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SECU Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la sécurité publique et nationale


NUMÉRO 026 
l
1re SESSION 
l
42e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 29 septembre 2016

[Enregistrement électronique]

(1530)

[Traduction]

    Je déclare ouverte la 26e séance du Comité permanent de la sécurité publique et nationale.
    Je remercie les témoins. Je ferais appel à votre indulgence un instant. Nous devons examiner une affaire du Comité que nous voudrions régler avant de commencer nos travaux d'aujourd'hui, et ce, afin de corriger une erreur commise lors de la séance précédente.
    Je crois comprendre que Mme Damoff souhaite déposer une motion.
    En effet. Elle concerne le titre de la version anglaise de notre rapport. Un mot erroné s'est glissé dans le compte rendu, car j'ai dit « occupational » au lieu d'« operational ».
    La motion est la suivante:
Que la motion adoptée le mardi 27 septembre 2016, concernant le titre anglais du rapport sur les blessures de stress opérationnel et le syndrome de stress post-traumatique soit révoquée et remplacée par la motion suivante: Que le rapport anglais soit intitulé « Healthy Minds, Safe Communities: Supporting our Public Safety Officers through a National Strategy for Operational Stress Injuries ».
    Je suis désolée d'avoir commis cette erreur.
    Est-ce que quelqu'un souhaite intervenir? Il est question d'« operational stress injury » tout au long de la version anglaise de notre rapport. C'est une erreur que nous voulons simplement rectifier. Merci.
    (La motion est adoptée.)
    Le président: Nous devons également nous occuper d'un autre petit point que nous pourrions régler aujourd'hui. Cela sera utile, car cela concerne la semaine prochaine.
    Monsieur le président, je propose:
Que les analystes et le greffier, en consultation avec le président, préparent un communiqué de presse pour publication sur le site web du Comité et pour distribution en lien avec ses consultations publiques prochaines sur le sujet du cadre de sécurité nationale du Canada.
    (La motion est adoptée.)
    Merci.
    Je remercie les témoins de leur indulgence. C'était le dernier détail à régler afin de terminer une étude à laquelle le Comité a travaillé.
    Nous portons maintenant notre attention, pour le moment du moins, au projet de loi C-226, Loi modifiant le Code criminel et d'autres lois en conséquence, qui a été renvoyé au Comité.
    Nous recevons aujourd'hui trois témoins, dont deux comparaissent en personne et un, par vidéoconférence. Je proposerais de commencer par la vidéoconférence, simplement parce qu'en cas de problème, comme il s'en produit parfois, les choses sont plus faciles si un autre témoin parle pendant que les techniciens règlent le problème. Je propose que nous commencions par un exposé de 10 minutes de Micheal Vonn, directeur de la politique à l'Association des libertés civiles de la Colombie-Britannique, et entendions par la suite Michael Spratt, de la Criminal Lawyers' Association, et Abby Deshman, de l'Association canadienne des libertés civiles.
    Nous entendrons Mme Vonn en premier.
    Le sujet de la conduite avec facultés affaiblies fait, bien entendu, l'unanimité. Nous sommes tous du même bord. Tout le monde est en faveur de la sécurité routière. Le seul point de discorde concerne la meilleure manière d'assurer cette sécurité tout en maintenant l'intégrité du système de justice.
    À notre avis, ce projet de loi rate la cible sur certains points cruciaux. Je vais traiter de trois parties du projet de loi, soit celles de la détermination de la peine, des protections procédurales en cours de procès et des fouilles de la police.
    En ce qui concerne d'abord la détermination de la peine, le projet de loi prévoit des peines minimales obligatoires qui devraient être reconsidérées. L'opinion selon laquelle ces peines ont un effet dissuasif général ou particulier est profondément ancrée, mais complètement erronée. Les preuves montrent que ces peines n'ont pas plus d'effet dissuasif que les peines proportionnelles imposées dans le cadre de l'exercice du pouvoir judiciaire discrétionnaire en général. C'est vrai même quand les peines minimales obligatoires constituent une sanction bien plus sévère.
    MADD a fait remarquer, dans son rapport du 11 décembre 2015, que les recherches menées au cours des 35 dernières années démontrent que l'imposition de peines plus sévères pour la conduite avec facultés affaiblies n'a pas en soi d'important effet dissuasif général ou particulier.
    En plus de ne pas présenter l'avantage d'avoir un effet dissuasif, les peines minimales obligatoires risquent fort d'être préjudiciables. Des peines injustes et excessivement punitives pourraient être imposées, et le pouvoir discrétionnaire pourrait être transféré des tribunaux, où le processus est public et peut faire l'objet d'un examen, aux procureurs, là où le processus serait secret et ne pourrait être soumis à un examen.
    Une recherche réalisée par la Commission canadienne sur la détermination de la peine a révélé une augmentation de la négociation de plaidoyers dans le contexte des peines minimales obligatoires, et ce système de justice pénale informel ne sert les intérêts de personne. Cela peut porter atteinte à la proportionnalité, à l'équité et, certainement, à la détermination de la peine, encourageant les plaidoyers de culpabilité sans égard à la culpabilité et isolant le processus de justice pénale de la transparence, de la reddition de comptes et des mesures de protection et de l'examen prévus par la Constitution.
    J'ai fourni au greffier le lien vers le rapport exhaustif de notre association sur l'imposition de peines minimales obligatoires pour que vous puissiez en prendre connaissance.
    Si nous passons au deuxième point, celui des protections procédurales, des présomptions législatives et de la question de la preuve, nous considérons que ce projet de loi semble reposer sur un postulat très dangereux voulant qu'une réduction des protections procédurales pour les personnes accusées de conduite avec facultés affaiblies rendra les routes plus sûres. Or, ce postulat est erroné. On n'accroît pas la sécurité publique en exposant les accusés à un risque d'injustice.
    Le projet de loi réduirait considérablement les protections procédurales au cours du procès des personnes accusées de conduite avec facultés affaiblies, et ce, de diverses manières, notamment en limitant la divulgation de renseignements à la défense et en imposant les présomptions relatives à la preuve qui favoriseraient la poursuite. Aucune mesure réduisant les protections procédurales ou les droits de l'accusé lors du processus judiciaire ne peut être justifiée.
    Nous partageons le point de vue de l'ACLC, que vous entendrez dans quelques instants, à propos de l'insuffisance de preuves démontrant l'efficacité des tests de détection et de reconnaissance de drogues. À l'évidence, il est toujours risqué de réduire les protections procédurales visant à empêcher les condamnations erronées, mais on ne devrait jamais envisager de le faire lorsque la fiabilité des preuves essentielles est susceptible d'être remise en question.
    J'aimerais attirer votre attention sur certaines preuves qui vont à l'encontre de l'opinion, répandue dans certaines sphères, voulant que les procès pour conduite avec facultés affaiblies déraillent souvent.
    Dans son rapport intitulé « La conduite avec facultés affaiblies au Canada, 2011 », Statistique Canada indique que « Les causes de conduite avec facultés affaiblies sont plus susceptibles de donner lieu à une condamnation comparativement à la plupart des [...] autres infractions. »
    Selon le rapport de 2010-2011 de Statistique Canada, 84 % des causes de conduite avec facultés affaiblies donnent lieu à une condamnation, un pourcentage qui se maintient depuis 10 ans. Ce pourcentage varie légèrement d'une région à l'autre, passant de 81 % en Ontario et en Alberta à 93 % à l'Île-du-Prince-Édouard. Ce pourcentage de condamnations est de loin supérieur à celui des causes réglées en général, qui s'établit à 64 %.
(1535)
    Selon le rapport de Statistique Canada, sur 10 ans, le pourcentage de condamnations a été bien plus élevé dans les causes de conduite avec facultés affaiblies que pour les causes criminelles en général. Je ne comprends pas comment MADD, dans son document de 2015, en soit arrivé à citer des chiffres et des conclusions aussi différents et aussi contraires aux données présentées par Statistique Canada.
    En ce qui concerne enfin les fouilles et les alcotests effectués par la police, on pourrait soutenir que l'essentiel du projet de loi vise à autoriser les tests d'haleine aléatoires, ou THA. J'avoue que ce n'est qu'hier que j'ai pu mettre la main sur un exemplaire de l'avis de Peter Hogg sur la constitutionnalité des THA. Maintenant que nous l'avons reçu, nous abondons dans le même sens que nos collègues de l'ACLC en ce qui concerne le poids des preuves sur lesquelles on s'est appuyé pour déterminer l'efficacité des THA. Nous n'avons pu examiner ces preuves assez en profondeur pour en arriver à une position claire; il est néanmoins évident que ces preuves sont très contestées.
    Il faut toujours porter soigneusement attention à la méthode utilisée lorsque l'on examine des études, et un examen sélectif des études s'avère toujours problématique. Voilà pourquoi les études systémiques sont toujours probantes, puisqu'elles tentent de corriger des manquements méthodologiques et des partis pris lors de la sélection des études. Nous considérons donc que le Comité devrait accorder beaucoup de poids à l'étude systémique de la Fondation de recherches sur les blessures de la route citée dans le mémoire de l'ACLC. Selon cette étude, rien ne prouve que les THA accroissent substantiellement la sécurité routière dans le cadre du régime actuel.
    Les preuves à cet égard sont, bien entendu, au coeur de la question de la constitutionnalité d'une telle disposition. Si ces preuves étaient apportées, les THA seraient justifiés, mais n'en perdraient pas pour autant leur effet discriminatoire potentiel.
    Il ne manque pas, au Canada, de preuves de comportements discriminatoires de la part de la police, particulièrement en ce qui concerne la race. Même si des renseignements essentiels à l'évaluation de la situation sont rarement recueillis, on en est à un point où on s'entend généralement sur le besoin d'empêcher la police de cibler des communautés racialisées.
    Les tenants des THA font valoir que la sélection est vraiment aléatoire et non discriminatoire si ces tests sont principalement utilisés lors de barrages routiers. Ils insistent toutefois pour que les policiers aient également la discrétion d'exiger l'administration de ces tests à l'extérieur du cadre d'un barrage routier, soutenant que dans les régions rurales ou éloignées, par exemple, il manque de ressources pour ériger des barrages routiers régulièrement. Comme ces tests seraient effectués en l'absence de tout critère pour déterminer les soupçons, le fait d'accorder une discrétion absolue aux agents de police favoriserait la sélection discriminatoire des conducteurs.
     À votre avis, les THA, s'ils sont clairement justifiés, ne devraient toutefois être effectués que lors de barrages routiers; c'est d'ailleurs, comme le concèdent les tenants des THA, l'utilisation de loin la plus courante que l'on en fait dans les autres pays. Cela permettrait d'optimiser les bénéfices de ces programmes, tout en garantissant que les THA n'entraîneraient pas une aggravation de la discrimination à l'égard des communautés racialisées. Cela favoriserait également l'établissement d'une base en vue de l'évaluation et de l'examen des programmes afin de déterminer si des modifications sont nécessaires ou justifiées.
    C'était là mes observations préliminaires.
    Merci.
(1540)
    Merci beaucoup.
    Votre exposé était limpide et instructif.
    Qui souhaiterait prendre maintenant la parole?
    C'est moi qui ai été nommée. J'interviendrai donc en premier.
    Merci beaucoup, madame Deshman.
    Merci beaucoup de nous avoir donné l'occasion de témoigner devant vous aujourd'hui.
     Je m'appelle Abby Deshman, et je suis avocate et directrice du Programme de la sécurité publique à l'Association canadienne des libertés civiles.
    À l'instar de l'Association des libertés civiles de la Colombie-Britannique, nous soutenons sans réserve l'objectif de ce projet de loi, sachant que la conduite avec facultés affaiblies constitue un grave problème du pays. Il est évident que le gouvernement peut et devrait jouer un rôle de premier plan dans la lutte contre ce problème social persistant. Nous savons que nous pouvons faire mieux. Malheureusement, nous ne pensons pas que ce projet de loi, dans sa forme actuelle, soit la réponse qui convienne.
    Je traiterai aujourd'hui de quatre points préoccupants. J'ai un mémoire écrit, qui n'a malheureusement pas été envoyé à temps pour la traduction officielle. Il est long — il compte 19 pages —, mais je passerai en revue autant de matière que possible.
     Ces quatre points sont les suivants: les amendes et les peines minimales obligatoires; l'imposition de peines consécutives; les tests d'haleine aléatoires; et les nouvelles présomptions législatives en cas de conduite avec facultés affaiblies par les drogues.
    Sachez d'abord que les peines minimales obligatoires ne fonctionnent pas. Elles sont inefficaces et injustes. Des décennies de recherches ont clairement montré que le durcissement des peines ne décourage pas la criminalité. Le régime d'amendes et peines minimales obligatoires prévu dans le projet de loi ne découragera pas la conduite avec facultés affaiblies. Il imposera toutefois des contraintes aux tribunaux et des peines injustes à un sous-groupe de la population qui aura commis ces crimes. Les peines minimales obligatoires constituent un échec au chapitre de la politique publique, et nous jugeons qu'elles devraient être éliminées. Nous avons bien accueilli les propos de M. Blair à la Chambre des communes, où il a déclaré que les nouvelles peines minimales obligatoires seraient ou devraient être éliminées du projet de loi, et il a encouragé le Comité à agir en ce sens. Nous appuyons pleinement cette élimination et pensons qu'il faudrait aller plus loin au Canada.
    Si vous n'éliminez que les nouvelles peines minimales obligatoires, celles qui existaient avant le dépôt de ce projet de loi seront encore là, y compris un ensemble de peines qui ont été durcies en 2008 sous l'ancien gouvernement. Nous ne considérons pas qu'elles soient nécessaires pour lutter contre la conduite avec facultés affaiblies.
    Nous pensons qu'il en va de même pour les amendes minimales obligatoires. Rien ne permet de croire que si les peines minimales obligatoires ne découragent pas la criminalité, les amendes minimales obligatoires se révéleront plus efficaces. En fait, ces amendes ont pour effet de cibler de façon discriminatoire les moins bien nantis du pays.
    Les peines minimales obligatoires pourraient entraîner l'imposition de peines injustes à certains citoyens, alors que les amendes minimales obligatoires auront toujours pour effet d'imposer des peines injustes aux personnes vivant de l'aide sociale ou ayant un handicap, alors qu'elles ne poseront pas de problème aux mieux nantis. Ce genre de régime de détermination de la peine est inéquitable. Nous ne pensons pas qu'il soit nécessaire, puisqu'il ne contribue pas à la sécurité publique, et nous encourageons le Comité à éliminer ces peines et ces amendes du projet de loi.
    Nous nous préoccupons également de l'imposition de peines consécutives. Je sais que la question a aussi été soulevée à la Chambre des communes; je serai donc brève. Le paragraphe 320.22(2) proposé — qui porte sur l'imposition obligatoire de peines consécutives en cas de conduite avec facultés affaiblies causant la mort — est extrêmement préoccupant et, selon nous, inconstitutionnel. La peine minimale obligatoire prévue en pareil cas dans le projet de loi est actuellement de cinq ans, ce qui signifie qu'un accident qui causerait le décès de plusieurs personnes entraînera l'imposition d'une peine d'emprisonnement obligatoire de 10, 15 ou 20 ans, voire davantage. À notre avis, cela contrevient clairement au droit d'être protégé contre les peines cruelles et inusitées. Cette disposition doit être éliminée du projet de loi.
    Le troisième point qui nous préoccupe est celui de l'élargissement des pouvoirs arbitraires d'interpellation et de fouille de la police dans le contexte de tests d'haleine aléatoires. Comme vous pourrez le voir dans notre mémoire écrit, nous nous inquiétons grandement des répercussions probables et, au bout du compte, de la constitutionnalité de ces nouveaux pouvoirs proposés. Nous avons étudié les recherches exhaustives publiées sur le contexte canadien dans les journaux, ainsi que l'avis de M. Hogg, et nous ne pensons pas que les documents existants répondent à la question principale qu'il convient de se poser au pays.
    Au Canada, la question n'est pas de savoir si les tests d'haleine aléatoires sont efficaces; il est évident qu'ils le sont et qu'ils fonctionnent. Ce qu'il faut se demander, c'est s'ils réussiront plus efficacement à dissuader les gens de conduire avec les facultés affaiblies que notre régime actuel. Ce régime, en place depuis de nombreuses années, prévoit des tests d'haleine sélectifs. C'est là la question à laquelle il est extrêmement difficile de répondre, et je pense sincèrement que les recherches et les comparaisons internationales actuelles ne permettent pas d'y répondre.
    J'ai décelé deux principaux problèmes au chapitre des études et des comparaisons internationales.
    D'abord, même s'il est vrai que l'instauration des tests d'haleine aléatoires a été révolutionnaire dans bien des pays, la vaste majorité de ces pays n'avaient pas de programme de contrôles routiers avant de commencer à effectuer les tests d'haleine aléatoires. Nous ne comparons donc pas la situation avec celle du Canada, où le programme de contrôles routiers R.I.D.E. a été mis en oeuvre pendant des décennies, mais avec celle de pays où il n'y avait presque aucune véritable initiative d'exécution de la loi.
    Par conséquent, grâce aux tests d'haleine sélectifs et à d'autres initiatives, le Canada a connu sa propre révolution au chapitre de la conduite avec facultés affaiblies. Le pourcentage de décès de conducteurs attribuables à l'alcool est passé de 62 % en 1981 à 33 % in 1999, et il a encore diminué depuis. Ces 10 dernières années, la conduite avec facultés affaiblies a assurément décru au Canada et dans les pays où des tests d'haleine aléatoires sont effectués.
(1545)
    Compte tenu des importants changements sur le plan juridique, culturel et éducatif qui sont survenus au cours des dernières décennies, nous ne pensons pas que les premières expériences qu'ont connues d'autres pays avec les alcootests aléatoires représentent un comparateur utile pour le Canada. Nous ne sommes tout simplement pas rendus au même point que ces pays.
    Deuxièmement, alors qu'il y a quelques pays qui ont mis en oeuvre les alcootests sélectifs en premier, suivis des alcootests aléatoires, ils ont également mis en place une série d'autres mesures pour lutter contre la conduite avec facultés affaiblies. J'ai quelques exemples. Je peux vous les fournir à la période des questions, si vous le voulez.
    Mais il est extrêmement difficile de distinguer l'incidence des alcootests aléatoires de celle des autres initiatives qui ont également été mises en oeuvre. Bon nombre de ces pays ont augmenté radicalement l'application de la loi au même moment où ils ont mis en oeuvre les alcootests aléatoires. Ils ont également mené des campagnes médiatiques très vastes, des campagnes de sensibilisation à grande échelle, et il est tout simplement impossible de séparer l'incidence de la mise en oeuvre des alcootests aléatoires de celle de tous les efforts importants qui ont été déployés parallèlement.
    Comme la Fondation de recherches sur les blessures de la route l'a résumé en 2012:
... les preuves disponibles appuient les deux... [les alcootests sélectifs]
— ce que nous avons déjà
— et... [les alcootests aléatoires] laissent entendre que ce qui compte vraiment, c'est l'équilibre entre les niveaux d'application de la loi suffisamment élevés et la publicité entourant l'application de la loi pour créer l'effet dissuasif requis.
    À la suite de cet examen, nous percevons l'incidence projetée de la mise en oeuvre des alcootests aléatoires au Canada comme étant plus hypothétique que certaine, et nous estimons que quelques-uns des documents que nous avons lus qui préconisent les alcootests aléatoires sont des évaluations trop optimistes par rapport à ce que les preuves démontrent réellement.
    De l'autre côté du balancier, nous sommes très préoccupés par les répercussions additionnelles qu'un pouvoir arbitraire de la police en matière de fouille aura sur les gens, et plus particulièrement sur ceux qui sont issus de communautés minoritaires. La proposition actuelle ne limiterait pas ce pouvoir de procéder à des fouilles à des postes de vérification stationnaires, où le pouvoir discrétionnaire est restreint et où le risque de profilage racial et d'autres pratiques inadéquates est réduit. Ceux qui sont déjà arrêtés au volant de leur voiture de façon disproportionnée devront non seulement immobiliser leur véhicule et être interrogés, mais devront aussi sortir de leur véhicule, rester sur l'accotement ou monter à bord de la voiture de patrouille et fournir un échantillon d'haleine.
    Je n'ai jamais été arrêtée sur le bord de la route pour que l'on vérifie mon certificat d'enregistrement et ma sobriété, et je n'ai jamais dû m'arrêter pour un programme RIDE. Je ne suis pas de ces personnes qui vivent ces expériences. Mais pour ceux qui sont ciblés de façon disproportionnée et qui doivent se soumettre à un alcootest, ils devront fréquemment... vivre une expérience qui est humiliante, dégradante et offensante. Ce n'est pas forcément quelque chose qui se fera rapidement dans une voiture.
    Ces faits, les avantages hypothétiques des alcootests aléatoires au Canada, de même que l'élargissement important des pouvoirs des policiers, sont à la base de l'analyse constitutionnelle que nous fournissons dans nos mémoires. Vous reconnaissez, là encore, que ce sont des opinions écrites très bien documentées qui laissent entendre que ce pouvoir est constitutionnel. Nous avons un point de vue différent.
    Ce que nous concluons, c'est que la mise en oeuvre d'alcootests aléatoires, telle qu'elle est proposée à l'heure actuelle, soulèverait d'importants problèmes constitutionnels et serait vraisemblablement une violation injustifiée de l'article 8, qui porte sur les perquisitions et les saisies arbitraires, et de l'article 9, qui porte sur la détention arbitraire, de la Charte.
    Enfin, j'aimerais dire quelques mots sur quelques-unes des présomptions légales dans le projet de loi C-226. Je pense que vous entendrez le témoignage de la Criminal Lawyers' Association sur l'élimination du critère énoncé dans l'arrêt Mohan pour évaluer les agents de police. C'est l'exigence selon laquelle ils doivent avoir leur certification d'expert dans des dossiers particuliers. Nous partageons ces préoccupations.
    Nous sommes également très inquiets au sujet de la présomption en matière de preuve liée à la conduite avec facultés affaiblies qui est proposée au paragraphe 320.32(7). Brièvement, ce nouveau paragraphe utiliserait les résultats soutenus d'un policier chargé des évaluations de la présence de drogues, les résultats qui correspondent à ceux de l'évaluation de la présence de drogues et de l'analyse des fluides corporels, pour établir une présomption légale que cette drogue était la cause des facultés affaiblies au moment de la conduite. Essentiellement, il faut les deux résultats de ces deux tests et, s'ils sont similaires, alors nous présumerons que la personne conduisait avec les facultés affaiblies par cette drogue.
    Ces deux mécanismes d'évaluation, l'évaluation de la présence de drogues et l'analyse des fluides corporels, comportent des lacunes chacun à leur manière. Dans une étude canadienne des évaluations de la présence de drogues, les résultats des tests d'une personne innocente sur cinq qui n'avait pas consommé de drogues ont révélé à tort qu'elle avait les facultés affaiblies. On parle ici de 20 % qui n'avaient pas consommé de drogues.
(1550)
    Les échantillons de salive et d'urine sont également très limités quant à leur utilité. Les résultats de ceux qui ont consommé des drogues de nombreux jours, de nombreuses semaines, voire de nombreux mois avant, seront positifs aux tests de dépistage, selon le type de drogue ou l'échantillon de substances corporelles prélevé.
    En termes simples, on ne peut pas prendre ces deux éléments d'information et les combiner pour créer une présomption, comme ce projet de loi le propose. C'est comme si l'on essayait de reproduire le système d'alcootests. Les données scientifiques sur les alcootests sont beaucoup plus fiables et sûres et sont moins variées que celles sur les facultés affaiblies par la drogue. Nous pensons que si vous maintenez ces présomptions, elles donneront lieu à des condamnations injustifiées et mettront en péril la présomption d'innocence.
    Je dois vous demander de conclure vos remarques rapidement.
    Je terminerai en vous remerciant du temps que vous nous avez consacré aujourd'hui.
    Je me ferai un plaisir de répondre à vos questions et de poursuivre cette discussion avec vous.
    Merci. Vous avez utilisé le temps de parole restant de Michael. C'est bien.
    Notre troisième témoin est Michael Spratt, de la Criminal Lawyers' Association.
    La parole est à vous, merci.
    J'imagine que la première étape consiste à laisser tomber les civilités et à aller droit au but. C'est un projet de loi volumineux, et nous n'aurons pas suffisamment de temps pour tout couvrir. J'ai présenté un mémoire de 32 pages. J'ai décidé de marquer un point sur mes amis ici. J'ai passé en revue rapidement ce qu'ils ont fait, cependant, et je dois les féliciter. En tant qu'avocat typique en droit criminel, j'ai soumis mon mémoire très tard hier soir. Il n'a pas encore été traduit, mais je me ferai un plaisir de répondre à vos questions et d'assurer un suivi, au besoin.
    La CLA appuie les lois qui sont justes, modestes et constitutionnelles. Bien que la CLA appuie les objectifs de protéger la société contre les dangers de la conduite avec facultés affaiblies, nous ne pouvons pas appuyer ce projet de loi dans sa forme actuelle. La CLA ne peut pas appuyer un projet de loi comme celui-ci dans sa version actuelle et, à vrai dire, ne peut pas appuyer la majorité des dispositions prévues dans ce projet de loi. Néanmoins, dans mon mémoire, j'offre quelques suggestions d'amendements, si le Comité arrive à une conclusion différente.
    Ce projet de loi, autrefois d'initiative ministérielle, et qui est maintenant présenté en tant que projet de loi d'initiative parlementaire, doit faire l'objet d'un examen plus approfondi en raison des modifications importantes qu'il propose d'apporter au Code criminel en ce qui a trait à la conduite avec facultés affaiblies et aux infractions connexes. Des modifications aussi fondamentales que celles proposées dans ce projet de loi devraient faire l'objet d'un examen exhaustif, de rapports complets du ministère de la Justice, de vastes consultations et, idéalement, d'un examen par une entité comme la Commission de réforme du droit.
    Je souscris aux mémoires de mes amis comme s'ils étaient les nôtres, de même qu'à ce que je m'apprête à vous dire.
    À notre avis, toutes les dispositions dans ce projet de loi qui imposent des peines minimales obligatoires, des amendes ou des peines d'emprisonnement doivent être retirées, et les peines minimales obligatoires actuelles devraient être examinées. Les peines minimales obligatoires sont une méthode inefficace pour respecter les principes de la détermination de la peine. Les peines minimales constituent une solution universelle qui sacrifie l'équité et la proportionnalité sans accroître la sécurité publique. Les peines minimales entraînent des coûts, imposent un fardeau excessif sur le système correctionnel et, peut-être plus important encore, déprécient les principes de discrétion judiciaire et d'équité fondamentale. Les peines minimales obligatoires prévues dans ce projet de loi sont inconstitutionnelles.
    Nous sommes également très préoccupés par le nouveau régime d'alcootests aléatoires. L'augmentation des pouvoirs policiers entraîne des coûts pour la société. L'expérience qu'on a eue avec les contrôles d'identité et de routine — ce qui a donné lieu à des arrestations et à des condamnations disproportionnées chez les minorités visibles pour des infractions liées à la marijuana — le démontre clairement. L'exercice des pouvoirs policiers peut viser et vise de façon disproportionnée les minorités visibles.
    Certains sont d'avis, et je suis certain que le Comité entendra ces opinions, que les mesures de tests d'haleine aléatoires prévues dans ce projet de loi sont constitutionnelles. Je dirais que les données probantes sur lesquelles ces opinions sont fondées devraient être examinées très attentivement. Même si ces données probantes sont correctes, les opinions les mieux intentionnées des circonstances de ces alcootests aléatoires ne tiendront pas la route. Je donne un exemple dans mon document de situations qui ne seraient pas du tout jugées acceptables et qui seraient offensantes pour bien des membres du Comité.
    Le projet de loi C-226 représente également un élargissement important des pouvoirs de l'État et renferme de nombreux raccourcis en matière de preuve. Je ne veux pas minimiser ce fait, car ce ne sont pas vraiment des raccourcis. Ce sont des raccourcis aux raccourcis préexistants. Ces raccourcis mettent en péril l'équité du procès. Ils comprennent, tels qu'ils sont énoncés dans mon mémoire, des condamnations pour conduite avec un taux d'alcoolémie supérieur à 80 milligrammes, ce qui disparaîtrait. Les condamnations seraient pour conduite avec un taux d'alcoolémie égal ou supérieur à 80 milligrammes dans les deux heures suivant la conduite. Ce sont d'énormes changements.
    Les dispositions relatives à l'inversion du fardeau de la preuve prévues dans le projet de loi posent problème. Les présomptions concernant le taux d'alcoolémie dans le sang représentent un raccourci dangereux qui requiert une évaluation attentive. Les normes assouplies concernant l'obtention d'échantillons d'haleine à des fins de contrôle devraient également être une source de préoccupation, tout comme l'assouplissement complet et l'élimination de la surveillance judiciaire liée à l'évaluation des témoignages d'experts que ce projet de loi, dans certains cas, rend définitives en ce qui concerne la détermination de culpabilité ou d'innocence.
    Ces raccourcis auront une incidence sur l'équité du procès. Ils susciteront de nombreuses préoccupations fondées sur la Charte. Au final, et peut-être plus important encore, ces raccourcis déprécieront et limiteront la qualité des preuves présentées en cour.
(1555)
    Enfin, il y a des articles du projet de loi qui sont incontestablement inconstitutionnels tels que l'amendement qui permettrait l'utilisation de déclarations faites sous la contrainte pour justifier de demander un échantillon d'haleine.
    La Cour d'appel de l'Ontario et la Cour suprême, au cours des 15 dernières années, ont jugé que c'était une violation de la Charte qui ne peut pas être justifiée par l'article premier. Il n'est pas nécessaire d'avoir un renvoi à l'article de la Cour suprême. Nous l'avons déjà, et les résultats sont mauvais.
    Compte tenu de la portée de ce projet de loi et des changements importants proposés qui sont énumérés dans l'étude — même si ce n'est pas la liste complète —, nous ne pouvons tout simplement pas appuyer cette mesure législative, et j'exhorte le Comité à étudier attentivement nos mémoires écrits de même que nos suggestions détaillées d'amendements, dans l'éventualité où le Comité juge bon d'approuver ces articles.
    Merci.
(1600)
    Merci.
    Je dis souvent que j'ai hâte de prendre connaissance des mémoires écrits, et je le pense vraiment parfois. J'ai hâte de lire vos mémoires.
    Merci à vous tous de vos témoignages.
    Monsieur le président, pourrais-je demander au Comité que l'on passe à une série d'interventions de cinq minutes? Je fais cette proposition car plus de la moitié de l'heure est passée.
    J'ai besoin du consentement unanime pour passer à une série d'interventions de cinq minutes.
    Non. D'accord.
    Monsieur Spengemann.
    Merci, monsieur le président.
    Si quelqu'un n'a pas besoin de ses sept minutes, nous passerons à l'intervenant suivant.
    J'allais simplement dire que, si je n'utilise pas les sept minutes au complet, je serai ravi de partager le reste de mon temps avec M. Mendicino.
    Je vais parler directement de ce qui est au coeur même de la controverse, à savoir les alcootests aléatoires.
    Ce projet de loi oppose deux très importants courants de pensée. L'un est le niveau de condamnation des infractions de conduite avec facultés affaiblies, qui est probablement semblable à d'autres formes d'homicides ou de crimes à caractère raciste. C'est une très grande source de préoccupation pour la population. Ensuite, il y a bien entendu nos libertés civiles, les droits procéduraux, les droits garantis par la Charte...
    Je vais vous proposer l'idée que le caractère aléatoire n'a pas sa place ici car l'esprit humain ne fait que rarement quelque chose d'aléatoire, voire jamais. Donc, lorsque nous parlons du caractère aléatoire, parlons-nous du point de vue de l'automobiliste qui peut ou non être intercepté lors d'un contrôle routier ou du point de vue de l'agent de police qui, à mon avis, a le pouvoir discrétionnaire en vertu de ce projet de loi de décider s'il soumet ou non une personne à un alcootest?
    Je tiens à préciser que ce ne sont pas que les minorités raciales qui risquent d'être négativement touchées par ce projet de loi. Ce pourrait être des personnes âgées, des jeunes, des femmes ou des conducteurs de camions. Le projet de loi accorde une très grande discrétion à l'agent de police qui peut décider ou non d'administrer l'alcootest. La seule façon de vraiment rendre cette décision aléatoire est de saisir le numéro de plaque d'immatriculation dans un ordinateur qui, à l'aide d'un processus de sélection aléatoire binaire, indique à l'agent s'il doit faire subir l'alcootest ou non à l'automobiliste.
    Je pense que nous sommes en dehors du caractère aléatoire, et je voulais vous demander si vous êtes d'accord et, le cas échéant, si cela renforce l'argument — sans doute que oui — de ne pas adopter ce projet de loi. Mais si nous maintenons le caractère aléatoire, vous verrez au paragraphe 320.27(3) que c'est seulement le titre du paragraphe qui dit « contrôle aléatoire ».
    Le projet de loi, dans sa forme actuelle, pourrait-il donner lieu à une défense où l'on invoque le caractère non aléatoire? Autrement dit, si une personne a été interceptée par une policière et que des recherches révèlent qu'elle arrête tous les automobilistes qui conduisent des camions mais personne d'autre, cela mènerait-il, à votre avis, à la possibilité d'une défense criminelle qui est une conséquence imprévue du projet de loi?
    Pour la seconde question, si le temps le permet, j'aimerais que l'on examine de façon plus générale les principes exposés ici et que vous nous fassiez part de vos opinions sur la façon dont ils peuvent ou non s'appliquer à la question de la légalisation de la marijuana. Par souci d'optimiser le temps du Comité, nous étudions ici un projet de loi qui pourrait ouvrir la voie à des questions entourant la légalisation. Nous voulons bien faire les choses, si possible, sur les deux fronts, dans les plus brefs délais.
    Il s'agit donc de deux grandes questions que je pose, idéalement, à nos trois témoins.
    Monsieur Spratt, je vous prie de répondre en premier.
    Brièvement, l'idée voulant que les contrôles aléatoires ne soient pas vraiment aléatoires est sensée; c'est ce qu'on voit tous les jours dans nos rues. Laisser entendre que le caractère non aléatoire peut servir de moyen de défense, à cause des antécédents d'un agent ou d'autres éléments de preuve, revient souvent à déposer un énorme fardeau, d'un point de vue pratique, sur des personnes indigentes qui sont victimes de discrimination.
    Ce n'est donc pas une solution, et je ne pense pas que cela permet de sauver la disposition. Je pense que le point que vous faites valoir va plutôt dans la direction opposée.
    Excusez-moi de vous interrompre, mais ce que je veux savoir, sur le plan des ressources judiciaires, c'est s'il est probable qu'on ait recours pour se défendre, à la suite de l'adoption du projet de loi dans sa forme actuelle, au caractère non aléatoire et, encore une fois, aux disparités que vous signalez concernant la situation socioéconomique et la capacité d'invoquer une défense devant les tribunaux? La mise en oeuvre de cette disposition mènera-t-elle à une multiplication d'allégations liées au caractère non aléatoire?
(1605)
    C'est une question qui sera soulevée, mais, tout compte fait, elle ne le sera pas, et je ne pense pas que ce sera fructueux. Cela ne réconforte aucunement les personnes qui seront inévitablement ciblées à cause de cette disposition.
    Madame Deshman.
    Je vais brièvement expliquer pourquoi je suis d'accord. Dans le contexte, il ne convient pas de parler de caractère aléatoire lorsque des gens choisissent qui appréhender et qui ne pas appréhender. Les gens ne pensent pas de façon aléatoire. Leurs raisonnements sont parfois légitimes et parfois tendancieux, et il arrive que ce soit de manière inconsciente. Nous constaterons tout cela en donnant un pouvoir discrétionnaire absolu aux policiers.
    Pour ce qui est des moyens de défense, je m'en remets à mon collègue, l'avocat de la défense, qui est devant les tribunaux.
    En ce qui a trait aux facultés affaiblies par la drogue et à la légalisation de la marijuana, il reste encore beaucoup de travail à faire pour savoir à quoi ressemble un régime efficace. Une partie de ce travail est scientifique. Le Parlement ne peut pas ignorer la science. Vous ne pouvez pas aller au-delà de la science.
    Je pense qu'il n'est pas très logique d'essayer d'adopter une réforme globale des dispositions relatives à la conduite avec facultés affaiblies alors qu'il reste une très grande question à régler à ce sujet. Si vous voulez réformer la conduite avec facultés affaiblies dans son ensemble, vous devriez alors le faire de concert avec les scientifiques et d'un seul coup. Vous le feriez ainsi correctement la première fois et du mieux que vous le pouvez.
    Madame Vonn, pouvez-vous répondre à l'une de ces deux questions ou aux deux?
    Désolée, je n'ai rien à ajouter.
    Nous passons à M. Mendicino. Vous avez environ une minute et demie.
    Supposons, pour les besoins de la discussion, que les contrôles aléatoires pourraient violer l'article 8 ou 9, et passons à l'article 1. Pouvez-vous en dire plus long sur la raison pour laquelle vous affirmez que ce projet de loi ne satisferait pas le critère du lien rationnel, le critère de l'atteinte minimale ou le critère de proportionnalité? Je suis certain que nous convenons tous que c'est un objectif urgent et important pour que nos rues demeurent sécuritaires.
    Tout à fait. Vous avez raison: cela se passe à l'article 1, et l'article 8 concerne le caractère raisonnable.
    Pour avoir un lien rationnel, il faut déterminer si les contrôles aléatoires dissuaderont davantage les conducteurs aux facultés affaiblies.
    Puis-je vous interrompre un instant? Il y a des raisons de croire que c'est efficace dans une certaine mesure. Je pense que ceux qui contestent cette mesure législative devront présenter des éléments de preuve ayant plus de poids. Est-ce un point de vue raisonnable?
    Je pense qu'il manque de preuves. Nous avons des anecdotes provenant d'autres pays, mais j'ai donné des raisons qui expliquent pourquoi il n'est guère approprié de comparer leur situation à la situation actuelle du Canada. Selon des métaétudes qui ont été publiées, il ne semble pas y avoir de différence entre les contrôles aléatoires et les contrôles sélectifs, mais ces métaétudes subissent l'absence d'étude visant à comparer ces deux types de contrôle, comme le mentionne le professeur Solomon dans ses travaux. C'est le problème; c'est la difficulté concernant le lien rationnel.
    Bien.
    Je pense que votre exposé renfermait des allusions aux groupes qui, pour une raison ou une autre, ont souffert à cause de ces contrôles.
    Je vais être un peu bref parce que le temps presse.
    Monsieur O'Toole.
    Merci, monsieur le président.
    Merci à tous les témoins d'être ici.
    Je suis avocat, comme beaucoup d'entre vous. Il est paradoxal que nous ayons probablement tous étudié les travaux du professeur Hogg dans nos cours de droits constitutionnels, peu importe l'établissement. Je sais que Michael et moi étions à l'Université Dalhousie. Je crois que son examen du lien rationnel et du caractère raisonnable serait très convaincant.
    J'ai commencé à parler de ce projet de loi à la Chambre des communes. Aujourd'hui, je vais commencer par parler de Harrison Neville-Lake, de Milly Neville-Lake, de Daniel Neville-Lake et de leur grand-père, car notre société se sert du droit pénal pour se prononcer sur le caractère répréhensible de certains actes.
    Ma première question est pour vous, Michael. Vous avez dit que ce projet de loi serait inefficace pour appliquer les principes de la détermination de la peine énoncés à l'article 718 du Code criminel, n'est-ce pas?
(1610)
    Les mesures dissuasives, la réhabilitation, les mesures dissuasives précises et générales
    C'est toujours ici que les peines minimales obligatoires entrent en ligne de compte, et cela me rappelle le vieil adage des facultés de droit, audi alteram partem, ce qui signifie qu'il faut entendre l'autre partie.
    Il y a deux autres principes de détermination de la peine dont on ne parle souvent pas du tout, à savoir la dénonciation et la protection. Lorsque je parle avec mes concitoyens, car c'est ainsi que j'aide à élaborer la loi... Un crime parfaitement évitable comme dans l'affaire de la famille Neville-Lake est tellement grave sur le plan de la culpabilité morale que je pense que ces piliers des principes de la détermination de la peine devraient être examinés de façon beaucoup plus détaillée, car la société a créé ces lois en 1921 et les a modifiées presque tous les 10 ans compte tenu du dégoût de plus en plus prononcé à l'égard des décès attribuables à quelque chose de parfaitement évitable.
    Ce n'est pas un crime passionnel ou autre chose du genre. C'est parfaitement évitable. En 1969, le seuil de 80 milligrammes est devenu une caractéristique des contrôles. Ne convenez-vous pas qu'en raison du plus grand nombre de moyens de dissuasion, de dénonciation et de protection du public, il faudrait se pencher là-dessus, y compris sur les alcootests aléatoires?
    Je rejette votre principe de départ, selon lequel le projet de loi contribuerait à rendre évitables la conduite avec facultés affaiblies et les décès qui y sont liés, qui sont si tragiques. Je pense que l'abondance de preuves, les arguments entendus à la Cour suprême dans l'affaire Nur, que vous connaissez sûrement très bien, et les témoignages d'experts, que la Cour suprême et Anthony Doob ont corroborés, ainsi que de nombreuses autres études dont il est fait mention dans mon mémoire et beaucoup d'autres mémoires que vous avez en main réfutent la notion voulant que ce projet de loi aide à éviter ces cas tragiques dont vous parlez.
    Le projet de loi se traduira par de l'injustice. Des particuliers seront pris pour cible. Il se traduira...
    Je vais vous interrompre ici. Nous avons pris connaissance de préoccupations concernant le fichage et le ciblage, et le fait que des humains appliqueront ces mesures. En tenant compte de la façon dont les forces de l'ordre procèdent lorsqu'un contrôle routier s'impose dans le cadre du programme RIDE, dans le but d'éviter de cibler certains quartiers, ne pourrions-nous pas établir des principes directeurs grâce auxquels l'emplacement des contrôles serait presque déterminé aléatoirement à avance, afin d'éviter le ciblage de groupes?
    Ne pourrions-nous pas adopter une approche opérationnelle pour éviter une partie des préjudices dont vous parlez?
    Oui, je peux en parler brièvement. Dans mon mémoire, à la quatrième recommandation — et je pense que c'est une des questions où je reprends le point de vue de l'Association canadienne des libertés civiles —, je propose la sorte de compromis dont vous parlez, en affirmant que des contrôles aléatoires effectués dans le cadre d'un programme RIDE élimineraient certaines préoccupations.
    Cela dit, il pourrait encore y avoir des problèmes potentiels dans ces situations si la police manque de ressources et qu'il y a d'immenses retards et un nombre très élevé de détentions alors que tout le monde est contrôlé dans le cadre d'un programme RIDE.
    Je suis d'avis que vous vous soustrayez à votre responsabilité lorsque vous légiférez en disant que cela devrait être correct si tout se passe bien dans un monde idéal...
    Mais si je peux me permettre...
    ... alors que les éléments de preuve indiquent plutôt le contraire.
    Qu'arriverait-il si, par exemple, des règles relatives au passage de la loi sur la réalisation de contrôles aléatoires imposaient le respect d'une approche opérationnelle semblable à celle du programme RIDE? Est-ce que cela apaiserait certaines de vos préoccupations?
    C'est fort probable. Il faudrait que je voie les règles et que je les examine, mais je pense que c'est fort probable. Cependant, le projet de loi présente encore d'énormes problèmes au-delà du simple contrôle aléatoire, et je recommande à votre comité d'en faire un examen approfondi.
    Puis-je intervenir?
    Je ne sais pas comment vous pouvez réglementer des contrôles véritablement aléatoires de manière à en faire un pouvoir qui n'existe que dans le cadre du programme RIDE.
    Puis-je faire une proposition?
(1615)
    Nous avons essayé de le faire dans le contexte des contrôles de routine en Ontario. Je ne pense pas que ce soit possible.
    J'ai vu une des autos Google l'autre jour. Nous les voyons circuler. Je suis certain que ces autos vous posent également beaucoup de problèmes. J'ai demandé au conducteur — je les vois circuler, mais je n'en avais jamais vu une en arrêt — comment son itinéraire était choisi. Il est établi en Californie à l'aide d'un algorithme. Le conducteur ne parle à personne. Il cartographie des voies de circulation.
    Je pense que nous pourrions avoir recours à la technologie pour retirer de l'équation une éventuelle partialité humaine. Ne devrions-nous pas nous pencher là-dessus? J'ajoute encore une fois, au sujet de la dénonciation, que la population, sans aucun doute dans le Sud de l'Ontario, voulait que des peines plus sévères soient imposées, et peu importe l'approche, nous ne pensons pas avoir un effet dissuasif. La dénonciation du comportement n'est-elle pas également importante?
    Je vais juste ajouter très brièvement que les contrôles véritablement aléatoires dont vous parlez ne feraient pas grand-chose pour contribuer à l'atteinte d'un des objectifs qui sous-tendent ce genre de contrôles, à savoir la détection efficace de conducteurs qui pourraient dépasser la limite, mais qui n'en montre pourtant aucun signe. Une aiguille dans une botte de foin.
    Nous allons le lire dans un livre. Merci.

[Français]

    Nous continuons avec M. Dubé.
    Merci, monsieur le président.
    Madame Deshman, j'aimerais que vous parliez un peu plus d'un élément que vous avez mentionné et que je trouve important. Vous avez dit qu'on avait adopté des lois semblables dans d'autres endroits où il y avait des campagnes médiatiques et d'éducation.
    À notre avis, une des grosses lacunes du projet de loi est qu'on fait très peu de choses pour que les gens s'abstiennent de monter dans leur voiture. On a beau imposer des pénalités après l'acte, il reste que notre objectif devrait être de faire en sorte que la personne ne songe même pas à monter dans la voiture après avoir consommé trop d'alcool.
    J'aimerais vous entendre parler de la façon dont cela a fonctionné. De quelle façon pourrait-on incorporer ces suggestions et ces méthodes pour mieux corriger la situation?

[Traduction]

    Je peux passer en revue d'autres mesures que d'autres pays ont adoptées lorsqu'ils sont passés des contrôles sélectifs aux contrôles aléatoires. La Nouvelle-Zélande, par exemple, lorsqu'elle a instauré les alcootests aléatoires en 1993, a augmenté le nombre de contrôles effectués au point d'en faire 1,5 million en un an dans un pays ayant 2,3 millions de véhicules immatriculés. C'est un nombre considérable d'alcootests. Cette année-là, 7 conducteurs sur 10 ont été interceptés.
    L'augmentation du nombre de contrôles enverrait un message de dénonciation extrêmement clair. L'effet dissuasif serait extrêmement puissant, qu'il s'agisse d'alcootests sélectifs ou aléatoires. Imaginez le puissant symbole que cela représenterait d'un bout à l'autre du pays.
    De façon similaire, l'Irlande a considérablement augmenté le nombre de contrôles et mené d'importantes campagnes publicitaires. La Nouvelle-Zélande a assoupli les exigences réglementaires relatives à l'alcool. Les Australiens ont dit qu'au strict minimum, un conducteur sur trois doit être intercepté chaque année, et idéalement un sur deux.
    Toutes ces mesures, qui ont eu d'énormes répercussions dans d'autres pays, sont à notre portée, dans le cadre réglementaire existant. Elles donneraient certains des résultats qui, comme moi, vous tiennent beaucoup à coeur en matière de dénonciation.

[Français]

    Merci.
    Mon autre question concerne les peines minimales. Vous pouvez tous y répondre.
    Vous me corrigerez si j'ai tort, mais selon moi, une personne qui évalue les conséquences du geste de prendre le volant après avoir consommé de l'alcool ne se préoccupe pas vraiment de la gravité de la pénalité, mais plutôt des chances de se faire attraper par un agent de police et de la rapidité avec laquelle la peine sera prononcée. Est-ce exact?
    Pourrait-on rectifier ce qui est devant nous, dans ce projet de loi? J'aimerais tous entendre votre opinion sur cette question.

[Traduction]

    Oui, les faits soutiennent sans aucun doute ce que vous affirmez. Lorsqu'une personne commet un crime, elle ne pense pas nécessairement à la peine minimale obligatoire ou aux conséquences probables, et c'est peut-être d'autant plus vrai dans le contexte de la conduite avec facultés affaiblies.
    Selon les experts, ce n'est pas nécessairement la peine qui a un effet dissuasif. C'est la criminalisation du comportement, et la probabilité de se faire prendre. Ce projet de loi ne donne également rien pour ce qui est de divers aspects de cette analyse.
(1620)
    Je suis d'accord. L'effet dissuasif repose sur la probabilité de se faire prendre et la rapidité avec laquelle la peine est imposée. C'est ce que laisse entendre la documentation. L'augmentation du nombre de contrôles rendrait les deux possibles, surtout si les peines sont imposées rapidement à l'échelle provinciale en suspendant les permis de conduire, plutôt que de recourir à un long processus pénal. Ces peines pourraient être tout aussi efficaces en ayant un effet dissuasif sur beaucoup de monde.

[Français]

    Madame Vonn, avez-vous quelque chose à ajouter à cet égard?

[Traduction]

    Je ne suis aucunement experte dans ce genre de travaux de recherche, mais ce que j'ai vu indique clairement que l'application de la loi est l'élément essentiel. Nous sommes conscients que cette solution au problème nécessite beaucoup de ressources, mais elle semble omniprésente dans tous les pays qui ont grandement amélioré leur sécurité routière.
    Il y a plusieurs avocats dans la salle. Je n'en suis pas un, et je vous demande donc de faire preuve de patience, car j'ai une autre question.
    D'après ce que je comprends de ces situations, le pouvoir discrétionnaire du juge a toujours été important, et les peines minimales obligatoires nuisent à ce pouvoir. J'ai lu que le projet de loi inquiète certaines personnes. Lorsque des peines minimales sont imposées malgré le fait que la société affiche de plus en plus de mépris à l'égard de la conduite avec facultés affaiblies, comme l'a correctement indiqué M. O'Toole, il est possible que forcer la main d'un juge ait l'effet contraire, et que certaines personnes puissent s'en sortir sans conséquence parce que le juge croit qu'elles ne méritent pas la peine minimale obligatoire. Est-ce une conséquence possible de ce que nous avons sous les yeux?
    C'est une conséquence d'une contestation constitutionnelle inévitable et réussie. C'est aussi une conséquence de nombreuses autres dispositions, y compris les raccourcis en matière de preuve, l'affaiblissement d'exigences comme celle se rapportant aux « meilleurs délais », lorsque l'agent de la paix a des motifs raisonnables de croire que le véhicule à moteur a servi il y a un certain temps, et les dispositions relatives à la relecture. Tous ces raccourcis vont également contribuer à ce que les tribunaux n'imposent pas de peine à des gens qui pourraient vraiment être coupables, et qui auraient subi des conséquences en vertu de la législation existante.
    Ma dernière question porte sur les ressources policières dont il a été question. Quelle est l'incidence de ce volet sur le projet de loi dont nous sommes saisis? Ce que je veux dire, c'est que nous entendons parfois dire qu'il y a un problème de ressources à certains endroits. Est-ce que le projet de loi intensifie certains des problèmes que vous avez tous soulignés?
    Je pense que toutes les études que j'ai lues indiquent que les forces de l'ordre sont essentielles. Je ne suis pas spécialiste de la question, mais il existe des analyses de coûts intéressantes qui tentent d'évaluer les avantages en comparant les coûts liés aux soins de santé et l'argent alloué à l'application de la loi, mais vous devrez en parler à d'autres témoins.
    Excellent.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Monsieur Erskine-Smith.
    Merci beaucoup.
     Je suis d'accord avec la majeure partie de ce que vous avez dit aujourd'hui, mais je vais tenter de me faire l'avocat du diable.
    Si j'ai bien compris, la défense du dernier verre et la défense du verre d’après sont extrêmement rares. Nous avons accueilli des représentants du ministère de la Justice, et ils ont dit, je crois, qu'ils acceptaient ces défenses. Pourtant, lorsqu'ils étaient ici, ils ont affirmé que les tribunaux avaient qualifié ces défenses et ce comportement d'irresponsables. Qui prendrait un verre et invoquerait une telle défense à la suite d'une accusation de conduite avec facultés affaiblies?
    Y a-t-il moyen de modifier la loi et d'abroger ces défenses, ou bien d'en limiter sensiblement la portée pour que les dispositions soient constitutionnelles?
    Je pense qu'il y aurait moyen de le faire à l'aide de modifications portant particulièrement sur cet aspect. Le problème, comme vous l'avez dit, c'est que si une personne consomme une grande quantité d'alcool puis prend sa voiture, cette personne continue d'absorber l'alcool. Lorsqu'elle est interceptée, elle n'en a pas encore absorbé suffisamment pour dépasser la limite permise, mais si le policier l'avait arrêtée une dizaine de minutes plus tard, elle aurait dépassé la limite.
    Il ne fait aucun doute qu'il s'agit d'un comportement hautement répréhensible sur le plan moral, et il y a certainement des modifications ciblées qui permettraient à un tribunal de tenir compte de la vitesse d'absorption. À l'aide d'une preuve d’expert adéquate, il serait possible de déterminer si la personne a dépassé la limite pendant qu'elle conduisait, ou si elle a été arrêtée en conduisant... Des modifications de cette nature et de cette portée limitée pourraient donc corriger le problème.
    Malheureusement, le projet de loi abroge ce problème de défenses du dernier verre et du verre d'après la conduite, alors qu'elles sont pourtant rarement invoquées. J'ai consulté de nombreuses personnes qui travaillent souvent dans ce domaine, et je sais que ces défenses sont rares. Or, en abrogeant ces défenses rares, le projet de loi criminalise et criminalisera en fait des gens qui ont conduit sans alcool dans le sang...
(1625)
    Et qui ont pris un verre ensuite.
    ... et qui ont pris un verre par la suite. Ou encore, le projet de loi criminalisera des gens qui n'avaient pas d'alcool dans le sang, ou qui en avaient un peu, mais loin de la limite permise, puis qui ont pris un verre après. Ces gens sont incapables de renverser les exceptions, y compris en retenant les services d'un toxicologue pour relire leurs résultats. Non seulement le projet de loi crée des situations injustes où une conduite tout à fait sobre est criminalisée, mais en plus, il pénalise les personnes qui n'ont pas les moyens de réunir le genre de preuve nécessaire pour renverser ces exceptions très répressives.
    J'aimerais maintenant parler de l'alcootest aléatoire.
     Madame Deshman, j'ai aimé votre argumentation. Il existe un certain nombre d'études et des preuves contradictoires, de sorte que si nous invoquions l'article 1, il n'y aurait peut-être pas suffisamment de justification concernant la preuve.
    Pour faire suite aux propos de M. O'Toole, si nous nous limitions à des vérifications aléatoires dans le cadre du programme de sobriété au volant RIDE, pensez-vous que ce serait conforme à la Constitution?
     Je pense que l'étendue du pouvoir que vous examinez serait fort différente.
     Si vous n'employez que l'alcootest aléatoire, je pense qu'on peut encore se demander sérieusement si cela aurait une incidence réelle sans toutes les autres mesures à l'étude.
    Se limiter aux vérifications dans le cadre du programme RIDE est une chose que nous recommandons comme solution de rechange.
    Je souhaiterais aussi que ces vérifications soient aléatoires. S'il est impossible de soumettre à l'alcootest chaque conducteur qui passe par le barrage, assurez-vous de vérifier un chauffeur sur cinq...
    Je vois.
    ... ou sur six, pour vraiment éliminer les nombreuses préoccupations en matière de profilage que nous avons soulevées dans notre projet de loi. Il s'agirait d'une proposition fort différente, et je pense que mon analyse est peut-être bien différente aussi.
    Madame Vonn, votre analyse est-elle différente, ou êtes-vous largement d'accord avec Mme Deshman?
    Non. Je suis d'accord dans une large mesure. Nous sommes arrivées à la même conclusion.
     En tant que représentant d'une circonscription de Toronto, le profilage racial me préoccupe beaucoup. J'ai communiqué avec M. Hogg cet été, et j'ai lu son mémoire à l'intention de Mothers Against Drunk Driving, ou MADD. Nous avons d'ailleurs parlé de l'affaire Orbanski.
    Dans cette affaire, il est apparu qu'un des accusés a été intercepté au hasard, puis soumis à l'alcootest, après quoi des accusations ont été portées contre lui.
    La police n'a-t-elle pas actuellement le pouvoir d'intercepter des gens au hasard pour les soumettre à l'alcootest? Quel est l'autre problème relatif à l'alcootest aléatoire?
    La police a bel et bien le pouvoir d'intercepter des gens pour vérifier leur permis de conduire, leur enregistrement et leur sobriété, mais l'alcootest n'est pas aléatoire dans cette affaire parce qu'il doit y avoir un soupçon raisonnable, ce qui est un autre problème relatif au projet de loi. Certains des soupçons raisonnables et des présomptions prévus au projet de loi font partie de la jurisprudence reconnue. Si l'haleine d'une personne sent l'alcool, il s'agit d'un soupçon raisonnable. Il y a beaucoup d'autres exemples dans le projet de loi où la norme du soupçon raisonnable est assouplie et même supprimée. dans le cas de l'article sur le contrôle aléatoire.
    Dans votre exemple, ce n'est pas vraiment aléatoire si l'alcootest est administré à la suite d'une myriade de faits désagréablement perceptibles menant à cette décision.
    Lors de mon entretien avec M. Hogg, le profilage était ma principale préoccupation. Il semblait pourtant qu'au moins un des accusés de l'arrêt Orbanski avait initialement été arrêté au hasard. Cette affaire semblait être la réponse aux inquiétudes en matière de profilage, mais ce n'est pas le cas. Je ne vous demande pas de répondre aujourd'hui, mais je vous serais reconnaissant de bien vouloir examiner l'affaire et me soumettre votre avis par écrit.
    Je vais le faire.
    En ce qui concerne l'affaire R. c. Mohan et les exemptions relatives aux critères établis dans l'arrêt, des représentants du ministère de la Justice sont venus nous dire qu'il y a eu une augmentation considérable du temps passé en cour à la suite d'un récent arrêt de la Cour suprême. Je pense qu'il y a eu une vague de demandes concernant les procédures que la police a employée au moment de l'interception, alors que cette exemption tente justement d'alléger le fardeau des tribunaux.
    Est-ce que c'est conforme à votre expérience? Pensez-vous que la mesure soit proportionnelle au problème que nous essayons de résoudre?
    Le fardeau accru des tribunaux est largement attribuable à la législation d'un gouvernement précédent qui a fait l'objet d'une interprétation considérablement atténuée dans certaines affaires judiciaires.
    Il arrive que des lois visant à alléger le fardeau des tribunaux entraînent non seulement une injustice, mais aussi une augmentation de la charge des tribunaux, ce qui est particulièrement problématique.
    La Cour suprême sera saisie de la question du témoignage d'experts, de sorte que nous aurons peut-être la réponse, et il se pourrait bien que mon analyse soit réfutée très vite. Mais il peut être risqué de renoncer sur le plan judiciaire à cette fonction de gardien, surtout quand le témoignage des experts en question entraîne de nombreuses condamnations injustifiées — il se peut que la preuve soit soumise à un jury, qu'elle soit très convaincante, ou qu'on y accorde trop d'importance. Bien sûr, la réglementation ne nous permet pas de vérifier la compétence des experts, et elle confie la tâche à une entité qui échappe complètement à la surveillance des tribunaux.
    Il s'agit donc d'une renonciation expresse à la fonction de gardien judiciaire qui a été si essentielle et dont la nécessité a été confirmée à maintes reprises par nos cours d'appel.
(1630)
    Je vous remercie de votre temps.
    Il est 16 h 30, et la première heure vient de prendre fin. Puisque nous avons commencé avec cinq minutes de retard, je propose de diviser la différence entre les deux groupes d'experts, et d'accorder trois minutes à M. Miller pour conclure la première partie. Nous aurons ensuite 55 minutes pour le prochain groupe d'experts.
    Monsieur Miller.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je ne sais pas trop par où commencer, mais je remercie infiniment tous les témoins d'être ici.
    Nous souhaitons tous mettre un terme aux tragédies causées par la conduite avec facultés affaiblies, mais le projet de loi me pose problème pour toutes les raisons que vous avez mentionnées aujourd'hui.
    Avec le peu de temps dont je dispose, permettez-moi de dire qu'un membre d'une réserve autochtone de mon territoire a déjà communiqué avec moi par crainte qu'un policier ayant du mépris puisse cibler un membre de la réserve ou ce genre de chose, et je pense que vous avez soulevé ce point.
    Monsieur Spratt, pourriez-vous expliquer brièvement la signification d'une déclaration forcée? Je ne suis pas un avocat, et je ne connais pas cette expression.
    Deuxièmement, j'aimerais si possible que les deux dames ici présentes nous parlent des facultés affaiblies par l'alcool, la drogue, les médicaments d'ordonnance, les messages textes, ou par quoi que ce soit d'autre. Même envoyer un message texte altère la capacité de conduire. Le fait de traiter différemment une forme de déficience par rapport aux autres est-il une question d'ordre juridique?
    Je vais m'arrêter ici.
     Très brièvement, en ce qui a trait à la recevabilité des déclarations faites expressément sous la contrainte — c'est à la page 30 de mon mémoire — voici la réalité juridique fondamentale: dans certains cas, une personne est obligée de fournir des renseignements à la police. En Ontario, en vertu du Code de la route, une personne impliquée dans un accident est tenue de fournir un rapport de police. Elle doit donner des détails sur l'accident et remettre ces informations à la police.
    Fondamentalement, l'État enfreint l'article 7 de la Charte s'il utilise par la suite les informations soutirées par la force légale pour intenter des poursuites. Nos tribunaux sont même allés plus loin. Dans l'affaire R. c. White, la Cour suprême est allée plus loin, et la Cour d'appel de l'Ontario aussi; elles estiment que personne ne peut utiliser une telle déclaration forcée, qui a été donnée sous peine d'incarcération pour non-conformité, pas même l'agent qui cherche à réunir des motifs pour porter des accusations. Il est donc vraiment important de garder l'État hors de ce genre de chose.
     Est-ce que Mme Vonn ou Mme Deshman souhaitent commenter la deuxième partie de la question?
    Certainement. Nous voulons bien sûr que les choses soient équitables. La conduite avec facultés affaiblies par la drogue et par l'alcool doivent être traitées équitablement.
    Le problème, c'est que la science et notre compréhension des facultés affaiblies par l'alcool sont beaucoup plus avancées que dans le cas des facultés affaiblies par la drogue. Voilà l'injustice au cœur du problème scientifique. Comme Mme Deshman l'a dit, nous ne pouvons ni devancer la science ni la faire avancer par la force de notre volonté. Nous n'avons pas ces connaissances scientifiques, et c'est la simple réalité.
    Je comprends.
    Madame Deshman?
    Je n'ai rien à ajouter.
    Je vais poser deux petites questions.
    Premièrement, plusieurs personnes ont fait référence à l'avis de M. Hogg. J'ai une copie d'un avis écrit de 2010 qui ne porte ni sur ces mesures législatives ni même sur les précédentes. Quelqu'un a-t-il une opinion écrite que je n'ai pas?
    Une voix: Non.
    Le président: Bien. Je voulais en avoir le coeur net.
    Deuxièmement, vous avez parlé de modifications par rapport à la déclaration originale, et vous dites que nous avons besoin de nouvelles mesures législatives qui seraient soumises à une procédure rigoureuse. En revanche, vous avez terminé en parlant de modifications. J'aimerais savoir ce que vous préféreriez.
    Nous sommes d'avis qu'il faut recommencer à zéro...
    Pour ainsi dire...
     ... mais j'ai inclus des suggestions de modifications qui pourraient légèrement atténuer nos grandes préoccupations.
    Merci beaucoup. C'était un témoignage merveilleux.
     Je vous remercie d'avoir été avec nous aujourd'hui.
    Nous allons maintenant prendre une minute pour passer au prochain groupe de témoins, puis nous allons poursuivre.
(1630)

(1635)
    Nous sommes maintenant à la deuxième partie de notre séance.
    Nous accueillons chaleureusement M. Therrien, commissaire à la protection de la vie privée du Canada. C'est un grand plaisir de vous recevoir, ainsi que Mme Kosseim, M. Brown et Mme Ouimet.

[Français]

    Je vous remercie de votre présence aujourd'hui.

[Traduction]

    Je propose que nous commencions par M. Therrien.
    Nous vous accordons 10 minutes pour votre déclaration liminaire, puis nous verrons où nous en sommes.

[Français]

    Mesdames et messieurs les députés, je vous remercie de m'avoir invité à comparaître devant vous aujourd'hui pour discuter du projet de loi C-226.
    Comme vous l'indiquiez, monsieur le président, je suis accompagné de Mme Patricia Kosseim, avocate générale principale au Commissariat.
    Je tiens d'emblée à préciser que je comprends évidemment la gravité, l'incidence sociale et les dangers évidents de la conduite avec facultés affaiblies. La conduite avec facultés affaiblies touche beaucoup trop de Canadiens chaque année et est effectivement un important problème social.
    Le projet de loi à l'égard duquel vous avez demandé des commentaires comporte de multiples volets. Je m'attarderai principalement à la question des contrôles aléatoires.
    Mes observations d'aujourd'hui visent à offrir un cadre fondé sur la jurisprudence relative à la Charte, mais non pas dans le but de prédire le destin constitutionnel du projet de loi. Il y a des avocats de droit criminel et constitutionnel qui peuvent vous aviser à ce sujet. Mon but est simplement de cerner les questions pertinentes du point de vue de la politique de protection des renseignements personnels.
    En maintenant les arrêts des véhicules au hasard aux fins d'interrogatoire policier pour vérifier la sobriété du conducteur, la Cour suprême du Canada a pris en considération plusieurs facteurs, y compris les suivants: d'une part, l'objectif impérieux de l'État d'assurer la sécurité routière; d'autre part, les fins limitées liées à cet objectif et qui s'appuient sur des pouvoirs appropriés conférés par la loi; ensuite, le caractère intrusif, l'efficacité et la proportionnalité de l'activité policière; et, enfin, les attentes raisonnables de la personne, selon le contexte.
    Pour les besoins d'analyse du projet de loi qui est devant vous, parmi les facteurs que je viens d'énumérer, l'objectif de l'État d'assurer la sécurité routière demeure évidemment un objectif impérieux. Toutefois, permettez-moi maintenant d'aborder certains autres facteurs qui seraient pertinents à votre examen des contrôles aléatoires de l'alcoolémie et de la communication des résultats des différents tests à d'autres fins.
    Comme vous le savez, le paragraphe 320.27(3) du Code criminel proposé par le projet de loi prévoit un nouveau pouvoir permettant à un policier d'ordonner à la personne qui conduit un moyen de transport, que celui-ci soit en mouvement ou non, de fournir immédiatement un échantillon d'haleine sur demande, aux fins de prélèvement aléatoire au moyen d'un appareil de détection approuvé, lorsque le policier a ce dernier en sa possession.
    À l'heure actuelle, ce genre d'alcootest ne peut être administré que lorsque le policier a des motifs raisonnables de soupçonner qu'une personne a consommé de l'alcool.
(1640)

[Traduction]

    Pour déterminer s'il est raisonnable de s'éloigner de la norme du soupçon, je suggère que le Parlement tienne compte des facteurs suivants.
    Premièrement, dans quelle mesure un nouveau pouvoir de l'État obligeant tout le monde à fournir un échantillon d'haleine sur demande serait-il intrusif? Même si des méthodes plus intrusives sont certainement possibles, par exemple la prise d'échantillons de sang, je suis d'avis que la procédure obligatoire suggérée a un caractère intrusif, notamment dans le cas des personnes qui ne sont pas soupçonnées d'avoir commis un acte répréhensible.
    Deuxièmement, à quel point est-il nécessaire de passer de la norme du soupçon aux prélèvements aléatoires pour réduire le nombre de cas de conduite avec facultés affaiblies? Dans quelle mesure l'actuel système s'est-il révélé efficace ou inefficace? Qu'est-ce qui le prouve?
    Troisièmement, qu'est-ce que l'expérience d'autres pays montre, du point de vue de la preuve, quant à la mesure dans laquelle le système proposé dans le projet de loi C-226 serait plus efficace?
    Je ne dispose pas des preuves nécessaires pour répondre à ces questions, mais je crois que ce sont des questions pertinentes à poser à ceux qui sont les parrains de ce projet de loi.
    De plus, je manquerais à mes obligations si je ne rappelais pas aux membres les risques en matière de protection des renseignements personnels qui sont inhérents lorsque la collecte d'informations est excessive et pourrait ouvrir la porte à un ciblage disproportionné. J'ajouterais que, si vous êtes prêts à approuver l'alcootest aléatoire, je vous encourage à prévoir des conditions pour éviter les décisions arbitraires, pour organiser en quelque sorte la vérification aléatoire de sorte que ce ne soit pas entièrement à la discrétion des agents de la paix.
    L'autre question importante liée à la protection des renseignements personnels que j'aimerais soulever est l'élargissement des fins pour lesquelles les résultats des tests et des analyses de substances corporelles peuvent être partagés.
    Le paragraphe 320.37(2) permet la communication des résultats des évaluations, des épreuves de coordination des mouvements, ainsi que des analyses de substances corporelles en vue de l’exécution ou du contrôle d’application de toute loi fédérale ou provinciale. À l’heure actuelle, l’utilisation et la communication de ce genre de renseignements ne sont permises que relativement à des infractions précises du Code criminel, de la Loi sur l’aéronautique ou de la Loi sur la sécurité ferroviaire, ou à l’exécution ou au contrôle d’application d’une loi provinciale. Le projet de loi élargit clairement les utilisations et fins possibles de tels résultats pouvant être invoquées par les autorités.
    Bien que j’aie commencé ma déclaration en admettant que le fait d’assurer la sécurité routière soit un objectif impérieux de l’État, on ne saurait dire la même chose des objectifs d’ordre administratif de toute autre loi fédérale ou provinciale. En ce qui concerne cette communication élargie, je suggère que vous déterminiez si les objectifs de ces autres lois aux fins desquels des résultats peuvent être communiqués sont suffisamment importants pour justifier la communication de renseignements personnels de nature délicate obtenus sous la contrainte de l’État. Je suggère en outre que la communication soit limitée aux lois précises qui respectent cette norme.
    Une autre façon de réduire au minimum les risques en matière de protection des renseignements personnels serait de prescrire que les résultats des tests aléatoires soient détruits une fois qu'ils ont rempli leur fonction.
    En résumé, j’encourage les membres à utiliser le cadre analytique proposé pour évaluer les répercussions plus vastes en matière de protection des renseignements personnels associées aux prélèvements aléatoires d’échantillons d’haleine et à l’élargissement des fins pour lesquelles des résultats peuvent être communiqués.
    Je vous remercie de m’avoir invité à présenter mes commentaires au Comité, et je me ferai un plaisir de répondre à vos questions.
(1645)
    Merci.

[Français]

    Merci beaucoup.

[Traduction]

    Vous avez le choix. Voulez-vous y aller en premier?
    Monsieur Brown.
    Je suis le docteur Thomas Brown. Je suis le chercheur principal et le directeur du programme de recherche sur la toxicomanie de l'Institut universitaire en santé mentale Douglas de Montréal. Je suis également professeur adjoint au Département de psychiatrie de l'Université McGill et psychologue clinicien agréé dans la province de Québec. Je suis aussi le spécialiste en santé mentale désigné par le Consulat des États-Unis au Canada pour évaluer les demandeurs de visa qui ne sont pas citoyens américains et qui sont soupçonnés de souffrir de troubles liés à l’utilisation de substances s'étant manifestés par un comportement préjudiciable — la plupart du temps, il s'agit de conduite avec facultés affaiblies. Mon avis en qualité de spécialiste est sollicité dans le cadre du programme américain de dispense de visa, et je l'ai donné à des centaines de reprises. Je suis honoré de pouvoir participer à cette séance.
    Monsieur le président, j'aimerais vous donner mon opinion au sujet de deux enjeux concernant les amendements qui sont proposés au projet de loi C-226. Le premier enjeu est d'ordre général et il a trait au bien-fondé d'augmenter la sévérité des peines consécutives à une condamnation. La sévérité des peines consécutives à une condamnation envoie un message important et peut en elle-même dissuader certaines personnes d'avoir un comportement criminel. Au même moment, d'après ce que je peux comprendre des preuves disponibles, les effets dissuasifs de la sévérité des peines ne se concrétisent que lorsqu'ils s'accompagnent de rigueur et de célérité dans l'application des lois pertinentes. Ce phénomène s'observe aussi dans d'autres contextes judiciaires.
    D'un point de vue clinique, je suis à même de constater que, dans bien des cas, les peines font mal et qu'elles ont un effet dissuasif sur maints délinquants. Toutefois, elles sont souvent perçues comme étant non justifiées et vexatoires par de nombreux autres délinquants considérés, selon moi et d'autres autorités, comme étant les plus à risque de récidiver, c'est-à-dire par ceux dont nous devrions nous inquiéter le plus.
    L'un des aspects de cette réaction est le fait que ces chauffeurs ont probablement conduit de nombreuses fois — certaines évaluations parlent de centaines de fois — sans se faire arrêter ou sans avoir de problème. Cette expérience personnelle alimente un raisonnement puissant qui vient fausser l'évaluation des risques lorsqu'il s'agit de prendre le volant, surtout après une consommation d'alcool excessive. Souvent, la personne se dira « je suis capable », « je l'ai déjà fait maintes et maintes fois », « je suis seulement à quatre rues de chez moi », etc. Ces marottes dont la force est décuplée par l'effet de l'alcool arrivent très efficacement à concurrencer l'effet dissuasif de la possibilité lointaine de se faire arrêter ou de subir d'autres conséquences négatives graves, y compris la possibilité de se blesser.
    Nos recherches et celles d'autres chercheurs vont toutes dans le sens de ces observations cliniques. Il faut plus que cela pour changer ce raisonnement chez les délinquants. C'est pourquoi les dispositions qui permettent et améliorent le recours à des mesures d'application de la loi d'une grande visibilité — notamment, la multiplication des contrôles routiers et le recours à des alcootests aléatoires — feront beaucoup pour appuyer le caractère dissuasif des peines sévères tant pour la prévention primaire que pour la prévention de la récidive.
    Le deuxième enjeu dont je veux parler, monsieur le président, concerne les dispositions sur l'utilisation du taux d'alcoolémie comme facteur aggravant aux fins de détermination de la peine. L'interprétation du taux d'alcoolémie dans la conduite avec facultés affaiblies est étonnamment controversée. La consommation excessive d'alcool est une condition préalable essentielle à la conduite avec facultés affaiblies, mais le taux d'alcoolémie susceptible de cautionner une accusation est très arbitraire. Le taux d'alcoolémie est une mesure convenue pour évaluer le risque d'accident, lequel augmente de façon exponentielle avec l'augmentation du taux d'alcoolémie. L'augmentation du risque de blessures pour quelque cause que ce soit commence toutefois à un taux d'alcoolémie beaucoup plus bas, à 0,02 en fait. Lorsque le taux atteint 0,05 ou 0,08, le risque est déjà plusieurs fois plus grand que lorsque le taux était à zéro. Par conséquent, le taux d'alcoolémie est une façon efficace et pratique de mesurer la dégradation des facultés et les risques d'accident.
    Par ailleurs, la littérature scientifique dont nous disposons indique que le taux d'alcoolémie au moment de l'arrestation ne s'est pas avéré particulièrement fiable pour prédire le risque de récidive. Par conséquent, je me demande ce que ce taux vient faire dans une stratégie de dissuasion, notamment si on compte l'utiliser pour justifier l'application de peines plus sévères. Que cherche à accomplir cette disposition? La plupart des gens qui conduisent avec des facultés affaiblies ne cherchent pas à enfreindre la loi ou à blesser autrui, mais ils doivent quand même assumer la responsabilité de leur négligence criminelle.
(1650)
    Nous avons fixé notre seuil « criminel » à 0,08 %, et la loi est la loi. Nous avons choisi cette limite pour de nombreuses raisons, mais en ce qui concerne le degré de risque et la mesure dans laquelle l’alcool affecte le jugement, 0,08 %, c'est déjà beaucoup. Pour la majorité des Canadiens, cela correspond à une consommation d’alcool excessive. Selon moi, cet amendement semble dire que le fait d’être arrêté avec un taux d’alcoolémie de 0,08 % est grave, mais que de l’être avec un taux de 0,12 % est pire, même s’il n’y a eu aucun accident dans les deux cas.
    Nous avons fixé une limite raisonnable — certains la décriront comme excessivement indulgente — pour la conduite avec facultés affaiblies. Pourquoi voudrions-nous réduire ou brouiller l’importance de la valeur repère actuelle en ajoutant une valeur repère plus élevée?
    Un autre aspect de cette question concerne l’utilité d’une arrestation liée au taux d’alcoolémie. Comme je l’ai fait remarquer, une arrestation n’est pas une façon particulièrement fiable de prévoir la récidive. Du reste, je n’ai jamais entendu un conducteur aux facultés affaiblies me dire que le fait de dépasser 0,08 % n’était pas assez et qu’il était motivé à conduire avec un taux d’alcoolémie encore plus élevé.
    En fait, ce qui se produit habituellement, c’est qu’ils boivent trop, souvent au point de dépasser la limite, mais en ayant toujours accès à un véhicule et l’intention de conduire. La mesure dans laquelle ils dépassent la limite est fonction de facteurs autres qu’une négligence accrue de leur part ou qu’un plus grand mépris de la sécurité des autres. À vrai dire, la plupart des personnes ne boivent pas à ce point ou en sont tout simplement incapables.
    Il n’est pas rare que les gens qui conduisent avec des facultés affaiblies affirment qu’elles se sentaient en mesure de conduire juste avant d’être arrêtées, ce qui nous porte, moi et d’autres chercheurs, à formuler l’hypothèse qu’il s’agit là du signal d’une consommation mal contrôlée. De plus, les taux d’alcoolémie élevés indiquent une capacité à consommer de grandes quantités d’alcool, et donc, une possibilité de tolérance à l’alcool, qui est aussi symptomatique d’une consommation problématique. En d’autres mots, la capacité d’évaluer le degré d’ébriété — ce qui est déjà difficile pour la plupart des gens — semble souvent encore moins efficace chez les conducteurs dont les facultés sont affaiblies, et ils ont une plus grande propension à avoir un problème d'alcool.
    Dans cette optique, une arrestation liée au taux d’alcoolémie est vraisemblablement un indicateur plus efficace des habitudes de consommation problématiques et d’une consommation proprement dite que le risque associé à la conduite avec facultés affaiblies. D’un point de vue clinique, tous les deux se caractérisent par un manque de contrôle sur la consommation.
    Le fait d’alourdir les peines lorsque le taux d’alcoolémie est élevé risque de punir les personnes qui ont la plus grande propension à avoir un problème qui, dans bien des cas, atteindrait le niveau d’une consommation problématique. Or, dans ce cas, le châtiment est une mesure de dissuasion ou de prévention inappropriée.
    Dans de nombreux États, l’arrestation liée au taux d’alcoolémie est utilisée au moment de la remise du permis pour éclairer les décisions en matière de remédiation ou de thérapie. Selon moi, il s’agit là d’une façon mieux appropriée de réagir à une consommation problématique révélée par un taux d’alcoolémie élevé, car elle s’inscrit dans une stratégie de santé publique plutôt que dans une stratégie d'ordre juridique axée sur la dissuasion ou le châtiment.
    Merci.
    Merci beaucoup.
    Madame Ouimet.

[Français]

    Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, je vous remercie de m'avoir invitée.
    Je suis professeure et chercheuse à la Faculté de médecine et des sciences de la santé de l'Université de Sherbrooke. Mes sujets principaux de recherche sont la conduite avec capacités affaiblies et les jeunes conducteurs.
    En fait, moi aussi, j'aimerais vous proposer des suggestions de clarification du nouveau paragraphe 320.27(3), qui porte sur le contrôle aléatoire et sa définition. J'aimerais suggérer que le libellé de cette proposition soit clarifié. Peut-on parler ici de contrôles aléatoires, de contrôles obligatoires lors d'actions policières précises orchestrées pour réduire la conduite avec les capacités affaiblies, ou de contrôles obligatoires en tout temps et en toutes circonstances lors de la conduite d'un véhicule? Il existe des différences importantes entre ces trois définitions.
    D'abord, lorsqu'on parle de quelque chose d'aléatoire, on va souvent dire que cela est fait ou choisi au hasard. Donc, une séquence de contrôles aléatoires devrait être générée, par exemple, à l'aide d'une séquence de nombres aléatoires. Cette séquence indiquerait quels véhicules devraient être arrêtés afin de soumettre le conducteur à un test d'alcoolémie, ou quel conducteur arrêté pour diverses raisons par les policiers devrait fournir un échantillon d'haleine. Ces techniques aléatoires sont déjà utilisées par les douaniers, qui peuvent demander aux voyageurs d'appuyer sur le bouton d'un appareil, ce qui va indiquer si la personne devra faire l'objet d'une fouille plus complète.
    Le mot « obligatoire » sera défini par « ce qui est exigé par la loi, ce à quoi l'on ne peut se soustraire ». Le mot « aléatoire » n'est donc pas un synonyme du mot « obligatoire », qu'il soit considéré lors d'actions policières précises ou en tout temps et en toutes circonstances lors de la conduite d'un véhicule. Toutefois, les mots « aléatoire » et « obligatoire » pourraient être utilisés pour décrire deux types d'activités compatibles, que je pourrai décrire plus tard.
    La définition qui est retrouvée sous « contrôle aléatoire », au paragraphe 320.27(3), ressemble donc plutôt à la description du contrôle obligatoire, en tout temps et en toutes circonstances, lors de la conduite d'un véhicule. Cela ne suggère en rien la notion d'aléatoire ni celle de motifs raisonnables. Cela suggère même plutôt l'obsolescence des motifs raisonnables, puisque le contrôle obligatoire en tout temps va englober les motifs raisonnables.
    Donc, la définition au paragraphe 320.27(3) m'apparaît permettre les dépistages obligatoires autres que ceux qui sont faits dans le cadre d'actions policières précises pour réduire la conduite avec capacités affaiblies, lors desquelles tous les conducteurs sont arrêtés. Le libellé suggère aussi que des contrôles obligatoires pourraient être faits par des agents de la paix qui travaillent de façon individuelle ou en duo. Ils ne comportent pas le dépistage de tous les conducteurs sans la nécessité de motifs raisonnables de soupçonner la consommation.
    J'aimerais suggérer d'encadrer ces actions policières qui ne comportent pas le contrôle obligatoire systématique de tous les conducteurs. Cela pourrait être possible, par exemple, en utilisant une séquence aléatoire de détermination des véhicules à arrêter, ou une séquence aléatoire des conducteurs contrôlés, une fois qu'ils ont été arrêtés pour diverses raisons. Une séquence aléatoire pourrait être conservée en archives afin de démontrer à la population la nature aléatoire du contrôle obligatoire qui est demandé, et aussi pour protéger le travail des policiers. Il s'agit ici de combiner la sélection aléatoire, faite au hasard, avec le contrôle obligatoire. La sélection aléatoire pourrait être aussi utile lorsqu'il y a des grands débits de véhicules, par exemple, et qu'on ne veut pas arrêter tout le monde.
    En bref, il est suggéré de clarifier la signification des termes « aléatoire » et « obligatoire ». Par ailleurs, il y a une zone grise dans la définition du contrôle obligatoire dans des circonstances dans lesquelles tous les conducteurs ne sont pas testés systématiquement et lorsqu'il n'y a pas de motifs raisonnables de soupçonner la consommation. Donc, la combinaison du contrôle aléatoire et du contrôle obligatoire dans ces circonstances pourrait permettre de donner à la population le sentiment que ses droits sont respectés, tout en participant à la démonstration que la probabilité d'être testé est élevée. Cela permettrait aussi de protéger le travail des policiers.
(1655)
     J'aimerais soulever un autre point. Le contrôle obligatoire de l'alcoolémie semble associé à une réduction de la conduite avec les capacités affaiblies. Toutefois, comme le résume bien le document qui a été préparé par le Centre canadien de lutte contre les toxicomanies, le nombre de tests qui devraient être faits au Canada afin d'atteindre les cibles de réduction se chiffrent en millions.
    Il faudra donc que, en parallèle avec les changements, on prévoie donner aux provinces et aux corps policiers la capacité de mettre en place ces procédures en ce qui touche l'éducation de la population, des policiers et des juges. Il faudra penser également aux coûts et aux effectifs nécessaires sur le terrain.
    Par ailleurs, si on considère l'ampleur du projet de loi proposé et ses ramifications pour les codes des différentes provinces, de même que la nécessité d'informer et de former toutes les parties, je suggère d'avoir une date d'entrée en vigueur beaucoup plus lointaine que 90 jours. Il faut prévoir un minimum de 9 à 12 mois sur le terrain afin que tous les intervenants soient prêts et comprennent bien tous les changements proposés. Les objectifs visés pourraient ainsi être atteints d'une façon beaucoup plus efficace.
    Je souhaite également donner mon appui à l'alinéa 320.27(2)d), où il est stipulé que le fait que la personne a été impliquée dans une collision ayant entraîné une blessure fait partie des motifs raisonnables de soupçonner qu'une personne a consommé de l'alcool. Cette initiative m'apparaît importante à la fois sur le terrain, après une collision, et pour dépister les conducteurs blessés envoyés dans les hôpitaux.
    D'une part, en ajoutant l'implication dans une collision parmi les motifs raisonnables de soupçonner qu'une personne a consommé de l'alcool, on donne aux policiers la possibilité de faire reconnaître la collision comme un motif raisonnable, ce qu'ils avaient souvent de la difficulté à faire auparavant. D'autre part, l'alinéa 320.27(2)d) constitue une possibilité offerte aux policiers, et non pas une obligation. Le contrôle obligatoire m'apparaît nécessaire dans le cas d'une collision ayant entraîné des blessures.
    Que les contrôles deviennent obligatoires ou constituent plus facilement un motif raisonnable de soupçonner qu'une personne a consommé de l'alcool ne sous-tend pas qu'ils seront appliqués systématiquement. Ma suggestion générale est que les provinces et les responsables des corps policiers des différentes compétences suggèrent fortement aux policiers d'appliquer les contrôles, sinon de prendre les mesures nécessaires pour faire un dépistage systématique de tous les conducteurs impliqués dans une collision ayant entraîné des blessures et qui ont été transportés à l'hôpital.
    Les informations recueillies dans le cadre de ces actions pourraient contribuer à démontrer que la probabilité d'être testé est élevée, ce qui est souhaité par tous. Elles permettraient également de mieux évaluer l'ampleur de l'alcoolémie dans les collisions avec blessures.
    Pour terminer, j'aimerais aussi indiquer mon appui aux éléments qui vont permettre aux policiers de faire prélever des échantillons des conducteurs blessés à la suite d'une collision. On sait que la majorité des conducteurs qui ont été blessés dans une collision et transportés à l'hôpital et dont le taux d'alcool dépassait la limite permise ne sont pas condamnés. Une revue de la documentation faite en 2015 par Robert S. Green et ses collègues, qui couvre cinq études canadiennes, révèle que le pourcentage de condamnation dans ces cas se situe à moins de 20 %. Plusieurs facteurs expliquent ces faibles taux. Notamment, on note la difficulté d'identifier le type d'intoxication et d'obtenir un échantillon admissible. Il y a également un manque de ressources pour bien appliquer la loi.
    Les changements apportés à la loi, comme l'alinéa 320.27(2)d) qui ajoute les collisions avec blessures aux motifs raisonnables de soupçonner qu'une personne a consommé de l'alcool, ainsi que les changements qui décrivent la procédure d'émission des mandats — pensons aux délais plus longs pour les obtenir — vont permettre de tenir compte de plusieurs problèmes décrits dans la revue de la documentation.
(1700)
    Toutefois, il faut aussi noter le besoin d'une plus grande aide dans l'application de la loi. Il faut parfois beaucoup de temps aux policiers pour procéder dans les cas d'hospitalisation. Je suggère fortement de donner aux corps policiers la capacité de recourir à ces nouvelles procédures afin de maximiser leur efficacité.

[Traduction]

     Nous allons commencer les questions d’une durée de sept minutes.

[Français]

    Nous commençons par M. Di Iorio.
    Merci, monsieur le président.
    Je voudrais tout d'abord remercier les témoins, autant ceux qui ont déjà témoigné que ceux qui sont dans la salle en ce moment. Votre collaboration et la qualité de votre prestation nous sont d'un précieux secours.
    Je vais d'abord vous adresser une question, maître Therrien et maître Kosseim. Je vais la résumer, puis je vous expliquerai brièvement pourquoi je la pose ainsi.
    Advenant que le projet de loi soit adopté tel quel, surtout le paragraphe 320.27(3), que feriez-vous? Comment mettriez-vous en oeuvre l'exercice de votre compétence et des pouvoirs qui y sont afférents? Il s'agit de la disposition sur le contrôle aléatoire.
    Dans le cas du contrôle aléatoire, une procédure qui pourrait être utile pour atténuer les risques d'atteinte à la vie privée serait d'exiger des forces policières de procéder à une évaluation des facteurs relatifs à la vie privée.
    Avant d'en arriver au contrôle aléatoire, je vous encourage à étudier la possibilité d'établir des paramètres afin que non seulement les contrôles ne soient pas aléatoires, mais qu'ils ne soient pas arbitraires ni laissés à l'entière discrétion de l'agent de la paix. Ce serait la première chose à faire. Si vous êtes d'avis qu'il devrait y avoir de tels contrôles, je vous encourage fortement à essayer de structurer cela et d'avoir des paramètres quant à l'exercice des pouvoirs policiers à ce sujet.
    Au-delà de ces critères qui donneraient des paramètres juridiques à l'exercice des pouvoirs policiers, il y a, en droit à la vie privée, cette mécanique de l'évaluation des facteurs relatifs à la vie privée. Selon cette évaluation, on demanderait aux autorités de l'État d'évaluer la façon dont elles mettraient en oeuvre le pouvoir en question. Elles réfléchiraient à la façon de le faire, à la façon dont les risques d'atteinte à la vie privée pourraient être atténués et à la façon de gérer ces choses.
(1705)
    Est-ce que l'entrée en vigueur de cette disposition requerrait une modification à la loi qui gouverne votre institution?
    Parlez-vous de l'évaluation des facteurs?
    Si le paragraphe 320.27(3) était adopté tel qu'il est, est-ce que cela requerrait une modification à la loi constitutive de votre organisme?
    Si on parle d'obliger les forces policières à procéder à ces évaluations, la réponse est non. Pour ce qui est des forces policières fédérales ou des organismes fédéraux, y compris la GRC, elles doivent procéder à ces évaluations. C'est au niveau fédéral seulement. Au niveau provincial ou municipal, il y a d'autres régimes qui seraient en place.
    Je vous remercie.
    Ma prochaine question s'adresse d'abord à la Dre Ouimet, puis le Dr Brown pourra répondre à son tour.
    J'ai bien compris la distinction que vous faites au sujet du paragraphe 320.27(3). Vous dites que, tel qu'il est rédigé, c'est plus obligatoire qu'aléatoire. Dans le titre, il y a le mot « aléatoire », mais il n'y a aucune mention de cela dans la disposition elle-même.
    J'aimerais que vous nous éclairiez sur les situations suivantes.
    Prenons le cas d'une personne, un citoyen canadien ou une citoyenne canadienne, qui, après être allée manger et avoir pris quelques consommations, fait une mauvaise évaluation de sa condition et croit sincèrement qu'elle n'a pas dépassé la limite. Ensuite, prenons le cas d'une autre personne qui se comporte avec mépris à l'égard de la sécurité et du bien-être d'autrui, celle pour qui tout ce qui compte, c'est le plaisir de consommer de l'alcool, et qui prend ensuite la route.
    Est-ce que vous pouvez nous éclairer quant aux manières de traiter ces situations?
    Je vais laisser le Dr Brown répondre.
    Si vous le voulez, vous pourrez compléter la réponse par la suite.
     Les motifs qui mènent à la conduite avec facultés affaiblies sont très hétérogènes. Il y a toutes sortes de motivations, et des personnes différentes se retrouvent dans cette situation. Il est sûr que, pour bon nombre d'entre elles, il s'agit d'une erreur de jugement, et ce n'est qu'un épisode, voilà tout. Dans d'autres cas, cela reflète un manque de considération envers la sécurité publique ou un manque de respect envers la loi.
    En tant que chercheurs, nous essayons de trouver les moyens de mieux personnaliser notre approche pour prévenir ce comportement à risque. Il n'y a pas de réponse simple. Cela doit être considéré comme une stratégie progressive, avec évaluation.
    J'ajouterais un élément à la discussion. Ce que nous constatons, c'est que l'alcoolisme et la conduite avec facultés affaiblies ne sont pas synonymes. C'est différent. Il y a des alcooliques, purement et simplement, qui ne conduisent pas, et d'autres sont de forts consommateurs qui conduisent toujours avec les facultés affaiblies.
    Il faut donc éviter l'idée de simplifier les choses et de dire qu'il s'agit seulement d'un manque de jugement. Pour certains, oui, c'est le cas, mais pour d'autres, non. C'est plutôt un signe de perte de contrôle substantielle face à l'alcool.
    Pour d'autres encore, il s'agit d'un geste presque criminel et négligeant, et l'alcool est le déclencheur de l'arrestation et de la condamnation, mais il n'est pas nécessairement à la racine du comportement.
(1710)
    Si on prend le premier cas que je soulevais, celui de la personne qui fait une mauvaise évaluation de sa condition, y a-t-il des moyens technologiques qui pourraient rectifier cela?
    Le jugement est souvent subjectif et peut porter quelqu'un à la confusion. Souvent, les gens ne sont pas capables de mesurer leur niveau d'incapacité.
    Il existe des moyens, par exemple rendre disponibles des ivressomètres dans des endroits de consommation. Il y a la sensibilisation et l'éducation quant au nombre de boissons consommées qui peuvent, compte tenu du poids de la personne, entraîner un taux d'alcool plus élevé que celui prévu dans la loi.
    Il y a des moyens. Est-ce qu'il y a une motivation...
    Nous devons nous arrêter ici. Excusez-moi.
    Merci beaucoup des questions et des réponses.
    Nous allons continuer avec M. Généreux.
    Je remercie les témoins d'être ici.
    Nous allons continuer cette discussion. Je vais vous donner l'occasion de poursuivre, parce que j'aimerais vous entendre, tous les trois. De toute évidence, il semble y avoir des améliorations à apporter au projet de loi. Quels éléments suggérez-vous en vue de le bonifier?
    Plus tôt, un avocat nous a dit qu'il le détruirait et qu'il en rédigerait un nouveau. Croyez-vous qu'il y ait possibilité d'améliorer ce projet de loi, plutôt que d'agir de façon aussi radicale? Si oui, quels éléments y changeriez-vous?
    Je parlerais du paragraphe 320.27(3). Je déterminerais exactement ce qu'on veut dire.
    Personnellement, je suggérerais de combiner les aspects aléatoire et obligatoire des contrôles. Je crois que personne ne va s'opposer à ce qu'il y ait des barrages routiers, ni à ce que tout le monde soit testé lors d'un barrage.
    Par contre, ce qui pose peut-être le plus de problèmes, c'est la détection, soit le fait que des policiers, qu'il travaillent seuls ou en duo, peuvent arrêter des gens et leur faire subir un test sans motifs raisonnables.
    Avec la combinaison des aspects obligatoire et aléatoire, un corps policier pourrait décréter que, durant une certaine semaine, par exemple, un test sera imposé toutes les trois arrestations, c'est-à-dire qu'une personne sera testée toutes les trois fois qu'on en arrête une. Par conséquent, ce serait documenté. De cette manière, il n'y aurait pas de souci concernant le fait qu'un policier puisse poser un jugement.
     Elle aurait été arrêtée au préalable pour une autre raison, peut-être.
    On l'aurait arrêtée pour une autre raison. Toutefois, une séquence aléatoire nous permettrait de procéder à ces contrôles. Ainsi, on ne pourrait pas dire qu'une personne a été arrêtée à cause de certaines de ses caractéristiques.
    Naturellement, la rédaction des lois n'est pas mon domaine, mais si on conserve aussi la séquence aléatoire, cela me semble être une façon de faire acceptable, qui permettrait à la fois d'effectuer le contrôle et de protéger le travail du policier.
    Monsieur Brown, j'aimerais que vous poursuiviez la réponse que vous avez donnée à M. Di Iorio. Je trouve cela intéressant.
    Sur le plan technologique, vous dites qu'il y a moyen de faire un test dans certains endroits où on vend de l'alcool. On a de ces équipements dans les bars depuis longtemps. Croyez-vous qu'on pourrait aller plus loin? J'imagine que certaines technologies ont évolué. Il y a peut-être de nouvelles technologies que je ne connais pas, car je ne vais plus beaucoup dans les bars.
    À votre avis, le comportement psychologique des gens peut-il être influencé par ces équipements?
    C'est difficile à dire. C'est un comportement risqué très persistant. Par définition, certaines personnes vont prendre des risques et leur sensibilité à l'alcool est plus élevée que la nôtre. C'est difficile, c'est un défi.
    On a fait une expérience qui évaluait l'impact de la présence d'un appareil qui sonnait si quelqu'un arrivait dans un véhicule avec un taux d'alcool plus élevé. Ce n'était pas nécessairement très déterminant dans la décision de conduire ou non. J'aimerais être plus optimiste.
(1715)
    Si l'auto ne démarrait pas, ce serait encore mieux.
    Oui, en effet, le système d'antidémarrage est très efficace.
    Je veux m'assurer que M. Therrien s'exprime.
    On parle de vie privée, qu'il s'agisse de contrôles aléatoires ou non. Dans le document que vous nous avez fourni, vous posez la question suivante: dans quelle mesure un nouveau pouvoir de l'État obligeant tout le monde à fournir un échantillon d'haleine sur demande serait-il intrusif?
    D'après vous, procéder à des contrôles obligatoires ou aléatoires — on ne lancera pas de débat sur la sémantique — serait-il très intrusif?
    Plusieurs choses sont beaucoup plus intrusives que cela. L'insertion d'une aiguille dans un corps humain, par exemple, serait plus intrusive, sans aucun doute.
    Toutefois, même si ce n'est pas très intrusif, le simple fait d'être obligé de répondre et d'être assujetti à cette procédure alors qu'on n'a rien à se reprocher et qu'il n'y a pas de soupçons, c'est intrusif. C'est comme, par exemple, devoir passer aux rayons X à l'aéroport. Dans les deux cas, il n'y a pas d'intervention directement sur le corps humain ni rien qui constituerait une voie de fait, à moins qu'il n'y ait une autorisation judiciaire.
    On est appelé à souffler dans un appareil quelconque.
    C'est exact. Ce n'est donc pas très intrusif physiquement, mais le fait d'y être assujetti, de devoir s'y conformer alors qu'il n'y a pas de soupçons qu'on a agi de façon contraire à la loi, c'est intrusif en soi. On peut facilement concevoir des choses plus intrusives, mais la procédure en question a un caractère intrusif.
    Si vous me donnez deux secondes, j'aimerais répondre à votre question sur les améliorations possibles. Il y a deux choses. Plusieurs pays, en particulier en Europe, ont adopté des mesures obligeant les gens à fournir des échantillons d'haleine même en l'absence de soupçons. Toutefois, ces programmes européens sont assortis de toute une gamme de conditions qui diffèrent d'un pays à l'autre. Je n'ai pas fait l'étude des systèmes en question, mais je sais que les conditions d'application de ce concept diffèrent d'un pays à l'autre. Je vous encouragerais donc fortement à entendre des gens vous parler de cette question ou à l'étudier pour voir de quelle façon il serait raisonnable de procéder.
    Lorsque vous parlez des conditions, parlez-vous de la façon d'effectuer le prélèvement?
     Non, je parle des conditions préalables qui permettraient à une autorité de l'État d'exiger de prendre l'échantillon, peu importe le moyen technique.
    D'accord.
    Je vais être concret. Un jugement américain qui date un peu disait qu'il devrait y avoir un encadrement juridique, des règlements dans lesquels, par exemple, il pourrait être question de faire approuver les conditions préalables.
    Cela revient à ce que disait Mme Ouimet lorsqu'elle a parlé de contrôles obligatoires lors d'actions policières précises. Alors, ce ne serait pas vraiment aléatoire; ce serait obligatoire, mais dans des conditions préapprouvées, par exemple, par une autorité policière supérieure, et non pas par l'agent sur le terrain. Idéalement, l'approbation serait donnée sur la base de preuves reliant la demande à une circonstance où il a été constaté qu'il y avait une certaine incidence de conduite en état d'ébriété. Donc, il faudrait relier cela à la preuve statistique, par exemple.
    Pour le moment, la nouvelle disposition du Code criminel tel qu'elle est présentée parle de contrôle aléatoire, ce qui pourrait aller jusqu'à donner une discrétion pleine et entière à un agent. Je crois que cela n'est pas idéal. Je vous recommande donc d'essayer d'envisager, soit à partir de modèles européens, soit à partir de ce jugement américain, de donner des conditions ou un encadrement reliant la demande à une preuve scientifique.
(1720)
    Merci, monsieur Therrien.
    Monsieur Dubé, vous avez la parole.
    Merci, monsieur le président.
    Merci aux témoins d'être avec nous aujourd'hui.
    Monsieur Therrien, j'aimerais toucher la question du nouveau paragraphe 320.37(2) proposé dans le projet de loi C-226, cette question de partage d'information pour l'application de toute loi fédérale ou provinciale.
    Formuler des hypothèses, surtout dans le cadre du travail que vous effectuez, n'est probablement jamais une aventure très appropriée. Néanmoins, vous avez peut-être une idée pour nous aider à mieux comprendre pourquoi cette disposition se retrouve là. Est-ce qu'elle sert véritablement à quelque chose?
    Nous ne voyons pas la motivation, nous ne la connaissons pas. Je ne sais pas si vous pouvez demander au parrain du projet de loi de l'expliquer, mais non, je n'ai pas d'explication à cela.
    Merci.
    Il y est question des évaluations, des épreuves de coordination des mouvements et des analyses de substances corporelles. Je ne suis pas avocat, alors je ne suis pas certain de ce qu'on pourrait entendre par « évaluations ». Est-ce qu'une déclaration verbale pourrait être incluse dans cette disposition de la loi?
    Peut-être, dans la mesure où la façon dont la personne répond et le débit de sa voix permettent d'évaluer son taux d'alcool.
    Parfait, merci.
    Au Québec et en Ontario, les régions plus éloignées sont desservies par la police provinciale. Dans d'autres provinces, c'est la GRC qui fait le travail.
    En analysant ce projet de loi, en ce qui touche le partage d'information, avez-vous relevé des problèmes potentiels liés aux différents territoires du fait que, dans la majorité des provinces, la GRC est le corps policier en place, alors qu'en Ontario et au Québec, c'est la police provinciale, surtout dans les régions rurales?
    Nous n'avons pas constaté de problèmes particuliers. Ce qu'on dit sur la question du partage des résultats des analyses en question, c'est que c'est concevable dans la mesure où l'importance du problème de l'alcool au volant justifie la prise d'échantillon de façon obligatoire, et ce, dans le cas de quelqu'un sur lequel ne pèsent pas de soupçons de conduite en état d'ébriété. Le problème social est important; on parle d'alcool au volant.
    Si on utilise le résultat de ce test à une autre fin réglementaire qui a une importance beaucoup moindre, par exemple l'obtention d'une permis de pêche, cela ne fonctionne plus. Il n'y a plus de lien entre le fait de se conformer à une obligation juridique pour une fin de l'État importante et l'utilisation ultime qu'on en ferait pour une question de permis de pêche, par exemple.
     Je comprends. Merci.
    Docteur Brown, docteure Ouimet, j'ai une question pour vous.
    Nous avons parlé des ressources. Nous avons entamé une discussion sur des questions de technologies. Nous avons parlé du comportement et de la peur du risque. Souvent, la possibilité ou la probabilité qu'on se fasse poigner par les autorités, comme on dirait en bon français, voilà ce qui motive le comportement. J'en ai parlé aux témoins précédents et ils semblaient confirmer que c'était ce que les études disaient la plupart du temps. Même si notre taux d'alcool est élevé et que nous le savons, notre attitude ne va pas forcément changer. Au fond, même si nous savons que nous ne devrions pas conduire, c'est le fait de savoir que nous pourrions nous faire arrêter qui va changer notre attitude.
    Vous avez tous deux mentionné cela brièvement, mais j'aimerais vous entendre parler davantage de la question des ressources affectées aux campagnes médiatiques et à l'éducation. Le témoin précédent nous a dit que, dans d'autres endroits où l'on appliquait des règles semblables et où l'on procédait à des tests aléatoires, on avait, par exemple, une campagne de sensibilisation en même temps. Selon moi, cela irait encore plus loin si on voulait éliminer ce fléau tout simplement. Faire plus de prévention serait mieux que de seulement s'occuper des conséquences.
    Qu'en pensez-vous? J'aimerais entendre votre opinion à tous les deux.

[Traduction]

     À mon avis, la question n’est pas d’arrêter des gens, mais bien de prévenir un comportement.
    Il est extrêmement important d’augmenter la probabilité d’être arrêté ou, à tout le moins, de donner l’impression aux conducteurs qu’ils ont une plus grande probabilité d’être arrêtés et qu’ils risquent des accusations s’ils ont trop bu. La transmission de cette perception est quelque chose que les campagnes d’information publique ont bien réussi, y compris le fait d’avertir les gens qu’il y aura des barrages routiers ici et là.
    Il ne s’agit pas de pincer les gens, mais bien de prévenir la matérialisation d’un certain comportement. Comme vous l’avez dit, l’une des façons de faire cela c’est de donner l’impression que la probabilité d’être arrêté avec les facultés affaiblies est élevée.
(1725)

[Français]

    Je dirais qu'il est absolument nécessaire de coupler les deux, et on en voit les effets.
    Les barrages sont efficaces, mais très souvent, cette stratégie a besoin d'être complétée par de la publicité. C'est pourquoi je disais qu'il faudrait accorder plus de temps, c'est-à-dire de 9 à 12 mois, pour que tout cela soit mis en place. Il faut que les gens soient au courant. Il faut faire de la publicité et il faut informer les gens.
    Il faut aussi se donner les moyens pour ce faire. Si la loi le permet, mais qu'on ne fait pas les millions de tests qui sont demandés pour que cela soit efficace, tout cela n'aura probablement pas d'efficacité. Pour moi, faire des campagnes d'éducation et accorder des fonds pour les tests supplémentaires est une grande préoccupation.
    Vous avez peut-être la connaissance scientifique pour étayer cela, mais au fond, vous dites que l'éducation a une plus grande influence sur la baisse du taux d'alcool au volant que toute autre mesure criminelle ou judiciaire.
    Je n'irais pas jusque-là, mais je dirais qu'il faut que ce soit couplé à une action. En effet, à quoi bon dire qu'on va se faire arrêter si on ne voit jamais de barrage et si on ne voit jamais quelqu'un se faire arrêter? Personnellement, je ne connais personne de mon entourage qui a été arrêté au cours des cinq dernières années.
    Oui, moi.
    Voilà, il y en a un dans la pièce.
    Il faudrait qu'une personne sur trois passe par un barrage.
    On fait de la publicité, mais si on se limite à cela, c'est peine perdue.
    Merci beaucoup.

[Traduction]

    Madame Damoff.
    Merci beaucoup.
    J’aimerais parler des peines minimales obligatoires. Vous nous avez donné votre avis sur leur utilisation comme mesure dissuasive. Si quelqu’un est envoyé à un endroit pour purger sa peine minimale obligatoire, aura-t-il accès à des ressources pour l’aider à régler ses problèmes, que ce soit un comportement à risque ou un problème de toxicomanie? Nos façons de faire sont-elles efficaces pour veiller à ce qu’il ne recommence pas une fois sorti?
     Dans l’ordre actuel des choses, je vois beaucoup de personnes qui ont été arrêtées, puis enfermées ou condamnées, et j’en vois beaucoup qui récidivent. On rapporte qu’entre un tiers et 50 % des personnes que nous arrêtons au cours d’une période donnée vont récidiver. Nous savons qu’il s’agit d’une sous-estimation.
    Je pense que les sanctions à elles seules ne seront pas nécessairement adéquates.
    Il y a un raisonnement très particulier que j’entends souvent en clinique, un raisonnement qui a très peu à voir avec quelque forme de morale, de pensée rationnelle ou d’introspection quant à la responsabilité d’une personne face à la possibilité de risquer sa vie et celle des autres.
    Nous menons des études et des recherches pour trouver de nouvelles façons d’intervenir auprès de ces gens sur une base individuelle. C’est très difficile. Certains sont tout simplement alcooliques, ce qui est un problème somme toute assez simple à gérer.
    Mais si un alcoolique est accusé de conduite avec facultés affaiblies et qu’il se retrouve en prison, essaie-t-on de l’aider pendant qu’il purge sa peine? Si la dépendance à l’alcool n’est pas traitée, il va sortir de prison et récidiver.
    En effet. Je ne peux pas me prononcer sur l’état actuel du système carcéral, notamment en ce qui concerne la prestation de ces services, mais les personnes qui ont de la difficulté à contrôler leur consommation d’alcool nécessitent une approche particulière qui n’est pas nécessairement offerte dans un pénitencier. Pour les autres, en revanche, c’est le comportement irresponsable et négligent qui doit être puni et il est possible que cela soit suffisant.
    C’est un phénomène très hétérogène.
(1730)
    Madame Ouimet, vous avez fait des recherches sur l’efficacité des nouvelles technologies pour ce qui est de faire reculer les comportements à risque.
    Pourriez-vous nous en dire un peu plus au sujet de ces nouvelles technologies qui pourraient s’avérer plus efficaces que les tests d’haleine aléatoires ou les peines minimales obligatoires? Y en a-t-il qui pourraient servir?
    Nous avons examiné des dispositifs individuels placés dans des véhicules afin de déterminer s’ils pourraient être utiles, mais nous sommes au tout début de nos recherches. Nous avons entendu dire que certaines sociétés travaillent à un dispositif qui serait placé dans un véhicule afin d’empêcher le conducteur de démarrer s’il a pris un verre, mais cela ne semble pas fonctionner très bien.
    Lorsqu’il est question d’autonomie en matière de conduite, nous avons tendance à croire qu’il serait facile de doter les véhicules d’un dispositif idoine, mais la réalité semble indiquer que ce n’est pas le cas.
    ll reste beaucoup de problèmes qu'ils ne sont pas encore parvenu à résoudre. De toute évidence, s’ils réussissent dans cette voie, nous allons tous devoir changer de domaine, ce que je serai heureuse de faire.
     En laboratoire, nous avons testé un simple appareil de rétroaction de l’alcoolémie sur des jeunes qui avaient bu de grandes quantités d’alcool, et ce dispositif s’est avéré inutile. Ce n’était qu’un appareil de rétroaction de l’alcoolémie placé dans une voiture. Les jeunes étaient seuls dans la voiture et 60 % d’entre eux ont choisi de conduire quand même le simulateur. Ils ont été nombreux à nous dire qu’ils avaient déjà conduit dans cet état.
    Bref, je n’attends pas grand-chose à court terme de ces appareils individuels. À ma connaissance, il ne se passe pas grand-chose sur ce front-là à l’heure actuelle. Je crois que notre étude était l’une des premières avec des personnes intoxiquées, et les résultats ne sont pas très prometteurs.
    Voyez-vous un avantage à faire passer le taux de 0,08 à 0,05, ou quel que ce soit le chiffre dont on parle?
    C’est 0,05. Plusieurs administrations l’ont fait.
    Même s’il est difficile de cerner précisément les effets d’un programme particulier puisqu’il est habituellement combiné à de nombreux autres éléments comme des effforts de sensibilisation et d’autres démarches, dont le renforcement momentané des mesures d’application de la loi, l’abaissement du taux d’alcoolémie donne généralement de bons résultats et parvient dans les faits à réduire les occurrences de conduite avec facultés affaiblies.
    D’accord. Merci.
    Merci beaucoup à tous nos témoins.

[Français]

    Je vous remercie encore une fois de vos témoignages.

[Traduction]

    Nous avons eu une bonne réunion. Nous reprendrons mardi.
    La séance est levée.
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