Passer au contenu
Début du contenu

NDDN Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.

Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.

Publication du jour précédent Publication du jour prochain
Passer à la navigation dans le document Passer au contenu du document






Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la défense nationale


NUMÉRO 081 
l
1re SESSION 
l
42e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 13 février 2018

[Enregistrement électronique]

  (0845)  

[Traduction]

    Bonjour, tout le monde. Bienvenue au comité de la défense.
    J'aimerais souhaiter la bienvenue à notre invité, le député et le président de la Commission sur la défense de la Lettonie, Ainars Latkovskis. Je vais vous appeler M. le président aussi, pour simplifier les choses.
    Merci à l'ambassadeur de la Lettonie et à l'attaché de défense d'être venus. Je pense qu'environ 13 heures se sont écoulées depuis notre dernière rencontre, alors j'espère que vous vous portez bien ce matin.
    Je vais vous céder la parole pour faire votre exposé liminaire. Nous aimerions savoir comment vont les choses en Lettonie avec le contingent canadien dans le cadre de la présence avancée. Nous aimerions aussi entendre les améliorations que nous pourrions apporter, car nous sommes très résolus à renforcer notre relation avec vous à l'avenir.
    Sur ce, monsieur le président, j'aimerais vous céder la parole.
    Pas tant d'heures se sont écoulées depuis le souper d'hier. Je vais essayer de mettre l'accent sur quelques-uns des points dont nous avons discuté hier, car je pense qu'il est très important que des notes soient prises et que les délibérations soient consignées. À notre comité, chaque séance est enregistrée, et les délibérations sont mises à la disposition du grand public sur demande. N'importe qui peut demander et recevoir un enregistrement. Nous sommes habitués de travailler de la sorte, et nous en sommes très satisfaits.
    Premièrement, avant mon arrivée au Canada, mon personnel a préparé un rapport sur notre relation avec le Canada de façon générale, mais principalement à propos des questions de sécurité. C'était un document très intéressant à lire. C'est une petite leçon d'histoire. Mon premier diplôme était en histoire, et en examinant comment nos relations ont évolué avec le temps, croyez-moi, jusqu'en 2016, il n'y avait que deux paragraphes. L'un portait sur la façon dont le Canada est devenu le premier pays à ratifier l'adhésion de la Lettonie à l'OTAN. Merci encore une fois de cette initiative.
    Le second paragraphe portait sur le fait que le Canada offrait à nos jeunes officiers de faire des études approfondies de l'anglais et du français, ce qui était très utile. Je connais de nombreux officiers qui sont venus ici pour suivre cette formation. Il est intéressant de voir qu'un plus grand nombre d'entre eux sont venus apprendre le français ici plutôt qu'en France. Nous utilisons désormais ces officiers dans le cadre de notre mission au Mali, si bien que c'est très utile.
    L'histoire moderne commence en 2016, le 30 juin, lorsque votre gouvernement a pris la décision d'être un chef de file ou un pays-cadre dans la mission de présence avancée renforcée de l'OTAN en Lettonie. C'est à partir de ce moment-là qu'on commence à lire au sujet d'événements qui se déroulent presque chaque jour ou chaque semaine, de réunions différentes, de planification, de va-et-vient et d'ententes qui sont conclues et signées.
    Imaginez un peu la situation. Votre gouvernement a pris une décision le 30 juin, et vos troupes et tout le matériel nécessaire étaient en Lettonie le 18 juin 2017. Il a fallu moins d'un an pour déployer 450 hommes et femmes et l'équipement nécessaire en Lettonie. Deux mois se sont écoulés, et le Canada était un pays-cadre là-bas et, conjointement avec d'autres partenaires, nous sommes pleinement accrédités en tant que bataillon en Lettonie.
    Je pense que c'est un énorme succès, tant pour l'OTAN que pour tous les pays qui ont pris ces décisions au pays de Galles et à Varsovie. C'était également possible en raison de votre pays et des personnes concernées, notamment les politiciens et le ministre de la Défense, ainsi que les soldats ordinaires qui sont venus en Lettonie. Je pense que vous vous êtes très bien préparés, et nous en sommes déjà à la deuxième phase, au deuxième contingent, et tout va vraiment bien, à mon avis.
    La Lettonie était la plus importante mission de l'OTAN parmi les États baltes et la Pologne. Fait intéressant, il y a plus de troupes en Lettonie qu'en Pologne, et la Pologne en soi, qui reçoit cette aide ou ce soutien, compte environ 200 hommes et chars d'assaut en Lettonie. C'est la preuve que ce n'est pas seulement une question de recevoir de l'aide et qu'il faut aussi en donner. La Lettonie fait pareil; nous participons à six missions à l'étranger. Nos soldats sont actuellement déployés en Afghanistan, au Mali, en Irak et dans d'autres missions, alors nous essayons de faire de notre mieux et de ne pas seulement recevoir de l'aide. Là où nous avons de l'expertise et des connaissances, nous rendons la pareille à nos partenaires, à nos alliés et à l'OTAN en général.

  (0850)  

    C'est également très difficile pour nous car en tant que pays hôte, nous avons dû consacrer beaucoup d'efforts et d'argent pour accueillir des troupes de six pays différents. Nous avons dû effectuer de nombreux travaux de construction sur notre plus grande base militaire près de Riga Adaži, qui est le plus gros terrain d'entraînement militaire dans les pays baltes.
    Au cours de la dernière année, nous avons élargi ce terrain d'entraînement, si bien qu'il est encore plus grand. Nous avons dépensé beaucoup d'argent pour la construction de casernes, alors nos officiers et nos soldats ont maintenant un toit sur la tête depuis l'automne dernier. Nous allons bâtir quatre casernes additionnelles: deux seront complètement financées à même notre budget et deux seront cofinancées avec les Américains.
    Je ne vais pas parler en détail de ces projets logistiques. mais nous avons fait le maximum pour que votre armée reste en Lettonie, et pas seulement pour l'accueillir mais aussi pour lui venir en aide, car vos soldats restent dans le plus gros polygone militaire. Ils ne se contentent pas de dormir dans les casernes, de se réveiller, d'assumer des fonctions et d'assurer une présence. Non, ils s'entraînent. Ils s'entraînent ensemble avec les soldats des six pays, et les Lettons participent activement au processus.
    À l'avenir, et je sais qu'il y a eu des discussions, il pourrait peut-être être très utile que vous me demandiez de faire une suggestion. Nous avons entrepris cette mission il y a quelques années avec les Américains, et elle s'est avérée très efficace. Les Américains voulaient mettre à l'essai certains de leurs drones en Lettonie. Nous avons dû modifier quelques lois pour ce faire. Nous avons aménagé des voies aériennes autour de la Lettonie pour que ces drones puissent voler. En discutant avec des officiers américains, j'ai appris qu'ils n'avaient même pas au Texas les possibilités territoriales pour s'entraîner et faire voler des drones près de la frontière avec la Russie, bien entendu.
    C'est une capacité qui pourrait peut-être vous être utile. J'ai été surpris. Je ne connais pas votre situation. Les Américains ont amplement de terres, mais l'espace aérien où ils peuvent utiliser ces drones se limite à des endroits tels que des installations militaires. Nous avons très rapidement modifié nos lois et nos règlements, si bien qu'ils peuvent maintenant faire voler ces drones. Il y a des voies aériennes spéciales tout autour de la Lettonie où l'on peut utiliser des drones. Je pense que ce serait très intéressant pour vos militaires.
    La Lettonie a également mis sur pied en 2014, avec l'aide de l'OTAN, le Centre d'excellence pour la communication stratégique de l'OTAN. Compte tenu des situations géopolitiques à l'heure actuelle dans le monde, de la propagande russe et des différents développements dans ce champ d'activité, ce centre est devenu très utile.
    Le Canada participe à ce centre d'excellence depuis le début, a investi de l'argent et a toujours eu des représentants à Riga. À l'heure actuelle, il y a deux Canadiens qui travaillent là-bas. Imaginez que ce centre d'excellence de l'OTAN ne travaille pas précisément pour la Lettonie. Nous disons parfois en riant que le centre n'en fait pas assez pour la Lettonie car il a élaboré différents algorithmes pour savoir d'où proviennent les nouvelles sur les réseaux sociaux, où nos navires sont déployés et où la Russie est présente.

  (0855)  

    Il y a des algorithmes en anglais et parfois en russes, mais la Lettonie est un petit pays et la langue n'est pas couramment utilisée dans ce centre d'excellence. Quoi qu'il en soit, nous pouvons tirer des leçons de ce que le centre a découvert dans le cadre des études qu'il a réalisées, et les gens qui travaillent à ce centre sont très compétents. C'est une initiative dans laquelle investir pour obtenir des résultats.
    Je devrais peut-être m'arrêter ici. Les longs exposés, ce n'est pas ma spécialité. Je suis prêt à répondre à toutes vos questions.
    Excellent. Merci beaucoup de votre déclaration liminaire.
    Je vais céder la parole à M. Robillard. Vous avez les sept premières minutes pour poser vos questions.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Latkovskis, bienvenue au Comité permanent de la défense nationale.
    Depuis l'adhésion de la Lettonie à l'OTAN en 2004, quels éléments ou actions clés de cette alliance ont été les plus profitables à votre pays?

[Traduction]

    Je dois dire que, depuis que nous sommes devenus membres de l'alliance militaire la plus puissante au monde, la situation est très intéressante. Nous participons à des missions à l'étranger. C'est dans ces missions où le personnel militaire peut recevoir une véritable formation — en Afghanistan, en Irak et dans différentes autres régions dans le monde, ainsi qu'au Kosovo et en Albanie il y de cela de nombreuses années. Cependant, il y a aussi évidemment des décisions qui ont été prises aux sommets de l'OTAN au pays de Galles et à Varsovie. Je pense que ces décisions étaient très importantes pour nous, et nous en voyons maintenant les résultats, avec six pays membres de l'OTAN postés en Lettonie.
    Du point de vue du grand public, c'est le sentiment de sécurité, le sentiment d'appartenance à l'Occident, à la partie démocratique du monde. C'est difficile à expliquer même pour les gens ordinaires dans la rue, mais c'est l'impression que partagent de nombreux Lettons — et pas seulement les Lettons — qui vivent en Lettonie. Lors de la guerre en Géorgie, peu de politiciens se sont mobilisés en Occident. Mais quand la Russie a annexé la Crimée et que la guerre a éclaté dans l'Est de l'Ukraine, de nombreux Lettons ont posé la question suivante: « Qu'arrivera-t-il si la Russie fait la même chose à la Lettonie? » La vieille génération se disait, « Regardez l'Ukraine, surtout l'Est de l'Ukraine; elle partage une frontière avec la Russie, mais nous aussi ». J'ai assisté à des assemblées publiques où des gens se levaient pour prendre la parole et me dire: « Monsieur Latkovskis, vous affirmez que tout va bien, mais regardez les faits. Nous avons une frontière commune. L'Ukraine compte une population assez importante de russophones; nous aussi dans l'Est. Ce sont deux points que nous avons en commun. »
    Les gens avaient tort en comparant des pommes et des oranges. En Lettonie, depuis que nous avons recouvré notre indépendance, nous avons choisi de faire partie à nouveau de l'Occident démocratique. Nous n'avons pas choisi un entre-deux, en raison des intérêts russes en Ukraine, mais de nombreux politiciens qui étaient responsables de ce pays dans les années 1990 et 2000 ont choisi un entre-deux, une zone grise en matière de sécurité. Nous ne pouvons pas être en sécurité lorsque nous sommes dans une zone grise, alors la Lettonie est membre de l'OTAN.
    Je vais vous dire comment j'explique habituellement la situation aux journalistes en Lettonie et à la population en général. Vous avez un système de sécurité, qui a été mis sur pied en 1949, et votre pays était l'un des fondateurs de cette organisation. S'il arrive quelque chose, qu'un pays attaque un allié de l'OTAN, et que les pays de l'OTAN ne prennent pas de décision et ne défendent pas cet allié, tout le système de sécurité s'effondre. Que faites-vous? Que décidez-vous? Si la Russie attaque la Lettonie, ce n'est pas si important. Si elle attaque la Norvège, c'est peut-être important. Si elle attaque la France, c'est très important. Ce n'est pas ainsi que les choses fonctionnent. On ne fait pas de calculs. Si vous ne venez pas défendre le pays et n'intervenez pas, tout le système de sécurité s'effondre. Vous faites confiance au système car vous croyez à son efficacité. C'est ainsi qu'il fonctionne.
    Cette explication a été reprise par de nombreux autres politiciens de presque tous les partis, et elle a satisfait le grand public. Les gens ont compris.
    Le geste le plus important a été posé par deux pays, en fait. Lorsque la Russie a commencé ses opérations en Ukraine, deux pays ont immédiatement pris une décision et ont déployé leurs chasseurs dans les pays baltes pour mener des missions de patrouille des airs. Ces deux pays étaient les États-Unis et le Canada.

  (0900)  

    Tout le monde sait que les États-Unis sont intervenus. Les gens et les journalistes se rappellent rarement que le Canada a également envoyé ses CF-18 dans les pays baltes dans le cadre de missions de patrouille des airs. C'est quelque chose que vous devriez savoir et dont vous devriez être fiers. C'était important à l'époque. Ce n'était pas aussi important pour la Russie, pour tenter de dissuader les Russes de poursuivre leurs opérations. C'était important pour les Lettons car ils constataient qu'ils avaient des alliés en temps de crise. Merci beaucoup.
    Merci.
    Merci beaucoup de votre temps.
    Je vais maintenant céder la parole à M. Bezan.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur l'ambassadeur, monsieur le président et colonels, c'est un plaisir de vous recevoir au Comité.
    Je veux adresser mes questions à M. Latkovskis.
    Tout d'abord, je veux remercier la Lettonie d'avoir adopté la loi de Magnitsky. Nous en avons discuté brièvement hier soir, des 63 votes et des 37 abstentions, je pense. Cette initiative montre très bien que la Lettonie, le Canada, les États-Unis et d'autres pays européens font front commun pour demander des comptes aux fonctionnaires étrangers corrompus et aux auteurs de graves violations des droits de la personne. Je sais que la Russie se défend plus fort que n'importe quel autre pays, mais la loi s'applique à l'échelle mondiale; elle ne cible pas seulement les ploutocrates au Kremlin. Je tiens à vous remercier.
    Je veux également remercier la Lettonie d'être un pays hôte aussi remarquable pour nos troupes. Tous les membres qui font partie des Forces armées canadiennes à qui j'ai parlé qui ont été stationnés en Lettonie dans le cadre d'une présence avancée renforcée ont beaucoup aimé l'expérience là-bas et la collaboration avec les forces armées très professionnelles de la Lettonie et de tous les autres États qui participent à la présence avancée renforcée pour l'OTAN. C'est une excellente expérience d'apprentissage pour l'interopérabilité et pour les leçons tirées que les pays peuvent échanger.
    Comme vous le savez — nous en avons parlé dans le passé lorsque nous étions à Riga —, nous avons discuté des fausses nouvelles en provenance de la Russie et de ceux qui essaient de calmer la Russie dans le contexte européen. Nous avons même ces fausses nouvelles ici au Canada. Nous avons eu des journalistes... Il y a en a un qui me vient à l'esprit. Il écrit pour le Chronicle Herald à Halifax et a récemment déclaré que la présence de nos troupes en Lettonie est un gaspillage d'argent et de ressources militaires. Il dit que c'est « pour contrer une menace non existante du bonhomme Sept-Heures russe ».
    Même si nous avons des détracteurs ici au Canada, en tant qu'ancien journaliste, comment expliquez-vous aux médias et à ceux qui veulent calmer la Russie à quel point il est important d'avoir une présence dans les pays baltes?

  (0905)  

    Tout d'abord, je ne connais pas ce journaliste personnellement, mais les journalistes comme celui-là dans notre pays sont très souvent qualifiés d'« idiots utiles ». C'est la meilleure expression pour les qualifier, et il y a des cas plus graves où la Russie achète des gens comme eux. Ils écrivent ce pour quoi ils ont été payés. Je ne parle pas de cet article précis ou de cet auteur précis. Je ne connais pas la personne.
    En Lettonie, nous connaissons très bien ces situations. Même si nous les connaissons très bien et depuis longtemps, cela ne signifie pas forcément que ces fausses nouvelles ou informations ne se rendent pas aux oreilles de nos habitants de temps à autre. Les principales cibles pour ce type de nouvelles ou de renseignements ne sont pas les politiciens, si bien que cet article n'a probablement pas été rédigé pour vous. Il était destiné à vos électeurs pour qu'ils puissent vous écrire une lettre ou un courriel et vous dire: « Qu'est-ce qui se passe, nom de Dieu? Pourquoi dépensez-vous de l'argent là-bas? Ce n'est pas important pour nous. »
    Vous avez posé la question sur l'adhésion de la Lettonie à l'OTAN en 2004. Nous sommes devenus membres de l'OTAN, et nous avons participé à des missions en Afghanistan, et je faisais déjà de la politique à l'époque et les gens me demandaient ceci: « Pourquoi l'Afghanistan? C'est si loin. » Même si la situation est chaotique là-bas comme en Ouzbékistan, au Kazakhstan, en Russie et à des milliers de kilomètres... pourquoi nous soucions-nous des gens ordinaires?
    Premièrement, nous nous soucions d'eux car nous faisons partie de l'alliance militaire. Si nos amis et nos partenaires font leur part et ont pris la décision ensemble, et pas isolément, nous ferons front commun avec eux. Et comme nous le savons, si jamais le jour vient, ils viendront nous aider. C'est ainsi que nous percevons le monde à l'heure actuelle. C'est pourquoi nous participons à six missions, même si lorsque vous regardez notre armée, elle ne compte que 14 000... Nous avons 6 000 professionnels et 8 000 gardes nationaux, qui sont des bénévoles. Ce n'est pas comme si nos ressources sont illimitées, mais nous faisons de notre mieux. Lorsque les mesures sont déjà en place, cela nous aide à obtenir de la formation et de l'expertise, de connaître d'autres officiers et soldats d'autres armées, d'apprendre à travailler avec eux, etc. Par ailleurs, nous faisons également partie de cette merveilleuse alliance militaire, et nous sommes responsables de faire en sorte que le monde soit un lieu sûr. C'est notre responsabilité même si nous sommes un petit pays. Vous avez signé l'entente. Vous ne vous contentez pas d'espérer qu'on vous aidera. Vous signez une entente, vous savez qu'on vous aidera à l'avancement de cette cause. Je pense que c'est ainsi que la démocratie fonctionne. Vous voulez faire partie de ce monde, et vous espérez que tous les pays deviennent démocratiques à un moment donné, et vous aidez à assurer la sécurité dans le monde, peu importe l'endroit. Nous faisons cela.
    Je sais que vous avez évoqué, dans le passé, la nécessité de veiller à la séparation des responsabilités entre l'UE et l'OTAN, ne serait-ce que de façon officieuse. Dans le contexte de l'invasion de la Crimée par la Russie, il ne fait aucun doute que la question de l'utilité de l'OTAN pour les pays membres — en particulier ceux d'Europe occidentale — est revenue au centre de l'actualité, comme c'est le cas depuis deux décennies.
    Mes collègues du Comité savent que je suis un peu obsédé par PESCO, en Europe. Vos commentaires antérieurs, qui remontent à 2015, portaient sur les rôles de l'Union européenne et de l'OTAN, sur la séparation des responsabilités entre ce qui est d'ordre militaire et ce qui est davantage de l'action politique. D'un point de vue d'observateur, PESCO semble changer quelque peu la donne. Je me demande si vous pourriez nous donner une analyse...

  (0910)  

    Je suis désolé; nous devons en rester là pour le moment, car c'est tout le temps que nous avons pour le député. Nous pourrions y revenir, mais je dois maintenant céder la parole au député Garrison.
    Vous avez bien géré le temps. Je dois en tirer des leçons, car dans mon comité, certaines personnes ne s'arrêtent jamais. Je ne fais pas de comparaison...
    Je remercie les témoins d'être ici.
    Je veux ajouter quelque chose aux observations préliminaires de M. Bezan. Je tiens à vous remercier de l'accueil qui a été réservé au Comité lors de notre visite en Lettonie. J'estime que nos deux visites — notre visite aux troupes canadiennes et notre visite avec les Lettons, vous-même et d'autres — nous ont été très utiles pour comprendre le rôle du Canada en Lettonie.
    Je trouvais que le voyage était important, car il témoignait de l'appui unanime du Parlement à l'égard du rôle du Canada dans la présence avancée renforcée de l'OTAN, pas seulement par rapport au rôle traditionnel de l'OTAN de réagir aux menaces venant de l'est, mais aussi pour son rôle accru axé sur la préservation de la stabilité et de la démocratie. J'estime que nous apportons une grande contribution à cet égard.
    Quelle a été la réaction de la Russie par rapport à la présence avancée renforcée? Selon vous, quelles sont les principales répercussions sur la politique russe à l'égard de la Lettonie ou des pays baltes en général?
    Parlons de l'état de préparation militaire de la Russie. Le pays a tenu le plus important exercice militaire de son histoire l'an dernier. Il avait pour nom Zapad 2017, qui signifie « Ouest 2017 ». L'exercice s'est déroulé de la mer Noire à la frontière de la Norvège, et touchait aussi l'Ukraine. C'était intéressant à observer, car cela permettait d'évaluer les forces qui pourraient être déployées en cas de conflit. Il était intéressant de constater que l'exercice s'étendait sur des milliers de kilomètres et qu'il visait à isoler les pays baltes ou l'OTAN, mais aussi à empêcher toute aide potentielle de la Norvège. C'est un aspect dont nous devons tenir compte.
    J'en arrive ici à la réponse à votre question — et à la vôtre aussi —, parce que PESCO, une sorte d'entité militaire de l'UE... Nous sommes très favorables à ce qu'on appelle un « Schengen militaire », car la plupart des pays de l'OTAN sont situés en Europe et que le déplacement de troupes et d'équipement prend beaucoup de temps.
    À cela s'ajoutent les questions de souveraineté. C'est plutôt étrange, car peu de lois ont changé depuis la fin de la guerre froide. Pendant la guerre froide, aucun politicien ne se demandait comment les Américains stationnés au nord de l'Italie se rendraient à la frontière orientale de l'Allemagne, par exemple, pour intervenir en cas d'attaque de la Russie. Personne ne se posait la question; ils y seraient allés, tout simplement. De nos jours, on pose trop de questions: « Comment traverseront-ils la frontière? Leurs armes seront-elles chargées? »
    Examiner cet enjeu sous cet angle soulève des problèmes; l'UE l'a d'ailleurs reconnu. Essentiellement, l'UE n'est pas une organisation militaire. La Lettonie s'est jointe à l'UE, ce qui nous donne évidemment un sentiment de sécurité, parce que le pays fait partie d'un important bloc économique, d'une union culturelle, etc. Ce sont des aspects très importants. Les politiciens ne sont pas les seuls à le souligner. C'est aussi le cas des militaires, qui tiennent compte de questions logistiques et de divers exercices qui ont eu lieu en Lettonie ces trois dernières années, en plus du stationnement de troupes — pas nécessairement les vôtres —, notamment les troupes espagnoles et italiennes qui participent à la mission que vous dirigez en tant que pays-cadre. Ils doivent examiner les questions logistiques, comme le déplacement d'équipement et de troupes, les efforts nécessaires et les procédures requises par divers pays. Cela prend du temps, et c'est stupide.
    L'UE doit faire quelque chose à ce sujet. Voilà pourquoi c'est important. Au début, nous étions très sceptiques, parce que nous avons une grande confiance en l'OTAN, croyez-moi, mais certains problèmes peuvent être réglés par l'UE.
    C'est aussi une question de recherche et développement dans ce domaine. Vous savez, les petits pays, comparés au vôtre... Tous les pays de grande taille, donc ceux qui n'ont pas la taille de la Lettonie, ont leurs propres activités militaires pour l'utilisation d'hélicoptères, etc. Cela mobilise une grande part de leurs ressources. Il convient de faire quelque chose par rapport à ces diverses normes, malgré l'existence de normes communes au sein de l'OTAN.

  (0915)  

    J'ai entendu toutes sortes de choses de divers politiciens. Un jour, je participais à une importante conférence en France, dans une ville située près de la Manche. C'était peu après la tenue d'élections, et le nouveau président du comité de la défense venait d'être élu. Dans une discussion avec nous, il a indiqué qu'il n'avait rien à faire des absurdités sur la normalisation et tout le reste. Il a dit qu'il était originaire de cette ville et que tout ce dont la France avait besoin devrait être produit en France. Je me suis dit que la discussion n'irait pas très loin.
    Voilà le genre d'enjeux sur lesquels l'UE doit se pencher. Je ne sais pas dans quelle mesure elle peut réussir, surtout lorsqu'on pense que la production pour le secteur militaire est synonyme d'emploi, de salaires versés, d'avantages sociaux, etc. Vous savez que c'est important. Vous devez trouver une façon quelconque d'harmoniser certains aspects.
    Je vais essayer d'utiliser la même tactique que M. Bezan: je vais poser une petite question et vous pourrez y répondre en répondant à la question suivante.
    Ma question aurait été...
    Veuillez vous limiter à 10 secondes, s'il vous plaît.
    Je voulais savoir quel était le rôle de la Lettonie dans certains autres aspects de l'OTAN, y compris les efforts de l'OTAN visant à atténuer les tensions nucléaires dans l'est et en Europe, mais je sais que mon temps est écoulé.
    Très bien.
    Je donne maintenant la parole à la députée Alleslev.
    J'aurais adoré avoir l'occasion d'accompagner le comité de la défense en Lettonie, mais nous avons des contraintes financières, de sorte que ce ne sont pas tous les membres qui ont pu y aller. Cela ne veut pas dire que nous n'aurions pas aimé cela. Ce voyage nous a permis d'obtenir d'excellentes informations. Même si certains d'entre nous n'y ont pas participé, ce formidable voyage nous a été très utile. Merci beaucoup.
    La raison d'être de notre étude est en quelque sorte liée aux propos de mon collègue James. Je pense que nous sommes rendus, pas seulement au Canada, mais aussi ailleurs, à un point où les questions sont essentiellement les suivantes: avons-nous besoin de l'OTAN? Convient-il de laisser l'OTAN aux Européens? Quelle est l'importance de l'OTAN pour le Canada? En quoi le Canada est-il important pour l'OTAN? Voilà pourquoi nous avons entrepris cette étude et convoqué des témoins.
    La Russie est-elle une réelle menace? Je pense que c'est une question légitime. À mon avis, les gens ne pensent pas nécessairement à la possibilité d'une invasion, car nous avons évidemment la présence avancée renforcée, qui a un effet dissuasif.
    Vous tiendrez bientôt des élections. On observe une prévalence accrue de cybermenaces, de désinformation et de diverses choses du genre. Notre démocratie est évidemment fondée sur notre capacité d'accéder à ces informations et de tenir des débats démocratiques avec nos citoyens.
    Dans quelle mesure ces formes d'ingérence vous préoccupent-elles? Quel appui recevez-vous? Vous avez brièvement parlé du centre d'excellence en cyberdéfense de l'OTAN. À votre avis, cette ingérence est-elle une menace? Si oui, dans quelle mesure?

  (0920)  

    On trouve des exemples dans divers pays qui ont tenu des élections. Il y a quelques années, certains considéraient qu'il était tout à fait impensable que la Russie puisse un jour s'ingérer dans le processus électoral américain. Maintenant, c'est un fait reconnu. C'est aussi arrivé en Europe, pour des élections de moindre importance, mais cela s'est tout de même produit. La Russie laisse sa marque partout.
    Ce n'est pas de la peur. Nous connaissons très bien la Russie, car nous vivons juste à côté, et les Russes cohabitent avec nous. Ils ont leurs bulletins de nouvelles et leurs émissions de télévision, ils travaillent parmi nous, et c'est en Lettonie qu'on observe le plus haut taux de mariages mixtes entre ressortissants russes et européens. Nous les connaissons très bien. Nous constatons les changements, nous suivons l'actualité et ce qui se passe ailleurs. Le fait de bien les connaître ne signifie pas nécessairement que nous pourrions être prêts à tout. Nous avons beaucoup investi dans nos capacités de détection des cyberattaques afin de les contrer.
    Il y a deux ans, la Lettonie assurait la présidence de l'Union européenne, un rôle que nous avons pris très au sérieux. Nous avons vu les cyberattaques qui se sont produites en Lituanie et, auparavant, en Estonie. Notre comité a été très actif à cet égard. Nous avons eu des rencontres régulières avec nos unités de cyberdéfense et nous nous sommes préparés pour ce genre de situation.
    La Russie nous met à l'épreuve de temps à autre. Récemment, nous avons eu des problèmes avec un système informatique du réseau de la santé. Vous allez chez le médecin, il vous prescrit un médicament, et tous les renseignements sont transmis à la pharmacie. Le système a été hors ligne pendant des heures, aux heures de grande affluence des personnes âgées dans les hôpitaux.
    Je pense plutôt aux opérations d'influence, parce que cela a peut-être eu une incidence sur les élections américaines. Certes, il n'y avait pas à cette occasion un parti prorusse cherchant à accroître ses appuis, et pourtant, d'autres pays d'Europe de l'Est ont plus... Il y a eu, possiblement, une transformation fondamentale de ce pays lorsque l'élément prorusse a connu du succès.
    Je comprends maintenant.
    Il y a, depuis toujours, un parti prorusse dans notre assemblée législative. Les années passent, la population évolue, les personnes âgées vieillissent et les jeunes obtiennent le droit de vote. Ce parti essaye aussi de changer. C'est très difficile, car comme dans tout pays démocratique, les personnes plus âgées ont une obligation et participent aux élections. Disons simplement que les jeunes ne sont pas aussi impliqués.
    Le parti cherche aussi à s'adapter au changement de mentalité. Il a rejoint les rangs d'un réseau européen de partis sociaux-démocrates et il essayera d'avoir deux votes en même temps. C'est très difficile, car comme je l'ai indiqué, ceux qui ont l'habitude de voter pour ce parti sont principalement des gens de la génération plus âgée, une génération qui a grandi et fait la guerre à l'époque soviétique et qui écoutait les nouvelles de Moscou. Ces gens ont un rôle à jouer.
    De toute évidence, ce n'est pas une bonne chose pour la Lettonie, mais comme je l'ai déjà indiqué, cela n'a rien de nouveau pour les Lettons. Tout le monde connaît le parti, les électeurs qui l'appuient et les problèmes connexes. Tout cela est connu depuis les années 1990. Cela a commencé en 1993, et cela se produit constamment. Ce n'est rien de nouveau. On ne s'attend pas à ce que les choses se déroulent comme aux États-Unis, où les choses sont découvertes après coup. Lorsque des choses de ce genre apparaissent sur les réseaux sociaux, les gens les signalent immédiatement. Il n'est pas nécessaire de faire appel à des unités spéciales ou à des centres d'excellence.
    Je souligne au passage que l'Union européenne consacre des fonds à la lutte contre les fausses nouvelles et qu'elle a créé une unité spéciale à cette fin, EU Mythbusters, qui fonctionne très bien et que vous pouvez suivre sur Twitter et Facebook. L'unité suit les fausses nouvelles sur de longues périodes, sur une base hebdomadaire ou mensuelle, puis compare la fausse nouvelle et la réalité. On montre une photo contrefaite à l'aide de Photoshop, puis on montre l'original. C'est très populaire et cela fonctionne bien.

  (0925)  

    Merci.
    Nous passons maintenant aux interventions de cinq minutes.
    Monsieur Spengemann, la parole est à vous.
    Merci beaucoup d'être avec nous.
    Je voulais poursuivre sur le thème du volet politique de l'Alliance. Le Comité consacrera ses deux ou trois prochaines séances à la politique étrangère et à la défense, et je voulais revenir sur une question qui vous a été posée par mon collègue, M. Bezan, mais dans une perspective plus large, pour discuter avec vous des ensembles de valeurs politiques complémentaires qui ont contribué à l'édification de l'Union européenne et de l'OTAN.
    Je crois savoir, si j'ai bien vérifié les faits, que vous avez été élu au Parlement pour la première fois tout juste deux ans avant l'adhésion de la Lettonie à l'Union européenne. Pourriez-vous nous faire part de vos observations sur l'importance de la cohérence des politiques de l'Union européenne à l'égard de la Russie et du monde, en ajoutant à cela vos commentaires sur l'importance du volet politique de l'OTAN, sur son importance sur le plan politique et non seulement en tant qu'alliance militaire? Le Canada n'est pas membre de l'Union européenne, mais il est membre de l'OTAN. Je crois que pour nous, la question d'ordre politique, y compris l'effet dissuasif d'une vision commune des notions de démocratie, de justice et de libertés individuelles pour contrer la Russie et d'autres ennemis potentiels... Il serait très important d'entendre vos commentaires à ce sujet.
    Nous pourrions y passer l'après-midi.
    Vous avez environ quatre minutes.
    Des députés: Oh, oh!
    Nous nous contenterons du résumé.
    Je vais vous donner des exemples. L'Union européenne est importante. Comme je l'ai dit plus tôt, elle nous donne un sentiment d'appartenance à l'Occident, au-delà des choses pratiques comme le libre-échange, la liberté de mouvement... qui est bien réelle. Dans la zone Schengen, il n'y a pas de point de contrôle. Vous n'avez même pas à vous identifier. On y passe comme on passe d'une ville à l'autre en Lettonie.
    Si vous pouviez diviser la première partie de votre question, quel type de... En 2002, j'ai été élu et en 2004, pendant deux ans, nous siégions deux fois par semaine aux séances plénières, en vue de modifier nos lois pour qu'elles s'harmonisent à celles de l'Union européenne. Elles ne visaient pas l'armée. Les lois sur notre armée, notre sécurité, nous les avons changées parce que nous nous apprêtions à devenir membre de l'OTAN. Elles avaient aussi besoin d'être modifiées et normalisées.
    De quelle façon...?
    Pour poser la question autrement, si l'on pense à la cohérence des politiques de l'OTAN par rapport à celles de la Russie — restons en Russie pour l'instant — et à la cohérence des politiques à l'intérieur de l'Union européenne en ce qui a trait à la Russie...
    En ce qui a trait à l'Union européenne, je peux peut-être l'exprimer ainsi, comme l'a dit la gentille dame: dans certains pays, on dit des partis ou du président au pouvoir qu'ils sont prorusses ou qu'ils ont des propos prorusses. C'était partout aux nouvelles; les gens sont inquiets. De temps en temps, ils rencontrent Poutine, un premier ministre russe ou un vice-premier ministre. Puis, ils sont d'avis qu'il faudrait retirer tous les embargos, des choses du genre. Mais lorsque vient le temps de prendre une décision à Bruxelles, lorsqu'ils s'assoient autour de la table, les pays de l'Union européenne s'unissent contre l'agression russe, les fausses nouvelles et tout le reste.
    Il s'agit probablement plutôt de la révérence de certains politiciens envers Poutine. Ou alors ils s'intéressent à certains projets là-bas, comme l'Allemagne et le pipeline qui passerait par les pays baltes, ce qui n'est pas vraiment une bonne chose puisque l'Union européenne dépendrait davantage du gaz russe. Je parle de l'avenir, du gaz liquéfié. Vous en produisez aussi au Canada, oui? Ou pas. Les Américains en produisent.

  (0930)  

    Oui.
    Ils ont modifié leurs lois pour en permettre l'exportation. Les Allemands ont conclu toutes sortes d'ententes et veulent plus de pipelines à partir de la Russie. Ils seront plus dépendants. Il y a des contradictions, mais au bout du compte, lorsqu'ils sont ensemble, ils sont unis.
    Qui en souffre le plus? Qui subit ces sanctions? Les pays baltes. Mais nous ne nous plaignons pas beaucoup parce que nous savons qu'on ne peut parfois pas améliorer son bien-être si on ne se trouve pas en bonne position sur le plan de la sécurité. Comment peut-on alors attirer des investissements? Tout est relié. On ne peut pas dire qu'on veut faire des échanges avec la Russie, sans égard à ce qui s'y trouve. Non.
    C'est bon à savoir. Merci
    Monsieur Yurdiga, vous avez la parole.
    Je vous remercie de vous joindre à nous ce matin. J'ai aussi beaucoup aimé notre conversation d'hier pendant notre souper.
    Nous avons beaucoup parlé des fausses nouvelles. Nous avons parlé des cyberattaques et de la cyberdéfense, dans une moindre mesure, mais nous n'avons pas parlé de corruption interne. Quelles mesures ont été prises pour aborder cette question? Est-ce que l'OTAN fait partie du groupe qui s'attaque à la corruption? Elle touche toute l'Europe, mais on parle surtout de l'influence russe.
    À quel type de corruption faites-vous référence? La corruption politique?
    Très souvent, il n'y a aucune preuve. Très souvent, le programme de la Russie est comme celui des États-Unis: il correspond au programme d'un parti politique ou d'un candidat. Ce n'est pas nécessairement de l'argent. Ce sont souvent les intérêts qui sont communs. La Russie le sait et l'utilise ou en abuse pour son propre profit.
    Je crois aussi que très souvent — et c'était le cas pendant la guerre froide —, certaines personnes peuvent être achetées. Il y a certainement des politiciens qui peuvent être achetés. De nombreuses personnes ont des problèmes, surtout les personnes ambitieuses comme nous.
    Il existe de nombreuses façons et la Russie les utilise toutes, comme le faisait l'Union soviétique. Le président de la Russie, Poutine, a étudié à l'école du KGB. Les gens autour de lui qui occupent de hautes fonctions sont ses anciens collègues. La façon dont se comporte la Russie, ses tactiques et sa stratégie, sont très semblables à ce qui se faisait dans le passé.
    Récemment, j'ai lu un article au sujet d'une personne qui avait réussi à mettre la main sur un manuel du KGB où l'on explique comment travailler avec les étrangers. Je crois qu'il est encore utilisé de nos jours. On parle de prostituées, d'argent, d'alcool... Tout ce que je peux dire aux politiciens, c'est de faire très attention.
    Je suis allé à Moscou, avant l'invasion de l'Ukraine. À l'hôtel, on vous appelle le soir et on vous offre toutes sortes de choses. Il n'en revient qu'à vous de choisir. Les Russes utilisent tout ce qu'ils peuvent pour atteindre leurs objectifs, quels qu'ils soient... la position du Canada sur un sujet, par exemple, peu importe. Je ne parle pas seulement de vous, mais ce sont les tactiques utilisées.
    Les choses n'ont pas beaucoup changé. Ils en savent peut-être plus maintenant. Ils sont meilleurs avec les technologies. Ils ont compris très rapidement que l'Internet était un bon moyen d'obtenir ce qu'ils voulaient, alors ils l'utilisent.
    C'est difficile. Si la séance n'était pas publique, je pourrais vous en dire un peu plus. Je suis membre du Conseil de sécurité national. Chaque mois, nos services de sécurité nous font un compte rendu et ils perçoivent souvent des choses, qu'ils transmettent aux services de sécurité de votre pays ou d'autres pays de l'OTAN. C'est intéressant de voir la façon dont fonctionnent les services de sécurité russes. On se croirait presque au temps du régime soviétique. Ils travaillent de 9 heures à 17 heures. Cela n'a pas d'importance. On remarque souvent que ce sont des Russes parce qu'ils finissent de travailler vers 17 heures là-bas. En Europe, ce serait 15 ou 16 heures et dans votre région du monde, ce serait différent. C'est parfois très facile de les détecter en raison de cela.

  (0935)  

    Merci. Ce n'est pas facile d'aborder ce sujet.
    Vous avez dit que la Russie était très agressive. Elle utilise tous les moyens possibles pour arriver à ses fins. Est-ce qu'elle utilise l'économie? Depuis que l'OTAN a déployé des troupes sur le terrain et se charge de l'entraînement, est-ce que les Russes ont pris des mesures économiques? C'est une préoccupation.
    Oui. Nous avons des sanctions; les États-Unis en ont imposé.
    Les Russes en imposent également. Comme je l'ai dit plus tôt, je crois que les sanctions nous frappent plus fort que bon nombre d'autres pays de l'Union européenne, parce qu'elles visent surtout les aliments. Comme nous avons une frontière commune, au temps du régime soviétique, les pays baltes étaient les principaux fournisseurs de Moscou, de Saint-Pétersbourg et de Leningrad. Sans eux, la population aurait crevé de faim. Les Russes croyaient qu'ils pourraient frapper fort ici et dans d'autres pays de l'Europe de l'est, et que nous nous allions nous plaindre ensuite des sanctions de l'Union européenne à Bruxelles, que nous allions dire: « On devrait laisser tomber les sanctions; soyons tous amis. » Ils utilisent cela.
    Cela les touche plus ou moins. Ils ne mangent plus de fromage. C'est une production de fromage. Ce n'est pas du vrai fromage. On fabrique des substituts.
    Du fromage fondu.
    Fondu ou quelque chose, mais ce n'est pas du fromage.
    Ils n'ont pas grand-chose; et tout le reste qui vient de l'Union européenne et d'autres pays est sanctionné sur la liste: le lait, la viande, le poisson, divers aliments. Certaines de nos entreprises ont dû travailler très fort pour trouver des marchés dans d'autres pays, mais aucune d'entre elles n'a coulé; elles fonctionnent et cela aide notre économie au bout du compte, parce qu'elles doivent regarder ailleurs. C'est facile de vendre à la Russie; c'est un grand pays. Il faut trouver d'autres façons avec de petits pays.
    Merci.
    Je cède maintenant la parole à M. Fisher. Allez-y, monsieur.
    Merci, messieurs, de votre présence ici aujourd'hui.
    Nous en avons parlé lorsque nous étions en Lettonie et nous en avons parlé hier soir. Ce qui m'intéresse... Je suppose qu'il s'agit d'une relation unique en raison de son emplacement, mais de nombreux Russes se trouvent en Lettonie. De nombreux Lettons parlent le russe. Il y a des groupes politiques et des partis prorusses.
    Ce qui m'intéresse, c'est la campagne de désinformation. Lorsqu'on pense à la façon dont se répandent les fausses nouvelles, est-ce qu'elles se rendent jusqu'en Lettonie, jusqu'en Russie et jusqu'aux troupes de l'OTAN? Est-ce qu'elles se rendent jusqu'à la population générale et est-ce qu'elles entraînent des conséquences? Y a-t-il des histoires de réussite de leur côté? Y en a-t-il du vôtre ou est-ce qu'on roule les yeux collectivement parce que les Lettons comprennent ce qui s'en vient? J'aimerais en savoir plus sur la dynamique qui s'opère puisqu'une grande partie de la population lettone est Russe ou parle le russe.
    Si ce sujet vous intéresse, je vous recommande de consulter le site Web du Centre d’excellence pour la communication stratégique de l’OTAN à Riga. Il a réalisé des recherches exhaustives et utilisé des algorithmes. Il a cherché des nouvelles ou des publications sur les réseaux sociaux comme Twitter et Facebook au sujet de la mission de l'OTAN en vue d'une présence avancée en Lettonie. Les résultats étaient surprenants. En effet, 80 % de toutes les publications ou les gazouillis en russe au sujet de la présence de l'OTAN en Lettonie, en Estonie ou en Pologne provenaient de la Russie et étaient rédigés par des robots ou des humains. Vous avez probablement lu au sujet des grandes maisons de Saint-Pétersbourg qui embauchent des gens pour rédiger des articles. C'était 80 % en anglais et en russe. Il n'y avait rien en letton parce que les Russes connaissent mal la langue et que leur centre d'excellence ne rédige et ne génère pas d'algorithme dans cette langue. C'est difficile. Notre grammaire est complexe alors c'est difficile pour eux, mais le russe et l'anglais, c'est jusqu'à 80 %.
    Ils ont fait de leur mieux, mais n'ont pas réussi. Peut-être pour certains segments de la population de la Lettonie qui parle le russe, mais pas de manière importante. En anglais, je ne le sais pas. Peut-être que l'auteur de ces articles suit certains de ces robots et lit les fausses nouvelles là-bas, mais ils n'ont pas réussi. Ils ont essayé; il y a eu un cas.
    Lorsque les Allemands étaient en poste en Lituanie — un pays-cadre, comme vous en Lettonie — ils ont publié une fausse nouvelle qui disait que les Allemands avaient violé une jeune fille. Il aura fallu une demi-journée à la Lituanie pour démentir la nouvelle. On a vu des dirigeants à la télévision et tous les sites de nouvelles officiels présentaient les faits; ils disaient que c'était faux et divulguaient la source de la nouvelle. Les Russes n'ont pas réussi, mais ils ont essayé. C'est leur manière de procéder. Ils font des tests et ils examinent ce qui se passe. Si une méthode ne fonctionne pas, ils ne l'utiliseront pas, mais si elle fonctionne, ils vont l'utiliser. Ils sont bons.
    Nombre de nos pays ont développé une cyberdéfense. Ils ont développé des cyberattaques. Ils sont excellents pour cela. Ce sont probablement les meilleurs. Je ne sais pas si les Américains le font, mais les Russes oui et ils sont très bons. C'est plus difficile de se défendre contre cela.

  (0940)  

    Avez-vous une question?
    Oui. Pourriez-vous nous dire quels sont les sujets abordés par votre comité de la défense à l'heure actuelle?
    Je suis le seul que le comité peut envoyer ici. Je n'étudie pas beaucoup à l'étranger.
    Ce que j'aime faire — et j'essaie d'engager tous les membres du Comité —, c'est rendre visite à nos troupes à l'extérieur. Nous nous rendons sur les terrains d'entraînement. Nous observons l'entraînement. Nous parlons aux gens. Lorsqu'on achète de nouveaux équipements, nous allons parler à ceux qui les utilisent. Nous les essayons nous-mêmes, parfois. C'est un très bon exercice. Nous avons acheté de nouvelles armes automatiques en Lettonie. À mon époque, on nous entraînait avec les AK-47.
    Moi aussi.
    Je sais comment ils tirent, comment ils fonctionnent, tout cela.
    On nous a entraînés d'une certaine façon; puis on nous montre comment ces nouvelles armes fonctionnent. C'est plus utile que de rester assis derrière une table et de demander au général ou au commandant de l'armée comment sont les nouvelles armes, pour se faire répondre qu'elles fonctionnent bien.
    Merci.
    C'est ce que j'essaie de faire, sinon... En avril, nous passerons une demi-journée à la base militaire d'Adazi; j'espère que nous pourrons passer du temps avec les soldats également. J'ai rendu visite aux troupes polonaises là-bas, mais cette fois-ci, nous voulons davantage parler aux pays-cadres.
    Merci.
    Monsieur Paul-Hus, vous avez la parole.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Latkovskis, bienvenue au Comité permanent de la défense nationale.
    En janvier dernier, j'ai assisté à Washington à une présentation de l'organisme RAND qui nous offrait différents scénarios possibles d'intervention russe dans votre pays et dans les pays voisins. On parlait de déplacements militaires et de capacités militaires. À présent, des pays de l'OTAN ont déployé des bataillons.
    Au bout du compte, selon vous, la plus grande menace est-elle une invasion militaire ou plutôt une attaque cybernétique?

[Traduction]

    En réalité, dans le monde d'aujourd'hui, je crois que la plus grande menace, ce sont les cyberattaques. La Russie les a utilisées contre l'Estonie à un certain moment, puisqu'elle n'aimait pas que l'Estonie déplace un monument de la Seconde Guerre mondiale. L'Estonie ne voulait pas le retirer; elle voulait seulement le déplacer vers un cimetière à l'extérieur de Tallinn. Elle a subi des attaques importantes.
    Puis, le monde a constaté pour la première fois les réelles capacités de la Russie. Lorsqu'on parle des Fancy Bears ou d'autres, ce ne sont que des noms. En fait, ce sont des unités spéciales quelque part en Russie, à Moscou ou ailleurs.
    La menace est plus importante encore, mais il en est ainsi parce que nous avons un pouvoir de dissuasion. Les décisions prises par Varsovie, par les Pays de Galles ou par vous sont des mesures de dissuasion qui ont fonctionné par le passé et qui fonctionnent toujours. La dissuasion fonctionne vraiment. Je n'ai pas peur de l'invasion militaire. Dans les faits, une cyberattaque pourrait arriver n'importe quand.

  (0945)  

[Français]

    Ce que vous me dites, c'est que la présence militaire provoque un peu la Russie, et donc la Russie va perpétrer plus d'attaques cybernétiques contre votre pays.
    Selon vous, le fait d'avoir des troupes de l'OTAN sur les lieux entraîne-t-il une forme d'escalade du conflit?

[Traduction]

[Français]

    Non? D'accord.
    Croyez-vous que le Canada pourrait être efficace s'il menait des opérations à partir d'ici? Internet n'a pas de frontières, alors nous serions peut-être en mesure de vous aider à partir d'ici. Avons-nous besoin de déployer autant de troupes?

[Traduction]

    Pour être plus précis, je ne dis pas que la présence de l'OTAN nous rend plus susceptibles de subir une attaque de la Russie. Je dis que les cyberattaques sont plus courantes dans le monde d'aujourd'hui et que la Russie les utilise facilement parce que rien ne l'en empêche. Nous venons de parler... Il y aura des élections en Lettonie cet automne. La cyberattaque pourrait être très petite ou elle pourrait être aussi importante que celle qui a frappé l'Estonie: bon nombre de sites Web et systèmes gouvernementaux ont été fermés pendant quelques jours et même une semaine dans certains cas.
    Je doute que c'est ce qui arrivera parce que les troupes de l'OTAN sont en poste en Lettonie et que cela ne donnerait rien à la Russie. De temps à autre, elle nous teste simplement pour voir quelles sont nos faiblesses. Je ne parle pas de la Lettonie, mais des pays baltes, de l'Europe de l'Est ou de l'Europe en général, et de l'Amérique du Nord. Il n'y a pas de raison pour attaquer la Lettonie.

[Français]

    Actuellement, au Canada, nous étudions le projet de loi C-59, dans lequel il est question de capacités d'attaques ou de contre-attaques cybernétiques.
    Croyez-vous que les pays de l'OTAN devraient avoir des capacités d'attaques cybernétiques? Est-ce que cette fonction pourrait être demandée par la Lettonie? Par exemple, est-ce que la Lettonie pourrait dire qu'elle aimerait que le Canada mène une cyberattaque contre tel élément en Russie?

[Traduction]

    Non, nous ne voudrions demander à personne d'attaquer la Russie par quelque moyen que ce soit. Ce n'est pas notre objectif.
    Nous ambitionnons plutôt d'être une démocratie prospère, à l'écart des ennuis. Inutile, donc, d'occuper un voisin ou de s'approprier une partie de son territoire, absolument. Nous avons goûté à cette médecine, d'où notre foi dans le monde occidental moderne et démocratique. Mais, comme nous sommes une démocratie, nous évitons d'agir comme les régimes autoritaires.
    Je crois que la Corée du Nord peut mener des cyberattaques, malgré la très grande rareté de téléphones mobiles ou d'appareils de ce genre, même si presque tout y est interdit. Elle le peut, mais comment a-t-elle acquis cette capacité?
    Je ne demanderais pas, et je ne crois pas que la Lettonie le demande non plus, à quelqu'un d'attaquer un tiers pour notre compte. Non. Nous n'avons pas l'intention d'attaquer personne et nous ne l'aurons jamais. Absolument jamais. Pas même préventivement. Nous ne sommes pas Israël.
    Merci.
    Monsieur Gerretsen.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Pouvez-vous nous dire quelle est la perception générale, par le citoyen letton, du rôle du Canada dans l'opération Reassurance?
    Je dois le dire, elle est très positive.
    Même avant que le Canada ne devienne un « pays-cadre »... Vous savez, nous partageons tous la même passion pour le hockey sur glace. Notre petit pays brille. Pendant nombre d'années, il est néanmoins resté dans le niveau supérieur de la ligue. Beaucoup de rivaux plus gros que nous, comme l'Italie, en sont évincés. Ils arrivent, ils partent, mais nous, nous restons. Beaucoup de Lettons inscrivent leurs enfants, garçons et filles, dans des ligues de hockey.
    C'est ainsi que, parfois, on a l'impression d'être des âmes soeurs. En Lettonie, on ne badine pas avec le hockey. Dans notre esprit du moins, nous considérons que vous en êtes fous. J'ignore ce qu'il en est vraiment, mais j'ai aperçu une patinoire devant votre parlement.
    Des voix: Oh, oh!
    L'hon. Ainars Latkovskis: Ici, nous n'en avons pas.

  (0950)  

    Nous jouons ce soir, si le coeur vous en dit.
    Son aménagement a fait le bonheur des conservateurs.
    Vous avez célébré votre 150e... Nous avons célébré notre centenaire de l'indépendance. Bien sûr, l'opposition et même des titulaires de postes homologues au mien rouspètent parfois contre de telles dépenses, mais pas tellement dans les activités sportives que dans les culturelles.
    J'essaie seulement de savoir. Je vous donne l'occasion de...
    Nous voyons beaucoup de choses. Notre travail, nos visites à l'étranger, nos discussions autour de cette table, tout ça semble montrer une grande satisfaction pour la participation du Canada, du moins chez les parlementaires, au gouvernement, dans les cercles officiels. Est-ce une perception partagée par le citoyen lambda, le Letton de la rue.
    Oui. Je ne vis pas dans les nuages. J'ai l'occasion de parler à l'homme de la rue.
    Je ne joue pas au hockey, mais au foot, trois fois par semaine, avec des gens de différentes professions: ouvriers de la construction, enseignants, propriétaires de grandes entreprises. C'est toujours de politique mais aussi de sécurité qu'ils me parlent.
    Je ne fanfaronne pas. C'est apprécié, très apprécié.
    Au début, certains ont été étonnés. Pourquoi le Canada? Lui dont on n'entendait plus parler, depuis bien des années. Quelques autres aussi, on ne les voyait plus en Europe.
    Maintenant, depuis votre retour, vos soldats n'ont été mêlés à aucun incident. Ils sont très actifs à nos manifestations sportives et ainsi de suite. Nous en organisons et vous y participez, vous venez montrer votre équipement, converser avec les spectateurs, comme je l'ai dit. Beaucoup de Lettons sont polyglottes. Ils peuvent vous parler.
    Je dois vous interrompre, faute de temps, mais j'apprécie votre réponse.
    Sur les quatre groupements tactiques qui participent à l'opération, le Canada en dirige un en Lettonie. Pouvez-vous nous donner une idée — nous connaissons tous la réponse, mais nous voudrions vous l'entendre dire — de la taille relative des différentes opérations et, en particulier, du nombre de pays présents en Lettonie, sous la direction du Canada?
    Nous connaissons bien la situation en Lettonie. Actuellement, 1 200 militaires y participent aux opérations, sept pays vont...
    Sept?
    Oui. Il y en aura neuf. Les Tchèques et les Slovaques s'en viennent.
    Par curiosité, comment ces pays — limitons-nous à ceux qui se trouvent en Lettonie — ont-ils décidé qu'ils voulaient y aller?
    Peut-être que les élus de ces pays pourraient mieux répondre que moi, mais, du moins à la faveur de mes discussions avec notre personnel militaire chargé de cette mission — et de mes propres constatations — l'annonce de l'acceptation, par le Canada, d'un rôle de premier plan a été décisive pour beaucoup de ces pays.
    Vous comprenez que les pays d'Europe organisent très souvent des exercices militaires, chez les uns et les autres, vu les courtes distances, bien sûr. Le Canada n'y participe pas très souvent. Les Américains sont plus présents — ils sont toujours là et ils nous encouragent — mais cette annonce a incité d'autres pays à y participer, à jouer un rôle en Lettonie.

  (0955)  

    D'autres pays ont suivi à cause de la participation du Canada.
    Oui, beaucoup d'entre eux. Je suis absolument certain que l'annonce de la décision de l'Espagne et de l'Italie de faire partie de ce groupement en Lettonie a porté un coup terrible à la Russie. Elle ne s'y attendait pas.
    Quelle valeur y accordez-vous?
    Une très grande, parce que, quand on en parle au citoyen ordinaire, il nous demande pourquoi nous sommes en Afghanistan. « C'est si loin ». Ou il dira: « l'Espagne et l'Italie sont dans le Sud. Pourquoi devraient-elles venir ici nous aider? » Mais elles viennent, et c'est à vous d'en juger. Elles viennent, et c'est la raison pour laquelle on a plus confiance qu'avant dans l'OTAN. Avant, nous nous demandions qui, en cas de guerre ou de conflit militaire, en dépit de l'article 5 qui promet la présence et l'assistance de nos amis, viendrait vraiment. À l'époque, c'était seulement de l'espoir. Maintenant, les pays arrivent, de plus en plus nombreux.
    Nos terrains d'entraînement, la logistique, tout le reste expliquent la participation prochaine des Tchèques et des Slovaques, par exemple, en sus de celle des autres.
    C'est une grande mission. J'ignore exactement combien de militaires se trouvent en Pologne, en Lituanie et en Estonie. En Estonie, il y a les Britanniques et les Français; en Lituanie, les Allemands et quelques autres, les Danois peut-être.
    Une voix: Oui, je dirais les Danois, moins nombreux.
    Je dois vous interrompre ici et céder la parole à M. Garrison. Vous pouvez prendre un peu plus de temps, si vous voulez.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    En Europe, récemment, nous avons notamment vu des manoeuvres d'armes nucléaires tactiques et des mouvements. Les États-Unis ont déplacé des armes nucléaires tactiques de la Turquie vers la Roumanie, peut-être davantage en raison de leurs relations avec la Turquie que pour d'autres causes, mais nous avons aussi assisté à l'arrivée de missiles russes Iskander-M de capacité nucléaire à Kaliningrad.
    La question que j'ai essayé de glisser à la fin de ma dernière intervention est vraiment quelle a été la réaction lettone, à l'intérieur de l'OTAN, pour essayer de réduire l'escalade nucléaire ou les tensions nucléaires?
    Nous gardons notre sang-froid. Ainsi, la classe politique se tait; on n'entend pas le cliquetis des armes. Avec l'aide des pays de l'OTAN et de leurs services de sécurité, nous suivons la situation de très près. Nous savons ce qui se passe, nous sommes renseignés et, je pense, c'est la façon de faire.
    Mais il fut un temps où l'OTAN déployait plus d'énergie contre la prolifération des armes nucléaires et l'augmentation des tensions nucléaires. La Lettonie lui a-t-elle demandé de ranimer ces mesures?
    Pas à ce que je sache.
    Voyez-vous, un rôle utile à l'OTAN pour qu'elle essaie de s'occuper de nouveau de ce genre de questions? Il est sûr que le danger des armes nucléaires tactiques réside dans la croyance que leur emploi n'entraînera pas de catastrophe mondiale.
    Il y a un an, dans un documentaire, la BBC a examiné l'hypothèse de l'utilisation de ces armes en raison du conflit en Lettonie. Beaucoup de Lettons l'ont regardé. Bien sûr, il posait des questions, mais je ne suis pas un grand spécialiste de la non-prolifération. J'espère que les dirigeants des pays membres de l'OTAN, qui se rencontrent encore cette année,...
    À quel endroit?
    Oui, mais où?
    À Bruxelles.
    J'espère qu'ils examineront aussi ces enjeux, mais comment savoir. Comme vous, je suis inquiet, et je suis dans le noir.
    Merci.
    Voilà qui termine la période officielle de questions. Vu l'heure, les travaux de notre comité prévus pour 10 h 15 et le besoin de quelques minutes pour suspendre les travaux et saluer une dernière fois nos témoins, j'accorde deux périodes supplémentaires de questions d'une durée de cinq minutes.
    Commençons par le parti ministériel. La dernière période ira à M. Bezan ou à un autre conservateur qui en voudra bien.
     J'accorde la première à M. Spengemann. Si vous voulez la partager, libre à vous.
    Monsieur Spengemann, vous avez la parole.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Revenons au tableau politique général.
    L'OTAN est une alliance qui repose sur les principes de la démocratie, des libertés individuelles et de la primauté du droit. Dans la communauté internationale, on voit apparaître, anecdotiquement, le sentiment d'un chaos, d'une instabilité et de l'impression que de moins en moins de pays prendront la défense des valeurs de l'ordre international fondé sur des règles.
    Dans quelle mesure croyez-vous que c'est la perception des Lettons? Est-ce la vôtre, et faut-il faire davantage pour défendre les valeurs qui sont au coeur de la démocratie et de la liberté?

  (1000)  

    Comme vous le savez, le prétendu accord de Budapest, par lequel les Américains, les Britanniques et les Russes ont convenu que l'Ukraine devait se débarrasser de ses armes nucléaires après l'effondrement de l'Union soviétique a aggravé la situation. Comme il promettait le maintien de l'unité territoriale de l'Ukraine, il n'a donc pas eu les résultats escomptés. C'est bien dommage pour cette clause, mais je pense qu'il vaut la peine qu'on se batte pour son respect.
    Les décisions que l'Union européenne a prises après l'annexion de la Crimée par la Russie étaient bonnes. Sinon, l'histoire se serait fidèlement répétée, encore une fois. Ç'aurait été comme un retour avant la Seconde Guerre mondiale, ce que les dirigeants de l'Union européenne ne pouvaient pas se permettre; ç'aurait été désastreux.
    Pour revenir à certaines des questions, sur les motifs de votre ou de notre intervention, je promets, du fond de mon coeur, que si quelque chose arrive dans l'Arctique, dans les territoires que vous affirmez de bon droit vous appartenir, croyez-moi, nous y serons. Notre peuple tient actuellement un exercice. Il s'exerce à sauter dans l'eau froide à travers la glace et à survivre — pas particulièrement pour cette éventualité, mais c'est ce qu'il faut faire quand on s'exerce. Nous y faisons participer vos soldats aussi, mais je suppose que vous le faites aussi au Canada.
    Mais qui le ferait?
    La plupart du temps, nous sautons dans l'eau froide.
    Monsieur le président, je cède le reste de mon temps à mes collègues.
    Monsieur Robillard.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Un article du National Post datant de mars 2017 citait en ces termes Paul Rutherford, ancien commandant du commandement des forces interarmées cybernétiques:

[Traduction]

Nous n'avons absolument pas droit à l'erreur. Nous devons aller en Lettonie en faisant montre d'une forte posture défensive.

Nous sensibiliserons nos militaires aux points faibles qui existent, parce que la Russie s'y connaît dans la cyberguerre et la guerre de l'information.

[Français]

    Près d'un an après cette déclaration, quel est, selon vous, l'état actuel de cette guerre de la désinformation?

[Traduction]

    J'ai déjà essayé d'expliquer. En Lituanie, ils se sont efforcés de produire des nouvelles truquées sur le viol d'une jeune fille. Un pétard mouillé. Ils les ont publiées sur Facebook et dans des messages sur Twitter, en russe et en anglais, qui ciblaient l'OTAN, en insistant davantage, en général, sur l'inutilité de l'organisation, qui n'avait pas à être... Ils répétaient que la Russie est un beau pays. Mais ça na rien donné. Aucune influence sociale.
    Je pense qu'il faut regarder froidement les choses. Ils n'essaient pas de cibler vos soldats là-bas. Ils essaient d'influencer la population locale et de la monter contre les soldats, mais ils n'ont pas réussi.
    Je vous ai dit hier, mais peut-être que je vous le dirai encore. Votre équipe de hockey, en route vers les Jeux olympiques, a joué sa dernière partie amicale, un exercice, en Lettonie. L'entraîneur de l'équipe nationale de la Lettonie est Canadien. Je joue au foot. Je ne connais pas son nom...
    Une voix: Hartley.
    L'hon. Ainars Latkovskis: Hartley. Avant la partie, la cérémonie inaugurale a réuni vos soldats et les nôtres. La plus grande patinoire intérieure de Lettonie était pleine de spectateurs en liesse, tous heureux. Les drapeaux canadiens et lettons étaient déployés. Ç'a été la partie la plus regardée, l'année dernière.
    Le hic, c'est que toutes ces opérations foirent, il faut le souligner, parce que, comme je l'ai dit, nous les connaissons très bien. Ça ne signifie pas nécessairement que, peut-être, ils réussiront quelque part. Mais ils essaient, comme en Lituanie. Ils ont peut-être essayé en Lettonie, mais les Allemands y sont arrivés les premiers, avant les Canadiens. Ils s'y sont essayés. Ils ont bien vu que ça échouait, qu'ils devaient cesser de perdre leur temps. Ils ont assez de matière pour faire le tour du monde. Ils sont occupés.

  (1005)  

    La dernière intervention va à M. Bezan.
    Merci, monsieur le président.
    J'ai deux questions.
    La Lettonie, l'Estonie, la Lituanie, la Pologne et la Roumanie ont toutes profité de leur appartenance à l'OTAN ces 15 dernières années. D'autres pays aspirent à en devenir membres: l'Ukraine, la Géorgie et la Moldavie, notamment. Première question: Que pense la Lettonie de ces éventuelles adhésions?
    Nous les appuyons, particulièrement celle de la Géorgie. Je pense qu'elle est prête depuis un certain temps. Je sais qu'il y a des problèmes, certains membres de l'OTAN qui remettent toujours à plus tard l'adhésion et qui imposent à la Géorgie de nouveaux objectifs à atteindre. Elle fait ce qu'elle peut. Des élections ont eu lieu, très rudes pour l'opposition, mais pas autant que ce qui arrive habituellement dans cette partie du monde. Les deuxièmes élections ont été, je dirais, démocratiques. Le pays les mérite, et il est prêt. Dans cette région, il nous faut un allié, un bon. Je cherche mes mots. Nous y avons besoin d'un ami, pas seulement nous, la Lettonie, mais l'OTAN, je pense.
    La Moldavie se trouve dans une situation un peu plus difficile, mais un jour, espérons-le... Oui, pourquoi pas? Et même chose pour l'Ukraine. Je lui souhaite bonne chance et de se transformer en pays occidental moderne.
    Je dirais que, grâce aux réformes qui ont lieu là-bas, sur le plan de la défense, et que, en temps voulu et, souhaitons-le, dans un proche avenir, elle atteindra tous les objectifs permettant l'adhésion à l'OTAN. Comme M. Yurdiga, je suis d'ascendance ukrainienne, ce qui explique notre ferveur pour l'Ukraine.
    Vous y avez 200 entraîneurs pour des missions d'entraînement.
    Oui, plus de 200, pour la formation et d'autres opérations.
    Vous faites vraiment du bon travail. Mais, au lieu de seulement la bercer de promesses, puis de lui imposer sans cesse de nouvelles conditions, qu'elle doit bien sûr remplir, vous devez aussi, en même temps que vous faites de l'entraînement, l'armer et l'équiper. Elle doit avoir...
    Nous, les conservateurs, préconisons de fournir de l'équipement militaire létal à l'Ukraine. En fait, c'est la politique de notre parti.
    C'est mon opinion personnelle aussi. Je ne m'exprime pas au nom du gouvernement letton.
    Passons à la prochaine question, avant de manquer de temps.
    Tout ce que le Canada a fait et tout ce dont nous avons discuté, en grande partie, a concerné la cybersécurité, ainsi que les opérations terrestres de l'armée à la faveur de la présence avancée renforcée en Lettonie.
    Qu'en est-il des autres menaces qui proviennent de la Russie? Vous êtes un pays balte. Qu'est-ce qui se passe sous la mer et en mer et quels types de menaces aériennes doit affronter actuellement la Lettonie?
    Nous avons, dans les pays baltes, une mission de police aérienne. Elle a ses limites. Sur le papier, elle est là. Nous devons montrer à la Russie que nous sommes au courant de ses activités. Nous ne sommes pas en conflit et ce n'est pas comme si nos délais de réaction devaient être comme pendant la guerre, mais, chaque fois que la Russie inactive un répondeur ou qu'un de ses avions s'approche de nos frontières, ou, parfois, enfreint le droit international et prend un raccourci, précisément pour voir si nous pouvons l'en empêcher, pour voir si nous veillons au grain.
    Je pense que, ensuite, ce sera en mer et dans les airs. Nous serions, bien sûr, désireux de faire évoluer cette mission de police aérienne en mission normale. Ça dépend, bien sûr, de la décision de tous les pays de l'OTAN, mais le Canada a fait sa part en étant présent pour les missions de police aérienne, et beaucoup d'autres pays aussi. Tous les six mois, il y a rotation des pays. Beaucoup d'entre eux, donc, y sont allés plus de deux ou trois fois.
    J'ai aussi fait visiter le terrain à mon comité. À l'époque, les Italiens étaient là. Leurs nouveaux Eurofighter m'ont beaucoup impressionné.

  (1010)  

    Je tiens à vous remercier tous de votre présence. M. Garrison a dit que la participation du Canada n'avait pas seulement l'appui du gouvernement du Canada, ce qui est évident puisque c'est lui a créé cette mission, mais, aussi, l'appui de tous les partis à la Chambre des communes, ce qui est très important. C'est important pour nous et je sais que ce l'est pour vous.
    Vous avez aussi évoqué, au tout début de la séance, nos rapports mutuellement profitables. Je pense que vous avez parlé de compromis, mais nous sommes fiers d'être aux côtés de la Lettonie dans l'OTAN.
    Je tiens à souligner votre appui à l'industrie aérospatiale canadienne et à vous en remercier. Vous êtes l'un de nos meilleurs clients pour les appareils de la C Series et vous êtes le premier client de la version CS300. Ça nous importe. Ça nous montre que nos rapports ne se bornent pas à la défense et à la sécurité, ce qui est très important, mais qu'ils peuvent évoluer en englobant les échanges commerciaux et d'autres aspects très importants pour les deux pays.
    Ça nous importe beaucoup.
    Oui, et si vous vous rappelez, le parlement letton a été le premier à ratifier l'accord de libre-échange avec l'Union européenne, le premier. C'est dans l'ordre des choses, pas autrement, comme il semble très souvent que ça se passe dans la partie de l'Amérique du Nord au sud du Canada. C'est la manière de faire de la Lettonie et du Canada.
    Merci d'être venus. Je vais suspendre les travaux quelques minutes, le temps, peut-être, d'une photo. Nous n'en n'avons pas pris hier soir.
    Oui, ce serait gentil.
    Merci.
    Après nos adieux, la séance reprendra à huis clos, sur les travaux du Comité
    [La séance se poursuit à huis clos.]
Explorateur de la publication
Explorateur de la publication
ParlVU