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SECU Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la sécurité publique et nationale


NUMÉRO 034 
l
1re SESSION 
l
42e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mercredi 19 octobre 2016

[Enregistrement électronique]

  (1730)  

[Traduction]

    Bonsoir à tous. Bienvenue à cette 34e séance du Comité permanent de la sécurité publique et nationale de la Chambre des communes.
    Comme vous le savez sans doute, notre comité a entrepris une étude sur le cadre de sécurité nationale du Canada en vue de déterminer sa situation actuelle et la forme que les Canadiens souhaiteraient lui voir prendre à l'avenir. Cette étude se déroule en parallèle avec une consultation sur le même sujet menée par le gouvernement du Canada.
    Le gouvernement, par l'entremise du ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile, a rendu public un Livre vert dont il existe deux versions, une brève et une longue. La consultation entreprise par le Comité ne porte pas expressément sur le Livre vert, mais nous nous en servons pour étudier l'ensemble du cadre de sécurité. Nous nous inspirons du Livre vert, mais il ne limite pas la portée de notre étude. Il soulève un certain nombre de questions auxquelles nous jugeons utile de nous intéresser.
    Le ministre a déjà présenté à la Chambre un premier texte législatif. Il s'agit du projet de loi C-22 qui traite de la surveillance par les parlementaires des agences de sécurité nationale. Notre comité est actuellement saisi de ce projet de loi qui a franchi l'étape de la deuxième lecture. Il en est question dans nos différentes séances. Il ne porte toutefois que sur une petite partie de notre cadre de sécurité nationale. C'est la première composante et elle revêt une grande importance, mais elle demeure partielle et ne traite que de la surveillance.
    Après avoir amorcé cette étude avec des séances tenues à Ottawa il y a quelques semaines, nous avons pris la route. Lundi, nous étions à Vancouver où nous avons tenu deux séances. Hier, nous étions de passage à Calgary. Aujourd'hui, nous sommes à Toronto, et nous en sommes à notre deuxième réunion ici. Nous fonctionnons toujours un peu de la même manière. Dans l'après-midi, nous accueillons des témoins invités qui traitent de certaines questions à notre demande. Très souvent, ces gens représentent des organisations, mais certains témoignent à titre personnel. Ils nous permettent de nous faire une meilleure idée des enjeux à considérer dans notre élaboration d'un cadre de sécurité nationale.
    Dans le cadre de nos déplacements, nos séances de l'après-midi ressemblent beaucoup à celles que nous tenons à Ottawa. Pour les séances du soir, nous avons toutefois décidé de tenir des audiences publiques où vous êtes invités à faire part de vos réflexions au Comité. Jusqu'à maintenant, environ 25 personnes ont demandé à prendre la parole ce soir. Si votre nom ne figure pas déjà sur notre liste, vous pouvez vous présenter à la table pour vous inscrire. Si nous voulons que les 25 intervenants inscrits puissent prendre la parole, je suggérerais que nous limitions les observations à environ trois minutes pour chacun. Si les choses se passent comme à Calgary et Vancouver, des gens vont arriver après le début de la réunion une fois qu'ils auront quitté leur travail et se seront rendus jusqu'ici malgré la circulation.
    Il est possible que les membres du Comité aient des questions à vous poser pour obtenir des précisions au sujet de vos observations. Je vais donc garder un oeil sur mes collègues pour m'assurer qu'ils ont la chance de vous poser leurs questions.
    Je vais maintenant demander aux membres du Comité de se présenter en indiquant quelle circonscription ils représentent.

  (1735)  

    Je m'appelle Marco Mendicino et je suis le député d'Eglinton—Lawrence, ici même à Toronto. Pour ceux qui l'ignoreraient, cette circonscription est située à peu près au centre de la zone desservie par l'indicatif régional 416, et est voisine de celle de Rob Oliphant.
     Je m'appelle Pam Damoff et je suis la députée d'Oakville North—Burlington, juste à l'ouest de Toronto.
    Je m'appelle John Brassard et je suis le député de Barrie—Innisfil en plus d'être porte-parole de l'opposition officielle pour les questions relatives aux anciens combattants.
    Je m'appelle Dianne Watts et je suis députée de South Surrey—White Rock. Je suis porte-parole de l'opposition officielle pour les questions touchant les infrastructures et les collectivités.
    Nous avons également Matthew Dubé qui doit être sorti quelques instants. Je lui demanderai de se présenter à son retour.
    Je dois vous dire que les membres du Comité ont dû se lever à 3 h 30 ce matin pour prendre l'avion depuis Calgary et qu'il est donc possible que vous nous voyiez boire du café et de l'eau pour tenir le coup pendant la soirée.
    Nous allons d'abord entendre Barrie Zwicker.

[Français]

    Soit dit en passant, les réunions de ce comité se déroulent en français et en anglais. Si vous avez besoin d'écouteurs pour entendre l'interprétation, vous pouvez utiliser ceux qui sont sur la table. Il est important de comprendre tout ce qui se dit au Comité.

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    J'avais préparé des observations pour une durée de plus trois minutes, mais je vais devoir respecter les directives. Merci de me donner l'occasion de prendre la parole.
    Je suis heureux qu'un comité comme le vôtre existe. Ma seule comparution à vie devant un comité permanent de la Chambre des communes a été couronnée d'un vif succès, mais je ne m'attends pas nécessairement à ce que ce soit le cas aujourd'hui.
    J'aimerais commencer en vous citant l'historien et militant pour la paix britannique E. P. Thompson: « Un esprit dénaturé est l'arme la plus dangereuse qui soit. »
    S'il y a un lien qu'il convient absolument de faire, c'est celui entre l'évolution actuelle des projets de loi C-51 et  C-22, d'une part, et la décision historique rendue en 2013 par une juge de la Cour suprême de la Colombie-Britannique au sujet d'un prétendu complot terroriste visant Victoria le Jour du Canada, d'autre part. Ce jugement qualifié de marquant par Faisal Kutty dans une récente édition du Toronto Star devrait servir désormais de repère à l'échelle internationale.
    Reste quand même qu'il ressort de tous les reportages — j'ai travaillé en journalisme et en communications — et de presque tous les commentaires dont j'ai pris connaissance, y compris ceux d'observateurs qui en ont marre des agences d'espionnage ou qui sont critiques à leur endroit, que le problème mis au jour dans la décision de la Cour suprême de la Colombie-Britannique est devenu plus ou moins un secret de polichinelle. Au coeur de ce problème, on retrouve le terrorisme de « fabrication policière ». Ce sont les termes mêmes utilisés par la juge Bruce de la Cour suprême de la Colombie-Britannique. On ne parle pas suffisamment de ces opérations bidon visant à tromper la population. Il y a longtemps déjà que nous aurions dû tenir un vaste débat approfondi à ce sujet, ce qui pourrait — et devrait, à mon sens — se faire dans le cadre des audiences de votre comité.
    La juge Bruce parle de ce crime fabriqué de toutes pièces par la police à la page 344 de sa décision du 29 juillet qui annulait les condamnations pour terrorisme de John Nuttall et Amanda Korody. Comme le faisait remarquer Thomas Walkom dans l'édition du 3 août du Toronto Star, un tel attentat à la bombe n'aurait pas pu se produire si la GRC ne l'avait pas organisé. La police montée a cruellement exploité deux anciens héroïnomanes sans le sou qui étaient de toute évidence aux prises avec des problèmes de santé mentale.
     En écoutant il y a deux heures les experts qui témoignaient devant le Comité, je n'ai pu m'empêcher de penser à cet aspect de la problématique dont je souhaitais traiter de toute manière. Tous ces échanges me sont apparus plutôt superficiels, avec leur complexité législative et tout le reste, en passant sous silence les considérations plus générales relativement à ce qui peut se produire effectivement pour faire la manchette et créer un climat d'angoisse dans toute la société.
    Des études universitaires, des rapports officiels et même des éditoriaux publiés dans les journaux révèlent que la menace terroriste est grossie de façon tout à fait démesurée depuis des années, une situation à laquelle votre comité serait tout à fait justifié de s'intéresser.

  (1740)  

    Voilà pour vos trois minutes et demie.
    Non. Oh, vous avez été généreux.
    Ce que j'ai oublié de dire aux membres du public ce soir, c'est qu'ils sont encouragés à nous faire parvenir un mémoire par le truchement du site Web du Parlement du Canada, à la page du Comité permanent de la sécurité publique de la Chambre des communes. Rendez-vous au « Cadre de sécurité nationale » et cliquez sur « Participez ». Il vous sera alors expliqué comment déposer vos documents.
    Oui, et je vais soumettre un mémoire sur le reste fascinant de mon exposé.
    Nous allons le lire. Je vous le promets.
    Merci.
    Arthur Jefford, vous avez la parole.
    Je m'appelle Art Jefford. J'habitais à Sundridge, en Ontario, jusqu'à ce que le gouvernement du Canada ait à l'encontre du projet de loi C-51 et des exigences du Code criminel du Canada à l'article 83.01, qui définit le terrorisme. Je suis devenu le résultat du projet de loi C-51. Les fonctionnaires de mon pays ont attaqué, violé et pillé ma propriété; ils ont commis des actes terroristes à 20 reprises. Je suis maintenant confronté à un problème. En tant que bon Canadien, comment dois-je réagir à cela?
    Il semble que la politique officielle du Canada pour lutter contre le terrorisme soit de pilonner les chefs terroristes à l'aide de drones, mais étant donné que les terroristes sont les fonctionnaires de mon pays, je veux trouver une meilleure solution, une solution pacifique, de préférence. Je suis ouvert aux suggestions. Permettez-moi de dresser un bref historique de ce qui s'est passé.
    En 1980, j'ai gagné 120 millions de dollars en vendant de la mousse isolante d'urée-formaldéhyde. Le gouvernement, le président de la SPI, le principal responsable des normes de l'industrie... Je n'ai pas été consulté. Notre produit a tout simplement été frappé d'une interdiction. En l'espace de 78 jours, nous avons été poursuivis 3 428 fois pour une somme de 484 millions de dollars. En 1981, après 78 jours, ma vie était brisée.
    En 1999, le gouvernement s'en prenait encore à moi. On a confisqué 13 véhicules dans mon entrée à différents moments. J'ai comparu devant le juge Tracy à la cour de Walkerton, et il a été établi que le gouvernement ne pouvait pas bafouer mes droits conférés par l'article 39 de la Magna Carta, mes droits constitutionnels ou mes droits garantis par la Charte. Tous les fonctionnaires sont tenus de s'assurer que chaque mesure législative qui est déposée respecte mes droits conférés par la Magna Carta, mes droits garantis par la Charte et mes droits constitutionnels, car ils l'emportent essentiellement sur tous les autres textes de loi.
    De mon point de vue, lorsque le premier ministre en poste a donné le feu vert au projet de loi C-51, il m'a trahi en tant que Canadien, car le nom de mon grand-père, Leslie Arthur Jefford, qui a fait l'ultime sacrifice pour défendre le mode de vie canadien et ma famille, est inscrit au Monument commémoratif de Vimy.
    En 2001, alors que j'étais à la tête d'une délégation canadienne, je crois qu'on m'a extradé vers Bahreïn en détournant l'avion dans lequel je me trouvais. J'ai réussi à m'en sortir parce que je ne suis pas arabe. En octobre 2001, alors que j'étais encore une fois à la tête d'une délégation canadienne, on m'a livré cette fois-ci à Oman, puis à Abu Dhabi. En janvier 2004, alors que j'étais une fois de plus à la tête d'une délégation canadienne, j'ai été capturé par Al-Qaïda et torturé à Kuala Lumpur, en Malaisie. Je me suis échappé après 10 jours, mais j'ai fini par raconter que ma famille s'était bien amusée à Washago, et mes bourreaux m'ont laissé tranquille pendant que je leur en parlais, ce qui m'a permis d'éviter un certain temps l'agonie de la torture.
    J'ai également expliqué comment, à la suite de l'interdiction de la mousse isolante d'urée-formaldéhyde, l'« homme téflon », Bob Fowler, qui a été chef du Bureau du Conseil privé pour Trudeau, Mulroney et Chrétien... J'ai dit qu'il avait tout mon argent, qu'il avait tout pris, et qu'Al-Qaïda ferait mieux de le lui demander. L'organisation terroriste a donc enlevé Bob Fowler et l'a caché ici et là pendant 130 jours jusqu'à ce que 10 millions lui soient versés.

  (1745)  

     J'ai bien peur que je doive vous interrompre, monsieur Jefford.
    Les membres du Comité ont-ils des questions?
    Eh bien, vous cherchez de l'information sur la radicalisation. Je dirais que j'ai été radicalisé. L'équipe de liaison de la Police provinciale de l'Ontario travaille maintenant avec moi.
    Mes députés, qu'il s'agisse de M. Miller, de Grey, ou de Tony Clement, ne se présentent pas quand je suis devant eux. Je me demande si je leur ai fait peur, car ils savent exactement ce qu'il s'est passé. Je me suis adressé à M. Jackson et à Bill Murdoch, sans oublier Larry Miller et Tony Clement. Le 9 février, quand l'isolant RetroFoam a été interdit, Tony Clement était ministre de la Santé et, du coup, il savait parfaitement quels étaient les problèmes.
    Je dois vous arrêter ici, mais je vous remercie. Vous êtes encouragé à nous faire parvenir tout ce que vous voulez par écrit. Je dois mentionner que M. Miller est un membre exceptionnel du Comité, dont il est vice-président. Il est normalement avec nous lors de ces séances, et je tenais donc à vous dire qu'il se présentera.
    [Note de la rédaction: inaudible] nous sommes au Canada. Voici une photo pour vous montrer comment le gouvernement terrorise [Note de la rédaction: inaudible]
    J'aurais dû mentionner que nous sommes accompagnés d'un analyste de la Bibliothèque du Parlement et du greffier du Comité, qui nous font paraître plus intelligents que nous le sommes.
    Monsieur Jack Dodds, vous pouvez prendre la parole.
    Monsieur le président, chers membres du Comité, merci de me donner l'occasion de me prononcer sur cette question importante. Je suis ici au nom des Canadian Unitarians for Social Justice, une organisation religieuse qui donne à des unitariens universalistes et à d'autres personnes l'occasion de mettre à profit leurs valeurs religieuses, humanistes et spirituelles dans le cadre de mesures sociales. La majorité des unitariens universalistes conviennent que les valeurs spirituelles sont pertinentes dans la vie de tous les jours et qu'une société libre et démocratique est une condition préalable à l'épanouissement spirituel.
    Nous estimons qu'un certain nombre d'idées déterminantes unissent les Canadiens. Parmi ces idées, la plus importante est celle du concept de société démocratique, ce qui ne renvoie pas uniquement à l'appareil électoral et gouvernemental. Selon ce concept, le pouvoir est conféré au peuple, et tout le monde a les mêmes droits et les mêmes privilèges. Le concept revêt une dimension spirituelle. C'est une profession de foi dans le pouvoir des êtres humains de façonner leurs propres vies.
    Plus tôt aujourd'hui, le professeur Levi a parlé de travaux de recherche qui montrent que les gens respectent la loi pas tant parce qu'ils craignent d'être punis, mais parce qu'ils pensent que les autorités juridiques sont légitimes et que les mesures qu'elles prennent sont généralement justes. La façon dont les citoyens perçoivent la légitimité varie en fonction du respect qu'on leur témoigne. Ils ont tous leurs propres besoins en matière de dignité et de protection de renseignements personnels. Ces principes sont intangibles, mais, au bout du compte, c'est ce qui a rendu la société canadienne paisible et sécuritaire.
    Reconnaître que l'égalité fait partie de la vision démocratique ne signifie pas seulement que tout le monde doit être traité de façon égale. Cela signifie également que lorsque les citoyens font affaire avec le gouvernement, il faut que ce soit sur un pied d'égalité. Au cours des 801 années qui se sont écoulées depuis la Magna Carta, des mécanismes ont été développés pour rendre possible cette vision. Nous exigeons que le gouvernement respecte la loi, tout comme les citoyens. Lorsque des citoyens ont des démêlés avec le gouvernement, ils doivent avoir accès à des juges et à des jurys impartiaux devant lesquels ils comparaissent sur un pied d'égalité avec leurs adversaires gouvernementaux.
    Nous craignons que la législation actuelle et le Livre vert n'entraînent un affaiblissement sournois de l'égalité entre les citoyens et les organismes de sécurité. Les organismes de sécurité prétendent qu'ils doivent mener leurs activités en catimini, mais il est fondamentalement impossible que justice soit rendue au moyen d'ordonnances d'un tribunal obtenues à la suite d'audiences secrètes qui excluent les personnes concernées.
    C'est d'autant plus vrai pour ce qui est de l'autorisation extrajudiciaire d'atteintes à la vie privée. Il y a deux semaines, devant votre comité, Wesley Wark a eu raison de qualifier le présent système de « paternaliste », et l'épithète s'applique aussi à ces mécanismes. Pour renverser la vapeur, le Parlement devrait réaffirmer que le seul moyen tout à fait légitime d'autoriser des perquisitions ou d'autres mesures contre une personne est d'engager des procédures judiciaires dans lesquelles cette personne est représentée. Dans le cas d'audiences visant à obtenir un mandat de perquisition, il pourrait être nécessaire de les tenir secrètes, mais dans tous les cas, la partie concernée devrait être avisée le plus tôt possible une fois le fait accompli, afin qu'elle puisse contester l'ordonnance du tribunal. En plus de créer un mécanisme de reddition de comptes, cette façon de procéder permettrait de peaufiner la loi grâce à l'évolution de la jurisprudence.
    Il me reste encore neuf minutes, mais je ne vais pas...

  (1750)  

    Nous sommes impatients de lire votre mémoire.
    Les membres du Comité ont-ils des questions à poser à M. Dodds?
    Ma collègue, Margaret Rao, la présidente des Canadian Unitarians for Social Justice, prendra la parole plus tard et donnera suite à mes propos.
    À moins que je puisse parler maintenant...
    Le président: Je pense qu'il serait probablement utile que vous preniez la parole maintenant, car votre exposé reprend le même thème.
    Mme Margaret Rao: Merci beaucoup.
    Nous sommes préoccupés par la tendance qui consiste à autoriser les organismes de sécurité à prendre des mesures contre des gens qui n'ont peut-être pas commis d'actes criminels. Les notions de « complicité » et de « complot », au sens du Code criminel, constituent un vecteur puissant pour enquêter et prévenir des actes violents avant qu'ils ne se produisent, mais la nouvelle loi a ajouté une liste d'activités vaguement définies qui nuisent à la sécurité du Canada, qui peuvent servir à justifier le partage de renseignements.
    De nouvelles dispositions autorisent la « perturbation » en s'appuyant sur des critères peu rigoureux en matière de preuve. Grâce à ces dispositions, les organismes de sécurité dressent des dossiers et interviennent dans les activités de citoyens qui ne commettent pas d'actes criminels. Dans la plupart des cas, les mesures de perturbation envisagées, si elles étaient prises par un citoyen plutôt que par le gouvernement, seraient criminelles ou illégales, ce qui va à l'encontre de la vision démocratique de l'égalité entre le peuple et le gouvernement.
    La nouvelle loi a multiplié les craintes de citoyens qui participent à des mouvements sociaux. En 2013, les organismes de sécurité ont présenté des séances d'information classifiées à des sociétés énergétiques canadiennes. Dans un rapport de la GRC datant de 2014, on emploie des termes hostiles pour décrire des mesures légales, comme la promotion de la lutte contre les changements climatiques au moyen des médias sociaux, et pour assimiler des actes de violence à des manifestations pacifiques.
    Le Comité de surveillance des activités de renseignement de sécurité enquête actuellement sur une plainte relative à l'espionnage de citoyens préoccupés par le projet d'oléoduc Northern Gateway d'Enbridge. Les organismes de sécurité semblent faire preuve d'une partialité palpable qui, combinée aux nouveaux pouvoirs de perturbation, décourage la participation des gens au processus démocratique.
    En résumé, les Canadian Unitarians for Social Justice demandent au Parlement de veiller à ce qu'un contrôle démocratique des activités des organismes de sécurité soit fait en reconnaissant que ces activités et la santé de notre démocratie entrent en conflit; en délimitant clairement ces activités pour garantir le respect des idéaux démocratiques; et en rendant obligatoires des mécanismes de transparence éprouvés afin que les citoyens possèdent l'information nécessaire pour faire un réel contrôle de ces activités.
    Je vais terminer en reprenant les mots du théologien Reinhold Niebuhr, qui a dit que la capacité de l'humanité à rendre justice rend possible la démocratie, mais que sa propension à l'injustice la rend nécessaire. Nous devrions l'écouter.
    Merci.
    Merci beaucoup. Vous avez respecté le temps alloué. Je pense que vous avez également terminé le mémoire des unitariens, ce qui est très bien. Je m'apprêtais à demander si d'autres unitariens voulaient poursuivre, mais ce n'est pas nécessaire. À mon avis, toute personne qui cite Reinhold Niebuhr est très utile.
    Steven Poulos sera le prochain à prendre la parole.
    Merci, monsieur Oliphant.
    J'habite à Toronto depuis 55 ans. Je dirige une entreprise de conception environnementale à Don Mills, au 1131, rue Leslie. Je suis inventeur, titulaire de brevets, concepteur en architecture et concepteur de technologies propres. Je vous suis très reconnaissant, ainsi qu'à votre personnel, de me donner l'occasion de me prononcer sur les disparitions très troublantes des 10 dernières années au pays et au-delà de nos frontières, comme celle que ma famille et moi avons vécue.
    Ma famille et moi sommes victimes d'une énorme atteinte à la vie privée. Je ne pense pas que ce soit un hasard qu'au cours de la dernière année, alors qu'approche la mise au point finale de ma technologie qui permet de transformer divers types de matière en énergie, le programme de surveillance dont ma famille, mes enfants et ma vie font l'objet est devenu omniprésent compte tenu du mépris total de nos droits et de notre vie privée tant à l'intérieur qu'à l'extérieur de notre domicile.
    J'ignore si c'est une tribune appropriée; je vous laisse le soin de trancher. Le responsable de ce programme, peu importe de qui il s'agit, a fait en sorte qu'il est impossible pour moi de marcher, de faire du vélo, de conduire ou de prendre l'avion où que ce soit sur le continent ou à l'étranger sans être accosté par toutes sortes d'aéronefs de taille différente. De nombreux témoins corroborent ces activités. J'ai aussi des enregistrements vidéo. J'ai pris en note des vecteurs, des altitudes, des positions et des périodes de vol des hélicoptères orange impliqués, et ils ne représentent qu'une sorte d'aéronef parmi une douzaine qui me traque d'une façon qui transcende la surveillance au point de devenir une perversion hors de contrôle.
    J'ai accepté la situation sans sourciller, sans jamais vraiment savoir qui est à la source de cette calamité, et j'ai évidemment peur de parler par crainte de répercussions évidentes. C'est la première fois que je divulgue publiquement cette information.
    Je peux vous dire que je n'arrive pas à m'endormir la nuit sans entendre, à 0 h 45, le dernier passage d'un aéronef volant à basse altitude au-dessus de ma maison, à Don Mills. La fin de semaine, je ne peux pas me rendre avec ma famille dans des aires de conservation sans être talonné dans la forêt par des hélicoptères orange, des Cessna, toutes sortes d'avions à réaction et des turbopropulseurs volant à basse altitude qui sont toujours en ma présence, et qui n'ont évidemment aucune raison d'être là.
    Au chalet de ma famille, au milieu de nulle part, nous n'arrivons jamais sans qu'un Cessna ne nous survole, ou un grand appareil Aurora, des hélicoptères militaires ou même des avions à réaction — je sais que c'est difficile à croire. Ces appareils volent à basse altitude, ce qui a mené les autres propriétaires de chalet à appeler directement l'armée pour lui dire de mettre fin à cette incroyable nuisance perturbatrice.

  (1755)  

    Il vous reste deux minutes.
    Je vais conclure rapidement. Je vous remercie encore du temps que vous m'accordez. Je ne m'étais pas préparé pour parler ce soir, mais j'ai pensé qu'il convenait de saisir l'occasion.
    Je peux dire que cette mauvaise utilisation de fonds publics est sur le point d'atteindre son plus haut point, même si c'est sans aucun doute également financé par de très grosses fortunes.
    Cet été, lorsque mon fils de 13 ans regardait un autre hélicoptère qui suivait notre voiture à basse altitude et qu'il m'a dit qu'on allait me tuer, je peux dire que j'ai eu peur un instant pour ma vie et le bien-être de ma famille. Ils savent exactement où je me trouve maintenant. Cela ne fait aucun doute.
    Mesdames et messieurs, notre système ne fonctionne pas et nuit sérieusement aux avancées technologiques et aux débouchés socioéconomiques. Je serais très reconnaissant de toute aide visant à enquêter là-dessus ou à faire un suivi de la situation.
    Merci. Je suis prêt à coopérer avec tous les organismes pour établir quel est l'objet de ce programme qui bat maintenant son plein.
     Merci, monsieur Poulos. Nous pourrions peut-être en parler après la séance en tant que dossier distinct.
    Ce soir, il serait probablement mieux que vous nous parliez d'un incident ou d'un cas précis. Je serai ravi de demander au personnel de mon bureau de vous aider à cet égard, mais il serait probablement utile que nous nous en tenions ce soir aux questions politiques.
    Allez-y, madame Watts.
    J'allais dire que nous pourrions accepter un mémoire, monsieur le président.
    Certainement. Nous pouvons également accepter un mémoire. Nous en serions ravis.
    Merci.
    Le prochain intervenant est Adam Smith.
    Bonjour. Merci beaucoup de me donner de votre temps et de tenir ces consultations publiques.
    Le projet de loi C-51 est fort probablement inconstitutionnel. Ce projet de loi omnibus dont le débat a été interrompu viole indéniablement la Charte des droits, et il a été adopté extrêmement rapidement pour une démocratie arrivée à maturité. Il regorge de problèmes, et beaucoup d'experts en sécurité conviennent qu'il n'est pas nécessaire pour attraper ou poursuivre des terroristes. Je suis donc stupéfait qu'il ne soit pas tout simplement aboli. Plutôt que de sévir contre le terrorisme, il ouvre tout grand la porte à des abus potentiels, à des atteintes à la vie privée et à l'espionnage de Canadiens. C'est la définition d'un système orwellien: légiférer au moyen du crime et faire du Canada un État de surveillance policière secrète.
    Le G20 de Toronto nous a appris à quel point il est facile de bafouer nos droits, non seulement en recourant à des lois archaïques et recyclées comme la Loi sur la protection des ouvrages publics de l'Ontario, mais aussi en laissant la police agir illégalement lorsqu'elle va au-delà de ce qu'elle peut demander à un citoyen, qu'elle détient illégalement des personnes et qu'elle arrête des gens en invoquant des prétextes.
    On a parlé plus tôt de ce que les différents gouvernements feraient s'ils étaient investis des pouvoirs conférés par le projet de loi C-51. Vu le mépris du gouvernement Harper pour la démocratie et les manifestations, il n'est pas étonnant qu'il ait créé la loi. Si Harper avait gagné les dernières élections, nous n'aurions pas cette discussion. Nous ferions l'objet d'une enquête parce que nous abordons le sujet.
    Le projet de loi C-51 a été adopté à toute vapeur dans un climat de peur et d'intimidation: la peur du terrorisme à la suite de l'attentat à la voiture au Québec et de la fusillade à Ottawa, qui ont eu lieu à point nommé; et l'intimidation dans le sens où ceux qui s'opposaient au projet de loi craignaient de passer pour des sympathisants du terrorisme qui nuisent à la sécurité publique. Si je ne m'abuse, le jour de la fusillade, on était censé débattre au Parlement du projet de loi C-51. L'adoption du projet de loi C-51 dans un tel climat de peur et de contrainte est une réaction impulsive qui rappelle les listes d'interdiction de vol trop rigoureuses et l'envoi de Canadiens à l'étranger où ils ont été torturés en dépit de preuves peu convaincantes.
    Tout cela néglige un simple fait. Lorsqu'on tient compte des cas rendus publics, on constate que la GRC représente la force la plus courante de radicalisation de Canadiens et qu'elle est responsable de la plupart des activités terroristes au pays. Les 18 de Toronto, le projet d'attentats à la bombe visant des trains de VIA Rail, la machination prouvée concernant un attentat qui devait avoir lieu pendant la fête du Canada et le coup monté de la GRC pour accuser Wiebo Ludwig d'attentats terroristes à l'explosif montrent clairement les antécédents de machination axée sur le terrorisme de la GRC et son influence sur la radicalisation par l'entremise de ses informateurs rémunérés qui cherchent à mettre de la pression sur leurs victimes.
    Le profil du tireur d'Ottawa cadre parfaitement avec celui d'une personne radicalisée: un jeune homme musulman en colère et à faible revenu qui a des antécédents de troubles mentaux et de toxicomanie. La GRC choisit les plus susceptibles d'être radicalisés. Le moment où la fusillade d'Ottawa a eu lieu dans le cadre du processus d'adoption du projet de loi C-51 n'est pas la seule chose étrange. Il est également curieux qu'un criminel reconnu ait pu obtenir une arme d'épaule et que, peu après, la GRC ait illégalement supprimé le registre des armes d'épaule. On ne nous a toujours pas dit d'où venait l'arme.
    Le gouvernement est également coupable de radicalisation compte tenu de ses actions sur la scène internationale. Le tireur d'Ottawa a admis, dans sa propre vidéo, que le bombardement de la Syrie par notre gouvernement était un facteur important dans sa décision de commettre l'attentat.
    Il semble n'y avoir aucune preuve ni aucune étude qui indique que les dispositions exagérées du projet de loi C-51 vont effectivement aider à intercepter des terroristes. De quelle façon cette mesure législative aurait-elle prévenu l'attentat à la voiture au Québec ou la fusillade d'Ottawa? Elle ne s'attaque aussi aucunement aux causes de la radicalisation.
    Pour terminer, s'il me reste un peu de temps, je tiens seulement à vous dire que des formulations vagues comme « entraver le fonctionnement d'infrastructures essentielles » doivent être précisées. Pour qui ces infrastructures sont-elles essentielles? Le sont-elles pour le public et le fonctionnement de la société, comme les usines de filtration d'eau, ou pour les revenus d'une entreprise privée, comme une société de pipeline? Par définition, un oléoduc qui achemine du pétrole brut qui sera raffiné et vendu à l'extérieur du Canada n'est pas une infrastructure essentielle.
    Il n'y a rien de bon dans le projet de loi C-51. Il devrait être abrogé dans sa totalité.
    Merci de votre attention.

  (1800)  

    Merci beaucoup.
    Les membres du Comité ont-ils des questions.
    Roberto De Luca, vous avez la parole.
    Merci de me donner l'occasion de m'adresser au Comité. Je m'appelle Rob De Luca. Je comparais aujourd'hui en tant que citoyen inquiet, mais aussi à titre d'avocat de l'Association canadienne des libertés civiles, qui est une association nationale à but non lucratif qui s'efforce de protéger les libertés civiles depuis plus de 50 ans.
    L'une de nos principales préoccupations concernant la Loi antiterroriste de 2015, communément appelée projet de loi C-51, est le manque de nouveaux mécanismes de reddition de comptes pour surveiller les nouveaux pouvoirs conférés à l'État. À ce sujet, nous soutenons le dépôt par le parti au pouvoir du projet de loi C-22, qui propose de créer un comité du renseignement de sécurité nationale formé de parlementaires pour surveiller les activités classifiées de sécurité et de renseignement et faire rapport des conclusions au premier ministre.
    J'ai été heureux de constater cet après-midi qu'on parlait plus souvent du projet de loi C-22 que ce à quoi je m'attendais. Je veux formuler de brèves observations au sujet de cette mesure législative.
    L'une de nos préoccupations concernant le projet de loi C-22 dans sa forme actuelle est que même s'il représente un pas dans la bonne direction, ce n'est pas suffisant pour remédier au manque de mécanismes de reddition de comptes dans le cadre de sécurité nationale du Canada. Premièrement, il faut intégrer ces mécanismes aux enquêtes des organismes d'examen existants et, idéalement, créer un organisme d'examen consolidé composé d'experts; deuxièmement, il faut mettre sur pied un organisme réellement indépendant de surveillance des lois nationales en matière de sécurité; et, troisièmement, il faut élaborer un mécanisme indépendant de surveillance et d'examen de l'Agence des services frontaliers du Canada pour aller au-delà de la surveillance et de l'examen effectués par le comité formé de parlementaires.
    Nous sommes aussi préoccupés par certaines des restrictions imposées au nouveau comité de parlementaires. Plus précisément, le projet de loi C-22 donne au gouvernement le pouvoir de mettre fin aux enquêtes du comité, à une surveillance ou un examen indépendant, ou le pouvoir de refuser de fournir de l'information lorsqu'on juge que cela « porterait atteinte à la sécurité nationale ». J'ai en tête les alinéas 8b) et 16(1)b) du projet de loi C-51.
    Ces dispositions posent entre autres problème parce que ces décisions ne peuvent pas être examinées par un tribunal ou dans le cadre d'un autre processus de règlement des différends. Ces restrictions très vastes du pouvoir du comité formé de parlementaires semblent particulièrement déplacées parce que le comité sera soumis à des mesures considérables de sécurité nationale, comme l'interdiction de publier des renseignements classifiés.
    Mes questions ou mes propositions au sujet de cette question précise visent deux objectifs: déterminer si le Comité et le gouvernement du Canada sont prêts à reconsidérer les importantes restrictions imposées à l'organisme de surveillance en matière de sécurité nationale; et, à défaut de quoi, déterminer si le Comité ou le gouvernement du Canada est disposé à envisager que les tribunaux, une entité spécialement désignée ou un organisme d'examen possède le pouvoir de revoir une décision du gouvernement de mettre fin à des enquêtes du comité ou de refuser de fournir des renseignements pertinents.
    Merci.

  (1805)  

    Merci.
    Est-ce qu'il y a des questions?
    J'ai dit précédemment que l'Association canadienne des libertés civiles avait comparu devant le Comité au sujet d'un autre projet de loi, et que je m'attendais à ce qu'elle vienne de nouveau nous offrir un témoignage utile. Merci beaucoup.
    M. Rob De Luca: Je vous remercie de votre temps.
    Le président: Brenda McPhail.
    Vous avez bien vu, puisque l'Association canadienne des libertés civiles comparaît encore en ce moment.
    Des voix: Oh, oh!
    Mme Brenda McPhail: Je m'appelle Brenda McPhail, et je suis directrice du projet relatif à la vie privée, à la technologie et à la surveillance de l'ACLC.
    Dans le livre vert, à la page 6, on dit que la Charte canadienne des droits et libertés « prévoit une norme minimale de conduite par les gouvernements au Canada », et également — ce qui nous a énormément fait plaisir — que les normes minimales peuvent ne pas suffire, dans certains cas, à garantir la confiance du public concernant la sécurité nationale. Nous sommes tout à fait d'accord, et c'est ce qui explique que quand nous nous réunissons ici pour discuter des aspects problématiques de la Loi antiterroriste de 2015, le plus gros problème de tous, c'est qu'il y a des éléments précis de la Loi qui enfreignent la Charte canadienne des droits et libertés.
    Notre collègue Tom Henheffer a comparu devant vous cet après-midi, et l'ACLC s'est associée à CJFE, Journalistes canadiens pour la liberté, pour contester les dispositions de ce qui était le projet de loi C-51 en vertu de la Charte. Cela est en suspens, en attendant les résultats des présentes consultations.
    Nous avons cinq sujets de préoccupation. Nous sommes troublés par le ton du livre vert, qui semble franchement essayer de justifier bon nombre des aspects problématiques du projet de loi, en particulier pour ce qui touche à la communication de renseignements, facteur que notre commissaire à la protection de la vie privée a souligné comme étant préoccupant; par les modifications à la LIPR qui visent à diminuer les renseignements à l'avocat spécial dans les cas de certificats de sécurité; par les nouveaux pouvoirs du SCRS; et par les mesures de sécurité inadéquates entourant la liste d'interdiction de vol. De plus, même si nous reconnaissons et apprécions beaucoup la déclaration du gouvernement selon laquelle il va veiller à ce que toutes les activités du SCRS soient conformes à la Charte, vous demandez quand même dans le livre vert si les gens pensent que la loi devrait être modifiée pour qu'il soit clair que les mandats du SCRS ne doivent jamais enfreindre la Charte.
    Un de vos témoins a dit, cet après-midi, en réponse à une question sur les problèmes du projet de loi C-51, que nous n'avons pas à nous en faire puisque ces problèmes feront l'objet de contestations en cour et que c'est là qu'ils seront résolus. Sauf le respect que je vous dois, et malgré le fait que l'ACLC fait une bonne part de son travail de défense en cour, nous aimerions beaucoup mieux que le projet de loi soit conforme dès le début, ayant été amélioré par le présent gouvernement avec les conseils de votre Comité.
    Voici notre question aujourd'hui. En plus de tenir compte des commentaires du public obtenus dans le cadre du présent processus de consultation, est-ce que le Comité et le gouvernement sont résolus à réaliser un examen législatif réel et approfondi de la loi en prêtant attention aux questions relatives à la Charte? Dans l'affirmative, comment cela va-t-il se produire précisément, et comment rendra-t-on cela public?

  (1810)  

    M. Mendicino va prendre la parole. Je veux juste rappeler au groupe que nous sommes un comité parlementaire et que nous ne pouvons par conséquent pas répondre pour le gouvernement. Nous pouvons répondre pour le Parlement.
    Oui, et il est à espérer que notre présence ici témoigne du mandat du Comité de s'engager dans des consultations publiques très robustes sur le cadre de la sécurité nationale. Nous vous remercions, vous et tous ceux qui vous ont précédée, pour vos observations jusqu'à maintenant.
    Madame McPhail, avez-vous des recommandations normatives précises, concernant la communication d'information? J'ai pensé vous demander un exemple de cela.
    Dans le cadre de notre contestation, ce qui nous préoccupe de la communication d'information, c'est la portée excessive, les définitions floues, et l'absence de garanties procédurales servant à veiller à ce que les intérêts de nature privée des Canadiens soient convenablement protégés. Je pense que nos préoccupations se reflètent dans le récent rapport du commissaire à la protection de la vie privée du Canada, qui a en fait enquêté et découvert qu'il manque des garanties procédurales concernant les directives données au personnel de première ligne, par exemple.
    Le commissaire à la protection de la vie privée est venu témoigner devant le Comité, il y a peut-être une semaine. Je ressens un peu l'effet du décalage horaire et je m'en excuse, mais nous avons traversé plusieurs fuseaux horaires, alors mes souvenirs ne sont pas aussi précis que je le voudrais. L'une des choses dont il a parlé dans sa déclaration, c'est le seuil de communication de l'information entre les divers organismes de sécurité et autres organismes de l'appareil gouvernemental fédéral.
    Avez-vous quelque chose de particulier à dire à propos de cet aspect de la communication d'information?
    Je crois que le seuil est une nécessité en cas de danger réel; autrement dit, le seuil relatif à la communication d'information devrait être relativement élevé. Pour un processus qui est à ce point fondamentalement envahissant, il faudrait qu'on juge nécessaire et non « possiblement nécessaire » de communiquer l'information.
    Merci beaucoup.
    Teri Degler.
    Bonjour. Je vous remercie de l'occasion que vous me donnez. Je suis rédacteur, journaliste et membre du Writers' Union of Canada, mais je vous parle à titre personnel.
    J'ai entendu Tom Henheffer parler, précédemment, et je suis d'accord sur chacune des choses qu'il a dites au nom des Journalistes canadiens pour la liberté d'expression. J'ai trouvé son exposé excellent et si bien fouillé, et j'espère que vous aurez tous l'occasion de le lire afin de vous imprégner de ce qu'il a dit.
    Mes préoccupations sont très semblables. Nous nous inquiétons des vastes pouvoirs exprimés en termes vagues qui sont donnés aux organismes de sécurité nationale comme le SCRS et les forces policières. En tant que rédacteurs, nous nous inquiétons particulièrement des aspects de la définition générale de terrorisme qui font que, d'après moi, nous pourrions être perçus comme faisant la promotion du terrorisme alors que nous ne faisons qu'en faire état. Je sais que cela risque peu d'arriver, et je sais que le gouvernement dit qu'il n'accusera jamais personne de cela, mais c'est trop vague.
    Comme on l'a dit plus tôt dans la journée, l'un des problèmes est que vous pouvez rédiger un article qui, en fait, critique une organisation terroriste, mais que cela peut inciter quelqu'un à la violence. Où sont tracées les lignes, et qui détermine cela? Je pense qu'il faut vraiment que vous vous arrêtiez à cela dans la réforme de cette loi.
    J'espère que ce sera une réforme de la Loi antiterroriste. Nous parlons sans arrêt d'une consultation sur la sécurité nationale — c'est ainsi que vous l'avez présentée ce soir —, mais je pense que nous sommes nombreux à parler de la réforme de ce qui était le projet de loi C-51. Nous aimerions une réforme de cela. Ou, comme le réclament bien des organisations de rédacteurs, débarrassez-vous-en et recommencez à zéro.
    L'autre grande préoccupation que nous avons est la criminalisation possible des protestations publiques, en particulier quand il y a entrave du « fonctionnement d'infrastructures essentielles ». Je sais que le projet de loi précise que « les activités de défense d’une cause, de protestation, de manifestation d’un désaccord ou d’expression artistique » sont exclues, mais encore là, on ne sait trop qui détermine cela. On peut très facilement imaginer qu'un gouvernement décide que la manifestation d'un désaccord est en fait une forme d'entrave. Ces choses sont très vagues. Au mieux, nous aimerions vraiment que ces dispositions soient resserrées, si elles ne sont pas simplement supprimées.
    Je vais vous donner un exemple rapide de la façon dont cela pourrait se produire. Je ne sais pas si vous connaissez Amy Goodwin. Elle est journaliste et présentatrice pour Democracy Now. Elle faisait un reportage sur les manifestations contre le pipeline au Dakota du North, où se trouvaient en grand nombre des Autochtones américains, et elle a filmé ce qui se passait. Elle s'est montrée très critique des forces de sécurité dans son reportage.
    Quelques semaines plus tard, elle a été accusée d'intrusion. Ils ont ensuite décidé que cela ne fonctionnerait pas, alors elle a été accusée d'avoir pris part à une émeute. Ces accusations ont été portées par le Bureau of Criminal Investigation du Dakota du Nord. Les lois sont très différentes, mais ce n'est pas parce que les lois sont très différentes. Ce qui est important ici, c'est que c'était un pipeline, qu'il y avait cette journaliste, et que tout à coup, on a porté des accusations contre elle. Lundi, on a abandonné les accusations, aussi bien pour l'intrusion que pour la participation à une émeute.

  (1815)  

    Malheureusement, je vais devoir vous interrompre.
    D'accord. Ce sont en gros nos préoccupations. Je vous remercie beaucoup.
    Merci.
    Matthew Currie.
    Bonjour. Je m'appelle Matthew Curie. Je représente une organisation ici, à Toronto, qui s'appelle « Stop C-51: Toronto ». J'ai des cartes professionnelles. Vous pouvez m'en demander après, si vous en voulez.
    Ce groupe fait partie d'un mouvement pancanadien en opposition à ce qui est maintenant appelé la Loi antiterroriste, mais qui est couramment appelé le projet de loi C-51. Mes propos d'aujourd'hui au sujet de la sécurité nationale vont principalement se centrer sur les problèmes que comporte cet ensemble de textes législatifs et sur la façon dont ils peuvent être corrigés.
    Comme vous êtes nombreux à le savoir, l'organisation de l'opposition populaire à ces dispositions législatives s'est amorcée au moment de son dépôt, en 2016. À compter de ce moment, l'opposition a pris de l'ampleur au point où la très grande majorité des Canadiens s'y opposent, y compris certains membres du Comité. Je ne sais pas s'ils sont tous ici. Je remercie ceux qui ont exprimé leur opposition ou qui ont travaillé contre ce projet de loi.
    Compte tenu de cette vaste opposition, nous croyons fermement que la loi devrait être abrogée et remplacée par des mesures législatives mieux dosées qui appuient les droits démocratiques des Canadiens. Toutefois, si le gouvernement choisissait d'ignorer — je tiens à le répéter — les souhaits de la très grande majorité des Canadiens, de même que les avis de dizaines de juges, d'avocats spécialisés en droits de la personne et en droit constitutionnel,  d'universitaires et de la Commission des droits de l'homme des Nations Unies, cette loi devrait au moins être mise en suspens jusqu'à ce qu'il soit possible de la modifier convenablement.
    Le Parti libéral, quand il était dans l'opposition, avait reconnu que la loi comportait des lacunes fondamentales. Dans ce contexte, maintenant qu'il forme le gouvernement, il devrait en interrompre l'exécution — parce que la loi est en ce moment appliquée — jusqu'à ce que les aspects menaçants qu'elle comporte en soient retirés. Cependant, si le gouvernement choisit d'ignorer l'avis de la grande majorité des Canadiens, il faut accorder la priorité à ce qui suit.
    Premièrement, il faut abroger les articles 12.1 et 12.2 de la Loi sur le SCRS. C'est le nouveau pouvoir conféré au SCRS de prendre des mesures de perturbation en cas de menaces perçues à la sécurité. Le SCRS a été créé spécialement pour séparer le renseignement des aspects cinétiques de l'exécution des lois. Il faut que cela soit maintenu.
    Deuxièmement, il faut abroger les articles 83.221, 83.222 et 83.223 du Code criminel. L’interdiction de fomenter la perpétration d’infractions de terrorisme en général est vague et représente un délit d’expression ou d’opinion. Quelqu’un en a parlé tout à l’heure. C’est inconstitutionnel et franchement absurde. Les lois floues comme celle-ci — nous le savons — peuvent servir à cibler des personnes qui ont des opinions politiques impopulaires, et même si votre gouvernement n’a aucune intention de faire un usage abusif de cette loi, le contexte politique et les gouvernements changent.
    Excusez-moi. Je fais vous demander de ralentir votre débit, pour les interprètes.
    J’ai ce problème depuis toujours; c’était d’ailleurs écrit sur mon bulletin de première année.
    En tant que Canadiens, nous avons le droit d’être aussi bizarres et criards que nous le voulons, sans que personne n’intervienne.
    Troisièmement, il faut une disposition de temporisation, pour une période de trois ans de préférence. L’une des choses les plus troublantes de cette loi, c’est la perpétuité. La loi devrait automatiquement expirer à moins que le Parlement discute de chaque article et l’adopte de nouveau. Il s’agirait d’un examen automatique qui garantirait que nous n’avons pas de mauvaises lois qui subsistent à cause de l’inertie.
    Quatrièmement, il faut convenablement définir « menace à la sécurité nationale ». Nous avons entendu cela encore ce soir. En vertu de cette loi, les activités qui représentent une menace, par exemple, pour « la stabilité économique ou financière du Canada » ou « les infrastructures essentielles », peuvent être considérées comme des menaces à la sécurité. Cette définition floue signifie, par exemple, que le SCRS, en vertu de ses nouveaux pouvoirs de perturbation, peut perturber une manifestation, ce qui ne devrait pas être possible.
    Ensuite, il faut convenablement définir les termes « terreur » et « terrorisme ». L’utilisation actuelle de ces termes dans le projet de loi C-51 est floue, et cela constitue une menace pour la liberté démocratique.
    Enfin, il faut définir « perturbation ». En ce moment, les pouvoirs de perturbation qui sont conférés ne sont limités que dans le sens où ils ne peuvent servir à mutiler, tuer ou violer une personne. Cela laisse la possibilité d’une foule de choses affreuses auxquelles peuvent s’adonner le SCRS, la GRC et les autres organismes d’application de la loi.

  (1820)  

    Je vais vous demander de conclure. Vous aviez environ cinq minutes, et vous en êtes à trois minutes et demie, alors c’est plutôt bon.
    Merci beaucoup.
    Nous espérons obtenir aussi un mémoire de votre part.
    En fait, j’en ai déjà soumis un.
    Très bien.
    Enfin, je veux parler des consultations en général, et c’est mon dernier point.
    Pour bon nombre des personnes avec lesquelles je fais de l’organisation et auxquelles je suis associé, et pour le public en général, les consultations comme celle-ci sont un subterfuge conçu pour apaiser le public et ne donnent lieu à aucun geste significatif. Bien des gens, en fait, sont absents ce soir parce qu’ils doutent de la légitimité de tels événements. C’est l’héritage du gouvernement Harper. C’est malheureusement de cela que vous avez hérité. Nous n’avons pas encore vu de changement important avec l’actuel gouvernement. Je vous mets au défi de changer les choses.
    En fait, nous avions prévu un coup d’éclat pour ce soir, avec une bannière, des chants et tout cela. Nous allions faire beaucoup de bruit et nous montrer insupportables. Cependant, à cause de la culture de la peur déjà profondément ancrée dans notre société à cause du projet de loi C-51, il n’a pas été possible de trouver des gens qui se sentaient assez sûrs pour le faire — pas parce qu’ils craignaient la procédure qui leur serait imposée, mais bien parce qu’ils craignaient de se retrouver sur une liste. Je vous prie de travailler à changer cela.
    Merci.
    Je tiens à faire quelques précisions pour les derniers intervenants. Le ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile a comparu, déjà, devant le Comité, et il a indiqué deux choses.
    Premièrement, huit éléments du projet de loi omnibus et du projet de loi C-51 doivent être immédiatement modifiés. Il nous les a énumérés, et vous les trouverez dans ses notes d’allocution. Il a aussi indiqué qu’il y avait quelques autres aspects qu’il veut étudier, et il a demandé au Comité d’écouter les Canadiens pour savoir ce qu’il y a d’autre à modifier. Il faudra juger l’arbre à ses fruits, au cours des quelques années à venir.
    Le Comité est résolu à faire deux choses: veiller à la sécurité des Canadiens et garantir nos droits civils et nos droits de la personne. Je pense que tous les partis s’entendent pour dire que leurs méthodes pour arriver à ces fins diffèrent, mais il n’y a pas un membre du Comité qui ne souhaite pas la sécurité du public et la garantie de nos droits civils et de nos droits de la personne.
    Tout ce que je peux dire, c’est que nous avons commencé, que nous sommes sur la bonne voie et que nous sommes contents que vous soyez là.
    Nous vous surveillons.
    Merci.
    Je soupçonne qu’il va falloir plusieurs années pour évaluer tout cela. Cette année, nous avons au programme quelques éléments très rapides à résoudre. Nous avons déjà déposé le premier projet de loi à la Chambre. C’est le projet de loi C-22. Je ne peux parler au nom du gouvernement, mais généralement, le gouvernement nous a fait savoir qu’il est contre les projets de loi omnibus. Chaque projet de loi sera donc déposé individuellement. Ce n’est pas aussi rapide, mais le travail va se faire de façon continue.
    Une voix: [Note de la rédaction: inaudible]
    Des voix: Bravo!
    Le président: Vous aurez l’occasion de prendre la parole. Pour le moment, la parole est à M. Ernst.
    Fred Ernst.
    Premièrement, je tiens à remercier infiniment le Comité d’avoir pris le temps de venir à Toronto. Il y a très longtemps que j’ai vu le Comité à Toronto. En fait, je n’ai jamais vu le Comité à Toronto, alors je vous remercie beaucoup. C’est un enjeu très important.
    Je vais parler un peu de moi. J’ai fait de la recherche d’intérêt public pendant 30 ans. Pendant les quatre dernières années, j’ai concentré presque exclusivement ma recherche sur la sécurité. Avant de poursuivre, mesdames et messieurs, j’aimerais vous présenter ma mère, qui a 81 ans. Elle s’appelle Elizabeth Ernst, et elle va vous envoyer un mémoire qui va vraisemblablement vous consterner tous autant que vous êtes. Nous n'avons pas le temps de parler de cela pendant mon exposé.
    Je vais aborder le sujet sans détour. Je suis le fondateur du National Security Oversight Institute of Canada. La recherche que je fais pourrait alimenter le Comité, franchement, sur des questions se rapportant aux enjeux pour lesquels il cherche l’apport de la société civile. J’étudie cette question depuis des années. J’ai écrit des rapports sur les méthodes extrajudiciaires, y compris la perturbation, alors je vous en prie, pensez à m’inviter comme témoin pour toute audience à venir qui se déroulerait à Ottawa.
    Voici le gros problème. J’ai soulevé ce problème au sujet du projet de loi C-51 déposé le 30 janvier 2015, presque immédiatement après cela, et je vais vous dire exactement quel est le problème. C’est un document que j’ai obtenu en vertu du droit d’accès à l’information et que j’ai ensuite transmis à plusieurs députés et membres des médias. On en a même parlé dans le Toronto Star. Ce rapport est mentionné dans l’introduction du livre vert.
    On n’en donne pas le titre, mais il est mentionné à la page 21. Au quatrième paragraphe, on dit qu’un rapport rendu public en 2010 par le CSARS recommandait que « le SCRS sollicite une orientation et des directives au sujet de la réduction de la menace ». Voici le rapport. Il s’agit là d’une interprétation inadéquate du rapport. Même le titre du rapport va à l’encontre de ce qu’il contient. Le titre est « Recours à la perturbation par le SCRS pour contrer les menaces envers la sécurité nationale ». Il s’agit de l’étude 2009-05 du SCRS. J’ai pu l’obtenir du CSARS en vertu de l’AIPRP, car naturellement, vous ne pouvez rien obtenir du SCRS.
    Dans ce rapport, mesdames et messieurs, il est clairement indiqué qu’on recourt à la perturbation au Canada depuis bien avant le projet de loi C-51, et que le SCRS participait à cette perturbation. En fait, le SCRS faisait de la perturbation. Je trouve enrageant d’entendre… pas l’actuel processus, mais certains des témoins qui se présentent devant vous à Ottawa, qui représentent le SCRS, et qui viennent vous dire que le SCRS vient de commencer cela, la perturbation, à la suite du projet de loi C-51, alors que c’est complètement faux.

  (1825)  

    Je vais vous demander de conclure. Vous avez eu quatre minutes.
    La conclusion de cela, c’est que je demande avec respect au Comité d’étendre la portée de son enquête afin d’examiner le recours à la perturbation avant et après le projet de loi C-51.
    C’est ce que je voulais vous dire. Merci.
    Des voix: Bravo!
    Merci.
    Ewa Infeld.
     Bonjour. Je suis une chercheure universitaire en mathématique et en sécurité de l’information.
    Vous faites cela depuis un bon moment, alors je suis sûre que vous avez entendu de nombreux arguments très éloquents pour l’abrogation du projet de loi C-51 . J’aimerais vous dire que cela ne suffit pas, en raison de la communication d’information à l’échelle internationale. Tant que le Canada est membre de l’alliance du Groupe des cinq, les agences canadiennes peuvent utiliser l’information obtenue du GCHQ sans que les citoyens canadiens puissent imposer de limites. Nous pouvons bien passer la journée à discuter; cela ne mènera à rien.
    L’autre côté du problème, c’est que si vous êtes membre de l’alliance du Groupe des cinq, en cette époque d’une surveillance digne des séries policières, vous devenez complice de la NSA, de la GCHQ et d’autres agences qui violent les droits des Canadiens dans le cadre de ce qui semble être un problème de souveraineté. Vous devenez aussi complice de ces agences concernant la violation des droits de toute autre personne dans le monde.
    Je vais y aller d’un petit commentaire professionnel. Le CST a indiqué très vigoureusement, dernièrement, qu’ils ne veulent pas affaiblir les systèmes. Ils veulent établir des systèmes sûrs pour tout le monde, plutôt que d’adopter une technologie clandestine. Cela semble formidable. Intégrons cela dans les mesures législatives. Pas de systèmes clandestins.
    Merci.
    Des voix: Oh, oh!

  (1830)  

    Merci.
    Richard Hudler, c’est à vous.
    À la Marche de la fierté gaie qui a suivi et souligné l’adoption d’une loi qui employait les mots « orientation sexuelle » dans le Code des droits de la personne de l’Ontario, on a demandé à deux groupes de mener la marche. L’un des groupes était la Coalition for Lesbian and Gay Rights in Ontario, la CLGRO, soit le groupe qui a précédé notre groupe, Queer Ontario. L’autre groupe était le Right To Privacy Committee. Cela symbolise l’importance accordée au droit à la vie privée dans nos communautés.
    Réaliser cela malgré l’incroyable résistance a été le grand objectif de la CLGRO pendant 12 ans. Cela nous a permis de faire des pressions et, au bout du compte, d’obtenir une reconnaissance à l’échelon fédéral dans la Charte des droits et libertés. La résistance à ces réalisations au sein de la société canadienne demeure. Nous voyons le projet de loi C-51 comme un exemple de cette résistance et des efforts déployés pour miner la Charte des droits et libertés. Nous comprenons que le gouvernement doit protéger le public canadien des menaces de terrorisme, mais nous gardons à l’esprit qu'un des grands objectifs de ces menaces est de miner notre mode de vie et de détruire les droits et libertés pour lesquels nous nous sommes si longtemps battus.
    Les éléments du projet de loi C-51 qui minent la Charte des droits et libertés contribuent à soutenir les objectifs des terroristes. Nous prions le gouvernement d’abroger la loi créée par le projet de loi C-51 et de veiller à ce que les mesures législatives proposées pour protéger le public canadien des menaces terroristes protègent aussi les droits établis par la Charte canadienne des droits et libertés.
    Je vous remercie de m’avoir écouté.
    Des voix: Bravo!
    Merci beaucoup.
    Je vais faire savoir au Comité que nous avons déjà reçu un mémoire de votre groupe. Dès qu’il sera traduit, je le ferai distribuer aux membres du Comité.
    Merci.
    Jens Porup, c’est à vous.
    Bonjour. Merci de me donner l’occasion de m’adresser au Comité.
    Je m’appelle J.M. Porup. Je suis un journaliste spécialisé en sécurité nationale et en cybersécurité, ici à Toronto. J’ai couvert les actes répréhensibles du CST pour CBC/Radio-Canada, en particulier la façon dont les failles de sécurité « jour zéro » compromettent la sécurité des Canadiens. Au début de l’année, j’ai dévoilé dans Ars Technica comment le programme SKYNET de la NSA cause la mort de milliers d’innocents à cause d’un algorithme d’apprentissage automatique mal conçu. Mon travail a été rendu public par CBC, The Economist, le Christian Science Monitor, Ars Technica, VICE Motherboard, le Daily Dot et autres.
    Pendant de nombreuses années, j’ai fait des reportages en Colombie sur la guerre civile. L’année prochaine, je vais me joindre à la Berkman Klein Assembly de l’Université Harvard. Le Berkman Klein Center est sans aucun doute le plus important groupe de réflexion dans le monde en matière de cybersécurité. Les points de vue dont je vous fais part aujourd’hui sont les miens.
    Pourquoi suis-je ici? La cybersécurité change tout. La technologie dicte le droit constitutionnel. Permettez-moi de répéter ceci: la technologie dicte le droit constitutionnel. La surveillance de masse et le piratage ciblé entravent la démocratie et redistribuent les pouvoirs aux agences du renseignement.
    Que nous arrive-t-il, alors? Le Canada fait face à une crise constitutionnelle. Les pouvoirs qu'ont accaparés le SCRS, le CST et la GRC de concert avec les partenaires du Groupe des cinq représentent une attaque directe contre les pouvoirs du Parlement, contre la démocratie canadienne et contre la souveraineté canadienne. La question que vous devez vous poser, c’est: Que devez-vous faire pour régler cela?
    Moi, en tant que journaliste, je vais continuer d’enquêter et de faire rapport sur les crimes que ces agences commettent au quotidien. Je n’ai pas le choix. Parce que j’exerce mes droits en vertu de la Charte, j’ai été personnellement piraté, traqué et harcelé, et on a cherché à m’empêcher de faire du journalisme ici même au Canada. Si le Parlement ne peut ou ne veut pas cesser ce genre d’abus commis par les agences, il nous incombe alors à nous, la presse, le quatrième pouvoir, de défendre la démocratie au Canada. Si vous ne faites pas votre travail, nous, la presse, allons le faire pour vous.
    Merci.

  (1835)  

    Madame Sharly Chan sera notre prochaine intervenante. Allez-y, madame.
    Merci d’avoir organisé cette séance et de permettre aux citoyens de venir et de participer aux discussions sur un sujet aussi important.
    Mes préoccupations concernent la Loi sur la communication d’information incluse dans la Loi antiterroriste.
    Le livre vert soulève la question des périodes de conservations des données générales dans le contexte du secteur des télécommunications, mais ne dit rien au sujet de la période de conservation des données en vertu de cette Loi. À ma connaissance, rien n’est dit sur ce qu’il advient des données une fois qu’elles ont été communiquées. Sont-elles conservées ou détruites après utilisation?
    À mon avis, les données communiquées en vertu de la Loi sur la communication d’information doivent être incluses dans ce contexte, car la Loi permet un partage des données sans précédent entre 17 institutions gouvernementales ou plus, à la discrétion du gouverneur en conseil.
    En vertu de cette disposition, la portée de la communication des données est trop large pour une activité qui compromet la sécurité du Canada. Le libellé est trop vague. Une organisation gouvernementale peut demander des données pour des raisons de sécurité publique ou de stabilité économique ou financière. J’insiste pour que des précisions soient apportées concernant l’annexe 3 de la Loi afin d’éviter que le gouvernement jouisse d’un pouvoir illimité quant à la surveillance et au profilage des Canadiens ordinaires comme moi.
    Si vous regardez les photos que nous avons sur nos cellulaires, vous constaterez que nous ne jetons rien. Nous avons photographié une affiche informative et nous allons la conserver, au cas où nous en aurions besoin. Sans règles facilement identifiables sur les pratiques relatives à la communication de nos données, je crains que ces institutions puissent en faire autant.
    En tant que citoyens, nous ne jouissons d’aucune protection adéquate pour contester cette pratique détournée, malgré le fait que la Loi sur la protection des renseignements personnels oblige les institutions à limiter la collecte de renseignements à ceux qui sont directement liés aux programmes ou activités de l’institution, et manifestement nécessaires.
    Je vais vous donner quelques exemples. Au Royaume-Uni, en vertu de la Data Retention and Investigaroty Powers Act, les données recueillies peuvent être conservées pendant un an. La Loi sur le renseignement, en France, stipule quelque chose de semblable, soit que les données peuvent être conservées entre 1 et 12 mois, selon le type de données recueillies.
    En tant que jeune Canadienne, je souhaite plus de transparence de la part du gouvernement et je veux que le citoyen moyen et son sosie numérique jouissent d’une meilleure protection. Je crois qu’il est très important de définir clairement les périodes de conservations des données, le type de données qui peuvent être communiquées, la façon dont elles peuvent être partagées, pendant combien de temps et la façon dont elles doivent être détruites par la suite. Cela permettrait de protéger les citoyens, dans une certaine mesure, contre les risques de profilage. La précision du libellé utilisé à l’annexe 3 permettrait peut-être de réduire la communication inutile de nos données.
    Merci.
    Des voix: Bravo !

  (1840)  

    Merci. Vous avez pris exactement trois minutes.
    Y a-t-il des questions?
    Monsieur Peter Glen, vous avez la parole.
    Je tiens à remercier tous les intervenants précédents. Cette séance de discussion est très instructive.
    Il y a environ cinq ans, je me suis dit qu’il fallait que je fasse quelque chose. Je me suis donc mis à participer à des marches, à des rassemblements et à des manifestations. Plus on s’habitue à se faire prendre en photo par les services de police, plus on comprend que l’on sacrifie une partie de notre vie privée en participant à ce genre d’événement, et c’est peut-être la nature même de ces événements.
    Ce que j’ignorais au moment de réfléchir à tout cela, c’est que… j’ai été victime d’agression sexuelle durant mon enfance. Étant donné ce que d’autres intervenants ont dit, je me dois d’en tenir compte dans le contexte de ma propre vie. Lorsqu’on se sent prêt à guérir de ce genre de mauvais traitement, il est très important d’avoir confiance en la personne à qui l'on se confie. Étant donné la culture de la peur qui existe et que les intervenants précédents ont soulignée, cela demeure un casse-tête, voire une énigme, pour moi alors que je tente de guérir de mes blessures. Si les conséquences ne sont pas à tout le moins troublantes, j’ignore ce que je pourrais vous dire de plus pour vous convaincre.
    Merci.
    Des voix: Bravo !
    Merci.
    Madame Bernice Murray.
    J’aurais quelques points à souligner.
    Concernant l’examen de la sécurité, le gouvernement présente la sécurité comme étant une question d’équilibre entre les droits et la sécurité. Tout d’abord, vous ne pourrez pas gérer la sécurité des citoyens si vous ne garantissez pas leurs droits. Ce n’est pas une question d’équilibre; il faut défendre les droits de tous les citoyens, et pas seulement les droits civils, mais aussi les droits économiques, politiques et sociaux. Il est extrêmement important, selon moi, d’aborder la question de ce point de vue. Ces droits appartiennent au peuple, à nous tous. C’est le point de départ de tout examen.
    Ce qui m’inquiète, c’est que le livre vert et d’autres documents utilisés dans le cadre de ces consultations nous éloignent de la discussion sur les droits relatifs à la sécurité et nous rapprochent d’une discussion sur l’extrémisme violent. Toutes les mesures deviennent alors acceptables, car il s’agit de lutter contre cet extrémisme, mais l’on s’éloigne de la question essentielle. Même le sujet des consultations… j’ignore si vous aurez terminé le 1er décembre, mais d’autre, oui. Si vous tenter de mener une étude de deux mois sur la sécurité et les droits au pays, dont une séance à Toronto, vos résultats ne seront pas aussi complets qu’ils devraient l’être.
    Je suis ici pour parler plus particulièrement de la Loi antiterroriste de 2015 que tout le monde appelle le projet de loi C-51. Bien que, à mon avis, ces consultations ne soient pas sérieuses, en ce sens qu’elles ne sont pas approfondies, les discussions et consultations publiques qui ont eu lieu concernant le projet de loi C-51 — et ce n’est pas grâce au gouvernement en place — étaient extrêmement larges et approfondies. On l’a déjà souligné, mais des mesures ont été prises à l’échelle du pays. Il y a eu des discussions générales, des discussions ouvertes, des jours d’action. Une pétition demandant à ce que ce projet de loi soit abrogé a recueilli 311 000 signatures.
    Je crois qu’il est important de vous rappeler que ce projet de loi a été amplement débattu et que les Canadiens se sont prononcés: ils veulent qu’il soit abrogé.
    Concernant le gouvernement Harper, un des problèmes… j’étais candidate lors des dernières élections et j’ai fait du porte-à-porte dès janvier 2015. Une des principales préoccupations des gens de ma circonscription était le projet de loi C-51. Ils voulaient que cette mesure législative soit abrogée. Aucun parti ne peut prétendre avoir le mandat de conserver ce projet de loi. À mon avis, il ne peut pas être amélioré.
    Je tiens à souligner également que le parti au pouvoir a dit qu’il allait abroger les dispositions problématiques du projet de loi. Eh bien, elles le sont toutes. C’est le projet de loi en entier qui devrait être abrogé.
    Des voix: Bravo !
    Mme Bernice Murray: Je m’inquiète surtout de la criminalisation de la dissidence. Le gouvernement actuel dit qu’il veut défendre les droits des Autochtones et qu’il appuie les relations de nation à nation. Pourtant, en vertu de ce projet de loi, les peuples autochtones qui défendent leurs territoires et leurs droits souverains peuvent être accusés de terrorisme selon la définition qui figure dans la loi. Je m’inquiète surtout de la définition large de « langage de nature terroriste », car, en vertu de cette définition, n’importe qui peut se faire accuser de terrorisme simplement pour avoir partagé son point de vue. Oui, le projet de loi permet une certaine latitude concernant l’intention, mais seule une démonstration juridique peut être acceptée dans de tels cas. C’est la loi.
    J’encourage le Comité à étudier toute l’information qui lui a été remise, probablement aux membres eux-mêmes, mais dans le cadre des consultations sur ce projet de loi, de tous les secteurs de la société, des spécialistes constitutionnels aux spécialistes des libertés civiles en passant par les avocats. C’est une énorme mine de renseignements. Je crois que toute cette information pointe dans la direction de l’abrogation du projet de loi. Toutes les mesures législatives nécessaires existaient déjà dans la Loi antiterroriste de 2001. Celle-ci était déjà problématique, car elle introduisait la notion de l’entrave au fonctionnement d’infrastructures essentielles. Honnêtement, les travailleurs sont un des groupes visés par cette notion. Les travailleurs qui font la grève sur le site d’une telle infrastructure ou ceux dont la grève est jugée illégale simplement parce que le gouvernement leur a ordonné de retourner au travail peuvent être accusés d’entrave à l’économie canadienne.

  (1845)  

    Je suis désolé, mais je dois vous interrompre. Vous avez largement dépassé le temps qui vous était alloué.
    Vous ressemblez beaucoup à certains membres du Comité; vous ne prenez pas le temps de respirer.
    Des voix: Bravo !
    Le président: Merci beaucoup pour cette présentation.
    J’ai bien aimé votre rappel selon lequel il ne faut pas choisir entre l’environnement et l’économie, et c’est la même chose en ce qui concerne nos droits et notre sécurité. C’est tout à fait légitime, ce que vous dites. Je vous en remercie.
    Monsieur Evan Light, vous avez la parole.
    Bonjour. Mon nom est Evan Light. Je suis professeur adjoint en communications au collège Glendon, de l’Université York, situé…
    Dans ma circonscription.
    C’est vrai? Eh bien, bonjour.
    Je suis également un collaborateur du Snowden Digital Surveillance Archive hébergé sur le site Canadian Journalists for Free Expression.
    Je suis ici aujourd’hui pour parler de la surveillance de masse relativement au projet de loi C-51. J’aimerais sensibiliser le Comité à l’occasion qui se présente à lui de faire en sorte que le Canada se démarque; c’est, semble-t-il, la raison pour laquelle le gouvernement Trudeau a été élu. Vous avez l’occasion d’abroger ce projet de loi mal-conçu à bien des égards et de prendre le temps d’élaborer une meilleure mesure législative, une mesure qui place les droits de la personne au coeur de la réglementation sur la communication ou la protection des renseignements personnels et qui accorde de l’importance à la vie privée des gens et non qui y porte atteinte.
    Comme l’a souligné un autre intervenant, vous avez l’occasion d’éloigner le Canada de l’alliance du Groupe des cinq, une alliance qui fait en sorte que tous les Canadiens sont automatiquement victimes de surveillance de masse partout dans le monde, et ce n’est pas une hypothèse. Cela a été démontré à maintes reprises au cours des trois dernières années. À mon avis, la surveillance de masse est une pratique dangereuse pour les parlementaires et notre démocratie. Le fait que je ne puisse pas communiquer en toute sécurité avec mon député constitue un problème. Le fait que vous et moi ne pouvons pas nous envoyer des courriels chiffrés constitue un problème.
    L’an dernier, j’ai eu l’occasion d’interviewer le vice-président du Comité sénatorial de la Sécurité nationale et de la Défense. Je lui ai parlé de la gestion des réseaux informatiques du Parlement. Il ignorait qui établissait la politique à ce sujet, mais a convenu que l’utilisation de courriels chiffrés serait peut-être une bonne chose, car le gouvernement pourrait me surveiller et le SCRS pourrait savoir ce que je fais, et parce que je devrais intégrer la notion de confidentialité dans mes activités.
    Je vais m’arrêter avant que mes trois minutes soient écoulées, mais…

  (1850)  

    Il vous reste une minute.
    … je voulais simplement insister sur le fait que vous avez une occasion unique de faire en sorte que le Canada se démarque sur la scène mondiale par sa position à l’égard des droits de la personne et à l’importance que nous attachons à ces droits. Avec un gouvernement majoritaire, il serait facile d’abroger ce projet de loi et de prendre quelques années pour mener des consultations publiques sérieuses plutôt que de passer en coup de vent pendant une semaine dans l’ensemble du pays, et ce, sans préavis. Les universitaires comme moi peuvent se réunir et vous fournir de vraies informations.
    Il existe une quantité incroyable de recherches financées par le public au Canada et en Europe sur la surveillance et la protection de la vie privée, les télécommunications et la sécurité. Il existe des ressources auxquelles vous avez facilement accès et pour lesquelles le gouvernement a déjà payé; donc pas besoin de présenter une demande. Il n’est pas nécessaire de former des comités pour effectuer ces recherches. Beaucoup d’informations ont déjà été publiées. Il suffit de nous donner un préavis suffisant et de travailler avec nous.
    Merci.
    Très bien.
    Y a-t-il des questions?
    J’aurais une question à vous poser. Trois partis ayant trois opinions différentes sont représentés à cette table, alors nous évitons de débattre avec ceux qui nous partagent leurs idées. Lors des dernières élections, un parti s’opposait au projet de loi C-51, un autre l’appuyait et un troisième proposait d’en modifier les dispositions problématiques. Il y avait trois points de vue différents. Comme l’a souligné la dernière intervenante, il y a eu plusieurs consultations publiques sur le projet de loi et 311 000 personnes ont signé une pétition demandant son abrogation. Nous avons cette information.
    Puis, il y a eu l’élection et la démocratie a parlé. Le parti qui proposait d’abroger les dispositions problématiques du projet de loi a été élu, mais, maintenant, les gens disent que notre mandat est d’abroger le projet de loi en entier, alors que nous leur avons dit nous n’allions pas l’abroger entièrement. J’essaie de régler la quadrature du cercle afin de comprendre… Est-ce la démocratie, le problème, ou …? J’essaie juste de comprendre, car le parti qui souhaitait abroger le projet de loi n’a pas été élu, pas plus que celui qui souhaitait conserver le projet de loi dans sa forme actuelle. C’est le parti qui proposait d’abroger les dispositions problématiques du projet de loi qui a été élu. Comment …?
    M. Evan Light: Je dirais que vous devriez…
    Des voix: Bravo!
    Une voix: Le parti qui a remporté les élections… [Note de la rédaction — Inaudible]
    Le président: Votre tour viendra.
    Puisque vous nous avez donné un conseil, monsieur Light… je tente de trouver une façon de régler la quadrature du cercle.
    D’accord. Je dirais, d’abord et avant tout, que vous devriez tenir une consultation publique digne de ce nom, une consultation à long terme, participative, ouverte et transparente. C’est simple. Cessez de faire semblant.
    Des voix: Bravo!
    Madame Watts, vous avez la parole.
    Nous savons que beaucoup de recherches ont été effectuées sur le renseignement et la cybersécurité, notamment. Pourriez-vous nous proposer une ou deux pratiques exemplaires? Certaines recherches… Vous dites que nous devrions nous éloigner du Groupe des cinq, tout laisser tomber et ne pas nouer le dialogue avec le monde des renseignements internationaux, mais je me dis qu’il doit y avoir une meilleure façon de procéder, car nous devons nous tenir au courant de ce qui se passe ailleurs.
    Il doit y avoir une meilleure façon, effectivement, mais je crois que le gouvernement doit faire preuve de transparence afin que les citoyens qui ne travaillent pas au gouvernement puissent savoir comment les choses fonctionnent. Ce n’est pas le cas actuellement. D’ailleurs, je crois que certains membres du gouvernement eux-mêmes ne savent pas comment les choses fonctionnent. L’an dernier, dans le cadre de mon entrevue avec lui, le vice-président du comité sénatorial sur la Sécurité nationale m'a dit qu’il n’avait pas l’habilitation de sécurité nécessaire pour comprendre… Le lendemain, son comité accueillait le chef du SCRS et le vice-président du comité l’a interrogé sur les activités SCRS.
    Nous avons besoin d’une véritable surveillance parlementaire et d’une véritable surveillance judiciaire, mais le Parlement et le gouvernement doivent également faire preuve de transparence. Les gens ne peuvent pas se protéger s’ils ignorent ce qui les attend.
    Je comprends. Il suffit d’aller sur Facebook et Twitter pour voir ce qu’on y affiche; tous vos renseignements sont là. La question est de savoir comment ils sont utilisés. Nous savons qu’il y a des pirates informatiques partout dans le monde qui cherchent à s’introduire dans les systèmes et à voler des renseignements.
    Pour reprendre l’expression de la quadrature du cercle, sachant que beaucoup de renseignements sont publics et que nous souhaitons protéger les droits de nos habitants, vos droits et les miens, comment pouvons-nous gérer tout cela?

  (1855)  

    Vous avez déjà les outils pour le faire. Vous avez le SCRS et le CSTC qui disposent de milliards de dollars de financement et de tous les renseignements et de toute l’expertise dont vous avez besoin, des renseignements qui sont utilisés de façon secrète. En faisant en sorte que ces autorités soient plus transparentes et en utilisant d’autres formes de gouvernance… Pendant des années, le gouvernement a répété qu’il avait de la difficulté à comprendre l’économie numérique et les métadonnées. Vous avez toute cette section du gouvernement qui se tient à distance du reste et qui possède tous ces outils et toute cette connaissance.
    Oui, mais, là, on touche à la sécurité nationale. Je ne sais pas s’il serait avantageux de rendre publique toute cette information. Qu’en pensez-vous? Croyez-vous qu’il faudrait publier toute l’information…
    Sur le vif, comme ça, je ne pourrais pas me prononcer. Pour le savoir, il faudrait mener un processus décisionnel participatif à long terme. Ce n’est pas le genre de décision que l’on peut prendre juste comme cela. Il faut mener un processus coopératif, car c’est une décision qui nous touche tous, nos enfants, nos parents, nos hôpitaux et nos établissements de recherche.
    Je travaille partout dans le monde à divers projets avec d’autres chercheurs. Par exemple, j’ai travaillé à un projet avec des groupes de personnes âgées de partout dans le monde, un groupe de personnes vulnérables. Vous ne voulez pas sauvegarder vos renseignements sur Dropbox, car il s’agit d’une société américaine, mais vous dites aux gens que vous allez protéger leur identité et leurs renseignements. Vous faites preuve de bonne volonté en disant cela, mais vous n’y pouvez rien.
    Vous avez raison. Nous ne pouvons pas.
    Vous devriez en être capable. D’un côté, le gouvernement du Canada dit aux gens qu’il finance la recherche et qu’il faut protéger ces informations, mais de l’autre côté, il mène des activités qui contreviennent à la sécurité.
    Merci.
    Y a-t-il d’autres questions?
    Merci. Nous avons ajouté votre nom à la liste des gens qui ne violent pas le secret des experts qui viennent témoigner au Comité. C’est bon de savoir qui vous êtes.
    Madame Sharon Howarth, vous avez la parole.
    Mon nom est Sharon Howarth. Lorsque mes filles étaient plus jeunes, je me suis demandé quelle serait la chose la plus importante à laquelle je pourrais travailler pour elle et j’ai conclu que c’était de trouver des solutions aux changements climatiques.
    Le groupe Climate Action Now vient tout juste de publier un tableau qui montre que, si nous ne réduisons pas les émissions afin de limiter le réchauffement planétaire à moins de deux degrés Celsius, nous aurons de sérieux problèmes.
    D’abord, si la température monte de plus de deux degrés, ce sera horrible, non seulement pour la planète — en fait, ce n’est pas important en ce qui concerne la planète, car l’humanité ne pourra pas survivre. Le tableau montre la désertification du sud des États-Unis. C’est vers cela que nous nous dirigeons. Les habitants de cette région ne resteront pas là à attendre. Ils vont venir au Canada. Dans un rapport publié il y a de cela bien des années, le Pentagone disait que les changements climatiques constituent la plus grande menace à la sécurité nationale.
    Lorsque j’ai entendu parler du projet de loi C-51, j’ai été sidéré d’apprendre que le simple fait de m’exprimer sur un sujet que je connais ou de participer à des rassemblements ou à des manifestations ou de donner mon opinion pouvait m’attirer des ennuis. Je suis transie de peur encore aujourd’hui. Je n’arrive pas encore… Prenez cette séance. C’est incroyable, mais on pourrait me cibler, moi et mes voisins, et ainsi de suite. La capacité que j’ai de m’exprimer librement au Canada — nous devons être une source d’inspiration à cet égard — prime sur toute menace terroriste perçue. Je souhaite vraiment que vous preniez la question de la liberté d’expression et … C’est ce qui doit primer.
    Merci.
    Comme je m’en doutais, d’autres ont ajouté leur nom à la liste d’intervenants. Je propose donc que nous passions à des interventions de deux minutes afin que tous ceux qui souhaitent intervenir puissent le faire.
    Certains thèmes sont revenus et je soupçonne qu’il en sera encore question, mais nous allons tout de même passer à des interventions de deux minutes.
    Madame Set Shuter, vous avez la parole.

  (1900)  

    Bonjour. Merci beaucoup d'avoir écouté ce que j'avais à dire, et oui, Set Shuter est mon vrai nom.
    Je viens d'une famille monoparentale. J'ai travaillé pour payer mes études. J'ai obtenu un diplôme en sociologie, puis un autre, et en ce moment, je suis technicienne de l'image, cinéaste et comédienne. L'une des choses que je fais tous les jours est de la gestion de données. Je travaille pour une assez grosse maison de post-production ici dans cette ville. Chaque jour, je calcule combien il en coûte pour maintenir les données en ligne, comment on assure le suivi des données, etc.
    L'une de mes grandes préoccupations en tant que contribuable qui n'a pas d'objection à payer ses impôts pour pouvoir vivre dans ce merveilleux pays — ce dont je suis reconnaissante —, c'est les coûts, les données qui sont recueillies, la façon dont elles sont colligées, le temps qu'elles sont conservées et l'établissement d'un budget pour la gestion de ces données. J'estime qu'il y a bien d'autres questions auxquelles nous pourrions nous attaquer au pays plutôt que de conserver toutes les données qui ont été mentionnées tout à l'heure par de nombreuses autres personnes — des messages textes aléatoires, des courriels, etc. —, données auxquelles nous ne réfléchissons pas forcément. Elles sont peut-être stockées quelque part. L'argent de mes impôts sert peut-être à payer pour la gestion de ces données plutôt que d'être utilisé pour financer l'éducation, les garderies, vos salaires, etc.
    En ce qui concerne les recommandations, j'ai étudié la surveillance dans le cadre de mes études en sociologie. Pour éviter que le Canada devienne un État de surveillance, ce qui se passe ailleurs dans le monde, je pense qu'il serait formidable d'avoir une reddition de comptes et un comité de surveillance, pas seulement composé de parlementaires, mais aussi de juristes et de citoyens. Je pense qu'il est très important que les gens comme nous aient voix au chapitre. L'inclusion de citoyens au sein du comité de surveillance pourrait nous donner un autre point de vue que nous oublions souvent lorsque nous sommes fonctionnaires ou avocats. Ce n'est qu'un autre point de vue.
    Je pense que la transparence est également très importante. Nous devons savoir ce que nous faisons, nous devons savoir comment le faire, et nous devons savoir les données que vous conservez et pour combien de temps, etc.
    En tant que jeune personne dans ce pays, je tiens à dire que je comprends, dans le contexte actuel, que nous devons établir un équilibre entre la surveillance et les droits de la personne. C'est inévitable. Nous vivons dans une société où la surveillance est omniprésente. Nous ne pouvons pas nous en débarrasser. Ce n'est plus le but. C'est une question d'équilibre: maintenir nos droits et assurer notre sécurité. Je vous ai entendu parler de sécurité. Je ne pense pas que le terrorisme soit autant une menace que les médias veulent nous le faire croire. Je préférerais conserver mes droits.
    Par ailleurs, je comprends qu'il se passe actuellement bien des choses dans ce monde. C'est très compliqué, avec les technologies que nous avons. Nos lois ne suivent pas l'évolution rapide des technologies. J'en suis consciente, et je sais que bien d'autres personnes aussi. Je suis reconnaissante à votre comité d'essayer d'apporter des amendements à ce projet de loi, qui n'aurait pas dû être adopté par un ancien premier ministre que je qualifierais de tyran.
    Merci.
    Des voix: Bravo!
    Merci.
    Paul Dutton.
    Je crois savoir que votre comité consulte les Canadiens sur ce qu'il faut faire concernant le projet de loi C-51, peu importe le parti qui a remporté les élections et la façon dont il s'y est pris.
    Il y a quelques points que je veux soulever concernant la structure chancelante. Si la structure s'effondre, alors vous n'avez qu'à vous en débarrassez et construire une structure qui est stable.
    Voici où le bât blesse. Dans un premier temps, il y a trois sujets de préoccupation: le nouveau régime d'interdiction de vol prévu dans la Loi sur la sûreté des déplacements aériens, les infractions en lien avec des propos tenus sur le terrorisme et le nouveau SCRS, qui est une agence de police secrète.
    En ce qui concerne le régime d'interdiction de vol, en vertu de la nouvelle loi, il est illégal de dire à une personne si son nom figure sur la liste d'interdiction de vol. Vous vous rendez à l'aéroport, votre nom est inscrit sur la liste d'interdiction de vol, on vous dit que vous ne pouvez pas monter à bord de l'avion, mais on ne vous dit pas pourquoi. Il est illégal de vous dire pourquoi vous ne pouvez pas prendre l'avion. C'est ce qui devrait être illégal. C'est injuste et antidémocratique. C'est une violation flagrante des droits de la personne.
    Bien qu'il soit pratiquement impossible pour les citoyens d'avoir accès à leur propre liste, la loi prévoit que les listes peuvent être communiquées à des gouvernements étrangers, sans imposer de restrictions légales quant à la façon dont ces renseignements peuvent être utilisés. Le Canada devrait abroger la Loi sur la sûreté des déplacements aériens et empêcher les terroristes soupçonnés de prendre l'avion en utilisant les outils existants prévus dans le Code criminel. Le gouvernement devrait abroger la Loi sur la sûreté des déplacements aériens et le projet de loi C-51. C'est ce que ce membre du public a à dire dans le cadre de ces consultations.
    Pour ce qui est des infractions en lien avec des propos tenus sur le terrorisme, la nouvelle infraction qui consiste à préconiser ou à fomenter la perpétration d'infractions de terrorisme en général devrait être abrogée. Il n'y a aucun intérêt sur le plan de la sécurité à criminaliser davantage l'encouragement au terrorisme au-delà de ce qui est déjà une infraction dans la Loi actuelle. Imaginez qu'on essaie de travailler au sein des collectivités pour soutenir les individus à risque d'être radicalisés quand même une discussion visant à comprendre leurs points de vue les met dans une situation où ils pourraient commettre un crime. C'est la situation à l'heure actuelle au Canada.
    Le nouveau SCRS est une agence de police secrète. Les fonctions policières sont confiées à un organisme du renseignement. C'est donc un État policier.

  (1905)  

    J'ai bien peur de devoir vous interrompre. Nous devons entendre d'autres intervenants. Nous sommes ravis d'avoir un mémoire écrit également.
    Les nouveaux pouvoirs du SCRS sont immoraux, dangereux et inutiles. Ils donnent au SCRS de vastes pouvoirs d'intervenir en dehors du cadre de la loi régulière dans le secret quasi total. Ces dispositions doivent être abrogées. Bien qu'un pays libre et démocratique puisse décider qu'un organisme du renseignement qui agit dans le plus grand secret soit nécessaire, dans un pays libre, une agence de police secrète n'a pas sa place, point final.
    Des voix: Bravo!
    Semret Seyoum.
    Merci beaucoup de me donner l'occasion de témoigner devant vous.
    J'aimerais commencer par dire que je remercie le gouvernement canadien d'avoir invité des experts des Nations unies, puisque j'ai participé hier à une réunion au sujet des dissidents africains. C'est toujours terrible d'entendre des histoires d'horreur au sujet des dissidents africains ici au Canada. J'ai bon espoir pour le proche avenir.
    Soit dit en passant, je suis Semret Seyoum, et je suis rédacteur en chef et journaliste. Je viens de l'Érythrée.
    En ce qui concerne les lois antiterroristes et l'Érythrée, il y avait deux organisations, l'EPLF et l'ELF. Les lois du gouvernement canadien stipulent que ce sont deux organisations terroristes. Conformément à cette loi, tous les membres de ces organisations sont considérés comme étant des terroristes. Lorsque nous parlons de ces organisations, nous faisons référence à environ 200 000 personnes qui étaient jeunes dans les années 1970 et 1980. De ces 200 000 personnes, environ 65 000 ont déjà été sacrifiées au nom de l'indépendance de l'Érythrée. J'aimerais discuter de cette loi. Elle est anticonstitutionnelle. Cette loi n'est pas fondée sur les droits fondamentaux de la personne. Ces jeunes gens se sont battus pour l'indépendance de l'Érythrée. De nombreux Érythréens qui sont actuellement au Canada sont considérés comme étant des terroristes.
    Enfant, j'étais là aussi. J'ai fréquenté l'école de l'EPLF dans les années 1980. C'est un peu problématique pour le gouvernement canadien. J'aimerais que le gouvernement canadien respecte la Constitution canadienne. Cette loi sur l'immigration est anticonstitutionnelle. Si nous respectons la Constitution canadienne et la Charte des droits et libertés, peut-être que tout irait dans la bonne direction.
    En ce qui concerne le projet de loi C-51, si nous l'examinons attentivement, il ne vise pas directement les terroristes. Il vise directement les journalistes, les auteurs et les écrivains. Les journalistes dans tous les pays sont victimes de différentes lois et sont à la merci du gouvernement.

  (1910)  

    Merci.
    Je dois vous arrêter ici car je dois céder la parole à d'autres personnes. Merci beaucoup.
    Des voix: Bravo!
    Merci.
    Ben Silver.
    Steven Brooks aura la parole après.
    Mesdames et messieurs les membres du Comité, merci.
    Comme bon nombre de Canadiens âgés de moins de 30 ans, je n'avais encore jamais pris la parole à une réunion politique, mais le projet de loi C-51 me met très en colère, alors me voici.
    Tout d'abord, j'aimerais d'abord démêler l'imbroglio dont vous avez parlé plus tôt sur le fait que les libéraux ont formé un gouvernement majoritaire, mais qu'un grand nombre de personnes veulent l'abrogation du projet de loi C-51. C'est une bonne chose que les libéraux ne présentent pas de projets de loi omnibus, mais pour l'électeur moyen, les élections nous permettent de choisir parmi les cinq plus grands partis omnibus de tous les temps. Nous devons choisir les partis dans leur ensemble. Même si nous aimons les libéraux plus que les conservateurs, cela ne signifie pas que nous appuyons massivement le projet de loi C-51.
    Le premier problème que je vois avec le projet de loi C-51 est le fait d'élargir les pouvoirs du SCRS pour inclure des pouvoirs policiers. Des témoins précédents ont expliqué avec éloquence pourquoi c'est un problème, alors je vais passer à un autre point. En juin 2015, M. Trudeau a accordé une entrevue au magazine Maclean's dans laquelle il a énuméré les raisons pour lesquelles il appuie le projet de loi. Quelques-unes des raisons pour lesquelles il l'appuie sont exactement les mêmes raisons pour lesquelles je m'y oppose.
    La première est la détention préventive. Je considère comme étant un principe sacré de notre société que le gouvernement ne peut pas nous enfermer dans une cellule à moins d'avoir une preuve hors de tout doute raisonnable que nous avons commis un acte répréhensible. L'idée que nous puissions être emprisonnés parce que le gouvernement pense que nous ferons quelque chose de mal dans le futur est révoltante et n'a pas sa place dans une société libérale.
    La deuxième raison est la liste d'interdiction de vol. C'est une page tirée du guide bancal des Américains. Si M. Trudeau commence à ajouter des Canadiens à une liste secrète d'interdiction de vol à partir de preuves secrètes, je vais l'ajouter à ma très publique liste de personnes qui n'obtiendront pas mon vote.
    Enfin, échanger les droits à la liberté pour la sécurité est une idée saugrenue qui ne fonctionnera pas. Le terrorisme, ce peut être une personne troublée avec un couteau de cuisine. Peu importe toutes les mesures de sécurité que nous mettons en place, nous ne pourrions jamais éliminer la possibilité que des actes de terrorisme surviennent. Nous pourrions mieux financer nos services de santé mentale et accroître l'éducation pour mettre fin à la radicalisation de membres de la société qui étaient auparavant sains d'esprit.
    Pour mettre les choses en perspective, 80 personnes perdent la vie chaque année sur l'autoroute 401. Si le gouvernement veut que nous renoncions à nos libertés, il lui faut des arguments plus convaincants pour que nous acceptions lorsque nous nous rendons au travail en voiture tous les matins.
    Merci.
    Des voix: Bravo!
    Steven Brooks, puis Rajib Dash.
    Les gens dans la salle ont déjà dit tout ce que je voulais dire aujourd'hui et l'ont mieux fait que je l'aurais fait. Toutefois, nous en sommes venus à criminaliser la dissidence dans ce pays. Une génération entière de jeunes ont peur de s'exprimer, même en privé sur les médias sociaux. Je l'ai vécu avant de venir ici, et j'ai des amis qui n'assisteraient pas à la réunion par crainte d'être inscrits sur une liste de surveillance. Ce sont des gens actifs sur la scène politique. Ils votent et ils sont membres de partis. Ils ne devraient pas avoir peur d'assister à une réunion comme celle-ci.
    C'est tout ce que j'ai à dire sur le sujet.
    Merci.
    Des voix: Bravo!
    Rajib Dash, puis Miguel Avila.
    Je n'ai jamais participé à des consultations publiques dans le passé, alors je croyais à tort que j'allais poser des questions et que je recevrais des réponses. Pour cette seule raison, ces consultations semblent être bidon, alors je ne veux même pas poser la question que j'avais l'intention de poser aujourd'hui.
    De plus, pour donner matière à réflexion, vous auriez pu entendre les deux côtés, mais les personnes qui sont ici aujourd'hui ont consacré beaucoup de temps et d'énergie à étudier la mesure législative que vous essayez d'adopter et viennent toutes du même camp. Essayez de comprendre ce que cela signifie pour nous.

  (1915)  

    Quelqu'un veut poser une question?
    Monsieur Mendicino.
    Quelle est votre question? Je prends des notes. Nous pourrons peut-être vous fournir une réponse ou des renseignements.
    Pas « peut-être »: mon impression était que j'allais obtenir des réponses.
    Bien. Quelle est votre question?
    Là encore, garantissez-moi que j'obtiendrai une réponse. Autrement, je ne la poserai pas.
    Monsieur, je ne peux pas vous dire si nous avons l'information ou non avant de connaître la question.
    Elle est très simple. Je n'ai même pas eu à la prendre en note.
    Très bien. Posez-la.
    Je crois comprendre qu'avant la mise en oeuvre de la Loi antiterroriste, les Canadiens étaient en sécurité. Tous les organismes du gouvernement, dont le SCRS, faisaient leur travail en nous protégeant. Si c'est vrai, alors pourquoi avons-nous besoin de la Loi antiterroriste? Abrogez-la au plus sacrant.
    Des voix: Bravo!
    M. Dubé a une question également.
    Je voulais simplement dire que pour répondre aux questions, le problème que nous avons avec cette formule, c'est que nous avons tous des positions différentes sur ces questions, alors vous entendez forcément la position de tout le monde. Je ne veux pas parler au nom de mes collègues. Je présume que comme nous le faisons habituellement, nous serons tous réunis dans la salle si vous voulez contester nos points de vue. Je sais que je le ferai si vous avez d'autres questions. Les choses se compliquent, car nous commençons à remettre en question nos façons de procéder à la Chambre, et nous voulons que vous ayez le plus longtemps possible la parole, et c'est pourquoi je vais m'arrêter là.
    Une voix: Je tiens à dire que [Note de la rédaction: inaudible] Personne n'a répondu à la question [Note de la rédaction: inaudible]
    M. Matthew Dubé: Avec la permission de la présidence, je veux faire valoir... Je n'entrerai pas dans les détails, mais j'étais ici à la dernière législature et j'ai voté contre le projet de loi. Je suis d'accord avec le témoin. Ce n'est pas forcément le cas pour tous mes collègues. En fait, quelques-uns de mes collègues n'étaient pas ici à la dernière... C'est le problème qui se pose. Vous entendrez une réponse différente de chacun.
    Une voix: [Note de la rédaction: inaudible]
    M. Matthew Dubé: C'est mon point de vue, mais pas nécessairement celui de mes collègues.
    Une voix: [Note de la rédaction: inaudible] Il voulait savoir quel est le but de poser la question [Note de la rédaction: inaudible]
    Le président voudra peut-être nous en dire un peu plus sur le but de cette réunion. Le but premier est de vous consulter. Bon nombre d'entre vous avez très clairement exprimé vos opinions. Même si je pense que la question du dernier intervenant était un peu vague, il a conclu ses remarques par la déclaration suivante...
    Une voix: [Note de la rédaction: inaudible]
    M. Marco Mendicino: Désolé, je vais terminer.
    Il a dit de l'abroger. Comme je prends des notes, et je ne pense pas que personne va contester ce que je vais dire, j'ai l'impression que les gens dans la salle ont beaucoup d'inquiétudes concernant le projet de loi et veulent son abrogation. Ce n'est pas tellement une question, mais davantage une déclaration sur quelle sera l'issue de ces consultations, d'après vous. Je pense que nous essayons tous de bien prendre en note vos points de vue.
    Une voix: J'ai posé une question.
    Oui, et je pense que M. Dubé vous a aidé à vous rappeler que nous ne sommes pas le gouvernement. Nous sommes le Parlement et nous n'avons pas les mêmes opinions au Comité. Nous sommes des parlementaires qui ont de nombreux points de vue différents, à vrai dire. Nous représentons trois partis, et même au sein de nos partis, il y a des divergences d'opinions. Nous ne sommes pas en mesure de répondre à une question précise car notre comité n'a pas rédigé son rapport. Nous ne sommes pas ici, bien franchement, pour que vous nous consultiez. Ce n'est pas la raison pour laquelle nous sommes ici. Nous sommes ici pour vous consulter.
    Notre tâche ce soir est de vous écouter, comme nous le faisons depuis un moment. Nous prenons des notes. Tout est mis sur papier. Nous avons plusieurs personnes qui veillent à ce que nous ayons l'information. À la fin du processus, qui s'échelonnera sur de nombreuses semaines — nous ne savons même pas encore combien de semaines les consultations se poursuivront —, nous rendrons public un rapport sur ce que nous avons entendu et, à partir de ce qu'on nous a dit, nous formulerons des recommandations au gouvernement par l'entremise du Parlement. C'est le système parlementaire canadien.
    Nous sommes ici pour écouter ce que vous avez à dire. Nous vous écoutons. Des thèmes sont soulevés. Notre analyste fait notamment un résumé des faits, où nous inscrivons les thèmes. Nous devons évidemment le faire. La réunion est différente de celle à Vancouver, qui était différente de celle à Calgary, qui était différente de celle à Montréal, et qui sera différente de celle à Halifax.
    Les experts qui ont témoigné sont différents des membres du public. Nous recevrons des mémoires. Je m'attends à ce que des centaines de mémoires nous seront envoyés, voire des milliers, et il y aura des personnes qui n'assisteront pas aux réunions parce que ce n'est pas le moyen qu'ils préfèrent pour exprimer leurs opinions. Ils le feront en rédigeant un mémoire ou ils s'adresseront directement au ministre qui tient des consultations, et qui a déjà reçu, en passant, 8 000 documents la semaine dernière.
    Les 338 députés tiendront des consultations. Nous sommes le Comité qui étudie ce dossier, mais vous avez tous un député. Je vous encourage à discuter avec votre député, peu importe le parti auquel il appartient. Faites part de vos opinions à votre député. Bien franchement, les députés écoutent leurs concitoyens. C'est notre travail.
    Nous allons continuer de vous écouter, alors Michel est le prochain intervenant.
    Je signale que cette réunion publique est enregistrée, soit dit en passant. Toutes nos réunions sont enregistrées. Un compte rendu est préparé. C'est un document public. Vous pouvez voir ce que nous avons entendu. Vous pouvez voir toutes nos réunions et ce que les gens nous ont dit, puis vous verrez notre rapport final lorsqu'il sera présenté au Parlement et pourrez vérifier si nous avons représenté fidèlement les opinions que nous avons entendues.

  (1920)  

    Merci beaucoup de me donner l'occasion de vous faire part de mes réflexions et de mes idées sur le projet de loi C-51.
    Je veux féliciter un certain nombre de Canadiens ici ce soir qui sont assez courageux pour se faire entendre sur cette importante question.
    Ce soir, je suis offensé d'avoir dû me présenter à la réception et fournir une carte d'identité, mon numéro de téléphone et mon adresse. Il est alarmant qu'une personne qui n'est pas un activiste politique comme moi ait ce type de conversations. Les gens auront peur.
    Je suis Miguel Avila. Je suis un activiste de Toronto. Je suis originaire du Pérou. J'ai fui un gouvernement tyrannique et, 29 ans plus tard, je suis ici à lutter contre un projet de loi oppressif qui veut me museler. Il ne me permettra pas d'exprimer mes opinions.
    La communauté en a déjà expliqué les raisons. On vous les a déjà décrites en détail. Tous les membres du Comité ont une copie de ces témoignages et de ces mémoires. Ce sera un excellent rapport.
    En ce qui concerne les promesses que le premier ministre Trudeau a mentionnées, il a dit qu'il allait abroger le projet de loi, mais il choisit ce qu'il aime parce qu'il veut faire plaisir aux entreprises. Nous sommes contre cette façon de faire.
    Par exemple, il y a l'entreprise Enbridge. Elle nuit à l'environnement, mais vous savez quoi? Les entreprises exerceront énormément de pressions pour s'assurer que ce projet de loi favorise les sociétés, et pas nous, les citoyens. Nous voulons nous assurer que nos enfants auront un avenir meilleur. Je suis certain que vous avez tous une famille, et je suis certain que vous voulez tous que vos enfants aient un bon environnement où ils peuvent grandir dans la liberté. Nous voulons vous rappeler que la Constitution nous donne la liberté de nous exprimer; elle ne nous réduit pas au silence.
    Je vous remercie de cette occasion que vous m'avez donnée. Merci infiniment.
    Merci beaucoup.
    Madame Watts.
    Très brièvement, et pour votre gouverne, parce que je sais que vous avez dit qu'à votre arrivée, vous avez dû signer le papier et inscrire votre nom, votre adresse et votre courriel, le président pourrait peut-être expliquer ce que nous faisons avec ces renseignements, puisque nous parlons de la protection des renseignements personnels, pour vous rassurer qu'ils ne sont pas disséminés un peu partout.

  (1925)  

    Les renseignements ne sont pas publiés. Ils sont conservés par le greffier, qui est un mandataire du Parlement, et ils sont détruits à la fin de la législature. Nous devons les conserver au cas où nous devons clarifier ce que vous avez dit dans notre document public, car nous assurons un suivi. C'est la raison pour laquelle nous recueillons ces renseignements. Ils sont détruits plus tard.
    Ils sont détruits plus tard.
    Il y a une chose que je voulais ajouter. J'ai oublié.
    Vous savez, M. Harper a donné de l'argent à la GRC et à l'Agence des services frontaliers. Pourriez-vous recommander au gouvernement de Justin Trudeau de récupérer cet argent et de l'utiliser à bon escient, notamment pour le logement, l'emploi et la santé? C'est dans ces secteurs que nous avons besoin d'argent.
    Votre voix a été entendue.
    Mohamed Shukby.
    Merci beaucoup de me donner l'occasion de témoigner. Avant de commencer, j'aimerais faire écho à mes concitoyens. Je suis tout à fait contre le projet de loi C-51; cela ne fait aucun doute.
    J'aimerais vous parler de la PGS, la Politique du gouvernement sur la sécurité, en particulier la cote de sécurité à différents niveaux. J'ai consulté ce document. Lorsque vous voulez obtenir une cote de sécurité, vous devez volontairement divulguer tous les renseignements qui vous concernent au gouvernement pour qu'il puisse enquêter avant de donner une réponse. Le document traite de la méthode de vérification des antécédents et de la divulgation volontaire de vos renseignements personnels, aux fins de vérification.
    On n'y aborde pas la façon dont se déroulera l'enquête. On parle de vérification à l'extérieur du pays. On ne traite aucunement du déroulement de ces enquêtes, des personnes qui seront consultées et du genre de renseignements qui seront échangés avec un pays étranger. Je pense qu'une personne qui accepte volontairement de se soumettre à ce processus a le droit de connaître la nature des renseignements qui seront communiqués à un pays étranger.
    Merci.
    Merci.
    Eric Mills, suivi de Faisal Bhabha.
    Merci. Je témoigne à titre personnel.
    Dans les années 1960, la GRC a incendié une grange pour empêcher la tenue d'une réunion politique. Elle est entrée par effraction dans un bureau pour voler la liste des membres d'un parti politique. Elle a notamment répandu, au sein d'un groupe politique, de fausses rumeurs sur les antécédents psychiatriques d'une personne. Ces révélations, parmi d'autres, ont fait scandale et ont évidemment mené à la création de la commission McDonald, que nous connaissons bien, et à la création de la commission Keable, je crois, au Québec.
    Le SCRS a été créé dans la foulée de ces événements afin d'enlever à la GRC les fonctions d'analyse politique et de transformer la GRC en simple organisme d'application de la loi, mais cela n'a pas empêché la GRC, d'après ce que nous avons entendu, de faire exploser un puits de pétrole en Alberta et d'emprisonner, en Colombie-Britannique, deux personnes dans un état confusionnel, comme nous l'avons vu dans une affaire portée devant les tribunaux récemment. Plutôt que de restreindre la capacité des forces de sécurité d'agir ainsi, le projet de loi C-51 semble encourager le SCRS — et probablement d'autres forces de sécurité ainsi que la GRC — à poursuivre de telles activités.
    Le gouvernement Harper a utilisé une rhétorique établissant un lien entre les environnementalistes et le terrorisme. Aux termes du projet de loi C-51, une communauté qui s'organiserait pour protéger les sources d'eau potable propre pourrait être surveillée et voir ses activités perturbées. Le Comité est-il de cet avis?
    Selon mon interprétation, le projet de loi C-51 autorise même les forces de sécurité à demander un mandat pour enfreindre explicitement la Charte canadienne des droits et libertés afin de nuire aux activités d'un mouvement politique. Je suppose que demander à un juge d'autoriser qu'on déroge à la Charte finira par être jugé inconstitutionnel. Si ce n'est pas le cas, nous ferions mieux de déménager au Texas. Quelle est la probabilité qu'une cause soit entendue devant les tribunaux? Combien de temps faudra-t-il attendre pour obtenir un jugement et, même si la cour jugeait le mandat inconstitutionnel, pendant combien de temps la loi demeurerait-elle en vigueur et pourrait-elle être invoquée par les agences de sécurité?
    Il ne s'agit que d'un exemple des abus scandaleux et flagrants découlant du projet de loi C-51. Il est honteux que le parti qui forme maintenant le gouvernement ait voté pour ce projet de loi, et il serait tout aussi honteux que ce Comité ne recommande pas l'abrogation pure et simple du projet de loi C-51, ou une refonte exhaustive ayant le même effet. Je pense que vous devriez poursuivre les efforts pour remédier aux abus de pouvoir des agences de sécurité qui ont eu cours avant le projet de loi C-51 et qui se poursuivent toujours, sans aucun doute.
    Merci.
    Merci.
    C'était très clair.
    Faisal Bhabha, suivi de Chaitanya Kalevar.
    Bon après-midi, et merci.
    Je m'appelle Faisal Bhabha. Je suis professeur agrégé de droit à la faculté de droit Osgoode Hall. Je suis ici à titre de conseiller juridique occasionnel du Conseil national des musulmans canadiens, ou NCCM. L'organisme mène activement des actions de sensibilisation sur les enjeux liés à la sécurité nationale depuis au moins 15 ans. Il a comparu devant des comités parlementaires, des comités sénatoriaux et d'autres comités, de même que devant la Cour suprême du Canada, pour discuter d'enjeux pertinents.
    Sans surprise, je suis ici pour faire écho à de nombreux propos que vous avez déjà entendus. Je ne veux pas répéter les raisons précises pour lesquelles vous devriez abroger le projet de loi C-51, la Loi antiterroriste de 2015. J'aimerais parler avec vous de raisons générales ou contextuelles. Elles sont en particulier liées à l'expérience des musulmans canadiens, qui vivent actuellement sous la menace découlant de l'existence même des pouvoirs accordés en vertu de cette loi.
    D'une part, les musulmans canadiens sont confrontés à des risques de décès ou de blessures en tous points semblables aux risques associés à une attaque terroriste. Dans l'ensemble, les musulmans sont les plus grandes victimes du terrorisme islamique. C'est là le regrettable paradoxe de la chose. D'autre part, ici au Canada, nous sommes également confrontés aux risques d'erreur sur la personne et de soupçons injustifiés, lesquels peuvent comporter leur lot de souffrances. Nous en savons beaucoup là-dessus.
    Le Livre vert cite les rapports qui recèlent d'une multitude de faits qui démontrent à quel point les choses peuvent mal tourner lorsque la GRC et le SCRS peuvent fonctionner sans surveillance adéquate. Les Arar, Almalki, Nureddin, El Maatii, Benatta, notamment, en savent quelque chose.
    L'honorable Dennis O'Connor — en particulier par rapport l'affaire Arar — a fait une mise en garde contre les effets discriminatoires, pour les musulmans canadiens, de l'obsession des services de renseignement et des organismes de sécurité à l'égard du terrorisme islamique et du fait qu'on semble ignorer d'autres sources de terrorisme qui pourraient représenter un plus grand risque. En matière de sécurité, nous préconisons une approche rationnelle plutôt que des mesures excessives, ce que représente précisément le projet de loi C-51.
    Nous croyons fermement que le droit criminel, tel qu'il existe déjà, suffit à assurer la protection des Canadiens et nous vous mettons en garde contre les dangers associés aux pouvoirs excessifs, à la communication excessive des renseignements et à toutes les choses dont vous avez entendu parler ce soir.

  (1930)  

    Je dois vous interrompre ici, malheureusement.
    Nous avons invité le Conseil national à comparaître à titre de témoin officiel au Comité; le groupe aura donc aussi l'occasion de venir ici.
    Merci. J'aurai peut-être l'occasion de voir cela.
    Je dirais simplement qu'il y a une contradiction inhérente entre la stratégie de prévention et le Livre vert — qui est louable —, et tout le reste. Les deux ne peuvent être applicables simultanément en toute crédibilité. Si vous voulez travailler avec les communautés, vous devez d'abord mériter leur confiance.
    Merci.
    Des voix: Bravo!
    Merci.
    Chaitanya Kalevar, la parole est à vous. Après, ce sera au tour de David Henderson.
    Je m'appelle Chaitanya Kalevar. Vous pouvez simplement m'appeler Chai.
    Je suis ingénieur et je suis membre d'un groupe qui s'appelle Architects and Engineers for 9/11 Truth. J'aimerais porter à votre attention que la question du terrorisme a été propulsée à l'avant-plan sur la scène internationale après les attentats du 11 septembre et que nous, les ingénieurs et architectes, sommes convaincus que les attentats du 11 septembre étaient une opération sous fausse bannière.
    Étant donné que le Canada entretient des liens très étroits avec les États-Unis et qu'il fait partie du Groupe des cinq, notamment, je pense qu'il convient d'être sceptique. Pourquoi le terrorisme est-il un problème si important, alors qu'on n'a même pas réussi à arrêter les deux criminels à l'origine du terrorisme en Irak, les « héritiers de Bush et de Blair »? Je pense que nous devons régler ce problème et amener ces deux personnes devant la Cour pénale internationale avant de nous attaquer au terrorisme de petite envergure qu’on voit en Irak et dans l’ensemble des pays du Moyen-Orient, où la population a été bombardée à outrance et où des collectivités entières ont été détruites. Quand allons-nous nous attaquer aux grands terroristes qui font parti du Groupe des cinq?
     Je pense que le terrorisme se poursuivra tant que nous n’aurons pas réglé ces problèmes. Permettez-moi de le dire autrement. En passant, je suis l’auteur d’un livre intitulé Climate Change in the Nuclear Age. Pensez-vous que ce terrorisme de petite envergure est plus important que les changements climatiques et les menaces nucléaires auxquelles vous êtes confrontés?
    Des voix: Bravo!
    M. Chiaitanya Kalevar: Est-ce une blague? Tout le monde se précipite à gauche et à droite parce qu’un homme a tiré sur un autre ou parce qu’un homme a poignardé quelqu’un, alors qu’une menace nucléaire pèse sur le monde et que cinq brutes siègent au Conseil de sécurité des Nations unies. Les défis que représentent la menace nucléaire et les changements climatiques sont beaucoup plus importants et méritent bien plus votre attention que la menace négligeable sur laquelle vous vous interrogez.
    Cela dit, permettez-moi de faire valoir...

  (1935)  

    Merci, Chai. Nous devons arrêter ici.
    Avant que vous ne mettiez fin à la séance, je tiens à souligner qu’au lieu de restreindre notre parole à deux minutes, vous auriez pu prolonger la séance et tenir une réunion de trois heures au lieu de deux. Qu’est-ce qui vous en a empêché?
    Il y a diverses raisons. Je vais vous le dire après.
    Il n’est pas nécessaire d’en discuter en privé.
    L’horaire de la réunion est établi d’avance. Certains membres ont d’autres obligations.
    Dans une ville comme Toronto, deux heures, ce n’est pas assez [Note de la rédaction: inaudible.].
    David Henderson est le prochain intervenant, et le dernier sera Dimitre Popov.
    Bonsoir. Je m’appelle David Henderson. J’aimerais d’abord vous remercier de l’occasion et de la tribune qui m’est offerte pour vous parler aujourd’hui. Je pense que c’est très important. Je suis aussi heureux de savoir que mes préoccupations feront partie d’un ensemble de témoignages publics plus large.
    Aujourd’hui, je suis ici à titre de citoyen, de contribuable, de père, de mari et de fils. Je suis venu ici ce soir parce que je suis scandalisé par les violations des droits de la personne et les atteintes à la vie privée qu’on observe au Canada. Je suis triste de savoir que mon fils de 10 ans n’a pas connu une seule journée où sa vie privée était réellement protégée. Je suis outré de savoir qu’au Canada, ma fille — ou ma mère — pourraient être arrêtées et détenues sans mandat, sans qu’on respecte leurs droits garantis par la Charte, sans la présence d’un avocat et sans être accusées de quoi que ce soit.
    Ce que le gouvernement fédéral fait aux contribuables canadiens respectueux des lois est honteux. Le fait qu’on agisse ainsi au nom de la sécurité nationale est une insulte à mon intelligence. Tout ce que vous avez à faire, c’est de regarder le rendement de nos investissements à cet égard. Le gaspillage des fonds publics devrait à lui seul justifier l’abrogation de cette loi et les coûts sociaux à long terme et d’une portée considérable devraient représenter les clous dans son cercueil.
    Je conclurai par une citation de Benjamin Franklin, qui résume de façon succincte l’enjeu dont nous et le pays sommes saisis ce soir: « Ceux qui seraient disposés à abandonner une liberté essentielle au profit d’un petit peu de sécurité temporaire ne méritent ni la liberté ni la sécurité. »
    Merci.
    Des voix: Bravo!
    Notre dernier intervenant est Dimitre Popov.
    Je vous remercie de l'occasion. Je devrais peut-être remercier M. Trudeau, qui vous a demandé de nous consulter.
    N'est-il pas vrai que le projet de loi C-51 a été adopté pour assurer la sécurité du public? C'est une question.
    Je ne siégeais pas au Parlement lorsqu'il a fait l'objet de débats. Je pense que vous devriez demander aux gens qui formaient le gouvernement à ce moment-là quelle était leur intention; ce sont eux qui l'ont adopté.
    J'ai une autre question. Savez-vous combien de personnes sont tuées chaque jour au Canada par des conducteurs ivres?
    Je ne le sais pas. Nous sommes actuellement saisis d'un projet de loi à cet égard. Je suis donc certain que nous prendrons connaissance des études à ce sujet.
    Très bien; je vais vous le dire: trois personnes par jour, ce qui représente plus de 1 000 personnes tuées par des conducteurs en état d'ébriété au Canada. Maintenant, l'autre question est la suivante: combien de personnes meurent chaque jour en raison d'un attentat terroriste en sol canadien?
    Je connais le nombre de personnes tuées ces dernières années. Je sais que le Canada et les Canadiens sont parmi les plus touchés — en nombre de décès —, notamment par l'affaire Air India, une grande tragédie qui a touché une communauté canadienne. Il y a eu d'autres incidents depuis.
    C'est une bonne réponse, mais je n'ai pas entendu le chiffre. Je vous ai demandé combien de personnes ont été tuées.
    Je n'ai pas donné de chiffre.
    Très bien. Je vais vous le dire: une ou deux personnes.
    Maintenant, j'ai une autre question.
    Je précise que la tragédie d'Air India ne s'est pas produite en sol canadien, mais les victimes étaient des Canadiens.

  (1940)  

    Oui, il s'agissait de Canadiens. Vous êtes donc d'accord; le nombre de morts est d'environ un ou deux.
    Une voix: [Note de la rédaction: inaudible.] rues de Toronto. Comment est-ce possible?
    M. Dimitre Popov: D'accord. Soyons respectueux les uns envers les autres.
    Mon argument, c'est que le gouvernement...
    À ce moment-ci, il ne vous reste qu'environ 20 secondes.
    Très bien. Est-ce une façon de vous débarrasser de moi? Je vais présenter un autre argument.
    Le gouvernement n'est pas prêt à adopter une loi autorisant les organismes d'application de la loi à obliger les conducteurs à se soumettre à un alcootest sous prétexte que cela pourrait être une violation de la Charte, ce qui revient à sacrifier la vie de 1 000 Canadiens chaque année. La question serait donc de savoir pour quelles raisons les parlementaires ont présenté et adopté le projet de loi C-51, alors qu'on ne compte qu'une victime, et ce, abstraction faite du nombre beaucoup plus élevé de personnes qui sont sacrifiées, étant donné la façon dont le projet de loi C-51 est mis en oeuvre.
    J'aimerais aussi savoir si vous êtes au courant du nombre de personnes qui meurent chaque année en raison d'erreurs médicales. Vous ne le savez pas — ou vous ne voulez probablement pas le dire —; on parle d'environ 24 000 personnes. Que fait le gouvernement, s'il est si préoccupé par la sécurité du public?
    Très bien. Je pense que nous avons compris le point que vous faites valoir.
    J'aimerais rappeler aux gens qui sont ici ce soir que notre travail est d'écouter vos observations, et c'est ce que nous avons fait. Notre travail consiste à être à l'écoute de vos préoccupations, et j'espère que vos points de vue se reflètent dans les témoignages que nous avons entendus. Le Comité en tiendra compte pour la présentation de ses recommandations au gouvernement sur les changements souhaités par les Canadiens d'un bout à l'autre du pays.
    Je vous remercie du temps que vous nous avez accordé ce soir, de votre énergie et de la passion que vous démontrez pour ce sujet. Je tiens à souligner que nous avons ici des gens de Windsor et d'Oshawa, et que nous avons entendu des gens de Niagara Falls, de Hamilton et de Mount Hope. Bien que la réunion ait lieu dans la région du Grand Toronto, mais nous avons aussi attiré des gens de la périphérie, et nous en tiendrons compte également.
    Merci beaucoup de votre temps. Je vous encourage à présenter vos observations ou préoccupations au Comité de la sécurité publique, par l'intermédiaire de notre site Web. Je vous souhaite un bon retour à la maison. Merci.
    La séance est levée.
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