Passer au contenu
Début du contenu

CACN Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.

Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.

Publication du jour précédent Publication du jour prochain
Passer à la navigation dans le document Passer au contenu du document






Emblème de la Chambre des communes

Comité spécial sur les relations sino-canadiennes


NUMÉRO 010 
l
1re SESSION 
l
43e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 11 août 2020

[Enregistrement électronique]

  (1100)  

[Traduction]

    Je déclare la séance ouverte.
    Bienvenue à la 10e séance du Comité spécial sur les relations sino-canadiennes de la Chambre des communes. Conformément à l'ordre de renvoi du 20 juillet 2020, le Comité se réunit pour examiner les relations sino-canadiennes.
    La séance d'aujourd'hui se déroule par vidéoconférence.

[Français]

    Voici quelques règles à respecter pour assurer le bon déroulement de la réunion.
    Pour la vidéoconférence, les services d'interprétation fonctionneront à peu près comme pour une réunion de comité ordinaire. Au bas de votre écran, vous pouvez choisir entre le son du parquet, de l'anglais ou du français.
    Lorsque vous avez la parole, si vous voulez passer d'une langue à l'autre, vous devez également changer de canal d'interprétation pour que le canal corresponde à la langue dans laquelle vous vous exprimez. Il serait bon de faire une courte pause entre les deux langues.
    Avant de commencer à parler, attendez que je vous donne la parole en disant votre nom. Lorsque vous êtes prêts à parler, vous pouvez cliquer sur l'icône du microphone pour activer votre micro.
    Je rappelle que toutes les observations des députés et des témoins doivent être adressées à la présidence.
    Si un député souhaite prendre la parole en dehors de la période qui lui est réservée pour les questions, il doit activer son micro et mentionner qu'il souhaite faire un rappel au Règlement.
    Si un député souhaite intervenir au sujet d'un rappel au Règlement soulevé par un autre député, il doit utiliser la fonction « Lever la main » pour signaler au président qu'il désire prendre la parole. Pour ce faire, il doit cliquer sur « Participants » au bas de l'écran. Lorsque la liste s'affiche, à côté de votre nom, vous verrez une option qui vous permet de lever la main.
    Assurez-vous de parler lentement et clairement.
    Lorsque vous n'avez pas la parole, mettez votre micro en sourdine.
    L'utilisation d'un casque d'écoute est fortement recommandée.

[Traduction]

    Avant de commencer, est-ce que tout le monde peut cliquer sur le coin supérieur droit de son écran pour s'assurer d'être en mode « Vue de grille »? Ce mode vous permet de voir tous les participants dans une disposition en grille; ils peuvent ainsi se voir les uns les autres. Comme c'est le cas lors de séances en personne, le public ne verra que le participant qui a la parole.
    Je voudrais accueillir notre premier groupe de témoins, composé de Cherie Wong, directrice administrative, et Davin Wong, directeur à l'Engagement des jeunes et aux initiatives stratégiques, d'Alliance Canada Hong Kong; de Gloria Fung, présidente et coordonnatrice de la plateforme pancanadienne pour 16 organisations concernées par Hong Kong, de Canada-Hong Kong Link; et d'Aileen Calverley, cofondatrice et curatrice de Hong Kong Watch.
    Chaque témoin ou organisation disposera de 7 à 10 minutes pour faire un exposé, après quoi les membres du Comité lui poseront des questions.
    Monsieur Wong, vous avez la parole.

  (1105)  

    Je m'appelle Davin Wong et je suis directeur à l'Engagement des jeunes et aux initiatives stratégiques pour l'Alliance Canada Hong Kong, ou ACHK. J'ai aussi déjà été président de l'Union étudiante universitaire de Hong Kong jusqu'à ce que je fuie Hong Kong. Je voudrais remercier le Comité de m'avoir invité à témoigner.
    Sensible au privilège dont je jouis à titre de Hongkongais canadien, je comprends qu'il est de mon devoir de parler. Même si je m'adresse à vous à titre de citoyen canadien, je cours un risque. En vertu de la loi sur la sécurité nationale, le gouvernement de Hong Kong a déjà émis des mandats pour « sécession » et « collusion avec des pays étrangers » contre six défenseurs des droits de la personne se trouvant à l'étranger, dont un citoyen américain intervenant auprès de son propre gouvernement.
    La loi sur la sécurité nationale empêche les Hongkongais d'exprimer des opinions contraires. Le gouvernement s'en sert également pour écarter des candidats et influencer l'élection du conseil législatif. Mes amis et les activistes ressentent les effets délétères de cette loi draconienne. Les Hongkongais dépendent maintenant de leurs alliés étrangers pour obliger les gouvernements de Pékin et de Hong Kong à rendre des comptes.
    J'aimerais ramener le Comité quelques années en arrière, au moment où j'étais encore un leader étudiant participant au mouvement prodémocratie. À l'époque, j'ai été harcelé, menacé et intimidé. Le 30 août 2019, j'ai été suivi, passé à tabac et blessé par un homme portant un t-shirt blanc, vêtement distinctif des fiers-à-bras du régime de Pékin. Trois autres activistes ont été brutalement attaqués le même jour.
    Je ne me suis pas rendu à l'hôpital après l'attaque, car l'endroit est dangereux pour les activistes, puisqu'il a été révélé que la police infiltre le système des autorités des établissements pour retracer les manifestants hospitalisés. À l'époque, l'union étudiante avait même mis sur pied une clinique clandestine où travaillaient bénévolement des médecins et des étudiants en médecine qui aidaient les manifestants ayant besoin de soins médicaux.
    En plus, je n'ai pas demandé l'aide de la police. Pourquoi l'aurais-je fait? Comme j'étais activiste, la police me considérait comme un ennemi. J'ai été témoin de ses abus de pouvoir et de ses violations des droits de la personne. J'ai assisté à des arrestations de masse. Le dixième de mes amis ont été arrêtés sous de fausses accusations. J'ai transporté un ami atteint à l'estomac par un tir de la police. J'ai été mis en joue et je me souviens encore parfaitement de l'odeur du gaz lacrymogène. La force de police de Hong Kong a arrêté des médecins et des journalistes. Des manifestants ont été rossés, violés et privés des processus auxquels ils avaient droit. Savez-vous ce que mes amis et moi transportions sur nous lors des manifestations? Nos dernières volontés, car nous craignions de ne jamais revoir la lumière du jour.
    Après l'attaque, j'ai immédiatement réservé mon billet à 15 heure et j'ai pris l'avion à 19 heure. Je savais qu'en fuyant Hong Kong, il n'y avait pas de retour en arrière, mais je pensais encore naïvement avoir une mince chance de revenir. La loi sur la sécurité nationale a mis fin à cet espoir. Nos activités de défense des droits de la personne au Canada peuvent nous mener en prison en vertu de la large définition de « collusion avec des pays étrangers ». Même au Canada, nous ne sommes pas en sécurité, car Pékin a enlevé des dissidents dans d'autres pays. La peur est bien réelle.
    En ce qui concerne la loi sur la sécurité nationale, le fait que Pékin affirme avoir le droit d'agir à l'étranger en réaction à des gestes posés par des non-Hongkongais se trouvant hors de son territoire amplifie ses ambitions autoritaires mondiales. Votre comité devrait également porter attention aux longs tentacules de Pékin et à son ingérence qui menace déjà nos libertés au Canada.
    Même si je ne suis pas expert en sécurité nationale, j'ai été témoin des tactiques du régime, particulièrement en ce qui concerne l'activisme universitaire et étudiant. Le bureau de liaison a fourni une aide financière substantielle à l'Association des étudiants et des universitaires chinois dans les universités de Hong Kong. Sachez en outre que l'Union étudiante universitaire de Hong Kong a déjà été infiltrée par des groupes favorables à Pékin, et nous craignons que ce genre d'ingérence ne se manifeste au Canada.
    La liberté et l'autonomie de Hong Kong ont été annihilées. Les journalistes gardent les derniers vestiges de la liberté de presse et de l'information, mais le propriétaire d'Apple Daily, une des sources les plus fiables à Hong Kong, a été arrêté en vertu de la loi sur la sécurité nationale il y a deux jours. La situation est urgente et le temps presse.
    Je demande au Canada d'offrir immédiatement un havre sécuritaire aux Hongkongais afin de faire échec à la campagne d'ingérence malveillante du Parti communiste chinois à Hong Kong et de collaborer avec nos alliés pour obliger les gouvernements de la Chine et de Hong Kong à rendre des comptes.
    Je vous remercie de nouveau de me donner l'occasion de vous faire part de mon expérience. Je répondrai à vos questions avec plaisir.

  (1110)  

    Je vous remercie beaucoup.
    Mme Wong ajoutera-t-elle quelque chose ou non?
    D'accord. Vous disposez encore de quelques minutes. Vous avez la parole.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Je m'appelle Cherie Wong et j'utilise le pronom « elle ».
    Je suis née au Canada et j'ai grandi après la rétrocession de Hong Kong. Je suis donc honorée de témoigner aujourd'hui à titre de Hongkongaise et de Canadienne. Je suis cofondatrice et directrice administrative d'Alliance Canada Hong Kong, ou ACHK, un regroupement national multipartite dirigé bénévolement qui réunit 18 groupes communautaires de 10 villes.
    Depuis le début du mouvement démocratique à Hong Kong, j'ai reçu des menaces de mort et de viol, certains laissant entendre qu'ils pourraient s'en prendre à ma famille. Pendant la semaine de lancement de l'ACHK, j'ai reçu un appel téléphonique menaçant dans ma chambre d'hôtel où on disait qu'on venait me chercher. Même si la chambre avait été réservée par quelqu'un d'autre, on avait quand même réussi à me trouver.
    Le 1er octobre 2019, j'ai codirigé une manifestation sur la Colline du Parlement avec le groupe Ottaviens en solidarité avec Hong Kong. Plusieurs jours avant la manifestation, nous avons commencé à recevoir des menaces en ligne. Lors de la manifestation, nous avons été attaqués, menacés et harcelés verbalement et physiquement. Plus de 100 alliés du régime de Pékin, rapidement mobilisés, nous ont entourés et rencognés.
    Même si la police d'Ottawa avait été appelée pour nous escorter, des groupes favorables au régime de Pékin nous ont photographiés et filmés, continuant à nous suivre même quand nous sommes partis. Après la manifestation, les renseignements personnels d'un grand nombre d'entre nous ont été publiés à des fins malfaisantes.
    Des Canadiens de toutes les régions du pays sont obligés de cacher leur identité par crainte d'être pris pour cible par des forces favorables au régime de Pékin. Mais ce qui est encore plus préoccupant, c'est que ces campagnes d'ingérence sont encouragées par des diplomates chinois en poste au Canada. Tong Xiaoling, consul général à Vancouver, a invoqué l'unité ethnonationale dans une tentative pour prendre le contrôle des communautés chinoises.
    Hong Kong n'est pas qu'une question étrangère; voilà pourquoi nos demandes ne visent pas seulement à favoriser l'avenir démocratique de Hong Kong, mais témoignent aussi des problèmes que rencontrent actuellement les communautés canadiennes.
    Sous les auspices de la Conférence de presse des citoyens, nous avons consulté 13 000 Canadiens et Hongkongais dans le cadre d'un sondage afin d'étayer cinq appels à l'action du Canada, lesquels visent à fournir de l'aide humanitaire aux Hongkongais, aux Ouïghours, aux Tibétains, aux Chinois et à d'autres communautés fuyant les persécutions; à invoquer des sanctions contre des fonctionnaires chinois et hongkongais pour des atrocités commises en violation des droits de la personne; à protéger de l'érosion les droits et libertés prévus par la Charte canadienne; à mener enquête sur l'ingérence étrangère dans les institutions canadiennes afin de la combattre; et à mettre fin à toutes les exportations de biens et de technologies utilisées à des fins militaires et policières.
    Même si nous nous réjouissons de la décision de suspendre les exportations de matériel militaire de nature délicate à destination de Hong Kong, les établissements d'enseignement canadiens continuent d'être dans une position vulnérable en échangeant des fonds contre de la propriété intellectuelle. Trois universités canadiennes, soit l'Université McGill, l'Université de Waterloo et l'Université de Toronto, figurent parmi les 10 établissements qui collaborent le plus avec l'Armée populaire de libération.
    L'ingérence d'États étrangers est profondément enracinée dans diverses composantes de la société canadienne, notamment dans les universités, les médias, les médias sociaux, les communautés étudiantes, le secteur privé, le milieu de l'éducation et les institutions politiques. Il est devenu évident que des campagnes coordonnées visent à infiltrer et à influencer la société canadienne. Ces campagnes s'inscrivent dans les visées autoritaires mondiales du Parti communiste chinois.
    Au Canada, nombreux sont ceux qui demandent au gouvernement de s'élever contre les atrocités commises en violation des droits de la personne, comme le démontre le document cosigné par 27 chefs de la communauté et 75 parlementaires appartenant aux principaux partis politiques. Nous demandons au gouvernement d'invoquer les sanctions Magnitski en collaboration avec d'autres puissances moyennes.
    Le Parti communiste chinois fait complètement fi des règles internationales. L'État n'a fait qu'accélérer ses efforts de suppression en se servant de la COVID-19 comme prétexte. Depuis la mise en oeuvre de la loi sur la sécurité nationale, le Parti communiste chinois recourt à des tactiques d'oppression au Tibet et dans l'Est du Turkestan, notamment lors du premier jour de son application. Les autorités ont commencé à recueillir l'ADN des personnes arrêtées à Hong Kong.
    On persiste à croire que les Hongkongais ont aisément accès aux ressources nécessaires pour émigrer et que les protestataires sont jeunes. En réalité, nombreux sont ceux qui n'ont pas les moyens de quitter le pays et ne peuvent peut-être pas se qualifier en passant par les voies habituelles. Nous avons peu de temps pour agir avant que le Parti communiste chinois ne supprime la liberté de mouvement à Hong Kong.
    Pour ce qui est du rôle du Canada dans le mouvement démocratique à Hong Kong, j'espère que vous conviendrez tous que l'avenir démocratique doit être celui du peuple, doit être assuré par le peuple et doit être pour le peuple de Hong Kong.
    Avant de terminer, je veux souligner que le Parti communiste chinois, de par ses affirmations, a créé l'illusion que le commerce avec la Chine présente un avantage net. Il est naïf de croire que le Parti communiste chinois va changer. À de multiples reprises, le Parti s'est servi au commerce comme d'une arme, et il est absolument crucial que le Canada commence à diversifier ses relations commerciales et économiques avec des pays ayant à coeur le développement démocratique et respectant les droits de la personne.

  (1115)  

    Je vous remercie de nouveau de m'avoir invitée à témoigner aujourd'hui. Je répondrai à vos questions avec plaisir et j'espère que nous pourrons vous inspirer des idées afin de faire avancer les intérêts du Canada dans le grand débat sur les relations sino-canadiennes.
    Je vous remercie beaucoup, monsieur Wong et madame Wong.
    Nous entendrons maintenant Gloria Y. Fung, présidente et coordonnatrice de la plateforme pancanadienne pour 16 organisations concernées par Hong Kong, de Canada-Hong Kong Link.
    Madame Fung, vous disposez de 10 minutes. La parole est à vous.
    Monsieur le président, distingués membres du comité spécial, je vous remercie de m'offrir l'occasion de témoigner devant vous. Je considère comme un honneur de témoigner aux côtés de courageuses personnes de Hong Kong qui luttent en faveur de la liberté et des droits de la personne.
    Je suis une fière Canadienne qui a grandi à Hong Kong. Je prends part aux démarches de justice internationale depuis la formation de Canada-Hong Kong Link en 1997. L'an dernier, quand j'ai vu des millions de Hongkongais manifester pacifiquement en faveur des droits civils fondamentaux et de jeunes protestataires figurant résister courageusement en première ligne malgré les gaz lacrymogènes, le poivre de Cayenne et mêmes les balles, j'ai été touchée en plein cœur. Je sais à quel point il est difficile de surmonter sa peur et de défendre la dignité humaine et les droits fondamentaux en Chine, car j'ai été témoin du massacre de la place Tiananmen en 1989. J'ai vu des chars d'assaut écraser des gens et un homme mourir sous les balles à mes côtés. Jamais je ne sous-estimerai la brutalité du Parti communiste chinois quand il entend réduire la dissidence au silence.
    À Hong Kong, les manifestations qui se sont déroulées au cours de la dernière année ont été marquées par une augmentation de la brutalité policière; plus de 9 000 personnes ont été arrêtées, dont certaines n'avaient que 13 ans. Ces personnes s'exposent à des peines d'emprisonnement pouvant aller jusqu'à 10 ans. C'est le prix à payer quand on lutte pour préserver les valeurs auxquelles les Canadiens adhèrent également.
    Cette année a été marquée par la fin de l'autonomie, de la primauté du droit et des libertés fondamentales à Hong Kong sous l'autorité d'un seul pays et au titre d'un cadre englobant deux systèmes, Pékin imposant sa nouvelle loi sur la sécurité nationale et cherchant à écraser les médias indépendants et l'opposition. De nombreux Hongkongais craignent de connaître le même sort que les millions de prisonniers ouïghours, tibétains ou d'autres groupes confessionnels privés de leurs droits à la liberté d'expression et de culte.
    En plus de menacer les droits civils des Hongkongais et des 300 000 Canadiens vivant à Hong Kong, la loi sur la sécurité nationale confère des pouvoirs extraterritoriaux. Quiconque critique les gouvernements de la Chine ou de Hong Kong dans le monde pourrait être considéré comme un criminel en vertu d'une disposition au libellé vague qui fait de l'encouragement à la haine contre la Chine une infraction criminelle. La Chine a des traités d'extradition avec de nombreux pays, et la citoyenneté canadienne n'offre aucune protection. Les deux Michael peuvent en témoigner, eux qui en sont à leur 20e mois de détention arbitraire dans des conditions s'apparentant à de la torture.
    Notre gouvernement doit prendre au sérieux cette grave menace à la sécurité des Canadiens. Une cinquantaine de Hongkongais ont demandé l'asile au Canada et nous anticipons une nouvelle vague d'immigrants et de demandeurs d'asile rejetés une fois que les restrictions en matière de voyage auront été levées.
    Quelle incidence Hong Kong a-t-elle sur la communauté canadienne?
    Ce qui se passe à Hong Kong revêt une importance capitale pour les intérêts canadiens. Alors qu'un régime chinois de plus en plus puissant cherche à élargir son influence et à bafouer la primauté du droit internationale, Hong Kong se trouve aux premières lignes d'un conflit mondial opposant le totalitarisme à la liberté et à la démocratie. Ainsi, en défendant la liberté à Hong Kong, on défend également la sécurité, les intérêts et les valeurs du Canada.
    En juin dernier, Canada-Hong Kong Link a tenu son premier ralliement contre le projet de loi sur l'extradition. L'activité a réuni un large éventail de communautés, dont des Ouïghours, des Tibétains, des Taïwanais et des secteurs religieux. Le soutien des Canadiens à l'égard de Hong Kong s'est amplifié, prenant la forme de manifestations d'envergure auxquelles prennent part des milliers de gens aux quatre coins du pays. À la suite du lancement d'une pétition en ligne en appui à la démocratie et aux droits de la personne à Hong Kong, signée par des milliers de personnes au Canada, nous avons formé collectivement un réseau national d'organisations encourageant les électeurs à réclamer des changements de politique.
    Le Parti communiste chinois a toutefois lancé des opérations secrètes afin de réprimer notre droit à la liberté d'expression, dressant des listes noires commerciales, effectuant des appels téléphoniques et envoyant des courriels menaçants, s'adonnant au piratage électronique et recourant même à la confrontation physique. J'ai personnellement fait l'objet de toutes ces formes d'intimidation. Des appelants anonymes m'ont plusieurs fois prévenue que je m'exposais à de graves conséquences si je continuais à défendre les droits de la personne. Le service de sécurité de Google m'a avisée que de nombreuses tentatives de piratage étatiques avaient été effectuées.

  (1120)  

    La confrontation physique la plus dramatique a lieu en août de l'an dernier. Des étudiants étrangers chinois et des organisations du Front uni pour Pékin ont été mobilisés pour bloquer et intimider des manifestants pacifiques à Toronto, à Montréal, à Calgary, à Vancouver et dans de nombreuses autres villes du monde en même temps. À Toronto, ils ont bloqué notre marche et tenté de voler nos drapeaux, poussant la police à intervenir. Ils nous ont abreuvés d'injures, chantant l'hymne national chinois et nous huant quand nous répondions en entonnant l'Ô Canada. Des hommes plus âgés munis de téléphones cellulaires se tenaient à l'écart de la foule, donnant apparemment des instructions.
    Dans une église de Vancouver, une veillée de prières en faveur de la paix à Hong Kong a été perturbée par 100 protestataires favorables à Pékin brandissant des drapeaux chinois. Les membres de l'église ont dû appeler la police pour que les gens puissent partir en sécurité. Ces incidents, qui témoignent d'une opposition de valeurs, ont été répertoriés dans le rapport national publié en 2020 sur le harcèlement et l'intimidation observés par Amnistie internationale et la Coalition canadienne des droits de la personne en Chine.
    Les organisations du Front uni pour Pékin ont publié de pleines pages de publicité dans des journaux canadiens de langue chinoise en appui au projet de loi sur l'extradition et la nouvelle loi sur la sécurité nationale. Dans la plupart des médias canadiens de langue chinoise, le traitement des questions relatives à Hong Kong est pratiquement contrôlé par le Parti communiste chinois, soit parce qu'il les possède directement ou parce qu'il exerce son influence par l'entremise de l'ambassade et des consulats de la Chine. La liberté journalistique est limitée au Canada.
    Pékin foulant aux pieds les droits civils à Hong Kong, nous demandons au gouvernement du Canada de prendre les mesures suivantes. Il doit notamment offrir un « programme de refuge sécuritaire » prévoyant un processus accéléré pour accorder le statut de résident permanent aux Hongkongais s'exposant à la persécution politique, y compris aux étudiants étrangers et aux travailleurs expatriés qui ont participé aux manifestations au Canada. Il doit en outre invoquer la loi Magnitski afin de sanctionner les fonctionnaires de la Chine et de Hong Kong qui violent les droits de la personne en interdisant à ces personnes et aux membres de leur famille d'entrer au Canada et en gelant leurs actifs au pays, comme les États-Unis l'ont déjà fait. Le gouvernement doit également adopter une loi pour lutter contre l'ingérence étrangère dans la politique canadienne et contre la suppression de la liberté d'expression en sol canadien.
    De plus, nous demandons au Comité d'accélérer la rédaction du rapport sur Hong Kong après avoir recueilli sa série de témoignages afin d'instaurer immédiatement les politiques proposées pour réagir à la crise qui sévit à Hong Kong au chapitre des droits de la personne.
    En conclusion, le Canada doit collaborer avec des alliés internationaux afin d'adopter une politique forte à l'égard de la Chine. Il est plus que temps qu'il montre la voie à l'échelle internationale.
    Je vous remercie beaucoup.

  (1125)  

    Je vous remercie beaucoup, madame Fung.
    C'est maintenant Aileen Calverley, cofondatrice et curatrice de Hong Kong Watch, qui prendra la parole.
    Madame Calverley, vous disposez de 10 minutes. La parole est à vous.
     Je vous remercie beaucoup de me recevoir ici. C'est pour moi un honneur de m'adresser à vous aujourd'hui.
    Depuis l'entrée en vigueur de la loi sur la sécurité nationale, le 30 juin, le régime s'en est déjà servi pour réprimer la liberté d'expression et de rassemblement dans les rues, les salles de classe et l'étranger. Plus de 30 manifestants et activistes ont été arrêtés. La démocratie elle-même est la cible de cette nouvelle loi. Le gouvernement de Hong Kong et les fonctionnaires de Pékin en poste à Hong Kong ont brandi la menace de la loi sur la sécurité nationale pour écraser la dissidence et mettre à mal la démocratie en écartant 12 candidats favorables à la démocratie qui avaient remporté les primaires, et ont menacé plus de 600 000 Hongkongais qui avaient voté pour ces candidats lors des primaires. Il a alors été décidé de reporter les élections.
    Nous craignons maintenant qu'en invoquant des ordonnances d'urgence datant de l'époque coloniale, Pékin suspende indéfiniment la démocratie à Hong Kong.
    La nouvelle loi ne sert pas qu'à écraser l'opposition aux urnes ou sur la rue. Le fait que les établissements imposent l'éducation sur la sécurité nationale, encouragent les étudiants et les enseignants à se surveiller mutuellement et aient renvoyé Benny Tai, un professeur d'université favorable à la démocratie, porte un coup à la liberté universitaire.
    De même, l'arrestation de Jimmy Lai, le propriétaire du journal prodémocratie Apple Daily, lorsque 200 agents de police ont investi ses bureaux, met à mal la liberté de presse.
    Pendant ce temps, des sociétés technologiques comme Telegram, Facebook, Google et WhatsApp sont dans une impasse avec les autorités en ce qui concerne leur obligation d'obtempérer aux demandes de renseignements de la police dans le cadre d'affaires de sécurité nationale. Ces développements illustrent l'effet délétère que la loi sur la sécurité nationale a sur tous les secteurs de la société de Hong Kong.
    Récemment, le groupe de parlementaires multipartite du Royaume-Uni sur Hong Kong a lancé son enquête sur les violations des droits de la personne commises par la police de Hong Kong. Enfreignant directement la loi humanitaire internationale, la police a arrêté des dizaines de travailleurs de la santé qui tentaient d'aider des manifestants blessés.
    La situation n'est pas importante que pour les Hongkongais privés de leur liberté; elle nous importe à nous aussi, au Canada. Comme plus de 900 000 Canado-Hongkongais vivent au Canada et à Hong Kong, le Canada jouit d'une relation particulière avec Hong Kong. Si le Canada, défenseur de longue date des droits de la personne, n'est pas prêt à s'allier avec des partenaires partageant les mêmes vues afin de défendre les libertés à Hong Kong, alors les valeurs auxquelles nous croyons et la réputation du Canada à l'échelle internationale en pâtiront.
    Le fait que le gouvernement de Pékin ait publié une liste de personnes recherchées en vertu de la loi sur la sécurité nationale confirme les prétentions inquiétantes des autorités selon lesquelles elles auraient du pouvoir à l'étranger, la capacité de cibler des citoyens étrangers et l'intention d'appliquer la loi de manière rétroactive. Comme une importante communauté canado-hongkongaise vit au Canada, il est extrêmement préoccupant que six activistes hongkongais vivant au Royaume-Uni, en Allemagne et aux États-Unis soient tous recherchés en vertu de la loi. L'un des activistes en question est un citoyen américain vivant aux États-Unis depuis plus de 25 ans. Ces activistes sont accusés d'incitation à la sécession et de collusion avec des forces étrangères, et s'exposent à des peines d'emprisonnement à perpétuité.
    La loi nuit également aux intérêts du Canada dans la région. Dans un rapport intitulé Why Hong Kong matters qu'il a publié récemment, Hong Kong Watch conclut que la ville, en sa qualité de centre financier, continue d'être indispensable aux entreprises chinoises et étrangères, précisément en raison du modèle « un pays, deux systèmes », qui garantit la liberté et la primauté du droit.
    Hong Kong demeure le lien financier le plus important entre la Chine et le reste du monde, ainsi qu'un centre névralgique pour les entreprises canadiennes. Si on prive la ville de la primauté du droit, c'est un des principaux centres financiers de l'Asie qui s'écroulera. La Chine doit faire marche arrière.
    Avant de nous pencher sur ce que nous devons faire, nous devons déboulonner un mythe. On affirme souvent que la Chine est le deuxième partenaire commercial du Canada et que ce dernier ne peut se permettre de la contrarier, mais examinons les chiffres.

  (1130)  

    En 2019, 3,9 % des exportations du Canada étaient destinées à la Chine. Le Canada ne dépend pas que de la Chine. Les États-Unis constituent bien entendu le principal partenaire commercial du Canada, puisque 75 % de nos exportations prennent le chemin de ce pays. Le deuxième partenaire commercial du Canada est l'Union européenne. Selon un rapport publié récemment par la Henry Jackson Society, le Canada est le pays du Groupe des cinq qui dépend le moins de la Chine à titre de marché extérieur. Le gouvernement du Canada ne devrait pas se réfugier derrière le mythe au lieu de défendre ses valeurs.
    Le Canada ne dépend pas de la Chine. Il doit faire preuve de courage et tenir tête au Parti communiste chinois. Il peut le faire de trois manières: en prenant des sanctions, en usant de diplomatie et en offrant un refuge.
    La semaine dernière, en réaction à la violation de la déclaration commune, le gouvernement américain a imposé des sanctions à 11 fonctionnaires hongkongais et chinois, notamment à Carrie Lam. Cette mesure fait suite à l'entrée en vigueur du projet de loi sur les sanctions financières, intitulée loi sur l'autonomie de Hong Kong, qui permet au gouvernement de sanctionner des particuliers et des institutions financières qui ont violé l'autonomie de Hong Kong. Le Canada devrait suivre le mouvement.
     Hong Kong Watch a toujours soutenu l'imposition de sanctions ciblées pour trois raisons. Premièrement, nous admettons que le fait de cibler des fonctionnaires hongkongais et chinois a un effet dissuasif, puisque ceux qui commettent des violations constantes des droits de la personne paient un prix élevé, notamment sous la forme d'une restriction aux voyages et de sanctions financières.
    Deuxièmement, même si un fonctionnaire chinois a affirmé que les sanctions auront peu de conséquences personnelles, puisqu'il ne possède pas de compte de banque aux États-Unis et ne voyage pas dans ce pays, nous savons que les sanctions sont efficaces. Un haut dirigeant d'une succursale d'une grande banque européenne en Chine a indiqué que tous les fonctionnaires figurant sur la liste de sanctions des États-Unis sont considérés comme « toxiques » par les banques étrangères. En outre, comme les membres de la famille de nombreux fonctionnaires inscrits sur la liste ont une citoyenneté étrangère, une interdiction de visa constituerait pour eux un obstacle de taille. Les partenaires de la secrétaire à la Justice Teresa Cheng et du secrétaire à l'Éducation Kevin Yeung ont la citoyenneté canadienne, et le secrétaire aux Affaires intérieures, Caspar Tsui, possède des biens ici, au Canada.
    Troisièmement, les sanctions ciblées font partie d'une discussion plus vaste sur la réaction de la communauté internationale à la stratégie expansionniste du Parti communiste chinois.
    Pour Hong Kong, il est minuit moins cinq. Nous espérons que le gouvernement du Canada jouera son rôle et aura le courage de suivre l'exemple des États-Unis en imposant des sanctions en vertu de la Loi sur la justice pour les victimes de dirigeants étrangers corrompus afin de défendre les droits et libertés à Hong Kong.
    Pendant trop longtemps, Carrie Lam et le Parti communiste chinois ont pu agir impunément en suspendant les libertés et en violant les droits de la personne. Bien entendu, les sanctions Magnitski à elles seules ne constituent pas la réponse. Elles devraient s'inscrire dans une approche plus vaste dans le cadre de laquelle on offrirait une aide vitale aux Hongkongais, particulièrement aux jeunes manifestants qui sont dans le besoin, et soutiendrait la création d'un poste d'envoyé ou de rapporteur spécial des Nations unies à Hong Kong pour surveiller la situation sur place afin d'en faire rapport. Cette approche comprendrait une stratégie diplomatique exhaustive, l'offre de refuge et des sanctions, autant de mesures qui devraient constituer les fondements de la réaction au Canada et de ses partenaires à la crise qui frappe Hong Kong.
    Certains de ceux qui font passer le commerce avant les droits de la personne feront peut-être valoir que ces mesures auront peu d'effet si le Canada fait cavalier seul et ne feront qu'indisposer la Chine. Le Canada n'est pas seul, cependant. Au cours du mois dernier, divers pays ont suspendu leurs traités d'extradition avec Hong Kong et instauré des mesures de contrôle des exportations.
    Je suis certaine que si le Canada décide d'agir, il se retrouvera en étroite compagnie avec ses principaux alliés du monde libre. Il est temps d'agir et de s'élever à la défense de Hong Kong.
    Je vous remercie beaucoup.

  (1135)  

    Je vous remercie beaucoup, madame Calverley.
    Je remercie tous les témoins d'avoir respecté le temps qui leur était accordé.
    Nous passerons maintenant au premier tour de questions. C'est M. Genuis qui interviendra en premier, pour six minutes.
     Je vous remercie, monsieur le président.
    Je remercie tous les témoins. Je suis ravi que nous soyons enfin ici afin de tenir des audiences sur Hong Kong. J'aurais voulu que nous commencions ces audiences il y a des mois, mais nous n'avions pas le soutien du gouvernement en mai. Mieux vaut tard que jamais, cependant, et les témoignages percutants que nous recueillons serviront, espérons-le, à réveiller de façon magistrale les parlementaires, le gouvernement et tous les Canadiens. Nous entendons des témoins qui possèdent une connaissance approfondie et un grand amour de Hong Kong, mais qui sont avant tout de fiers Canadiens qui parlent des menaces qui pèsent sur leurs droits, leur liberté et leur sentiment de sécurité ici, au Canada.
    Je retiens de vos témoignages que les droits fondamentaux de la personne sont menacés à Hong Kong. Il s'agit d'une attaque contre la loi internationale et d'une violation des engagements de la Chine, mais aussi d'un effort sans précédent du régime pour étendre ses tentacules à l'étranger afin d'étouffer la liberté d'expression. Le gouvernement chinois présume maintenant qu'il peut exiger des comptes des gens et poursuivre des citoyens canadiens pour les propos qu'ils tiennent au Canada. Voilà qui devrait nous préoccuper fortement. Je vous remercie de nous en avoir avisés.
    Je veux m'attarder à certaines mesures à prendre. Un des témoins a indiqué que le Comité devrait déposer un rapport comprenant des recommandations précises concernant la situation de Hong Kong. J'aimerais que les autres témoins me disent comment procéder à cet égard. Quand nous voyons ce qu'il se passe à Hong Kong, il est question de « préoccupations » et de « graves préoccupations ». Les gens en ont assez d'entendre parler de « préoccupations ». Ils veulent entendre parler de mesures concrètes.
    Nous disposons de quelques mesures précises et efficaces, de quatre outils sur lesquels les quatre témoins semblent s'entendre: les sanctions Magnitski, dont tout le monde a parlé, je pense; les nouvelles dispositions législatives fermes portant sur l'ingérence étrangère au Canada; les nouvelles voies d'immigration; et les propositions en matière de diplomatie.
    Je suppose que je veux simplement poser mes questions ensemble pour que nous puissions peut-être entendre l'avis de tous les témoins à ce sujet.
    Le Comité devrait-il rédiger un rapport pour inscrire ces questions au programme parlementaire? En ce qui concerne les sanctions, devrions-nous sanctionner Carrie Lam? Est-ce quelque chose que le Canada devrait envisager? Sur le plan de l'ingérence étrangère, il me semble évident, d'une certaine manière, que nous devrions avoir une politique de tolérance zéro à l'égard des diplomates s'adonnant à l'ingérence étrangère ici, au Canada. Tout diplomate intimidant des Canadiens devrait être renvoyé dans son pays. Nous devrions mettre fin à la collaboration universitaire avec les armées étrangères hostiles. Selon moi, il est insensé que nos universités collaborent avec l'Armée populaire de libération.
    Ce sont là des mesures simples et claires que le gouvernement du Canada pourrait prendre immédiatement. J'aimerais entendre ce que tous les témoins ont à dire à ce sujet.
    Si vous le voulez bien, monsieur Genuis, pourriez-vous accélérer les choses en indiquant quel témoin vous voudriez entendre en premier? Je suis désolé de vous le demander, mais je pense que cela nous aiderait tous.
    Bien sûr. Que diriez-vous d'inverser l'ordre dans lequel les témoins ont pris la parole?
    Très bien.
    Madame Calverley, vous avez la parole.
    Je pense qu'il faut agir immédiatement, car le temps presse. La situation est très critique à Hong Kong. Je conviendrais qu'en ayant...
    Nous avons une liste de sanctions, en fait. Je travaille depuis le Royaume-Uni. Vous savez peut-être que Hong Kong Watch est une organisation non gouvernementale internationale de défense des droits de la personne, mais son administration centrale se trouve à Londres. Le ministre des Affaires étrangères a déjà le premier groupe de noms de personnes à sanctionner. Elle n'englobe pas la Chine, mais nous exerçons des pressions pour que le prochain groupe inclue des fonctionnaires chinois et hongkongais.
    Je conviendrais certainement avec vous qu'il faut inscrire Carrie Lam sur la liste, monsieur Genuis. Je pense que nous devons le faire. Comme je l'ai indiqué, il est très important que nous prenions des mesures avec nos principaux alliés pour ne pas faire cavalier seul. Bien entendu, certains se sont moqués de nous en demandant comment nous pourrions sauver Hong Kong alors que nous ne pouvons même pas sauver nos propres citoyens canadiens. Je suis en total désaccord avec cette façon de voir. Je pense que si la communauté internationale fait front commun, nous pouvons sauver tant nos Canadiens que Hong Kong.

  (1140)  

    Madame Fung, peut-être pourriez-vous réagir à mon introduction et à mes questions.
    Je suis entièrement d'accord avec vous. Je pense qu'il est crucial d'accélérer la rédaction du rapport sur la présente série d'audiences. Nous ne pouvons pas attendre la fin de toutes les audiences que le Comité spécial tient sur tous les dossiers, car le risque auquel la population de Honk Kong est confrontée est imminent. Même un mois sera trop long. Nombreux sont ceux qui s'exposent déjà à des risques mettant leur vie en péril.
    Nous devons absolument collaborer avec nos alliés, particulièrement ceux du Groupe des cinq, afin de réfléchir aux mesures d'urgence à prendre pour aider les Hongkongais risquant fortement d'être victimes de persécution politique à quitter Hong Kong. Par ailleurs, nous devrions mettre en œuvre le programme de refuge sécuritaire afin de permettre aux victimes de persécution politique de s'installer au Canada. De nombreux étudiants étrangers,que beaucoup oublient, se sont joints à nous au cours de la dernière année dans le cadre de nos ralliements et d'un éventail d'activités sociales. Eux aussi s'exposent à un risque de persécution politique et devraient se voir offrir une sorte de prolongation de visa pour rester...
    Madame Fung, je vous remercie beaucoup. Je crains que le temps de M. Genuis ne soit écoulé. Je vous remercie, monsieur Genuis.
    Nous accorderons maintenant la parole à Mme Zann pour six minutes.
    Je vous remercie beaucoup.
    Je veux remercier les témoins de comparaître aujourd'hui. Je sais qu'il s'agit d'une question qui suscite beaucoup d'émotions et de préoccupations chez bien des gens à Hong Kong, ainsi que chez vous et vos familles.
    Sachez que j'ai visité Hong Kong une fois et que j'ai trouvé cette ville incroyable. Elle n'a pas son pareil dans le monde, et je suis désolée de voir ce qu'il s'y passe actuellement.
    Des observateurs nous ont avertis que la loi sur la sécurité nationale permet au gouvernement d'agir à l'étranger, comme on l'a fait remarquer. Amnistie internationale a notamment indiqué que la loi s'applique à tout le monde sur la planète. Selon vous, à quels endroits et à qui cette loi s'applique-t-elle, et comment les mesures extraterritoriales de cette loi se comparent-elles aux dispositions de sécurité nationale adoptées par des gouvernements en dehors de la Chine?
    Monsieur Wong, voudriez-vous commencer à répondre à cette question en premier? Mme Fung pourra peut-être intervenir par la suite.
    Je vous remercie de poser cette question.
    La Loi sur la sécurité nationale, et particulièrement les dispositions sur l'intervention à l'étranger, est effectivement préoccupante. Vous avons vu qu'un journaliste travaillant pour un journal britannique a été arrêté à Hong Kong il y a deux jours en vertu de cette loi. Nous constatons ainsi que même si nous avons mis fin au traité d'extradition avec Hong Kong, les Canadiens qui vivent ou se trouvent simplement à Hong Kong risquent d'être arrêtés, même s'ils travaillent pour la presse canadienne. Je pense que le Comité devrait porter attention à la situation et s'en inquiéter.
    Je vous remercie.
    Madame Fung, voudriez-vous intervenir?
    Je pense d'abord qu'un risque imminent plane sur quelques groupes de personnes en raison de cette nouvelle loi. Il s'agit d'expatriés qui vivent et travaillent à Hong Kong, y compris 300 000 Canadiens. Le Canada a donc la responsabilité de condamner cette nouvelle loi sur la sécurité nationale, tout en collaborant avec ses alliés pour trouver un moyen d'y mettre fin.
    En outre, d'autres citoyens étrangers pourraient être arrêtés de manière arbitraire s'ils passent par Hong Kong. Je pense que la loi s'applique vraiment à tout le monde, où que ce soit sur la planète, y compris aux membres du Comité spécial qui pourraient avoir tenu des propos critiques à l'endroit du gouvernement de Pékin ou de Hong Kong.
    Ce genre de crainte est vraiment oppressante. Nombreux sont ceux qui ont déjà commencé à être touchés et à s'autocensurer. Un grand nombre de journalistes étrangers en poste à Hong Kong ont déjà commencé à s'autocensurer et à déménager leurs bureaux à Taïwan ou dans d'autres pays voisins. C'est fort malheureux.

  (1145)  

     Je vous remercie.
    À la lumière de tout cela, dans quelle mesure considérez-vous qu'il soit risqué pour des étrangers de réclamer une liberté et une démocratie accrues à Hong Kong afin de visiter Hong Kong, la République populaire de Chine ou d'autres pays entretenant des relations étroites avec la Chine?
    Qui voudrait répondre à cette question?
    J'y répondrai.
    En fait, de nombreux journalistes attendent le renouvellement de leur visa à Hong Kong. Le New York Times a réaffecté certains de ses journalistes de Hong Kong à la Corée du Sud. Vous pouvez donc constater qu'une menace plane sur les journalistes à Hong Kong.
    En ce qui concerne Hong Kong Watch, son président s'est vu interdit d'entrée à Hong Kong. Il a reçu des menaces, et des lettres ont été envoyées à ses voisins, à lui et à sa mère.
    Qui plus est, la semaine dernière, Ray Wong, un activiste recherché, a visité Londres et a rencontré Simon Cheng, qui a obtenu l'asile au Royaume-Uni. Ils ont été suivis par un homme qui semblait être un citoyen chinois. Hier seulement, Simon Cheng a reçu des courriels et des appels de C.Y. Leung l'avertissant de faire attention à lui, précisant qu'on lui mettrait le grappin dessus et le ramènerait à Hong Kong. Voilà la menace qui plane sur les gens à l'extérieur de Hong Kong.
    Je vous remercie.
    Comment la population de Hong Kong a-t-elle réagi à la loi sur la sécurité nationale? A-t-on sondé son opinion? Je sais que cela doit être très difficile. Comment les habitants de Hong Kong expriment-ils leur opposition à la loi, le cas échéant? Je suis certaine qu'ils doivent être très inquiets.
    De fait, Citizens' Press Conference a mené un sondage auprès de 370 000 répondants, dont 98 % n'appuient pas la loi sur la sécurité nationale. Nous avons constaté que la vaste majorité des gens jugent qu'elle sonne le glas de la constitution et des droits fondamentaux des citoyens de Hong Kong.
    Je vous remercie.
    Je vous remercie beaucoup, madame Zann.

[Français]

    Monsieur Bergeron, vous avez la parole pour six minutes.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Je tiens à remercier sincèrement tous les témoins qui participent à cette rencontre aujourd'hui et qui ont le courage de comparaître à ces audiences du Comité spécial sur les relations sino-canadiennes.
    Nous ne sommes pas sans savoir que cette comparution peut avoir des incidences sur leur vie et leur sécurité. Nous leur sommes extrêmement reconnaissants d'avoir accepté de contribuer aux travaux de ce comité. Je les en remercie encore une fois.
    La plupart des intervenants ont soulevé la possibilité que le Canada accueille davantage de ressortissants hongkongais. Ma question est fort simple. Comment cette proposition peut-elle avoir une incidence concrète, étant donné que les autorités politiques de Hong Kong et de la République populaire de Chine risquent fort d'empêcher tous les départs d'opposants du territoire hongkongais? Nous savons pertinemment qu'on risque d'empêcher les opposants de sortir de Hong Kong pour venir au Canada.
    Monsieur Bergeron, voulez-vous préciser à qui s'adresse votre question?

  (1150)  

    Elle s'adresse à quiconque voudra y répondre, mais je pourrais la poser en premier lieu à Mme Fung.

[Traduction]

     Il y a quelques semaines, le porte-parole du ministère des Affaires étrangères a fait savoir que le gouvernement pourrait empêcher les habitants de Hong Kong de quitter Hong Kong.
    En outre, de nombreux activistes bien connus, comme M. Martin Lee, qui est considéré comme le père de la démocratie à Hong Kong, et même Jimmy Lai, ainsi que Joshua Wong et d'autres personnalités, ont vu leur passeport confisqué par la police de Hong Kong. Il leur est impossible de quitter Hong Kong à moins que des alliés partageant leurs idéaux ne creusent un tunnel spécial jusqu'à Hong Kong pour leur permettre de partir, comme ce fut le cas tout de suite après le massacre de la place Tiananmen en 1989.
    Quand de nombreux activistes sociaux du continent chinois sont arrivés à Hong Kong, c'est grâce à la collaboration de diverses ambassades à Hong Kong qu'ils ont pu quitter Hong Kong. Je pense que c'est une voie que le Canada peut envisager d'emprunter. La collaboration avec d'autres alliés à Hong Kong est d'une importance cruciale.
    Il est aussi possible, selon moi, d'offrir le programme de refuge sécuritaire aux activistes avant que leur passeport ne soit confisqué pour qu'ils puissent quitter Hong Kong le plus rapidement possible. Ils peuvent rester ici s'ils le souhaitent — à titre temporaire, du moins — ou même demander la résidence permanente.
    Monsieur Wong, je vois que vous levez la main.
    Je vous remercie.
    Je voudrais simplement ajouter quelque chose à ce que Mme Fung vient de dire. Elle a déjà traité de la situation des activistes bien connus. Je peux toutefois aussi expliquer brièvement comment le gouvernement de Hong Kong peut pratiquement empêcher quelqu'un de quitter Hong Kong.
    Pour confisquer un passeport à Hong Kong, il y a normalement ou plus couramment deux conditions, la première étant une condition de remise en liberté quand quelqu'un a été arrêté. La deuxième est la suivante: quand une personne fait l'objet d'une enquête en vertu de la nouvelle loi sur la sécurité nationale, cette dernière autorise la police à confisquer son passeport.
    Par ailleurs, je voudrais attirer l'attention du Comité sur les nombreux activistes peu connus dont le passeport n'a peut-être pas encore été confisqué, mais qui n'ont pas les moyens financiers ou matériels de quitter Hong Kong ou de se réinstaller au Canada. En modifiant notre programme existant afin de réduire l'exigence relative au temps et d'autres obstacles, nous pouvons leur permettre de quitter rapidement Hong Kong et, avec le temps, de se réinstaller au Canada.

[Français]

    Monsieur le président, je crois que Mme Wong souhaitait aussi intervenir.

[Traduction]

    Madame Wong, vous avez la parole.
    Je vous remercie.
    Ce ne sont pas que des moyens de trouver refuge ailleurs qui sont recommandés ici, car outre les solutions de refuge, il existe encore les voies d'immigration, les possibilités d'éducation et les offres d'emplois qui permettent aux étrangers d'entrer au Canada. Je pense qu'il est urgent d'examiner toutes les options qui s'offrent aux Hongkongais afin de déceler et d'éliminer les obstacles de façon générale. Nous n'avons pas nécessairement à élaborer une nouvelle stratégie; il nous suffit d'examiner ce qui existe actuellement afin de voir comment nous pouvons utiliser ce système le plus efficacement possible.
    Pour ajouter aux propos de M. Wong, je pense que la plupart des citoyens lambda ne se font pas confisquer leur passeport. Ils ont encore une liberté de mouvement limitée pour le moment, mais le temps presse et je pense que n'importe quelle action sera préférable à l'inaction.

[Français]

    Je vous remercie beaucoup, madame Fung et monsieur Bergeron.

[Traduction]

    Nous accorderons maintenant la parole à M. Harris pour six minutes.
     Je vous remercie beaucoup, monsieur le président. Je remercie également les témoins de comparaître aujourd'hui.
    Il s'agit d'un acte de courage, particulièrement pour M. Wong, qui nous décrit fort éloquemment les conséquences et sa propre situation à Hong Kong. Je vous remercie de nous avoir expliqué ce qu'il en est. Madame Fung, je vous remercie également de nous faire savoir et, par notre entremise, d'informer tous les Canadiens que nous sommes nous-mêmes touchés par cette loi, au moyen de laquelle le régime cherche à atteindre tout citoyen canadien ou étranger qui parle de manière qu'il juge contraire à cette loi nationale. Voilà qui met en lumière l'importance du problème.
     Quand l'entente a été mise en place en 1997, le Canada et d'autres pays ont promis de faire de leur mieux pour favoriser le maintien de la primauté du droit et l'autonomie des institutions à Hong Kong. C'était il y a plus de 20 ans. Madame Fung, savez-vous si des travaux sérieux ont été entrepris à cette fin au cours des 20 dernières années ou si nous sommes aujourd'hui confrontés à une question que nous avons négligée pendant 20 ans?

  (1155)  

    Au cours des 20 dernières années, j'ai constaté que le gouvernement du Canada a déployé bien peu d'efforts pour appuyer le concept de « un pays, deux systèmes » et les valeurs fondamentales, comme la primauté du droit, les libertés, les droits de la personne et même la démocratie promise aux habitants de Hong Kong. Le gouvernement chinois n'a cessé de rompre ses promesses. Par exemple, les élections avec suffrage universel ont toujours été reportées, et la situation est maintenant sans espoir, car même la réunion du conseil législatif qui devait se tenir cet automne a été repoussée d'un an.
    C'est vraiment honteux, car l'absence de réaction et de responsabilité exemplaire visant à obliger la Chine à rendre des comptes quant aux promesses qu'elle a faites dans son traité international a mené à la situation qui règne actuellement à Hong Kong. Je suis convaincue que la situation ne se limitera pas à Hong Kong, car si la Chine peut rompre ses promesses à l'égard de Hong Kong, elle peut le faire pour tout autre pays, y compris le Canada.
    Je pense qu'il est temps que le monde change de stratégie à l'égard de la Chine. Nous devrions tous travailler de concert, particulièrement au sein du Groupe des cinq, afin d'élaborer une politique plus musclée à l'égard de la Chine et de la tenir responsable de tout comportement non fondé sur des règles et non conforme aux règles et aux normes internationales.
    Je vous remercie beaucoup. Je suis on ne peut plus d'accord avec vous, et je conviens aussi entièrement qu'il y a un réel sentiment d'urgence. Vous avez notamment parlé des mesures que le Canada devrait tenter de prendre très rapidement afin d'offrir un refuge sécuritaire. Je pense aussi que nous devons agir rapidement afin de contrer l'ingérence étrangère dont vous et Cherie Wong avez traité.
    Est-ce que l'un d'entre vous sait si la force de la police nationale, la GRC ou le Service canadien du renseignement de sécurité ont pris des contre-mesures ou des mesures de riposte coordonnées pour contrer ce genre d'ingérence, apparemment répandue, en sol canadien? Savez-vous s'il se fait quelque chose à cet égard ou s'agit-il d'une question que nous devrions examiner de plus près?
    Je pense qu'il faut examiner la question de plus près. Comme vous l'avez souligné, la GRC et le Service canadien du renseignement de sécurité sont des organismes censés exister pour nous protéger contre ces menaces et cette ingérence, mais je ne pense pas qu'ils disposent de tous les outils nécessaires et qu'ils comprennent bien la manière dont le Parti communiste chinois fonctionne. Ce dernier n'échange pas nécessairement un chèque contre un service; sa méthode est plus pernicieuse et raffinée.
     Comme de nombreux témoins l'ont fait remarquer, nous devons changer d'attitude à l'égard de la Chine, particulièrement en ce qui concerne la manière dont elle s'ingère dans les affaires du Canada. Le problème est certainement plus complexe et touche plusieurs secteurs. Ce n'est pas qu'une affaire de menaces physiques; la campagne d'information s'infiltre également dans les médias, le milieu universitaire et les médias sociaux. La Chine emploie des techniques très ingénieuses, et je ne suis pas certaine que le Canada soit prêt à lutter contre une ingérence aussi raffinée.

  (1200)  

    Vous avez nommé trois universités: l'Université McGill, l'Université de Toronto et l'Université de Waterloo, il me semble.
    En effet.
    Pourquoi avez-vous nommé ces établissements en particulier? Quels efforts notre gouvernement devrait-il déployer pour résoudre ces problèmes?
    Répondez brièvement, je vous prie. Nous disposons de 15 secondes.
    La collaboration entre l'Armée populaire de libération et les universités a fait l'objet d'un rapport très détaillé. Si j'ai nommé ces trois établissements en particulier, c'est parce qu'ils figurent parmi les 10 universités qui réalisent le plus de projets en collaboration avec l'Armée populaire de libération.
    Je suis désolée, mais je n'ai plus de temps.
    Je suis moi aussi désolé, mais c'est ainsi que les règles du Comité fonctionnent.
    Monsieur Harris, je vous remercie beaucoup. Votre temps est écoulé.
    Nous entamerons maintenant le deuxième tour de questions, avec des interventions de cinq minutes chacun. Nous commencerons avec M. Chiu.
    Bienvenue parmi nous.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Je remercie les témoins de comparaître devant le Comité et de nous expliquer comment la situation à Hong Kong est pertinente pour le Canada.
    Permettez-moi de me faire brièvement l'avocat du diable, car dans la communauté, la Chine affirme, par la bouche de ses porte-parole, que ce qui se passe à Hong Kong est une question purement nationale et ne concerne en rien le Canada, ajoutant que votre comité est un comité spécial sur les relations sino-canadiennes et non sur les relations canado-hongkongaises.
    Je vous demande donc, à titre d'avocat du diable, si vous pouvez me dire pourquoi les relations Canada-Hong Kong jouent un rôle crucial dans les relations sino-canadiennes. En quoi la situation à Hong Kong est-elle pertinente et pourquoi les Canadiens devraient-ils s'en soucier?
    J'aimerais entendre les témoins se trouvant au Canada, l'Alliance Canada Hong Kong, puis Canada-Hong Kong Link, s'il vous plaît.
    Vous avez la parole, madame Wong.
    Je suis désolé, monsieur le président.
    C'est correct, merci. Je pense que l'écran de Mme Wong est momentanément figé. Devrions-nous passer à M. Wong, monsieur Chiu? Cela vous convient-il?
    M. Kenny Chiu: Oui.
    Le président: Vous avez la parole, monsieur Wong.
    Je répondrai peut-être brièvement aux questions de M. Chiu, puis je laisserai ma collègue, Mme Wong, fournir plus de détails.
    Je pense que le Comité devrait porter attention au fait que 300 000 Canadiens vivent, résident et travaillent actuellement à Hong Kong, assurant ainsi un lien très substantiel entre le Canada et Hong Kong. À cela s'ajoute un autre lien important que la plupart des Canadiens négligent, selon moi: il s'agit d'un lien historique, car les Canadiens ont aidé Hong Kong pendant la Seconde Guerre mondiale en défendant son territoire, et les Hongkongais les en remercient chaque année.
    Je pense que je voudrais attirer l'attention du Comité sur ces deux liens, et je demanderai à ma collègue, Mme Wong, de vous en dire plus à ce sujet.
    Absolument, on posera des questions sur les raisons pour lesquelles il y a un lien entre Hong Kong et le Canada, et je crois que, en ce qui nous concerne, ce sont nos valeurs fondamentales. Quand nous parlons de la Chine, nous ne pouvons pas ignorer Hong Kong, et il n'y a pas que Hong Kong; il y a aussi la Mongolie. Il y a aussi le Tibet. Il y a aussi le Turkestan oriental et les atrocités commises sur le plan des droits de la personne. Il y a une crise en ce moment dans ces territoires. Chacun est un peu différent des autres, mais le lien entre eux, c'est que le Parti communiste chinois orchestre la crise humanitaire. Le Comité se penche sur la façon dont le Canada doit poursuivre ses relations avec la Chine, et je crois que les droits de la personne figurent en tête de nos priorités.
    Deuxièmement, il y a le commerce qui nous préoccupe dans une grande mesure, quand il est question de la Chine. Il est important de garder à l'esprit que nous sommes complices quand nous exportons des technologies à double usage qui sont utilisées pour violer les droits de la personne. Nous achetons les produits de l'esclavage des Ouïgours qui sont dans les camps et qui sont prisonniers.
    Dans le cadre de son étude sur les relations plus générales entre la Chine et Hong Kong et le Canada, il faut donc que le Comité tienne compte du manque total de respect manifesté par la Chine concernant la loi et le maintien de l'ordre à l'échelle internationale. La Déclaration commune sino-britannique est un traité international que les Chinois ont balayé du revers de la main, et ce, non seulement en 2019, mais également en 2003 et en 2014.

  (1205)  

    Merci.
    Nous vous écoutons, madame Fung.
    Je crois que Hong Kong importe vraiment pour tous les Canadiens, et ce, pour diverses raisons.
    La première est que Hong Kong est la plus grande ville canadienne à l'extérieur du Canada: 300 000 Canadiens y vivent. En comptant les personnes qui sont retournées à Hong Kong sans revendiquer le statut de non-résident, le nombre total dépasse les 500 000, si je me fie à la conversation que j'ai eue avec le représentant du consulat canadien à Hong Kong.
    Deuxièmement, les gens de Hong Kong et les Canadiens ont les mêmes valeurs. Les gens de Hong Kong luttent pour préserver la primauté du droit, la liberté, les droits de la personne et la démocratie — toutes des valeurs précieuses aux Canadiens ainsi qu'aux villages planétaires. Par conséquent, les gens de Hong Kong sont en fait à l'avant-garde de la lutte contre le régime autoritaire chinois qui constitue une grave menace à la démocratie mondiale, et donc…
    Je vous remercie, madame Fung. Je suis désolé de vous interrompre. Merci beaucoup, monsieur Chiu.
    Monsieur Oliphant, vous disposez de cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci à tous nos témoins de leur présence aujourd'hui. Je suis ravi de vous revoir, madame Wong et monsieur Wong, et je suis ravi de faire votre connaissance, mesdames Fung et Calverley.
    J'ai deux questions fondamentales à poser.
    Rien de ce que vous avez dit aujourd'hui n'est nouveau pour moi. Je suis de près cet enjeu depuis mon voyage à Hong Kong, il y a plus d'un an, alors qu'on discutait de la question de l'extradition. J'ai visité le LegCo et j'en ai entendu parler. J'ai également rencontré divers militants. Quand la Loi sur la sécurité nationale a été adoptée, je n'ai pas été complètement surpris. Ce qui m'a surpris, c'est la rapidité avec laquelle cela s'est fait.
    J'aimerais que chacun de vous me dise pour commencer ce qui, d'après vous, a changé concernant la compréhension que la Chine a de Hong Kong et le resserrement… Cela a commencé avant les changements touchant l'extradition. La progression a été rapide, puis, avec les manifestations, nous avons eu la Loi sur la sécurité nationale.
    Qu'est-ce qui s'est produit en Chine pour qu'un horizon de 50 ans se réduise au point de diminuer Hong Kong et d'en faire ce que nous connaissons aujourd'hui? J'aimerais que vous m'aidiez à comprendre cela.
    Nous pourrions peut-être commencer par Mme Wong, puis entendre Mme Fung, M. Wong et Mme Calverley.
    Merci. Je crois qu'il est important de comprendre que la détérioration du principe « un pays, deux systèmes » de Hong Kong a commencé quand Hong Kong a été cédée à la Chine. Ce n'était rien de nouveau, mais cela se faisait lentement. Au fil du temps — en 2014 —, nous avons vu la répression violente de la révolution et le rétrécissement des libertés politiques. Depuis 2014, cela s'est accéléré.
    En 2019, quand le mouvement contre l'extradition s'est formé, je crois que le gouvernement — le gouvernement central et le gouvernement de Hong Kong — s'est rendu compte que les gens de Hong Kong étaient résolus à maintenir la démocratie à Hong Kong. C'est une idée très dangereuse, car Hong Kong a été, pendant de nombreuses années, la fenêtre sur la Chine. Le mouvement démocratique populaire massif constitue une menace au régime du Parti communiste chinois dans son ensemble, ce qui fait que la répression violente et rapide du mouvement à Hong Kong n'avait rien d'étonnant; elle était en fait attendue. C'est ainsi que le parti peut exercer son contrôle.
    L'extradition est maintenant inscrite dans la nouvelle Loi sur la sécurité nationale. Donc, le traité d'extradition a été aboli au début du mouvement, mais la situation a maintenant basculé et nous allons extrader les gens. Il y a aussi…
    Merci. Je vais poursuivre…
    Désolée. Il y a aussi le fait qu'en matière d'affaires mondiales…

  (1210)  

    … parce que je veux que tout le monde puisse répondre. Je n'ai que cinq minutes.
    Si les autres peuvent commenter brièvement, j'aurais une deuxième question à poser.
    Oui, d'accord.
    D'après moi, bien des gens comprennent mal la situation en Chine. J'ai travaillé en Chine pendant cinq ans, de 1984 à 1989, à gérer la Banque mondiale et des projets de prêts de faveur européens. Quand on comprend vraiment bien les Chinois, on constate qu'ils font face à d'importants risques, par exemple la chute du PIB et les troubles dans diverses régions de la Chine.
    Depuis quelques années, le courageux mouvement de résistance à Hong Kong constitue une menace à la durabilité et à la stabilité du régime communiste. Ils ne veulent pas que le mouvement de résistance se répercute dans le reste de la Chine, ce qui fait que…
    Merci. Est-ce que quelqu'un d'autre aurait des commentaires?
    Est-ce que je peux répondre?
    Oui.
    C'est, pour la Chine, un plan d'ensemble visant à intégrer Hong Kong dans la grande région de la baie.
    Vous avez peut-être entendu parler du capital rouge. De nombreuses entreprises et sociétés de financement relèvent maintenant des capitaux chinois. La Chine est fortement tributaire de Hong Kong, et c'est la raison pour laquelle Hong Kong est importante. Plus de 73 % des PAPE qui recueillent de l'argent, en particulier aux États-Unis, ont besoin de Hong Kong. Je crois que le Parti communiste estime pouvoir exercer un contrôle complet sur Hong Kong et s'en servir comme centre financier de la Chine pour recueillir des fonds. Cependant, ils oublient que la Hong Kong Policy Act doit maintenant…
    Je vous remercie.
    J'aimerais poser mes autres questions.
    Je suis désolé, monsieur Oliphant, mais je crains que votre temps soit écoulé.
    D'accord.
    C'est maintenant au tour de Mme Alleslev, qui dispose de cinq minutes.
    Nous avons aujourd'hui une conversation très importante.
    Je tiens à remercier tous les témoins du courage dont ils font preuve en venant nous aider à comprendre que ce n'est pas un problème qui touche uniquement Hong Kong et la Chine, mais que c'est aussi un enjeu de souveraineté canadienne et de sécurité, et que le temps est un luxe que nous ne pouvons pas nous permettre. Nous devons intervenir de toute urgence, si je comprends bien ce que vous dîtes.
    Nous avons besoin de précisions pour être en mesure de présenter des recommandations au gouvernement. Mme Fung et Mme Wong ont toutes les deux souligné l'importance suprême d'avoir des dispositions législatives qui nous permettent de lutter contre les influences étrangères, non seulement en ce qui concerne les diplomates, par exemple, mais aussi les universitaires, les journalistes, etc.
    Madame Wong, pourriez-vous nous donner plus d'information sur les grandes universités que vous avez mentionnées — McGill, Waterloo et l'Université de Toronto — et sur leurs relations avec l'armée populaire de libération, et nous dire pourquoi c'est important? Madame Fung, quelles dispositions législatives permettraient de protéger la souveraineté et la sécurité du Canada, ainsi que les citoyens chinois au Canada et les droits de la personne et la démocratie à l'échelle du monde?
    L'armée populaire de libération a entrepris, il y a de nombreuses années, d'envoyer des universitaires chinois dans diverses universités pour qu'ils y fassent des études. Les ententes de recherche comportent systématiquement des dispositions prévoyant l'exportation des résultats vers la Chine. Je vais faire des recommandations stratégiques précises.
    Je crois que le Canada doit se doter d'un processus de demande de subventions plus strict. Il faut un examen servant à déterminer si les subventions et les projets se traduisent par l'exportation de la propriété intellectuelle vers l'étranger — pas seulement vers la Chine, mais vers d'autres pays également. Il nous faut aussi une politique fédérale cohérente qui examine la façon dont la technologie à double usage sert à des fins commerciales et la façon dont elle est utilisée à l'étranger.
    L'une des choses les plus urgentes que nous pourrions faire serait d'affiner et de mettre à jour la Liste des marchandises d'exportation contrôlée d'Affaires mondiales. Les technologies à double usage sont inscrites sur cette liste, mais ce n'est pas assez complet. Les technologies évoluent très rapidement, au XXIe siècle, et…

  (1215)  

    Merci beaucoup.
    Je ne veux pas manquer de temps. Je vais donc demander à Mme Fung de prendre la parole.
    Merci beaucoup.
    Les Canadiens en général, y compris notre gouvernement, sont un exemple du manque de compréhension et de connaissances quant au fonctionnement du « pouvoir de manipulation » de la Chine. La Chine s'est infiltrée, et elle manipule et contrôle dans une terrible mesure l'orientation de tous nos instituts de recherche ainsi que de nos projets de recherche universitaire.
    J'ai été témoin de dons anonymes à diverses universités visant à contrôler l'orientation de la recherche pour le développement. Très souvent, une fois que le produit intellectuel a été conçu, il est habituellement expédié hors du Canada sans un contrôle suffisant…
    Parfait…
    … et la technologie fondamentale du programme de surveillance en Chine provient en fait d'universités canadiennes…
    Merci.
    Vous aimeriez nous en dire beaucoup plus, et je vous prie par conséquent de nous transmettre un document fournissant des précisions supplémentaires, car c'est un aspect très important dont nous ne sommes collectivement pas au courant. Cela aiderait vraiment le Comité à faire ses recommandations.
    En fait, je vous suggérerais de tenir d'autres audiences…
    Je crois que notre équipe a déjà envoyé un mémoire…
    D'accord.
    Merci beaucoup, madame Fung, et merci à vous, madame Alleslev.
    La parole est maintenant à M. Fragiskatos, qui dispose de cinq minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    J'ai une question au sujet des enjeux que M. Wong a soulevés.
    Monsieur Wong, merci beaucoup de parler au nom des jeunes.
    Ma question porte sur les médias sociaux. Les médias sociaux créent un espace pour le militantisme démocratique — et il n'est pas question que de Hong Kong, même si nous nous concentrons sur Hong Kong. Dans quelle mesure est-il juste de dire que la Loi sur la sécurité nationale compromet les possibilités que les militants ont, en particulier les jeunes militants, de s'attaquer aux enjeux relatifs à la démocratie?
    Comme le Comité le savait peut-être déjà, Telegram — une application de messagerie instantanée — est l'un des principaux modes de communication des jeunes de Hong Kong en particulier. Il y a quelques mois, les forces policières ont confisqué quelques canaux sur Telegram. Je dirais que même sans la Loi sur la sécurité nationale, les médias sociaux ne constituent pas un lieu sûr pour les jeunes protestataires de Hong Kong. S'il est une chose dont nous devrions nous préoccuper, c'est la façon dont le pouvoir abusif qui est prévu par la Loi sur la sécurité nationale a peut-être compromis encore plus ce type de communications à Hong Kong ainsi qu'à l'extérieur de Hong Kong.
    Je vous remercie beaucoup.
    On pourrait en dire et en faire beaucoup plus. Je suis content, cependant, que le gouvernement canadien ait adopté des positions fermes et pris des mesures, dont la suspension du traité d'extradition avec Hong Kong, par exemple, ou l'interruption de l'exportation de produits névralgiques. Il s'agit de mesures concrètes que le gouvernement du Canada a prises. Cependant, comme je l'ai dit, nous pouvons toujours envisager d'autres mesures, et les audiences actuelles sont importantes en ce qu'elles donnent aux militants et à d'autres personnes l'occasion de nous faire part de leurs points de vue et de leurs idées sur des pistes de solutions possibles.
    Pour le temps qu'il me reste, je vais poser une dernière question qui est ouverte à tous nos témoins. C'est une question générale.
    Nous voyons depuis quelque temps des rapports sur les violations des droits de la personne qui ont été commises contre la minorité ouïgoure. Dans quelle mesure les militants qui se concentrent sur Hong Kong, ici au Canada, et les gens de Hong Kong craignent-ils que ce qui transpire de l'État chinois et de la minorité ouïgoure puisse se répercuter d'une façon ou d'une autre à Hong Kong, l'objectif étant de réprimer encore plus la démocratie sur le territoire?

  (1220)  

    Je vois que Mme Fong aimerait répondre à la question.
    Nous vous écoutons. Veuillez activer votre micro.
    Je suis désolé. Je voulais dire Mme Wong. Pardonnez-moi. Elle avait manifesté son désir de parler précédemment.
    Madame Wong, je suis désolé.
    Je vous remercie de cette question.
    Je crois que tous les Hongkongais pensent [Difficultés techniques] le Turkestan oriental. Si nous en entendons encore plus parler, c'est la preuve que Hong Kong adopte tranquillement les mêmes politiques qui ont été utilisées au Turkestan oriental — aussi appelé Xinjiang — et au Tibet, qu'il s'agisse du prélèvement d'échantillons d'ADN des personnes arrêtées ou de l'État de surveillance. Comme vous l'avez mentionné, les médias sociaux ne sont plus un lieu sûr parce qu'ils sont surveillés, et de nombreuses personnes ont été arrêtées à cause du contenu qu'elles avaient sur les médias sociaux.
    Nous voyons le même type de répression, et l'arrestation de Jimmy Lai et de dirigeants des médias est également un indice de la façon dont se fait la transformation de Hong Kong. C'est très présent à l'esprit des Hongkongais depuis des mois et des mois.
    Madame Fung, vous avez 35 secondes.
    Vous êtes satisfait de cette réponse, monsieur Fragiskatos?
    Tout à fait, monsieur le président. C'est excellent.
    Nous avons un très célèbre dicton: « Aujourd'hui, le Turkestan oriental; demain, Hong Kong ». Malheureusement, nous devons le modifier et dire: « Aujourd'hui, le Turkestan oriental; et aujourd'hui également, Hong Kong ».
    Au cours de la dernière année, nous avons vu Hong Kong se transformer en État policier, avec des caméras de surveillance partout sur les grandes artères. En même temps, la police de Hong Kong utilise une force excessive pour sévir contre la société civile. Il y a des arrestations massives, et beaucoup de personnes sont arrêtées, mais il y a aussi beaucoup de disparitions, et on cherche à…
    Merci, madame Fung.
    Je suis désolé, mais nous avons dépassé le temps accordé à M. Fragiskatos. J'ai horreur d'interrompre les gens, mais le Comité s'est fixé des règles sur le temps qui est accordé à chaque député.

[Français]

    Monsieur Bergeron, vous avez la parole pour deux minutes et demie.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    J'aimerais poursuivre sur le sujet que j'ai abordé il y a quelques instants. À l'instar de M. Chiu, je me ferai l'avocat du diable. Cette fois, je vais adresser ma question à Mme Calverley, compte tenu du fait qu'elle n'a pas eu l'occasion de répondre à ma première question.
    Je pense qu'il y a une volonté, dans la communauté internationale, d'accueillir le plus grand nombre possible d'activistes hongkongais afin qu'ils échappent à la répression. Si l'on se place du point de vue des Hongkongais, peut-on dire que le départ massif d'un grand nombre d'activistes va affaiblir le mouvement prodémocratie sur le territoire de Hong Kong?

[Traduction]

    Non, parce que nous sommes en étroite communication avec de nombreux militants, et parce que de nombreux protestataires ont en fait décidé de rester malgré les offres, par exemple le transport aérien offert par d'autres gouvernements.
    Bien entendu, de nombreux protestataires voudraient chercher refuge ailleurs, et je pense que les gouvernements étrangers doivent se préparer. Par exemple, le Royaume-Uni a déjà offert aux ressortissants britanniques à l'étranger de venir au Royaume-Uni. Environ 3,9 millions de personnes sont admissibles, mais la majorité des jeunes ne sont pas des ressortissants britanniques à l'étranger. C'est la raison pour laquelle nous espérons que le Canada pourra s'occuper des jeunes qui n'ont pas le privilège d'aller au Royaume-Uni.
    La situation est très urgente, et je crois que le Canada doit immédiatement adopter une politique afin d'aider les personnes qui veulent s'échapper.

[Français]

    Je crois que M. Wong aimerait ajouter des commentaires, monsieur le président.

  (1225)  

[Traduction]

    Je vous remercie de cette question. J'aimerais ajouter quelque chose.
    Premièrement, en tant qu'ancien jeune leader et étudiant militant, je peux vous dire que les nombreux protestataires à Hong Kong sont d'âges et de sexes divers, et qu'ils proviennent de toutes les couches de la société. Je crois que si le Canada en est capable, nous devrions aider les jeunes, bien sûr, mais nous ne devrions pas nous concentrer uniquement sur les jeunes, parce que les nombreux protestataires qui aiment Hong Kong sont de tous les âges, ainsi que de sexes et d'origines ethniques variés.
    Merci, monsieur Wong.

[Français]

    Je vous remercie beaucoup, monsieur Bergeron.

[Traduction]

    C'est maintenant au tour de M. Harris, qui dispose de deux minutes et demie.
    Merci, monsieur le président.
    J'ai également des questions pour Mme Calverley.
    Premièrement, avec la Chine, l'Angleterre est le seul pays signataire du traité de rétrocession de 1997. Quel est le droit particulier qui permet au Royaume-Uni d'appliquer ce traité et que le Canada ou d'autres pays n'ont pas, et pourquoi le Royaume-Unis ne joue-t-il pas un rôle plus important dans ce dossier? Je sais qu'il y a les passeports britanniques à l'étranger, dont les circonstances sont spéciales.
    Ma deuxième question est liée aux autres nations. Je sais que 27 pays se sont associés à une déclaration commune au Conseil des droits de l'homme des Nations unies. Votre organisme, Hong Kong Watch, a-t-il des organisations dans bon nombre de ces autres pays également, ou êtes-vous plutôt concentrés sur le Royaume-Uni et, dans le cas actuel, sur le Canada?
    Nous sommes un organisme international et nous intervenons donc aux États-Unis, au Canada, dans l'Union européenne et, bien sûr, au Royaume-Uni. Nous sommes le secrétariat du groupe parlementaire multipartite européen.
    J'aimerais répondre à votre question au sujet des Nations unies. En fait, notre collègue qui va témoigner jeudi vous en dira davantage au sujet des Nations unies. Nous avons initié cela avec Lord Chris Patten, notre parrain. Nous espérons vraiment qu'il y aura un envoyé spécial ou un rapporteur des Nations unies à Hong Kong pour suivre la situation. Je crois que c'est très important. Il faut que le Canada et de nombreux autres pays aux vues similaires unissent leurs forces pour que cela se produise, afin que…
    Pouvez-vous répondre à ma question sur le rôle du Royaume-Uni en tant que seul signataire de ce traité? Est-ce qu'il a des droits particuliers que le Canada n'a pas, pour sa mise en application, et est-ce qu'il est prêt à se prévaloir de ces droits?
    Je crois que la Déclaration commune sino-britannique ne prévoit aucun recours. C'est donc de cela qu'il est question quand ils parlent d'une violation de la déclaration commune. En ce moment, la solution est d'offrir aux ressortissants britanniques à l'étranger la possibilité de déménager au Royaume-Uni. Nous parlons d'environ 2,9 millions de Hongkongais qui seront admissibles. Je crois que le Royaume-Uni va également adopter des sanctions. C'est ce que le Royaume-Uni va faire.
    Merci beaucoup, monsieur Harris.
    C'est tout pour notre premier groupe de témoins d'aujourd'hui. Je tiens à réitérer ce qui a été dit précédemment. Je crois que tous mes collègues ont remercié tous les témoins et exprimé l'admiration que votre comparution leur inspire. Nous vous savons gré d'avoir comparu devant nous aujourd'hui.
    Nous allons maintenant nous arrêter cinq minutes pour nous préparer à notre prochain groupe de témoins. Merci encore.

  (1225)  


  (1235)  

    Nous reprenons.
    Bienvenue. J'aimerais faire quelques observations pour nos nouveaux témoins.
    Avant de parler, veuillez attendre que je vous nomme. Quand vous êtes prêt à parler, activez votre microphone en cliquant sur l'icône. Cela étant dit, pendant la période des questions et réponses, vous constaterez que le député qui pose une question va indiquer à qui sa question s'adresse. Vous pouvez alors répondre sans attendre que je vous nomme, jusqu'à ce que nous arrivions au bout du temps qui est accordé au député en question.
    Je vous rappelle que tous les commentaires doivent être adressés au président. L'interprétation, pour cette vidéoconférence, va fonctionner dans une très grande mesure de la même façon que pour une réunion ordinaire du Comité. Au bas de l'écran, vous pouvez choisir le parquet en anglais ou en français. Quand vous parlez, si vous avez l'intention de passer d'une langue à l'autre, vous allez aussi devoir changer de canal d'interprétation pour que le canal corresponde à la langue que vous choisissez. Songez à faire une courte pause avant de passer à l'autre langue. Quand vous ne parlez pas, veuillez désactiver votre micro. Nous vous encourageons fortement à utiliser un casque d'écoute.
    C'est maintenant avec plaisir que je souhaite la bienvenue à notre deuxième groupe de témoins. D'Amnistie internationale Canada, nous accueillons Alex Neve, secrétaire général; de National Endowment for Democracy, nous accueillons Akram Keram, agent de programme pour la Chine; et de Human Rights Watch, nous accueillons Sophie Richardson, directrice Chine.
    Chaque témoin aura un maximum de 10 minutes pour prononcer une déclaration liminaire, après quoi nous aurons les questions des membres du Comité. Nous aurons, je l'espère, au moins deux tours.
    Monsieur Neve, nous allons commencer par vous. Vous disposez de 10 minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    C'est pour moi un réel plaisir de témoigner devant le Comité spécial cet après-midi, ou ce matin pour ceux d'entre vous qui se trouvent dans l'Ouest, et de me joindre à mes deux formidables collègues.
    Il y a manifestement eu de nombreux chapitres troublants sur le parcours qui a mené les Hongkongais à la réalité terrifiante qui est la leur aujourd'hui, soit la détérioration rapide de la situation déjà critique des droits de la personne, laquelle requiert une action internationale ferme et concertée. Il y a eu la révolution des parapluies, qui remonte à six ans, puis le soulèvement courageux en réponse à la réforme des lois d'extradition l'année dernière, et maintenant en réponse à la Loi sur la sécurité nationale, qu'Amnistie internationale a décrite dans les termes suivants:
... c'est à ce jour l'attaque la plus stupéfiante, menaçante et insensible menée par Pékin… la pire menace pour les droits humains de l'histoire récente de la ville… L'objectif des autorités chinoises est de gouverner Hong Kong par la peur.
    Naturellement, il ne s'agit pas de prédictions abstraites, compte tenu du bilan franchement atroce que la Chine traîne depuis fort longtemps en matière de droits de la personne. Le dossier de la Chine à ce chapitre est sous le feu des projecteurs en ce moment, avec la campagne massive et pénible qui est menée contre les Ouïgours et les autres minorités musulmanes; les arrestations de défenseurs des droits de la personne, notamment d'avocats, et les procès injustes auxquels ils sont soumis; la répression constante que subissent les Tibétains; la lutte contre le Falun Gong — qui en est maintenant à sa 21e année —; et plus près de nous, les huit Canadiens emprisonnés en Chine, source de préoccupation pour Amnistie internationale. Quatre des Canadiens ont été condamnés à la peine de mort; deux Canadiens, Michael Kovrig et Michael Spavor, ont été arbitrairement et illégalement arrêtés et placés en détention; et deux autres Canadiens, Huseyin Celil et Sun Qian, purgent de longues peines d'emprisonnement après des procès profondément inéquitables.
    Compte tenu de tout cela, nous avons cerné 10 raisons troublantes de nous inquiéter de la Loi sur la sécurité nationale de Hong Kong.
    Premièrement, une menace à la sécurité nationale peut signifier à peu près n'importe quoi, et c'est effectivement le cas. La peine maximale, soit l'emprisonnement à vie, est imposée dans les cas d'actes de sécession, de subversion, de terrorisme et de collusion avec des forces étrangères. Ces crimes sont définis de façon si générale qu'ils peuvent facilement devenir des fourre-tout.
    Deuxièmement, on abuse de la loi depuis le premier jour. Des gens sont arrêtés parce qu'ils possèdent des drapeaux, des autocollants et des bannières portant des slogans politiques. La police et les autorités prétendent que les slogans, les T-shirts, les chansons et même les morceaux de papier blanc qu'on tient en l'air représentent des menaces pour la sécurité nationale. Le gouvernement de Hong Kong a déclaré que le slogan politique « Libérez Hong Kong, révolution de notre temps »,régulièrement scandé lors des manifestations de l'année dernière, évoque l'indépendance de Hong Kong et est par conséquent interdit.
    Troisièmement, la loi est omniprésente et mène notamment au resserrement du contrôle sur l'éducation, le journalisme et les médias sociaux.
    Quatrièmement, les gens peuvent être emmenés en Chine continentale pour y subir des procès inéquitables, et c'est précisément l'enjeu des manifestations monstres de l'année dernière contre la réforme de la loi visant l'extradition.
    Cinquièmement, la loi s'applique à tout le monde sur la planète — absolument tout le monde, partout.
    Sixièmement, les autorités chargées des enquêtes jouissent de pouvoirs nouveaux et élargis, dont le pouvoir de fouiller les propriétés, de restreindre ou d'interdire les voyages, de geler ou de confisquer des biens, de censurer du contenu en ligne et de s'adonner à la surveillance secrète, ce qui comprend l'interception des communications. Dans aucun cas une ordonnance du tribunal n'est requise.
    Septièmement, le gouvernement central de la Chine met sur pied un bureau de protection de la sécurité nationale au cœur de Hong Kong. Le bureau et son personnel ne relèvent pas de Hong Kong.
    Huitièmement, le gouvernement de Hong Kong a mis sur pied un nouvel organisme, le comité de protection de la sécurité nationale, qui compte parmi ses membres un conseiller venant du gouvernement central de la Chine. Les décisions de ce comité ne peuvent pas faire l'objet d'une révision judiciaire.
    Neuvièmement, les mesures de protection des droits de la personne risquent de faire l'objet de dérogations. La Loi sur la sécurité nationale comporte une garantie générale concernant le respect des droits de la personne, mais prévoit une immunité et d'importantes exemptions pour les institutions chargées de la sécurité nationale, en plus d'avoir explicitement préséance sur toutes les autres lois.
    Dixièmement, la loi a déjà produit un effet immédiat et terrible. Les Hongkongais ont fermé leurs comptes de médias sociaux, les magasins et restaurants ont retiré les bannières et autocollants soutenant le mouvement de protestation, et les bibliothèques publiques ont retiré des étagères les livres traitant de sujets délicats et les livres écrits par des militants qui critiquent le gouvernement.
    Nul doute que ces graves préoccupations sont en fait fondées. C'est très clair dans les communiqués de presse d'Amnistie internationale et les actions urgentes préconisées. On peut lire dans les communiqués de presse que quatre militants — trois hommes et une femme ayant entre 16 et 21 ans — ont été arrêtés il y a deux semaines en vertu de la loi sur la sécurité et ont été accusés de préconiser l'indépendance de Hong Kong. Aussi, 12 candidats prodémocratie aux élections du Conseil législatif de Hong Kong, maintenant reportées, ont été disqualifiés, et Joshua Wong est du nombre. On a entre autres justifié leur disqualification en soutenant que leur opposition à la récente Loi sur la sécurité nationale démontre qu'ils ne peuvent pas véritablement s'acquitter de leur devoir constitutionnel à titre de législateurs.

  (1240)  

    Plus récemment, naturellement, il y a eu hier, pour des raisons de sécurité nationale, l'arrestation de la militante pour la démocratie bien connue, Agnes Chow, accusée d'actes de sécession, ainsi que de l'éminent éditeur Jimmy Lai, de deux de ses fils et du personnel de son journal, l'Apple Daily, pour « collusion avec des forces étrangères ».
    Devant cette crise qui s'aggrave, je vais proposer rapidement cinq priorités sur lesquelles le Canada devrait concentrer ses efforts.
    Premièrement, le multilatéralisme est essentiel, et plus la coalition d'États disposés à discuter des préoccupations sera vaste et diverse, plus elle sera efficace. Le Canada l'a fait en diverses occasions, l'année passée, concernant la crise qui fait rage à Hong Kong et d'autres préoccupations en Chine. Il y a eu notamment l'adoption d'une déclaration orale conjointe présentée par 28 gouvernements au Conseil des droits de l'homme des Nations unies, le 30 juin, puis le ministre Champagne a participé avec ses homologues de l'Australie, de la Nouvelle-Zélande, du Royaume-Uni et des États-Unis à une déclaration exprimant leurs préoccupations relatives à Hong Kong, il y a deux jours. Augmenter le nombre d'États disposés à exercer de la pression sur la Chine devrait être une grande priorité du Canada.
    Deuxièmement, toujours sur la question du multilatéralisme, le Canada devrait activement prendre des mesures dans le cadre du système des droits de la personne de l'ONU. Une déclaration publique diffusée le 26 juin par 50 experts indépendants des Nations unies en matière de droits de la personne énonce un éventail d'options, par exemple concernant des propositions qui pourraient être tentées au Conseil des droits de l'homme des Nations unies, dont la prochaine session s'amorcera le 14 septembre.
    Troisièmement, le Canada est bien placé pour diriger la préparation internationale, compte tenu de la possibilité que de nombreux Hongkongais soient forcés de trouver refuge à l'étranger. La géographie de Hong Kong est telle que, contrairement à bien d'autres réfugiés ailleurs dans le monde, les gens ne peuvent manifestement pas franchir la frontière la plus immédiate, car il s'agit de la Chine. Les gens qui doivent fuir se retrouveront dans des situations très diverses: certains sont citoyens d'un autre pays, comme les quelque 300 000 Canadiens qui résident à Hong Kong; il y a les gens qui ne sont pas citoyens, mais qui ont des proches et d'autres liens au Canada ou dans d'autres pays; et il y a ceux qui n'ont aucun lien fort avec quelque autre pays que ce soit. Le Canada devrait travailler à prendre des dispositions pour recevoir, peut-être, un grand nombre de Canadiens forcés de quitter soudainement Hong Kong, et il devrait aussi collaborer avec d'autres gouvernements afin de préparer une intervention bien coordonnée en réponse aux besoins plus généraux des réfugiés.
    Quatrièmement, le Canada devrait envisager des options prévues par les lois et les politiques du Canada afin d'exercer directement une plus forte pression. Les préoccupations relatives aux droits de la personne en général et celles qui concernent particulièrement Hong Kong doivent être prioritaires dans toutes les relations que le Canada entretient avec la Chine, et ce, non seulement sur le plan diplomatique, mais à l'échelle de tous les échanges bilatéraux, y compris le commerce et l'investissement. Les accords d'extradition avec Hong Kong ont été suspendus, et le transfert de matériel de sécurité névralgique a été resserré. Un groupe considérable de députés et de sénateurs font pression sur le gouvernement pour qu'il envisage des sanctions en vertu de la Loi sur la justice pour les victimes de dirigeants étrangers corrompus. Au moment d'envisager d'autres mesures, il est recommandé d'accorder la priorité aux mesures fondées sur une approche multilatérale, de concert avec d'autres gouvernements.
    Enfin, permettez-moi de m'arrêter sur quelque chose qui nous touche de très près. Amnistie internationale fait partie de la Coalition canadienne pour les droits de la personne en Chine, qui est composée de 15 organismes, ici au Canada. Au nom de la Coalition, nous avons préparé deux rapports, au cours des trois dernières années, qui mettent au jour l'intensification inquiétante d'une tendance à l'intimidation, à l'interférence et aux menaces visant les défenseurs des droits de la personne installés ici et qui participent à la campagne visant les préoccupations au chapitre des droits de la personne en Chine. Les personnes qui s'adonnent à ces abus sont liées à des représentants du gouvernement chinois ou sont du moins encouragées ou applaudies par eux. Selon notre plus récent rapport, qui a été remis au gouvernement du Canada en mars et rendu public en mai, au cours de l'année passée, des personnes qui appuient le mouvement prodémocratie et la protection des droits de la personne à Hong Kong en particulier ont été ciblées sans relâche, entre autres lors de manifestations et par l'intermédiaire des médias sociaux.
    En 2017 et cette année encore, la Coalition a présenté de nombreuses recommandations au gouvernement canadien en vue d'une action plus efficace permettant de protéger contre ces abus les défenseurs des droits de la personne qui se trouvent ici, en mettant l'accent sur la nécessité d'une meilleure coordination entre la police, la sécurité et les organismes et ministères gouvernementaux. À notre grande déception, nous avons eu très peu d'écho. Les personnes qui subissent ces interférences et ces menaces, notamment des menaces de violence sexuelle et physique et des menaces contre les membres de leur famille à Hong Kong ou en Chine, sont essentiellement laissées sans aucun recours efficace et savent rarement vers qui se tourner et à quoi s'attendre.

  (1245)  

    Il pourrait être très difficile de contrer l'influence de la Chine à l'échelle mondiale et il peut être difficile d'exercer des pressions en vue d'une réforme des droits de la personne sur le terrain en Chine, mais il est inexcusable de ne prendre absolument aucune mesure solide et décisive pour lutter contre les violations des droits de la personne qui peuvent être liées à Pékin ou soutenues par elle et qui sont liées à ce qui se produit à Hong Kong et ici, au Canada.
    Merci, monsieur le président.
    Merci beaucoup, monsieur Neve.
    Nous allons maintenant passer à M. Keram pour dix minutes. Allez-y, s'il vous plaît.
    C'est pour moi un honneur de témoigner devant le Comité aujourd'hui avec d'autres distingués invités, y compris mon amie Sophie.
    On m'a demandé de formuler des commentaires au nom de M. Carl Gershman, président de National Endowment for Democracy et l'un des 11 Américains officiellement sanctionnés par le gouvernement chinois pas plus tard qu'hier pour leur soutien du militantisme prodémocratie à Hong Kong.
    Hong Kong est une ville cosmopolite internationale et un centre financier mondial louangé pour sa diversité culturelle et son inclusivité, sa liberté d'expression et son application solide du principe de la primauté du droit. Depuis 17 mois, Hong Kong attire l'attention du monde entier tandis que des millions de Hongkongais ordinaires sont descendus dans la rue pour manifester contre une mesure d'extradition controversée. Au fil du temps, cette initiative est devenue un mouvement de protestation concernant les droits et libertés fondamentales du peuple de Hong Kong. Malheureusement, les dirigeants locaux ont répondu aux demandes justes et légitimes des Hongkongais par l'indifférence, la répression, des arrestations et une brutalité policière ahurissante, le tout avec le soutien du gouvernement central de Pékin. Depuis juin 2019, la police de Hong Kong a procédé à environ 9 000 arrestations liées au mouvement de protestation. On compte parmi les personnes arrêtées plus de 700 enfants âgés de moins de 18 ans, y compris huit élèves du primaire.
    Malgré le tollé et les critiques à l'échelle internationale, la situation ne fait que continuer d'empirer pour le peuple de Hong Kong. Le 30 juin, dans le secret quasiment complet et sans tenir compte des obligations juridiques reconnues à l'échelle internationale à l'égard de la ville de Hong Kong, le Parti communiste chinois a adopté de force une nouvelle loi de la République populaire de Chine sur la protection de la sécurité nationale dans la Région administrative spéciale de Hong Kong, loi que j'appellerai LSN à partir de maintenant.
    La LSN est déjà à l'origine de l'un des moments les plus sombres dans l'histoire de Hong Kong en raison des violations des droits et libertés fondamentales des Hongkongais. La LSN a donné aux dirigeants du PCC un droit sans précédent: celui d'appliquer et d'imposer systématiquement ses règles à Hong Kong. Ces dirigeants n'ont pas perdu de temps pour utiliser ce droit et arrêter des militants dans la rue, disqualifier des politiciens prodémocratie, congédier des universitaires titularisés et, pas plus tard qu'hier, remettre en question les propos d'organes de presse essentiels.
    Malgré ces mesures très sévères et souvent violentes, les citoyens de Hong Kong n'ont pas tout simplement renoncé silencieusement à leurs droits. En novembre dernier, avec un taux de participation record, des candidats prodémocratie ont gagné dans 17 des 18 élections de district. Depuis, les Hongkongais se sont tournés vers la communauté internationale afin que cette dernière prenne des mesures, misant sur leurs réseaux internationaux, y compris ceux qu'ils ont ici, au Canada, pour encourager les gouvernements de partout dans le monde à prendre position, que ce soit en annulant des accords d'extradition avec Hong Kong ou en demandant aux Nations unies de lancer une enquête. Tout juste le mois dernier, plus de 600 000 citoyens ont à nouveau voté pour appuyer des candidats prodémocratie dans le cadre des élections primaires du Conseil législatif. Puis, dans ce qu'on peut décrire comme un flagrant mépris des droits garantis par la loi aux Hongkongais — et révélant toute l'ampleur des peurs de Pékin —, la chef de l'exécutif, Carrie Lam, a annoncé que les élections du Conseil législatif seraient reportées d'une année entière.
    Il faut absolument que les gouvernements de partout dans le monde reconnaissent que les gestes posés par le PCC vont totalement à l'encontre des lois et des normes locales et internationales actuelles. La LSN bafoue directement certaines composantes des lois fondamentales de Hong Kong ainsi que sa déclaration des droits. De plus, les dispositions de la LSN vont aussi à l'encontre des obligations de la Chine en vertu du droit international, comme le Pacte international relatif aux droits civils et politiques et la Déclaration commune sino-britannique. La LSN constitue aussi une initiative sans précédent visant à affirmer une emprise sur les citoyens d'autres pays. Par conséquent, ce ne sont pas les institutions juridiques de Hong Kong qui sont attaquées, Pékin a aussi remis en question le système juridique international en accaparant des pouvoirs qui ne lui reviennent pas.
    Il y a beaucoup de choses que la communauté internationale peut faire en réaction. D'abord et avant tout, elle peut prendre des mesures pour protéger les Hongkongais qui veulent se rétablir avec leur famille. Depuis mai, des milliers de Hongkongais ont présenté des demandes pour obtenir des documents d'immigration étrangers, cherchant la sécurité et la protection dans des pays tiers, y compris au Canada. On compte parmi ces personnes un grand nombre d'étudiants et de jeunes militants qui s'inquiètent de l'effort du gouvernement de Hong Kong d'imposer une soi-disant « éducation patriotique » et d'autres initiatives nationalistes qui remettent en question la liberté universitaire de Hong Kong et sa diversité culturelle et politique.
    À la suite de l'arrestation de Jimmy Lai il y a quelques jours, les Hongkongais ont aussi raison de craindre que le PCC commence à mettre en place les mécanismes de censure et de surveillance qu'il a perfectionnés dans le Turkestan oriental, que le PCC appelle la Région autonome ouïghoure du Xinjiang.

  (1250)  

    Il faut que la communauté internationale envisage d'autres mesures qu'elle peut prendre pour protéger l'avenir de la démocratie, de la liberté et de la primauté du droit à Hong Kong. Sans un tel soutien, comme les événements des derniers jours l'ont montré, l'ombre de l'autoritarisme continuera de se propager de façons que connaissent trop bien ceux qui ont déjà souffert de la coercition et de la répression du PCC, comme c'est le cas pour la communauté ouïghoure.
    Nous tous de la National Endowment for Democracy croyons aux droits des gens de choisir librement leur gouvernement, un gouvernement qui garantit la liberté d'expression, de croyance et d'association, qui respecte les droits fondamentaux des personnes et des minorités, qui promeut la liberté de presse et qui favorise un accès réel à la justice. Nous croyons aussi que les mesures prises par le gouvernement chinois parlent d'elles-mêmes, qu'il s'agisse de la négation des droits et libertés fondamentaux de son peuple ou de son abus de pouvoir pour enfreindre des engagements juridiques à Hong Kong.
    Nous prions instamment le gouvernement du Canada de s'élever avec d'autres États pour condamner l'abrogation par le PCC des droits des Hongkongais ainsi que les violations de l'intégrité de l'ordre juridique international.
    Merci.
    Monsieur le président...
    Je suis désolé. J'ai oublié de réactiver mon micro. C'est quelque chose qui nous arrive souvent ici. Ce n'est habituellement pas le président, mais je m'en excuse.
    Vous ne m'entendiez pas, mais je remerciais M. Keram d'avoir présenté son témoignage et d'avoir tenu le microphone afin que nous puissions tous l'entendre.
    Nous allons maintenant passer à Mme Richardson, pour un maximum de 10 minutes.
    Allez-y, s'il vous plaît.

  (1255)  

    Merci, monsieur le président et merci aux membres du Comité. Je sais que vous faites un travail très important en étudiant les relations sino-canadiennes, et c'est un honneur pour moi de témoigner devant le Comité aujourd'hui.
    J'ai supervisé tous les travaux de Human Rights Watch sur la Chine depuis que j'ai rejoint l'organisation en 2006. Durant cette période, nous avons bénéficié d'une solide collaboration avec les représentants canadiens à Pékin, à Hong Kong et à Ottawa. J'aurais bien sûr aimé qu'on ait à parler de moins en moins de choses, mais, malheureusement, c'est l'opposé qu'on constate. Nous composons actuellement avec des violations des droits de la personne d'une ampleur et d'un niveau sans précédent, non seulement sur le continent, comme les violations continues contre les Ouïghours et les Tibétains, mais de plus en plus à l'extérieur du pays aussi, y compris les efforts de Pékin pour miner les institutions internationales mêmes sur lesquelles nous nous appuyons pour protéger les droits de la personne partout dans le monde. En effet, le gouvernement chinois a généré des menaces aux droits de la personne ici même au Canada.
    Nous sommes ici aujourd'hui pour discuter de la violation sans précédent par Pékin des droits de la personne des sept millions de Hongkongais. La décision des autorités chinoises d'imposer une soi-disant loi sur la sécurité nationale à Hong Kong viole des principes juridiques fondamentaux de la constitution fonctionnelle du territoire ainsi que le Pacte international relatif aux droits civils et politiques que la Chine a signé, mais pas ratifié, et auquel Hong Kong est partie.
    Le temps de le dire, le 30 juin, les Hongkongais se sont vu dépouillés de leurs droits de réunion pacifique, d'expression et de participation politique et de la promesse d'avoir un pays et deux systèmes jusqu'au moins en 2047. Les dispositions vagues et trop générales de la loi sur la sécurité nationale sont dévastatrices pour les droits de la personne, notamment grâce à la création d'organismes de sécurité secrets spécialisés, à la négation des droits à un procès équitable et à des élections régulières, à la prestation de nouveaux pouvoirs à la police, à l'augmentation des contraintes imposées à la société civile et aux médias et à l'affaiblissement de la surveillance judiciaire.
    Selon Human Rights Watch, il s'agit d'une loi qui n'a rien à voir avec la sécurité. C'est une feuille de route vers la répression. Les événements des 24 dernières heures, à la suite de l'arrestation du propriétaire de l'Apple Daily, Jimmy Lai, et de militants prodémocratie, y compris Agnes Chow, en vertu de la LSN, le montrent très clairement.
    Nous remercions le Canada d'avoir parlé publiquement de ses préoccupations au sujet de la LSN, de ses efforts pour coordonner un tel point de vue avec des gouvernements aux vues similaires et de sa rapide suspension du traité d'extradition avec Hong Kong. Nous tenons aussi à remercier le Canada de ses efforts au sein du Conseil des droits de l'homme lorsqu'il a demandé aux autorités chinoises de mettre fin aux violations contre les défenseurs des droits de la personne et les minorités ethniques et religieuses, entre autres problèmes.
    Cependant, l'existence même de la loi sur la sécurité nationale montre que les efforts de nombreux gouvernements ne sont malheureusement pas suffisants. Il est non seulement essentiel de souligner les violations de Pékin, mais il est aussi crucial et urgent de mettre fin au sentiment d'impunité extraordinaire dont Pékin continue de bénéficier au chapitre des violations des droits de la personne soutenues par l'État.
    À cette fin, nous prions instamment le Canada, d'abord et avant tout, de déclarer publiquement et sans équivoque qu'il ne coopérera pas à l'application extraterritoriale de la LSN ni ne la facilitera et qu'il ne donnera pas suite aux demandes de la police de Hong Kong pour obtenir des renseignements concernant les personnes accusées de crimes contre la sécurité nationale. Le Canada devrait adopter rapidement des mécanismes pour permettre aux habitants de Hong Kong de trouver un asile au Canada tout en s'assurant que les militants de Hong Kong qui sont réétablis au Canada puissent continuer leur militantisme en toute sécurité et sans être victimes du harcèlement du gouvernement chinois, y compris par une quelconque initiative à l'étranger du Front uni.
    Le Canada peut accroître de façon urgente la capacité de son consulat à Hong Kong de surveiller les violations des droits de la personne et les répercussions de la LSN en plus d'accroître son soutien accordé aux groupes qui défendent les droits de la personne, les médias locaux indépendants et les libertés sur Internet.
    Le Canada peut aussi imposer des sanctions ciblées aux dirigeants de la Chine et de Hong Kong qui ont participé à la rédaction, à l'adoption et à l'application de la loi et qui ont par conséquent violé les droits de la personne fondamentaux établis par le droit international. Il peut s'assurer que les fournisseurs de services Internet refusent de coopérer avec la police de Hong Kong qui demande de fournir de l'information ou de retirer ou de limiter l'expression de points de vue politiques en ligne en plus de veiller à ce que les entreprises limitent les exportations à l'intention de la police de Hong Kong d'équipements ou de soutien technologique ou technique qui peuvent être utilisés pour intercepter des communications personnelles ou procéder à de la surveillance.
    Le Canada peut aussi assurer la participation de chambres de commerce et d'autres associations de l'industrie pour réaffirmer le soutien à l'égard du respect des droits de la personne, de la primauté du droit et de la participation civique et communiquer publiquement les risques sociaux, financiers et opérationnels liés à la loi.
    J'aimerais souligner tout particulièrement les deux dernières recommandations.
    Comme Alex l'a mentionné précédemment, la première consiste à soutenir l'appel, à la fin juin, de 50 experts en droits de la personne des Nations unies relativement à la tenue d'une séance spéciale sur la Chine du Conseil des droits de l'homme et la création d'un nouveau mécanisme de surveillance de la Chine. Ce sont les genres de mesures qui aideront à ébranler l'attente d'impunité affichée par Pékin.

  (1300)  

    J'aimerais également exhorter le gouvernement à envisager de créer un poste à l'échelon du Cabinet dont le titulaire serait responsable de coordonner, d'élaborer et de mettre en œuvre des politiques sur les relations avec la Chine. Cette question déborde désormais du cadre traditionnel des affaires étrangères ou du commerce. De plus en plus, nous voyons des menaces contre la liberté universitaire, ainsi que contre la diaspora. Les questions d'immigration suscitent des préoccupations. L'intégration de ces éléments n'est pas terrible. Cette recommandation ne s'adresse pas seulement au gouvernement du Canada, mais, selon moi, il s'agit d'un moment particulier où la création d'un tel poste enverrait un message, non seulement à Pékin et à Hong Kong, mais également aux citoyens partout au Canada.
    Nous savons que les autorités chinoises exercent une pression sur d'autres gouvernements et entreprises afin qu'ils demeurent silencieux face aux violations des droits de la personne, comme celles qu'entraîne la LSN, mais l'importance d'assurer le respect des droits fondamentaux de sept millions de Honkongais est indéniable. Il faut faire preuve de ténacité et de persévérance pour lutter contre un mépris aussi grave et aussi répandu des droits. En prenant activement des mesures pour aider les Hongkongais et faire monter le prix que doivent payer les représentants gouvernementaux coupables de violations des droits de la personne à Pékin et à Hong Kong, le Canada peut aider à atténuer la répression actuelle et future. Nous vous exhortons à le faire en coordination avec des gouvernements aux vues similaires, pour augmenter le poids des mesures prises.
    Nous vous remercions de nous avoir fourni l'occasion de discuter avec vous, et je répondrai avec plaisir à toutes vos questions.
    Merci beaucoup, madame Richardson.
    Je remercie tous les témoins d'avoir respecté le temps alloué à leur exposé.
    Nous allons maintenant commencer le premier tour de questions. Monsieur Chiu, vous avez six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie tous les témoins de comparaître devant le Comité pour parler de la question de Hong Kong et de la Chine du point de vue du Canada.
    En tant que député nouvellement élu, en novembre 2019, j'ai été invité à me rendre à Hong Kong dans le cadre d'une mission d'observation de l'élection du Conseil de district, et nous avons produit un rapport qui comportait certains commentaires positifs à l'intention du gouvernement de Hong Kong. Nous avons été heureux d'être témoins de l'exercice de la démocratie. Dans cette élection du Conseil de district, le peuple de Hong Kong a manifesté son appui profond et net à la démocratie. En tant que personne qui est née à Hong Kong et qui a grandi au Canada, j'ai été très satisfait d'assister à la mise en pratique de la démocratie.
    Revenons maintenant en 2020, en date d'aujourd'hui. Nous voyons qu'un important climat de peur règne dans tous les secteurs à Hong Kong, y compris la presse. L'arrestation du propriétaire d'Apple Daily, par exemple, a mis en péril la liberté de parole. Le Club des correspondants étrangers a publié une déclaration très critique contre la LSN et l'arrestation de M. Jimmy Lai. Les gens peuvent se faire arrêter pour avoir chanté certaines chansons ou avoir crié certains slogans, de sorte que la liberté d'expression est également menacée. Cela nuit également à leur association avec des défenseurs de la liberté d'expression. Ils disqualifient des leaders politiques et même des législateurs comme bon leur semble, selon leurs opinions.
    Définitivement, un épais voile de peur s'étend sur Hong Kong. Toutefois, au Canada, et également dans le reste du monde, je dirais qu'il y a également une peur blanche opaque qui s'abat. Nous voyons que la LSN de Hong Kong a également mené à la mise en accusation du citoyen américain Samuel Chu, qui est à l'étranger depuis 25 ans. Il est l'une des personnes accusées. Des électeurs de ma circonscription ont présenté une pétition demandant au gouvernement du Canada d'appliquer la loi Magnitski pour sanctionner la Chine ou Hong Kong. Il serait également visé.
    Selon vous, que devraient faire les gouvernements canadiens pour protéger la sécurité des Canadiens, peu importe leur origine ethnique? Nous savons que, en 2006, Huseyin Celil, un Canadien ouïghour, a été arrêté en Ouzbékistan, mais extradé vers la Chine. Nous avons également les deux Michael qui sont détenus arbitrairement. Selon vous, que devrait faire le Canada pour mettre efficacement en garde les citoyens canadiens?
    Je viens de vérifier les avertissements aux voyageurs sur le site Web de voyage du gouvernement du Canada, et on dit aux Canadiens de faire preuve d'une grande prudence. Comment pouvons-nous savoir qu'ils ne se feront pas arrêter? Comment pouvons-nous savoir qu'ils ne seront pas extradés arbitrairement vers la Chine durant leurs déplacements?
    Madame Richardson, monsieur Neve et monsieur Keram, veuillez répondre.

  (1305)  

    Monsieur Chiu, merci beaucoup. C'est une grande question qui comporte de nombreux volets en évolution constante.
    Essentiellement, la question concerne la façon de protéger les droits des Canadiens. C'est ce que je comprends de votre question.
    Évidemment, nous avons formulé quelques suggestions quant à la façon de composer avec la LSN et les questions relatives à l'extradition et à la portée extraterritoriale. Je souhaite souligner rapidement que nous sommes tout aussi préoccupés, notamment, par la question de la confiance que les gens qui ont immigré au Canada depuis la Chine continentale ou Hong Kong ont dans leur capacité de faire connaître leurs opinions, si elles sont critiques à l'endroit d'acteurs étatiques chinois, et dans le fait que ces opinions n'entraîneront pas de représailles contre eux ou contre des membres de leur famille en Chine.
    Je comprends qu'il n'y a pas nécessairement grand-chose à faire concernant les membres de la famille en Chine, mais je pense que le fait de rassurer les gens en leur faisant savoir que le gouvernement canadien encourage ce type de militantisme citoyen et s'exprimera pour le protéger est critique. Je pense qu'il s'agit d'une question politique qui concerne également l'application de la loi.
    Merci.
    Je me pencherais également sur un autre volet, et nous avons écrit à ce sujet, soit la menace que représente le gouvernement chinois contre la liberté universitaire. Je crois que les universités canadiennes n'en font pas suffisamment pour s'assurer que toutes les personnes sur leurs campus, que ce soient des Canadiens, peu importe leur origine, ou bien des personnes qui proviennent de la Chine continentale, de Hong Kong ou de Taïwan, ont toutes un accès égal à la liberté universitaire sur leur campus.
    Au cours des dernières années, nous avons vu des exemples de cas où des écoles n'ont pas pris la parole pour défendre cette liberté lorsqu'elle a été menacée.
    Merci, madame Richardson.
    Monsieur Neve, allez-y.
    Merci beaucoup, monsieur Chiu, pour la question. Elle est très importante, et je crois qu'elle comporte deux volets.
    Tout d'abord, il y a les risques croissants auxquels des Canadiens font face ici même au Canada. Je répéterais les commentaires que j'ai formulés au sujet du rapport que nous avons présenté au gouvernement au nom de la Coalition canadienne pour les droits de la personne en Chine. Je crois que vous le connaissez. Je peux certainement vous en fournir une nouvelle copie, puisqu'il contient un certain nombre de recommandations qui sont non seulement largement inspirantes, mais également très concrètes pour la création de lignes d'aide permettant aux différents organismes gouvernementaux de réagir de façon plus cohérente à ce qui représente une menace profondément troublante et croissante. Dans les faits, depuis de nombreuses années, très peu de choses ont bougé alors que la situation a empiré.
    En ce qui concerne les préoccupations...
    Monsieur Neve, je suis désolé de vous interrompre, mais le temps de M. Chiu est écoulé, donc merci. Espérons que nous sommes tous...
    Monsieur le président.
    Monsieur Chiu, votre temps est écoulé.
    Je comprends.
    Si vous le permettez, puis-je demander au témoin, M. Neve, de fournir le rapport au Comité?
    Merci beaucoup.
    Nous passons maintenant à M. Fragiskatos, pour six minutes.
    Je remercie les témoins de leurs exposés.
    Madame Richardson, à la suite du témoignage antérieur que nous avons entendu à la séance d'aujourd'hui, j'ai demandé s'il y avait une possibilité que ce qui se passe avec la Chine et la minorité ouïghoure se passe également à Hong Kong. Les témoins ont affirmé qu'il était certainement possible que ce qui se passe aujourd'hui puisse laisser présager une situation semblable pour les Hongkongais dans l'avenir.
    Ils ont affirmé que ce qui arrive aux Ouïghours aujourd'hui arrivera aux Hongkongais demain. Est-ce le cas?
    C'est une question difficile.
    Je pense que, à la base, nous parlons de personnes qui perdent leurs droits politiques, qui n'ont pas accès à un procès équitable, qui n'ont pas l'occasion de participer à la vie politique et qui perdent leur identité même en tant que communauté distincte ayant une langue et des traditions particulières. Je pense qu'il s'agit de préoccupations valides.
    Les motivations à l'origine des politiques de Pékin dans les deux régions sont quelque peu différentes et se sont manifestées un peu différemment. Par exemple, dans le Xinjiang, évidemment, l'une des choses qui motivent le gouvernement chinois est un désir de modifier radicalement, de limiter ou d'éradiquer l'islam. Il n'y a pas de facteur comparable à Hong Kong. De plus, nous pouvons toujours voir ce qui se passe à Hong Kong, ce que nous ne pouvons pas faire dans le Xinjiang. Des journalistes et des avocats qualifiés sont toujours présents, et un certain militantisme citoyen est possible, mais cela diminue rapidement.
    Toutefois, je n'attendrais pas que l'un devienne comme l'autre pour tenter de prévenir de tels résultats. Selon moi, même si on ne regarde que les deux ou trois dernières années, Pékin a amplement montré son dédain profond... de mépriser les droits de la personne même à un endroit qui est aussi bien connecté au reste du monde, qui est aussi visible et aussi lié par le droit international que Hong Kong.

  (1310)  

    Merci beaucoup.
    Monsieur Neve, avant tout, je suis heureux de vous revoir.
    J'ai une question concernant quelque chose que nous continuons à entendre, qui a de nouveau été mentionné aujourd'hui: les sanctions Magnitski. Si le gouvernement du Canada devait emprunter cette voie, je me demande quelles seraient les conséquences pour les Canadiens en Chine, notamment les deux Michael, Michael Kovrig et Michael Spavor.
    Si le Canada devait prendre de telles mesures draconiennes, qu'est-ce qui attendrait ces deux personnes? Qu'arriverait-il aux deux Michael? Évidemment, il est impossible de le prédire, mais serait-il raisonnable de laisser entendre et de supposer que cela réduirait dramatiquement les chances de libération de M. Kovrig et de M. Spavor?
    Je suis également heureux de vous revoir. Il s'agit manifestement d'une question très importante.
    Je pense qu'il n'est pas du tout étrange de s'en préoccuper, parce que, selon moi, à tout instant, que ce soit en ce qui concerne Meng Wanzhou et son extradition ou qu'il s'agisse de considérations plus vastes concernant la façon dont les gouvernements réagissent à la crise des Ouïghours ou à la situation à Hong Kong, s'il y a un mot qui caractérise très souvent la réaction de la Chine, c'est « représailles ». Par conséquent, je pense que le scénario que vous avancez en est un que le Canada devrait examiner très attentivement sur le plan stratégique.
    Amnistie internationale ne s'est pas prononcée quant à l'imposition de sanctions au titre de la loi Magnitski. Nous pensons certainement que cette stratégie mérite d'être envisagée. Nous croyons qu'il faut tenir compte d'un certain nombre de considérations, y compris ce que vous avez souligné, mais il y a également le fait que, selon nous, si nous empruntons cette voie, nous allons inévitablement avoir beaucoup plus de succès si nous procédons de façon multilatérale et que le Canada n'agit pas seul. Évidemment, les États-Unis l'ont également fait. Cela peut être fait si le Canada prend part à une réaction d'envergure concertée à l'échelle internationale, au lieu de faire partie d'un très petit groupe d'États qui prennent des mesures. Je crois qu'il s'agit du facteur qui doit orienter l'approche diplomatique du Canada pour l'adoption de tout un éventail de stratégies qui ne se limitent pas à la possibilité d'imposer des sanctions.
    Merci beaucoup.
    Ma dernière question s'adresse à M. Neve et à Mme Richardson.
    Monsieur Neve, vous avez parlé de votre profonde préoccupation quant aux actes et abus du gouvernement chinois sur le territoire canadien. Pouvez-vous donner des exemples précis de ce qui vous préoccupe le plus?
    J'imagine que la même question, formulée exactement de la même façon, s'adresse également à Mme Richardson.
    Ce qui me préoccupe le plus, c'est qu'Amnistie internationale fait le suivi de la situation par l'entremise de la coalition depuis de nombreuses années. La situation empire au lieu de s'améliorer. C'est ma première préoccupation.
    Ensuite, lorsque je parle avec mes fabuleux collègues qui travaillent pour d'autres organisations communautaires de protection des droits de la personne ici au Canada, il me paraît très clair que les femmes très courageuses qui défendent les droits de la personne sont la principale cible des menaces et des actes d'intimidation, qui sont accompagnés de menaces croissantes de violence sexuelle, etc. Cela doit devenir une préoccupation de premier plan.
    Finalement, même si le gouvernement examine la question depuis un certain nombre d'années, certaines des mesures les plus simples, même seulement pour améliorer la coordination entre les ministères et les organismes, n'ont pas été prises. Honnêtement, je crois que c'est inconcevable.
    Merci, monsieur Neve.
    Je suis désolé, monsieur Fragiskatos, mais votre temps est écoulé.

[Français]

     Monsieur Bergeron, vous avez la parole pour six minutes.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Je remercie les témoins de leur importante contribution à nos travaux.
    Nous avons eu l'occasion, avec le groupe précédent, de nous pencher plus particulièrement sur le sort des activistes à Hong Kong. Cette fois-ci, nous nous penchons davantage sur l'influence exercée par les autorités chinoises ou, du moins, sur les menaces qu'elles feraient peser sur des ressortissants se trouvant en territoire canadien. Dans tous les cas, nous avons des questions à nous poser et des gestes à poser.
    J'ai eu l'occasion d'échanger avec l'ambassadeur de la Chine et le consul général à Montréal. Si vous le permettez, je vais vous en parler. L'argument qui a été avancé est le suivant. Étant donné que la situation sur le terrain était complètement explosive, la loi sur la sécurité nationale avait en réalité pour objectif de maintenir la stabilité sur le territoire de Hong Kong et d'assurer le maintien des institutions démocratiques.
     Compte tenu de ce que nous avons pu voir jusqu'à présent et des craintes qui sont exprimées, quelle foi pouvons-nous accorder à une telle prétention de la part des autorités chinoises? Il est légitime de penser que la stabilité est garante des institutions démocratiques, mais comment pouvons-nous croire ces propos, vu tout ce qui s'est produit jusqu'à présent, notamment l'incarcération de journalistes et d'activistes? Comme je le faisais remarquer aux diplomates chinois, si rien dans la loi ne précise ce qui peut constituer une atteinte à la sécurité nationale, tout peut en constituer une.
    J'aimerais avoir une réponse à cette question dans l'ordre inverse des interventions.

  (1315)  

[Traduction]

    Je pourrais faire deux ou trois commentaires, et mes collègues aussi, j'en suis sûr.
    Il est clair que la Chine n'est pas le premier gouvernement au monde à avancer des arguments à propos de la stabilité et de la sécurité sociale pour cacher, derrière la rhétorique de la sécurité nationale, une campagne flagrante de répression et d'intimidation servant à s'emparer du pouvoir. Je crois que c'est exactement ce qui se passe sur le terrain à Hong Kong. Rien de ce que nous documentons sur l'application de la loi ne pourrait appuyer ces prétentions, même de loin. Tout ce que nous avons vu, surtout dans les cinq ou six dernières semaines depuis l'entrée en vigueur de la loi, ne vise que la répression des droits de la personne, ouvertement et sans scrupule.
    J'aimerais ajouter quelques commentaires, si vous me le permettez. Merci de votre question, monsieur Bergeron.
    Pour ce qui est de la mesure dans laquelle nous croyons que la mise en œuvre de la loi sur la sécurité nationale sert uniquement à assurer la stabilité ou la sécurité sociale, je dirais que ce que la Chine a fait en Turkestan oriental depuis la révolte et les affrontements durant les protestations de juillet 2009 est un exemple concret. La Chine se sert de l'excuse de la sécurité nationale et de la stabilité intérieure pour réprimer et opprimer les gens. J'ai peur qu'il arrive exactement la même chose à Hong Kong.
    D'ailleurs, la loi sur la sécurité nationale de la Chine continentale, adoptée en 2015, énonce très clairement, au début, même avant l'article premier, que son objectif ultime est de protéger la suprématie du PCC. Ces lois, que ce soit la loi sur la sécurité nationale, la loi sur le renseignement national ou, dans le cas de Hong Kong, sa loi sur la sécurité nationale, ont comme fondement et comme objectif ultime de protéger la suprématie du PCC. À cause de ces lois, il est impossible d'assurer la liberté d'expression, la liberté de l'information, le droit de circuler librement ou la démocratie.
    À dire vrai, la situation que M. Chiu décrit dans ses commentaires sur ce qu'il a vu de la démocratie pendant sa visite lors des élections de novembre 2009 est exactement ce que le PCC redoute. Le PCC a peur de cela. Il a extrêmement peur des démocraties. Le PCC les craint, et j'ai peur que, si nous n'intervenons pas, Hong Kong ne devienne le prochain Turkestan oriental.
    Très rapidement, je veux dire que les États assujettis au droit international ont l'obligation d'assurer la sécurité publique, mais les lois comme la loi sur la sécurité nationale sont censées être interprétées de façon étroite et prévoir des mesures nécessaires et proportionnelles, ce que la loi sur la sécurité nationale et les autres politiques gouvernementales chinoises ne font pas du tout. Ces lois ne doivent pas miner les engagements clés envers les droits de la personne ni viser des populations entières.
    Le gouvernement chinois dispose de nombreuses lois en vigueur pour traduire en justice les auteurs de menaces crédibles à la sécurité nationale, le cas échéant. Bon nombre de ces lois sont extrêmement problématiques, mais les politiques, comme la campagne « frapper fort » à Xinjiang ou la loi sur la sécurité nationale à Hong Kong sont très loin d'être nécessaires, ciblées, proportionnelles ou raisonnables.

  (1320)  

    Merci beaucoup, madame Richardson.

[Français]

    Je vous remercie beaucoup, monsieur Bergeron.
    Monsieur Harris, vous avez la parole pour six minutes.

[Traduction]

    Merci beaucoup, monsieur le président. Je veux aussi remercier nos trois témoins des exposés très complets qu'ils ont présentés ainsi que de leur présence aujourd'hui.
    Tout d'abord, je suis heureux de vous revoir, monsieur Neve. Merci d'être avec nous. J'ai bien aimé vos dix raisons pour lesquelles cette loi est tout à fait déplorable, par exemple le fait qu'elle a été appliquée de façon abusive dès le début, dès le premier jour. C'est exactement ce qui se passe. Nous sommes face à une situation... Je crois que je peux vous poser la question en premier.
    Avant tout, nous nous sommes engagés, à la demande de la Chine et du Royaume-Uni, en 1997, à faire tout en notre pouvoir pour promouvoir à Hong Kong la pérennité de la primauté du droit ainsi que l'indépendance de ses institutions. D'autres pays ont fait de même. J'ai posé la question à d'autres témoins: peut-on démontrer que le Canada a fait quoi que ce soit au cours des 20 dernières années et avant pour parvenir à ces fins? C'est ma première question.
    Bien entendu, la déclaration énonce des droits, et c'est évidemment lié à ce dont nous parlons aujourd'hui. De fait, il a été convenu que le Pacte international relatif aux droits civils et politiques s'appliquerait à Hong Kong pour y garantir le droit à la vie, la liberté de religion, la liberté d'expression, la liberté de réunion, les droits électoraux, le droit à l'application régulière de la loi et à un procès équitable. Très peu de ce que je viens de nommer est prévu dans la loi sur la sécurité nationale qui est appliquée.
    Quelles possibilités y a-t-il, compte tenu du fait que cela est censé s'appliquer à Hong Kong? Comme on vient de le dire il y a quelques minutes à peine, la Chine a signé la Convention, mais ne l'a pas ratifiée. Malgré tout, la Chine est tenue de la respecter en ce qui concerne Hong Kong. Serait-il possible de tirer parti de cela, ou est-ce que les efforts des Nations unies dont vous avez parlé visaient justement cela?
    Je n'ai probablement ni le temps ni, honnêtement, une connaissance suffisamment complète pour bien répondre à votre question ou pour faire un survol de l'histoire du Canada au cours des 20 dernières années et avant en ce qui concerne la défense des droits et de la démocratie.
    Je soulignerais que, au cours de la dernière année et demie et à un certain nombre d'occasions, le Canada a été l'un des seuls pays à se faire entendre sur la scène mondiale — la plupart du temps avec un, deux et parfois même jusqu'à 20 à 25 autres États partenaires — pour soulever certaines des préoccupations dont il est question présentement. Même s'il ne s'exprime pas avec des mots forts ou virulents — et probablement avec autant de force que ce qu'Amnistie internationale écrirait —, je crois que le Canada a fait preuve de leadership, avec quelques autres, puisque actuellement, très peu d'États sont prêts à pousser ne serait-ce qu'un soupir de désapprobation. Je crois que nous avons tous formulé des recommandations quant au fait que cela doit se poursuivre, que des efforts doivent être davantage multilatéraux et que le Canada devrait peut-être soulever des préoccupations plus concrètes.
    Pour répondre à votre question sur le pacte international, je crois réellement qu'il s'agit d'une composante stratégique très importante ici, et particulièrement que le Canada devrait beaucoup chercher à en tirer parti. Je crois que cela peut déboucher — et Mme Richardson l'a souligné également — sur diverses stratégies axées sur les Nations unies, qui devraient vraiment être considérées avec plus de sérieux. Jusqu'ici, nous sommes arrivés à obtenir des déclarations conjointes, de vive voix au Conseil des droits de l'homme ou par écrit, en marge du Conseil des droits de l'homme, mais il n'y a toujours pas eu d'initiatives, de résolutions ou de séances extraordinaires du Conseil lui-même. La Chine a toujours été intouchable — elle est trop puissante, a trop d'influence —, et il faut que ça change. Comme l'un des plus importants traités des Nations unies relatif aux droits de la personne s'applique ici, c'est une solution évidente pour arriver à cette fin.
    Merci. Cela nous est très utile.
    Vous avez dit qu'il y a eu quelques discussions sur les sanctions imposées par la loi Magnitski, et que relativement peu de pays ont de telles lois. Le Royaume-Uni vient tout récemment d'adopter la sienne. Vu ce contexte, vous avez dit qu'il fallait un effort coordonné, et que le groupe le plus important qui s'est réuni tout récemment, le 30 juin, était composé d'environ 27 ou 28 pays.
    Croyez-vous qu'il pourrait y avoir une coalition plus vaste pour appuyer un effort coordonné afin de faire en sorte que la Chine change son approche envers Hong Kong, ou est-ce plutôt qu'il faut régler le problème des personnes qui cherchent l'asile et qui ont besoin de ports sécuritaires?

  (1325)  

    Je ferais une distinction entre... Ce que j'ai dit à propos de ce qui s'est passé à la fin juin ne concerne pas la loi Magnitski...
    Non, non.
    Ni les sanctions qui en découlent, proprement dites.
    Oui, je crois qu'il y aurait probablement une possibilité d'allonger la liste des pays qui sont liés par ce genre de déclarations, au lieu de prendre des mesures davantage controversées comme l'imposition de sanctions. Cela devrait être la véritable priorité. Le Canada est un acteur clé multilatéral. Nous avons des liens dans un grand nombre de tribunes diverses. Nous devrions faire tout en notre pouvoir pour que ce nombre passe de 28 à 35, à 43, à 58 et plus encore. Je crois que ce serait très important pour le Canada de faire cela.
    Y a-t-il d'autres témoins qui veulent...?
    Madame Richardson, peut-être voudriez-vous intervenir?
    De façon générale, je ne peux pas donner une meilleure réponse que M. Neve, mais je crois que le Canada pourrait réellement tirer parti de la dynamique actuelle, et que beaucoup d'autres gouvernements pourraient suivre son exemple. Si on regarde, notamment, les gouvernements dont l'électorat est outré, à juste titre, par les mauvais traitements infligés au peuple ouïgour, les gouvernements qui sont très préoccupés du fait qu'il est impossible d'obtenir de l'information de qualité à propos de l'origine de la COVID, et, maintenant, les gouvernements dont l'électorat est très troublé par la situation à Hong Kong, la lente...
    Merci, madame Richardson. Je suis désolé de vous interrompre, mais le temps de M. Harris est écoulé.
    Nous allons commencer le deuxième tour.
    Monsieur Albas, vous avez cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je tiens à remercier tous les témoins d'être avec nous aujourd'hui, et je tiens aussi à remercier mes collègues de siéger à notre comité. Je crois que le comité a un rôle important à jouer, en particulier sur cette question, et je suis content que nous ayons repris les travaux juste à temps pour discuter de Hong Kong.
    Monsieur le président, lorsque je m'exprime, j'essaie de me concentrer sur la politique et non sur la personne. Je veux parler de la supposition sous-jacente que M. Fragiskatos a soulevée plus tôt.
    Nous savons que le gouvernement chinois détient deux de nos citoyens. Je pense qu'il est très clair qu'il s'agit d'une situation de diplomatie des otages, mais nous ne pouvons pas nous permettre, en tant que Canadiens, ou permettre à notre gouvernement de refuser de faire ce qui est juste en vertu des droits de la personne ou de nous opposer aux brutes et aux tyrans lorsqu'on nous implore, comme nous l'avons toujours fait. Je suis simplement surpris de la réponse que M. Fragiskatos a obtenue du représentant d'Amnistie internationale. Cela revenait essentiellement à hausser les épaules et dire: « J'imagine que ça peut arriver. »
    Ne croyez-vous pas que les 300 000 Canadiens à Hong Kong...
    Je suis désolé, monsieur Albas, mais M. Fragiskatos invoque le Règlement. J'espère qu'il ne s'agit pas d'une question de débat.
    Allez-y, monsieur Fragiskatos.
    Ce n'est certainement pas une question de débat, monsieur le président.
    Je veux simplement qu'il figure au compte rendu que M. Albas déforme et interprète mal ce que j'ai dit...
    Je suis désolé, mais ce n'est pas un rappel au Règlement; c'est une question de débat. M. Albas a la parole.
    Monsieur Albas, allez-y, je vous en prie.
    Comme je le disais, monsieur le président, je ne veux pas que ça devienne personnel, mais je crois sincèrement que le Canada arrive à un point crucial de ses interactions avec le gouvernement chinois.
    N'est-il pas de notre devoir de nous occuper des 300 000 Canadiens qui vivent à Hong Kong? Ne sommes-nous pas aussi redevables aux gens qui se sont battus pour les droits de la personne, pour la démocratie et pour l'espoir que nous pouvons nous entendre et collaborer? Ne croyez-vous pas que, si nous refusons d'agir, de peur que la Chine réplique avec des sanctions à quoi que nous fassions ou même si nous laissons échapper un murmure de reproche au gouvernement chinois, cela pourrait porter préjudice à ceux que le gouvernement chinois a déjà maltraités et pris en otage?
    J'aimerais connaître votre avis.
    Je suis navré de voir que vous semblez interpréter mes remarques comme un haussement d'épaules ou un manque d'intérêt, car rien n'est plus faux. Amnistie internationale travaille sans relâche pour intervenir face aux violations des droits de la personne commises en Chine et à Hong Kong. Nous travaillons de manière très active sur les cas de Michael Kovrig et Michael Spavor, notamment en communiquant régulièrement avec leur famille pour discuter des possibilités stratégiques. J'aimerais donc corriger les raisons pour lesquelles vous croyez que nous ne sommes pas préoccupés à propos de la situation sur le terrain.
    Ce que j'essaie de faire valoir, manifestement, en ce qui a trait aux interventions et aux stratégies les plus efficaces et les plus constructives à l'avenir, c'est qu'il est essentiel que le Canada tienne compte d'un large éventail de conséquences et de répercussions. Cela suppose bien sûr d'évaluer la possibilité que l'une de nos actions puisse accroître le risque pour Michael Kovrig et Michael Spavor. Je n'ai pas dit qu'il ne faut rien faire, mais il s'agit d'un aspect dont le gouvernement doit tenir compte. Nous devrions également évaluer s'il est utile ou efficace pour nous de faire cavalier seul pour prendre une mesure particulière ou si nous devrions réellement investir notre énergie à trouver d'autres partenaires afin que nous puissions faire avancer les choses en collaboration. Tout est une question de...

  (1330)  

    D'accord. Je vous suis reconnaissant de soulever cet aspect. Je crois que votre organisation a fait de l'excellent travail. Je pense simplement que nous devons remettre en question cette hypothèse sous-jacente selon laquelle, si nous faisons quoi que ce soit ou que nous nous exprimons, on nous portera préjudice en tant que pays ou en tant que Canadiens. C'est toujours une menace, mais je pense qu'il est encore plus grave de laisser les gens intimider notre pays et nos citoyens, que ce soit à l'étranger ou chez nous.
    À ce sujet, monsieur, vous avez dit plus tôt qu'il se passe certaines choses à l'échelle nationale. Nos propres organismes de sécurité sont, selon moi, très sensibles aux menaces qui se posent à nos citoyens. Vous avez dit qu'il y avait certains éléments de base que le présent gouvernement ou les gouvernements antérieurs n'ont pas mis en place pour contrer l'ingérence étrangère. Pouvez-vous nous en dire plus sur le sujet?
    Je transmettrai assurément le rapport au Comité afin que vous puissiez le consulter plus en détail. L'un des aspects que nous avons soulignés concerne le fait que, lorsque des personnes subissent ce genre de menaces, ce qui arrive fréquemment, comme je l'ai dit, qu'il s'agisse de menaces de violence et de violence sexuelle ou de menaces à la sécurité des membres de la famille à l'étranger, il n'est pas clair du tout vers qui elles doivent se tourner. Elles s'adressent à la GRC, et on leur dit qu'il s'agit d'une affaire policière municipale. Elles s'adressent aux forces policières municipales, et on leur dit qu'elles devraient s'adresser au SCRS. Puis le SCRS leur dit qu'il s'agit d'une question de diplomatie et qu'il faut le signaler à Affaires étrangères Canada.
    Cela ne mène nulle part. Il faudrait tout regrouper en un seul endroit cohérent de sorte que le gouvernement et les organismes concernés puissent réellement brosser un portrait clair de la situation et intervenir de la bonne façon à l'avenir. Ce sont des mesures aussi simples que cela que nous devons mettre en place.
    M. Dan Albas: D'accord. Merci beaucoup.
    Merci, monsieur Albas...
    Je veux simplement m'assurer que cela figure dans le compte rendu, monsieur le président. En tant que parlementaire, je veux...
    Je suis désolé, monsieur Albas. Ce n'est plus à vous de parler. Je suis certain qu'il y aura du temps pour débattre et parler d'autres enjeux à l'avenir, et bien sûr, nous établissons cette distinction importante.
    Nous allons maintenant donner la parole à Mme Zann pour cinq minutes.
    Merci beaucoup.
    Je remercie les témoins.
    J'apprécie beaucoup Amnistie internationale. J'en ai déjà été membre pendant de nombreuses années. Vous faites de l'excellent travail. Merci beaucoup. Continuez.
    Le gouvernement du Canada a déjà qualifié la loi sur la sécurité nationale imposée par la Chine à Hong Kong comme une violation des obligations internationales. Le ministre des Affaires étrangères, François-Philippe Champagne, a annoncé que, dorénavant, le Canada n'établirait plus de distinction entre Hong Kong et la Chine en ce qui concerne l'exportation de biens de nature délicate et il ne permettra plus l'exportation d'articles militaires de nature délicate vers Hong Kong. Le Canada suspend également son traité d'extradition avec Hong Kong.
    Selon vous, monsieur Neve, quelles répercussions auront ces mesures sur la situation à Hong Kong et sur les relations sino-canadiennes? À votre avis, quelles mesures supplémentaires précises le gouvernement du Canada devrait-il adopter pour préserver l'autonomie et les libertés politiques de Hong Kong et pour appuyer les gens qui cherchent à faire progresser la démocratie à Hong Kong?
    Je sais que c'est une question dense, mais nous avons peu de temps.
    Merci beaucoup. C'est toujours un plaisir d'échanger avec un membre d'Amnistie.
    Oui, les mesures qu'a prises le Canada jusqu'à présent comptent et sont bien accueillies. Je crois que nous avons tous, d'une certaine manière, fait allusion à la suspension de l'entente d'extradition et au renforcement des mesures de contrôle à l'égard des transferts militaires et autres transferts de nature délicate, et constaté que cette question de sanctions découlant de la loi de Magnitski, par exemple, est en jeu. Tout cela a de l'importance, et nous devrions continuer d'examiner ce que nous pouvons faire de plus, même de manière bilatérale.
    J'aimerais revenir sur le point que j'essaie de faire valoir: je pense que la valeur du Canada repose en bonne partie sur le fait d'adopter véritablement ce genre de mesures, entre autres, de manières multilatérales. Aux fins de l'ordre international, ce ne doit pas être uniquement les mêmes pays qui exercent constamment des pressions sur la Chine, ce doit être un groupe plus large et plus imposant. Je crois que le Canada a des aptitudes réelles à offrir à cet égard.
    En ce qui a trait aux mesures très concrètes, dans ma liste de cinq mesures, j'insisterais sur les deux qui sont possiblement les plus immédiates et les plus concrètes. La première est la recommandation que j'ai mise en évidence quant à la situation des réfugiés: il faut se préparer au fait qu'il pourrait y avoir une augmentation du nombre de personnes qui demandent l'asile au Canada; il ne faut pas seulement être prêt à l'offrir en tant que pays, mais nous devons aussi préparer une intervention internationale si jamais ce nombre devient très élevé. Le deuxième concerne la situation des militants au Canada qui reçoivent des menaces.

  (1335)  

    Merci.
    Je sais que le gouvernement de l'Australie a fait l'annonce de nouvelles ententes de visas, qui donneront accès à la résidence permanente aux détenteurs de passeports de Hong Kong munis d'un visa de travailleurs qualifiés temporaires ou d'un visa d'étudiants diplômés. Le gouvernement du Royaume-Uni a créé un nouveau mécanisme d'immigration afin de permettre à environ 2,9 millions de ressortissants britanniques de Hong Kong de présenter une demande pour un visa dont la durée peut aller jusqu'à cinq ans. Après ce temps, ils peuvent présenter une demande de statut de résident, puis de naturalisation, ce qui me semble extrêmement intéressant.
    Que savons-nous actuellement au sujet du nombre de militants de la démocratie et de personnalités politiques qui cherchent à quitter Hong Kong? Seront-ils autorisés à partir ou est-ce que leur passeport sera confisqué?
    Je me demande si Mme Richardson en sait plus sur la question que moi.
    Il est difficile d'obtenir des chiffres ou des listes. Ces décisions sont prises très rapidement, sous l'effet de la contrainte et sous toute réserve. Je peux vous dire que nous avons encouragé les gens qui demandent refuge à communiquer avec les gouvernements qui, selon nous, se mobiliseront rapidement pour les aider, et cela inclut le Canada.
    J'ajouterais rapidement un autre élément pour ce qui est des exportations, des ventes et des restrictions. Nous avons fait beaucoup de travail sur le recours abusif aux technologies de surveillance à l'échelle de la Chine au cours des dernières années, notamment la biométrie, l'intelligence artificielle, pour n'en nommer que quelques-unes. Je pense qu'il incombe réellement aux gouvernements touchés par ces problèmes de penser à limiter l'exportation de technologies ou de services qui favorisent la surveillance, laquelle viole les droits de la personne, et d'examiner très attentivement les types de partenariats de recherche ou d'investissements faits par les entreprises ou les institutions chinoises au Canada auprès d'établissements universitaires ou simplement en tant que fournisseurs de produits et services. Je pense qu'il y a beaucoup à faire à ce chapitre.
    Merci beaucoup, madame Richardson.
    Merci, madame Zann.
    Nous allons maintenant écouter M. Genuis pendant cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie les témoins.
    Je vais commencer par appuyer les propos de M. Albas au sujet de la diplomatie des otages. Je pense que si nous tenons compte des concessions en matière de politique en réaction à la diplomatie des otages, nous contribuons alors à l'expansion massive de la diplomatie des otages et nous limitons également notre capacité de prendre toute mesure contraire aux intérêts de l'État chinois. J'encourage vivement les membres du Comité à prendre des décisions au sujet de ce qui est juste et de ce qui est dans notre intérêt stratégique afin de nous protéger et de ne pas être victime de ce genre de diplomatie des otages.
    Monsieur Neve, j'ai été très surpris par vos commentaires au sujet de l'inaction du gouvernement au chapitre de l'ingérence d'un pays étranger. Je suis impatient de lire le rapport de suivi écrit à ce sujet, et j'espère que, en tant que Comité, nous serons en mesure d'étudier davantage la question et de formuler des recommandations particulières. Je sais que d'autres comités, peut-être le Comité de la sécurité publique et le Comité de surveillance des activités du renseignement, se sont penchés sur la question de l'ingérence d'un État étranger et sur la façon dont cela touche les Canadiens ainsi que leur réaction.
    Quant au volet immigration de la question, ce qui me préoccupe grandement, c'est le risque que l'État chinois prenne des mesures pour empêcher l'immigration et le retour au Canada de citoyens canadiens. Nous avons déjà eu un son de cloche à cet égard en ce qui a trait à la politique gouvernementale du Royaume-Uni et à une réponse de la Chine. Quelle est la probabilité selon vous? Comme nous avons demandé au gouvernement du Canada d'établir un plan pour favoriser la réunification des Canadiens et pour gérer la question de l'asile, que pourrait faire la Chine et que pourrait faire le Canada pour assurer la réunification et l'octroi de l'asile en réaction aux contre-mesures?
    Madame Richardson, vous pourriez commencer, puis nous céderons la parole aux deux autres intervenants par la suite.

  (1340)  

    Bien sûr. Quant à la question de savoir ce qu'il faut faire pour protéger les citoyens, le gouvernement chinois ne reconnaît pas la double citoyenneté. D'un point de vue pratique, je pense que la chose la plus urgente à faire est d'évaluer le statut des citoyens à double nationalité à Hong Kong, c'est-à-dire si c'est leur statut à Hong Kong qui a été pris en considération plutôt que leur statut canadien à leur arrivée à Hong Kong. Je ne sais pas quels mécanismes sont en place pour modifier le système, mais à tout le moins, le gouvernement canadien peut faire valoir une revendication un peu plus importante à l'égard de ces personnes au moment de défendre leurs intérêts.
    Je pense qu'il faut faire comprendre très clairement à Beijing que tout effort visant à empêcher les gens de quitter le pays ou de se réunir avec les membres de leur famille serait un enjeu de la plus haute importance. Rappelons que le gouvernement chinois a détenu et gardé pendant des décennies des citoyens d'autres pays et a simplement refusé de reconnaître leur citoyenneté et, par conséquent, a miné la capacité des représentants de ces autres gouvernements de communiquer avec eux.
    Oui, pour nous concentrer sur cet aspect, croyez-vous qu'il existe un risque raisonnable que le gouvernement chinois puisse, à grande échelle, empêcher les citoyens canadiens de Hong Kong de rentrer chez eux, particulièrement s'ils voyagent à titre de citoyens de Hong Kong?
    Il est difficile de prédire cela, mais quelques hauts fonctionnaires ont évoqué cette possibilité, peut-être pour mettre à l'épreuve la capacité d'intervention. C'est la raison pour laquelle je crois qu'une réponse sans équivoque est importante. Si on se penche sur la façon dont les autres personnes ayant une double nationalité que le gouvernement chinois voulait contrôler ont été traitées, les résultats ne sont pas réjouissants.
    D'accord.
    Monsieur Neve, j'aimerais savoir ce que vous en pensez.
    J'allais soulever certaines des mêmes questions que Sophie.
    J'ajouterais que, compte tenu de ce contexte de préoccupations concernant le fait que la Chine n'est pas disposée à reconnaître la double nationalité — et, bien entendu, nous le voyons dans le cas d'Huseyin Celil, depuis maintenant 14 ans — selon moi, si on ajoute à cela une couche d'arbitraire, la préoccupation très réelle tient au fait que ce pourrait bien être les personnes ayant la double nationalité qui courent le plus grand risque, qui sont les moins susceptibles de voir leur citoyenneté canadienne reconnue. Il pourrait y en avoir d'autres, qui ne suscitent pas beaucoup d'intérêt politique ou autre, qui pourraient partir en douce.
    Il faudra établir une stratégie très complexe, multilatérale — encore ce terme — et comportant plusieurs niveaux à cet égard.
    Merci.
    Monsieur Keram, pour le temps qu'il reste, voulez-vous vous prononcer brièvement là-dessus?
    Vous disposez de 15 secondes.
    Bien sûr. Je pense qu'il est très important que l'on prenne des mesures, car je crains que, s'il s'agit d'un risque, plus tard, il se transformera en menaces de la part du parti communiste chinois. Nous ne voulons pas voir des milliers de Michael se faire prendre puis être détenus à Hong Kong ou en Chine continentale afin de servir de levier vu les ambitions politiques et les stratégies géopolitiques du parti communiste chinois, lesquelles finissent par menacer la liberté et la démocratie au Canada également.
    Merci beaucoup, monsieur Keram.
    Je vous remercie, monsieur Genuis.
    Le risque pour des milliers de Michael est très bouleversant. Merci.
    Monsieur Genuis, votre temps de parole est écoulé.
    Les cinq prochaines minutes seront partagées entre Mme Yip et M. Dubourg, si je ne me trompe pas.
    Allez-y, madame Yip.
    Je vous remercie d'être présents et d'avoir parlé aussi clairement des droits de la personne.
    Oui, je partagerai mon temps de parole avec M. Dubourg.
    Tout le monde peut répondre à mes questions.
    Concernant les arrestations de militants étudiants, au titre de la Loi sur la sécurité nationale, en raison de publications dans les médias sociaux, Nicholas Bequelin, directeur pour la région Asie et Pacifique à Amnistie internationale, a affirmé ce qui suit :
que ces quatre jeunes gens risquent d’être condamnés à une peine d’emprisonnement à perpétuité sur la base de billets publiés sur les réseaux sociaux met en évidence le caractère draconien de la Loi relative à la sécurité nationale. L’idée selon laquelle n’importe qui peut désormais être emprisonné pour avoir exprimé ses opinions politiques sur Facebook ou sur Instagram va faire trembler toute la société à Hong Kong.
    Nous apprenons que ces étudiants se sont fait saisir leur ordinateur et leur téléphone et que, sous le régime de cette nouvelle loi, ils peuvent être contraints à répondre à des questions. Pouvez-vous formuler d'autres commentaires sur la portée de cette loi et sur le risque qu'elle pose pour les libertés des citoyens de Hong Kong? En outre, aura-t-elle pour effet d'étouffer et d'arrêter l'élan de protestations?

  (1345)  

    Je pense que la portée est grande et que c'est exactement à cause de son libellé intentionnellement vague que des situations comme celles dont nous avons parlé dans le communiqué de presse se produisent. Il ne s'agit pas que de prédictions concernant ce qui pourrait se produire. C'est en fait ainsi que les choses se déroulent.
    Je suppose que la chose que je soulignerais, même si, bien entendu, nous sommes profondément préoccupés en raison de ce qui est arrivé à ces quatre personnes — et Amnistie, Human Rights Watch et d'autres organisations suivront certainement la situation de près —, selon moi, nous sommes tout aussi préoccupés au sujet de ce que nous appelons souvent son effet paralysant.
    Il ne s'agit pas que des sanctions et des châtiments que subiront les quatre personnes en cause. Il suffit de penser aux nombreux milliers d'autres personnes qui s'autocensureront, qui ne communiqueront pas leur point de vue dans les médias sociaux et qui n'afficheront pas de bannières publiques parce qu'elles ont entendu parler de ce qui est arrivé à ces quatre personnes, et qu'elles sont tout simplement très, très craintives. Il s'agit en réalité de l'intention principale de ce genre d'initiative.
    Comment les gens de Hong Kong peuvent-ils encore montrer leur dissidence? Ce sera difficile.
    Selon moi, parmi les gestes les plus évocateurs qui ont été posés depuis l'entrée en vigueur de la loi, on compte des événements comme des gens qui sont descendus dans les rues ou les membres du Conseil législatif qui ont brandi des morceaux de papier vierge comme pour dire: « nous prenons la parole, mais nous n'utiliserons pas les mots qui pourraient entraîner notre arrestation; toutefois, nous ne laisserons pas passer l'occasion de poser ce geste. »
    Par ailleurs, je veux relier très rapidement quelques éléments ensemble, afin de rappeler à votre groupe que nous avons rédigé un texte, l'an dernier, au sujet de l'un de vos collègues, la députée Jenny Kwan, dont les publications sur WeChat au sujet des manifestations pour la démocratie de Hong Kong ont été censurées.
    Histoire de vous avancer encore plus, pouvez-vous nous parler du statut des réfugiés, des demandeurs d'asile et des migrants qui cherchent à quitter Hong Kong en ce moment, y compris des difficultés ou des obstacles auxquels ces personnes pourraient faire face? Courent-elles le risque d'être arrêtées sous le régime de cette nouvelle loi, pendant qu'elles tentent de quitter Hong Kong?
    Madame Richardson?
    Nous n'avons pas de chiffres particuliers concernant le nombre de personnes qui tentent de partir, mais, selon moi, si je puis donner une réponse très générale, les gens sont forcés de faire des calculs très difficiles au sujet des effets qu'aura la loi sur leur vie, à savoir si leur départ pourrait attirer l'attention non souhaitable des autorités sur les membres de leur famille qui resteront en Chine, de se demander s'ils ont les moyens d'émigrer et ce qu'ils feraient dans un autre pays.
    Je pense que c'est aussi souvent un choix très difficile à faire pour les gens que de décider de demander l'asile plutôt que de tenter de trouver un genre de statut qui leur laissera la possibilité de retourner en Chine, si ce retour est souhaitable pour je ne sais quelle raison. Je pense qu'en ce sens, certains des éléments qu'a soulevés M. Neve plus tôt lorsqu'il parlait de préciser les possibilités qui s'offrent aux gens, les statuts qui leur sont offerts, ce qui pourrait être accéléré et s'il s'agit essentiellement d'un sens unique seraient extrêmement utiles pour les personnes qui réfléchissent aux compromis qu'ils vont faire.
    Je vous remercie.

[Français]

    Nous avons seulement 30 secondes.
    Monsieur Dubourg, vous avez la parole.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    J'aimerais d'abord prendre le temps de saluer les témoins et de les remercier de leurs présentations et du travail qu'ils font.
    La question qui me préoccupe est la suivante. M. Neve a parlé de recommandations, et les gens qui faisaient partie du groupe de témoins précédent nous ont parlé des menaces qu'ils recevaient. Mme Richardson a proposé la création d'un poste au sein du Cabinet.
    Monsieur Neve, pourriez-vous nous dire brièvement si cela pourrait être utile?
    Je m'excuse de vous interrompre, monsieur Dubourg, mais il ne reste malheureusement plus de temps pour la réponse.
    Monsieur Bergeron, vous avez la parole pour deux minutes et demie.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Je faisais référence, il y a quelques instants, à l'incarcération de M. Jimmy Lai. Cela est extrêmement préoccupant.
    Nous avons vu précédemment que les entreprises GAFA, les grandes entreprises du Web, avaient réagi au resserrement du contrôle à Hong Kong. Par exemple, Apple a fait marche arrière, alors que Facebook semblait vouloir maintenir ses activités telles quelles.
    Au-delà des contrôles qui sont déjà effectués par les autorités chinoises sur les différents médias sociaux, devons-nous nous attendre à davantage de contrôles au cours des prochains jours et des prochaines semaines? Verrons-nous les entreprises GAFA qui exercent présentement des activités à Hong Kong adopter davantage de compromis?

  (1350)  

[Traduction]

    Je suis vraiment désolée. Je vais devoir demander à quelqu'un qui parle français de répondre à cette question. Je ne comprends pas cette langue, et je ne reçois pas l'interprétation.
    Monsieur Neve, pouvez-vous vous en charger?
    Je n'ai pas entendu. Avez-vous formulé un commentaire, madame Richardson?
    J'espérais que quelqu'un qui parle français pourrait répondre à cette question. Je ne parle pas la langue, et je ne reçois pas l'interprétation, alors je ne suis pas certaine de savoir quelle était la question précisément.
    La possibilité que nous observions une intensification progressive de la répression dans les médias sociaux, sur Facebook et ainsi de suite suscite des préoccupations.
    Je pense que la réponse courte est « oui ». Il s'agit manifestement de l'une des intentions très précises de l'adoption d'une loi aussi vaste que celle-ci. Selon moi, nous constatons déjà que certaines des mesures initiales consistaient tout à fait à s'en prendre à des gens. Le cas des quatre jeunes militants qui a été souligné dans la question de Mme Yip, par exemple, concerne des publications sur Facebook. Nous verrons de plus en plus de cas comme ceux-là, et c'est très préoccupant.
    Je suis entièrement d'accord avec M. Neve à ce sujet.
    Merci beaucoup.

[Français]

    Je vous remercie, monsieur Bergeron.
    Monsieur le président, je veux simplement vous signaler que mon temps de parole a été réduit à cause des problèmes d'interprétation. Je ne pensais pas que vous alliez le retrancher du temps de réponse des différents témoins.
    J'ai ajouté environ 15 secondes, monsieur Bergeron.
    À mon avis, cela correspondait bien au temps que cela a pris. J'ai fait de mon mieux pour être équitable envers tout le monde.

[Traduction]

    Nous cédons maintenant la parole à M. Harris.
    Vous disposez de deux minutes et demie.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Je veux seulement poser une question générale à M. Neve et peut-être aux autres témoins.
    On s'entend sur le fait que la Chine a une terrible réputation à cause de son système judiciaire inapproprié et de l'absence d'équité et de respect des droits de la personne en général. Avons-nous affaire à quelque chose de différent, d'un point de vue quantitatif, dans le cas de la loi sur la sécurité spéciale de la Chine, qui requiert une attention spéciale supplémentaire, ou bien faut-il prendre des mesures face au comportement qui est adopté?
    La deuxième question donne suite à ce que M. Neve a laissé entendre au sujet de l'application inadéquate des lois à l'intérieur du Canada dans les cas d'ingérence. Nous faut-il une intervention législative en plus d'amener les autorités à assurer une coordination plus solide? Par exemple, M. Mulroney a proposé un registre des agents étrangers, entre autres choses. Si vous vouliez bien formuler un commentaire à ce sujet, ce serait apprécié.
    En ce qui concerne la question de savoir si une réforme législative est nécessaire pour réagir aux préoccupations ici, au Canada, il s'agit de l'un des éléments que nous avons signalés dans le rapport que je vous ferai parvenir. Les auteurs du rapport n'ont pas pris position quant au fait qu'une réforme législative particulière est nécessaire. Nous avons souligné certains exemples d'autres pays, dont l'Australie, par exemple, où des lois vont au-delà de celles dont nous sommes dotés, au Canada, et elles pourraient offrir davantage de recours pour les personnes qui ont vécu ce genre de situation; par conséquent, je pense qu'il vaut la peine d'étudier cette possibilité.
    Pour ce qui est de savoir si cette loi sur la sécurité nationale change la donne ou si elle est différente, d'un point de vue qualitatif, je pense qu'elle change manifestement la donne pour les gens de Hong Kong. Toutefois, le fait est qu'il existe de telles lois depuis longtemps en Chine continentale, et je pense que nos trois organisations ont effectué des signalements concernant toutes les violations qui découlent de ces lois.
    J'ajouterai simplement qu'à bien des égards, la Loi sur la sécurité nationale n'est pas distincte, si on la compare à d'autres lois de la Chine continentale. Toutefois, n'oublions pas que Hong Kong est une administration qui a joui pendant longtemps d'un système judiciaire indépendant et hautement professionnel qui protège les droits à un procès équitable, qui était doté de procureurs respectés et dont les forces de l'ordre étaient fiables et faisaient un travail incroyable de collecte d'informations. Beaucoup de ces choses ont commencé à changer au cours des dernières années, et la Loi sur la sécurité nationale est vraiment en train de démanteler ce système.

  (1355)  

    Merci beaucoup.
    Il nous reste cinq minutes, et elles sont destinées à Mme Alleslev.
    Ma question s'adresse à Mme Richardson, car j'estime aussi que la suggestion de position à l'échelon du Cabinet est vraiment d'une importance cruciale.
    Pourriez-vous nous donner plus de détails au sujet de la nature de votre concept, et même peut-être aller jusqu'à lui donner un titre, afin que nous puissions tenir un genre de brève discussion sur ce dont il pourrait s'agir?
    Je n'ai pas encore trouvé de titre. Je promets de faire un suivi à cet égard.
    Je pense qu'en réalité, l'idée se reflète dans un grand nombre des fils de notre conversation. Il n'est plus simplement question de violations des droits de la personne à Hong Kong, des menaces auxquelles font face les Ouïgours ou des défis pour la société civile en Chine. Il est également question des genres d'abus qui découlent de la politique gouvernementale chinoise ou de mesures prises dans d'autres pays, dont le Canada.
    Ni le gouvernement canadien ni aucun autre ne compte une instance ultimement responsable. Laissez-moi l'affirmer clairement: il ne s'agit pas d'une critique du Canada ni d'une suggestion que nous n'adresserions qu'au Canada. Nous la formulerons auprès de divers gouvernements, surtout ceux qui ont des liens incroyablement complexes, profonds et étroits avec la Chine, et je parle des relations non seulement avec le gouvernement chinois, mais aussi avec des pays qui ont des communautés de personnes d'ascendance chinoise ou de personnes qui s'intéressent à la Chine.
    Je pense que les gouvernements ne reconnaissent pas que ces personnes sont menacées et que d'autres types de menaces pesant sur les gens dans leur propre pays découlent de la politique gouvernementale chinoise. Comme l'ont documenté de façon très éloquente M. Neve et les gens d'Amnistie — et selon notre expérience lorsque nous nous sommes attaqués à certains enjeux —, il est très difficile pour une personne qui se trouve au Canada et qui est harcelée par le gouvernement chinois de déterminer ce qu'elle est censée faire à ce sujet. Le fait de hausser les épaules ou de s'envoyer la balle d'un organisme au suivant n'est pas une solution gratifiante et, en réalité, je pense que l'absence d'intervention ne fait qu'encourager encore plus ce genre de comportement.
    Nous avons fait beaucoup de travail au sujet des universités au Canada, aux États-Unis, en Australie et au Royaume-Uni, et de leur capitulation sous la pression du gouvernement chinois, ou il est probablement plus exact de dire: « leur défaut de respecter leurs principes de liberté et d'indépendance universitaire » lorsque d'importantes sommes d'argent du gouvernement chinois ou d'entreprises étatiques sont en jeu ou que des flux de revenus essentiels prenant la forme d'étudiants étrangers de la Chine sont en jeu. On a beaucoup tendance à laisser courir et à dire: « eh bien, peut-être que nous trouverons une solution à ce problème ou qu'il changera au fil du temps » et, à mon avis, il s'agit généralement du problème de beaucoup de gouvernements et de leurs politiques liées à la Chine depuis les 20 dernières années. Les gens ont tergiversé et se sont protégés, et n'ont pas réellement reconnu le fait qu'il s'agit d'un régime autoritaire extrêmement abusif qui ne garde pas les abus à l'intérieur de ses frontières et qui mène de plus en plus ces opérations à l'étranger, notamment en affaiblissant les institutions qui protègent les droits partout dans le monde.
    J'envisagerais un système qui tire sur toutes ces ficelles en même temps et permet des interventions intérieures, bilatérales et multilatérales pour régler ces divers types de problèmes.
    Je veux approfondir juste un peu plus cette question.
    Serait-il juste de qualifier le régime de la Chine dans le sens qu'il adopte certainement une approche pannationale pour atteindre les objectifs qu'il s'est fixés au moyen de la Loi sur la sécurité nationale, de l'ingérence étrangère et de l'affaiblissement des institutions multilatérales internationales?
    Dans ce cas, nous devrions aussi adopter une perspective pangouvernementale qui nous permettrait d'étudier la situation du point de vue de la souveraineté, de la sécurité, de l'économie, des universités et des droits de la personne afin que nous établissions ce point de contact central et que nous puissions comprendre l'intégration et l'interdépendance de tous ces éléments et la façon dont ils fonctionnent en coordination. Est-ce juste?
    Je pense que vous venez tout juste de rédiger la description de travail.
    L'approche de Beijing n'est pas pangouvernementale, ce qui donne à penser qu'il s'agit simplement d'une affaire intérieure. Il s'agit d'une approche planétaire.
    C'est juste.
    Selon moi, l'un des besoins les plus urgents pour les gouvernements qui respectent les droits au cours des années à venir sera de cartographier, au moins pour la décennie à venir — ce qui est difficile à faire pour les démocraties —, la façon de faire contrepoids à ces menaces, plutôt que de trouver une solution individuelle, fragmentaire... tel gouvernement faisant ceci, un autre faisant cela. Parfois, des choses se produisent...

  (1400)  

    Pourrais-je affirmer qu'il s'agit non pas seulement d'adopter des lois, mais aussi de les faire appliquer, de même que les politiques et les procédures, et qu'il s'agit aussi des attitudes et des comportements des civils et des entreprises?
    Il s'agit de toutes ces réponses.
    Je n'ai encore rien écrit à ce sujet. Vous me poussez à m'engager à le faire et à vous communiquer mon rapport.
    Je vous prie de le faire, et je vous demanderais, bien entendu, de le remettre au Comité.
    Je vous remercie sincèrement de toute la recherche et de tout le travail que vous avez déjà fait.
    Il n'y a pas de quoi.
    C'est une très bonne façon pour nous de clore la séance.
    Je sais que tous mes collègues seraient du même avis, et nous remercions tous les témoins. Nous sommes très reconnaissants de votre présence aujourd'hui.
    Notre prochaine réunion aura lieu à la même heure, jeudi.
    Je remercie tous mes collègues. La séance est levée.
Explorateur de la publication
Explorateur de la publication
ParlVU