Passer au contenu
;

CAAM Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.

Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.

Publication du jour précédent Publication du jour prochain
Passer à la navigation dans le document Passer au contenu du document






Emblème de la Chambre des communes

Comité spécial sur la relation économique entre le Canada et les États-Unis


NUMÉRO 011 
l
2e SESSION 
l
43e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 22 avril 2021

[Enregistrement électronique]

(1830)

[Traduction]

    Je vous souhaite la bienvenue à la 11e réunion du Comité spécial sur la relation économique entre le Canada et les États-Unis. Conformément à la motion adoptée par la Chambre le 16 février, le Comité spécial se réunit pour discuter de la relation économique entre le Canada et les États-Unis.
    Nous poursuivons notre examen de la politique Achetez américain portant sur les marchés publics. Je souhaite la bienvenue à nos témoins, qui sont tous les deux de retour devant la Comité. Nous accueillons aujourd'hui Maryscott Greenwood, directrice générale du Canadian American Business Council, et Mark Agnew, vice-président, Politique et international, de la Chambre de commerce du Canada.
    Madame Greenwood, vous avez la parole pour cinq minutes.
    Bonsoir, monsieur le président et membres du Comité. Je suis heureuse d'être de retour parmi vous aujourd'hui.
    Depuis des générations, la politique dite « Achetez américain » est une réalité majeure et étonnamment bien enracinée dans l'espace économique du continent nord-américain. Le Canadian American Business Council s'y est attaqué à maintes reprises depuis sa fondation il y a plus de trois décennies. Le problème semble resurgir avec plus d'acuité à chaque changement de gouvernement et, surtout, à chaque nouvelle crise financière.
    Le gouvernement Biden se propose de dépenser des billions de dollars sur des projets d'infrastructure et de relance économique, tous assortis de la restriction Achetez américain. Le Canada, bien entendu, soulève des objections. Or, pour présenter une argumentation valable à un interlocuteur, il faut toujours bien comprendre ce qui motive sa prise de position.
    Le gouvernement Biden se propose de dépenser des billions de dollars sur des projets d'infrastructure et de relance économique, tous assortis de la restriction Achetez américain. Le Canada, bien entendu, soulève des objections. Or, pour présenter une argumentation valable à un interlocuteur, il faut toujours bien comprendre ce qui motive sa prise de position.
    Étant donné le degré d'intégration entre nos deux économies, qui s'est accrue depuis le premier accord de libre-échange, la meilleure façon de créer plus d'emplois aux États-Unis est de pousser plus loin encore cette intégration. Nous n'avons jamais été si interdépendants. Vu cette réalité, les obstacles au commerce entre nos deux pays sont particulièrement contre-productifs et coûteux. La politique Achetez américain se répercutera sur les travailleurs américains et coûtera des emplois aux Américains.
    Il importe cependant de rappeler que la politique Achetez américain n'a rien de nouveau. Elle ne devrait pas être considérée comme un signe de mépris ou d'indifférence à l'égard du Canada. Les gouvernements, républicains ou démocrates, tant au niveau fédéral qu'à celui des États, imposent des restrictions de ce genre en matière de dépenses publiques depuis des lustres et des lustres, ou du moins depuis que je m'intéresse à ces questions, c'est-à-dire depuis fort longtemps. Pour être juste, il faut reconnaître que la préférence accordée aux fournisseurs nationaux dans les dépenses publiques n'est pas une pratique exclusivement américaine. Partout au monde, les accords commerciaux permettent un certain degré de protectionnisme. Il est vrai que le Canada a ouvert ses marchés ces dernières années, mais il ne s'abstient pas pour autant de tenter de limiter l'accès de fournisseurs étrangers dans certains secteurs. En fait, le public canadien l'exige. Vous le savez mieux que moi.
    Cela dit, nous sommes préoccupés par la portée des dispositions Achetez américain dans la nouvelle loi américaine. Nous sommes d'avis qu'à moins que le Canada ne se voie accorder une exemption, une dérogation ou, si vous préférez, un « créneau réservé », les règles sur les dépenses vont vite s'avérer inopérantes devant certaines dures réalités.
    Prenons le cas du New Jersey. Le Canada est le deuxième marché d'exportation du New Jersey. Le New Jersey vend plus de biens au Canada que sur ses troisième et quatrième marchés d'exportation combinés et il importe des milliards de dollars de biens canadiens. Près de 180 000 emplois au New Jersey dépendent de ces échanges transfrontaliers. La politique Achetez américain perturberait ces chaînes et réduirait la disponibilité de fournitures canadiennes à prix concurrentiel pour les entreprises du New Jersey. Cela se traduirait par une inefficacité. L'inefficacité entraîne la perte d'emplois. Je n'ai parlé que du New Jersey, mais il en va de même de presque tous les autres États américains.
    Prenons l'exemple de l'équipement de protection individuelle. Le Canada est l'un des principaux fournisseurs d'EPI aux États-Unis. N'oublions pas que le gouvernement précédent, au début de la pandémie, avait cherché à restreindre l'exportation des masques N95 au Canada et aux pays des Antilles, mais a rapidement fait marche arrière. Pourquoi? Parce que le Canada exporte aux États-Unis des composantes de l'EPI et de fournitures médicales cruciales. La dépendance est réciproque.
    Voici un autre exemple qui se rapporte directement au grand programme de relance économique. Comme nous le savons, le plan d'infrastructure du président Biden mettra l'accent sur les sources d'énergie propre, comme les parcs éoliens. En passant, je vous fais mes bons souhaits pour le Jour de la Terre. Les entreprises québécoises produisent des composantes d'éolienne parmi les plus recherchées au monde. Le Texas produit de loin plus d'énergie éolienne que tout autre État américain. Il s'agit d'une association commerciale naturelle. Chaque semaine, un train du CN quitte New Richmond, au Québec, chargé de pylônes de turbine ou de ces lames gigantesques, longues de 120 pieds. Il se rend à Chicago, puis descend le cours du Mississippi jusqu'au golfe du Mexique. Depuis 2016, le CN a transporté environ 9 000 composantes de turbines fabriquées au Canada vers des parcs éoliens situés le long de son réseau aux États-Unis. Ce commerce d'éoliennes est le résultat direct de nos trois traités de libre-échange successifs. Le fait de le restreindre entraînerait tout simplement une perte d'emplois aux États-Unis et au Canada.
    La ville de Bettendorf, en Iowa, offre un exemple de projet plus modeste, mais qui illustre peut-être de façon plus frappante la situation. La ville est en train de construire un nouveau pont et se propose d'installer un ensemble d'ascenseurs pour faire monter piétons et cyclistes du niveau du sol jusqu'à la voie piétonne et cyclable du pont. Les autorités locales ont appris que certaines des pièces nécessaires pour les ascenseurs sont fabriquées au Canada. À moins que certaines des restrictions Achetez américain ne soient levées, Bettendorf devra faire fabriquer les pièces sur mesure aux États-Unis, ce qui fera doubler le coût — 427 000 $ — des ascenseurs.
(1835)
    Nous sommes d'avis que les cas comme celui de Bettendorf, sous une forme ou une autre, seront nombreux un peu partout aux États-Unis, et iront sans cesse croissants, à moins que le Canada ne soit exclu, ou exempté, si vous voulez, de la politique Achetez américain.
    Le Canada aura besoin d'une exemption. Ce serait une demande raisonnable, et il y a un précédent. En effet, en 2009, le Canada a obtenu une exemption qui a permis aux entreprises canadiennes de soumissionner pour des projets de relance, d'une valeur de centaines de milliards de dollars au total, à la suite de l'effondrement du secteur du logement.
    Comment cette exemption s'est-elle obtenue? Posez la question à l'ambassadeur du Canada de l'époque, Gary Doer. Il a approché le syndicat des métallurgistes, qui compte des membres des deux côtés de la frontière et qui a une voix collective assez forte pour se faire entendre à la Maison-Blanche. Comme se plaît à le dire l'ambassadeur Doer, il a réussi à faire intervenir les travailleurs américains du bâtiment en faisant appel à leurs propres intérêts.
    Cette fois-ci, le Canada devra envoyer un message tout aussi convaincant. Nous avons créé un système de croissance mutuelle assurée. Il ne faut pas le perturber.
    Le Canadian American Business Council ne cesse de préconiser la réduction des formalités administratives à la frontière, la rationalisation et l'harmonisation des politiques industrielles et, de façon générale, la facilitation du commerce entre nos deux pays.
    La politique Achetez américain est peut-être une réaction intuitive chez les décideurs américains. De son côté, le Canada devra avoir l'intuition qu'il lui faut plaider vigoureusement en faveur d'une exemption, d'une exclusion ou d'une dérogation. Pour cela, le CABC offre son concours. Nos deux pays doivent opérer le redressement de leur économie et ils doivent le faire ensemble.
    À ce sujet, nous avons préparé une campagne de relance nord-américaine, que nous avons, il semble, déjà évoqué dans le passé. Si vous le souhaitez, je me ferai un plaisir d'en discuter avec vous ce soir.
    Merci beaucoup de votre attention.
    Merci, madame Greenwood. C'est toujours un plaisir de vous entendre.
    Nous allons maintenant passer à M. Agnew, pour cinq minutes, s'il vous plaît.
    Monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du Comité, je vous remercie encore une fois de m'avoir donné l'occasion de témoigner devant le Comité.
    Scotty, nous devons vraiment cesser de nous rencontrer ici.
    Depuis ma dernière comparution, la Chambre de commerce du Canada a lancé une initiative sur la relation canado-américaine qui porte sur cinq de ses aspects essentiels, à savoir la frontière, l'environnement et les ressources naturelles, la coopération en matière de réglementation, la politique Achetez américain et les questions liées à la chaîne d'approvisionnement du secteur de la défense et de la sécurité.
    Nous espérons avoir bientôt l'occasion d'en discuter avec les membres du Comité, mais ce sont vraiment les deux derniers points qui seront le sujet principal de mon exposé devant le Comité au cours des prochaines minutes.
    Je n'ai pas à revenir sur le fait que les pratiques d'approvisionnement aux États-Unis sont un sujet de préoccupation permanente pour le milieu des affaires canadien, puisqu'elles risquent de nous exclure du marché américain.
    J'aimerais plutôt prendre les prochaines minutes pour vous parler de six idées prospectives susceptible d'assurer notre intégration aux chaînes d'approvisionnement américaines et notre accès aux marchés publics américains. Nous espérons que le Comité pourra en faire état dans le rapport qu'il présentera au gouvernement dans les semaines à venir.
    En premier lieu, nous devrions examiner de façon exhaustive l'importance des biens et des services. Il existe un risque que nous portions, par myopie, toute notre attention sur les biens et que nous perdions de vue les services de grande valeur. Par exemple, pas plus tard que la semaine dernière, la filiale américaine d'une entreprise canadienne, a obtenu un contrat de coentreprise, d'une valeur de jusqu'à 2 milliards de dollars, pour la conception et les services liés à une activité de l'aviation américaine. Cela montre la valeur des services, surtout s'il s'agit de contrats de soutien qui peuvent durer des années, par opposition aux contrats ponctuels de livraison d'un bien matériel.
    En deuxième lieu, nous devons savoir ce que le Canada apporte à la table de négociation. En 2008-2009, au cours des négociations bilatérales avec les Américains, nous avons été assez malmenés, et je ne pense pas que quiconque veuille recommencer ce genre d'exercice, surtout que nous sortons à peine des négociations sur l'ACEUM. Nous devons réfléchir à la façon de devenir un partenaire sérieux, notamment en ce qui concerne la mise en œuvre de l'ACEUM, le soutien de la résilience de la chaîne d'approvisionnement nord-américaine, l'exploitation des minéraux essentiels et le remplacement éventuel de nos propres pratiques d'approvisionnement par des propositions de politique « Achetons nord-américain », en particulier dans le secteur de la défense et de la sécurité.
    Il y a d'énormes possibilités de partenariat et de collaboration avec des entreprises américaines, et aussi d'apporter des compétences de calibre mondial dans le secteur de l'énergie propre. Cela comprendrait, par exemple, des partenariats portant sur les installations hydroélectriques ou les petits réacteurs modulaires.
    En troisième lieu, nous devons reconnaître la nature unique de notre base industrielle de défense et de sécurité. Le DPSA et d'autres arrangements sont des outils essentiels qui permettent au Canada conserver son accès au marché américain, et nous incitons le Comité à formuler des recommandations visant à codifier ces accords afin d'offrir plus de certitude aux entreprises canadiennes. La base industrielle continentale est essentielle à la défense du continent et ne peut y être dissociée.
    En quatrième lieu, il est important de participer aux initiatives émergentes d'achats verts. La CLEAN Future Act, loi récemment présentée aux États-Unis, établirait un programme d'achats propres fondé des objectifs de rendement pour les projets qui reçoivent un financement fédéral. Elle a été présentée dans le but très explicite de renforcer la compétitivité du secteur manufacturier américain. Nous devons nous assurer que les normes appliquées pour sa mise en œuvre n'excluent pas les entreprises canadiennes du marché.
    Notre approche consiste à tenter de relever les défis climatiques tout en créant des débouchés économiques dans les technologies, les biens et les services respectueux de l'environnement. Cela signifie également qu'il faut positionner le Canada en faisant valoir nos produits à faible empreinte carbone.
    En cinquième lieu, la collaboration entre l'industrie et le gouvernement est essentielle. La Chambre de commerce du Canada et ses membres ont travaillé en étroite collaboration avec le gouvernement pendant les négociations de l'ACEUM. Un autre exemple de cette collaboration est survenu l'an dernier, quand le gouvernement et les membres de la Chambre de commerce ont travaillé ensemble pour que les dispositions qui auraient nui aux exportateurs canadiens de l'industrie de la défense et de la sécurité soient supprimées de la loi américaine de 2021 sur les crédits de défense avant son adoption.
    Heureusement, le décret-loi du gouvernement Biden sur la chaîne d'approvisionnement a reconnu l'importance de consulter les alliés, et nous demandons au gouvernement de participer à ces consultations et de collaborer avec l'industrie pour faire en sorte que le point de vue canadien y soit bien défendu.
    En sixième lieu, mais ce n'est pas à négliger, nous avons besoin de meilleures données. La politique Achetez américain et son cousin « Buy America » sont d'une complexité déroutante lorsqu'ils se conjuguent aux engagements pris dans le cadre de l'AMP de l'OMC, aux exemptions et aux divers programmes infranationaux. Je dis cela en me fondant sur mon expérience de 10 années et plus dans le domaine de la politique commerciale. Il n'y a pas, dans le domaine public, de données vraiment fiables sur l'accès du Canada aux marchés publics américains. Les entreprises canadiennes, et moi personnellement, aimerions mieux comprendre l'ampleur réelle du problème. Les entreprises veulent savoir aussi où concentrer le plus utilement possible leurs efforts d'expansion.
    J'ai dit récemment dans une entrevue que peu de gens se lèvent le matin à Washington en songeant à quel service ils pourraient rendre aux entreprises canadiennes. Mme Greenwood est peut-être une exception. Il y a une multitude d'intérêts divers qui fourmillent à Washington, mais heureusement notre ambassade est dirigée avec compétence par Kirsten Hillman, qui réussit admirablement à faire valoir ceux du Canada. Nous sommes cependant à un tournant critique dans la relation, et il nous faut faire comprendre aux Américains qu'il est dans leur propre intérêt de travailler avec nous.
    La Chambre de commerce du Canada est désireuse de continuer à travailler avec ce comité. Je serai heureux de répondre à vos questions.
(1840)
    Merci, monsieur Agnew.
    Nous passons maintenant à la période de questions.
    Monsieur Hoback, vous avez la parole pour six minutes.
    Je vous remercie, monsieur le président, ainsi que les témoins. Je pense que je devrais simplement vous servir une tasse de café. C'est comme si nous étions assis ici à prendre un café comme nous le faisions dans le bon vieux temps.
    Madame Greenwood, vous passez avant moi.
    D'entrée de jeu, je tiens à remercier le gouverneur du Dakota du Nord. Il a posé un geste de bonne volonté cette semaine en offrant de faire vacciner les camionneurs qui font le va-et-vient à la frontière. Il va vacciner les camionneurs du Manitoba et du Dakota du Nord. Voilà un bel exemple de bon voisinage. C'est un bon voisin que nous avons là. Nous avons du mal ici à obtenir suffisamment de vaccins pour nos travailleurs essentiels et le reste de la population, et je lui suis donc grandement reconnaissant de ce beau geste.
    J'aimerais que nous puissions maintenant faire de ce geste le fondement de quelque chose de nouveau. Je sais que nous avons parlé des dernières négociations sur l'AEUMC. Nous avons manqué cette occasion de bâtir cet espace nord-américain où le Canada, les États-Unis et le Mexique, travaillant ensemble, tirant parti de nos efficacités et de nos connaissances et les regroupant, auraient pu tenir tête au monde entier. Nous avons raté beaucoup d'occasions et maintenant, avec la politique Achetez américain, il semble que nous allons en rater une autre.
    Madame Greenwood, vous avez parlé d'une chose qui me paraît être l'une de nos réussites dans les négociations de l'ACEUM, soit d'avoir pu sensibiliser, en y mettant beaucoup de temps, nos homologues américains à l'importance de notre relation économique. En ces temps de pandémie, nous ne pouvons pas faire comme avant.
    M. Doer a bien fait les choses. Il a approché et convaincu les travailleurs américains. C'est ce qu'il a fait.
    Voyez-vous, à l'heure actuelle, le Canada agir de cette façon? Dans quelle mesure est-ce efficace?
(1845)
    Merci beaucoup, monsieur Hoback.
    Vous savez, tout le monde se réunit comme nous le faisons maintenant. Toutes les réunions se font par Zoom, avec le résultat que, dans bien des cas, les décideurs sont plus faciles à joindre parce qu'ils voyagent peu. Il s'agit de continuer à utiliser cette formule jusqu'à ce nous puissions nous rencontrer en personne.
    La Pacific NorthWest Economic Region organise une réunion à laquelle les participants assisteront en personne. Il s'agit d'un groupe régional qui comprend des responsables fédéraux et des dirigeants d'États américains et de provinces canadiennes. Elle se tiendra en août au Montana. Je pense qu'il y a beaucoup d'Américains qui y assisteront, et on espère qu'il sera possible pour les Canadiens d'y venir aussi. Être présent à ces réunions bilatérales est aussi une façon utile d'exercer une influence.
    L'ambassade ici fait un travail phénoménal, comme vous le savez, mais les gens de l'ambassade ne peuvent pas tout faire seuls. Ils ont besoin que tout le monde les aide et mette à profit leurs relations pour élargir l'approche dont vous avez parlé.
    Comment transmettre un message? Avec la politique Achetez américain, il est question de créer des emplois aux États-Unis, mais je m'interroge souvent sur la valeur qu'en tirent les contribuables américains. Qu'en est-il de la valeur de ces emplois? Il y a un certain point où il n'est tout simplement pas logique d'effectuer certains travaux aux États-Unis parce que c'est tout simplement trop coûteux. Il y a certaines composantes que vous ne fabriquez pas aux États-Unis. C'est tout simplement trop coûteux.
    Où les États-Unis trouveront-ils le point d'équilibre? Le contribuable finira bien par dire: « Un instant, ce n'est pas rentable de faire ce travail », mais quand fera-t-il ce constat?
    À votre avis, où est-ce que cela s'inscrit dans l'équation?
    Ce sont les entreprises et les entités américaines qui finiront par devoir faire valoir leurs arguments auprès des décideurs.
    J'ai donné l'exemple de Bettendorf, en Iowa. La ville construit un pont et doit obtenir du Canada des composantes d'ascenseur. Si elle devait les faire fabriquer elle-même, cela doublerait littéralement le coût du pont, mais le financement accordé à la ville n'a pas doublé. La solution tombe sous le sens.
    Il y a une différence entre acheter au Canada et acheter n'importe où ailleurs dans le monde. Même si je suis partisane du libre-échange, je crois que, dans ce cas-ci, je ferais une exception en faveur du Canada.
    Il ne s'agit pas d'ouvrir la porte à tous les pays du monde. Nous tentons de nous assurer que la relation entre le Canada et les États-Unis fonctionne sur le plan économique. Je pense que les Américains sont généralement ouverts à cette idée. Les gouvernements des États et les administrations locales en particulier, qui manquent tellement de ressources, ne veulent pas que le coût de leurs infrastructures double ou triple à cause d'un blocage de la chaîne d'approvisionnement.
    Monsieur Agnew, nous constatons déjà au Canada une pénurie de certains matériaux, le bois d'œuvre, par exemple.
    Compte tenu de la politique Achetez américain, des 2 billions de dollars qui seront dépensés et des mesures de stimulation qui seront prises ici au Canada, comment envisagez-vous la gestion de nos ressources, comme le gros et le petit bois d'œuvre, l'acier et le ciment, dans un scénario de ce genre? Comment pensez-vous que cela fonctionnera? Les États-Unis en ont besoin et le Canada en a besoin. Avez-vous des prédictions à ce sujet?
    En fait, je pense que l'une des plus grandes possibilités réside dans les minéraux essentiels et les terres rares. Nous en avons en abondance dans notre sous-sol, mais nous ne sommes pas très doués pour les extraire. Les États-Unis veulent que leur industrie des semi-conducteurs obtienne ses intrants de pays autres que la Chine, et je pense que c'est en fait un avantage important que nous pouvons faire valoir à la table de négociation.
    Ce qu'il faut ici, c'est de rendre leur extraction plus rentable pour le secteur privé parce que, à l'heure actuelle, les facteurs économiques ne sont pas tout simplement propices à cette activité.
    Je sais qu'en Saskatchewan, on est en train de mettre en place l'un des premiers centres de traitement des terres rares, de différents types de terres rares. Nous en avons ici; nous le savons. Nous savons où elles se trouvent. C'est comme vous l'avez dit, elles ne sont pas dans un endroit où on peut arriver avec une rétrocaveuse et se mettre à creuser. Elles se trouvent au milieu de nulle part, pourrait-on dire, et sont difficiles d'accès.
    Une chose que nous avons remarquée dans les deux... en Amérique du Nord, il y a des pénuries des composantes provenant ordinairement de Chine.
    Les chambres de commerce ou les entreprises qui en sont membres ont-elles déterminé quelles sont ces pénuries et comment le Canada ou les États-Unis pourraient s'y prendre pour en venir à bout ou pour fabriquer ces composantes ici?
(1850)
    Nous entamons ce processus dans le cadre de notre initiative Canada-États-Unis. L'une des questions consiste à savoir ce que les gouvernements peuvent faire pour soutenir cet effort du secteur privé, du fait qu'il y a actuellement, dans cette industrie, une défaillance du marché.
    Combien de temps me reste-t-il?
    Il vous reste 10 secondes, monsieur Hoback, le temps d'une brève question.
    Dans ce cas, je vais m'arrêter ici, monsieur le président, et laisser ce temps au collègue qui me suit.
    Merci beaucoup.
    Monsieur McKay, vous avez six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci à nos deux témoins.
    Monsieur le président, si nous avions un programme pour grands voyageurs, nous il faudrait y inscrire M. Agnew et Mme Greenwood, car leurs témoignages sont des plus utiles, et je doute fort que les membres du Comité soient en désaccord sur l'un ou l'autre des points qu'ils ont fait valoir.
    Madame Greenwood, vous travaillez dans ce domaine depuis de nombreuses années. Votre valeur unique tient au fait que vous êtes à cheval sur trois mondes: celui des orientations stratégiques, celui de la politique, celui de la vie concrète. Je suis curieux de savoir quel genre de clients viennent vous demander: « À quoi faut-il s'attendre de cette politique Achetez américain? Mon entreprise fabrique des tuyaux en PVC ou tel autre produit. »
    Quels conseils donnez-vous à ceux qui se présentent à votre bureau?
    À l'heure actuelle, ce que les entreprises veulent savoir, c'est quels sont les programmes prévus dans le plan d'infrastructure de 2 billions de dollars afin d'y dénicher des possibilités d'affaires.
    Ce qui les intéresse en premier, c'est de savoir où se trouvent les possibilités d'affaires, pour quels projets ils pourraient soumissionner. Comme d'habitude, le Canada a une bonne longueur d'avance. Le plan d'infrastructure, auquel se rattache la politique Achetez américain, n'est pas encore entré en vigueur. C'est une proposition. On pourrait l'appeler le coup d'envoi du gouvernement Biden. Il faut passer par le Congrès et il faut attendre que cela débouche sur un programme concret. Comme les débats se prolongeront, les gens s'impatientent de savoir où se trouveront les possibilités d'affaires.
    L'autre point à retenir, c'est que la Maison-Blanche n'a pas encore doté l'Office of Management and Budget du personnel nécessaire. C'est là que les exceptions seront décidées, que l'examen des recommandations de dérogation à la politique Achetez américain ou d'exemption canadienne seront examinées. Ces personnes ne sont même pas encore en poste.
    Les entreprises se montrent très intéressées par le plan et très désireuses d'y participer, mais pour le moment, elles s'occupent à déceler les possibilités d'affaires.
    Pour vous donner un exemple précis, je parlerai des cimenteries, qui ont une grande importance en ce moment. Elles ont aussi une grande incidence sur l'environnement. Il existe des technologies très intéressantes — dont certaines d'origine canadienne — qui permettent de capter le carbone, de le mélanger à des nanotubes et à d'autres choses du genre, pour l'incorporer au ciment, par exemple, et réduire ainsi l'empreinte carbone.
    Je pense qu'il y aura beaucoup d'occasions comme celle-là où, si le Canada peut montrer son expertise en matière d'infrastructures écodurables, d'avantages environnementaux... Voilà le genre de choses qui auront une valeur ajoutée et qui seront traitées comme telles, je crois, aux États-Unis.
    Comme vous l'avez signalé à juste titre, le plan de relance n'a pas encore été adopté par le Congrès. Selon le mot de Bismarck, il y a deux choses qu'il ne faut pas regarder de près, la fabrication des saucisses et la rédaction des lois. Si un aphorisme a déjà sonné vrai, c'est probablement celui-là, appliqué au Congrès américain.
    On trouvera bien quelque utilité limitée au Congrès américain seulement en ceci qu'aucun membre du Congrès n'oserait s'opposer à la préférence donnée à l'achat de produits américains. Ce serait politiquement suicidaire. Cependant, le conseil de s'adresser aux responsables à la Maison-Blanche me semble utile.
    Est-ce un conseil que vous donnez également à notre ambassadrice?
    Oui, bien qu'elle n'ait pas besoin de mes conseils à ce sujet. Elle est bien en avance sur nous tous. L'ambassadrice Hillman s'entretient très régulièrement avec des gens de tous les niveaux à la Maison-Blanche et dans l'exécutif. Toutefois, le problème, c'est que la dotation en personnel n'est pas terminée. Je sais que nous avons tous hâte de discuter avec nos homologues, mais ils en sont encore à l'étape de confirmation de leur nomination.
    Le gouvernement Biden est en place depuis peu, et nous devons donc attendre qu'un grand nombre de responsables soient confirmés dans leur poste avant de pouvoir vraiment nous engager avec toute l'énergie que vous souhaitez, je le sais.
(1855)
    Cette observation est tout à fait juste.
    Je m'adresse maintenant à M. Agnew. Je crois que nous exagérons un peu en vous demandant de comparaitre deux fois en une semaine, monsieur Agnew, mais je ne vous ai pas posé de questions mardi. Il se trouve que je copréside la Commission permanente mixte de défense, et nous sommes sur le point d'établir notre ordre du jour pour la réunion de juin au Pentagone. J'aimerais savoir ce que vous pensez qu'il faudrait inscrire à l'ordre du jour en ce qui concerne les dépenses de défense et de sécurité, vu ce contexte où nos amis américains seront nos captifs au Pentagone.
    Nos membres nous ont parlé de la modernisation de NORAD. Il y a une somme assez importante qui y sera consacrée, et nous voulons simplement nous assurer que l'industrie canadienne en tirera également des avantages, puisqu'il s'agit d'un dispositif de défense continental. Ce serait un point très concret que je vous demanderais de porter à l'attention de la Commission. Je me ferai un plaisir de communiquer avec votre bureau à ce sujet.
    Il vous reste 20 secondes, monsieur McKay.
    Eh bien, elles s'ajouteront aux 10 secondes de M. Hoback. Nos amis du Bloc devraient en être très heureux.
    Merci.
    Merci.

[Français]

    Monsieur Savard-Tremblay, vous avez la parole pour six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie mon collègue de m'offrir ces 20 secondes additionnelles.
    Je salue également mes autres collègues ainsi que les témoins d'aujourd'hui.
    J'aimerais m'adresser aux témoins qui souhaitent une exemption. Je crois que Mme Greenwood disait qu'elle était en faveur du libre-échange, mais que ce serait bien d'avoir une exemption qui nous permettrait d'avoir un accès spécial aux marchés publics américains.
    Cela dit, si la chose n'est pas possible sur le plan juridique, étant donné qu'il faut véritablement qu'il s'agisse d'un accord de libre-échange profitant également à toutes les parties, comme on l'a entendu de la part de témoins, quelle stratégie préconisez-vous?

[Traduction]

    Je pense que ce que nous aimerions voir, c'est une exemption aussi large que possible. Je suis, j'aime croire, une personne assez pragmatique et je ne pousserai donc pas la naïveté au point d'espérer une exemption complète. Ce que nous devrions probablement déterminer dès maintenant, ce sont les secteurs clés auxquels le programme d'infrastructure s'appliquera. Nous devrions vraiment nous concentrer là-dessus, aller voir les Américains et leur dire que nous avons en fait des compétences clés dans les domaines X, Y et Z et que c'est pourquoi il est dans leur intérêt de voir à ne pas nous maltraiter et de nous accorder une exemption.
    J'aimerais beaucoup que nous obtenions une exemption générale, mais, franchement, je ne suis pas certain que ce soit une option viable.
    Pour ma part, j'aimerais beaucoup qu'il y ait une exemption ou, si vous voulez, une exclusion générale. Nous avons réussi à en obtenir une, quoique tardivement, en 2009 relativement au programme de relance économique Il a fallu beaucoup de temps pour y arriver et, entretemps, des pipelines ont été posés en Californie qui ont dû être démantelés par la suite. Je pense qu'une exemption générale serait une bonne chose.
    Je suis d'accord avec M. Agnew au sujet de la codification de l'Accord sur le partage de la production de défense. Il existe un précédent qui accorde aux États-Unis et au Canada un accès réciproque aux marchés publics de l'autre pays, et le secteur de la défense en est un parfait exemple. Si c'est bon pour la défense, c'est bon pour l'infrastructure, à mon avis. Je pense que nous devons insister et être accompagnés d'entreprises américaines quand nous discuterons avec les décideurs américains afin que ceux-ci comprennent.
    Ordinairement, le Canada n'est pas ciblé par les Américains. Il l'est peut-être dans le cas de l'acier, mais pas vraiment pour d'autres produits. La cible, ce sont d'autres pays, comme la Chine.

[Français]

    En 2009, les négociations ont effectivement été très longues et très ardues. La situation a un peu changé, parce qu'il y a maintenant l'Accord Canada—États-Unis—Mexique, l'ACEUM, qui n'est plus l'ALENA. Comme cela a été démontré devant le Comité, la situation n'est pas la même, parce que l'ACEUM ne contient pas de chapitre sur les marchés publics, contrairement à l'ALENA. Ce serait donc une renégociation, et, dans le contexte actuel, Dieu sait qui l'emporterait. On pourrait s'attendre à ce que les Américains aient une position particulièrement combative. La chose est donc très loin d'être réglée.
    Monsieur Agnew, vous disiez qu'il ne pourrait probablement pas y avoir d'exemption globale ou d'exemption d'ensemble. Dans ce cas, quel secteur serait à privilégier?
    Personnellement, j'ai une hypothèse, et je me permets de vous demander ce que vous en pensez: ne devrions-nous pas privilégier les technologies et les industries les plus vertes? En effet, nous pourrions assurément vaincre beaucoup d'entreprises américaines dans l'octroi de contrats sur ce plan, puisque nous sommes très avancés dans ce domaine.
(1900)

[Traduction]

    Comme presque tous les secteurs de l'économie sont représentés parmi nos membres, il y a beaucoup de cas différents qui pourraient être présentés. Je dirais, simplement en me fondant sur certaines des premières conversations que nous avons eues avec nos membres, en particulier les gens qui travaillent dans le domaine de l'énergie propre — les installations hydroélectriques, les petits réacteurs modulaires —, que je pense que ce sont là des points particuliers où nous avons des forces. Comme nous l'avons vu aujourd'hui, avec le Sommet des dirigeants sur le climat, il y a de fortes pressions à la Maison-Blanche pour amener les États-Unis à réduire leurs émissions et à atteindre le seuil zéro net. Je pense donc que c'est un domaine où nous pouvons nous présenter en position de force.
    Il a y aussi, bien sûr, beaucoup de secteurs plus traditionnels de l'infrastructure, comme l'acier et l'aluminium, qui sont intéressés. Je pense que ce sont les domaines que nous espérons voir prioriser. Je sais qu'au Québec, en particulier, le secteur de l'aluminium a une grande importance.

[Français]

    L'aluminium est effectivement très important, notamment parce que nous avons un aluminium qui n'est pas fait au charbon comme celui de la Chine. Nous avons l'aluminium le plus vert au monde. Nous en sommes même à penser à un aluminium carboneutre.
    Si on avait à choisir une exemption précise, puisqu'on sait que la nouvelle administration américaine a des considérations environnementales, ne devrait-on pas insister sur le critère de l'écoresponsabilité pour l'octroi des contrats?

[Traduction]

    Tout à fait, et je pense que cela — notre production d'électricité propre — fait partie de ce que le Canada peut offrir en matière de protection de l'environnement. Je pense que les statistiques montrent que 80 à 85 % de notre électricité provient de sources propres. Je pense que c'est un excellent bilan à présenter et qu'il faut s'assurer que les gens à Washington le comprennent.

[Français]

    Merci, monsieur Savard-Tremblay.

[Traduction]

    Monsieur Green, bienvenue au Comité. Vous avez six minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président, et merci à tous les membres du personnel de service ce soir, aux membres du Comité et aux témoins, Je vous suis reconnaissant de cette occasion que j'ai de prendre la parole.
    Je suis très fier d'être le député de Hamilton-Centre. Bien sûr, pour ceux qui y sont allés, vous comprenez, dès que vous traversez le Skyway et que vous voyez les usines, que ce n'est pas sans raison que Hamilton est appelée la « ville de l'acier ».
    C'est de cela que je veux parler en premier. Je pense beaucoup à la façon dont Bain Capital a ruiné le Hamilton Specialty Bar, une entreprise centenaire qui employait des centaines de travailleurs depuis des générations. Je pense à la façon dont la restructuration de la dette de 2 milliards de dollars de la U.S. Steel a été faite sur le dos des retraités par le truchement de la CCWA. Je ne peux m'empêcher de me demander comment et dans quelle mesure les dispositions Achetez américain ont eu une incidence sur l'industrie locale de l'acier ici à Hamilton.
    J'ai entendu Mme Greenwood dire, en expliquant l'exception canadien, que le Canada n'était pas ciblé, sauf peut-être dans le cas de l'acier, et je suis plutôt enclin à lui donner raison là-dessus. Je veux donc, pour commencer, demander, par votre entremise, monsieur le président, à Mme Greenwood de préciser dans quelle mesure elle croit que la American Recovery and Reinvestment Act de 2009 et les dispositions Achetez américain sont semblables et différentes des dispositions « Buy America » qui limitent actuellement l'accès du Canada aux marchés publics infrafédéraux aux États-Unis.
    Merci beaucoup de votre observation et de votre question.
    Elles sont semblables. C'est le même scénario. Nous le voyons encore une fois. Il y a certaines industries et certaines circonscriptions aux États-Unis qui parlent haut et qui ont un grand poids politique. Nous l'avons vu avec l'acier, nous l'avons vu avec le bois d'œuvre, secteurs dans lesquels les États-Unis agissent d'une façon qui ne concorde généralement pas avec une saine politique économique, qui va à l'encontre des accords commerciaux et de leurs obligations et qui porte atteinte à leurs relations avec leurs alliés. Pourtant, les États-Unis continuent de recourir à des mécanismes protectionnistes. Parfois, ils fonctionnent.
    Bombardier a des installations dans le nord de l'État de New York parce qu'elle soumissionnait à l'époque pour les rames de métro de New York. Vous souvenez-vous de l'époque où Bombardier construisait des rames de métro? Elle a donc construit une usine à Plattsburgh, dans l'État de New York. Pourquoi? Parce qu'il y avait une composante d'achat local à respecter. Sa soumission a été retenue. Mais ce qui vous heurte, il me semble, c'est que cela montre que l'exigence d'achat local donne des résultats, n'est-ce pas? C'est compliqué.
    L'autre chose que je m'empresse d'ajouter, c'est qu'il faut considérer la situation dans son ensemble quand on demande une exemption. Par exemple, je pense que le budget canadien déposé il y a quelques jours instaure une taxe sur les services numériques. C'est quelque chose qui existe dans d'autres pays du monde. Je prédis que les États-Unis verront d'un mauvais œil l'imposition des grandes sociétés de communications numériques qui ont leur siège aux États-Unis, dont bon nombre sont nos membres.
    Je pense qu'il faut se préoccuper de l'état d'esprit de la Maison-Blanche lorsqu'elle prendra des décisions sur les exemptions, et si elle est à l'écoute… Est-ce que les Métallurgistes... le syndicat est-il aussi aligné sur notre position qu'il l'était à l'instigation de l'ambassadeur Doer en 2009 ou non? Les gens sont-ils mécontents ou non de la perception d'injustice de la part du Canada à l'égard des sociétés de communications numériques? La…
(1905)
    Monsieur le président, je me demande si, avec votre permission, je pourrais revenir au cœur du sujet.
    Ici, à Hamilton-Centre, la taxe sur les services numériques sera de toute façon refilée aux consommateurs. Cela ne touchera pas les grandes sociétés de communications numériques qui sont aux États-Unis.
    Je sais que notre secteur de l'acier a été durement touché, alors que je pensais que nous avions beaucoup travaillé dans le cadre de la négociation de l'ACEUM pour en arriver à un nouvel accord offrant de meilleures protections et de meilleures possibilités de règlement négocié. Il a été signé et, à peine quelques mois plus tard, il me semble, Trump l'a dénoncé et a imposé des tarifs de toute façon. Je me demande donc dans quelle mesure ces accords importent lorsqu'il y a changement de gouvernement et que les dirigeants américains décident de changer de cap.
    Vous avez raison. L'Accord Canada-États-Unis-Mexique, l'ACEUM, s'applique à une grande partie de l'économie, mais les marchés publics, l'infrastructure et les investissements du gouvernement dans l'infrastructure sont des choses différentes. Si vous fournissez de l'acier entrant dans la production d'entreprises américaines, vous bénéficiez d'un accès sans tarif aux États-Unis en vertu de l'accord commercial, mais s'il s'agit d'un État ou d'une administration locale qui reçoit du financement du gouvernement fédéral américain au titre de l'infrastructure, c'est alors que l'exigence d'achat local, que les dispositions Achetez américain entrent en jeu.
    Pour répondre à votre première question, c'est à peu près toujours le même combat que nous menons depuis des générations.
    Je vous dirais que le gouvernement a affecté, je crois, 100 milliards de dollars à la relance à la suite de la pandémie. Je suppose qu'une grande partie de cette somme sera consacrée à l'achat local.
    Est-ce que cela nous mettrait dans une position où nous pourrions envisager d'instaurer des politiques semblables, des politiques « Achetez canadien », qui auraient peut-être pu s'appliquer à l'acier canadien utilisé dans nos réseaux ferroviaires et de transport en commun et dans nos projets d'énergie verte, l'éolienne et le solaire?
    Je vais vous donner une brève réponse philosophique.
    Dans un cas comme dans l'autre, c'est une mauvaise idée. Le Canada et les États-Unis s'en tirent mieux lorsqu'ils travaillent ensemble et qu'ils ont chacun plein accès aux marchés de l'autre. Je ne pense pas que l'attitude « à bon chat bon rat » comme celle que vous suggérez donne de bons résultats, mais je comprends qu'elle soit politiquement attirante.
    Que nous restera-t-il si nous n'avons pas cette capacité de répliquer et si le gouvernement Biden, disons, décidait de changer de cap de nouveau dans le dossier de l'acier?
    C'est que notre relation est très large, énorme. Il y a beaucoup de moyens. Je ne sais pas. Il faudrait que je pense à une stratégie qui aiderait à empêcher que vous soyez lésés de cette façon, mais je ne peux pas, à l'instant, vous énumérer les représailles possibles.
    Je vous en sais gré de cette réponse. Merci.
    Merci, monsieur Green.
    Nous passons maintenant à notre deuxième tour de questions.
    Monsieur McLean, bienvenue au Comité. Vous avez cinq minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président. Et merci aussi à nos témoins.
    Je m'adresse à M. Agnew en particulier. J'aurais aimé avoir le texte de votre exposé à l'avance parce qu'il m'a fallu noter à la hâte toutes les questions à vous poser qui me passaient par la tête.
    Vous avez parlé des minéraux essentiels, de l'énergie propre et de la défense. J'aimerais vraiment parler de la façon dont nous collaborons avec nos partenaires américains. Nous avons récemment mené une étude à ce sujet au comité des ressources naturelles qui a permis de mettre en lumière un certain nombre de faiblesses.
    Tout d'abord, chaque minéral essentiel nécessitera un processus de développement minier de 10 ans, probablement plus en raison d'une nouvelle loi canadienne qui s'applique aux mines, la Loi sur l'évaluation d'impact, qui a eu un effet généralement désastreux. Il y a un énorme écart entre le temps nécessaire pour développer les mines et le temps nécessaire pour mettre en place les installations d'affinage et de fabrication de ces métaux, qui est d'environ 18 mois. Au cours de ce cycle d'une dizaine d'années, il y aura ce cartel de fournisseurs des minéraux essentiels, surtout présent en Chine, qui continuera de faire fluctuer les prix, si bien que les mines qui ne sont pas au terme de ce cycle cesseront d'être viables, comme cela a été le cas des installations de Mountain Pass, aux États-Unis.
    Dites-moi ce que vous pensez que nous devrions faire, le Canada et les États-Unis, pour réduire ces tendances collusoires qui rendent l'exploitation de nos minéraux essentiels non viable à certains moments du cycle de production.
(1910)
    Il y a deux aspects qu'il vaut la peine de considérer. Il y en a beaucoup d'autres, mais pour éviter l'éparpillement, je vais m'en tenir à deux.
    Il y a d'abord ce que nous pouvons faire chez nous. Certains éléments relèvent uniquement de nous: réglementation, études d'impact, main-d’œuvre et infrastructure. Que faut-il faire pour rendre l'extraction des ressources rentable pour les entreprises? C'est là un premier point.
    Voici le deuxième. À propos de la coopération possible entre les gouvernements du Canada et des États-Unis, comment pouvons-nous combler les lacunes du marché qui ont empêché jusqu'ici ce secteur d'être rentable? Selon moi, il y a là une intervention gouvernementale possible. L'expression « filet de sécurité » me répugne, mais, faute de mieux, je vais l'employer.
    Comment pouvons-nous utiliser les marchés publics, par exemple, pour créer des incitatifs financiers à l'intention des entreprises de façon qu'elles voient une raison d'extraire ces ressources, sachant que, au bout du compte, il y aura un acheteur? C'est ce que les entreprises doivent savoir: si elles extraient les ressources et que quelqu'un d'autre les transforme, y aura-t-il des acheteurs? C'est là que les gouvernements pourraient intervenir. Étant donné que nous avons une chaîne d'approvisionnement commune, par exemple pour les produits de défense, comment pouvons-nous mettre à profit l'acquisition de matériel par l'État pour encourager l'industrie des minéraux critiques?
     Intéressant, car le modèle d'affaires américain vise à réduire les coûts dans l'ensemble de la chaîne d'approvisionnement, ce qui veut dire, selon les stades du cycle des produits de base, s'adresser au fournisseur le moins coûteux, c'est-à-dire, la moitié du temps, la Chine. Comment pouvons-nous avoir une chaîne d'approvisionnement nord-américaine en minéraux critiques qui atténuera cette tendance à se tourner vers le fournisseur le moins coûteux?
    Il faut créer une demande pour que l'offre se manifeste. Cela revient à ce que je disais au sujet des entreprises qui extraient les ressources et les raffinent. Elles doivent savoir qu'il y a un acheteur, qu'il s'agisse des gouvernements pour les contrats de défense ou d'une entreprise automobile qui va ensuite s'en servir pour fabriquer des puces qui entrent dans ses véhicules. Il faut créer la demande avant que les entreprises n'extraient les ressources.
    Je passe à autre chose.
    Intéressons-nous aux vaccins et au fait que la campagne de vaccination avance bien aux États-Unis.
    La frontière canado-américaine est fermée et les voyageurs provenant des États-Unis ne peuvent pas venir chez nous. Peut-être Mme Greenwood pourrait-elle répondre à la question suivante: comment pouvons-nous faire en sorte que l'Amérique du Nord continue d'avoir des activités à la frontière, puisque nous partageons des vaccins?
    Lorsqu'il y a des urgences nationales, lorsque nous nous considérons comme un bloc nord-américain et avons des résultats similaires en matière de santé, tout en ayant moins d'interactions avec les autres pays... Pour ce qui des déplacements transfrontaliers, nous partageons ces vaccins essentiels, par exemple, qui peuvent être produits des deux côtés de la frontière également...
    Est-ce quelque chose qui peut cadrer dans ce contexte?
    Absolument, nous devons tirer des leçons de la pandémie et de la COVID, et voir comment il est possible de mieux s'y prendre à l'avenir puisque, malheureusement, ce ne sera pas la seule crise de santé publique que nous devrons affronter. Je suis tout à fait d'accord sur cette idée. En fait, notre organisation cherche comment le Canada et les États-Unis peuvent faire face à ces difficultés ensemble.
    Monsieur, si vous me permettez de répondre, en 10 secondes seulement, au sujet des minéraux critiques, je suis d'accord avec M. Agnew. J'ajouterais, au sujet des coûts et du fait que la Chine est un fournisseur à faible coût, qu'il faudra quelque chose comme un mécanisme d'ajustement carbone à la frontière.
    La politique du gouvernement doit faire en sorte qu'il soit plus coûteux de s'approvisionner en Chine. Quant à un rajustement carbone à la frontière, nous devrions penser à d'autres... La pollution, les droits de la personne, tous les motifs de rajustement dont on tient compte, voilà le moyen de faire augmenter les coûts des fournisseurs étrangers pour que les entreprises nord-américaines puissent être concurrentielles.
    Merci, monsieur McLean.
    Merci.
    Nous allons maintenant passer à Mme Romanado, qui aura cinq minutes. Je vous en prie.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Merci aux témoins de comparaître encore une fois ce soir. C'est toujours un plaisir de vous entendre.
    Comme je suis issue d'une famille de militaires, je ne peux pas imaginer que le Canada et les États-Unis ne travaillent pas ensemble. Prenons le NORAD, le Système d'alerte du Nord, le passage du Nord-Ouest. Après les attentats du 11 septembre, je ne peux pas imaginer que le Canada et les États-Unis ne collaborent pas sur le plan de la défense continentale.
    Madame Greenwood, vous avez soulevé un point qui a piqué ma curiosité, car j'ai déjà travaillé au CN, et j'ai suivi récemment la surenchère à laquelle le CN et le CP se sont livrés pour acquérir le Kansas City Southern, qui serait un chemin de fer incroyablement intéressant. Quand on y pense, cela serait à l'image de l'ACEUM, car les trois partenaires seraient associés pour faire circuler les marchandises entre eux.
    Je considère cette situation et celle d'Héroux Devtek une entreprise de ma circonscription qui fabrique des trains d'atterrissage. Elle a même créé le train d'atterrissage du module lunaire et elle a des entreprises établies en Ohio, au Michigan et dans l'État de Washington, car nos économies sont étroitement intégrées.
    Pourriez-vous nous entretenir plus longuement de la reprise nord-américaine, car nous devons considérer la situation sous cet angle. Nous devons tenir compte à la fois des États-Unis et du Canada, plutôt que de voir chacun des pays isolément. Nos économies sont intégrées et le resteront.
    Pourriez-vous nous parler de la reprise nord-américaine par opposition à deux reprises, l'une au Canada et l'autre aux États-Unis?
(1915)
     Bien sûr. Merci beaucoup.
    Cette idée de campagne de reprise nord-américaine — vérifiez-la, cherchez-la sur Google, vous la verrez surgir à divers endroits — a été abordée dans une conversation que j'ai eue avec la déléguée générale du Québec aux États-Unis, Catherine Loubier. Elle et moi avons discuté... au début de la pandémie, lorsque les gouverneurs des États de la Nouvelle-Angleterre se sont réunis.
    Rappelez-vous qu'au début de la pandémie, les administrations essayaient d'obtenir de l'équipement de protection individuel pour leur propre population. Les États de la Nouvelle-Angleterre ont décidé de former un bloc d'achat pour ne pas faire monter les prix en se livrant à une surenchère. Le Québec a dit: un instant, nous sommes liés à vous sur le plan économique; nous voulons faire partie de ce bloc.
    Mme Loubier et moi avons discuté de la question. À la vérité, avons-nous dit, le Canada et les États-Unis en général devraient essayer d'acquérir de l'EPI, de le partager entre eux, de le fabriquer, d'obtenir tous les intrants, etc. Nous avons donc lancé cette campagne de reprise nord-américaine. La Chambre de commerce des États-Unis, la Chambre de commerce du Canada, la National Association of Manufacturers et toutes sortes de chambres de commerce locales, des gens de partout au Canada et aux États-Unis et dans les provinces ont signifié leur accord: quelle que soit la question, la réponse est que le Canada et les États-Unis sont dans le même bateau.
    C'est ainsi que le mouvement a commencé, et ceux qui le soutiennent sont de plus en plus nombreux et les appuis sont de plus en plus solides. Nous espérons que la communauté qui se développe va s'opposer à certaines dispositions privilégiant l'achat de produits américains.
    J'ai parlé du New Jersey dans mon témoignage parce que, malheureusement, l'Assemblée législative de l'État vient d'adopter une disposition de cette nature à laquelle le Québec et l'Ontario en particulier se sont vigoureusement opposés, mais c'était trop tard.
    Quoi qu'il en soit, voilà en quoi consiste le mouvement de reprise nord-américaine. Nous continuerons de le renforcer par des moyens numériques et d'inviter les particuliers et les entreprises à y adhérer. Ensuite, nous mobiliserons des districts congressionnels ciblés pour essayer d'appuyer, pour le Canada, une exception à cette politique qui privilégie les produits américains.
    Je dois dire que cette notion d'Amérique du Nord est plus difficile à faire accepter aux États-Unis, parce que, si on ajoute le Mexique à l'équation, la conversation prend une tout autre tournure. Lorsque nous parlons de reprise nord-américaine, il s'agit en fait du Canada et des États-Unis. Ce n'est pas que le Mexique ne soit pas important — car il l'est vraiment —, c'est seulement que les enjeux, étant donné surtout ce que le Mexique représente dans l'imaginaire américain, sont tout à fait différents des possibilités offertes par le Canada.
    Merci.
    Il ne me reste qu'une trentaine de secondes. Je veux donner à M. Agnew l'occasion d'intervenir, s'il souhaite ajouter quelque chose au sujet de notre collaboration en matière de défense, un domaine qui, je le répète, me tient à coeur.
    En ce qui concerne le DPSA, nous ne pensons qu'à une seule chose pour l'instant: cet accord n'a pas le plein statut de traité que peut avoir l'ACEUM, par exemple. De façon générale, il fonctionne, mais nous entendons des entreprises parler de cas où il ne marche pas aussi bien qu'il le devrait. Nous voudrions réfléchir au moyen de codifier cet accord un peu plus rigoureusement pour que des débouchés possibles ne nous échappent pas.
    Merci beaucoup.
    Merci, madame Romanado.
(1920)

[Français]

    Monsieur Savard-Tremblay, vous avez la parole pour deux minutes et demie.
    Monsieur Savard-Tremblay, êtes-vous là?
    Vous avez la parole.
    Monsieur le président, j'aimerais faire un commentaire et je vous demanderais de ne pas le compter dans mon temps de parole. Il arrive souvent, lorsque vous dites mon nom, que le son soit coupé. Par conséquent, je n'entends pas que vous me donnez la parole. Je ne sais pas si le message peut être transmis au soutien technique. J'ignore pour quelle raison technique cela se produit, mais cela a eu lieu plusieurs fois.
    Il n'y a pas de problème. Vous disposez de deux minutes et demie.
    Ma question s'adresse à Mme Greenwood.
    M. Biden a déjà dit souhaiter que la frontière américano-canadienne soit rouverte au cours de l'été. Nous savons qu'il y a à tout le moins une volonté d'ouvrir la frontière et d'établir un dialogue.
    Croyez-vous que cela pourrait servir d'argument pour la négociation?

[Traduction]

     Certains des meilleurs arguments concernent les services professionnels essentiels à notre reprise économique. Le Canada et les États-Unis ont plutôt bien réussi à maintenir la circulation des camions dans les deux sens à la frontière pour approvisionner les marchés d'alimentation, mais ils s'en sont moins bien tirés pour ce qui est des services professionnels.
    Prenons le cas de l'intelligence artificielle. Au CABC, nous avons une merveilleuse entreprise canadienne Contextere. Tous ses clients sont aux États-Unis. Elle fait remarquer que les membres de son personnel font partie de la chaîne d'approvisionnement. Or, ils ne peuvent pas traverser la frontière à l'heure actuelle, ni dans un sens ni dans l'autre.
    En tenant compte de la vaccination, des tests, d'une approche qui tient compte des risques, il nous faut trouver un moyen de leur faire franchir de nouveau la frontière.

[Français]

    Oui, il faut de nouveau pouvoir traverser la frontière. Dans un tout autre ordre d'idées, je me dis qu'il est possible que cette volonté des États-Unis accélère l'approvisionnement en vaccins provenant de ce pays.
    Étant donné la volonté des États-Unis, si le Canada posait comme condition d'avoir un certain accès, croyez-vous que cela pourrait servir d'argument pour la négociation?

[Traduction]

    Si j'ai bien compris votre question, je pense que oui... Les entreprises canadiennes ont besoin de rendre visite à leurs clients et de les recevoir.
    J'espère que d'ici quelques semaines, les problèmes de pénurie de vaccins seront réglés. Il y a maintenant beaucoup de vaccins disponibles aux États-Unis et dans le monde, et nous espérons qu'il y en aura au Canada pour que nous puissions reprendre sérieusement nos échanges commerciaux.

[Français]

    Merci, monsieur Savard-Tremblay.

[Traduction]

    Monsieur Green, vous avez deux minutes et demie. Je vous en prie.
    Monsieur Agnew, la Chambre de commerce du Canada a publié une déclaration après que M. Biden eut signé le décret, disant que ce décret aura un effet paralysant sur les entreprises et qu'il frappera plus durement au Canada. Elle a ajouté que les restrictions de la politique Buy American demeurent un problème permanent pour les entreprises canadiennes qui cherchent à obtenir des marchés publics chez notre plus important partenaire commercial. Selon elle, les règles ont été resserrées progressivement au fil des ans, et la dernière annonce n'est qu'un obstacle de plus dont auraient pu se passer les entreprises canadiennes qui souhaitent décrocher des contrats aux États-Unis.
    Quelles mesures aimeriez-vous que le Canada prenne en réaction à cette manifestation de protectionnisme américain?
    Nous pourrions proposer deux ou trois choses, dont l'une me ramène à une allusion que j'ai faite tout à l'heure: s'efforcer de trouver des exemptions très ciblées au programme Buy American pour le prochain projet de loi sur l'infrastructure. Une fois que nous aurons vu ce qui est proposé et ce qui est visé par les Américains, nous devons cerner les secteurs pour lesquels nous devrions avoir une exemption et tenter ensuite de l'obtenir.
    Par votre entremise, monsieur le président, je demanderai au témoin si le secteur de l'acier est parmi ceux-là.
    Nous n'avons pas fini de consulter les membres, mais j'imagine pour l'instant que les secteurs de l'acier, de l'aluminium et des énergies propres seraient du nombre.
    Une chose qui me frappe, surtout dans le cas de l'acier produit à Hamilton, c'est qu'il est très difficile de dire à quel moment il devient de l'acier canadien ou pas, tellement il est déplacé dans un sens ou l'autre sous toutes ses formes.
    Quelles mesures devrions-nous prendre de façon proactive pour qu'il soit tenu compte de cette réalité? Devons-nous pratiquer une planification industrielle propre au Canada? Trouver des moyens d'adapter les politiques du Canada sur les marchés publics, pour tenir compte de notre secteur de l'acier?
(1925)
    Il y a des choses que nous pouvons faire à l'échelle nationale pour aider notre secteur. Ce qui est important pour l'industrie de l'acier, c'est de montrer aux États-Unis que nous prenons au sérieux les problèmes de capacité excédentaire sur le marché mondial de l'acier.
    Pour revenir à ce que Mme Greenwood disait tout à l'heure des liens à établir entre les problèmes pour les responsables de la Maison-Blanche, leur dire que nous tenons à nous attaquer au problème de la surcapacité montrerait que nous sommes un joueur sérieux, et nous risquerions moins d'être visés par la politique Buy American en ce qui concerne les produits de l'acier.
    Je vous remercie de ces réponses. J'attends avec impatience d'autres interventions de la part des autres témoins.
    Merci, monsieur Green.
    Passons maintenant à M. Nater, qui aura cinq minutes. Je vous en prie.
    Merci, monsieur le président.
    Merci au témoin. Des sujets intéressants ont été abordés jusqu'à maintenant.
    Je remplace Mme Alleslev cette semaine. Mes questions viennent d'elle. Elles ont été effleurées sous différents angles, si bien que je répéterai peut-être un peu ce qui a déjà été dit, mais je tiens à ce que ses questions figurent au compte rendu.
    Mme Alleslev voulait que je pose une question sur le chapitre 13 de l'ACEUM et que je demande s'il y aurait une volonté de rouvrir cette partie de l'accord ou un intérêt pour le faire, et quelles options s'offrent aux législateurs canadiens pour faire valoir cette proposition au sud de la frontière.
    Je pose la question aux deux témoins.
     Je connais les chapitres de l'ACEUM par leur titre, pas par leur numéro. Vous allez donc devoir me rappeler de quoi il s'agit.
    Désolé. Il s'agit des marchés publics.
    Selon mon avis personnel, nous n'avons en ce moment ni le temps ni le luxe de renégocier l'ACEUM. Nous devrions plutôt remettre aux Américains une liste d'autres choses pour lesquelles nous les aidons et des raisons pour lesquelles nous sommes un partenaire précieux plutôt que d'essayer de rouvrir un accord que nous venons de conclure.
    Si vous voulez que je réponde à la question, je vais utiliser une expression familière du Sud. Devriez-vous rouvrir l'ACEUM? « Heck no. » Bien sûr que non. Nous ne pourrions pas le faire adopter par le Congrès, et vous risquez d'en arriver à un texte bien pire que ce que vous avez maintenant.
     Je suis tout à fait d'accord avec M. Agnew pour dire qu'il suffit de négocier de meilleures ententes au fur et à mesure. Il ne faut pas changer les règles en cours de route, car vous n'obtiendrez pas ce que vous voulez. Vous n'y arriverez pas et vous n'obtiendrez pas ce que vous voulez, et ce pourrait être pire pour le Canada.
    Aucun de nous ne souhaite des conditions pires pour le Canada.
     Madame Greenwood, dans votre déclaration liminaire, vous avez donné quelques exemples de domaines où le Canada et les États-Unis ont des échanges commerciaux dans les deux sens. Je suis curieux de savoir: au niveau des États, quels sont ceux sur lesquels nous devons faire porter nos efforts de lobbying, pour que ces États fassent à leur tour des démarches auprès de leur gouvernement fédéral, outre ce dont il a déjà été question?
    Je déteste faire cette réponse, mais ils sont tous importants, car le Canada est le premier ou le deuxième partenaire commercial de tous les États américains, et ils sont tous importants pour des raisons différentes. Prenez l'Alaska et la Floride. Ces deux États ont beaucoup d'influence dans le secteur des croisières. Dans un État comme le Kentucky, il y a le bourbon, qui plaît plutôt aux consommateurs. Puis, il y a le Tennessee et ses refroidisseurs d'eau.
    Chaque État est important et, heureusement, le Canada a un réseau de consulats dans l'ensemble des États-Unis, qui ont des responsabilités régionales, et il a aussi des bureaux provinciaux. Nous avons parlé du bureau du Québec. Nous n'avons pas parlé des bureaux de l'Ontario et de l'Alberta, qui travaillent très fort tous les jours avec les États, avec leurs homologues.
    La réponse, c'est donc que tous les États sont importants. Si je devais choisir une ou deux priorités en ce moment, pour des raisons que le Comité connaît bien, je dirais que le Michigan et l'Illinois sont très importants, mais pour d'autres raisons liées à l'infrastructure.
    Au cours des 18 prochains mois environ, d'ici les prochaines élections de mi-mandat aux États-Unis — on dirait qu'ils sont constamment en mode électoral —, quel est, selon vous, le plus grand risque pour le Canada dans ses tractations avec le Congrès actuel au sujet de la frontière?
(1930)
    Excellente question. Il y a un risque que vous n'obteniez pas les exemptions dont vous avez besoin même si vous avez un groupe de gens qui sont prêts à faire des affaires et qu'il y ait pour vous une période d'incertitude au Congrès.
    Le Sénat des États-Unis est si également divisé que vous ne savez pas à qui vous aurez affaire après 2022. Autant faire le maximum maintenant et garantir les acquis pour pouvoir résister aux résultats des prochaines élections, quels qu'ils soient.
    Très bien. Merci.
    Pas d'autres questions pour l'instant. Merci.
    Merci, monsieur Nater.
    Nous allons maintenant terminer ce tour avec Mme Bendayan.
    Allez-y, s'il vous plaît. Vous avez cinq minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Merci aux témoins. C'est toujours un plaisir de les accueillir au Comité, et je les remercie de bien vouloir passer votre jeudi soir avec nous.
    Je reviens sur un point signalé au tout début par plusieurs témoins. Nous avons un peu parlé des dépenses de relance aux États-Unis en 2009. Au début de notre étude, des témoins nous ont dit que l'exemption accordée au Canada dans ce contexte a été consentie en 2010, ce qui était trop tard pour que de nombreuses entreprises canadiennes puissent présenter des offres sur de nombreux contrats qui les auraient intéressées.
    Ma question, madame Greenwood, est la suivante: nous en sommes encore aux premières étapes du plan annoncé par l'administration Biden et, comme vous l'avez dit, il reste encore plusieurs obstacles à franchir, et des modifications y seront probablement apportées. Compte tenu de notre expérience passée, de combien de temps disposons-nous, selon vous?
    Vous avez également dit que l'Office of Management and Budget manque peut-être de personnel en ce moment. Selon vous, le problème va-t-il persister pendant un certain temps? Devrions-nous en tenir compte dans notre réflexion sur les délais dont nous disposons?
     Merci beaucoup. Je suis heureuse de vous rencontrer.
    Pour vous organiser, vous avez selon moi d'ici la fin de l'année civile. Mais vous pouvez établir le contact avec les gouverneurs dès maintenant, n'est-ce pas? Les gouverneurs et les maires prendront leurs propres décisions en matière de marchés publics. Vous pouvez faire un travail de préparation avec les gouverneurs et les maires, pendant que les instances fédérales renforcent leur personnel, et cerner les projets clés auxquels les entreprises canadiennes veulent participer. Cela peut se faire immédiatement.
    D'accord.
    Vous avez aussi donné plus tôt l'exemple du New Jersey, je crois, qui a déjà adopté une loi au niveau de l'État. Y a-t-il quelque chose, d'après votre expérience de cette situation ou d'autres, dont nous pourrions tirer des leçons, d'après les échanges que vous avez eus?
    J'ai une réponse intéressée: il aurait été bon d'intensifier la campagne numérique de reprise nord-américaine pour que des dizaines de milliers de personnes du New Jersey écrivent à leur assemblée législative pour lui dire: « Nous allons perdre de l'argent et notre avantage concurrentiel si nous écartons le Canada. »
     Pendant l'étude de l'AEUMC, nous avons déployé un effort numérique ciblant les membres démocrates du Congrès pour essayer de le faire adopter.
    Il est essentiel de mener des campagnes intelligentes auprès de vrais électeurs américains qui parlent à leurs représentants.
    Je m'adresse à vous et à M. Agnew. Quel rôle entrevoyez-vous pour les entreprises et l'industrie canadiennes? Une mobilisation de cette nature de ce côté-ci de la frontière peut-elle être efficace à l'heure actuelle grâce à la campagne de reprise nord-américaine ou à d'autres campagnes?
    Je le pense. Les entreprises canadiennes ont de très bons contacts aux États-Unis, qu'il s'agisse de fournisseurs, de vendeurs ou d'autres acteurs. Nous avons des contacts avec la chambre de commerce des États-Unis et d'autres instances.
     Il s'agit de mobiliser ces gens-là pour comprendre pourquoi il est dans leur propre intérêt de se porter à notre défense, parce que — soyons honnêtes — ils ont certainement plus de poids à Washington qu'une organisation canadienne.
     Mme Greenwood voudra peut-être intervenir, mais permettez-moi au préalable de poser une question très pratique, compte tenu des délais évoqués à l'instant, qui me semblent assez courts. Sur le plan pratique, comment pouvons-nous y arriver?
     Croyez-vous que l'industrie et le milieu des affaires veulent que le gouvernement organise un groupe ou est-ce quelque chose que le secteur privé peut organiser par l'entremise d'associations comme la vôtre, madame Greenwood?
    Il faut agir sur les deux plans, selon moi. Le gouvernement a tendance à avoir le pouvoir de rassembler; s'il s'occupe d'un dossier, il peut faire venir des dirigeants d'entreprise. Le plus difficile, cependant, parce que les entreprises aux États-Unis sont constamment débordées, c'est de s'assurer que le dossier se retrouve aux plus hauts échelons.
    Les préférences d'achat local sont vraiment importantes parce qu'elles font monter les coûts, mais le sont-elles plus que le taux d'imposition des sociétés ou d'autres types de problèmes de mobilité de la main-d'oeuvre ou de population active? Cela fait partie du problème. Vous devez faire connaître les échanges qui ont lieu, amener les gens à se rappeler les uns aux autres comment le problème se présente. Le problème est difficile et nous devons nous y attaquer dès maintenant.
(1935)
    Monsieur le président, s'il me reste quelques secondes, je voudrais apporter une précision. Au cours de la séance, nous avons parlé tantôt de « Buy America » et tantôt de « Buy American ». Je tiens à préciser clairement que le Canada est en grande partie exempté de la politique « Buy American ». Le vrai problème tient au « Buy America », et c'est là le sujet de notre étude.
    Merci beaucoup, madame Bendayan.
    Je vous remercie encore une fois, madame Greenwood et monsieur Agnew, d'avoir comparu pour nous faire part de vos réflexions et nous donner vos conseils. Je suis certain que cela nous aidera beaucoup dans nos délibérations. Merci encore au nom du Comité.
    Comme d'habitude, je suis heureuse d'assurer la première partie, avant la prestation de Jerry Dias.
    Je vais suspendre la séance quelques instants pour permettre aux prochains témoins de s'installer.
(1935)

(1935)
    Mesdames et messieurs les membres du Comité, nous reprenons les travaux.
    Je vais maintenant présenter les prochains témoins. Nous accueillons Sean Strickland, directeur exécutif des Syndicats des métiers de la construction du Canada; Jerry Dias, président national d'Unifor, et Angelo DiCaro, directeur de la recherche; Ken Neumann, directeur national pour le Canada, au Bureau national du Syndicat des Métallos, et Meg Gingrich, adjointe au directeur national.
    Monsieur Strickland, je suis heureux de vous revoir. Bon retour au Comité. Je vous cède la parole. Vous avez cinq minutes. Je vous en prie.
    Je suis très heureux de vous rencontrer, ainsi que les membres du Comité. Merci beaucoup pour tout ce que vous faites pour le Canada, et surtout pour le travail important du Comité.
    Je m'appelle Sean Strickland. Je suis le directeur exécutif des Syndicats des métiers de la construction du Canada, la section canadienne des Syndicats des métiers de la construction de l'Amérique du Nord, une organisation composée de 14 syndicats internationaux et de plus de trois millions de travailleurs. Nous travaillons en étroite collaboration avec notre bureau de Washington pour coordonner et appuyer les enjeux qui touchent nos membres des deux côtés de la frontière.
    Aujourd'hui, je vais parler de l'incidence des politiques d'achat aux États-Unis sur les travailleurs spécialisés au Canada et aux États-Unis, et soumettre au Comité deux recommandations: premièrement, que le gouvernement du Canada démontre aux États-Unis qu'il est important d'avoir un commerce sans obstacle avec le Canada; deuxièmement, qu'il préconise la création d'une politique bilatérale ou nord-américaine sur les marchés publics qui traitera de façon permanente des politiques d'achat aux États-Unis.
    Au moyen de la récente Feuille de route pour le renouvellement du partenariat entre les États-Unis et le Canada, le président Biden et le premier ministre Trudeau ont lancé une stratégie visant à renforcer la sécurité de la chaîne d'approvisionnement entre nos deux pays et ont convenu de renforcer notre relation économique profondément interconnectée et mutuellement avantageuse, mais depuis, comme nous le savons tous, le président Biden s'est engagé à adopter une politique qui privilégie l'achat de produits américains.
    Ces mesures protectionnistes n'ont rien de neuf. Elles existent depuis 1933 et elles ont récemment été renforcées par l'ancien président Trump. Le président Biden vise à renforcer encore davantage les exigences protectionnistes en matière de marchés publics. Il prévoit faire en sorte qu'il soit plus difficile pour les entreprises étrangères, y compris les entreprises canadiennes, d'obtenir des dérogations aux règles, en créant un poste de directeur de la politique « Made in America » pour centraliser le contrôle. Par le passé, des exemptions ont été accordées aux fabricants, fournisseurs et entrepreneurs canadiens qui soumissionnaient sur des marchés publics aux États-Unis.
    Bien que ces mesures visent à protéger les emplois, de telles politiques peuvent entraîner des retards dans l'industrie de la construction en raison de l'intégration de notre chaîne d'approvisionnement. Voici deux exemples.
    Un exemple modeste nous vient de Bettendorf, en Iowa. Interdire l'utilisation d'importations canadiennes pourrait faire doubler le coût de construction d'un silo de 427 000 $. Certains composants d'ascenseur à traction, des glissières de guidage et d'autres éléments requis pour rendre la structure conforme à l'Americans with Disabilities Act sont fabriqués uniquement au Canada. La ville a passé six mois à chercher des solutions de rechange et n'a trouvé aucun fabricant connu aux États-Unis qui produisait les pièces requises. En l'absence d'une exemption à la politique « Buy America » — qui n'a pas encore été accordée —, la ville devra faire construire les composantes sur mesure, ce qui fera doubler les coûts, ou renoncer à la subvention fédérale.
    Un exemple plus important est celui du promoteur privé d'un projet de ligne ferroviaire à grande vitesse reliant la périphérie de Los Angeles à Las Vegas, d'une valeur d'environ 5 milliards de dollars. Le promoteur accuse la politique « Buy America » et ses exigences de bloquer son projet. L'entreprise a cherché à obtenir du financement à faible coût dans le cadre du programme fédéral de financement de la remise en état et de l'amélioration des chemins de fer. La demande de prêt a été assujettie à la politique « Buy America », et le secrétaire aux Transports en a suspendu l'examen parce que les promoteurs avaient du mal à satisfaire aux exigences de la politique.
    En cette période d'incertitude économique causée par la pandémie, nous devons renforcer les chaînes d'approvisionnement entre nos deux pays, et non multiplier les entraves.
    Selon un rapport du GAO, les fournisseurs américains obtiennent plus de 10 % des marchés du gouvernement fédéral du Canada, d'une valeur d'environ 1 milliard de dollars, tandis que les fournisseurs canadiens obtiennent environ 0,2 % des contrats fédéraux américains, d'une valeur d'environ 600 millions de dollars. Le gouvernement du Canada octroie des contrats à des fournisseurs américains d'une valeur monétaire bien des fois supérieure à celle des contrats accordés à tout autre pays.
     Dans la Feuille de route, nos dirigeants se sont engagés à se donner des objectifs plus ambitieux en matière de climat et à coordonner la coopération pour atteindre les objectifs de l'Accord de Paris et la carboneutralité.
    En ce qui concerne l'approvisionnement en matériaux de construction, les matériaux canadiens sont parmi les plus écologiques au monde. Les chaînes d'approvisionnement canado-américaines réduisent les émissions associées au transport. Nos systèmes d'énergie et d'électricité sont parmi les plus propres au monde. Nos fabricants sont très efficaces et émettent généralement moins de carbone que les installations de production semblables dans la plupart des marchés étrangers. Le Canada est un chef de file dans la production d'acier à faible teneur en carbone. Nos producteurs d'aluminium ont l'empreinte carbone la plus faible au monde. Nous sommes un chef de file dans le développement et le déploiement d'une technologie de pointe pour le béton qui réduit les émissions. Tout cela aidera le Canada et les États-Unis à atteindre les objectifs climatiques.
    Ce qu'il nous faut, c'est élaborer une solution stratégique à plus long terme et reconnaître que l'intégration de la chaîne d'approvisionnement Canada-États-Unis permet également d'avoir une chaîne d'approvisionnement verte. Nous avons besoin d'une stratégie d'achat en Amérique du Nord pour protéger les emplois canadiens et américains.
(1940)
     Les travailleurs ne devraient pas avoir à payer de leur gagne-pain chaque changement d'administration. L'industrie a besoin d'une continuité stratégique pour croître et créer des emplois pour les travailleurs canadiens. Les villes et les localités doivent se préoccuper du vieillissement des infrastructures au lieu d'avoir à naviguer dans des changements difficiles et des modifications des politiques d'approvisionnement après chaque cycle électoral. Nous avons besoin d'une politique d'achat en Amérique du Nord à long terme qui protège les travailleurs des deux pays.
    Merci de m'avoir accordé du temps, monsieur le président. J'attends avec impatience les délibérations et les questions du Comité.
    Merci beaucoup, monsieur Strickland.
    Je cède maintenant la parole à M. Dias et à M. DiCaro, qui auront cinq minutes en tout.
(1945)
    Bonsoir, monsieur le président et mesdames et messieurs les membres du Comité. Je m'appelle Jerry Dias et je suis le président national d'Unifor. Je représente plus de 315 000 travailleurs dans presque tous les secteurs industriels du pays. Je suis accompagné du directeur national de la recherche d'Unifor, Angelo DiCaro.
    J'ai été heureux d'apprendre en février la mise sur pied du comité spécial. Ces quatre dernières années, notre syndicat a observé de près les relations canado-américaines. Je ne peux que les qualifier de bizarres et instables, soit dit avec diplomatie, dois-je avouer. La nouvelle administration Biden apporte l'espoir de relations de travail plus constructives pour le Canada. Jusqu'à maintenant, les signes sont encourageants.
    La volonté du président de prendre l'initiative en matière de politique sur le climat, de parler avec conviction des droits des travailleurs et des syndicats et d'obliger les employeurs qui enfreignent la loi à rendre des comptes est impressionnante. Son engagement à l'égard de la justice raciale et de l'égalité, d'une fiscalité équitable, de l'infrastructure sociale et des bons emplois arrive à point nommé et est franchement nécessaire. À notre avis, du moins sur papier, cette administration s'harmonise avec le type d'économie tournée vers l'avenir que les membres d'Unifor souhaitent et avec ce qui est proposé dans le budget de cette semaine.
    Rien ne garantit une relation stable, mais ce que nous avons vu jusqu'à maintenant donne à penser que nous sommes partis du bon pied. La Feuille de route canado-américaine de février va dans ce sens. C'était un signe de relations constructives qu'on n'avait pas vu depuis des années.
     Il est important de voir comment favoriser cette harmonisation des politiques. Les échanges musclés au sujet des règles d'achat aux États-Unis, dans le contexte d'un plan de création d'emplois de plusieurs billions de dollars américains et du plan qui s'adresse aux familles américaines, sont inévitables.
    Adoptons une optique stratégique. Les règles favorisant l'achat de produits américains n'ont rien d'étonnant. Elles existent depuis près de 100 ans. Le resserrement des règles a été un élément clé de la campagne électorale Biden-Harris. C'est un espace que les États-Unis ont réussi à préserver pour leur politique, malgré les accords commerciaux. À la différence du Canada, qui a cédé une bonne partie de ce terrain à l'OMC et y a renoncé dans l'AECG.
    Il ne fait aucun doute que les règles du Buy American aux États-Unis se traduisent par des difficultés pour les milieux de travail canadiens qui dépendent des exportations. En 2018, par exemple, le président Trump a fait passer de 60 à 70 % le contenu américain exigé pour les achats des transports en commun financés par le gouvernement fédéral. Cette mesure a entraîné directement la mise à pied de dizaines de membres d'Unifor à notre usine d'assemblage de New Flyer à Winnipeg. Entretemps, la même année, le Canada a acheté pour 1 milliard de dollars de marchandises dans le domaine des transports par l'entremise de VIA Rail. Les exigences relatives au contenu canadien ont été intentionnellement omises. Par conséquent, des travaux d'assemblage ont été effectués dans une usine américaine.
    La politique Buy American pose problème. Une partie des idées lancées par Biden me préoccupe, sans aucun doute, mais nous excellons quand il s'agit d'aggraver encore les choses pour nous-mêmes.
    La question est de savoir ce qu'il nous faut faire. Demander à la Maison-Blanche une exemption générale à la politique Buy American, même si c'est le meilleur résultat possible, n'est franchement pas réaliste. Steve Verheul n'a pas dit autre chose au Comité.
    Ce qui compte, c'est la façon de repérer les points d'harmonisation et de mettre l'accent sur les avantages mutuels dans des domaines comme la durabilité écologique, les normes du travail élevées, les chaînes d'approvisionnement essentielles et le commerce équitable et équilibré. Par exemple, il est presque impossible de bâtir une chaîne d'approvisionnement résiliente et durable en véhicules électriques sans le Canada. Je crois qu'il est possible d'envisager un pacte moderne pour les véhicules électriques.
    L'ajout d'exigences de faibles émissions de carbone dans les marchés publics s'inscrit dans le programme de développement durable des États-Unis. L'élaboration d'une stratégie d'approvisionnement propre et à faibles émissions de carbone entre nos deux pays est avantageuse pour les secteurs à faibles émissions de gaz à effet de serre, comme ceux de l'exploitation forestière et de l'aluminium au Canada.
    Nous soutenons qu'il est essentiel de faire valoir des idées créatives auprès de la Maison-Blanche et d'établir des relations étroites avec le nouvel organisme de surveillance centralisé de la politique « Made in America ».
    Peu importe les exemptions que le Canada pourrait obtenir, le gouvernement doit agir de son propre chef. Cette semaine, nous avons été témoins d'un budget historique qui prévoit des dépenses de stimulation de plus de 100 milliards de dollars. Étant donné que cette question est débattue dans un Parlement où le gouvernement est minoritaire, pourquoi ne pas l'associer à un programme national d'approvisionnement local durable au Canada? Pourquoi ne pas avoir une politique nationale de normes de travail élevées dans les marchés publics? Pourquoi ne pas exiger qu'une partie des dépenses soit réservée aux communautés autochtones ou aux régions économiquement défavorisées?
(1950)
     Notre programme de reprise ne peut pas reposer uniquement sur les entreprises canadiennes qui obtiennent des marchés publics à l'étranger. Je ne suis certainement pas favorable à ce que des Canadiens soient exclus du marché du travail, mais je ne suis pas d'accord non plus pour que nous restions les bras croisés alors que nous disposons de moyens toujours inemployés.
    Je remercie le Comité de son invitation et du travail qu'il fait pour notre pays.
    Je me ferai un plaisir de répondre à vos questions.
    Merci.
    Merci, monsieur Dias.
    Enfin, monsieur Neumann et madame Gingrich, vous avez la parole pour un total de cinq minutes.
    J'aimerais d'abord vous remercier vous, monsieur le président, ainsi que la greffière, le personnel du Comité, les interprètes et tous les membres du Comité de l'occasion qui m'est donnée de faire une présentation et de me joindre à vous aujourd'hui.
    Comme vous l'avez indiqué, je m'appelle Ken Neumann, et je suis le directeur national pour le Canada du Syndicat des Métallos. Le Syndicat des Métallos compte 225 000 membres actifs au Canada et 600 000 autres aux États-Unis. Nos membres travaillent dans presque tous les secteurs de l'économie, y compris dans des industries qui dépendent directement du commerce en Amérique du Nord.
    En raison de notre structure binationale, nous possédons une compréhension unique de l'importance d'assurer des marchés nord-américains vigoureux et intégrés. Aux États-Unis, les choses bougent rapidement. Le plan de création d'emplois aux États-Unis, l'American Jobs Plan, que le président Biden a annoncé le 31 mars dernier, notamment l'engagement d'investir 2 billions de dollars dans les systèmes de transport, les habitations et les immeubles, et les infrastructures hydrauliques, pourrait entraîner de lourdes conséquences pour le Canada. C'est ce qui se produira, et ce qui est généralement prévu, si le projet de loi sur les infrastructures élargit les dispositions de la Buy American Act afin d'y inclure d'autres produits et les projets d'infrastructure infranationaux financés par le fédéral.
    Les projets d'infrastructure comptent sur des produits comme l'acier, l'aluminium et le bois, dont bon nombre sont actuellement fabriqués au Canada. Nous devons agir rapidement afin de veiller à ce que le Canada ne soit pas tenu à l'écart de ces plans. Comme le président international du Syndicat des Métallos Tom Conway l'a dit récemment tout en applaudissant l'ensemble des initiatives du président Biden, « Le Canada ne constitue pas le problème auquel se heurtent la fabrication et les travailleurs américains. La collaboration entre le Canada et les États-Unis renforcera notre relation commerciale productive de longue date. » Donc, à quel point cette relation est-elle productive?
    Comme vous le savez peut-être, les industries canadiennes expédient à elles seules environ 16 milliards de dollars en produits d'acier et d'aluminium aux États-Unis chaque année. Il s'agit de 90 % de toutes les exportations canadiennes d'acier et des deux tiers des revenus totaux de l'aluminium. Ces industries emploient directement plus de 38 000 Canadiens, et plus de 140 000 emplois additionnels y sont reliés indirectement. Le secteur forestier du Canada emploie directement plus de 200 000 travailleurs. De plus, les États-Unis constituent notre principale destination, représentant environ 75 % de nos exportations de bois d'œuvre seulement. Nos chaînes d'approvisionnement sont aussi profondément intégrées. Dans le secteur automobile, par exemple, ce qui, au départ, est une bande métallique peut traverser la frontière cinq à six fois aux fins de transformation avant d'aboutir à sa forme définitive. Si nous voulons que la relation économique solide entre nos deux pays se poursuive, nous devons obtenir une exemption générale aux dispositions de la Buy American Act; nous avons besoin d'une stratégie d'approvisionnement binationale axée sur l'utilisation de produits écologiques de haute qualité fabriqués en Amérique du Nord; finalement, nous devons trouver une solution au conflit sur le bois d'œuvre qui dure depuis des décennies.
    Sous l'administration américaine précédente, les Métallos se sont fortement opposés aux tarifs imposés aux termes de l'article 232 sur les produits d'acier et d'aluminium canadiens. Il y a 10 ans, nous avons collaboré avec l'administration Obama à la mise au point d'une stratégie nord-américaine dont ont profité les travailleurs des deux côtés de la frontière. Maintenant, dans le cadre d'un plan visant à continuer de renforcer notre relation, nous préconisons une stratégie d'achat propre en Amérique du Nord qui tiendrait compte en priorité des incidences sur l'environnement des matériaux utilisés dans la construction de projets publics. Le récent rapport « Acheter propre » de Blue Green Canada, une alliance entre des organisations ouvrières et environnementales fondée par le Syndicat des Métallos, montre que les produits d'acier, d'aluminium, de ciment et de bois fabriqués au Canada comptent parmi les plus sobres en carbone dans le monde. Cette incidence environnementale relativement faible cadre avec les objectifs déclarés du président Biden et de notre gouvernement canadien, et protégerait et créerait des emplois.
    Les produits forestiers du Canada représentent une possibilité de réduire l'empreinte carbone. Cependant, avant que les États-Unis et le Canada puissent travailler ensemble dans le secteur forestier, nous devons conclure un accord à long terme qui résout le conflit sur le bois d'œuvre résineux une fois pour toutes. Actuellement, des milliers de travailleurs font face à des mises à pied chaque fois que les États-Unis imposent de nouveaux tarifs sur le bois d'œuvre. Bien que le mécanisme de règlement des différends de l'ALENA ait été intégré à l'ACEUM, une résolution générale du conflit sur le bois d'œuvre ne faisait pas partie des négociations.
(1955)
    Les prix exorbitants du bois actuellement masquent la gravité du problème. Nous devons trouver une solution avant que les prix diminuent à nouveau et que les travailleurs en fassent les frais. Le Syndicat des Métallos est d'avis que si le Canada adopte une approche stratégique face à la situation, les travailleurs canadiens pourraient alors avoir la possibilité de profiter des investissements massifs du président Biden dans l'infrastructure, l'environnement et les emplois.
    À cette fin, nous poursuivrons nos efforts tant au Canada qu'aux États-Unis en vue de promouvoir un secteur manufacturier vigoureux et propre. Nous ne pouvons laisser passer cette occasion.
     Merci encore. Je me ferai un plaisir de répondre à vos questions.
    Merci beaucoup, monsieur Neumann.
    Nous allons maintenant entamer notre premier tour.
    Monsieur Strahl, vous avez la parole pour six minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Merci à tous d'être ici aujourd'hui.
     Je suis heureux de voir que bon nombre d'entre vous ont également participé à notre discussion sur la ligne 5. Nous avons pu, je crois, constater l'intérêt des syndicats à défendre les 20 000 emplois et plus que ce conflit met en péril. Nous vous sommes reconnaissants de vos commentaires.
    Monsieur Strickland, votre organisation a défendu les travailleurs de Keystone et d'autres qui ont été touchés par la décision de l'administration américaine. Je suis heureux de vous voir vous battre pour les projets canadiens et les travailleurs canadiens et, dans ce cas, pour les travailleurs des deux côtés de la frontière. C'est de cela que je veux vous parler, monsieur Strickland.
    Au début, vous avez parlé du caractère international de certaines de ces organisations syndicales. Avez-vous discuté avec vos homologues américains de la façon dont vous pouvez travailler ensemble pour défendre les travailleurs qui seront touchés négativement des deux côtés de la frontière? À quoi ressemble cette stratégie? Le groupe de témoins précédent nous a dit qu'il faudrait peut-être faire valoir aux législateurs américains qu'il est souvent préférable pour les projets d'utiliser des matériaux canadiens fabriqués par des travailleurs canadiens.
    Vous pourriez peut-être nous parler du travail au niveau de la frontière ou de la coopération à laquelle votre organisation participe tous les jours.
    Nous travaillons bien sûr avec nos homologues de Washington. J'aimerais entendre ce que Ken a à dire, car il représente un autre syndicat international.
    Je peux ajouter que l'ambassade du Canada a été très active dans ce dossier également et qu'elle a communiqué avec les dirigeants, les responsables canadiens des métiers de la construction. Nous animons des discussions avec les directeurs canadiens ainsi qu'avec les présidents de nos 14 syndicats affiliés qui sont basés à Washington.
    Une partie de notre défi consiste à faire connaître l'importance de cette question et les répercussions qu'elle pourrait avoir sur les travailleurs canadiens. Nous devons nous efforcer de mettre en évidence de nombreux exemples de projets, et nous continuons de le faire avec l'appui du personnel du bureau de Washington. Si on ne lui en parle pas, cela ne fait pas vraiment partie de ses préoccupations.
    Dans ma déclaration liminaire, j'ai donné des exemples de projets — un ascenseur en Iowa et un important projet de train léger sur rail entre Las Vegas et Los Angeles —, mais il y a de nombreux autres exemples, comme le relèvement de ponts et la construction de logements à Cleveland, en Ohio, ainsi que l'installation de filtres à eau dans des usines de traitement des eaux usées. Nous avons une liste de 15 usines de traitement des eaux usées dans les grandes régions métropolitaines des États-Unis d'Amérique dont les activités ont été ralenties en raison des politiques d'achat aux États-Unis.
    Une partie de notre défi consiste vraiment à sensibiliser les gens à l'externe — et aussi à l'interne — à l'importance que cela revêt pour les travailleurs canadiens, et nos dirigeants aux États-Unis nous appuient à cet égard.
(2000)
    Excellent. Je vais donner la parole à M. Neumann pour la prochaine question. Il voudra peut-être aussi aborder la question de la collaboration avec vos partenaires internationaux.
    Vous avez mentionné à plusieurs reprises une stratégie intégrée d'énergie propre ou de fabrication propre. Avec le groupe de témoins précédent, nous avons parlé d'un mécanisme d’ajustement carbone à la frontière et nous en avons parlé brièvement. Il y aurait moyen de déterminer si les biens fabriqués dans d'autres pays — en particulier la Chine — devraient être assujettis à un tel mécanisme d'ajustement fondé sur des intrants manufacturiers comme l'acier et l'aluminium, par exemple. Les Métallos ont-ils réfléchi à cela? Ont-ils une position à ce sujet?
    À votre avis, cela pourrait-il s'appliquer à la véritable cible d'achat aux États-Unis par d'autres moyens, plutôt qu'à une approche fourre-tout qui mette dans le même sac les produits plus propres comme l'acier et l'aluminium?
     Merci beaucoup pour cette question. Vous avez mis dans le mille.
    C'est ce que nous avons demandé au gouvernement. Nous avons dit à plusieurs reprises qu'il devrait y avoir un mécanisme d’ajustement carbone à la frontière parce que le Canada — comme je l'ai dit au début — possède l'acier et l'aluminium parmi les plus propres qui soient. Nous éviterions ainsi une partie du problème lié au dumping et aux marchandises venant de l'étranger. Nous sommes donc tout à fait d'accord pour qu'il y ait un ajustement du carbone à la frontière.
    Pour revenir sur les commentaires de M. Strickland, je dirai que notre syndicat a joué un rôle de premier plan. Je pense que les relations entre le Canada et les États-Unis se sont quelque peu rétablies. Sous le gouvernement précédent, la situation a été plutôt nébuleuse pour nous pendant longtemps, quand l'administration américaine nous percevait comme une menace à la sécurité et qu'elle nous a imposé des droits de douane sur l'acier et l'aluminium. Il se trouve que nous étions aux États-Unis au moment où notre conseil exécutif international a publié une résolution disant que le Canada était le pays le moins dangereux qui soit pour la sécurité nationale, et c'est toujours le cas aujourd'hui.
    Je vois une occasion ici parce que nous connaissons un nouveau départ. Le président des États-Unis et le premier ministre du Canada ont, je crois, une vision semblable en matière d'environnemental et d'avenir plus vert. Notre syndicat travaille des deux côtés de la frontière. Nous travaillons avec le gouvernement canadien, l'ambassade, notre bureau de lobbying à Washington et l'ambassade là-bas également. Nous tendons la main à nos alliés parce que, comme l'a dit le président Conway, le Canada et les États-Unis entretiennent depuis longtemps des relations commerciales. Pourquoi voudriez-vous punir votre meilleur voisin?
    Nous avons tous, j'en suis sûr, traversé la frontière et vu des files de camions sur des milles et des milles. Ils ne traversent pas à vide. Ils transportent des produits fabriqués dans l'autre pays, par des travailleurs que nous représentons des deux côtés de la frontière; c'est cela, le commerce. Le Canada et les États-Unis ont une longue histoire d'échanges commerciaux, alors je pense qu'il y a une occasion que nous ne devrions pas rater. Je suis certain que nous allons tous travailler le plus fort possible pour surmonter la Buy American Act parce que... N'oubliez pas non plus que le marché américain est 10 fois plus gros que le nôtre. Nous sommes petits comparativement à... Pour moi, c'est l'éléphant et la souris. C'est à cela que cela se résume. Nous travaillons aussi fort que possible.
    Merci, monsieur Strahl.
    Nous allons maintenant passer à M. Sarai pour six minutes. Allez-y, monsieur Sarai.
    Merci aux témoins. Je suis heureux de vous revoir en grand nombre. Je n'oublie pas que je suis fils d'ouvrier, membre du Syndicat des Métallos et que mon frère est membre d'Unifor. Ma circonscription compte des écoles de métiers, des collèges et des instituts de formation. Je suis très près de vous tous. Je vous remercie de votre présence.
    Je pense que vous ne devriez pas utiliser l'analogie de l'éléphant et de la souris parce que vous êtes assez puissant et que l'éléphant a peur de vous quand vous joignez vos forces. Je suis très heureux d'apprendre que vous avez la pleine collaboration de l'ambassade du Canada et du gouvernement pour vous aider. Et puis, nous avons besoin de vous en ce moment pour faire appel à vos confrères et consœurs du Sud afin de nous aider à tuer certaines de ces idées poison qui circulent.
     Monsieur Dias, avec le Recovery Act de 2009, l'administration américaine a mis en œuvre des dispositions strictes d'achat aux États-Unis. Comment les syndicats ont-ils réagi au Canada et aux États-Unis? Comment pouvons-nous utiliser cela, peut-être, pour faire face à la situation actuelle?
(2005)
    Le Recovery Act a été adopté à la fin de 2009, sous l'administration Obama. Soit dit en passant, ce n'est pas nouveau pour nous. Toute la question des dispositions d'achat aux États-Unis n'est pas nouvelle; nous en parlons depuis des générations.
    Au Canada, nous nous sommes battus pour obtenir des exemptions, et je pense que nous avons obtenu gain de cause dans quelque 37 États qui ont permis aux entreprises de chez nous de soumissionner sur leurs marchés, mais en fin de compte, le Canada a refusé la contrepartie aux Américains pour toutes les occasions d'approvisionnement fédérales et provinciales. À l'époque, il y avait un débat au Canada sur la question de savoir si nous n'allions pas abandonner trop de choses.
    Par rapport à l'historique de ce dossier, il convient de garder les choses en contexte. Si je remonte cinq ou six ans en arrière, en 2015, sur les 500 000 contrats accordés à des entreprises non-américaines, le Canada en a obtenu environ 4 % pour une valeur d'environ 700 millions de dollars, ce qui, dans l'ensemble, représente les deux cinquièmes de quasiment rien. Nous n'avons jamais vraiment remporté de gros contrats aux États-Unis.
    Et puis, il y a l'autre aspect de la question. Je ne veux pas m'écarter du sujet, mais il fallait s'attendre à ce qui se passe. Les colistiers Biden-Harris ont fait campagne là-dessus. Je pense que l'administration Biden va chercher à réfuter tout le raisonnement de Trump qui s'était fait élire en affirmant que la fermeture des usines de montage d'automobiles en Ohio était le résultat de piètres accords commerciaux. Je pense que l'administration Biden va faire tout ce qu'elle peut pour reprendre à son compte l'argument de la défense des travailleurs américains. Je pense que nous avons beaucoup de pain sur la planche.
     Merci.
    Monsieur Strickland, pensez-vous que les syndicats américains réclameront une exemption au Canada, compte tenu de ce que vous avez dit tous les trois au sujet de la viabilité... ou de nos pratiques de travail, de notre niveau d'intégration? Partant, pensez-vous que vos homologues américains avec lesquels vous travaillez nous appuieront à cet égard?
    Nos confrères et nos consœurs ainsi que les dirigeants des Syndicats des métiers de la construction en Amérique du Nord appuient les travailleurs canadiens. Cela étant, ils appuient certainement nos initiatives.
    Je pense que, dans le cadre d'une stratégie à plus long terme, nous devons tirer parti des approvisionnements écologiques. M. Neumann en a parlé, et j'en ai parlé. Jerry a aussi parlé de la chaîne d'approvisionnement des batteries, par exemple. Je pense que l'administration Biden s'est engagée encore davantage cette semaine à rendre l'économie américaine plus verte. Nous avons l'industrie de notre côté. Quand on songe en particulier à l'investissement massif dans les infrastructures que le gouvernement Biden prévoit de faire, je pense que nous aurons des occasions de trouver des façons de contourner les dispositions du Buy American Act en tirant parti des achats écologiques. Il y a là, je crois, une véritable occasion à saisir. Je pense que, dans ces domaines, nous pourrions accorder des exemptions et acheter des produits nord-américains.
    Merci.
    Monsieur le président, me reste-t-il du temps?
    Il vous reste une minute.
    Monsieur Neumann, l'administration Biden a indiqué qu'elle préférait une politique économique et commerciale axée sur les travailleurs, comme l'a dit M. Strickland.
    Seriez-vous d'accord pour dire que le message contre l'expansion de la politique d'achat aux États-Unis devrait être axé sur la main-d'œuvre?
    Nous le faisons. Je connais la position de notre syndicat. J'entends ce que dit M. Strickland.
    Je pense que les travailleurs américains comprennent que le Canada n'est pas le problème.
    Je comprends l'argument de M. Dias selon lequel chaque gouvernement veut tenir compte de ses citoyens. Bien sûr. Le Canada agirait de la même façon selon le cas. Nous parlons ici de la situation de votre meilleur voisin que vous pouvez tous imaginer et du fait que nous faisons partie d'un marché intégré depuis des années. J'ai parlé de rétablir la relation parce que nous avons connu une période nébuleuse dans le cas de l'aluminium, de l'acier et des droits de douane, et cela pas une, mais deux fois.
    Je suis un peu plus optimiste face à l'occasion qui s'offre à nous. Pour ce qui est de l'environnement, Meg pourra vous en parler parce qu'elle est également présidente de Blue Green Canada qui vient de faire une importante annonce aujourd'hui. Comme vous le savez, M. Biden a mis sur pied un grand projet visant à favoriser l'achat de produits verts. Je pense que c'est une avenue que nous devrions explorer le plus possible.
(2010)
    Merci, monsieur Sarai.

[Français]

    Monsieur Savard-Tremblay, vous avez maintenant la parole pour six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Tous ces commentaires sur l'approvisionnement vert sont très intéressants.
    Pourrait-on obtenir une exemption en vertu du programme d'approvisionnement vert des États-Unis? Même lorsque le produit en question n'est pas vert, il est possible de le produire de manière plus verte, comme dans le cas de l'aluminium. L'aluminium n'est pas en soi un produit vert, mais le Québec produit un aluminium beaucoup plus vert que celui de la Chine. Pourrait-on passer à travers les mailles du filet de cette façon? C'est une question que nous nous posons de plus en plus. Je l'ai posée à plusieurs témoins lors des réunions de ce comité. Je pense qu'il serait possible de collaborer de manière intéressante à ce sujet.
    Or pour arriver à tirer son épingle du jeu lors des négociations avec les États-Unis, on doit établir un rapport de force. Pour établir un rapport de force, il faut préparer une contre-réponse. Je vais donc lancer une idée à tous les témoins et j'aimerais savoir ce qu'ils en pensent.
    Faudrait-il commencer par signer un décret similaire qui accorderait la priorité à nos entreprises? La Small Business Act aux États-Unis accorde une place préférentielle aux PME lors de l'octroi de contrats. Devait-on commencer par cela, dans l'espoir de forcer les pays à s'assoir à une même table?

[Traduction]

     À qui s'adresse la question? Je n'en suis pas certain.

[Français]

    Comme je vous le disais, ma question s'adresse à l'ensemble des témoins. Donc, quiconque souhaite y répondre sera le bienvenu.

[Traduction]

    Je peux essayer de répondre à la première partie et vous pourriez peut-être répéter la deuxième partie de la question.
    Pour ce qui est de la production d'aluminium dont vous parlez, de la production d'acier, de la production de ciment, de notre capacité de production d'électricité et du caractère écologique de ces productions, vous pouvez songer à notre chaîne d'approvisionnement et voir à quel point nous sommes près des États-Unis d'Amérique. Il y a aussi les émissions de gaz à effet de serre liées au transport entre le Canada et les États-Unis comparativement à l'importation de matériaux à l'étranger. Nous avons l'occasion de tirer parti de ces approvisionnements écologiques dans le cas des infrastructures et de la fabrication de biens américains, et je pense qu'il serait idéal d'agir sur ces points. Je suis d'accord avec vous, et je pense que l'ambassade canadienne et d'autres travaillent là-dessus.
    Il y a toutes sortes d'exemples. Nous sommes le quatrième plus grand fabricant de piles au lithium au monde et nous sommes en tête sur le plan de la production écologique. Il y a toutes sortes d'aspects de l'industrie canadienne qui sont plus écologiques et qui sont de meilleures solutions que la production américaine, et devraient être exemptés des dispositions de la Buy American Act.
    Monsieur Strickland a raison. La clé pour nous, c'est de trouver le juste milieu avec les États-Unis. Où est-ce que nous avons des points communs? Nous disons que le Canada est un chef de file dans les matériaux de construction à faibles émissions de carbone, qu'il s'agisse du ciment, du bois d'œuvre, de l'aluminium ou de l'acier. L'électricité au Canada est probablement exempte d'émissions à 82 %. S'il y a des points communs à faire valoir aux États-Unis, alors l'élimination des gaz à effet de serre et la faible empreinte carbone du secteur manufacturier en sont certainement.
    Vous avez aussi parlé de l'importation de biens fabriqués avec une technologie autre que verte — disons-le ainsi à défaut d'un autre choix de mots —, alors parlons donc de la Chine. Le Canada va-t-il maintenant imposer un tarif douanier sur les produits à fortes émissions de carbone qui entrent chez lui? Il y aurait lieu d'en parler. Évidemment, cela va susciter une discussion politique avec la Chine, mais je soutiens que nous ne devrions pas avoir peur de tenir ces discussions-là. L'objectif de toute stratégie à venir devrait être, premièrement, de trouver les points communs et, deuxièmement, d'aller de l'avant.
    Monsieur Strickland a soulevé la question des véhicules électriques, dont nous avons parlé longuement. J'ai personnellement passé beaucoup de temps à négocier des investissements avec les trois grands de Detroit, pour une valeur d'environ 6 milliards de dollars au Canada au cours des derniers mois. Nous savons que le cœur d'un véhicule électrique, c'est la batterie. Le cobalt, le magnésium, le nickel et l'aluminium sont les éléments clés, alors nous devrions en faire l'empreinte écologique de notre stratégie. C'est un autre point commun à faire valoir auprès des États-Unis, où il est beaucoup question de rendre plus verte l'industrie automobile. Je pense que nous devons commencer à nous concentrer sur les éléments que nous avons en commun et voir ce que nous pouvons faire à partir de là.
(2015)
    Madame Gingrich, voulez-vous intervenir?
     Bien sûr. Ce que les autres ont dit est essentiellement exact, et c'est aussi notre position. Le fait que nos produits soient beaucoup plus verts que ceux fabriqués dans d'autres régions du monde est un véritable atout et un argument à faire valoir pour tenter d'obtenir des exemptions. L'administration Biden a dit clairement que sa politique commerciale était liée à ses objectifs climatiques et à ses objectifs d'emploi, alors c'est une belle occasion à saisir. En fait, les deux pays — le Canada et les États-Unis — ont fait part aujourd'hui d'une volonté de rendre plus vertes les initiatives gouvernementales, qui porte précisément sur ce genre de choses. Nous voyons dans l'approvisionnement, tant au niveau fédéral que dans le gouvernement en général, un moyen d'imposer des produits plus propres dans les deux pays. C'est en plein là que nous devrions concentrer nos efforts et faire jouer nos leviers.

[Français]

    Merci, monsieur Savard-Tremblay.

[Traduction]

    Monsieur Green, vous avez six minutes.
     Merci beaucoup, monsieur le président.
    J'ai dû négocier avec notre porte-parole qui siège normalement à ce comité, Daniel Blaikie... et, bien sûr, mon caucus de l'acier d'Hamilton a invité Scott Duvall à comparaître devant nous aujourd'hui pour parler de ma priorité numéro un, l'acier.
    Monsieur Neumann, vous connaissez les gens du coin, Ron Wells, Gary Howe et d'autres. J'ai eu l'occasion de discuter avec eux.
    D'abord, j'aimerais vous faire part d'un commentaire que j'ai relevé dans un témoignage antérieur de Mme Greenwood, du Conseil des affaires canadiennes-américaines, qui disait que le Canada n'était pas la cible, sauf peut-être dans le cas de l'acier.
    Dans un sens plus large, je pense à la façon dont Bain Capital a acculé Hamilton Specialty Bar à la faillite, à la façon dont la restructuration de U.S. Steel a touché nos travailleurs.
    J'aimerais demander à M. Neumann, par votre entremise, monsieur le président, dans quelle mesure et en quoi les dispositions de l'American Recovery and Reinvestment Act et de la politique d'achat aux États-Unis ressemblent à celles qui limitent actuellement l'accès du Canada à certains contrats, à cause de l'acier justement, et en quoi elles diffèrent?
    Je ne suis pas certain de bien comprendre. Qu'est-ce qui nous empêche...? Parce qu'actuellement...
    Je vais reformuler ma question, peut-être de façon plus claire.
    Lorsque j'entends Ron Wells me parler du va-et-vient des bobines de bandes laminées à chaud entre les États-Unis et le Canada... Pouvez-vous expliquer au Comité comment on peut même distinguer ce qui est fabriqué au Canada et ce qui est fabriqué aux États-Unis dans tous ces produits qui servent à l'approvisionnement américain? Sommes-nous protégés par cet état de fait, ou sommes-nous déjà en quelque sorte exclus de facto...?
    Je crois savoir que U.S. Steel produit beaucoup à l'heure actuelle. Dofasco aussi.
    Avez-vous des observations à faire sur l'effet que ces restrictions peuvent avoir chez nous?
    Je pense que cela se ramène à la relation de longue date... Le fait est, comme je l'ai dit plus tôt, qu'on peut avoir une bande d'acier qui est fabriquée à Hamilton ou au lac Érié et qui traverse la frontière quatre ou cinq fois avant de devenir un produit final.
    Il y a cette relation de longue date entre le Canada et les États-Unis. C'est pourquoi je ne vois pas le Canada comme la cible. Pourquoi puniriez-vous votre meilleur voisin? Vous êtes à deux pas l'un de l'autre. Si on regarde la relation commerciale que nous avons entretenue au fil des ans, nous avons tiré au clair beaucoup de ces situations, lorsque les États-Unis invoquaient une menace à la sécurité nationale... Le Canada n'est pas le problème, loin de là.
    Vous avez raison. Lorsque les camions traversent la frontière, on ne sait pas où le lingot a pu être coulé ou la bande métallique a pu être coulée; c'est cela, l'idée du marché intégré.
    Comme je l'ai déjà dit, beaucoup d'entre nous ont traversé ces frontières et vu les camions aller et venir. Je ne vois pas cela comme une menace. Je vois que nous avons une occasion à saisir, et nous devrions la saisir.
(2020)
    Cela étant dit, et compte tenu de la fluidité de nos échanges d'acier, j'ai demandé aux témoins précédents s'ils trouveraient logique qu'on dise formellement qui est exclu ou non dans le cas de l'acier, qu'on soit explicite à propos de cette amitié et de cette relation de longue date, permanente, et peut-être qu'on assure dans la loi ou dans les réserves de notre accord que les travailleurs canadiens de l'acier sont dûment protégés, parce que nous savons bien que des produits américains pourraient transiter par nos usines.
    Que verriez-vous comme riposte à un éventuel protectionnisme américain?
    Tout d'abord, quelqu'un a parlé de la Chine, peut-être M. Strickland ou M. Dias. Nous n'avons pas été en mesure de bien contrôler l'acier qui fait l'objet de dumping. Vous avez un pays comme la Chine qui produit plus d'un milliard de tonnes. Elle utilise environ 800 millions de tonnes et cherche quoi faire avec le reste. Elle ne va pas le garder dans sa cour. Elle va chercher à l'envoyer ailleurs.
    L'Amérique du Nord est tout indiquée. Nous n'avons pas été en mesure de faire face au dumping massif des pays qui trichent. Ils sont nombreux à ne pas respecter les règles. Ils ont des normes épouvantables.
     L'empreinte carbone est un des plus gros problèmes que nous ayons eus. Regardez le Canada, toutes les aciéries que nous avions à Hamilton, toutes les autres, et voyez le nombre d'employés qui y travaillent aujourd'hui. La quantité d'acier que le Canada produit est en baisse constante depuis 2014. Et cela continue. Ce n'est tout simplement pas normal.
    Le fait est que nous avons investi... Nous avons des entreprises où investir. Nous avons des gens hautement qualifiés. Pour moi, ce n'est pas compliqué. Il y a tous ces politiciens qui n'ont pas compris comment traiter avec les pays qui font juste du dumping et qui ne respectent pas les règles. Nous ne pouvons pas compétitionner.
    Parfois, les politiciens devraient se regarder dans le miroir. Comment se fait-il que le pont Gordie-Howe devait être construit au début avec de l'acier chinois? Nous nous en sommes mêlés. Je pense que l'ambassadeur était Gary Doer à l'époque. Nous avons fini par changer cela pour de l'acier nord-américain. Comment se fait-il qu'on construise encore des ponts à Montréal et en Colombie-Britannique et que l'acier vienne de Chine? Que quelqu'un m'explique où est le bon sens là-dedans.
    Si on regarde l'empreinte carbone, et ce qu'on vient d'annoncer aujourd'hui au sujet d'un environnement plus vert, bien sûr, c'est important. Nous sommes tous d'accord. Par contre, les choses vont continuer comme avant et les bateaux vont continuer à venir de Chine, avec leur grosse empreinte carbone... mais c'est un autre débat. Je finis par m'emporter sur ce sujet-là. Désolé.
     Non, je comprends. Cela vient me chercher, moi aussi.
    Merci du temps que vous m'avez accordé, monsieur le président.
    Merci, monsieur Green.
    Monsieur Lewis, c'est maintenant à vous. Vous avez cinq minutes, s'il vous plaît.
    Merci, monsieur le président.
    Cela vient me chercher aussi, monsieur, beaucoup.
    Monsieur le président, je m'adresse à tous les témoins. Je déborde d'optimisme pour l'avenir, mais il reste que l'usine d'assemblage de Windsor est fermée depuis trois ou quatre semaines maintenant, et qu'elle le sera encore pendant deux ou trois semaines. Pourquoi? Parce que nous n'avons pas de puces électroniques à mettre dans les pare-chocs. Pourquoi? Parce qu'aucune puce n'est fabriquée en sol canadien ou américain. Pourquoi? Parce qu'elles sont toutes fabriquées à l'étranger. Donc, si nous voulons vraiment sortir de l'impasse, il faut que la solution commence ici et qu'elle finisse ici, en Amérique du Nord. Bien sûr, il faut que ce soit plus abordable, mais nous en avons besoin. Nos travailleurs sont assis chez eux, les emplois déménagent en masse partout sauf chez nous, c'est-à-dire au Canada et aux États-Unis.
    Monsieur Dias, ne serait-il pas sage de commencer à produire davantage de ces articles spécialisés, de ces pièces très complexes pour nos voitures, qu'elles soient électriques ou non? Je comprends très bien. Je suis très fier de présider le caucus conservateur. Et je sais pertinemment que 121 véhicules électriques s'en viennent, et certains vont s'en venir chez nous, je crois. Monsieur Dias, comme vous le savez, au Michigan, GM va commencer à construire des camionnettes électriques. Mais sans pare-chocs à assembler, sans puces électroniques à y mettre, qu'allons-nous faire?
    N'est-il pas important que toutes les étapes de la fabrication se déroulent ici, au Canada?
(2025)
    Cela ne fait aucun doute. Vous adoptez la bonne position, non seulement au sujet de la fabrication, mais de toutes sortes d'autres éléments dans la chaîne. Pensons à la pandémie, par exemple, et à quel point elle nous a pris au dépourvu. Nous ne pouvions même pas assurer la sécurité de nos propres citoyens. Nous n'avions aucun moyen de fournir des vaccins. Nous n'avions même pas de masques ou de combinaisons parce que, chez nous, les gouvernements se succèdent en croyant toujours à la théorie qui dit que si c'est moins cher, c'est meilleur. Nous avons donc sous-traité notre sécurité, comme nous avons sous-traité d'ailleurs une grande partie de notre capacité manufacturière. Vous avez raison: les usines d'assemblage sont en panne en Amérique du Nord parce qu'on manque de puces d'ordinateur. Mais cela fait des générations que nous n'avons pas de stratégie industrielle. Nous sommes le seul pays au monde qui possède autant de ressources naturelles et de matières premières et qui n'a jamais eu de stratégie pour mettre les Canadiens au travail.
    Comment faire les choses différemment? C'est bien le sujet d'aujourd'hui, vous avez raison. Franchement, quelle leçon tirons-nous de voir les États-Unis appliquer une stratégie d'achat chez eux? Allons-nous parler d'une stratégie d'achat chez nous? Si nous devons avoir des marchés publics canadiens d'une valeur de 100 milliards de dollars par année, pourquoi diable n'aurions-nous pas une stratégie qui procurerait du travail aux Canadiens à hauteur de ces 100 milliards de dollars?
    Voilà le genre de discussions que nous devons avoir. Nos gouvernements doivent se libérer de cette mentalité de libre entreprise à tout prix qui force les travailleurs canadiens à réduire leurs salaires pour être compétitifs, comme si tout à coup nous pouvions concurrencer les travailleurs mexicains. Nous allons donc devoir tenir un vrai débat, franc et vigoureux, sur la mobilisation des forces vives et sur les besoins du pays, et tout ce qui en découle.
    Merci, monsieur.
    Monsieur le président, combien de temps me reste-t-il, s'il vous plaît?
    Il vous reste 45 secondes.
    Merci beaucoup. Je serai très bref.
    Évidemment, l'assemblage de véhicules automobiles serait de niveau 1. Je sais que les fournisseurs de niveaux 2 et 3 ont énormément de difficultés à la frontière. Ils encaissent les coups durs, parce qu'il n'y a pas de direction claire et précise. Si nous ne pouvons pas faire traverser les pare-chocs à la frontière, par exemple, il n'y aura pas de voitures à assembler, tout simplement.
    Monsieur Dias, pourriez-vous nous parler de l'importance pour nos fabricants de traverser la frontière aller-retour, en toute sécurité évidemment?
     Vous avez raison, et il y a deux éléments à considérer ici.
     Il y a la libre circulation des pièces à la frontière. En ce qui concerne l'industrie automobile, vous avez raison, et M. Neumann en a parlé à propos de l'industrie sidérurgique. Il y a des pièces qui traversent la frontière cinq ou six fois avant d'être assemblées dans un véhicule, alors cela ne changera pas. Voilà pour le premier élément.
    L'autre élément concerne, bien sûr, l'approvisionnement. Nous n'aurons jamais au Canada une industrie automobile à laquelle nous pourrons fournir toutes les pièces, mais nous devons nous assurer que les grosses composantes sont fabriquées près de l'usine d'assemblage. Nous ne pouvons pas perdre cela.
    Vous avez raison. Il faut que la technologie, la capacité de fabrication et l'assemblage se trouvent dans la région frontalière pour que nos usines d'assemblage fonctionnent. Vous avez raison: nous ne pouvons pas nous permettre de voir partir ce qui constitue les entrailles du véhicule.
    Merci, monsieur le président.
    Merci, monsieur Lewis.
    Nous passons maintenant à M. Housefather. Vous avez cinq minutes, s'il vous plaît.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Strickland, monsieur Dias, monsieur DiCaro, monsieur Neumann et madame Gingrich, je vous remercie de votre présence. Je vous en suis très reconnaissant.
    Monsieur Dias, je suis très intéressé à vous parler d'achat dans un instant, mais avant, j'ai une question pour M. Neumann et M. Strickland au sujet de la politique d'achat aux États-Unis.
     J'ai écouté une grande partie de ce que vous avez dit, et je suis tout à fait d'accord pour dire que nous sommes en harmonie avec l'administration Biden. Nous avons en commun beaucoup de valeurs, de normes environnementales, de normes du travail, etc., et nous avons assez d'alliés au Congrès pour trouver un moyen, je crois, de collaborer et de voir ensemble ce que nous faisons de bien et sur quel terrain d'entente nous pouvons créer ce genre de cadre nord-américain.
    Comme vous l'avez dit au sujet de l'administration Trump, M. Trump a gagné en 2016 en persuadant beaucoup de travailleurs, beaucoup de cols bleus, que le libre-échange avec le Canada et le monde était mauvais. Au lieu d'essayer de corriger cette impression, on dirait que l'administration Biden et beaucoup de politiciens aux États-Unis semblent croire qu'il vaut mieux reprendre cette théorie, lui donner plus de force et simplement montrer qu'ils sont encore meilleurs que Trump au jeu de l'achat américain. J'ai examiné les déclarations de l'AFL-CIO et des Teamsters, qui ont félicité M. Biden lorsqu'il a annoncé qu'il reprenait à son compte les politiques Buy America.
    Pourriez-vous me donner une idée de l'impression qui ressort lorsque vous parlez à vos homologues américains dans vos syndicats et de ce qu'ils voient sur le parquet du Congrès, et me dire s'ils croient vraiment qu'il y a moyen d'éduquer les législateurs américains pour qu'on nous accorde une telle exemption? Ou devrions-nous riposter par une stratégie canadienne, comme l'entendait M. Dias? Je sais que c'est une longue question, mais j'aimerais savoir ce que vous en pensez.
(2030)
    Comme je l'ai dit et comme vous le savez, nous avons publié une déclaration signée par moi-même et par notre président international, Thomas Conway, qui est très proche de l'administration Biden. Je sais que nous avons parlé à la personne qui s'occupe maintenant de l'infrastructure, et nous sommes en discussion continuelle depuis.
    Écoutez, les Américains ont des demandes à faire. Une des choses qui les préoccupent, c'est la façon dont le Canada traite les pratiques de contournement — est-ce que nous protégeons bien nos frontières? Ce qu'ils craignent, c'est qu'il y ait énormément de... que le Canada devienne un endroit de prédilection pour le dumping et que, de quelque façon, il y ait des transbordements qui passent inaperçus... Ce sont des questions que nous devons régler. Je peux vous assurer que notre président en a touché mot au gouvernement canadien, et je pense que le gouvernement canadien va y prêter attention.
    Ce qu'ils comprennent tous par contre, d'après ce que nous en savons, c'est que le Canada n'est pas le problème. Voyez la quantité de bois d'œuvre, d'acier et d'aluminium, tous des produits dont ils ont besoin. Mais lorsqu'on en vient au point qui a été soulevé au début, celui du virage vert... Il y a cette communauté de vues entre le président Biden et le gouvernement canadien aujourd'hui, et si on considère l'annonce toute récente qu'il faut relever la barre en matière d'environnement, c'est par là que la société s'en va, et nous avons une occasion à saisir. Je suis convaincu que les travailleurs américains comprennent que le Canada n'est pas le problème. Bien sûr, il y a la politique, il y aura du protectionnisme et ce genre de choses. Il y en aura de notre part aussi.
    C'est ainsi que je vois les choses. Les travailleurs canadiens ne sont pas le problème.
    Je pense que nous sommes tous d'accord là-dessus. La question est de savoir comment les Américains le perçoivent.
    Monsieur Strickland, avez-vous quelque chose à ajouter à ce sujet?
    Bien sûr, monsieur Housefather. Merci beaucoup de la question.
    Il est juste de dire que nos bureaux aux États-Unis ont l'oreille de membres influents du Congrès et du Sénat. Je pense que la dynamique ici, sans vouloir la simplifier à l'extrême, c'est que parfois la bonne politique ne fait pas nécessairement de bonnes politiques publiques. Vous faites tous de la politique. Vous savez comment cela fonctionne. Malheureusement, c'est dans la nature des choses. Dans la dynamique actuelle, une grande partie des Américains croient que l'achat aux États-Unis est une bonne politique économique, et cela va aider leurs représentants à se faire réélire aux élections de mi-mandat et ainsi de suite.
    Nous pouvons donc en discuter, et nous pouvons avoir des conversations raisonnables avec les représentants élus des deux côtés de la frontière, mais parfois c'est tempéré par la politique. Voilà la réalité dans laquelle nous devons naviguer. Je vous ai donné de nombreux exemples de la façon dont les politiques d'achat aux États-Unis, l'ancienne et la nouvelle, ne sont pas bonnes pour la construction — et nous en avons fait part à nos homologues aux États-Unis —, mais parfois, on se fait éclipser par la politique.
     Je suis tout à fait d'accord.
    Monsieur le président, est-ce qu'il me reste une minute?
    Non. Il vous reste 10 secondes.
    Monsieur Dias, je voulais vous parler de la stratégie d'approvisionnement. Nous pourrions peut-être le faire hors ligne. Je suis désolé.
    Pas de problème.
    Nous allons organiser cela. Merci.

[Français]

    Monsieur Savard-Tremblay, vous avez la parole pour deux minutes et demie.
     Merci, monsieur le président.
    Je vais sans doute revenir à ma question précédente. C'est M. Strickland, il me semble, qui a répondu à la première question et qui m'a dit que je pourrais revenir sur la seconde. C'est donc ce que je vais faire.
    Faut-il adopter l'équivalent de la Buy American?Act ou quelque chose de similaire, dans la mesure du possible? En effet, il est évident que chaque économie est propre à son pays. Par conséquent, nous n'aurions sans doute pas le pouvoir d'adopter, dans le contexte canadien, une version copiée-collée de la Buy American?Act.
    Pourrions-nous cependant, dans la mesure du possible, adopter une loi quelconque qui accorderait la priorité à nos entreprises? Pourrions-nous aussi adopter quelque chose de similaire à la Small Business Act, qui permettrait d'accorder une priorité aux PME?
    Bref, serait-il possible d'avoir, nous aussi, une politique d'achat et d'octroi de contrats nous permettant de donner la priorité aux entreprises canadiennes et québécoises?
(2035)

[Traduction]

    Je pense qu'il y a certainement lieu d'en discuter. Je sais par exemple que pour de nombreux grands projets d'infrastructure financés par le gouvernement fédéral, il y a des exigences d'achat au Canada, en particulier pour les projets de transport en commun et d'autres du genre.
     Pour faire suite aux propos de M. Dias, je pense que tout ce qui peut favoriser la réindustrialisation du Canada est une bonne chose. Nous de la construction, nous faisons tout l'entretien dans ces aciéries et ces usines d'automobiles, alors la réindustrialisation du Canada nous concerne directement aussi. Donc, oui, il y a de la place pour cela.
    Évidemment, comme vous le savez, monsieur Savard-Tremblay, lorsque nous traitons avec les États-Unis, nous avons affaire à la plus grande économie du monde. Nous parlons de la Chine, mais les États-Unis sont encore la plus grande économie du monde. Nous devons faire très attention aux pratiques que nous mettons en place pour ne pas compromettre notre relation. Depuis plus de 100 ans, nos rapports commerciaux avec nos vis-à-vis américains sont plutôt colorés et mouvementés.
    Pour répondre à votre question, je pense qu'il y a lieu d'en discuter. Nous pouvons examiner les mesures qui vont déjà dans ce sens et peut-être leur donner plus d'ampleur, mais nous devons faire attention de ne pas compromettre la relation globale.

[Français]

    Merci, monsieur Savard-Tremblay.

[Traduction]

    Les dernières questions appartiennent à M. Green. Vous avez deux minutes et demie, s'il vous plaît.
    Merci.
    Je veux simplement dire que je suis tout à fait d'accord avec M. Dias au sujet de l'occasion que nous offre notre programme de 100 milliards de dollars pour la relance après-COVID. Il parlait de 2009...
    Je suis désolée de vous interrompre, monsieur Green. Pourriez-vous baisser votre microphone, s'il vous plaît?
    Oh, mon Dieu.
    Est-ce que je dois recommencer?
    Oui. C'est bien.
    Je voulais simplement dire que je suis d'accord avec M. Dias. J'ai pris bonne note de ses observations selon lesquelles nous avons ici une occasion de 100 milliards de dollars pour nous relever de la COVID. Lorsqu'il parlait de 2009, il se joignait, j'imagine, à un front commun des milieux ouvriers et de la société civile sur l'octroi des marchés publics, ce qui n'a rien de nouveau. On était en récession à ce moment-là, et il était légitime d'invoquer ce genre de mesures de relance financées par les contribuables.
    Monsieur Dias, vous avez dit que le Canada ne comptait que pour 4 % des contrats américains. J'aimerais savoir si vous connaissez la proportion inverse, c'est-à-dire quelle est la part d'approvisionnement américain dans les projets canadiens. Quels seraient les avantages et les désavantages pour les entreprises et les travailleurs canadiens si nous attachions des conditions d'achat au Canada à notre programme post-COVID de 100 milliards de dollars pour financer des projets d'infrastructure publique chez nous?
     C'est une excellente question.
    Les 4 % que le Canada avait obtenus en 2015 s'appliquaient aux contrats octroyés à l'extérieur des États-Unis. On parle de 700 millions de dollars, ce qui est deux cinquièmes de rien. Nous n'avons jamais eu cette manne de contrats fédéraux qui devaient être sous-traités chez nous.
    Aux États-Unis, vous le savez, la majorité de l'argent va du gouvernement fédéral aux États, ce qui permet de se soustraire aux règles de l'OMC puisqu'elles ne s'appliquent pas aux marchés publics des États. C'est ainsi que nous finissons par nous faire exclure.
    En fin de compte, nous devons nous concentrer sur ce que nous pouvons contrôler, et nous ne pouvons pas contrôler la ferme adhésion de l'administration Biden à la politique d'achat aux États-Unis. Comme je le disais plus tôt, M. Biden va se démener pour reprendre à son compte le discours de l'administration Trump, alors les choses vont empirer avant de s'améliorer. Nous devons composer avec cette simple réalité.
    Qu'est-ce que nous pouvons contrôler? Nous pouvons contrôler 100 milliards de dollars, point à la ligne. À nous donc de nous assurer d'investir environ 100 milliards de dollars dans des marchés publics pour garder les Canadiens au travail. Il est absolument insensé de dépenser comme nous l'avons fait un milliard de dollars pour faire construire les trains de VIA Rail par Siemens en Californie. Voilà le genre d'erreurs que nous avons commises. Nous avons toujours eu cette attitude de boy-scout. Il n'y a qu'à regarder les dispositions sur le contenu canadien dans les transports en commun. Elles sont beaucoup plus faibles qu'aux États-Unis. Pourquoi? Cela n'a aucun sens à mes yeux.
    Si les États-Unis imposent chez eux 70 % de contenu américain, pourquoi n'aurions-nous pas 70 % de contenu canadien chez nous? Les règles peuvent être les mêmes pour tout le monde.
(2040)
    Soyez assuré, monsieur, que je ne suis pas un boy-scout, alors c'est tout en ce qui me concerne.
    Merci, monsieur Green. Je vous en sais gré.
    Je tiens à remercier les témoins sans aucun ordre particulier, sauf celui où ils m'apparaissent à l'écran, soit M. DiCaro, M. Neumann, Mme Gingrich, M. Strickland, M. Dias et... je crois que c'est tout.
    Merci beaucoup à tous d'avoir pris le temps de vous réunir avec nous en ce jeudi soir. Je vous remercie sincèrement de nous avoir éclairés sur cette question et de nous avoir aidés dans nos travaux au cours de cette étude. Je souhaite à tous une excellente fin de semaine.
    La séance est levée.
Explorateur de la publication
Explorateur de la publication
ParlVU