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INAN Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent des affaires autochtones et du Nord


NUMÉRO 049 
l
1re SESSION 
l
42e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 21 mars 2017

[Enregistrement électronique]

(0855)

[Traduction]

    Bienvenue à tous. Nous allons commencer.
    Nous voulons, premièrement, reconnaître que nous sommes sur le territoire non cédé du peuple algonquin.
    Dans le cadre de notre processus national de vérité et de réconciliation, nous sommes honorés d’être ici pour entendre la grande chef Sheila North Wilson.
    Je tiens à souhaiter la bienvenue à Sheila North Wilson et à David Chadwick, qui feront une présentation au nom de MKO. Ils auront 10 minutes pour ce faire, et nous passerons ensuite à la période des questions.
    Merci d’être venus. Je vous cède la parole.
     [Le témoin s'exprime en cri.]
    Je suis reconnaissante d’être ici. Je m’appelle Sheila North Wilson et je suis membre de la nation crie de Bunibonibee. Un ancien m’a déjà dit que lorsque nous nous servons d’abord de notre langue maternelle en public, nous affirmons notre souveraineté. Je le fais donc par respect pour ma souveraineté et mon peuple, non par manque de respect pour les vôtres.
    Je suis contente d’être ici. Je tiens aussi à dire, avant de commencer, que cette question ne représente qu’une petite partie du gros problème dans ce dossier. Je ne prétends pas tout connaître à ce sujet — je ne pense pas que ce soit le cas de quiconque —, mais je vais vous donner des perspectives en me fondant sur ce que nous savons du point de vue de notre région.
    J’éprouve de la gratitude pour les 30 chefs et communautés que je représente et notre personnel, y compris Dave Chadwick, et d’autres qui nous aident en cours de route.
    Tansi, boozhoo, edlanet'e, et bonjour. Au nom des 30 Premières Nations du Nord du Manitoba qui représentent près des deux tiers des Autochtones de la province et des plus de 72 000 citoyens autochtones de Manitoba Keewatinowi Okimakanak, qui sont cris, dénés et oji-cris, je tiens à vous remercier de me donner l’occasion de faire cette courte présentation concernant la Politique de la prévention et gestion des manquements d’AINC.
    Comme vous le savez sûrement, cette politique a été instaurée par le gouvernement fédéral précédent. Je pense que cette étude arrive à point nommé et qu’elle aurait dû, en fait, être menée depuis longtemps. Je ne crois pas que bien des députés et même des sénateurs diraient que cette politique a stimulé le développement économique dans les réserves. Lorsqu’elle a été présentée, le gouvernement fédéral avait entrepris de réduire considérablement le financement de base et opérationnel des organisations des Premières Nations et des conseils tribaux au Canada. Le 3 juin de cette année-là, toutes les organisations autochtones ont reçu des lettres d’AADNC dans lesquelles étaient énoncées les réductions et les compressions dans le financement des projets qui seraient effectuées en 2013 et en 2014. J’ajouterais que ces lettres sont arrivées après 17 heures ce jour-là, alors cela s’est vraiment fait en douce. Le financement de base a été réduit de 10 %, tandis que le financement des organisations régionales a été réduit à 500 000 $ tout au plus. Le financement des projets a été réduit sur une période de deux ans.
    Les organisations des Premières Nations ont perdu en moyenne plus de 50 % de leur financement. Dans le cas du Manitoba, ce fut 68 % selon un rapport dont j’ai pris connaissance récemment. J’ai lu que le Manitoba était une des provinces qui avaient subi les compressions les plus importantes au Canada.
    Sur une période de cinq ans, le même ministère fédéral a sous-utilisé presque 1 milliard de dollars de son budget. Il a, en moyenne, sous-utilisé 218 millions de son budget annuel au cours des dernières années du gouvernement fédéral précédent. C’était pendant une période où le public mettait le gouvernement au défi de traiter la crise de l’eau non potable dans littéralement des centaines de réserves. Les projets d’infrastructure de base qui auraient dû être construits depuis longtemps ont été retardés, et une autre génération s’est vu refuser un financement égal pour l’éducation à cause de sa race et de son emplacement géographique.
    Le premier ministre de l’époque a présenté des excuses officielles pour les dommages causés par les pensionnats, mais n’a pas été disposé à prendre des mesures pour éliminer les inégalités que les Autochtones ont subies et subissent toujours. Au lieu de cela, le financement des programmes qui répondaient à nos préoccupations a été sujet à des réductions plus importantes que dans presque tous les autres ministères. La Politique de la prévention et gestion des manquements s'inscrit dans ce programme, car elle a réussi à limiter le développement économique et l’autonomie gouvernementale.
    Je veux d’abord faire remarquer que plus de la moitié des Premières Nations du MKO sont assujetties au Cadre de contrôle de gestion d’AINC. La Politique de la prévention et gestion des manquements, qui est entrée en vigueur en 2011 et a été révisée en 2013, est censée favoriser le développement des capacités communautaires de façon à ce que les communautés continuent d’accroître leurs capacités de s’autogérer; elle est aussi censée prévenir les manquements et les récidives.
    Cela signifie, en fait, que les pouvoirs et options du chef et du conseil locaux sont, au mieux, très limités. Bien des Premières Nations du Manitoba se sont vu imposer ces types de restrictions pendant des décennies sous différents noms, y compris celui d'« agent des Indiens ». Cela signifie que pour toutes les décisions importantes dans leurs communautés, elles ont dû communiquer avec AINC à Winnipeg ou à Ottawa si le gestionnaire actuel approuvé par le fédéral décidait ne de pas avaliser leur recommandation.
(0900)
    Les statistiques les plus récentes sur le site Web d’AINC montrent que sept de nos Premières Nations ont été placées dans la catégorie « Plan d’action de gestion administré par le bénéficiaire ». Cet euphémisme signifie officiellement que la Première Nation élabore un plan qu'AINC juge acceptable. Les deux catégories suivantes, « conseiller nommé par le bénéficiaire — cogestion » et « gestion des ententes de financement par un séquestre-administrateur », sont des étapes plus étroitement contrôlées par le ministère. Douze de nos Premières Nations entrent dans ces catégories. En tout 46 nations au Manitoba sont visées par la gestion des manquements, un des nombres les plus élevés au pays.
    Officiellement, cette politique est censée être axée sur la prévention, la gestion et la viabilité, mais la plupart du temps, elle nuit au développement de collectivités viables. Bien que cette politique du gouvernement fédéral précédent soit toujours en place, il en va de même pour ses lacunes les plus remarquables au plan de l’infrastructure. Ce ne sont pas les projets d’infrastructure potentiels qui manquent dans les réserves au Canada. La plupart de ces besoins ont été cernés il y a des années.
    Je ne vous apprends rien en vous disant que l’analyse menée par le gouvernement fédéral et le Comité a révélé, l’an dernier, qu’il faudrait 2 milliards de dollars pour composer avec la question des moisissures et de la pénurie de logements dans nos réserves du Nord du Manitoba seulement alors que le financement affecté au logement pour l’ensemble du pays dans le dernier budget représentait moins que le dixième de ce montant. On estime que le déficit pour l’infrastructure des Premières Nations au Canada dépasse les 7 milliards de dollars. Sans entrer dans les détails de ce dont chaque communauté que le MKO représente a besoin, je veux simplement indiquer que ces conditions déplorables forcent les dirigeants des Premières Nations à se retrouver dans une série de situations de crise.
    Les représentants des bandes reçoivent des appels quotidiens de familles en détresse qui essaient de survivre dans un dénuement profond. Comme les bandes, ils prennent constamment du retard alors qu’ils essaient de composer avec toutes ces pressions. Nous sommes ravis que le gouvernement fédéral ait officiellement approuvé les recommandations de la Commission de vérité et de réconciliation, mais je pense que si nous visons vraiment à changer les choses, nous devons nous pencher sur les facteurs qui empêchent nos gens d’avancer.
    Il y a une semaine, j’ai parlé aux Nations unies des similarités et des différences entre les réfugiés qui arrivent au Canada d’ailleurs dans le monde et les Autochtones qui quittent des réserves éloignées pour aller dans les centres urbains.
    Les deux groupes trouvent qu'il est très difficile de s’installer dans les grands centres urbains canadiens. Les différences dans les cultures, les langues, les infrastructures et les possibilités d’emploi sont difficiles à surmonter, de même — honnêtement, dans bien des cas — que le racisme manifeste. Fort heureusement, la plupart des réfugiés bénéficient de beaucoup de soutien pour les aider. Il arrive souvent que cela ne suffise pas, mais la comparaison avec les Autochtones qui migrent vers les villes est très révélatrice. Faute d’écoles secondaires et, a fortiori, d’institutions postsecondaires dans la plupart de nos réserves, nombre d’entre nous sommes forcés d’aller vivre en ville après le primaire. Comme je peux en témoigner personnellement, moi qui suis partie d’une réserve éloignée accessible uniquement par voie aérienne pour faire mes études secondaires, c’est un changement énorme et souvent dangereux pour les jeunes femmes et les filles. Sans bénéficier de soutien et sans comprendre les menaces et dangers qui pesaient sur moi, j’ai frôlé la catastrophe plus d’une fois lorsque j’ai quitté la maison à 15 ans pour aller faire mes études secondaires à Winnipeg. Notre réserve, comme la plupart des réserves, n’avait pas de ressources pour me venir en aide à moi ou à d’autres. Le fait est que la majorité des Premières Nations visées par la Politique de la prévention et gestion des manquements n’ont ni pouvoir ni influence réel pour déterminer les priorités des bandes. Comme le sénateur Murray Sinclair l’a dit hier soir, les progrès réalisés pour donner suite aux appels à l’action de la Commission de vérité et de réconciliation sont assez limités après 20 mois. Pour les Premières Nations assujetties à la Politique de prévention et gestion des manquements, ces changements sont, à toutes fins utiles, impossibles à voir. Les statistiques concernant le désespoir sont restées les mêmes. Si nous prenons la réconciliation au sérieux dans ce pays, je suggère qu’il serait judicieux de commencer par éliminer les conditions imposées à de nombreuses réserves.
    Les peuples des Premières Nations ont été autonomes pendant des milliers d'années avant la colonisation, la création de la Loi sur les Indiens et leur relocalisation dans des petites réserves. Les politiques de gestion des manquements d’AINC renforcent ce contrôle en faisant en sorte que nos Premières Nations ne puissent pas élaborer de modèles d’autonomie gouvernementale. Lorsque j’envisage l’avenir de ma province et d'une bonne partie du pays, il semble de plus en plus clair qu’il est primordial qu’un nombre accru d’Autochtones participent à l’économie pour assurer leur prospérité économique future. Il faudra faire des investissements considérables, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur des réserves, pour assurer la progression professionnelle des Autochtones. Les retombées économiques seront de l’ordre de milliards de dollars. Laisser les Premières Nations gérer leurs propres communautés est une première étape tangible de leur développement économique.
    Malgré les bonnes intentions, une bonne partie du financement des projets d’infrastructure affecté, dans l’exercice actuel, au développement dans les réserves n’a pas été dépensé. C’est notamment attribuable à l’incapacité continue des gouvernements autochtones de planifier et de travailler avec les secteurs public et privé, car ils n’ont pas le pouvoir de le faire. Les projets sont retardés, et dans le cas des communautés accessibles uniquement par voie aérienne, ces reports peuvent être d’un an ou même plus.
(0905)
    Comme Cindy Blackstock l’a dit avec beaucoup d’éloquence, les enfants n’ont qu’une seule vie. Nous ne pouvons pas retarder indéfiniment la prise de mesures tout en attendant des changements progressifs. Les incidents traumatiques qui se produisent dans les réserves doivent cesser. On ne peut pas continuer à promouvoir les mêmes politiques inefficaces et s’attendre à des nouveaux résultats — cela n’a aucun sens.
    Au lieu de cela, pratiquons une véritable réconciliation et reconnaissons que le contrôle qu’Ottawa exerce sur les administrations locales n’améliore pas les conditions dans les réserves. Il est temps que nous contribuions à l’excellence des administrations locales au lieu de continuer à laisser des personnes de l’extérieur superviser toutes les décisions et se concentrer sur les dépassements budgétaires antérieurs causés par du financement inadéquat.
    Demain, le gouvernement publiera son budget pour 2017 et 2018. Bien que je veuille qu'il s’engage à régler les nombreux enjeux économiques, j’aimerais aussi voir qu’il s’engage sérieusement à relaxer les contrôles imposés à un si grand nombre de nos Premières Nations.
    Merci de m’avoir écoutée aujourd’hui.
    Kinanaskomitin. Meegwetch. Mahsi Cho.
    Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant passer à la période des questions.
    Nous entamerons la première série de questions avec le député Michael McLeod.
    Merci de votre présentation, grand chef.
    Vous avez soulevé un certain nombre de questions à différentes occasions devant le Comité. Je pense que, dans les communautés autochtones et les réserves à la grandeur du pays, on se préoccupe réellement du niveau de financement qui est versé aux communautés pour leur permettre de devenir fonctionnelles et en santé.
    Comme vous l’avez signalé, il est probable que les compressions que le gouvernement précédent a faites soient la principale raison qui explique la situation de nos communautés aujourd’hui. Certaines communautés m’ont dit que leurs budgets avaient été réduits de 40 % et de 50 %. Elles sont à la limite de devenir dysfonctionnelles. On n’avait déjà pas suffisamment investi dans le financement de base, alors le fait de le réduire de 40 % ne laisse aucune marge. La plupart des communautés sont simplement capables de garder l’électricité et le chauffage, et c’est pas mal tout. Il n’y a vraiment pas de gestion.
    De plus, AINC ne consacre aucun financement à la formation dans les communautés, du moins pas à ma connaissance. Nous avons des conseils de bande et des gens qui viennent sur place pour faire de la gestion et qui n’ont pratiquement aucune expérience, car nous n’avons aucune capacité locale. Je vois des gens qui arrivent dans la communauté, parfois juste en balade, qui finissent par se faire embaucher comme gestionnaire, mais sans aucune expérience.
    Mon expérience m’a appris que les communautés qui s’en sortent le mieux ont des personnes de l’endroit, des personnes qui ont été formées sur place, qui ont des maisons dans la communauté et qui n’ont pas l’intention de partir.
    Je veux essayer d’avoir une idée de ce que seraient vos principales recommandations, et je veux que vous donniez peut-être un peu plus de détails sur la question du financement de base.
    Vous avez raison. Je pense que vous en savez beaucoup plus au sujet de la situation que bien des gens. Nous accusons un déficit lorsque nous parlons de financement de base dans nos Premières Nations, alors ce n’est pas surprenant que certaines d’entre elles et certains gestionnaires soient accusés de mauvaise gestion.
    À titre d’exemple, comment êtes-vous censés prédire le nombre de funérailles que vous êtes censés couvrir pour l’année? Le budget de début d’exercice prévoit peut-être 10 000 $ pour les funérailles, mais il se peut que vous ayez une série de suicides ou de la maladie. Le chef et le conseil sont contraints de transférer de l’argent pour couvrir bien des dépenses pour les nôtres, qui n’ont pas les moyens d'assumer les coûts d’un cercueil et des funérailles. C’est juste une question qui est souvent oubliée quand il s'agit de budgets. Les routes en sont une autre. Dans une de nos communautés, je pense qu’on reçoit 50 000 $ par année pour l’entretien des routes, alors qu’en réalité, il en coûte 1 million de dollars. Comment sont-ils censés comptabiliser cette dépense? Lorsqu’ils le font, on estime qu’ils gèrent mal le financement.
    Le présent gouvernement, la Loi sur les Indiens et toutes les politiques ont des conséquences négatives sur notre peuple au point où cela paralyse nos Premières Nations. Nous avons beaucoup de bonnes idées dans nos communautés. Nos gens savent comment gérer leurs propres communautés et leurs propres affaires, mais la façon dont les choses sont organisées à l’heure actuelle ne leur permet pas de le faire. Nous devons changer ces politiques.
    Je pense que la recommandation la plus importante et la plus évidente est que nous avons besoin d’honorer ces traités et de commencer à donner à nos communautés le montant dont elles ont besoin pour pouvoir fonctionner, conformément aux traités. Il ne s'agit pas d’aumône. Il est censé s’agir de financement et de ressources que nous sommes censés partager entre Canadiens, et non l’aumône à nos Premières Nations.
    C’est souvent la façon dont c’est décrit dans le public et les médias: que nous cherchons l'aumône. Ce n’est pas le cas. Nous avons autant le droit que quiconque de profiter des ressources de nos communautés et de nos régions ainsi que des revenus qui en découlent. Au Manitoba, 80 % de l’énergie qui se rend chez Manitoba Hydro vient du Nord, de ma région, et nous sommes ceux qui en bénéficient le moins. Nous avons toujours les factures d’énergie les plus élevées dans la province, et nos communautés sont aussi les plus défavorisées au Manitoba, alors que 80 % de l’énergie que le gouvernement provincial utilise et vend à d’autres endroits provient de notre région.
(0910)
    Je veux poser une question de plus sur le financement.
    Le dernier budget prévoyait 8,4 milliards de dollars de financement autochtone. Je sais que ce montant n’englobe pas le Nord. Il s’agit de 8,4 milliards de dollars pour les collectivités méridionales. Nous ne recevons pas un cent de ce financement. Les montants qui ont été annoncés ne se rendent pas jusqu’à nous. Je suis probablement le seul député qui vit dans une petite communauté autochtone, et j’ignore à quelle année remonte la dernière construction d’une maison. Tout le financement s’en va vers le sud.
    Avez-vous vu une différence avec cette nouvelle annonce budgétaire? Prévoit-elle du financement pour les communautés de votre région? Je vois que presque 60 % des Premières Nations que vous représentez sont dans des situations de gestion par un séquestre-administrateur.
    Nous avons le temps d’une réponse très brève d’une trentaine de secondes.
    En ce qui concerne l’infrastructure, non, et dans d’autres secteurs, comme celui de la santé mentale, peut-être… On a fait des investissements dans la santé mentale, même si ce ne sera jamais assez. Pour ce qui est de l’infrastructure, je ne le vois pas.
    J’ai entendu dire qu’on a promis du financement pour le logement, mais, encore une fois, nous ne savons pas. La saison des routes d’hiver est déjà courte. Hier encore, une Première Nation m’a téléphoné pour dire que leur route était fermée. Il leur reste 20 cargaisons à ramener dans la communauté le soir même, mais la route est fermée. Si les routes ne rouvrent pas pour cet approvisionnement d’urgence, leur étang ne sera pas construit.
    Nous dépendons aussi de la météo; nous subissons toutes les décisions prises à Ottawa sur les changements climatiques.
    Merci.
    Nous allons maintenant laisser la parole au député Arnold Viersen.
    Merci à nos invités d'être là.
    Mes questions porteront sur l'objet de notre étude, c'est-à-dire la gestion par un tiers. Combien y a-t-il de Premières Nations au Manitoba qui sont gérées par un tiers?
    Il y en a 46.
    Auriez-vous une histoire de type anecdotique qui pourrait expliquer pourquoi l'une d'elles fait l'objet d'une gestion par un tiers?
    Il y a probablement différentes raisons pour expliquer cela, mais...
    Pouvez-vous nous donner un exemple?
    J'ai bien précisé que, de toute manière, elles commencent dans une situation de déséquilibre. Lorsqu'elles tentent de gérer les maigres ressources qu'elles ont pour répondre à l'ensemble des besoins, elles peuvent donner l'impression qu'elles gèrent tout de travers. Sauf qu'en réalité, elles font de leur mieux avec le peu qu'elles ont pour répondre aux besoins énormes de la collectivité.
(0915)
    J'en conviens, mais auriez-vous un cas particulier qui pourrait illustrer comment elles se retrouvent sous la gestion d'un tiers?
    Non, je n'en ai pas, et je ne crois pas qu'il serait juste pour n'importe laquelle d'entre elles de tenter cet exercice.
    Il y a 14 Premières Nations dans ma circonscription, et trois d'entre elles sont gérées par un tiers. Il y a beaucoup d'histoires qui circulent. L'une d'elles a fait faillite, et à trois reprises si je ne m'abuse. Cela irait dans le sens de ce que vous dites, à savoir que les collectivités n'ont tout simplement pas assez d'argent pour fonctionner.
    Il n'y en a tout simplement pas et, en fin de compte, ce sont les jeunes et les gens malades qui en souffrent le plus.
    L'une des Premières Nations où je suis allé récemment dispose d'un compte en fiducie pour le développement des ressources qui se fait aux alentours. L'argent est placé dans un compte en fiducie. Or, il y a 200 millions de dollars dans ce compte, mais ils ne sont pas capables de s'en servir parce que les membres de la bande n'arrivent pas à s'accorder entre eux.
    Est-ce une situation de plus en plus fréquente, selon vous? Je ne sais pas exactement comment les choses marchent dans le nord du Manitoba. Y a-t-il une entente en matière d'électricité? Je suis allé dans le nord du Québec. Ils ont la Convention de la baie James. La production d'électricité est assortie d'un mécanisme de financement. Le nord du Manitoba a-t-il quelque chose de semblable?
    Non, il n'y en a pas dans le nord du Manitoba. Il y a des partenariats à Nelson House, mais pas de fonds en fiducie.
    L'un des problèmes avec ces fonds en fiducie, c'est que les membres n'arrivent pas à s'entendre entre eux. Je présume que c'est parce que tout recours à ce fonds doit faire l'objet d'un référendum. Pour peu que la majorité des membres de la bande soient d'accord, ils peuvent se servir de cet argent pour des choses particulières.
    Croyez-vous qu'il serait possible de remettre cet argent directement à chacun des membres de la Première Nation et de le taxer en amont?
    Je suis certaine que cela pourrait se faire. Je ne sais pas précisément comment fonctionnent ces ententes et ces fonds en fiducie. Je sais que ces mécanismes varient d'une communauté à l'autre, mais il ne fait aucun doute qu'une rationalisation des politiques en la matière serait pour le mieux, car la situation actuelle est comme si les ressources étaient retenues. Quelle est l'ampleur du sous-financement que le gouvernement précédent a avalisé alors que nous étions ceux qui en souffraient le plus?
    Les représentants du ministère qui étaient ici la semaine dernière nous ont expliqué qu'il y a un certain nombre d'éléments déclencheurs pour justifier la prise en charge de la gestion par un tiers.
    Dans bien des cas, si c'était ailleurs au Canada, au lieu de financer les services auprès d'une société ou d'un organisme qui pose problème, le gouvernement pourrait s'en remettre à un autre organisme. Toutefois, lorsqu'il s'agit d'une Première Nation éloignée, la société qui fournit les services est la seule de la région à pouvoir le faire. Le ministère n'a donc pas d'autre choix que d'intervenir et de prêter main-forte quant à la gestion financière du financement.
    Y aurait-il une façon de contourner l'organisation et de remettre l'argent directement entre les mains des gens, des habitants de cette Première Nation, puis d'imposer cet argent en amont? Ce serait un moyen pour la Première Nation de responsabiliser ses propres membres.
    Nous pourrions effectivement envisager toutes sortes de choses de la sorte, mais en même temps, il ne faut pas perdre de vue qu'il est question de personnes qui ne sont pas encore habituées à cela. On leur a enlevé le pouvoir de contrôler et de gérer leurs propres ressources. Elles peuvent gérer leurs propres familles et tout le reste, mais ce serait vraiment une énorme responsabilité qu'on leur donnerait en leur remettant l'argent directement. Il faudra d'abord améliorer les capacités. Dans les Premières Nations, on ne met pas assez l'accent sur l'édification des capacités en matière d'éducation, voire d'alphabétisation. Les nouveaux Canadiens, les nouveaux immigrants qui arrivent dans les villes ont parfois de l'argent d'avance, mais nous n'avons pas ce luxe quand nous allons dans les villes. Parfois, nous n'avons même pas de références pour louer un appartement.
    Les gens des Premières Nations commencent donc toujours avec une longueur de retard en matière de littéracie financière, et les occasions financières qui leur permettraient de subvenir à leurs besoins sont rares. Le fait de leur confier cet argent du jour au lendemain ne leur rendrait pas service, mais en même temps, je sais qu'il doit y avoir une façon de faire cela, parce que la façon de faire actuelle ne fonctionne pas. Elle paralyse tout le monde. Plus vite on changera ces politiques, le mieux ce sera pour tout le monde.
    Oui, assurément.
    Je pense que là où j'essaie d'en venir, c'est que la transparence financière est une chose à laquelle tous les Canadiens ont droit, et que nous aimerions que nos Premières Nations emboitent le pas. Nous devons trouver une façon de faire en sorte que les Premières Nations aient une forme de reddition de compte. Je sais que le chef de la Première Nation de Duncans, dans ma circonscription, vient d'être élu en vertu d'un programme axé sur la transparence.
    Pouvez-vous nous dire un mot sur la transparence et sur la façon dont elle est perçue au Manitoba?
(0920)
    Je sais que nos collectivités sont celles qui se rapportent le plus, mais elles ne reçoivent pas de ressources pour ce faire. Elles ne disposent pas des réseaux et des outils utilisés de nos jours pour produire des rapports, pour faire les choses comme tout le monde, c'est-à-dire aller en ligne et gérer les documents financiers à même les réseaux. C'est un problème.
    En revanche, je connais de nombreuses Premières Nations qui rendent des comptes à leurs collectivités. Elles ouvrent leurs livres aux leurs et elles organisent des réunions sur une base régulière. Ce n'est pas le cas partout, mais, encore une fois, cela a aussi à voir avec l'édification des capacités et avec les changements de leadership incessants. Certaines collectivités manquent beaucoup de constance.
    Merci.
    La parole est maintenant au député Romeo Saganash.
    [Le député s'exprime en cri.]
    [Traduction]
    J'ai beaucoup de questions à vous poser concernant votre exposé. Je veux commencer avec ce que vous avez dit sur la réconciliation, à savoir que si nous sommes sérieux à ce sujet, nous devons accorder une grande attention au rapport de la Commission de vérité et de réconciliation et à ses « Appels à l'action ».
    Si je ne m'abuse, dans les 94 appels à l'action, la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones est mentionnée au moins 16 fois, y compris aux termes des deux appels à l'action fondamentaux qui se trouvent sous le titre « Réconciliation », soit les numéros 43 et 44. On y demande au gouvernement du Canada, aux provinces, aux territoires et aux municipalités « d’adopter et de mettre en oeuvre » la déclaration des Nations unies en tant que « cadre de la réconciliation ». J'estime qu'il s'agit là d'une recommandation importante.
    Dans cette tâche qui nous est donnée de revoir cette politique, croyez-vous que nous devrions aussi utiliser cette déclaration en tant que cadre?
    Absolument. Je crois que c'est une vérité qui s'impose d'elle-même lorsque l'on regarde ladite déclaration et les appels à l'action. On y parle de respect mutuel, voire de collaboration, lorsqu'il s'agit de travailler avec nos Premières Nations afin de corriger les nombreuses politiques qui ont une incidence négative sur nos communautés. Je crois qu'il est plus que temps de commencer à les mettre en oeuvre. Nos gens souffrent sur une base quotidienne à cause de ces politiques, et les choses ne vont pas en s'améliorant. Je crois qu'il est urgent que nous nous penchions là-dessus. Nous devrions arrêter de parler de la réconciliation et commencer à la mettre en pratique...
    Lorsque l'on parle à des communautés de l'étranger, comme je l'ai fait la semaine dernière, l'impression que l'on a c'est qu'elles croient que nous sommes bien engagés dans le processus et que tout est... Les gens ont l'impression que les Premières Nations du Canada se débrouillent très bien. C'est peut-être l'image que l'on projette à certains égards, mais lorsque l'on vit dans ces collectivités, on a l'impression d'être paralysé par la pauvreté et par la situation épouvantable en matière de santé, et c'est à cause de ces politiques. Tout cela est exprimé clairement dans la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones et dans le rapport de la Commission de vérité et de réconciliation. C'est le gouvernement lui-même qui a financé cette commission pour qu'elle se penche sur ces politiques et pour qu'elle fasse des recommandations, mais la mise en oeuvre de ces recommandations est déficiente à bien des égards.
    Je ne sais pas comment une personne peut arriver à dormir en sachant qu'elle est responsable de la souffrance des collectivités des Premières Nations dans son propre pays. C'est l'un des pays les plus riches au monde, mais nous avons toujours cette pauvreté abjecte comme lot quotidien.
    Même si ce comité étudie la Politique de la prévention et gestion des manquements, il ne faut pas perdre de vue que les collectivités qui s'affranchissent de la gestion par un tiers continueront d'être assujetties à cette structure coloniale qu'on appelle « Loi sur les Indiens ». Un grand nombre des questions et des problèmes qui s'imposent à nos collectivités ont été négligés pendant si longtemps par les gouvernements fédéraux successifs qu'ils sont devenus des priorités. Au-delà de cette étude sur cette politique particulière, avez-vous des recommandations à formuler au sujet de ce que nous devrions faire pour la suite des choses?
(0925)
    Je sais que beaucoup de gens réclament l'abolition de la Loi sur les Indiens, et je crois que c'est la chose à faire. Je sais aussi que nous avons besoin d'un processus conçu par nos Premières Nations et par des personnes exceptionnellement douées et intelligentes comme vous, qui avez participé à l'élaboration de la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones. Je crois que nous avons de telles personnes de qualité dans nos collectivités, des experts qui seront en mesure de concevoir et d'appuyer une marche à suivre pour abolir la Loi sur les Indiens et nous en distancier. Il est clair que, dans son état actuel, cette loi n'aide personne au Canada.
    Je sais qu'il y a beaucoup de problèmes, et vous représentez une bonne partie des collectivités isolées du Nord. Quels sont les problèmes particuliers en ce qui a trait à la planification pour ces collectivités? Je suis du nord du Québec. Par exemple, la saison de la construction doit être planifiée avec soin. Or, il est très difficile de faire cela quand on ne sait pas combien d'argent on va recevoir, ce qui est souvent le cas.
    Avez-vous aussi ce type de problème dans le nord du Manitoba?
    Oui, bien sûr. Les routes d'hiver ne sont qu'un des aspects qui limitent les possibilités. Lorsqu'une Première Nation reçoit le feu vert pour construire un certain nombre de logements, il lui faut trouver les matériaux en vitesse, les acheter et prendre des arrangements pour leur transport. Tout cela demande du temps. Ce ne sont pas des choses qui se font en un clin d'oeil. Les collectivités ont souvent besoin d'un financement provisoire parce qu'elles n'ont pas nécessairement assez d'argent en réserve pour couvrir tous les frais en attendant l'arrivée du financement proprement dit. Ces conditions nuisent aux projets et les retardent. Parfois, il faut attendre deux ans — quand ce n'est pas plus — avant que tout tombe en place et que le projet démarre.
    Il arrive que les logements qu'on nous livre ne sont pas appropriés — surtout lorsqu'il s'agit de logements préfabriqués —, ce qui entraine un gaspillage d'efforts considérable. De plus, certaines entreprises qui font affaire avec nos Premières Nations ne sont pas particulièrement empressées à honorer leurs engagements, et c'est la Première Nation concernée qui en souffre. Certaines maisons dans nos collectivités restent inoccupées. Elles ont des intérieurs magnifiques, mais elles sont inutilisables parce que le fournisseur n'a pas été tout à fait honnête au sujet de la façon dont elles ont été construites.
    Croyez-vous que la prochaine politique — ou la version améliorée de la politique actuelle, qu'en sais-je — devrait tenir compte des conditions particulières du Nord?
    Absolument. Il y a tellement de problèmes particuliers à notre nord que le sud ne comprendra jamais, surtout en ce qui concerne les collectivités éloignées.
    C'est aussi une question de capacité. Parfois, la saison pour les projets domiciliaires est courte. Les gens ont leur qualification pour faire de la menuiserie, mais leur permis ne sera peut-être plus valide la prochaine fois que l'on aura besoin d'eux. Comme ils n'ont pas été en mesure d'exercer leur profession, il faut qu'ils reprennent la formation, ce qui peut se produire encore et encore. Certains ont eu à refaire la même formation de premier niveau 12 fois d'affilée simplement pour garder des emplois qu'ils n'exercent qu'une fois de temps en temps.
    Merci.
    La parole est maintenant au député Don Rusnak.
     Merci, grande chef, de votre présence parmi nous. À une autre époque, j'ai déjà travaillé sur votre territoire. J'étais employé par le gouvernement du Manitoba et je me suis rendu dans la région du conseil tribal Swampy Cree et à Norway House. C'est une région fantastique avec des gens formidables. Je suis fier du travail que j'ai fait avec ces collectivités.
    L'une de mes frustrations — et ce n'est pas la première fois que j'en parle —, c'est que nos gens sont devenus des mendiants sur leurs propres terres. Je me suis déjà attiré des problèmes en disant cela. Beaucoup de gens parlent des traités, et plus particulièrement d'un certain nombre de régions soumises à des traités. L'intention de ces traités était de partager le territoire. Il n'y a pas si longtemps, je parlais avec des communautés du nord de la nation Nishnawbe-Aski à propos des compétences et du fait que les communautés des Premières Nations dépendent d'un ministère qui a été créé à partir d'un texte de loi conçu pour détruire et contrôler nos communautés. C'est précisément ce que nous sommes en train d'étudier. Nous sommes encore là à examiner ce texte de loi et à tenter de l'améliorer.
    Je comprends que certaines communautés ne sont pas en mesure de se mettre à assumer la responsabilité d'une foule de choses, mais que pensez-vous de la possibilité que des Premières Nations du nord du Manitoba se mettent à assumer une partie de ces compétences? Je vois cela comme une étape vers l'abolition de la Loi sur les Indiens. En tant qu'Autochtone, je crois que ce n'est pas au gouvernement fédéral à faire ces changements, que ce n'est pas sa responsabilité. Je crois que ces changements doivent venir des communautés autochtones et que le gouvernement fédéral doit prêter l'oreille.
    Quel avenir entrevoyez-vous pour le nord du Manitoba et les communautés qui y sont?
(0930)
    Je pense que l’un de mes plus grands espoirs, c’est le fait qu’en tant qu’Autochtones, nous nous impliquons dans toutes les différentes facettes de la société, et l’une d’elles est l'aboriginal financing officers organization. Je crois qu’elle s’appelle l’AFOA. Je sais que certains membres des Moskégons de cette région font partie de l’AFOA. Ils sont très intelligents et compétents en gestion des finances.
    J’estime que nous avons simplement besoin de développer davantage nos capacités dans ce domaine ainsi que dans le domaine de la gestion afin de commencer à apaiser bon nombre des préoccupations que même nos collectivités ont par rapport à la façon dont nous gérons nos finances. Nous supposons que tous les chefs devraient savoir comment financer leur collectivité et tenir ses livres. Toutefois, les chefs ne sont que des chefs, et ils sont élus pour diriger leur collectivité. Ils ne sont pas nécessairement élus pour tenir les livres, mais je crois que nous nous donnons de faux espoirs à cet égard. Nous appliquons une politique raciste lorsque nous estimons que le chef assume toutes les responsabilités de la collectivité et que nous devrions superviser toutes les fonctions que le chef exerce.
    En réalité, nos collectivités ont besoin qu’on les aide à développer leurs capacités. Il est important de développer ces capacités à tous les niveaux, y compris dans le domaine des finances et de la gestion, comme c’est le cas pour toute municipalité.
    Nous sommes maintenant entrés dans une nouvelle ère. Je sais que bon nombre de gens souhaitent reprendre le mode de vie de leurs ancêtres et recommencer à tirer leur subsistance de la terre. Je salue les gens qui désirent vivre de cette façon, mais, en revanche, un grand nombre d’autres personnes souhaitent regarder vers l’avenir et développer leur collectivité d’une façon moderne et actuelle. Il existe des moyens de le faire tout en respectant l’héritage de nos Premières Nations. Je crois que bon nombre de gens pensent déjà de cette façon. Vous constaterez qu’un grand nombre de nos collectivités sont, en fait, très bien gérées. Nous n’entendons pas parler de ces collectivités assez fréquemment. Les Premières Nations qui gèrent leurs collectivités et leurs affaires efficacement sont celles qui sont en mesure de maintenir un leadership constant dans leurs collectivités. Nous n’observons pas cela assez fréquemment.
    Je crois que les collectivités qui souffrent le plus sont celles qui sont touchées directement par la Loi sur les Indiens, ses élections à court terme et ses conditions, auxquelles elles sont soumises. Une fois que les chefs ont jeté des bases solides et compris tout ce qu’ils doivent faire pour diriger une collectivité, il est temps pour eux de céder la place. Puis quelqu’un d’autre doit tout recommencer. Malheureusement, la Loi a été rédigée de cette façon — de façon à échouer —, et j’estime que nous devons changer cela. Je sais que certaines collectivités sont maintenant passées à des mandats de quatre ans, et cela va améliorer énormément les choses. Toutefois, nous devons appliquer cela à toutes les Premières Nations et commencer à examiner les politiques qui nuisent aux collectivités.
(0935)
    Il ne me reste qu’une minute. Je serai donc bref.
    J’ai eu une conversation avec les Premières Nations du nord de l’Ontario à propos des compétences. Voyez-vous quoi que ce soit sur le plan des compétences dont les Premières Nations pourraient tirer parti, peut-être auprès des provinces ou du gouvernement fédéral, et qui leur permettrait de commencer à discuter des soins de santé, par exemple, ou des ressources naturelles?
    La compétence partagée des ressources naturelles est l’un des sujets que nous avons abordés avec les collectivités de la nation Nishnawbe-Aski. Au lieu des ententes sur les répercussions et les avantages, que je considère comme l’équivalent moderne des perles et des babioles, une vraie conversation devrait avoir lieu à propos des compétences et du partage des terres et des revenus qu'elles rapportent.
    Tout à fait. Je pense que nous devons transformer entièrement la façon dont nous gérons le transfert des fonds. Je n’aime même pas parler de « transfert de fonds », parce que cet argent appartient de droit aux Premières Nations et à leurs membres.
    Nous devons transformer complètement la façon dont nous gérons les soins de santé, par exemple. Je travaille avec la nation Nishnawbe-Aski et la FSIN afin d’élaborer un plan en vertu de ce qui est connu sous le nom d'Indigenous Health Alliance. Le plan traite de cette question, de la transformation complète de la façon dont nous assurons la prestation des programmes de santé, du transfert de l'obligation d'être transparent et de rendre des comptes aux membres des collectivités, de manière à ce que nous dressions la liste des priorités dans les secteurs sur lesquels l’accent doit être mis, à notre avis. Ensuite, nous passerons de l’intérieur à l’extérieur, afin de gérer la source de la reddition de comptes.
    Dans l’état actuel des choses, les fournisseurs de soins de santé et même les chercheurs rendent des comptes au gouvernement. Ils cherchent à satisfaire le gouvernement. Ils ne relèvent pas de nos membres, c'est-à-dire les gens qu’ils étudient, et, par conséquent, ils n’ont aucune raison de s’assurer que les gens qui vivent dans les réserves se portent bien. Ils souhaitent simplement remplir les exigences du gouvernement, et le gouvernement n’a pas toujours les meilleures intentions…
    Merci.
    Nous cédons maintenant la parole à la députée Cathy McLeod.
     Merci, grande chef, de votre présence parmi nous aujourd’hui.
    Ma première observation est que je conviens avec vous que nous devons trouver une façon beaucoup plus appropriée de partager les ressources du territoire et de veiller à ce que ce soit fait d’une manière adéquate et équitable, et à ce que ce partage fournisse beaucoup plus de débouchés dans les collectivités. Je sais qu’en Colombie-Britannique, il y a beaucoup de mouvements qui vont dans cette direction. Je pense que c’est important. Cet enjeu n’est peut-être pas directement lié à notre discussion, mais, en fin de compte, il fera partie de notre destination.
    J’ai une préoccupation à formuler. Je sais que vous avez parlé de supprimer les ficelles. Toutefois, tout en supprimant ces ficelles, nous devons trouver des moyens de garantir la reddition de comptes. Je remarque que la vérification qui a été effectuée avant que vous assumiez la direction du MKO a révélé quelques problèmes très préoccupants ayant trait à des fonds qui étaient censés être investis dans des services de garde d’enfants, mais dont les collectivités n’ont jamais bénéficié. Vous avez mentionné n’avoir reçu aucun appui pour la formation professionnelle. La vérification en question a indiqué clairement que des fonds destinés à financer de la formation professionnelle n’ont pas profité à la collectivité.
    Il y a beaucoup de gens bien dans la société qui font de bonnes choses, qu’ils soient sénateurs, députés, propriétaires d’entreprises ou même parfois employés. Nous devons mettre en place des mécanismes de contrôle pour surveiller les fonds et les systèmes. Si vous souhaitez supprimer les ficelles, comment vous assurerez-vous que des mécanismes de contrôle appropriés sont en place? Cela me fend le coeur de savoir que des fonds destinés à financer des services de garde ont été utilisés à d’autres fins.
    Je répète encore une fois ce que j’ai dit à Don à propos de confier de nouveau la responsabilité aux gens. Je ne peux pas vraiment parler des intentions de l’ancien grand chef de notre région ni de ce qui s’est passé. Je ne le sais simplement pas, et je ne comprends pas entièrement son raisonnement.
    De plus, je crois que les compressions importantes qui sont survenues en 2012 et 2013 ont grandement contribué aussi à la réaffectation des fonds. Les collectivités et les organisations ont été forcées d’examiner leurs priorités et leurs projets en cours, et de prendre des décisions en fonction de ceux-ci.
    Comme je l’ai dit, cela se produit constamment à l’échelle des bandes lorsqu’il y a très peu de ressources disponibles en premier lieu. Les bandes sont forcées de réattribuer le peu d’argent dont elles disposent pour couvrir d’autres dépenses imprévues engagées dans les collectivités.
(0940)
    Je comprends cela.
    Pendant ma lecture du rapport de vérification, j’ai remarqué quelques préoccupations qui étaient peut-être un peu plus graves, comme le fait de devoir choisir entre de la nourriture ou des abris.
    Ma plus grande inquiétude, et je crois l’avoir mentionnée régulièrement… Je reconnais qu’il faut faire preuve de transparence à l’égard des collectivités. Si des fonds ont été affectés pour financer des services de garde d’enfants ou des programmes de repas gratuits et qu’un rapport détaillé est fourni, les membres des collectivités seront en mesure de demander des comptes à leurs chefs ou leurs conseils.
    Je reçois un nombre croissant d’appels de la part de membres des collectivités qui sont très inquiets. Manifestement, la Loi sur la transparence financière des Premières Nations n’a pas plu aux chefs. Cela fait maintenant 18 mois qu’elle est en vigueur, et la façon dont l’information est communiquée aux membres des collectivités est très désordonnée. Et les gens sont de plus en plus inquiets.
    Exercez-vous des pressions en disant : « Nous devons mettre un système en place qui nous permettra de rendre des comptes aux membres des collectivités »? À mon avis, c’est une mesure très importante.
    Veuillez répondre brièvement.
    Je pense qu’en fin de compte, nous devons comprendre que la responsabilité et l’obligation de rendre des comptes doivent être transférées aux Premières Nations. Je sais que bon nombre de gens en ont conscience et qu’ils souhaitent également que cela se produise. Cela ne nous a pas échappé. En même temps, il s’agit là d’un processus. Même les organismes gouvernementaux ne suivent pas toujours leurs propres politiques. Ils négligent des choses, les laissent aller sans mécanisme de contrôle, puis ils blâment les Premières Nations d’avoir mal géré les choses. J’ai été témoin de telles situations ou j’en ai entendu parler la plupart du temps. Ce sont toujours les Premières Nations qui semblent fautives, alors que les représentants gouvernementaux ou les bureaucrates ont omis eux-mêmes d'assurer un suivi pour faire preuve de la diligence voulue et pour mener à bien le travail qui leur incombait.
    Merci.
    Nous cédons maintenant la parole au député Rémi Massé.

[Français]

    Madame North Wilson, je vous remercie d'être parmi nous et de participer aux travaux de notre comité. Je sais que la préparation a dû vous prendre un certain temps.
    Vous avez mentionné tout à l'heure les répercussions entraînées par la mise en oeuvre, en 2011, de la Politique de la prévention et gestion des manquements.
    Depuis l'arrivée de notre gouvernement, avez-vous constaté des changements dans la culture du gouvernement en matière de gestion des accords de financement conclus avec l'ensemble des gouvernements, par exemple pour ce qui touche le Nord du Manitoba? Notre gouvernement fait-il preuve d'une plus grande ouverture d'esprit en matière de dialogue? Notre gouvernement est-il parvenu à établir les mécanismes nécessaires pour améliorer les accords, de sorte que les transferts de fonds soient plus efficaces et mieux ciblés?

[Traduction]

    Parlez-vous du gouvernement libéral?
    Eh bien, je parle de notre gouvernement.
    Je dirais que [Le témoin s’exprime en cri]. Traduisez cela.
    Je vois un léger changement. La volonté d’agir semble exister, mais, en même temps, nous n’observons pas de nombreuses preuves de la volonté exprimée. Je peux dire que le gouvernement montre un certain degré de respect à l’égard des Premières Nations, que le gouvernement précédent, en particulier, n’affichait pas. Je pense que tout semble préférable au gouvernement précédent. Je peux déclarer sans équivoque qu’il existe maintenant un certain degré de respect et, à tout le moins, une volonté de collaborer. Toutefois, je crois qu’il faut que le gouvernement en fasse davantage. Nous devons le voir poser des gestes, prendre de vrais engagements et mieux gérer les dépenses qui n’ont pas été engagées. Il faut que nous commencions à cerner les raisons pour lesquelles les fonds ont été retenus en premier lieu, alors que nos collectivités souffrent encore d’une extrême pauvreté et d’un manque de ressources.
    J’estime que la volonté d’agir existe, mais que nous devons l’amener à se manifester davantage. Nous devons observer de véritables engagements. Je ne nourris pas beaucoup d’espoirs par rapport au budget. Je ne sais pas si quiconque en nourrit vraiment. Je fais toujours preuve d’un optimisme prudent. Je dois toujours regarder en avant. Toutefois, nous sommes tellement habitués à un manque… et à de fausses promesses qu’il est difficile d’être complètement conquis par bon nombre des décisions prises à ce niveau et de s’en réjouir.
(0945)

[Français]

    Dans les réponses que vous avez fournies, ainsi que dans votre allocution de départ, vous avez mentionné de nombreux projets d'infrastructure, qui visent notamment à assurer l'approvisionnement en eau potable ou à fournir des logements.
    Les dirigeants de votre organisation défendent les intérêts de 30 communautés. Ces dernières devront-elles affronter de nombreux autres défis?
    Je conviens que vos besoins sont criants et qu'ils nécessitent du financement. Selon vous, quels seraient les mécanismes qui vous permettraient d'avoir accès à du financement pour mener à bien des projets d'infrastructure importants comme ceux que je viens de mentionner?

[Traduction]

     Je crois que nous avons besoin de diplômés en génie et en économie pour comprendre les mécanismes en tant que tels, mais dans certaines de mes collectivités, il manque 500 maisons, et dans d'autres, 1 500 maisons, et ce, seulement pour raccourcir les listes d'attente. Cela reflète bien les besoins importants de nos réserves.
    À certains endroits, trois générations vivent dans une maison de trois chambres à coucher, et la maison est dans un état déplorable au départ, elle n'est pas bien isolée et n'a pas de bonnes fenêtres. Les gens finissent par tomber malades, ce qui entraîne une hausse des coûts des soins de santé dans nos collectivités. Cela met même les gens en danger.
    Noël dernier, trois membres de ma collectivité ont péri dans l'incendie de leur maison. La maison était tellement vieille; elle l'était déjà durant mon adolescence. La famille qui y vivait avait déménagé dans une autre maison, mais elle n'était pas assez grande et elle devait vivre dans l'ancienne maison aussi. Elle n'a pas pu l'abandonner complètement parce qu'elle avait besoin de l'espace. Ces personnes sont décédées parce qu'il n'y avait pas un bon système de ventilation et que le poêle à bois a fait défaut.
    Nous avons absolument besoin d'un mécanisme et d'un meilleur plan pour construire un plus grand nombre de logements dans nos collectivités, et même des écoles et des hôpitaux. Certaines collectivités parlent aussi de repousser les frontières de leur territoire. Par exemple, les gens de War Lake demandent au gouvernement qu'on agrandisse le territoire pour qu'ils puissent y construire d'autres logements, de sorte que plus de personnes puissent revenir dans leur collectivité. Puisque la superficie du territoire n'est pas assez grande pour qu'on y construise d'autres maisons, des gens sont forcés de vivre dans d'autres centres urbains; ils souffrent là-bas plutôt que de vivre dans leur propre collectivité.
    Il y a bien des facteurs.
    Merci beaucoup.
    C'est maintenant au tour de David Yurdiga.
    Je remercie nos témoins de leur présence.
    Je crois comprendre que MKO souhaite, en fin de compte, que le ministère des Affaires autochtones et du Nord soit démantelé, que la Loi sur les Indiens soit abrogée et que des programmes gouvernementaux liés au financement soient transférés directement à des Premières Nations du Manitoba. Croyez-vous que cela permettrait de réduire le nombre de collectivités de Premières Nations qui sont assujetties à la gestion par un séquestre-administrateur?
(0950)
    Je pense que c'est une question étrange, parce que la décision d'assujettir des gens à une mesure de gestion par un séquestre-administrateur se fonde sur des politiques gouvernementales, et vous parlez d'autre chose concernant le volet capacité qui semble manquer.
    Je vais m'exprimer autrement. Si nous fournissions plus de fonds aux Premières Nations pour permettre une plus grande propriété, le nombre de collectivités des Premières Nations gérées par un séquestre-administrateur diminuerait probablement.
    Oui, je crois que plus nous renforçons les capacités et la responsabilisation des Premières Nations, mieux c'est. Comme je l'ai déjà dit, avant la colonisation, nous avions fonctionné selon nos propres règles pendant des milliers d'années et nous avons réussi à survivre. Je crois que nous avons oublié cela depuis les débuts de ce que nous appelons le « Canada », ce qui représente une courte période. Nous devons revenir à certaines des lois selon lesquelles vivaient déjà nos ancêtres et que nous ne pouvons plus appliquer en raison de la Loi sur les Indiens et des autres politiques qui régissent nos Premières Nations.
    D'après mon expérience, certaines collectivités s'en tirent mieux que d'autres, mais il semble que plus la collectivité est isolée, plus les difficultés sont grandes. Y a-t-il des différences sur le plan du financement? Est-ce que plus d'argent est fourni à des collectivités qui vivent loin dans le Nord et qui sont isolées? Une collectivité sera dans une très bonne situation, tandis que pour une autre collectivité qui est isolée, les choses n'iront pas aussi bien, ou iront mal. On examine ce qu'il en coûte de fournir des produits dans les collectivités. Tous les coûts augmentent. AANC a-t-il un mécanisme qui permet de compenser cet écart?
     Dans l'ensemble, non. Or, je sais qu'il y a parfois ce qu'on appelle une indemnité de postes dans le Nord qui est offerte aux fonctionnaires fédéraux et à d'autres travailleurs qui obtiennent des fonds supplémentaires pour acheter les aliments chers qui sont vendus dans nos collectivités isolées. Ainsi, lorsque des enseignants ou d'autres professionnels sont envoyés là-bas pour travailler, ils obtiennent de l'argent supplémentaire.
    L'autre mesure que je connais, c'est le programme de contribution Nutrition Nord pour des aliments, en principe, mais la plupart des contributions finissent par être versées à la Compagnie du Nord-Ouest, qui est payée pour livrer les aliments là-bas. Cela ne se rend pas toujours aux Premières Nations et aux gens eux-mêmes, car la contribution sert à couvrir les dépenses de la Compagnie qui sont liées à la livraison des aliments, et il coûte cher de livrer des aliments là-bas. Je n'en doute pas un instant, mais il existe également d'autres façons d'utiliser l'argent de Nutrition Nord, comme contribuer à l'établissement de jardins et de serres de sorte que les membres des collectivités puissent produire leurs propres aliments. Nous pourrions contribuer de cette façon, mais nous pourrions également rendre admissibles à des contributions des aliments traditionnels, car ce sont ces aliments que les gens utilisaient auparavant et qui faisaient en sorte qu'ils étaient en santé.
    Malheureusement, à Shamattawa, par exemple, lorsque le magasin Northern Store a brûlé il y a quelques mois, la collectivité a été paralysée. La capacité des gens de subvenir à leurs besoins a été éliminée lentement mais sûrement, et nous avons dû nous tourner vers les épiceries basées dans l'Ouest. Retirer cela nuit à la collectivité. Je pense qu'à long terme, si cela avait duré, je crois que les membres de la collectivité auraient trouvé une solution et que les choses se seraient bien passées.
    En même temps, je sais que ce n'est pas toujours possible pour toutes les collectivités, car en dépit de notre conviction que vivre de la terre est une solution facile, cela requiert de l'argent. De plus, il manque les compétences voulues qui existaient auparavant parce que nos jeunes n'adhèrent pas autant à ce mode de vie que nos générations précédentes. Bien des choses ont changé et font mal à nos collectivités de toutes sortes de façons.
    C'est maintenant au tour du député Anandasangaree.
    Je vous remercie beaucoup de votre présence.
    J'aimerais revenir sur un point qui a été soulevé plus tôt concernant le développement des ressources et le partage de certains des projets qui sont menés dans le Nord du Manitoba. Pouvez-vous nous donner une idée des possibilités, et si elles existent, du type de consultations ou de discussions qu'il faut mener pour qu'il y ait un vrai partenariat entre le gouvernement et votre collectivité et d'autres collectivités du Nord du Manitoba?
(0955)
    Il semble qu'il est impossible de le dire maintenant, mais je crois que le gouvernement provincial devrait confier la gestion de Manitoba Hydro à nos Premières Nations du Nord pour qu'elles mettent en oeuvre les politiques qui sont fondées sur les besoins des Premières Nations, mais cela ne se produira pas. Je crois que nous essayons toujours de lancer ces discussions concernant le partage des ressources, et même si cela semble impossible présentement, nous ne cesserons jamais d'essayer.
    Dans ma collectivité, il y aurait prétendument des diamants, ce qui doit encore être prouvé. On est encore loin, et bon nombre de membres de notre collectivité sont très emballés par cette possibilité. Or, bien des gens sont aussi très sceptiques et disent que cela ruinera notre collectivité et notre terre. Le secteur dans lequel on prétend qu'il y a des diamants est un beau lac, et je peux comprendre pourquoi certaines personnes s'opposent au développement des ressources uniquement pour cette raison, car c'est un lieu de pêche incroyable. Par ailleurs, je crois qu'il existe des façons de mener une vraie consultation auprès de nos Premières Nations, de sorte que nos aînés et nos gens puissent contribuer à trouver une façon d'extraire les ressources qui serait avantageuse pour les gens de la région d'abord et tous les autres gens ensuite.
    Merci.
    Vous avez beaucoup parlé du renforcement des capacités. En ce qui concerne la gestion par un séquestre-administrateur, à quels égards le ministère ou même les tierces parties peuvent-ils favoriser le renforcement des capacités locales?
    Tout d'abord, il nous faut savoir quels emplois existent dans nos collectivités. L'idée selon laquelle il n'y en a pas est un mythe; il y en a. Or, ce sont des emplois exigeant l'obtention d'un diplôme d'études postsecondaires; et quand nous quittons nos collectivités pour faire des études postsecondaires, dès le départ, nous accusons habituellement deux ans de retard. Je le sais, car lorsque je suis passée de la 9e à la 10e année, et d'Oxford House à Winnipeg, j'avais deux années de retard. À Oxford House je faisais partie des élèves les plus brillants de l'école, tandis qu'à mon arrivée à Winnipeg, je faisais partie des élèves les plus stupides. J'ignore comment réussissent certaines personnes, en fait. C'est purement grâce à leur persévérance que des gens de nos collectivités terminent leurs études postsecondaires, collégiales et universitaires, car c'est difficile au départ, sans parler du choc culturel et de toutes les choses auxquelles il faut s'habituer quand on déménage en ville.
    Nous devons commencer à examiner les systèmes d'éducation de nos collectivités pour renforcer les capacités dont nous avons besoin afin que les collectivités fonctionnent bien. Je crois que nous avons beaucoup d'exemples à cet égard. Je sais que certaines collectivités recrutent en fonction de leurs besoins, mais cela ne doit pas s'arrêter là. Dans l'une de nos collectivités, un centre de santé sera établi au cours des prochaines années. Pourquoi ne pouvons-nous pas déterminer nos besoins en matière d'emploi et commencer à recruter des gens pour ces emplois et à créer des programmes de formation?
    Lorsque je discutais de la question des femmes disparues ou assassinées, un journaliste m'a demandé si nous avions besoin de plus de services de consultation et de maisons sécuritaires et d'autres choses du genre, ce à quoi j'ai répondu « bien sûr, mais nous avons également besoin d'emplois pour prendre soin de nous-mêmes et de nos familles ».
    Ce qui se passe, c'est que nous devenons dépendants d'autres endroits et d'autres personnes qui ne servent pas au mieux les intérêts de nos peuples. Ce n'est qu'un microcosme de ce qui se passe dans nos collectivités. Si nous dépendons d'autres gouvernements, politiques et endroits qui n'ont pas à coeur nos intérêts, nous souffrons. Tant que nous ne changerons pas cette situation, nous allons continuer de souffrir.
    Merci.
    C'est le député Romeo Saganash qui posera les dernières questions.
     Je veux dire tout d'abord que je conviens que le nouveau gouvernement a amené un changement de ton, mais parfois, surtout en ce qui concerne le Tribunal canadien des droits de la personne, cette attitude est incompatible avec la réconciliation, à mon sens. Plutôt que remettre en question l'autorité ou le tribunal, il devrait nous dire s'il mettra fin à la discrimination dont sont victimes les enfants des Premières Nations. C'est le type de problèmes auxquels nous faisons toujours face.
    Récemment, le nouveau gouvernement a formé un comité ministériel qui est censé revoir le cadre législatif et les politiques. Si vous aviez la possibilité de déterminer le programme du comité, de quoi serait-il composé?
(1000)
     J'inclurais certainement des penseurs autochtones dans ce comité, et je commencerais à respecter cette perspective, car c'est ce qui a toujours fait défaut dans les politiques et l'établissement de ce type de comités. Je crois que vous avez raison. Le présent gouvernement fait beaucoup de belles promesses, et il en est de même d'AANC à bien des égards, mais nous attendons toujours que les vraies améliorations dont nos collectivités ont besoin soient apportées. Je crois qu'il faut que nous commencions à en parler, à parler des besoins réels, et à créer des environnements qui rendent cela possible. Même dans notre province, le bureau d'AANC est tellement inaccessible présentement qu'il est difficile pour nos gens de s'y rendre et d'avoir ces liens qui, en principe, sont en train de s'améliorer.
    Je peux dire que les choses se sont améliorées sur certains plans, mais en même temps, il y a encore beaucoup à faire; et nous devons aller dans cette voie, car, telles que sont les choses présentement, nous souffrons et la situation ne s'améliore pas. À mon avis, plus nous en parlerons ouvertement et plus nous examinerons les défis ensemble, et si nous renvoyons la balle à nos Premières Nations... Je crois que nous devons le faire. Nous n'avons plus le choix, car nous entrons dans une nouvelle ère d'espoir et de possibilités, mais en même temps, cela ne se concrétisera pas si nous ne travaillons pas ensemble.
    Un de mes amis et collègues de l'Alberta dit qu'il y a 150 ans, nous devions disparaître. C'est ce qui s'est passé, et c'est ce qui nous a amenés à la situation actuelle. Or, 150 ans plus tard, nous existons toujours, et nous sommes dans tous les segments de la société. Nous sommes partout. Nous n'en sommes pas encore là où nous le voulons, dans un niveau d'entrée qui renforce les capacités pour nos jeunes, mais nous sommes encore partout. Vous êtes toujours ici et il en est de même pour bon nombre de Premières Nations, à chaque niveau. Dans 150 ans, qui sait où nous en serons si nous continuons d'avancer de cette façon? C'est ce que j'espère de tout coeur.
     Pour faire face à certaines difficultés — et elles sont nombreuses — même dans le cadre de l'étude précédente sur la prévention du suicide dans les collectivités que nous avons menée, la question du logement revenait sans cesse. Qu'espérez-vous du prochain budget qui sera dévoilé demain?
    Allez-y très rapidement.
    Je suis d'un optimisme prudent, mais je n'ai pas beaucoup d'espoir. Il ne permettra jamais de surmonter les difficultés actuelles qui mettent la vie des gens en danger dans ce pays.
    Je vous remercie beaucoup de votre participation. Vous vous êtes cassé le bras récemment, ce qui a compliqué votre participation. Nous vous remercions d'être venue d'aussi loin.
    Nous allons prendre une pause et à notre retour, nous poursuivrons la séance à huis clos.
    [La séance se poursuit à huis clos.]
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