Passer au contenu
Début du contenu

INDU Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.

Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.

Publication du jour précédent Publication du jour prochain
Passer à la navigation dans le document Passer au contenu du document






Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de l'industrie, des sciences et de la technologie


NUMÉRO 131 
l
1re SESSION 
l
42e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le lundi 15 octobre 2018

[Enregistrement électronique]

  (1530)  

[Traduction]

    Bonjour à tous, et bienvenue à une autre excitante journée d'examen prévu par la loi de la Loi sur le droit d'auteur. Nous accueillons aujourd'hui Kate Cornell, directrice générale de l'Assemblée canadienne de la danse, Davis Yazbeck, administrateur de Droits d'auteurs Arts visuels, et Robin Sokoloski, directrice générale de la Playwrights Guild of Canada.

[Français]

    Nous recevons également Mme Elisabeth Schlittler, de la Société des auteurs et compositeurs dramatiques. Elle est la

[Traduction]

déléguée générale pour le Canada, ainsi que Patrick Lowe, scénariste et membre du Comité des auteurs.
    Je veux confirmer avec nos vice-présidents que nous garderons une demi-heure vers la fin de la réunion pour la motion de M. Albas.
    Nous allons commencer par Kate Cornell.
    Je vous remercie infiniment de me donner l'occasion de vous parler aujourd'hui au nom de l'Assemblée canadienne de la danse.
    Je représente l'Assemblée canadienne de la danse, une organisation nationale de service qui s'est associée à 10 organisations provinciales de danse afin de servir le secteur de la danse, lequel englobe des centaines de compagnies, d'écoles et de danseurs particuliers à l'échelle du pays.
    En tant que membre de Pleins feux sur les créateurs, je suis ici pour ajouter ma voix à celles des personnes qui réclament une rémunération équitable pour les artistes canadiens, peu importe la discipline artistique. À la fin de ma déclaration, je vous présenterai deux recommandations.
    Le droit d'auteur est l'un des principaux piliers de l'économie créative, et c'est un outil stratégique essentiel pour le gouvernement fédéral. Il existe pour garantir les droits de propriété intellectuelle des producteurs et des créateurs tout en permettant aux Canadiens d'avoir un accès facile au contenu sur lequel ils comptent pour leur travail, leur divertissement et, surtout, leur éducation.
    La ministre Joly a déclaré que le Canada a besoin d'un cadre de protection du droit d'auteur qui fonctionne bien dans notre univers numérique en rapide croissance et qui donne aux créateurs des possibilités d'obtenir une juste rétribution pour leur travail.
    La chorégraphie est mentionnée une fois dans la Loi sur le droit d'auteur, dans les définitions. Honnêtement, je suis très contente qu'elle soit même mentionnée. Cette définition d'une oeuvre chorégraphique est dépassée, cependant. Elle pourrait, par exemple, mentionner la chorégraphie pour la scène, la chorégraphie pour des oeuvres in situ et la chorégraphie sur les plateformes numériques.
    Il y a notamment eu des débats dans les médias concernant l'utilisation de la danse dans les jeux vidéo comme Fortnite. Il est donc impératif de veiller à ce que les définitions de la Loi sur le droit d'auteur soient pertinentes et à jour. Après avoir discuté avec plusieurs collègues du secteur de la danse, je sais que le droit d'auteur des oeuvres chorégraphiques et les redevances liées aux performances subséquentes sont réglés dans le cadre d'un contrat. À ma connaissance, la Commission du droit d'auteur n'a été saisie d'aucun dossier touchant des oeuvres chorégraphiques. Malheureusement, le secteur canadien de la danse n'est pas assez important en ce moment pour qu'il y ait de multiples performances et pour que des oeuvres chorégraphiques soient montées de nouveau. Les redevances sont par conséquent rares.
    Fait remarquable, il y a eu des discussions à l'échelle mondiale sur la question de savoir s'il est même possible de soumettre un mouvement au droit d'auteur. En 2011, la grande vedette Beyoncé a été accusée d'avoir fait des emprunts libéralement à la chorégraphie belge Anne Teresa De Keersmaeker pour son vidéoclip Countdown. Dans le Guardian, l'écrivain Luke Jennings a affirmé qu'il serait difficile de démontrer qu'il s'agit de plagiat, puisque les oeuvres d'art font référence à d'autres oeuvres d'art.
    Je ne suis pas ici pour vous parler des redevances liées à la chorégraphie, mais plutôt, principalement, de l'utilisation de la musique en danse.
    La danse s'exécute normalement, en spectacle, avec de la musique en direct ou enregistrée. La musique en direct est très coûteuse, et je dirais que la majorité des membres de mon organisation utilise de la musique enregistrée. Les grosses compagnies de danse paient régulièrement des redevances pour la musique enregistrée et sont très conscientes de leurs obligations, mais les petites compagnies de danse ignorent souvent les règles et, par conséquent, ne se conforment pas.
    Nos collègues de Ré:Sonne, que vous avez entendus dans le cadre de votre étude, sont conscients du fardeau administratif que doivent assumer les petites compagnies pour se conformer, et ils sont prêts à travailler avec les organisations de service lié à la danse, comme l'Assemblée canadienne de la danse, à l'organisation de webinaires servant à éduquer nos membres. L'Assemblée canadienne de la danse travaille avec ses collègues provinciaux et Ré:Sonne à améliorer la compréhension et, ainsi, le degré de conformité.
    En juillet 2017, le gouvernement fédéral a annoncé son intention de réformer la Commission du droit d'auteur. L'Assemblée canadienne de la danse appuie pleinement l'examen et la réforme de la Commission du droit d'auteur. La Commission joue un rôle important pour ce qui est de veiller à ce que les créateurs et éditeurs soient rémunérés pour l'utilisation de leurs oeuvres quand il n'est pas possible d'établir les modalités de cette utilisation par la négociation. De plus, la Commission du droit d'auteur a l'obligation de consulter les secteurs touchés par les tarifs. C'est de la consultation que j'aimerais vous parler.
    En danse, la Commission du droit d'auteur administre les ententes entre les écoles de danse et Ré:Sonne pour l'utilisation de musique enregistrée pendant les cours de danse, et c'est le tarif 6.B qui s'applique. La Commission administre aussi les accords avec Ré:Sonne concernant l'utilisation de musique enregistrée lors de spectacles, et dans ce cas, c'est le tarif 5.K. Il y a aussi des accords avec la SOCAN, mais je veux parler de Ré:Sonne.
    Mes collègues des organisations de service provinciales qui travaillent directement avec les studios de danse de partout au Canada sont très préoccupés par le tarif 6.B, le « tarif convenu ». Le tarif a été négocié en mars 2014 entre le Conseil du secteur du conditionnement physique du Canada, GoodLife Fitness et Ré:Sonne.

  (1535)  

     Veuillez noter qu'il n'y a pas d'organisation de danse parmi les négociateurs, mais que le tarif s'applique à l'enseignement de la danse. Le tarif convenu, homologué par la Commission du droit d'auteur en mars 2015 est fixé par classe, alors que le tarif original était établi par lieu. Ce changement, combiné à une augmentation importante du taux de base, s'est soldé par un tarif convenu, considérablement plus élevé qu'avant pour les écoles de danse. Par exemple, le studio où ma fille de 4 ans suit ses cours payait 25 $ pour un permis en fonction du lieu. Maintenant, parce qu'il s'y donne 44 cours par semaine, l'école doit payer 1 100 $. Ce qui est frustrant de ces négociations, c'est que les organisations de danse n'étaient pas vraiment représentées à la table, lors de l'examen réalisé par la Commission du droit d'auteur.
    Soulignons de plus que le tarif convenu s'applique aux cours récréatifs, et non aux cours éducatifs. La majorité des écoles de danse du pays se concentrent sur les enfants d'âge scolaire, ce qui fait qu'éclaircir la définition pour bien faire la distinction entre un établissement d'enseignement et une école où l'on donne des cours récréatifs pourrait avoir une incidence importante sur les frais que les écoles de danse paient.
    Notons qu'en mars 2015, la Commission du droit d'auteur a supposé que le Conseil du secteur du conditionnement physique du Canada pouvait parler de cours de danse, alors qu'il y a bien sûr plusieurs organisations du domaine, des organisations de service lié à la danse, qui pouvaient parler de danse. En janvier 2018, quand le tarif 6.B a été réexaminé, un groupe de danse provincial a participé brièvement aux discussions, l'Association canadienne des professeurs de danse, mais il n'a pas pu se permettre de continuer à participer à toutes les discussions.
    Je reconnais pleinement que les actions de la Commission du droit d'auteur ne relèvent pas du Comité, mais je tiens à souligner ici que la danse n'a pas été représentée afin que ce soit connu du public.
    Au nom de l'Assemblée canadienne de la danse, je souhaite encourager le Comité à se concentrer sur la rémunération équitable des artistes, dans le cadre de son étude.
    En guise de conclusion, l'Assemblée canadienne de la danse recommande que le Comité permanent de l'industrie, des sciences et de la technologie modifie la Loi sur le droit d'auteur de deux façons: premièrement, en précisant la définition de la chorégraphie de sorte qu'elle soit le reflet de la profession de la danse en 2018, et deuxièmement, en réexaminant la définition des établissements d'enseignement pour tenir compte des instituts de formation non gouvernementaux comme les écoles de danse.
    Je vous remercie beaucoup de votre attention.
    Merci beaucoup.
    Nous passons maintenant à M. Yazbeck, de Droits d'auteur Arts visuels. Vous avez un maximum de sept minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Merci à vous et aux membres du Comité de me permettre de prendre la parole cet après-midi.
    Je suis avocat spécialisé en droit du travail et en droits de la personne, ici même à Ottawa, mais n'insistons pas trop là-dessus. J'ai beaucoup travaillé auprès des artistes en arts visuels depuis une dizaine d'années, et je suis récemment devenu membre du conseil d'administration de l'organisme Droits d'auteur Arts visuels que je représente ici aujourd'hui.
    Nous sommes une organisation sans but lucratif de gestion collective des droits d'auteur qui est dirigée par des artistes. Nous avons soumis un mémoire où nous formulons trois recommandations qui, à notre avis, vont influer directement et considérablement sur le gagne-pain des artistes en arts visuels au Canada. Je vais vous soumettre sans plus tarder ces trois recommandations avant d'être bien sûr à votre disposition pour répondre à toutes vos questions une fois que tous les exposés auront été présentés.
    Nos trois recommandations portent sur l'utilisation équitable, le droit d'exposition et le droit de suite de l'artiste.
    Je vais d'abord vous parler d'utilisation équitable. Les représentants d'Access Copyright et d'autres groupes d'auteurs et d'éditeurs vous ont déjà parlé cet été de l'ajout de l'éducation aux exceptions touchant l'utilisation équitable à la suite des modifications apportées à la loi en 2012. La loi ne définit cependant pas la portée de cette exception. Depuis lors, les établissements d'enseignement ont décidé d'établir leurs propres lignes directrices en matière d'utilisation équitable, ce qui est problématique pour les artistes des arts visuels. En outre, ces établissements ont cessé de se procurer des licences collectives auprès d'Access Copyright en invoquant l'exception relative à l'utilisation équitable. Bien que les paiements ponctuels aux artistes visuels soient modestes, ceux-ci y trouvent une source régulière de revenus. Il y a quelques années, un artiste pouvait payer un mois de loyer avec ses redevances annuelles. Ils ne reçoivent désormais que 50 $ par année en moyenne. Au cours des quatre dernières années, les redevances payées par Access Copyright aux artistes visuels ont chuté de 66 %, passant d'un montant nettement supérieur à 500 000 $ à un total inférieur à 200 000 $. Dans des endroits comme le Royaume-Uni, l'Australie et les pays scandinaves, des restrictions en matière d'utilisation équitable ont été inscrites dans la loi pour en arriver à un juste équilibre entre les droits des utilisateurs et ceux des créateurs, lorsque le gagne-pain des artistes n'est pas en jeu. Nous recommandons que l'on intègre un libellé similaire à notre loi de manière à ne pas interférer avec l'octroi de licences collectives. Vous trouverez de plus amples détails à ce sujet dans notre mémoire et je vous encourage également à consulter celui que vous a présenté Access Copyright durant l'été. Vous y aurez droit à une analyse détaillée de ces questions.
    Notre deuxième recommandation concerne le droit d'exposition et la date butoir de 1988. Comme vous le savez tous, la loi prévoit un droit d'exposition permettant aux artistes d'exiger un paiement pour l'exposition de leurs oeuvres à des fins autres que la vente ou la location. Or, les galeries d'art et les musées publics ne sont pas tenus de payer des droits aux artistes pour les oeuvres créées avant le 8 juin 1988, date d'entrée en vigueur de ce droit d'exposition. L'application de cette date butoir est discriminatoire à l'encontre des artistes âgés et de leurs héritiers. Certains musées choisissent de payer les artistes pour les oeuvres créées avant cette date, mais la plupart ne le font pas. En l'absence de droits légaux mieux affirmés, il n'est pas rare que les artistes plus âgés ne soient pas payés, alors que leurs jeunes homologues n'ont pas à composer avec ce problème. À nos yeux, il ne serait pas difficile d'établir que cette mesure discriminatoire contrevient à la Charte canadienne des droits et libertés. Nous recommandons par conséquent que l'on élimine la date butoir de 1988 et que le droit d'exposition soit étendu à toutes les oeuvres assujetties à un droit d'auteur et s'applique donc pendant toute la vie de l'artiste et jusqu'à 50 ans après sa mort.
    Notre dernière recommandation porte sur le droit de suite de l'artiste. Ce droit de suite ou de revente est une redevance qu'un artiste des arts visuels devrait toucher chaque fois que son oeuvre est revendue publiquement par une maison d'encan ou une galerie commerciale. Si un artiste vend ou donne une oeuvre qui est revendue par la suite, nous voudrions que lui-même ou sa succession reçoive un montant équivalent à 5 % du prix de vente. C'est une somme plutôt symbolique. À l'heure actuelle, les artistes canadiens sont payés uniquement au moment de la vente initiale de leur oeuvre. Cette redevance contribuerait grandement à améliorer la situation financière des artistes. Un auteur ou un compositeur continue à être payé tant et aussi longtemps que des gens achètent ses livres ou ses chansons. Les artistes des arts visuels devraient aussi être payés lorsque leurs oeuvres reviennent sur le marché et sont revendues, car ils en conservent la propriété intellectuelle. Le droit de suite n'est pas un nouveau phénomène. Il est appliqué dans plus de 90 pays du monde. L'Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI) s'efforce de rendre l'application de ce droit obligatoire à l'échelle internationale. Cette application est pour l'instant optionnelle pour les signataires de la Convention de Berne. L'an dernier, le CIAGP, un conseil représentant les collectifs de droits d'auteur en arts visuels sur la scène internationale, a adopté une motion exhortant le ministre Bains et la ministre Joly, alors qu'elle était encore ministre du Patrimoine canadien, à adopter le droit de suite de l'artiste et à appuyer la ratification d'un traité international à l'OMPI.

  (1540)  

    Nous vous exhortons à joindre les rangs d'une communauté internationale qui appuie les artistes en adoptant le droit de suite de l'artiste.
    Je dois noter qu'en 2011, votre comité a appuyé nos efforts en ce sens en nous encourageant à travailler à l'adoption d'un tel droit de suite, via un projet de loi d'initiative parlementaire. C'est ce que nous avons tenté de faire en 2013, mais l'initiative n'a pas abouti.
    Merci pour le temps que vous m'avez consacré. Je serai ravi d'essayer de répondre à toutes les questions que vous voudrez bien m'adresser.
    Merci beaucoup.
    Nous passons à la représentante de la Playwrights Guild of Canada, Mme Sokoloski.
    Merci de m'avoir invitée à prendre la parole devant vous.
    Je m'appelle Robin Sokoloski et je suis directrice générale de la Playwrights Guild of Canada, une organisation qui s'emploie depuis 46 ans à protéger et mettre en valeur le travail des auteurs dramatiques. Mes 10 années de travail au sein de notre organisation m'ont appris à quel point il pouvait être difficile de protéger le travail de nos créateurs artistiques tout en veillant à ce que leurs oeuvres soient accessibles.
    Je vous suis reconnaissante de bien vouloir consacrer le temps et l'attention nécessaires à l'examen des enjeux complexes liés au droit d'auteur, surtout dans le contexte d'un milieu en constante évolution.
    Je veux vous parler aujourd'hui des répercussions que peuvent avoir les dispositions de la Loi sur le droit d'auteur actuellement en vigueur sur le contenu artistique, et ce, du point de vue des membres de notre organisation, soit plus de 900 auteurs dramatiques du Canada. Comme le font si bien nos membres, je vais commencer par vous raconter une histoire.
    Il y a environ un an, un des membres les plus en vue de la Playwrights Guild of Canada, David Craig, a été invité à discuter de son travail devant une classe d'étudiants. David écrit des pièces de théâtre s'adressant à un public jeunesse, un genre théâtral qui, lorsqu'il est bien maîtrisé, peut permettre d'améliorer grandement les comportements des jeunes, notamment pour ce qui est de l'empathie et du respect d'autrui. Vous pouvez imaginer la consternation de David lorsqu'il s'est rendu compte en arrivant dans cette classe que chaque étudiant avait devant lui une copie de la version intégrale de sa pièce, sachant que celle-ci est publiée par un éditeur canadien, Playwrights Canada Press, et que notre organisation reçoit du financement gouvernemental pour en assurer l'accessibilité au plus grand nombre.
    Si je vous donne cet exemple aujourd'hui, c'est pour illustrer, aussi clairement que possible, les défaillances attribuables à l'ambiguïté inhérente à notre Loi sur le droit d'auteur, et plus particulièrement à l'incertitude qui règne quant au contexte de l'éducation.
    L'éducation n'a pas été définie lorsqu'on l'a ajoutée à titre d'objet d'utilisation équitable dans le cadre de la Loi sur la modernisation du droit d'auteur. Le milieu de l'éducation a ainsi adopté unilatéralement ses propres lignes directrices en la matière. Ces lignes directrices permettant la copie d'oeuvres ont été récemment jugées inéquitables, aussi bien dans leur énoncé que dans leur application, par la Cour fédérale du Canada. Reste quand même que le recours à la photocopie demeure bien présent dans le milieu de l'éducation. Je sais que vous êtes tous bien au fait de la situation, mais j'aimerais vous rappeler les conséquences pour les auteurs dramatiques canadiens. Depuis 2011, Playwrights Canada Press, l'éditeur de cet ouvrage, a vu les redevances versées par Access Copyright chuter de 86 %. Elles sont ainsi passées de 28 000 $ en 2012 à 4 000 $ en 2017. Cette source de revenus permet à l'entreprise de publier d'autres oeuvres canadiennes.
    Chacun de nos membres signale une dégringolade de ses revenus provenant des droits d'auteur. Cette réduction de l'ordre de 85 % sur une période de cinq ans se traduit par des milliers de dollars de revenus en moins. Ces exemples témoignent éloquemment des effets concrets de ces statistiques que l'on vous répète sans cesse, comme les 600 millions de pages de contenu protégé par le droit d'auteur qui sont photocopiées sans frais chaque année dans le milieu de l'éducation. Ce total ne tient pas compte du contenu rendu accessible via les licences d'utilisation des bibliothèques scolaires ou les licences d'accès libre. Pour ces 600 millions de pages dont on vous parle toujours, on a fonctionné un peu comme pour celles de cet ouvrage-ci.
    Nous devons tous faire de notre mieux pour sensibiliser les gens à la valeur des arts et de nos artistes canadiens. Nous octroyons des licences de droits de représentation pour amateurs aux écoles qui souhaitent monter les pièces de l'un de nos membres. Nous constatons qu'il est de plus en plus fréquent que nous ayons à rappeler à l'ordre des écoles qui ont négligé de demander l'autorisation avant de présenter une telle production. Dès que ce manquement est porté à leur attention, les écoles s'empressent de faire le nécessaire rétroactivement sans que cela ne pose aucune difficulté. Cela s'explique du fait que la Loi sur le droit d'auteur autorise la Playwrights Guild of Canada à prendre les mesures requises pour que ses membres soient rémunérés lorsque leurs oeuvres sont utilisées.
    Je tenais toutefois à vous exposer cette problématique, car il semble bien évident que les gens peuvent oublier facilement la question des droits d'auteur lorsqu'ils utilisent la propriété intellectuelle d'autrui. Il y a certaines actions à entreprendre pour créer un environnement florissant autant pour les artistes que pour les étudiants canadiens, et je me sens obligée d'y voir dans bon nombre de cas, à titre de directrice générale de notre organisation. J'aurais donc des recommandations à vous adresser — seulement deux, en fait —, en vue de favoriser l'émergence d'un contexte encore plus propice à la création et à l'apprentissage.
    Premièrement, nous estimons que l'on devrait rayer l'éducation parmi les fins d'utilisation équitable prévue dans la Loi sur le droit d'auteur. En y laissant cette catégorie qui prête à interprétation, on a favorisé l'utilisation inappropriée. Dans l'arrêt York, le juge de première instance a conclu qu'il avait été clairement établi que la pratique permettant de faire des photocopies sans frais en vertu de la politique du secteur de l'éducation s'était substituée à l'achat de livres. Malgré cette décision judiciaire, les comportements n'ont pas changé dans le milieu de l'éducation. Rien ne peut justifier que l'on traite ainsi les artistes canadiens comme de simples fournisseurs que l'on n'a pas à rémunérer. En rayant le terme « éducation », on évitera aux parties en cause de s'enliser dans des procédures judiciaires qui semblent désormais vouloir se multiplier.

  (1545)  

    Notre seconde recommandation serait que l'on revienne à un régime d'octroi de licence par le truchement d'organisations de gestion collective comme Access Copyright.
    Comme vous le savez sans doute, après les modifications apportées à la loi en 2012, le milieu de l'éducation dans l'ensemble du Canada, à l'exception du Québec, a renoncé aux licences collectives et cessé de payer les droits obligatoires. Pour dire les choses simplement, les oeuvres des membres de notre organisation nationale continuent à être utilisées sous licence par le milieu de l'éducation au Québec, contrairement à ce qui se passe dans le reste du Canada où elles sont accessibles sans licence.
    La solution pour offrir à peu de frais un accès facile aux oeuvres protégées par droit d'auteur tout en rémunérant adéquatement les artistes existe déjà sous la forme des collectifs comme Access Copyright. Vous pourriez aisément favoriser le recours à cette solution en harmonisant les dommages-intérêts préétablis à verser à ces collectifs.
    À l'heure actuelle, seules deux sociétés de gestion collective des droits d'auteur, la SOCAN et Ré:Sonne, peuvent exiger des dommages-intérêts préétablis atteignant entre 3 et 10 fois la valeur du droit non payé. Les autres sociétés comme Access Copyright, celle qui a été mise sur pied pour assurer le paiement des redevances à nos membres, ne peuvent pour l'instant réclamer que le montant du droit impayé.
    Un tel changement aurait un impact considérable. En plus de son effet dissuasif, il favoriserait les règlements hors cour et permettrait des gains d'efficience dans le système judiciaire en réduisant le nombre de ces poursuites interminables dont je parlais précédemment.
    C'est le mieux-être de la collectivité qui fait foi de l'efficacité d'une politique. Les nouvelles dissensions créées par les modifications apportées à la Loi sur le droit d'auteur en 2012 ne vont pas dans le sens d'une communauté où il fait bon travailler, vivre et apprendre. La mise en oeuvre des recommandations que je vous ai soumises aujourd'hui permettrait d'améliorer le sort des créateurs artistiques canadiens ainsi que des étudiants qui s'en inspirent.
    Je vous remercie.

  (1550)  

    Merci beaucoup.

[Français]

    Nous allons passer à la Société des auteurs et compositeurs dramatiques.
    Madame Schlittler, vous avez la parole pour sept minutes.
    Monsieur le président, mesdames et messieurs, nous vous remercions de nous avoir invités à participer à l'examen de la Loi sur le droit d'auteur.
    Je m'appelle Élisabeth Schlittler et je suis déléguée générale au Canada de la Société des auteurs et compositeurs dramatiques, ou SACD, et de la Société civile des auteurs multimédia. Cela va faire hurler, mais l'acronyme de la Société civile des auteurs multimédia est SCAM. Comme cela fait 30 ans que je dis « la SCAM » dans mon texte, je vais continuer à le dire. Je suis accompagnée par M. Patrick Lowe, scénariste et représentant du Comité des auteurs.
    La SACD et la SCAM ont des bureaux à Montréal depuis plus de 30 ans. Ces deux sociétés gèrent, au Canada et à l'international, les droits de leurs membres sur un vaste répertoire d'oeuvres dramatiques et documentaires, ce qui explique les deux sociétés. Elles ont été chargées par leurs auteurs membres de négocier, de percevoir et de répartir les redevances versées par les utilisateurs des oeuvres des répertoires audiovisuel, radiophonique et scénique. Ce sont deux sociétés de gestion collective au sens de la Loi sur le droit d'auteur.
    La SACD regroupe les auteurs d'oeuvres à caractère dramatique, soit des scénaristes, des réalisateurs et des réalisatrices. Je précise qu'il s'agit de directors en anglais, et non pas de producers. Nous représentons également des dramaturges, des chorégraphes, des compositeurs et des metteurs en scène.
    De son côté, la SCAM représente les scénaristes, les réalisateurs et les réalisatrices d'oeuvres à caractère documentaire.
    La SACD-SCAM représente près de 2 000 auteurs canadiens, francophones et anglophones, qui sont essentiellement des scénaristes et des réalisateurs de séries télévisuelles, de longs métrages, de dessins animés, de courts métrages, de séries Web et radiophoniques ainsi que des dramaturges et des chorégraphes.
    En adhérant à la SACD ou à la SCAM, les auteurs nous apportent, entre autres, leur droit de communiquer leurs oeuvres au public par télécommunication. À titre d'exemple, le répertoire audiovisuel de la SACD est constitué de longs métrages tels que La chute de l'empire américain, de Denys Arcand, et de séries telles que District 31, de Luc Dionne. Le répertoire de la SCAM est constitué de documentaires tels que Roger Toupin, épicier variété, de Benoît Pilon, et de Un pont entre deux mondes, de Pascal Gélinas.
    En contrepartie des apports de droits d'auteur, la SACD-SCAM leur assure de négocier les conditions des licences qu'elle accordera notamment aux chaînes de télévision et aux plateformes numériques leur permettant d'exploiter nos répertoires.
    Au Canada, la SACD-SCAM a négocié des licences qui couvrent six chaînes traditionnelles, vingt chaînes spécialisées, une chaîne payante, cinq plateformes numériques, une chaîne de radio et une entente pour les droits du câble.
    Grâce aux contrats négociés par la SACD-SCAM en France, en Belgique, au Luxembourg et à Monaco avec les chaînes de télévision, les plateformes numériques telles que YouTube et Netflix, et à ses ententes avec des sociétés d'auteurs notamment en Suisse, en Italie, en Espagne et en Pologne, les membres canadiens sont assurés de recevoir les redevances qui leur reviennent pour l'exploitation de leurs oeuvres dans ces pays.
    Le principe de rémunération défendu par la SACD-SCAM, notamment dans les pays francophones d'Europe, et qui est implanté au Québec est très simple: un auteur doit être lié à la durée de vie économique de son oeuvre et il doit être rémunéré pour toutes les formes d'exploitation de cette dernière.
    À ce titre, la gestion collective des droits continue d'être indispensable, particulièrement à l'ère du numérique. L'examen actuel de la Loi sur le droit d'auteur doit favoriser la création des oeuvres et la juste rémunération des auteurs en outillant plus adéquatement les sociétés de gestion collective.
    Il est temps de faire contrepoids aux multiples exceptions adoptées en 2012 et de se souvenir que cette loi est censée protéger les auteurs.
    Le gouvernement doit stopper le pillage des biens intellectuels issus du travail des auteurs. Il doit envoyer un message clair que tout travail mérite salaire et qu'on ne peut pas tout obtenir gratuitement.
    Dans notre mémoire déposé en mai, vous trouverez le détail de nos recommandations, dont voici un bref aperçu.
    Tout d'abord, nous recommandons que le flou juridique entourant la question de la titularité des droits sur l'oeuvre cinématographique — enfin, l'oeuvre audiovisuelle — soit clarifié. Selon nous, il est nécessaire de préciser qu'il s'agit d'une oeuvre de collaboration entre plusieurs coauteurs et de prévoir une présomption de titularité au bénéfice du scénariste et du réalisateur. Cette clarification nous permettra, notamment, de négocier avec les chaînes et les plateformes canadiennes la rémunération de nos membres réalisateurs, qui en ont été privés jusqu'ici.

  (1555)  

    À l'instar de la majorité des pays disposant d'un régime de copie privée, nous recommandons que le régime canadien de copie privée soit étendu aux oeuvres audiovisuelles et qu'il s'applique à tous les supports utilisés par les consommateurs pour les reproduire. Cette extension du régime à l'audiovisuel corrigerait ainsi une situation impossible à justifier aux auteurs et aux sociétés soeurs avec lesquelles nous avons des ententes fondées sur la réciprocité.
    À l'instar du Parlement européen, nous recommandons que tous les intermédiaires du numérique contribuent au financement du contenu culturel, puisqu'ils l'acheminent ou y donnent accès à leurs abonnés et en tirent des profits.
    Nous saluons la démarche du ministre des Finances visant à trouver des solutions fiscales au commerce électronique, mais nous demandons que toutes les taxes perçues par les entreprises nationales le soient également par les entreprises étrangères, et qu'une part des sommes ainsi perçues soit réservée au financement de la culture canadienne.
    Finalement, nous nous réjouissons que le Canada se soit engagé, dans l'Accord États-Unis—Mexique—Canada, à modifier enfin la durée du droit d'auteur au Canada en la portant à 70 ans afin de refléter la durée prolongée de l'exploitation des oeuvres et d'harmoniser la loi canadienne avec les lois étrangères modernes.
    Au nom des membres de la SACD-SCAM, nous vous remercions de votre attention et nous sommes prêts à répondre à vos questions.
    Merci.
    Merci beaucoup.

[Traduction]

    Nous allons passer directement aux questions des membres du Comité en commençant par Mme Caesar-Chavannes.
    Vous avez sept minutes.
    Je vais d'abord m'adresser à Mme Cornell. Vous avez indiqué au départ que vous alliez vous intéresser surtout à l'aspect musical de la danse, plutôt qu'à sa composante chorégraphique.
    Comme je veux contribuer à faire en sorte qu'il soit davantage question de chorégraphie dans la loi, je vais me concentrer sur cet aspect.
    Je n'étais pas au fait de l'exemple que vous avez donné dans le cas de Beyoncé. Je vais vous donner un autre exemple en citant un article publié en septembre 2018 dans le magazine Forbes où l'on traite des jeux vidéo et, plus particulièrement, des jeux Epic. Je vais simplement vous en lire un extrait:
Selon Chance the Rapper, l'un des premiers artistes à se prononcer sur la question, Fortnite
    ... un jeu vidéo qui utilise des danses...
profite indûment de danses déjà baptisées et reconnaissables sans en donner le crédit à leurs créateurs ni les rémunérer. « Fortnite devrait faire jouer la chanson originale en rap en même temps que les danses qui font sa fortune à titre d'“emotes” », a-t-il déclaré... « Des rappeurs noirs ont créé et popularisé ces danses, mais n'en tirent aucun bénéfice pécuniaire. Imaginez si tout l'argent dépensé pour ces « emotes » était partagé avec les artistes qui les ont créés. »
    Comme nous sommes nombreux à le savoir, Epic Games a gagné plus d'un milliard de dollars avec Fortnite depuis sa mise en ligne en septembre de l'an dernier. On peut y jouer gratuitement, si bien que la plus grande partie des profits viennent de la vente de ces « emotes » que mon fils connaît sans doute beaucoup mieux que moi.
    Vous nous avez dit que la définition était désuète. Comment pourrions-nous mettre à jour la définition de « chorégraphie » pour l'adapter à cette nouvelle réalité numérique, comme en témoigne l'exemple de Beyoncé, et comment pouvons-nous modifier la Loi sur le droit d'auteur pour apporter les correctifs nécessaires à l'égard de la situation que je viens de décrire pour les danseurs et les chorégraphes, surtout dans le contexte numérique?
    Je pense qu'en élargissant la définition de la danse pour englober les plateformes numériques et même faire référence aux jeux vidéo, vous pourriez atteindre le degré de précision dont vous parlez. Je suis vraiment heureuse que vous posiez la question, car on est assurément conscient que des considérations raciales entrent en ligne de compte et que le travail des chorégraphes de la communauté noire n'est pas reconnu à sa juste valeur.
    Il y a actuellement des oeuvres de chorégraphes américains qui sont utilisées dans Fortnite. Je ne suis pas une spécialiste de ce jeu, mais je sais que les gens dépensent en moyenne 87 $ pour acheter des mouvements qu'ils peuvent utiliser. On devrait reconnaître aux chorégraphes des droits sur les sommes ainsi obtenues.
    La situation est difficile du fait que l'on peut actuellement faire protéger par droit d'auteur une oeuvre chorégraphique complète, mais pas un simple mouvement. Il faut donc se demander à partir de quel moment un mouvement de danse devient une oeuvre à part entière. Il faudrait que la définition retenue soit claire à ce sujet.

  (1600)  

    Excellent.
    Je vais partager le temps à ma disposition, monsieur le président.
    Ma seconde question est pour M. Yazbeck.
    Vous avez présenté d'excellents arguments en faveur du droit de suite de l'artiste. Que répondez-vous à ceux qui soutiennent le contraire en indiquant que ce droit de suite n'est pas nécessaire, car les artistes bénéficient déjà de l'accroissement de la valeur de leurs oeuvres antérieures en demandant un prix plus fort pour celles qui suivent?
    Je pourrais vous dire simplement que c'est un peu comme le droit d'exposition. Les artistes ne sont généralement pas rémunérés pour les expositions de leurs oeuvres antérieures à la date butoir de 1988, exception faite de quelques organisations qui décident de les payer tout de même. Il en va de même du droit de suite. Si aucune loi ne l'exige, les artistes n'en bénéficieront pas. Les entités engagées dans la revente d'oeuvres d'art ne sont tout simplement pas intéressées à payer ces droits. Il faut qu'on les oblige à le faire. Je vous rappelle que c'est un droit de 5 %. C'est une somme vraiment symbolique. Si vous pensez au montant total de certaines de ces transactions, c'est très minime. Reste quand même qu'il y a d'énormes conséquences dans la vie d'un artiste, surtout du point de vue financier.
    Monsieur Jowhari.
    Merci à nos témoins.
    Je vais consacrer les quelque trois minutes qu'il me reste à M. Yazbeck.
    J'ai une question sur les impacts de l'ère numérique que nous vivons sur les arts visuels.
    Vous avez peut-être entendu parler du dévoilement récent d'un nouveau portrait de Rembrandt créé grâce à l'intelligence artificielle. Cette nouvelle oeuvre d'art est le fruit du recours combiné à un logiciel de reconnaissance faciale, un algorithme d'apprentissage automatique et l'impression 3-D. Quelles pourraient être selon vous les répercussions? Qui est en fait le propriétaire, l'auteur ou le créateur? Est-ce que c'est la machine? Est-ce la personne qui a rédigé l'algorithme? Est-ce l'imprimante 3-D? À qui l'oeuvre va-t-elle appartenir?
    Je suis persuadé qu'il y a au moment où l'on se parle une bonne demi-douzaine d'étudiants au doctorat qui préparent une thèse à ce sujet. Je ne blague absolument pas. C'est une question très complexe. Je ne suis pas certain d'être en mesure de vous fournir une réponse détaillée à ce sujet pour l'instant. Selon moi, la reproduction numérique d'oeuvres d'art fait en sorte qu'il est difficile de savoir qui en est propriétaire et qui doit être rémunéré, entre autres considérations. Je pense que de nombreuses organisations s'emploient à trouver des solutions. Par ailleurs, il y a la technologie des chaînes de blocs qui pourrait être d'une certaine utilité. En toute franchise, c'est un terme que j'ai entendu, mais de là à vous fournir une réponse très précise...
    À votre avis, devrait-on même permettre à une oeuvre semblable d'entrer dans le domaine public alors que l'on n'a pas encore déterminé qui était son créateur ou son propriétaire?
    C'est une bonne question. Je préférerais pouvoir y réfléchir et vous répondre ultérieurement.
    Très bien.
    D'autres témoins ont-ils des observations à faire?
    Non? Bon! Je vous remets 40 secondes.
    Merci. Je les garde pour plus tard.
    Monsieur Albas, vous disposez de sept minutes.
    Je remercie tous les témoins pour leurs opinions.
    Madame Cornell, je tenais à vous remercier de votre analyse. J'ai déjà dirigé une école d'arts martiaux qui avait pour voisine une école de ballet. Vous avez fait des observations sur les tarifs et l'absence de représentation. Effectivement, je crois que la représentation dans la discussion sur le tarif 6.B est nécessaire, parce que le modèle d'entreprise qu'incarnent les écoles de ballet diffère beaucoup du modèle sur lequel se calque le gymnase commercial, particulièrement les GoodLife Fitness, ne serait-ce qu'en raison de l'échelle de différences entre les deux et de leurs façons de faire. Sur ce point, vos observations sont bien notées.
    Sur la chorégraphie, je m'aperçois de la justesse des remarques, quand on utilise le travail d'une artiste comme Beyoncé sans la reconnaître comme il se doit. Bien sûr, ça finit toujours par s'arranger, parce que, grâce à l'Internet, nous pouvons l'analyser et juger par nous-mêmes.
    Vu mes antécédents dans les arts martiaux, je sais que les instructeurs du domaine sont très prompts à commercialiser ce qu'ils peuvent. Nous remettons au goût du jour d'anciennes disciplines que nous nous approprions. Un droit d'auteur touche les marques de commerce et ainsi de suite, pour assurer la commercialisation originale de la prétendue nouvelle discipline, mais, dans le même ordre d'idées, nous reprenons des mouvements millénaires. Comment les reconditionner et les moderniser, puis réclamer des redevances? Nous avons vu, dans les arts martiaux, comment, désormais, quelqu'un, à l'autre bout du monde, peut comparer différentes techniques. Si nous commencions à autoriser un droit d'auteur aux mouvements de danse, je suis convaincu que nous verrions bientôt des gens réclamer des droits d'auteurs pour leur propre discipline en arts martiaux. Qu'en pensez-vous?

  (1605)  

    Encore une fois, comme je l'ai dit à Mme Caesar-Chavannes, c'est à peu près la différence entre un mouvement — et j'ai cité l'exemple des « jazz hands » — et une oeuvre d'art complète ayant un auteur reconnu.
    Je n'affirme pas nécessairement que nous devons protéger un mouvement par le droit d'auteur et verser pour lui des dividendes, mais il faut reconnaître le travail des Canadiens — eux particulièrement. Si un tiers se l'approprie, je n'exige pas nécessairement réparation pour eux, mais il faut reconnaître leur rôle dans sa création. Comme le Guardian l'a dit, les emprunts entre artistes sont continuels, c'est la nature de la créativité.
    Il est sûr que, souvent, certains styles sont enseignés, et quelqu'un dira qu'un tiers les a intégrés. On peut se demander où ça se termine.
    Exactement.
    Il faut parfois examiner ce à quoi nous touchons. Je suis sûr que certains, relativement à un mouvement de danse, diraient que, en divers moments, divers artistes les ont inspirés, mais que leur oeuvre à eux est nouvelle, tandis que beaucoup d'autres diraient que nous ajoutons simplement nos propres fioritures. C'est se placer sur une pente très dangereuse...
    C'est très subjectif.
    ... parce que, encore une fois, c'est le corps humain. C'est l'art momentané, et personne ne peut réclamer la paternité d'un mouvement ou d'une suite de mouvements, parce que c'est essentiellement des arts martiaux, dans une grande mesure.
    Selon certains témoignages, des groupes d'artistes voudraient bénéficier de l'extension du droit d'auteur aux oeuvres employées dans des films. Les enregistrements sonores qu'on y emploie étant diffusés à répétition exigent des redevances répétées, d'après certains témoignages.
    Actuellement, les enregistrements sonores entraînent une rémunération du travail proprement dit. Si, ensuite, ils sont rediffusés dans un cinéma ou joués en continu sur une plateforme, c'est autre chose.
    Un représentant de l'Association cinématographique du Canada, qui s'y opposait, nous a prévenus que ça pourrait s'étendre aussi aux numéros de danse. Il a dit que, actuellement, le réalisateur versait un montant forfaitaire au chorégraphe qui n'est pas autorisé à recevoir ensuite de rémunération quand l'oeuvre était intégrée dans un film. Essentiellement, quand les créateurs vendent l'oeuvre pour un film, ils n'ont pas droit, plus tard, à des redevances supplémentaires.
    Est-ce que votre association appuierait des modifications de la loi pour le versement de redevances aux chorégraphes pour la diffusion de leur oeuvre?
    Oui, mais je voudrais vraiment entendre l'opinion de Patrick et d'Elizabeth à ce sujet, parce que ce n'est certainement pas mon rayon.

[Français]

    C'est très simple: chez nous, à la SACD, chaque forme d'exploitation d'une oeuvre est assujettie à un paiement de droit d'auteur. Qu'elle soit utilisée une, deux ou trois fois, cela importe peu. Chaque fois, elle doit être assujettie à un paiement de droit d'auteur.
    Prenons l'exemple d'un film, qui est d'abord projeté en salle. Dès le moment où il est par la suite diffusé à la télévision, l'auteur doit être payé. Puis, aussitôt qu'il est mis à la disposition des usagers sur une plateforme numérique, nous prétendons que l'auteur doit encore une fois toucher un droit d'auteur.
    C'est notre façon de voir la chose. Comme je suis accompagnée d'un auteur, vous pouvez lui poser la question et il va vous répondre.

[Traduction]

    Est-ce que d'autres pays l'offrent? Je crains la complexité de la surveillance exigée et la fuite éventuelle, du Canada, d'une part importante de l'activité cinématographique légitime qui a lieu ici et qui permet de rémunérer artistes, danseurs, compositeurs et producteurs de son.
    Cependant, si les directeurs et les réalisateurs estiment qu'il y aura ce qu'ils considèrent comme une obligation continue — et je reconnais que beaucoup d'entre vous le considèrent comme du travail accompli — ce n'est pas ce que dit la loi, actuellement, ce n'est pas l'usage dans la communauté. Les gens sont rémunérés pour le travail d'origine et non pour sa rediffusion.
    Est-ce aussi un de nos objectifs? Pour moi, c'est là qu'intervient la complexité. C'est quand elle est excessive qu'il se prend souvent des décisions stratégiques nocives à long terme pour l'écosystème.

  (1610)  

    Il n'y a pas de problème au Québec concernant tous les droits versés par la chaîne.

[Français]

    Cela vaut pour quiconque diffuse une oeuvre au Québec. Nous avons des contrats où c'est spécifié. Nous avons une réserve de droits. Nous avons une SACD en santé qui réussit très bien à négocier de très bons forfaits avec les propriétaires de chaînes de télévision. Tout le monde s'entend sur ce système et, puisque c'est le cas, ce système fonctionne.

[Traduction]

    Je suppose que ça fonctionne dans ce cas précis.
    Cependant, d'après de nombreux témoignages, on peut, dans certains cas, à l'extérieur du Québec, faire insérer dans les contrats entre la société et le réalisateur, chorégraphe ou producteur de son, une clause de rémunération.
    Encore une fois, nous parlons du statu quo d'un bout à l'autre du pays. C'est la raison pour laquelle je le demande, si nous la rendons obligatoire pour toute diffusion continue sur une plateforme comme Netflix ou CraveTV, elle entraînera un surcoût qui pourra empêcher des travaux au Canada, à l'avenir. Je m'interroge aussi, parce que nous n'aurons alors pas d'écosystème où on pourra se trouver du travail.
    Je reconnais le régime qui semble différent au Québec, mais nous parlons de ce qui se passe actuellement, dans tout le pays.
    Eh bien...
    Je suis désolé. Notre temps est amplement écoulé. Nous pourrons y revenir.
    Au tour maintenant de M. Masse.
    Vous disposez de sept minutes.
    Vous pouvez terminer votre réponse.
    J'allais dire que, à la Playwrights Guild of Canada, nous agissons en amont, en ce qui concerne l'accès à nos oeuvres réalisées sur une plateforme numérique. Actuellement, beaucoup de dramaturges font filmer leur travail pour le rendre plus accessible ultérieurement. Nous avons entamé des discussions avec beaucoup d'impresarios et d'organisations à l'échelle internationale, pour assurer quand même le versement d'une rémunération aux dramaturges pour une pièce filmée puis distribuée d'une façon différente.
    Nous avons tous besoin de collaborer un peu mieux pour bien mettre en place les moyens pour rendre l'oeuvre accessible. Je pense que ça touche davantage l'obtention du droit d'auteur et des permis que le coût de l'opération.
    Merci.
    Je joue à Fortnite. Je connais donc assez bien les pas de danse de ce jeu et d'autres jeux. C'est une nouveauté intéressante.
     Pour ceux qui ne savent pas, ces danses durent de deux à cinq secondes, selon le jeu, mais elles n'ont habituellement aucun rapport avec lui. Elles font partie d'une forme d'expression des joueurs en ligne, qu'ils utilisent entre eux, souvent dans les salles d'attente ou pendant l'attente avant le jeu; elles peuvent aussi être une forme d'expression manifestée pendant le jeu. Elles ne sont pas propres à Fortnite. Des centaines de jeux intègrent ces danses.
    Voici ma question: où tirer la ligne? On peut en acheter, mais c'est souvent à partir de crédits accordés au joueur. Certains de ces crédits — un certain problème est survenu, qui a été réglé par Battlefront — sont presque devenus une loterie. Ç'a été critiqué pour les coffres à butin et à d'autres trucs de ce genre, quand on achetait des améliorations pour les armes, les costumes ou les pas de danse.
    Ces « emotes » peuvent aussi être des expressions ou des citations très répandues dans la culture pop, qui proviennent de films ou d'autres sources qui en sont devenues des sources généralement acceptables pour cet usage.
    Avez-vous une idée de la distinction à établir et des modalités de la rémunération? Encore une fois, on peut en obtenir gratuitement. Le joueur obtient des unités de crédit en ligne.
    Quelles seraient les modalités de la rémunération? Si c'est une suite de mouvements de trois à cinq secondes, ça s'insère aussi dans le contexte social du jeu — et non dans le jeu lui-même — comment limiter cet usage? Dans les salles et les éléments d'un monde virtuel où on ne se gêne pas pour exécuter ces pas de danse, c'est comme si, ici, vous tourniez les pouces vers le haut.
    Ça comprend tous les mouvements de danse qui remontent à des expressions culturelles slaves ou russes ou à d'autres danses de l'est de l'Europe où on déplie la jambe en pointant le pied loin du corps, jusqu'aux mouvements de planche à roulettes apparus au sommet de la gloire de Tony Hawk, en passant par ceux qui sont apparus à l'émergence de cette culture.
    Comment quantifier ces mouvements. Feriez-vous une distinction entre leur exécution, encore une fois dans un cadre virtuel, avant le jeu, quand le joueur s'exprime, en baignant dans cette culture où il sait tous ses gestes épiés et diffusés? Ça ne serait pas différent du monde réel.

  (1615)  

    À ma connaissance, aucun endroit n'offre actuellement de redevances pour ces « emotes ». J'essayais d'expliquer que la définition du travail chorégraphique a besoin d'être un peu plus flexible et pas tellement focalisée sur le ballet narratif de la Loi sur le droit d'auteur. Ainsi, dans 5 à 50 ans d'ici, nous serons susceptibles d'avoir cette conversation quand Drake créera un phénomène chorégraphique et que, soudainement, il en obtiendra les droits d'auteur. À partir de là nous glisserons sur cette pente.
    Nous n'y sommes pas encore.
    J'ignore comment j'y penserais, mais il y en a comme le rodéo sur fusée chevauchée par l'acteur, comme c'est arrivé dans un vieux film des années 1950 ou 1960, que quelqu'un pourrait se rappeler.
    C'est ce dont il est question. Ces pas de danse m'ont rappelé ce film. En même temps, comment les quantifier, si on peut les reconnaître? Ça pourrait conduire à leur créateur, musicien, chorégraphe ou artiste, puis à l'achat de sa chanson, de sa danse ou de son oeuvre.
    Comment conciliez-vous ce processus? Je suis seulement curieux de le savoir. Qu'en pense l'industrie elle-même?
    Quand Beyoncé s'est librement inspirée de De Keersmaeker, l'industrie s'est réjouie. La danse contemporaine ésotérique a attiré beaucoup d'attention, suscité plus d'intérêt et peut-être exactement ce que vous dites: plus de billets se sont vendus, et les regards ont convergé en plus grand nombre vers l'artiste.
    C'est vraiment nouveau. Je pense que, dans l'industrie des jeux vidéo, il y a un plus gros... Encore une fois, ces ensembles font partie à la fois de Loot Crate, en partie de l'identité sociale qu'on crée en ligne. C'est tout ce qui va des armes aux expressions, en passant par les vêtements.
    Merci beaucoup.
    Je ressens l'étrange appel du jeu. Je me sens tenu à l'écart.
    Au tour de M. Longfield, qui dispose de sept minutes.
    Je vous remercie tous pour vos exposés.
    Madame Cornell, le festival de danse de Guelph vient de fêter son 20e anniversaire. Il fait partie des cinq fameux festivals de Guelph où nous célébrons les arts et la culture.
    Je pense aux petits festivals comme ceux-là et aux artistes qui y jouent; comment, normalement, s'y prendraient-ils pour obtenir le droit d'auteur pour leur création et leur présentation au public? Par une vidéo les représentant? Par quel mécanisme protègent-ils leurs oeuvres?
    Pour le dire bien franchement, il n'y en a pas beaucoup, actuellement. J'adore absolument le festival de danse contemporaine de Guelph. J'ai vécu quelques années à Guelph. Ça me réjouit particulièrement que vous en parliez.
    Un danseur, un chorégraphe ou une compagnie de danse contemporaine passerait un contrat avec le festival, par exemple, pour présenter l'oeuvre. Si l'oeuvre devient un succès — et, dans le contexte canadien, ça signifie peut-être cinq soirées dans deux villes, c'est vraiment à petite échelle — ça signifie que tout se décide par contrat avec le présentateur. Si un autre présentateur souhaite acheter l'oeuvre et, disons qu'il emploiera différents danseurs et peut-être un contexte légèrement différent, il y a une très faible probabilité de versements de redevances, mais, en réalité, les redevances ne sont versées que dans le domaine du ballet, 99 % du temps.
    En danse contemporaine, cet exemple est assez rare.

  (1620)  

    Vous venez peut-être de répondre à la question qui suivait, sur les danses autochtones et l'éventuelle protection du patrimoine séculaire des Autochtones.
    À ma connaissance, et je ne suis certainement pas spécialiste des danses autochtones, il s'agit davantage de la transmission orale de l'héritage de la danse...
    Bien sûr. C'est leur tradition.
    ... et ces danses sont conservées par des gardiens du savoir. C'est un système tout à fait différent.
    Excellent. Merci.
    Je partage mon temps avec M. Lametti.
    Madame Sokoloski, vous parlez, sur votre site Web, des trois prismes que vous employez: la promotion, la protection et le pluralisme. Aujourd'hui, nous parlons de protection et nous développons des mécanismes.
    Existe-t-il un exemple de mécanisme que vous avez développé et qui est utilisé ou un secteur que la loi pourrait aider à protéger, en sus de ce dont vous avez parlé dans votre exposé?
    La principale activité de la Playwrights Guild of Canada est un contrat triennal avec l'Association professionnelle des théâtres canadiens. Les fondations et les raisons pour lesquelles ce contrat et ces ententes standards continuent d'avoir du poids dépendent de la loi actuelle sur le droit d'auteur. Nous avons été en mesure de négocier une redevance de 10 % des recettes pour toute la durée de la création de la pièce sur scène, ce que nous envient d'autres pays.
    Cela protège le petit peuple, encore une fois, qui n'aurait peut-être pas accès à une protection autrement.
    Oui.
    Nous avons entendu dans des témoignages précédents que c'est l'un des principaux problèmes.
    Madame Schlittler, pour ce qui est du contexte européen, nous avons parlé un peu, lors d'une séance précédente, de la norme qui s'en vient dans l'UE en vertu du chapitre 13. Vous semblez avoir beaucoup d'expérience de l'UE. Avons-nous beaucoup à apprendre de l'Europe? L'UE fait-elle quelque chose à quoi nous devrions réfléchir plus en profondeur?

[Français]

     Je vais vous décevoir en vous disant que je m'occupe principalement du Canada et du Québec. J'ai un lien filial, si l'on veut, avec la SACD en France, mais je ne pourrais pas vraiment vous dire ce qui se passe en Europe. Je le sais dans les grandes lignes, mais mon territoire ou ma préoccupation est ce qui se passe au Canada.

[Traduction]

    Très bien.

[Français]

    Je peux vous parler des décisions qui y ont été prises en matière de numérique, que vous connaissez d'ailleurs, mais je n'ai aucune idée de l'application de ces décisions. De toute façon, c'est une entente qui doit être ratifiée au mois de janvier.

[Traduction]

    Fantastique.

[Français]

    Je peux vous parler de la situation au Québec, mais pas vraiment de ce qu'il en est en Europe.

[Traduction]

    D'accord. Merci.
    Passons à M. Lametti.
    Ma question s'adresse à Mme Sokoloski. Dans votre premier exemple, celui d'un jeune dramaturge, savez-vous de quelle commission scolaire il s'agissait?
    TDSB.
    J'ai lu quelques politiques sur l'utilisation équitable en vigueur dans des commissions scolaires, universités ou collèges du Canada. Je pense qu'il n'y en n'a pas une qui permette de copier une oeuvre entière.
    Non.
    L'exemple que vous avez donné constitue probablement au moins une violation du droit d'auteur...
    Oui.
    La plupart des commissions scolaires et des universités mettront en place un groupe qui travaillera avec les enseignants. Il est aussi tout à fait possible qu'elles aient payé les droits et que l'auteur ne puisse pas le savoir avant la fin de l'année, quand il ou elle recevra un chèque du collectif, parce qu'il ne comportera pas de détails.
    Je tiens à dire, pour le compte rendu, qu'il y a pas mal de certitude entourant les diverses normes sur l'utilisation équitable à des fins éducatives. En fait, ce sont Copibec et Access Copyright qui ont présenté ces lignes directrices dans les années 1990 et 2000, sur des affiches qu'elles apposaient près des photocopieurs. En fait, elles ressemblent beaucoup à ce qu'on voit aujourd'hui dans les politiques des universités, des collèges et des commissions scolaires sur l'utilisation équitable.
    J'ai donné cet exemple pour diverses raisons, mais en premier lieu pour vous donner une idée de ce que nous considérons comme l'atmosphère qui règne actuellement dans le secteur de l'éducation. C'est une pente glissante.

  (1625)  

    N'est-il pas trompeur d'utiliser cet exemple? Il nous a portés à croire qu'on peut copier une oeuvre entière en vertu des politiques sur l'utilisation équitable, alors que ce n'est le cas dans aucun établissement d'enseignement au Canada.
    C'est très vrai. Selon les lignes directrices sur la reproduction qu'on trouve dans le secteur de l'éducation, on pourrait reproduire 10 % d'une oeuvre ou un chapitre entier. Mais si l'oeuvre en question figurait dans une anthologie, on pourrait potentiellement la photocopier au complet. En vertu des lignes directrices créées dans le secteur de l'éducation, on pourrait en fait copier l'oeuvre au complet.
    Et Access Copyright a joué un rôle dans l'établissement de ces lignes directrices...
    Tout à fait. C'est la raison pour laquelle je...
    En ce sens, c'est mon modèle.
    Oui, mais quand on dit que les droits exigibles ne sont pas payés, on ne tient pas compte du fait que soudainement, les titulaires de droits sont privés d'une rémunération pour l'utilisation de leurs oeuvres, parce que les droits applicables ne sont pas versés, étant donné que les oeuvres sont copiées, conformément aux lignes directrices sur la reproduction en vigueur dans le secteur de l'éducation.
    Mais comme vous le savez, les établissements d'enseignement achètent actuellement divers autres types de documents, dont, selon toutes probabilités, des copies de l'oeuvre en question.
    Certainement. Oui, ils en achètent. La Playwrights Guild of Canada a une boutique du nom de Canadian Play Outlet. Ils achèteront une copie de l'oeuvre en format numérique, mais ne paieront aucune licence subséquente pour en obtenir d'autres copies.
    S'ils achètent une copie numérique de l'oeuvre, ils achètent probablement le droit de l'utiliser.
    Non, ils n'achètent qu'un exemplaire de l'oeuvre. Il y a aussi évidemment l'option d'acheter plusieurs exemplaires ou d'obtenir une licence permettant la reproduction. Ce n'est pas ce qu'ils achètent. C'est la réalité en ce moment.
    D'accord. Merci.
    Passons maintenant à M. Chong.
    Vous avez cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    J'aimerais aussi aborder la question des manuels, madame Sokoloski. Il est clair qu'on observe un déclin précipité des revenus d'édition scolaire, d'après les témoignages que ce comité a recueillis, comme d'après les recherches de nos analystes. Il est assez ahurissant de constater à quel point le secteur de l'édition scolaire a souffert de la loi de 2012 sur le droit d'auteur. Vous avez dit que 600 millions de pages étaient reproduites sans aucune rémunération pour les auteurs. Il y a la décision rendue par la cour dans l'affaire de l'Université York qui doit toujours entrer en vigueur. Compte tenu de tous ces éléments, on obtient un portrait clair de l'effet des modifications de 2012 et on voit que l'inclusion du secteur de l'éducation aux dispositions sur l'utilisation équitable a eu un effet profond sur l'industrie.
    Vos recommandations et celles d'autres témoins sont claires: il faut retirer l'éducation des dispositions de la loi sur l'utilisation équitable.
    J'aimerais creuser un peu plus la question. J'ai été choqué de découvrir que notre commission scolaire locale n'achète plus de manuels scolaires pour les élèves du secondaire. Je n'en revenais pas. Je ne comprends pas comment on peut faire ses études secondaires sans un seul manuel. J'ai trois jeunes enfants à l'école. Au primaire, ils reçoivent des photocopies qui se retrouvent dans le fond de leurs sacs avec les restes de boîtes de jus, les espadrilles, les vêtements d'éducation physique sales et tout le reste. Il est parfois frustrant d'essayer de trouver un sens à tout cela.
    J'ai fait toutes mes études à l'aide de manuels; ils étaient l'épine dorsale de mes apprentissages, donc je n'en reviens pas, et apparemment, ce n'est pas propre à notre seule commission scolaire locale. Il y a beaucoup de commissions scolaires de la province qui n'achètent plus de manuels. J'arrive ensuite à ce comité, où j'apprends tout cela sur le fait que l'éducation ait été incluse aux dispositions sur l'utilisation équitable et le déclin précipité des ventes. J'y réfléchis depuis quelques semaines.
    Les établissements secondaires et postsecondaires ont-ils arrêté d'acheter des manuels à cause des coûts ou s'agit-il d'une nouvelle mode? Manifestement, l'échappatoire ou la modification apportée à la loi de 2012 leur permet de ne pas acheter autant de manuels qu'ils ne le faisaient avant 2012, ou à tout le moins c'est l'interprétation qu'ils en font. Outre cette modification législative, qu'est-ce qui cause le déclin précipité de l'achat de manuels dans les écoles secondaires et les universités? Le but est-il de réduire les coûts pour les étudiants et le système, ou s'agit-il d'une mode, selon laquelle nous n'aurions plus besoin de manuels et nous n'aurions qu'à assembler divers documents multimédias en ligne pour éduquer les étudiants de nos jours?
    Je ne veux pas parler au nom des éducateurs, parce que je n'en suis pas, mais je peux certainement vous dire que si vous examinez le contenu des cours, vous verrez qu'on y trouve les oeuvres de plusieurs auteurs canadiens qui n'ont reçu aucune rémunération pour cela et qui n'ont pas reçu de redevances non plus pour leur travail même s'il est utilisé dans le matériel de cours.
    J'ai étudié à l'Université de Toronto, où nous recevions des notes de cours fournies par le professeur pour certains cours. Il fallait se rendre à la librairie située au coin des rues St. George et College, un centre local de reproduction, pour acheter les notes de cours. À l'époque, les auteurs de ces articles étaient-ils rémunérés pour les notes de cours?

  (1630)  

    Oui.
    Le sont-ils aujourd'hui?
    À notre avis, et selon les études effectuées, non.
    À votre avis, qu'est-ce qui cause ce déclin précipité des revenus?
    Veut-on économiser? Est-ce une nouvelle mode dans le milieu de l'éducation, qui pousse les gens à laisser tomber les manuels pour leur préférer des documents en ligne ou d'autres documents multimédias pour l'enseignement?
    Je suis perplexe, moi aussi. À ce niveau d'éducation, je pense qu'il faut favoriser la croissance des connaissances, faute de quoi le déclin ne fera que s'accentuer, comme la qualité des travaux présentés à nos étudiants.
    Je n'ai pas de réponse à vous donner, parce que je n'ai pas cette perspective.
    Je dirais qu'il y a sûrement quelque chose qui se passe, et cela m'inquiète, à titre de représentante des artistes. Les gens ont l'impression d'avoir le droit à du contenu gratuit et pensent que tout le monde devrait y avoir accès. L'accès ne va pas nécessairement de pair avec la gratuité. Je pense que nous devons simplement tous travailler mieux ensemble pour trouver des moyens d'assurer l'accès tout en protégeant ces droits.
    J'ose croire que ce n'est pas une question de coût. Je pense que le modèle d'iTunes prouve que si l'on crée un accès rapide et facile, puis qu'il suffit de cliquer sur un bouton, les gens seront prêts à payer pour le service. C'est ce qu'espère l'optimiste en moi.
    Nous entendrons maintenant M. Sheehan. Vous avez cinq minutes.
    M. Longfield a commencé à poser une question que je voulais poser sur les danses autochtones, comme nous nous demandons comment gérer les droits d'auteur autochtones. Nous n'avons pas su bien le faire jusqu'ici. Nous cherchons des solutions. Nous savons qu'il y a des groupes plus vulnérables à ce genre de problème, et les Premières Nations en font partie.
    À l'époque de la télévision en noir et blanc, par exemple, on voyait beaucoup de danses autochtones dans les westerns. Il n'y avait alors absolument aucune indemnité ni de permission demandée.
    Je vous suis reconnaissant de vos observations sur cette question. Nous avons d'excellents danseurs aussi. Richard Kim, à Sault Ste. Marie, est bien connu dans le monde, et Tanya Kim est sa soeur. Il y a beaucoup d'autres artistes.
    Nous avons parlé des différentes technologies qui nous sont imposées dans toutes sortes de contextes. Nous parlions du photocopieur avant qu'il ne puisse être utilisé pour photocopier des oeuvres entières. Cela a déjà été une nouvelle technologie pour des têtes grises comme moi. Ce n'était pas possible avant. Nous avons donc vu beaucoup de choses du genre se passer. Je pense qu'il y a plus de politiques, de règles et de lois sur toutes ces questions de nos jours.
    Il y a de nouvelles technologies, comme Spotify, Google, les divers produits Apple et je ne sais quoi d'autre. Pouvez-vous nous décrire comment elles touchent vos organisations? Votre groupe est-il mieux ou moins bien rémunéré dans ce contexte?
    Est-ce que quelqu'un veut briser la glace?

  (1635)  

    Je suis au Québec. Parlez-vous en particulier d'iTunes et de Netflix?
    De ce genre de nouvelles plateformes sur Internet, oui.

[Français]

     Je vais aider un peu M. Lowe.
    Pour une société de gestion, la technologie n'est pas le problème en soi. La vraie question est le besoin de lois qui nous permettent de négocier avec les détenteurs de cette technologie. En Europe, pour reprendre cet exemple, nous avons des ententes avec Netflix et d'autres plateformes, dont iTunes. La technologie n'est pas le problème. Ce dont nous avons besoin, c'est d'un levier juridique qui nous permette de négocier auprès de tous ces propriétaires ou inventeurs de nouvelles technologies. Avec un tel levier, nous pouvons faire n'importe quoi.
    Nous parlions plus tôt de ces nouvelles plateformes qui utilisent ou diffusent une oeuvre. Pour une société de gestion collective, il est toujours possible d'aller percevoir des droits. Alors, pour nous, ce n'est pas un problème. J'ai l'air d'être un peu prétentieuse en disant cela, mais c'est vraiment ce que nous croyons. Tout est possible, si l'on nous donne la possibilité de faire ce que nous devons faire.

[Traduction]

    Est-ce que quelqu'un d'autre veut s'exprimer à ce sujet?
    David, j'ai une question spécialement pour vous. Vous avez mentionné une contestation fondée sur la Charte concernant les artistes âgés, pour reprendre vos mots. Où a-t-elle été déposée? N'est-ce encore qu'un recours envisagé? Y a-t-il une poursuite en cours? Sur quoi fondez-vous votre argument?
    Il n'y a pas de contestation officielle en cours. Ce n'est qu'une réflexion, une possibilité. L'essentiel, c'est que la loi établit clairement une distinction entre les artistes dont les travaux remontent à avant 1988 et les autres. En soi, cela ne serait peut-être pas considéré discriminatoire, mais le fait est qu'il est fort probable et tout à fait logique que les oeuvres créées avant 1988 soient des oeuvres d'artistes visuels plus âgés.
    Par conséquent, on se trouve à tracer une ligne arbitraire. Les avocats n'aiment pas les absolus, mais c'est probablement l'une des limites les plus arbitraires possible. On a fixé une date, en 1988, et tant pis pour ceux qui ont créé des oeuvres avant. La plupart de ces artistes sont vraisemblablement assez âgés, ou alors ce sont leurs héritiers qui se trouveront à perdre des profits.
    Merci beaucoup.
    Monsieur Albas, vous avez cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je vais reprendre exactement là où M. Yazbeck s'est arrêté, sur le droit de revente de l'artiste. Ce n'est rien de nouveau. Un peu plus tôt, dans votre exposé, vous avez dit que cette exception est arbitraire en soi. Vous avez dit que le fait de choisir une date dans les années 1980 équivalait à tracer une ligne dans le sable et qu'il y a des enjeux intergénérationnels.
    Mon interprétation serait que vous nous demandez d'intervenir sur la revente d'oeuvres d'art. Premièrement, il est presque impossible d'authentifier une oeuvre d'art réalisée il y a une centaine d'années. Je suppose que nous appliquerions la règle des 70 années suivant la mort d'une personne pour déterminer qui touchera une rémunération pour cela. Les problèmes d'authentification demeureraient, encore faut-il déterminer qui a produit une oeuvre d'art, puis à qui doit être versé l'argent s'il n'y a pas de succession ni d'enfants vivants. N'aurions-nous pas le même genre de problème intergénérationnel que vous avez maintenant? Il me semble que c'est la seule façon dont le gouvernement pourrait dire, lorsqu'il y a revente, qu'à partir de tel moment, 5 % des bénéfices — ou quel que soit le pourcentage déterminé — iront à l'artiste, à sa succession ou à sa famille.
    Comment éviter le problème?
    Il y a beaucoup d'éléments dans cette question. Premièrement, la question de l'authentification est une question bien tangible, qui peut être complexe, mais pour moi, c'est une question différente. Nous ne parlons pas là d'une question de principe.
    Deuxièmement, à mon avis, l'absence de droit de revente de l'artiste a aussi tendance à avoir un effet négatif sur les artistes âgés. Je vous donne un exemple. Bien souvent, plus la carrière d'un artiste se développe, plus il est connu et plus son art prend de la valeur. Pourtant, même si son art est mieux connu et vaut plus cher aujourd'hui, il n'en profite pas, parce que ses oeuvres ont été vendues il y a 30 ans pour quelque chose comme 20 $, même si elles se vendraient aujourd'hui 50 000 $. Il y en a de nombreux exemples dans notre mémoire.
    Je ne crois pas que cela crée de la discrimination, parce que le droit de revente ne change pas en fonction de l'âge de la personne ou du moment auquel l'oeuvre a été créée. Selon notre proposition, quand l'oeuvre est revendue, plus tard, nous en retirerions quelque chose.

  (1640)  

    Il y a un membre de ma famille qui est décédé, et j'ai toujours ses oeuvres dans mon bureau. Votre argument est très séduisant, mais encore une fois, comment le gouvernement peut-il instituer un régime juste pour tous? Il faut penser à son applicabilité.
    Si l'on ne peut pas, concrètement, dire que telle personne a créé telle oeuvre d'art à tel moment, puis en garder des traces pour que la personne soit rémunérée, le problème restera entier. Vous prétendez qu'il y a une injustice intergénérationnelle quand on expose des oeuvres créées avant la limite de 1988 plutôt qu'après.
    Je ne le vois pas comme un problème de discrimination. Vous soulignez à juste titre que plus une oeuvre est vieille, plus elle est difficile à authentifier. Je le comprends bien, mais quand je parle du droit d'exposition, la date de 1988 ressort clairement. Or il y a toutes sortes d'autres facteurs qui peuvent compromettre l'authenticité d'une oeuvre d'art. Ce n'est pas une date limite figurant dans une loi adoptée par le Parlement qui change tout. Ce sont ces autres facteurs. C'est la raison pour laquelle je ne considère pas que cela va à l'encontre de la Charte. Cela peut tout de même être problématique, mais ce n'est pas contraire à la Charte.
    Vous évoquez la possibilité de faire intervenir le gouvernement dans l'évaluation pour déterminer l'authenticité d'une oeuvre. Nous proposons plutôt que le gouvernement ne s'en mêle pas. C'est un collectif de protection du droit d'auteur qui administrerait le régime.
    Je peux vous dire que l'ARC a eu toutes sortes de problèmes après que des personnes aient donné de magnifiques oeuvres d'art dont on avait établi le prix et tout et tout. Il y a eu toutes sortes de problèmes à l'authentification, pour déterminer si c'était le bon prix. En définitive, on se trouve à demander au gouvernement de faire appliquer une politique qui bénéficiera à l'artiste, donc je pense qu'il est important que nous en comprenions bien la mécanique.
    Pour la revente, comment est-on censé faire le suivi des transactions? Par exemple, si je suis un artiste et que je vends une oeuvre à M. Lametti — qui a un grand sens du talent artistique —, puis qu'au bout de 20 ans, il décède et que l'un de ses descendants récupère l'oeuvre, pour ensuite la vendre de façon privée, comment pourrai-je en bénéficier? Encore une fois, ce genre de transaction ne passe pas par une maison de courtage.
    Nous confions cette responsabilité aux personnes qui reçoivent les oeuvres. Parfois, elles ne savent pas quoi en faire, c'est comme la personne qui reçoit une collection d'armes d'un grand-père ou d'une grand-mère décédée. Elle ne saura pas d'où elles viennent, mais devra respecter toutes sortes de lois et d'exigences.
    Pouvez-vous m'expliquer comment le gouvernement pourrait appliquer votre proposition tout en en respectant l'intention, concrètement?
    En fait, nous proposons que le gouvernement ne participe pas du tout à la transaction en tant que telle lorsque l'artiste exerce son droit de revente. Ensuite, cette proposition ne s'applique pas aux transactions privées comme celle que vous venez de décrire. Elle ne s'appliquerait qu'aux transactions publiques qui passent par une maison de vente aux enchères ou une galerie commerciale.
    Finalement, des représentants de CARFAC et du RAAV viendront témoigner devant vous mercredi. Ils représentent les artistes visuels du Canada: CARFAC représente les artistes hors Québec, alors que le RAAV représente les artistes du Québec. Je vous invite à leur poser les mêmes questions, particulièrement à April Britski, directrice exécutive de CARFAC. Elle sera mieux placée que moi pour vous répondre, puisque tout cela est encore relativement nouveau pour moi.

  (1645)  

    Je comprends, mais puisque vous êtes venu comparaître devant un comité parlementaire et que vous faites une proposition, j'ose espérer que vous êtes en mesure de parler de certaines de ces questions.
    C'est le gouvernement qui devra faire respecter ce droit de revente entre différentes maisons de courtage et différentes maisons de vente aux enchères. Je peux vous dire qu'il y a beaucoup de choses liées au CANAFE, et à tout le reste — des règles pénalisantes imposées aux gens avec les meilleures intentions qui ne sont pas toujours respectées. On contourne probablement bon nombre de ces règles fédérales actuellement, en grande partie parce qu'il est difficile de suivre leur évolution.
    Je sais que vous ne pouvez pas parler de ces préoccupations d'ordre pratique. Je vais poser certaines de ces questions, mais si l'on fait une proposition, on doit répondre à ce genre de questions pratiques si l'on veut qu'elle soit prise au sérieux.
    Je comprends. Je reviens sur le premier point que j'ai soulevé, soit qu'à mon avis, la validité inhérente et l'importance des droits de revente des artistes constituent une question distincte des problèmes pratiques liés à leur mise en oeuvre. Nous sommes ici pour défendre les artistes et le droit de revente.
    Merci beaucoup.
    C'est maintenant au tour de M. Lametti. Vous disposez de cinq minutes.
    Merci.
    Monsieur Yazbeck, aidez-nous à définir les paramètres de possibles droits de revente. S'agit-il uniquement d'arts visuels? Cela n'inclut pas les livres, par exemple.
    Non.
    Est-ce que cela s'appliquerait au format numérique en plus du format traditionnel?
     Je sais que nous en avons discuté brièvement il y a peu de temps. C'est une question qu'un de vos collègues a soulevée. Je suis désolé, mais je ne suis pas en mesure de donner une réponse précise. Je pense que ce serait applicable. Concrètement, je laisserais à ma collègue, Mme Britski, qui sera ici mercredi, le soin de répondre.
    D'accord. Nous nous en souviendrons. Essayez d'y réfléchir un peu, par contre.
    Oui, je le ferai.
    Est-il également possible de répondre à certaines des préoccupations de M. Albas? Selon la Convention de Berne, on n'a pas besoin d'obligations officielles pour le droit d'auteur à l'heure actuelle. Concernant le droit traditionnel, qui est épuisé après la première vente, nous pourrions composer avec cela — pas d'exigence d'enregistrement. Cela dit, il existe un endroit où l'on peut facilement déposer une demande d'enregistrement — l'OPIC, l'Office de la propriété intellectuelle du Canada. Pourrait-il faire partie de la solution quant à l'enregistrement d'une oeuvre artistique permettant à l'artiste de bénéficier du droit de revente?
    Peut-être. C'est un aspect auquel je voudrais certes réfléchir.
    Je vais m'adresser à Mme Sokoloski.
    Vous savez que la Cour suprême du Canada avait rendu une décision unanime sur l'utilisation équitable en 2004. Il est alors devenu immédiatement clair pour l'ensemble du secteur de l'éducation qu'il était fort probable que les sociétés de gestion — Access Copyright et Copibec — faisaient payer des frais pour une partie de l'oeuvre alors qu'elles n'avaient pas le droit de le faire parce que cela s'inscrivait dans le droit d'utilisation équitable. La question a été réglée en 2012 avant l'entrée en vigueur de la loi, au titre de laquelle l'utilisation de recherches et d'études privées en vertu de l'utilisation équitable... La Cour suprême du Canada a jugé que pratiquement toutes les copies— et Access Copyright était d'accord pour une grande partie de la cause portée devant la Cour suprême du Canada qui a été réglée — qui se faisaient de la maternelle à la 12e année constituaient, en fait, une utilisation équitable.
    Même si nous devions retirer le mot « éducation » des dispositions sur l'utilisation équitable, que devrions-nous faire de la décision de la Cour suprême?
     Je crois que les deux recommandations que j'ai présentées vont de pairs. Si nous retirions « éducation » de l'exception pour utilisation équitable, je crois qu'il nous faudrait revenir sur la façon dont les choses fonctionnaient concernant les sociétés de gestion. Il nous faudrait créer un meilleur mécanisme, ce que nous avions avant 2012 avec Access Copyright et d'autres sociétés de gestion, pour qu'Access Copyright collabore avec le milieu artistique afin de déterminer ce à quoi cela doit ressembler.
    Et il faudrait qu'elles collaborent avec le milieu de l'éducation, ce que Access Copyright et Copibec n'ont jamais voulu faire auparavant.
    Dans toutes mes recommandations, j'exhorte essentiellement tout le monde à revenir à la table.
    Que devrions-nous faire concernant l'objectif très légitime de l'utilisation équitable, qui est de permettre au milieu de l'éducation de reproduire de petites quantités de matériel? Il y a un argument raisonnable selon lequel nous ne faisons que régler la question. Avec un certain nombre de jugements qu'a rendus la Cour suprême du Canada et les modifications apportées à la Loi sur le droit d'auteur en 2012, nous avons enfin accepté ce que signifie l'utilisation équitable. En fait, c'est un élément de l'esprit du régime anglo-américain de droit d'auteur qui existe au Canada. Les pays les plus créatifs du monde, comme les États-Unis, Israël, la Corée du Sud et Singapour, ont tous des régimes qui englobent davantage que l'utilisation équitable. Ils comprennent le « fair use », l'usage loyal.

  (1650)  

    Oui.
    À dire vrai, j'opterais pour le « fair use » sans hésitation. On peut maintenant fort bien soutenir que nous sommes finalement dans une situation où le milieu de l'éducation et les artistes peuvent trouver une solution de bonne foi, voire peut-être même forcer certaines des sociétés de gestion à se joindre à eux, et dans ces mêmes termes, et voyons quelle sera la suite des choses. Il est trop tôt pour le déterminer. Auparavant on imposait des frais excessifs. Il y a maintenant une réaction. Voyons voir comment la situation évoluera.
    Parce qu'Access Copyright représente nos membres, nous collaborons très étroitement avec cette société. Son travail comporte une autre facette, soit sur le plan de l'innovation avec la technologie de la chaîne de blocs. Il s'agit de s'assurer qu'il y a authentification, de sorte que le droit de revente puisse être mis en oeuvre, et qu'il y a des moyens de s'assurer que ce type d'information est mis en place. Comme je l'ai dit, toutes mes recommandations visent à ce que nous en discutions tous ensemble afin que nous puissions travailler à l'innovation pour décider quelle est la meilleure façon de procéder. À l'heure actuelle, il y a tellement de dissensions entre les gens que c'est impossible. C'est ce qui est, à mon avis, la cause du problème.
    D'accord. Merci.
    Les deux dernières minutes sont à vous, monsieur Masse. Allez-y, s'il vous plaît.
    Je remercie nos témoins.
    Je pense encore aux « emotes ». Je pense à l'idée de protéger par le droit d'auteur, pour la période des questions, le « facepalm », le roulement des yeux et l'indignation vertueuse. Je crois que je pourrais faire beaucoup d'argent avec ces droits d'auteur si je le pouvais.
     Je m'interroge sur le temps dont le Comité dispose pour la production d'un rapport, sa présentation au ministre, qui nous reviendra là-dessus, et une proposition de modification de la loi, comme vous l'avez mentionné, qui nécessiterait un autre processus, et il faudrait que ce soit présenté au Sénat par la suite.
    Durant la dernière minute qu'il nous reste, pouvez-vous nous dire rapidement si l'on peut faire quelque chose entretemps? La Commission du droit d'auteur a été un exemple. Quelle mesure pourrait-on prendre facilement en moins d'un an? Que pourrions-nous accomplir?
    Je crois que l'harmonisation des dommages-intérêts préétablis serait facile à réaliser. Comme je l'ai mentionné dans mon exposé, à l'heure actuelle, des sociétés de gestion collective comme Access Copyright ne peuvent réclamer que le montant du droit impayé. Il y a déjà d'autres sociétés, comme Ré:Sonne et la SOCAN, qui peuvent exiger des dommages-intérêts préétablis atteignant entre 3 et 10 fois la valeur du droit impayé. C'est un changement qui pourrait se faire rapidement.
    D'accord. Merci.
    Cela dit, je remercie les témoins d'être venus comparaître.

[Français]

    Merci beaucoup de vos présentations.

[Traduction]

    Elles étaient très bonnes. Vous nous avez donné beaucoup d'éléments à étudier dans le cadre de l'examen que nous menons depuis un an.
    Nous allons suspendre la séance deux minutes. Lorsque nous reprendrons, nous poursuivrons la séance publique et examinerons votre motion.
    Nous suspendons la séance deux minutes.

    


    

  (1655)  

     J'ai deux ou trois questions d'ordre administratif à soulever. Ce mercredi, nous siégerons dans une autre pièce, soit la pièce 430.
    Ensuite, il faudrait qu'il y ait une motion proposant que la date limite pour la réception des mémoires concernant l'examen prévu par la loi de la Loi sur le droit d'auteur soit le 10 décembre 2018.
    Des députés: D'accord.
    Le président: Excellent.
    Monsieur Albas, la parole est à vous.
    Merci, monsieur le président.
    Je vais lire la motion pour les gens qui nous regardent.
Pour aider dans l'examen de la Loi sur le droit d'auteur, que le Comité permanent de l'industrie, des sciences et de la technologie demande aux ministres Freeland et Bains, de venir devant le Comité, accompagnés de fonctionnaires, pour expliquer les répercussions de l'Accord États-Unis-Mexique-Canada (AEUMC) sur les régimes régissant la propriété intellectuelle et le droit d'auteur au Canada.
     Il s'agit pour le gouvernement d'une occasion de discuter de ses négociations. Évidemment, cela a une incidence directe sur une grande partie des travaux, car le pays devra faire certaines modifications législatives à un moment donné. C'est pourquoi cela devrait certainement être pris en compte dans nos discussions sur le droit d'auteur. Il n'y a pas d'échéancier prévu à cet égard, bien qu'il serait de l'intérêt du Comité d'entendre ces témoignages de sorte qu'il puisse faire référence aux témoignages des ministres et des fonctionnaires dans le rapport.
    J'espère que les députés de l'autre côté sont d'avis que c'est une proposition raisonnable. Un certain nombre de différents changements sont directement liés à nos travaux, et cela permettrait de les intégrer, et de rendre des comptes et d'apprendre des choses. Si un changement ou une politique sont bons pour le Canada, le gouvernement aurait alors la possibilité d'en expliquer les raisons. De plus, cela nous donnerait à nous, les parlementaires, qui menons cette étude très approfondie, d'y intégrer une partie de cette information.
    Merci beaucoup.
    Monsieur Longfield.
    L'objectif de la motion, soit nous permettre de comprendre ce qui se négocie ou ce qui a été négocié jusqu'à maintenant, est bien sûr valable. Or, je crois que concernant l'accord, nous devons maintenant voir ce que les Américains proposeront pour ce qui est de la ratification. Il y aura les élections de mi-mandat et l'examen de 21 jours. Je crois qu'il pourrait y avoir des répercussions sur la propriété intellectuelle et le droit d'auteur pendant notre étude.
    Nous devrions faire comparaître des fonctionnaires pour une séance d'information technique après que nous saurons ce qu'il en sera concernant l'accord. Pour l'instant, nous en sommes toujours à la ratification.
    Il y a aussi l'Accord du Partenariat transpacifique global et progressiste, le PTPGP, qui m'intéresse et qui sera renvoyé au Sénat après le vote qui aura lieu à la Chambre un peu plus tard cette semaine — et il y a également l'AECG.
     Je crois que le souhait de voir quelles seront les répercussions internationales, surtout concernant les États-Unis, est valable, mais je ne crois pas que nous soyons prêts. Nous devrions nous concentrer sur la présente étude jusqu'à la fin de l'année, comme nous l'avions déjà prévu.

  (1700)  

    Merci.
    Monsieur Masse.
     Je crois que la motion est très raisonnable et juste. Tout d'abord, je peux donner des précisions sur une ou deux choses qu'a mentionnées M. Longfield. J'étais à Washington le jour où l'entente de principe a été conclue. M. Easter m'a demandé, pour l'association parlementaire Canada-États-Unis, d'y être avec M. MacDonald en tant que membre d'un groupe bipartite, la délégation canadienne pour les réunions de la Border Trade Alliance. C'était intéressant d'y être à ce moment-là.
    Les États-Unis ont décidé de déposer leur texte immédiatement. Ils ont habituellement 30 jours pour déposer leur texte, le corriger, et c'est pourquoi une partie du texte contient des erreurs. Par exemple, on a inversé le Mexique et le Canada à certains endroits. Or, ils l'ont fait pour lancer leurs discussions publiques, et c'est ce qui sera présenté au Congrès.
    Voilà ce qu'il en est du processus actuel, mais il est indépendant du nôtre. Rien ne peut changer dans ce processus concernant l'entente finale. Ils présenteront des rapports au Congrès et le Sénat les examinera, mais rien ne peut changer dans l'entente. Elle correspond exactement à ce qui a été déposé aux États-Unis. Elle peut faire l'objet de modifications liées à la grammaire, par exemple, mais rien ne changera quant au fond.
    De nombreuses audiences ont lieu — on a vu le gouverneur du Kentucky exprimer des préoccupations récemment —, mais elles visent à obtenir le point de vue du public de sorte que les membres du Congrès comprennent la situation avant de voter. C'est l'examen qu'ils en font. Je dirais que ce que nous faisons ici est similaire. Selon leur processus parlementaire d'évaluation, différents comités retourneront au Congrès, alors que dans notre cas, le ministre vient en parler. Nul doute qu'il serait utile de tenir une réunion à ce sujet, car cela permettrait également de dissiper la confusion concernant certaines dispositions sur lesquelles le Parlement doit se prononcer.
    Je crois que c'est une démarche très raisonnable. À mon avis, il est presque déraisonnable de notre part de poursuivre l'étude sans tenir cette discussion. La situation est telle que nous faisons rapport sur une chose au sujet de laquelle les règles ont déjà changé sans avoir reçu même une observation à cet égard. En toute honnêteté, je crois qu'il serait absurde que nous prétendions que nous allons consacrer un an et demi et tous ces fonds publics et ce temps à une étude portant sur un sujet que notre plus important partenaire commercial... et nos liens sont tellement pertinents. Même avant, des témoins nous ont parlé de la loi américaine et des conséquences pour les artistes canadiens, nos industries culturelles, et j'en passe, que nous parvenions à une entente ou non. Et il se peut que l'entente ne soit pas adoptée par le Congrès actuel. Nous ne le savons pas.
    Ce que nous savons en ce moment, c'est qu'on nous demande de préparer un rapport qui se fonde sur les choses qui sont devant nous, ce qui inclut maintenant l'entente possible entre le Canada et les États-Unis. Je crois qu'il est raisonnable de tenir une réunion avec le ministre pour avoir une idée juste de la situation et inclure dans notre rapport des commentaires à ce chapitre.
    Si nous devons avoir des observations à ce sujet, j'inclurais le ministre et je crois que nous aurions alors probablement une excellente occasion d'obtenir des précisions sur une partie de ces questions.
    Je sais que le secteur de l'automobile, par exemple, n'est pas inclus, mais parce que nous menons cette étude, c'est très pertinent. C'est pourquoi ce serait un peu plus valable puisqu'on semble si préoccupé par le côté politique. Je crois que nous devrions tenir une séance distincte sur le secteur automobile à ce sujet. Je l'ai étudié et j'ai demandé à des avocats spécialisés en droit commercial de le faire et il y a toute une liste de qualificatifs pour ce secteur, ce qui est très complexe. Or, cela n'a rien à voir avec ce que nous faisons maintenant. Nous ne sommes pas en train de mener une étude sur le secteur de l'automobile. Nous faisons l'examen sur le droit d'auteur, et nous venons de conclure une entente qui changera les choses à cet égard. Je crois que ce serait une très bonne occasion d'intégrer cela à ce que nous présenterons. Je suis désolé de m'éterniser, mais je crois que c'est important.
    Nous allons présenter quelque chose au ministre, mais il devra répondre et nous soumettre quelque chose et peut-être prendre une mesure avant que la législature se termine. Puisque le temps est limité, je crois qu'il serait très utile d'inclure cet élément.
    Il serait probablement étrange de le faire sans cela. Je crois que c'est la première chose qu'on dirait. Comment avez-vous fait tous ces travaux pour ensuite faire comme si l'entente avec les États-Unis n'avait pas été conclue? C'est pire qu'ignorer la présence de l'éléphant dans la pièce. C'est essentiellement comme si l'éléphant mourait dans la pièce et qu'on restait là à le laisser pourrir. Pendant ce temps, une entente est conclue. Les discussions se poursuivent, et l'odeur devient de plus en plus nauséabonde.

  (1705)  

     Je crois que ce serait bien de tenir une séance et c'est suffisant.
     Monsieur Albas.
    Pour répéter une partie de ce qu'a dit mon collègue, une entente de principe a été conclue. Nous ne pouvons pas dire à quel moment il y aura ratification de notre côté ou du côté américain. Toutefois, nous avons conclu une entente de principe avec notre plus grand partenaire commercial et allié. Nous sommes dans un écosystème nord-américain lorsqu'il s'agit de créativité, de droit d'auteur, etc.
    Il y aura des répercussions majeures. Nous devons en tenir compte dans la préparation de notre rapport. Encore une fois, nos recommandations devront en tenir compte. Voyons voir les raisons. Encore une fois, il y a une raison pour laquelle aucune date n'est proposée. Il s'agit d'une demande raisonnable pour notre étude.
    J'incite les membres du Comité à adopter la motion. Je suis ravi de la présenter au président. Il peut travailler avec les ministres. S'il veut organiser la séance de sorte que chacun comparaisse durant une moitié de séance, c'est bien. Par contre, il est important que les deux comparaissent. Au bout du compte, le ministre Bains lira notre rapport, mais la ministre Freeland connaît les raisons de ces changements. Faisons notre travail. Nous consultons très bien l'industrie. Pourquoi ne voudrions-nous pas consulter notre gouvernement?
    Puisqu'il n'y a pas d'autres interventions, nous passons au vote.
    Je demande un vote par appel nominal, s'il vous plaît.
    (La motion est rejetée par 5 voix contre 4.)
     Y a-t-il autre chose?
    Merci beaucoup. Nous nous reverrons mercredi.
    La séance est levée.
Explorateur de la publication
Explorateur de la publication
ParlVU