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SECU Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la sécurité publique et nationale


NUMÉRO 088 
l
1re SESSION 
l
42e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 30 novembre 2017

[Enregistrement électronique]

  (0845)  

[Traduction]

    Bonjour à tous. La 88e séance du Comité permanent de la sécurité publique et nationale est ouverte.
    Notre premier témoin est bien connu du Comité, l'honorable Ralph Goodale.
    Monsieur Goodale, je présume que vous allez nous présenter tous les collaborateurs qui vous accompagnent. Je vous cède la parole.
    Je vais le faire, monsieur le président. Je remercie sincèrement les membres du Comité de leur travail, au moment où ils s'apprêtent à entreprendre l'étude article par article du projet de loi C-59, loi concernant la sécurité nationale.
    J'ai le plaisir aujourd'hui d'être accompagné par un groupe de distingués collaborateurs qui travaillent dans le domaine de la sécurité publique et nationale. David Vigneault, comme vous le savez, est directeur du SCRS. Greta Bossenmaier, à ma droite, est chef du Centre de la sécurité des télécommunications, le CST, qui est très concerné par le projet de loi C-59.
    À ma gauche, Vincent Rigby est sous-ministre délégué à Sécurité publique. Je pense qu'il en est à sa première audience du Comité dans ses nouvelles fonctions. Kevin Brosseau est sous-commissaire à la GRC, et Doug Breithaupt travaille au ministère de la Justice.

[Français]

     Dans tout ce que fait notre gouvernement en matière de sécurité nationale, il y a deux objectifs inséparables: protéger les Canadiens et défendre les droits et libertés. Pour ce faire, nous avons déjà pris plusieurs mesures importantes, comme le nouveau comité de parlementaires établi par le projet de loi C-22 et la nouvelle directive ministérielle visant à éviter la complicité dans les cas de mauvais traitements. Cela dit, le projet de loi C-59 est certainement un élément central de nos efforts.

[Traduction]

    Comme je l'ai mentionné la semaine dernière à la Chambre, le projet de loi porte sur trois thèmes principaux: accroître la responsabilité et la transparence, corriger les lacunes de l'ancien projet de loi C-51, et veiller à ce que les agences canadiennes chargées de la sécurité nationale et du renseignement soient en mesure de s'adapter à l'évolution des menaces.
    Le projet de loi C-59 est le fruit des consultations les plus exhaustives qui aient été menées au Canada sur la sécurité nationale. Nous avons reçu plus de 75 000 mémoires provenant d'un grand éventail d'experts et d'intervenants ainsi que de la population. Les membres du Comité y ont aussi apporté une contribution très importante, comme ils pourront le constater, je l'espère, à son contenu.
    Toute cette information a guidé nos travaux et mené au projet de loi qui est devant nous aujourd'hui, et ce n'est qu'un début. Quand il est question de sujets aussi fondamentaux que notre sécurité et nos droits, le processus doit être aussi ouvert et complet que possible. C'est pourquoi nous avons choisi de demander au Comité d'examiner ce projet de loi non pas après, mais avant la deuxième lecture. Comme vous le savez, une fois que le projet de loi a passé l'étape de la deuxième lecture en Chambre, sa portée ne peut être modifiée. En procédant comme nous le faisons, vous aurez la chance d'examiner le projet de loi C-59 en détail plus tôt dans le processus, soit à partir de maintenant, et de proposer des amendements qui auraient pu autrement être considérés comme dépassant sa portée.
    Nous avons déjà eu plusieurs heures de débat, et j'aimerais profiter du temps qu'il me reste pour vous parler de certains points qui ont été soulevés à cette occasion. Tout d'abord, il y avait des inquiétudes au sujet des pouvoirs de réduction de la menace du SCRS. Certains voudraient qu'on les élimine totalement, alors que d'autres voudraient qu'ils soient illimités. Pour les mesures qui nécessitent un mandat judiciaire, nous avons donc décidé de les énumérer dans une liste précise.
    Le SCRS doit avoir, et les Canadiens ont besoin que le SCRS ait, des pouvoirs clairement définis, sans ambiguïté, afin qu'il puisse faire son travail qui est d'assurer notre sécurité. Le projet de loi apporte cette clarté. En ayant des pouvoirs très clairs, les agents du SCRS peuvent accomplir le travail difficile qui est le leur en sachant qu'ils le font en respectant pleinement la loi et la Constitution.
    Qui plus est, le projet de loi fera en sorte que les mesures prises par le SCRS respectent la Charte des droits et libertés. Le projet de loi C-51 supposait le contraire, et même si le SCRS a très clairement indiqué qu'il n'a jamais utilisé cette option, le projet de loi C-59 éliminera toute ambiguïté à ce sujet.
    Lors de son intervention pendant le débat en Chambre,M. Paul-Hus a parlé des changements que nous proposons d'apporter à la définition de « propagande terroriste » et à l'infraction criminelle de fomenter la commission d'une infraction de terrorisme. Il ne peut maintenant y avoir absolument aucun doute sur notre conviction — et je pense que tous les partis sont d'accord — que répandre les idéologies odieuses des organisations terroristes est un comportement qui ne peut être toléré. Nous savons que les groupes terroristes utilisent Internet et les réseaux sociaux pour joindre et radicaliser des gens et arriver à leurs fins ignobles et sanguinaires. Nous devons faire tout ce qui est en notre pouvoir pour les en empêcher.
    Le problème à l'heure actuelle est que la définition du projet de loi C-51 étant très vaste et très vague, elle est pratiquement inapplicable, et la disposition n'a pas été utilisée. Le projet de loi C-59 propose donc une terminologie claire et courante en droit canadien. Il interdirait de conseiller à une personne la commission d’infractions de terrorisme. Cela ne nécessite pas qu'une personne en particulier soit incitée à commettre une infraction particulière. Le simple fait d'encourager les autres à poser des gestes terroristes non spécifiques se qualifiera et enclenchera cette disposition du Code criminel.

  (0850)  

    La loi étant plus claire, il sera plus facile de l'appliquer. Des poursuites seront peut-être intentées en vertu de cette nouvelle disposition pour cette infraction, ce qui n'a pas été le cas jusqu'à maintenant.
    On a aussi demandé pendant le débat à la Chambre si les nouveaux mécanismes de reddition de comptes n'obligeront pas les agences de sécurité et de renseignement à faire trop de pirouettes pendant leur travail. La réponse, à mon avis, est certainement non. Lorsque nous avons présenté le projet de loi, deux de nos meilleurs experts en sécurité nationale au pays, Craig Forcese et Kent Roach, ont mentionné que le projet de loi constituait des avancées solides — tant du point de vue de la règle de droit que des libertés civiles — et sans coût apparent pour la sécurité.
    Les mécanismes de reddition de comptes des agences canadiennes de sécurité et de renseignement sont déficients depuis un bout de temps déjà. Le projet de loi C-22 a fait un grand pas pour corriger cette lacune en créant le Comité de parlementaires sur la sécurité nationale et le renseignement. Le projet de loi C-59 créera quant à lui l'Office de surveillance des activités en matière de sécurité nationale et de renseignement, que certains appellent, pour faire court, super CSARS, de même que le poste de commissaire au renseignement, une autre innovation du projet de loi C-59.
    Ces mesures ont été très bien accueillies. Certaines activités de surveillance prévues dans le projet de loi auront lieu a posteriori, et quand les activités de surveillance auront lieu en temps réel, nous avons inclus des dispositions pour couvrir les situations d'urgence où il faut intervenir sans attendre.
    Il est important de mentionner que la reddition de comptes vise, bien sûr, à s'assurer que les droits et les libertés des Canadiens sont protégés, mais aussi à s'assurer que nos organismes fonctionnent le mieux possible pour protéger les Canadiens. La sécurité et les droits sont deux objectifs essentiels qui doivent être atteints simultanément, et non pas l'un sans l'autre.
    Lors du débat, le Nouveau Parti démocratique a soulevé des questions au sujet de ce qu'on appelle communément la LCISC, la Loi sur la communication d'information ayant trait à la sécurité du Canada. On a suggéré de l'abroger totalement, mais, respectueusement, nous mettrions ainsi la sécurité des Canadiens en danger. Si un organisme ou ministère gouvernemental possède des renseignements dignes de foi concernant une menace à la sécurité, il doit être en mesure de les divulguer aux organismes partenaires concernés au sein du gouvernement pour s'occuper de cette menace, et vous vous souviendrez sans doute que cela a donné lieu à quelques enquêtes judiciaires dans l'histoire de notre pays au cours des dernières années.
    La divulgation doit être régie par des règles claires, et c'est pourquoi le projet de loi C-59 prévoit les trois exigences suivantes: premièrement, l'information divulguée doit cadrer avec les responsabilités en matière de sécurité nationale de l'organisme destinataire. Deuxièmement, la divulgation ne doit pas se répercuter sur la vie privée d'une personne plus que raisonnablement nécessaire. Troisièmement, l'organisme destinataire doit recevoir une confirmation que les renseignements sont exacts. De plus, nous indiquons clairement qu'aucun nouveau pouvoir en matière de collecte de renseignements n'est créé ou sous-entendu, et qu'un dossier doit être conservé sur tout renseignement communiqué à un autre organisme.
    Monsieur le président, je vois que vous me faites un geste inélégant, qui pourrait être mal interprété dans un autre contexte.
    Des députés: Oh, oh!
    L'hon. Ralph Goodale: J'ai quelques autres points, mais je présume qu'ils seront soulevés pendant la discussion. Je serai heureux de répondre à vos questions avec l'appui des gens qui m'accompagnent aujourd'hui.
    Merci.

  (0855)  

    Ce n'était pas aussi inélégant que cela aurait pu l'être. Merci, monsieur le ministre.
    Notre première intervenante est Mme Dabrusin.
    Merci d'être avec nous aujourd'hui, monsieur le ministre.
    Le cadre de sécurité est un élément très important pour les gens de ma circonscription. Pendant les consultations, j'ai organisé une rencontre à laquelle beaucoup de gens ont participé. L'assistance était nombreuse. Les gens étaient très préoccupés par la protection de la vie privée et des droits garantis par la Charte. Je le dis pour situer un peu en contexte les questions que je vais poser.
    Ma première question porte sur un sujet que vous avez abordé brièvement. Beaucoup de gens m'ont demandé pourquoi n'abroge-t-on pas tout simplement l'ancien projet de loi C-51 adopté sous l'ancien gouvernement lors de la précédente législature? Pourquoi a-t-on besoin d'un nouveau projet de loi? Pourquoi ne pas abroger la précédente mesure et laisser les choses comme elles étaient?
    La réponse courte, bien sûr, est que le projet de loi C-51 n'existe plus. Son contenu a été intégré dans d'autres textes législatifs qui touchent cinq ou six lois et différents organismes et activités du gouvernement du Canada. C'est un peu maintenant comme vouloir séparer les oeufs d'une omelette, au lieu d'abroger simplement ce qui était là.
    Au sujet de la consultation dont vous avez parlé, nous avons passé au peigne fin les lois sur la sécurité au Canada, qu'elles aient été touchées ou non par le projet de loi C-51, et nous nous sommes posés la question importante suivante: « est-ce la meilleure disposition, la bonne disposition pour atteindre, dans l'intérêt des Canadiens, les deux objectifs simultanément, soit assurer leur sécurité et protéger leurs droits et libertés?
    Nous avons tenu notre engagement électoral de corriger cinq ou six éléments précis du projet de loi C-51 que nous trouvions particulièrement problématiques. Nous avons corrigé chacun d'eux, comme nous l'avions promis, mais nous avons ajouté beaucoup d'autres éléments qui ont été soulevés, non pas pendant la campagne, mais pendant les consultations.
    Pour être clair, pourriez-vous nous préciser ces cinq éléments?
    Oui, je peux certainement obtenir la liste dans notre plateforme. On voulait notamment s'assurer que rien n'empêcherait les manifestations civiles; s'assurer que la Charte des droits et libertés était respectée, notamment pour ce qui est des mesures de réduction des menaces; s'assurer qu'il y aurait un examen de la loi après un certain temps, soit dans cinq ans lorsque l'ensemble du cadre de sécurité sera réexaminé; et clarifier certaines définitions, comme celle concernant la propagande terroriste, dont j'ai parlé. Nous avons aussi corrigé certains éléments concernant l'interdiction de vol.
    Nous avions aussi dit que nous créerions le comité de parlementaires. C'est fait. Nous avions dit que nous créerions un bureau de lutte contre la radicalisation. C'est fait. Lorsque le projet de loi C-59 sera adopté, tous les éléments dont il était question dans notre plateforme auront été concrétisés.

  (0900)  

    Merci.
    L'autre enjeu qui a surgi dernièrement — c'est une question qui a été soulevée au Parlement — est celui de la portée du projet de loi. Il est assez costaud. Pourriez-vous nous expliquer les liens entre les changements? Pourquoi est-ce important de les faire tous en maintenant, dans un seul projet de loi?
    Ces changements forment un tout cohérent et complet. Je répète que c'est le fruit de consultations. Aucun autre gouvernement n'avait tendu la main aux Canadiens pour qu'ils aient leur mot à dire concernant la sécurité nationale, qu'ils nous disent ce qui fonctionne et ce qui ne fonctionne pas et qu'ils soulèvent les enjeux qui comptent pour eux. Nous avions un document de travail pour stimuler ce dialogue, mais il n'y avait aucune limite aux enjeux que les Canadiens pouvaient soulever. Les Canadiens ont soulevé certains enjeux plus vigoureusement que d'autres et ils en ont soulevé certains plus souvent que d'autres; ce sont les enjeux que nous retrouvons dans le projet de loi C-59. Ils sont tous étroitement liés.
    Voici un exemple. Des personnes ont posé des questions concernant les dispositions sur le Centre de la sécurité des télécommunications se trouvant dans le projet de loi et elles se demandaient si ces mesures étaient directement liées au reste. Eh bien, le Centre de la sécurité des télécommunications était l'un de nos engagements électoraux. Il s'agit d'un sujet qui a été soulevé lors des consultations. L'une des nouvelles mesures que nous proposons dans le projet de loi est la création du commissaire au renseignement. Le titulaire s'occupe des questions liées au Centre de la sécurité des télécommunications et au Service canadien du renseignement de sécurité et d'autres questions. C'est donc logique de prendre toutes ces mesures en même temps.
    Comme nous avons un grand nombre d'enjeux connexes, cela nous amène à conclure qu'il faut débattre de ces mesures comme un tout au lieu de le faire à la pièce, parce qu'autrement le lien qui les unit ne serait pas aussi évident.
    Comme il ne me reste qu'une minute, votre réponse devra être très brève.
    Un autre enjeu est la surveillance de l'Agence des services frontaliers du Canada, et c'est une question qui est soulevée dans ma région. Les gens posent des questions à ce sujet.
    Il n'y a aucune surveillance indépendante dans le régime actuel. Le projet de loi C-59 contient-il des mesures de surveillance de l'Agence des services frontaliers du Canada?
    Oui.
    Si l'Agence des services frontaliers du Canada traite de questions ayant trait à la sécurité nationale et au renseignement, l'organisme sera visé par le projet de loi C-59, au même titre que le SCRS, le Centre de la sécurité des télécommunications, la GRC ou tout autre organisme de sécurité ou du renseignement ou tout autre service de police à l'échelle fédérale. Leurs activités ayant trait à la sécurité nationale et au renseignement sont visées par le projet de loi C-59 et le nouvel Office de surveillance des activités en matière de sécurité nationale et de renseignement.
    Ce qui manque encore en ce qui concerne l'Agence des services frontaliers du Canada, c'est un mécanisme pour les plaintes par des particuliers qui portent sur la conduite des agents n'ayant pas trait à la sécurité nationale. Nous proposerons une mesure à cet égard. C'est une lacune qui subsiste dans l'architecture, et cela fera l'objet d'un autre projet de loi.
    Merci, madame Dabrusin.
    Monsieur Motz, allez-y.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur le ministre, je vous remercie, de même que votre équipe, de votre présence ce matin.
    Je tiens à vous féliciter, vous et le ministère, d'avoir saisi le Comité du projet de loi avant la deuxième lecture. Je présume que ma naïveté de nouveau député me permet de me bercer d'illusions quant au motif derrière cela, et j'espère acquérir une meilleure compréhension à ce chapitre, étant donné que cela donne l'occasion au Comité de se pencher sur le projet de loi dans son ensemble sans être restreint par la portée, comme vous l'avez déjà mentionné.
    Je trouve notamment encourageant que le projet de loi porte sur divers facteurs qui, je présume, n'avaient pas été examinés avec attention dans le projet de loi C-51. Cela se veut un complément à cette mesure, ce qui est très bien. Lorsque vous avez pris la décision de saisir le Comité du projet de loi avant la deuxième lecture, j'ai eu l'impression que le ministère était conscient qu'il y avait certains éléments que nous pourrions améliorer. Nous pourrons apporter de légères modifications qui n'ont pas été faites lorsque le projet de loi a été rédigé au départ.
    Y a-t-il des éléments qui vous viennent à l'esprit et auxquels vous nous demandez de porter une attention particulière, soit des aspects qui n'ont pas déjà été réglés?

  (0905)  

    Monsieur Motz, nous avons écouté très attentivement les réactions de la population et des parlementaires lorsque nous avons déposé le projet de loi en juin. Dans l'ensemble, les réactions étaient favorables.
    Cependant, avec un projet de loi d'une telle envergure, il y aura des perspectives divergentes. Au cours de l'été, certains ont justement fait part de leur point de vue à ce sujet. Des universitaires ont écrit des articles, et diverses personnes qui ont participé aux consultations ont soulevé une question à propos de ceci ou une réserve à propos de cela.
    Il y a deux secteurs que j'aimerais mentionner en particulier. Premièrement, il y a les dispositions concernant la Loi sur la communication d'information ayant trait à la sécurité du Canada. Pouvons-nous les améliorer? Certains spécialistes, par exemple, MM. Forcese et Roach, ont formulé des suggestions à cet égard, et nous sommes disposés à les examiner très attentivement. Il s'agit d'un mécanisme essentiel pour que les organismes puissent communiquer de l'information et le faire de manière légale et adéquate en vue de protéger la vie privée. Le commissaire à la protection de la vie privée a également formulé certains commentaires. Voilà un premier domaine.
    En ce qui concerne un autre domaine, vous avez peut-être remarqué qu'au début de l'automne j'ai donné de nouvelles directives ministérielles aux organismes de sécurité sur la façon de communiquer de l'information avec des entités étrangères. Certains ont souligné qu'une directive ministérielle a traditionnellement force de loi. Il serait peut-être pertinent de prendre ce concept et de trouver une manière de l'inclure dans le projet de loi pour fournir un cadre législatif aux directives ministérielles.
    Ce ne sont que deux possibilités que nous pourrions examiner, et j'espère que d'ici la fin de ces échanges vous serez d'accord pour dire que vous avez raison d'être optimiste.
    Nous le verrons bien. Je demeure optimiste.
    L'un des aspects qui ont suscité des commentaires de nombreuses personnes ayant étudié la question est que la protection de la sécurité nationale et toute la question de la sécurité nationale sont un sport d'équipe non partisan et que nous devons tous être sur la même longueur d'onde quant à la façon dont cela s'effectue.
    Un autre aspect unique du projet de loi C-59, c'est qu'il est plus contraignant que ce qu'ont nos alliés. Nous avons beaucoup de règlements qui pourraient être des mesures réglementaires dans ce projet de loi.
    Vous avez déjà mentionné que vous voulez notamment que nous ayons la capacité de nous assurer que la sécurité nationale demeure dynamique et qu'elle est en mesure de suivre le rythme des menaces qui évoluent. Si tout est prévu dans un projet de loi et que nous avons seulement un cycle d'examen quinquennal, nous savons tous qu'il arrive parfois qu'un projet de loi prenne beaucoup de temps à modifier. Je me demande si nous n'aurions pas plutôt intérêt à prendre certains des bons éléments du projet de loi C-59 et à les transformer en mesures réglementaires. Ainsi, si nous devons apporter des modifications et être en mesure de nous adapter rapidement aux menaces qui évoluent, nous pouvons plus efficacement apporter ces modifications.
    Je serais curieux d'examiner toute suggestion précise que vous auriez concernant une mesure que nous aurions intérêt à adopter par la voie réglementaire plutôt que la voie législative. C'est tout à fait possible, parce que nous avons décidé de discuter du projet de loi au Comité avant la deuxième lecture. Si vous avez une suggestion dont vous voulez nous faire part, nous l'examinerons.
    Votre commentaire est en fait le contraire de ce que nous entendons normalement. Les gens demandent de ne pas passer par la voie réglementaire, mais bien de l'inclure dans le projet de loi. Je pense que cela dépendra de ce que vous proposez concrètement.

  (0910)  

    La seule raison que je soulève ce point, c'est que le visage du terrorisme évolue et qu'il nous arrive parfois d'être limités par la perspective d'un projet de loi, ce qui n'est pas facile à modifier. C'est seulement là où je veux en venir.
    Des procédures d'approbation existent à plusieurs endroits, et nous avons pris des dispositions dans le cas de situations d'urgence pour que les approbations nécessaires puissent être obtenues, mais cela n'empêche pas les organismes d'intervenir en cas d'urgence.
    Vous avez mentionné que le projet de loi C-59 était une tentative de préciser certaines ambiguïtés dans le libellé. Dans certaines de nos discussions préliminaires au Comité, nous avons déjà cerné certaines ambiguïtés et la façon dont le libellé a peut-être été utilisé. Nous voulons certainement nous assurer d'être cohérents à ce sujet, et nous proposerons peut-être certaines modifications pour utiliser, par exemple, « communiquer » au lieu de « divulguer »,« motifs raisonnables et probables » au lieu de « il est probable que », etc. Nous voulons appliquer le tout de manière cohérente.
    Vous devrez répondre au député à un autre moment.
    Monsieur Dubé, vous avez sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur le ministre, merci de votre présence au Comité.
    J'aimerais mentionner certains aspects aux fins du compte rendu avant d'aller plus loin.
    Nous avons grandement fait valoir notre capacité d'étudier le projet de loi de manière plus exhaustive en le faisant avant la deuxième lecture; n'empêche qu'au bout du compte nous avons seulement une heure pour vous poser des questions concernant un projet de loi de 138 pages. Je tiens évidemment à faire savoir que cela me déçoit. Au bout du compte, outre la question de la portée des amendements, cette façon de faire ne nous permet pas nécessairement d'avoir plus de temps pour étudier un projet de loi assez volumineux, comme vous pouvez le voir par la taille de nos cartables.
    L'autre élément que j'aimerais mentionner porte sur la notion selon laquelle il est impossible de revenir en arrière; je suis certain que le ministère de la Justice peut faire comme mon collègue, Randall Garrison, dans son projet de loi C-303, qui est actuellement au Feuilleton et qui abroge l'ensemble des dispositions de l'ancien projet de loi C-51. Je fais valoir que la notion selon laquelle c'est impossible à faire est incorrecte, parce que nous avons été en mesure d'élaborer un tel projet de loi.
    Cela étant dit, j'ai des questions.
    Le premier point que j'aimerais aborder concerne les modifications ayant trait au Centre de la sécurité des télécommunications dans la partie 3 du projet de loi. Cela se trouve au paragraphe 24(1) et en particulier aux alinéas a) et b) du projet de loi où il est écrit « acquérir, utiliser, analyser, conserver et divulguer de l’information accessible au public ». À cet article, nous retrouvons la mention « Malgré les paragraphes 23(1) et (2) », soit les paragraphes qui visent précisément à empêcher que ces activités visent des Canadiens ou des personnes se trouvant au Canada. Par conséquent, j'en comprends que cela signifie évidemment que les activités menant à l'acquisition de ces données par de tels moyens peuvent viser des Canadiens ou des personnes se trouvant au Canada.
    J'essaie seulement de comprendre, parce que nous pouvons certainement faire valoir qu'il s'agit d'information accessible au public et que c'est tant pis pour les personnes qui ne gèrent peut-être pas très bien leurs comptes de médias sociaux. Cependant, certains éléments sont inquiétants, en particulier les expressions comme « divulguer de l'information » et les personnes qui...
    Pouvez-vous répéter l'article exact auquel vous faites allusion?
    Je suis à la partie 3 au paragraphe 24(1).
    Merci.
    Cela se trouve aux alinéas 24(1)a) et b). À l'alinéa 24(1)a), nous avons « acquérir » de l'information; à l'alinéa 24(1)b), il est question de « l'information sur l'infrastructure à des fins de recherche et de développement ou de mise à l'essai », etc. Puis, à l'alinéa 24(1)c), il est écrit « mettre à l’essai ou évaluer des produits, des logiciels et des systèmes, notamment pour des vulnérabilités ».
    N'avons-nous pas raison de nous inquiéter qu'il soit possible ici d'arriver à la conclusion que, même s'il s'agit d'information accessible au public, nous pourrions commencer à scruter l'information peut-être publique des gens qui se trouve sur les réseaux sociaux, à créer des profils sur des personnes qui ne sont peut-être pas nécessairement des menaces à la sécurité nationale et à conserver ces données? C'est ma première question.
    Deuxièmement, qu'entendons-nous par « divulguer »? Qui sont exactement les destinataires de l'information divulguée?
    Monsieur Dubé, puis-je demander à Greta, qui est chef du Centre de la sécurité des télécommunications, de vous donner un premier élément de réponse?
    M. Matthew Dubé: Oui. Tout à fait.
    Merci de votre question.
    En ce qui concerne cet article, le paragraphe 24(1) du projet de loi mentionne la façon dont le Centre de la sécurité des télécommunications peut acquérir, utiliser, analyser, conserver et divulguer de « l'information accessible au public ». Je crois qu'il y a deux choses qui peuvent nous aider à nous situer. Premièrement, cela doit être lié à notre mandat. Notre organisme s'occupe du renseignement électromagnétique étranger, et nous mettons l'accent sur les cibles étrangères et les menaces étrangères envers le Canada. Notre mandat n'est donc pas de mettre l'accent sur les Canadiens. Nous sommes bel et bien un organisme qui met l'accent sur les menaces étrangères envers le Canada.
    En ce qui a trait au but de cette disposition, cela nous permet véritablement d'être en mesure de mener des recherches simples, pour le dire ainsi, ayant trait à notre mandat. Voici un exemple. Par exemple, nous pouvons publier un rapport d'un service de renseignement étranger ou un rapport sur la cybersécurité, et de l'information accessible au public pourrait contribuer à étayer ces rapports. Par exemple, dans le cas d'une atteinte à la sécurité ou à la cybersécurité, nous pourrions vouloir faire référence à de l'information accessible au public qui traite peut-être de la nature de cette atteinte et de la façon dont l'atteinte a été signalée ailleurs.
    Nous n'avons pas un mandat d'enquête. Nous n'avons pas le mandat de mettre l'accent sur les Canadiens. Je répète que c'est très étroitement lié à notre mandat, soit le renseignement électromagnétique étranger et la cybersécurité.

  (0915)  

    Très bien. Cependant, si nous prenons le paragraphe 23(1) du projet de loi, il est précisé que les activités du Centre « ne peuvent viser des Canadiens ou des personnes se trouvant au Canada », tandis que nous avons à l'article 24 du projet de loi « Malgré les paragraphes 23(1) et (2), le Centre peut mener » et ce qui suit a déjà été lu. En gros, nous disons que les activités ne viseraient pas normalement des Canadiens ou des personnes se trouvant au Canada, mais ce n'est plus le cas, parce qu'il est précisé que c'est fait « malgré » ce que prévoit l'article 23 du projet de loi.
    Je comprends certainement les situations hypothétiques données en exemple. Toutefois, cet article ne permet-il pas la détention et l'utilisation de technologies qui peuvent créer d'immenses toiles qui finiront inévitablement par toucher des gens au Canada? Nous pouvons, par exemple, penser à l'utilisation possible des périphériques StingRay. Cela ne risque-t-il pas...? La façon dont est formulé l'article, c'est certainement possible, lorsque nous considérons cet extrait:
acquérir, utiliser, analyser, conserver et divulguer de l’information sur l’infrastructure à des fins de recherche et de développement ou de mise à l’essai de systèmes ou pour mener des activités de cybersécurité et d’assurance de l’information dans l’infrastructure à partir de laquelle celle-ci a été acquise [...]
    À mon avis, cela semble créer une situation où vous pourriez recueillir de l'information à partir de l'infrastructure ici au Canada dont se servent évidemment des Canadiens sans nécessairement avoir la même obligation qui est créée en excluant les Canadiens à l'article 23 du projet de loi.
    Je peux ajouter deux autres points. Je suis au paragraphe 24(1) du projet de loi. Dans la première partie, il est question des « activités ci-après dans la réalisation de son mandat ». Je répète que notre mandat a trait au renseignement électromagnétique étranger et à la cybersécurité. C'est vraiment l'élément central qui lie le reste des alinéas.
    De plus, pour tout simplement veiller à une utilisation adéquate, toutes les activités du Centre, y compris toutes celles qui seront menées en vertu du paragraphe 24(1) du projet de loi, feront l'objet des mécanismes de surveillance dont le ministre a déjà parlé concernant l'Office de surveillance des activités en matière de sécurité nationale et de renseignement et évidemment le nouveau Comité des parlementaires sur la sécurité nationale et le renseignement.
    Merci.
    Mon temps file. Je crois que cela montre bien pourquoi une heure avec le ministre est peut-être insuffisante, étant donné que je viens de pratiquement passer sept minutes à parler d'un article du projet de loi.
    N'empêche qu'une heure avec Greta est beaucoup plus utile.
    Des voix: Ah, ah!
    C'est certain.
    Monsieur le ministre, j'aimerais revenir à l'article sur la communication d'information. J'aimerais comprendre, parce que vous avez dit à la Chambre qu'il y a une différence dans la version anglaise entre le mot « disclosure » qui se trouve maintenant dans les dispositions et le mot « sharing » qui s'y trouvait. J'aimerais comprendre les motifs juridiques qui font en sorte de créer une différence.
    Lorsque nous avons présenté cet article, nous voulions clairement affirmer que nous ne créons aucun nouveau pouvoir concernant la collecte de renseignements. Cela concerne uniquement de l'information qui existe déjà.
    Monsieur le ministre, si vous me le permettez, dans cette optique...
    Je m'excuse, monsieur Dubé. Je vous ai déjà accordé un peu plus de temps.
    Monsieur Picard, vous avez sept minutes.

[Français]

     Merci, monsieur le président.
    Monsieur le ministre, madame, monsieur, je vous remercie de vous être rendus disponibles.
    Ma question porte sur le Service canadien du renseignement de sécurité, le SCRS, et sur les suites de la décision du juge Noël.
     En ce qui a trait à cette décision, la nature des informations sur lesquelles on pouvait enquêter et qu'il était possible de conserver, de même que la mesure dans laquelle il était possible d'enquêter, ont été problématiques. J'aimerais savoir de quelle façon ces obstacles ont été surmontés. Comme l'a dit le juge, il était impossible de conserver l'information, même si celle-ci pouvait être utile dans le cadre des enquêtes en cours.

[Traduction]

    Le jugement du juge Noël est très intéressant. Certaines procédures et pratiques le préoccupaient évidemment, et le juge a fourni des consignes quant à la manière de modifier ces pratiques. Le projet de loi C-59 donne suite aux conseils et au jugement du juge Noël concernant une procédure ayant trait à la gestion des données et des ensembles de données. C'est défini dans une série très élaborée de règles qui s'appliqueront.
    Cependant, le juge Noël a également mentionné autre chose. Je n'ai pas exactement ce qu'il a dit entre les mains, mais il a mentionné qu'il ne faut pas oublier que la Loi sur le SCRS a été rédigée en 1984. Rappelons-nous ce qu'était la réalité en 1984. Si vous aviez un téléphone cellulaire, votre appareil était de la grosseur d'une boîte à pain. Le télécopieur était une technologie de pointe. Beaucoup de choses ont changé depuis. Comme vous l'avez mentionné, monsieur Picard, il a clairement dit que nous devrions peut-être revoir ces dispositions, compte tenu de tous les changements technologiques qui sont survenus depuis 1984.
    Le Comité de surveillance des activités de renseignement de sécurité a formulé des recommandations. Des tribunaux se sont prononcés sur la question. Des enquêtes judiciaires ont permis d'arriver à des conclusions dans une vaste gamme de circonstances en ce qui a trait à la collecte, à l'analyse et à l'utilisation de certains ensembles de données et à ce qui devrait être permis et à ce qui ne devrait pas l'être. Nous avons tenu compte de tous ces éléments, et cela se retrouve maintenant dans les dispositions du projet de loi C-59.
    Il y avait un autre aspect dans le jugement du juge Noël; il a laissé entendre dans un langage assez direct que les communications entre l'organisme et le tribunal doivent s'améliorer et que l'organisme doit voir à un meilleur respect de son obligation de franchise à l'égard du tribunal.
    David Vigneault est le directeur du SCRS. J'aimerais lui demander de faire un commentaire concernant la question de l'obligation de franchise.

  (0920)  

[Français]

    Monsieur Picard, je vais vous donner une idée de la façon dont nous interprétons la décision du juge Noël.
    Le Service a une liste d'enjeux qui sont soulevés lorsqu'il comparaît devant la Cour pour obtenir des mandats. Il y a donc plusieurs enjeux au sujet desquels la Cour soulève des questions. Nous conservons une liste qui comprend tous ces enjeux. Nous retournons devant la Cour pour donner des explications détaillées et nous lui offrons des séances de breffage technique. C'est notamment cette candeur qui a mené, en 2016, à la décision du juge Noël. Il y a une forme de transparence et, en quelque sorte, un partenariat. Ce n'est peut-être pas le mot adéquat, étant donné qu'on parle ici de la Cour, mais il reste que nous comprenons les obligations qui sont imposées au Service et nous travaillons très étroitement avec la Cour pour tenter de répondre de la meilleure façon possible à ses préoccupations.
    Récemment, j'ai eu l'occasion de m'entretenir avec les juges désignés de la Cour fédérale et d'autres membres du système judiciaire. Je leur ai fait part de mon point de vue sur la façon dont le Service allait se comporter à l'avenir. Je pense que, dans une large mesure, le sentiment de confiance a été rétabli. L'obligation de conserver la confiance de la Cour en étant ouvert et transparent à son égard repose sur mes épaules.
     La transparence est souvent bienvenue.
    Cela dit, cela vous donne une plus grande flexibilité quant à la cueillette d'information et, par conséquent, de pouvoir avoir plus d'information et de l'information de bonne qualité. L'effet pervers de cela, c'est la possibilité d'avoir de l'information qui concerne des tierces parties.
    En ce moment, quelles mesures prenez-vous pour protéger l'information sur des tierces parties?
    Toute information que recueille le Service doit absolument être liée à son mandat, qui est de surveiller les menaces à la sécurité du Canada. Au départ, l'information recueillie doit être liée à une menace à la sécurité du Canada.
    Le projet de loi C-59 énonce des catégories d'information, qui sont déterminées par le ministre. En tant que directeur, il nous dira quelles catégories d'information nous aurons le droit d'utiliser. Les femmes et les hommes du Service iront chercher cette information de façon organisée. Si cette information fait partie d'un ensemble de données canadiennes, le commissaire au renseignement devra évaluer la décision du ministre.
    Dans le cas d'information canadienne, la Cour fédérale devra déterminer si nous pouvons l'utiliser et la conserver. La façon dont nous allons utiliser cette information sera revue par le nouvel Office de surveillance des activités en matière de sécurité nationale et de renseignement et par le Comité des parlementaires sur la sécurité nationale et le renseignement.
    La façon dont les catégories sont déterminées par le ministre, la façon dont nous utiliserons l'information canadienne, le rôle que joueront la Cour fédérale et le commissaire au renseignement et le fait que l'utilisation subséquente de cette information sera revue par des comités de supervision, tout cela nous permettra d'utiliser des données qui sont absolument essentielles pour contrer les menaces du XXIe siècle. Nous devons absolument avoir accès à ces données. Écrite il y a plus de 30 ans, la loi reflétait son âge, comme l'a dit le juge Noël.
    Ces mesures nous permettront, en 2017, de contrer les menaces de la bonne façon, tout en rendant des comptes quant à la protection des données sur des tierces parties, comme vous l'avez mentionné.

  (0925)  

[Traduction]

    Monsieur MacKenzie, vous avez cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci aux témoins de leur présence ici.
    Sauf votre respect, monsieur le ministre, le projet de loi C-51 a été adopté il y a quelques années, et je crois me rappeler qu'il avait joui d'un appui généralisé de la Chambre. Je crois que vous avez voté en faveur du projet de loi. Je crois que ce projet de loi a apporté des changements qui, à l'époque, étaient appropriés. Dans le cadre de l'examen trois ans plus tard, nous cherchons en gros à en faire l'examen. Je crois que vous serez d'accord pour dire qu'il ne s'agit pas d'une refonte complète de l'ancien projet de loi, mais ce processus ajoute certains éléments qui sont probablement importants.
    Lorsque vous mentionnez la loi qui interdit expressément les activités de défense d'une cause, de protestation et tout le reste, les changements qu'apportera le nouveau projet de loi entraîneront-ils des accusations qui n'étaient pas possibles en vertu du projet de loi C-51? Les probabilités de poursuites sont-elles plus élevées avec le projet de loi C-59 qu'avec le projet de loi C-51?
    Comme vous le savez, c'est toujours difficile de le prévoir, monsieur MacKenzie.
    Dans l'exemple que j'ai utilisé dans mon exposé, je crois que ma réponse à votre question serait oui en ce qui a trait aux outils disponibles pour lutter contre la propagande terroriste. Le problème avec le langage utilisé dans le projet de loi C-51 était que c'était très vaste. Pour reprendre l'expression des avocats devant la cour, le libellé était tellement vaste que c'était vague et impossible à appliquer.
    Je vous rappelle qu'il y a eu certaines discussions durant la campagne électorale en 2015 faisant valoir que le libellé de cet article pourrait être utilisé pour inclure certaines publicités électorales, ce qui n'était évidemment pas le but de la mesure législative.
    Nous avons précisé le libellé sans nuire à son efficacité, et je crois que nos changements rendront plus probables le dépôt d'accusations et les condamnations, parce que nous avons dressé un parallèle avec une structure juridique existante que les tribunaux, les avocats et les procureurs connaissent, soit l'infraction de conseiller. Ce n'est clairement pas obligé que ce soit une personne précise qui conseille à une autre de faire quelque chose de précis. Si une personne conseille de manière générale à une autre de commettre un acte terroriste, c'est une infraction de conseiller une telle commission en vertu du projet de loi, tel que nous l'avons écrit.
    J'espère que nous conviendrons tous que c'est un changement adéquat. Je crois que nous voyons des modifications dans le projet de loi avec lesquelles nous sommes d'accord, et je crois que nous avons un examen quinquennal pour une bonne raison. Je ne suis pas certain si nous devons attendre cinq ans pour ce faire; un examen plus fréquent que tous les cinq ans peut être nécessaire pour certains de ces éléments.
    Je regarde bon nombre des mesures dont il a été question, et nous parlons de la collecte d'information. Pour les gens sur le terrain qui appliquent ces mesures et qui essaient de protéger les Canadiens, je me demande pourquoi nous nous inquiétons autant de l'information accessible au public que nous pouvons recueillir, notamment ce qui se trouve sur les médias sociaux. Je crois que les Canadiens sont au courant grâce aux médias nationaux que nous avons reçu de l'information obtenue par d'autres pays grâce aux médias sociaux qu'utilisaient des gens. Je vous donne l'exemple de l'incident qui s'est produit dans le sud-ouest de l'Ontario; l'information provenait d'un autre pays et elle avait été obtenue grâce aux médias sociaux.
    J'ai tout simplement l'impression que nous nous leurrons si nous pensons que nous ne devrions pas surveiller les médias sociaux au pays dans l'intérêt des Canadiens en particulier.

  (0930)  

    Monsieur MacKenzie, à ce sujet, j'aimerais peut-être demander à Kevin Brosseau de faire un commentaire. Je crois que vous faites référence à l'affaire Driver à Strathroy. Cette importante information qui nous a été transmise par le FBI découlait en fait d'une opération de renseignement menée par les autorités américaines. Cela ne provenait pas des médias sociaux. Une autre méthode a été utilisée.
    Cependant, la capacité des autorités américaines de nous communiquer de l'information et notre capacité d'en faire autant ont été fondamentales. La relation qui existe entre le SCRS et ses homologues et entre la GRC et ses homologues est extraordinaire. Dans cette affaire, les autorités ont eu besoin d'environ huit heures pour déterminer très précisément ce qui se tramait et empêcher une très grave tragédie de se produire.
    Merci, monsieur MacKenzie.
    Monsieur Spengemann, allez-y.
    Merci beaucoup, monsieur le président. Je souhaite la bienvenue au Comité au ministre Goodale et à son équipe. J'offre mes félicitations à M. Rigby et je lui souhaite la bienvenue dans ses nouvelles fonctions.
    À l'instar de M. Motz, j'aimerais vous remercier de nous avoir saisis du projet de loi avant la deuxième lecture.
    Monsieur Goodale, ma question a directement trait à l'idée générale que nous avons besoin d'avoir une bonne sécurité et de protéger nos droits garantis par la Charte. Cela concerne les jeunes Canadiens et leur vulnérabilité face au terrorisme. En particulier, nous avons des réseaux terroristes dans le monde, notamment Abu Sayyaf, aux Philippines, Al-Shabaab, en Somalie, le groupe État islamique, en Syrie et au Levant, et de futurs réseaux terroristes qui risquent de chercher à s'en prendre aux jeunes dans divers pays. Selon ce que j'ai lu, cela vise vraiment des jeunes de 14 à 19 ans ou qui sont dans la jeune vingtaine.
    L'article 159 du projet de loi C-59 a trait à la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents et à son application; cela inclut notamment le principe selon lequel la détention ne remplace pas les mesures sociales et que cela vaut également pour la détention préventive, comme le prévoit l'article 83.3 du Code criminel. Ce n'est pas un substitut.
    J'aimerais vous entendre au sujet de votre vision sur la manière dont le projet de loi concerne les jeunes délinquants et les jeunes vulnérables en ce qui a trait essentiellement à ce qui se passe avant la commission d'une infraction de terrorisme ou leur recrutement par des réseaux. Ensuite, j'aimerais avoir votre vision globale sur ce que nous pouvons faire mieux pour empêcher le terrorisme à la source en nous assurant que ces réseaux ne cherchent pas à s'en prendre aux jeunes et aux enfants.
    Il s'agit là d'un problème très grave, monsieur Spengemann. Vous abordez réellement deux éléments auxquels nous travaillons. Grâce à l'éventail de nouvelles dispositions que comprend le projet de loi C-59, nous donnerons au Service canadien du renseignement de sécurité, à la GRC et aux autres organismes la capacité et les outils nécessaires pour être aussi bien informés qu'il est humainement possible de l'être au sujet de ces activités et pour pouvoir agir dans le respect de la loi et de la Constitution afin de faire ce qu'ils doivent faire pour contrer ces menaces. Lorsque les infractions mettent en jeu des jeunes, la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents s'applique; le processus sera donc régi par cette loi lorsque de jeunes contrevenants sont concernés.
    L'autre facette est celle de la prévention, une question vers laquelle tous les pays membres du G20, et probablement de nombreux autres pays du monde, portent leur attention. Les alliés de la collectivité des cinq, ainsi que les pays membres du G7 et du G20 ont d'ailleurs discuté du sujet.
    Comment pouvons-nous trouver des moyens de mettre en commun l'expertise de tous les pays concernés? Comment trouver des moyens de détecter les jeunes vulnérables suffisamment tôt pour avoir une occasion décente d'intervenir efficacement afin de mettre fin à la spirale de l'influence terroriste et de les sortir du cycle?
    De toute évidence, les techniques d'intervention et de lutte à la radicalisation ne fonctionneront pas à tout coup. Voilà pourquoi nous devons disposer d'un large éventail d'outils pour lutter contre les menaces terroristes; quand la prévention s'avère possible, toutefois, nous devons renforcer l'expertise pour intervenir à cet égard. C'est pour cette raison que nous avons mis sur pied le nouveau Centre canadien d'engagement communautaire et de prévention de la violence, un bureau national qui coordonnera les activités mises en oeuvre à l'échelle locale, municipale et universitaire au pays, leur accordera davantage de ressources et assurera l'échange des idées et des renseignements les meilleurs pour que si nous pouvons prévenir une tragédie, nous disposions des outils pour y parvenir.

  (0935)  

    Merci, monsieur le ministre.
    Très brièvement, serait-il juste de dire qu'il est aussi important de contrecarrer les efforts de recrutement des organisations terroristes à l'échelle internationale et nationale que de nuire à leurs finances?
    Oui, c'est important, bien qu'il soit difficile de classer les activités en ordre hiérarchique. Toutes les activités sont importantes, et nous faisons de notre mieux pour déployer un effort global coordonné avec toutes les parties prenantes.
    Merci, monsieur Spengemann.
    Madame Gallant, vous disposez de cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Par votre entremise, je poserais la question suivante au ministre. Les citoyens canadiens de toutes les régions du pays demandent pourquoi le gouvernement semble se préoccuper davantage des droits des terroristes que de la sécurité de la population canadienne quand des combattants de Daech rentrent au pays.
    Considérez-vous que ces combattants peuvent être réhabilités?
    Madame Gallant, je pense qu'en présentant les choses ainsi, vous donnez une impression complètement fausse de la position du gouvernement.
    Nous pensons avoir besoin d'un ensemble solide de mesures pour lutter contre la menace terroriste. Nous devons notamment participer à la coalition internationale contre Daech, au sein de laquelle le rôle Canada s'est révélé un atout de taille, particulièrement au chapitre de la collecte de renseignements. Nous avons besoin de la capacité de surveillance et de collecte de renseignements de nos organismes. Il faut que nos forces de police soient en mesure de préparer des dossiers pouvant être défendus en cour. Nous devons pouvoir utiliser les listes de personnes interdites de vol, y inscrire des gens et des entités en vertu du Code criminel, demander des engagements à ne pas troubler l'ordre public et exercer les pouvoirs de réduction de la menace du SCRS.
    Merci, monsieur le ministre.
    Il faut pouvoir utiliser tous ces outils, y compris les efforts de prévention.
    Dans le domaine de la défense, je me souviens que votre gouvernement a retiré les avions de combat CF-18 qui défendaient les soldats canadiens luttant contre Daech.
    Pourquoi ce projet de loi ne contient-il pas de mesures criminalisant les voyages à destination des régions contrôlées par des organisations terroristes?
    Le Code criminel en fait déjà une infraction.
    Est-ce une infraction de se rendre dans certaines régions?
    Quiconque voyage ou quitte le Canada à des fins terroristes commet une infraction en vertu du Code criminel.
    Alors pourquoi les gens qui reviennent ne sont-ils pas accusés d'avoir commis cette infraction?
    Une soixantaine de combattants sont revenus au pays. Gardez à l'esprit que ces gens se sont rendus dans toutes sortes de nids d'activités terroristes du monde. Certains ont participé activement aux activités, d'autres moins. Les efforts en matière de sécurité et de renseignement des Canadiens et de leurs alliés permettent de surveiller attentivement ces personnes pour savoir exactement ce qu'elles sont en train de faire.
    À leur retour, elles sont accusées si les preuves recueillies peuvent tenir la route en cour. Au cours des deux dernières années, deux accusations ont été déposées parce que nous jugions avoir des preuves valables. Aucune accusation n'avait été portée jusque-là.

  (0940)  

    Monsieur le ministre, vous parlez d'une soixantaine de personnes, alors qu'en réalité, nous n'avons pas de chiffre exact. En fait, les gens qui ont quitté les États-Unis pour réclamer le statut de réfugié au Canada voulaient se faire prendre à la frontière. Les organismes responsables de la sécurité à la frontière ont été débordés. Mais qu'en est-il des gens qui veulent traverser la frontière sans être vus? Nous ignorons s'il n'y a que 60 personnes qui ont combattu pour Daech.
    À la lumière de l'attaque terroriste à laquelle M. MacKenzie a fait référence, des attaques terroristes ont été commises au Royaume-Uni, dans l'Union européenne et au Canada en recourant à des objets qui sont à la disposition des citoyens, comme des véhicules ou des produits chimiques. Le gouvernement a-t-il examiné les dispositions du projet de loi C-59 afin d'autoriser les activités perturbatrices d'urgence appropriées au besoin, y compris sans mandat?
    À notre avis, les mesures que prévoit le projet de loi, instaurées à la suite de consultations exhaustives menées auprès d'experts canadiens, de parlementaires et du grand public, permettent effectivement d'atteindre deux objectifs: assurer la sécurité des Canadiens et préserver leurs droits et libertés, et ce, concurremment.
    J'ai une dernière question. La tâche du centre de déradicalisation consiste entre autres, selon les intervenants, à lire de la poésie aux combattants de Daech qui reviennent au pays. Comme des personnes de pays alliés nous écoutent, pouvez-vous nous donner le titre précis d'un poème qui pourrait contribuer à déradicaliser ces combattants?
    De toute évidence, vous tentez de...
    Monsieur le ministre, Mme Gallant ne vous a malheureusement pas laissé assez de temps pour donner votre avis sur la poésie.
    J'accorde les cinq dernières minutes à M. Fragiskatos, après quoi je suspendrai la séance.
    Merci, monsieur le président. Je remercie également le ministre et les fonctionnaires de témoigner aujourd'hui.
    Monsieur le ministre, vous avez indiqué au début que la Charte des droits prime dans ce dossier. Je me demande si vous pourriez traiter de la place de la Charte dans tout ceci et dans le projet de loi C-59 afin de nous expliquer quand elle s'applique.
    Le principal problème découlant du projet de loi C-51, c'est que le libellé initial de ce qui est devenu l'article 12.1 de la Loi sur le SCRS indiquait, en raison de la manière dont il était structuré, que le SCRS pouvait s'adresser à un tribunal pour obtenir l'autorisation de violer la Charte. Tous les spécialistes du droit que j'ai entendus ont affirmé que cette disposition n'avait aucune valeur juridique. Une loi ordinaire comme la Loi sur le SCRS ne peut avoir préséance sur la Charte. C'est cette dernière qui prime. Le libellé de l'article 12.1 était toutefois structuré de manière à donner l'impression que le SCRS pouvait s'adresser à un tribunal pour obtenir l'autorisation de violer la Charte.
    Le projet de loi C-59 modifie ce libellé, notamment en ajoutant une liste des activités de perturbation que le SCRS peut entreprendre avec l'autorisation d'un tribunal. Cependant, lorsqu'il s'adresse à la cour pour obtenir cette autorisation, ce n'est pas pour être autorisé à violer la Charte, mais pour s'assurer que les activités respectent cette dernière, y compris l'article 1.
    Voilà ce qui différencie la structure de l'ancienne disposition et le nouveau libellé. Nous avons tenté d'indiquer nettement que la Charte prime.
     Merci beaucoup.
    D'une part, je voulais vous interroger sur les droits, mais de l'autre, je veux aussi vous poser des questions sur la sécurité, notamment sur la cybersécurité.
    Une seule attaque pourrait mettre à mal nos systèmes bancaires et électriques. Je vous accorde peut-être une minute pour répondre à la question suivante: en quoi le projet de loi C-59 fournit-il un cadre solide pour prévenir de telles attaques et protéger la population canadienne?
    Au cours des prochains mois, vous pouvez vous attendre à voir notre gouvernement présenter tout un éventail de propositions visant à renforcer la cybersécurité. Les politiques actuelles en la matière remontent à 2010; elles étaient considérées comme avant-gardistes à l'époque, mais la technologie a évolué.
    Nous proposerons donc un ensemble entièrement nouveau de mesures pour renforcer la cybercapacité du Canada, accordant notamment un nouveau pouvoir au Centre de la sécurité des télécommunications. Pour gagner du temps, je demanderais peut-être à Greta de traiter précisément des cyberpouvoirs prévus dans les dispositions sur le CST.

  (0945)  

    Merci beaucoup, monsieur Goodale.
    Je m'attarderai sur une disposition en particulier, puisque le ministre a fait référence à l'infrastructure essentielle. Le CST utilise actuellement un certain nombre d'outils de pointe afin de protéger les systèmes du gouvernement fédéral. Dans le projet de loi, une disposition permettrait au CST, à la demande du propriétaire d'une infrastructure jugée importante pour le gouvernement fédéral, de déployer ses outils ultramodernes pour défendre une infrastructure essentielle qui serait, par exemple, attaquée depuis l'étranger.
    Voilà un exemple concret de mesure particulière du projet de loi qui permettrait de mieux protéger les citoyens et les infrastructures du Canada contre les cyberattaques.
    Merci beaucoup.
    Ce qui change la donne, c'est que sans ce pouvoir, on reste les bras croisés à attendre qu'une attaque survienne, même si on sait qu'elle va se produire. On ne peut être proactif. Grâce à ces nouveaux pouvoirs, le CST pourrait détecter une attaque qui risque fort de se produire et être plus proactif afin de la prévenir au lieu de tenter de réparer les pots cassés après les faits.
    Si je vous ai bien compris, monsieur le ministre, la définition de « propagande terroriste » que comprenait le projet de loi C-51 était si particulière que cela avait un effet restreignant. Est-il juste de dire qu'elle était inefficace et relativement inutilisable? Est-ce une critique juste?
    Cette définition n'a pas été utilisée au cours des deux ou trois ans qui se sont écoulés depuis l'adoption du projet de loi. À notre avis, son libellé était si vague qu'il la rendait en grande partie inutilisable.
    Nous avons tenté d'utiliser une formulation plus courante. Dans les annales du droit pénal, l'infraction consistant à prodiguer un conseil est très bien comprise. En utilisant cette formule, on résout le problème de manière à rendre la disposition applicable.
    Merci, monsieur Fragiskatos.
    Monsieur le ministre, je tiens à vous remercier au nom du Comité. Vous savez que vous êtes toujours le bienvenu devant le Comité.
    Sur ce, je vais suspendre la séance. Pour éviter les pertes de temps et être efficace, je demanderais à ceux qui souhaiteraient poser une ou deux questions au ministre de le faire à l'extérieur de la pièce pour que nous puissions poursuivre la séance avec les fonctionnaires.
    La séance est suspendue pour deux minutes.

  (0945)  


  (0950)  

    Nous reprenons la séance pour entamer la deuxième heure de notre rencontre.
    Comme les témoins ne font pas d'exposé, je pense que nous passerons immédiatement aux questions.
    Monsieur Spengemann, c'est vous qui avez la parole en premier, pour sept minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président. Merci, mesdames et messieurs, de demeurer avec nous pour la deuxième heure.
    Mes premières questions concernent la Loi sur la sûreté des déplacements aériens. Moi et un grand nombre de mes collègues avons entendu les doléances de certains électeurs, qui se préoccupent non pas de la Loi, mais des situations où des jeunes et des enfants qui ne figurent pas sur une liste de personnes interdites de vol se voient toutefois refuser le droit d'embarquement. Le problème est difficile à résoudre, puisqu'il n'existe pas de système de recours.
    Le ministre ayant souligné que le projet de loi nous a été renvoyé avant la deuxième lecture, je voulais vous demander ce que vous pensez du projet de loi dans sa forme actuelle en ce qui concerne l'élaboration d'un système de recours. Le Comité devrait-il porter attention à des domaines particuliers?
    En outre, pour des questions de temps, nous subissons de fortes pressions afin de corriger cette partie de la loi. Certains électeurs considèrent qu'il faudrait adopter une solution rapide provisoire. J'aimerais que vous nous indiquiez si c'est possible et faisable.
    Une fois que la mesure législative aura été adoptée et que les crédits budgétaires auront été accordés pour résoudre ce problème, que faudrait-il faire pour établir ce système? Je pense qu'on saisit encore mal l'ampleur et la complexité des démarches nécessaires pour établir un système de recours efficace.
    Pour une question de procédure, puis-je vous demander de poser vos questions à une personne en particulier, étant donné que nous recevons de nombreux témoins?
    M. Rigby pourrait peut-être commencer, mais si certains de ses collègues souhaitent intervenir, je les encourage également à répondre.
     Merci beaucoup, monsieur le président. Je vous remercie de me poser cette question.
    Je la renverrai à Monik pour qu'elle vous fournisse des détails, puisqu'elle travaille à ce dossier.
    Selon moi, toutefois, le ministre a clairement indiqué que l'établissement d'un système de recours constitue une priorité pour le gouvernement. Nous avons déjà commencé à réaliser des progrès en ce sens dans le projet de loi. Pour ce qui est d'une solution rapide, je ne pense pas que nous puissions en trouver une facilement. Comme vous le dites, avec le temps, nous chercherons une solution plus exhaustive.
    Pour ce qui est du recours, il faut commencer, à mon avis, par instaurer un système de contrôle centralisé pour que ce soit le gouvernement qui se charge du contrôle. À l'heure actuelle, cette tâche relève de la responsabilité de la compagnie aérienne. Nous la confierons de nouveau au gouvernement pour qu'il applique un processus de contrôle plus rigoureux et plus cohérent à l'échelle du pays. Le projet de loi lui-même fait également référence à un numéro d'identification permettant à ceux qui demandent ce numéro de se soumettre au contrôle à l'avance. Si on croit par erreur qu'ils figurent sur la liste, le problème peut être résolu avant que les gens ne se présentent à l'aéroport.
    Nous avons également indiqué clairement que quand un enfant ne figure pas sur la liste, par exemple, le gouvernement en informera les parents. Nous considérons qu'il s'agit d'une disposition importante, car les parents appréhendent beaucoup de recevoir une réponse positive quand ils demandent si leur enfant est sur la liste, que ce soit par accident ou en raison d'une autre disposition. Si nous pouvons aviser les parents que l'enfant ne figure pas sur la liste, cela atténue grandement leur appréhension.
    Avec le temps, nous adopterons une approche très exhaustive. Pour avoir un processus de contrôle centralisé, nous devrons concevoir un système à partir de zéro. Cette entreprise exigera une modernisation considérable de la technologie et donc un financement substantiel au fil du temps pour y parvenir.
    Nous sommes d'avis que le projet de loi nous oriente certainement dans la bonne direction.
    Monik, vouliez-vous ajouter quelque chose?

  (0955)  

    J'ajouterais seulement que mettre en place un programme de recours est très complexe. Il faut procéder à des modifications législatives et réglementaires, mener des consultations avec les compagnies aériennes et apporter des correctifs informatiques assez considérables. Je crois que le projet de loi C-59 contient les premiers éléments essentiels qui peuvent nous mener à un programme centralisé.
    Les modifications proposées permettront au ministère de la Sécurité publique d'obtenir l'information nécessaire pour mettre en place un programme de recours. Ce sont les premiers éléments dont nous avons besoin pour nous permettre d'élaborer un tel programme.
    D'accord.
    Êtes-vous d'avis alors qu'il n'est pas nécessaire de recommander l'examen d'autres aspects du projet de loi puisque vous estimez qu'il contient ce qu'il faut pour mettre en place le programme?
    Je dirais que nous sommes toujours ouverts à des propositions novatrices. Nous croyons toujours que nous avons pensé à tout, mais les suggestions sont les bienvenues, particulièrement en ce qui concerne les compagnies aériennes et les correctifs informatiques
    Je suis tout à fait d'accord. Nous sommes bien entendu ouverts aux suggestions. Nous estimons que nous allons dans la bonne direction, mais les propositions du Comité sont les bienvenues.
    Êtes-vous en mesure d'expliquer comment nous nous sommes retrouvés dans cette situation? Beaucoup d'électeurs qui voyagent aux États-Unis affirment que, malgré la stigmatisation dont font l'objet les personnes qui détiennent un numéro de révision, ce système semble bien fonctionner. Pourquoi sommes-nous dans cette situation?
    Je ne peux pas vraiment expliquer pourquoi nous sommes dans cette situation. Nous collaborons avec les États-Unis. Nous avons mis sur pied un groupe de travail canado-américain pour régler plus facilement les problèmes que subissent certains passagers aériens. Nous nous inspirons de l'expérience qu'ont vécue les États-Unis lorsqu'ils ont mis en place leur programme de recours et nous tirons des leçons de la façon dont ils ont procédé.
    Je vais peut-être vous forcer à sortir de votre réserve, car j'aimerais savoir si vous savez à peu près combien de temps il faudra pour établir les paramètres informatiques que vous avez décrits, une fois que nous aurons obtenu l'approbation du budget et que le projet de loi C-59 aura été adopté?
    Nous sommes en train de mener de vastes consultations avec les ministères au sujet de cette question précisément. En ce qui concerne la somme d'argent ou les délais, je ne suis pas en mesure en ce moment de vous donner une estimation définitive pour ni l'un ni l'autre.
    Est-ce qu'il serait même prématuré de donner une estimation provisoire?
    Oui, à ce stade-ci, il serait prématuré de le faire.
    Très brièvement, car il me reste 20 secondes, pouvez-vous me dire combien de ministères et d'organismes du gouvernement prendraient part à la mise sur pied de ce système de recours?
    Nous travaillons en très étroite collaboration avec un certain nombre de ministères. Bien entendu, il y aurait l'ASFC, qui fait partie de notre portefeuille. Il y aurait aussi Transports Canada, Services partagés... Je ne vous en nomme que trois ou quatre, mais il y en a d'autres. Nous consulterions également le Conseil du Trésor, etc.
    Je vous remercie beaucoup tous les deux.
    Monsieur Motz.
    Je vous remercie, monsieur le président. Je remercie les témoins d'être ici aujourd'hui.
    Pour continuer sur la question des coûts, je me demande si on a établi un budget approximatif pour la mise en oeuvre du projet de loi.
    J'imagine que les représentants du ministère de la Sécurité publique peuvent répondre.
    Parlez-vous de l'ensemble du projet de loi?
    Oui. A-t-on réfléchi au coût approximatif de la mise en application de l'ensemble du projet de loi?
    En ce qui concerne le coût total, je ne crois pas qu'on ait... Je pourrais demander à mes collègues, mais nous en sommes encore aux premières étapes. Il faut d'abord que le projet de loi soit adopté et qu'il devienne ensuite une loi.
    Nous avons par contre évalué certains des coûts pour des mesures précises, mais je ne peux pas vous donner pour l'instant un chiffre approximatif pour la mise en oeuvre de l'ensemble du projet de loi .
    Pourriez-vous à votre convenance nous faire parvenir ultérieurement ces chiffres?
    Je vais certes m'occuper de trouver des réponses, monsieur.
    Je vous remercie.
    En ce qui concerne le SCRS, l'article 99 du projet de loi ajoute une nouvelle disposition qui vise à interdire au SCRS de détenir un individu. Pouvez-vous nous expliquer la raison pour laquelle on enlève des pouvoirs à cet organisme?

  (1000)  

    Je vous remercie pour cette question.
    En fait, nous n'avons pas ce pouvoir et nous ne l'avons jamais eu. C'est un pouvoir qui appartient uniquement aux policiers. Pour contrer les menaces, essentiellement, nous menons des enquêtes, nous recueillons des renseignements et nous informons nos partenaires. Puisque la loi nous accorde des pouvoirs de réduction de la menace, nous pouvons prendre certaines mesures pour réduire la menace, mais la détention n'en fait pas partie. Nous n'avons donc aucun pouvoir de détention et nous n'en avons jamais eu.
    D'accord. Je vous remercie.
    Ma prochaine question s'adresse aux représentants du ministère de la Justice et du ministère de la Sécurité publique. Lors d'une autre séance du Comité, nous avons discuté des changements sur le plan du libellé. Pouvez-vous nous aider à comprendre la nécessité de modifier le libellé de l'article 83.3 du Code criminel, à savoir remplacer « aura vraisemblablement pour effet d'empêcher » que l'activité terroriste ne soit entreprise par « est nécessaire pour empêcher » que l'activité terroriste ne soit entreprise. Pouvez-vous aussi nous expliquer l'incidence prévue de ce changement sur la capacité de procéder à des arrestations préventives?
    Est-ce que la question s'adresse à M. Breithaupt?
    Je ne sais pas quels témoins représentent le ministère de la Sécurité publique ou le ministère de la Justice.
    Nous allons laisser M. Breithaupt répondre.
    Oui, le projet de loi C-59 rétablit l'un des critères tel qu'il figurait dans l'ancien projet de loi C-51. Il y a deux critères, à savoir que l'agent de la paix ait d'abord des motifs raisonnables de croire qu'une activité terroriste est entreprise, et deuxièmement, qu'il ait des motifs raisonnables de soupçonner que l'imposition d'un engagement assorti de conditions ou son arrestation aura, comme il est écrit actuellement, « vraisemblablement pour effet d'empêcher que l'activité terroriste ne soit entreprise. »
    Dans le projet de loi, on propose de remplacer ce libellé par « est nécessaire pour empêcher que l'activité terroriste ne soit entreprise. » Cette modification rétablirait cet élément précis du critère tel qu'il figurait dans la Loi antiterroriste de 2001. C'est lié aux « motifs raisonnables » de soupçonner. Par conséquent, l'agent de la paix devra présenter des preuves qui démontrent un plus grand lien entre les conditions imposées à une personne ou son arrestation et la prévention d'une activité terroriste.
    Ce que nous proposons fera en sorte qu'il sera plus difficile d'assurer la sécurité nationale, étant donné que nous revenons à ce qui existait même avant le projet de loi C-51. Est-ce bien ce que vous êtes en train de dire?
     On a resserré le critère. Cette disposition peut être utilisée, mais elle ne l'a pas été jusqu'à maintenant. Il est fort probable qu'elle le soit prochainement dans certaines circonstances, et dans un tel cas, la nécessité d'utiliser cette disposition pour empêcher que l'activité terroriste ne soit entreprise sera plus claire.
    D'accord. Je vous remercie.
    Je dois dire que je trouve problématique de diminuer notre capacité de nous protéger contre la menace à notre sécurité nationale compte tenu que cette menace prend de l'ampleur.
    Peut-être que le même témoin peut expliquer pourquoi on remplace « sharing » par « disclosure » en anglais.
    Lorsque nous avons discuté de cette question antérieurement, nous avons parlé de la communication de l'information, de ce que signifie divulguer de l'information, et nous nous sommes demandé s'il s'agit simplement d'un changement cosmétique. Croyez-vous qu'il s'agit d'un changement important sur le plan de la transmission de l'information?
    Comme nous le savons, la communication de l'information est absolument essentielle entre les ministères et les organismes du gouvernement aux fins de la sécurité nationale, ainsi que la communication de l'information avec nos alliés, et au sein du Canada, c'est absolument primordial. Est-ce qu'il s'agit selon vous d'une modification considérable qui facilitera ou rendra plus difficile la communication de l'information?
    Je peux répondre à cette question, monsieur le président.
    Je ne crois pas qu'il s'agit simplement d'un changement cosmétique. Je pense que c'est en fait un changement très important. Comme le ministre l'a laissé entendre, en remplaçant le terme « sharing » par « disclosure », on perd la notion de collecte de renseignements. Il est question de divulguer l'information, et parfois, je crois que lorsqu'on utilise le terme « sharing », cela implique qu'il y a collecte de renseignements également. Ce changement vise donc à clarifier les choses.
    En outre, lorsqu'on parle de « disclosure », il est clair que l'information est transmise d'une entité, d'un organisme, à un autre. Par conséquent, l'organisme qui divulgue l'information doit respecter certaines exigences en ce qui concerne l'information qu'elle transmet à une autre organisation.
    Je suis d'accord avec vous, la communication de l'information est extrêmement importante. En fait, je crois que les modifications proposées dans le projet de loi visent — tout en assurant la protection de la vie privée, des droits, etc. — à faire en sorte que les organismes obtiennent l'information dont ils ont besoin pour réagir aux menaces.

  (1005)  

    Je vous remercie, monsieur Motz.
    Monsieur Dubé, vous disposez de sept minutes.

[Français]

     Je vous remercie, monsieur le président.
    Je veux revenir rapidement à M. Rigby et à Mme Beauregard au sujet de la liste d'interdiction de vol. J'ai deux questions à leur poser.
    Premièrement, pourquoi est-il si difficile de déterminer les coûts d'implantation du système?
    Deuxièmement, si le projet de loi est adopté, les mesures législatives seront mises en place, mais l'argent ne sera toujours pas disponible. La façon dont vous parlez me donne l'impression que nous ne verrons pas l'argent dans le prochain budget. Est-ce que cela veut dire que nous devons attendre le prochain cycle budgétaire avant que le système technique puisse être mis en oeuvre?
    Je vous remercie de votre question.

[Traduction]

    À ce stade-ci, je ne veux pas dévoiler les coûts, tout simplement parce que nous sommes encore en train de discuter. Je ne crois pas qu'il serait dans l'intérêt de quiconque que je donne une estimation en ce moment, puisqu'il faudrait revoir ce chiffre ultérieurement.
    Comme je l'ai dit, il faudra apporter d'importants correctifs informatiques très techniques, ce qui signifie que nous devons travailler avec de nombreux organismes et ministères du gouvernement pour déterminer l'ensemble des coûts. Nous avons effectué une estimation, que nous avons présentée au gouvernement, et nous attendons sa réponse à cet égard.

[Français]

    Essentiellement, on attend donc la réponse du ministère des Finances pour savoir ce qui sera possible de faire grâce au budget. Est-ce bien cela?

[Traduction]

    Nous sommes en train de discuter avec le ministère des Finances en ce qui concerne le coût définitif.

[Français]

     Je vous remercie.
    Monsieur Vigneault, je voudrais parler des ensembles de données non sélectionnées. Il s'agit de l'espèce de filet qui peut toucher plusieurs personnes pendant que vous faites ces activités. L'une des justifications contenues dans le projet de loi, c'est que le ministre et le nouveau commissaire vont déterminer si c'est approprié ou non de rassembler ces données et de les garder.
    Comment faites-vous pour distinguer les ensembles de données? Par exemple, le ministre ou le commissaire pourrait juger un ensemble de données approprié, parce qu'elles sont liées à quelqu'un qui ne constitue pas une menace, mais qui aurait eu une conversation avec un suspect que vous ciblez. Comment distinguez-vous ces données des autres informations concernant les collaborateurs légitimes de la personne qui, eux, peuvent être une menace?
     Pour mieux poser la question, comment faites-vous pour distinguer des autres cas les ensembles de données non sélectionnées qui touchent des gens qui n'ont rien à voir avec le suspect?
    Je vous remercie de votre question, monsieur Dubé.
    Je vais y répondre en deux parties.
     En premier lieu, comme je l'ai mentionné brièvement tout à l'heure, un certain nombre de mesures existent et nous permettent de procéder à la collecte, à l'utilisation et à la conservation des données. Cela commence par le ministre, qui va déterminer la catégorie des données que nous pouvons utiliser. Cette catégorie est révisée par le commissaire. Il y a donc une révision quasi judiciaire faite par le commissaire au renseignement. Si les données touchent les Canadiens, c'est la Cour fédérale qui va devoir déterminer si c'est absolument nécessaire que le service conserve et utilise les données. La Cour fédérale va faire le test de protection de la vie privée, en vue de nous permettre d'utiliser les données. Le régime qui serait mis en place par le projet de loi C-59 comprend les critères nous permettant d'utiliser les données.
    En deuxième lieu, je comprends qu'on s'intéresse de près à l'utilisation des données, mais pour une organisation de renseignements comme le SCRS, c'est absolument crucial d'avoir des données. Je vais donner un exemple concret. Avoir les données dans un plus grand ensemble nous permet de caractériser la menace et de dire avec qui tel individu est en contact et si cela constitue une menace ou non. Souvent, cela nous permet d'établir que ce n'est pas une menace. Le fait d'avoir cet ensemble de données fait que le SCRS n'enquête pas sur des personnes innocentes.

  (1010)  

    Quand on accumule des ensembles de données, l'une des grandes préoccupations de la société civile, notamment, est que ces données peuvent toucher toutes sortes d'informations qui ne sont pas essentielles à votre travail et qui peuvent brimer la vie privée. Dans ce contexte, cela peut aussi inclure ce que le projet de loi identifie comme des données non sélectionnées.
    Sur le plan technique, comment procédez-vous? Si la cour juge que vous avez le droit de collecter ces données à cause d'une cible légitime, comment faites-vous pour distinguer la cible légitime des données non sélectionnées qui seront inévitablement collectées? Un système a-t-il été mis en place? Mon degré de compréhension n'est peut-être pas aussi élevé que le vôtre, mais quand on collecte des ensembles de données, il est inévitable que le filet soit très large et que des données ne soient pas forcément pertinentes aux enquêtes.
    Absolument. Si le projet de loi est adopté, il y aura une séparation des données non sélectionnées. Seules les personnes désignées pourront avoir accès à ces données. Il ne s'agira pas de prendre un ensemble de données et de le mêler à nos données liées à la menace. Les données non sélectionnées seront isolées. Des personnes désignées pourront présenter des requêtes pour les utiliser. Chaque fois que ce sera fait, ces activités seront révisées pour s'assurer que nos procédures et notre mise en oeuvre satisfont à l'esprit de la loi.
    Dans un contexte où l'ensemble des données peut être tissé très large, comment faites-vous pour distinguer les informations pertinentes des autres?
    Vous les mettez de côté, c'est bien beau et c'est une bonne intention, mais comment faites-vous pour décider quelles informations ou quelles données seront mises de côté?
     Voici ce que nous faisons.
    Nous ne commençons pas nos enquêtes à partir des données sélectionnées. Nous les commençons à partir d'éléments liés à la menace.
    Si une cible identifiée est impliquée dans des actions potentiellement terroristes ou d'espionnage, et si nous constatons que cette personne est en contact avec quelqu'un — certaines informations, comme un numéro de téléphone, peuvent nous être utiles —, nous pouvons alors vérifier dans nos données non sélectionnées dont la rétention a été autorisée. Cela fait partie du processus que je vous ai expliqué plus tôt.
    Ce que les gens craignent, c'est que nous allions à la pêche à l'information.

[Traduction]

    On ne va pas à la pêche.

[Français]

    Nous ne pouvons pas commencer à mener des enquêtes à partir des données non-sélectionnées. C'est le contraire. Nous partons de nos données d'enquêtes et nous nous servons ensuite des données non sélectionnées pour nous assurer que les individus sur lesquels nous enquêtons sont vraiment liés à la menace. Souvent, ces données vont nous permettre d'établir qu'ils ne sont pas liés à la menace.

[Traduction]

    Monsieur Vigneault, je suis désolé de vous interrompre pendant que vous abordez cette question de la pêche.
    Madame Damoff, vous disposez de sept minutes.
    Je vous remercie beaucoup.
    Je remercie les témoins d'être avec nous durant notre deuxième heure de séance.
    Je voudrais revenir à la liste d'interdiction de vol ou le Programme de protection des passagers. J'ai moi aussi rencontré des enfants qui figurent sur la liste d'interdiction de vol. Je travaille avec la mère d'un jeune homme dans ma circonscription depuis que j'ai été élue parce que le nom de ce jeune homme figure sur la liste.
    J'aimerais aborder certains éléments qui ne figurent pas dans le projet de loi et certains qui s'y trouvent.
    Vous avez mentionné que les États-Unis ont mis en place un système de recours et que c'est ce que nous avons l'intention de faire au Canada. Je crois comprendre qu'il est plus difficile et plus coûteux d'en créer un aujourd'hui que si nous l'avions fait dès le départ ou même il y a plusieurs années. Puisque cette liste existe depuis longtemps, il serait plus difficile et plus coûteux de mettre en place un tel système que si nous avions procédé de la même façon que les États-Unis et que nous l'avions fait bien avant. Est-ce exact?
    En rétrospective, nous aurions certainement voulu que le système de recours soit mis en place dès le début. Il est certes plus difficile maintenant d'apporter des correctifs; cela ne fait aucun doute. Je ne peux pas affirmer avec certitude qu'il en coûtera plus cher, mais je présume que ce sera le cas. Il faudrait le confirmer.
    Très bien.
    Lorsque je lis le projet de loi, une chose n'est toujours pas tout à fait claire pour moi, alors si vous pouviez m'éclairer... Qui établit la liste et en assure la gestion? Est-ce que ce sont les compagnies aériennes ou le gouvernement?

  (1015)  

    Je vais laisser Monik répondre à cette question, car elle joue un rôle très essentiel, mais je peux dire que, jusqu'à maintenant, les compagnies aériennes s'occupaient d'effectuer les vérifications, mais cette tâche reviendra maintenant au gouvernement. Nous allons nous occuper des vérifications à la place des compagnies aériennes, et cela présente un certain nombre d'avantages.
    Je vais laisser Monik, qui est aux premières lignes, vous expliquer le processus.
    Le gouvernement crée la liste établie en vertu de la Loi sur la sûreté des déplacements aériens en fonction de deux critères. Premièrement, il détermine les personnes susceptibles de constituer une menace pour les compagnies aériennes et, deuxièmement, il détermine les personnes susceptibles de se rendre à l'étranger pour participer à des activités terroristes. Cela ne signifie pas que les compagnies aériennes ne possèdent pas leurs propres listes, mais elles ne concernent pas le terrorisme. Les compagnies aériennes établissent des listes des personnes qui, par exemple, ont eu des accès de colère.
    Lorsqu'une personne fait l'objet d'un signalement lors de l'enregistrement, un processus assez complexe s'enclenche. Il se peut que cette personne figure sur la liste établie en vertu de la Loi sur la sûreté des déplacements aériens. Il y a tout un processus qui s'ensuit au sein du gouvernement, de Transports Canada et du ministère de la Sécurité publique, afin de vérifier s'il y a quasi-concordance des noms ou s'il s'agit bien d'une personne dont le nom figure sur la liste.
    Je vous remercie.
    Le projet de loi entraînera deux changements. Premièrement, les parents ou les tuteurs pourront communiquer avec le gouvernement pour savoir si leur enfant figure sur la liste. Est-ce exact?
    Oui, tout à fait.
    C'est exact.
    Le deuxième changement concerne les personnes qui ont demandé à ce que leur nom soit retiré de la liste. Pouvez-vous nous expliquer les modifications qui ont été apportées à cet égard?
    C'est le processus de recours. Lorsque le gouvernement libéral a pris le pouvoir, il avait notamment le mandat d'apporter des modifications au processus de recours. Essentiellement, auparavant, si après 90 jours le ministre n'avait rendu aucune décision, le nom de la personne demeurait sur la liste. C'est maintenant l'inverse. Si le ministre n'a pas rendu de décision après 120 jours, alors le nom de la personne est automatiquement retiré de la liste. Le processus de recours est maintenant plus juste.
    C'est un changement que le Comité avait recommandé lors de son étude sur le cadre de sécurité nationale.
    Tout à fait.
    Le Canada a sa propre liste, à l'instar d'autres pays, n'est-ce pas?
    Oui, c'est exact.
    Alors le Canada n'utilise pas une liste américaine? C'est une question qu'on me pose souvent.
    Non. Comme je l'ai expliqué, nous avons notre propre liste. La liste qui est communiquée aux compagnies aériennes est la liste canadienne, comme Vincent l'a expliqué.
    Je vous remercie.
    Il semble exister une certaine confusion, surtout chez les parents, à propos du fait qu'il existe une liste à laquelle tous les pays ont accès.
    En ce qui concerne une solution à court terme, je veux simplement aborder un point aux fins du compte rendu, car mon collègue, M. Spengemann, l'a soulevé. Cela peut sembler tout à fait farfelu, mais on m'a dit que les gens qui obtiennent un numéro d'adhérent à un programme de fidélisation d'une compagnie aérienne éprouvent moins de difficulté avec les compagnies aériennes, à l'instar de ceux qui détiennent un numéro de révision. C'est ce qu'un de mes électeurs a entendu dire, alors je me suis adressée au ministère de la Sécurité publique parce que je trouvais cela farfelu, mais on m'a expliqué que ce numéro constitue un numéro d'identification unique. Pouvez-vous me confirmer que ce numéro aide effectivement les passagers aériens?
    Oui, en effet. Certains de ces numéros d'identification uniques sont établis en fonction de la date de naissance, du sexe, etc. En utilisant un numéro du programme Aéroplan, par exemple, il y a automatiquement une résolution d'incompatibilité qui permet de confirmer l'identité. L'utilisation d'un numéro du programme Aéroplan ou du programme de WestJet permet d'aider les personnes qui font l'objet d'une quasi-concordance du nom.
    D'accord. Je vous remercie.
    Le projet de loi vous permettra de mettre en oeuvre le règlement dont vous avez parlé. Il y aura d'abord la loi, ensuite le règlement et par après le financement pour que vous puissiez mettre cela en place. Est-ce que vous serez en mesure de commencer à mettre en place certains éléments?

  (1020)  

    Certainement, mais le financement sera essentiel.
    Je vous remercie.
    Je vous remercie, madame Damoff.
    Avant de donner la parole à Mme Gallant, je voulais dire que la plupart des témoins ici présents sont des habitués, tandis que d'autres ne le sont pas. Ceux qui souhaitent clarifier leurs propos ou ce qu'ils ont lu dans le hansard sont invités à écrire au greffier du Comité.
    Madame Gallant, vous disposez de cinq minutes.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Ma question s'adresse à la chef du Centre de la sécurité des télécommunications. En ce qui a trait aux articles proposés 30 et 31, pouvez-vous expliquer la nécessité d'inclure le ministre des Affaires étrangères dans la prise de décisions lorsqu'il s'agit d'autoriser des cyberopérations? Pourquoi est-ce nécessaire d'inclure le ministre des Affaires étrangères dans le processus de prise de décisions?
    Je vous remercie pour votre question.
    Madame Gallant, je présume que vous faites référence aux cyberopérations dont il est question dans le projet de loi. Il y a deux types de cyberopérations. Il y a premièrement les cyberopérations défensives, dont le ministre des Affaires étrangères doit être mis au courant. Il ne participerait pas à la décision concernant l'approbation, mais il serait mis au courant.
    Dans le cas des cyberopérations actives, le ministre des Affaires étrangères, comme vous l'avez dit, doit les approuver, alors, si je puis dire, il s'agirait d'une approbation à deux niveaux.
    Il est important de souligner que ces opérations, qu'il s'agisse des cyberopérations défensives ou actives, visent des cibles étrangères, à l'extérieur du Canada. Bien entendu, le ministre des Affaires étrangères s'y intéresserait puisqu'il a la responsabilité des affaires internationales et étrangères du Canada, et, comme ces activités visent des cibles étrangères ou des menaces à l'endroit du Canada, nous incluons par conséquent le ministre des Affaires étrangères.
    D'accord. L'approbation est nécessaire pour les cyberopérations actives.
    Je vais m'adresser à M. Rigby. Pour quelle raison a-t-on modifié dans le projet de loi C-59 la définition de « propagande terroriste » qui figure dans le Code criminel? Cela augmente le niveau de preuve requis au-delà des pratiques actuelles que sont la radicalisation, le recrutement et la facilitation, en plus de recouper le crime que constitue déjà le fait de conseiller à une autre personne de commettre une infraction à l'article 22 du Code criminel.
    À la lumière de ces faits, est-ce que le gouvernement décidera de retirer la modification proposée dans le projet de loi C-59 concernant la propagande terroriste?
    Je m'en remettrai à mon collègue du ministère de la Justice, bien que le ministre ait répondu en partie à votre question concernant la clarification de la définition et l'utilisation du terme « conseiller ». J'espère que mon collègue pourra vous fournir une réponse plus complète.
    Il y a effectivement un lien avec l'infraction de conseiller qui est proposée dans le projet de loi C-59. La définition de « propagande terroriste » serait modifiée de façon à désigner tout « écrit, signe, représentation visible ou enregistrement sonore qui conseille la commission d'une infraction de terrorisme ». En fait, il y a un lien très rapproché avec la nouvelle infraction qui consiste à conseiller.
    Il existait certaines préoccupations quant au libellé actuel de la définition de la propagande terroriste, soit « préconise ou fomente la perpétration d'infractions de terrorisme en général », ce qui porte à croire que cette définition n'était pas aisément applicable. La définition a donc été supprimée, suite à l'engagement du gouvernement qui souhaitait clarifier les définitions trop vagues, dont celle de « propagande terroriste ».
    Cela veut dire que si quelqu'un reçoit un message ou voit quelque chose dans les médias sociaux et ne fait que l'envoyer par la suite à une autre personne à des fins d'information, admettons, la personne qui a fait suivre l'information ne fera pas l'objet de poursuites pour avoir tout simplement envoyé ou reçu l'information.
    Rappelons-nous que l'infraction qui consiste à conseiller, telle que proposée dans le projet de loi C-59, est une infraction qui ferait l'objet de poursuites. La définition de « propagande terroriste » s'inscrit dans la structure prévue par le Code criminel.
    L'ancien projet de loi C-51 a ajouté deux dispositions au Code criminel, l'une prévoyant un mandat de saisie et de confiscation d'articles de propagande terroriste, conformément à la définition, et l'autre permettant à un agent de la paix de demander une ordonnance à un juge pour supprimer la propagande terroriste affichée sur un site Web accessible au public par l'entremise d'un fournisseur canadien de service Internet. La définition de la propagande terroriste s'applique à ce mandat et à cette ordonnance, ainsi qu'à la Loi sur les douanes, puisqu'elle vise la propagande terroriste ou les marchandises interdites.

  (1025)  

    Monsieur Rigby, vous êtes responsable de la cybersécurité de nos infrastructures, et nous devons absolument nous protéger contre les cyberattaques. Or, nous savons que le réseau électrique est exposé.
    Si j'ai bien compris, toutes les provinces, ainsi que les États-Unis d'ailleurs, ont prévu une structure afin de protéger leurs réseaux, sauf l'Ontario. Y a-t-il quelque chose que le Parlement pourrait faire, que ce soit au moyen du projet de loi C-59 ou d'une autre disposition fédérale, afin d'obliger l'ensemble des provinces et territoires à prévoir les dispositifs de protection, puisque tous les réseaux sont reliés?
    Malheureusement, monsieur Rigby, il ne reste plus de temps.
    Au tour de Mme Dabrusin.
    Merci.
    Pendant la première série de questions, j'ai indiqué que mes électeurs se souciaient énormément des protections prévues par la Charte, et j'ai quelques questions pour les représentants du ministère de la Justice.
    J'ai lu votre énoncé concernant la Charte et j'aimerais d'abord savoir la dernière date à laquelle le document a été modifié. Je voudrais tout simplement être sûre d'avoir la version la plus récente.
    L'énoncé concernant la Charte a été déposé le même jour que le projet de loi, c'est-à-dire le 20 juin, et il n'y a pas eu de mise à jour depuis.
    Il n'y a eu aucune mise à jour pour ce qui est des analyses faites à la lumière de la Charte.
    Beaucoup de personnes m'ont posé des questions sur les mesures de réduction de la menace, et je vous demanderais de nous parler de ce que vous en avez conclu dans l'énoncé concernant la Charte.
    Si le Comité veut bien, je ferai quelques observations.
    Tout d'abord, il faut se souvenir que toutes les activités du SCRS doivent respecter la Charte. Le ministre a expliqué la façon dont l'ancien projet de loi C-51, qui a été adopté, a été conçu. Il se peut qu'il y ait eu des problèmes dans sa structure.
    Le projet de loi C-59 vient essentiellement confirmer que la loi ne peut entraîner une violation de la Charte. En ce qui concerne la réduction de la menace, on s'assure que toute éventuelle mesure dans ce qui brimerait la liberté de quelqu'un aux termes de la Charte fera l'objet d'une requête auprès de la Cour fédérale. La Cour fédérale décidera à ce moment-là si l'entorse faite à la liberté est raisonnable et proportionnelle, ce que permet la Charte. C'est la façon dont le projet de loi C-59 aborde la question du respect de la Charte en ce qui concerne le mandat de réduction de la menace.
    De plus, la loi précisera de façon transparente les types d'activités envisagées. En ma qualité de directeur du SCRS, je serai alors en mesure d'interpréter la loi afin de déterminer... S'il y a effectivement une entorse faite à la liberté des gens, je dois m'adresser à la Cour fédérale. Si l'activité ne gêne pas la liberté d'une personne, je peux procéder. Le Comité supervise nos activités. Le nouvel office en sera informé et sera en mesure d'examiner l'activité afin d'être sûr que nous respectons la loi.
    Je ne sais pas à qui poser ma prochaine question. Je crois que ce sera à M. Rigby du ministère de la Sécurité publique.
    Le projet de loi a-t-il fait l'objet d'une analyse comparative entre les sexes?
    Oui.
    Les résultats peuvent-ils être consultés?
    Je peux vous revenir là-dessus. J'ai l'impression que le document est frappé du secret du Cabinet, mais je n'étais pas présent au moment de sa rédaction. Je peux certainement vous revenir là-dessus.
    D'accord.
    Si le document n'est pas frappé du secret du Cabinet, je vous demanderai de le faire suivre au Comité.
    Merci.
    Ma prochaine question, qui concerne la partie 8 de la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents, s'adresse probablement aux gens du ministère de la Justice. Le projet de loi crée un système selon lequel des renseignements sur les jeunes délinquants seront transmis aux responsables de la délivrance des passeports. Respecte-on à ce moment-là les objectifs de la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents?

  (1030)  

    Vous voyez à la disposition, je crois que c'est l'article 119, de nombreux paragraphes qui portent sur les autorités auxquelles il faut transmettre des renseignements en vertu de la loi. On ajoute un paragraphe supplémentaire afin de permettre la consultation des dossiers des adolescents aux fins d'administration du Décret sur les passeports canadiens, conformément aux dispositions de protection de la vie privée de la loi, ce qui respecte l'approche de la loi en matière de communication de renseignements.
    On y précise à qui les renseignements doivent être transmis et les motifs. Par exemple, on pourrait transmettre des renseignements au ministre de la Sécurité publique afin qu'il décide s'il faut délivrer ou retirer un passeport. Le fait qu'un adolescent ait fait l'objet d'un engagement de ne pas troubler l'ordre public visant le terrorisme pourrait être transmis à des fins de prise de décisions.
    Merci.
    À vous, monsieur MacKenzie.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie les témoins d'être venus aujourd'hui.
    Je suis content de voir que nous actualisons les dispositions du projet de loi C-51. Il y a effectivement quelques mises à jour. Je suis sûr que d'ici trois ou cinq ans, il y en aura encore plus.
    Moi-même, ainsi que les Canadiens, sommes d'avis que s'il est possible d'intervenir et d'empêcher certains phénomènes, c'est toujours souhaitable, plutôt que de devoir payer les pots cassés après coup. Je me demande si le projet de loi C-59 a changé le volume des activités d'intervention sans mandat qui pourraient être conçues pour réduire la menace et, dans l'affirmative, comment et pourquoi?
    Le projet de loi C-59 oblige-t-il un agent du SCRS à obtenir un mandat afin de parler aux parents du jeune soupçonné de radicalisation ou d'intentions terroristes? Je comprends que demander un mandat à un juge entraîne beaucoup de travail et prend du temps, et parfois le temps, il n'y en a pas. Ce genre de facteurs entrent-ils en ligne de compte?
    Le nouveau projet de loi ne prévoit aucune nouvelle mesure de réduction de la menace pouvant être prise sans mandat. Notre service a eu recours à des mesures de réduction de la menace environ 30 fois.
    Dans votre exemple précis, c'est-à-dire si nous avions connaissance d'une personne qui voulait aller à l'étranger afin de se joindre à une organisation terroriste, nous n'aurions pas à obtenir de mandat afin d'intervenir auprès d'un parent ou des proches de la personne pour les informer et leur demander d'exercer une influence. Le projet de loi C-59 ne modifie aucunement la disposition pertinente.
    Je le répète, nous avons utilisé cette mesure environ 30 fois.
    Ai-je raison de dire que le projet de loi C-59 ne change rien en ce qui concerne le fait de permettre à certaines personnes d'intervenir auprès de terroristes soupçonnés?
    Ce qui change dans l'approche, comme je l'ai expliqué plus tôt, c'est que si certaines mesures briment la liberté de la personne, le service devra, à ce moment-là, demander un mandat à la Cour fédérale. Le projet de loi prévoit une liste des activités autorisées.
    Tout cela peut se faire assez rapidement. La Cour comprend l'urgence des menaces à la sécurité nationale, mais nous n'avons pas encore eu à invoquer la disposition. Le projet de loi C-59 précise les conditions dans lesquelles cela se ferait, et ce serait un outil à notre disposition.
    J'ajouterais que lorsque nous nous servons de ces outils, nous devons consulter nos partenaires, et dans le cas particulier des menaces de terrorisme, nous consulterions la GRC. La loi nous oblige de le faire.
    Le ministre a déjà décrit la situation dans laquelle se sont retrouvés des agents de la GRC. Les modifications prévues dans le projet de loi C-59 auraient-elles permis une intervention dans le processus qu'ont suivi la GRC et la force de police locale lorsqu'elles ont eu affaire à un organisme de l'extérieur?
    Je vais vous répondre d'abord et ensuite me référer à mon collègue, James, qui pourra apporter des précisions ou me corriger, le cas échéant.
    Monsieur MacKenzie, je crois que cela revient aux premières observations faites par le ministre concernant la communication de renseignements et la nature des renseignements qui nous permettent de réagir de façon efficace à la menace terroriste et d'assurer la sécurité des Canadiens. Nous le savons, et cette certitude est particulièrement amplifiée par ce que je perçois comme étant une contraction entre la période de contemplation et celle d'action. Nous savons que cette période de temps peut être très brève. Il revêt d'une importance critique de pouvoir communiquer des renseignements.
    Même si le projet de loi ne nous aide pas forcément, il renforce les rapports que nous entretenons avec nos partenaires, la relation que nous avons grâce au Centre d'opérations conjointes en matière de sécurité nationale. Nous collaborons de près avec nos collègues du SCRS et d'autres ministères afin de veiller à la communication des renseignements en temps opportun et à leur vérification, et de nous assurer que la fiabilité et l'exactitude des renseignements sont bien comprises. Nous utilisons tout outil nécessaire selon les circonstances, en reconnaissant que chaque incident a ses propres particularités, et tout cela afin de pouvoir intervenir rapidement.
    James, puis-je faire appel à vos lumières?

  (1035)  

    Il n'aura que quatre secondes pour répondre. Ce serait peut-être mieux de lui demander plus tard.
    Monsieur Fragiskatos, vous disposez de cinq minutes.
    Merci à vous, monsieur le président, et merci aux divers fonctionnaires d'être venus aujourd'hui.
    Monsieur Rigby, j'aimerais en savoir plus sur l'approche préventive. Le ministre a répondu à une question à ce sujet, mais j'aimerais mieux comprendre la perspective du ministère, le raisonnement derrière la politique publique, si vous le voulez bien.
    M. Spengemann a parlé de l'importance d'une approche préventive. Il se peut qu'une approche préventive soit encore plus importante pour ce qui est du financement du terrorisme. Pouvez-vous nous en dire plus?
    Comme le ministre l'a indiqué, nous avons toute une gamme de mesures et d'outils que nous pouvons mettre en oeuvre. Il y a des mesures réactives, et il en a décrit, et ensuite il y a les mesures préventives, qui, au final, sont tout aussi importantes, à mon avis, et le ministre l'a bien dit d'ailleurs.
    Il a parlé tout particulièrement du Centre canadien d'engagement communautaire et de prévention de la violence. Ce nouvel outil s'annonce très prometteur. Il a vu le jour en juin dernier, et il nous donnera la possibilité de communiquer avec les gens à l'échelle locale et communautaire, à travailler avec les Canadiens, à collaborer avec les groupes canadiens afin d'effectuer de la recherche sur les mesures de lutte contre la radicalisation, de communiquer avec les jeunes, d'éradiquer la radicalisation, et d'avoir une approche holistique afin de tuer la radicalisation dans l'oeuf.
    Le centre a déjà ouvert ses portes, comme je l'ai dit. Ses employés, en plus de leurs activités de programmation et responsabilités liées aux subventions et aux contributions, consultent les Canadiens cet automne afin de concevoir une stratégie pour lutter contre la radicalisation violente, une stratégie que le gouvernement aimerait présenter à un moment donné.
    Je crois qu'il s'agira d'une approche très complète, et ce sera un outil important qui s'ajoutera à notre panoplie déjà bien garnie.
    Merci.
    Je vais citer Phil Gurski, expert en matière de sécurité et ancien agent du SCRS, qui a dit: « pour ce qui est de contrer l'extrémisme violent ou d'en détecter rapidement les manifestations, le gouvernement précédent a fait un travail pitoyable. »
    Dans quelle mesure en avons-nous appris d'autres pays? Le Danemark, par exemple, a depuis longtemps une politique en matière de prévention. Une douzaine d'anciens djihadistes ou de personnes soupçonnées de l'être sont rentrés au Danemark et ont suivi un programme comme nous voudrions en avoir ici au Canada. Dans quelle mesure en avons-nous appris du Danemark et d'autres pays?
    Nous consultons de près nos alliés et d'autres pays, comme le ministre l'a indiqué, que ce soit les pays du G7, du G20 ou les ministres chargés de la sécurité nationale du Groupe des cinq.
    Le ministre s'est rendu en Italie récemment pour assister à une rencontre des ministres chargés de la sécurité nationale du G7. Ils ont parlé notamment des extrémistes qui vont à l'étranger et des moyens de lutter contre la radicalisation violente. C'est sûr que nous tentons de tirer des leçons, d'en apprendre sur les pratiques exemplaires, et ce, sur toute la ligne, qu'il s'agisse de mesures préventives ou réactives, nous voulons en apprendre sur la façon de collaborer et la façon de renforcer nos outils.
    J'ai parlé du Danemark, parce qu'ils ont connu énormément de succès, comme vous le savez sans doute. Il n'y a pas eu d'acte terroriste commis par une personne soupçonnée d'être un ancien djihadiste. Les experts estiment que c'est en majeure partie à cause de la programmation.
    Madame Bossenmaier, j'aimerais vous poser une question sur la capacité du CST de prévenir des cyberattaques. Dans d'autres pays démocratiques, nous avons vu les organismes responsables de la sécurité se faire attaquer et menacer et des renseignements d'une importance vitale ont été rendus publics, ce qui nuit à la sécurité de l'État. Pouvez-vous nous en parler, s'il vous plaît?

  (1040)  

    Le Centre de la sécurité des télécommunications a comme toute première priorité la cybersécurité. Dans mes communications récentes, j'ai indiqué que nous protégeons les renseignements les plus sensibles du Canada depuis 70 ans. Or, cette activité est devenue plus difficile et plus complexe, vu la nature des menaces actuelles, mais également en raison du recours généralisé des citoyens, des entreprises et du gouvernement canadiens à la technologie de l'information; d'où l'importance de la cybersécurité.
    Nous consacrons énormément d'efforts à fournir des conseils et des services, non seulement au gouvernement du Canada, mais également dans un contexte élargi afin d'aider les divers acteurs à protéger leurs réseaux. On se concentre sur la protection des réseaux gouvernementaux ainsi que des infrastructures d'une importance critique.
    Certaines des dispositions proposées dans le projet de loi dont vous êtes saisis nous permettraient d'utiliser davantage nos cybercapacités afin de mieux protéger l'information des Canadiens. J'ai déjà parlé d'une disposition qui nous permettrait de protéger et de déployer nos réseaux sur des réseaux non gouvernementaux à la demande du propriétaire d'une infrastructure d'importance critique, par exemple. Le ministre a décrit un autre cas de figure, c'est-à-dire que nous pourrions tenter d'empêcher une attaque dirigée contre le Canada, les Canadiens ou une infrastructure canadienne avant même qu'elle se produise. Voilà deux exemples de la façon dont ce projet de loi nous aiderait à mieux protéger les Canadiens.
    Il va falloir se contenter de ces deux exemples.
    Merci.
    Monsieur Dubé, vous avez les trois dernières minutes.

[Français]

     Je vous remercie.
    La fin de votre réponse est peut-être liée à la question que je vais poser.
    Je vais retourner à l'article 24 proposé, dont nous discutions plus tôt, et à la question de l'information sur l'infrastructure. On peut lire à l'alinéa 24(1)b) proposé:
24(1)b) acquérir, utiliser, analyser, conserver et divulguer de l'information sur l'infrastructure à des fins de recherche et de développement [...]
.
    Je vais laisser le soin à mes collègues de le lire au complet.
    Plus loin, dans les définitions, il est dit:
24(5) [...] Information liée :

a) soit à un élément fonctionnel, physique ou logique, de l'infrastructure mondiale de l'information;

b) soit aux évènements qui se produisent lors de l'interaction entre deux dispositifs fournissant des services sur un réseau [...]
    J'aimerais être certain de bien comprendre. Dans le contexte de ce qui vous est offert comme pouvoir dans le projet de loi, quelle sorte d'exercice serait fait sur le plan de l'infrastructure pour que vous puissiez mener ce genre d'étude ou d'analyse de la pérennité et de la sécurité du réseau? Je comprends que votre mandat concerne les menaces étrangères, comme vous me l'avez dit plus tôt, mais vous allez inévitablement faire un travail lié au réseau canadien.
    Pouvez-vous me donner un exemple de ce qui serait fait dans le contexte de ce pouvoir qui est donné à l'article 24 proposé?
    Je vous remercie de cette question. Je vais répondre en anglais.

[Traduction]

    Pour revenir à votre première question concernant les renseignements publics, il importe de souligner que l'alinéa 25b) porte sur l'information accessible au public, tout comme le paragraphe 24(1). On y indique que « pour protéger la vie privée des Canadiens et des personnes se trouvant au Canada » des mesures doivent être en place pour ce qui est de l'utilisation de l'information accessible au public.
    Monsieur Dubé, cela nous ramène un peu à votre question qui portait sur la nature de la protection de la vie privée qui serait prévue si nous avions recours à l'information accessible au public.
    Quant aux infrastructures, je vais m'en remettre à mon collègue, Dominic Rochon...
    Puis-je poser une petite question là-dessus? J'ai très peu de temps.
    Ces mesures visent à protéger la vie privée, mais elles ne vous empêchent pas de recueillir des données. C'est bien cela?
    On indique: « pour protéger la vie privée des Canadiens... en ce qui a trait à l'utilisation, à l'analyse, à la conservation et à la divulgation... de l'information accessible au public ».
    Le Centre veillera à la protection de la vie privée, mais il pourrait néanmoins recueillir des données en...
    Permettez-moi de vous interrompre afin de vous répondre très rapidement, monsieur Dubé, sur la raison pour laquelle nous avons besoin de cette information.
    Comme vous le comprendrez, l'infrastructure informatique mondiale d'Internet est incroyablement complexe. On nous interdit de cibler des Canadiens lorsque nous menons nos activités, notamment pour ce qui est de recueillir des renseignements étrangers, alors nous devons comprendre exactement comment l'infrastructure informatique mondiale est conçue. Il existe énormément d'information accessible au public qui nous permet de comprendre cette infrastructure. La disposition nous permet d'étudier cette information et de comprendre les progrès technologiques. Des études ont été publiées qui nous aident à protéger la vie privée des Canadiens puisque nous nous assurons de cibler des étrangers qui se retrouvent à l'extérieur du Canada dans le cadre de nos activités.

  (1045)  

    Malheureusement, je vais devoir vous arrêter là.
    Au nom du Comité, je remercie chacun d'entre vous. Je suis sûr que nous aurons d'autres questions dans le cadre de cette étude. J'ose croire que vous serez prêts à revenir afin de répondre à d'autres questions de la part de nos membres.
    La séance est levée.
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