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INDU Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de l'industrie, des sciences et de la technologie


NUMÉRO 121 
l
1re SESSION 
l
42e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 7 juin 2018

[Enregistrement électronique]

  (1530)  

[Traduction]

    Bonjour à tous. Bienvenue à la 121e séance du Comité permanent de l'industrie, des sciences et de la technologie, alors que nous poursuivons notre étude sur l'examen prévu par la loi de la Loi sur le droit d'auteur.
    Aujourd'hui, nous accueillons John Lewis, vice-président international et directeur des affaires canadiennes de l'Alliance internationale des employés de scène. Nous recevons les représentantes d'Artisti: Annie Morin, directrice générale, et Sophie Prégent, vice-présidente. Nous avons enfin les représentants de la Guilde canadienne des réalisateurs: Tim Southam, président du Bureau national, et Dave Forget, directeur des politiques du Bureau national.
    Nous pensions que le temps serait limité à cause des votes à la Chambre, mais ce n'est pas le cas. Vous aurez donc sept minutes chacun pour votre exposé, après quoi nous passerons aux questions. Commençons par M. Lewis.
    Vous avez sept minutes.
    L'Alliance internationale des employés de scène, ou IATSE, est un des syndicats les plus anciens et les plus importants qui représente les travailleurs de l'industrie du divertissement au Canada. Nous avons vu le jour en 1893, et nous représentons actuellement 22 000 travailleurs au Canada et 140 000 en Amérique du Nord. Nous sommes les techniciens et les artistes qui travaillent sur des productions étrangères à gros budget comme Star Trek: Discovery à Toronto, et Deadpool à Vancouver, mais aussi sur des productions canadiennes comme Cardinal à Sudbury et Maudie, dont le tournage a eu lieu à Terre-Neuve.
    Je suis persuadé que de nombreux témoins qui comparaîtront devant vous parleront de l'importance des industries culturelles dans l'établissement et l'épanouissement de notre identité nationale, et de la façon dont un régime législatif moderne sur le droit d'auteur favorise la créativité et l'innovation.
    Je suis cependant ici pour parler d'emplois. Une législation sur le droit d'auteur efficace est un outil d'une importance capitale pour protéger les intérêts économiques des consommateurs, des créateurs, des producteurs, des radiodiffuseurs et des travailleurs canadiens. La production cinématographique et télévisuelle canadienne est maintenant une industrie de 8 milliards de dollars qui crée 171 000 emplois équivalents temps plein. Le vol numérique a une incidence directe sur notre industrie.
    Nos membres n'ont pas de sécurité d'emploi. Nous sommes les travailleurs derrière la caméra — les machinistes, les coiffeurs, les décorateurs de plateau et les cadreurs — qui dépendent de la santé de l'industrie pour leur travail. Les membres de l'IATSE ne reçoivent aucun paiement résiduel une fois la production achevée. Leurs revenus dépendent uniquement de ce qui tourne chaque jour, car une fois le tournage terminé, leur chèque de paye cesse de rentrer.
    Pourquoi une forte protection du droit d'auteur est-elle importante pour l'Alliance? Parce que lorsque les producteurs, qui sont nos employeurs, subissent des pertes financières en raison du piratage, ils ont moins d'argent pour les projets futurs, et donc moins de possibilités d'emploi pour nos membres. Le piratage n'est pas un crime sans victime.
    Les services de diffusion en continu ont remplacé les plateformes de poste à poste comme BitTorrent et représentent désormais jusqu'à 85 % du piratage. En 2016, les Canadiens ont visité 1,88 milliard de fois des sites de piratage. En 2016 seulement, on estime que 375 millions de films et d'émissions de télévision piratés ont été téléchargés au Canada au moyen de BitTorrent.
    La plus récente méthode pour afficher du contenu illégal est le lecteur multimédia entièrement installé. Le plus populaire est le boîtier décodeur Kodi. Dans ces lecteurs, des applications sont préinstallées pour permettre aux utilisateurs d'accéder au contenu sous licence, mais il existe des ajouts pour lire du contenu non autorisé. Près d'un foyer canadien sur dix possède désormais un boîtier Kodi. De ce nombre, 70,9 % utilisent un module de piratage.
    Voici un exemple précis de l'incidence du piratage. Letterkenny arrive au deuxième rang des émissions de télévision piratées au Canada. L'émission fait partie des milliers qui sont disponibles légalement grâce à un abonnement à CraveTV à un faible coût de 7,99 $ par mois. Elle a été téléchargée illégalement plus d'un million de fois. On estime que ces téléchargements représentent jusqu'à 350 000 abonnements en moins à CraveTV, dont la valeur mensuelle peut atteindre 2,8 millions de dollars.
    En 2012, la Loi sur la modernisation du droit d'auteur a été adoptée et prévoit un examen obligatoire de la loi tous les cinq ans. Sa mise en oeuvre a eu des résultats positifs. Par exemple, la Cour d'appel fédérale a confirmé en mars 2017 une injonction interlocutoire en première instance contre les revendeurs de décodeurs tels que le boîtier Kodi. Un autre exemple est l'injonction de 2015 que la Motion Picture Association of America a obtenue contre les programmeurs canadiens de Popcorn Time, un site Web qui permet la diffusion de contenu en ligne gratuit.
    Il y a encore de nombreux domaines où la législation actuelle est insuffisante. Le paysage numérique en évolution rapide a mis en évidence de graves lacunes de la loi. Le 2 janvier 2015 est entré en vigueur le régime de transmission d'avis volontaire, qui devait être un outil éducatif pour les utilisateurs finaux. La sensibilisation est une bonne chose, mais rien n'indique que le régime d'avis a contribué à changer quoi que ce soit au comportement du consommateur. Celui-ci ne s'expose à aucune conséquence, et les fournisseurs de services Internet ne sont pas incités à se débarrasser du matériel illégal. Aussi, les fournisseurs n'ont pas de raison suffisante de respecter le régime de transmission d'avis volontaire, car s'ils ne transmettent pas les avis aux détenteurs de droits, cela n'a aucune incidence sur responsabilité en cas de violation du droit d'auteur.

  (1535)  

    Les gouvernements du monde entier se rendent compte qu'il faut réglementer les plateformes en ligne. On a récemment porté une grande attention à la protection de la vie privée sur celles-ci aux États-Unis et au Canada, mais des discussions et des mesures législatives ont également été prises pour réglementer le comportement responsable sur Internet et imposer des obligations aux plateformes en ligne. Internet n'est plus le Far West. Les gouvernements se rendent compte qu'une réglementation et une surveillance accrue sont nécessaires.
    Aucune solution unique ne permettra de résoudre ce problème aux multiples facettes, mais l'Alliance vous en propose une. Nous sommes une des 25 organisations qui composent la coalition FairPlay Canada, qui comprend des syndicats, des radiodiffuseurs, des sociétés de production et d'autres intervenants.
    FairPlay Canada a déposé une demande au CRTC visant à protéger les créateurs de contenu. Nous proposons un système similaire à celui qui est employé dans des pays comme le Royaume-Uni, l'Australie et la France, et qui permettrait au CRTC d'identifier les sites de piratage illégal et de les empêcher d'atteindre les Canadiens. Selon notre proposition, le CRTC créerait une organisation indépendante à but non lucratif, un organisme indépendant de surveillance du piratage qui soumettrait au CRTC des recommandations de sites devant être bloqués.
    Toute partie intéressée pourrait soumettre une demande au sujet d'un site, qui serait transmise au site Web et aux fournisseurs de services Internet. L'organisme formulerait ensuite une recommandation au CRTC, lui disant s'il faut ajouter le site à la liste des sites de piratage flagrants. Il ne recommanderait l'ajout d'un site Web à la liste que si les éléments de preuve présentés établissent que le piratage est flagrant, massif ou structurel. La décision finale incomberait au CRTC, et serait également assujettie à la surveillance de la Cour d'appel fédérale. Une fois qu'un site figure sur la liste, les fournisseurs de services Internet seraient tenus d'empêcher tout utilisateur canadien d'y accéder, peu importe où il se trouve dans le monde.
    Je tiens à préciser que cette proposition ne porte aucunement atteinte à la neutralité du réseau. L'Alliance et FairPlay sont en faveur d'un accès ouvert à tous les contenus légaux sur Internet. Cependant, la neutralité du réseau protège uniquement le contenu légal et n'est pas affectée par cette proposition. Encore une fois, nous parlons exclusivement de sites de piratage flagrants, pas de sites soupçonnés de piratage. Nous parlons de sites comme The Pirate Bay, qui existe principalement pour partager du matériel protégé par des droits d'auteur, et non YouTube, par exemple, où la majorité du contenu est original et diffusé par le créateur.
    Il est temps que le Canada envisage des solutions novatrices au piratage. Les industries créatives ont besoin de soutien pour protéger le gagne-pain de dizaines de milliers de Canadiens talentueux.
    Je vous remercie.

  (1540)  

    Merci beaucoup. Je tiens à dire que vous m'avez conquis avec Star Trek.
    Nous allons maintenant écouter Artisti.

[Français]

    Vous disposez de sept minutes.
    Mesdames et messieurs, je vais d'abord vous dire quelques mots sur Artisti.
    Artisti est une société de gestion collective qui a été créée par l'Union des artistes en 1997 pour gérer les droits d'auteur des artistes-interprètes. Depuis sa création, Artisti a distribué plus de 43 millions de dollars à 4 500 adhérents.
    Nous avons formulé les six recommandations suivantes pour rendre la Loi sur le droit d'auteur plus équitable et plus adaptée à la réalité.
    Premièrement, nous recommandons que le régime de la copie privée s'applique également aux appareils audionumériques qui permettent de copier la musique, et pas seulement aux CD vierges, comme c'est le cas actuellement.
    Les créateurs devraient recevoir des redevances pour l'utilisation de leur travail, quel que soit le support utilisé.
    Deuxièmement, nous recommandons de limiter les exceptions gratuites et de réinstaurer le paragraphe 30.9(6) de la Loi sur le droit d'auteur, qui a été abrogé en 2012. Le retrait de ce paragraphe a contribué à réduire de façon importante les redevances versées par les radios aux artistes-interprètes.
    Les exceptions en vigueur ne respectent pas les exigences du triple test imposé par les traités internationaux. Artisti demande que le législateur corrige cette situation.
    Notre troisième recommandation est de traiter les prestations incorporées à des vidéoclips comme des prestations musicales, et non comme des prestations cinématographiques.
    Actuellement, dès qu'un artiste-interprète autorise l'incorporation de sa prestation dans une oeuvre cinématographique, y compris un vidéoclip, par exemple, il renonce à exercer son droit d'auteur.
    Par exemple, un artiste-interprète dont la prestation est captée sur vidéo et fait également l'objet d'un enregistrement sonore peut uniquement exercer son droit d'auteur ou recevoir une rémunération équitable lorsque sa prestation sonore est dissociée de la vidéo. Or, un vidéoclip, c'est une chanson avec des images. Je ne connais personne qui regarde sur YouTube le vidéoclip d'une chanson alors que le son est désactivé. C'est la chanson que la personne « regarde ».
    Dans un tel cas, priver l'artiste de ses droits est inconcevable. La communauté internationale l'a d'ailleurs reconnu en 2012, quand elle a adopté le Traité de Beijing sur les interprétations et exécutions audiovisuelles.
    Il est donc impératif que le Canada ratifie ce traité et étende les droits exclusifs et moraux prévus pour les artistes-interprètes du secteur sonore à l'ensemble des artistes-interprètes.
    Cependant — et c'est là notre quatrième demande —, il faut aussi changer la définition d'« enregistrement sonore » pour que soient également visées par la rémunération équitable les chansons qui sont utilisées dans les films ou dans les séries télévisées.
    La définition d'« enregistrement sonore » pose problème puisqu'elle exclut les bandes sonores d'oeuvres cinématographiques diffusées en même temps que le film. Cette situation prive les interprètes de revenus importants, en plus d'être discriminatoire, puisque les auteurs perçoivent, eux, des redevances en pareilles circonstances.
    Cinquièmement, il faut trouver des moyens de rémunérer les artistes-interprètes pour l'utilisation de leurs prestations sur Internet.
    Les artistes québécois savent très bien que les revenus découlant de la diffusion en continu sont extrêmement bas, même pour leurs chansons les plus populaires.
    D'abord, les revenus pour la webdiffusion non interactive et semi-interactive découlent d'un tarif établi par la Commission du droit d'auteur du Canada. Ce tarif est presque 11 fois moins élevé que celui en vigueur aux États-Unis.
    Ensuite, les revenus pour les webdiffusions à la demande, comme Spotify ou Apple Music, par exemple, sont assujettis à des contrats entre les artistes et les producteurs, qui prévoient la récupération de frais de production avant le versement de redevances aux artistes. Compte tenu des faibles sommes générées par les ventes d'albums ainsi que par la webdiffusion à la demande, les interprètes se voient trop souvent privés de redevances provenant de cette exploitation commerciale.

  (1545)  

    Notre recommandation comprend deux volets.
    D'une part, des directives devraient être intégrées dans la Loi afin que les tarifs de la Commission du droit d'auteur du Canada s'arriment à ceux qui s'appliquent chez nos voisins du Sud. La diffusion en continu devrait avoir la même valeur, qu'elle se fasse au Canada ou aux États-Unis. On devrait également prévoir des directives pour que la Commission du droit d'auteur du Canada respecte les ententes conclues entre les utilisateurs et les sociétés de gestion.
    D'autre part, il faudrait instaurer un droit à la rémunération pour les exploitations numériques des prestations comme celui qui est prôné par le regroupement européen Fair Internet for Performers. De plus, cette redevance devrait faire l'objet d'une gestion collective obligatoire. Mieux encore, les règles de la rémunération équitable, qui est versée à moitié aux artistes-interprètes et à moitié aux producteurs d'enregistrements sonores, devraient également s'appliquer à la webdiffusion à la demande, comme c'est le cas pour la radio.
    Enfin, notre dernière recommandation est très simple: il s'agit d'abolir l'exemption qui permet aux radiodiffuseurs de se soustraire à l'obligation de verser des redevances de rémunération équitable sur la première tranche de 1,25 million de dollars de leurs recettes publicitaires annuelles. Cette exemption adoptée en 1997 ne s'applique pas aux auteurs, mais seulement aux artistes-interprètes et aux producteurs, et elle devait être transitoire. Vingt ans plus tard, l'abolition de cette mesure discriminatoire est urgente.
    Je vais conclure en posant une question: pourquoi avons-nous autant de difficulté à reconnaître la valeur de l'interprète quand on parle de musique?
    Les pratiques qui ont cours ne reconnaissent pas à leur juste valeur la contribution et la prise de risques de l'interprète. L'artiste consacre des centaines, voire des milliers d'heures à parfaire son talent. Cela doit être reconnu.
    Nos lois doivent soutenir les artistes devant les géants de l'industrie culturelle, parce que, comme je le dis souvent, et je le répète ici, il n'y a pas de culture sans artistes.
    Merci.
    Merci beaucoup.

[Traduction]

    Nous allons passer à M. Southam.
     Vous avez sept minutes.
    Je remercie le président, les vices-présidents et les membres du Comité.
    Je m'appelle Tim Southam. Je suis président de la Guilde canadienne des réalisateurs, ainsi que réalisateur de longs métrages, de documentaires et de séries sur des plateformes comme le cinéma, la télévision linéaire et Internet.
    Je comprends votre amour pour Star Trek, mais je dois vanter les mérites de Lost in Space, que j'ai réalisé cette année.
    C'est bon aussi.
    Bien.
     Je suis accompagné de Dave Forget, directeur des politiques.
    Nous sommes ravis d'avoir été invités par le Comité à présenter le travail de la Guilde canadienne des réalisateurs auprès de la Société canadienne de gestion des droits des réalisateurs, d'autant plus que ce travail reflète un principe fondamental de la Guilde, à savoir que les réalisateurs et les scénaristes canadiens devraient être reconnus par la loi comme coauteurs de l'oeuvre audiovisuelle.

[Français]

    La Guilde est une organisation nationale du travail qui représente le personnel créatif clé et logistique du cinéma, de la télévision et des industries des médias numériques. Aujourd'hui, elle compte 5 000 membres et couvre tous les domaines de la réalisation, de la production, du montage et de la conception visuelle.
    En 1998, la Guilde canadienne des réalisateurs a fondé la Société canadienne de gestion des droits des réalisateurs, ou DRCC, une société de perception de droits qui administre les paiements de redevances en provenance de pays étrangers sujets au droit d'auteur et qui distribue ces bénéfices à tous les réalisateurs canadiens, et ce, pour tous les genres. En 2017, la DRCC a versé 796 000 $ en redevances étrangères à ses membres, soit 1 349 réalisateurs canadiens.

[Traduction]

     Les réalisateurs ont droit à ces redevances en vertu des lois nationales sur le droit d'auteur et des systèmes de monétisation à l'extérieur du Canada. C'est le cas principalement en Europe, mais aussi de plus en plus là où les lois sur le droit d'auteur considèrent les réalisateurs audiovisuels comme étant auteurs de leur travail, et exigent des paiements de la même manière que la SOCAN le fait pour les compositeurs et auteurs-compositeurs du Canada.
    Ici au Canada, alors que l'actuelle Loi sur le droit d'auteur laisse planer l'ambiguïté sur l'auteur du travail cinématographique, le texte et les décisions judiciaires subséquentes appuient largement la proposition selon laquelle le scénariste et le réalisateur sont coauteurs de l'oeuvre.
    L'article 11.1 de la loi établit une distinction entre un contenu audiovisuel à « caractère dramatique » et un contenu sans caractère dramatique, et attribue une durée normale au droit d'auteur, soit la vie de l'auteur plus 50 ans, uniquement aux oeuvres où « les dispositifs de la mise en scène ou les combinaisons des incidents représentés donnent un caractère dramatique ».
    Un écrivain crée bien sûr une « combinaison d'incidents », qu'on appelle intrigue ou scénario. Un réalisateur dirige ensuite le jeu, puis conçoit et organise les divers éléments créatifs qui apparaîtront finalement à l'écran: il gère la mise en scène, le cadrage et les mouvements de la caméra; conçoit les plans et sélectionne les emplacements; détermine le ton et l'interaction des artistes; organise la séquence finale des images dans la salle de montage; et choisit la trame sonore et la musique.
    Tout compte fait, l'article 11.1 décrit le travail des scénaristes et des réalisateurs. Si la paternité d'une oeuvre dans les médias audiovisuels signifie créer une oeuvre originale et lui donner un caractère dramatique, comme la loi le prévoit, alors il est logique de penser que l'auteur est l'initiateur et le créateur qui fournit ce caractère dramatique.

  (1550)  

    La durée du droit d'auteur lui-même, soit la vie de l'auteur plus 50 ans, constitue une preuve supplémentaire que l'auteur doit être un individu et une personne physique, quelqu'un qui peut prendre le crédit de la paternité et de la propriété naturelle des droits moraux, et non pas une société ou une autre entité juridique. Cette interprétation de la loi est appuyée par toute la jurisprudence canadienne, et québécoise aussi, en vertu du Code civil.
    La loi établit également une distinction explicite entre l'auteur et le producteur d'une oeuvre. Bien que la désignation de producteur soit principalement employée pour les enregistrements sonores, elle est également définie pour les oeuvres audiovisuelles. La première propriété du droit d'auteur ou du droit moral n'est attribuée nulle part dans la loi au producteur d'une oeuvre audiovisuelle. Cela confirme que la propriété du droit d'auteur et du droit moral doit revenir exclusivement à l'auteur original, qui doit être la personne physique ayant conféré à l'oeuvre son caractère dramatique original.
    Il ne s'agit pas seulement de l'interprétation actuelle des tribunaux, mais aussi de la politique déjà intégrée dans les ententes et les contrats de notre industrie. Les entreprises ont besoin de certitude, et aucun producteur, studio, diffuseur ou distributeur n'investirait dans un projet sans avoir obtenu les droits nécessaires pour l'exploiter. C'est pourquoi les scénaristes et les réalisateurs souscrivent déjà systématiquement à leur exploitation et à leurs droits moraux, et sont déjà rémunérés au moyen d'honoraires pour leur talent et l'utilisation future de leur création.
    Le changement que nous préconisons aujourd'hui ne perturberait pas le statu quo dans l'industrie et ne changerait rien à la façon de faire les affaires, mais reconnaîtrait nos droits moraux en tant qu'individus et créateurs. Voilà qui dirait clairement que ces droits doivent continuer à être respectés dans le cadre de discussions au sujet de toute plateforme future.
    Mesdames et messieurs les membres du Comité, je vous remercie de votre temps.
    Nous serons heureux de répondre à vos questions.
    Merci beaucoup. Nous allons passer directement aux questions.
    Monsieur Longfield, vous avez sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie tous les témoins non seulement d'avoir été concis, mais aussi d'avoir formulé des recommandations claires à la fin. C'est vraiment utile pour la suite des choses.
    Je pourrais peut-être commencer par M. Lewis. Au sujet des sources de revenus, je pensais pendant votre exposé à Napster et à la façon dont certains sites de piratage qui avaient été créés à l'origine sur Internet ont été fermés. Je n'avais rien à voir avec le droit d'auteur à cette étape du processus. Envisagez-vous quelque chose de similaire dans l'identification des sites de piratage? Sont-ils aussi évidents que Napster ne l'était?
    Oui, l'industrie connaît les sites. De nombreux pays les ont déjà identifiés et fermés.
    Le Canada est à la traîne. Je suis persuadé que vous allez l'entendre de la part de nombreux témoins en matière de droit d'auteur. Nous ne sommes pas chefs de file, c'est certain.
    Ce que nous cherchons à accomplir avec l'application FairPlay, c'est vraiment de faire comme beaucoup de pays d'Europe occidentale, qui ont des industries culturelles dynamiques, et qui ont cru bon de les protéger. Nous avons examiné le régime d'avis, mais il est franchement inefficace, de sorte que nous devons durcir le ton.
    L'industrie connaît les joueurs. Il s'agit donc d'une façon rapide, efficace et peu coûteuse de remédier au problème, car d'autres initiatives qui ont été examinées... Il est long et fastidieux pour un détenteur de droits d'auteur de faire valoir ses droits. Selon nous, ce processus permettrait une application régulière de la loi et l'obtention d'un résultat rapide.

  (1555)  

    Merci.
    Vous avez mentionné les examens internationaux. Les entreprises internationales du domaine connaissent-elles les sites? Y a-t-il un rapport que nous pourrions consulter? La communauté artistique internationale a-t-elle diffusé quelque chose qui pourrait aider?
    Je vois le rapport The Value Gap dont il a été question lors de notre dernière séance. Je l'ai parcouru. C'est une approche proprement canadienne. On y fait référence à des études internationales. Y en a-t-il que vous pourriez nous fournir?
    Nous allons vous les remettre. Nous verrons comment procéder correctement par l'intermédiaire du Comité, mais nous le ferons sans problème.
    Formidable. Merci beaucoup.
    Mesdames Morin et Prégent, vous nous parliez de l'accent qui est mis sur les créateurs. Voilà qui me semble être le point de départ de toute la question, à savoir qu'il faut s'assurer que les créateurs sont couverts. Les choses ne fonctionnent évidemment pas pour le moment.
    Est-ce que le syndicat ou regroupement...? Devrions-nous être informés d'un accent qui est mis sur les créateurs, et dont vous pourriez nous parler?
    J'y vais au hasard.

[Français]

    En fait, en tant que société de gestion collective, nous essayons autant que possible de faire en sorte que les redevances perçues pour les utilisations du travail des artistes-interprètes ne diminuent pas avec le temps. Malheureusement, de nombreuses exceptions ont été introduites dans la Loi sur le droit d'auteur lors de sa modernisation en 2012, et c'est certain que cela rend les choses difficiles. On voit des baisses importantes des redevances.
    Je parlais de la copie privée, par exemple. Au plus fort de la copie privée, les redevances correspondaient à plus de 50 % des redevances canadiennes qu'Artisti pouvait distribuer aux artistes. L'année dernière, seulement 7 % des redevances canadiennes découlaient de la copie privée.
    On voit que la Loi n'a pas suivi le mouvement et qu'il y aurait intérêt à la moderniser davantage afin que ce soit étendu aux appareils.
    Je pourrais vous parler d'un tas d'autres exceptions qui ont été introduites dans la Loi.
    Malheureusement, cela attire défavorablement le regard des pays étrangers sur le Canada. Pas plus tard qu'en mai 2017, l'Association littéraire et artistique internationale, l'ALAI, a formulé au gouvernement canadien la recommandation ou le voeu de diminuer les exceptions gratuites. En fait, il faudrait que, si des exceptions sont introduites dans la Loi, celles-ci soient au moins assorties d'une compensation.

[Traduction]

    Merci.
    Je regarde l'heure, et je voulais vous poser des questions sur le traité de Beijing. On nous l'a mentionné à quelques occasions. Je ne l'ai pas examiné, mais ce traité devrait-il nous servir de base? A-t-il fonctionné dans d'autres pays?

[Français]

    Jusqu'ici, le traité n'a été ratifié que par 18 pays, si je ne m'abuse. Il faut effectivement que 30 pays l'aient ratifié pour qu'il soit pleinement en vigueur. C'est un traité qui accorde l'ensemble des droits exclusifs aux artistes-interprètes du secteur de l'audiovisuel, mais aussi, chose importante, des droits moraux.

[Traduction]

    Merci beaucoup. Vous faites un excellent travail.
    Messieurs Forget et Southam, si nous prenons l'examen du CRTC qui a été annoncé cette semaine, quelle part de ce dont vous parlez s'y rapporte? Quelle part doit être examinée au sens de la Loi sur le droit d'auteur elle-même? Est-ce que certains des sujets que vous abordez seraient couverts par l'examen du CRTC? Dans l'affirmative, pourriez-vous nous en dire un peu plus? Je sais que c'est une toute nouvelle annonce.
    Je serais porté à vous dire aujourd'hui que c'est distinct. Comme vous le savez, l'examen du CRTC est une recommandation exhaustive. De toute évidence, le marché des droits est fondamental; son fonctionnement est lui aussi fondamental. Cela se rapporte directement au droit d'auteur et à ce que nous disons ici.
    D'accord.
    Vous avez mentionné le créateur personnel. Quand vous créez des fichiers numériques et des images, créer en imitant le style de quelqu'un d'autre peut miner la valeur du créateur. C'est peut-être une nuance à laquelle je pense trop, mais en création numérique, il est difficile de retrouver le véritable créateur, parfois. Est-ce juste?

  (1600)  

    Je dirais que cela correspond en fait à notre position concernant la recommandation du CRTC, soit que pratiquement rien de l'univers numérique ne change quelque chose à notre enjeu, concernant la création de contenu. C'est donc dire que l'origine, c'est l'origine, et qu'Internet est essentiellement une plateforme ou un moyen organisé d'une façon très différente et très déterminante. Quoi qu'il en soit, en ce qui concerne l'origine, nous parlons de droits d'auteur. Nous parlons de l'identification du créateur, dans la chaîne, pour ce qui concerne la propriété des droits.
    Merci de m'avoir accordé un peu plus de temps.
    Merci beaucoup.

[Français]

    Monsieur Bernier, vous avez sept minutes.
    Sept minutes et demie?
    D'accord, vous avez sept minutes et demie.
    Merci, monsieur le président.
    Ma question s'adresse aux représentantes d'Artisti.
    Vous avez fait de bonnes démonstrations ce matin devant le Comité permanent du patrimoine canadien. Les députés ici n'ont pas eu l'occasion de participer aux échanges que nous y avons eus.
    Plus tôt, vous avez parlé des nombreuses exceptions dans le droit canadien en disant qu'elles n'étaient peut-être pas alignées sur la Convention de Berne. Pouvez-vous nous donner un peu plus de détails là-dessus?
    Oui.
    La Convention de Berne prévoit le triple test dont j'ai parlé précédemment, mais il y a également l'Accord sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce, ou l'ADPIC, ainsi que les traités de l'Organisation mondiale de la propriété intellectuelle qui ont été mis en place en 1996. Je parle ici du WCT, soit le Traité de l'OMPI sur le droit d'auteur, ainsi que du WPTT, soit le Traité de l'OMPI sur les interprétations et exécutions et les phonogrammes. Ces traités prévoient un triple test qui s'applique quand une des parties contractantes voudrait implanter une exception aux droits d'auteur dans les lois d'un pays.
    On dit que les exceptions doivent répondre à trois critères: elles doivent être limitées à certains cas spéciaux, elles ne doivent pas porter atteinte à l'exploitation normale de l'oeuvre ou de l'autre objet du droit d'auteur et elles ne doivent pas causer un préjudice injustifié aux intérêts légitimes du créateur. À partir du moment où une loi instaure une exception sans prévoir de mesures de compensation, indéniablement, on se trouve à causer un préjudice aux créateurs.
    Pensez-vous que l'exception de l'utilisation raisonnable a été trop utilisée?
    J'ai parlé de cela ce matin parce que je citais l'étude de M. Mihály Ficsor. Ce dernier a publié dernièrement une étude analysant les exceptions qui s'appliquent aux oeuvres littéraires. Il y précise que, selon lui, les exceptions canadiennes ne respectent pas le triple test dont je viens de parler. Cela dit, il peut y avoir d'autres exceptions que celles-là.
    Vous représentez les interprètes. Avez-vous des statistiques sur le déclin de leurs revenus au cours des dernières années?
    Je n'ai pas de statistiques à proprement parler, mais il y a eu le processus de consultation qui s'est déplacé de ville en ville, d'un bout à l'autre du Canada. Vous aurez peut-être entendu parler du témoignage livré à cette occasion par M. Pierre Lapointe, un artiste très connu au Québec. Il a dit que, pour 1 million d'écoutes en diffusion continue, il avait obtenu une somme tout à fait dérisoire. M. David Bussières, qui fait partie du duo très connu au Québec qui s'appelle Alfa Rococo, a lui aussi témoigné en ce sens. Les sommes sont ténues.
    Il n’y a qu’à regarder, par exemple, les redevances qui sont perçues pour la webdiffusion non interactive et semi-interactive. Comme nous le disions tout à l’heure, le tarif qui a été fixé par la Commission du droit d’auteur du Canada est 11 fois moins élevé que celui des États-Unis pour la même période. D'après un savant calcul que j'ai fait, pour être en mesure de s'acheter une pinte de lait, ou un litre de lait, si vous préférez...
    Ne me parlez pas de lait. Un verre de vin, peut-être.
    D'accord, mais quoi qu'il en soit, il fallait des milliers d'écoutes en diffusion continue pour se payer cela. Or, plusieurs artistes participent souvent à un seul enregistrement sonore. C'est le cas, par exemple, des orchestres symphoniques. Il faut alors une multitude d'écoutes en diffusion continue pour générer ne serait-ce que de minuscules sommes.
    Quant aux statistiques précises sur le déclin des revenus, il faudrait que je puisse vous dire exactement ce qu'il en est. Je ne peux que parler de la copie privée. Comme je l'ai mentionné déjà, la copie privée représentait plus de 50 % des redevances canadiennes que nous versions aux artistes, mais ce pourcentage est passé à 7 % en quelques années.

  (1605)  

    Plus tôt, lorsque vous avez expliqué vos recommandations, vous avez parlé de la Commission du droit d'auteur du Canada. Avez-vous des suggestions à faire en ce qui concerne la réforme de cette commission? Vous interagissez avec la Commission. Selon vous, y aurait-il lieu d'apporter des améliorations, qu'il s'agisse de son rôle, de la Loi ou d'autres aspects?
    Oui, il y aurait des recommandations à faire. D'ailleurs, nous en avons formulé plusieurs. Un comité s'est penché sur la question et Artisti a produit un mémoire à cette occasion. Si cela vous intéresse et peut vous être utile, je pourrai vous le faire parvenir.
    Vous pourriez le faire parvenir au Comité.
    Certainement. Cela me fera plaisir.
    C'était en réponse à des questions qui nous avaient été posées. Cela correspond aussi à une de nos grandes préoccupations. Nous sommes tout de même une petite société de gestion collective. Même si nous distribuons 43 millions de dollars aux 4 500 adhérents que nous représentons, nous ne disposons pas des mêmes moyens que la SOCAN, par exemple. Pour les petites sociétés de gestion collective, se présenter devant la Commission du droit d'auteur du Canada est extrêmement coûteux. On parle de plusieurs dizaines de milliers de dollars. C'est vraiment dommage. Les sociétés de l'envergure d'Artisti se disent qu'il y aurait peut-être moyen de percevoir des redevances et de déposer des tarifs pour les artistes qu'elles représentent. Toutefois, nous ne savons pas précisément combien ces redevances peuvent représenter. Nous voyons que les tarifs sont assez bas. Dans bien des cas, cela rend l'exercice complètement vain.
    Dans vos recommandations, vous avez parlé de l'exception qui a été établie il y a plusieurs années relativement à la diminution des redevances pour la première tranche de 1,25 million de dollars de recettes publicitaires.
    Est-ce qu'il s'agit d'un règlement ou est-ce dans la Loi?
    C'est carrément dans la Loi. Il s'agit de l'article 68.1. Le titre qui annonce le contenu de l'article parle de mesures « transitoires ». Si on l'a écrit, c'est que ce devait être transitoire. C'était en 1997. Pendant combien de temps est-ce transitoire?
    Si le gouvernement était de bonne foi, il pourrait faire passer un décret pour abolir la mesure transitoire. Je pense que mes amis libéraux seraient tous d'accord à ce sujet; c'est une bonne chose.
    Oui. Cela représenterait quand même 8 millions de dollars de plus par année à répartir entre les artistes-interprètes et les producteurs d'enregistrements sonores. Ce n'est pas rien.
    Plus tôt, Mme Prégent proposait qu'on apporte une modification à la définition du terme « enregistrement sonore ». Si cette définition était modifiée et que nous pouvions percevoir des redevances de rémunération équitable pour la musique intégrée à des films et des émissions de télévision, il serait possible de distribuer aux artistes-interprètes et aux producteurs d'enregistrements sonores, en parts égales, 55 millions de dollars. C'est ce que disait ce matin M. Ian MacKay, de Re:Sonne, une société qui perçoit la rémunération équitable. Ce sont des sommes importantes pour nous.
    Merci beaucoup.
    Merci beaucoup.

[Traduction]

    Vous avez eu 50 secondes de plus.
    Monsieur Stetski, vous avez sept minutes.
    Je vous remercie de votre présence.
    Je remplace Brian Masse, qui est le membre habituel du Comité, alors je m'excuse auprès des membres du Comité si d'autres témoins ont déjà répondu à ces questions.
    Je suis très intéressé par divers aspects. Commençons par la musique. Comment le Canadien moyen sait-il, quand il va sur YouTube, par exemple, et clique sur un vidéoclip qu'il veut voir, si l'artiste reçoit ou non une forme de rétribution?
    Au Canada, premièrement, si vous cliquez sur une vidéo en particulier, c'est du « sur demande ».

[Français]

    Quand c'est fait à la demande, en principe, cela devrait être couvert par le contrat passé entre l'artiste et le producteur.
    Cela dit, souvent, si vous faites une demande pour une vidéo, puis que vous arrêtez de faire des demandes, YouTube vous suggère des vidéos et vous propose telle autre chanson du même artiste ou une autre chanson d'un artiste différent. À ce moment-là, il ne s'agit plus de ce que l'on appelle les services à la demande, mais plutôt de webdiffusion semi-interactive ou non interactive, selon la terminologie qu'on emploie. Vous n'avez rien demandé, mais on vous a suggéré un contenu. Personnellement, je ne suis pas en mesure de vous dire si, dans ces cas, c'est rétribué chaque fois.

  (1610)  

[Traduction]

    Est-ce qu'il serait possible d'avoir une désignation ou une étiquette pour ces vidéos, de sorte que vous puissiez faire la bonne chose si vous le souhaitez? En ce moment, je le fais tout simplement, et vous avez raison: il y a peut-être quatre ou cinq autres vidéos qui apparaissent. Je ne sais absolument pas si je fais quelque chose d'illégal.

[Français]

    Une des solutions législatives serait effectivement d'accorder une rétribution lorsque ces vidéos jouent, un peu comme c'est le cas à la radio. Mme Prégent le disait clairement: on ne désactive pas le son lorsqu'on écoute une vidéo sur YouTube. Généralement, on écoute la musique, et des images viennent avec la musique. En fait, YouTube devient en quelque sorte une radio avec des images. Quand les radios utilisent la musique, elles doivent payer des redevances; c'est ce qu'on appelle les redevances de rémunération équitable. Elles sont divisées 50-50 entre l'artiste et le producteur. Si de telles mesures étaient en place, on réglerait une grande partie de l'iniquité qui existe, et les gens pourraient regarder des vidéos sur YouTube et s'en faire proposer sans avoir à se demander ce qui se passe et si les artistes sont rétribués ou non.
    L'autre aspect un peu pernicieux est que des personnes mettent parfois en ligne des vidéos dans lesquelles on voit leurs petits chats faire des cabrioles, et ces vidéos sont accompagnées de musique. Dans ce cas, il n'y a pas de certitude. Si la vidéo est visionnée plusieurs fois, celui qui l'a mise en ligne recevra ultimement de l'argent. Cette personne reçoit de l'argent, mais la personne qu'on entend chanter dans cette vidéo ou dont on entend la musique n'en reçoit pas nécessairement. On utilise une oeuvre, mais on n'a pas la certitude que l'argent ira au créateur.

[Traduction]

     Est-ce que l'adoption de mesures législatives aiderait?
    Absolument.
    À ce sujet, est-ce que certaines de ces plateformes sur Internet, que ce soit YouTube, Facebook ou n'importe quelle autre plateforme — et cette question s'adresse à vous tous —, coopèrent aux efforts pour faire face aux problèmes de piratage? Est-ce qu'ils se contentent, au contraire, de dire que ce n'est pas de leur faute, parce que c'est quelqu'un d'autre qui met cela sur YouTube? Les fournisseurs Internet doivent-ils rendre des comptes et veiller effectivement à ce qu'il n'y ait pas de matériel illégal sur leurs sites? Sinon, est-ce qu'il faudrait imposer cela?
    Non, elles ne coopèrent pas à ce jour et ce, malgré les multiples avis. Effectivement, c'est la raison pour laquelle c'est inutile, car ils disent qu'ils ne font que fournir le conduit et qu'ils ne réglementent pas ce qui passe par ce conduit — ce genre de propos. Cependant, je tiens à dire qu'il y a des diffuseurs, Bell Média et Rogers, qui font partie de Franc-Jeu Canada. Ils ont changé de position concernant la réglementation de cela, car ils sont des fournisseurs de contenu ainsi que des créateurs de contenu, ce qui fait que cela va avoir des répercussions sur leur bénéfice net. Même aux États-Unis, la règle 230, dont tout le monde se servait pour se protéger en matière de contenu et de responsabilité du contenu, a été modifiée de sorte qu'il y a maintenant des exigences croissantes concernant la responsabilité de ce qui est présenté sur votre plateforme.
    Est-ce que des mesures législatives seraient utiles sur ce plan? Est-ce au contraire trop demander aux organismes de réglementation?
    Des mesures législatives seraient en fait d'une très grande aide.
    Mes connaissances à ce sujet sont très élémentaires. Si vous tombez sur du piratage ou une utilisation illégale, quel type de processus suivez-vous pour essayer de rectifier la situation? Comment ce processus pourrait-il être amélioré? Que faites-vous si vous voyez quelque chose et constatez que les redevances ne sont pas versées et, donc, que c'est illégal? Quel processus avez-vous en ce moment, et comment pourrions-nous l'améliorer?

  (1615)  

    Il y a deux façons de voir la proposition de Franc-Jeu Canada au CRTC.
    Je parle à des réalisateurs qui voient leur travail surgir sur ces plateformes. De toute évidence, dans bien des cas, c'est sans permis d'utilisation. Les réalisateurs ne sont pas en mesure, faute de temps et de ressources, de suivre ces dossiers et d'exercer les recours légaux afin de faire retirer le contenu. Le contenu surgi ailleurs. C'est un défi, et notre organisation est également membre de la coalition Franc-Jeu Canada. L'une des qualités de l'approche est d'aller à la source.
    Souvent, la source du contenu — d'où il est diffusé — se trouve à l'extérieur du Canada. Il est difficile de l'atteindre avec notre actuelle structure juridique traditionnelle. Par conséquent, empêcher ces sources d'entrer sur notre territoire représente une solution simple. Nous dirions, en effet, que tout ce qui doit arriver à l'extérieur du Canada va arriver, car ces sources de flux vont probablement continuer d'exister, et que d'autres administrations devront s'en occuper. Certaines ont des protocoles très semblables à ce que Franc-Jeu a déjà — par exemple au Royaume-Uni, au Portugal et en Italie —, et cela fonctionne.
    Ce qu'on suggère, c'est essentiellement de bloquer ces sources, car pour les créateurs, se lancer à la poursuite de cela, un cas à la fois, représente une tâche herculéenne, en plus de n'être tout simplement pas efficace. La suggestion est donc très pratique; quand un site fait manifestement énormément de piratage de contenu alors qu'il n'a pas le droit de l'exploiter et de l'offrir, il faut le bloquer.
    Merci beaucoup.
    C'est à vous, monsieur Baylis. Vous avez sept minutes.
    Je vais poursuivre dans la même veine avec M. Lewis.
    Si je comprends bien, le régime d'avis et avis ne fonctionne pas pour vous.
    C'est juste.
    Franc-Jeu a trouvé une solution qui, d'après ce que vous dites, lui permettra d'identifier... Vous avez énuméré des critères que vous jugez justes et qui garantiraient que le gouvernement n'est pas exagérément sévère aussi. Est-ce...?
    En effet. Il s'agirait d'un organisme indépendant qui trancherait. Il y aurait un processus d'audience. Ce serait un tribunal administratif quasi judiciaire qui se pencherait là-dessus et ferait une recommandation au CRTC. Au bout du compte, c'est le CRTC qui aurait ce pouvoir.
    Et il dirait aux FSI de bloquer ce site?
    C'est cela.
    Quelqu'un a parlé du principe du jeu de la taupe. On bloque un site, et il resurgit ailleurs. Voyez-vous cela comme un problème ou une préoccupation?
    L'industrie doit faire preuve d'habileté sur ce plan. C'est là le problème avec le régime d'avis et avis. Vous demandiez comment on peut déterminer si quelque chose est piraté si vous ne le savez pas. Avec certains de ces sites Web, ce n'est pas qu'ils comportent des erreurs d'orthographe ou qu'ils aient l'air douteux. Ils sont sophistiqués et bien ficelés. Vous pouvez payer avec une carte Visa. Vous avez toutes les normes traditionnelles auxquelles vous vous attendez d'un site Web légal. La plupart des gens ne peuvent pas déterminer si c'est légal ou illégal. L'industrie le peut, car de toute évidence, nous savons qui a les droits de diffusion et qui a la capacité d'exploitation. Il y a un processus en place pour cela, mais il faut de la souplesse.
    Oui, dans une certaine mesure, il faut de la souplesse. De la même manière, disons que des gens utilisent Kodi, et qu'il y a cinq sites bloqués. Ces sites doivent refaire surface et, d'une façon ou d'une autre, dire à ces gens qui voulaient du matériel piraté où ils se trouvent, n'est-ce pas?
    Oui.
    Et ce faisant, ils pourraient aussi le dire au CRTC également, n'est-ce pas?
    Oui.
    Donc, si nous avions une méthode plus ferme, ce serait très utile.
    Ce qui est bon de cela, c'est que l'industrie se réglementerait elle-même, en quelque sorte. Nous présenterions ces cas, et le site Web aurait l'occasion de réagir et de dire non, que l'information est incorrecte et qu'il avait la capacité d'exploiter le produit, par exemple. Il y a un processus en place. Je pense que 30 autres pays ont quelque chose de semblable.
     Trente autres pays ont cela?
    Ne me citez pas, mais je sais qu'il y a un certain nombre de pays. Je vais me tourner vers la Guilde canadienne des réalisateurs.
    Remarquez que je leur ai donné de l'eau, tout à l'heure.
    Oui, en effet, les réalisateurs.
    Ils sont toujours des réalisateurs. Vous devez toujours servir les réalisateurs.
    Je comprends, oui.
    C'est parce que nous avons un bien plus gros syndicat.
    Des voix: Ha, ha!

[Français]

    J'aimerais revenir sur la question du Traité de Beijing sur les interprétations et exécutions audiovisuelles en ce qui concerne les vidéoclips. Je crois que c'est Mme Morin qui en a parlé, ou peut-être est-ce Mme Prégent.
    Ai-je bien compris que, aux termes de ce traité, un vidéoclip est traité davantage comme de la musique, comparativement à une vidéo?

  (1620)  

    Non, non, non.
    En fait, le Traité de Beijing reconnaît qu'on devrait accorder aux artistes l'ensemble des droits d'auteur et des droits exclusifs, au même titre que les auteurs d'une oeuvre. Les artistes-interprètes devraient, eux aussi, obtenir ces droits.
    Pour l'instant, selon la manière dont la Loi sur le droit d'auteur du Canada est rédigée, ce sont les artistes du secteur sonore qui bénéficient de droits d'auteur. Il y a un article précis de la Loi sur le droit d'auteur qui dit que, pour peu qu'un artiste-interprète accepte que sa prestation soit incorporée dans une oeuvre audiovisuelle, il renonce à exercer son droit prévu à l'article 15.
    Vous voulez dire que, selon la Loi sur le droit d'auteur du Canada, si un interprète accepte d'interpréter une chanson dans un vidéoclip, il n'a pas droit à des redevances.
    En fait, il n'a pas de droit d'auteur. Cependant, pourrait-il négocier un arrangement par l'entremise de ses contrats avec le producteur, par exemple?
    Peut-être pourrait-il l'obtenir, mais, du point de vue légal, ce n'est pas inscrit dans la Loi qu'il peut toucher des droits d'auteur.
    Tout à fait. Il les touche non comme interprète, mais comme auteur de sa prestation. L'auteur-compositeur, c'est autre chose.
    Lorsqu'on considère une chanson, il y a, d'une part, l'oeuvre, qui comprend la mélodie et les paroles.
    C'est ce qui a été écrit par cet auteur, celui qui a écrit la musique.
    Oui, exactement: les mots et la musique.
    De ce côté, il n'y a pas de difficulté.
    Toutefois, l'interprète n'est pas traité comme un auteur.
    Non. Il l'est en ce qui concerne l'enregistrement sonore, mais pas en ce qui concerne le vidéoclip.
    Dans le cas d'une chanson standard à la radio, l'interprète est-il traité comme un auteur?
    Oui, c'est-à-dire qu'il reçoit sa rémunération équitable au même titre que l'auteur va recevoir son droit de communication.
    C'est simplement dans le contexte de la loi canadienne qu'un interprète n'est pas couvert dans le cas d'un vidéoclip. Par contre, lorsque la chanson joue à la radio, il touche ses redevances.
    C'est d’ailleurs l'une des modifications que nous recommandons d'apporter à la Loi. D'une part, on devrait prévoir des droits d'auteur pour les artistes participant à une œuvre audiovisuelle. D'autre part, il faudrait modifier la définition du terme « enregistrement sonore » de sorte que, dans le cas où l'image d'un vidéoclip accompagne la chanson qu'on écoute, ce ne soit pas exclu.
    C'est donc exclu, en ce moment.
    Oui. En ce moment, il y a effectivement cette exclusion particulière.
    Pourquoi y a-t-il cette exclusion? Y a-t-il une raison?
    Je ne le sais pas. Je n'étais peut-être même pas née encore. Non, ce n'est pas vrai, j'étais née en 1997, comme vous pouvez vous en douter.
    D'accord, nous allons vérifier cela.
    J'ai une autre question, au sujet de la tarification. Je crois vous avoir entendu dire qu'au Canada, les contenus provenant de YouTube ou de Spotify étaient soumis à un tarif beaucoup plus faible que celui en vigueur aux États-Unis.
    Oui, tout à fait.
    Comme je vous l'ai dit, il existe un tarif pour la webdiffusion non interactive et semi-interactive. Je vais vous expliquer la différence.
    Je l'ai comprise.
    Commençons par la diffusion en continu non interactive.
    À titre de comparaison, alors que les artistes aux États-Unis touchent 11 ¢, les artistes au Canada vont toucher seulement 1 ¢, n'est-ce pas?
    Oui, tout à fait. C'est 11 fois moins. Plus précisément, c'est 10,78.
    Selon cette tarification, si c'est 11 ¢ aux États-Unis, c'est 1 ¢ ici.
    Oui.
    Ce tarif, c'est seulement pour la...
    C'est pour la diffusion continue non interactive et semi-interactive.
    Pourquoi cet écart existe-t-il?
    Je ne saurais pas vous l'expliquer. C'est une décision qu'a rendue la Commission du droit d'auteur du Canada. Je ne sais pas exactement quels ont été les critères qui ont permis d'établir au Canada un tarif vraiment plus bas que celui établi aux États-Unis.
    À présent, l'écart se creuse encore davantage, parce que, depuis ce temps, les tarifs aux États-Unis ont augmenté.
    C'est la Commission du droit d'auteur du Canada qui décide de cela?
    Oui, tout à fait.
    Ce n'est pas vraiment quelque chose qui nous est présenté.
    On pourrait quand même incorporer dans la Loi des directives qui établissent des critères, par exemple.
    En ce qui concerne YouTube ou Spotify, êtes-vous satisfaits du montant ou non?
    En ce qui concerne la diffusion continue non interactive et semi-interactive, non. Dans le cas de YouTube, nous ne pouvons pas être satisfaits des montants, parce que, pour l'instant, comme je l'ai dit, c'est zéro, à part certains arrangements qui pourraient être convenus dans les contrats passés entre artistes et producteurs.
    Merci beaucoup.

[Traduction]

     Monsieur Jeneroux, vous avez cinq minutes.
    Merci, monsieur le président, et merci à tous d'avoir pris le temps de venir discuter avec nous aujourd'hui.
    Je veux revenir à vous, monsieur Lewis. Vous avez tenu des propos intéressants tout à l'heure, au sujet de la proposition de Franc-Jeu, qui a suscité beaucoup de préoccupations chez les gens qui veulent préserver la neutralité du Net. Vous avez dit appuyer la neutralité du Net, et c'est bon de l'entendre. Cependant, j'aimerais aller au fond de certaines choses que vous avez dites.
    À l'heure actuelle, comme vous l'avez dit, Franc-Jeu propose la création d'un conseil composé d'intervenants de l'industrie qui demanderait au CRTC d'exiger que les FSI bloquent les sites Web qu'ils jugent perpétuer le piratage. La principale préoccupation causée par cette proposition, c'est qu'aucun tribunal n'interviendrait avant la fermeture du site. En réponse à cela, vous avez dit — à l'instar d'autres représentants de Franc-Jeu — que les plaignants pourraient s'adresser à la Cour d'appel fédérale une fois que le site a été retiré.
    Pourquoi ne pas répondre directement à ces préoccupations bien réelles et modifier la proposition afin de prévoir l'intervention d'un tribunal avant le retrait des sites commettant les infractions?

  (1625)  

    J'ai déjà travaillé à la Commission des relations de travail de l'Ontario — encore là, un tribunal quasi judiciaire —, et ses décisions prenaient effet... N'importe quelle partie pouvait demander un contrôle judiciaire ou demander aux tribunaux d'examiner cela, mais la décision était en vigueur. Traditionnellement, les décisions sont en vigueur pendant tout contrôle judiciaire. La partie contrevenante pourrait demander une injonction pour suspendre la décision du CRTC en attendant le résultat du contrôle de la Cour d'appel fédérale. Le régime prévoit déjà qu'une personne qui s'estime lésée peut demander la suspension de l'effet de la décision du CRTC en attendant l'issue d'un appel interjeté à la Cour d'appel fédérale. Encore une fois, c'est une question de moment.
     Nous sommes une organisation nord-américaine, et aux États-Unis, nous avons entrepris de manifester nos préoccupations au sujet de la neutralité du Net auprès de l'administration. Nous consacrons énormément de ressources à cette lutte. Nous prenons cela très au sérieux. Je sais que chaque fois qu'on parle de bloquer quoi que ce soit, mes propres membres, particulièrement les jeunes, deviennent très nerveux et préoccupés.
     Encore là, je regarde ailleurs... Et j'en profite pour vous dire que je me suis trompé. Ce ne sont pas 30 pays, mais bien 40 pays qui ont adopté des mesures législatives semblables. Il arrive que le processus comporte au début un volet judiciaire, mais la méthodologie est semblable. Il est possible de toute façon de demander la suspension d'une décision pendant le contrôle réalisé par la Cour d'appel.
    Qu'avez-vous fait aux États-Unis récemment, alors? Les préoccupations au sujet de la neutralité du Net demeurent, il me semble. Vous avez dit que vous consacriez à cela beaucoup de ressources. Quelles sont-elles?
    L'industrie dans son entier faisait des pressions, et je ne sais pas si c'est le Sénat ou le Congrès, mais ils n'ont pas eu les votes nécessaires pour adopter les dispositions que l'administration actuelle souhaitait.
    Je suis heureux d'entendre que vous appuyez la neutralité du Net, car je sais que cela est une source de préoccupation importante dans le milieu.
    Pendant ma dernière minute, je veux rapidement que nous discutions des boîtes télé Kodi. Vous avez soulevé cela au début. D'où viennent-elles? Si on les ferme, est-ce qu'elles resurgissent? Est-ce que ce sont des parties de l'extérieur du Canada qui les mettent en place? Est-ce qu'elles se vendent sur le marché noir? Vous comprenez, je l'espère, que je ne sais pas grand-chose de ces boîtes, et c'est probablement une bonne chose, aux yeux des témoins. Pouvez-vous nous en dire un peu plus?
    Nous allons vous fournir plus d'information. Nous allons présenter un énoncé plus complet au Comité, avec nos mémoires.
    Cependant, le problème avec tout cela, c'est que c'est devenu si flagrant que la clandestinité n'est même plus requise. Personne ne prend au sérieux les questions d'application de la loi, parce que c'est tellement flagrant. C'est le vrai problème. C'est l'indifférence devant cela. Pour certains, ce n'est pas un bien matériel; ce n'est pas comme voler un paquet de cigarettes ou une voiture. C'est la notion de propriété intellectuelle.
    Notre industrie a essuyé des critiques; les gens disaient qu'il n'y avait aucun autre endroit pour obtenir cela, et que l'industrie avait été lente à suivre le mouvement et à offrir quelque chose comme Netflix, CraveTV et tous les autres qui n'étaient pas là et qui n'étaient pas trop chers. On s'en est occupé. C'est réglé. Quelle est la raison, maintenant, si ce n'est que vous voulez seulement avoir le produit sans le payer?
    Merci beaucoup.
    Monsieur Sheehan, vous avez cinq minutes.
    Je vais poser ma question à Tim. Quand aurons-nous la prochaine saison de Lost in Space? J'ai regardé tous les épisodes très rapidement.
    Des voix: Ha, ha!

  (1630)  

    La saison 2 a été commandée il y a deux semaines. J'étais dans le bureau de Netflix quand cela s'est fait. C'est un endroit fou. C'est si occupé. Trois des quatre murs étaient couverts d'affiches de la série The Crown, et nous avions un petit truc en carton pour Lost in Space, dans le coin. J'espère que cela va changer.
    D'accord. Ce sera bientôt, donc?
    Le tournage est en cours à Vancouver.
    C'était les 20 secondes que vous me deviez...
    Le tournage est en cours à Vancouver, avec une fantastique équipe de Vancouver.
    C'est formidable.
    Il faudra que nous allions visiter le plateau, simplement pour la question des droits d'auteur.
    Pour la question des droits d'auteur — bien sûr.
    Merci beaucoup. Cela m'amène à ma prochaine question. J'essaie de comprendre comment Netflix rétribue l'artiste, par comparaison avec le processus traditionnel. Est-ce semblable? J'ai vu que Netflix prévoit maintenant aux environs de 8 milliards de dollars en dépenses pour les années à venir. C'était environ 6 milliards de dollars l'année passée, ou l'année précédente, alors il est évident que cela augmente. Pouvez-vous nous expliquer s'il y a une différence dans le mode de rémunération?
    Netflix exploite trois domaines d'activité, en fait, deux. D'abord, l'entreprise agit comme rediffuseur d'oeuvres existantes. Elle conclut des ententes avec les propriétaires des droits de films et séries.
    Concernant les oeuvres originales, comme vous l'avez souligné, l'entreprise prévoit d'investir 8 milliards de dollars par année à l'échelle mondiale, ce qui est presque le même... Je dirais que c'est exactement le même processus contractuel utilisé actuellement dans l'espace linéaire où l'entreprise embauche un producteur qui retient les services de gens comme moi et tous les autres, comme les scénaristes, ou elle agit à titre de studio et demeure propriétaire des oeuvres qu'elle produit.
    Bien entendu, il y a tout un débat au sein de ces organisations à savoir si elles souhaitent devenir des studios ou demeurer simplement des diffuseurs, un terme intéressant pour un service de VADA. Elles agissent exactement comme des diffuseurs en ce sens qu'elles concluent des contrats pour obtenir les oeuvres produites.
    La compensation qu'elles reçoivent en vertu des lois sur les droits d'auteur au Canada est la même.
    Autrement dit, la rémunération que je touche?
    Oui.
    Nous avons des conventions collectives. Les choses sont constamment redéfinies, mais le format est presque identique à ce que l'on retrouve dans l'espace linéaire.
    D'accord.
    Je vous remercie pour cette réponse, car les choses ont changé. Auparavant, les pirates se rendaient dans les salles de cinéma avec leurs longs manteaux, tentaient de stabiliser leurs caméras et téléchargeaient leurs enregistrements dans Internet, et...
    J'aimerais ajouter une chose. Ce contrat inclut une clause pour l'achat des droits moraux présumés de l'artiste par rapport à son oeuvre. Cette reconnaissance est incluse dans le contrat, à la fois pour l'espace linéaire que pour l'espace numérique, soit que nous sommes en réalité les propriétaires originaux du matériel audiovisuel.
    C'est intéressant. Cela m'amène à parler de la différence. Internet est à la fois une calamité et une bénédiction pour l'économie créative. Essentiellement, là où les choses ont changé, c'est que les pirates sont présents dans Internet, mais l'industrie de la création l'est également. J'essaie simplement de faire une comparaison entre Netflix et Spotify. Des témoins nous ont dit être insatisfaits de la rémunération offerte par Spotify. C'est ce que nous avons entendu récemment. J'essaie simplement de faire ressortir cette information.
    Concernant Internet et les pirates qui utilisent ce médium — John, peut-être que c'est ce dont vous parliez —, y a-t-il un pays ou une région en particulier qui est bien connu pour le piratage?
    Le Canada.
    Le Canada figure en tête de liste?
    À l'époque où le piratage au moyen d'un camescope...
    L'utilisation d'un camescope, c'est ce que faisait le type dans la salle de cinéma...
    Oui, le camescope dans les salles de cinéma. Montréal était l'un des plus grands centres pour ce genre de piratage.
    J'en avais déjà entendu parler, mais est-ce encore le cas?
    Non. Ce genre de piratage a beaucoup diminué. Il y avait beaucoup de problèmes de qualité, notamment.
    C'était dans une province en particulier. Je ne m'embarquerai pas dans ce sujet, mais c'était... De nos jours, d'où viennent les nouveaux pirates, pas ceux qui vont dans des salles de cinéma, mais ceux qui arrivent à pirater un système pour en saisir le contenu?
    D'où viennent ces infiltrations...
    M. Terry Sheehan: Oui.
    M. John Lewis: ... non, mais comme l'a souligné David, l'une des raisons pour lesquelles nous avons FairPlay, c'est parce qu'il n'y a plus de frontières. Tout est numérique. Les pirates peuvent aller n'importe où, venir de n'importe où et diffuser n'importe où. En ce qui a trait à l'acquisition du matériel piraté, je n'ai aucune statistique quant aux endroits où il se fait le plus d'achats.
    D'accord.
    L'ordonnance de cessation et d'abandon ne fonctionne plus, puisque les gens ne font que l'ignorer. Elle n'a aucun mordant.
    Il n'y a aucune conséquence.
    D'accord. Il n'y a aucune conséquence.
    Ma dernière question — il ne me reste que quelques secondes — s'adresse aux représentantes d'Artisti. Vous dites que votre société a été créée en 1997. J'ai vu qu'une recommandation formulée en 1997 proposait de changer la règle du premier 1,25 milliard de dollars de recettes publicitaires annuelles. Le chiffre de 1,25 milliard de dollars était-il celui avancé en 1997? Est-ce encore le même chiffre aujourd'hui?

  (1635)  

    Oui.
    Est-ce la raison pour laquelle votre société a été créée?

[Français]

    En fait, Artisti a été formée en 1997, à la suite des modifications qui avaient été apportées à la Loi afin d'introduire les droits de la rémunération équitable et le droit à la rémunération pour la copie privée. À ce moment, le syndicat qu'est l'Union des artistes avait formé sa propre société de gestion collective pour être en mesure d'offrir aux artistes-interprètes du secteur de la musique la possibilité de percevoir les redevances introduites en 1997, soient celles de la rémunération équitable et celles de la copie privée.
    Au sujet de l'exemption sur la première tranche de 1,25 million de dollars, je dois dire qu'à l'époque, les radiodiffuseurs étaient plutôt mécontents de savoir qu'ils allaient désormais devoir verser des redevances liées à la rémunération équitable. Cette exemption a probablement été introduite à la demande des radiodiffuseurs.
    Toutefois, après plusieurs années, on constate que la radio, quoi qu'on en dise, est une industrie qui continue de fonctionner et qui génère des revenus très importants. C'est la raison pour laquelle nous disons que cette exemption n'a plus sa raison d'être dans la Loi.
    Merci beaucoup.

[Traduction]

    Monsieur Lloyd, vous avez la parole pour cinq minutes.
    Pardonnez-moi, je ne me sens pas très bien, mais je vais tenter de poser mes questions.
    Monsieur Lewis, votre commentaire a piqué ma curiosité. La solution que vous proposez, et ce qu'a demandé FairePlay Canada, c'est de bloquer pour les Canadiens l'accès à ces sites Web. Je sais qu'il existe une technologie qui permet de bloquer des adresses IP et les RPV et de savoir si le signal vient des États-Unis, par exemple. Je connais plusieurs personnes qui reçoivent le signal américain de Netflix au Canada.
    Auriez-vous un commentaire à formuler à ce sujet? Y a-t-il une façon d'empêcher ce contournement qui viendrait affaiblir votre commentaire?
    La technologie ne m'est pas familière. Je sais qu'elle existe, mais j'ignore à quel point il est facile de contourner le système grâce à cette technologie. Je ne le sais tout simplement pas.
    Ce qui m'inquiète, c'est qu'avec cette technologie, il serait très facile de prétendre d'être dans un pays étranger — quoique, je suis convaincu que certaines personnes se feraient prendre. Peut-être pourrait-on trouver d'autres renseignements à ce sujet. Nous allons faire des recherches.
    M. Sheehan m'a devancé au sujet des coupables. Vous dites que les Canadiens ont visité environ 1,88 milliard de sites Web.
    C'est exact.
    Vous avez déjà quelque peu répondu à la question, mais le contenu vient-il principalement d'autres pays ou est-ce du contenu canadien qui est piraté?
    La production canadienne Letterkenny est piratée. Certaines productions canadiennes sont...
    Je veux parler des pirates. Les sites Web qui pratiquent le piratage sont-ils canadiens?
    Si je ne m'abuse, à une certaine époque, Pirate Bay était établi au Canada. Il s'agissait d'un groupe très souple, très transitoire. Je crois que l'entreprise était établie à Vancouver. Outre cette entreprise, je l'ignore, mais Pirate Bay était l'un des joueurs les plus importants dans le milieu.
    On parle beaucoup de Netflix et on entend toujours dire que l'entreprise ne paie pas sa juste part. Je sais que le CRTC et un nouveau comité se pencheront sur la question. Il ne faut pas oublier qu'outre Warner Bros., Netflix est probablement le plus important producteur de contenu au Canada. Je sais qu'on l'oublie parfois lorsqu'on se demande si l'entreprise contribue à l'industrie ou si elle apporte une valeur ajoutée, notamment. L'entreprise dirigera la plus importante production à Montréal cette année. J'aimerais simplement que l'on reconnaisse parfois qu'il s'agit d'un contributeur important dans l'industrie.
    Merci. J'apprécie votre commentaire.
    Ma prochaine question s'adresse à Mmes Morin et Prégent.
    Vous dites que les exceptions sont problématiques. Pourriez-vous nous dire, selon vous, quelles exceptions sont les plus problématiques?

[Français]

    Nous pensons à deux exceptions qui ont été introduites dans la Loi en 2012 et qui compliquent beaucoup la situation pour ce qui est des choix des consommateurs.
    En 1997, un régime de la copie privée a été adopté pour permettre aux consommateurs de reproduire de la musique dans l'intimité de leur foyer. Cela se faisait déjà de façon courante. Tous les gens ont probablement déjà fait ou possédé un enregistrement de diverses chansons qu'ils écoutaient dans leur voiture en se rendant à leur chalet ou ailleurs. En 1997, le gouvernement a déterminé qu'il serait désormais permis aux gens de faire de telles reproductions pour leur usage personnel, mais qu'une compensation serait versée aux créateurs pour tous les supports audio vierges vendus.
    Malheureusement, la cour a rendu une décision selon laquelle les supports audio vierges n'incluaient pas les appareils audio numériques. C'est pourquoi cette redevance s'applique maintenant uniquement aux CD vierges, un support qui est de moins en moins utilisé, il faut bien le dire.
    En 2012, on a incorporé dans la Loi sur le droit d'auteur une exception en vertu de laquelle il devenait possible de faire des copies de musique sur des appareils qui n'étaient pas déjà couverts par le régime de la copie privée. Autrement dit, il est devenu légal de faire des copies sur son iPod, s'il y en a encore, ou sur son iPhone. Cependant, plutôt que de prévoir, comme cela avait été fait de façon assez judicieuse en 1997, une compensation pour les créateurs en contrepartie des copies faites de leur travail, on n'a prévu aucune compensation en 2012. C'est malheureux.
    On a également introduit dans la Loi une exception pour les cas où les gens copient une émission afin de pouvoir la regarder en différé. Encore là, malheureusement, aucune compensation n'a été prévue dans la Loi en contrepartie de l'utilisation du travail des créateurs.
    Il y avait également les reproductions éphémères, qui étaient effectuées par les radiodiffuseurs afin de faciliter leurs activités de radiodiffusion. Comme je l'ai expliqué...

  (1640)  

[Traduction]

    Pardonnez-moi de vous interrompre, mais la technologie qui permet d'enregistrer une émission et de la regarder plus tard m'est familière. Est-ce que cette technologie est problématique ou est-ce que les diffuseurs sont compensés?

[Français]

    Quand les gens faisaient des reproductions au moyen de leur magnétophone, par exemple, il n'y avait pas de régime de la copie privée. De toute façon, il n'y en a pas pour l'audiovisuel. Ce n'est pas inclus dans notre loi. En revanche, cela se fait dans d'autres pays, notamment en France, où des redevances liées à la copie privée sont versées lorsque des oeuvres cinématographiques sont reproduites. Nous n'avons pas cela au Canada.

[Traduction]

    Mais, Bell et Rogers, par exemple, offrent leurs propres enregistreurs numériques, mais, selon vous, ce n'est pas un problème. Le problème, ce sont ceux qui utilisent leur propre enregistreur à la maison.

[Français]

    En ce qui concerne cet aspect précis, si Bell ou d'autres compagnies prévoient des moyens pour faire des enregistrements, l'accès au service prévoit peut-être des frais pour compenser cela, à même les frais d'abonnement des gens. Je ne sais pas ce qui se fait dans ce secteur. Comme je l'ai dit, nous ne gérons malheureusement pas les droits associés à l'audiovisuel, car il n'y en a pas pour l'instant.

[Traduction]

    Merci.
    Quelles seront les conséquences pour vous si le Canada ratifie le traité de Beijing?

[Français]

    Parlez-vous précisément d'Artisti, la société de gestion collective, ou des artistes-interprètes en général?

[Traduction]

    Vous pouvez peindre une image aussi générale que vous le voulez.

[Français]

    Déjà, à la base, cela va leur donner un droit moral sur leurs prestations. C'est déjà très important. Il ne sera plus possible d'associer des prestations audiovisuelles à une cause ou à un produit sans d'abord en demander l'autorisation à l'artiste. On ne pourra pas déformer ses prestations de façon à les dénaturer.
    Le droit moral viendra avec la mise en vigueur du Traité de Beijing sur les interprétations et exécutions audiovisuelles, dans la mesure où le Canada l'aura ratifié. Cela va accorder tous les droits d'auteur aux artistes-interprètes. À partir du moment où l'on a tous les droits d'auteur, on peut continuer à négocier dans le cadre des ententes contractuelles.
    Nous parlons beaucoup du milieu de la musique. Je suis présidente de l'Union des artistes. Au Québec, nous avons réussi à compenser quelques formes de droits grâce à nos ententes collectives. À l'Union des artistes, il y a 55 ententes collectives dans tous les secteurs. Cela touche évidemment la musique, mais aussi les animateurs, les chanteurs et les danseurs. Au moyen de nos ententes collectives, nous avons su nous protéger. Le milieu de la musique est exceptionnel. Je dirais que ce milieu est l'exemple à ne pas suivre, en fait.
    Au fil du temps, au Québec, nous avons su nous protéger un peu, grâce à la loi sur le statut de l’artiste. Nous appelons cela des droits de suite. En fait, nous sommes payés pour la journée de travail, un peu comme les plombiers. Pour le reste, c'est un pourcentage du cachet négocié à la base. Par exemple, on établit que les droits de suite équivaudront à 30, 40, 50, voire 80 % du cachet négocié. Nous sommes donc dans un autre système, qui protège à peu près les artistes tant et aussi longtemps que nous restons dans ce cadre.
    Évidemment, le milieu ou le marché tend à changer complètement la méthode de rémunération des artistes, si bien qu'on demande de plus en plus, au moyen des médias numériques, par exemple, ce que l'on appelle des paiements forfaitaires. Vous comprenez ce que je veux dire? Cela est complètement différent.

  (1645)  

[Traduction]

    Monsieur Jowhari, vous avez la parole pour cinq minutes.
    Cinq minutes, d'accord. Merci, monsieur le président.
    Merci aux témoins d'avoir accepté notre invitation.
    Si vous me le permettez, j'aimerais aller dans une direction légèrement différente.
    Nous avons passé beaucoup de temps à parler de piratage, mais j'aimerais profiter de l'occasion pour parler des éléments perturbateurs qui ont été introduits dans les industries de la télé et du film, ainsi que des nouvelles technologies. Pourriez-vous nous dire, au cours des cinq dernières années, ce que vous avez remarqué de différent et quelles nouvelles technologies ont perturbé, nuit ou aider votre industrie?
    N'importe lequel d'entre vous peut me répondre.
    À titre de préambule, je tiens à reconnaître que les principaux services de VADA ont offert une plateforme sans pareil pour rémunérer les artistes. C'est incontestable et fantastique. Les contrats sont solides et la compensation est tout à fait juste. Dans bien des mesures, l'augmentation de la popularité des VADA nous a soulagés temporairement de l'énorme problème des autres services qui font le commerce d'oeuvres volées.
    Il est très important de reconnaître qu'en tant que mesure temporaire pour cette génération, les services de VADA, comme Netflix et Crave, doivent être félicités pour avoir créé un mécanisme qui permet aux artistes d'être rémunérés pour leur travail. Ces contrats sont d'excellents modèles sur lesquels la loi devrait s'appuyer pour protéger leurs droits de propriété sur leurs oeuvres avant que celles-ci ne soient exploitées. C'est le commentaire que je voulais d'abord formuler.
    Concernant les perturbations, je vais laisser Dave amorcer cette belle discussion. Il s'agit d'un sujet important.
    En réalité, la question est de savoir par où commencer. Nous vivons à une époque où il y a une abondance de choix et de diversité en matière de contenu. Il n'y a jamais eu de meilleure époque pour les téléspectateurs; il y a tellement de choix. Cela a entraîné beaucoup d'investissement dans la création de contenu. À bien des égards, il s'agit d'un excellent remède pour l'industrie, car il y a beaucoup d'activités.
    Le Canada en a profité. Nos membres travaillent à des productions étrangères — nous en avons mentionné quelques-unes, Lost in Space, Star Trek et The Shape of Water, notamment —, mais aussi à des productions canadiennes.
    Les activités de production ont connu un véritable boom. C'est une bonne chose, mais de l'autre côté, il y a beaucoup plus de contenu qui entre au pays. C'est positif, mais cela a entraîné une augmentation de la concurrence. Par exemple, nous voyons les avantages des efforts qu'a déployés le gouvernement. Le rapport et les recommandations du CRTC pour être compétitifs à l'échelle internationale le démontrent et pour bâtir sur ces forces— un grand bassin de talent, une excellente infrastructure, une capacité financière — et avoir l'expérience nécessaire pour être compétitif sur la scène internationale, nous devons continuer de jouir d'un système solide qui permet de renforcer le contenu canadien.
    Concernant le système solide, selon vous — et n'importe lequel d'entre vous peut intervenir —, la Loi sur les droits d'auteur dans sa forme actuelle appuie-t-elle ou protège-t-elle les droits des producteurs de films ou doit-elle être modifiée ou renforcée? Fonctionne-t-elle dans sa forme actuelle?
    Je vais laisser la chance aux autres d'intervenir, car il s'agit d'une excellente question.
    Je parlerai d'abord des raisons pour lesquelles nous sommes ici aujourd'hui. La façon dont la loi définit le terme « auteur » est ambiguë, en ce sens qu'elle ne précise pas qui sont les auteurs.
    À mon avis, nous avons bien expliqué notre position, les scénaristes et directeurs sont des auteurs. La raison pour laquelle je le souligne, c'est le simple fait de clarifier cette question permettrait de renforcer la loi. D'autres vous l'ont probablement déjà dit, mais bon nombre des choses que nous faisons — la renonciation de nos droits moraux et l'attribution de droits d'exploitation aux producteurs et distributeurs, notamment — nous encouragent à faire en sorte que le contenu créé par nos membres est totalement exploité, pour des raisons bien évidentes. C'est ce que nous voulons pour des raisons financières. Je crois que c'est positif.
    Un changement modeste, comme renforcer cet aspect de la Loi sur le droit d'auteur, permettrait d'apporter une certaine clarté. Quelles seraient les conséquences? Tim et d'autres ont parlé des investissements faits par de nouveaux intervenants dans le domaine de la VADA. Si vous demandez à Crave, Netflix et autres ce qu'elles font, elles vous diront — dans leur propre langage — qu'elles produisent des émissions de télé. Lorsque nos membres se retrouvent à Vancouver dans un studio d'enregistrement, peu importe l'émission...
    Plus il y aura de perturbation sur le marché et de nouveaux modèles d'affaires, plus il sera nécessaire d'avoir ces conventions collectives. Madame Prégent a avancé un excellent argument et c'est également l'expérience qu'a vécue la GCR. Les conventions collectives sont le meilleur moyen de codifier ces ensembles de droits et cette transaction. Mais, le fait de renforcer la Loi sur le droit d'auteur nous donnerait les outils nécessaires pour nous assurer que lorsque de nouvelles plateformes sont créées grâce à de nouvelles technologies et de nouveaux modèles — je suis désolé, je prends beaucoup de temps, mais j'ai presque terminé —, il y ait une conversation sur les droits et la rémunération équitable entre les auteurs, scénaristes et directeurs et ceux qui commandent et financent le contenu et qui organisent la conception des projets.

  (1650)  

    Il ne me reste plus qu'environ une minute, mais pourriez-vous nous faire parvenir une présentation écrite sur la question du droit d'auteur, surtout en ce qui a trait à la définition de la paternité d'une oeuvre? Comment pourrions-nous modifier ou renforcer la loi de façon à accorder plus de protection ou à faciliter l'utilisation de nouvelles technologies?
    Merci.
    Monsieur Stetski, vous avez la parole pour deux minutes.
    Nous en sommes à la période des questions brèves.
    Pensez à l'organisme ou au ministère qui a la plus grande influence ou le plus grand contrôle sur vos vies actuellement. Quelle est la principale chose qu'il pourrait faire dès demain pour aider les artistes à connaître plus de succès?
    Nous pouvons y aller rapidement à tour de rôle.
    L'argent. Le débat sur les productions audiovisuels tourne autour de la génération de fonds nécessaires dans une petite économie pour créer des programmations concurrentielles et qui suscitent de l'intérêt au Canada et ailleurs.
    Donc, le financement.
    Ensuite, nous devons comprendre qu'en tant que pays, nous avons l'opportunité et le mandat de créer des oeuvres qui nous ressemblent. Ces oeuvres sont souvent perdues dans un marché international dominé par de grands joueurs. Notre ministère et notre gouvernement ont l'occasion de faire en sorte que les voix canadiennes continuent d'être entendues.
    Je crois qu'avec ce que nous avons vu récemment, une orientation se dessine pour mettre en place un système cohérent où tous les participants peuvent contribuer, dans le sens plus large du mot, que ce soit en investissant dans la santé de l'industrie ou en faisant la promotion de l'industrie, selon les besoins. Cela inclut les intervenants situés à l'extérieur du Canada qui apportent leur contenu au pays et ceux qui se trouvent déjà au Canada, à la fois dans le réseau de diffusion traditionnel et le monde de la diffusion en ligne.
    La semaine dernière, le CRTC a publié un rapport réfléchi dans lequel il parle de l'orientation à emprunter pour atteindre cet objectif et il précise que l'examen des lois sur la radiodiffusion et les télécommunications pourrait ouvrir cette voie.
    Je dirais simplement que les mesures prises par le CRTC dernièrement nous rendent optimistes: nous croyons qu'on pose les bonnes questions.
    Ce qui me préoccupe, c'est l'afflux. Notre industrie est en plein essor; elle est très effervescente. Une grande partie des budgets des productions étrangères n'est pas logique, à mon avis. Je travaille dans l'industrie. Je n'ai jamais vu autant d'argent investi dans les productions télévisuelles. Je suis certain qu'il y a un modèle opérationnel associé à cela et que des gens plus intelligents que moi peuvent le comprendre.
    Je ne sais tout simplement pas comment notre industrie nationale pourra suivre le rythme de tous ces longs-métrages tournés chaque semaine. Il faut les deux. Il faut des productions étrangères et il faut une industrie nationale, qui travaillent en harmonie. J'ai peur pour l'avenir. Il y a tellement d'argent qui tourne dans l'industrie à l'heure actuelle.

  (1655)  

    Monsieur le président, nous donnez-vous la permission de continuer?
    Allez-y.

[Français]

    Sur les plateformes qui distribuent des produits culturels, souvent, le produit d'appel ou ce qui fait que les gens vont voir un produit culturel, ce sont les artistes-interprètes. Ils veulent écouter une chanson d'Adele ou voir une vidéo de Pierre Lapointe, par exemple. Ils vont beaucoup voir le contenu des artistes-interprètes. Ces plateformes se trouvent à bénéficier du rayonnement des artistes-interprètes pour créer leur achalandage.
    Il serait bien que les créateurs puissent profiter des retombées économiques de cette utilisation du rayonnement des artistes-interprètes dont bénéficient les plateformes. On pourrait s'inspirer du modèle proposé par Fair Internet for Performers pour garantir un droit à rémunération pour l'utilisation des prestations qui se fait sur Internet.
    Merci beaucoup.

[Traduction]

    Nous avons le temps pour quelques brèves questions.
    Je crois que vous allez commencer, monsieur Sheehan.
    Merci beaucoup.
    Dave, vous avez parlé du film La Forme de l'eau. Un type de la région de Sault, Paul Austerberry, a gagné un Oscar pour ce film — et je le connais très bien —, et David Fremlin de l'équipe de conception l'a partagé avec lui. Ce sont mes très bons amis et je sais à quel point l'économie de la création est importante, surtout en ce qui a trait à la production cinématographique et télévisuelle.
    Dans votre exposé, vous avez parlé d'une période visant la vie de l'auteur plus 50 ans. Nous étudions aussi la façon d'aborder le droit d'auteur des Autochtones du Canada. L'un des enjeux auxquels nous sommes confrontés — et je fais une recherche là-dessus —, c'est que nous savons qu'il faut demander la permission, mais souvent la production, l'oeuvre n'appartient pas à une personne. Elle appartient à une Première Nation ou à un clan, ou à une partie de ces groupes.
    Savez-vous comment les modifications du droit d'auteur pourraient aider les artistes autochtones et comment nous pourrions accroître l'art créatif parmi les collectivités autochtones?
    Ce qu'on peut dire aux diverses collectivités, c'est que le droit d'auteur ne sera pas automatiquement associé au propriétaire, mais au créateur du contenu, celui à l'origine du travail. Il faudrait étudier la façon dont c'est interprété dans les diverses collectivités et en tenir compte.
    La première erreur que l'on a commise avec la définition ambiguë du droit d'auteur, c'est de dire qu'automatiquement, le titulaire du droit d'auteur en est le propriétaire, par opposition à la personne qui est partie de rien et qui a créé cette oeuvre que les gens peuvent voir. De plus, si l'on favorisait explicitement l'auteur, nous pourrions alors éviter d'arracher ces oeuvres aux gens qui les ont créées.
    Oui, ce serait bien.
    Je vais céder le reste de mon temps de parole à Lloyd. Nous allons partager notre temps de parole au cours de la réunion.
    Merci.
    Je n'ai qu'une question à vous poser; je passerai ensuite la parole à M. Badawey.
    Dans le modèle opérationnel, la création originale est associée à un coût et la distribution subséquente a elle aussi un coût. Comme nous ne payons pas les interprètes, est-ce que le droit d'auteur a une incidence sur les décisions d'affaires en vue de la création au Canada? Est-ce que les gens se disent qu'ils n'auront pas à payer les frais de distribution s'ils créent au Canada, alors... est-ce qu'il y a un lien à faire dans le modèle opérationnel?
    Vous me demandez quels sont les avantages pour un producteur étranger de créer ici?
    Oui, est-ce que la Loi sur le droit d'auteur a une incidence sur la décision de créer au Canada?
    Non, je crois que la seule chose que fait la Loi sur le droit d'auteur dans ce cadre-là, c'est de clarifier le marché des droits.
    D'accord. C'est excellent.
    Merci.
    Monsieur Badawey, allez-y.
    J'aimerais poser quelques questions au sujet du modèle opérationnel et, bien sûr, de la croissance durable.
    Monsieur Southam, vous avez dit que les avantages financiers pouvaient être comptabilisés au fil du temps et intégrés au modèle opérationnel général. Mais j'aimerais qu'on se centre sur la Loi sur le droit d'auteur et sur les mécanismes dont vous avez tous parlé plus tôt en ce qui a trait à la Loi. J'aimerais ressortir de l'étude avec quelque chose de tangible afin que nous puissions faire des recommandations à la fin du processus.
    Je vous ai entendu parler de mécanismes relatifs aux nouvelles technologies et de la façon dont nous pouvons détecter bon nombre des sites pirates. Sur ce deuxième point, est-ce qu'une organisation indépendante se charge de surveiller les sites pirates qui s'adonnent à ce type d'activités?
    Plutôt que d'avoir une entité distincte, est-ce qu'une sous-entité du CRTC suffirait?

  (1700)  

    En ce qui a trait à l'intelligence artificielle, oui. Nous cherchons un tiers objectif en qui l'industrie et la population du pays auraient confiance, qui examinerait la situation de façon juste et impartiale.
    Ce que j'entends, c'est qu'il faut que les lois soient appropriées et aussi assurer le premier droit en matière de droit d'auteur.
    C'est exactement ce que je dis: les auteurs et les réalisateurs sont les auteurs du contenu audiovisuel et donc les premiers titulaires du droit d'auteur.
    En ce qui a trait à ce que vous avez dit au sujet de l'exploitation, de la distribution et du financement dans votre question précédente, je dirais qu'ils vont de pair. Par exemple, même si la Loi n'est pas claire à ce sujet, nos réalisateurs se voient demander de renoncer aux droits moraux dans les contrats qu'ils signent lorsqu'ils créent du contenu. On reconnaît leurs droits moraux de manière implicite s'ils ne sont pas prévus dans la Loi. Ce que nous demandons, c'est d'établir clairement ce qui s'exerce déjà dans la pratique au sein de notre industrie.
    Le deuxième point, c'est qu'il n'y a personne qui crée du contenu sans vouloir qu'il soit vu. Personne n'est plus motivé de voir ce contenu être exploité et faire le tour de monde que les gens qui le créent. Ce qu'ils veulent, c'est une rémunération juste et équitable pour leur travail.
    Merci.
    Quelqu'un a dit que les redevances pour la diffusion en continu sont 11 fois plus importantes aux États-Unis qu'au Canada. Je ne me souviens plus qui a dit cela. Pourriez-vous nous en dire un peu plus?
    Je pourrais vous transmettre les notes rédigées par la Commission du droit d'auteur à la suite de sa décision relative au tarif 8 de Ré:Sonne. Elle fait mention du taux en vigueur aux États-Unis. Lorsqu'on fait le calcul par rapport à ce qui est payé au Canada, c'est 11 fois plus.

[Français]

    C'est 10,78 fois plus bas.

[Traduction]

    Cela étant dit, je présume que si le Comité prévoyait des recommandations à cet égard et que la situation changeait, vous seriez sur un pied d'égalité avec les marchés américains.

[Français]

    Il est fascinant de constater que, d'un côté de la frontière, une écoute en diffusion continue rapporte très peu d'argent, comparativement à ce qu'elle rapporte à 1 kilomètre de là, de l'autre côté de la frontière. De l'autre côté de la frontière, cela rapporte 11 fois plus d'argent. C'est quand même fascinant que, dans deux pays voisins ayant une forte économie, il y ait une telle disparité dans la valeur d'une seule écoute en diffusion continue.

[Traduction]

    Y a-t-il autre chose que vous vouliez ajouter? C'est ce que j'ai retenu. J'ai peut-être oublié quelque chose. Y a-t-il des questions dont le Comité devrait tenir compte en vue d'aller de l'avant?
    Nous sommes tous tentés de penser que Internet est un milieu très différent en ce qui a trait à la gestion des droits et à la création. Je demanderais à tous ceux qui se penchent sur la question de songer à ce que cela signifie pour un auteur ou un réalisateur qui est seul dans sa cuisine ou dans son appartement et qui entre dans ce monde, un endroit où l'on fera le travail gratuitement simplement parce qu'il y a un nouvel ensemble de fils. C'est un résumé plutôt réducteur de l'Internet, mais c'est l'un des grands défis associés à la création.
    Merci.
    Très rapidement, s'il vous plaît.
    Monsieur Southam, ce que vous proposez n'existe pas aux États-Unis pour le moment: la reconnaissance des droits du réalisateur et du scénariste. N'est-ce pas? Est-ce que c'est le cas en Europe?
    Non. Les lois des États-Unis et du Canada ne prévoient pas cela. Nous nous préoccupons des créateurs qui ne sont pas membres de notre syndicat, parce que nos contrats — ceux de la Guilde américaine des réalisateurs, de la Guilde américaine des auteurs, de la Guilde canadienne des auteurs et de la Guilde canadienne des réalisateurs — prévoient la reconnaissance de la propriété intellectuelle et du droit moral associés à notre travail. C'est dans nos contrats. Ce n'est pas dans la loi, donc les gens qui ne travaillent pas dans ce cadre contractuel...

  (1705)  

    Les droits moraux au Canada, mais pas aux États-Unis.
    C'est exact.
    Je parle des États-Unis. Cela n'existe pas aux États-Unis...
    Non.
    ... mais en Europe, oui.
    Oui.
    Oui et si vous me le permettez, j'ajouterais que 1 300 membres de la Société canadienne de gestion des droits des réalisateurs ont obtenu une rétribution l'année dernière. Il y a seulement environ 800 membres actifs de la Guilde canadienne des réalisateurs. Nous ne couvrons pas tout le spectre des réalisateurs actifs du Canada, alors bon nombre d'entre eux ne profitent pas des avantages de la convention collective qui protège nos membres.
    Merci beaucoup.
    Sur ce, je tiens à remercier chaleureusement les témoins d'être ici et de nous transmettre ces renseignements. Nous avons beaucoup de pain sur la planche. Comme vous pouvez le constater, c'est un dossier assez complexe. Encore une fois, nous vous remercions de votre présence.
    J'aurais besoin de deux minutes avec le groupe. Je ne vais pas suspendre la séance, mais vous pouvez vous dire au revoir puis nous poursuivrons.

[Français]

    Merci beaucoup.

[Traduction]

    D'accord. Nous allons continuer. Merci beaucoup.
    La semaine dernière, la délégation ukrainienne a dit qu'elle voulait nous rencontrer. Nous avons dit qu'il était impossible de le faire en comité. Nous tentons d'organiser un dîner le mardi 12 juin. Je sais que quelques personnes ont déjà confirmé leur présence. Lloyd et moi y serons. Est-ce que quelqu'un voudrait prendre part à ce dîner? Nous organisons le tout.
    Ce sera à quel sujet?
    Les membres du Comité et la délégation ukrainienne se réuniront. Elle est ici pour quelques jours. La délégation comptera probablement le président du sous-comité du contrôle financier et des activités de l'État, un premier vice-président, le secrétaire du Groupe d'amitié parlementaire Canada-Ukraine et le président du sous-comité d'évaluation de l'incidence des projets de loi sur les budgets. Ce genre de choses. Nous organisons un dîner le mardi 12 juin, à midi.

  (1710)  

    Pouvez-vous me dire où il aura lieu, afin que je transmette l'information à Brian?
    Dans la pièce 356-S, du côté du Sénat. Malheureusement, il n'y avait pas de place au restaurant et aucune salle de la Chambre des communes n'était libre.
    La rencontre durera environ une heure. Nous allons dîner. Nous devons savoir combien de députés seront présents.
    Comme le laisse entendre mon nom, Stetski, je suis tout à fait en faveur d'une telle rencontre.
    D'accord. Allez-vous être présent?
    Eh bien, Brian sera là, je crois.
    Ne le dites pas à Brian.
    Est-ce que je peux voir combien de personnes seront présentes?
    Je pourrais passer plus tard, peut-être, mais je ne pourrai pas être là pendant toute la rencontre.
    Je pourrais passer peut-être.
    C'est un dîner culturel.
    Donc, nous avons trois personnes, et on verra.
    C'est bon? Nous n'avons pas besoin de faire cela, n'est-ce pas?
    Il nous faut une motion, sinon je ne pourrai pas payer le repas.
    Le repas sera payé.
    Par les Ukrainiens?
    Par les Ukrainiens? Non, nous allons payer le repas.
    Nous allons payer les pierogis.
    C'est une bonne idée de se parler. Nous l'avons fait avant et c'est agréable d'avoir le temps de parler de nos cohortes, surtout avec les Ukrainiens...
    Je propose que le greffier du Comité prenne les mesures nécessaires pour organiser un dîner avec les membres du Comité de l'industrie et la délégation ukrainienne le mardi 12 juin à midi, et que le coût de cette activité soit couvert par le budget du Comité.
    J'appuie la motion.
    Êtes-vous tous en faveur de cette motion?
    (La motion est adoptée.)
    Le président: Excellent. J'ai besoin d'une confirmation, alors dites-moi si vous serez présents. Sinon, alors nous trouverons d'autres personnes intéressées à y prendre part.
    Merci beaucoup.
    La séance est levée.
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