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SECU Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la sécurité publique et nationale


NUMÉRO 025 
l
1re SESSION 
l
42e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 27 septembre 2016

[Enregistrement électronique]

  (1640)  

[Traduction]

    Aujourd'hui, nous entreprenons notre étude du projet de loi C-226, Loi modifiant le Code criminel (infractions relatives aux moyens de transport), la Loi sur le casier judiciaire et d'autres lois en conséquence, qui a été adopté en deuxième lecture et renvoyé au Comité permanent de la sécurité publique et nationale.
    Il s'agit d'un projet de loi d'initiative parlementaire, et M. Blaney, le parrain du projet de loi, n'est pas ici aujourd'hui, mais il comparaîtra certainement au cours de notre étude du projet de loi. Toutefois, pour partir du bon pied, nous avons cru utile de convoquer des représentants du ministère de la Justice. Nous avons également demandé à ce qu'un témoin du ministère de la Sécurité publique soit à notre disposition pour répondre à nos questions.
    Comme je l'ai indiqué aux membres du Comité, les témoins que nous recevons aujourd'hui ne feront pas de déclarations. Par conséquent, ils pourront tout de suite commencer à répondre à nos questions sur la teneur du projet de loi et les enjeux connexes.
    Nous accueillons Mme Carole Morency, directrice générale et avocate générale principale à la Section de la politique en matière de droit pénal du ministère de la Justice; M. Greg Yost, avocat pour la même section; et M. Talal Dakalbab, directeur général exécutif de la Commission des libérations conditionnelles du Canada.
    Je vous remercie d'avoir accepté de nous rencontrer aujourd'hui. Nous allons amorcer une série de questions de sept minutes. C'est M. Mendicino qui va ouvrir le bal.
    Merci beaucoup, monsieur le président, et merci à vous tous pour votre témoignage de cet après-midi.
    Le projet de loi C-226, Loi modifiant le Code criminel (infractions relatives aux moyens de transport), la Loi sur le casier judiciaire et d'autres lois en conséquence, porte essentiellement sur notre approche pénale à l'égard de la conduite avec facultés affaiblies.
    D'après ce que je vois, le projet de loi peut être divisé en plusieurs catégories. Il y a premièrement l'introduction des tests d'haleine aléatoires. Deuxièmement, il est question de l'imposition de peines minimales obligatoires pour les infractions de la même catégorie qui, selon certains, sont plus sévères que par le passé. Troisièmement, on trouve une autre catégorie de dispositions techniques qui ont une incidence sur la façon de mener des enquêtes et éventuellement d'intenter des poursuites lorsque des accusations sont déposées relativement à ces infractions.
    J'aimerais tout d'abord parler des peines minimales obligatoires. Comme vous le savez sans doute, la Cour suprême du Canada s'est récemment prononcée sur les peines minimales obligatoires et la possibilité qu'elles fassent l'objet d'une contestation en vertu de la Constitution dans certaines circonstances. Je m'intéresse particulièrement à l'article 320.19, aux alinéas 320.2a) et 320.2b) et aux paragraphes 320.21(1) et 320.21(3). Je ne crois pas que j'aie besoin de les citer textuellement, étant donné qu'il y en a plusieurs, alors de façon générale, pourriez-vous nous dire dans quelle mesure l'introduction d'un régime de peines minimales obligatoires dans le contexte du projet de loi pourrait être vulnérable à des contestations constitutionnelles?
    Toute peine minimale obligatoire plus sévère fera sans aucun doute l'objet d'une contestation en vertu de la Constitution.
    Je pense qu'il serait juste de dire que le projet de loi prévoit une peine minimale obligatoire plus lourde dans le cas d'une quatrième infraction de conduite avec facultés affaiblies de même que sur déclaration de culpabilité par mise en accusation. On apporte également plusieurs changements aux peines minimales obligatoires pour les infractions ayant causé des lésions corporelles ou la mort, et on a ajouté des peines minimales pour les infractions de conduite dangereuse et d'autres infractions. Le projet de loi prévoit un grand nombre de nouvelles peines minimales obligatoires.
    Nous connaissons évidemment la jurisprudence de la Cour suprême à ce sujet. Les gens qui étaient en faveur des peines minimales obligatoires plus sévères par le passé estimaient qu'une gradation des peines — en commençant par une amende de 1 000 $ pour la première infraction jusqu'à une peine d'emprisonnement d'un an pour une quatrième infraction — serait défendable.
    Je ne dis pas que cette mesure serait maintenue, mais chose certaine, elle serait défendable, et la même chose pourrait s'appliquer à la conduite dangereuse et à d'autres infractions. C'était le raisonnement derrière ce régime qui, vous vous souviendrez, figurait dans l'ancien projet de loi C-73 du gouvernement.
    Est-ce que Mme Morency ou M. Dakalbab voudrait commenter?
    Comme vous le savez, la Cour suprême s'est prononcée sur la question des peines minimales obligatoires, plus récemment dans l'arrêt R. c. Lloyd, avant le mois d'avril, et avant cela, dans l'arrêt R. c. Nur. Dans les deux cas, la Cour a expliqué de manière beaucoup plus exhaustive dans quelle mesure une peine minimale obligatoire pouvait aller à l'encontre de la Charte et modifier légèrement l'analyse qu'on utilisait jusqu'ici.
    Cela dit, certaines peines minimales obligatoires ont été maintenues par le passé, y compris par la Cour suprême. Il n'y a pas de doute qu'à l'avenir — et il ne faut pas oublier qu'il s'agit d'un projet de loi d'initiative parlementaire et non ministérielle —, ce sera la décision de la Cour suprême sur les peines minimales obligatoires qui déterminera la mesure dans laquelle ces peines seront proposées.
    Je crois que le secrétaire parlementaire de la ministre de la Justice a indiqué, dans le cadre du débat en deuxième lecture, que le gouvernement n'appuierait pas les peines minimales obligatoires plus sévères proposées par le projet de loi, à l'exception des amendes obligatoires.
    Le Comité sait peut-être que la ministre de la Justice se penche actuellement sur le recours aux peines minimales obligatoires en vertu du Code criminel. La ministre a non seulement mené des consultations avec des intervenants partout au pays dans le cadre de l'examen du système de justice pénale, mais elle a aussi pris part à une étude spécifique sur les questions liées aux peines minimales obligatoires réalisée à la lumière de la jurisprudence de la Cour suprême.
    Ces peines suscitent effectivement des questions, et pour ce qui est de la façon dont la Cour suprême traitera ce dossier, nous sommes un peu en territoire inconnu.

  (1645)  

    J'aimerais revenir sur vos deux réponses.
    Je vais citer le plus récent arrêt de la Cour suprême, l'arrêt R. c. Lloyd. Au paragraphe 35, la majorité a écrit ce qui suit:
Si le législateur tient à prévoir des peines minimales obligatoires pour des infractions qui ratissent large, il lui faudra envisager de réduire leur champ d'application de manière qu'elles ne visent que les délinquants qui méritent de se les voir infliger.
Le législateur pourrait par ailleurs recourir à un mécanisme qui permettrait au tribunal d'écarter la peine minimale obligatoire dans les cas exceptionnels où elle constituerait une peine cruelle et inusitée.
    Laissons de côté la dernière phrase. Je suppose que la première phrase nous amène à nous demander si l'auteur du projet de loi — si l'on se fie à l'introduction de ces peines minimales obligatoires — croit que le régime actuel ne dissuade pas suffisamment les délinquants de commettre ce type d'infraction et que le recours aux peines minimales obligatoires ne contrevient pas au principe dont je viens de parler, c'est-à-dire qu'on ne ratisse pas trop large.
    Pourriez-vous répondre à cela?
    Je crains que vous n'ayez plus de temps. C'était une longue introduction.
    Merci, monsieur le président. J'espère que l'un de mes collègues reprendra ma question.
    Très bien.
    Monsieur Miller.
    Merci, monsieur le président.
    Merci aux témoins d'être ici aujourd'hui.
    J'aimerais revenir sur un sujet qu'a abordé Mme Damoff plus tôt, à savoir les droits constitutionnels. Je tiens à ce que les choses soient claires. Il est essentiellement question ici de tests d'haleine aléatoires. Il s'agit de pouvoir arrêter n'importe qui n'importe quand. Cela pourrait être pour les bonnes comme pour les mauvaises raisons. À votre avis, ces tests sont-ils susceptibles d'être contestés en vertu de la Charte canadienne des droits et libertés?
    Encore une fois, je dirais que nous pourrions nous attendre à une contestation. Cependant, le pouvoir d'arrêter quelqu'un de manière aléatoire découle des lois provinciales et de la common law et a été appuyé par la Cour suprême du Canada à plusieurs reprises.
    Ce qui est différent ici, c'est qu'en ce moment, le policier doit soupçonner la présence d'alcool dans l'organisme d'une personne, que ce soit par l'odeur émanant de son haleine ou un autre motif qui justifie l'utilisation d'un appareil de détection approuvé dans le cadre d'un contrôle obligatoire de l'alcoolémie, comme on l'entend en Irlande ces jours-ci, alors qu'en vertu du projet de loi, le policier pourra ordonner à un conducteur de souffler dans un appareil de détection approuvé afin de prélever un échantillon d'haleine et ainsi établir scientifiquement s'il dépasse la limite permise.
    À ce sujet, avant que je m'adresse à d'autres témoins, monsieur Yost, ce que vous avez dit ne se fait-il pas déjà? Je me suis moi-même fait arrêter lors d'un contrôle routier jeudi dernier dans ma circonscription. Évidemment, je n'avais pas bu. Les policiers le font très souvent, mais à moins de voir, de sentir ou de soupçonner la présence d'alcool, ils ne peuvent pas aller plus loin. Bien entendu, si je suis assis avec une boisson ouverte dans ma voiture, ils peuvent entreprendre des démarches. Par conséquent, ce que vous venez de dire ne se fait-il pas déjà à l'heure actuelle?

  (1650)  

    Les vérifications aléatoires sont bel et bien possibles. Je crois que nous savons tous que si un policier nous indique de nous arrêter en bordure de la route, nous sommes obligés de le faire, et c'est en vertu des lois provinciales.
    Comme je l'ai dit, une fois que la personne baisse la fenêtre de sa voiture, le policier commencera à lui poser des questions pour savoir si elle a bu de l'alcool et lui demandera son permis de conduire et ses papiers d'immatriculation. Le policier recherche des indices, tels qu'une odeur d'alcool, une maladresse ou quelque chose lui permettant de soupçonner que la personne conduisait sous l'effet de l'alcool. À ce moment-là, il peut lui demander de fournir un échantillon d'haleine à l'aide d'un appareil de détection approuvé. Cependant, en vertu de ce qu'on appelle un test d'haleine aléatoire, le policier, peu importe la raison pour laquelle il a arrêté la personne en bordure de la route, de façon purement aléatoire, peut lui demander de lui donner ses papiers d'immatriculation et son permis de conduire et aussi de souffler dans l'appareil de détection approuvé pour prouver sa sobriété. C'est donc la principale différence.
    D'accord, mais ici en Ontario, le policier doit avoir une raison. Remarquez, parfois, ils arrêtent les gens sans bonne raison. On l'entend souvent, mais en vertu de la loi, ils ne sont pas censés le faire sans motif valable, par exemple l'éclairage de la plaque d'immatriculation ne fonctionne pas, un feu arrière est brûlé ou la personne zigzague sur la route, n'est-ce pas?
    Je ne suis pas un expert du Code de la route de l'Ontario. Je sais qu'il y a des programmes RIDE où ils arrêtent tout le monde de façon aléatoire. Je ne devrais pas dire tout le monde. Ils discutent avec ces personnes et lorsqu'ils ont terminé, ils passent à d'autres. Je sais que dans plusieurs causes qui ont été portées devant les tribunaux, la police, dans le cadre d'une campagne contre l'alcool au volant, a arrêté des conducteurs de façon aléatoire — généralement aux petites heures du matin et dans les coins festifs de la ville — afin de vérifier leur sobriété. C'était leur motif, et cela a été appuyé par les tribunaux.
    D'accord, merci.
    Madame Morency ou monsieur Dakalbab, pourriez-vous nous parler de l'aspect constitutionnel de cette mesure?
    Je n'ai rien d'autre à ajouter, sinon le fait que les dispositions traitant de la conduite avec facultés affaiblies du Code criminel sont depuis toujours parmi les plus contestées. Lorsqu'on apporte des changements dans ce domaine, qu'ils soient minimes ou importants, comme le propose le projet de loi d'initiative parlementaire C-226, il est raisonnable de s'attendre à des contestations en vertu de la Charte. Cela ne signifie pas nécessairement que les dispositions ne résisteront pas aux contestations, mais c'est une réalité dont il faut tenir compte.
    Avez-vous autre chose à ajouter?
    Connaissez-vous une province ou un pays où on a adopté une telle loi? Je ne suis pas au courant; je ne fais que poser la question.
    Il y a des lois pour divers types de tests d'haleine aléatoires. Je ne peux toutefois pas vous confirmer le nombre de pays. J'ai un document ici de l'Organisation mondiale de la Santé qui affirme que 121 pays ont une forme quelconque d'alcootests aléatoires. Je doute de ce nombre. Il y a un autre document rédigé par M. Chamberlain, conseiller juridique pour MADD Canada que vous pourriez d'ailleurs convoquer à titre de témoin. Il a dressé une liste de 73 pays qui ont adopté une forme de tests d'haleine aléatoires. Le document de travail du ministère de 2010 renfermait une recommandation de la Commission européenne selon laquelle les tests d'haleine aléatoires devraient être menés dans tous les pays de la commission dans le cadre d'un programme de lutte contre l'alcool au volant. J'ai les lois ici de sept États de l'Australie. Ils procèdent tous à des tests d'haleine purement aléatoires. Je dis cela, parce qu'il y a des endroits, notamment en Irlande, où on a instauré des contrôles routiers pour mener ces tests. Les gens y entrent et soufflent dans l'appareil, mais il n'y a pas d'agent en bordure de la route qui contraint les automobilistes à s'arrêter. L'Australie procède à ce que j'appellerais un test d'haleine purement aléatoire. Il pourrait être difficile d'instaurer des postes de contrôle dans les régions rurales canadiennes pour y réaliser ces tests.

  (1655)  

    Mon temps est-il écoulé, monsieur le président?
    Oui. Nous pourrons peut-être revenir à vous plus tard.

[Français]

     Nous continuons avec M. Dubé.
    Merci, monsieur le président.
    J'ai aussi des questions par rapport aux peines d'emprisonnement obligatoires. S'il y a un élément du projet de loi C-226 qui n'est pas matière à débat, c'est bien celui de l'alcool au volant. Il est important de le mentionner. Nous sommes tous d'accord qu'il faut réduire le taux d'alcoolémie au volant et les conséquences tragiques que cela entraîne.
    C'est la première réunion que nous avons sur ce projet de loi. Nous n'avons donc pas encore eu l'occasion d'entendre le témoignage de MADD. Si je ne me trompe pas, cet organisme a dit qu'une de ses inquiétudes, par rapport au projet de loi C-226, est que le taux de condamnation diminue à cause des peines d'emprisonnement obligatoires, parce qu'au fond, c'est tout ou rien.
    Dans cet esprit, si l'on donne un peu de pouvoir discrétionnaire aux juges, croyez-vous que cela fera en sorte que les chauffeurs ivres seront condamnés plus souvent? En effet, le juge a la discrétion de prendre sa décision selon les circonstances qui, malgré les tragédies, peuvent néanmoins varier selon les cas.
    À l'heure actuelle, les juges ont un pouvoir discrétionnaire en matière de peines minimales obligatoires, qui font déjà partie du Code criminel. Pour une première condamnation, c'est une amende de 1 000 $. La peine est de 30 jours d'emprisonnement pour une deuxième condamnation et de 120 jours pour une troisième condamnation. Par procédure sommaire, la peine d'emprisonnement peut aller jusqu'à 18 mois, et jusqu'à cinq ans si on procède par mise en accusation.
    Si le projet de loi était adopté, on ajouterait à ces trois premières peines par procédure sommaire une quatrième peine d'un an d'emprisonnement. On augmente les peines maximales à peu près partout dans la législation. Cela ne devrait pas poser de problème par rapport à la Charte parce qu'on ne limite pas le pouvoir de discrétion du juge. En fait, cela lui en donne peut-être un peu plus.
    Je ne sais pas ce que MADD a dit au sujet de la possibilité que les juges refusent de condamner quelqu'un s'ils croient que la peine minimale obligatoire est trop élevée.
    Un article du projet de loi permet à un juge, dans les cas où il n'y a pas eu de lésions corporelles ou de décès, de retarder l'imposition de la peine afin que la personne puisse suivre un traitement pour régler son problème de toxicomanie. Si la personne réussissait à régler son problème, le juge ne serait pas obligé d'imposer une peine minimale obligatoire. Il y a présentement une disposition de ce genre dans le Code criminel, mais elle n'est pas en vigueur en Colombie-Britannique, en Ontario, au Québec et à Terre-Neuve-et-Labrador. On étendrait donc cette idée à tout le pays.
    D'accord.
    Je suis curieux à propos de quelque chose.
    Vous avez dit que cela ne poserait aucun problème par rapport à la Charte, et je comprends cela. Quand on parle de peines d'emprisonnement obligatoires, on parle aussi de l'efficacité des mesures. Or, au cours des 10 dernières années, il n'y a pas eu de diminution du nombre de cas d'alcool au volant.
    Selon vous, cette mesure est-elle inefficace dans le système judiciaire?
    Je ne critiquerai pas les juges. Je ne le ferai pas du tout.
     Au cours des deux ou trois dernières années, on a peut-être commencé à constater une diminution des cas. Il est vrai qu'on a fait beaucoup de progrès dans les années 1980 et 1990, où il y a eu un record à ce chapitre.
    En 2009, le Comité permanent de la justice et des droits de la personne avait demandé des peines plus élevées pour les récidivistes et les personnes ayant un taux d'alcoolémie élevé. Naturellement, le gouvernement de l'époque avait accepté cette recommandation. Nous avons donc essayé de répondre à cette demande ou à cette recommandation. C'est pour cette raison que le projet de loi C-226 ne prévoit pas des peines minimales obligatoires plus élevées.
    Merci.
    J'ai une autre question et je ne sais pas qui pourra y répondre.
    Je ne suis pas avocat et je suis curieux à propos de quelque chose. Le projet de loi C-226 n'est pas encore adopté, mais enlevons-le quand même de l'équation. D'après ce qu'on entend, la marijuana pourrait être légalisée d'ici un an. Serait-il compliqué, par la suite, de modifier les lois existantes en fonction de cette nouvelle situation?

  (1700)  

    Le projet de loi contient des éléments qui aideraient un peu à lutter contre la conduite avec facultés affaiblies par l'effet des drogues. Avec ce projet de loi, on essaie de rendre plus efficace le témoignage des agents évaluateurs. Si un agent évaluateur détermine que la drogue affaiblit les facultés d'une personne après avoir analysé une substance corporelle, il y a une présomption que cette drogue qui causait un problème lors de l'évaluation causait un problème sur la route. Cela ne touche en rien la légalisation de la marijuana. C'est déjà un crime que d'avoir les facultés affaiblies par une drogue, que ce soit par une drogue licite ou illicite. Il n'y a donc pas de changement à cet égard.
    Nonobstant ce qui se passera concernant ce projet de loi, je crois que le fait de conduire avec les facultés affaiblies par la marijuana continuera d'être un crime.
    Ne vous inquiétez pas. Je ne prétends pas le contraire. Je veux juste bien comprendre la situation à cet égard. Dans l'optique de ce débat, en tant que législateurs, il faut avoir un oeil sur l'avenir. J'essaie simplement de bien comprendre l'état actuel de la législation. Évidemment, il faut anticiper qu'il y aura des changements dans le travail de la police. C'est davantage sur cet aspect que portait ma question.

[Traduction]

    Je n'ai pas beaucoup de temps, monsieur Dakalbab, mais j'aimerais savoir ce que pense la Commission des libérations conditionnelles du débat actuel entourant le projet de loi C-226.

[Français]

    De notre côté, nous sommes un tribunal indépendant. Nous appliquons la loi normalement. En ce qui nous concerne, le projet de loi n'a d'impact que sur la suspension de casier judiciaire, parce que présentement, il y a une exclusion. La majorité de nos révocations de suspension de casier ou nos pardons sont liés à cet article. S'il y avait un changement, cela toucherait surtout les révocations de suspension de casier et les pardons.
    Merci.

[Traduction]

    Merci.
    Monsieur Erskine-Smith, allez-y.
    Ma première question donne suite à ce que MM. Mendicino, Miller et Dubé ont dit au sujet de la constitutionnalité. Le présent projet de loi est fondé sur le projet de loi C-73, qui a été rédigé par le ministère de la Justice. Par conséquent, avez-vous une opinion au sujet de la conformité à la Charte du projet de loi C-73 que vous pourriez fournir au Comité?
    C'est vrai; le projet de loi C-226, qui est un projet de loi d'initiative parlementaire, reflète très bien ce qui avait été déposé par le gouvernement au cours de la législature précédente.
    Nous ne sommes pas en mesure de nous prononcer sur l'avis que le parrain lui-même a reçu à l'égard du projet de loi C-226. Lorsque les ministres de la Justice, y compris celui du gouvernement précédent, déposent un projet de loi à la Chambre, ils doivent attester qu'il résistera aux éventuelles contestations reposant sur la Charte en vertu de la Loi sur le ministère de la Justice; donc oui, on a suivi ce processus.
    Pourriez-vous fournir au Comité une copie de toutes les opinions portant sur la conformité à la Charte du projet de loi C-73?
    Nous témoignons aujourd'hui à titre d'experts pour aider le Comité dans le cadre de son étude de ce projet de loi d'initiative parlementaire. En tant qu'avocats, nous fournissons des avis à la ministre de la Justice et non pas au Comité; ce n'est donc pas quelque chose que nous sommes en mesure de faire. Nous sommes ici pour aider le Comité dans le cadre de son étude.
    Ces renseignements sont protégés par le secret professionnel.
    D'accord. Je présume que le ministère avait des explications concernant le projet de loi C-73, qu'il n'a pas fournies. Évidemment, comme il s'agit ici d'un projet de loi d'initiative parlementaire, il n'y a ni explication ni déclaration. Par conséquent, j'aimerais qu'on nous fournisse tous les documents d'information, rapports, explications ou documents rédigés par le ministère à l'appui du projet de loi C-73 qui pourraient s'avérer pertinents dans le cadre de notre étude d'un projet de loi presque identique C-226.
    Encore une fois, en raison du secret professionnel, nous nous trouvons dans une situation plutôt délicate, mais je pourrais certainement voir à ce qu'on fournisse au Comité des renseignements auxquels vous avez déjà probablement accès, c'est-à-dire les documents qui sont normalement publiés lorsque le gouvernement dépose un projet de loi. Il s'agit notamment des communiqués de presse, des documents d'information...
    J'ai cette information. Merci beaucoup.
    D'après un document qui nous provient de la Bibliothèque du Parlement, le taux de condamnation pour la conduite avec les facultés affaiblies s'élève à 84 %. Je suis désolé, ces statistiques sont tirées d'un rapport Juristat publié en 2011. Ce taux est donc plus élevé que celui relatif aux autres types d'infractions, qui se situe à 64 %.
    Qu'est-ce qu'on essaie de faire ici en éliminant les moyens de défense du « dernier verre » et du « verre d'après »? Encore une fois, étant donné le projet de loi C-73, vous avez une connaissance plus approfondie du dossier C-226. Est-ce qu'on vise ici un taux de condamnation plus élevé? Est-ce ce que désirent les tribunaux?

  (1705)  

    Tout d'abord, j'aimerais parler des moyens de défense du « dernier verre » et du « verre d'après ». Dans l'arrêt R. c. St-Onge, la Cour suprême a vertement critiqué ces deux défenses.
    Vous voudrez peut-être entendre le Comité des analyses d'alcool, mais selon moi, une personne qui boit plusieurs consommations avant de prendre le volant représente un danger pour la population, même si son taux d'alcoolémie ne dépasse pas 0,07 %.
    Le nouvel article qui prévoit l'infraction de conduite avec les facultés affaiblies lorsqu'une personne a une alcoolémie égale ou supérieure à 80 milligrammes d'alcool dans les deux heures suivant le moment où elle a cessé de conduire correspond à un modèle courant aux États-Unis et dans d'autres pays pour éviter qu'on se pose la question suivante: « Est-ce que mon taux était tout juste en dessous de 80 milligrammes lorsque la police m'a intercepté? » C'est davantage une question de politique publique.
    Le taux de condamnation de 84 % est nettement supérieur à celui de beaucoup d'autres types d'infractions, mais nous parlons ici d'une situation où, dans la grande majorité des cas, la personne a été trouvée au volant de sa voiture; les policiers avaient des doutes quant à sa capacité de conduire; la personne a échoué au test de détection approuvé et son taux d'alcoolémie était supérieur à 80 milligrammes au poste de police.
    Le taux de 84 % est loin d'être aussi élevé que celui du Royaume-Uni, qui s'élève à 98 %, et pourtant, nos lois sont semblables.
    En ce qui concerne la défense Carter, la Cour a indiqué qu'il y avait une contradiction entre le taux d'acquittement en vertu de la défense Carter et les données scientifiques.
    A-t-on les mêmes inquiétudes concernant les défenses du « dernier verre » et du « verre d'après »? Avons-nous ces chiffres?
    Non, je n'ai pas de données indiquant à quel moment on a invoqué ces défenses.
    Le Centre canadien de la statistique juridique a seulement des données brutes concernant les acquittements et ainsi de suite. Le taux de 84 % a augmenté par rapport à ce qu'il était il y a environ 15 ans. Je crois qu'il s'élevait à 70 %. Vous devriez pouvoir trouver ce chiffre dans le rapport Juristat de 2002 sur la conduite avec facultés affaiblies. Si je ne me trompe pas, on parle de 72 %. Par conséquent, certains des changements apportés se sont avérés utiles.
    Les propositions visent en fait à répondre aux critiques qu'on avait formulées dans la décision St-Onge selon lesquelles le Parlement n'avait jamais précisé les critères que le Comité des analyses d'alcool souhaitait qu'on établisse. Le Comité des analyses d'alcool a clarifié sa position à bien des égards depuis ce temps-là, et le projet de loi indique en fait que si on suit ce que le comité a fait, il a été prouvé qu'il avait raison.
    En ce qui concerne la décision de la Cour suprême dont vous avez parlé, d'après l'information que le ministère a rendue publique au sujet du projet de loi C-73, je crois savoir que ce projet de loi visait à s'attaquer à la série de demandes ainsi qu'aux délais de traitement accrus dans la foulée de cette décision de la Cour suprême.
    Avons-nous des chiffres pour justifier cette vague de demandes? Était-ce une vague importante? De combien de demandes parle-t-on? Avons-nous des preuves?
    J'ignore combien il y a eu de décisions.
    En ce qui me concerne, j'ai reçu une demande d'appel cette semaine en provenance de Québec. Il s'agit de 100 décisions consolidées en un seul appel. La personne a été arrêtée en 2009. On peut s'attendre à ce qu'ils essaient d'interjeter appel auprès de la Cour d'appel.
    Il y a eu des décisions rendues récemment, particulièrement en Ontario, qui ont contribué à définir ce qui est requis en matière de dépistage. Je sais que toutes les provinces — et nous communiquons régulièrement avec elles — ont dit qu'elles faisaient face à une série d'appels. L'Alberta devra comparaître devant sa Cour d'appel en octobre avec une consolidation d'environ 15 cas.
    Visiblement, il y a une vague d'appels, mais je ne peux pas vous donner le nombre exact.
    Merci beaucoup.
    Monsieur Généreux.

[Français]

    Je remercie les témoins de leur présence parmi nous aujourd'hui.
    Monsieur Yost, vous avez dit plus tôt que les contrôles aléatoires dans les régions rurales canadiennes serait plus difficile. Si le contrôle est aléatoire, cela veut dire qu'il peut être fait à n'importe quel moment, sans même qu'il y ait de contrôle routier particulier. De façon aléatoire, est-ce que cela signifie que le contrôle peut être fait n'importe quand? Est-ce que je comprends bien ce que vous avez dit?

  (1710)  

    Si la proposition dans le projet de loi C-226 est acceptée, la réponse est oui. N'importe quel policier dans sa voiture de patrouille pourrait administrer le test de détection au bord de la route. Dans les grandes villes, il arrive qu'une quinzaine de policiers arrêtent toute la circulation et choisissent cinq ou six personnes pour leur administrer ce test. En milieu rural, le corps de police peut compter quatre ou cinq policiers. Il serait donc un peu difficile de faire la même chose.
    Au Québec, la majorité des corps policiers dans les petites municipalités sont de la Sûreté du Québec et sont tous regroupés par MRC.
    J'ai été maire de la ville de La Pocatière pendant quatre ans, et j'ai vu plusieurs contrôles routiers. Cette ville a une population de 4 500 habitants. Qu'entendez-vous par un milieu rural? Est-ce des villages de 200 personnes? En réalité, ces petites municipalités ou petites régions sont souvent couvertes par la Sûreté du Québec de façon beaucoup plus large, si on peut le dire ainsi. La Sûreté du Québec patrouille sur les autoroutes, mais elle est aussi dans les municipalités par l'entremise des MRC.
    Je pourrais vous donner l'exemple de Rivière-du-Loup, qui a une population de 20 000 habitants. Elle avait son corps policier, mais maintenant, c'est la Sûreté du Québec qui joue ce rôle. La Sûreté du Québec est de plus en plus présente partout. Elle est donc en mesure de faire des contrôles routiers dans un village où il y a encore un bar, même s'il y en a de moins en moins. Je ne vois donc pas où est la difficulté.
    Je suppose que le Comité aimerait entendre des policiers parler des situations auxquelles ils font face sur le bord de la route. Je suis avocat à Ottawa et je ne sais pas vraiment quels sont leurs problèmes à cet égard.
    Vous êtes avocat. Vous dites que ce serait plus difficile à appliquer en milieu rural. En définitive, les conséquences pour un conducteur pris de façon aléatoire seraient les mêmes en milieu rural qu'en milieu urbain. Que dites-vous de cela en tant qu'avocat?
    Les conséquences seraient les mêmes s'il était arrêté par un policier. La question est de savoir si, en milieu rural, on pourra fréquemment établir des points de contrôle pour toutes sortes de voitures. À Toronto, il y a toutes sortes de véhicules. On peut établir les point de contrôle presque n'importe où. Sur la route que je parcours régulièrement en Ontario, soit la route 17 entre Marathon et Wawa, il n'y a pas beaucoup de villes et de villages.
    Je comprends ce que vous voulez dire. De toute évidence, la conséquence demeure la même. Les contrôles aléatoires sont essentiellement le changement le plus important dans ce projet de loi. Si j'ai bien compris, MADD a des réticences par rapport à cela, ou l'inverse. Je n'en suis pas certain.
    Plus tôt, vous avez dit que les contrôles aléatoires se faisaient dans plusieurs pays du monde. Vous pensiez d'ailleurs en particulier à la loi australienne. Y a-t-il des différences fondamentales entre les lois actuelles en Australie ou d'autres pays et ce qu'on s'apprête potentiellement à accepter ici, au Canada?
    Ce qui est dans le projet de loi C-226 est basé sur le modèle de l'Australie et non pas sur celui de l'Irlande, où il faut faire une sorte de grand contrôle routier, des annonces et ainsi de suite.
    Merci beaucoup.
    Merci.

[Traduction]

    Madame Damoff, vous disposez de cinq minutes.
    Monsieur Yost, dans votre témoignage devant le Comité permanent de la justice et des droits de la personne, vous avez parlé des tests d'haleine aléatoires et de la stratégie de la Commission européenne visant à réduire le nombre d'accidents de voiture mortels. D'après les chiffres que j'ai vus, le nombre de décès sur les routes a chuté de 28 % en Irlande, de 30 % en Nouvelle-Zélande et de 35 % en Australie. Il était cependant question ici d'une série de mesures et non pas seulement de tests d'haleine aléatoires. J'aimerais que vous nous en parliez davantage afin que nous puissions avoir une idée des lacunes qui pourraient survenir si on mise uniquement sur les tests d'haleine aléatoires.

  (1715)  

    Vous avez tout à fait raison.
    L'un des problèmes sur le plan de la recherche, c'est qu'en Australie, on a instauré les tests d'haleine aléatoires tout en abaissant le taux d'alcoolémie à 0,05 %, avec beaucoup de publicité et de mesures d'application de la loi, etc. L'État de Victoria dispose de huit « autobus d'analyse », si je ne me trompe pas. Ils sont sur la route tous les jours et ont procédé à près de trois millions de tests d'haleine dans un État qui compte six millions d'habitants. Tous les conducteurs subiront le test un jour ou l'autre, alors oui, il n'y a pas de doute que peu importe les mesures qu'on insère dans la loi, si on ne veille pas à leur application, elles ne donneront pas les résultats escomptés.
    La situation en Irlande est intéressante, parce qu'elle a tout d'abord fixé son taux d'alcoolémie à 0,05 % puis elle a ramené son ancien test d'haleine aléatoire. On pourrait diviser les deux. Le test d'haleine aléatoire est l'une des mesures, mais on parle ici d'un pays relativement petit. J'ai les chiffres ici. L'Irlande réalise environ 70 000 contrôles routiers par année. Cela représente donc une centaine chaque jour.
    Pourriez-vous nous fournir ces chiffres?
    Ces données sont toutes tirées du site Web de Garda, alors je pourrais certainement le faire. En 2008, il y a eu 18 013 cas de conduite avec facultés affaiblies, et ce nombre a été réduit à 7 962. Le nombre d'accidents mortels de la route est passé de 279 à 188. Comme je le disais, on a réalisé 78 290 contrôles d'alcoolémie obligatoires — c'est leur façon de dire tests d'haleine aléatoires —, ce qui représente un peu plus de 200 par jour. Il est donc très probable que vous soyez intercepté dans un contrôle routier en Irlande, et cela a des répercussions énormes.
    Toutefois, on ignore si cette mesure à elle seule peut fonctionner aussi bien qu'une série de mesures.
    Non. Une des études qui a été réalisée en Nouvelle-Zélande, dont a parlé le Comité permanent, a ventilé la réduction de 49 %, et elle a attribué 22 % aux tests d'haleine aléatoires et 20 quelque pour cent à la réduction du taux d'alcoolémie, etc. C'est difficile à savoir.
    J'aimerais vous adresser une question, monsieur Dakalbab. Une partie du projet de loi traite des peines minimales obligatoires. Lorsqu'il est question d'accusations de conduite avec facultés affaiblies, avez-vous les ressources nécessaires pour permettre à ces personnes de réintégrer la société une fois qu'elles sont libérées? Évidemment, notre but ici est d'éviter que les gens récidivent. Avez-vous les ressources et les programmes en place pour y parvenir?
    Je vous remercie de votre question. Bien entendu, à la Commission des libérations conditionnelles, on ne gère pas les peines et on ne les supervise pas non plus. Nous ne faisons que prendre les décisions.
    Les individus sanctionnés pour conduite avec facultés affaiblies ne doivent-ils pas suivre des programmes au moment de leur libération?
    Habituellement, les programmes visent à traiter certains des facteurs pouvant contribuer à la criminalité, mais pas toujours. Il y a d'autres outils, que ce soit des suivis et des traitements, qui sont parfois offerts au sein de la communauté.
    Notre rôle consiste essentiellement à évaluer les risques en fonction des critères et de la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition. Évidemment, on parle d'autre chose ici.
    Pour nous, ces changements n'ont pas vraiment d'incidence sur nos décisions. Nous nous occupons de tous les délinquants individuellement et conformément à la loi.
    Les programmes pourraient être offerts par le SCC, mais de notre côté, on applique les mêmes critères d'évaluation du risque.
    Je crois qu'ils vont venir nous rencontrer.
    Je pense qu'il me reste quelques secondes.
    Souhaitez-vous utiliser les sept secondes qui restent?
    Monsieur Liepert a une question.
    Je vais d'abord poser une question, puis je vais laisser mon collègue, M. Miller, revenir à une question qu'il a posée précédemment.
    Vous avez mentionné brièvement le taux d'alcoolémie de 0,05 %. L'Alberta a ramené à 0,05 % le taux maximum d'alcool permis dans le sang pour pouvoir prendre le volant, il y a quatre ans, si je ne me trompe pas. Dans cette province, si vous atteignez cette limite, je crois que vous perdez votre voiture et vos clés pour trois ou quatre jours. Vous n'êtes pas accusé de conduite avec facultés affaiblies, mais vous avez en quelque sorte un avertissement.
    Avez-vous des preuves démontrant que cette mesure a été utile? Pourriez-vous nous dire un peu ce qui s'est passé ces quatre ou cinq dernières années en Alberta?

  (1720)  

    Je n'ai pas de données sous la main au sujet de l'Alberta. Je sais que la Colombie-Britannique a fait quelque chose de semblable. D'ailleurs, dans cette province, si vous dépassez la limite de 0,08 %, on saisit votre véhicule pour 30 jours. Le taux de mortalité a diminué grandement sur les routes. Je crois que la même chose s'est produite en Alberta.
    Les sanctions administratives — et je suis fier de dire que je les ai créées au Manitoba il y a plus de 30 ans maintenant — sont immédiates et efficaces. Les gens n'aiment pas qu'on saisisse leur voiture. Ils n'aiment pas non plus perdre leur permis de conduire ou devoir payer des centaines de dollars pour récupérer leur voiture. Si je ne me trompe pas, en Colombie-Britannique, cela peut vous coûter environ 4 000 $ pour récupérer votre voiture si vous dépassez la limite de 0,08 %. Les gens préfèrent opter pour les sanctions administratives. D'après ce qu'on a vu, c'est plus rapide et très efficace.
    Le nombre d'accusations portées en vertu du Code criminel a diminué dans cette province, alors que le nombre de suspensions administratives a augmenté. Toutefois, la décision de mettre en place ces mesures revient à la province.
    Je comprends, mais s'agit-il de la solution ou y a-t-il d'autres façons de réduire l'alcool au volant? C'est ce que j'aimerais savoir ici.
    Il n'y a pas qu'une seule solution. Cela peut en faire partie, tout comme une application de la loi plus rigoureuse. Étant donné les pressions exercées sur les policiers ces jours-ci et les problèmes budgétaires, je crois qu'on espère ici quelque chose qui risque de ne pas se produire. Selon moi, il faut renforcer les mesures administratives et sensibiliser les jeunes dans les écoles, tout comme le fait régulièrement l'organisme MADD.
    Nous sommes arrivés à un point où il semble que les 15 à 21 ans consomment moins d'alcool que de marijuana. Les jeunes d'aujourd'hui ont donc moins de chances d'être accusés de conduite avec facultés affaiblies.
    Il n'y a pas de solution miracle. Cela donnerait un nouvel outil aux policiers. Cela pourrait également être utile dans les provinces, parce que si le policier réalise un test d'haleine aléatoire et qu'il s'avère que le taux d'alcoolémie de la personne ne dépasse pas 0,08 % mais est au-dessus de la limite provinciale de 0,05 %, on pourra tout de même imposer des sanctions.
    Des peines plus sévères ont été mises en place, notamment en Ontario et dans d'autres provinces. Il y a aussi l'éducation qui entre en ligne de compte. Je dois admettre que lorsque j'avais l'âge de mes garçons, à cette époque, tout le monde prenait un verre. C'était comme fumer la cigarette. Aujourd'hui, fumer à l'intérieur des édifices publics est inacceptable. Aujourd'hui, mes enfants et leurs amis ne songeraient même pas à conduire en état d'ébriété. Ils ont toujours un chauffeur désigné.
    Par conséquent, est-ce plutôt une question de peines plus sévères ou d'éducation?
    Avez-vous quelque chose à dire à ce sujet?
    Je ne crois même pas que l'organisme MADD réclamerait des peines plus sévères. Nous avons resserré les peines à maintes reprises au fil des années, en imposant une amende de 300 $ pour une première infraction jusqu'à une peine d'emprisonnement pour une deuxième et troisième infraction. Il faut aussi penser à ce que les compagnies d'assurance peuvent faire à ces conducteurs. Je suis convaincu que personne ici dirait que la seule chose à faire est d'alourdir les peines. Les peines sont sévères et les gens sont tout de même prêts à prendre le risque.
    Quant à l'aspect de l'éducation, j'ai assisté à l'assemblée générale annuelle de l'organisme MADD le week-end dernier, et j'ai vu leur dernier film. Il dure 15 minutes et sera diffusé dans près de 2 000 écoles secondaires, grâce au LCBO — qui amasse des fonds pour l'organisme — afin de sensibiliser les étudiants. C'est donc un aspect essentiel.

  (1725)  

    Je vais devoir vous arrêter ici.
    Il reste six minutes, alors je vais céder la parole à M. Di Iorio.
    Toutefois, en tant que président, j'aimerais d'abord poser une question. Peut-on trouver quelque part dans ce projet de loi ou dans le Code criminel une définition du terme « aléatoire »? Quelle est la définition juridique du terme « aléatoire » et où puis-je la trouver?
    Il n'est pas question d'« aléatoire » dans ce projet de loi. On parle plutôt de contrôle obligatoire de l'alcoolémie, qui est le terme employé en Irlande. Les tests d'haleine aléatoires proviennent des Australiens, et comme ils ont été les premiers, on a adopté le terme.
    Il y a eu des affaires qui se sont retrouvées devant les tribunaux concernant le caractère aléatoire d'une intervention, où on semblait cibler des gens selon des critères inappropriés, tels que l'origine ethnique, la couleur et ce genre de choses. Il n'y a rien dans le projet de loi qui...
    Ce ne sont pas des tests d'haleine aléatoires. Nous ne devrions pas utiliser ce terme.
    Cela a occasionné bien des problèmes. Dans le cadre de nos consultations, la majorité des objections aux tests d'haleine aléatoires concernait le pouvoir de la police d'intercepter des gens de façon aléatoire, un pouvoir qu'elle détient déjà, et cela a été appuyé par la Cour suprême du Canada. Les gens n'aiment pas ce qui est « aléatoire », et je peux comprendre.
    C'est obligatoire à moins que vous ne vous fassiez pas arrêter.
    Des voix: Oh, oh!
    C'est obligatoire si l'agent de police vous arrête, en effet.
    Très bien.
    Monsieur Di Iorio, vous disposez de cinq minutes.

[Français]

     Merci, monsieur le président.
    Je remercie les témoins de leur travail.

[Traduction]

    Excusez-moi, je voudrais faire une petite mise au point. Il y a effectivement le terme « contrôle aléatoire » dans un titre du projet de loi.
    Il figure dans le titre?
    Je savais que je n'avais pas inventé ça, mais le terme ne se retrouve pas dans le texte.
    Je suis désolé. On trouve bel et bien le terme.
    Allez-y, monsieur Di Iorio.

[Français]

    Un suivi des changements à propos de quoi? Voulez-vous parler du code actuel?
    Connaissez-vous l'expression « track changes »?
    Je connais très bien l'expression track changes.
    Les dispositions du projet de loi s'inspirent de la loi existante. Il y a parfois des projets de loi où on a raturé ce qu'on enlève et où on a indiqué les ajouts. Avez-vous un tel document?
    Il y a une concordance qui indique, par exemple, que l'article 320 devient l'article 19.12 et que cet article en est un nouveau.
    Ce n'est pas la question que j'ai posée.
    Avez-vous un document qui présente le suivi des changements?
    Non, je n'ai pas ce document.
    Il n'y a donc aucun document de cette nature qui a été produit?
    Nous avons commencé presque tout à partir du début. Il s'agit d'une toute nouvelle partie du projet de loi. Ce ne sont pas des modifications.
    Revenons au contrôle aléatoire.
    Allons au paragraphe 320.27(3) intitulé « Contrôle aléatoire ».
    Évidemment, nous connaissons les restrictions imposées à l'utilisation des titres dans l'interprétation d'une loi. Ces restrictions sont quand même importantes et font en sorte que le tribunal doit s'en remettre au libellé de l'article et de la disposition plutôt qu'au titre.
    Dans la disposition, le seul paramètre qu'on retrouve est le passage disant « que l'agent de la paix estime nécessaire [...] ». On convient que, dans ce contexte, une grande discrétion est accordée à l'agent de la paix.
    À cet égard, ma question est la suivante.
     Il y a évidemment un contrôle aléatoire, mais il peut aussi y avoir un contrôle arbitraire. Comment peut-on en arriver à passer à un véritable contrôle aléatoire et à éviter un contrôle arbitraire?
    Premièrement, il y a une restriction importante, à savoir que l'agent de la paix doit avoir en sa possession un appareil de détection approuvé. Il ne peut pas faire attendre la personne cinq minutes, le temps qu'un autre policier se rende sur les lieux avec un appareil. L'intervention doit être immédiate et l'agent de la paix doit avoir l'appareil avec lui.
    Rien ne l'empêche d'avoir l'appareil avec lui lors de chaque quart de travail.
    À ma connaissance, en Colombie-Britannique et en Alberta, on a décidé de mettre un appareil de détection approuvé dans toutes les voitures de patrouille pour éviter qu'il y ait un délai et les problèmes que cela occasionne. Toutefois, j'avoue que je ne vois pas comment on peut rendre arbitraire un contrôle qui est aléatoire.

  (1730)  

    Vous reconnaissez toutefois que la disposition ne pose aucune restriction au contrôle arbitraire.
    Je ne dirais pas cela, parce que ce n'est pas notre projet de loi et que cette disposition n'était pas dans le projet de loi C-73.
    L'auteur du projet de loi, soit M. Blaney, a suivi le modèle de l'Australie où le contrôle est aléatoire et est presque sans restriction. Je n'ai trouvé qu'une restriction dans la loi australienne et c'est celle voulant que l'agent de la paix doit être en uniforme.
    Donc, à Montréal, ils ne pourraient pas présentement faire ces contrôles aléatoires.
    Pardon?
    À Montréal, ils ne pourraient pas faire présentement ces contrôles aléatoires.
    Cela aurait été le cas si on avait ajouté cette restriction dans notre loi. Il n'y a qu'un des États en Australie qui exige que le policier soit en uniforme pour pouvoir effectuer un contrôle dans sa voiture de patrouille. C'est la seule restriction.
    Il y a aussi un article qui exige qu'un policier applique la procédure qui réduit au minimum les problèmes et les délais pour le public.
    Je sais que le temps qui m'est alloué tire à sa fin. Je vais donc vous poser brièvement une dernière question.
    Pourquoi enlève-t-on les dispositions contenues dans un article pour les inclure dans un autre article?
    C'est une question de rédaction. Nous voulions signaler un nouveau départ en créant une nouvelle partie. C'était prévu dans le document de discussion du ministère de la Justice, qui a été publié en février 2010.
     J'ai été un peu surpris lorsque les rédacteurs nous ont dit qu'on ne pouvait pas remplacer les numéros qui y figuraient parce qu'on créerait une partie dans une autre partie. Cela ne fonctionne pas de cette façon. Il fallait trouver un autre endroit pour les inclure. C'est l'expertise que ces gens ont à cet égard. Ils nous ont dit de créer une nouvelle partie et celle-ci débute, si je ne m'abuse, à l'article 320.22.

[Traduction]

    Je crains que nous n'ayons plus de temps, mais vous pourriez nous fournir une réponse par écrit.
    Il s'agit d'un projet de loi d'initiative parlementaire, alors je suis un peu préoccupé parce que, dans votre réponse, vous avez dit: « comme le gouvernement l'a rédigé ». Nous devons être très prudents ici. En tant que parlementaire, c'est une situation qui me préoccupe. C'est déroutant pour le Comité, parce qu'on nous a dit que nous ne pouvions pas obtenir d'information concernant un ancien projet de loi rédigé par un ancien gouvernement, mais en même temps, nous avons un témoin qui est fonctionnaire et qui nous dit: « Nous avons rédigé ce projet de loi. Nous avons voulu faire ceci et faire cela ». Je voulais simplement le souligner.
    À titre de président du Comité, je suis préoccupé parce qu'un député a demandé de l'information au sujet d'un projet de loi qui a été rédigé lors d'une législature précédente, et sa demande a été refusée. C'est donc une préoccupation que je tenais à inscrire au compte rendu.
    Merci beaucoup.
    La séance est levée.
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