il y a eu de nombreuses discussions avec le ministère des Pêches et des Océans sur la façon de mieux appliquer ces politiques, mais peu de progrès ont été réalisés. La politique visant à préserver l’indépendance de la flottille côtière dans les pêches de l’Atlantique du Canada — la PIFPCAC, comme beaucoup de gens d’affaires le savent — est une initiative stratégique importante qui est en place depuis près d’une décennie, mais qui a donné des résultats modestes. C’est une politique importante et bien intentionnée, mais encore une fois, ils ont eu la capacité de contourner cette politique sans la force de la loi.
    En fin de compte, la PIFPCAC et l’application de la loi sur le propriétaire-exploitant et la séparation de la flottille sont minées parce que l’activité réglementée n’est pas illégale. Le propriétaire-exploitant et la séparation des flottilles ne sont pas des lois et le fait de les enfreindre n’entraîne aucune sanction précise.
(0855)
    Les modifications proposées à l’article 9 de la loi devraient remédier à l’absence actuelle de sanctions en clarifiant le pouvoir du ministre d’agir en cas de violation de la loi. Ces dispositions confèrent au ministre le pouvoir de suspendre ou d’annuler des permis s’il détermine que le titulaire de permis a conclu une entente qui contrevient à toute disposition de la loi ou des règlements.
    La protection de la pêche côtière est l’un des meilleurs moyens de bâtir une classe moyenne forte dans des centaines de collectivités côtières — un peu comme Calvert, la collectivité où j’ai grandi — de créer des emplois, de protéger et de renforcer l’économie. Nous avons en fait une flotte de propriétaires-exploitants très sophistiquée et indépendante qui est capable de récolter toutes les espèces sur nos côtes. Elle est en mesure d’offrir ces produits frais à nos collectivités, mais nous devons nous assurer d’avoir une politique et un cadre juridique solides pour veiller à ce que les avantages de la pêche profitent aux pêcheurs et aux collectivités côtières avoisinantes.
    Nous ne pouvons plus nous permettre de prendre des décisions en vase clos en matière de pêche, pas plus que nous ne pouvons nous permettre d’ignorer la richesse des connaissances offertes par les gens qui passent leurs journées et d’innombrables heures dans des bateaux de pêche.
     Merci, monsieur Sullivan. Je suis désolée, je dois vous interrompre. Votre période de 10 minutes s'est écoulée.
    Nous passons maintenant à l'Association minière du Canada.
    Monsieur Gratton, vous avez 10 minutes.
     Je remercie les membres du Comité. Au nom de l’Association minière du Canada, Justyna et moi vous remercions de nous donner l’occasion de comparaître devant vous aujourd’hui.
    Comme certains d’entre vous le savent peut-être, lorsque j’ai parlé à vos collègues du comité de l’environnement au sujet du projet de loi C-69, j’ai dit que j’étais fâché parce que dans le même projet de loi, les dispositions transitoires pour les projets miniers en vertu de la LCEE n’étaient pas les mêmes que pour les projets de l’ONE.
    Dans ce dernier cas, le gouvernement a veillé à ce que tous les projets faisant l’objet d’une évaluation entreprise par l’ONE en vertu de la LCEE 2012 demeurent sous la responsabilité de l’ONE, mais pas dans le cas de l’exploitation minière, qui est confrontée à l’incertitude liée à la modification des lois en cours de route.
    Devinez quoi? Je suis furieux contre le projet de loi C-68 pour une raison très semblable. Lors de notre comparution devant votre comité le 14 novembre 2016, nous avons insisté sur l’importance d’une capacité ministérielle suffisante pour mettre en oeuvre la loi et gérer la transition. Nous avons décrit les défis importants que nous avons rencontrés lors de la transition à la suite des modifications apportées en 2012. À maintes reprises, nous avons souligné au ministère qu’il devait mieux gérer la transition cette fois-ci.
    Nous avons apprécié vos recommandations, en particulier les recommandations 21, 22 et 25, qui préconisaient des investissements dans l’embauche de personnel sur le terrain et l’affectation de ressources significatives aux volets surveillance, conformité et application de la loi du ministère. Nous sommes heureux que le gouvernement ait augmenté sensiblement le financement du MPO.
    Toutefois, dans le cas du projet de loi C-68, nous constatons encore une fois que le problème de la transition n’est pas réglé. Bien que les dispositions proposées au paragraphe 53(1) prévoient une transition ordonnée pour les demandes d’autorisation jugées complètes, elles ne reconnaissent pas les directives données aux promoteurs par le MPO en réponse à une demande d’examen ou d’orientation d’une demande d’autorisation.
    Qu’est-ce que cela veut dire exactement? Je vais vous expliquer.
    Il faut du temps pour déterminer si un projet minier d’envergure et complexe aura une incidence sur l’habitat du poisson, recueillir de l’information sur l’habitat du poisson qui pourrait être touché et examiner les options d’atténuation ou d’évitement. Les études sur le terrain prennent du temps et doivent tenir compte des contraintes saisonnières. Si une autorisation en vertu de la Loi sur les pêches est requise, il faut prévoir plus de temps pour recueillir tous les renseignements nécessaires, évaluer les options de compensation, demander l’avis des collectivités touchées, en particulier des collectivités autochtones et se conformer aux demandes d’autorisation présentées en vertu de l’alinéa 35(2)b) du Règlement sur les pêches. Le coût de la trousse complète de demande d’autorisation peut varier de centaines de milliers de dollars pour les petits projets à des millions de dollars dans le cas des grands projets et peut prendre plusieurs années.
    Par conséquent, le fait de demander un examen et de préparer une demande n’est pas un engagement futile ou rapide. Les projets miniers sont également assujettis aux processus d’évaluation environnementale fédéraux et provinciaux. Cela peut prendre trois ans ou plus et une demande d’autorisation en vertu de la Loi sur les pêches ne peut être présentée tant que ces évaluations ne sont pas terminées. Le cas d’un membre du AMC est particulièrement troublant et illustre l’importance de notre demande d’amendement.
    Le projet a fait l’objet d’une évaluation environnementale fédérale en 2012 et le promoteur a dû réviser complètement ses plans originaux liés à la Loi sur les pêches lorsque les nouvelles modifications apportées à la Loi sur les pêches sont entrées en vigueur à la fin de 2013. Dans le cas de ce projet, il est peu probable que l’évaluation environnementale soit terminée à temps pour permettre qu’une demande d’autorisation soit présentée avant l’entrée en vigueur du projet de loi C-68 et de ses modifications. Ce promoteur serait alors tenu de réviser sa demande à nouveau, parce que les directives étendues données par les fonctionnaires du ministère au cours des six dernières années seraient soudainement jugées invalides.
    Je suis désolé, mais nous trouvons cela tout simplement inacceptable. Nous vous exhortons donc à modifier le paragraphe 53(1), comme nous vous l’avons suggéré dans notre mémoire, afin d’éviter que les promoteurs responsables soient forcés de refaire des études sur le terrain, la conception des projets, la conception des crédits compensatoires et l’élaboration des applications.
    Je dois souligner que nous avons rencontré des représentants du ministère à ce sujet et nous croyons avoir été entendus, mais, encore une fois, nous encourageons fortement le Comité à examiner sérieusement l’amendement que nous proposons, car, membres du Comité, notre secteur a fait preuve de diligence raisonnable. Contrairement à d’autres secteurs qui croient que leurs activités n’étaient plus réglementées par la Loi sur les pêches, au cours des six dernières années, nous nous sommes entièrement conformés aux exigences des modifications de 2012 à la Loi sur les pêches et nous avons communiqué avec les fonctionnaires du ministère pour les comprendre.
(0900)
     En effet, les fonctionnaires, de leur propre aveu, confirment qu'à présent, la plupart des autorisations ne s’appliquent qu’au secteur minier. Peu d’autres, à l’abri de l’examen de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale et, par conséquent, de l’examen du MPO, ont pris la peine de demander des autorisations même si leurs activités peuvent causer du tort aux poissons.
    Pourtant, nous estimons que c’est le secteur minier qui, en suivant les directives reçues, risque maintenant d’être pénalisé pour notre diligence raisonnable et notre engagement envers le ministère si les directives reçues sont invalidées par des dispositions de transition inadéquates et qu’il faut redoubler d’efforts pour se réengager après l’entrée en vigueur des nouvelles modifications.
    La modification que nous demandons n’est pas une clause de droits acquis. En fait, nous croyons que le nombre de projets qui seraient touchés par le changement proposé est faible. Par ailleurs, la modification demandée aux dispositions transitoires n’aurait aucune incidence sur la santé de l’habitat du poisson au Canada. Nous ne croyons pas qu’il y ait eu une détérioration de la protection contre une rigueur insuffisante des examens et des demandes d’autorisation pour les projets miniers — et je crois que le ministère pourrait le confirmer également. S’il y a eu détérioration, cela est dû à l'absence de contrôle des activités des autres. Nous demandons un allégement du fardeau administratif inutile imposé aux promoteurs de projets responsables et au personnel régional du MPO.
    Permettez-moi maintenant d'aborder un deuxième enjeu, qui a trait aux effets cumulatifs.
    Lorsque je me suis adressé au comité de l’environnement au sujet du projet de loi C-69, j’ai parlé de la façon dont la LCEE 2012 a pénalisé le secteur minier en nous rendant responsables des effets cumulatifs d’autres secteurs qui ne sont pas assujettis à la LCEE. Dans le cas du projet de loi C-68, nous sommes confrontés à une situation similaire avec l'exigence de l'alinéa 34(1)d) proposé que le ministre tienne compte des effets cumulatifs avant de recommander des règlements ou d’exercer tout pouvoir.
    Il faut tenir compte des effets cumulatifs lorsqu’on prend des décisions qui peuvent avoir une incidence sur la santé des écosystèmes aquatiques. Les pêches sont de compétence fédérale et la Loi sur les pêches contient une gamme complète d’outils de réglementation pour l’exercice de cette compétence. Le MPO dispose donc des outils nécessaires pour surveiller, évaluer et gérer les effets cumulatifs.
    Toutefois, d’après notre expérience de la LCEE 2012, le ministère pourrait, par défaut, imposer à quelques projets miniers le fardeau de la gestion des effets cumulatifs plutôt que de prendre les mesures nécessaires pour s’attaquer aux causes profondes de la détérioration cumulative de l’habitat du poisson.
    Vous avez récemment entendu Margot Venton, d’Ecojustice Canada, qui a dit:
 [...] l’habitat du poisson est dégradé non seulement par les grands projets, mais aussi par les répercussions des travaux, des entreprises et des activités à petite échelle. Pour endiguer la vague de perte graduelle de l’habitat, le MPO doit faire un meilleur travail en tenant compte de cette perte cumulative de l’habitat...
    Oui — devinez quoi — je suis d’accord avec Ecojustice et avec d'autres également.
    Le rapport publié récemment par le Fonds mondial pour la nature, intitulé Rapports sur les bassins hydrographiques - Une évaluation nationale de la qualité de l’eau douce au Canada, met en lumière la complexité et la diversité des stress qui s’exercent sur les bassins hydrographiques du Canada. Elle appuie notre préoccupation selon laquelle il est impossible de remédier à ces tensions en concentrant l’attention du ministère sur quelques projets miniers. Les activités affectant le poisson et son habitat doivent être pleinement évaluées par la partie qui a causé l’effet. Les projets miniers ne devraient être responsables que des effets liés aux projets, car notre industrie n’a aucun contrôle sur les effets liés aux activités non minières, comme la foresterie, l’agriculture, l’hydroélectricité et les travaux municipaux. Bref, la loi doit s’appliquer de façon uniforme à tous les ouvrages, entreprises ou activités.
    Les promoteurs de projet ne devraient pas être tenus responsables des effets cumulatifs des activités non réglementées, comme le prévoit le paragraphe 34.1(1) proposé. Selon le libellé actuel du projet de loi, un promoteur pourrait être tenu d’éviter, d’atténuer ou de créer des compensations pour l’habitat du poisson afin de compenser les dommages causés à l’habitat du poisson par d’autres industries.
    On pourrait répondre en partie à ces préoccupations en modifiant l'alinéa 34.1(1)d) tel qu’énoncé dans notre mémoire.
    En conclusion, si les dispositions transitoires du paragraphe 53(1) sont modifiées tel que demandé et si vous contribuez à équilibrer la responsabilité à l’égard des effets cumulatifs, les répercussions de la Loi sur les pêches révisée proposée par le projet de loi C-68 sur le secteur minier devraient être gérables. Bien entendu, cela dépend de la façon dont le MPO les interprète et les met en oeuvre.
    Merci beaucoup. Je suis prêt à répondre à vos questions.
(0905)
    Merci beaucoup.
    Il vous restait encore 30 secondes, alors vous vous en êtes très bien tiré.
    Monsieur Laughren, vous avez la parole pour 10 minutes.
     Merci, madame la présidente et membres du Comité.
    Je remercie Oceana de me donner l’occasion de comparaître aujourd’hui au sujet du projet de loi C-68 et je vous remercie de votre excellent travail.
    Oceana Canada collabore avec les autres groupes environnementaux qui ont comparu devant vous également. Nous consultons régulièrement les Premières Nations sur la façon de renforcer le projet de loi C-68. Nous appuyons les amendements prioritaires que d’autres vous ont présentés sur les flux environnementaux et les effets cumulatifs. Les groupes des Premières Nations, en particulier, ont souligné l’importance de créer des réserves d’habitat dans la loi en collaboration avec les Premières Nations et de mentionner la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones dans la loi.
    L'objectif prioritaire d’Oceana et notre domaine d’expertise est le rétablissement des pêcheries. Nous sommes d’avis que le projet de loi C-68, dans sa forme actuelle, ne contient pas un élément vraiment crucial, c’est-à-dire le devoir d’agir lorsque les stocks et les populations sont épuisés, dans le but de rétablir la pêche à des niveaux sains. D’autres pays l’exigent et je vais vous le montrer. Le Canada s’est engagé à le faire dans le cadre d’accords internationaux et cela existe déjà dans la politique ministérielle. Nous croyons que l’enchâssement de ce devoir dans la loi est la chose la plus importante que nous puissions faire en tant que pays pour assurer l’avenir de nos pêches et de tous ceux qui en dépendent.
    Un mot sur notre entreprise. Oceana Canada a été créée en 2015 en tant qu’organisation scientifique indépendante. Elle fait partie du plus grand groupe international axé uniquement sur les océans dans huit pays en plus de l’UE. Nous croyons que les océans sont essentiels pour nourrir les neuf milliards de personnes qui seront présents sur Terre d’ici 2050. En rétablissant le secteur des pêches du Canada, nous pouvons renforcer nos collectivités côtières, en retirer de plus grands avantages économiques et nutritionnels et protéger notre avenir. Oceana Canada a les mêmes objectifs que tout le monde dans cette salle, c’est-à-dire des pêches vigoureuses, saines, sauvages ainsi que tous les avantages culturels et économiques qui en découlent.
    En ce qui concerne le projet de loi C-68, pour la première fois depuis la création de la Loi sur les pêches en 1868, le projet de loi C-68 contient des dispositions spécifiques au rétablissement des stocks. C’est bien. Malheureusement, selon le libellé actuel, les dispositions ne sont pas à la hauteur de ce que nous savons de l’expérience mondiale pour rétablir efficacement les stocks. Il ne respecte pas nos accords internationaux et il ne nous permettra pas de respecter les lois des autres pays.
    Le projet de loi C-68 exige que le ministre examine s’il existe des mesures non précisées pour reconstituer les stocks qui, à son avis, se trouvent dans la zone critique lorsqu’il prend des décisions de gestion. J’aimerais m’arrêter un instant là-dessus. « Envisager » s’il y a ou non une mesure en place qu'une fois que les stocks se situent à un niveau inférieur ou égal au niveau auquel les politiques et les mesures de gestion du gouvernement sont conçues pour qu'il n'y parvienne jamais.
    J’ai entendu dire que nous ne devrions pas nous en faire, que les règlements seront là où ces détails seront inclus. Nous convenons, bien sûr, que la réglementation sera nécessaire et c’est là que l’on peut trouver beaucoup de détails. Nous croyons fondamentalement que la loi doit fournir des directives claires aux responsables de la rédaction des règlements ainsi qu’aux intervenants et aux titulaires de droits sur l’intention de ces règlements. Cette orientation est actuellement absente.
    Qu’est-ce qui constitue une mesure de rétablissement des stocks? S’il n’y a pas de mesures pour reconstituer les stocks épuisés, que se passe-t-il? Reconstituée à quoi? S’agit-il de maximiser le rendement durable ou d’atteindre les points de référence supérieurs ou simplement de les reconstituer jusqu’à la limite de la zone critique et de les laisser là? Dans quel délai? Le projet de loi C-68 ne respecte pas les normes internationales, au moment même où le Canada cherche à jouer un rôle de chef de file mondial dans la gestion des pêches et des océans.
    J’aimerais vous donner rapidement quelques exemples tirés d’autres lois dans le monde, révisées par souci de brièveté. Aux États-Unis, la loi stipule que « les mesures de conservation et de gestion doivent empêcher la surpêche tout en obtenant, de façon continue, le rendement optimal de chaque pêche pour l’industrie américaine de la pêche ». Il ajoute que tout plan de gestion des pêches, quel qu’il soit, doit contenir les mesures nécessaires et appropriées pour prévenir la surpêche et rétablir les stocks de surpêche.
     Dans l’Union européenne, il est dit que la politique commune de pêche « vise à assurer que l’exploitation des ressources rétablit et maintient les populations ... au-delà des niveaux qui peuvent produire le rendement durable maximal. » Le texte se poursuit ainsi: « Les plans pluriannuels sont adoptés en priorité [...] et contiennent des mesures de conservation visant à rétablir et à maintenir les stocks de poissons à des niveaux supérieurs à ceux pouvant produire un rendement maximal durable. »
     En Nouvelle-Zélande, la loi stipule que le ministre doit fixer un total autorisé des captures qui permet de modifier le niveau de tout stock dont le niveau actuel est inférieur au rendement maximal durable d’une façon et à un taux qui permettra de rétablir le stock à ce niveau.
     Au Japon, la loi stipule que l’État doit prendre des mesures « visant à maintenir ou à récupérer les ressources halieutiques à un niveau qui permet une production maximale durable ».
(0910)
     Le Canada l’a exigé des nations dans la nouvelle convention de l’OPANO que nous avons signée. D’autres pays et nous-mêmes y avons adhéré.
    Dans chacun de ces cas, il existe des règlements et d’autres directives qui précisent la manière dont les gouvernements peuvent et doivent tenir compte des considérations économiques et sociales, tenir compte des stocks interdépendants et ajuster les plans lorsque la nature ne réagit pas comme nous le pensons. C’est approprié et nécessaire. On ne peut pas légiférer la biologie. Mais dans chaque cas, l’intention de la loi est claire: lorsque le stock est en difficulté, les gouvernements doivent réagir et non « envisager » de répondre.
    Bien sûr, c’est important parce que la nécessité de reconstituer nos pêches n’a probablement jamais été aussi grande. Nous avons vraiment mis un terme à certains des pires cas de surpêche qui se sont produits au cours des dernières décennies, mais bon nombre de nos pêches sont encore épuisées, souvent des décennies après l’effondrement. Nous sommes maintenant dans la position vulnérable d’être fortement tributaires d’une poignée d’espèces pour soutenir l'essentiel de l’économie de l’industrie de la pêche, comme le homard, le crabe et la crevette, évidemment.
    Comme vous l’avez entendu, les populations de poissons marins du Canada ont diminué de 55 % depuis 1970. Cela représente plus de la moitié de notre biomasse de poissons de mon vivant. Selon les chiffres les plus récents publiés par le MPO, il n’y a que trois plans de rétablissement en place pour les 21 stocks que le MPO a confirmé être dans la zone critique. Le MPO continue souvent d'autoriser la pêche dirigée sur les stocks dans la zone critique, même en l’absence de plan de rétablissement ou de points de référence de gestion. La morue du Nord, bien sûr, qui s’est effondré en 1992 et qui fait l'objet d'un moratoire depuis 26 ans, comme le comité l’a fait remarquer, n’a toujours pas de plan de reconstitution et il n’y a pas de point de référence supérieur identifié. Quoi qu’il en soit, les décisions de gestion se poursuivent et permettent au niveau de pêche d'augmenter à un niveau de stock précaire, ce qui lui donne le privilège douteux d’être la plus importante pêcherie de poisson de fond, je crois, dans le Canada atlantique à l’heure actuelle, pendant qu’elle fait toujours l’objet d’un moratoire.
    Nous sommes d’avis que ce manque historique de priorité à la reconstitution, malgré les engagements politiques à cet égard et à la mise en oeuvre de plans de reconstruction est directement attribuable à l’absence de directives législatives et à une obligation légale. Le Comité a la possibilité de remédier à cette situation; et j’ajouterai qu’il y a de solides preuves que l’ajout d’une obligation légale de créer des plans de reconstitution fait une différence — une grande différence. Par exemple, depuis que les États-Unis ont légalement exigé la reconstitution des stocks de poissons épuisés, 44 stocks ont été classés comme reconstitués depuis 2000, générant en moyenne 50 % de plus de revenus que la surpêche. Dans l’UE, le nombre de stocks ayant un total autorisé de captures, fondé sur des données scientifiques pour produire un rendement maximal durable au fil du temps, est passé de deux stocks en 2007 à 53 en 2016. La morue, bien sûr, une fois effondrée en Europe comme ici, s’est rétablie dans la mer du Nord, en Norvège et dans la mer de Barents.
    Le Canada s’est engagé à rétablir des accords internationaux comme l'Accord des Nations unies sur les stocks de poissons, le Code de conduite pour une pêche responsable de la FAO et la Convention de l’OPANO. C’est déjà la politique du ministère, mais ce qui nous manque, ce sont les directives juridiques.
    Nous vous recommandons de modifier le projet de loi C-68 en exigeant que le ministre élabore des plans de reconstitution lorsque les stocks se retrouvent dans la zone critique; établir un objectif de reconstitution des stocks hors des zones critiques et prudentes, et revenir à des niveaux acceptables recommandés dans le cadre de pêche durable du MPO à l’heure actuelle; et inclure un calendrier et des directives sur les échéanciers de reconstitution.
    Évidemment, ce n’est pas une panacée. Ce genre de devoir doit s’accompagner d’une bonne science, d’une solide gestion, d’un renforcement des capacités et cela doit se faire en partenariat avec les collectivités et les gens qui dépendent de nos océans et qui y sont profondément affectés. Les pays qui ont ce devoir juridique d’agir ont des pêches plus saines et plus stables que celles qui n’en ont pas. C’est certainement ce que nous voulons tous.
    Dans notre mémoire, nous proposerons un libellé précis à l'intention du Comité.
    Nous comptons sur votre appui et vos discussions. Merci.
(0915)
    Merci beaucoup, monsieur Laughren.
    Nous passons maintenant au parti ministériel pour les sept premières minutes. Monsieur McDonald, vous avez la parole.
    Merci, madame la présidente.
    Merci à nos témoins qui comparaissent en personne et, bien sûr, à M. Sullivan, qui comparaît par vidéoconférence.
    Je suis heureux de vous parler de nouveau, Keith. Je sais que nous nous sommes rencontrés la semaine dernière pour une brève discussion.
    Vous avez parlé du propriétaire-exploitant et de son importance pour la flotte. Vous avez dit que vous représentez environ 10 000 pêcheurs. La FFAW représente les travailleurs d’usine; les personnes qui participent à la pêche, tant sur la côte qu’au large des côtes et les gens qui travaillent sur les navires. Cela fait partie de ceux que vous représentez dans le secteur des pêches. Le bassin est vaste. Essentiellement, vous parlez au nom de tous les intervenants. En ce qui concerne le propriétaire-exploitant, vous avez expliqué comment ça se passe et j’espère que cela changera dans le projet de loi. Que faisons-nous pour corriger ce qui s’est déjà passé? Envisagez-vous un moyen de renverser ce qui s’est passé en ce qui concerne la propriété des sociétés par opposition aux propriétaires-exploitants?
     Oui, absolument. Je crois que quelques mesures ont été prises pour faire enquête sur les cas où des accords de fiducie et des accords de contrôle ont été conclus, de sorte que ces accords qui, à l’heure actuelle, ne font pas partie de la politique devraient être illégaux et, espérons-le, le seront bientôt.
    Il est nécessaire d'acquérir davantage de ressources et d’investissements. Je sais que des fonds ont été débloqués pour aider à la mise en oeuvre de ce projet de loi, alors il sera important que nous ayons les investissements nécessaires afin de voir qui minera vraiment cette importante politique économique. Il s’agit en fait d’y consacrer du travail, du temps et des investissements, parce que, dans les endroits où les entreprises perdront une licence, par exemple, cela peut avoir une valeur d'un, deux ou trois millions de dollars. Il y a des pénalités assez importantes. Ce n’est pas un investissement très sûr pour les gens qui sont prêts à laisser ces capitaux en suspens.
    En fait, c’est bien d’avoir cela dans la politique et maintenant dans la loi et la réglementation, mais il faut vraiment faire un suivi lorsqu'il est question d'une pierre angulaire économique aussi importante pour nos provinces, particulièrement à Terre-Neuve. Comme vous l’avez dit, nous en dépendons absolument et c’est le plus grand secteur en ville pour la plupart de nos régions rurales et côtières. Cela va du pêcheur aux travailleurs d’usine, en passant par tous les camionneurs et toutes les entreprises existantes, jusqu’à la valeur de ce que nos gouvernements municipaux exploitent, c'est-à-dire la valeur des pêches. C’est absolument essentiel et c’est pourquoi ces changements comptent parmi les plus importants que nous ayons vus depuis un certain temps.
     L’investissement de suivi est la partie sur laquelle j’allais terminer si j’avais mieux planifié mon temps. C’est l’autre élément clé.
(0920)
    En disant cela, Keith, vous avez aussi parlé des jeunes qui peuvent se lancer dans la pêche, mais dans bien des cas, vous entendez parler d’une société qui achète une entreprise ou d’une participation majoritaire dans une entreprise dans le cadre de ces accords de fiducie et qui verse des millions de dollars à un pêcheur ou à une entreprise en particulier.
    Comment pouvons-nous faire en sorte qu’il soit abordable pour les nouveaux venus ou les jeunes de s'engager dans le secteur de la pêche à ce niveau, alors que les quotas sont si coûteux? Seules les grandes sociétés ont la capacité de payer ces sommes d’argent. Comment faire pour que les pêcheurs, les gens dans les bateaux, aient les moyens d’acheter ces quotas et ces entreprises?
    En fait, mon expérience m’a montré que, s’il y a de bonnes possibilités de gagner sa vie et d’élever une famille dans le secteur de la pêche, les gens vont investir. Ce n’est pas comme les autres entreprises. Il faut que l’analyse de rentabilisation soit logique et les gens s’y intéresseront. Les gens veulent vraiment vivre dans les régions rurales de notre province et la pêche est souvent un moyen de subsistance appréciable.
    Ce que nous avons vu dans le passé, ce sont des jeunes, peut-être sur le pont d’un bateau, des jeunes qui ont grandi dans cette collectivité, qui ont eu l’occasion d’obtenir un permis, mais ces entreprises, qui sont manifestement beaucoup plus en moyen — parfois des entreprises nationales ou internationales — ont toujours eu la capacité de dépasser les autres groupes. Si vous vous adressez simplement à la banque et que vous tentez de réunir cette somme à investir, les entreprises sont toujours en mesure de concurrencer les gens avec leur plan d’affaires complètement différent. Elles peuvent compenser la valeur d’autres façons, par exemple en ne payant pas les gens le même montant que lorsqu’ils avaient le contrôle de leur permis. En fait, l’élimination de ces dispositions place les jeunes pêcheurs sur un pied d’égalité. Nous pouvons certainement envisager d’autres solutions pour les jeunes pêcheurs.
    Monsieur Laughren, vous avez mentionné quelque chose qui, je suppose, est assez difficile pour un député de Terre-Neuve-et-Labrador, le moratoire sur la morue du Nord qui a commencé en 1992 — il y a 26 ans maintenant — et l’absence d’un plan de reconstitution adéquat et peut-être l'exécution d’un plan de gestion médiocre au départ. Comme l’a dit M. Sullivan, la pêche est très importante sur les plans économique et social pour quelque 500 collectivités de Terre-Neuve seulement.
    Que répondez-vous aux gens qui dépendent du quota qu’ils doivent avoir pour une année de rentabilité? Étant donné que la morue est dans un état critique, même s’il y a un moratoire et qu’il y a de la pêche, devons-nous l’éliminer complètement? Comment conciliez-vous cela avec les collectivités et la survie du stock?
    Le point évident sur lequel nous nous entendons tous, c’est que la surpêche des stocks, y compris la morue, a fait beaucoup plus de tort aux collectivités de Terre-Neuve que toute conservation ou tout protecteur de l’environnement. Ce sont des décisions difficiles. L’idée d’élaborer un plan approprié et d’établir des objectifs à l’avance signifie en fait qu’il faut avoir cette discussion et elle est difficile. Ayez cette discussion avant et non pas après avoir atteint ces seuils. Nous sommes maintenant en mesure de nous attendre à une décision du ministre sur la morue sous peu et personne n’a la moindre idée de ce qu’il va faire, parce qu’il y a un pouvoir discrétionnaire total et absolu à ce sujet et aucun plan pour nous guider. Vingt-six ans après l’effondrement, nous ne nous entendons toujours pas sur l’orientation que nous voulons donner aux stocks ou sur les niveaux que nous allons commencer à autoriser pour la pêche. Ce sont des discussions difficiles que nous devrions avoir et surtout avant d’en arriver à cette étape.
    Merci, monsieur Laughren.
    Nous passons maintenant à M. Doherty pour sept minutes.
    Merci à nos invités.
    J’aimerais poursuivre dans la même veine que M. Laughren. Si vous avez suivi les témoignages des comités précédents, c’est quelque chose qui me préoccupe beaucoup. À mon avis, c’est une question de gestion.
    J’aimerais avoir votre opinion. Le MPO a comparu devant le Comité à maintes reprises, que ce soit au cours de la présente législature, de la législature précédente ou de celles auparavant. Depuis 26 ans, le MPO comparaît devant le Comité, devant les membres du Parlement et promet de faire mieux, de s'améliorer, de faire en sorte que nos stocks de poissons dépassent le niveau critique. Quel est le problème que nous semblons avoir? Est-ce une question institutionnelle ou est-ce strictement une question de gestion au sein du MPO?
(0925)
    Je pense que c’est certainement plus qu’une simple question de gestion au sein du MPO. Lorsque la situation se reproduit au cours d’une génération ou plus, on commence à examiner les facteurs fondamentaux, par opposition à une personne qui prend une mauvaise décision.
    D’accord.
    Je pense qu’il s’agit d’un manque d’orientation et d’un manque de cadre pour prendre ces décisions. Je pense que nous sommes tous complices. Il y a beaucoup de voix sur un grand nombre de stocks différents, des voix qui demandent que les stocks soient rouverts avant qu’ils ne devraient l'être ou que les quotas soient fixés à un niveau supérieur ou même au-delà des avis scientifiques. Ces voix viennent aussi de l’extérieur du ministère. Bien que je veuille tenir le ministère responsable des décisions, je veux aussi m’assurer que nous sommes justes et exacts quant à la provenance de ces facteurs et qu’ils soient de portée générale.
    Nous ne faisons rien pour créer plus de poissons. C’est une observation. Nous aimons bien parler, mais nous ne faisons rien pour créer plus de poissons.
     Je ne serais pas aussi sévère que cela. Je pense que nous avons des exemples de bonne gestion au Canada. Nous avons des exemples de rétablissement des réserves, des résultats positifs comme dans le cas du flétan. Pour moi, c'est un cas très positif. Quand on réduit la pression exercée sur les réserves et qu'on laisse les ressources se rétablir, c'est ce qui se passe le plus souvent. Il suffit de leur donner du temps et de laisser faire la nature, si vous voulez.
    Vous avez parlé de quelques pays qui ont obtenu certains résultats. Est-ce que votre groupe pourrait nous communiquer un plus de détails? Nos analystes pourraient aussi nous fournir ces renseignements.
    Bien sûr.
    Monsieur Gratton, je suis très sensible à votre témoignage sur ce projet de loi. À votre avis, est-ce que les changements apportés en 2012 ont permis aux promoteurs de faire approuver plus facilement leurs projets?
    Pas les promoteurs miniers, non.
    Je vois. D’autres voudraient faire croire que cela a été fait bon gré mal gré et que, une fois les changements apportés, les promoteurs ont eu toute liberté de faire ce qu’ils voulaient. Des témoins nous ont déjà dit que ce n’était pas le cas. En fait, cela a un peu clarifié la démarche, mais il ne s'agissait pas de donner carte blanche aux promoteurs, n'est-ce pas?
    Voulez-vous répondre à cette question? Allez-y.
     Les différences entre l’interprétation effective de la loi et les changements apportés, du moins pour notre secteur dans les eaux intérieures, étaient très subtiles. Certains des biologistes qui travaillent dans notre secteur diraient que la loi actuelle est scientifiquement plus solide parce qu’elle met l’accent sur la productivité de la pêche en général et qu’elle permet de tenir compte de l’apport alimentaire, de la qualité de l’habitat, etc., bien mieux que la loi précédente ou même, dans une certaine mesure, la future loi.
     Vous parlez de la loi actuelle, c’est-à-dire des changements qui ont été apportés en 2012.
    Oui, mais elle n'a pas été à la hauteur du point de vue de la conformité, de la promotion et de la mise en oeuvre. Beaucoup de gens n'ont pas bien compris la loi.
    Monsieur Gratton, vous avez dit que les travaux des six dernières années devraient probablement être abandonnés et qu'on devrait recommencer. Savez-vous combien de projets seraient touchés?
    À peine une demi-douzaine. Ce n’est pas beaucoup, mais pour ces projets, c’est... Eh bien, dans l’exemple que nous vous avons donné, ils l’ont déjà refait, mais il faudrait qu'ils le refassent une deuxième fois.
    Très bien.
    Est-ce qu'il s'agit de grands projets?
    Oui, ce sont des mines importantes. En fait, ce projet concerne votre province.
    Avez-vous des chiffres sur l'incidence économique à cet égard?
    Le coût en serait probablement de quelques millions de dollars. Le délai supplémentaire avant la mise en oeuvre du projet a également un impact.
     Monsieur Sullivan, j'ai trouvé intéressants vos commentaires sur le fait que le propriétaire-exploitant et la séparation de la flottille sont les deux outils de développement économique les plus importants pour Terre-Neuve-et-Labrador. Votre organisation s’est récemment prononcée très vigoureusement contre le ministre au sujet du TAC appliqué au crabe des neiges, du prix du crabe des neiges et de la décision concernant la mactre.
    Ne craignez-vous pas, vous et votre organisation, que le projet de loi C-68 donne plus de pouvoir de ce genre au ministre, avec d'importantes répercussions sur vos membres?
(0930)
    Tout d’abord, le plus grand avantage que nous voyons est le fait que nous assurons le suivi de la protection et de la promotion de la flotte de propriétaires-exploitants.
    Je parle précisément du pouvoir ministériel.
    Oui.
    Comme je l’ai déjà dit, les navires côtiers ont actuellement une capacité incroyable et ils peuvent pêcher la mactre. C’est un exemple où de bons emplois ont été transférés de Terre-Neuve-et-Labrador à une autre province, et cela a vraiment déstabilisé une main-d’oeuvre très solide. Il était possible de prendre ce genre de décision auparavant. Nous estimons que, à bien des égards, le système s'est amélioré et qu’il est davantage axé sur la participation des gens dans les collectivités.
    Merci, monsieur Sullivan, je dois vous interrompre.
    Monsieur Donnelly, vous avez sept minutes.
    Merci, madame la présidente. Merci à tous ceux qui sont venus témoigner au sujet du projet de loi C-68, la Loi sur les pêches, qui est probablement l’une des plus importantes mesures législatives au pays pour protéger cette activité.
    Nous avons parlé de l’importance d'essayer de prévenir la surpêche. C’est une affaire cruciale. Nous avons parlé de l’importance des plans de rétablissement. Je dirais également que l’habitat ou la perte d’habitat est d'une importance cruciale dans tout le pays quand on parle de pêche florissante.
    Monsieur Laughren, si vous me permettez de commencer par vous et Oceana, vous avez donné des exemples précis d’autres pays et de l’importance des plans de rétablissement dans leur législation. Vous en avez parlé dans le détail.
    À la toute fin de votre témoignage, vous avez dit que vous pourriez proposer un libellé pour modifier le projet de loi C-68 en ce sens. Êtes-vous en mesure de nous fournir cela le plus tôt possible?
    Oui, tout à fait. Nous nous sommes concertés avec le ministère à ce sujet, avec le cabinet du ministre, notamment pour éviter des conséquences imprévues.
    Je crois que le dernier délai pour les amendements est le 10 mai. Nous veillerons à le faire avant, et bien avant de préférence, donc le plus tôt possible.
    Qu’est-ce qui est en jeu si ce projet de loi n’inclut pas de disposition sur le rétablissement des ressources halieutiques?
    Il y a probablement environ 27 espèces dans la zone critique. Nous avons perdu 55 % de nos réserves de poisson. S'il est question de changements institutionnels, je n’en vois pas. Il faut s'attendre à ce que cette tendance à la baisse se prolonge si nous ne profitons pas de cette occasion pour corriger la situation.
    Si nous intégrons cette consigne, appuyée par de bonnes données scientifiques, ce sera peut-être le point tournant qui nous permettra de rétablir l'abondance dans nos océans.
     Par ailleurs, quelle importance cela a-t-il à l'égard d’autres campagnes ou de ce que vous pensez que le projet de loi C-68 devrait inclure?
    Je dirais sans hésiter que c’est certainement notre principale priorité en ce moment.
    Je donnais un cours récemment et je me suis dit que ce projet de loi, et notamment cet élément du projet de loi, est la chose la plus importante sur laquelle j’ai travaillé au cours de mes 20 ans de carrière dans le domaine de la conservation. Je suis convaincu de son importance, de l’impact que cela aura et que c'est l'occasion ou jamais.
    Je pense que la question se pose à l'échelle mondiale et, bien sûr, à l'échelle nationale, ici au Canada. Je vous remercie de votre témoignage et de votre présence parmi nous.
    Monsieur Sullivan, vous avez souligné l’importance du propriétaire-exploitant et de la séparation de la flottille.
     Je me demande si vous avez un libellé précis, que vous pourriez fournir au Comité pour consolider le projet de loi C-68, sur la façon dont cela se fait, évidemment sur la côte Est, mais aussi sur la côte Ouest. Vous connaissez mieux le Canada atlantique que nous. Je viens de l’Ouest canadien, de la Colombie-Britannique. En Colombie-Britannique, le propriétaire-exploitant et la séparation de la flottille n'ont pas la même importance.
    Si vous pouviez nous fournir un libellé et nous faire part de vos idées sur la façon dont la côte Ouest pourrait suivre votre exemple sur la côte Est, ce serait utile.
(0935)
    Merci beaucoup.
     Nous travaillons avec nos collègues de la Colombie-Britannique, et ils nous envient, évidemment. Malgré les lacunes et la possibilité de contourner la loi, ils nous envient le principe du propriétaire-exploitant et ce qu'on fait pour maintenir des économies fortes dans nos collectivités côtières.
    Nous vous fournirons des détails et nous collaborerons avec d’autres organisations de pêche pour vous donner de l'information au cours de la semaine prochaine.
    Pourrais-je très rapidement revenir sur la question des plans de rétablissement?
    M. Fin Donnelly: Combien de temps me reste-t-il?
    Il vous reste deux minutes et demie.
    Oui, bien sûr.
    Je sais que j'empiète sur votre temps. Je vais essayer d’être très bref.
    Je suis d’accord, et les pêcheurs et les gens de nos collectivités seraient d'accord aussi, pour dire qu'on a besoin d'un secteur de la pêche solide, sain, robuste et durable. Il doit être aussi sain que possible.
    Le problème, d’après ce que nous avons appris du ministère des Pêches et des Océans — et, encore une fois, c’est probablement une question de ressources —, c’est qu’il n’a pas été en mesure d’assurer une gestion écosystémique complète. Des mesures de précaution ponctuelles ont été prises. Des points de référence ponctuels et incohérents ont été établis pour les ressources halieutiques. Les pêcheurs ont donc du mal à croire qu'un plan de rétablissement imposé par la réglementation aurait un sens. Nous voulons les mêmes choses, mais ces mesures ne nous inspirent pas confiance.
    Plus précisément, en ce qui concerne la morue du Nord, puisqu'on en a parlé, nous sommes passés de 25 000 tonnes en 2006 à plus de 300 000 tonnes l’année dernière — une croissance incroyable, quoi qu'il en soit. La récolte n’a jamais été aussi faible, à peine quelques pour cent. Le problème, ce sont les autres prédateurs, et les pêcheurs pensent que les phoques ont un problème.
    À notre avis, il faut examiner les vrais problèmes. Ce dont nous avons besoin, c'est d'une plus grande participation des pêcheurs et non pas d'un plan de rétablissement prescriptif quand le ministère n'est pas prêt.
    Excellent, merci.
    Je crois que vous avez raison. Nous pouvons avoir des lois solides et d’excellentes politiques, voire des règlements rigoureux, mais nous devons absolument fournir au ministère les ressources nécessaires pour mettre en oeuvre ce qui est prévu dans la loi et dans nos politiques. C'est très juste.
    Dans la dernière minute dont je dispose, monsieur Gratton, pourriez-vous dire au Comité si vous avez une idée du nombre de plans d’eau où vivent des poissons touchés par les projets miniers au Canada?
    Non, je n'ai pas de chiffres concrets à vous donner.
    Est-ce que votre organisation pourrait vérifier si...?
    Vous savez combien il y a de mines au Canada.
    Il y a environ 200 mines en activité.
    Le Canada est un pays très humide, et, dans certaines parties du Nord, il y a plus d’eau que de terre. Je pense que vous constaterez que pratiquement toutes les activités humaines au Canada, et pas seulement l'exploitation minière, ont une incidence sur l’eau.
    Diriez-vous que presque toutes ces mines ont une incidence sur un plan d’eau?
    Pas nécessairement. Cela dépend de l’endroit où elles se trouvent.
    Vous pourriez peut-être vérifier et communiquer l'information au Comité.
    Je pense que ce serait très important, parce qu’il est évident qu’on ne peut pas...
    Merci, monsieur Donnelly.
    Pouvez-vous nous fournir cette information?
    Je ne pense pas, en partie parce que, surtout quand on va dans le Nord, on parle de plans d’eau, alors...
     Très bien.
    Avec un millier sur un petit kilomètre carré, il est très difficile d’arriver à ce chiffre.
     Comme nous avions décidé de terminer cinq minutes plus tôt, je crains que ce ne soit la fin des questions pour cette série. Je tiens à remercier nos invités d’aujourd’hui.
    Monsieur Sullivan, merci de vous être joint à nous par vidéoconférence.
    Monsieur Gratton, madame Laurie-Lean et monsieur Laughren, merci encore d’être venus aujourd’hui. Nous allons suspendre la séance quelques minutes, le temps de changer de témoins.
(0935)

(0940)
    Bienvenue à la deuxième heure de l’examen de la Loi sur les pêches.
     Nous entendrons Sergio Marchi, président et chef de la direction de l’Association canadienne de l’électricité, et Terry Toner, directeur des services environnementaux de Nova Scotia Power. Nous avons aussi Ian MacPherson, directeur exécutif de la Prince Edward Island Fishermen’s Association et, par téléconférence, Mme Susanna Fuller, d’Océans Nord Canada.
    Nous allons commencer par l’Association canadienne de l’électricité.
    Durant vos 10 premières minutes, allez-vous tous les deux faire un exposé?
    Est-ce que ce sera cinq minutes chacun?
    Grosso modo. Peut-être que Terry prendra un peu plus de temps parce qu'il en sait plus.
    Eh bien, vous déciderez quand passer la main, qu'en dites-vous?
    Merci. Allez-y.
    Je vous remercie, madame la présidente, et merci aux membres du Comité d’avoir invité l’Association canadienne de l’électricité à comparaître devant vous en lien avec cet examen du projet de loi C-68.
    Il me fait plaisir de représenter l'Association, en compagnie, à ma gauche, de Terry Toner, directeur des services environnementaux de Nova Scotia Power, comme l'a dit la présidente.
    Pour vous placer dans le contexte, l’ACÉ est la voix et la tribune du secteur canadien de l’électricité à l'échelle nationale. Nos membres comprennent les grandes sociétés de production, de transmission et de distribution, ainsi que l'éventail complet des fournisseurs. Comme vous le savez tous, l’électricité est indispensable aussi bien pour la qualité de vie de vos électeurs et de tous les Canadiens que pour le fonctionnement et la compétitivité d’une économie moderne.
    Ce secteur occupe également une place privilégiée pour favoriser un avenir propre sur le plan énergétique au Canada. À l’heure actuelle, nous sommes exempts de GES dans une proportion de 82 %, ce qui nous classe parmi les secteurs les plus propres du monde. Aucun autre secteur au Canada n’est près d'obtenir des résultats semblables. Puisque nous sommes aussi un système riche sur le plan hydrologique, la production d’électricité dépend dans une grande mesure de l’utilisation responsable des ressources hydriques, et c'est une question qui a été soulevée à la fin de la discussion avec les témoins précédents. Nous utilisons également l'eau dans les centrales nucléaires et thermiques. En tant que tel, notre secteur est déterminé à protéger et à conserver l’ensemble de nos ressources naturelles.
    Nous devons cependant dire que notre avenir, et celui des autres industries, baigne dans l'incertitude en raison de l'accumulation de changements profonds dans les lois et règlements du fédéral, des provinces et des territoires. Ces changements deviennent de plus en plus lourds, et aucun ordre de gouvernement n’assume la responsabilité de ce fardeau global. Chaque palier de gouvernement ne s'intéresse qu'à ses propres changements. Une telle situation ne peut plus durer. Nos entreprises évoluent dans un environnement qui doit être concurrentiel, sans compter qu'elles doivent inspirer confiance aux investisseurs, pour contribuer à maintenir la prospérité économique du Canada. De plus, toutes ces décisions stratégiques finissent par faire augmenter le coût de l’électricité pour les consommateurs, qui sont nos clients et vos électeurs.
    Cela étant dit, nous croyons que le projet de loi C-68 équivaut pour le gouvernement fédéral à une occasion ratée d'intégrer la Loi sur les pêches, clairement et de manière explicite, dans la gestion responsable de la pêche et de l’habitat global du poisson, plutôt que de protéger une seule espèce de poisson et les microhabitats.
    Cela dit, permettez-moi de donner la parole à Terry, qui présentera les grandes lignes de nos cinq recommandations spécifiques visant à améliorer l’application pratique et l’effet de la loi.
(0945)
    J’aimerais commencer par remercier chacun de vous de votre temps.
    L'expérience de notre secteur en ce qui a trait à l’application de la Loi sur les pêches et la relation de travail à long terme avec le ministère des Pêches et des Océans fait de nous des gens qualifiés pour exprimer des commentaires constructifs et des recommandations pratiques visant à modifier la Loi sur les pêches.
    La première de nos recommandations est qu'il faudra examiner la définition proposée de « poisson » et d’« habitat du poisson » en tenant compte de la population. Une définition élargie de l’habitat du poisson et l’interprétation du terme « poisson » comme s'il s'agissait de n’importe quel poisson se sont révélées coûteuses et prohibitives par le passé. Cette approche donne lieu à un risque impossible à gérer sur le plan juridique pour les centrales électriques actuelles et nouvelles, parce qu'on peut interpréter la mort accidentelle d'un poisson comme une infraction à la loi, et ce peu importe les effets véritables sur les populations et sur écosystème.
    En étendant cette définition au-delà du « poisson » pour l'appliquer à l'« habitat du poisson », je préciserais que la définition de l’habitat du poisson dans le projet de loi englobe des structures anthropiques qu'on n'a jamais voulues pour l’habitat du poisson. La réglementation de telles structures en vertu de la Loi sur les pêches ne servirait à rien d'utile, sans compter qu'elle viendrait encombrer la réglementation et entraînerait pour le système d'alimentation en électricité des coûts qui seraient reportés sur les contribuables.
    Les définitions et les dispositions pertinentes méritent qu'on les examine attentivement pour assurer une interprétation et une application raisonnables. Nous sommes impatients de voir des accommodements, de préférence dans la loi en tant que telle, sinon assurément dans les règlements et les directives en ce qui a trait à l’application de la loi.
    En deuxième lieu, l’énoncé de l’objet devrait être axé sur la gestion et sur le contrôle des pêches. Nous sommes encouragés par l’ajout d’un énoncé sur l’objet, puisque nous l'avons demandé devant ce comité l’an dernier. Cependant, dans sa version actuelle, la protection et la conservation du poisson et de l’habitat du poisson sont présentées comme des buts distincts et autonomes, alors qu’elles devraient être subordonnées à la gestion et au contrôle responsables et adéquats des pêches. On peut alors établir correctement la priorité des effets de conservation et de protection et les déployer de manière à procurer des avantages concrets aux populations de poissons.
    Pour ce faire, nous recommandons de fusionner les deux clauses afin que le but de la loi se lise comme suit: « La gestion et la surveillance judicieuse des pêches par la conservation et la protection du poisson et de son habitat, notamment par la prévention de la pollution. »
    En troisième lieu, les dispositions visant à gérer les paramètres de débit devraient tenir compte des règlements actuels. Alors qu'elles respectent la Loi sur les pêches, les sociétés membres doivent également se soumettre à l’autorité d’organismes provinciaux, territoriaux et, dans certains cas, internationaux. Dans les ententes conclues avec de tels organismes, incluant les autorités responsables de la gestion de l’eau, on aborde les questions touchant les propriétés de l’eau, comme le débit, la température et d’autres propriétés physiques.
    En accordant de nouveaux pouvoirs élargis au ministre, en particulier en ce qui concerne le débit d’eau, les modifications qui sont proposées à la Loi sur les pêches ne reconnaissent pas pleinement l’interaction possible avec ces autres autorités, ce qui pose un risque considérable de chevauchement, de conflit et d’incertitude au niveau des règlements.
    Nous suggérons, avant d'ordonner toute mesure concernant le débit d’eau ou d’autres questions du genre, que le ministre soit tenu de consulter toute instance pouvant présenter un chevauchement de compétences. Les ententes actuelles en matière de gestion de l’eau existent depuis longtemps et répondent à des besoins régionaux spécifiques. Il serait prudent de consulter les gens afin d'éviter tout conflit et chevauchement sur le plan des compétences.
    En quatrième lieu, augmenter les occasions de créer des réserves d'habitat. Nous sommes vraiment ravis des dispositions de la Loi sur les pêches portant sur un système de création de réserves d'habitat. Nous y voyons la possibilité de promouvoir une gestion adéquate et efficace de la pêche. Pour nous efforcer de maximiser les avantages sur les plans économique et environnemental, nous recommandons qu'en élaborant un programme de réglementation sur la création de réserves d'habitat, le ministre soit autorisé à reconnaître les contributions non seulement du promoteur, mais également des tiers partis à un projet de conservation et à permettre l'échange de crédits d'habitat.
    Cela est possible en apportant des changements mineurs à la définition de « projet de conservation », de « promoteur » et d'« aire de service », permettant ainsi de bénéficier de davantage de flexibilité afin d'assurer un rétablissement efficace de l'habitat. La formulation précise sera présentée dans notre prochaine présentation écrite.
    En cinquième et dernier lieu, on a les exigences en matière de rétablissement de l'habitat. Pour les zones écologiquement sensibles actuelles et futures, les modifications proposées à la Loi suscitent une certaine ambiguïté en ce qui concerne la responsabilité des promoteurs lorsqu'il s'agit de contribuer à définir les exigences en matière de rétablissement. Nous recommandons que l’établissement de zones écologiquement sensibles et de plans de rétablissement puisse bénéficier d'une consultation auprès des parties concernées, incluant les producteurs d’électricité. De plus, le gouverneur en conseil devrait être autorisé à établir, au besoin, un processus de compensation juste et raisonnable.
    Ceci étant dit, au cours du mois, nous présenterons au Comité tous les détails en ce qui concerne l'intention et la formulation des modifications que nous proposons. Nous les recommandons à votre attention.
(0950)
    Merci. Je redonne la parole à Sergio.
     Merci beaucoup, Terry.
    En conclusion, comme l'a dit Terry, l’ACÉ collabore depuis longtemps avec le MPO pour assurer la protection du poisson et de son habitat au nom de tous les Canadiens.
    Nous espérons que notre exposé d'aujourd'hui et le mémoire complet que nous vous présenterons la semaine prochaine vous seront utiles pour mettre la dernière main au projet de loi C-68. Nous espérons aussi que vous accorderez une grande attention aux amendements que nous avons proposés ce matin.
    Nous aurons plaisir à continuer de travailler non seulement avec le MPO, mais aussi avec ce comité parlementaire, pour élaborer des politiques, des règlements et des codes de pratique qui auront une application pratique et efficace tout en protégeant l'avenir de la pêche au Canada.
    Merci beaucoup de votre attention. Nous serons heureux de répondre à vos questions.
    Merci beaucoup.
    Écoutons maintenant Mme Fuller, qui est présente par téléphone.
    Madame Fuller, vous avez 10 minutes. Allez-y.
    Je vous remercie de m’avoir invitée à témoigner aujourd’hui dans le cadre de mes nouvelles fonctions à Océans Nord Canada.
    J'ai participé à des tentatives antérieures pour modifier la Loi sur les pêches, en 2006 et 2007, et je tiens à féliciter le gouvernement actuel et le Comité de leur travail, qui nous a finalement permis, à l’occasion du 150e anniversaire de la Loi sur les pêches du Canada, de proposer des modifications importantes visant pour la plupart à améliorer et à moderniser la Loi sur les pêches du Canada.
    Compte tenu de l’importance du poisson et de l’habitat du poisson pour les collectivités côtières, les peuples autochtones et les Canadiens en général, nous avons besoin d’une Loi sur les pêches pour le XXIe siècle et d’une loi que nous pourrons présenter avec fierté au G7, dont le Canada assurera la présidence, compte tenu notamment de la priorité accordée aux océans.
    Mes commentaires sont fondés sur mon expérience au sein du Comité national de coordination de l’habitat du poisson, qui, de concert avec le MPO, a été membre de plusieurs comités consultatifs sur la pêche commerciale, parce que je suis convaincu qu’il est urgent de veiller à ce que les lois du Canada tiennent compte de la nécessité de réconcilier notre histoire et celle des peuples autochtones. Ils sont également fondés sur la conviction que la gestion d’une ressource publique doit s'appuyer sur un cadre juridique et stratégique solide pour s'assurer que sa durabilité s'inscrit dans la diversité, est associée à des services écosystémiques précieux, offre un soutien aux pêcheurs indépendants et garantit l’avenir des collectivités côtières.
    Comme vous le savez peut-être, la réaction initiale au projet de loi C-68 a été très positive, et c'est le résultat d'un processus de consultation de grande ampleur, quoique rapide. Plusieurs éléments du projet de loi C-68 constituent des améliorations importantes. Je tiens à le préciser avant d’aborder les quelques aspects importants qu'il faudrait modifier selon moi pour que la loi prévoie une gestion et une protection suffisantes de la pêche, de la conservation du poisson et de son habitat, et de l’accès aux ressources halieutiques pour les collectivités avoisinantes.
    Les améliorations qui, à mon avis, sont valables sont l’article sur l’objet de la loi, l’élargissement des critères décisionnels, les mesures de protection des flottilles de pêche indépendantes, le rétablissement des habitats, une disposition, pour la première fois, sur le rétablissement des réserves halieutiques, la durabilité de la fermeture de la pêche, notamment lorsqu'il s'agit de protection marine, la création de comités consultatifs aptes à veiller à ce qu’on fasse davantage appel à des experts et à la participation du public dans la mise en oeuvre de la loi, et, enfin, l’examen quinquennal de la loi, qui garantira une mise à jour régulière.
    Cependant, si l'on y regarde de plus près et après réflexion sur la possibilité que la loi permette de commencer à régler les problèmes existants et de longue date concernant le poisson et l’habitat du poisson, on constate qu'il y a encore quelques éléments fondamentaux qui, s’ils restent tels quels, compromettront progressivement la réalisation de l’objectif proposé. Chacun sait que les populations de poissons déclinent surtout en raison de deux facteurs principaux, à savoir la surpêche ou la destruction d'une grande partie de leur habitat, et ce nonobstant la mortalité naturelle et les changements climatiques. Faute de mesures juridiques rigoureuses, il n’y a aucun moyen de garantir une gestion correcte des prises ou la possibilité d’atténuer et d’éviter la destruction des habitats. C’est dans cette optique que nous recommandons des mesures d'amélioration.
    Comme vous le savez probablement, les milieux de l’environnement et de la conservation travaillent en étroite collaboration pour que les modifications que nous recommandons soient concises et harmonisées. J’ai également communiqué avec les représentants de l’industrie de la pêche pour mieux comprendre leurs préoccupations concernant le projet de loi C-68. Les recommandations ci-dessous sont conformes à celles qu'ont présentées West Coast Environmental Law, Écojustice, Oceana Canada et d’autres. Je suis en grande partie d’accord avec les observations faites ce matin par Keith Sullivan et ÉcoFiducie Canada. Je fais remarquer que l’Association minière du Canada est également d'accord avec certaines des observations d’Écojustice. Je pense qu’il s’agit en fait d’une situation unique, où tant de parties acquiescent à tant de choses semblables.
    J'approfondirai mes six recommandations dans un mémoire au vocabulaire précis, mais la première est de consolider l’objet de la loi. L'énoncé de l'objet est une très bonne chose — on en avait besoin depuis 1996 —, mais je crois qu’il devrait être harmonisé avec les conventions et les accords internationaux. À mon avis, nous devrions au moins y ajouter la conservation à long terme et l’utilisation durable de la pêche.
    Deuxièmement, on ne mentionne nulle part l’article 35 de la Constitution canadienne, et je remarque que c’est inclus dans le projet de loi C-69. Pour enchâsser les droits des Autochtones dans ce projet de loi et garantir la cohérence de l'ensemble des lois fédérales, je pense que l’article 35 devrait être ajouté. J'en parle pour la première fois. Mon collègue Josh Laughren et les représentants d’Oceana proposent de nombreuses raisons de reconstruire la Loi sur les pêches, mais je pense que cet article doit être inclus dans la loi de façon très claire.
     Dans le Canada atlantique, la pêche commerciale vise ou affecte 17 espèces de poissons de mer, et ces espèces sont considérées comme menacées ou en voie de disparition par le COSEPAC, le Comité sur la situation des espèces en péril au Canada, qui se prononce sur la Loi sur les espèces en péril. Les poissons de mer ne sont généralement pas inscrits dans la Loi sur les espèces en péril, principalement pour des raisons socioéconomiques, et je peux comprendre pourquoi le plus souvent. Cependant, je crois que, si nous avions une solide Loi sur les pêches qui exigerait le rétablissement des populations de poissons, nous ne serions peut-être pas dans une situation aussi critique, avec tant d’espèces en péril, dont certaines sont vitales pour nos collectivités côtières.
(0955)
     La consolidation des dispositions actuelles sur le rétablissement garantit un cadre juridique à la Loi sur les espèces en péril, et je pense que l’industrie de la pêche serait d’accord. C'est un autre outil pour reconstituer les stocks de poisson sans qu’ils soient inscrits dans la liste de la Loi sur les espèces en péril, bien que celle-ci soit parfois le meilleur moyen. Il faudrait exiger que des plans de rétablissement soient mis en place en tenant compte de l’écosystème et, notamment, des changements climatiques dans la détermination des échéances et des objectifs. Faute de quoi, étant donné que nous sommes loin derrière d'autres pays leurs lois — de nombreux exemples ont été donnés par Oceana —, nous ne parviendrons pas non plus à nous aligner sur les accords internationaux auxquels le Canada est partie ou dont il est signataire.
    Quatrièmement, il faut rendre des comptes au Parlement et aux Canadiens. Il faudrait rendre compte tous les ans de l’état des habitats du poisson et l’état du rétablissement des populations. Pour l'instant, Environnement et Changement climatique Canada rend des comptes en fonction de la liste de contrôle des pêches du MPO. Cela semble un peu hors de propos. Je pense que c'est le MPO qui devrait rendre compte de ses propres objectifs, notamment en matière d’habitat du poisson, de stocks et de rétablissement des populations. Il y a d’excellents exemples de méthodes permettant de communiquer facilement l'information au public, par exemple ce que fait la NOAA à l'intention du Congrès américain. C’est très facile à lire. C’est une infographie. Ce n’est pas difficile à faire. Je recommande d'exiger un compte rendu sur le rétablissement à l’article 42.1 proposé.
    Enfin, concernant les effets cumulatifs, nous devons élargir le contenu obligatoire du registre public, prévu à l’article 42.3 proposé. On a grandement besoin d'un registre public des projets. Les ONG le préconisent depuis très longtemps, et nous sommes heureux de le voir dans ce projet de loi. Il importe cependant que soient inclus tous les projets ayant des retombées sur un habitat marin, au moyen d'une lettre d’avis ou d'une autorisation ministérielle. Les organisations sur le terrain, dont le MPO, ont déjà cartographié, dans le cadre d’un projet pilote dans la région du golfe, les zones où le passage du poisson est bloqué ou un habitat a été modifié. En pratique, c’est ce qui se passe. Il ne devrait pas être si difficile de l’ajouter à un registre public géospatialement référencé. Si l’on n’inclut pas les projets à faible risque, il sera impossible de planifier les niveaux des bassins hydrographiques et de prendre des mesures d’atténuation, et je pense que mes collègues de l’Association minière du Canada en ont parlé également.
    En conclusion, un groupe très solide au Canada souhaite contribuer à la mise en oeuvre d’une nouvelle Loi sur les pêches. Il s’agit d’une situation unique où des milliers de bénévoles, par l’entremise d’organismes d’intendance et des collectivités autochtones, travaillent à repérer les obstacles au passage du poisson et les dommages à l’habitat du poisson, dans le but de rétablir la situation. On constate une plus grande transparence et une plus grande participation multipartite dans le travail des comités consultatifs des pêches sur la pêche commerciale, dans le but de trouver un terrain d’entente et de prendre des mesures qui aident à protéger l’habitat du poisson et à rétablir les populations de poissons.
    Nous pouvons aussi utiliser de nouveaux moyens pour mettre en oeuvre une nouvelle Loi sur les pêches, notamment la cartographie et le SIG, la surveillance électronique — ce sont des exemples —, qui peuvent faciliter la collecte et l’analyse de données. Nous avons déjà essayé de mettre la loi à jour, mais nous n'avions pas les moyens que nous avons aujourd'hui et qui peuvent simplifier la mise en oeuvre.
    Pour terminer, j'espère que, dans le cadre de l'étude du projet de loi C-68, vous serez aussi ambitieux que possible en ce moment historique du 150e anniversaire de la Loi sur les pêches, deuxième loi après l’Acte de l’Amérique du Nord britannique. La loi actuelle, le projet de loi C-68nous amène au niveau des années 1970. Nous devons nous projeter dans ce siècle et nous doter d’une Loi sur les pêches pour l’avenir. Nous sommes très près du but. Cette loi est et demeurera le fondement de notre identité canadienne.
    Merci. Je serai heureux de répondre à vos questions.
(1000)
    Merci, madame Fuller.
    Monsieur MacPherson, vous avez 10 minutes. Je vous en prie.
     Je vous remercie, madame la présidente, ainsi que les membres du Comité permanent des pêches et des océans, de m’avoir invité à témoigner ce matin.
    Je m’appelle Ian MacPherson. Je suis le directeur exécutif de la Prince Edward Island Fishermen’s Association.
    Pour ceux d’entre vous qui ne connaissent pas la PEIFA, nous avons six organisations locales de pêcheurs qui sont représentées à notre conseil d’administration et qui forment l’épine dorsale de notre organisation. Nous défendons les intérêts de plus de 1 260 pêcheurs. Les espèces que nous pêchons sont surtout le homard, le hareng, le maquereau et le thon.
    La PEIFA est un organisme très actif dans tous les secteurs de la pêche, et notre contribution au produit intérieur brut provincial est l’une des plus élevées au Canada à cet égard. Par conséquent, bon nombre des modifications proposées à la Loi sur les pêches auront des répercussions directes et indirectes sur nos pêcheurs.
    Au cours des deux dernières années, nous avons eu le privilège de comparaître devant votre comité permanent et à d’autres tribunes pour discuter des changements proposés, et nous tenons à souligner que nos commentaires et nos préoccupations découlent de notre volonté d’améliorer la pêche pour les pêcheurs, dès aujourd'hui et pour bien des années à venir.
    Ce matin, j’aimerais aborder six types de changement. La PEIFA convient que la Loi sur les pêches du Canada aurait dû être modifiée depuis longtemps à de nombreux égards.
    Tout d’abord, nous tenons à rappeler qu’il existe un savoir traditionnel et collectif considérable dans les collectivités de pêcheurs autochtones et non autochtones. Ce savoir devrait faire partie intégrante de tout processus décisionnel. Nos deux collectivités ont un objectif commun, qui est de faire prospérer notre industrie de la pêche pour beaucoup de générations à venir. Nous soulignons que la science a sa place dans la gestion des ressources, mais que les observations et les commentaires de tous ceux qui sont sur l’eau doivent également être respectés et pris en compte dans le processus décisionnel.
    Deuxièmement, nous rappelons également que les comités consultatifs peuvent faciliter le processus décisionnel. Il est important que les groupes d’experts soient bien représentés pour garantir une représentation juste et équilibrée et que les anciens fonctionnaires ou les groupes d’intérêts spéciaux ne soient pas surreprésentés. Le secteur d'activité doit aussi être représenté dans ces comités.
    Troisièmement, nous sommes en faveur de la modernisation du cadre réglementaire de la Loi sur les pêches et nous avons activement participé aux ateliers sur la rationalisation des politiques du ministère des Pêches et des Océans organisés au cours des dernières années. Il y a manifestement des écarts importants entre les politiques appliquées d’une zone de pêche à l’autre, et cela concerne souvent le même objet. Il est arrivé qu'un exploitant de remplacement puisse être employé plusieurs jours dans une administration et quelques jours dans une autre, avec des processus d’autorisation très différents. Nous travaillons à l’élaboration de politiques qui soient équitables et exhaustives et qui tiennent compte des situations exigeant une approche raisonnée et compréhensive. Rappelons qu'il ne faut pas changer de politiques pour le simple plaisir de changer. Nous devons également veiller à ce que les changements soient proposés par des organisations de pêche légitimes et que de petits groupes d’intérêts n'imposent pas de changements susceptibles de nuire à l’ensemble du secteur.
    Nous appuyons sans réserve l’intégration de dispositions sur les propriétaires-exploitants et la séparation des flottilles dans la loi. Nous félicitons le ministre LeBlanc d’avoir fait basculer de la politique à la législation des changements dont on parle depuis longtemps.
    Quatrièmement, nous appuyons fermement la protection de l’habitat du poisson. Il faut notamment s’assurer que les examens environnementaux fédéraux aient préséance sur les examens provinciaux lorsque la réputation de l’industrie canadienne des produits de la mer est en jeu. À l’heure actuelle, nous préconisons un examen environnemental fédéral du projet de conduite de rejet d’effluents dans le détroit de Northumberland depuis l’usine de pâte Northern à Abercrombie, en Nouvelle-Écosse. De concert avec des membres du Gulf Nova Scotia Fleet Planning Board, de l’Union des pêcheurs des Maritimes et de la Première Nation de Pictou Landing, nous suivons tous les protocoles pour qu’un examen fédéral soit effectué.
    Compte tenu de l'importance des nouvelles technologies, nous devons veiller à ce que le Canada soit au premier plan, à l'échelle mondiale, dans l’amélioration et la préservation de nos océans lorsqu’un nouveau secteur d'activité s'ouvre ou que le secteur a besoin de mises à niveau. Nous appuyons le fait que des décrets ministériels puissent être délivrés lorsque les caractéristiques physiques de l’eau, comme sa température et sa composition chimique, sont modifiées, comme le prévoient les sous-alinéas 34.3(2)g)(i) et 34.3(2)g)(ii) proposés.
    Cinquièmement, nous restons inquiets des répercussions de l’exploration pétrolière et gazière dans des zones de plus en plus vastes au large des côtes du Canada atlantique. Nous comprenons bien que les provinces ont besoin de trouver d'autres sources de revenus, mais toute entente éventuelle de redevances ou de partage des recettes ne sera pas près de compenser les pertes potentielles pour les secteurs de la pêche et du tourisme en cas de déversement ou de fuite importants.
    Nous constatons que les tendances migratoires de certaines espèces sont en train de changer, et il faudrait examiner tous les facteurs susceptibles d'y contribuer au lieu de simplement modifier les sources alimentaires. Nous continuons de craindre que l’extraction pétrolière et gazière soit permise dans les aires marines protégées et que les sociétés pétrolières et gazières, mais pas les pêcheurs, puissent être indemnisées si l'exploitation était interdite dans ces zones.
(1005)
    Sixièmement, nous appuyons vigoureusement les modifications qui renforcent les pouvoirs des ministères et des fonctionnaires en matière de conservation et de protection. Nous sommes heureux que des ressources financières supplémentaires soient affectées à la conservation et à la protection pour l'excellent travail accompli. Nous comprenons que les décisions juridiques dépassent la portée de ces modifications législatives. Mais nous continuons de préconiser que les sanctions soient plus proportionnelles à la gravité de l'infraction. Nos capitaines sont très fiers de leur savoir et de leurs compétences. Des règles du jeu équitables permettent à notre industrie de survivre et de prospérer pendant encore de nombreuses années. Récemment, à l’Île-du-Prince-Édouard, on a imposé des amendes et des suspensions traduisant mieux la gravité des infractions commises. Nous espérons que cette tendance se poursuivra.
    En résumé, la PEIFA est un organisme qui continuera d’être actif dans le plus grand nombre possible de volets du secteur de la pêche, dans la mesure où nos ressources internes le permettront. Nous continuerons de préconiser des changements qui ont du sens, car les organismes et les gouvernements sont tous responsables de leurs actions à un moment où le secteur de la pêche affronte des défis et des changements sans précédent.
    Je remercie le Comité permanent des pêches et des océans de m'avoir permis de présenter et de fournir ce que j’espère être considéré comme une rétroaction valable. Je me ferai un plaisir de répondre aux questions des membres du Comité.
    Merci.
    Merci beaucoup, monsieur MacPherson.
    Nous allons passer à notre première série de questions.
     Je rappelle aux députés que, comme nous siégerons à huis clos 10 minutes plus tôt, ils peuvent, s'ils le désirent, partager leur temps de parole, car nous ne pourrons probablement pas terminer la première série de questions.
     Monsieur Morrissey.
     Merci, madame la présidente. Ma question s’adresse à M. MacPherson.
    Vous avez parlé de l'utilité des comités consultatifs. L’une des critiques que me font les pêcheurs, c’est que les mêmes personnes comparaissent trop souvent devant les comités consultatifs. Par conséquent, le MPO exprime un point de vue particulier.
     Je suis d’accord avec le processus, mais comment pouvons-nous partager cela dans le processus de consultation? Les entreprises nous reprochent beaucoup le manque d'efficacité et la sélectivité du processus de consultation utilisé par le MPO.
    Je faisais allusion à certains groupes d’experts fédéraux. Ils commencent tout juste à être mis en place. Par exemple, cette fin de semaine, nous présentons un exposé devant un groupe d’experts fédéral sur les aires marines protégées, à Moncton.
    Pour garantir l’intégrité d’un processus, il faut effectivement des gens qui sont respectés et qui représentent différents volets du secteur d'activité. Nous constations des progrès dans le processus de consultation du MPO, mais le fait est qu'il y a une consultation initiale, mais qu'il manque ensuite de réunions de suivi avant l'annonce d'une politique, et c'est là que nous aimerions voir des améliorations, parce que nous avons encore des surprises et que cela ne fonctionne pas pour tout le monde.
(1010)
    Nous en avons aussi un peu.
    Il y a des lacunes à combler.
    Nous sommes d’accord, il y a des lacunes.
    Ian, pourriez-vous nous en dire un peu plus sur cette politique concernant les exploitants de remplacement? C’est très différent. C’est un souci souvent exprimé par les entreprises; elles s'inquiètent de l’efficacité du traitement lorsqu'on a besoin d'un exploitant de remplacement. Je ne savais pas qu’il y avait des différences.
    Il y en a, je pense, en ce qui concerne la période autorisée dans une saison.
    Une autre chose, par exemple... et il en est ainsi depuis un certain nombre d’années. Je crois que Terre-Neuve dispose de quelques jours pour permettre aux capitaines de partir avec quelqu'un à bord pour diverses raisons. Je veux qu’il soit parfaitement clair que nous ne voulons pas qu’on abuse de cette politique. Personne sauf le capitaine ne devrait être dans le bateau. C’est la raison pour laquelle il faut avoir une approche humaine. En réalité, il est extrêmement difficile pour les capitaines de notre région d'obtenir une journée ou deux de congé pour des raisons familiales, car ils doivent s'engager dans un long processus avant que quiconque ne soit autorisé à entrer dans leur bateau.
    L’intention première de la loi tient-elle clairement compte des objectifs de gestion des pêches?
     Nous pensons que ces objectifs pourraient être clarifiés. En fait, de nombreux changements sont examinés et c'est pourquoi je voulais du même coup tenir compte des connaissances traditionnelles et communautaires, parce que les décisions ne sont pas toujours évaluées dans une perspective élargie. Par exemple, il y a quelques années, les pêcheurs de l’Île-du-Prince-Édouard étaient très préoccupés par le fait que le quota de maquereau reste le même, année après année. Des recommandations ont été formulées pendant deux ou trois années de suite...
    Pour le réduire?
    Oui, pour le réduire, mais il n'a pas bougé.
    Les pêcheurs conseillaient au ministère des Pêches et des Océans de réduire les prises.
    Oui. On en entend peut-être pas tellement souvent parler, mais c'est bien ce qu'ils conseillaient au ministère.
    Et le ministère s’y opposait.
    Il s'y opposait en raison des observations faites sur l’eau. En 2015, au beau milieu d'une vérification du Marine Stewardship Council, un nouvel ensemble de conditions a été imposé pour la pêche du maquereau parce que le quota avait été réduit considérablement. C’est le genre de situations où les connaissances traditionnelles et communautaires auraient pu à mon avis mieux servir notre industrie.
    Vous représentez 1 260 pêcheurs. J'imagine que la plupart d’entre eux sont des pêcheurs de homard.
    Oui.
     Croyez-vous que le projet de loi C-68 enchâsse dans la loi la politique actuelle sur le propriétaire-exploitant et sur la séparation de la flottille?
    C’est certainement un bon début, mais nous allons revoir le libellé. Si je peux me permettre, nous fournirons également un libellé au Comité.
    Avez-vous des observations à faire?
    Oui, certainement, maintenant que nous nous rapprochons de notre objectif.
    Très bien.
    J'aimerais aborder brièvement la question que j’ai soulevée lorsque des fonctionnaires ont comparu devant le comité à propos du ministère qui a engagé des ressources supplémentaires pour améliorer l'application de la loi et assurer une meilleure protection. Un autre sujet de préoccupation que j’entends souvent de la part des pêcheurs, c’est qu’ils disent collaborer, mais que le ministère ne fait pas preuve de vigilance en matière de protection.
    Par ailleurs — et je crois que vous y avez brièvement fait allusion, monsieur MacPherson — les pénalités et les amendes qu'imposent les tribunaux pour les infractions en matière de pêche sont fondées sur la valeur du produit. Toutefois, il semble y avoir un décalage entre l'effet dissuasif du point de vue juridique ou des amendes et ce que peut rapporter une pêche effectuée en contravention au règlement.
(1015)
    Je citerai à titre d'exemple récent les amendes relativement mineures, malheureusement, qui ont été établies pour certains mauvais joueurs qui avaient capturé des crabes des neiges femelles. Bien entendu, dans le cas des femelles œuvées comme le homard ou pour toute autre espèce, il importe d'assurer la pérennité de la ressource. Nous avons eu l'impression que les amendes ne correspondaient pas à la gravité des infractions, mais depuis, des peines assez sévères ont été imposées ainsi que des suspensions qui envoient certainement un message fort.
    Votre groupe pourrait-il nous donner un aperçu de la situation, nous dire dans quelles circonstances le ministère pourrait envisager d’imposer davantage de peines minimales?
    Nous pourrions certainement le faire parce que nous voulons une ressource durable, et il suffit de quelques personnes pour créer des problèmes.
    J’ai une brève question pour Mme Fuller. Pourriez-vous expliquer plus longuement ce que vous avez dit à propos de la loi qui est l’une des plus anciennes au Canada et à propos de cette révision qui la ramène tout simplement aux années 1970. Nous sommes en 2018. Pourriez-vous nous en dire un peu plus sur ce fossé entre les années 1970 et 2018?
    Certainement. La Loi sur les pêches a été la première loi adoptée après l’Acte de l’Amérique du Nord britannique. Lorsque nous examinons certaines autres lois adoptées dans d’autres pays en matière d'aménagement des pêches et de protection de l’habitat, nous constatons que notre loi ne nous permet pas d’atteindre les objectifs de ce siècle en la matière. C’est aussi un commentaire que j’ai entendu de certains membres du personnel du ministère des Pêches et des Océans. C'est formidable de voir tout le chemin que nous avons parcouru, car il s’agit d’une refonte majeure de notre...
    Je suis désolée, madame Fuller, mais je dois vous interrompre. Le temps est écoulé.
     D’accord.
    Je dois passer au prochain intervenant sur la liste.
    Monsieur Miller, vous avez sept minutes.
    Je vais partager mon temps avec M. Arnold.
    Voulez-vous que je vous le dise quand vos trois minutes et demie seront écoulées ou vous allez simplement lui céder la parole?
    Si vous voulez, mais j’aurai peut-être terminé avant cela.
    Madame Fuller, à titre d’information, la loi a été modernisée en 2012. Je pense qu'il est important de le mentionner.
    Monsieur MacPherson, vous avez dit que vous représentez 1 260 pêcheurs. Or, j'aimerais approfondir un peu la question que M. Morrissey vous a posée au sujet des conseils consultatifs. Nous avons entendu dire à maintes reprises, surtout de la part des pêcheurs, que le manque de consultation était un véritable problème. Êtes-vous d'avis que ces conseils consultatifs ne font peut-être pas grand-chose, mais qu’ils font au moins un bout de chemin pour rendre cette consultation plus fructueuse?
    Certaines institutions parmi les plus importantes au fédéral... Je crois qu'une des premières à avoir été créée visait les aires marines protégées, et l'industrie n'est aucunement représentée au sein de ce conseil. Voilà ce que j'ai à dire à ce sujet. Les anciens fonctionnaires y ont certainement leur place, tout comme les groupes qui s’intéressent à la pêche, mais l’industrie devrait aussi en faire partie afin d'assurer une approche équilibrée.
    D’accord. Je ne suis pas contre l'idée que l’industrie soit représentée, mais comment améliorer le manque de consultation dont il a été si souvent question tout au long de la discussion, que ce soit à propos des modifications à la Loi sur les pêches ou de questions qui relèvent du MPO?
    Pour répondre à ces deux questions, ce qui me vient spontanément à l'esprit, c’est que le mandat est très restrictif pour les personnes autorisées à participer à ces comités et que les intervenants de l'industrie y sont généralement exclus.
    Êtes-vous en train de dire que les règles mises en place donnent l’impression qu'on ne veut pas vraiment tenir des consultations ni recevoir de commentaires de quiconque?
    Non, je ne dirais pas cela. Je parle des membres de certains des comités dont M. Morrissey a parlé.
    Je pense que l'industrie doit être représentée au sein de ces comités, mais le mandat est parfois restrictif et tout le monde ne peut devenir membre de ces comités; il exclut les gens de l’industrie.
     Pensez-vous qu'il est restrictif seulement pour cette raison? Qu’en pensez-vous?
    Je ne vais pas spéculer sur les motifs de ces restrictions. Peut-être que l’industrie ne s’intéressait pas à la question à l'époque. Je peux toutefois vous assurer que les organisations de pêcheurs sont actuellement très impliquées dans l’industrie, que ce soit sur le plan de la politique, de la conservation et de la protection sous tous leurs aspects, et ainsi de suite. Nous voulons participer et nous voulons que notre contribution soit prise en considération.
    Il pourrait s’agir d’un changement mineur, mais qui aura des répercussions majeures.
    Merci.
    Monsieur Toner ou monsieur Marchi, quels changements à la Loi sur les pêches nuisent à certains de vos projets, à votre avis? Donnez-moi un exemple, le plus brièvement possible.
(1020)
     Je me tournerais vers Terry pour répondre, car c'est lui le spécialiste des questions touchant la réglementation de l'industrie. Je dirais néanmoins que la seule solution pour nous est probablement d’abaisser le seuil à respecter, comme nous l’avons tous les deux mentionné, afin de protéger le poisson plutôt que la population de poissons, et le microhabitat plutôt que l'habitat en général.
    Notre industrie est l'une des plus propres. Nous nous préoccupons des pêches, de l’état de l’eau, mais nous devons aussi produire de l’électricité au bénéfice des Canadiens et de l’industrie, alors nous cherchons à avoir une approche pratique et équilibrée.
    Terry, je ne sais pas si vous voulez ajouter quelque chose.
    Certainement.
    Je pense que nous cherchons dans la plupart de nos recommandations à offrir une aide judicieuse. Le libellé qui a été présenté peut donner de bons résultats, mais je pense que nous voulons plus de clarté dans ce genre de considérations. Je pense que c’est sur la population ou l’écosystème que nous devons cibler nos efforts.
    Merci.
    Monsieur Arnold.
    Il vous reste deux minutes et cinquante secondes.
     Si vous pouviez le plus rapidement possible nous donner quelques précisions supplémentaires sur ces recommandations, ce serait très utile pour les prochaines consultations.
    Monsieur Marchi, vous avez parlé de l’effet cumulatif des chevauchements de compétences, etc., et des problèmes qui en découlent. Considérez-vous que le projet de loi C-68 en crée davantage?
    Pour ce qui est des recommandations, je crois que votre date limite est le 10 mai, alors nous allons certainement vous revenir avec plus de précisions, ainsi que des modifications d'ordre juridique écrites.
    Les répercussions cumulatives deviennent vraiment inquiétantes, non seulement pour notre industrie, mais pour les industries réglementées en général. Au fédéral, nous avons les projets de loi sur les pêches, les eaux navigables, l’évaluation environnementale, l’Office national de l'énergie ancienne formule, de même que les objectifs en matière de changements climatiques, les normes sur les carburants propres, la conversion du charbon en gaz et les règlements sur la qualité de l’air et de l’eau, pour n’en nommer que quelques-uns. Ensuite, il faut multiplier le tout pour chaque province et territoire.
    Ce qui m'inquiète, comme j'ai essayé de le dire, c’est que chaque palier de gouvernement est responsable de ses propres règlements. Nous n'avons rien contre cette réglementation, mais notre question est la suivante: quel palier de gouvernement est responsable de tout le reste? Au bout du compte, nous pigeons dans l'assiette au beurre, et c'est l'utilisateur final — nos clients et vos électeurs — qui en fait les frais.
    Même si nous avons l’une des sources d'électricité les plus fiables et les plus abordables au monde, nous savons à quel point les coûts sont devenus une préoccupation pour de nombreuses personnes partout au pays.
    En fin de compte, il nous faut une bonne loi et une bonne réglementation pour éviter que l'effet cumulatif devienne dangereusement lourd, mais tout cela a un coût.
     Merci.
    Madame Fuller, des témoins nous ont parlé des répercussions possibles des décisions en matière de gestion des pêches sur les stocks épuisés et de l’opinion du ministre qui devrait être à la base de certaines de ces décisions. Pensez-vous que les décisions devraient être fondées sur l’opinion du ministre ou sur la science?
    Je pense qu'elles devraient être fondées sur la science. Je pense que dans certains cas, cette loi donne un pouvoir discrétionnaire et que ce projet de loi C-68 ne l’a pas éliminé. Je pense que la science doit absolument faire partie des facteurs à prendre en considération, mais il existe de nombreux autres facteurs à ne pas oublier, comme l'approche de précaution, l'approche écosystémique et l’intégration des connaissances autochtones.
    Merci, madame Fuller.
    Je suis désolée, j’ai toujours l’impression de vous interrompre, mais c’est tout le temps que vous aviez.
    Nous passons maintenant à M. Donnelly pour sept minutes.
    Merci, madame la présidente, et merci à tous nos témoins pour leurs témoignages sur le projet de loi C-68.
    Docteure Fuller, vous avez mentionné six recommandations. Je pense que vous avez très bien abordé le sujet et vous avez dit que vous alliez soumettre ces recommandations au Comité par écrit.
    Oui, c'est exact.
    D’accord, cela nous sera très utile.
    Puis, monsieur MacPherson, vous avez dit que l’examen environnemental fédéral a préséance sur les examens provinciaux. Avez-vous un libellé sur la façon dont la loi pourrait appliquer cette disposition?
(1025)
    C'est un point intéressant, parce qu'il s’agit d’eaux sous responsabilité fédérale. Nous avons été surpris de constater que, dans certaines situations, les provinces peuvent avoir préséance sur une évaluation environnementale fédérale effectuée dans les eaux fédérales. C'est un des problèmes sur lequel nous nous penchons dans l'affaire touchant l'usine d'Abercrombie Point.
    Il est certain qu'il est très important de consacrer du temps à l'analyse des commentaires et de faire preuve d'une grande rigueur, et c’est pourquoi nous faisons collectivement pression pour obtenir une évaluation environnementale fédérale pour ce projet particulier.
     Je sais que sur nos côtes les évaluations environnementales provinciales ont préséance sur les évaluations fédérales.
    Toute formulation ou suggestion précise sur la façon d’améliorer cette façon de procéder serait utile.
    Nous pourrions certainement vous fournir cette information.
    Merci beaucoup.
    Je voulais également demander aux représentants de l’Association canadienne de l’électricité ici présents de nous donner un libellé précis concernant les normes nationales de consultation avec les partenaires provinciaux, parce que je pense qu'il en a été question. Je pense que la question est délicate. Comment établir une norme nationale, tout en reflétant l’autonomie des provinces et des territoires?
    Nous avons beaucoup travaillé avec le MPO au cours des douze dernières années ou plus, et nous avons conclu un protocole d’entente aux termes duquel nous avons collaboré avec lui. Je pense que cela nous a permis de constater la grande diversité des pratiques, partout au pays. Les espèces de poissons varient, les priorités diffèrent et ce qui se passe sur le terrain diffère également.
    Il importe de tenir compte des régions, des provinces ou des territoires, et nous avons commencé à élaborer des principes avec eux. C'est généralement utile de commencer par l'élaboration de principes: les gens s'entendent généralement sur les questions de principe. Puis, nous intégrons ces principes aux pratiques, qu’elles soient identiques à celles en usage à l’échelle du pays ou non, et nous les évaluons par rapport aux principes établis, afin de voir s'il y a cohérence ou uniformité.
     Je pense qu'il est très important de procéder ainsi.
    Si vous pouviez fournir au Comité un libellé pour le projet de loi C-68, ce serait vraiment utile.
    C’est ce que nous ferons.
    C’est la partie législative que nous examinons.
    Pour ce qui est des réserves d'habitats, vous avez mentionné que des promesses avaient été faites à ce sujet. J’ai aussi entendu dire que la création de ces réserves suscitait une certaine nervosité, lorsqu'elle permet la destruction complète d’un bassin hydrographique au détriment de l’amélioration, voir la surexploitation de certains bassins hydrographiques.
    Comment peut-on éviter cela?
     Je pense que le travail effectué pour créer des réserves d'habitats et mettre en place un processus d'indemnisation, que ce soit en offrant des dédommagements ou des crédits compensatoires, est encore un domaine en développement. Le MPO a vraiment beaucoup travaillé sur ces questions, plus particulièrement au cours des deux ou trois dernières années.
    Ce qui est certain, c'est que nous devons pouvoir aller de l'avant avec ces projets. On ne peut éviter complètement toutes les zones d’habitat, mais notre industrie fait énormément d'efforts pour éviter les habitats essentiels, que ce soit pour protéger les espèces en péril ou en vertu de la Loi sur les pêches. Si un habitat est en jeu, on a de plus en plus tendance à déterminer le caractère essentiel de l'habitat lui-même, et je pense d'ailleurs que la loi le prescrit et qu'à l'avenir on se conformera encore davantage à cette exigence. Si nous aménageons un habitat de remplacement, par exemple un habitat de réserve ou je ne sais quoi, des critères pertinents doivent être mis en place — et nous sommes tout à fait d’accord avec cela — pour assurer que les promoteurs vont vraiment s'en tenir à ce qu’ils ont dit qu’ils allaient faire.
    Nous croyons que si nous pouvons procéder de la sorte, nous pourrons aller de l'avant. Le ministère a toujours abordé ces questions avec une très grande prudence et nous respectons cette approche. Je pense que nous cherchons simplement à encourager l’adoption de règles qui permettent de tenir compte d'un plus grand nombre de facteurs susceptibles de faire l'objet de mesures compensatoires. Ce faisant, on encourage les industries comme la nôtre, qui ont à coeur de bien faire les choses, d'assurer la pérennité et de progresser. Nous pourrions ainsi proposer de faire encore plus.
    Pourriez-vous nous donner des précisions à propos de ces critères? Ce serait très utile. Tous les mémoires que le Comité reçoit, qu'il s'agisse de recommandations, d'amendements et de libellés nous sont essentiels.
    Il me reste encore une minute ou deux que j'aimerais donner à M. Marchi pour qu'il puisse vanter un peu l'association.
    Vous avez mentionné que vous avez réussi à réduire les gaz à effet de serre. Pouvez-vous dire au Comité comment vous y êtes arrivé?
(1030)
    C’est par une combinaison de facteurs.
    Premièrement, je pense que la décision de nous débarrasser du charbon au pays y est pour beaucoup. Comme vous le savez, nous envisageons de mettre fin à son utilisation d’ici 2030. Je pense que ce sera probablement en 2040 dans certaines provinces, en raison de considérations économiques qui nous obligeront à faire preuve d'une certaine flexibilité. Enfin, je pense qu’il est important de se débarrasser du charbon.
    Deuxièmement, il y a l’innovation, tout simplement. Nous avons un énorme projet de loi sur l'investissement visant à renouveler nos infrastructures. Le Conference Board du Canada a estimé il y a quelques années que nous devions dépenser environ 350 milliards de dollars d’ici 2030 pour leur renouvellement, mais il ne s’agit pas seulement de remplacer le vieux par du vieux, mais bien de remplacer le vieux par du neuf et du novateur. Je pense que l’innovation y est pour beaucoup. Nos entreprises investissent environ 20 milliards de dollars par année dans l'innovation et l'infrastructure, et les résultats sont éloquents.
    Il vous reste 30 secondes.
    Madame Fuller, je vais vous donner ces 30 secondes, puisque vous avez toujours été interrompue. Peut-être pourriez-vous nous parler de la modernisation de la Loi sur les pêches et terminer ce que vous aviez à dire à ce sujet.
    Vous êtes peut-être arrivée à l'an 2000, mais nous sommes en 2018.
    Je pense que les exemples que Joshua Laughren d’Oceana a donnés sont de pays ou de groupes de pays où les lois sur les pêches sont bien meilleures que les nôtres. Je crois que le projet de loi C-68 va dans cette direction, mais qu'il a encore du chemin à faire. Je pense que deux éléments clés nous permettront d'y arriver: veiller à ce que l'on tienne compte de la reconstruction et à ce qu'on l'exige, et veiller à bien gérer les effets cumulatifs, afin d’atteindre l’objectif de la loi.
    Comme vous le savez, les lois sont répétitives, mais je ne pense pas pour le moment que le projet de loi C-68 soit tout à fait conforme à l’Accord des Nations unies sur les stocks de poissons ou à la convention modifiée par l’Organisation des pêches de l'Atlantique Nord-Ouest.
    D’accord.
    Donc...
    Je suis désolée, madame Fuller. Je dois vous interrompre à nouveau.
    J’aimerais profiter de l’occasion pour remercier nos invités d’être venus aujourd’hui: M. Marchi, M. Toner, M. MacPherson, et Mme Fuller par téléphone. Nous vous remercions de votre témoignage.
    Nous allons suspendre la séance pendant quelques minutes, puis nous reprendrons à huis clos, s’il vous plaît.
    [La séance se poursuit à huis clos.]
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