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FOPO Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent des pêches et des océans


NUMÉRO 004 
l
2e SESSION 
l
43e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le lundi 26 octobre 2020

[Énregistrement électronique]

  (1650)  

[Traduction]

    Je déclare la séance ouverte. Bienvenue à la quatrième séance du Comité permanent des pêches et des océans de la Chambre des communes. Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement et à la motion adoptée par le Comité le lundi 19 octobre 2020, le Comité poursuit son étude de la mise en œuvre des droits de pêche issus de traités des Micmacs visant à assurer une subsistance convenable.
    J'aimerais commencer par vous fournir des renseignements au sujet de la motion adoptée par la Chambre le mercredi 23 septembre 2020.
    Bien entendu, le Comité siège désormais selon une formule hybride, ce qui signifie que ses membres peuvent participer soit en personne, soit par vidéoconférence. Les témoins doivent témoigner par vidéoconférence. Tous les membres, peu importe leur mode de participation, seront comptés aux fins de quorum.
    Le pouvoir de siéger du Comité est toutefois limité par l'utilisation prioritaire des ressources de la Chambre, qui sont établies par les whips. Toutes les questions doivent être décidées par appel nominal, sauf celles agréées du consentement unanime ou avec dissidence. Enfin, le Comité peut délibérer à huis clos, pourvu qu'il tienne compte des risques de bris de la confidentialité inhérents à ce type de délibérations avec des participants à distance.
    Les délibérations seront diffusées sur le site Web de la Chambre des communes. Sachez que l'écran de la webdiffusion montre toujours la personne qui parle plutôt que l'ensemble du Comité.
    Pour assurer le bon déroulement de la séance, j'aimerais vous présenter quelques règles à suivre.
    Pour ceux qui participent à la séance virtuellement, voici les règles: membres et témoins peuvent s'exprimer dans la langue officielle de leur choix. Des services d'interprétation sont offerts pour cette réunion. Vous avez le choix, au bas de votre écran, entre le parquet, l'anglais ou le français. Avant de prendre la parole, cliquez sur l'icône du microphone pour activer votre micro. Quand vous avez terminé de parler, veuillez désactiver votre micro pour réduire au minimum les interférences. Je rappelle que tous les commentaires des membres et des témoins doivent être faits par l'intermédiaire de la présidence.
    Si un député veut demander la parole en dehors de la période qui lui est réservée pour les questions, il doit activer son micro et indiquer qu'il invoque le Règlement. Si un député souhaite réagir au rappel au Règlement d'un de ses collègues, il doit utiliser la fonction « Lever la main ». Je saurai ainsi que vous voulez prendre la parole et je créerai une liste d'intervenants. Pour ce faire, vous n'avez qu'à cliquer sur l'icône « Participants », au bas de votre écran. Quand la liste apparaît, vous verrez, près de votre nom, une icône pour lever la main.
    Lorsque vous avez la parole, veuillez vous exprimer lentement et clairement. À moins de circonstances exceptionnelles, tous les participants à distance doivent utiliser un casque d’écoute muni d'un micro-perche. Signalez tout problème technique à la présidence. Veuillez noter que nous pourrions devoir suspendre la séance pendant quelques minutes, étant donné que nous devons pouvoir garantir la pleine participation de tous les députés.
    Pour ceux qui participent à la réunion en personne, faites comme vous le feriez habituellement si tous les membres du Comité se réunissaient en personne dans une salle de comité. Gardez à l’esprit les directives du Bureau de régie interne concernant le port du masque ainsi que les protocoles en matière de santé. Si vous souhaitez obtenir mon attention, faites-moi un signe de la main ou dites « monsieur le président » au moment approprié. Si vous souhaitez invoquer le Règlement, attendez le moment approprié et dites-moi clairement que vous souhaitez invoquer le Règlement.
    Au sujet de la liste des intervenants, la greffière du Comité et moi ferons de notre mieux pour avoir une liste consolidée des intervenants, qu'ils participent virtuellement ou en personne.
     J'aimerais maintenant souhaiter la bienvenue aux témoins du premier groupe. Nous accueillons le chef Paul J. Prosper, de la Nation Mi'kmaw de Paqtnkek, chef régional de l'Assemblée des Premières Nations pour la Nouvelle-Écosse et Terre-Neuve. Nous accueillons aussi le chef Darcy Gray du gouvernement mi'gmaq de Listuguj.
    Nous passons maintenant à la déclaration préliminaire du chef Prosper. Je rappelle aux intervenants qu'ils ont cinq minutes pour leurs exposés. Je serai ferme quant au temps imparti, puisque nous commençons en retard. Nous voulons nous assurer de pouvoir poser nos questions et d'entendre vos importants témoignages.
    Chef Prosper, lorsque vous êtes prêt, allez-y. Vous avez cinq minutes, tout au plus.
    Kwe. Merci, monsieur le président. Honorables membres du Comité, je suis honoré d'être ici. Je suis ici au nom de l'Assemblée des Premières Nations, à titre de chef régional pour la Nouvelle-Écosse et Terre-Neuve.
    Pour commencer, j'aimerais souligner que la définition de concepts juridiques comme la « subsistance convenable » ou la « pêche de subsistance » va au-delà de la portée et du mandat du Comité. Agir de la sorte aurait pour effet de miner les négociations de nation à nation en cours entre les Micmacs et le gouvernement fédéral. Je crois plutôt que le but premier de cette audience est de vous informer, les dirigeants de ce pays, sur certaines questions et perspectives auxquelles les Micmacs sont actuellement confrontés. Y arriver en cinq minutes ou moins sera difficile.
    Premièrement, en guise de contexte, nous, les Micmacs, avons une longue histoire sur notre territoire traditionnel. Nous avons notre propre récit de la création. Nous avons des légendes qui parlent d'une époque où la glace a commencé à marcher sur la terre. Avant l'arrivée des Européens, nous existions en tant que nations indépendantes régies par nos propres coutumes, valeurs et traditions. En tant que tels, nous avons des droits ancestraux et issus de traités qui ont été reconnus et confirmés par la loi suprême du pays, la Constitution, et le plus haut tribunal du pays, la Cour suprême du Canada.
    Un chef national a dit un jour qu'une Première Nation a trois avenues pour faire reconnaître ses droits: l'action directe; le dévouement; la consultation et la négociation. Chacun de ces aspects relève de personnes différentes qui ont des rôles et responsabilités précis.
    Les Micmacs se sont retrouvés dans ce cycle d'action directe et de contentieux durant de nombreuses décennies. Au cours des deux dernières décennies, les Micmacs de la Nouvelle-Écosse ont négocié d'une seule voix avec les gouvernements fédéral et provincial. En tant que Micmacs, nous avons nos guerriers, des gens qui sont en première ligne et qui prennent les choses en main face à l'injustice, des gens comme Gabriel Sylliboy, James Matthew Simon, David Denny, John Paul et Tom Sylliboy, Donald Marshall Jr. et beaucoup d'autres.
    En tant qu’Autochtones, si nous voulons créer une loi, nous devons d'abord enfreindre une loi injuste. Les litiges opposent souvent les obligations du droit autochtone et des traités aux lois provinciale et fédérale au plus haut niveau, soit la Constitution du Canada.
    Je vais parler brièvement du paysage politique. Il y a les droits de la pêche au saumon au Québec en 1981, et les accusations contre MM. Denny, Paul et Sylliboy; le rapport de la Commission royale sur la condamnation injustifiée de Donald Marshall Jr. en 1987; la décision de la Cour d’appel de la Nouvelle-Écosse dans l'affaire Denny, Paul et Sylliboy en 1989, puis l'arrêt Sparrow; accords au titre de la Stratégie des pêches autochtones; les accusations contre Donald Marshall en 1993; la décision de la Cour suprême du Canada et la réaction à Burnt Church; les accords Marshall en 1999 et 2000; le processus néo-écossais en 2002, suivi des accords de réconciliation des droits en 2017.
    À cet égard, il est important de respecter la primauté du droit; la Constitution, à l'article 52, précise ce qui suit:
(1) La Constitution du Canada est la loi suprême du Canada; elle rend inopérantes les dispositions incompatibles de toute autre règle de droit.
    Toutes les lois doivent être ancrées dans la Constitution.
    Pour négocier les droits ancestraux et issus de traités, un gouvernement négocie habituellement en vertu d'un mandat du Canada. Pour moi, la prise de conscience a été brutale: avoir un droit ancestral ou issu de traités ne garantit pas que le gouvernement respectera ou défendra ce droit. Autrement dit, il n'existe aucun mécanisme pour obliger les gouvernements à respecter les lois du pays.
    Vous vous demandez peut-être comment je le sais.
     Je le sais parce que la Première Nation Paqntkek et la Première Nation de Bear River, ici en Nouvelle-Écosse, attendent depuis 30 ans un mandat découlant de l'arrêt Sparrow, le droit ancestral de pratiquer la pêche, et attendent depuis 21 ans un mandat pour la pêche à des fins de subsistance découlant de l'arrêt Marshall. Ce qui est endémique au gouvernement fédéral, de l'arrêt Sparrow à l'arrêt Marshall et encore aujourd'hui, c'est de négocier sans reconnaissance.
    Vous vous demandez peut-être comment cela peut arriver. Eh bien, c'est assez simple. Un fonctionnaire du gouvernement vous dit: « Nous n'avons pas le mandat de parler de vos droits, mais voici un accord. Il n'y a pas d'autre option ». Comment le gouvernement y parvient-il? Une bande à la fois.

  (1655)  

    Les présumés droits issus des ententes de conciliation de 2017 sont encore pires. Ces accords offrent de l'argent aux Premières Nations afin qu'elles achètent leur droit d'accès aux pêcheries en vertu des règles du ministère des Pêches et des Océans. En retour, les Premières Nations doivent accepter une suspension de leurs droits pendant 10 ans.
    La négociation sans la reconnaissance ou l'accès sans l'autonomie gouvernementale représentent le statu quo, et c'est la position par défaut du gouvernement fédéral.
    Chef Prosper, je dois vous dire que vous avez dépassé votre temps de parole, malheureusement. Si vous avez des notes d'allocution, vous pouvez les transmettre à la greffière. Nous les ferons traduire et les distribuerons aux membres du Comité.
    Nous allons maintenant passer au chef Darcy Gray. Vous disposez d'au plus cinq minutes. Allez-y.
    Bonjour à tous. Je vous remercie de m'avoir invité.
    Listuguj est une communauté Mi'kmaq du Gespe'gewa'gi, le septième district du Mi’gma’gi. En gros, nous sommes la porte d'entrée du Mi’gma’gi. En d'autres termes plus familiers, nous sommes situés au Québec, dans la baie des Chaleurs, de l'autre côté de la rivière Ristigouche, en face de Campbellton, au Nouveau-Brunswick.
    Listuguj est signataire des traités de paix et d'amitié de 1760 et 1761. Nous avons le droit de pêcher et de vendre le poisson à des fins de subsistance convenable. Dans l'arrêt Marshall, la Cour suprême du Canada a fait valoir que le Canada avait le pouvoir de réglementer nos pêcheries, mais que les restrictions devaient être justifiées par un intérêt public substantiel, être les moins envahissantes possible et faire suite à des consultations significatives. Si une restriction ne peut être justifiée, alors elle est invalide. Selon la règle générale, nous avons le droit de pêcher et de vendre le poisson à n'importe quelle période de l'année.
    Depuis maintenant 20 ans, Listuguj procède chaque année à la pêche du homard automnale. Le ministère des Pêches et des Océans nous octroie un permis qui restreint la pêche à des fins alimentaires, sociales et cérémoniales. Le permis nous interdit de vendre le homard pêché à l'automne. Cette interdiction ne vise aucune fin de conservation. Le ministère nous permet de pêcher, et nous le faisons dans le respect des limites imposées. Que nous mangions le homard ou que nous le vendions, l'effet sur les stocks sera le même. L'interdiction de la vente du homard que nous pêchons à l'automne n'a rien à voir avec l'équité régionale ou économique. Ces homards seront tirés des eaux d'une façon ou d'une autre, que ce soit pour les manger ou les vendre. Si nous les vendons, cela ne mine aucunement l'accès des autres intervenants aux ressources.
    Depuis des années, nous demandons au ministère de nous octroyer un permis qui refléterait notre droit conféré par les traités et nous permettrait de vendre le homard à l'automne. Selon leur formulation actuelle, la Loi sur les pêches et le Règlement sur les permis de pêche communautaires des Autochtones donnent à la ministre le pouvoir de le faire. Les négociations et les consultations avec le ministère des Pêches et des Océans durent depuis des années. Chaque année, à l'automne, nous encaissons un refus. Chaque année, le ministre en poste insiste pour nous interdire l'exercice de notre droit en vertu des traités.
    Nous comprenons la nécessité de bien réglementer la pêche. Nous comprenons que les droits sont assortis de responsabilités. Après plusieurs années de consultations communautaires, nous avons adopté notre propre loi et notre propre plan de gestion des pêches, qui régissent la pêche du homard, et qui permettent à notre peuple de vendre le homard, tout en veillant à ce que les efforts de pêche demeurent durables. Depuis deux ans, nous régissons nous-mêmes la pêche automnale. Les stocks de homard dans notre région demeurent sains. Nous n'avons pas connu de violence comme celle que vit la Nouvelle-Écosse. À notre avis, notre façon de gérer la pêche du homard est une réussite en matière d'autodétermination. Nous avons tenté de travailler avec le ministère des Pêches et des Océans. Au bout du compte, toutefois, nous nous sommes rendus là malgré le ministère.
    Le ministère nous met toujours des bâtons dans les roues. Puisque le permis qui nous est octroyé pour la pêche automnale interdit la vente du homard, toute personne qui achète notre homard commet une infraction en vertu de la Loi sur les pêches. Nous avons le droit de vendre le homard en vertu des traités, mais le ministère rend l'achat illégal. C'est un problème important pour nous, qui provient entièrement du ministère des Pêches et des Océans.
    Il n'est pas question ici de définir les « fins de subsistance convenables ». Il me peine de le dire, mais Listuguj est loin de subsister convenablement de la pêche. Nous avons un taux de chômage de 33 %. Cet automne, la pêche au homard a duré deux semaines et a donné du travail à 38 personnes: des pêcheurs, des contrôleurs, des cuisiniers et d'autres. Nous avons cuit 10 000 livres de homard et l'avons distribué directement aux membres de notre communauté, ce qui nous a permis de nourrir environ 1 500 personnes, dont 300 aînés. Je suis très fier de cela, mais nous sommes loin des fins de subsistance convenables.
    L'enjeu a trait à la façon dont nous pêchons, et non à la quantité de homard pêché. Le ministère insiste pour faire entrer le traité sur les pêches des Mi'kmaq dans un moule créé pour la pêche commerciale non autochtone. Nous n'entrons pas dans ce moule. Il n'a pas été fait pour nous. Les restrictions qu'il impose sont injustifiables. Nous sommes plus que capables de concevoir une approche en matière de gouvernance des pêches qui reflète nos droits, nos valeurs et nos ambitions, mais le ministère ne veut pas travailler avec nous. En n'offrant aucune mesure d'adaptation raisonnable pour notre traité, le ministère ne nous donne autre choix que de nous autoréglementer. D'une certaine façon, j'en suis reconnaissant, puisque les pêcheurs et la communauté ont réalisé que nous étions capables de nous acquitter de cette responsabilité. L'autodétermination et l'autonomie gouvernementale représentent l'avenir de nos pêcheries.
    La seule raison invoquée par le ministère des Pêches et des Océans pour ne pas octroyer de permis qui corresponde à nos droits en vertu des traités est qu'il serait difficile pour lui de gérer les pêches. Je crois que le contraire est plutôt vrai. Si les permis respectaient nos droits en vertu des traités, nos lois et nos plans de pêche, alors nous pourrions travailler de façon collaborative avec le ministère sur l'eau, afin de veiller à assurer une pêche sécuritaire et durable.

  (1700)  

    À l'heure actuelle, le ministère des Pêches et des Océans force les Mi'kmaq à pêcher dans une zone grise sur le plan juridique, ce qui nous rend furieux. Cela rend aussi furieux les pêcheurs non autochtones. C'est là où commencent réellement les problèmes de gestion.
    Depuis des années...
    Merci, chef Gray. Vous avez légèrement dépassé votre temps de parole. Je sais que vous nous avez transmis vos notes d'allocution. Elles sont traduites et seront distribuées à tous les membres du Comité.
    Nous allons maintenant passer aux questions, en commençant par le Parti conservateur.
    M. Bragdon est le premier intervenant. Je comprends que vous souhaitez partager votre temps de parole avec M. Arnold. Est-ce que je vous laisse décider du moment approprié pour changer d'intervenant?
    Ce serait excellent, monsieur le président. Si vous constatez que j'approche de la barre des trois minutes, vous pouvez me faire signe et je vais m'assurer de donner suffisamment de temps à M. Arnold.
    D'accord. Allez-y.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie le chef Prosper et le chef Gray de se joindre à nous aujourd'hui, et de prendre le temps de nous transmettre leur témoignage. Nous vous sommes reconnaissants du temps que vous passez avec le Comité. Merci.
    Bien sûr, les Canadiens se préoccupent tous de ce qui se passe en Nouvelle-Écosse ces derniers temps. Je tiens à préciser que la violence n'est jamais la solution dans ce genre de situation. Il n'y a pas de place pour cela. Les Autochtones ont certainement le droit de pêcher, et ce droit est très bien établi.
    Je vous remercie de témoigner devant le Comité. Nous avons des questions à vous poser.
    En ce qui a trait à la situation actuelle, à notre avis, nous en sommes arrivés là — en Nouvelle-Écosse surtout — en grande partie parce que le gouvernement n'a pas adopté d'approche proactive pour aborder les questions sous-jacentes qui doivent être réglées. Le gouvernement a nommé un représentant spécial. Selon ce que je comprends, il a été nommé pour servir de médiateur ou pour animer la discussion relative à la situation en Nouvelle-Écosse.
    Vendredi, le chef Mike Sack de la Première Nation Sipekne’katik a évoqué des préoccupations relatives à la nomination du représentant spécial pour modérer la conversation entre les Autochtones et les pêcheurs commerciaux du sud-ouest de la Nouvelle-Écosse. Il a qualifié cette nomination d'alarmante et s'est dit inquiet de la capacité du représentant spécial d'agir à titre de tiers neutre dans le cadre de ces discussions.
    Partagez-vous ces inquiétudes? La question s'adresse à nos deux témoins. Nous allons commencer avec le chef Prosper, puis nous entendrons le chef Gray.

  (1705)  

    Je suppose que je ne suis pas tout à fait au courant du mandat précis confié au représentant spécial. Des discussions sont en cours entre les Micmacs et le gouvernement fédéral, et nous avons bien hâte d'en voir l'issue. En ce qui concerne le représentant spécial, je suis sûr que le gouvernement fédéral lui fait confiance pour mener la collecte de renseignements et les discussions nécessaires afin de contribuer aux négociations délicates qui se déroulent actuellement en Nouvelle-Écosse.
    Quant aux pratiques des gouvernements précédents — et on ne peut pas se contenter de pointer du doigt le gouvernement libéral —, sous n'importe quel gouvernement depuis les arrêts Marshall ou Sparrow, que ce soit un gouvernement conservateur, libéral ou autre, la position par défaut a été la négociation sans la reconnaissance.
    Merci, chef Prosper.
    Avez-vous quelque chose à ajouter, chef Gray?
    Je pense que c'est une question importante, parce que lorsqu'on examine la situation, force est de constater que l'éducation et la compréhension en sont les aspects clés. Si on peut faire venir des gens, comme des représentants spéciaux, ou organiser différentes consultations ou discussions, c'est, à mon avis, l'élément essentiel.
    Cela me rappelle une conversation que j'ai eue il y a un peu plus d'un an avec des représentants du ministère des Pêches et des Océans; je leur avais alors dit que, pour que nous puissions aller de l'avant avec notre pêche de subsistance convenable, il serait important d'éduquer non seulement nos pêcheurs, mais tous les pêcheurs. Je pense que c'est cela, la clé.
    Merci, chef Gray.
    À ce sujet, l'une des frustrations qui semblent être sans cesse exprimées dans le cadre de ce processus, c'est l'absence d'efforts, jusqu'ici, pour faire en sorte que toutes les parties y participent, c'est-à-dire pour veiller à ce que les pêcheurs autochtones et non autochtones soient inclus dans les discussions et fassent partie du processus.
    Pensez-vous qu'avant cette nomination, des consultations auraient peut-être dû avoir lieu avec les pêcheurs autochtones et non autochtones?
    J'aimerais d'abord entendre le chef Prosper et, ensuite, le chef Gray.
    Selon moi, des discussions auraient certainement dû avoir lieu avec les deux parties respectives, mais je tiens également à signaler que les Micmacs se trouvent dans une position différente de celle des autres parties intéressées, par exemple l'industrie. Nous avons des droits constitutionnels, qui nous distinguent des pêcheurs commerciaux ou même des pêcheurs non autochtones. Je ne suis pas d'accord pour dire que les parties ont un statut équivalent dans le cadre de ces discussions, car les Micmacs ont des droits constitutionnels.
    Merci, chef Prosper.
    Chef Gray, allez-y.
    Je suis tout à fait d'accord avec le chef régional Prosper. Bien sûr, je songe à notre situation locale ici, et nous ne cherchons pas la violence. Nous ne voulons pas aggraver la situation dans notre région. Nous serions heureux de participer aux discussions, mais de toute évidence, il ne peut s'agir d'une discussion axée sur le droit de veto. Il faut plutôt viser à améliorer la compréhension et l'éducation concernant l'exercice de nos droits.
    Merci, chef.
    Monsieur Arnold, je vous cède la parole.
    Il vous reste 10 secondes.
    Oh, pardon.
    Voilà ce qu'est le partage pour votre collègue.
    Toutes mes excuses, monsieur Arnold.
    Très rapidement, et veuillez répondre par oui ou non, a-t-on défini l'expression « subsistance convenable » depuis la décision Marshall, ne serait-ce qu'en partie?
    Non.
    Non, et je pense que nous avons essayé de proposer une solution, mais on nous dit toujours non, sous prétexte que cela ne correspond pas à la réglementation, que cela ne répond pas aux besoins ou que c'est trop problématique.

  (1710)  

    Merci, monsieur Arnold, de cette question rapide. Vous avez réussi à placer un mot.
    Pourtant, je vous avais fait signe, monsieur Bragdon.
    Toutes mes excuses, monsieur le président. J'étais tellement concentré sur les réponses et les questions que j'ai perdu la notion du temps. Je présente aussi mes excuses à M. Arnold.
    Il n'y a rien de mal à se laisser obnubiler par les témoignages. Tout cela est certes très intéressant.
    La parole est maintenant à vous, monsieur Battiste. Vous disposez d'au plus six minutes. Je crois comprendre que vous allez partager votre temps de parole avec M. Cormier. Si vous voulez, je vous ferai signe lorsque vous serez rendu à la moitié de votre temps et, si vous choisissez de partager le reste, vous pourrez le faire. Sinon, vous n'aurez qu'à continuer, je suppose. Ce n'est pas moi qui décide cela.
    Allez-y quand vous serez prêt.
    Merci, monsieur le président. Si je peux me permettre, pour m'assurer d'être beaucoup plus généreux avec mon collègue que ne l'était M. Bragdon avec le sien, pouvez-vous simplement m'interrompre et me dire que c'est au tour de M. Cormier? Je sais qu'il a des questions à poser au chef Gray.
     Cela étant dit, j'aimerais adresser ma question au chef régional Prosper. Je tiens à vous donner la possibilité de terminer votre exposé, mais je voudrais aussi vous demander ceci. On nous a parlé des approches qui n'ont pas fonctionné au cours des 20 dernières années. J'aimerais beaucoup entendre les solutions que vous proposez, c'est-à-dire les approches qui, selon vous, permettraient de faire respecter le droit des Micmacs.
     Merci.
    Merci.
    Pour faire suite à ce que vous avez dit concernant les approches qui ne fonctionnent pas, de façon générale, c'est la négociation sans la reconnaissance. Voilà ce qui est récurrent. C'est un problème endémique, peu importe le gouvernement au pouvoir au cours des 21 dernières années.
    Pour ce qui est de la marche à suivre à l'avenir et de la proposition d'une éventuelle solution appropriée, il importe de ne pas oublier que beaucoup de gens dans nos communautés n'arrivent pas à s'identifier à une quelconque position sur nos droits sans aucune consultation sur nos connaissances ou nos croyances. Le gouvernement parle souvent de consultation; cependant, ses positions et ses interventions révèlent qu'en réalité, nous devons nous conformer à ses règles. À défaut de confier un mandat adéquat et de mener des consultations de bonne foi dans le cadre du processus, le gouvernement donne l'impression que les dirigeants micmacs sont incompétents et peu à l'écoute des besoins de leurs communautés.
    Cela nous amène donc à la notion de vraie réconciliation. Il s'agit là de concilier les lois: d'une part, le droit des traités micmacs et, d'autre part, le droit canadien aux termes de la Loi sur les pêches. Il faut que ces deux types de lois s'appliquent de manière complémentaire afin que nous puissions résoudre le conflit en cours sur notre territoire. Il n'y a aucune mesure immédiate dans ce domaine. Les progrès que nous avons réalisés au fil des ans risquent d'être perdus, et nous pourrions assister à une nouvelle série d'actions directes et de litiges. Ce qu'il faut retenir ici, c'est l'héritage de Donald Marshall Jr.
    Donald Marshall Jr. est décédé neuf ans après avoir rendu sa décision historique. Cette décision a donné une lueur d'espoir à beaucoup de nos concitoyens, mais hélas, Donald Marshall n'a même pas eu la chance de voir sa décision se concrétiser pleinement au sein de nos communautés micmaques. Même si je crois qu'il y a de bonnes raisons de recommander une voie à suivre, je ne peux pas m'empêcher de vous implorer, vous et les autres, de ne pas agir sans nous consulter et de ne pas nous proposer quelque chose que vous seuls considérez comme étant avantageux pour nous. Cela ne fonctionnera jamais. En fait, la situation qui sévit dans nos communautés est le produit des bonnes intentions du gouvernement fédéral qui n'ont rien donné. L'héritage de Donald Marshall signifie, à tout le moins, que nous avons le droit de vivre sur ce territoire. Nous avons le droit de vivre conformément aux instructions originales qui nous ont été transmises par Kisu'lkw, le créateur, et qui ont été reconnues et confirmées par la loi suprême et le plus haut tribunal du pays.
     Je vous remercie.
     C'est à vous, monsieur Cormier.
    Chef Gray, merci d'être des nôtres aujourd'hui.
    Puisque vous êtes notre voisin de l'autre côté de la baie, nous pensons à vous en cette période difficile. Je sais que votre communauté fait face à certaines restrictions que le Nouveau-Brunswick s'apprête à imposer relativement à la COVID-19, mais nous pensons à vous et nous espérons que ce sera bientôt terminé.
    Chef Gray, pour la gouverne des membres du Comité et pour celle des Canadiens aussi, tout le monde dans cette industrie semble être d'avis que nous nous trouvons dans cette situation en raison du flou entretenu par le ministère des Pêches et des Océans ou par le gouvernement depuis le début de l'année. Imaginons un instant que les négociations aient été couronnées de succès, si je puis dire, et que tout le monde se soit mis d'accord sur la définition de « subsistance convenable ».
    Accepteriez-vous que les revenus tirés de cette pêche de « subsistance convenable » se limitent à la saison de pêche commerciale dans différentes zones de pêche au homard du Canada atlantique? Je pense que vous savez de quoi je parle. J'aimerais simplement vous entendre à ce sujet.

  (1715)  

    Je suis sûr que vous connaissez la rivière Restigouche, si vous êtes de l'autre côté. Nous gérons la rivière Restigouche depuis 30 ans, c'est-à-dire depuis 1995. À l'époque, nous avions adopté notre propre loi sur le saumon et, depuis, nous réglementons nos propres activités de pêche au saumon. Cette industrie y est très bien gérée.
    La conservation est de la plus haute importance. La saison est déterminée aux termes de notre loi. Nous ne tenons pas nécessairement compte de la saison de pêche commerciale ou de la saison de pêche de subsistance, et nous n'envisageons pas non plus la pêche au homard de la même façon. Nous examinons plutôt les stocks et leur état de santé. Voilà, en quelque sorte, l'approche que nous avons adoptée dans le cadre de notre plan de gestion.
    Les poissons que nous attrapons à l'automne sont visés par une pêche qui nécessite normalement un permis et qui est reconnue dans le total autorisé d'effort de pêche, en vertu de la réglementation du ministère des Pêches et des Océans. Ce n'est pas en dehors d'une saison de pêche, pour ainsi dire. La différence ici, c'est que nous cherchons, à tout le moins, à récupérer une partie des coûts et à en tirer une subsistance convenable. Nous sommes bien loin de cet objectif, mais nous avons créé des débouchés pour notre peuple grâce à cette approche.
    Comme je l'ai dit, au lieu de tenir compte des saisons, nous prenons en considération les besoins de notre peuple. Parfois, il faut manger les produits de la pêche et, d'autres fois, il faut les vendre pour gagner sa vie.
    Très brièvement, pouvez-vous nous parler de la collaboration entre les pêcheurs commerciaux et les pêcheurs de votre communauté? Compte tenu de notre proximité, pouvez-vous dire un mot sur la collaboration que vous avez obtenue au cours des dernières années?
    Oui, bien sûr. Il n'y a eu aucune tension sur les eaux ici. Tout s'est bien passé. Nous prenons part à un certain nombre d'activités de pêche. Dans le secteur de la pêche au homard, les gars s'entraident pendant la saison commerciale. Il n'y a pas beaucoup de problèmes à ce chapitre et, ces deux dernières années, nous n'avons été témoins d'aucune violence pendant notre pêche de subsistance à l'automne. Si vous regardez notre pêche au crabe des neiges et nos autres activités commerciales, il y a un bon esprit de collaboration.
    Nous travaillons vraiment bien avec les gens qui nous entourent, et il y a beaucoup d'ouverture à cet égard.
    Merci, monsieur le président.
    Je vous remercie.
    La parole est maintenant à Mme Gill. Vous avez un maximum de six minutes.
    Nous vous écoutons.

[Français]

     Merci, monsieur le président.
    J'aimerais remercier le chef Prosper et le chef Gray d'avoir accepté l'invitation du Comité.
    J'aimerais poser une question simple et complexe à la fois — vous allez comprendre pourquoi.
    Depuis le début, il y a un consensus entre vous selon lequel il faut que ce soit une négociation de nation à nation. Quels sont les éléments clés qui favoriseraient des conditions gagnantes pour une négociation effective et bénéfique de nation à nation?

[Traduction]

    Pour en arriver à des relations de nation à nation et aux conditions gagnantes propices à l'instauration d'un tel environnement, il faut reconnaître les lois du pays et la nécessité de réconciliation entre les lois relatives aux traités et aux peuples autochtones et les lois en vigueur au Canada. Il y a lieu de les invoquer de façon complémentaire, mais il faut un certain niveau de respect et de maturité pour y arriver.
    J'ajouterais seulement que, selon moi, l'élément clé est la souplesse. Jusqu'à présent, lorsque nous parlons de négociations et de réconciliation, il s'agit, me semble-t-il, de concilier nos attentes avec les lois ou les politiques canadiennes et d'essayer de les faire entrer dans ce moule, plutôt que d'examiner ce qui est confirmé dans la Constitution et dans les traités au chapitre de nos droits et de la manière dont nous les exerçons. Il faut aussi reconnaître que nous, les Micmacs, pouvons les définir pour nous-mêmes. Ces droits n'ont pas à entrer en concurrence avec les lois canadiennes; les deux peuvent se compléter. L'exercice de nos droits peut bien fonctionner en tandem avec ces règlements et ces politiques, mais il faut faire preuve d'ouverture, faute de quoi nous n'accomplirons rien et nous aurons passé quatre ans et demi à faire du surplace.

[Français]

     Je vous remercie.
    Essentiellement, il y a donc deux éléments: le respect des lois et de la réconciliation et la souplesse.
    Chef Prosper, au début, vous avez mentionné la subsistance convenable. Par ailleurs, chef Gray, vous sembliez dire aussi qu'il était possible de définir ce concept, même si c'est très complexe et que beaucoup de valeurs doivent être prises en compte. Vous ai-je bien compris?
    Si ce n'est pas une réponse ou une définition, pourriez-vous nous donner des balises ou des idées relatives à ce concept que l'on devrait absolument prendre en compte? Je pense, par exemple, à la question de la spiritualité.

  (1720)  

[Traduction]

    Je pourrais peut-être répondre en premier, chef Gray.
    Comme je l'ai déjà dit à propos des définitions juridiques de « subsistance convenable », je crois certainement qu'elles dépassent la portée du Comité. Afin d'aborder la notion de « subsistance convenable », il faut examiner et créer un processus dans le cadre duquel on dispose d'un mécanisme qui reconnaît effectivement les droits confiés aux Micmacs par les traités eux-mêmes. Une fois que ce mécanisme est en place, le processus peut définir ce qu'est une subsistance convenable. Il peut s'agir d'une notion à l'échelle communautaire ou individuelle. C'est ce que je dirais.
    C'est notre expérience à nous aussi; en effet, il s'agit d'une notion qui varie d'une communauté à l'autre. Si vous regardez la façon dont nous travaillons avec nos voisins et la façon dont nous pratiquons la pêche, vous constaterez que nos grands principes et nos valeurs fondamentales ont tendance à se ressembler, mais nos pratiques au quotidien varient, et ce ne serait pas à nous, les gens de Listuguj, de dire aux Micmacs du Gespe'gewa'gi comment pêcher ou ce qui est important ou comment définir la « subsistance convenable ». C'est quelque chose qu'ils doivent déterminer eux-mêmes. Nous, les Micmacs de Listuguj, le déterminerons pour nous-mêmes, et nous pouvons apprendre les uns des autres. Voilà, en somme, la situation.

[Français]

    Il ne me reste qu'une minute. Je vais donc aborder une autre question, et nous pourrons y revenir plus tard.
     Vous avez beaucoup parlé d'autoréglementation et de vos propres lois adaptées aux besoins de la communauté. Vous disiez que cela fonctionnait bien. Vous avez également parlé d'apprendre des autres, et vous venez de conclure là-dessus.
     Si cela fonctionnait, qu'est-ce qui pourrait causer des conflits? Serait-ce la perception des autres parties prenantes?
    Comment voyez-vous la situation en ce qui a trait à ces règlements et à ces lois, qui siéent bien à la pêche, selon ce que vous affirmez?

[Traduction]

    Je pourrais peut-être proposer quelque chose à cet égard.
    Je pense qu'on ne peut pas se débarrasser complètement du risque de conflit. Ce que l'on espère essentiellement, c'est que le gouvernement fera ce qui s'impose en reconnaissant l'existence de ces droits, lesquels s'insèrent dans l'ensemble des lois du pays, et qu'il établira un processus et un mécanisme pour les mettre en œuvre.
    Ainsi, selon moi, les communautés des Premières Nations pourront travailler avec leurs homologues non autochtones d'une manière qui respecte chacun de ces droits dans le cadre du processus de réconciliation.
     Merci, madame Gill. Votre temps de parole est écoulé.
    Nous passons maintenant à M. Johns. Vous disposez d'au plus six minutes.
    Merci, monsieur le président.
     C’est un honneur de vous joindre depuis les terres non cédées des peuples Hupacasath et Sechelt. Je tiens à remercier le chef Prosper et le chef Gray pour leur témoignage. C’est très important.
    Nous savons que la ministre des Pêches, des Océans et de la Garde côtière canadienne est présentement en pourparlers avec la nation Sipekne’katik et qu’elle ne négociera pas en public. Elle l’a répété plusieurs fois et nous sommes d’accord avec cela.
    Nous siégeons à ce comité pour étudier un enjeu d'actualité qui est important pour les parties qui sont en pourparlers de nation à nation.
    Ma question s'adresse au chef Prosper.
    Vous avez fait part de vos réserves au sujet du comité qui étudie cette question et des discussions qui ont lieu en ce moment même. Nous sommes en train d'avoir cette conversation ici même au Comité. Vous dites craindre de compromettre ces discussions. Quelles sont les conséquences de tenir la présente discussion au Comité pendant que le ministère et la nation parlent en privé?

  (1725)  

    Merci de votre question.
    Nous parlons d’un sujet qui touche à des droits reconnus par la Constitution qui ont été affirmés et reconnus aux termes d’un traité. Ce sont des documents de nation à nation, et ils doivent être discutés à cet échelon-là, de nation à nation, comme il se doit.
    Ce qui me dérange avec les discussions en comité, c’est que les conclusions d’un comité de ce type — surtout si elles portent sur des définitions juridiques — peuvent assurément compromettre la nature des discussions qui doivent plutôt se tenir entre les représentants des deux gouvernements en cause, c'est-à-dire entre les ministres et les dirigeants des Premières Nations concernées.
     Comme je l’ai déjà mentionné, je pense que, pour les besoins de ce comité, un sujet approprié serait de fournir une composante éducative, et je crois que cela va dans le sens de ce que le chef Gray a également mentionné.
    D’après ce que j'ai pu constater dans ma circonscription, où nous avons 10 nations Nuu-chah-nulth et la nation de Qualicum, je sais que les pêcheurs autochtones sont régulièrement stoppés au nom de la conservation. Le gouvernement dépense des millions de dollars pour les affronter devant les tribunaux. Nous avons même des juges de la Cour suprême qui disent que le ministère des Pêches et des Océans s’est sciemment présenté à la table des négociations avec un mandat vide, qu'il n'était pas de bonne foi. Nous voyons ce racisme systémique.
    Pensez-vous que le Comité devrait étudier le racisme systémique? Comment la situation actuelle en Nouvelle-Écosse rend-elle compte du problème plus vaste qui existe au ministère des Pêches et des Océans?
    Encore une fois, la question s'adresse à vous, chef Prosper.
    Je me souviens de l’exemple de ma communauté de Paqtnkek. Donald Marshall était en train de pêcher sur les terres de notre réserve. Paqtnkek n’a pas signé d’« accord Marshall », nous n’avons pas signé d’accord dans le cadre de la Stratégie des pêches autochtones. La raison pour laquelle nous n’avons pas signé ces accords, c'est qu’il n’y avait pas de mandat pour discuter du droit. Ce que le gouvernement a fait, essentiellement, c’était de dire: « Voici un accord. Nous n’avons pas de mandat, et il n’y a pas d’autre option pour vous. »
    Ceci est un enjeu particulièrement sérieux pour bien des communautés des Premières Nations. Il faut absolument proposer une approche différente sur ce point particulier, parce que le Canada devrait avoir honte de ne pas reconnaître l'arrêt Sparrow. Il devrait avoir doublement honte de ne pas reconnaître l'arrêt Marshall.
    Qu’aimeriez-vous que le Comité recommande au gouvernement afin que soient apportés des changements au ministère des Pêches et des Océans qui aillent au-delà de mesures symboliques de réconciliation?
    Ce que je pense, c’est que le concept de réconciliation doit avoir une véritable substance. On ne peut pas regarder ces ententes de réconciliation et de reconnaissance des droits qui ont vraisemblablement été mises en avant en 2007, et qui se résument à ceci: « Voici un peu d’argent; vous allez être soumis à nos règles, et soit dit en passant, vos droits issus des traités vont être suspendus pendant 10 ans. »
    La vraie réconciliation, c’est la reconnaissance de la loi micmaque. Nous avons une base constitutionnelle, et il faut la concilier avec le droit fédéral dans le cadre de la Loi sur les pêches. Il ne suffit pas de dire qu’il y a un accès. Il faut qu'il y ait aussi un élément d’autonomie gouvernementale. Ce que notre peuple, nos pêcheurs, les membres de nos communautés recherchent, c’est quelque chose qui rendra compte de la véritable nature des relations découlant des traités qui existent — quelque chose de différent.
    Merci.
    Chef Gray, nous savons qu’au sein du Comité, nous allons entendre à maintes reprises que la pratique des pêcheurs micmacs consistant à exercer leur droit inhérent de pêcher est une menace pour la conservation et une menace pour la paix et la civilité. Nous entendons même dire que les Autochtones sont étiquetés comme étant des criminels et des menaces. À mon avis, le vrai problème est le fait que le ministère des Pêches et des Océans a été incapable de protéger le droit de pêche et de soutenir adéquatement les négociateurs qui tentent de définir ce qu'est une subsistance convenable.
    Quelle recommandation feriez-vous au ministère pour qu’il change de comportement et s’engage de bonne foi non seulement avec les Micmacs, mais aussi avec les pêcheurs autochtones de tout le pays?

  (1730)  

    Tout d’abord, je pense qu’il faut travailler de manière significative avec les communautés ou les nations — et ce, quelle que soit la manière dont ces dernières interagissent avec le ministère — et fournir le soutien nécessaire à une vraie gouvernance qui sera en mesure d'assurer la sécurité et la durabilité de la pêche. En fin de compte, il faut que le ministère soit prêt à prendre une décision.
    En ce qui nous concerne, nous avons négocié pendant deux ans un plan de gestion élaboré en commun pour nos pêches convenues dans le cadre de traités. Nous avons travaillé sur ce plan pendant deux ans. La veille de sa mise en place, on nous a dit: « Nous sommes désolés, nous ne pouvons pas faire cela. » Pour moi, cela est inacceptable. Pour moi, cela fait partie du problème. Je trouve frustrant d'avoir négocié pendant deux ans et d'avoir dépensé beaucoup d’argent, de temps et d’efforts afin de trouver une solution, puis de se faire dire non à la ligne d'arrivée.
    Merci.
     Merci beaucoup à vous deux.
    Merci, monsieur Johns.
    Nous pourrions bien sûr passer à une autre série de questions, mais le temps alloué à la fonction de comité est écoulé pour aujourd’hui. Je vais demander le consensus du Comité — soit par un vote à main levée, soit en levant le pouce — pour prolonger la réunion. Si cela était possible, j'aimerais que nous procédions à une autre série de questions avant de recevoir le deuxième groupe d'experts. Nous avons d’autres témoins qui attendent.
    Je vois des pouces levés.
    Nancy, pourriez-vous faire le point concernant ce vote pour prolonger...
    Non, je ne peux pas...
    ... si nous avons les ressources nécessaires pour nous permettre une prolongation?
    Oui, et je vois M. Mazier ici. Je ne sais pas si vous pouvez le voir, mais il nous informait qu’il voulait aussi rester.
    Bon, je suppose que nous restons, mais je n’ai pas vu beaucoup de pouces en l’air. D'accord, maintenant nous avons six pouces en l’air, donc je présume que nous allons rester.
    Nous allons nous y mettre rapidement. Passons donc dès maintenant à la deuxième série de questions, qui durera cinq minutes, en commençant par M. Calkins.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Monsieur Prosper, depuis l’arrêt Marshall, le gouvernement fédéral a dépensé aux alentours de 600 millions de dollars pour acheter des quotas existants afin de les transférer aux communautés des Premières Nations, l'objectif étant d’accroître leur participation à la pêche et d’offrir des possibilités économiques accrues à leurs communautés.
     J’ai cru comprendre que les programmes qui ont permis aux Premières Nations d’accéder à la pêche commerciale par l'intermédiaire de quotas, de formation et de la fourniture d’équipements ont été réalisés dans l’intention d’aider les communautés des Premières Nations à concrétiser les droits réaffirmés aux termes de l'arrêt Marshall. Si l'on en croit ceux que l’on pourrait croire au sujet de ces statistiques, dont le ministère des Pêches et des Océans, ces programmes ont fait en sorte que l’activité économique dans l’industrie sur les réserves est passée d’environ 3 millions de dollars en 1999 à 152 millions de dollars en 2016.
    Comment considérez-vous les quotas et l’accès que procurent des programmes comme l’Initiative des pêches commerciales intégrées de l’Atlantique par rapport à la pêche visant une subsistance convenable?
    Je pense que cet accès et cette capacité ont effectivement aidé nos communautés à faire à tout le moins une entrée préliminaire dans le secteur des pêches. Ils ont soutenu les communautés. Ils ont permis aux communautés de se développer. Je pense qu’il est également important de noter que les ententes ont été conclues « sans préjudice » à l'égard des droits des Micmacs et des Malécites. Je pense qu’il est important de replacer cela dans son contexte.
    L’autre élément que je voudrais ajouter, c'est que je crois que cela n'a rien à voir avec une subsistance convenable. Je veux dire que c'était sans préjudice et surtout, que c'était sans mandat approprié. Il y a beaucoup de choses à faire en ce qui concerne l’accès supplémentaire qui doit être fourni aux Micmacs et aux Malécites.
    Chef Gray, avez-vous quelque chose à ajouter?
    Je voudrais juste faire écho à ce que disait le chef Prosper. Oui, ces programmes ont effectivement permis l’accès, mais cela ne règle pas vraiment l’aspect de subsistance convenable.
    Je vous remercie.
    La semaine dernière, nous avons entendu un témoin, une certaine Mme Denny, au sujet de l’expression « subsistance convenable ». Je vais la citer, non pas dans un esprit négatif, mais tout simplement parce que j’essaie de me faire une idée.
    Elle a dit que le concept de subsistance convenable concernait davantage « la capacité de subvenir à ses propres besoins du point de vue spirituel, culturel, économique et social ». Je pense que c’est une norme très difficile à utiliser comme base de référence dans la gestion des pêches.
    Monsieur Gray, votre nation a récemment lancé une pêche de subsistance convenable basée sur votre propre plan de gestion. Je crois que, ce que je vous demande, c'est si votre plan de gestion tient compte de ce que Mme Denny a dit? Si c'est le cas, comment pouvez-vous l’intégrer dans un plan de gestion quantifiable qui établit un équilibre entre la réalisation de vos droits et la durabilité de la ressource, et plus particulièrement celle des homards?

  (1735)  

    Je vais commencer par la dernière partie de cette question. Sur notre site Web, listuguj.ca, nous avons une copie de notre loi sur le homard de Listuguj, qui fournit quelques détails sur cette question et sur la manière dont nous avons essayé d’élaborer un plan de réglementation pour notre pêche.
    Par ailleurs, même s’il s’agit d’une pêche de deux semaines que nous pratiquons en vertu de notre plan de gestion et de la loi dans le cadre de cette subsistance convenable, le fait d’aller sur ces bateaux avec ces pêcheurs et de savoir qu’ils pêchent en vertu de la loi micmaque est vraiment responsabilisant. C’est un sentiment incroyable de les voir dehors, avec les familles qui les soutiennent, les gens qui surveillent et s’assurent que les choses se font de la bonne façon, les cuisiniers qui prennent le homard et le préparent pour les familles, et les pêcheurs qui sont capables de subvenir un peu mieux aux besoins des leurs.
    Cela correspond à une grande partie de ce que Mme Denny a expliqué la semaine dernière dans son témoignage. Si vous n’êtes pas allé sur un de ces bateaux et que vous n’avez pas vu comment les pêcheurs s’y prennent et la joie qu’ils éprouvent lorsqu’ils apportent le homard aux anciens, c’est quelque chose qui est difficile à comprendre. Une fois que vous y êtes allé, c’est une évidence qui saute aux yeux.
    Je suis moi-même chasseur et pêcheur. Bien sûr, je le fais d’une manière différente, mais je comprends tous ces aspects de la chasse et de la pêche et de l’idée de subvenir à ses besoins. Je saisis toute la beauté de ce patrimoine. Je me demande simplement comment nous pouvons arriver à concilier tout cela dans une perspective de gestion.
    Je sais que vous avez parlé de votre plan de gestion, que d’autres pays ont des plans de gestion similaires, et que le ministère des Pêches et des Océans a son propre plan de gestion. Comment pensez-vous que cette combinaison de plans de gestion peut fonctionner pour garantir le respect des droits de chacun et la viabilité de la ressource à long terme?
    Merci de...
    Je suis désolé, mais nous sommes allés trop loin. Nous avons dépassé le temps que nous nous étions donné. Il ne reste plus que cinq minutes. Vous pourriez peut-être répondre à cette question par écrit. Le Comité intégrerait cela au témoignage d’aujourd’hui.
    Nous passons maintenant à M. Battiste, pour cinq minutes ou moins.
    Monsieur le président, j'invoque le Règlement.
    Oui, monsieur Beech.
    Pour le bien de tout notre personnel, qui travaille fébrilement dans l’ombre pour reprogrammer les réunions qui ont été programmées pendant la prolongation, avez-vous une idée du temps que durera la deuxième série de questions et du moment où elle prendra fin?
    Il nous reste 10 minutes pour terminer cette deuxième série de questions, afin que chaque parti ait la possibilité d'en poser quelques-unes. Ensuite, nous devrons bien entendu faire une pause pour effectuer quelques tests de son, si ce n’est pas déjà fait, pour notre prochain groupe d’invités. Si c'était possible, j’aimerais que nous soyons en mesure de poser le même nombre de questions au prochain groupe, pour que cela vaille la peine pour les témoins de comparaître, soit en personne, soit par vidéoconférence. Bref, je présume que nous pouvons prévoir une heure supplémentaire, ou dans ces eaux-là.
    Merci, monsieur le président.
    Merci.
    Monsieur Battiste, vous avez cinq minutes ou moins pour poser des questions.
    Merci, monsieur le président.
    Nous avons entendu des témoignages selon lesquels, au sein des communautés micmaques, il existe des valeurs, une langue et des principes communs tels que le netukulimk, comme cela a été évoqué précédemment. Je comprends que chaque communauté micmaque a des besoins distincts, mais je me demande si vous pensez qu’il y a des valeurs et des principes communs des communautés micmaques qui seraient propices à une vision globale concernant l'établissement d'une pêche de subsistance convenable.
    Cette question s’adresse aux deux chefs.
    Je peux peut-être répondre à cela.
    Il est certain que les communautés micmaques ne vivent pas isolées les unes des autres. Nous avons une tradition commune, une culture commune, une langue commune et, au sein de cette langue, il existe des traditions comme le netukulimk qui fournissent un mécanisme permettant d’orienter les décisions de gestion, le fonctionnement et d'autres choses de ce genre. Ce mécanisme s'étend à l’ensemble de la nation micmaque et nous procure un certain cadre de référence et de cohérence où nous pouvons nous rejoindre et prendre des décisions de gestion qui sont dans l'intérêt supérieur de toutes nos communautés respectives.
    Ce mécanisme définit également les détails d'un certain protocole qui existe entre nos communautés respectives. Par exemple, lorsque Donald Marshall est venu ici à Walneg pour pêcher l’anguille, c’est le chef Terry Paul de Membertou, la communauté dont Donald Marshall est originaire, qui a téléphoné à mon frère, Kerry Prosper, qui était le chef à Paqtnkek. Cela procure une certaine dose de diplomatie entre nos nations respectives, alors je crois que c'est bon de le souligner aussi.

  (1740)  

    Chef Darcy, aimeriez-vous ajouter quelque chose?
    Bien sûr. Je pense que cela remonte au rassemblement que nous avons eu ici il y a un peu plus d'un an avec le grand conseil. Nous avons discuté de la gestion de l'orignal et de l'importance de prendre soin de cette ressource et de netukulimk.
    Il en est ressorti également que nous avons besoin d'une approche basée sur le consensus dans le cadre de laquelle nous pourrons convenir de la façon de procéder. Il faut donner en retour. Comme l'a mentionné le chef régional Prosper, il y a du respect mutuel, du partage. Il n'y a pas qu'une personne qui compte et à qui tout revient. Il faut qu'il y ait un partage et il faut redonner à la communauté.
    Je pense que c'est un aspect important du secteur de la pêche et de notre façon de le gérer.
    Ce que je comprends, c'est qu'il y a une vision commune, des valeurs communes, un langage commun et que c'est le partage qui importe au bout du compte.
    Je vous remercie, chef, de cette information.
    Chef Prosper, je comprends qu'avant d'être chef, vous étiez avocat. Pouvez-vous me résumer ce qu'ont dit les deux décisions Marshall au sujet du droit des Micmacs de faire de la pêche commerciale dans un but de subsistance convenable?
    En m'efforçant de faire court, je dirais qu'elles reconnaissent, aux termes des traités de 1760 et 1761, que la communauté micmaque peut gérer les pêches de façon à lui assurer une subsistance convenable, et c'est la conclusion, mais ce qui est plus important, elles prévoient un mécanisme grâce auquel nous pouvons régir la façon d'exercer ce droit.
    Comme nous le savons, les Micmacs ont des droits, mais ces droits sont assujettis aux responsabilités prévues dans les traités que nous devons tous assumer. C'est un élément qui fait partie intégrante du tissu social de notre nation. C'est un élément qui est reconnu, selon moi, dans les décisions de la Cour.
    Merci, monsieur le président. Je n'ai plus de questions.
    Merci, monsieur Battiste.
    Nous passons maintenant à Mme Gill pour une période maximale de deux minutes et demie.
    Allez-y, s'il vous plaît.

[Français]

     Je vous remercie, monsieur le président.
    Ma question s'adresse tant à M. Gray qu'à M. Prosper.
    Depuis le début, je vous entends dire qu'il doit y avoir une négociation de nation à nation. Bien sûr, ce n'est pas le rôle du Comité de mener une telle négociation. Outre faire des pressions sur le gouvernement de façon à ce qu'il y ait une véritable négociation et une reconnaissance des droits, quel devrait être son rôle?

[Traduction]

    J'aimerais répondre à la question.
    Je crois que les membres du Comité pourraient jouer un rôle important en établissant le plan d'action pour renseigner leurs homologues au sein du gouvernement et les citoyens qu'ils représentent sur la nature des relations qui découlent des traités et l'aspect historique de nos droits.
    Voilà un rôle que le Comité pourrait jouer, et je pense que le chef Gray a aussi mentionné qu'on ne doit pas sous-estimer toute l'importance d'éduquer et d'informer les gens.
    Je suis d'accord. Je pense qu'un des éléments importants ici est que cela donne une voix aux gens. On donne aux gens l'occasion de se faire entendre, ainsi que d'accroître et de favoriser la compréhension, plutôt que de continuer à s'adonner aux accusations, aux injures et à la violence que l'on connaît. C'est une autre façon de remédier aux problèmes en cours.
    Je pense qu'il est important pour nous d'avoir une façon de faire connaître nos préoccupations à l'égard de certaines façons de faire, de certaines politiques et de certaines méthodes que le MPO utilise depuis des années et qui, à nos yeux, ne répondent pas aux attentes.

  (1745)  

[Français]

     Je vous remercie.

[Traduction]

    Merci, madame Gill.
    Nous passons maintenant à M. Johns pour une période maximale de deux minutes et demie. Allez-y, s'il vous plaît.
    Je vous remercie, moi aussi, tous les deux de vos témoignages importants.
    On entend souvent dire que le ministère des Pêches et des Océans néglige de prendre en considération le savoir autochtone, tout particulièrement en matière de conservation. Vous pourriez nous parler de l'importance de voir les choses changer, de l'importance d'investir dans le renforcement des capacités au sein des nations et de votre façon de mettre en application vos propres plans de gestion.
    Chef Gray, je sais que vous avez un programme de gardes forestiers, le Listuguj. Pourriez-vous nous en parler?
    Bien sûr, et cela renvoie à la question que M. Calkins a posée un peu plus tôt.
    Nous avons un plan de gestion de notre pêche automnale dans le cadre duquel notre effort est reconnu et autorisé par le MPO. Il est important pour nous de respecter cet effort, car c'est ce que la science nous dit de faire. C'est ce que nous considérons comme important pour la conservation de la ressource. Pour nous aider à cet égard, nous avons tout d'abord notre conseil qui examine notre plan de gestion chaque année. Nous avons ensuite des agents de conservation, si on veut, des contrôleurs de la pêche et de la faune qui sont sur l'eau pour s'assurer, tout d'abord, que nos pêcheurs sont en sécurité, et ensuite, qu'ils font du bon travail. Nous avons ensuite des contrôleurs aux quais qui comptent les homards à l'arrivée des bateaux pour s'assurer qu'il y a un partage et que l'on redonne immédiatement à la communauté. Nous avons enfin nos cuisiniers qui veillent à ce que les homards distribués soient de bonne qualité.
    Nous avons différents intervenants dans le processus. C'est vraiment un effort très important pour nous. Il est survenu un incident au début, une situation interne. Un des pêcheurs est sorti un jour plus tôt que prévu, alors nous avons organisé une réunion avec tous les pêcheurs qui nous ont demandé comment régler le problème. Nous leur avons répondu que ce pêcheur devait remettre toutes ses prises à la communauté, et il a répondu qu'il était d'accord pour le faire afin de garder la paix et de corriger ses torts à l'égard des autres pêcheurs.
    Je vous remercie beaucoup de cette information.
    Chef Prosper, vouliez-vous ajouter quelque chose?
    C'est un très beau résumé, à mon avis.
     Pour revenir à ce que le chef Gray a dit, lorsque vous avez des Micmacs qui sont sur l'eau en train d'exercer leurs droits de pêche, ils ont un certain degré de responsabilité et de reddition de comptes non seulement à l'égard des autres pêcheurs, mais aussi à l'égard de la communauté et des créateurs, Kisu'lkw et Sitqamúk, notre Terre mère. C'est souvent difficile à expliquer, mais c'est bien présent dans les yeux et le regard des pêcheurs.
    Merci beaucoup à tous les deux.
    Merci, monsieur Johns.
     Cela met fin à nos séries de questions pour le premier groupe de témoins. Je veux remercier le chef Prosper et le chef Gray d'avoir participé à la séance par vidéoconférence. Vos témoignages ont été très instructifs et nous ont éclairés sur certains éléments.
    Nous allons suspendre la séance quelques minutes pour donner le temps à nos témoins de quitter, et aux nouveaux d'arriver. Auparavant, je veux souligner la présence de Mme May, qui représente Saanich-Gulf Islands. Elle s'est jointe au Comité pour participer à cette étude. Bienvenue.

  (1750)  

    Nous allons commencer. Pouvez-vous tous cliquer sur le coin supérieur droit de votre écran pour avoir l'affichage « Galerie »? Vous devriez ainsi pouvoir voir tous les participants dans la fenêtre.
    J'aimerais mentionner quelques éléments à nos nouveaux témoins.
    Veuillez attendre que je vous nomme avant de prendre la parole. Lorsque vous êtes prêt, activez votre micro. Je vous rappelle que tous les commentaires doivent être adressés à la présidence. L'interprétation en vidéoconférence fonctionne sensiblement de la même façon que lors des séances régulières du Comité. Vous avez le choix au bas de votre écran entre « Parquet », « Anglais » ou « Français ». Lorsque vous avez la parole, exprimez-vous lentement et clairement, et lorsque vous avez terminé, vous devez désactiver votre micro.
    J'aimerais maintenant souhaiter la bienvenue à notre deuxième groupe de témoins, soit M. Michael Barron, de la Cape Breton Fish Harvesters Association, et MM. Ian MacPherson et Bobby Jenkins, de la Prince Edward Island Fishermen's Association.
    Nous allons maintenant entendre les déclarations liminaires.
    Monsieur Barron, vous disposez d'un maximum de cinq minutes. Allez-y lorsque vous êtes prêt.
    J'aimerais tout d'abord remercier le comité permanent de son invitation à témoigner ce soir.
    Comme vous l'avez mentionné, je m'appelle Michael Barron. Je suis président de la Cape Breton Fish Harvesters Association et je suis aussi propriétaire-exploitant et pêcheur commercial indépendant. Je représente environ 200 pêcheurs ici au Cap-Breton.
    J'aimerais commencer par dire que tout le monde a le droit de pêcher de manière sécuritaire et que mon association ne tolère pas la violence. Les organismes de pêcheurs au Canada atlantique appuient, et continuent d'appuyer, la décision Marshall. Les associations comme la mienne ont consacré beaucoup de temps et d'efforts pour l'expliquer à leurs membres, dont la connaissance et l'appui à l'égard de cette décision adoptée en 1999 varient beaucoup. Je vais être honnête et dire que pour ma part, j'essaie encore de comprendre la décision Marshall. C'est le problème que pose un document évolutif. Par « document évolutif », j'entends le fait que nous sommes sans définition claire du terme « subsistance convenable » depuis 21 ans et que ce terme a été interprété de maintes façons. Cette situation a créé de graves problèmes et de l'incertitude pour tous les intervenants de part et d'autre. Malheureusement, l'absence d'information et de discussions à propos du terme « subsistance convenable » vient rendre encore plus complexes l'éducation et la prestation de conseils à nos membres.
    L'industrie dans son ensemble génère environ 2 milliards de dollars de revenus en Nouvelle-Écosse. Elle emploie approximativement 50 000 personnes dans la province. Pour vous donner un exemple de son apport économique, 249 pêcheurs se trouvent dans la circonscription où habite le député Battiste. Ces pêcheurs génèrent des revenus bruts d'environ 31 millions de dollars. Il s'agit d'un apport important qui doit être souligné. À l'heure actuelle, les pêcheurs n'ont eu aucune discussion avec leur député et ont le sentiment d'être victimes de discrimination. Le 5 octobre, les intervenants de la zone de pêche au homard 27 ont fait parvenir une lettre par courrier recommandé aux députés fédéraux et aux députés provinciaux et ont reçu une réponse, mais ils n'ont pas reçu de réponse encore du député Battiste. Toutes les parties doivent avoir la chance de discuter de leurs préoccupations respectives.
    La gestion de la pêche au homard repose sur un contrôle de l'effort: un nombre limité de participants, un nombre limité d'engins, une durée de saison définie, une taille maximale pour les casiers, et surtout, la protection des femelles œuvées et des homards en période de mue. L'industrie de la pêche au homard a été la première à limiter le nombre de participants dans le but de stabiliser l'emploi et de contrer la tendance historique d'assister à une augmentation de la participation en période de forte production, suivie d'un retrait des investissements et d'une sortie de l'industrie par ceux qui ne dépendaient pas uniquement de cette pêche. Or, même en limitant le nombre de participants, il a été nécessaire d'instaurer des programmes de rachat dans les années 1970, et encore récemment au début des années 2000, pour tenter de faire correspondre le nombre de participants à la ressource disponible.
    Outre les initiatives et les règles officielles pour gérer la participation, la pression locale contribue à la répartition relativement ordonnée de l'effort dans les zones de pêche du homard. Les pêcheurs commerciaux craignent très logiquement qu'en augmentant ou en modifiant l'effort par des quantités inconnues, en particulier si cela est concentré dans quelques régions, on réduise considérablement les prises dans ces régions, en laissant les autres inchangées.
    La grande question qui se pose est la suivante: si le gouvernement établit des droits et élargit l'accès, qu'arrivera-t-il à nos petites collectivités côtières? Si on élargit l'accès, cela nuira à l'économie de ces collectivités, car l'argent que génère l'industrie est dépensé au sein de la communauté. Dans certains cas, lorsque l'accès des Autochtones n'est pas à proximité des côtes, cet argent ira ailleurs, ce qui nuira à nos économies.
    La manipulation des homards à cette période de l'année, après la mue et la ponte des œufs, les rend plus vulnérables et faciles à attraper parce qu'ils tentent de regagner des forces et ont une carapace molle. Après la ponte, s'ils sont attrapés à cette période de l'année, ils sont ce qu'on considère être des prises de l'année suivante. Les taux de prises des flottes commerciales diminueront donc, et il en sera de même de la valeur économique qu'en retirent nos collectivités.
    La Charte protège les droits et libertés que tous les Canadiens estiment essentiels pour préserver le Canada comme pays libre et démocratique. Toutefois, comment cela s'applique-t-il à moi, en tant que pêcheur commercial canadien? Si je pose la question, c'est parce que nous avons besoin de nous asseoir à la même table pour discuter des problèmes opérationnels présents depuis trop longtemps.

  (1755)  

    Pour une raison quelconque, le MPO a négligé de réunir les parties pour régler ce problème. Depuis octobre 2019, une coalition de groupes de pêcheurs demande formellement au MPO d'instaurer un dialogue entre les pêcheurs autochtones et non autochtones. Rien n'a été fait à ce jour. Il faut que ce dialogue ait lieu pour favoriser le développement durable des pêches en protégeant les besoins économiques des pêcheurs et la viabilité de l'espèce, de concert avec les droits des Autochtones.
    Il s'agit d'une question d'égalité entre les zones de pêches du homard, les pêches en général et la société dans son ensemble. Toute l'attention a été centrée dernièrement sur la pêche du homard, ce qui est étrange dans une certaine mesure.
    Merci, monsieur Barron. Nous avons dépassé le nombre de minutes permis pour votre déclaration liminaire. Nous avons une copie de votre exposé. Nous allons le faire traduire, et les membres du Comité en recevront alors une copie. Nous aurons l'occasion, je l'espère, de revenir à votre témoignage pendant la période de questions.
    Je ne sais pas qui parle au nom de la Prince Edward Island Fishermen's Association.
    Vous pouvez prendre la parole maintenant pour une période maximale de cinq minutes. Allez-y.
    Merci, monsieur le président. M. MacPherson et moi, nous partageons l'exposé.
    Bonsoir à tous. La Prince Edward Island Fishermen's Association souhaite remercier le Comité permanent des pêches et des océans de lui donner l'occasion de témoigner à l'heure où le secteur des pêches traverse une période difficile dans l'Est du Canada.
    Je m'appelle Bobby Jenkins, et je suis président de la Prince Edward Island Fishermen's Association, ou PEIFA.
    La PEIFA représente 1 254 pêcheurs du noyau à l'Île-du-Prince-Édouard. Le homard est l'espèce qui génère le plus de revenus pour nos membres. Mon exposé portera donc avant tout sur cette espèce.
    À la lumière des événements des dernières semaines, il y a eu beaucoup de discussions sur la nature des principaux problèmes. Nous sommes ici aujourd'hui pour discuter de la viabilité des stocks de homard et de l'importance d'une application cohérente des mesures de conservation.
    Les pêcheurs commerciaux que nous sommes se trouvent dans une situation où ils ne sont pas représentés dans les discussions importantes qui ont lieu et qui ont des répercussions sur la ressource dont nous dépendons tous pour notre subsistance. La rencontre d'aujourd'hui marquera peut-être le début de l'élargissement du dialogue sur les problèmes de gestion de la ressource.
    Nous comprenons les facteurs importants qui contribuent à la situation actuelle au Canada atlantique et au Québec et le problème lié à l'absence de définition du terme « subsistance convenable ». Il semble également que tous les intervenants dans le secteur des pêches s'inquiètent de l'escalade du conflit.
    J'aimerais souligner que les pêches traditionnelles et non traditionnelles coexistent à l'Île-du-Prince-Édouard depuis de nombreuses années et que les efforts de collaboration, comme l'opposition au pipeline de la Northern Pulp dans le détroit, profitent à tous les pêcheurs à l'Île-du-Prince-Édouard.
    Aujourd'hui, nous souhaitons parler de notre attachement au secteur des pêches et discuter de nos préoccupations. Nous allons aussi vous faire part du mandat que nous devons suivre, conformément aux directives de nos membres. Nous préconisons que la pêche de subsistance convenable se déroule à l'intérieur d'une saison de pêche commerciale réglementée.
    Je souhaite que nos discussions aujourd'hui soient respectueuses et constructives. Nous traversons une période difficile, pendant laquelle les dirigeants doivent montrer la voie en mettant en place des solutions réalistes et bénéfiques pour nos pêcheurs.
    Merci, monsieur le président.

  (1800)  

    Monsieur le président, avez-vous reçu notre document aujourd’hui? Nous avons été invités un peu à la dernière minute...
    Non, nous ne l’avons pas reçu.
    D’accord. C’est dommage. Quoi qu’il en soit, pour respecter l’heure, je vais résumer ce document. Nous voulions aborder trois ou quatre points clés.
    Dans les années 1970, on a commencé à recueillir des données détaillées. Nous disposons aujourd’hui de plus de 50 ans de données sur les stocks et le rendement de la ressource. En 2005, deux zones connaissaient un déclin important. Elles ont élaboré leurs plans de gestion dans le cadre des mesures de durabilité concernant le homard de l’Atlantique. Il s’agissait d’abandonner définitivement les casiers et d’emprunter de grosses sommes d’argent pour les larguer. Les zones de pêche du homard de l’Atlantique 25 et 26A ont perdu le nombre stupéfiant de 29 050 casiers au cours de cette période. Ce chiffre est considérable.
    La question pour le Comité est la suivante: Pourquoi l’histoire est-elle pertinente par rapport aux situations actuelles?
    Nous aimerions aborder 10 points. Premièrement, les stocks de homards sont en bonne santé dans la plupart des zones en raison de la réduction considérable du nombre de casiers et de permis dans de nombreuses zones au cours de la dernière décennie.
    Deuxièmement, on a établi des saisons réglementées pour préserver ces stocks. Les dates de ces saisons sont étayées par de nombreuses années de données scientifiques.
    Troisièmement, la pêche d’une taille de carapace supérieure à la taille légale minimale a été un facteur positif qui a contribué aux mesures de conservation dans les zones de pêche du homard.
    Quatrièmement, les certifications et les marchés internationaux sont tributaires d’une approche unie et cohérente de la pêche dans tous les domaines, approche qui peut être documentée par des organisations tierces.
    Cinquièmement, les pêcheurs traditionnels et non traditionnels ont travaillé et continueront de travailler ensemble à l’Île-du-Prince-Édouard à ce type de questions relatives aux ressources. Dans un effort de coopération, une bande de l’Île a vendu deux permis dans une zone pour en acheter un autre dans une autre afin de se rapprocher de son territoire et de son usine. Les membres de la Prince Edward Island Fishermen’s Association ont appuyé ces changements à l’unanimité. Une nouvelle série de pourparlers a récemment débuté entre la PEIFA et les pêcheurs des Premières Nations.
    Sixièmement, la gestion générale de la ressource doit être supervisée par une organisation globale comme le ministère des Pêches et des Océans.
    Septièmement, le solde positif qui existe actuellement dans le secteur de la pêche du homard du Canada atlantique et du Québec résulte de mesures particulières de gestion fondées sur l’effort. Ce solde diminuera rapidement si la ressource fait l’objet d’un effort de pêche trop important.
    Huitièmement, l’application cohérente des lois de conservation actuelles pour tous les pêcheurs et les acheteurs est essentielle pour mettre fin à toute pêche illégale.
    Neuvièmement, le concept visant à ne pas créer de nouvel accès à la pêche s’est avéré être judicieux. Le principe « une entrée, une sortie » appliqué aux achats de permis permet de maintenir un accès à la pêche qui soit cohérent et gérable et qui puisse être documenté.
    Enfin, les sondages nationaux suggèrent que les Canadiens accordent une très grande importance au respect et à l’application des règlements de pêche et à la tenue de négociations directes entre le gouvernement, les dirigeants autochtones et les organisations de pêcheurs.
    Voilà ce qui met fin à notre exposé. Le capitaine Jenkins et moi-même serons heureux de répondre aux questions du Comité.
    Merci à vous deux.
    Nous allons passer à notre première série de questions de six minutes ou moins.
    Monsieur Bragdon, je crois comprendre que vous allez débuter. Partagez-vous votre temps encore une fois?
    En fait, je vais céder mon temps à M. Arnold pour lui rendre la pareille après la dernière série.
    Merci, monsieur le président.
    Aucun souci.
    Monsieur Arnold, vous avez la parole. Lorsque vous serez prêt à partager votre temps avec M. Calkins, vous pourrez le faire.

  (1805)  

    Merci, monsieur le président.
    Je voudrais commencer par demander aux deux présentateurs si leurs organisations ont été consultées par la ministre ou son ministère pour connaître leur avis sur la façon dont cette situation se répercute sur la pêche et les entreprises qu’ils ont créées.
    Il est certain que toute consultation avec la PEIFA s’est faite à un échelon élevé. Nous avons travaillé avec un certain nombre d’autres groupes afin de soumettre ces idées à des discussions. Un certain nombre de groupes, y compris la PEIFA, ont trouvé frustrant que nous n’ayons pu contribuer directement à certaines de ces situations en cours.
    Vous n’avez donc pas eu de discussions directes avec la ministre ou son ministère?
    Nous avons discuté par téléphone. Nous avons également présenté des documents, mais nous n’avons reçu aucune réponse officielle à ces derniers — tout comme pour la liste que j’ai donnée, monsieur Arnold.
    D’accord.
    Monsieur Barron, avez-vous un commentaire à formuler?
    Notre association, les Cape Breton Fish Harvesters, n’a reçu aucune communication directe de la part de la ministre des Pêches. Elle n’a pas répondu à la lettre que nous lui avons envoyée au nom des parties prenantes. Il n’y a eu qu’une petite consultation avec les autres membres de la coalition des associations de pêcheurs, et cette information m’a été transmise par les autres groupes. Ce sont là tous les rapports que nous avons eus avec la ministre des Pêches.
    D’accord. Merci.
    Dans certains des témoignages de la semaine dernière, nous avons entendu dire qu’une partie de ce qui se passe ici consiste en des négociations de gouvernement à gouvernement, entre le gouvernement et les Premières Nations ou la communauté autochtone. Quelles méthodes de communication proposez-vous d’utiliser entre les pêcheurs non autochtones et le ministère des Pêches et des Océans et les pêcheurs non autochtones et les Premières Nations pour négocier la mise en œuvre de ces droits issus de traités?
    Dans notre cas, les chefs ont accepté de retourner voir leurs membres pour discuter de la façon dont, selon eux, on devrait définir « subsistance convenable » ou « pêches ». Nous allons nous réunir à nouveau, de sorte que nous estimons que c’est une étape positive.
    Il est clair que cette ressource est si importante pour tout le monde que nous devons entamer un dialogue tripartite. Manifestement, d’autres témoins nous ont dit que le ministère des Pêches et des Océans suscite beaucoup de frustration. Peut-être qu’un facilitateur indépendant pourrait rendre ces discussions productives, mais il faut absolument tenir des discussions à trois avec les pêcheurs non traditionnels, les pêcheurs traditionnels et le ministère des Pêches et des Océans.
    D’accord. Merci.
    Je veux passer à une autre question.
    Dans le rapport de 2000 du comité des pêches concernant les arrêts Marshall et Marshall II, le Comité a recommandé que « tout transfert d’accès aux ressources halieutiques aux communautés des Premières Nations ait lieu au moyen du rachat volontaire, financé par le gouvernement fédéral, d’une partie des permis de pêche commerciale, à mesure qu’ils deviennent disponibles ». Nous avons vu que cela s’est produit en partie, mais la réponse du gouvernement à cette recommandation a été la suivante: « Le gouvernement reconnaît que la plupart des pêches sont pleinement exploitées et que l’augmentation de la participation autochtone aux pêches ne peut se produire sans perturbations sérieuses pour les pêcheurs actuels que par le retrait de la capacité en place. » C’était il y a 20 ans. La pêche s’est-elle intensifiée? Est-elle devenue plus efficace? La demande en ressources a-t-elle augmenté au cours de ces 20 années?
    Je dirais que la demande exercée sur la pêche est plus forte aujourd’hui qu’il y a 20 ans. J’aimerais également mentionner, comme l’a fait M. MacPherson dans son exposé, que lorsque nous sommes passés sous le régime des mesures de durabilité concernant le homard de l’Atlantique pour acheter des permis existants et réduire le nombre de casiers, nous l’avons fait en partie pour assurer la durabilité des ressources. À l’époque, les ressources ne se portaient pas très bien. C’était il n’y a pas si longtemps, et nous avons lancé les mesures de durabilité concernant le homard de l’Atlantique en 2009. Nous constatons qu’elle se rétablit aujourd’hui, mais la demande exercée sur les stocks est probablement plus importante qu’en 2000, et la technologie pour les capturer est nettement meilleure.

  (1810)  

    Merci.
    Monsieur Barron, avez-vous un commentaire à formuler à cet égard?
     Je suis d’accord avec ce que disent mes homologues de l’Île-du-Prince-Édouard. L’effort a augmenté, mais il s’est accru grâce aux stocks constitués au fil des ans grâce aux mesures de conservation prises par la flotte commerciale au moyen de dispositifs d’évasion et d’autres choses de ce genre.
    D’accord. Merci.
    Je vous pose tous la question: Comment le ministère des Pêches et des Océans devrait-il mettre en œuvre les droits de pêche issus de traités des Micmacs afin d’assurer une subsistance convenable, tout en offrant aussi une certitude et une prévisibilité quant à l’accès aux ressources aquatiques pour tous les pêcheurs?
    Nous avons écouté les témoins. Nous avons fait la même chose. Nous avons rencontré le chef Bernard et le chef Gould de Lennox Island et Abegweit, à l’Île-du-Prince-Édouard, le 2 octobre. À ma connaissance, monsieur, personne ne nous a encore donné de définition de la subsistance convenable, et je n’ai certainement pas entendu pareille définition ici ce soir. C’est une question un peu chargée. Nous ne savons pas encore en quoi consiste la subsistance convenable à ce stade. Si j’entrais dans une salle de 20 personnes, nous pourrions peut-être élaborer une définition de ce que nous pensons être une subsistance convenable, mais serait-ce approprié pour les détenteurs de droits? Probablement pas.
    Je voulais simplement ajouter...
    Je vous demanderais d’être bref.
    Nous avons été invités à la dernière minute, si bien que vous n’avez pas reçu notre document.
    Les 10 points que nous avons énoncés visaient à lancer une discussion, mais nous n’y participons pas en ce moment.
    Je vous remercie.
    Une fois que nous aurons reçu et traduit tout document soumis, nous le distribuerons aux membres du Comité.
    Merci, monsieur Arnold. Vos six minutes sont écoulées. Je ne savais pas que vous n’alliez pas partager votre temps de parole, mais vous l’avez tout de même utilisé.
    La parole est maintenant à M. Morrissey pour six minutes ou moins, je vous prie.
    Merci, monsieur le président.
    Mes questions seront brèves et directes pour quiconque voudra y répondre.
    La pêche en dehors des saisons existantes peut-elle être plus lucrative?
    Je peux répondre à cette question.
    Selon la définition de la pêche en dehors d’une saison réglementée et selon le nombre de casiers, elle pourrait être plus lucrative en fonction de l’endroit où vous allez et de votre concurrence. Si votre concurrence est faible et que vous avez entre 50 et 100 casiers, vous pourriez probablement installer ces casiers à leur taille maximale — disons qu’il y en a 50 — et les remonter probablement quatre, cinq ou six fois par jour. Si la concurrence n’est pas là, vous pêchez pratiquement sans concurrence et oui, votre pêche pourrait être plus lucrative. Oui, selon la façon dont vous abordez la situation, la pêche pourrait être tout aussi bonne que celle qui est pratiquée pendant les saisons réglementées sur, par exemple, 55 jours avec un modèle de 300 ou de 272 casiers.
    La pêche avec très peu de concurrence signifie plus de prises par casier et davantage de prises. Ai-je raison sur ce point, monsieur Barron?
    Oui, vous avez raison.
    Petite précision pour le Comité: en 2004, la zone de pêche du homard 25, qui est partagée entre le Nouveau-Brunswick et I'Île-du-Prince-Édouard, était en train de s’effondrer et presque ruinée des deux côtés du détroit. Tous ceux qui y participaient ne pouvaient même pas payer leurs frais de carburant, encore moins quoi que ce soit d’autre.
    On a pris des mesures importantes pour rétablir cette pêche à son niveau très élevé actuel, notamment en supprimant un nombre important de permis et, par conséquent, de casiers et en incluant la taille de la carapace. Ces deux mesures ont-elles permis à cette pêche de retrouver le niveau de réussite qu’elle connaît aujourd’hui?
    C’est tout à fait vrai. Ce fut très difficile à accepter pour certains des pêcheurs de la zone 25 à l’époque. Vous avez tout à fait raison. Personne n’a gagné d’argent là-bas, ou très peu, pendant quelques années. Après les impôts et tout le reste, il ne leur restait probablement plus rien.
    Mais les mesures qui ont été mises en place au nom des pêcheurs de cette région — il est question d’évents d’échappement, de taille de carapace, de relâchement de femelles plus grosses — ont joué un rôle dans le niveau actuel des stocks. Pendant quelques années, les stocks étaient en baisse et les pêcheurs ont pris les choses en main et ont fait beaucoup de choses pour les ramener au niveau de pêche actuel.

  (1815)  

    Merci.
    Cette question est ouverte à tous. Je tiens à la replacer dans son contexte, car nous avons eu droit à deux merveilleux exposés, ceux du chef Prosper et du chef Gray, qui ont mentionné à maintes reprises que les membres des Premières Nations, en particulier les Micmacs, aiment être sur l’eau pour exercer leur droit et participer à la pêche.
    Ce dont on m’a fait part de temps en temps, en plus de la nécessité pour les Premières Nations d’avoir accès à la pêche moderne en raison du taux de chômage élevé dans certaines de leurs communautés, c’est du fait que, dans certaines situations, ces droits de pêche sont exercés par des pêcheurs non autochtones et non par les Premières Nations mêmes. Merci de me faire part de vos commentaires, car je veux connaître votre point de vue à tous les deux.
    Je ferai ici allusion au récent rapport de l’Institut Macdonald-Laurier qui dresse le profil de certaines des communautés des Premières Nations qui pêchent avec leur permis. Les revenus tirés de ces permis retournaient dans la communauté, et on citait de véritables exemples de réussite.
    À mon sens, il existe des cas statistiques et pouvant être documentés de communautés qui profitent de la pêche avec leur propre permis.
    Vous n’avez pas fait de commentaires sur la pratique. Est-ce qu’il arrive que des pêcheurs non autochtones pêchent au titre des droits des Premières Nations?
    Merci d’avoir posé la question.
    Oui, cette situation se produit dans certains ports où des pêcheurs non autochtones aident les pêcheurs autochtones à effectuer les prises. Je n’y participe pas moi-même. Je ne connais pas de personnes qui le font, mais je sais qu’il y en a.
    Peut-être que notre homologue du Cap-Breton en sait plus à ce sujet là-bas.
    Monsieur Barron, pourriez-vous répondre?
    Parlez-vous de la cession des permis de pêche à des pêcheurs non autochtones? C’est à cela que vous faites allusion?
    Oui.
    Il y a des exemples de cas semblables. Il n’y en a pas ici dans ma zone de pêche du homard, à ma connaissance, mais il y en a... Je suis désolé, il y en a en fait dans ma zone de pêche du homard, mais ce n’est pas le cas dans la zone où je pêche directement. Cependant, c’est ce qui se passe dans toute la Nouvelle-Écosse.
    Merci.
    Merci, monsieur Morrissey.
    La parole est maintenant à Mme Gill pour six minutes ou moins.

[Français]

     Merci, monsieur le président.
    Je remercie les témoins qui ont accepté d'être présents aujourd'hui.
    Ma question porte sur les négociations. Vous avez entendu plus tôt le chef Prosper et le chef Gray dire qu'il doit y avoir une réelle négociation de nation à nation, donc entre les nations autochtones et le gouvernement du Canada.
    Des pêcheurs demandent à être entendus. Comment le gouvernement pourrait-il tenir compte des intérêts des pêcheurs allochtones? Si j'ai bien compris, le ministère des Pêches et des Océans ne les représente pas actuellement.
    Comment les pêcheurs pourraient-ils être davantage partie prenante à la conversation? La question s'adresse à MM. MacPherson, Barron et Jenkins.

[Traduction]

    L’une des idées qui ont été avancées depuis un certain temps déjà est qu’il y ait un agent de liaison entre les organisations de pêche non autochtones et la table de négociation qui soit chargé de ce genre de questions et de faire connaître nos préoccupations. Il faudrait évidemment que ce soit une personne de confiance.
    En fin de compte, il existe des moyens de contourner ce problème. Nous comprenons l’aspect de nation à nation, mais je pense que les gens peuvent comprendre que lorsqu’il y a 10 000 pêcheurs et une personne qui négocie en notre nom, et qu’on nous répond qu’on ne peut pas nous dire ce qui se passe parce qu’il s’agit de négociations de nation à nation, c’est très frustrant. C’est malheureusement ce qui a mené à une partie de la situation qui existe actuellement.

  (1820)  

[Français]

    Monsieur Barron, voulez-vous répondre?

[Traduction]

    Nous demandons simplement au ministère des Pêches et des Océans de nous aider à faciliter les choses, et en demandant à cette partie extérieure de nous aider à diriger la conversation, il est possible de réunir plus de gens de l’industrie et de Premières Nations autour de la table afin de pouvoir entamer la discussion.

[Français]

    Vous parlez de négociations de nation à nation pour ce qui est des droits et de la façon dont ils se déclineront. Par curiosité, comment voyez-vous ce travail de négociation? Quelle en est la structure? Parlez-vous de négociations entre pêcheurs allochtones et pêcheurs autochtones? Je crois que c'est ce que dont ont parlé M. MacPherson et M. Jenkins.

[Traduction]

    Non. Il faut que les Premières Nations, les pêcheurs et le gouvernement soient réunis dans la même pièce pour discuter.

[Français]

    D'accord.

[Traduction]

    Ce n’est pas le gouvernement et les pêcheurs ou le gouvernement et les Premières Nations. Les trois parties doivent être assises autour de la table pour la discussion.
    Le ministère des Pêches et des Océans nous a dit qu’aucun nouvel accès ne serait créé, ce qui se fait habituellement par l’octroi de nouvelles licences ou d’une autre façon. Selon moi, c’est l’un des principaux problèmes que nous avons actuellement. C’est un problème.
    Je ne pense pas que le mot « négociations » convienne. Il doit y avoir un dialogue ouvert et franc sur la ressource et sa durabilité. Si certaines décisions sont prises ou certaines idées proposées, l’accent doit être mis sur la façon dont elles vont influer sur la durabilité de la ressource.

[Français]

    Mon autre question concerne les différents types de pêche autochtone.
    Depuis plusieurs années, on observe, chez les Premières Nations, une volonté de mener des activités de pêche commerciale. Il y a également la pêche communautaire. Comment percevez-vous ces deux types de pêche en relation avec le concept de subsistance convenable? Pensez-vous que cela entre en ligne de compte ou s'agit-il de deux choses complètement différentes?

[Traduction]

    Une fois de plus, pour revenir sur les discussions relatives aux répercussions possibles sur la ressource, j’estime qu’une bonne façon d’aborder la question est de regarder les répercussions possibles ou les effets cumulatifs sur la ressource. Nous devons adopter cette optique et inclure tous les pêcheurs dans ce type de dialogue. Si la ressource devait diminuer drastiquement, ce serait tous les pêcheurs qui en ressentiraient les conséquences. Ce serait une situation perdant-perdant.
    Il y a eu une rupture de transmission pendant votre question. Pourriez-vous la répéter?

[Français]

    Nous avons parlé de subsistance convenable. La pêche communautaire est une chose, mais il y a également la pêche commerciale, où les Premières Nations prennent de façon tout à fait louable une place plus importante. Du point de vue de la subsistance convenable, trouvez-vous que ces deux types de pêche s'opposent ou se complètent?

[Traduction]

    Eh bien, comme ils l’ont dit, si l’accès accordé à la pêche communautaire et commerciale est trop important et que les stocks commencent à décliner, il y aura un effet sur l’ensemble des pêches.
    Merci, madame Gill.

  (1825)  

[Français]

    Je vous remercie.

[Traduction]

    La parole est maintenant à M. Johns. Vous disposez d’au plus six minutes.
    Merci.
    Merci à vous tous pour votre témoignage, surtout à si courte échéance.
    D’abord, messieurs Barron et Jenkins, je vous remercie de condamner comme nous tous la violence perpétrée contre les pêcheurs micmacs. Pouvez-vous nous parler des mesures que vos organisations respectives ont prises pour que leurs pêcheurs répondent de leurs actes, qu’il s’agisse de violence ou de tentatives d’assurer eux-mêmes la conservation de la ressource? Pourriez-vous nous dire ce qui se produirait au sein de votre organisation si un pêcheur allait à l’encontre des règles de conservation du ministère des Pêches et des Océans et essayait de prendre la situation en main?
    Merci pour cette question très importante.
    Je viens de signer des déclarations de la victime pour les tribunaux de l’Île-du-Prince-Édouard où des contrevenants sont accusés de délits de pêche. Il y a quelque temps, à l’une de ses réunions, notre conseil d’administration a adopté une motion exigeant que l’on signe une déclaration de la victime, peu importe qui préside l’association à l’Île-du-Prince-Édouard à ce moment-là et peu importe les circonstances. Nous le faisons depuis 10 ans. Nous allons continuer le faire.
    Je me suis porté volontaire pour lire des déclarations de la victime au tribunal, au besoin. On ne me l’a pas encore demandé, mais j’ai accepté de le faire, si nécessaire. À l’Île-du-Prince-Édouard, les pratiques de conservation de notre conseil d’administration et de nos comités consultatifs veulent que tout le monde reçoive le même traitement, peu importe la personne prise en défaut ou le crime commis. Une déclaration de la victime est donc émise au nom de la PEIFA.
    En ce qui a trait aux chefs autochtones à l’Île-du-Prince-Édouard, la PEIFA a pris l’initiative le 2 octobre de rencontrer nos chefs, soit la chef Darlene Bernard de Lennox Island et le chef Junior Gould d’Abegweit. Nous avons eu une réunion fort productive le 2 octobre sur la situation au Canada atlantique. Nous avons hâte de dialoguer davantage avec les chefs là-bas.
    Pour vous donner un petit exemple, si un pêcheur de votre organisation se faisait prendre en train d’incendier un vivier à homards, de détruire des casiers au nom de la conservation et de détruire des homards, que feriez-vous?
    Nous n’allons pas tolérer quoi que ce soit du genre…
    Mais y a-t-il des conséquences au sein de votre organisation?
    Ce serait au système judiciaire de porter des accusations.
    Bon. Donc, votre organisation n’a pas de…
    Aussi, peu importe le port où cela se serait produit, je m’attendrais à ce que les représentants des autorités portuaires concernées au sein du conseil fassent quelque chose du genre. Nous ferions en sorte que les forces de l’ordre… Personnellement, nous ne pouvons porter aucune accusation.
    Monsieur Barron, avez-vous quelque chose à ajouter?
    Notre association n’a pas de règlement qui lui permet d’appliquer quoi que ce soit du genre et n’a jamais rien connu de tel. Ce pourrait être soulevé dans nos discussions, mais de demander à une association si elle va appliquer une loi à laquelle on a contrevenu sur l’eau… La coercition est du ressort du ministère des Pêches et des Océans. Il ne devrait pas incomber…
    Supposons que le ministère des Pêches et des Océans condamne quelqu’un. Quelle serait la réaction de votre organisation par rapport au membre ainsi condamné?
    Le conseil d’administration discuterait de la situation.
    Je suis très content de vous entendre dire que les pêches peuvent être gérées conjointement. Nous croyons que ce devrait être un dialogue de nation à nation sur l’exploitation des pêches. Où j’habite, sur le territoire traditionnel nuu-chah-nulth, les pêcheurs commerciaux et sportifs comprennent que c’est la ministre qui représente les intérêts commerciaux à la table des négociations, où il y a un dialogue de nation à nation sur le contingent et l’établissement des droits de pêche.
    Toutefois, notre région compte aussi un organe de gestion appelé Conseil de gestion des ressources aquatiques pour la côte Ouest. C’est vraiment un excellent modèle. Tout le monde y est représenté et y discute de son plan de gestion, y compris les Premières Nations. Et tout le monde s’en réjouit. Les participants affirment que le Conseil fonctionne merveilleusement bien, mais le ministère a essentiellement quitté le Conseil. Il y est pour ainsi dire invisible. Au cours de la dernière décennie, il a arrêté de le financer.
    Pouvez-vous citer des exemples dans votre région où il y avait des mécanismes qui fonctionnaient bien et que le ministère a délaissés et qu’il a arrêté de soutenir?
    Allez-y, monsieur Barron. Je crois que je vais commencer de nouveau avec vous.

  (1830)  

    Rien ne me vient spontanément à l’esprit, mais d’après les quelques interactions que j’ai eues avant la situation actuelle, le ministère des Pêches et des Océans dans notre région réussit assez bien à travailler avec l’industrie. Depuis ce qui s’est passé en octobre et jusqu’à maintenant, toute communication fédérale et locale a en quelque sorte cessé, donc…
    Constatez-vous du racisme systémique au sein du ministère? Pouvez-vous penser à des exemples?
    Pas à ce que je sache.
    Et vous, messieurs MacPherson et Jenkins? Pouvez-vous faire un commentaire là-dessus?
    De notre côté, je crois que la frustration vient du fait que nous traitons de nos préoccupations dans cette situation avec de hauts fonctionnaires, à Ottawa. Comme c’est arrivé dans le Sud-Ouest de la Nouvelle-Écosse, c’était très préoccupant pour tout le monde.
    Nous cherchions entre autres à établir un dialogue et nous avons demandé au ministère des Pêches et des Océans de nous aider. Notre gestionnaire local nous a apporté son aide à notre dernière réunion. Je suis content que nous ayons pu compter sur lui à ce moment-là, mais ce dialogue doit avoir lieu à beaucoup d’endroits et c’est un rôle que peut remplir le ministère des Pêches et des Océans. Mais, pour quelque raison, il semble y avoir de la réticence.
    Et qu’en est-il...
    Merci, monsieur Johns. Vous avez depuis longtemps dépassé votre temps de parole.
    Merci.
    Passons maintenant à M. Arnold. Vous disposez d’au plus cinq minutes.
    Merci, monsieur le président, mais je cède mon temps à M. Mazier.
    Monsieur Mazier, quand vous serez prêt, allez-y. Le compteur tourne.
    Merci, monsieur le président.
    Vous disposez d’au plus cinq minutes.
    Pour revenir brièvement sur les questions de M. Johns relativement au ministère des Pêches et des Océans, vous avez essentiellement demandé à tout organisme gouvernemental qui était prêt à vous entendre de venir vous aider à instaurer un dialogue et à coordonner les discussions, pas seulement entre pêcheurs, mais dans les communautés.
    J’aimerais revenir sur vos propos, monsieur Barron, sur votre appel à la création d’une coalition. Simplement pour que ce soit clair, il n’y avait pas de dialogue avec le ministère des Pêches et des Océans ni avec la ministre. Personne n’a vraiment fait de suivi auprès de vous et pensé que c’était une bonne idée et qu’on devrait peut-être entamer une conversation comme celle-là.
    Je n’ai pas dit qu’il n’y avait pas de coalition. J’ai dit qu’il y a une coalition d’associations de pêcheurs qui œuvrent ensemble depuis octobre 2019, et que nous essayons d’amener la ministre à s’asseoir avec nous à titre de représentants de toute l’industrie.
    C’est ce que j’avais compris. Désolé. C’est vrai. Bon.
    Croyez-vous que ce qui s’est passé récemment aurait pu être évité si ces conversations avaient débuté en 2019? Puisque le dialogue serait déjà lancé, croyez-vous qu’il aurait ainsi été possible de réunir les gens autour d’une table et d’en faire un exemple?
    Je suis persuadé que la situation n’aurait pas dégénéré de la sorte si des conversations étaient en cours. Cela est entièrement dû au manque d’encadrement ou de gouvernance du ministère des Pêches et des Océans.
    Est-ce que quelqu’un au ministère des Pêches et des Océans a communiqué avec vous pour vous expliquer pourquoi le ministère ne voulait pas se manifester, pourquoi il s’est soit retiré, soit abstenu de participer? Est-ce que c’était du nouveau pour le ministère?
    L’un de vous peut répondre.
    Est-ce que quelqu’un d’autre sur la côte Est a adopté ce type d’approche?
    Je peux intervenir là-dessus.
    On nous a dit qu’il s’agissait de négociations de nation à nation. Nous n’étions pas vus comme une des parties prenantes dans le cadre de ce mandat, et ne pouvions donc pas prendre part aux discussions. Même si on nous a dit pendant plusieurs mois que le ministère des Pêches et des Océans essayerait d’établir un certain dialogue avec différentes Premières Nations du Canada atlantique et du Québec, cela ne s’est pas produit.
    D’accord.
    Changeons un peu du sujet.
    Parlons des ressources. Je suis moi-même agriculteur, mais dans les Prairies. Vous vous occupez toujours de vos ressources, vous essayez de les protéger en prévision de la récolte de l’année suivante.
    Avez-vous des rapports sur l’état des stocks en ce moment? Est-ce que les pêches qui ont cours actuellement sont durables? Si les stocks devaient s’effondrer et que vous constatiez soudainement que nous sommes en crise, combien de temps faudrait-il pour qu’ils se rétablissent? Que faudrait-il faire?

  (1835)  

    C’est une bonne question.
    Tout dépend de l’ampleur de l’appauvrissement des stocks. Si nous constations une baisse de 20 à 25 %, il faudrait envisager une quelconque mesure de conservation.
    Quand nous avons procédé au rachat de permis de pêche et à la réduction du nombre de casiers en 2009-2010, certains secteurs de nos zones de pêche du homard ou ZPH connaissaient des baisses de 20 à 25 % des prises, comme l’a mentionné plus tôt M. MacPherson; donc, nous avons pris l’initiative d’essayer de mettre en place de nouvelles mesures de conservation. Tout dépend de l’état des stocks et de l’ampleur de leur appauvrissement. Il faudrait se fonder là-dessus, sur toutes les données scientifiques disponibles à ce moment-là.
    J’ajouterais quelques mots sur ce que vient de dire M. Jenkins. Dans le cas des activités de pêche actuelles, et dépendamment de la gestion qui est faite de cette ressource, nous ne verrons pas d’effets immédiats, car il faut de sept à neuf ans pour qu’un homard atteigne une taille commercialement viable. S’il y a des activités vraiment nuisibles en ce moment, nous n’en constaterons les effets que plus tard. Il peut y avoir des effets à court terme, mais il faudra attendre beaucoup plus longtemps pour voir les conséquences de ce qui se produit en ce moment.
    Donc, y a-t-il un organisme gouvernemental…
    Merci, monsieur Mazier. Vos cinq minutes sont écoulées. Le temps passe vite quand on s’amuse.
    Merci.
    Passons à M. Battiste. Vous disposez d’au plus cinq minutes.
    Merci. J’aimerais aussi remercier les témoins.
    Monsieur Barron, pourriez-vous me faire suivre la correspondance? La dernière correspondance que j’ai reçue provenait du président de la Cape Breton Fish Harvesters Association. Je n’ai reçu aucune correspondance du genre au cours des dernières semaines.
    J’aimerais discuter un peu avec vous de ce que disent les associations de pêcheurs. J’entends souvent que les principales préoccupations des associations de pêcheurs sont de veiller à la durabilité à long terme de l’industrie du homard et de toutes les autres industries, ainsi que d’assurer la transparence.
    Diriez-vous qu’il s’agit là des deux principales préoccupations des associations de pêcheurs? S’il y en a une troisième, pourriez-vous préciser un peu ce qui m’a échappé?
    Je serais très heureux de demander à notre personnel de vous faire suivre cette correspondance de nouveau.
    Pour ce qui est de la transparence et de la ressource, elles sont de la plus haute importance pour toute association de pêcheurs, et j’aimerais préciser que le chef Terry Paul s’est manifesté. Il a été très pris par les élections et ce genre de choses. Il va s’organiser pour s’asseoir avec les associations, ici, au Cap-Breton. J’ai extrêmement hâte d’entamer ces négociations, ou plutôt, ces discussions.
    En ce qui a trait à un troisième élément, je n’en vois pas pour l’instant, mais la transparence et la protection de la ressource sont d’une importance capitale.
    S’il y avait une proposition où toutes les pêches micmaques, pas seulement celle de subsistance convenable, mais aussi les pêches alimentaire et cérémoniale et… Si tout cela était transparent et que les scientifiques disaient que, en raison de la petite échelle de cette pêche, soit moins de 1 %, il n’y aurait pas de dommages causés à l’industrie en général, est-ce qu’il s’agirait là de quelque chose que vous pourriez soutenir?
    À l’heure actuelle, je ne peux vraiment pas répondre à cette question sans avoir les données scientifiques sous les yeux.
    D’accord.
    Selon les deux témoins — et n’hésitez pas à répondre, messieurs —, les associations de pêcheurs ont toujours affirmé qu’elles veulent participer aux négociations. Les Micmacs nous ont dit que, parce qu’ils ont un droit constitutionnel, ils jugent que ce n’est pas approprié dans un contexte juridique.
    Si vous participiez aux négociations, je me demande sur quoi reposeraient les arguments soumis au gouvernement. À titre de représentants des associations de pêcheurs, pourriez-vous nous dire ce dont nous devons tenir compte dans l’étude de la subsistance convenable?
    Là encore, tant que les négociations ou discussions n’auront pas vraiment commencé, je ne peux pas ajouter grand-chose là-dessus, car ces discussions doivent avoir lieu. Nous devons nous retrouver ensemble, dans une même pièce, afin que ces discussions aient lieu et que nous puissions connaître les intentions de chacune des parties concernées.

  (1840)  

    D'accord.
    Nous ferions écho à cette réponse, et je pense que la nature humaine est ainsi faite. Sans information, les gens supposent toujours le pire, donc je pense que c'est là une partie du défi que nous devons tous relever maintenant.
    Diriez-vous que le fait que les plans de gestion de la nation Sipekne'katik et de la nation Potlotek n'ont pas été envoyés aux associations de pêcheurs est l'un des plus grands obstacles à l'obtention de l'appui des associations de pêcheurs relativement aux mandats des Micmacs?
    Nous pensons certainement que ce serait un pas dans la bonne direction. Nous n'avons aucune idée de ce que contiennent ces plans. Comme je l'ai mentionné plus tôt, lorsqu'on vous dit constamment « nous ne pouvons pas communiquer ceci » et « nous ne pouvons pas mentionner cela »... Nous comprenons leur approche dans une certaine mesure, mais elle cause assurément une certaine angoisse.
    Et vous, monsieur Barron? Diriez-vous que, si vous aviez ces plans sous les yeux et qu'ils respectaient les principes de transparence et de durabilité, il serait possible d'obtenir cet appui?
    Là encore, il est difficile de dire que vous pourriez appuyer ces plans, sans avoir vu le document. Il faudrait que le document soit présenté à toutes les associations pour qu'elles puissent l'examiner.
    J'ai une dernière question à vous poser. Pensez-vous que le fait que les associations de pêcheurs témoignent devant les comités est un bon point de départ pour entendre les pêcheurs eux-mêmes?
    Absolument. Il est toujours bon de dialoguer, c'est certain.
    Et vous, monsieur Barron?
    Je suppose que la dernière chose que je pourrais dire, c'est que nous parlons des moyens de subsistance de chacun et que ce sont des enjeux assez importants.
    Tout à fait.
    Feriez-vous écho à ces observations, monsieur Barron?
    Oui.
    Je n'ai pas d'autres questions à poser. Merci.
    Merci.
    Merci, monsieur Battiste. Vous vous êtes arrêté exactement après cinq minutes. Bon sang, c'était plutôt bien. Vous êtes le premier à l'avoir fait ce soir.
    Nous allons maintenant céder la parole à Mme Gill, qui dispose d'un maximum de deux minutes et demie.

[Français]

     Je vous remercie, monsieur le président.
    Certains intervenants ont dit que l'un des rôles du Comité pourrait en être un d'éducation pour déconstruire certaines perceptions et arriver à une meilleure collaboration.
    Que pensez-vous de cette assertion et quelles étaient vos attentes, en général, concernant votre comparution devant ce comité.

[Traduction]

    Pourriez-vous demander à la députée de répéter sa question? J'ai manqué la première partie de ses propos.

[Français]

     Je le ferai avec plaisir. J'espère que cela ne diminuera pas pour autant le temps pour la réponse.
    Certains intervenants ont mentionné que ce comité doit jouer un rôle d'éducation pour assurer une meilleure collaboration entre les différentes parties prenantes. Qu'en pensez-vous? En outre, avez-vous d'autres attentes pour ce qui est des travaux de ce comité et à la suite de votre témoignage?

[Traduction]

    Eh bien, je suppose que nous nous attendons à ce que quelque chose ressorte de notre témoignage — que le comité des pêches, un comité crucial, assure un suivi, et que les mesures qu'il a mentionnées ou qu'il s'est engagé à prendre fassent l'objet d'un suivi.
    C'est de là que vient une grande partie de la frustration éprouvée par les groupes au cours de l'année dernière. Il semble que nous ayons fait du surplace, et cela a entraîné des problèmes importants au sein de l'industrie.

[Français]

    Monsieur Barron, qu'en pensez-vous?

[Traduction]

    Je pense que le rôle du Comité devrait consister à renforcer le dialogue avec les Premières Nations par l'intermédiaire du ministère, car il faut entamer ce dialogue. J'espère que cette séance nous permettra d'entamer des discussions.

[Français]

    Je vous remercie.

  (1845)  

[Traduction]

    Merci, monsieur Barron. Merci, madame Gill.
    Nous allons maintenant céder la parole à M. Johns pendant une période maximale de deux minutes et demie.
    En ce qui concerne vos deux organisations, avez-vous des objectifs en matière de réconciliation? Avez-vous des projets en matière d'engagement communautaire, ou des plans d'apprentissage et d'écoute par rapport aux communautés autochtones sur les terres desquelles vous vous trouvez? En comparaison, les syndicats ont souvent des objectifs bien définis pour sensibiliser leurs membres au soutien à apporter aux travailleurs autochtones.
    Pouvez-vous parler des mesures que vous prenez, dans le contexte de votre organisation?
    Comme je l'ai mentionné il y a quelques instants, nous souhaitons discuter avec le chef Terry, et nous sommes impatients d'entendre son point de vue. Une fois que nous aurons compris leurs points de vue, nous pourrons alors gérer la situation et la communiquer à nos membres.
    Messieurs MacPherson et Jenkins, voulez-vous, vous aussi, formuler des observations à ce sujet?
    J'ai une courte observation à formuler, monsieur Johns. C'est à propos de votre dernière série de questions, au cours de laquelle nous avons manqué de temps. Nous avons... Les membres doivent être en règle avec l'association, et le conseil d'administration s'occupe des situations comme celles auxquelles vous avez fait allusion plus tôt.
    Je comprends cela.
    Cela dit, nous nous sommes portés à leur rencontre, et nous voulons poursuivre ce dialogue. Le chef Bernard a notamment déclaré qu'un véritable processus d'éducation doit avoir lieu pour que tout le monde comprenne les traités et leur fonctionnement, ainsi que les droits et tous ces aspects.
    Je peux vous affirmer que tous nos conseillers en matière de homard étaient représentés. Notre exécutif était là. Cette rencontre a été fructueuse, et nous attendons avec impatience la prochaine réunion. C'est ainsi que le processus s'est amorcé.
    Pour revenir à une question précédente qui portait sur le racisme systémique au sein du MPO, nous avons vu un parc à homards brûler. Nous avons observé des actes d'intimidation, des agressions, des casiers à homard coupés, des homards détruits. Nous avons remarqué la lenteur avec laquelle la GRC est intervenue pour créer la paix et la sécurité.
    Ne voyez-vous pas un racisme systémique dans la manière dont la protection des pêcheurs micmacs et de leur communauté a été abordée?
    Je vous remercie de votre question.
    C'est une question à laquelle il est difficile de répondre. Nous ne sommes toujours pas complètement sûrs de ce qui a conduit aux événements qui se sont déroulés là-bas. Nous n'avons pas approuvé qu'une usine de transformation du homard soit brûlée ou qu'un camion ou une camionnette soit brûlé, ou quoi que ce soit d'autre.
    Là encore, je dirai respectueusement au nom de la GRC que cela relève de leur compétence, et non de la nôtre. Si des accusations devaient être portées, alors cela aurait dû se produire, et c'est à eux de les porter. Tout ce que nous pouvons faire, c'est parler au nom de nos membres...
    Monsieur Barron, avez-vous quelque chose à dire à ce sujet?
    Je ne vois pas chez nos membres le racisme dont vous parlez.
    Je vous demande simplement si vous pensez avoir observé un racisme systémique au cours de l'intervention de la GRC.
    En ce qui concerne la lenteur de l'intervention de la GRC, je dirais qu'elle était attribuable au fait que le MPO ne voulait pas se rendre dans les soi-disant usines qui étaient mêlées à l'achat de certains des homards pêchés à des fins de subsistance convenable. C'est ce qui a causé la lenteur de l'intervention de la GRC.
    La réaction tardive du MPO a entraîné avec le temps une certaine frustration. Pour ce qui est de dire carrément que j'observe du racisme systémique, non, je ne peux pas dire que j'en vois. C'est une question à laquelle il est très difficile de répondre sans être mêlé directement aux événements qui se déroulent là-bas.
    Merci, monsieur Johns.
    Cela conclut les témoignages de nos témoins de ce soir. Je tiens à remercier MM. Barron, MacPherson et Jenkins d'avoir participé à la deuxième heure de la séance du Comité de ce soir.
    Avant de mettre fin à la séance, je tiens à rappeler aux membres du Comité que la date limite pour présenter les noms des derniers témoins que nous entendrons dans le cadre de l'étude actuelle est demain à 17 heures, heure de l'Est. Veuillez envoyer ces noms à la greffière par courrier électronique avant la date limite.
    Je tiens à remercier Mme Vohl et le personnel du bureau de la greffière d'être restés tard ce soir pour que nous puissions entendre ces témoignages. Je remercie également notre propre personnel et celui des différents députés. Je suis sûr que certains d'entre eux travaillent également tard en raison de la prolongation de la séance. Nous devons nous efforcer d'entendre le plus grand nombre de témoignages possible afin d'être en mesure de produire un rapport tout à fait digne de mention et d'intérêt à la fin de l'étude.
    Merci à tous. Je suppose que nous nous reverrons jeudi.
    La séance est levée.
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