Passer au contenu
Début du contenu

TRAN Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.

Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.

Publication du jour précédent Publication du jour prochain
Passer à la navigation dans le document Passer au contenu du document






Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent des transports, de l'infrastructure et des collectivités


NUMÉRO 005 
l
1re SESSION 
l
43e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 10 mars 2020

[Enregistrement électronique]

  (1530)  

[Traduction]

    Bonjour, mesdames et messieurs. Je déclare la séance du Comité permanent des transports, de l'infrastructure et des collectivités ouverte.
    Avant de passer à l'ordre du jour, j'aimerais que nous profitions de l'occasion pour observer une minute de silence. Comme bon nombre d'entre vous le savent, c'est aujourd'hui le premier anniversaire de la tragédie du vol 302 d'Ethiopian Airlines.
    [On observe un moment de silence.]
     Merci.
    Monsieur Doherty.
    Monsieur le président, j'ai remarqué que dans l'avis de convocation de la greffière pour notre réunion de jeudi, il est indiqué que de 15 h 30 à 17 heures, nous poursuivrons notre étude, et que de 17 heures à 17 h 30, des travaux du Comité sont prévus.
    Compte tenu de l'importance que revêt la question, ainsi que du nombre de témoins que nous avons, je propose que nous prolongions la réunion et que nous nous occupions de nos travaux de 17 h 30 à 18 heures. Ainsi, tous les parlementaires auraient la possibilité de poser des questions aux témoins.
    Merci, monsieur Doherty.
    Je prends cela comme une motion.
    Y a-t-il des questions ou des commentaires?
    Monsieur Sidhu.
    Monsieur le président, j'ai déjà un engagement. Je croyais que la réunion se terminerait à 17 h 30. Quelqu'un viendra à mon bureau à 17 h 45. Je peux annuler ce rendez-vous si vous le souhaitez.
    Y a-t-il d'autres questions ou d'autres commentaires?
    Monsieur Doherty.
    Monsieur le président, il est inhabituel qu'au cours d'une étude, nous réservions de façon arbitraire 30 minutes ou une partie de la réunion à d'autres travaux immédiatement après avoir entendu des témoins. L'objectif de la comparution des témoins, c'est que nous leur posions des questions pertinentes sur leurs témoignages et le sujet à l'étude. Il serait inhabituel que nous entendions leurs témoignages sans avoir la possibilité de leur poser des questions.
    Encore une fois, je fais cette proposition sous forme de motion et j'espère que le Comité l'adoptera.
    Merci, monsieur Doherty.
    Je veux seulement préciser qu'en fait, ce n'est pas inhabituel; c'est parfois ce qui arrive si nécessaire. Cela dit, je vais néanmoins accepter la motion et demander aux membres du Comité s'ils ont d'autres questions à ce sujet.
    Monsieur Berthold.

[Français]

     Je veux renchérir sur ce que mon collègue vient de dire. Il y a trois témoins et on dispose de 30 minutes. Les témoins vont donc venir ici uniquement pour livrer leur présentation. Nous n'aurons aucunement le temps de les questionner. Selon l'horaire, il n'y aura même pas un seul tour de table. Je pense qu'il est tout à fait légitime que nous puissions questionner les témoins et obtenir des précisions sur leur présentation.

[Traduction]

    Merci, monsieur Berthold.
    Y a-t-il d'autres questions ou d'autres commentaires concernant la motion?
    Monsieur Bittle.
    J'essaie de trouver un compromis et un terrain d'entente sur la question, car je sais que des membres du Comité ont peut-être d'autres engagements, qu'ils doivent, par exemple, prendre l'avion pour rentrer à la maison. Apporter des changements à des réservations de vol a un coût, non seulement sur le plan financier, mais sur le plan familial également. Je serai ici vendredi, alors cela ne me pose aucun problème, mais la situation peut être différente pour d'autres membres du Comité.
    Nous pourrions réduire de moitié le temps à consacrer aux travaux du Comité, ce qui donnerait plus de temps aux membres du Comité pour poser des questions et tiendrait compte de ceux qui doivent se déplacer. Je sais que certains d'entre nous ont de longues distances à parcourir.
    Voilà le compromis que je propose, si cela convient à l'opposition.

  (1535)  

    Merci, monsieur Bittle.
    Y a-t-il d'autres questions ou d'autres commentaires?
    Encore une fois, compte tenu de l'importance que revêt le sujet à l'étude et du fait que les témoins font un long voyage pour comparaître devant nous, il est important de ne pas les faire témoigner à la hâte et de réserver le temps voulu pour les questions.
     Merci, monsieur Doherty.
    Y a-t-il d'autres questions ou d'autres commentaires? Je vais mettre l'amendement proposé par M. Bittle aux voix.
    (L'amendement est rejeté.)
    Le président: Nous passons maintenant au vote sur la motion de M. Doherty.
    (La motion est adoptée. [Voir le Procès-verbal])
    Le président: Merci, monsieur Doherty.
    Nous passons maintenant aux travaux prévus à l'ordre du jour. Nous étudions le processus de certification des aéronefs.
    Nous avons le privilège de recevoir des témoins aujourd'hui. Je vous présente ceux qui comparaissent de 15 h 30 à 16 h 30. Nous accueillons tout d'abord M. Sylvain Alarie et M. Gilles Primeau, tous deux ingénieurs, qui comparaissent à titre personnel. De plus, nous recevons des représentantes du Bureau canadien d'enquête sur les accidents de transport et de la sécurité des transports: la présidente, Mme Kathleen Fox; et la directrice des enquêtes aéronautiques, Mme Natacha Van Themsche.
    Bienvenue à tous. C'est un privilège et un honneur de vous recevoir.
    Bien entendu, nous allons tout d'abord écouter vos exposés. Vous disposez de 10 minutes chacun. Les membres du Comité vous poseront des questions par la suite.
     Je ne sais pas qui veut commencer.
    La parole est à vous, madame Fox.
    Bonjour. Je tiens à remercier le Comité d'avoir invité le Bureau de la sécurité des transports du Canada, le BST, à discuter de la certification des aéronefs.

[Français]

     Aujourd'hui, je suis accompagnée de ma collègue Natacha Van Themsche, directrice des enquêtes aéronautiques. Elle détient une vaste expérience, entre autres comme ingénieure aérospatiale et membre des Forces canadiennes depuis plus de 20 ans.

[Traduction]

    Comme de nouveaux membres se sont joints au Comité, je veux prendre un bref moment pour vous expliquer qui nous sommes et ce que nous faisons.
    Le BST a été créé en 1990 par la Loi sur le Bureau canadien d'enquête sur les accidents de transport et de la sécurité des transports. Notre mandat, et notre seul but, consiste à promouvoir la sécurité du transport aérien, maritime, ferroviaire et pipelinier relevant de la compétence fédérale.
    Nous le faisons en procédant à des enquêtes indépendantes, en constatant les lacunes en matière de sécurité et en déterminant leurs causes et les facteurs contributifs, en formulant des recommandations et en publiant des rapports. Autrement dit, lorsqu'un incident ou un accident survient, nous menons une enquête afin de savoir non seulement ce qui s'est passé, mais aussi pourquoi cela s'est produit. Ensuite, nous rendons publiques nos conclusions, afin que celles et ceux qui sont les mieux placés pour prendre les mesures nécessaires — c'est-à-dire les organismes de réglementation et les intervenants de l'industrie — puissent le faire.
    Le BST est un organisme qui mène ses activités indépendamment des ministères et des organismes gouvernementaux. Nous rendons des comptes au Parlement par l'intermédiaire du président du Conseil privé de la Reine pour le Canada. Cela nous permet d'être impartiaux et libres de toute influence extérieure réelle ou perçue.

[Français]

    Il est également important de préciser ce que le BST ne fait pas. Nous ne sommes pas un organisme de réglementation ni un tribunal. Nous n'attribuons et ne déterminons pas les responsabilités civiles ou pénales. Nous ne menons pas d'inspections ni de vérifications. Ces fonctions reviennent aux organismes de réglementation et autres.

[Traduction]

    Quant au sujet d'aujourd'hui, de manière générale, la certification des aéronefs sort du cadre du mandat du BST tel qu'il est défini dans la Loi sur le Bureau canadien d'enquête sur les accidents de transport et de la sécurité des transports. Nous ne pouvons pas certifier les aéronefs ou l'équipement aéronautique. Cette fonction relève plutôt du mandat de Transports Canada. Le BST n'interviendrait dans ce domaine que si, au cours d'une de ses enquêtes, la certification des aéronefs ressortait comme une lacune de sécurité importante. Bien que ce ne soit pas courant, une telle situation s'est produite à quelques reprises. Permettez-moi de vous donner deux exemples qui ont été très médiatisés, pour vous permettre de comprendre comment et dans quelles circonstances cela peut se produire.
    Le 2 septembre 1998, l'avion du vol 111 de SwissAir a quitté New York pour un vol régulier à destination de Genève. Environ 53 minutes après le départ, l'équipage de conduite a senti une odeur anormale dans le poste de pilotage. Un incendie se propageait au-dessus du plafond dans la partie avant de l'avion. Cela a entraîné une succession rapide de défaillances liées aux systèmes de bord. L'équipage de conduite a déclaré une situation d'urgence, mais quelques minutes plus tard, l'avion s'est écrasé au sud-ouest de Peggy's Cove, en Nouvelle-Écosse, causant la mort des 229 personnes à bord.
    L'enquête complexe et exhaustive du BST a permis d'établir de nombreux faits, dont deux causes de l'accident qui touchaient directement la question de la certification. Premièrement, le BST a découvert que les normes de certification des avions en matière d'inflammabilité des matériaux étaient inadéquates, en ce sens qu'elles permettaient l'utilisation de matériaux isolants qui pouvaient s'enflammer, et entretenir et propager un incendie. Deuxièmement, nous avons appris qu'il n'était pas obligatoire d'envisager la possibilité d'une défaillance causée par un incendie lors de l'analyse de la sécurité des systèmes requise pour la certification.
    Le deuxième exemple est celui du 12 mars 2009, lorsque la boîte de transmission principale d'un hélicoptère Sikorsky S-92A de Cougar Helicopters a subi une perte soudaine d'huile. Peu après, l'hélicoptère s'est écrasé dans l'Atlantique à environ 35 milles marins de St. John's, à Terre-Neuve-et-Labrador, causant la mort de 17 des 18 personnes à bord.
    L'enquête subséquente du BST a révélé des problèmes dans le processus de certification de la boîte de transmission principale, notamment le fait que les normes de certification n'exigeaient pas que l'hélicoptère puisse continuer à voler pendant 30 minutes après une perte de lubrifiant de la cuve du filtre à huile, comme cela s'est produit dans cet événement.

  (1540)  

[Français]

     Depuis, d'autres enquêtes du BST ont fait ressortir des lacunes de sécurité, comme la conception et la certification des radiobalises de repérage d'urgence, ou ELT, et la conception des issues de secours et leur caractère fonctionnel en cas d'évacuation d'urgence.

[Traduction]

     Au fil des ans, le BST a diffusé des communications de sécurité liées à la certification, notamment des avis de sécurité et des recommandations du Bureau, et ces communications portaient entre autres sur la capacité d'enregistrement des enregistreurs de conversations de poste de pilotage, ou CVR, les normes d'inflammabilité des matériaux d'isolation mentionnées précédemment, les performances des avions dans des conditions de givrage et l'installation de systèmes avertisseurs de décrochage.
    Dans chaque cas, après avoir formulé une recommandation, nous évaluons la réponse du ministre et nous procédons à une réévaluation annuelle des nouvelles réponses reçues. Nous évaluons les progrès réalisés en vue de réduire ou d'éliminer la lacune de sécurité relevée et nous rendons compte publiquement de ce qu'il reste à faire.
    Je dois souligner une fois de plus que le BST ne participe pas directement au processus de certification. Comme je l'ai dit précédemment, il n'est pas un organisme de réglementation. Son seul objectif est de promouvoir la sécurité des transports en décelant les lacunes de sécurité et en rendant compte publiquement de ce qui doit être fait pour réduire ou éliminer les risques cernés.
    Merci. Je serai ravie de répondre à vos questions le moment venu.
     Merci, madame Fox.
    Qui sera le prochain?
    Bienvenue, monsieur Alarie.

[Français]

    Je vous remercie. C'est un honneur d'être ici.

[Traduction]

    Je suis ingénieur en aérospatiale. Je travaille dans le domaine de l'aérospatiale depuis 30 ans, soit depuis que j'ai obtenu mon diplôme. J'ai commencé à titre de dessinateur et j'ai gravi les échelons. J'ai été concepteur, analyste structurel, ingénieur de projet et ingénieur de système. Jusqu'à tout récemment, j'étais ingénieur en chef de grands systèmes de commandes de vol électriques, et je suis maintenant ingénieur-conseil spécialisé dans le développement de systèmes critiques, comme les commandes de vol, les circuits de carburant et les systèmes hydrauliques.
    Mon approche à l'égard du processus de certification se base principalement sur le point de vue des fournisseurs du système. Je vais vous en parler un peu pour vous aider à orienter vos questions.
    Depuis la fin des années 1990, un processus s'est développé. Les avionneurs qui demandent le certificat de type transmettent les exigences en matière de certification par contrat aux fournisseurs de système. Les fournisseurs de système, selon leur système, négocieront sur la question de savoir quels règlements de Transports Canada s'appliquent à leur système et, tout au long du processus d'élaboration, ils collaboreront avec l'avionneur et, du même coup, avec Transports Canada pour concevoir un système conforme aux règlements. De plus, ils prépareront tous les plans et les produits de familiarisation et de vérification nécessaires à la certification du système sur la cellule et la certification de type elle-même.
    En tant qu'ingénieur en chef, mon rôle consistait à superviser la conception, mais j'étais également responsable de la certification et des coûts, du calendrier et des risques pour les programmes, ce qui crée une dichotomie intéressante où il faut gérer différentes priorités.
    Comme je l'ai dit, lorsque j'examine le processus de certification, c'est davantage dans une perspective ascendante. Dans quelle mesure les systèmes sont-ils conformes? Comment appliquons-nous la Réglementation applicable aux produits modifiés lorsque nous modifions notre système? Comment informons-nous les avionneurs que la modification au système s'en vient? Comment composons-nous avec le changement avec Transports Canada?
    Je serai ravi de répondre à vos questions. Merci.

  (1545)  

    Merci, monsieur Alarie.
    Monsieur Primeau.
    Bonjour, monsieur le président, messieurs les vice-présidents, mesdames et messieurs.

[Français]

    Je m'appelle Gilles Primeau. Je tiens à remercier ce comité de m'avoir invité à comparaître, ce que je fais aujourd'hui en tant qu'individu, ingénieur professionnel et pilote privé.

[Traduction]

     Les problèmes de commandes de vol sont le facteur dominant dans les accidents des 737 MAX de Lion Air et d'Ethiopian Airlines. C'est là que résident mon expertise et mon expérience. En début de carrière, je les ai simulés et j'ai passé des centaines d'heures, notamment dans des simulateurs de vol de niveau D pour des 737-300. Plus tard, pour plusieurs types d'avions, j'ai travaillé à la conception, aux tests et à la certification de commandes de vol réelles, et au compensateur du stabilisateur horizontal en particulier.
    C'est probablement le plus important de tous les systèmes d'aéronef; si son vérin se casse, ou si son contrôleur agit anormalement et que la situation ne peut pas être maîtrisée, on perd l'avion. Cela s'est produit avant les écrasements des 737 MAX; l'avion du vol 261 d'Alaska Airlines s'est écrasé en 2001 à cause du vérin du système, et en 2011, un Falcon 7X a été presque perdu à cause du contrôleur du système.
    Il y a un an aujourd'hui, le deuxième écrasement d’un 737 MAX s'est produit. Ce jour-là, j'ai commencé mon étude indépendante, neutre et volontaire sur les causes de ces accidents. Contribuer à la prévention de tragédies similaires dans l'avenir est devenu pour moi une obligation professionnelle et morale et la meilleure façon de m'assurer que les 346 victimes n'ont pas péri en vain.
    Pour me préparer à la réunion d'aujourd'hui, j'ai lu la transcription de la séance du 25 février à laquelle des dirigeants de Transports Canada en matière de certification ont participé, et je suis d'accord avec eux pour ce qui est de la haute qualité de la surveillance réglementaire et du dossier de sécurité enviable au Canada. De plus, j'approuve l’initiative du Canada quant au besoin de formation sur simulateur de haute qualité, en particulier concernant le MCAS. Mon expérience en tant que pilote, dans trois vols distincts au cours desquels j’ai connu des difficultés spécifiques, dont lors de mon premier vol en solo, m'a absolument convaincu que devant l'inattendu, une bonne formation est la meilleure alliée.
    Je conviens également que l'harmonisation internationale de la réglementation devrait être améliorée. La Réglementation applicable aux produits modifiés en est un bon exemple. Cela pourrait également s'appliquer à l'article 25.1309, le plus important concernant les systèmes d'aéronef.
    Je me demande maintenant s'il pourrait être utile pour chaque autorité nationale de certification qui supervise les avionneurs de son propre pays, d'envoyer en permanence certains de ses propres représentants dans chacun des autres pays dans la même situation. Si chacun agit de bonne foi, la qualité du contrôle de nouveaux développements pourrait être améliorée grâce à la contribution de toutes les parties prenantes.
    Toujours en ce qui concerne le processus de certification des aéronefs, il y a presque neuf mois, j'ai conclu qu'il serait possible d'adopter deux nouveaux règlements.
    Premièrement, en ce qui concerne la Réglementation applicable aux produits modifiés et la soi-disant « clause de droit acquis », aucun privilège de droits acquis ne devrait être accordé si quelque chose est relié, nouveau ou modifié, à un système critique qui a été précédemment certifié. Ce dernier doit alors être certifié de nouveau. Avec cette règle, l'introduction du MCAS aurait forcé la modernisation du compensateur du stabilisateur horizontal.
    Deuxièmement, en ce qui concerne la mise à l’essai — et c'est lié à une recommandation clé du JATR, le Joint Authorities Technical Review —, la mise à l'essai de tout système critique devrait obligatoirement être effectuée de manière intégrée avec tous les systèmes qui y sont reliés, peut-être en vertu de l'article 25.1309. Certains appellent cela des essais au niveau de l'aéronef. En d'autres termes, la mise à l'essai des systèmes critiques de façon isolée ne suffit pas. Avec cette règle, le simple essai d'un capteur d'angle d'attaque défectueux aurait facilement permis de découvrir ses multiples effets, et des modifications à l'architecture du 737 MAX se seraient imposées.
    Les modifications apportées au logiciel MCAS rendront le 737 MAX plus sûr. Cependant, le compensateur du stabilisateur horizontal sera alors devenu le maillon le plus faible de la chaîne, et aucune chaîne n'est plus forte que son maillon le plus faible. J'ai désigné neuf motifs techniques pour justifier la nécessité de moderniser le compensateur du stabilisateur horizontal du 737 MAX.

  (1550)  

    Une autre constatation clé a été qu’un capteur AOA défectueux, en plus de provoquer une activation erronée du MCAS, a également provoqué une forte augmentation des forces de la colonne de commande en raison de la détection de décrochage erronée. Les forces élevées de la colonne, ainsi que les forces élevées de la roue de trim manuel — un problème connu depuis longtemps —, ont rendu extrêmement difficile pour l’équipage du vol ET302 de lever le nez de l’avion, pour troquer de la vitesse pour gagner de l’altitude, ce qu’ils devaient faire pour éviter d’entrer en collision avec des pics locaux. Google Earth près d’Addis-Abeba révèle pourquoi l’équipage du ET302 a demandé au contrôle aérien une altitude de 14 000 pieds. C’est ce qu’il s’efforçait d’atteindre.
    Les conclusions de mon étude ont été compilées dans un document de 44 pages qui a été récemment transmis à Boeing; il contient notamment 24 questions techniques principales, il formule des suggestions visant à rétablir la confiance envers Boeing, et il donne un résumé de ce qui s’est probablement produit dans chaque vol au cours duquel un accident est survenu, sur la base des résultats de mon étude. En raison des liens avec la réglementation et de l’incitatif précité d’harmonisation internationale, la FAA et Transports Canada ont également été mis en distribution de ce document.

[Français]

    Je vous remercie de votre attention et je suis maintenant prêt à répondre à vos questions.

[Traduction]

    Merci, monsieur Primeau.
    Merci à tous pour vos exposés.
    Nous allons commencer par M. Doherty.
    Premièrement, je tiens à remercier les témoins d’être ici aujourd’hui.
    Monsieur Primeau, seriez-vous prêt à présenter aussi vos conclusions au Comité?
    Oui, je suis prêt à le faire, mais de façon confidentielle, car je veux donner à Boeing la possibilité de répondre. Certaines des questions sont assez pointues, alors je veux lui donner la possibilité d’y répondre avant que mes conclusions soient publiées.
    Monsieur Primeau, trouvez-vous étrange que même les manuels de commandes de vol ne mentionnent pas le MCAS, sauf dans les définitions? Même si ces manuels font plus de 1 000 pages, ils ne contiennent même pas cette information.
    Compte tenu des capacités du MCAS, soit qu’il peut prendre le contrôle du vérin de compensateur de stabilisateur, oui, c’est inadmissible. Je pense qu’on ne l’a ajouté au glossaire que plus tard.
    Si vous vous fiez à votre expérience, compte tenu de la taille du fuselage et de la capacité du 737-800 — qui est 38 % plus long et 52 % plus grand et dont le moteur a une poussée qui est 100 % plus élevée que les autres —, croyez-vous qu'il aurait dû être classé comme un nouvel aéronef ou seulement certifié comme un nouveau modèle?
    J’aurais pensé que le système de vérin de compensateur avait dû être révisé. Une des questions que je pose à Boeing est celle de savoir s’il a instrumenté un de ses aéronefs d’essai, s’il a instrumenté le vérin en tant que tel, pour confirmer si la capacité de la force portante convenait à l’aéronef.
    Merci, monsieur Primeau.
    Madame Fox, votre organisme, le NTSB, a-t-il participé, avant les écrasements ou après, à une quelconque enquête concernant la certification du 737 MAX?
    Aux fins de clarification, pour ne pas embrouiller les choses, nous sommes le Bureau de la sécurité des transports, le BST, du Canada...
    Oui, je suis désolé.
    ... ne pas confondre avec le NTSB, qui a fait...
    Je sais de quoi il s’agit. Désolé.
    Non, nous n’avons pas enquêté nous-mêmes sur le MAX. Avant son immobilisation au sol, il n’y avait pas eu de cas semblables impliquant le MAX qui nous aurait poussés à mener une enquête à l’époque.
    Donc, après le premier accident, vous n’avez pas été poussés à examiner la certification du 737 MAX.
    Si vous voulez parler de l’écrasement de l’avion de Lion Air, cet accident faisait l’objet d’une enquête, et comme tout organisme d’enquête sur les accidents, nous souhaitions évidemment beaucoup connaître les conclusions.
    D’accord.
    Comme l’avion d’Ethiopian Airlines qui s’est écrasé n’avait pas été construit, fabriqué, exploité ou enregistré au Canada, notre rôle a été aussi limité que dans le cas de l’accident iranien.
    Merci. Je vais céder la parole à mon...
    Merci, monsieur Doherty.
    Monsieur Baldinelli.
    Merci aux témoins.
    Madame Fox, pour enchaîner sur ce point, en ce qui concerne l’annexe 13 de la Convention relative à l’aviation civile internationale, si des ressortissants canadiens sont au nombre des victimes d’un tragique accident, des experts peuvent être nommés par nos autorités nationales pour enquêter. Êtes-vous en train de dire que le Bureau canadien d’enquête sur les accidents de transport et de la sécurité des transports n’a pas participé à l’enquête sur l’écrasement de l’avion d’Ethiopian Airlines?

  (1555)  

    Étant donné que des ressortissants canadiens ont fait partie des victimes de cet écrasement, notre statut au titre de l’annexe 13 de cette convention se résumait à celui d’« expert ». Après cet accident, nous avons immédiatement essayé de participer à l’enquête. Nous avons pris contact avec l’organisme d’enquête éthiopien et avons travaillé en étroite collaboration avec les organismes centraux de notre propre gouvernement ainsi que les diplomates, mais nous n’avons malheureusement jamais pu... Nous avons même envoyé un enquêteur à Paris pour assister au téléchargement des enregistrements, chose que nous n’avons jamais été autorisés à faire en raison de notre statut limité au titre de l’annexe 13. Cependant, nous avons essayé.
    Pour enchaîner, est-ce que le Bureau canadien d’enquête sur les accidents de transport et de la sécurité des transports demande régulièrement à ses homologues étrangers de le laisser participer à des enquêtes?
    Tout dépend de la mesure dans laquelle il est concerné. Il est clair que s’il s’agit d’un produit fabriqué au Canada, que l’exploitant est canadien ou que l’aéronef est enregistré ici, ou que l’accident s’est produit chez nous, nous avons entièrement le droit, faute de pouvoir mener l’enquête, à tout le moins d’y participer comme représentant accrédité.
    Dans le cas de l’écrasement de l’avion d’Ethiopian Airlines, nous n’avons pas pu aller au-delà du statut d’« expert », bien que nous ayons essayé de nombreuses fois et en passant par de multiples organismes. Au bout du compte, nous avons uniquement reçu des renseignements factuels publiés par l’organisme d’enquête éthiopien sur l’avancement de l’enquête.
    Vous avez aussi mentionné que nous n’êtes pas l’organisme de réglementation et que c’est lui qui est chargé du processus de certification, mais que vous chercheriez à jouer un rôle sur le plan de la sécurité en formulant des recommandations en cas d’accident. Est-ce que cela s’est produit en ce qui concerne le MAX 8?
    Encore une fois, les autres organismes... Par exemple, le National Transportation Safety Board aux États-Unis a mené une enquête et a formulé des recommandations. Nous n’avons pas de rôle officiel à jouer, mais nous suivons les développements de très près.
    Aux États-Unis, le Comité de la Chambre sur les transports et l’infrastructure vient de publier un rapport préliminaire. A-t-on communiqué avec votre bureau pour y prendre part ou pour fournir des commentaires à son sujet?
    Non.
    Merci, monsieur Baldinelli.
    Merci, madame Fox.
    Monsieur El-Khoury, vous avez la parole.

[Français]

     Je vous remercie de votre présence et de l'éclairage que vous apportez à notre comité.
    Ma question s'adresse à MM. Alarie et Primeau: avez-vous rencontré le ministre des Transports, Marc Garneau, et Transports Canada pour leur faire part de votre expertise et de votre point de vue?
    Si votre réponse est oui, quelles principales recommandations avez-vous présentées?
    Comme M. Primeau l'a indiqué, il a commencé à préparer un dossier indépendant. À un moment donné, des questions concernant les commandes de vol et les vérins se sont présentées, et il m'a appelé. Il était aussi question d'une relecture de son travail. J'ai participé à cette activité avec lui. Mon rôle était de soutenir M. Primeau. Je pense que nous sommes en parfait accord sur le dossier. Ensuite, M. Primeau a parlé au ministre Garneau.
    Je vais lui laisser la parole.
    J'ai demandé à rencontrer le ministre Garneau. Je ne me souviens plus de la date exacte. Une audience de 30 minutes m'a été accordée et a eu lieu le vendredi 3 mai, je crois. Au bout de ces 30 minutes, je me suis excusé parce que je n'avais pas encore terminé, mais le ministre m'a dit:

[Traduction]

    « Continuez, je vous prie. »

[Français]

    Je suis resté là à peu près 50 minutes, et M. Garneau m'a demandé si j'étais disposé à aller présenter ce que j'avais trouvé jusque-là à ses experts de Transports Canada, à Ottawa, ce que j'ai accepté de faire.
    Cela a eu lieu le 18 juin. J'ai fait une présentation d'à peu près 65 planches, dont une quarantaine étaient actives. Cela a duré deux heures. On m'a très bien expliqué qu'on ne pouvait pas me donner de rétroaction. C'est normal. Je tiens à respecter pleinement le processus d'investigation. Cependant, on m'a quand même laissé entendre que j'étais sur la bonne piste à certains égards.

  (1600)  

    Est-ce qu'il a été entendu que Transports Canada donnerait suite à vos recommandations?
    J'avais oublié de répondre à la deuxième partie de votre question.
    J'ai formulé les recommandations que je vous ai mentionnées lors de ma présentation. J'ai formulé certaines suggestions, mais je ne savais pas si Transports Canada avait le pouvoir de faire certaines choses, comme demander l'inspection de certaines pièces.
    En ce qui concerne ce que Mme Fox vient de dire, je ne crois pas qu'il y avait beaucoup de pouvoir sur ce plan, mais j'ai fait des recommandations concernant une nouvelle réglementation, celle dont je vous ai parlé.

[Traduction]

    Nous avons compris que les observations de M. Primeau et de M. Alarie n’ont pas encore été prises en compte dans le cadre d’une enquête.

[Français]

     Même en ce qui a trait aux questions et aux recommandations que vous avez envoyées à Boeing, vous n'avez pas eu de réponse. Je pense qu'ici, au Canada, lorsque nos experts envoient un rapport à l'extérieur, il doit être respecté.
    Pouvez-vous expliquer au Comité pourquoi vous n'avez pas eu de réponse?

[Traduction]

    Y a-t-il une raison en coulisses qui fait que Boeing n’a pas pu répondre à vos questions?
    Nous avons posé les questions directement à Boeing par courriel jeudi dernier avant de lui envoyer une copie papier par courrier recommandé. La dernière fois que j’ai vérifié, on n’en avait toujours pas pris connaissance au siège social à Chicago. Le processus par courrier pourrait encore prendre quelques jours. Cependant, la Federal Aviation Administration les avait reçues.
    Croyez-vous que vous allez obtenir des réponses à ces questions et à ces recommandations?
    Je ne peux pas savoir ce qu’on a fait de mes commentaires. Je le respecte, car je respecte le processus d’enquête. Je ne voudrais pas qu’on m’accuse d’avoir essayé de m’ingérer dans quelque chose. Tout ce que j’ai, c’est ma connaissance de la physique. Même si nous ne comprenons pas et n’appliquons pas les notions de physique correctement, malheureusement, les lois de la physique ont toujours raison. Plus tard, nous devrons faire avec les lois humaines devant les tribunaux, et ce n’est pas mon domaine.

[Français]

    Les opinions fournies par les experts sur ces sujets sont contradictoires. Vous êtes des ingénieurs très expérimentés.
    Comment allons-nous évaluer des questions aussi compliquées relatives au génie aéronautique dans un tel cas?
    Si M. Alarie et moi-même avons fait certaines déclarations sur certains systèmes, le 10 novembre dernier, à Découverte, une émission de Radio-Canada, c'est que nous étions certains de ce que nous avions découvert.
    L'équipe de Radio-Canada exigeait aussi de pouvoir corroborer nos déclarations avant de diffuser quoi que ce soit. Alors, nous avons fait appel à un ingénieur du nom de Peter Lemme, qui a travaillé pour Boeing et avec qui j'ai été en contact. Disons que certaines de mes découvertes l'ont surpris. Il m'a dit:

[Traduction]

    « J'y réfléchis encore. »

[Français]

    Cependant, nous allons dans la même direction.

[Traduction]

    Merci.
    Monsieur Barsalou-Duval, vous avez la parole.

[Français]

    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Mes premières questions s'adresseront aux gens du Bureau de la sécurité des transports.
    Tout à l'heure, je me posais une question, et j'ai obtenu la réponse lorsqu'on a dit à un de mes collègues que le Bureau de la sécurité des transports n'avait pas enquêté sur les deux accidents impliquant un Boeing 737 MAX parce qu'on ne lui avait pas permis d'aller sur le site des accidents pour obtenir des éléments de preuve.
    J'aimerais savoir quelle est la procédure habituelle dans de tels cas, parce que, d'une part, ce sont tout de même 18 citoyens canadiens, au total, qui ont été touchés par cet accident, et d'autre part, il y a aussi des Boeing 737 MAX dans les airs chez nous. Nous sommes donc très touchés par ces accidents.
    Premièrement, je vais mettre en contexte l'Annexe 13 à la Convention relative à l’aviation civile internationale de l'Organisation de l’aviation civile internationale, ou OACI. C'est cette annexe qui régit les enquêtes internationales sur les accidents et les incidents aériens. Elle comprend des rôles et des responsabilités très clairs.
     Par exemple, en théorie, le pays où a lieu l'accident devrait être responsable de l'enquête. Ensuite, les pays qui forment l'équipe de l'enquête, c'est-à-dire ceux qui vont mener activement l'enquête sur l'accident, sont l'État d'immatriculation ou de l'exploitant de l'avion, l'État où l'appareil a été conçu et construit, ainsi que l'État où les moteurs ont été conçus et construits. Ces pays jouent un rôle très actif dans l'enquête.
    Dans le cas de l'accident du vol de Lion Air, le Canada ne répond à aucun de ces critères. Le cas du vol d'Ethiopian Airlines est différent. L'annexe dont je parlais stipule que, lorsque des citoyens d'un pays sont à bord d'un avion impliqué dans un accident, ce pays a un statut d'expert. Cependant, ce statut est très limité. En fait, il permet de visiter la scène de l'accident, de recevoir de l'information factuelle qui est prête à être divulguée publiquement par l'État responsable de l'enquête, et finalement, de recevoir une copie du rapport final de l'enquête. C'est ce que l'annexe 13 permet dans ces cas-là.
    Alors, dans le cas du vol de Lion Air, nous n'avons aucun statut, et, dans celui d'Ethiopian Airlines, nous avons le statut d'expert. Cela dit...

  (1605)  

     Merci. Cela répond à ma question.
    Dans le fond, le statut d'expert ne nous donne pas grand-chose de plus que cela ne donne à M. et Mme Tout-le-Monde. On prend l'avion, on va voir les lieux après l'accident et on reçoit les mêmes documents, qui sont publics. Je comprends que cela ne vous donne pas grand-chose.
    Cependant, de son côté, le Bureau de la sécurité des transports aurait-il pu entreprendre des investigations sur les 737 MAX ici après les deux accidents qui sont arrivés? On sait qu'il y en a chez nous.
    Pouvez-vous faire de telles enquêtes? Si oui, pourquoi ne le faites-vous pas?
    Premièrement, notre mandat est d'enquêter sur les événements, et les accidents sont des événements. À la suite de l'accident d'Ethiopian Airlines, il y a eu une interdiction de vol partout dans le monde. Aussi, des enquêtes réalisées par Ethiopian Airlines et par les États-Unis se poursuivaient. En réalité, on n'avait aucun rôle formel à jouer. Comme je vous l'ai dit, on suit de près la tournure des événements.
    Vous avez fait confiance au processus, étant donné qu'on prenait au sérieux ces deux accidents et que d'autres pays allaient vérifier le tout. Vous allez donc suivre cela.
    Oui.
    Je comprends. Je vous remercie des réponses que vous avez données à mes questions.
    J'ai des questions à poser à MM. Alarie et Primeau.
     J'essaie de comprendre ce qui se passe quand on conçoit un tel appareil et qu'on ajoute des systèmes, comme cela a été le cas. Ils n'ont ni indiqué dans le manuel qu'il y avait un nouveau système anticollisions, le MCAS, ni donné de formation aux pilotes à cet effet. En fait, il y a une formation générale d'une heure sur l'appareil qui est effectuée sur un iPad, sans même que le système ne soit mentionné.
    Quand on a un nouveau système comme celui-là, est-ce commun de ne pas le mettre dans le manuel et de ne pas former les pilotes à ce sujet?
    À bord de l'avion, ils auraient appliqué la Réglementation applicable aux produits modifiés.
     Quand ils ont construit le nouvel avion, ils ont été obligés de faire l'inventaire de tout ce qui était neuf à bord. Quand ils ont ajouté le MCAS, ils ont dû établir la criticité du système. Cette dernière aurait été classée comme étant mineure.
     Cela veut dire que, si les pannes de ce système étaient majeures et que le système était défectueux, elles auraient augmenté légèrement la charge de travail des pilotes.
    À mon avis, c'est là que l'erreur a été faite; cela a été mal classé. Ils ont tenu pour acquis, comme le circuit de compensation en général...
    Je vous interromps, car il ne me reste presque plus de temps.
    Si cela a été mal classé, pensez-vous que c'était intentionnel de la part de Boeing pour limiter les analyses ou que c'était une erreur habituelle?
    Si cela avait été classé hasardeux ou plus risqué, ils auraient été forcés de faire de l'entraînement par simulateur. Boeing, qui avait même un accord avec Southwest Airlines, n'a pas voulu le faire. S'il y avait une nécessité de faire de la formation en simulateur, il y aurait un rabais de 1 million de dollars par avion.

  (1610)  

[Traduction]

    Merci, monsieur Primeau.
    Monsieur Bachrach, vous avez la parole.
    Merci, monsieur le président.
    J’aimerais commencer par souligner le premier anniversaire de l’écrasement du vol 302 et offrir mes condoléances aux familles et à toutes les personnes touchées.
    J’aimerais aussi remercier nos témoins d’être ici aujourd’hui.
    Ma première question s’adresse à M. Primeau. Elle porte sur l’harmonisation des processus de certification entre notre pays et les autres. Pendant une réunion précédente, nous avons eu la chance de poser des questions aux fonctionnaires de Transports Canada concernant la feuille de route pour l’amélioration de la validation, dont l’un des buts est de limiter l’étude technique des validateurs dans le cadre de ce processus et de pleinement harmoniser les processus de validation et de certification.
    Comment décririez-vous le processus de certification entre le Canada et les États-Unis? À la lumière des deux écrasements dont nous avons parlé, se demande-t-on si on devrait opter pour une certification commune et chercher à harmoniser les processus?
    Je vais retourner au compte rendu de la réunion du 25 février et réitérer que j’étais d’accord avec les propos qu’ont tenus les fonctionnaires de Transports Canada. Voilà aussi pourquoi je l’ai ajouté en dernier à ma préparation.
    J’envisageais la possibilité d’opter pour une certification commune. Ce serait difficile à avaler. Une étape intermédiaire serait peut-être de dépêcher des experts vers d’autres organismes nationaux de certification et d’essayer de trouver un terrain d’entente avant le début du projet. C’est simplement une idée que j’ai eue.
    Merci pour cette réponse.
    Vous avez aussi parlé brièvement de la clause de droits acquis dans le cas des systèmes qui font l’interface avec des systèmes essentiels auparavant certifiés. Pourriez-vous nous dire dans quelle mesure c’est courant dans notre processus de certification actuel et à quelle fréquence cela se produit?
    Mon dernier emploi était à Seattle, sur l’avion à réaction régional de Mitsubishi, le MRJ. Il y avait une grande équipe dont la seule tâche était d’essayer de retenir des fournisseurs qui tentaient d’appliquer des similitudes de façon à ce que leur système puisse être installé sur l’aéronef sans modification. Il m’arrivait de dire, à la blague: « Essayez-vous de trouver des similitudes avec le Wright Flyer? » C’est extraordinaire.
    Les règles techniques devraient primer. Ce que je veux dire, par là, c’est qu’il faut qualifier, il faut mettre au banc d’essai, et si on a apporté une modification importante à un nouvel aéronef, c’est là que la réglementation applicable aux produits modifiés entre en jeu — les modifications mineures par rapport aux modifications majeures ou les modifications non significatives par rapport aux modifications significatives. Vous serrez les dents et vous les mettez au banc d’essai. C’est incroyable le nombre de discussions sans fin que j’ai vues dans ma carrière. Ils auraient eu intérêt à les mettre au banc d’essai; ils auraient sauvé du temps et des ressources.
    Merci.
    Pour en revenir à votre suggestion selon laquelle pour chaque certification nationale, chaque autre pays pourrait dépêcher les représentants de ses propres organismes de réglementation pour qu’ils y participent, pourriez-vous nous expliquer un peu plus en détail comment on aurait procédé dans le contexte du MAX 8 et comment on aurait pu repérer les lacunes et potentiellement prévenir une catastrophe?
    Les deux recommandations que je fais sont en sus de celle de former une équipe internationale d’experts. Cela dit, dans ce cas, pour essayer de répondre directement à votre question, ce serait l’excellente réputation des Canadiens dans le domaine de l’aérospatiale qui aurait pu être utile.
    Des deux recommandations de nouveaux règlements, la première, qui contient les termes « aucun privilège de droits acquis » aurait dû entraîner la correction automatique du HSTS.
    Merci, monsieur le président.
    Il vous reste deux minutes.
    J’ai une question pour Mme Fox.
    Vous avez mentionné deux autres incidents, soit l’écrasement de l’avion de Swissair et celui du Sikorsky. Vous avez dit que, par la suite, le BST avait diffusé des communications qui se rapportaient au processus de certification. Ces communications faisaient-elles partie de la certification future de ces types d’aéronefs?
    En ce qui concerne l’écrasement de l’avion de Swissair, un peu moins de la moitié des 23 recommandations se rapportaient à la certification et aux normes d’inflammabilité. La plupart d’entre elles ont été adoptées par l’industrie, non seulement aux États-Unis et au Canada, mais aussi en Europe. Les matériaux qu’on utilisait dans les aéronefs ne sont plus permis. Nombre de ces recommandations ont alors été mises en œuvre.
    Quant aux processus de certification utilisés pour le Sikorsky 92A, malheureusement, les mesures que le Bureau souhaitait qu’on prenne n’ont pas encore été adoptées, si bien que cet hélicoptère, par exemple, ne peut pas voler pendant au moins 30 minutes en cas de perte de lubrifiant au niveau du train d’atterrissage.

  (1615)  

    Y a-t-il lieu de dire, alors, que vos préoccupations à cet égard n’ont toujours pas été apaisées?
    Oui, ces recommandations-là sont toujours en suspens.
    Merci, monsieur le président.
    Merci, monsieur Bachrach et madame Fox.
    Passons maintenant à M. Davidson.
    La parole est à vous.
    Merci aux témoins d’être venus.
    J’offre encore une fois mes condoléances aux familles des victimes.
    Je vais d’abord me pencher sur l’aéronef en tant que tel. Ma question s’adresse aux ingénieurs. Diriez-vous que le 737 MAX est un avion stable ou instable? C’est une question importante.
    Faites-vous allusion à l’emplacement des moteurs et à la façon dont on peut redresser l’appareil?
    Oui, il y a eu des changements considérables comparativement au modèle NG.
    Oh mon doux! Lorsqu’ils ont appris qu’ils avaient besoin d’élargir l’enveloppe de protection du MCAS à faible vitesse, c’est à ce moment-là que tout le monde aurait dû arrêter et dire « un instant ».
    Les aéronefs à commandes électriques peuvent contrôler la gouverne de profondeur pour contrôler le tangage de l’avion avec finesse. Grâce aux contrôles, ils peuvent graduellement assurer la stabilité de l’appareil. Si vous n’avez pas d’aéronef à commandes électriques comme le 737, et que la seule surface de contrôle du tangage que vous pouvez contrôler par commande électrique est le stabilisateur horizontal, et un vérin qui le déplace, disons, à un quart de degré la seconde, c’est tout ce que vous avez comme instruments.
    Oui.
    Il faut faire extrêmement attention lorsque vous utilisez une surface à si haut rendement pour faire les mêmes manœuvres que si vous aviez un avion à commandes électriques.
    Certains problèmes de fils sont ressortis. Compte tenu de ce que vous avez étudié et examiné, seriez-vous en mesure de dire si les fils devraient être groupés ou divisés ou si vous vous êtes penché sur la question?
    Oui, cette mesure s’inscrit dans la modernisation du HSTS qui devrait se produire.
    Normalement, nous procédons à ce qu’on appelle une analyse de risque particulière — rupture du rotor du moteur, rupture du rotor du groupe auxiliaire de puissance sur la queue de l’aéronef dans ce cas — et nous disons: « Une lame de ce rotor va se casser dans votre harnais. » C’est la raison pour laquelle il vous faut séparer les signaux pour vous assurer de ne pas éliminer toutes les redondances lorsqu’il y a... Dans le HSTS du 737 MAX, il n’y a qu’un seul moteur pour mettre le vérin en marche, alors ils ont probablement voulu séparer des fils sur le connecteur pour s’assurer qu’en cas de frottement, on ne court-circuiterait pas deux fils qui pourraient lui faire baisser ou lever entièrement le nez de l’appareil.
    Qu’en est-il de la protection contre la foudre? Savez-vous si c’est un facteur dont ils tiennent compte sur le support de moteur, sur le groupe auxiliaire de puissance?
    On le fait habituellement. On devrait le faire par défaut. Vous faites peut-être allusion au 787.
    Il y a beaucoup de choses qui devraient être faites par défaut, mais j'ai l'impression que certaines n'ont pas été faites ici, n'est-ce pas?
    Eh bien, en ce qui concerne les 787, par exemple, ils sont sortis. Les ailes sont faites de matériaux composites. On ne protège pas les réservoirs de carburant contre la foudre de la même façon quand ils sont fabriqués en composites. La règle n'est pas la même. J'ai travaillé à cela sur le MRJ à Seattle, un peu, ainsi que sur le Global 7500.
    Vous savez, les gestionnaires peuvent parfois renverser la décision de l'ingénieur et lui dire: « Vous devez faire ceci ou cela ». Si le gestionnaire n'évolue pas, s'il ne suit pas l'évolution de la technologie, il peut renverser les décisions d'une personne compétente, si bien qu'on se trouvera avec un système pas nécessairement conforme à la réglementation la plus récente.
    D'accord.
    Évidemment, compte tenu de toute l'attention qu'on porte à cet aéronef, disons, s'il devait de nouveau être autorisé de vol, croyez-vous que les pilotes devraient avoir une attestation de vol particulière pour rassurer la population, compte tenu de toutes les modifications apportées au modèle NG? Certains diront qu'elles ne sont pas assez grandes pour mériter une telle exigence, mais dans ce cas précis, pour que le public se sente en confiance, les pilotes devraient-ils avoir une attestation particulière pour pouvoir piloter cet aéronef, compte tenu des modifications apportées, parce qu'il réagit un peu différemment?

  (1620)  

    C'est une bataille qui s'annoncerait très ardue. Je me battrais pour qu'ils aient accès à une excellente formation en simulateur. Si vous souhaitez arriver à quelque chose, c'est peut-être ce que nous devrions viser.
    C'est lié au certificat de type.
    Oui, c'est lié au certificat de type, les lignes aériennes devront maintenir autant que possible le type commun.
    Oui.
    En vol normal, aucun pilote ne devrait s'approcher d'un décrochage dans un 737 Max, à moins d'un imprévu.
    C'est juste.
    Merci, monsieur Primeau et monsieur Davidson.
    Passons à Mme Jaczek.
    Merci, monsieur le président.
    Ma question s'adresse à Mme Fox.
    Notre comité a pour mandat d'étudier le processus de certification des aéronefs au Canada. Nous avons donc vraiment le devoir de veiller à ce que toutes nos institutions canadiennes aient l'occasion de s'exprimer adéquatement quand un aéronef reçoit la certification au Canada, un aéronef que les Canadiens utiliseront. Toute institution concernée de près ou de loin par ce processus doit avoir l'occasion de s'exprimer comme il faut.
    Vous nous avez dit que dans le cadre de votre mandat, vous n'aviez qu'un statut d'« expert » concernant l'écrasement en Éthiopie, ce qui est très limité. Évidemment, il s'agit là d'une tragédie terrible. Des Canadiens sont morts. Que verriez-vous? Aimeriez-vous jouer un plus grand rôle?
    Si vous souhaitez jouer un plus grand rôle, pour vous exprimer et bien comprendre ce qui s'est passé, comment pouvons-nous faire en sorte que le BST puisse jouer un plus grand rôle? Qui détermine les règles, qui décide qui pourra se rendre sur les lieux, entre autres? Recommanderiez-vous que le BST ait ce mandat à l'avenir?
    Si vous voulez parler de participation à une enquête étrangère quand un accident survient en sol étranger, mais que le Canada est directement touché, l'organisme qui établit les normes et recommande des mesures est l'Organisation de l'aviation civile internationale.
    Si l'on fait le parallèle avec l'accident du PS752 en Iran, à l'égard duquel le Canada n'a qu'un statut « d'expert », selon l'annexe 13 de l'OACI, le BST a eu davantage accès aux lieux, aux débris et au bureau d'enquête — bien que celle-ci soit dirigée par l'Iran — qu'il aurait dû y avoir droit à titre d'expert dans ce genre de situation.
    Ce serait vraiment à l'OACI d'apporter des changements pour qu'un pays comme le Canada, s'il a perdu un grand nombre de vies dans un écrasement et qu'il dispose d'une expertise reconnue en la matière, puisse jouer un rôle plus actif dans l'enquête.
    Merci.
    Dans ce cas-ci, même si le BST a joué un rôle limité, publierez-vous un quelconque rapport pour réagir à ce qui aura été fait?
    Normalement, nous ne faisons pas de commentaires sur le rapport d'enquête d'un autre pays. Dans le cas d'Ethiopian Airlines, nous suivons la situation de très près pour voir ce que feront la FAA, Transports Canada et les autres organismes de réglementation avant de remettre l'appareil en service.
    Je le répète, selon notre mandat, nous n'avons pas vraiment de rôle particulier à jouer. Cela dit, il est certain que s'il devait y avoir d'autres accidents impliquant cet aéronef ou un autre, nous essayerions de déterminer si les mesures prises ont été suffisantes ou s'il y a lieu d'en faire plus.
    Vous avez dit être intervenus après l'écrasement des appareils de Swissair et de Sikorsky. Avez-vous publié d'autres rapports au cours des dernières années? Le cas échéant, je présume que Transports Canada a examiné vos recommandations. Pouvez-vous nous parler un peu de la réponse que vous avez reçue?
    Ensuite, si votre organisation n'est pas satisfaite de la réponse de Transports Canada, pouvez-vous publier un autre rapport ou est-ce qu'une autre entité peut le faire?
    Oui, dans le cadre de nos fonctions, nous avons fait de nombreuses recommandations au fil des ans sur la certification de divers aéronefs. Nous parlions justement du Sikorsky S-92, et je précise que des améliorations sont actuellement apportées à cet aéronef pour lui permettre de voler 30 minutes sans carburant. C'est donc une réponse à l'une de nos recommandations.
    Chaque année, nous réévaluons les réponses. Quand nous estimons qu'elles sont pleinement satisfaisantes, nous le disons. Quand il reste des mesures à prendre, nous qualifions la réponse de partiellement satisfaisante ou même d'insatisfaisante. Notre outil ultime, c'est nos recommandations et même notre liste de surveillance, à laquelle nous inscrivons toute question de sécurité qui demeure en suspens.

  (1625)  

    Vos commentaires sont accessibles au public.
    Oui. Tous nos rapports, nos recommandations, nos évaluations et notre liste de surveillance sont publics.
    J'ai une question à vous poser, monsieur Primeau, et j'ose espérer que vous ne la jugerez pas impertinente. Vous nous avons donné énormément d'informations. Je pense que nous l'apprécions tous et que nous comprenons votre position.
    Agissez-vous dans l'intérêt du public? Vous êtes un consultant. Ce rapport a-t-il été financé par qui que ce soit?
    Non.
    Il est totalement...?
    Oui, nous l'avons préparé sur une base totalement volontaire.
    Je vous félicite. C'est excellent.
    Merci monsieur Primeau et madame Jaczek.
    Monsieur Doherty.
    Monsieur Primeau, savez-vous comment Boeing catégorise les changements apportés à la conception du 737 Max 8?
    C'est la grande question qui se pose relativement à la réglementation applicable aux produits modifiés: comment déterminer si une modification est majeure ou mineure?
    Est-ce un changement de niveau 1?
    Oh, je ne connais pas vraiment la nomenclature.
    Vous ne savez pas en quoi consiste un changement mineur ou un changement majeur?
    Normalement — et Sylvain pourra me corriger si je me trompe — si un changement est considéré comme majeur, il apparaîtra sur le certificat de type.
    Est-ce bien cela?
    C'est exact.
    Très bien. Sylvain a examiné le certificat de type.
    Allez-y, Sylvain.
    J'ai étudié le certificat de type, tout l'historique, j'en ai épluché toutes les pages, et je n'ai rien trouvé sur le compensateur de tangage ou le...
    Les stabilisateurs...
    Ils ne l'ont pas mentionné du tout...
    Savez-vous maintenant ou saviez-vous à l'époque où le 737 Max a été certifié...? Vous êtes dans l'industrie. Vous savez qu'il s'agit d'un nouvel aéronef. Je viens moi-même du milieu de l'aviation. J'ai suivi le dossier. Saviez-vous déjà qu'il y avait des problèmes au moment de la fabrication et de la certification? Êtes-vous inquiets d'apprendre aujourd'hui qu'il y avait peut-être des signes d'un problème concernant les indicateurs ou la détection d'un décrochage?
    Personnellement... C'est Boeing, une entreprise qui a certifié déjà beaucoup d'aéronefs. Elle a des règles très claires au Canada et aux États-Unis, qui sont très bien harmonisées. On s'attendrait à ce qu'elle ait fait toute la classification nécessaire comme il se doit et à ce que la certification ait été faite en bonne et due forme. Ce n'est qu'après coup, malheureusement, que nous nous sommes rendu compte qu'elle n'avait pas fait preuve de toute la diligence voulue.
    Il y a un ingénieur qui a dit: « Allons-nous laisser tout le système être contrôlé par un seul senseur, qui pourrait causer des incidents catastrophiques? » J'aimerais savoir qui est cet homme. C'est lui qui devrait prendre les décisions.
    Je vous suis très reconnaissant de votre témoignage ici aujourd'hui.
    Comme beaucoup l'ont mentionné, c'est aujourd'hui le premier anniversaire de la tragédie.
    Il y a des membres des familles des victimes parmi nous aujourd'hui. Il y en a qui suivent probablement nos délibérations de très près. Si nous tenons ces audiences, c'est justement pour obtenir des réponses pour les proches non seulement des Canadiens mais des 346 personnes qui ont perdu la vie dans ces deux écrasements.
    À votre avis, tous les mécanismes de poids et de contrepoids nécessaires ont-ils été appliqués?
    Le système fonctionne que s'il est respecté à la lettre.
    Effectivement.
    Nous avons entendu dire que certains employés de Boeing estimaient que c'était des singes qui gardaient les bananes. Je pense que c'est l'image qu'ils ont utilisée. Nous entendons aussi dire que nous nous sommes fait jouer des tours de Jedi, ce qui est très frustrant, évidemment.
    À tous mes collègues ici présents, j'aimerais dire que j'aimerais beaucoup, dans le cadre de cette étude... Je vous demanderais, monsieur le président... Mais je le ferai plus tard, puisque nous en avons déjà discuté...
    Je pense que vos témoignages d'aujourd'hui apportent beaucoup de profondeur à notre étude. Comme cette séance tire à sa fin, seriez-vous prêts à revenir comparaître devant le Comité si nous vous réinvitions?

  (1630)  

    Certainement. Avec plaisir.
    Oui.
    Merci, monsieur Doherty.
    Passons à M. Bittle.
    Très bien.
    Merci.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Comme il n'y a pas tellement de spécialistes de l'aviation dans la pièce, à part les deux personnes assises ici à l'avant, ce n'est peut-être pas très juste de poser cette question aux représentantes du Bureau de la sécurité des transports, mais moi qui ai étudié non pas les lois de la physique mais les lois de l'homme à l'école de droit, j'aimerais savoir si vous pouvez réagir aux témoignages de M. Alarie et de M. Primeau.
    Non.
    Sans vous prononcer sur leurs conclusions, voyez-vous des lacunes dans le processus qui pourraient expliquer qu'ils tirent ces conclusions?
    Ce sont des experts.
    Je pense qu'il serait totalement inapproprié que je prenne position sur leurs témoignages ou les rapports produits par d'autres organismes, je ne peux que dire que nous y portons attention et que nous suivrons la situation de près.
    Merci beaucoup.
    Monsieur Primeau, avez-vous mentionné avoir simulé certains des problèmes pouvant survenir dans un B737-300 à l'aide d'un simulateur? Ai-je bien entendu?
    Au début de ma carrière, j'ai travaillé comme ingénieur en commande de vol et j'effectuais des simulations de commande de vol d'un 737 à l'aide du simulateur. Cela comprenait de tester toute la logique et le rendement de l'appareil. C'était ce travail qui me permettait de prévoir les forces de l'appareil.
    Merci beaucoup. Je vous remercie encore une fois de votre présence ici aujourd'hui.
    Serait-il possible que des experts canadiens ou Transports Canada jouent un rôle d'observateurs dans tous les processus de certification dans le monde, compte tenu de leur nombre élevé?
    J'ai participé à divers processus de certification au Canada et aux États-Unis.
    Selon mon expérience, c'est évidemment le pays où l'avion est conçu qui dirige le processus de certification. Je ne sais pas exactement ce que les lois prescrivent, mais habituellement, la FAA et l'AESA interviennent lorsque le processus a lieu au Canada.
    Il y a des périodes de familiarisation. Ce sont habituellement les autorités supérieures qui y participent, et Transports Canada explique où il se situe dans le processus, de quoi a l'air l'avion, etc. Je pense qu'elles ont alors l'occasion de mentionner leurs préoccupations, leurs inquiétudes à l'égard de la réglementation, ce qu'elles voudraient voir creuser davantage.
    Ce serait à vérifier, mais je suis à peu près certain qu'elles ont voix au chapitre à ce moment-là, sauf qu'elles ne soulèvent pas souvent de problèmes, parce que nous avons une entente de réciprocité très solide.
    Je dirais que c'est un processus plus informel que formel. Peut-être que nous devrions officialiser le tout.
    Je comprends.
    Je m'adresse maintenant aux représentants du Bureau de la sécurité des transports.
    Vous avez mentionné ne pas avoir pu intervenir après la tragédie d'Ethiopian Airlines, compte tenu de la convention en vigueur, et je le comprends. Si une tragédie comparable survenait au Canada, le BST refuserait-il lui aussi que des organismes étrangers interviennent? Sur quoi se fonderaient les décisions du BST?
    Le Bureau de la sécurité des transports applique les conventions en vigueur en vertu de l'annexe 13 de la Convention relative à l'aviation civile internationale. C'est nous qui dirigerions l'enquête. Nous mettrions à contribution tous les autres États ayant un rôle à jouer selon les règles officielles.
    Si un autre État se trouvait dans la position dans laquelle nous nous trouvons actuellement, nous devrions nous demander ce qu'il pourrait apporter à l'équipe d'enquête, mais nous visons toujours la transparence et l'ouverture, dans la mesure où les règles de confidentialité sont respectées. Ce serait à examiner au cas par cas.
    J'ai déjà posé la question à d'autres fonctionnaires: est-il sûr pour les Canadiens qui suivent nos délibérations aujourd'hui de prendre l'avion au Canada?
    Nous avons un excellent bilan de sécurité aérienne au Canada.
    Nous sommes sur le point de publier nos statistiques de 2019, nous le ferons demain. Cela a été une année très difficile pour certains secteurs de l'aviation, notamment l'aviation générale, mais le niveau de sécurité demeure très élevé en aviation commerciale, pour le type d'avion que la plupart des gens prennent, pour les avions qu'utilisent les grands transporteurs. Pour d'autres éléments, comme le taxi aérien, nous avons de réelles préoccupations, et nous avons justement publié une étude spéciale sur le sujet.
    Croyez-vous que le ministre a agi de façon responsable en clouant au sol la flotte de Max 8?

  (1635)  

    Des mesures ont été prises, et bien sûr, il a été démontré que c'était la chose à faire, compte tenu de tout le travail qui se poursuit et du fait que l'aéronef fait toujours l'objet de tests. On en est encore à élaborer des plans pour déterminer quelles nouvelles exigences seront imposées et comment. Je pense que c'était la chose à faire, ne serait-ce que pour gagner la confiance du public.
    Merci.
    Merci, madame Fox et monsieur Bittle.
    Je vous remercie tous et toutes, monsieur Primeau, monsieur Alarie, madame Fox et madame Van Themsche, du temps que vous nous avez consacré aujourd'hui. Comme M. Doherty l'a mentionné déjà, il est possible que nous vous rappelions pour venir participer de nouveau à nos délibérations.
    Je vais suspendre la séance quelques instants.

  (1635)  


  (1640)  

    La séance reprend.
    Premièrement, j'aimerais souhaiter la bienvenue aux témoins qui se joignent à nous pour la fin de la séance.
    Nous recevons Jodi Diamant, ingénieure en chef, Navigabilité et certification, chez Pratt & Whitney Canada; Jim Quick, président et chef de la direction de l'Association des industries aérospatiales du Canada, ainsi que Michael Deer, spécialiste de la navigabilité chez Bell Textron Canada Limitée.
    Nous accueillons également deux représentants de Viking Air Limited, soit David Curtis, président et chef de la direction, ainsi que Steven Bruce, directeur, Conception et certification. Enfin, nous accueillons David Joseph Watson, gérant, Navigabilité et sécurité aérienne chez De Havilland Aircraft of Canada Limited.
    Sur ce, nous commencerons par les exposés.
    Monsieur Quick, vous avez levé la main, donc je présume que vous voulez commencer.
    La parole est à vous.
    Je vous souhaite la bienvenue.
    Merci, monsieur le président. Bonjour.
    Au nom des membres de l'Association des industries aérospatiales du Canada, je vous remercie de nous inclure à votre étude sur le processus de certification des aéronefs.
    L'aérospatiale est l'une des plus grandes fiertés de notre pays, elle génère 215 000 emplois et 25,5 milliards de dollars chaque année dans l'économie canadienne.
    C'est aussi un secteur dans lequel la concurrence est de plus en plus féroce à l'échelle internationale. En toute honnêteté, le Canada commence à tirer un peu de l'arrière sur ce plan. C'est la raison pour laquelle notre association a lancé, il y a un peu plus d'un an et demi, sa vision 2025, une initiative pancadienne menée par l'industrie. Nous avons parcouru l'ensemble du pays, avons sollicité la participation de nos membres, des gouvernements fédéral et provinciaux et de nos 215 000 employés. Il en résulte un rapport détaillé présentant les préoccupations de l'industrie. Nous y formulons également des recommandations.
    L'une des grandes priorités ciblées est justement le processus de certification de Transports Canada et la nécessité de garantir son statut d'organisme de réglementation de calibre mondial.
    Je tiens à dire d'emblée que l'AIAC fait pleinement confiance à TCAC pour certifier les aéronefs canadiens. Cependant, nous avons quelques recommandations à faire du point de vue de l'organisation et des ressources.
    J'aborderai d'abord la structure organisationnelle de TCAC. Mes observations d'aujourd'hui n'ont pas pour but de la critiquer, puisqu'en fait, nous estimons que TCAC a un souci incomparable de la sécurité. Cependant, elle pourrait améliorer l'efficacité de son interaction avec l'industrie.
    À l'heure actuelle, TCAC est le seul grand organisme de réglementation de l'aviation civile à faire partie d'un ministère. Ce n'est pas la structure que privilégient nos grands partenaires commerciaux. L'Administration fédérale de l'aviation des États-Unis, la FAA, et l'Agence européenne de la sécurité aérienne, l'AESA, ont une structure différente. TCAC est limitée par sa structure qui la place en concurrence avec Transports Canada, qui s'occupe de tous les moyens de transport, ainsi que par un mode de reddition de comptes interne compliqué.
    Le comité technique de l'aviation civile de l'AIAC, qui se compose de représentants du secteur et d'experts en la matière, a examiné cette structure et fait les recommandations suivantes: TCAC devrait être une direction à part de Transports Canada, dotée de toute l'autonomie, les pouvoirs et la structure de responsabilité nécessaire. Un haut fonctionnaire qualifié, fort d'une expérience pertinente en aviation — minimalement un SMA — devrait être nommé et se voir confier la responsabilité globale des questions liées à l'aviation civile au Canada. Un énoncé de mission fort et clair pour l'aviation civile devrait être publié. Enfin, nous recommandons que TCAC travaille avec nous, avec l'AIAC, pour rétablir et redynamiser le Conseil consultatif sur la réglementation aérienne canadienne, le CCRAC, afin de garantir une bonne collaboration entre le gouvernement et l'industrie pour évaluer les enjeux et recommander des changements réglementaires grâce à un processus de réglementation coopératif.
    Cela m'amène à l'aspect investissement. Notre industrie croît à un rythme de 5 % par an, mais les investissements dans TCAC ne suivent pas la cadence. Notre plus grand partenaire commercial, les États-Unis, finance la FAA de manière très proactive et transparente. C'est de notoriété publique. Ainsi, le comité technique de l'aviation civile de l'AIAC recommande que le gouvernement du Canada crée une équipe de haut niveau composée de représentants de l'industrie et de Transports Canada qui serait chargée d'évaluer les besoins en personnel et en financement de TCAC, puis de proposer des méthodes justes et pratiques pour en assurer la dotation et le financement. Cette équipe devrait avoir la tâche de faire connaître ses conclusions et ses recommandations dans un laps de temps court et bien défini, et cela devrait se faire parallèlement à l'amélioration de l'efficacité de la structure organisationnelle de TCAC.
    Je conclurai en rappelant qu'il est impératif de protéger et de renforcer la réputation de TCAC de chef de file parmi les organismes de réglementation de l'aviation civile. Nous estimons que les modifications que nous recommandons nous permettront d'y parvenir.
    Merci, monsieur le président.

  (1645)  

    Merci.
    Madame Diamant, vous avez la parole.
    Bonjour, monsieur le président, messieurs les vice-présidents et membres du Comité permanent des transports, de l'infrastructure et des collectivités.
    J'aimerais vous remercier d'entreprendre cet examen important du processus de certification des aéronefs de Transports Canada. J'aimerais également offrir mes plus sincères condoléances aux personnes qui ont perdu des proches au cours des évènements tragiques qui ont mené à cette étude.
    Permettez-moi de me présenter. Je m'appelle Jodi Diamant — certains m'appellent Joanne. Je suis ingénieure spécialisée en certification des aéronefs. J'ai travaillé pendant 18 ans pour Aviation civile, chez Transports Canada, et depuis les 14 dernières années, je suis ingénieure en chef, Navigabilité et certification, chez Pratt and Whitney Canada. J'ai grandement participé à la mise au point et à l'application de normes en matière de conception, aux processus de certification, de validation et de délégation des aéronefs et à la mise en œuvre des systèmes de gestion de la sécurité. Aujourd'hui, je comparais à titre personnel, car je participe à ce processus depuis 30 ans et j'ai donc les compétences nécessaires pour expliquer son fonctionnement et les améliorations qu'on pourrait lui apporter.
    Comme M. Quick l'a indiqué, l'industrie canadienne est un chef de file en matière de conception et de production d'aéronefs, d'hélicoptères et de turbines à gaz. De plus, le processus de certification de Transports Canada est reconnu comme étant l'un des plus rigoureux au monde, ce qui signifie un produit de niveau exceptionnel sur le plan de la sécurité.
    Puisque le Canada est un pays de conception en vertu de l'OACI — l'Organisation de l'aviation civile internationale —, Transports Canada est maintenant responsable de la certification et du maintien de la navigabilité de plus de 18 000 aéronefs et hélicoptères et de plus de 60 000 moteurs de Pratt and Whitney Canada en vol dans le monde, y compris au Canada.
    La certification des aéronefs et des moteurs — qui est exceptionnellement complexe, comme l'ont expliqué les représentants de Transports Canada en février dernier — représente seulement le point de départ de la sécurité aérienne, avant même la mise en service des produits. Toutefois, c'est une étape indispensable. Il s'agit d'un partenariat dans lequel les participants au processus de certification ont des rôles, des obligations et des responsabilités bien définis, et je vais vous les décrire rapidement.
    Il y a les organismes de réglementation, à savoir l'OACI, dont Mme Fox vous a parlé, ainsi que la FAA. Il y a aussi les demandeurs, c'est-à-dire les représentants de l'industrie qui sont ici, et les délégués.
    Je dois insister sur le fait que peu importe sa description, le système n'est pas fondé sur l'autocertification et ce n'est pas un système de réglementation. Pour simplifier, en commençant par l'échelon le plus élevé, l'OACI — dont vous a parlé Mme Fox — est un organisme international. C'est un organisme spécial des Nations unies qui existe depuis 1944. Le Canada est l'un des signataires principaux de cet organisme et manifestement, l'OACI a son siège social ici. L'organisme définit les responsabilités, les exigences et les processus de haut niveau qui sont utilisés par les pays, les organismes de réglementation et l'industrie dans la conception et la certification d'un produit sécuritaire. Il mène les partenariats bilatéraux et l'harmonisation. Il faut préciser que cette approche est exclusive au secteur de l'aviation. En effet, aucune autre industrie n'a le même modèle de gouvernance et de surveillance de la réglementation internationale.
    Transports Canada, en se fondant sur les exigences de l'OACI, établit les normes et les processus en matière de conception qui servent à déterminer le niveau de sécurité des produits et les méthodes acceptables pour démontrer la conformité aux exigences, et la façon de le prouver.
    L'industrie et les entreprises qui conçoivent les produits — on nous appelle « le demandeur » — doivent faire appel aux nombreux fournisseurs et à leur propre expertise. Nous devons satisfaire aux normes en matière de conception et cela peut prendre des années. Ensuite, nous devons nous prouver à nous-mêmes et, surtout, à Transports Canada qu'un produit est conforme à toutes les normes en matière de conception qui ont été établies par Transports Canada, et qu'il est donc sécuritaire.
    Dans le cas d'un aéronef, il y a plus de 1 200 exigences. Pour un moteur, il y a au moins 100 exigences. Nous devons prouver que chacun de ces produits satisfait à toutes les exigences.
    Transports Canada approuve seulement un aéronef ou un moteur lorsque l'entreprise ou l'industrie a prouvé que chaque exigence, sans exception, avait été satisfaite. Les intervenants du ministère doivent être convaincus que c'est le cas.
    Au début du processus de certification et tout au long de celui-ci, Transports Canada et le demandeur sont en communication constante. Ils ne se contentent pas de se parler au début pour se revoir seulement à la fin du processus. Ils sont en communication tout au long du processus.

  (1650)  

    Transports Canada utilise une approche fondée sur le risque pour déterminer sa participation à l'étape du processus qui vise la démonstration de la conformité. Les intervenants du ministère se concentrent sur les éléments essentiels à la sécurité, sur les nouveaux processus et sur les méthodes liées à la conception et à la conformité. Ils observent des mises à l'essai et lisent des rapports. Ils participent à tous les aspects du processus.
    Après la certification, le détenteur de certificat — parce que sa conception a maintenant été approuvée — a l'obligation de surveiller les produits sur le terrain, de cerner et d'analyser les problèmes qui pourraient causer des conditions dangereuses, de collaborer avec Transports Canada pour prendre les mesures correctives appropriées et d'appliquer les leçons apprises en matière de conception et de certification de nouveaux produits. C'est un cycle perpétuel d'améliorations.
    Le processus de certification des aéronefs de Transports Canada est fondamentalement rigoureux. Il débouche sur un niveau de sécurité exceptionnellement élevé pour les produits. Toutefois, comme nous le savons, compte tenu de l'augmentation continuelle de la complexité des produits et de l'intégration, de l'évolution constante des technologies et des pressions qui s'exercent sur la commercialisation, le processus peut toujours être amélioré. Mes recommandations à l'industrie exigent que les organismes qui participent à la certification et à la fabrication des produits se dotent de systèmes de gestion de la sécurité.
    Permettez-moi d'expliquer les systèmes de gestion de la sécurité — ou les SGS. Au début des années 2000, le Canada était reconnu comme étant un chef de file dans la mise en œuvre d'un SGS pour les gros exploitants dans le cadre du RAC 705. Toutefois, il a pris une pause, en quelque sorte. De nombreux membres du Comité peuvent comprendre son cheminement.
    En ce qui concerne la certification, permettez-moi de préciser que les SGS ne remplacent absolument pas le processus ou les exigences en matière de certification. Ces éléments ne changent pas. Le SGS renforce plutôt le processus en exigeant que le système de gestion d'un organisme cerne et gère les risques liés à la sécurité d'un produit associé aux processus et aux décisions de l'entreprise. Ce système rend la direction de l'entreprise responsable de la sûreté du produit et exige l'élaboration d'une culture organisationnelle axée sur la sécurité.
    L'OACI reconnaît l'importance des SGS non seulement pour le fonctionnement, mais aussi pour notre secteur de l'industrie. C'est pourquoi cette exigence a été ajoutée à l'annexe 19 de l'OACI. Transports Canada devrait mettre en œuvre les processus et les ressources nécessaires pour évaluer et reconnaître les organismes qui souhaitent ou qui devraient mettre en œuvre un SGS à titre volontaire avant l'établissement de règlements ou à la place de règlements.
    Il faut exiger la mise en œuvre de SGS. Pour répéter les paroles de M. Quick, c'est très important pour Transports Canada, pour la population canadienne et pour les industries dont les représentants sont assis à cette table. Il faut conserver les compétences en certification par l'entremise de la rétention et de la formation d'experts qui ont les compétences nécessaires pour participer aux étapes essentielles du processus de certification et de maintien de la navigabilité.
    Cela concerne l'élaboration de normes, les partenariats bilatéraux, la participation aux processus de certification de produits et la surveillance des processus utilisés par les entreprises pour obtenir la certification, ainsi que les SGS. De plus, Transports Canada doit veiller à ce que la structure organisationnelle appropriée soit harmonisée avec les principaux partenaires bilatéraux.
    Les suggestions formulées plus tôt permettront de renforcer le processus de certification déjà rigoureux et le bilan de sécurité des produits de Transports Canada.
    J'aimerais vous remercier de votre attention. Au moment approprié, je serai heureuse de répondre à vos questions sur la certification, la délégation, la validation et les SGS.
    Merci.

  (1655)  

    Merci.
    Monsieur Curtis.
    Monsieur le président et membres du Comité, je vous remercie de m'avoir invité à comparaître aujourd'hui.
    À des fins de précision, je suis président et chef de la direction de Viking. Je suis aussi président exécutif de Longview Aviation Capital, l'entreprise propriétaire de Viking et de plusieurs autres entités d'aviation au Canada, notamment De Havilland Canada.
    Longview, par l'entremise de ses filiales De Havilland Canada et Viking Air, basées à Victoria, Calgary et Toronto, s'occupe de la conception, de la certification, de la fabrication et de la modification d'aéronefs commerciaux à turbopropulseurs, y compris l'aéronef régional à turbopropulseurs Dash 8-400 — le meilleur de sa catégorie —, l'aéronef de renommée mondiale DHC-6 Twin Otter et le bombardier à eau très spécialisé Canadair CL-415.
    Le groupe d'entreprises Longview emploie près de 2 000 personnes directement et 4 000 personnes indirectement au sein de la chaîne d'approvisionnement du secteur canadien de l'aérospatiale. Aujourd'hui, nous représentons plus de 1 milliard de dollars en ventes, dont 95 % sont des exportations. Depuis que Bombardier s'est retirée du secteur de l'aviation commerciale, Longview est le plus grand fabricant d'équipement commercial d'origine pour les aéronefs à turbopropulseurs en Amérique du Nord. Nous sommes propriétaires de plus de 23 modèles d'aéronefs différents et 21 d'entre eux ont été conçus et fabriqués au Canada au cours des nombreuses décennies précédentes.
    Pourquoi est-ce digne de mention? Parce que la certification de modèles d'aéronefs entièrement nouveaux nécessite d'énormes investissements en capital. Nous n'avons qu'à penser à la mise au point récente de l'aéronef de série C de Bombardier, maintenant le Airbus A220, pour mieux comprendre. Notre modèle d'affaires est entièrement axé sur le développement d'un deuxième ou d'un troisième cycle de vie pour un produit à partir de modèles robustes et éprouvés.
    Le Twin Otter, par exemple, a reçu sa première certification en 1965 et a été fabriqué jusqu'en 1988. Ensuite, il n'a pas été fabriqué pendant 22 ans, mais Viking a relancé sa production en 2010. L'aéronef a été assujetti à un processus rigoureux de RAPM par Transport Canada et 150 autres exemplaires de ce nouveau modèle modifié ont été livrés depuis. La même chose s'applique au Dash 8. Il a été fabriqué pour la première fois en 1983, et des produits dérivés ont été mis au point et ont permis de prolonger la vie de production de l'aéronef Dash 8 pendant plus de 37 ans.
    Le processus de certification des aéronefs et l'application de la RAPM — la Réglementation applicable aux produits modifiés — sont des éléments extrêmement importants pour Longview et ses filiales. Le processus de RAPM permet de mener une évaluation rigoureuse du modèle modifié pour s'assurer qu'un niveau de sûreté acceptable est maintenu. L'évaluation des nouveaux changements proposés et le rendement en service confirmé de l'aéronef sont des éléments fondamentaux pour établir les critères de la certification et pour veiller à ce que les moyens et les méthodes de conformité appropriés soient employés.
    La participation de Transports Canada au début de l'examen du modèle modifié et du processus de certification permet de prendre des décisions fondées sur les preuves et sur les risques relativement à sa participation dans l'ensemble du processus de certification. L'engagement continu de Transports Canada avec le demandeur à toutes les étapes de la certification permet de surveiller et d'ajuster la participation du ministère à mesure que les facteurs de risque évoluent et que les exigences en matière de surveillance appropriées sont respectées. Par l'entremise de cette surveillance et d'un système établi de délégation, Transports Canada peut compter sur l'organisme délégué pour faire des constats en matière de conformité.
    Viking et De Havilland, grâce à leur expérience de travail avec les exigences canadiennes en matière de fonctionnement et de navigabilité, ont déterminé qu'elles ont les connaissances et les compétences nécessaires pour permettre aux membres autorisés de leurs équipes de formuler des constats sur la conformité au nom du ministre, et non à titre d'employé du fabricant d'équipement commercial d'origine.
    Transports Canada est un chef de file mondial respecté dans le domaine de la certification des aéronefs. Lorsqu'un aéronef est certifié et que nous le vendons à l'échelle mondiale, le ministère devient un partenaire pour obtenir la certification dans d'autres pays. Il intercède pour nous. La reconnaissance du rôle de Transports Canada à titre d'organisme d'homologation par le pays de conception par l'entremise d'accords bilatéraux solides avec d'autres organismes de réglementation étrangers est essentielle pour la survie de notre entreprise.

  (1700)  

    Le Twin Otter et le Dash 8 sont validés partout dans le monde. Cette activité n'aurait pas été possible si Transports Canada n'avait pas conservé sa réputation d'organisme de réglementation de premier plan dans l'industrie.
    Merci.
    Merci, monsieur Curtis.
    Monsieur Bruce.
    Monsieur Deer.
    J'aimerais remercier les membres du Comité de me donner l'occasion de discuter du processus canadien de certification. Bell conçoit et fabrique des hélicoptères dans son usine de Mirabel depuis plus de 30 ans. Afin d'appuyer la certification de nos produits, nous avons établi une relation solide avec Transports Canada et nous détenons depuis plus de 28 ans la désignation d'organisme d'approbation de conception de Transports Canada, qui se fonde sur le système de délégation de Transports Canada.
    Dans mon rôle chez Bell, je suis responsable de la gestion et du processus de certification pour Bell Canada et de la validation de nos produits à l'échelle mondiale. À ce titre, j'ai eu l'occasion d'observer comment Transports Canada se compare à d'autres instances et comment ces dernières perçoivent le ministère.
    Je peux dire qu'Aviation civile de Transports Canada jouit d'une solide réputation dans le monde entier à titre d'organisme de certification par excellence. En raison de la réputation de Transports Canada et de solides partenariats bilatéraux, d'autres pays reconnaissent les compétences de Transports Canada et font confiance au processus canadien de certification, ce qui permet à des produits aéronautiques comme les nôtres, qui sont conçus et certifiés au Canada, de satisfaire aux normes en matière de sécurité qui ont été établies par les instances de calibre mondial dans le domaine.
    Comme il a été mentionné plus tôt, Transports Canada utilise une approche fondée sur le risque pour la certification. Le processus de certification de Transports Canada, avec son système de délégation, est efficace et rigoureux. La surveillance exercée par le ministère, qu'on appelle le niveau de participation, se fonde sur une évaluation du risque pour déterminer où et quand le ministère interviendra dans les projets de certification, afin que son attention puisse être dirigée sur les éléments les plus importants qui ont le plus grand impact sur la sécurité.
    Bell conçoit des produits sécuritaires par l'entremise d'une relation ouverte avec Transports Canada. Le processus de certification est structuré de façon à établir la communication avec le ministère au début du cycle de vie de la mise au point du produit. Le système canadien de délégation est mature et fondé sur la confiance. Il comprend le niveau de participation de Transports Canada pour assurer la sécurité des produits. On encourage donc les communications précoces et ouvertes entre les spécialistes du ministère et ceux de Bell pour veiller à établir un engagement et une compréhension commune à l'égard de notre conception et pour assurer la conformité aux normes applicables.
    Un système de délégation rigoureux est nécessaire pour optimiser l'efficacité du processus de certification et pour veiller à ce que les ressources de Transports Canada soient concentrées sur les éléments qui ont l'impact le plus important sur la sécurité. Les autorités qui exercent une surveillance sur le processus de certification ont des ressources limitées, ce qui signifie que la délégation et un partenariat solide avec Transports Canada sont nécessaires à la réussite de l'industrie canadienne. La collaboration précoce, la confiance, la délégation continue et le recours à l'expertise des fabricants d'équipement d'origine sont nécessaires pour poursuivre la mise au point de produits sécuritaires.
    Il est également essentiel d'établir de solides partenariats bilatéraux avec d'autres grandes instances. Si le processus de certification de Transports Canada inspire confiance, les instances étrangères peuvent aussi se concentrer sur les éléments qui présentent un risque plus élevé.
    Nous sommes reconnaissants de notre partenariat avec Transports Canada. Il est important, pour Bell, que Transports Canada dispose des ressources nécessaires et d'un financement stable et prévisible pour maintenir une présence robuste à l'échelle nationale et internationale.
    J'aimerais aussi me faire l'écho de la recommandation formulée par Mme Diamant sur les systèmes de gestion de la sécurité. Bell a déjà entamé le processus consistant à volontairement intégrer des systèmes de gestion de la sécurité à son fonctionnement. En effet, nous les avons déjà adoptés dans plusieurs autres installations et nous sommes également en train d'adopter, sur une base volontaire, un système de gestion de la sécurité ici, au Canada.
    Merci.

  (1705)  

    Merci, monsieur Deer.
    Y a-t-il d'autres commentaires?
    Monsieur Watson?
    D'accord. Nous allons donc passer aux questions.
    Monsieur Doherty, vous avez la parole.
    J'aimerais remercier nos témoins de comparaître aujourd'hui.
    Monsieur Curtis, vous avez dit que la certification de nouveaux modèles est un processus qui nécessite d'énormes investissements en capital. Vous avez mentionné la recertification effectuée par votre entreprise pour le Twin Otter et le Dash 8. Dans le cadre de la nouvelle certification, quels changements ont été apportés à la cellule des deux aéronefs?
    Je peux parler du programme pour le Twin Otter de Viking.
    Oui, allez-y.
    Essentiellement, pour respecter la réglementation applicable aux produits modifiés et pour mettre à jour la certification, nous avons dû nous occuper de plusieurs éléments liés à la sécurité des passagers. Les nouveaux règlements liés à la sécurité des passagers, les systèmes d'avionique améliorés, la connaissance de la situation, les coups de foudre... ce sont tous des éléments qui ont été pris en considération.
    Toutefois, sur le plan structurel, on ne peut pas faire la différence entre le nouveau Twin Otter et l'original.
    Excellent. Merci.
     Donc, si nous avions un aéronef dont la cellule est modifiée — étant 38 % plus longue, ayant 52 % de plus de capacité, dotée d'un moteur dont la taille et la puissance seraient 100 % plus élevés, ayant une envergure 27 % plus large, et dont l'aérodynamique, qui serait stable ou instable selon certaines conditions, serait douteuse, cet appareil devrait-il faire l'objet d'un nouveau genre de certification, à votre avis?
    Madame Diamant, si vous voulez traiter du Dash 8... Je veux dire, vous avez vu un aéronef passer d'une capacité de 37 passagers...
    En ce qui concerne précisément le 737 Max, aurait-il fallu...
    Mes compétences ne me permettent pas de comprendre les différences techniques du 737.
    D'accord.
    Madame Diamant, je vous poserai la même question.
    Je dirais que vous l'avez déjà posée de manière différente, mais c'est correct.
    La règle sur les produits modifiés exige que l'on évalue chaque point modifié pour en déterminer l'incidence sur le produit. Quand les gens proposent de certifier l'ensemble de l'aéronef, il faut essentiellement se pencher sur les 1 200 exigences qu'il faut examiner et prendre une décision sur l'étendue des changements — comme l'augmentation de 38 %, la différence de moteurs et de rendement —, et l'avionneur doit reconfirmer la conformité aux exigences.
    Compte tenu des états de services de l'Aviation civile de Transports Canada, est-ce quelque chose que cet organisme devrait remettre en question, compte tenu des nouvelles caractéristiques techniques de l'aéronef?
    À chaque changement, nous devons évaluer s'il est important ou non, comme vous l'avez d'ailleurs déjà entendu. On analyse donc l'ampleur du changement.
    À titre de demandeurs, nous devons nous adresser à notre organisme de réglementation pour lui faire savoir si le changement est important ou non. Même s'il ne l'est pas, nous devons quand même montrer que l'aéronef est conforme à toutes les exigences. Aucune n'est omise; l'évaluation s'effectue à l'échelle du produit.
    La règle sur les produits modifiés exige que l'on envisage les exigences ultérieures en matière de sécurité aux fins de certification. L'évaluation visera entre autres à analyser l'étendue du changement et à déterminer s'il est suffisamment important pour justifier l'application d'exigences de certification ultérieures. La certification, peu importe le changement, exige toujours un examen de tous les changements et une réévaluation aux fins de certification.

  (1710)  

    Excellent.
    Monsieur Deer, je vous pose la même question.
     Je ne peux me prononcer sur le 737 Max proprement dit, mais du point de vue de la règle sur les produits modifiés, nous avons évalué les modifications apportées à nos produits. Nous devons suivre le même processus à chaque modification. Nous devons examiner l'ampleur du changement que nous apportons à l'aéronef, conformément aux directives émises par Transports Canada, et évaluer si le changement est important ou non.
    Nous présentons notre recommandation à Transports Canada, mais au bout du compte, c'est ce dernier qui décide si un changement apporté à un aéronef est important ou non. C'est lui qui a le dernier mot au chapitre de la certification.
    Je sais que Transports Canada pose également les mêmes questions aux demandeurs étrangers. Quand il examine un produit étranger, il pose les mêmes questions sur la base de la certification afin de déterminer comment cette base a été établie.
    Merci.
    Je vous remercie, monsieur Deer.
    Merci, monsieur Doherty.
    Monsieur Davidson, vous avez la parole.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Je vous remercie de témoigner aujourd'hui. Nous soutiendrons certainement toujours le formidable secteur canadien de l'aviation.
    En ce qui concerne l'objet de notre étude, nous tentons de nous en tenir au 737 Max. Nous le devons aux familles. L'écrasement du premier appareil a certainement envoyé un signal d'alarme. Je pense qu'on est passé à côté de quelque chose.
    Nous n'essayons pas de compliquer les choses ou de les rendre plus difficiles pour l'aviation canadienne. Nous tentons d'obtenir des réponses, des réponses pour les familles, et de veiller à ce que pareille tragédie ne se produise plus jamais.
    Pour reprendre la discussion là où M. Doherty l'a laissée, quand le 737 Max a été certifié et autorisé à voler, les ingénieurs de la Federal Aviation Administration et de Boeing ont fait état de plus de 71 changements de conception. Il s'agit d'une liste substantielle si on la compare au modèle NG.
    Monsieur Davidson, pourriez-vous en venir à la question?
    D'accord. Quoi qu'il en soit, avez-vous des observations à formuler sur tous les changements apportés à la conception?
    C'est à vous que je poserai cette question, monsieur Curtis.
    Répondez brièvement, je vous prie, monsieur Curtis.
    Ici encore, je ne dispose d'aucune information sur la manière dont le 737 Max a été certifié. La seule équivalence que je pourrais proposer, c'est le fait que De Havilland Canada avait un produit semblable au Dash 8 dont la capacité est passée de 37 à 90 places, une évolution exigeant des élongations du fuselage et d'autres modifications. L'entreprise s'est toutefois astreinte à un processus des plus solides, dans le cadre duquel elle aura appliqué les exigences de certification nouvelles et existantes à l'aéronef. Ce dernier est produit depuis 20 ans et on en compte près de 700 exemplaires. Le processus fonctionne donc.
    Honnêtement, je ne sais rien au sujet du 737.
    Je vous remercie, monsieur Curtis.
    Merci, monsieur Davidson.
    Vous avez la parole, monsieur Rogers.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Je souhaite la bienvenue à nos témoins.
    Je présente moi aussi mes condoléances aux membres des familles alors que nous discutons de ce sujet très important.
    La CBC a parlé aujourd'hui de deux rapports, l'un de l'équipe d'enquête éthiopienne, qui pointe sans contredit Boeing du doigt, et l'autre de la Chambre de représentants des États-Unis, que je trouve quelque peu troublant, puisqu'il fait état de de la pression financière considérable qui a poussé les concepteurs à lancer le produit, de la culture de secret, du fait que les lacunes du MCAS ont été cachées aux pilotes du 737 Max et de problèmes clés de sécurité n'ont pas été détectés. À l'évidence, les auteurs du rapport remettent en question le processus de certification de la Federal Aviation Administration. Voilà que je trouve assez préoccupant.
    Au regard des observations sur la Federal Aviation Administration, l'échec de ses procédures, ses lacunes et sa collaboration avec Boeing au cours de certains processus de certification, pourquoi continuerions-nous à faire confiance au processus de certification? Je présume que ma question est la suivante: comment pensez-vous que d'autres pays réagiraient si nous nous retirions du système international et cessions de reconnaître son processus de certification? Si d'autres pays ne reconnaissaient plus la certification canadienne, quelles pourraient être certaines des répercussions sur les entreprises canadiennes?
    Je demanderai à Mme Diamant et peut-être à M. Curtis de répondre à cette question.

  (1715)  

    Si je comprends votre question, juste pour reprendre vos propos, vous voudriez comprendre les répercussions d'un retrait...
    Oui. Comment pensez-vous que les autres pays réagiraient si nous nous retirions du système international et cessions d'en reconnaître le processus de certification? Quelles pourraient être les conséquences pour les entreprises canadiennes?
    Essentiellement, chaque pays certifierait de nouveau notre appareil et nos moteurs après les avoir soumis à des examens approfondis. Je présume qu'ils ne se fieraient pas à Transports Canada, et c'est un processus exceptionnellement difficile et exigeant. Il nous serait très difficile de fabriquer des produits et de les livrer aux clients étrangers, puisqu'ils devraient les certifier de nouveau eux-mêmes.
    Quel est votre avis, monsieur Curtis?
    Je pense que notre industrie cesserait ses activités. Je vous donnerai un exemple de situation où certains pays ont des produits concurrents. Dans le cas du Twin Otter, quand nous en vendions à la Chine, Transports Canada devait collaborer avec les autorités de navigabilité chinoises équivalentes pour qu'elles avalisent la manière dont il avait certifié l'aéronef. Tout un éventail de questions politiques empêchaient l'importation de notre produit en Chine. Si Transports Canada n'avait pas défendu les fondements de la certification, nous ne compterions aucun appareil dans ce pays.
    Je vous remercie.
    Monsieur Deer, comment Transports Canada vous aide-t-il sur le plan de la certification? À quel point le processus est-il long ou rigoureux?
    Quand nous entamons un nouveau programme de certification, nous collaborons d'entrée de jeu avec Transports Canada. Notre système de délégation se base sur les relations que nous entretenons avec le ministère. Nous sommes en communication constante, misant sur les relations que nous avons avec lui pour nous assurer qu'il comprend la configuration de notre produit et la complexité de certains dispositifs afin de prendre une décision fondée sur le risque pour déterminer quand il interviendra dans le cadre du processus de certification.
    Transports Canada se familiarisera avec notre produit en agissant en interaction avec nous. Il évaluera le risque et les facteurs qui auront le plus d'influence sur la sécurité du produit, puis il ciblera ces facteurs afin de déterminer son degré d'intervention à l'égard du produit.
    Au final, ce sont nos délégués qui tirent des conclusions au chapitre de la conformité, mais le produit ne sera jamais approuvé à moins que Transports Canada n'ait participé au processus et soit convaincu que le produit est sécuritaire.
    Considérez-vous que le processus de certification canadien a progressé de manière à améliorer la sécurité ces dernières années?
    Je pense que le processus de certification de Transports Canada est très bien établi, et comme il est arrivé à maturité, les relations de travail entre le ministère et les demandeurs sont bonnes, avec pour résultat des produits sécuritaires.
    Qu'est-ce qui différencie le processus de certification du Canada de celui d'autres entités de certification étrangères, le cas échéant?
    Sachez simplement que le système de délégation de Transports Canada s'appuie sur une relation fondée sur la confiance. On ne devient pas délégué dans ce système si on ne jouit pas de la confiance de Transports Canada. Or, cette confiance suppose une relation. Selon une norme établie, il faut avoir une relation de travail depuis un an avec Transports Canada pour devenir délégué, mais l'histoire a montré qu'il faut plus longtemps que cela pour obtenir le degré de confiance nécessaire. Je pense que c'est là un des éléments clés qui différencient le système canadien des autres systèmes: la confiance.
    Je vous remercie, monsieur Deer.
    Merci, monsieur Rogers.
    Nous accordons maintenant la parole à M. Barsalou-Duval.

  (1720)  

[Français]

     Merci beaucoup, monsieur le président.
    Ma première question s'adresse à M. Deer, de Bell Textron Canada limitée, mais les autres témoins pourront y répondre aussi.
    Les pilotes n'avaient pas été informés du fait que le MCAS, ce nouveau système, avait été installé dans les Boeing 737 MAX. Cela ne figurait pas non plus dans le manuel qui était fourni et ne faisait pas partie de la formation.
    Si vous aviez intégré un nouveau système de ce genre ou un système important dans des hélicoptères construits par Bell Textron Canada, est-ce que cela aurait figuré au manuel? Est-ce qu'une formation aurait été offerte à ce sujet?

[Traduction]

    Je ne peux parler précisément du 737 Max, mais quand nous apportons des modifications substantielles à nos produits, nous évaluons la formation requise et déterminons s'il faut modifier nos cours de formation à l'avenant.

[Français]

    Est-ce que Viking Air, par exemple, procède de la même façon?

[Traduction]

    Pardonnez-moi, une partie de la question m'a échappé.

[Français]

    Dans le cas où l'on installerait un système comme le MCAS ou un système qui modifie lafaçon dont l'avion est piloté et stabilisé, est-ce que Viking Air, par exemple, le mentionnerait dans son manuel? Est-ce que de la formation serait offerte aux pilotes?

[Traduction]

    Je pense que tout dépendrait du changement apporté au système de l'aéronef et du fait qu'il est substantiel ou léger. Chaque fois qu'on modifie les systèmes de contrôle de l'aéronef, il s'agit habituellement de modifications d'envergure qui requièrent un degré de supervision bien plus élevé.

[Français]

    Ma deuxième question s'adresse aussi à M. Deer ainsi qu'aux représentants de Viking Air.
    Si vous installiez un nouveau système, que vous ne le considériez pas important alors qu'il le serait passablement et que vouliez éviter de divulguer ce fait dans le cadre du processus de certification, seriez-vous en mesure de cacher cette modification à Transports Canada ou à l'Association du transport aérien du Canada, l'ATAC? Est-ce que l'organisme canadien de certification le détecterait?

[Traduction]

    Je dirais que non dans le système de certification canadien. Comme je l'ai souligné précédemment, toute la relation que nous entretenons avec Transports Canada est fondée sur la confiance et une communication ouverte et honnête.
    Je ne peux imaginer qu'on puisse ne pas se fier à la relation de confiance avec l'autorité de certification.

[Français]

    Comment expliquez-vous qu'une telle situation se soit produite aux États-Unis, dans le cas de Boeing?

[Traduction]

    Je n'ai aucune explication.

[Français]

     D'accord. J'ai une autre question à vous poser.
     Pensez-vous qu'une situation de ce genre mine la confiance du public à l'égard du processus de certification des aéronefs?

[Traduction]

     Fort certainement, et je pense que c'est la raison de notre présence ici aujourd'hui. Nous voulons confirmer que le processus de certification de Transports Canada est solide et est considéré comme étant de calibre mondial à l'échelle internationale.

[Français]

    Je pense qu'il a été démontré par bon nombre de personnes que notre système de protection est solide, et je suis content que ce soit le cas. Cela dit, je me demande si nous devrions prendre des mesures pour nous assurer que le processus de certification des autres pays est aussi solide que le nôtre.
    Un système d'acceptation un peu automatique s'en vient. Un changement adopté en Europe ou aux États-Unis serait considéré automatiquement comme accepté ici. Ce système pourrait être intéressant en ce sens qu'il simplifierait les choses, permettrait que notre travail soit plus rapide et serait profitable.
     Comment pouvons-nous être certains de pouvoir faire confiance aux systèmes de certification utilisés dans d'autres pays?

  (1725)  

[Traduction]

    Dans mon exposé, j'ai indiqué que nous nous sommes adonnés à un exercice appelé Vision 2025, dans le cadre duquel nous avons présenté intentionnellement et de manière très stratégique des recommandations à propos de Transports Canada. Nous sommes convaincus que les employés de Transports Canada figurent parmi les meilleurs du monde. Comme M. Deer l'a indiqué, notre système est différent des autres, et je pense que c'est cette différence qui en fait le meilleur du monde.
    J'ai fait remarquer dans mon exposé que l'effectif, tout excellent soit-il, est insuffisant. Comment pouvons-nous alors réaliser des progrès du point de vue de la compétitivité mondiale? Nous devons nous assurer que l'Aviation civile de Transports Canada soit dotée d'une structure et de ressources financières et humaines adéquates afin de suivre notre rythme. J'ai indiqué que nous affichons une croissance annuelle de 5 %. Or, le budget de l'organisme n'a pas augmenté depuis sept ou huit ans.
    Je vous remercie, monsieur Quick et monsieur Barsalou-Duval.
    Monsieur Bachrach, vous avez la parole.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie tous nos témoins.
    Ma première question s'adresse à Mme Diamant.
    Dans votre exposé, vous avez ardemment défendu le système de certification canadien. Dans le cadre de notre étude, nous constatons de plus en plus que la certification du 737 Max 8 aux États-Unis présentait des lacunes substantielles. Pourtant, le Canada a vérifié cette certification. Qu'est-ce qui n'a pas fonctionné? À votre avis, comment pouvons-nous rectifier la situation pour assurer la sécurité des voyageurs aériens canadiens?
     Je ne peux que parler des faits rendus publics jusqu'à présent. Je ne me hasarderai pas plus loin à ce sujet, le rapport d'enquête officiel n'étant pas encore achevé.
    Même si cela peut sembler évident au regard des témoignages livrés par l'équipe de Transports Canada, je dirais que ce dernier n'était pas au fait des changements quand il a avalisé l'aéronef. En fait, il semble que la Fedeal Aviation Administration n'était pas au courant des changements. Il est très difficile pour une autorité de certification de pouvoir détecter un facteur de risque dans le cadre de son examen si cette autorité et l'avionneur ne l'ont pas fait initialement. Ce serait comme chercher une aiguille dans une meule de foin, et le temps accordé à cet exercice est limité.
    Nous avons entendu parler plus tôt du processus de délégation et du rôle de la confiance. Diriez-vous que dans le cas présent, la Federal Aviation Administration s'est fiée à Boeing pour signaler les problèmes?
    Je dirais que c'est une question d'obligations et de responsabilisation. Il incombe à l'organisation qui a la délégation ou l'autorisation d'effectuer une évaluation juste, puis d'aviser l'organisme de réglementation quand un certain risque se pose. Il semble que l'organisation n'ait pas évalué correctement la situation et n'a donc pas avisé l'organisme de réglementation.
    Je vous remercie.
    Monsieur Deer, vous avez longuement traité de la délégation et du rôle de la confiance. Dans l'affaire mettant en jeu Boeing et la Federal Aviation Administration, Boeing subissait des pressions financières extrêmes et était talonnée par ses concurrents, ce qui la poussait à lancer son produit sur le marché. Je me demande si, à titre de représentant d'une entreprise ayant une responsabilité déléguée, vous pouvez nous indiquer comment vous évitez que les objectifs financiers de l'entreprise n'entrent en conflit avec la livraison d'un produit sécuritaire sur le marché.
    Je parlerai précisément du système de délégation canadien.
    Ce système exige essentiellement que les titulaires de l'autorité déléguée ne soient soumis à aucune pression commerciale. Le chef de notre bureau d'autorité déléguée doit donc signer un engagement indiquant que les délégués sont libres d'agir selon leurs connaissances, sans pression commerciale.
    J'ai maintenant une question pour M. Quick.
    Monsieur Quick, vous avez longuement parlé de la compétitivité et de l'importance des changements que vous avez préconisés afin de rendre notre industrie plus concurrentielle sur la scène mondiale. Je pense que la sécurité constitue la principale préoccupation du Comité dans le cadre de la présente étude. Je me demande donc si vous pourriez formuler des commentaires sur la contribution que feraient les recommandations que votre organisation a présentées au chapitre de la sécurité de notre industrie et des voyages aériens au Canada en général.

  (1730)  

    Transports Canada et l'industrie canadienne font tous deux passer la sécurité en premier.
    Les recommandations que nous avons formulées contribuent fort bien à faire en sorte que la sécurité reste au premier plan dans tout ce que nous faisons. Comme je l'ai indiqué au cours d'une réponse précédente, l'innovation que nous élaborons est porteuse de grandes perturbations et évolue à vitesse grand V. Sur le plan de la sécurité, il faut s'assurer que Transports Canada et l'Aviation civile soient capables de suivre notre rythme à mesure que nous faisons progresser cette technologie.
    Nous avons essentiellement recommandé que vous modifiiez votre structure et l'étayiez adéquatement pour que nous puissions garantir la sécurité.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Je vous remercie, monsieur Bachrach.
    Nous remercions également les membres du groupe de témoins, soit M. Watson, M. Bruce, M. Curtis, M. Quick, Mme Diamant et M. Deer. Merci d'avoir comparu aujourd'hui.
    Je tiens également à remercier les membres du Comité, non seulement d'avoir posé d'excellentes questions et obtenu de formidables réponses de la part des témoins aujourd'hui, mais aussi d'avoir rendu hommage aux 157 hommes, femmes et enfants qui ont trouvé la mort dans la tragédie du vol 302 d'Ethiopian Airlines. Je vous encourage, alors que nous quittons les lieux aujourd'hui, à garder à l'esprit ces personnes, et leurs familles, bien entendu.
    Sur ce, la séance est levée.
Explorateur de la publication
Explorateur de la publication
ParlVU