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INAN Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent des affaires autochtones et du Nord


NUMÉRO 031 
l
1re SESSION 
l
42e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mercredi 26 octobre 2016

[Enregistrement électronique]

  (1530)  

[Traduction]

    Je souhaite à tous la bienvenue au Comité permanent des affaires autochtones et du Nord de la Chambre des communes. Nous poursuivons aujourd'hui notre étude du suicide chez les peuples et communautés autochtones. Nous accueillons aujourd'hui un seul groupe, de 15 h 30 à 16 h 30.
    Merci beaucoup aux témoins d'avoir bien voulu comparaître. De la Weeneebayko Area Health Authority, nous accueillons M. Leo Ashamock, président, et Mme Deborah Hill, vice-présidente des services cliniques et chef de direction des soins infirmiers. Et Greta Visitor, directrice générale adjointe, représente le Conseil cri de la santé et des services sociaux de la Baie James. Bienvenue à tous.
    Nous donnons avec plaisir, 10 minutes à la Weeneebayko Area Health Authority pour s'exprimer, après quoi nous passerons au Conseil cri de la santé et des services sociaux de la Baie James, qui aura également 10 minutes. Je signale que, lorsque nous en serons à neuf minutes environ, je montrerai un carton jaune pour vous inviter à conclure. Le carton rouge veut dire que nous n'avons plus de temps et qu'il faut passer à l'intervenant suivant ou aux questions. Vos exposés seront suivis des questions des députés.
    Autre détail: nous sommes très heureux d'offrir aujourd'hui l'interprétation en cri. M. Greg Spence passe l'après-midi avec nous, au cas où quelqu'un aurait besoin d'interprétation en cri.
    Merci.
    Sans plus attendre, c'est avec plaisir que je donne la parole pour 10 minutes à M. Ashamock et à Mme Hill. Merci.
    Je vais commencer dans un instant. Nous avons fait distribuer un document avant notre arrivée, et je ne veux pas consacrer ces 10 minutes à en répéter le contenu. On y distingue deux thèmes. D'abord, le rôle du fournisseur de soins de santé dans la région et les difficultés liées à ce rôle, compte tenu des problèmes de logement, de recrutement et de maintien en emploi, et du travail en région isolée. Deuxièmement, un thème très cher à notre président, celui de la communauté: gérer la vie en l'absence de déterminants sociaux favorables à la santé, avec des conditions de vie rudimentaires dans un milieu isolé et apparenté à celui de la colonisation.
    Je vais laisser la parole au président Loone pour qu'il vous donne son point de vue personnel, à la façon des Premières Nations. Il va s'exprimer dans sa langue maternelle, et je serai très heureuse de parler des détails et des différentes parties du rapport pendant l'échange de questions et de réponses.

  (1535)  

    Bonjour, mesdames et messieurs.
    Comme vous l'avez entendu, je m'appelle Leo Ashamock. En cri, ce nom veut dire « huard ». Je suis fier de ce nom.
    Je suis un peu nerveux. C'est la première fois que je me retrouve dans un cadre comme celui-ci, mais je vais m'en tirer.
    Je vais tout de suite vous parler de mon expérience personnelle, vous donner une idée des difficultés que j'ai éprouvées au fil des années. J'aurai 65 ans en février prochain. Je m'achemine vers la retraite. Je travaille dans le domaine social depuis un bon moment. J'ai été conseiller en service social, affecté au programme communautaire de santé mentale, et je travaille maintenant dans les services de santé de Weeneebayko, d'où je viens, à Fort Albany, en Ontario.
    Je suis un survivant des pensionnats pour Autochtones. À compter de l'âge de six ans, j'ai passé sept ans dans le pensionnat de St. Anne, dont vous avez probablement entendu parler aux informations. C'est une expérience horrible que nous avons tous vécue dans ce pensionnat, si on en juge par les résultats. Les coupables ont dû répondre de leurs actes devant la justice et les indemnisations ont été versées.
    Mes années de formation... Un mot à ce sujet. Ma mère et mon père sont allés tous les deux en pensionnat. Ils ont souffert de leur confinement dans cet établissement, de la perte qu'ils ont subie à cause de la séparation d'avec leurs parents.
    Dans ces années-là et quand mes parents essayaient d'élever notre famille, nous avons connu le même drame. Nous avons été brisés. Nous avons été arrachés à notre foyer et traités durement au pensionnat. Cela a laissé des séquelles. Les liens affectifs ne se sont pas créés. Rien ne s'est passé pendant ces années de formation, à un moment où nous avions vraiment besoin de liens étroits avec nos parents, puisque nous leur avons été arrachés à l'âge tendre de six ans. Cela a vraiment eu des conséquences pour mon éducation également, dans mes années de formation et comme jeune adulte et pendant les études secondaires.
    J'avais de très bons résultats à l'école. J'étais toujours presque premier de classe. Mais lorsque je suis sorti du pensionnat, cela a été une sorte de libération. J'ai fait ce que j'avais à faire sans songer à finir mes études. J'ai quitté l'école dès que j'ai pu, à 16 ans. J'ai été trois ans en neuvième année et je n'ai jamais réussi. C'est que je buvais déjà de l'alcool, ce genre de chose. Cela ne s'est pas très bien passé par la suite, dans mon adolescence. J'ai fait une foule de choses idiotes, et la consommation d'alcool y était pour beaucoup.
    Quand j'ai commencé à vouloir vivre avec quelqu'un, ma femme et moi ne nous entendions pas. J'étais donc très violent. Je buvais sans cesse, tout et n'importe quoi. Cela n'améliorait rien à la maison, où j'étais violent avec mes enfants et ma femme. Pour finir, nous nous sommes séparés, ma femme et moi, et on nous a séparés de nos enfants.

  (1540)  

    À 21 ans, mon fils s'est suicidé. Il s'est tué. Il l'a fait avec un fusil de calibre 12. C'est alors qu'on me l'a dit. Un des parents est venu me voir et m'a dit: « C'est ta faute, Leo. C'est toi qui lui as fait ça. » Je ne le croyais pas. Je ne pouvais pas l'accepter. C'était trop dur à accepter. J'ai essayé de nier. J'ai fait de mon mieux, sachant très bien que c'était en partie ma faute. À ce qu'on m'a raconté, le fils que je venais de perdre pleurait en allant au lit le soir et disait: « Je voudrais que mes parents soient ensemble. Papa n'est pas là. Maman n'est pas toujours là parce qu'elle sort pour boire. » C'est la cause du suicide de mon fils.
    J'ai appris. J'ai obtenu de l'aide. Je me suis fait traiter pour mon alcoolisme. J'ai beaucoup changé. J'ai travaillé à tous les postes possibles. J'ai été gestionnaire de bande. J'ai été membre du conseil de ma bande. Je suis devenu chef adjoint. Lorsque je suis arrivé tout à l'heure et qu'on me saluait comme chef, c'était pour moi une sorte de compliment.
    J'y suis presque arrivé, mais j'ai recommencé à avoir des ennuis. Je suis retombé dans l'alcoolisme. Je me suis ressaisi depuis. Je fais ce que je dois faire et j'essaie d'aider ma communauté. Je suis conseiller en service social depuis maintenant une trentaine d'années, depuis que je me suis repris et que j'ai travaillé à mes problèmes. Je fais de mon mieux pour aider les jeunes de notre communauté.
    Je poursuis le plus rapidement possible.
    J'essaie d'obtenir de l'aide pour les jeunes de notre communauté, où il y a beaucoup de suicides. La semaine dernière, un jeune de 13 ans, que nous nous apprêtons à mener à son dernier repos, s'est suicidé par pendaison. En début d'année, nous avons eu trois suicides, un en janvier, un en février et un en mars. Ce sont trois jeunes qui ont réussi à se suicider en début d'année, et cela a été très difficile pour la communauté. C'est accablant. Je sais ce que la communauté ressent. Je peux en témoigner, puisque j'ai vécu cette expérience.
    Je suis pourtant optimiste. Les choses iront mieux. Nous faisons tout pour aider nos jeunes. Nous devons réfléchir à notre façon d'aborder le problème. On s'intéresse surtout aux jeunes, mais il faut mettre l'accent sur la famille nucléaire. Il faut que la famille participe au travail qui doit se faire. C'est sur ce plan qu'il nous faut de l'aide pour offrir les ressources pour le travail avec les familles. Je l'ai dit dans mon exposé. J'ai parlé des programmes axés sur le territoire auxquels je songe: amener tous les membres de la famille dans les bois et leur montrer comment se débrouiller, leur montrer à être respectueux de la création, de la Terre mère, de leur relation avec le Créateur.
    Je vais m'arrêter là. J'espère que vous pourrez prendre connaissance de ce qui est expliqué dans le document et en apprendre davantage sur les choses dont nous avons besoin.
    Nous avons essayé d'obtenir des ressources pour préparer une proposition. Nous avons besoin d'aide parce que nous n'avons pas encore acquis les connaissances nécessaires et que nous n'avons pas de personnel pour travailler à ces choses-là. Il y a un bon moment, nous avons demandé un conseiller en politique sur la santé, mais notre demande n'a pas encore été satisfaite.
    Merci.

  (1545)  

    Merci beaucoup, monsieur Loone. Je vous suis très reconnaissant.
    Nous serons très heureux de vous entendre, madame Visitor. Vous avez 10 minutes, après quoi nous passerons aux premières questions. Vous avez la parole.
    Je traduis rapidement ce que je viens de dire. Je suis honorée de comparaître et de saluer mes parents d'Eeyou Istchee, c'est-à-dire le territoire cri du Québec
    Je remercie mon ami Leo d'avoir parlé de son expérience.
    Je suis heureuse que Leo comparaisse avec moi aujourd'hui. Je me sentais un peu seule et effrayée, probablement, de parler de mon histoire personnelle. Je pourrais lire une foule de statistiques venant des documents que nous avons fournis, mais je vous laisse le soin d'en prendre connaissance.
    Comme Leo vous l'a dit, la plupart d'entre nous avons été touchés par les suicides. Trois membres de ma famille se sont suicidés. Ma soeur s'est pendue il y a une quinzaine d'années. Cela laisse un vide dans la famille et dans le coeur. Ma nièce par alliance de 18 ans s'est suicidée l'été dernier, laissant un enfant derrière elle. Mon beau-frère avec qui j'ai grandi, avec qui je suis allée à l'école — lui et moi étions amis depuis l'enfance — s'est enlevé la vie l'hiver dernier.
    Je suis vraiment touchée par ces suicides. Ce qu'il y a de commun chez les membres de ma famille, c'est probablement la toxicomanie et l'alcoolisme, et aussi l'apathie qu'on sent dans la communauté. Cette apathie tient beaucoup au fait que bien des gens n'entrevoient aucun espoir.
    Dans ma jeune vingtaine, j'ai aussi songé au suicide. Je suis allée jusqu'à prendre de puissants narcotiques qu'on m'avait prescrits parce que je souffrais de dépression. J'étais engagée dans une relation de violence, dans laquelle je suis restée cinq ans. Puis, pendant 10 ans, j'ai essayé de me distancer de cet épisode. Je suis moi aussi un produit des pensionnats.
    Je me suis sentie sans importance, négligée, indésirable. J'étais considérée comme une moins que rien parce qu'on ne me laissait même pas parler ma langue maternelle dans cet établissement. Lorsque je suis entrée au pensionnat, on m'a séparée de ma soeur aînée parce que je ne voulais pas apprendre l'anglais. Je suppose que ma soeur a été maltraitée physiquement parce qu'elle traduisait pour moi. Cette séparation en si bas âge, lorsque nous sommes entrées au pensionnat, a duré à l'âge adulte. Il n'y a qu'une vingtaine d'années que ma soeur et moi nous sommes réconciliées.

  (1550)  

    C'est au début de nos années de formation, dans les pensionnats, que les actes des surveillants ou des responsables qui nous ont séparées nous ont fait comprendre que nous ne devions pas parler notre langue. C'était le message lancé aux enfants. Il y a un ou deux jours, j'ai entendu un homme dire, au cours d'une réunion qui portait sur les accoutumances: nous faisons notre chemin de notre identité à notre destinée. Pourtant, tous les enfants placés dans ces établissements se sont fait voler leur identité.
    Le chemin a été difficile pour la plupart des gens. Pour retrouver leur équilibre et la place qui leur revient, nos gens doivent revenir à la base. Ils doivent accueillir ce qu'ils sont, comme membres des Premières Nations, comme Cris. La réconciliation, ce n'est pas que des excuses. Il faut aussi que chacun reprenne la place qui lui revient dans la société.
    Je pense en ce moment à mon grand-père, qui est décédé à 102 ans, il y a deux ans. Il parlait du sentiment d'autonomie que chacun ressent en lui. Comme membres des Premières Nations, nous avons été privés de cette autonomie parce que nous étions considérés comme inférieurs. Notre grand père blanc allait décider de ce qui valait mieux pour nous. Les pensionnats étaient ce qu'il y avait de mieux pour nous.
    J'ai parlé de mon beau-frère, de ma soeur, de ma nièce. Ils luttaient tous contre des problèmes d'accoutumance. Et moi aussi, lorsque j'ai songé au suicide. Je crois vraiment que la grande puissance, le Créateur, veillait sur moi.
    Je ne viens pas devant vous avec un discours soigneusement répété. Je vous parle du coeur, espérant vous toucher. Lorsque j'avais des problèmes de toxicomanie, je parlais avec ma tête, et j'étais complètement déséquilibrée. Ce sont les cérémonies du « chemin rouge » qui m'ont redonné mon équilibre.
    Pour nos gens, il y a aussi nos programmes axés sur le territoire. Avec le Grand Conseil des Cris, nous avons le premier traité moderne et nous sommes dans une meilleure situation financière que nos amis de l'autre côté de la baie, qui sont régis par la Loi sur les Indiens. Leurs collectivités soumises à cette loi vivent dans des conditions dignes du tiers monde. Je vous implore de les aider le plus possible.
    Pour prendre notre place, nous devons renouer avec notre culture et retrouver la fierté de ce que nous sommes et de ce que nous allons devenir.

  (1555)  

    Merci de m'avoir écoutée. Meegwetch.
    Merci beaucoup de vos témoignages, madame Visitor et monsieur Loone. Je crois pouvoir dire au nom du comité que vous nous avez profondément touchés. Merci.
    Nous allons passer aux questions. M. McLeod sera le premier à intervenir, et il a sept minutes. Je vous en prie.
    Merci de vos exposés. Il est très pénible d'entendre parler des difficultés que vous avez éprouvées. Nous étudions la question du suicide depuis quelques mois, et chaque fois qu'il est question de ces tribulations, c'est difficile à entendre.
    Je viens des Territoires du Nord-Ouest et j'ai vécu dans une petite localité autochtone de 800 habitants. Je suis allé moi aussi en pensionnat. J'ai connu le problème de la langue. Je ne sais plus parler aucune des langues autochtones, même si je n'ai pas dit un mot d'anglais avant l'âge de six ans. Je vois tous les jours, dans ma localité d'origine, des familles qui se défont à cause de l'alcool et des drogues. Je vois des jeunes atteindre l'âge où ils pourront se procurer de l'alcool, et ils suivent le même parcours. Le problème prend des proportions énormes. C'est une crise et il existe un vrai désespoir chez les jeunes, comme vous l'avez expliqué. La plupart des jeunes qui se suicident le font pour des problèmes comme ceux-là, qui demeurent assez peu importants pour des adultes, mais qui sont énormes pour un enfant ou un jeune. Pour un adulte, c'est différent. Pour les jeunes, c'est habituellement plus lourd, plus difficile.
    J'ai lu votre document et vos deux exposés. Vous y faites d'excellentes recommandations. Je suis tout à fait d'accord avec vous pour dire qu'il faut commencer par amener les jeunes à accepter qui ils sont. Il faut qu'ils soient fiers d'être des Autochtones, fiers de leur culture et de leur histoire.
    Dans votre document, j'ai cherché d'abord s'il y était question de routes, car vos collectivités sont isolées comme la plupart des miennes le sont. Expliquez-moi. Ce facteur a-t-il un effet sur le problème du suicide, cette impression d'être isolé, d'être séparé du reste de la population? Voilà ma première question.
    C'est un bon point. Ce facteur joue certainement. Nous, dans le Nord, dans les collectivités isolées, nous voudrions avoir accès à des villes du sud, nous voudrions avoir des routes carrossables en toute saison. La question a été soulevée périodiquement au fil des ans, depuis que je siège au conseil de ma nation, c'est-à-dire huit ans. Il est arrivé que nous venions à des réunions, à des comités comme celui-ci, pour parler d'accès routier. Cela améliorerait certainement nos conditions de vie, ferait diminuer le coût de la vie et briserait l'isolement. Ce serait vraiment utile.
    Pour faire fonctionner un établissement comme celui de nos services hospitaliers, pour entretenir l'hôpital et les points de service au nord de Moose Factory, il faut absorber un coût de la vie énorme. Notre hôpital général est situé à Moose Factory. C'est un très vieux bâtiment qui, à l'époque de sa construction, a servi de sanatorium pour les tuberculeux. Nous commençons maintenant à parler du nouvel établissement que nous voudrions avoir. Nous souhaitons que la réalisation de ce projet soit accélérée. Peut-être que Debbie pourra en dire un mot. Notre directeur général, Bernie Schmidt, est également ici. Il est certain que l'accès serait plus facile. Le transport des patients vers les points de consultation nous coûte très cher. Il n'y en a pas à Moose Factory maintenant, et il faut aller dans le sud. Imaginez ce que peut coûter un vol vers des villes comme Kingston, Toronto, Ottawa, Sudbury ou Timmins. Debbie pourra peut-être donner plus de détails.

  (1600)  

    Je pense aussi que ce facteur joue. Il a un impact. Lorsque nous avons conçu ce projet, nous pensions, à l'administration sanitaire, au fardeau quotidien à supporter pour essayer d'offrir les soins élémentaires. Un des obstacles à la réalisation du projet de nouvel hôpital est le coût de la construction, alourdi par l'isolement et l'absence de route.
    Un mot du logement, également. Au départ, quand nous avons amorcé cette étude, je connaissais, d'après ce qui se passe dans ma circonscription, les difficultés de la situation du logement, surtout en ce qui concerne les logements à prix modique ou les logements sociaux, mais je ne connaissais pas l'impact de ce manque de logements sur l'attitude des gens, sur ce désespoir.
    Plusieurs témoins nous ont dit que, si nous réglions notre problème de logement, nous ferions disparaître du même coup de 50 à 60 % de nos problèmes sociaux. Êtes-vous d'accord?
    Je le suis. En plus du coût de la construction de bâtiments comme des logements, il y a aussi le fait que notre sol est gorgé d'eau. La nappe phréatique est très proche de la surface. Il faut donc relever le niveau du sol et ménager un bon égouttement, et nous n'avons pas les ressources pour le faire. À cause de tout cela, il nous faut aussi de meilleures fondations.
    Merci. Michael, votre temps de parole est terminé, je le crains.
    Cathy McLeod posera la prochaine question. À vous.
    Merci à vous tous de vos propos qui viennent du coeur, au sujet des défis absolument horribles que vous devez relever bien trop souvent au quotidien.
    Je remarque que les deux groupes représentent des autorités sanitaires. Pardonnez-moi, mais avez-vous le contrôle total de la prestation de vos services de santé? Estimez-vous avoir l'autonomie voulue pour offrir les services et les programmes de la façon qui vous semble indiquée? Y a-t-il un transfert de fonds, après quoi vous avez l'autorité à l'égard des services dans votre région?
    Je ne sais vraiment pas comment répondre.
    Le système d'enveloppes que le gouvernement applique pour distribuer les fonds destinés à la prestation de service est limité à un certain montant. C'est le problème qui se pose à nous. On devrait envisager de relever notre financement de base pour les services qui sont décrits dans le document que nous avons établi sur l'évaluation de nos installations et des services que nous y dispensons. Le document a déjà été remis au gouvernement. Nous devons persévérer, puisque nous entrevoyons un déficit de 24 millions de dollars, que nous essayons de gérer. C'est ce qui a été relevé dans l'évaluation et l'audit. On a jugé que les ressources accordées sont insuffisantes pour les services que nous fournissons, parce qu'il s'agit de services essentiels. Nous devons travailler avec les montants que nous avons, mais nous dépensons davantage. Voilà ce qui s'est passé.
    Nous avons un délai à respecter pour pouvoir poursuivre à Weeneebayko le travail qui doit s'y faire. De plus en plus de gens tombent malades. Les chiffres ne diminuent pas, mais augmentent sans cesse, au contraire, comme l'attestent probablement les statistiques fournies dans le document que nous venons de vous remettre.
    Deb et Greta peuvent donner des précisions.

  (1605)  

    Une réponse partielle à votre question, c'est qu'il y a différents modèles de financement. Le financement de l'autorité sanitaire est assuré en partie par la province, en partie par le gouvernement fédéral. Et puis il y a une autre partie des fonds qui provient des diverses bandes des Premières Nations. C'est assez compartimenté et fragmenté. Il est donc difficile de dire que nous sommes l'autorité sanitaire. Nous n'avons pas le contrôle des enveloppes de fonds.
    Au Canada, certaines collectivités n'ont aucune autonomie. Elles relèvent toujours du gouvernement pour l'apport de fonds et de personnel. Depuis de longues années, vous avez une plus grande autonomie à l'égard de la prestation de vos services de santé.
    Les Cris du Québec à qui s'applique la Convention de la Baie James et du Nord québécois obtiennent des fonds provinciaux et fédéraux. Nous avons des lignes directrices et des conditions à respecter à l'égard des fonds versés à nos collectivités.
    Vous avez demandé si nous étions autonomes ou non. Nous devons respecter certaines conditions. Ceux d'entre nous qui occupent des postes de direction ou de président doivent s'efforcer de travailler à l'intérieur d'un programme soumis à certains paramètres d'application, et le faire selon une approche holistique.
    Ce mois-ci, j'ai visité un établissement où on doit plus ou moins réaliser la quadrature du cercle. C'est la philosophie qu'on y pratique: concilier le cercle et le carré.
    Pour une partie des fonds versés à vos communautés ou à vos organisations afin de soutenir les activités de prévention du suicide, il faudrait cela, la quadrature du cercle? Vous ne pouvez pas faire ce qui vous semble le mieux? Vous avez un programme obligatoire? C'est bien cela?
    Exactement.
    Rapidement. Toutes les communautés ont-elles des communications à large bande de qualité pour la télésanté et le soutien?
    Oui, nous avons les communications mobiles dans toutes nos collectivités.
    Nous avons des problèmes d'infrastructure surtout à Kashechewan. On dirait que la communication marche moins de la moitié du temps, mais elle existe.
    Toutes nos communautés sont reliées, mais la large bande ne suffit pas pour celles de Waskaganish ou de Whapmagoostui, qui sont situées tellement au nord qu'elles ont aussi des problèmes d'isolement.
    Nous avons la télésanté à différents endroits.
    Je crois qu'il ne me reste plus de temps. Merci.
    La prochaine question sera celle de Charlie Angus. À vous.
    Merci de votre exposé et merci d'avoir parlé du fond du coeur. Je pense à Garrett Tomagatick, 13 ans, qui est disparu. Nous avons perdu trois autres personnes à Fort Albany. Une autre à Moose Factory. Nous avons perdu le petit Sheridan, et il y a eu 700 tentatives de suicide à Mushkegowuk depuis 2009. On parle de drame. C'est un drame quand un enfant se fait frapper par une voiture. Il y a ici quelque chose qui n'est pas du même ordre.
    Je suis allé à Moose Factory en 2009, au beau milieu de la crise de suicides. C'était comme se promener en zone de guerre. Et il y avait le traumatisme des travailleurs de première ligne qui devaient gérer la situation soir après soir.
    Je tiens à remercier l'autorité de Weeneebayko de son travail. Je vous donne probablement beaucoup d'ennuis. J'appelle constamment, mais dans mon bureau, nous n'avons à gérer qu'un faible pourcentage de ce dont vous devez vous occuper au quotidien.
    Nous nous efforçons toujours d'obtenir des traitements, de trouver un endroit où un jeune peut obtenir du counselling. Il n'est pas normal que le bureau du député doive téléphoner et menacer un établissement de santé pour faire traiter un jeune de 13 ans, mais ces gens-là se présentent ensuite dans les urgences. Vous les faites sans cesse voyager par avion. Il faut une action proactive. Ce sont de magnifiques jeunes enfants... C'est ce qui me choque, voir ces décès à Fort Albany. C'est une communauté étonnante.
    Pourriez-vous expliquer au Comité le travail de première ligne, le problème du manque de ressources pour procurer à ces jeunes le traitement dont ils ont besoin de façon proactive et non en réaction à ce qui survient.

  (1610)  

    Oui, c'est tout à fait vrai, Charlie, si je peux me permettre cette familiarité.
    Bien sûr.
    Je rentre d'une évacuation médicale, la semaine dernière, pour ma petite-fille qui avait besoin de soins en santé mentale. Il y a eu beaucoup de confusion. Où pouvait-on l'envoyer. L'endroit principal est l'hôpital de Timmins et du district, où il y a une unité de santé mentale, et c'est là où travaille le médecin de ma petite-fille, le Dr Nuosu.
    Elle s'est fait dire qu'il n'y avait pas de lit en santé mentale à Timmins. Nous nous sommes adressés à North Bay et à Sudbury. C'était fermé. On nous a dit qu'il fallait l'amener à Moose Factory, mais nous devions le faire le lendemain matin et pas le soir même.
    Où ma petite-fille s'est-elle retrouvée? Dans une cellule de prison du détachement des SNPA à Fort Albany. Ce n'est pas l'idéal. Le moins qu'on puisse faire dans ce genre de situation, c'est offrir aux patients une chambre sûre à Fort Albany même. On pourrait songer à cette solution pour les patients ou clients en attente.
    On se fait répondre aussi: « Vous n'êtes pas dans mon secteur. »  Voilà ce qu'on nous dit dans les autres hôpitaux. Même si leur secteur est le RLISS du Nord-Est, on se fait dire: « Vous êtes en dehors de votre zone. » Ce n'est pas vrai. C'est mon domaine. Je parle à ces gens-là à titre de président. J'ai des contacts avec eux et je sais que ce n'est pas vrai. Nous sommes sûrs d'être dans notre secteur, même si nous devons envoyer des patients à l'unité pour adolescents à Ottawa.
    Dans ce genre de situation, il doit y avoir une meilleure coordination pour ces jeunes qui ont des problèmes de santé mentale. Ce n'est pas tout. À cause de leurs problèmes d'alcool et de drogues, ces jeunes, à cause du sevrage, ont des hallucinations, par exemple. Nous devons vraiment les aider.
    Effectivement.
    Puis-je proposer?
    Oui?
    Pour traiter un patient, on le retire temporairement de la situation où il se trouve. Si on ne cherche pas à guérir toute la famille, on ramène l'enfant dans le contexte qu'il veut fuir.
    Je poursuis dans le même ordre d'idées. Après la crise des suicides, en 2009, lorsqu'on mettait à pied les travailleurs de la protection de l'enfance de Payukotayno au milieu de la crise parce qu'ils avaient épuisé leur budget, nous avons dû couvrir de honte le gouvernement pour qu'il ramène ces travailleurs. Puis, il a congédié 25 % d'entre eux et a fermé des foyers de groupe en 2012, disant: « Maintenant, vous allez devoir vivre selon vos moyens. » Et le cycle a recommencé.
    Cindy Blackstock dit que le système de protection de l'enfant est détraqué. Il y a eu tant de cas de suicides d'enfants qui ont été... Le seul moyen à la disposition des services était de retirer l'enfant à sa famille et de le confier à une famille d'accueil. C'était la fin de la famille, qui perdait son enfant. Que faudra-t-il pour nous convaincre de débloquer les ressources voulues pour aider la famille dans son milieu, pour avoir un centre pour les jeunes, de sorte que les jeunes aient un endroit où aller au lieu de se tourner vers les drogues?
    Quelle vision a-t-on, en dehors de ces réactions aux situations d'urgence? Votre communauté ne devrait pas fonctionner comme une unité de MASH. Vous devriez faire de la prévention, vous intéresser au long terme, offrir des services de santé proactifs. C'est ce qui s'est produit dans d'autres communautés. Nos communautés ont parfois les allures de postes d'urgence sur un champ de bataille.
    Qu'en pensez-vous?

  (1615)  

    Je suis d'accord avec vous, Charlie. Ce sont d'excellentes observations. Merci pour ce rappel, Greta. À cause de la façon dont le service est coordonné, parfois, on peut détruire toute une famille.
    Il y a même un problème en ce qui concerne les accompagnateurs des enfants. Les parents ne sont même pas invités à aller avec eux. Il faut pourtant qu'ils participent au plan de traitement. C'est très important. Cela vaut aussi pour tous les patients qui sont aiguillés vers différents centres de services de santé. Ils doivent être accompagnés par quelqu'un qui peut les soutenir.
    Je suis sûr que les médecins peuvent autoriser le patient à avoir un membre de sa famille près de lui dans sa souffrance. Cela les aide à guérir. C'est ce que les médecins nous disent, et nous le savons aussi.
    Merci beaucoup.
    La prochaine question viendra de Mike Bossio. À vous.
    Merci beaucoup du courage que vous avez eu de venir nous faire part de vos récits personnels. Je peux à peine imaginer la douleur que vous et votre communauté avez vécue pendant des générations. Votre histoire et votre culture ont été déchirées. Votre langue vous a été enlevée. Vos unités familiales sont brisées. Comment commencer à réparer tout cela quand on n'a personne vers qui se tourner? Et puis les institutions d'Ottawa viennent vous dire ce que vous devez faire. Ce sont elles qui sont à la source du problème. Sur quoi peut reposer la confiance nécessaire pour aller de l'avant?
    Tout au long de cette étude, nous en revenons toujours au même point. Le système est détraqué et le modèle de financement ne marche pas. Ottawa essaie sans cesse d'apporter du nouveau, de nouvelles recettes magiques les unes après les autres, et nous en revenons au point de départ: des familles brisées, l'alcoolisme, la toxicomanie, la violence.
    Il y a d'une part le problème de l'autonomie. Au premier coup d'oeil, vous semblez avoir de l'autonomie, mais en fait, à cause des subventions et du modèle de financement, du modèle des programmes, vous devez constamment vous battre pour obtenir de nouveaux fonds, pour faire renouveler les fonds, et l'argent ne peut être dépensé que d'une certaine manière. Êtes-vous d'accord pour dire que le modèle de financement est détraqué?
    Tout à fait.
    Êtes-vous d'accord pour dire qu'il est temps de parvenir à l'autonomie, que l'autonomie gouvernementale et un financement durable sont l'approche à retenir?
    Si vous aviez l'autonomie nécessaire pour établir vos propres priorités, quelles seraient-elles?
    Ce n'est pas une question honnête. Vous êtes plongé dans cette situation, n'est-ce pas?

  (1620)  

    Exact.
    Vous avez traversé l'enfer et êtes sorti de l'autre côté.
    Je suis curieux de savoir quelles devraient être les priorités.
    C'est une question piégée. Je comprends pourquoi Leo répugne à répondre.
    C'est une question tendancieuse. Vous demandez où devraient être nos priorités. Il faudrait retrouver l'esprit des Premières Nations, rétablir leur identité, et cela ne peut pas se faire de façon compartimentée ou individualiste. Nous avons parlé de la famille. C'est notre fondement, notre lien avec le territoire. De plus en plus, à cause de tous les empiétements du développement dans les régions du Nord, nous perdons l'espace où nous pratiquions la chasse et le piégeage.
    Je ne sais vraiment pas trop comment répondre à la question.
    En fait, c'est exactement la réponse que j'attendais. Nous devons commencer par la culture de la famille. Ce sont les choses qui ont été abîmées, et nous devons trouver les moyens de les réparer, mais nous devons vous donner le pouvoir voulu pour y parvenir.
    Le problème, c'est que personne n'a le pouvoir. C'est se prendre pour Dieu que dire: nous vous donnons le pouvoir. Les gens doivent affirmer leur propre autonomie et prendre eux-mêmes leurs affaires en main. Il faut commencer par les éléments de base dans l'existence des gens. Je repense à la première question du député. Il a parlé d'isolement. Les suicidaires ont tendance à s'isoler. J'ignore si la solution est de briser notre isolement. Cela aidera certainement l'économie de nos collectivités, mais je crois que la base que nous cherchons, c'est l'établissement de relations, le rétablissement de la famille, qui doit apprendre à communiquer, comme nous le faisons aujourd'hui.
    J'ai eu la chance, récemment, de me rendre visite à Haida Gwaii. J'ai rencontré Miles Richardson, ainsi que Steven Nitah, des Territoires du Nord-Ouest, et Valérie Courtois. Miles a fondé le programme des gardiens. Steven Nitah s'est occupé des gardiens de parc et Valérie Courtois, une Innue, essaie maintenant de lancer le programme de gardiens dans tout le pays. C'est tout cet aspect du retour à la terre.
    Sur le plan culturel, c'est-à-dire la langue, l'art, les traditions et le territoire, croyez-vous que c'est la base d'où il faut partir pour redonner fierté et espoir aux communautés?
    C'est vraiment la base. Je pense aux difficultés que j'ai eues et à la résilience qui est maintenant la mienne. J'en suis arrivée là grâce aux rites de passage que mes parents et mes grands-parents m'ont montrés. Lorsque nous avons suivi ces rites, comme la cérémonie des premiers pas ou celle des premières raquettes, j'ai ressenti de la fierté, j'ai senti que j'avais de l'importance, comme personne.
    Leo, auriez-vous quelque chose à ajouter?
    Mike, nous n'avons plus le temps, je le crains. Nous devrons attendre une autre question.
    J'ai seulement un mot à dire.
    Allez-y.
    C'était très intéressant. L'autonomie que nous avions avant l'arrivée des colons, c'est elle qui a été brisée. Et c'est une tâche à laquelle nous devons travailler. Comment nous y prendre, c'est à nous de le dire, c'est à nous de vous dire de quoi nous avons besoin, ce que nous voulons. Et nous ferons participer les aînés, nous inviterons des gens de toutes les sphères d'activité, du système de justice, par exemple. Nous devons veiller sur notre propre peuple. Nous ne pouvons pas toujours voir les patients retirés de la communauté pour être hospitalisés et ensuite revenir exactement là où ils en étaient. Nous devons reprendre tout cela en main.

  (1625)  

    Merci beaucoup à vous deux.
    Merci de ce complément.
    Il nous reste du temps pour deux questions de cinq minutes. Cela passe vite.
    La première sera posée par David Yurdiga. Je vous en prie.
    Merci, monsieur le président.
    Merci aux témoins de participer à notre étude. Vous nous avez dit des histoires émouvantes qui nous ont vraiment touchés. Je crois que tous les membres du Comité ont le coeur en peine.
    Madame Visitor a dit que, dans beaucoup de programmes, il faut réaliser la quadrature du cercle. Toutes sortes de programmes sont annoncés, et ils changent sans cesse. Ils deviennent autre chose que ce qui était prévu au départ. Dans quelle mesure les collectivités autochtones sont-elles consultées pour l'élaboration de ces programmes? Croyez-vous que vous devriez participer davantage de façon à améliorer les programmes?
    Je comprends les difficultés que vous éprouvez, étant donné mon poste au Conseil cri de la santé et des services sociaux. Mon plus gros problème a toujours été d'obtenir le point de vue de la base sur la façon de structurer les programmes, car ce sont les gens qui savent de quoi ils ont besoin sur les plans de la santé et du bien-être. Je suis certainement d'accord pour qu'on parte de la base plutôt que d'imposer des solutions d'en haut et pour que l'on consulte la population pour savoir quels sont les programmes et services qui leur seraient bénéfiques.
    Merci.
    Les programmes actuels ont-ils une certaine souplesse pour que vous puissiez les modifier en fonction de la communauté? Chacune est différente, et nous comprenons que, dans beaucoup de programmes, le même modèle doit s'appliquer à tout le monde. Je constate que cela ne fonctionne pas. Quelle latitude voudriez-vous avoir pour élaborer ou modifier les programmes et les adapter à votre communauté?
    La question s'adresse à tous les témoins.
    Pour ce qui est des programmes et services, je crois que les autorités sanitaires prévues par les traités ont probablement plus de restrictions que ceux d'entre nous qui reçoivent des fonds... Comme nous sommes les bénéficiaires de la Convention de la Baie James, nous sommes considérés comme les signataires du premier traité moderne. Nous ne sommes pas régis par la Loi sur les Indiens, mais nous devons nous conformer tout de même à la Loi sur les Cris et les Naskapis, qui nous impose également des restrictions.
    Leo serait probablement mieux placé que moi pour répondre à votre question, car je crois que, de son côté, les restrictions sont plus lourdes que les nôtres.
    C'est certain.
    À propos de l'observation de Greta, il faut être ouvert. Vous devez être plus souples au sujet des modèles de gouvernance. Même avec l'autorité sanitaire que nous avons là-haut et le lien que nous sommes censés avoir avec le RLISS du Nord-Est, nous sommes parfois laissés de côté, même si nous sommes censés collaborer. Une autre autorité qui serait désignée dans notre propre région serait à conseiller, effectivement.
    Merci.

  (1630)  

    Merci beaucoup d'avoir comparu aujourd'hui. Nous vous sommes reconnaissants de ce que vous nous avez apporté. Assurément, nous voudrions que toutes vos communautés progressent dans ce dossier. Il y a eu trop de souffrances, et les prochaines mesures seront importantes.
    Merci.
    La prochaine question, et aussi la dernière, viendra de Gary Anandasangaree. Allez-y.
    Merci beaucoup de nous avoir fait connaître vos expériences. Ce sont des choses que nous avons beaucoup entendues, mais lorsque vous en parlez, cela nous rappelle la réalité que nous étudions.
    Je voudrais que vous me donniez une idée de la Convention de la Baie James et de la forme d'autonomie gouvernementale qu'elle permet. Quelles sont les restrictions? À l'avenir, que devons-nous faire pour combler les lacunes?
    Comme je l'ai déjà dit, la CBJNQ est le premier traité moderne.
    J'ai l'impression que le gouvernement a toujours contrôlé le programme d'autonomie gouvernementale, de sorte qu'il a toujours son rôle paternaliste auprès des Premières Nations ou des peuples autochtones. C'est donc le premier traité moderne. Mais nos dirigeants, lorsqu'ils ont négocié, avaient en tête une relation de nation à nation, et c'est ce qu'ils ont recherché. Si on examine la Convention de plus près, on constate que nous sommes en fait considérés comme une administration municipale. Il est certain qu'une administration municipale a moins de pouvoirs qu'un gouvernement provincial ou fédéral, mais nos anciens dirigeants qui ont négocié la Convention envisageaient une relation de nation à nation.
    C'est le point principal que je veux faire ressortir. Comme Leo l'a dit, personne ne peut nous donner du pouvoir. Nous devons renouer avec qui nous sommes comme peuple autochtone et retrouver la fierté de nos ancêtres.
    Quant à la langue, l'une des choses qui reviennent régulièrement dans nos échanges, c'est l'importance de la langue. Tout est relatif, mais je crois que le cri est l'une des quelques langues autochtones qui sont plutôt stables, comparée à d'autres.
    Que doit faire le gouvernement pour garantir l'avenir de la langue de sorte que les gens l'utilisent dans un cadre judiciaire, par exemple, ou dans d'autres espaces publics lorsqu'il y a interaction avec le gouvernement?
    Pouvoir parler notre langue, c'est le fondement de notre culture.
    J'espère que Greg est à l'écoute.
    Je vais vous donner un exemple de la façon dont j'essaie d'accepter votre langue étrangère dans ma façon de penser et ma culture crie.
     [Le témoin s'exprime en cri, avec l'interprétation que voici.]
    Notre langue est très importante. Elle nous a été donnée par le Grand Esprit. J'estime qu'il est très important que nous puissions nous exprimer dans la langue qui nous a été donnée. Il est important de l'utiliser pour exprimer correctement ce qui vient de mon coeur et pour vous parler avec mon intelligence, mon corps et mon esprit. C'est ainsi que je me sens lorsque je parle cri. Je n'arrive pas à m'exprimer tout à fait clairement lorsque je n'utilise pas ma langue. C'est ainsi que je suis.
    [Traduction]
    Je suis heureux de pouvoir converser avec vous dans votre langue, mais je préférerais pouvoir le faire dans ma propre langue, qui me permet de m'exprimer davantage et de parler avec mon coeur. Je fais de mon mieux pour expliquer en anglais que tout ce que j'ai dit et communiqué vient de mon coeur. J'accepte vraiment votre écoute. Je vous en remercie.
    Meegwetch.

  (1635)  

    Une dernière observation.
    Si j'étais votre invitée et que vous me demandiez si je veux du gâteau, il serait impoli de ma part de dire quelle part je veux. Sachez que le cri, notre langue maternelle, est le souffle de vie de notre culture. Je ne sais pas si cela peut prendre une expression monétaire.
    Merci beaucoup à vous tous, madame Visitor, monsieur Loone et madame Hill, de vos témoignages très sincères.
    Il nous sera très utile. Nous avons toujours l'impression de ne pas avoir assez de temps pour dire tout ce que nous voulons. Je vous signale donc que nous avons créé un portail Internet pour recueillir d'autres observations. S'il y a autre chose que vous voulez nous dire, Michelle, la greffière, s'assurera que vous puissiez visiter ce site Web. Nous avons aussi un sondage en ligne que nous avons lancé pour les professionnels de la santé, comme vous. Il faut une vingtaine de minutes pour y répondre. Il serait très utile que vous y répondiez. Il orientera nos conclusions finales et nos recommandations.
    Merci beaucoup d'avoir pris le temps de venir nous voir aujourd'hui.
    Nous allons faire une courte pause.
    [La séance se poursuit à huis clos.]
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