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NDDN Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la défense nationale


NUMÉRO 023 
l
2e SESSION 
l
43e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 6 avril 2021

[Enregistrement électronique]

  (1105)  

[Français]

[Traduction]

     La séance est ouverte.
    Bienvenue à la 23e séance du Comité permanent de la défense nationale de la Chambre des communes.
     La situation est très inhabituelle, si je puis dire. En tout cas, elle ne se présente pas très souvent. C'est pourquoi, tard hier soir, nous vous avons fait parvenir un courriel décrivant ce qui a été remis au greffier hier, de sorte que tout le monde soit au courant. Nous avons aussi promis que nous commencerions la séance par un dialogue ouvert sur ce que le Comité souhaite faire. Je sollicite les lumières du Comité, car il s'agit d'une situation exceptionnelle.
    J'invite les membres du Comité à s'exprimer. Vous avez tous lu le courriel et vous êtes au courant de ce qui a été proposé. Je donnerai la parole à quiconque souhaite faire des observations et proposer des solutions ou des idées. Je m'en remets à vous. Quelqu'un veut commencer? Veuillez lever la main. Nous allons donner la parole à celui qui se manifestera en premier.
    Monsieur Bezan, allez-y.
    Je présume que vous allez inviter le ministre Sajjan à témoigner à la place de Zita Astravas, ce qui, à mon avis, ne tient absolument pas compte de l'ordre de la Chambre. Le Parlement a exigé que Zita Astravas comparaisse. À mon avis, son absence est un outrage au Parlement et ce que fait le gouvernement tient de l'opération de camouflage.
     Je propose, madame la présidente, que nous entendions le ministre, qu'il reste pendant toute la période qui avait été prévue pour Zita Astravas et que nous posions au ministre les questions que nous avions préparées pour elle.
    Merci beaucoup, monsieur Bezan.
    Madame Vandenbeld.
    Je suis également d'accord, il va sans dire, pour que nous entendions le ministre et ceux qui l'accompagnent.
     Comme il en a été longuement question à la Chambre et dans la lettre d'explication que le ministre a fait parvenir au Comité, les membres du personnel politique ne sont pas des décideurs. Ils doivent rendre des comptes au représentant politique, dans ce cas-ci, le ministre. Comme le ministre est parmi nous et qu'il lui incombe de rendre des comptes au Parlement et au Comité, je suis persuadée que les membres du Comité pourront lui adresser toutes les questions qu'ils auraient posées à Mme Astravas.
     Je propose donc que nous entendions le ministre et ceux qui l'accompagnent.
    D'accord. Merci beaucoup.

[Français]

    Monsieur Barsalou-Duval, vous avez la parole.
    Je vous remercie, madame la présidente.
    Je crois cependant que M. Garrison avait levé la main avant moi. Cela ne me dérangerait pas d'intervenir maintenant, si tel était le souhait de M. Garrison. Cela dit, je voudrais quand même respecter l'ordre des mains levées.

[Traduction]

    Monsieur Garrison, voulez-vous commencer?
    Merci, madame la présidente.
    J'ai un peu de mal ce matin, car l'image bloque à mon écran. Vous m'en excuserez.
     Je suis heureux que le ministre comparaisse pour parler de la responsabilité ministérielle, car c'est ce dont il s'agit ici. Je ne me réjouis pas que le gouvernement ait choisi de ne pas tenir compte d'un ordre de la Chambre, mais cela nous donne l'occasion de discuter de la notion de responsabilité ministérielle avec le ministre. Je serai très heureux de le faire.
    Je signale que, si nous avons convoqué des membres du personnel du ministère et du Bureau du Conseil privé, c'est que le ministre les a pointés du doigt dans son témoignage en disant que le problème n'avait rien à voir avec lui et que nous devions nous adresser à ces gens-là. En fait, c'est le ministre qui a proposé à l'origine que nous discutions avec les membres du personnel qui, selon le point de vue qu'il défend maintenant, ne devraient pas être convoqués devant le Comité.
    J'ai hâte de lui parler de la notion de responsabilité ministérielle pour savoir qui est responsable du fait que le ministre et le premier ministre n'ont pas pris les mesures nécessaires pour destituer un chef d'état-major de la défense lorsqu'une plainte fondée d'inconduite sexuelle a été déposée contre lui.
     Merci, monsieur Garrison.

[Français]

     Monsieur Barsalou-Duval, vous avez la parole.
    Je vous remercie, madame la présidente.
    Mes propos rejoignent ceux de mes collègues conservateurs et néo-démocrates.
    Je dois dire que je suis déçu. Je ne sais pas si je suis surpris ou non, mais je suis certainement déçu. C'est rare que nous nous plaignions de recevoir le ministre au Comité, et je ne m'en plains pas. Ce serait même intéressant qu'il soit là plus souvent, comme c'est le cas dans la plupart des comités.
    Cependant, ce qui m'inquiète, c'est de voir qu'on ne respecte pas la volonté du Comité et qu'on écarte des témoins que l'on avait prévu d'entendre. Je me demande même si ce n'est pas une façon d'empêcher ces personnes de parler. Pourquoi ne voudrait-on pas laisser ces personnes parler? On me dit que ce ne sont pas elles qui prennent les décisions et que ce ne sont pas elles qui ont la responsabilité finale. Toutefois, elles savent quand même des choses, elles savent ce qui se passe et les décisions qui sont prises.
    Dans la situation actuelle, où l'on voit que les actions du ministre ne sont pas celles qu'elles auraient dû être, il me semble qu'il serait pertinent d'avoir des commentaires et de l'information de la part du personnel.

  (1110)  

    D'accord. Je vous remercie beaucoup.

[Traduction]

    Quelqu'un d'autre?
    Monsieur Bezan, à vous.
    Je dirais simplement, madame la présidente, que cela ne dispense pas Zita Astravas de comparaître devant le Comité. L'ordre de la Chambre tient toujours, et je m'attends à ce qu'il soit respecté.
    Cela dit, parlons de la responsabilité ministérielle avec le ministre lui-même.
    Il semble que ce soit la volonté du Comité d'inviter les témoins dont la liste figure dans le courriel qui vous a été envoyé hier soir.
    Je vais suspendre la séance pendant environ cinq minutes pour qu'on puisse vérifier le son, puis nous reprendrons.
    La séance est suspendue.

  (1110)  


  (1120)  

     Nous reprenons les travaux.
    Pour commencer, j'invite le ministre Sajjan à faire sa déclaration liminaire et à présenter son équipe aux membres du Comité.
    Vous avez la parole, monsieur le ministre.
    Madame la présidente, merci encore de me donner l'occasion de m'adresser une fois de plus au Comité.
    Je suis accompagné de mon sous-ministre, du chef d'état-major de la défense par intérim et du juge-avocat général pour répondre aux questions.
    Je tiens d'abord à apporter une précision, madame la présidente. Je comparais parce que, de ce côté-ci de la Chambre, nous avons un profond respect pour les traditions du Parlement. L'une d'elles est le principe de la responsabilité ministérielle.
    Le gouvernement croit que les ministres doivent rendre compte des décisions gouvernementales et des actes de leur personnel politique à la Chambre des communes. Nous avons collaboré avec les députés et nous avons rendu des comptes. C'est notre responsabilité, et nous l'avons assumée avec empressement.
     Je comparais aujourd'hui parce que, en tant que membre du Cabinet, je parle au nom du gouvernement et de ceux qui y travaillent. Soyons clairs: les membres du personnel politique non élus doivent rendre des comptes aux membres du Cabinet, et le Cabinet doit rendre des comptes au Parlement.
    Les conservateurs ont cru en ce principe fondamental il y a plus d'une décennie, lorsqu'ils étaient au pouvoir sous la direction du premier ministre Harper. C'est même un ministre conservateur des Affaires étrangères, John Baird, qui a expliqué au Comité pourquoi le gouvernement Harper refusait de laisser son personnel témoigner.
    M. Baird a dit:
Si vous avez un problème avec mon personnel ou mon bureau, adressez-vous à moi. Vous ne pouvez pas traîner des gens devant ce comité pour les interroger de façon hostile et partisane — d'autant plus quand ces gens sont incapables de se défendre. Si vous avez un problème avec le gouvernement, notre système veut que vous vous adressiez aux ministres.
    Les ministres sont responsables.
    Ou peut-être l'opposition voudrait-elle entendre l'ancien premier ministre Harper lui-même:
Monsieur le Président, nos précédents et nos pratiques sont très clairs. Ce sont les ministres qui doivent rendre des comptes à la Chambre et aux comités, non leur personnel politique. Les membres du personnel politique doivent rendre des comptes aux ministres et aux députés pour lesquels ils travaillent.
    Le premier ministre Harper et son gouvernement ont ordonné à leur personnel de s'abstenir de comparaître. Les ministres ont comparu à leur place. Malheureusement, les conservateurs d'Erin O'Toole — qui participe lui-même à cette étude, ne l'oublions pas — ont changé d'avis sur l'importance de ce principe fondamental de la responsabilité ministérielle. Ce qui était si important à leurs yeux lorsqu'ils étaient au pouvoir, ils l'ont jeté par-dessus bord maintenant qu'ils sont dans l'opposition. C'est regrettable et dangereux, car il faut que les Canadiens puissent être convaincus que les traditions mêmes de leur Parlement ne seront pas sacrifiées par simple opportunisme politique par ceux qui cherchent à obtenir le pouvoir.
    Madame la présidente, l'argument présenté par MM. Baird et Harper était juste. C'était la bonne chose à faire à l'époque, et il en va de même maintenant.
    Passons maintenant à la question très importante qui est à l'étude.
    Commençons par énoncer ma position de la façon la plus claire possible. Je n'accepte aucune forme d'inconduite sexuelle dans les Forces armées canadiennes ni au ministère de la Défense nationale, quel que soit le grade ou le poste des personnes en cause. Je m'engage à faire en sorte que les victimes aient accès à une gamme de mesures de soutien et soient traitées avec équité et compassion. Je crois fermement à l'indépendance des enquêtes. Ce sont les principes qui me guident dans ce dossier depuis que je suis ministre de la Défense nationale.
    Nous devons prendre soin de nos gens et leur offrir un milieu de travail exempt de harcèlement et de discrimination. C'est inscrit dans notre politique de défense. C'est écrit dans ma lettre de mandat. C'est aussi conforme à mes convictions personnelles.
    L'inconduite sexuelle est préjudiciable au plus haut point. Le gouvernement a travaillé fort pour donner suite au rapport de la juge à la retraite Deschamps. Nous avons mis en place des mesures axées sur la compréhension du problème, la prévention des préjudices, l'intervention en cas d'incidents et le soutien aux personnes touchées.
    Nous avons créé le Centre d'intervention sur l'inconduite sexuelle, qui est complètement indépendant de la chaîne de commandement militaire. Nous avons lancé une nouvelle formation obligatoire. Nous nous sommes associés à Statistique Canada pour mener des enquêtes afin de mieux saisir l'ampleur du problème. Nous avons examiné 179 dossiers anciens qui avaient été classés comme sans fondement. Nous avons créé de nouvelles équipes spécialisées dans la police militaire et au service des poursuites pour lutter contre l'inconduite sexuelle. Nous avons sollicité l'avis d'experts de l'extérieur et nous avons mis en œuvre de nouveaux programmes et de nouvelles politiques. L'an dernier, nous avons publié une stratégie visant à transformer la culture. Tout ce travail était essentiel et fondamental.

  (1125)  

     Il est clair que l'opération Honour, telle que nous la connaissons, a suivi son cours. Il est devenu évident qu'elle a ses limites. Il est extrêmement clair que nous avons encore beaucoup de travail à faire. Nous tirerons des enseignements des efforts qui ont été fructueux et de ceux qui ne l'ont pas été, et nous élaborerons un plan délibéré pour aller de l'avant.
     Nous devons faire en sorte qu'il soit facile et commode pour quiconque, à quelque niveau que ce soit, de signaler un incident, et les mécanismes de signalement doivent inspirer confiance. C'est pourquoi nous élaborerons une structure de signalement indépendante pour examiner toutes les allégations. Comme le premier ministre et moi-même l'avons dit, toutes les possibilités sont envisagées. Nous continuerons d'être guidés par l'équité et le respect de la primauté du droit. [Difficultés techniques] soient maintenus, car personne ne devrait avoir une influence indue sur une enquête. Cela compromet la capacité d'obtenir un résultat juste.
    Madame la présidente, on ne peut pas le nier. L'inconduite sexuelle est un problème grave et systémique dans les Forces armées canadiennes. Nous devons prendre des mesures audacieuses pour instaurer une culture où jamais on ne minimise l'importance de l'inconduite sexuelle, ne ferme les yeux ou ne trouve des excuses. Pendant beaucoup trop longtemps, les membres des Forces armées canadiennes ont subi l'influence négative d'une culture qui est influencée par des conceptions dépassées du guerrier, une culture façonnée par l'hypermasculinité, une culture qui valorise l'affirmation de soi, l'agressivité et la compétitivité; une culture qui perpétue les rôles stéréotypés de genre et exclut ceux qui ne correspondent pas au modèle. Cet idéal imprègne les cultures militaires du monde entier. C'est évident dans ce qu'on raconte des bizutages et initiations, dans les incidents constants d'inconduite sexuelle. Ce n'était pas acceptable pas le passé, et ce ne l'est pas plus aujourd'hui.
    Nous savons que nous devons changer notre culture afin de prévenir l'inconduite sexuelle. Notre valeur fondamentale qui prône le respect et la dignité pour tous doit régir tous les comportements et toutes les attitudes. Le changement ne se fera pas tout seul. Il faut adopter une approche tenace, méthodique et holistique. Tous les membres de l'organisation doivent s'y investir.
     Ces deux derniers mois, les membres des Forces armées canadiennes et les civils de toute l'équipe de la Défense ont eu des discussions importantes sur les problèmes qui persistent dans nos organisations. Elles ont été motivées et éclairées par ceux qui ont fait part de leurs expériences, mais la responsabilité de s'attaquer à l'inconduite sexuelle ne repose pas sur les épaules des victimes. Elle repose sur nous tous.
    Il revient aux dirigeants de toute l'équipe de la Défense d'établir une culture où chacun est traité avec dignité et respect. Il appartient aux commandants de protéger leur personnel contre les représailles. Il incombe à tous les membres de notre organisation d'intervenir quand ils sont témoins d'incidents et de se soutenir les uns les autres. Nous devons continuer à bâtir la confiance les uns envers les autres et envers nos organisations, une confiance qui doit être méritée et non tenue pour acquise.
    C'en est assez de la politique. Nous devons nous concentrer sur les survivants et les victimes qui se manifestent. Nous devons maintenant agir et changer la culture des Forces armées canadiennes.
    Madame la présidente, merci de m'avoir donné l'occasion de m'adresser à vous encore une fois.

  (1130)  

    Merci beaucoup, monsieur le ministre.
    Nous allons maintenant passer aux questions.
    Pour commencer, M. Bezan. Je vous en prie.
    Merci, madame la présidente.
    Monsieur le ministre, je tiens à préciser qu'il ne s'agit pas de politique. Il s'agit de s'assurer d'aller au fond des choses pour savoir pourquoi votre prétendue tolérance zéro pour l'inconduite sexuelle ne s'est pas appliquée au général Vance et pourquoi vous l'avez laissé s'en tirer il y a trois ans.
    Madame la présidente, nous sommes censés entendre aujourd'hui le témoignage de Zita Astravas. J'espère que le ministre lui a parlé et qu'il a les questions que nous avions préparées pour elle, afin que nous puissions obtenir plus d'information sur ce qu'il nous a invité à chercher.
    Monsieur le ministre, à quelle date Zita Astravas a-t-elle pris connaissance des allégations visant le général Vance?
    Madame la présidente, le jour même où l'ancien ombudsman m'a informé, j'ai immédiatement parlé avec ma cheffe de cabinet au bureau.
    Merci.
    Ce devait donc être le 1er mars 2018.
    Le même jour.
    Qui, au Cabinet du premier ministre, a communiqué avec Zita Astravas au sujet des allégations dont le général Vance faisait l'objet?
    Comme je l'ai déjà dit, ma cheffe de cabinet a immédiatement informé le Bureau du Conseil privé et le Cabinet du premier ministre.
     Qui, au Cabinet du premier ministre, a-t-elle contacté au sujet de ces allégations?
    Je crois que c'était M. Marques.
     Elder Marques? Savez-vous, monsieur le ministre, si elle a communiqué avec quelqu'un d'autre?
    À quelle date Zita Astravas a-t-elle parlé à Elder Marques?
    Je crois qu'elle l'a fait immédiatement dès que je l'ai mise au courant. Elle a aussitôt informé le Bureau du Conseil privé.
    Combien de fois Zita Astravas a-t-elle communiqué avec le Cabinet du premier ministre au sujet de ces allégations contre le général Vance? À quelle date ont eu lieu ces autres communications. A-t-elle communiqué en personne, par téléphone ou par courriel?
    Nous ne savons pas au juste combien de fois elle a communiqué. Je sais que j'ai eu un certain nombre de discussions avec ma cheffe de cabinet pour savoir où en étaient les allégations et si l'ancien ombudsman avait fourni les renseignements nécessaires.
     Le plus important, c'est de veiller à ce que l'enquête soit vraiment indépendante. Notre but était d'informer le Bureau du Conseil privé afin qu'une enquête indépendante puisse avoir lieu, et c'est exactement ce qui s'est produit. Elle a informé...
    Monsieur le ministre...
    Excusez-moi, madame la présidente, si vous voulez bien me laisser terminer.
    Elle a informé le Cabinet du premier ministre des mesures qu'elle avait prises, mais l'important ici est de s'assurer que l'enquête était indépendante. C'est exactement ce qu'elle a fait lorsqu'elle a communiqué avec le Bureau du Conseil privé.
    Qu'est-ce que Zita Astravas a dit exactement au sujet des allégations portant sur le général Vance?

  (1135)  

    Exactement ce qui était connu: l'ancien ombudsman a été rencontré, et nous avons communiqué avec le Bureau du Conseil privé pour qu'une enquête indépendante puisse avoir lieu.
    Monsieur le ministre, quelle réponse Zita Astravas a-t-elle reçue du Cabinet du premier ministre après que le Cabinet eut été mis au courant des allégations? Quelles indications lui a-t-il données?
    Compte tenu de la gravité des allégations elles-mêmes, notre responsabilité était de veiller à ce que le Bureau du Conseil privé soit informé. La première étape était de voir qui pourrait donner de l'information — c'est ce que nous avons alors pensé — afin que des mesures puissent être prises. C'est exactement ce qui s'est produit. Elle a ensuite informé le Cabinet du premier ministre de ce qu'elle avait fait.
    Nous ne voulions pas non plus nous ingérer davantage dans l'enquête. Dans ce cas, nous avons pu...
    Quelle enquête? Aucune enquête n'avait été entreprise à ce moment-là.
    L'hon. Harjit S. Sajjan: Nous...
    M. James Bezan: Personne n'avait d'information. Le Bureau du Conseil privé, avec Janine Sherman, a dit qu'il n'y avait pas eu d'enquête. Il n'avait toujours pas de preuve. L'ombudsman ne pouvait pas faire enquête. Des experts militaires et des experts en justice ont dit qu'il n'y avait pas eu d'ingérence politique parce qu'aucune enquête n'avait été entreprise et que vous n'aviez donné aucune directive.
    Monsieur le ministre, avez-vous toujours dit la vérité lorsque vous avez témoigné devant le Comité, oui ou non?
    Absolument, madame la présidente.
    Monsieur le ministre, vous avez dit au Comité: « Tout d'abord, comme il l'a lui-même déclaré, le premier ministre a été informé que j'avais soulevé ces préoccupations auprès du Bureau du Conseil privé. » C'était le 12 mars. Avez-vous dit cela au Comité, oui ou non?
    Pourriez-vous répéter, s'il vous plaît?
    Vous avez dit ceci: « Tout d'abord, comme il l'a lui-même déclaré, le premier ministre a été informé que j'avais soulevé ces préoccupations auprès du Bureau du Conseil privé. »
    Non, je voulais dire le Cabinet du premier ministre, madame la présidente.
    Vous vous êtes mal exprimé?
    Pensiez-vous que le premier ministre savait que vous aviez soulevé ces préoccupations auprès du Bureau du Conseil privé...
    ... et de son personnel?
    Non. Comme je l'ai dit, ma cheffe de cabinet en a informé le Cabinet du premier ministre.
    Qui vous a informé que le premier ministre était au courant que vous aviez soulevé ces préoccupations auprès de...
    Je n'en ai pas parlé au premier ministre.
    Mais le premier ministre a déclaré à la Chambre qu'il était au courant de ces allégations en 2018. Qui, au Bureau du Conseil privé, les aurait transmises au premier ministre ou à ses collaborateurs?
    Nous avons signalé le problème au Bureau du Conseil privé et au Cabinet du premier ministre, mais j'ignore qui l'aurait abordé avec d'autres. Nous nous sommes concentrés sur l'information qui nous a été fournie. Nous voulions nous assurer qu'elle donne lieu à un examen indépendant et nous avons agi en conséquence. Puisque, dans ce cas-ci, il s'agit d'une personne nommée par le gouverneur en conseil, nous voulions garantir une indépendance complète et surtout éviter toute forme d'ingérence politique.
    D'accord. Merci beaucoup.
    Monsieur le ministre...
    Nous allons passer à M. Bagnell, si vous le voulez bien.
     Merci, madame la présidente.
    Merci d'être parmi nous, monsieur le ministre, et merci à tous les autres témoins également.
    L'un des membres des forces a dit qu'il y a des allégations sérieuses et vérifiées à l'encontre d'un haut gradé, mais il ne convient pas de présumer des conclusions. Des enquêtes sont en cours, et ce sont elles qui permettront de voir quelles allégations sont confirmées.
    Monsieur le ministre, je suis ravi que vous ayez passé la majeure partie de votre temps à parler des changements à apporter, et mes questions, après ce tour-ci, porteront entièrement sur cet aspect. Les centaines de personnes touchées, surtout des femmes, qui veulent être protégées, voudraient vraiment que les membres du Comité travaillent là-dessus. C'est le résultat le plus important auquel le Comité peut parvenir. C'est une responsabilité qui nous incombe à tous. Nous devons vraiment améliorer le système, et j'espère que nous en discuterons. Nous allons certainement poser beaucoup de questions à ce sujet. Nous devons aller de l'avant. Vous avez préconisé cette attitude, et nous sommes ravis que vous ayez parlé de la souplesse nécessaire pour aller de l'avant et apporter ces changements afin de protéger les hommes et les femmes des forces armées.
    Je veux simplement m'assurer que, pour ce tour... Y a-t-il autre chose que vous vouliez dire au sujet des raisons qui vous poussent à comparaître aujourd'hui à la place de votre ancienne cheffe de cabinet, Zita Astravas?
    Madame la présidente, comme vous l'avez dit, il est important que les ministres interviennent à la place de leur personnel. Ils doivent rendre compte au Parlement de ce qui se passe dans leur ministère. C'est exactement ce que nous faisons.
    Dans ce cas-ci, madame la présidente, toute l'équipe de la Défense et moi cherchons avant tout à comprendre la situation et à trouver les moyens d'apporter le changement de culture que tous les membres du Comité et nous souhaitons. J'attends avec impatience les recommandations du Comité et de tous les députés, parce qu'en fin de compte, c'est ce que... Lorsque nous avons formé le gouvernement, nous voulions créer un environnement accueillant pour tous les Canadiens, non seulement dans les Forces canadiennes, mais partout au Canada. C'est un objectif que nous avons pris très au sérieux.
    Nous avons pris le rapport de Mme Deschamps très au sérieux avant même de former le gouvernement. Nous déployons beaucoup d'efforts pour apporter les changements voulus. Nous savons qu'il reste encore beaucoup de travail à faire, mais nous voulons continuer à l'accomplir. Plus important encore, nous devons pouvoir entendre le point de vue des experts. Nous devons entendre les survivants. Nous devons entendre les femmes des Forces armées canadiennes, qu'elles soient en service ou à la retraite. C'est ce qui nous permettra d'apporter ce changement de culture. Nous voulons agir le plus énergiquement possible, mais notre objectif ultime sera toujours la tolérance zéro.

  (1140)  

    Merci, monsieur le ministre.
    Je sais que vous comparaissez aujourd'hui à la place de votre ancienne cheffe de cabinet, Zita Astravas. Pensez-vous qu'elle aurait quelque chose à ajouter, outre ce qui a déjà été dit au Comité?
    Madame la présidente, j'ai comparu à plusieurs reprises devant le Comité, ainsi que devant d'autres comités. J'ai répondu à toutes les questions. Plus important encore, non seulement je parle au nom de mon ancienne cheffe de cabinet, mais j'affirme aussi qu'elle n'aurait rien à ajouter.
     Merci, monsieur le ministre.
    Certains hauts gradés font l'objet d'enquêtes. Elles suivront leur cours. Bien sûr, il n'y aura pas d'ingérence politique et les enquêtes se feront. L'essentiel, c'est d'aider les membres des forces et de changer les systèmes à cause des nombreuses autres plaintes qui existent.
    Nous avons entendu votre témoignage, celui de l'ancien ombudsman, du chef de cabinet de l'ancien premier ministre Stephen Harper, du BCP et de nombreux témoins. Pensez-vous que le Comité pourrait apporter une contribution en continuant à poser ce genre de questions et en mettant l'accent sur les incidents sur lesquels les autorités compétentes mènent des enquêtes?
    Madame la présidente, j'ai répondu à toutes les questions. À toutes les questions de cette nature, peu importe le nombre de fois qu'on me les pose, je ne peux répondre qu'en fonction de l'information et des faits.
    Ce sur quoi je voudrais vraiment mettre l'accent, c'est la condition des femmes et le changement de culture sur lequel nous sommes tous d'accord. Nous voulons obtenir les conseils d'experts, élaborer un bon plan et, plus important encore, faire en sorte que nos idées soient les bonnes et permettent de faire évoluer la culture. C'est exactement ce sur quoi nous sommes tous d'accord, mais surtout, c'est ce à quoi ont droit tous les membres des Forces canadiennes.
     Merci.
    Nous avons entendu d'excellents témoignages d'experts et de victimes. Ce sera certainement une partie importante de notre rapport, mais nous pouvons certainement en entendre davantage. J'ai hâte. Je suis ravi que vous soyez ouvert à ces changements. Évidemment, lorsqu'il y a des centaines de personnes, voire plus d'un millier, qui ont été victimes par le passé, nous devons vraiment apporter des changements majeurs. Je suis heureux que vous soyez ouvert à cette idée.
    Il n'est jamais facile d'apporter des changements. Il ne sera donc pas facile non plus d'apporter ces changements difficiles, à mon avis, mais je suis certainement déterminé à... Je sais que tous les autres membres du Comité — vous avez entendu leurs propos — veulent vraiment apporter ces changements également. Ils veulent vraiment aider particulièrement les femmes, mais pas seulement elles, qui ont été victimes de ce genre d'activité.
    Merci beaucoup.

[Français]

     Monsieur Barsalou-Duval, vous avez la parole.
    Je vous remercie, madame la présidente.
    Monsieur le ministre, aujourd'hui, nous avons eu une surprise en vous accueillant ici. Habituellement, quand nous recevons un ministre, c'est une belle surprise. Cette fois-ci, je ne suis pas certain que ce soit le cas. Votre présence s'explique par le fait que vous avez décidé de contrevenir à la volonté du Comité de convoquer du personnel de votre bureau qui pourrait dire des choses intéressant le Comité.
    Ce que vous faites présentement, est-ce de l'obstruction?

  (1145)  

[Traduction]

    En tant que ministre de la Défense nationale, je parle au nom de mes collaborateurs. Je suis ici pour répondre à vos questions.

[Français]

    Vous semblez dire qu'en procédant de cette façon, vous protégez ces personnes. Ne pensez-vous pas que, au contraire, plutôt que de protéger ces personnes, vous vous protégez vous-même?

[Traduction]

    J'ai toujours saisi l'occasion de comparaître devant le Comité à la première occasion pour répondre à ses questions. J'ai toujours été extrêmement ouvert. En fait, avec un certain nombre de députés de l'opposition, je suis même prêt à répondre à leurs questions de nature personnelle. J'ai été extrêmement ouvert dès le premier jour, lorsque je suis devenu ministre. J'ai même écrit une lettre à tous les députés pour leur dire que s'ils avaient des idées sur ce que nous pourrions faire pour améliorer le secteur de la défense, je serais tout à fait disposé à les entendre. Éliminons la politique de la défense.
    Dans ce cas-ci, je témoigne au nom de mon personnel, qui ne devrait pas avoir à comparaître. Il n'a pas de comptes à rendre au Parlement pour le ministère; ce sont les ministres qui ont des comptes à rendre. Je suis ici pour répondre à vos questions.

[Français]

    Craignez-vous les réponses que pourrait donner le personnel aux questions du Comité?

[Traduction]

    Nous sommes ici pour répondre à toutes vos questions. Je parle au nom de mon personnel et de mon ancienne cheffe de cabinet, Zita Astravas.
    Je tiens à rappeler l'importance du travail des comités. Je suis heureux d'avoir ces échanges. Vu le travail qui nous attend, personne n'aura toutes les réponses. Je me ferai un plaisir non seulement de répondre à toutes vos questions, mais aussi de prendre connaissance de vos recommandations.

[Français]

    Monsieur le ministre, vous ne répondez pas à la question que je vous ai posée. Je vous ai demandé si vous craigniez ce que les gens de votre personnel pourraient dire au Comité.
    Avez-vous des choses à cacher?

[Traduction]

[Français]

    Voilà une réponse, et j'espère que c'est la vérité.
    J'essaie de comprendre pourquoi vous empêchez le personnel de venir témoigner. Est-ce que cela va devenir une nouvelle norme?
    Souvent, lorsque nous convoquons les ministres aux comités, nous aimerions les avoir pendant deux heures, mais ils disparaissent après la première heure et ils nous laissent leur personnel. Ils laissent donc témoigner leur personnel.
     J'aimerais comprendre pourquoi, présentement, c'est l'inverse.

[Traduction]

    Le personnel politique ne représente pas le ministère. Mes collaborateurs, s'il s'agit de représenter le ministère au Comité... Vous parlez des sous-ministres et des membres des Forces armées canadiennes. Nous avons là le chef d'état-major de la défense. Ces responsables sont là. Le personnel politique au service du cabinet des ministres n'a pas à rendre compte au Parlement de ce qui se passe dans les ministères. Ce sont les ministres qui doivent le faire. Telle a été la pratique des gouvernements précédents, et c'est encore celle qui s'applique maintenant.
    En tant que ministre, je suis responsable devant le Parlement. Je suis ici pour répondre à vos questions.

[Français]

    Si je comprends bien, quand cela fait votre affaire, vous laissez témoigner les fonctionnaires, et, quand cela ne fait pas votre affaire, vous ne les laissez pas témoigner.
    Vous avez laissé entendre au Comité, le 12 mars dernier, que M. Walbourne n'avait pas fait son travail et qu'il aurait pu donner ses informations à d'autres personnes qu'à vous.
    Pourtant, quand nous avons reçu M. Lick, l'ombudsman actuel — je ne me souviens pas si c'était à ce comité-ci ou au Comité permanent de la condition féminine —, il a dit que, s'il avait eu à agir, il aurait agi exactement de la même façon que M. Walbourne.
    À votre avis, les deux ombudsmans, l'ancien et le nouveau, comprennent-ils mal la nature de leur travail, alors que vous, vous avez raison?

[Traduction]

     Madame la présidente, je reviens sur la première affirmation du député. Non, mon personnel n'est jamais venu témoigner devant le Comité. J'ai toujours parlé au nom de mon ministère. Je suis accompagné du sous-ministre, du juge-avocat général, parfois du vice-chef d'état-major de la défense et, dans ce cas-ci, du chef d'état-major de la défense par intérim.
    Pour répondre à l'autre question que le député a posée, je dirai qu'il est important, lorsque des allégations surgissent au sujet de quiconque, et a fortiori au sujet d'une personne nommée par le gouverneur en conseil, de suivre le processus approprié, sans ingérence politique, et d'assurer une indépendance absolue s'il y a lieu de lancer une enquête. C'est exactement ce qui s'est passé, et nous avons agi immédiatement, madame la présidente.
    Le lendemain, le Bureau du Conseil privé a fait un suivi auprès de M. Walbourne. Je suis heureux de le répéter encore et encore. Il est tellement important que, chaque fois que nous recevons de l'information sur quelqu'un, quel que soit son grade ou son poste, nous prenions des mesures concrètes.

  (1150)  

[Français]

    Je comprends que M. Lick, comme M. Walbourne...

[Traduction]

    Je crains que votre temps de parole ne soit écoulé, monsieur Barsalou-Duval.
    Nous allons passer à M. Garrison, s'il vous plaît.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    Je remercie le ministre de comparaître aujourd'hui pour parler de la responsabilité ministérielle. Cela touche au cœur du problème, soit le fait qu'on ne s'attaque pas à l'inconduite sexuelle dans les Forces canadiennes.
    Lorsque l'opération Honour a été annoncée, en 2015, j'ai été parmi ceux qui ont félicité les militaires canadiens d'avoir pris acte du problème et d'avoir entrepris de le résoudre, mais ce que nous avons entendu à maintes reprises, c'est que l'opération Honour a en fait échoué. Au cours de cette étude, des témoins nous ont dit à plusieurs reprises que les membres des Forces armées canadiennes estimaient qu'il y avait deux normes différentes et que les hauts gradés des Forces armées canadiennes n'étaient pas tenus de respecter les mêmes normes que les simples soldats dans le cadre de l'opération Honour. C'est là le cœur du problème. Aucune des mesures prises ne peut avoir la moindre crédibilité, s'il s'agit de garantir aux femmes qu'elles peuvent servir dans les forces sur un pied d'égalité, si on ne fait rien pour réprimer les inconduites au plus haut niveau.
     Monsieur le ministre, ma question est très directe. Le général Vance a été autorisé à rester chef d'état-major de la défense après que des allégations crédibles d'inconduite sexuelle eurent été soulevées contre lui. Qui est le ministre responsable du maintien du général à son poste de chef d'état-major de la défense dans ces circonstances?
    Madame la présidente, je le répète, chaque fois que des renseignements sont présentés, quel que soit le grade ou le poste... Dans ce cas-ci, il s'agissait de la nomination par le gouverneur en conseil de l'ancien chef d'état-major de la défense. Il fallait s'assurer que l'information présentée, que les allégations soient prises extrêmement au sérieux, et elles l'ont bel et bien été. Il est important d'appliquer à la lettre le processus prévu. Autrement, on risque de ne pas parvenir à une juste conclusion.
    J'ai pris très au sérieux ma responsabilité envers les Forces canadiennes dès mon arrivée. L'accent que nous mettons sur nos effectifs, l'accent que le gouvernement met sur tous les types d'inconduite systémique, surtout l'inconduite sexuelle... nous avons pris des mesures.
    Pour ce qui est de l'opération Honour, oui, elle a suivi son cours. Elle a commencé avant que nous ne formions le gouvernement. Nous essayons de voir ce qui a fonctionné, ce que nous devons conserver et ce que nous devons changer. Notre équipe a travaillé d'arrache-pied, même avant que les allégations concernant l'ancien chef d'état-major de la défense ne surgissent cette année. Nous voulions travailler à un changement de culture complet, ce dont nous discutions déjà. Nous avons tenu compte de toutes les formes d'inconduite. Nous avons mis sur pied un comité composé d'anciens membres actifs qui ont vécu diverses expériences, ce qui peut aller du racisme systémique jusqu'aux préjugés sexistes et à l'inconduite sexuelle, afin de pouvoir aller de l'avant.
    Madame la présidente, l'une des choses que je préconiserai toujours auprès de tous les hauts dirigeants, c'est qu'il faut regarder vers l'avenir et créer un environnement inclusif. Non, ce ne sera pas facile, mais je peux vous assurer que personne ne va chômer. Tous les membres des forces armées, y compris le chef d'état-major de la défense par intérim et le sous-ministre, et vous tous continuerez de travailler pour apporter les changements nécessaires.
    Madame la présidente, je ne vois pas en quoi cela répond à la question sur la responsabilité ministérielle. Vance est resté en poste malgré les allégations d'inconduite sexuelle qui pesaient sur lui, et rien ne s'est passé.
    Maintenant, le ministre invoque toujours les enquêtes. Or, il n'y a pas eu d'enquête en 2018. J'en reviens donc à la responsabilité ministérielle. Qui était le ministre responsable de veiller à ce qu'une enquête soit menée? Lorsque le ministre a appris que le Bureau du Conseil privé ne faisait pas enquête, lorsque le ministre de la Défense a appris que le bureau de l'ombudsman ne faisait pas enquête, n'était-il pas le ministre qui devait non pas faire enquête, mais faire mener une enquête indépendante? Pourquoi l'affaire a-t-elle été abandonnée? Le ministre est-il responsable ou non du fait qu'il n'y a pas eu d'enquête?
    Madame la présidente, quelles que soient les affirmations qui émaillent la question, dans notre société, dans notre système, nous avons une procédure établie, et il faut la suivre. Quelle que soit la position que chacun défend, on ne peut pas simplement prendre une décision et essayer d'obtenir un résultat donné; il faut suivre un processus qui s'applique de façon absolue. Comme dans toute enquête policière, si on ne se conforme pas à ce processus dans ce cas-ci, lorsque des renseignements ont été fournis au sujet d'une personne nommée par le gouverneur en conseil... Et les personnes nommées par le gouverneur en conseil relèvent de la direction du Bureau du Conseil privé. Dans ce cas-ci, c'est la raison pour laquelle l'information a été envoyée au Bureau du Conseil privé pour suivi immédiat.

  (1155)  

    Donc, comme le Bureau du Conseil privé...
    Ce suivi immédiat a eu lieu, puis il y a eu d'autres suivis multiples. L'information qui a été fournie au Comité, d'après ce que je comprends, d'après les documents produits, décrit les mesures qui ont été prises et indique également que si l'ancien ombudsman n'a pas fourni d'autres renseignements, c'est que la personne qui a porté plainte ne voulait pas se manifester.
    Monsieur le ministre, vous semblez dire que le premier ministre est responsable du fait qu'il n'y a pas eu d'enquête, parce que le Bureau du Conseil privé relevait de lui. Lorsque le Conseil privé n'a pas mené d'enquête, le premier ministre aurait dû agir. Est-ce bien ce que vous nous dites au sujet de la responsabilité ministérielle?
    Madame la présidente, je ne sais pas comment le député ou son parti décident du type de pouvoir que les hommes et femmes politiques devraient avoir, mais je peux vous assurer que...
    L'un de ces pouvoirs est celui d'ordonner la tenue d'une enquête.
    Madame la présidente, j'essaie... Je peux répondre à la question ou m'abstenir.
    Madame la présidente, puis-je répondre à la question?
    Veuillez répondre à la question.
    Merci.
    Madame la présidente, aucun homme ou femme politique ne devrait être mêlé à une enquête. Ce que nous devons faire, c'est permettre aux fonctionnaires indépendants d'examiner les faits et de décider de la direction à prendre. S'écarter de cette démarche, c'est compromettre la possibilité de parvenir à une issue juste pour la personne qui a porté plainte.
    Merci beaucoup.
    Quel ministre devait veiller à ce qu'une enquête ait lieu?
    Je crains que votre temps de parole ne soit écoulé.
    Nous passons à Mme Alleslev.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    Dans le même ordre d'idées, monsieur le ministre, un ministre, un politique — vous, en l'occurrence — est-il responsable de s'assurer que les Forces canadiennes ont un chef d'état-major de la défense qui est au-dessus de tout reproche, qui ne s'est pas rendu coupable ou ne se rend pas coupable d'inconduite sexuelle?
    Madame la présidente, c'est notre responsabilité à tous, y compris la personne, quiconque...
    Non, monsieur le ministre, est-ce votre responsabilité?
    Madame la présidente, si je pouvais essayer de répondre à la question... On me coupe la parole.
    Si cela vous convient, madame la présidente, je pourrais essayer de répondre à la question précédente.
    Veuillez répondre à la question.
    Madame la présidente, tout d'abord, tout type d'inconduite sexuelle est notre responsabilité à nous tous. À titre de ministre de la Défense nationale, il m'incombe, aux termes de la Loi sur la défense nationale, d'orienter les Forces canadiennes. Cette orientation est définie dans la politique de défense, qui prévoit donc que le milieu de travail doit être libre de tout harcèlement. Et les hommes et les femmes des forces armées sont au premier rang des priorités, madame la présidente. Nous savons que nous n'avons pas...
    Merci, monsieur le ministre.
    En 2018, puis en 2019, étiez-vous convaincu que le chef d'état-major de la défense, le général Vance, était irréprochable et qu'il ne s'était jamais livré d'aucune façon à des inconduites sexuelles?
    Madame la présidente, quand nous recevons de l'information de cette nature, nous devons toujours la transmettre aux autorités compétentes — les autorités compétentes indépendantes, pas des hommes et femmes politiques — pour qu'elles lancent des enquêtes ou y mettent fin, de sorte que des fonctionnaires indépendants puissent déterminer où...
     Monsieur le ministre, vous avez dit avoir participé à...
    Veuillez laisser le ministre répondre. Il est ici pour trois heures. Laissez-le terminer, puis nous poursuivrons. Je vous donnerai un peu plus de temps à la fin.
    Merci.
    Merci, madame la présidente.
    Comme je l'ai déjà dit, il est important que le processus soit suivi si on veut qu'une enquête indépendante ait lieu. Aucun homme ou femme politique ne devrait intervenir dans une enquête ni avoir le pouvoir de lancer une enquête sur quiconque ou d'y mettre fin.
    Étiez-vous convaincu, en mai 2019, lorsque vous étiez à la réunion du Cabinet où il a été question du Programme de gestion du rendement du général Vance, que son rendement n'était entaché par aucune inconduite sexuelle?

  (1200)  

    Madame la présidente, je ne fais pas partie d'un comité de gestion. Pourrait-elle reformuler sa question?
    Ma question portait sur le programme d'examen de la gestion du rendement. En tant que ministre de qui relevait le général Vance, vous participez à ce processus. Est-ce exact?
    Madame la présidente, en ce qui concerne ceux qui travaillent pour moi, qu'il s'agisse du sous-ministre, du chef du CST ou du chef d'état-major de la défense, c'est habituellement vers la fin de l'automne que le greffier nous téléphone pendant une quinzaine de minutes pour discuter de la façon dont les choses se passent au ministère avec les responsables.
    Étiez-vous convaincu que le rendement du général Vance était au-dessus de tout reproche et qu'il ne faisait l'objet d'aucune allégation d'inconduite sexuelle?
    Madame la présidente, dans ce cas-ci, notre responsabilité, si des renseignements nous parviennent, est de les transmettre immédiatement aux responsables compétents afin qu'ils puissent y donner suite. C'est exactement ce qui s'est passé.
    Monsieur le ministre, l'évaluation du rendement relève de votre jugement, de votre responsabilité ministérielle et de votre jugement. Étiez-vous convaincu que le comportement du général Vance était irréprochable?
    Madame la présidente, lorsque nous avons discuté du travail qui... Les questions auxquelles je réponds lorsque le greffier pose des questions sur les gens... C'est une liste de questions sur leur travail. Évidemment, je ne peux pas entrer dans les détails, car il faut protéger la vie privée. Je ne m'occupe pas de la rémunération au rendement, comme la députée l'affirme. Je n'ai jamais participé aux décisions sur la rémunération au rendement.
    Ce n'est pas le montant de la rémunération qui est en cause, mais la question de savoir si le rendement mérite d'être récompensé et si la personne reste en poste, et c'est là votre responsabilité. Étiez-vous absolument satisfait du rendement du général Vance?
    Madame la présidente, ce n'est pas ainsi que ces choses-là se passent.
    Avez-vous participé à la réunion du Cabinet où il a été question du décret à soumettre au gouverneur général prévoyant une augmentation pour le général?
    Madame la présidente, je ne participe pas à la décision sur les augmentations salariales.
    Qu'en est-il d'une recommandation d'augmentation de salaire, signée par le Cabinet et adressée à la gouverneure générale, le décret du conseil de mai 2019?
    Madame la présidente, on ne m'a pas demandé mon avis sur une augmentation de la rémunération au rendement pour l'ancien chef d'état-major de la défense.
    C'était une réunion du Cabinet où il était question de décrets. Vous n'avez pas eu votre mot à dire, même si vous êtes le ministre de qui relève le chef de l'état-major de la défense.
    Madame la présidente, comme je l'ai dit à maintes reprises, je ne m'occupe pas de rémunération au rendement.
    Merci beaucoup. J'ai laissé l'échange se poursuivre un peu plus longtemps que la normale.
    Nous allons passer à M. Baker, s'il vous plaît.
    Merci, madame la présidente.
    Mes questions porteront sur les problèmes de harcèlement sexuel et d'agression sexuelle chez les militaires, mais je voudrais au préalable réagir à l'affirmation de quelqu'un qui a déjà pris la parole, affirmation selon laquelle le ministre aurait dû commander une enquête.
    Il est important de se rappeler, et nous l'avons entendu à maintes reprises au Comité, que tout ce qu'un ministre peut faire, c'est s'en remettre aux autorités, qui peuvent alors entreprendre une enquête de façon à protéger la victime, à suivre la procédure établie et à respecter des normes de professionnalisme et d'impartialité. Évidemment, si le ministre ordonnait une enquête, ce serait de l'ingérence.
    Je voulais poser des questions sur les traumatismes sexuels en milieu militaire. Je m'adresse d'abord à Mme Preston.
    Madame Preston, à votre connaissance, quel soutien offre-t-on aux membres des Forces canadiennes qui ont subi un traumatisme sexuel?
     Une gamme de mesures de soutien est offerte aux militaires qui ont subi un traumatisme sexuel. Les services de santé des Forces canadiennes sont un acteur important à cet égard. Ils ont toutes sortes de professionnels de la santé mentale qui apportent l'aide dont la personne peut avoir besoin dans sa propre unité. Si les besoins sont trop lourds pour ce qu'ils sont en mesure de donner, la personne est guidée vers des spécialistes externes.
    Le Centre d'intervention sur l'inconduite sexuelle offre aussi divers services. Notons par exemple une ligne d'appel confidentielle accessible 24 heures sur 24, sept jours sur sept, ainsi qu'un programme d'intervention et de coordination du soutien. Ce programme assure aux participants un soutien constant dès le moment où ils divulguent l'incident jusqu'à ce qu'ils n'aient plus besoin de services. Cela peut comprendre de l'information, l'aiguillage vers d'autres services, l'accompagnement à des rendez-vous, la défense des droits, l'aide pour les mesures d'adaptation en milieu de travail et une série d'autres services.
    Il y a aussi d'autres soutiens non spécialisés. Les aumôniers sont une ressource à laquelle les membres recourent fréquemment pour obtenir un soutien confidentiel. Le plus souvent, ils guident ensuite ceux qui les consultent vers le CIIS ou les services de santé.

  (1205)  

    Merci, madame Preston.
    Je vous demanderais de répondre brièvement aux prochaines questions, car j'en ai encore quelques-unes à poser si j'en ai le temps.
    Offre-t-on un soutien par les pairs pour les traumatismes sexuels en milieu militaire? Ce traumatisme sexuel devrait-il être traité comme une blessure de stress opérationnel?
    Première question: le soutien par les pairs n'est pas offert actuellement, mais, il se fait un certain travail pour mettre en place une plateforme en ligne de soutien par les pairs. De plus, nous avons produit une proposition conjointe avec ACC pour élaborer un programme de soutien en ligne et en personne pour les membres et les anciens combattants.
    Deuxième partie de votre question; oui, je suis d'accord pour dire que les traumatismes sexuels en milieu militaire devraient être considérés comme des blessures de stress opérationnel.
    Merci beaucoup.
    Monsieur le président, combien de temps me reste-t-il?
    Une minute et demie.
    Ma prochaine question s'adresse à vous, lieutenant-général Eyre.
    Des femmes qui ont servi dans les forces armées m'ont appris qu'elles ont souvent besoin d'équipement et de vêtements de tailles différentes qui ne sont pas normalement gardés en stock sur les bases. Comment pouvons-nous nous assurer que les femmes obtiennent l'équipement de protection dont elles ont besoin, comme des gilets pare-balles et d'autres vêtements et équipements, sans que cela soit aux frais de l'unité ou de la base, qui devraient pour les offrir puiser dans leur propre budget? Pourrions-nous avoir un fonds distinct, si vous voulez, ou un budget distinct qui servirait exclusivement à cette fin de sorte que les femmes puissent s'intégrer pleinement dans les forces armées?
    En tant que commandant de l'Armée de terre, j'ai été saisi de cette question. Nous avons lancé une initiative de modernisation de l'habillement et de l'équipement opérationnels des soldats. Nous voulions améliorer l'ajustement et la fonctionnalité des vêtements, alléger la charge portée par les soldats et moderniser leur armure. À l'aide de données anthropométriques ou de la technique de balayage, nous nous assurons de pouvoir tenir compte de la taille et de la morphologie, de façon que les soldats soient mieux protégés, que leurs vêtements soient mieux ajustés et qu'ils se sentent plus fiers de servir dans l'armée.
    L'une des principales plaintes que j'ai reçues de jeunes soldats, c'est qu'ils ne croyaient pas que leur armure les protégerait vraiment. C'est ce que visait cette initiative. Il s'agissait d'améliorer la confiance que chaque membre avait dans son équipement pour pouvoir faire son travail.
    Merci.
    Je crains que votre temps de parole ne soit écoulé, monsieur Baker.
    Merci.
    Nous allons passer à M. Barsalou-Duval. Je vous en prie.

[Français]

     Je vous remercie, madame la présidente.
    Monsieur Sajjan, à l'époque, vous avez refusé de rencontrer M. Walbourne, qui voulait vous faire part d'informations sur des allégations de nature sexuelle.
     Si aujourd'hui, en 2021, M. Lick vous contactait pour vous communiquer de l'information de la même nature, refuseriez-vous encore de le rencontrer?

[Traduction]

    Je reviens d'abord sur l'affirmation du député. Il n'est pas vrai que j'ai refusé de rencontrer l'ancien ombudsman. En fait, j'ai eu une réunion officielle avec tout notre personnel. Il a demandé à me rencontrer en privé, et j'ai accédé à sa demande. En fait, nous avons discuté de l'enquête en cours à son bureau. À la fin de l'échange, il a soulevé ces préoccupations. Il ne m'a pas demandé conseil, mais je lui ai dit qu'il nous fallait traiter cette information correctement. C'est pourquoi il y a eu un suivi immédiat.
    Pour quiconque fournit ce genre d'information, je dois toujours respecter la procédure prévue. C'est exactement ce que j'ai fait par le passé, et c'est exactement ce que je ferai à l'avenir.

  (1210)  

[Français]

     Merci, mais vous avez refusé de rencontrer M. Walbourne au moins à une douzaine de reprises, selon ce qu'il nous a dit.
     Est-ce faux?

[Traduction]

     Vous voulez parler des réunions ordinaires. En fait, nous nous rencontrions régulièrement. On ne peut pas dire que je refuse de le rencontrer. Il y a parfois, des problèmes d'horaire... En réalité, j'ai saisi toutes les occasions de le rencontrer. Nous nous sommes rencontrés assez régulièrement pour discuter du travail du bureau de l'ombudsman, pour aborder très tôt certains sujets lorsque nous élaborions la politique de défense et examinions divers problèmes.
    Je n'ai jamais refusé de rencontrer l'ombudsman.

[Français]

    M. Walbourne fabule donc lorsqu'il dit que vous refusiez de le rencontrer après la rencontre au sujet du général Vance.

[Traduction]

    Pourriez-vous répéter la question, s'il vous plaît? Après la rencontre...?

[Français]

    M. Walbourne a mentionné au Comité que vous auriez refusé de le rencontrer une douzaine de fois après qu'il ait essayé de vous parler du cas du général Vance. Aujourd'hui, vous mentionnez que ce n'est pas vrai et que vous rencontrez l'ombudsman très souvent, que ce soit M. Walbourne ou M. Lick, aujourd'hui.

[Traduction]

    Après cette rencontre, l'ancien ombudsman a remis la lettre dans laquelle il disait avoir l'intention de démissionner. Je crois qu'il était en congé à ce moment-là. Quoi qu'il en soit, en ce qui concerne l'information fournie par l'ancien ombudsman, nous avons saisi de nombreuses occasions... Le Conseil privé l'a fait, y compris mon ancienne cheffe de cabinet, qui lui a envoyé directement un courriel pour lui demander l'information.
     Non, je n'ai pas refusé de rencontrer l'ancien ombudsman.
    Merci beaucoup.
    Nous allons passer à M. Garrison, s'il vous plaît.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    Ce qui me préoccupe encore, c'est que quelqu'un a fait une allégation fondée d'inconduite sexuelle. Dans les politiques efficaces sur l'inconduite sexuelle et les agressions sexuelles, on ajoute foi à la version des victimes jusqu'à ce qu'il y ait une raison de ne pas les croire. Dans ce cas-ci, nous avions une allégation crédible pour laquelle l'ombudsman militaire avait des preuves que le ministre — vous, monsieur le ministre — a refusé d'examiner.
    Vous avez invité... Vous avez dit il y a quelques minutes que vous aviez invité les gens à vous poser des questions de nature personnelle. J'ai des questions à vous poser au sujet de vos relations avec le général Vance. Depuis combien de temps le connaissez-vous? Dans quelles circonstances vous êtes-vous rencontrés pour la première fois?
    Désolé, quelle était la première question? Pourriez-vous la répéter?
    Depuis combien de temps connaissez-vous le général Vance et dans quelles circonstances vous êtes-vous rencontrés? Je voudrais que vous répondiez à cette question, monsieur le ministre.
    Non, vous avez posé une autre question avant.
    Non, aucune. La question que je vous pose maintenant est la suivante: depuis combien de temps connaissez-vous le général Vance et dans quelles circonstances...
    Non. Madame la présidente, il est injuste de faire une affirmation comme celle-là et d'enchaîner avec une question. Il est extrêmement injuste qu'un député se comporte ainsi.
    Je vais répondre très directement à la question du député, madame la présidente.
    Je n'étais pas et je ne suis pas un ami du général Vance. Est-ce que cela répond très directement à votre question?
    Vous n'avez donc pas de relations personnelles...
    Non, je n'ai pas de relations personnelles avec le général Vance.
    Le général Vance n'a joué aucun rôle dans votre nomination à des postes en Afghanistan.
    Désolé?
    Le général Vance a-t-il joué un rôle dans votre nomination à des postes militaires en Afghanistan?
    Les postes que j'ai occupés en Afghanistan?
    Oui.
    Oui, lors de mon deuxième déploiement en Afghanistan, il était commandant de la force opérationnelle.

  (1215)  

    Vous releviez alors du général Vance.
    Exact.
    Merci beaucoup, monsieur le ministre.
    Madame la présidente, avec votre permission, je signale que le député fait ici une affirmation — simplement parce que j'ai servi mon pays et continue de le faire — qui semble laisser entendre que j'avais une certaine relation personnelle.
     J'ai participé à quatre déploiements. J'ai été au service d'un général américain. C'est l'une des raisons pour lesquelles je suis très préoccupé par les affirmations du député. Comme je l'ai déjà dit, je ne vais pas le laisser définir ce que j'ai vécu dans le cadre de mon déploiement ni ce que j'ai vécu dans les Forces canadiennes.
    Je sais que cela ne plaît pas au député, mais je suis désolé. Je ne vais pas lui permettre de le faire. S'il veut me poser une question directe... Ai-je une relation personnelle avec le général? Je lui ai répondu que non. S'il veut poser une question, d'accord, mais s'il vous plaît, ne faites pas ce genre d'affirmation. C'est extrêmement désagréable.
     Merci beaucoup.
    Monsieur le ministre...
    Nous allons passer à Mme Gallant, s'il vous plaît.
    Lorsque l'appel téléphonique a eu lieu avec le greffier au sujet du rendement de Vance dans le cadre du processus d'examen du rendement, pourquoi le ministre n'a-t-il pas soulevé la question de l'allégation?
    Madame la présidente, cet appel téléphonique a eu lieu plus tôt, à la fin de l'automne.
    Monsieur le ministre, vous avez dit que le premier ministre est responsable du BCP. Puisque c'est le BCP qui a mené l'enquête, êtes-vous en train de dire que le premier ministre est responsable?
    Madame la présidente, aucun homme ou femme politique ne devrait être responsable d'une enquête sur qui que ce soit.
    Donc...
    Les hommes et femmes politiques ne devraient pas intervenir. C'est très dangereux.
    Le premier ministre est-il responsable des actions ou de l'inaction du Bureau du Conseil privé?
    Madame la présidente, je ne vois pas trop comment répondre à cette question.
    Qui vous a informé que le premier ministre était au courant que vous aviez soulevé ces préoccupations auprès du BCP?
    Madame la présidente, comme je l'ai dit, mon ancienne cheffe de cabinet a informé le Cabinet du premier ministre de ce qui s'était passé et des mesures que nous prenions.
    Lorsqu'il a reçu de l'information de l'ancien ombudsman militaire Gary Walbourne au sujet d'une allégation d'inconduite sexuelle de la part du général Vance, le ministre a-t-il examiné l'historique du dossier du général Vance au BCP?
    Pouvez-vous répéter la question? Excusez-moi, mais j'ai eu du mal à vous entendre.
    Lorsque vous avez reçu l'information de l'ombudsman Walbourne au sujet de l'allégation au sujet du général Vance, avez-vous examiné l'historique du dossier du général Vance au BCP?
    Madame la présidente, je peux répondre en parlant des mesures que nous avons prises. Nous avons pris l'information très au sérieux. Nous avons informé le Bureau du Conseil privé des informations qui avaient filtré. Le BCP a communiqué avec l'ancien ombudsman, et mon ancienne cheffe de cabinet a informé le Cabinet du premier ministre des mesures que nous prenions.
    Donc, vous n'avez pas examiné l'historique du dossier du général Vance au BCP. Pour quelle raison?
    Madame la présidente, je ne saisis pas très bien la question. Le dossier du BCP... Je voudrais vraiment comprendre de quoi il s'agit. J'ai du mal à comprendre ce qu'on entend par « dossier du BCP ».
    Le dossier du BCP, le dossier personnel du général Vance.
    Madame la présidente, j'insiste, ce serait de l'ingérence. Je ne m'occupe pas des dossiers du personnel conservés par le Conseil privé sur les nominations par le gouverneur en conseil.
    Monsieur le ministre, avez-vous, oui ou non, ordonné une enquête sur des incidents racistes dans les Forces armées canadiennes?
    J'ai ordonné à un groupe indépendant d'examiner la question du racisme systémique, des préjugés sexistes et de l'inconduite en général, oui.
    Vous avez donc lancé cette enquête, mais...
    Ce n'est pas...
    ... vous ne vous êtes pas assuré qu'une enquête soit entamée sur les allégations portées contre le général Vance.
    Madame la présidente, il ne s'agit pas d'une enquête, ni même d'un examen sur une personne en particulier. Il s'agit d'examiner un problème plus vaste, qui est de notre ressort. Je n'essaie pas d'examiner les agissements d'une personne en particulier. Ce serait du ressort du chef d'état-major de la défense ou du sous-ministre, compte tenu de leurs responsabilités et des mécanismes mis à leur disposition.
    Je ne ferais pas d'enquête ministérielle ni n'entreprendrais d'enquête sur des personnes, et j'espère qu'aucun responsable politique ne le ferait.

  (1220)  

    Merci.
    Monsieur le ministre, quand, où et à quel titre avez-vous servi avec le général Vance en dehors de l'Afghanistan?
    Je n'ai servi sous son commandement qu'en Afghanistan.
    Si aujourd'hui vous étiez saisi des mêmes allégations concernant le général Vance par l'entremise de l'ombudsman au sujet d'une nomination par le GC, quelle serait la procédure applicable?
    C'est ce que nous allons examiner pour voir si nos procédures sont valables. Quant aux nominations par le GC, elles sont du ressort du Conseil privé. Notre rôle est de nous assurer dans ce cas que la tâche est confiée à des fonctionnaires indépendants qui vérifieront l'information.
    Nous allons examiner la question de l'indépendance au sein des Forces armées canadiennes. Mais il n'appartient pas aux ministres d'examiner les nominations par le GC; cela incombe au Bureau du Conseil privé.
     Merci beaucoup.

[Français]

     Monsieur Robillard, vous avez la parole.
    Je vous remercie, madame la présidente.
    Monsieur le ministre, que font le ministère de la Défense nationale et les Forces armées canadiennes pour assurer un meilleur soutien aux survivantes ou survivants qui se manifestent?

[Traduction]

    Merci beaucoup de la question.
    Je vais en fait demander à Mme Preston de répondre à cette question, mais nous voulions nous assurer, dès le départ, que, quand quelqu'un se décide à parler... Imaginez ce que cette personne a vécu. Nous voulions nous assurer qu'elle aurait non seulement le soutien psychologique nécessaire, mais aussi de bons conseils sur la marche à suivre.
    Par exemple, nous nous interrogeons en ce moment sur le moyen d'offrir à une personne victime d'une inconduite quelconque la possibilité d'obtenir le soutien, les conseils et les directives juridiques dont elle a besoin et le suivi nécessaire tout au long du processus.
    Madame Preston, pourriez-vous apporter des précisions, s'il vous plaît?
    Oui. Merci.
    Comme je l'ai dit tout à l'heure, les militaires peuvent bénéficier de diverses mesures de soutien en s'adressant aux services de santé ou au Centre d'intervention sur l'inconduite sexuelle. Ils peuvent également être aiguillés vers des spécialistes civils. Il existe également un programme de contributions dans le cadre duquel nous finançons neuf centres d'aide aux victimes d'agression sexuelle, situés à proximité des bases partout au pays. Cela permet de demander de l'aide à l'extérieur de l'armée si on préfère parler à des fournisseurs de services non militaires.
    Nous songeons à améliorer des services, par exemple le programme de coordination des interventions et du soutien dont je vous ai déjà parlé, qui offre un soutien du début à la fin du parcours d'une victime. C'est un modèle centralisé, offert depuis Ottawa, mais nous enverrons du personnel par avion, pour offrir de l'accompagnement par exemple. Nous sommes en train d'élargir ce programme pour avoir des centres régionaux et offrir plus de soutien rapproché.
    Nous réfléchissons à d'autres améliorations — par exemple, l'offre de conseils juridiques indépendants aux militaires, ainsi que des programmes de soutien par les pairs, en ligne et en personne.

[Français]

    Docteure Preston, diriez-vous que les survivantes ou les survivants ne se manifestent pas parce qu'ils craignent de subir des représailles ou bien par peur que leur cas ne soit pas pris au sérieux?

[Traduction]

    En fait, pour ceux et celles qui ont vécu une agression, qu'il s'agisse ou non de militaires, la décision de dénoncer est très difficile. On sait que, à l'extérieur de l'armée, dans le monde civil, seulement environ 5 % des agressions sexuelles sont signalées à la police.
    Dans l'armée, les taux de signalement sont plus élevés. Cela va de 20 à 25 %. Je dois cependant préciser que 40 % de ces signalements sont faits par des tiers, ce qui dessaisit les victimes de leur pouvoir.
    Les raisons de ne pas dénoncer un cas d'inconduite sont multiples. C'est une situation extrêmement embarrassante, très délicate et très personnelle. Les victimes commencent par se blâmer elles-mêmes avant même de songer à dénoncer. Ensuite, une fois cette difficulté surmontée, ce que vous dites est vrai. Il y a la crainte de ne pas être crues et la peur des représailles et des répercussions sur la carrière. Il y a toutes sortes de craintes, et pas seulement des représailles. Les représailles existent, c'est une réalité.
    Il faut dire que le système n'inspire pas confiance — du fait même que les mécanismes ne sont pas rapides et que les militaires n'obtiennent pas l'information dont ils ont besoin pour bénéficier de ce système — et que les résultats de la procédure sont insatisfaisants, qu'il s'agisse du règlement obtenu ou du temps qu'il a fallu pour y arriver.
    Les raisons pour lesquelles les victimes hésitent à signaler ce genre de situation sont multiples.

  (1225)  

    Merci.

[Français]

    Contre-amirale Bernatchez, il est évident que les survivantes et les survivants qui tentent de dénoncer des cas d'inconduite sexuelle ont des problèmes, surtout lorsque les officiers impliqués sont des officiers de haut rang au sein des Forces armées canadiennes.
    Quelle serait la solution à ce problème, selon vous, afin que les survivantes et les survivants n'aient plus à y faire face?
    Il faut indiquer que le système de justice militaire joue un rôle important afin de traiter des questions d'inconduite sexuelle dans les Forces armées canadiennes. C'est un système qui agit en partenariat avec les autres systèmes qui sont mis en place dans les Forces armées canadiennes pour l'éducation et la prévention de l'inconduite sexuelle.
    J'aimerais souligner que, lorsqu'il y a un incident d'inconduite sexuelle, la victime ou la survivante a le choix de le rapporter au système de police civile ou au système de police des Forces armées canadiennes, c'est-à-dire le Service national des enquêtes des Forces canadiennes.
    Il est évident, comme le disait la Dre Preston, qu'il y a une série de défis et de blocages qui se présentent aux victimes et aux survivantes. Lorsqu'on ira de l'avant, il faudra s'assurer de les écouter et les soutenir davantage et de les respecter, afin qu'elles puissent regagner confiance non seulement dans le système de justice militaire, mais aussi dans le système criminel civil, ainsi que dans la chaîne de commandement.
    Merci beaucoup.
    Merci.

[Traduction]

     C'est à votre tour, monsieur Benzen, s'il vous plaît.
    Merci, madame la présidente.
    Merci, monsieur le ministre, d'être parmi nous aujourd'hui.
    Monsieur le ministre, il y a une chose qui m'intrigue. Vous avez dit avoir travaillé sous le commandement du général Vance en Afghanistan. J'aimerais savoir si vous avez travaillé à un autre endroit avec lui ou à ses côtés?
    Avez-vous été en poste à Toronto, où vous auriez travaillé avec lui ou à ses côtés? Aviez-vous des bureaux voisins?
    M. Bob Benzen: Vous ne...
     L'hon. Harjit S. Sajjan: [Inaudible] à Vancouver.
    M. Bob Benzen: Je sais. Je dis simplement...
    L'hon. Harjit S. Sajjan: J'étais réserviste à Vancouver. Je n'ai pas travaillé à Toronto, non.
    Je ne relevais pas de la classe B. Je peux l'expliquer — ni de la classe B, ni de la classe C, ni même de la classe A de Toronto, non. Peut-être qu'il s'agissait d'une personne qui me ressemble, étant donné qu'il y a beaucoup de militaires portant le turban dans les Forces armées canadiennes.
    Non, non, c'était juste une question.
    Vous avez dit aujourd'hui que, chaque année à l'automne, vous recevez un appel de 15 minutes du greffier du Conseil privé pour parler du chef d'état-major de la défense. C'est une petite conversation d'une quinzaine de minutes seulement. Quel genre de questions vous pose-t-on durant cette conversation? De quoi parlez-vous?
    En fait, nous parlons surtout du sous-ministre.
    Je vois.
    Évidemment, comme mon sous-ministre est ici devant moi...
    C'est très bien.
    ... je ne vais pas parler de...

  (1230)  

    Vous ne discutez donc pas du chef d'état-major de la défense.
    Non, j'ai dit que nous parlons du sous-ministre, nous parlons du chef du Centre de la sécurité des télécommunications, et nous parlons aussi du chef d'état-major de la défense à ce moment-là...
    Ma question ne portait que sur le chef d'état-major de la défense. De quoi parlez-vous?
    D'accord. Je voulais simplement préciser que cette conversation ne concerne pas seulement le chef d'état-major de la défense. On parlera, par exemple, du travail prévu dans la lettre de mandat. Concernant la politique de défense, on parlera du travail qui a été fait, des opérations en cours — des activités dont ils sont responsables.
    Il s'agit donc des activités qui se sont déroulées tout au long de l'année, et vous voulez donc en faire un rapide examen, les mettre en contexte et vous assurer que tout le monde est sur la même longueur d'onde.
    D'accord.
    Le greffier était Michael Wernick. Il était au courant des allégations qui lui ont finalement été communiquées. Il avait entendu parler des allégations d'inconduite sexuelle. Est-ce qu'il en a été question dans votre conversation avec lui au cours de cette conversation?
    Non, je ne me souviens pas que nous en ayons discuté. N'oubliez pas non plus que cette conversation a eu lieu l'automne précédent.
    D'accord. Mais il y en a une chaque année.
    Vous en avez eu une en 2019, en 2018, et ainsi de suite.
    La question de l'augmentation de salaire a été soulevée, et ce n'était tout simplement pas... Il n'était pas nécessaire d'en discuter.
    Comme je l'ai dit, non, je n'ai pas discuté de rémunération. Je ne discute pas de rémunération. Je ne participe pas aux décisions sur la rémunération.
    Vous n'arrêtez pas de dire que vous ne participez pas à l'examen, mais...
    Non, j'ai dit que je ne participe pas aux décisions concernant l'examen de la rémunération. Je n'y participe pas.
    D'accord. Mais ceux qui prennent cette décision examinent tout, y compris vos conversations avec le greffier du Conseil privé sur le travail des uns et des autres. En un sens, vous participez donc au processus d'examen, n'est-ce pas?
     Non. Ce que vous dites ici, c'est que je participe à l'examen de la rémunération et que...
    Ce n'est pas ce que je dis. Non.
    Je dis qu'un examen est effectué à la fin de l'automne. Il y a un examen, mais je n'y discute pas de rémunération. Je ne participe pas aux décisions sur la rémunération.
    D'accord, mais la conversation en question fait partie du processus décisionnel concernant une augmentation éventuelle, et vous participez donc indirectement à cet examen.
    Non. Madame la présidente, il dit que, si je décide d'accorder une augmentation... Mais, non, je ne m'occupe pas de la rémunération.
    Comme Mme Sherman l'a déclaré sans équivoque et comme elle l'a expliqué au Comité, « les ministres n'établissent pas la rémunération. »
    Je comprends, mais voici le problème. Les Canadiens partout au pays... Je viens de parler à mes voisins et je leur ai dit: « Votre supérieur aura son mot à dire sur l'examen de votre rémunération; il aura son mot à dire sur l'examen de votre travail annuel. Croyez-vous que le ministre de la Défense n'ait pas son mot à dire sur le chef d'état-major de la défense? » Et ils répondent: « Il a sûrement son mot à dire. C'est son patron. »
    Tous les Canadiens, d'un océan à l'autre, savent que le patron a son mot à dire, et vous répétez que ce n'est pas le cas. Les Canadiens ne sont pas dupes. Pouvez-vous leur expliquer pourquoi, comme patron, vous n'y participeriez pas?
    Compte tenu de votre description de la situation avant d'essayer de dire que nous allons... Je ne sais pas comment vous entamez la discussion avec vos voisins. Je suis ici pour vous expliquer comment cela fonctionne. Plus important encore...
    C'est très simple.
    Madame la présidente, j'essaie de répondre à la question.
    Veuillez répondre à la question.
     Mme Sherman est venue expliquer tout le processus au Comité. Elle a expliqué comment cela fonctionne. Pendant ce temps, oui, il y a une conversation, à la fin de l'automne je crois, et je ne le conteste pas. Je dis aussi que je ne m'occupe pas de la rémunération. Elle a également expliqué que « les ministres n'établissent pas la rémunération. »
    C'est à vous de décider de la conversation que vous aurez avec les Canadiens, pour quelque raison que ce soit, mais je suis ici pour...
    Eh bien, je pense que vous...
    Merci beaucoup.
    C'est au tour de M. Spengemann, s'il vous plaît.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    Merci encore à tous les témoins d'être ici.
    Nous avons entendu des témoignages très complets. Nous en sommes arrivés à certaines conclusions plus définitives qu'auparavant. L'une de ces conclusions est qu'il y a une responsabilité ministérielle. Le personnel politique exonéré n'a pas de comptes à rendre à la population canadienne, mais les ministres, eux, en ont.
    Un très solide point de vue s'est par ailleurs révélé, appuyé par l'ancien chef de cabinet du premier ministre Harper, selon lequel il ne convient pas que des élus lancent une enquête ou y participent. À mon avis, il est très important que le Comité en prenne note.
    Monsieur le ministre, je voulais profiter du fait que vous et l'équipe de la plus haute direction des Forces armées canadiennes soyez présents ici encore une fois pour vous demander de réexaminer la question du changement de culture. Vous avez dit dans votre exposé préliminaire, il y a plusieurs semaines, que « nous devons changer notre culture » et que « le temps de la patience est maintenant révolu ». Des témoins nous ont expliqué qu'il existe des paliers au sein des Forces canadiennes, que l'ouverture au changement pourrait être plus large parmi les militaires des rangs inférieurs et que la difficulté se trouve aux rangs supérieurs. Je cite un de nos témoins au sujet de la réticence des hauts gradés à changer.
    Est-ce que vous et vos collègues pourriez dire au Comité comment précisément faire progresser de façon tangible une évolution systémique au sein des Forces canadiennes compte tenu de notre mandat? Sur quoi pourrions-nous nous concentrer en matière de culture? Il y a des aspects positifs à la culture, mais il y a aussi des aspects négatifs. Comment résoudre ce problème? Comment vraiment réaliser le changement que méritent les femmes et les hommes des Forces canadiennes, ainsi que les aspirants qui voudraient un jour servir dans l'armée?
    Je vais vous laisser commencer, puis j'aurai des questions complémentaires à l'intention de votre équipe.

  (1235)  

    Merci beaucoup de cette excellente question.
    Nous nous intéressons à la question du changement de culture depuis un certain temps. Je l'ai dit publiquement. Il s'agit de veiller à protéger nos militaires de tous les rangs. Il s'agit de veiller à ce que nos recrues soient prises en charge tout au long du processus et à leur offrir un environnement inclusif de sorte que tous ceux et celles, quels qu'ils soient — sur les plans du genre, de l'orientation sexuelle, de la religion, de la couleur, etc. —, qui décident de s'enrôler dans les Forces armées canadiennes aient une chance juste et égale de réussir et que leurs compétences soient valorisées.
    Évidemment qu'il y a de la résistance au changement, mais nous nous y attaquons vigoureusement. Nous devons également veiller à ce que ceux et celles qui ont été victimes d'agression dénoncent cette situation et reçoivent de l'aide. L'objectif est d'essayer de prévenir ce genre d'inconduite. Et cela se fera grâce à un changement de culture. Ces discussions ont cours depuis un certain temps. C'est l'objet du travail du groupe d'experts indépendant. Il y aura un changement de culture. Il faut d'abord que les hauts gradés participent pleinement à ce changement de culture, pour que les choses soient faites correctement au fil de la hiérarchie.
    C'est à nous, au bout du compte, qu'incombe cette responsabilité.
     Merci beaucoup, monsieur le ministre.
    Madame la sous-ministre Thomas, existe-t-il des mécanismes au sein des Forces canadiennes qui permettraient d'inciter les officiers et sous-officiers à devenir des alliés et de récompenser le genre de comportement vraiment propice à un changement de culture plus systématique?
    Je ne suis pas sûre qu'il y ait des récompenses, mais je crois qu'il y a moyen de sensibiliser les militaires et de susciter un sentiment d'alliance. On se trompe en croyant que le seul problème est l'agression sexuelle. L'agression sexuelle est un acte criminel. C'est très grave, et il faut prendre cela au sérieux, mais, pour beaucoup de femmes dans les Forces armées canadiennes et au ministère de la Défense nationale, c'est l'effort quotidien pour être entendues et respectées qui pèse. Certains cadres supérieurs de l'organisation ont le sentiment que l'institution leur appartient en propre et pas à tous. C'est la différence entre être intégré et être inclusif.
    Il y a un profond manque de foi dans les droits à l'égalité, à l'équité et à l'inclusion, et la fausse impression que si l'on n'a pas agressé quelqu'un, on n'a rien fait de mal.
    Il faut commencer par changer cette perception et responsabiliser les gens pour que toutes les voix soient entendues et que tout le monde soit traité de façon plus équitable et plus juste au ministère.
    Madame la sous-ministre, est-ce que le leadership en matière d'alliance et d'égalité entre les sexes pourrait compter dans l'évaluation du rendement des militaires?
    Absolument, cela pourrait en faire partie, mais le général Eyre serait mieux placé que moi pour en parler. Ce serait certainement et ce sera une bonne chose pour les membres de la haute direction du ministère de la Défense nationale.
    Merci beaucoup.

[Français]

     Monsieur Barsalou-Duval, vous avez la parole.

  (1240)  

    Je vous remercie, madame la présidente.
    Monsieur le ministre, à écouter les réponses que vous nous donnez depuis le début, j'ai presque l'impression que c'est vous qui êtes la victime dans cette situation, c'est-à-dire que vous êtes complètement impuissant et que vous avez tout fait correctement.
    C'est un peu difficile à suivre, après avoir entendu les témoignages de l'ombudsman, M. Lick, de son prédécesseur, M. Walbourne, et du lieutenant-colonel Leblanc. Chaque fois qu'on leur a demandé si cela aurait constitué de l'ingérence que le ministre décide de dire qu'il y a un problème et de prendre les mesures nécessaires, ils ont tous répondu non.
    J'essaie donc de comprendre pourquoi vous continuez de maintenir que, si vous aviez pris des mesures, cela aurait été de l'ingérence, alors que tous les experts crédibles en la matière disent que ce n'est pas le cas.

[Traduction]

    Madame la présidente, l'impression du député est erronée. Chaque fois que de l'information est communiquée, des mesures doivent être prises, et elles le sont... il suffit de s'adresser immédiatement à ma cheffe de cabinet pour que des mesures puissent être prises. Elle s'est immédiatement adressée au Bureau du Conseil privé pour que des mesures indépendantes puissent être prises, et c'est ce qui a été fait dès le lendemain. Ensuite, nous avons fait un suivi.
    Nous avons pris la question au sérieux. Nous avons immédiatement fait un suivi auprès des personnes indépendantes compétentes. Ce que j'essaie de dire, c'est qu'il ne faut pas déformer mes propos lorsque je dis qu'un responsable politique ne devrait pas participer aux enquêtes. Ils ne devraient jamais le faire. Aucun responsable politique, aucun ministre — antérieur ou à venir — ne devrait ordonner une enquête sur un militaire ou y mettre fin.

[Français]

    Monsieur le ministre, le résultat de cela a été que le chef d'état-major de la Défense est resté en poste, alors que des allégations de nature sexuelle pesaient contre lui.
    Êtes-vous satisfait du résultat de votre travail?

[Traduction]

    Madame la présidente, ce n'est évidemment pas le résultat que nous aurions souhaité, mais il est important quoi qu'il en soit de... quand quelqu'un nous informe, nous le prenons au sérieux. En l'occurrence, comme je l'ai déjà dit, l'information a été immédiatement transmise — sans aucun délai, madame la présidente, immédiatement — aux personnes compétentes pour que les mesures nécessaires puissent être prises.
    Ensuite, si vous examinez le témoignage d'autres personnes en plus de l'information qui a été fournie, vous constaterez qu'il y a eu un suivi auprès de l'ancien ombudsman.
     Merci beaucoup.
    C'est à vous, monsieur Garrison, je vous en prie.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    J'ai encore des problèmes d'écran gelé. Excusez-moi.
    Monsieur le ministre, la raison pour laquelle je vous ai interrogé au sujet de votre relation avec le général Vance, c'est qu'il a été dit publiquement que les problèmes d'inconduite sexuelle du major Vance étaient bien connus des hauts gradés de l'armée canadienne.
     Le major Brennan l'a dit à Mme Mercedes Stephenson dans une entrevue. Je crois que c'était en février. Nous avons besoin de comprendre pourquoi vous n'avez pas voulu examiner les éléments de preuve alors que nous avons eu connaissance d'allégations — et certaines m'ont été communiquées par d'autres qui craignaient des représailles — selon lesquelles les cas d'inconduite étaient multiples et étaient bien connus.
    Je disais donc, avant qu'on m'interrompe, que la raison était que je vous donnais une chance de dire que vous ne saviez rien de ces allégations et que vous n'aviez pas entendu parler du comportement antérieur du général Vance.
    Oui, c'est vrai. Je n'étais pas au courant du comportement antérieur du général Vance, et donc, non seulement pour répondre à votre question... Absolument, les allégations transmises par le major Brennan sont extrêmement troublantes. Une enquête est maintenant en cours. Je rappelle l'importance, pour moi et pour nous tous, de nous assurer que l'issue soit juste et de laisser l'enquête suivre son cours. Je n'étais pas au courant.
     Je serai heureux de répondre à d'autres questions plus directes comme celle-ci.
    Je n'arrive toujours pas à comprendre pourquoi, en 2018, vous n'avez pas examiné l'information communiquée par l'ombudsman militaire. Il n'y avait pas d'enquête en cours. C'est ce qu'a dit l'ombudsman militaire de l'époque. L'ombudsman militaire actuel a déclaré qu'il n'aurait pas pu y avoir d'enquête en cours. Il n'y avait aucune enquête en cours. Pourquoi ne pas avoir examiné les éléments de preuve qui, selon l'ombudsman militaire, corroboraient l'allégation?

  (1245)  

    Madame la présidente, je vais essayer d'être le plus clair possible.
    La question est posée avec beaucoup de recul. Imaginez qu'on me communique des renseignements. Mon intention a été aussitôt de m'assurer de ne pas accueillir l'information confiée à l'ombudsman pour éviter de l'altérer. Et je dis bien immédiatement, car je sais, d'après ma propre expérience de détective, que, dans une enquête, il faut envisager la possibilité que l'affaire soit portée devant les tribunaux, et que la dernière chose à faire est d'intervenir.
    En l'occurrence, j'ai pris l'affaire très au sérieux et je voulais m'assurer que l'information serait transmise au BCP, qui est responsable des nominations par le gouverneur en conseil, parce que c'est ce qu'il faut faire, pour que la décision soit prise et le suivi effectué indépendamment des élus, y compris moi-même. Ensuite, si les choses évoluaient autrement, d'autres décisions pourraient être prises. Il s'agissait de protéger l'intégrité de l'enquête, madame la présidente. Il n'y avait pas d'autre raison. Je ne peux pas dire les choses autrement. C'est le sérieux avec lequel j'ai traité ces affaires, compte tenu de mon expérience de détective.
    Merci beaucoup.
    C'est à vous, monsieur Bezan, je vous en prie.
    Merci, madame la présidente.
    Dans le même ordre d'idées, monsieur le ministre, à la suite de la récente enquête de la Marine royale canadienne sur le commentaire de la chambre rouge dans une réunion sur Zoom, qui avait abouti à un non-lieu, vous avez ordonné au SNEFC de réexaminer cette enquête. Est-ce de l'ingérence politique?
    Madame la présidente, je n'ai pas ordonné l'enquête du SNEFC. Je ne dirige pas l'enquête du SNEFC. J'ai demandé au chef d'état-major de la défense par intérim de se pencher sur la question. Si le député le souhaite, celui-ci pourra fournir des précisions.
    Non merci. Je voulais simplement savoir comment cela s'est passé.
     D'accord.
    Mais vous avez demandé au CEMD par intérim de faire enquête...
     Non...
    ... de réexaminer l'enquête. J'ai compris.
    Comment se fait-il que l'amiral McDonald ait quitté son poste de chef d'état-major après la révélation des allégations le concernant? Lui avez-vous demandé de démissionner?
    Madame la présidente, M. Art McDonald a volontairement démissionné.
    Après avoir été informé des allégations d'inconduite sexuelle dont il faisait l'objet.
    Il a volontairement démissionné.
    Oui.
     Avez-vous veillé après coup à ce que le soi-disant réexamen ou l'enquête du BCP n'aboutisse à rien? Avez-vous demandé un réexamen de ce processus et avez-vous informé le général Vance qu'il faisait l'objet d'une enquête afin qu'il puisse décider de démissionner et de laisser la chaîne de commandement fonctionner librement dans le cadre de cette enquête?
    Madame la présidente, il aurait fallu qu'une enquête ait été entamée et que beaucoup d'autres circonstances se soient produites pour que cela arrive. En l'occurrence, le député sait très bien ce qui s'est passé. Ce que je voulais, c'était m'assurer que l'information était transmise à des personnes indépendantes pour qu'elles puissent décider où l'acheminer, mais, comme le député le sait d'après les divers témoignages, ce qui s'est passé exactement...
     Monsieur le ministre, comme vous le savez, aucune véritable enquête n'a été menée sur le général Vance, et il n'y a donc pas de risque d'ingérence politique, mais, en vertu de la Loi sur la défense nationale, vous êtes tenu d'utiliser tous les instruments mis à votre disposition pour garantir la gouvernance et la gestion des Forces armées canadiennes. Cela comprend l'article 45 de la Loi sur la défense nationale, qui prévoit, par exemple, la constitution d'une commission d'enquête pour examiner « toute question relative à la direction, la discipline, l’administration ou aux fonctions des Forces canadiennes ».
    Mme Zita Astravas, votre cheffe de cabinet, a donné suite... Vous avez dit aujourd'hui qu'il y a eu plusieurs réunions avec elle à ce sujet. À qui, à part M. Elder Marques, a-t-elle parlé au Cabinet du premier ministre? Quand a-t-elle parlé à Mme Katie Telford?
    Madame la présidente, je vais répondre à la première question et aux affirmations du député.
    J'aimerais que vous répondiez d'abord à la deuxième question. Nous pourrons ensuite revenir à la première.
    En fait, non, madame la présidente, je vais répondre à la première question. C'est chronologique.
    La première n'est qu'une déclaration.
    Non. On ne peut pas simplement faire une déclaration et laisser une affirmation sans suite.
    Bien sûr que si. C'est mon temps de parole et je...
    J'essaie de répondre à votre question.
    Ma question, monsieur...
    Monsieur le ministre, veuillez répondre aux questions dans l'ordre où elles ont été posées.
    Merci.
    Ce n'était pas une question. C'était une déclaration, pas une question.
    J'ai suivi le processus, c'est-à-dire que, quand...
    La question est...
    Monsieur Bezan, veuillez laisser le témoin parler.
    Madame la présidente...
    Madame la présidente, puisque le député parle d'enquêtes, je sais qu'une enquête a été lancée en 2015 et que, comme il le sait sans doute, le chef actuel du Parti conservateur était au courant lorsqu'il était ministre, et...

  (1250)  

    [Inaudible]
    Madame la présidente, j'essaie de répondre à la question.
    ... ministre, qui...
    Je suis désolé, il y a peut-être un certain décalage. J'essaie de répondre à la question.
    L'enquête menée en 2015 par le chef du Parti conservateur, qui était alors ministre, a permis de fournir l'information... Ce qui est drôle, c'est que nous suivons exactement le même processus, en veillant à ce que les fonctionnaires s'assurent de la direction à prendre.
    Il y a eu une enquête. La différence ici, madame la présidente, est évidemment qu'il n'y a pas eu d'enquête. Cela dit, si cela avait été le cas, l'histoire aurait peut-être été différente, mais il n'y en a pas eu.
    À tout le moins, monsieur le ministre...
    C'est la différence entre l'incident qui s'est produit...
    Madame la présidente, le ministre essaie de gagner du temps.
    Je me ferai un plaisir de répondre à la deuxième question maintenant, si vous voulez. Comme je l'ai déjà expliqué, après que l'information a été fournie à mon ancienne cheffe de cabinet, celle-ci a communiqué avec le Bureau du Conseil privé et a informé le Cabinet du premier ministre non seulement de ce qui s'était passé, mais aussi des mesures qu'elle était en train de prendre.
    Quand a-t-elle parlé à Mme Katie Telford, la cheffe de cabinet du premier ministre?
    Elle n'a pas parlé à Mme Katie Telford, mais, comme je vous l'ai déjà dit, elle a fourni l'information au Cabinet du premier ministre, à M. Marques, et nous voulions nous assurer qu'il n'y aurait pas d'ingérence politique. Nous devions laisser la procédure suivre son cours.
    Je vous ai laissé un peu plus de temps.
    Nous passons maintenant à Mme Vandenbeld.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    Puisqu'il en a été question dans le témoignage d'aujourd'hui, monsieur le ministre, je tiens à vous remercier des services que vous avez rendus à ce pays dans l'armée et des nombreuses années pendant lesquelles vous avez servi honorablement. Merci.
    En fait, j'aimerais adresser mes questions au général Eyre. Je vous souhaite la bienvenue, général, et je tiens à souligner que c'est la première fois que vous comparaissez devant le Comité à titre de chef d'état-major de la défense par intérim. Bienvenue parmi nous dans ce nouveau rôle.
    J'aimerais revenir sur certaines des choses que vous avez dites lors de votre comparution devant le comité de la condition féminine le mois dernier. Vous avez fait une déclaration très importante au sujet de l'opération Honour.
    On sait bien que, quand on essaie de trouver des solutions et des moyens de changer la culture institutionnelle, on peut faire des choses avec les meilleures intentions du monde et provoquer des répercussions inattendues. Je crois que vous avez parlé, à cet égard, de l'obligation de rendre compte. L'un des mots que vous avez employés... J'ai entendu des victimes dire que c'était quelque chose de tout à fait bienvenu.
    Vous avez dit que l'opération Honour avait atteint son « point culminant ». Pourriez-vous expliquer ce que vous entendiez par là et nous parler des prochaines étapes? Que faire maintenant pour s'assurer de tirer les leçons de l'expérience, mais aussi pour s'assurer de ne pas répéter les erreurs commises par le passé?
     Merci de cette question. Il faudrait un certain temps pour décortiquer tout cela.
     Je dois dire, tout d'abord, que nous n'avons pas toutes les réponses. En gardant cela à l'esprit, nous pourrons mieux élaborer nos mesures.
    Le cadre que nous avons adopté est fondé sur l'écoute, l'apprentissage et l'action, c'est-à-dire écouter nos militaires des rangs inférieurs, écouter les victimes, écouter les experts externes, écouter les experts internes, écouter les universitaires et entendre ce qu'ils ont à dire sur ce qu'il faudrait faire. Nous devons apprendre. Nous devons prendre acte de tous les rapports qui ont été déposés. Nous devons prendre acte des résultats de l'opération Honour pour voir ce qui a fonctionné et ce qui n'a pas fonctionné.
     Ensuite, nous devons agir. Ce faisant, nous devons recueillir toutes les suggestions, concilier les idées et les intégrer dans un plan délibéré, parce que le changement de culture ne se fait pas du jour au lendemain. Ce plan doit aussi comprendre certains objectifs à très court terme.
    Concernant l'opération Honour et son « point culminant », cette expression militaire signifie précisément qu'une opération ne peut pas aller plus loin, qu'elle est à court de ressources, qu'elle est à bout de souffle. Il faut passer à autre chose. Il est très clair que l'opération Honour doit se transformer en un plan délibéré qui permettra de combler les lacunes circonscrites par notre personnel.
    À l'avenir, nous devrons envisager le changement de culture du point de vue des victimes. Oui, on peut parler des progrès accomplis depuis 15 ou 20 ans, mais, pour une victime, cela n'a probablement pas d'importance. Je crois aussi très important de modifier notre cadre de référence.
    Vous avez parlé de l'obligation de rendre compte. Je suis de plus en plus convaincu qu'il faut remplacer « obligation de rendre compte » par « obligation de réagir ». Nos militaires doivent en effet signaler les actes répréhensibles dont ils sont témoins, mais nous devons aussi donner des moyens aux victimes. Elles doivent avoir leur mot à dire dans le suivi de leur dossier. Je crois que la transition de l'obligation de rendre compte à l'obligation de réagir en sera un aspect important.
     Les idées nous arrivent constamment. Il faut les concilier, mais nous sommes en bonne voie.

  (1255)  

    Merci beaucoup, général.
    Pourriez-vous également nous parler un peu — mais j'aimerais aussi entendre la sous-ministre à ce sujet — de la façon d'instaurer un climat de confiance dans l'équipe de la Défense? Nous avons vu que la confiance a été brisée malgré tous les efforts déployés. Il est désormais très important de rétablir la confiance. Comment faire? La sous-ministre et le chef intérimaire pourraient-ils répondre brièvement?
    Merci.
    Il faut des années pour bâtir la confiance, mais un incident peut suffire à la détruire. C'est l'une de mes plus grandes préoccupations en ce moment. La confiance dans la haute direction est remise en cause.
     Pour rétablir cette confiance et rétablir la confiance dans le système de signalement des cas d'inconduite, s'il faut créer un organisme indépendant de signalement externe, eh bien soit, si c'est ce qu'il faut pour que nos militaires aient confiance dans le système. La confiance dans la chaîne de commandement va être rétablie, étape par étape, parce qu'il n'y a pas qu'un seul commutateur de confiance.
    Madame la présidente, pour faire suite aux commentaires du général Eyre, je pense que nous devons, comme il l'a dit, commencer par écouter et ne pas donner d'ordres. On ne peut pas ordonner le rétablissement de la confiance et on ne peut pas ordonner un changement de culture. Cela ne vient pas du QGDN. Cela doit être construit dans les bases et les escadres à partir des rangs inférieurs de l'armée.
    Nous devons montrer des signes de changement et montrer que nous avons pris acte des problèmes et nous devons agir rapidement pour changer la structure hiérarchique, afin que les plaintes puissent être déposées à l'extérieur de la chaîne de commandement sans diminuer la valeur de celle-ci. N'oublions pas qu'il est indispensable de faire participer à l'élaboration de ces plans les militaires qui agissent au nom des Canadiens et les employés civils de la Défense nationale qui appuient les Forces armées canadiennes tous les jours. Nous devons comprendre et reconnaître que les membres civils sont à la fois victimes et auteurs de ce mauvais comportement. Par conséquent, quoi que nous fassions à l'avenir, nous devrons inclure toute l'équipe de la Défense.
    D'accord. Merci beaucoup.
    Je vais suspendre la séance pendant cinq minutes pour une pause-santé. Je ne sais pas ce que vous en pensez, mais cela fait deux heures que nous discutons. Nous allons suspendre la séance pendant cinq minutes, s'il vous plaît.

  (1255)  


  (1305)  

     Reprenons nos travaux.
     Nous en sommes à la quatrième série de questions, et c'est à vous de parler, madame Alleslev, je vous en prie.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    Monsieur le ministre, dans la lettre de mandat qui vous était adressée en 2015, il était précisé qu'à titre de ministre de la Défense nationale, vous deviez « travailler de concert avec les principaux dirigeants des Forces armées canadiennes à l'établissement et au maintien d'un milieu de travail exempt de harcèlement et de discrimination. » Est-ce bien exact?
    Est-ce que cela comprend la surveillance et l'assurance que les changements nécessaires à apporter aux politiques et aux processus pour y parvenir sont en place?
    Par conséquent, est-ce que cela inclut aussi la responsabilité des particuliers de s'assurer que leur comportement reflète ces politiques et de prêcher par l'exemple?
    Nous devons nous assurer que les gens sont tenus responsables, peu importe leur grade ou leur poste.
    Parfait.
     Ensuite, dans son témoignage, Janine Sherman a déclaré: « Le ministre est consulté lors du programme annuel de gestion du rendement des personnes qui sont nommées par le gouverneur en conseil et qui relèvent de son portefeuille. »
    Vous avez été mis au courant des allégations d'inconduite sexuelle contre le général Vance en 2018. À l'automne 2018, vous avez dit avoir parlé du rendement du général Vance avec le greffier du Conseil privé. Puisque nous savons que le Cabinet a signé l'augmentation de salaire en mai 2019, nous pouvons en conclure que selon vous, le rendement du chef d'état-major de la défense justifiait une augmentation. Est-ce encore exact?
    Madame la présidente, je ne suis pas d'accord avec les déclarations de la députée, et je signale que Mme Sherman a déclaré que les ministres ne fixent pas la rémunération.
    Je n'ai pas parlé de rémunération. J'ai dit que vous avez fait des commentaires, que vous avez exercé une influence, que vous avez été consulté sur le rendement du chef d'état-major et déterminé qu'il justifiait une récompense, quelle qu'elle soit.
    Je me demande simplement, monsieur le ministre, si vous avez dit au greffier du Conseil privé, à l'automne 2018, que M. Vance s'était conformé aux normes et qu'il méritait donc de continuer d'occuper le poste et d'être récompensé pour son rendement?

  (1310)  

    Madame la présidente, non, je n'ai pas dit ce que la députée tient à me faire dire ici. Je réponds aux questions que le greffier me pose chaque année à la fin de l'automne lorsqu'il parle du chef d'état-major de la défense ou, plus important encore, du sous-ministre et du chef du Centre de la sécurité des télécommunications.
    Monsieur le ministre, qu'avez-vous dit au sujet de son rendement? Était-il inférieur aux attentes? Était-il satisfaisant? Était-il extraordinaire? Était-il exceptionnel? Avez-vous soulevé des préoccupations au sujet de la conduite et du rendement du général Vance?
    Madame la présidente, je peux vous dire que j'ai répondu aux questions, mais évidemment, pour des raisons de protection de la vie privée, je ne peux pas entrer dans les détails de cette conversation.
    Monsieur le ministre, vous avez pris la parole à la cérémonie de passation de commandement du général Vance en janvier dernier, et vous l'avez remercié de son aide pour paver la voie vers la dignité et le respect dans les Forces armées canadiennes, ainsi que de sa stratégie en matière d'inconduite sexuelle, et vous l'avez félicité d'avoir créé un environnement plus sûr. Est-ce bien exact?
    Madame la présidente, à l'occasion de tout défilé de passation de commandement, en ma qualité de ministre de la Défense nationale, je parle toujours des membres qui participent à la passation de commandement.
     Monsieur le ministre, j'ai l'impression que pas plus tard qu'en janvier dernier, vous faisiez l'éloge de sa conduite exemplaire et vous étiez entièrement convaincu qu'il était un exemple à suivre pour les militaires.
    Non, madame la présidente. Ce n'est pas ce que j'ai affirmé.
    D'après vos commentaires, les membres des Forces armées canadiennes qui ont entendu ces éloges ne devraient-ils pas croire qu'il était un modèle à suivre?
     Madame la présidente, à titre d'ex-membre des Forces armées canadiennes, elle et vous-même, si je ne m'abuse, madame la présidente, savez que lorsque vous changez de commandement, vous parlez de la personne concernée. C'est exactement ce que j'ai fait, et comme ministre de la Défense nationale, il m'incombe de parler des militaires qui partent et qui arrivent.
    À titre de membre des Forces canadiennes, lorsqu'un ministre de la Défense nationale — le plus haut poste des Forces canadiennes au pays — prend la parole et fait l'éloge d'une personne, un chef d'état-major sortant, pour son comportement, je crois certes, comme membre des Forces canadiennes, que je devrais imiter ce comportement, car c'est un exemple à suivre.
    Êtes-vous en train de dire que je ne devrais pas tenir compte de vos commentaires dans le cadre d'une cérémonie de passation de commandement?
    Madame la présidente, lorsque je prononce une allocution, elle est fondée sur l'information que je connais au sujet d'une personne.
    Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant céder la parole à M. Bagnell.
    Merci beaucoup.
    Avant de passer à ma question principale, qui portera sur l'indépendance, monsieur le ministre, où avez-vous suivi l'entraînement préalable à votre déploiement en 2006?
    C'était à Edmonton.
    Merci.
    En ce qui concerne le problème systémique très grave auquel nous sommes confrontés, qui touche des centaines de membres des Forces canadiennes et du ministère, les experts ont laissé entendre que deux principaux facteurs, à savoir la culture et l'indépendance du processus, sont responsables ou doivent être réglés pour corriger la situation. Félicitations aux membres du Comité qui ont déjà posé des questions sur la culture, et vous avez répondu. Quant à moi, je vais poser des questions au sujet de l'indépendance du processus, et je vais aussi poser des questions à Mme Preston et au général Eyre.
     Monsieur le ministre, de nombreux membres du milieu de la défense préconisent la création d'un organisme indépendant qui ferait rapport au Parlement. Qu'en pensez-vous?

  (1315)  

    Madame la présidente, je me réjouis de l'existence des instances indépendantes. En fait, il existe un certain nombre d'instances indépendantes qui rédigent des rapports sur les actions non seulement des militaires, mais aussi du Centre de la sécurité des télécommunications.
    Pour le gouvernement, il est extrêmement important de rendre des comptes aux Canadiens, et l'indépendance des instances qui se penchent sur divers dossiers est essentielle, puisqu'elle nous permet de nous assurer que nous allons dans la bonne direction. Ce qui est encore plus important, c'est qu'elle assure un examen indépendant qui nous permet de déterminer où nous avons peut-être oublié quelque chose, de sorte que nous pouvons envisager d'améliorer les processus ou d'affecter les ressources là où se trouvent les besoins.
    En plus de l'indépendance du Parlement, nous devons examiner le travail qui doit être fait au sein des Forces armées canadiennes. À l'heure actuelle, nous nous penchons également sur le type d'indépendance dont nous avons besoin à l'interne, afin de rebâtir la confiance de nos membres.
    Merci.
    Madame Preston, je pense qu'on a laissé entendre que le Centre d'intervention sur l'inconduite sexuelle, le CIIS, pourrait être encore plus indépendant. Avez-vous des commentaires à faire sur la façon dont cette indépendance pourrait être accrue?
    Je réfléchis à l'indépendance du CIIS au moins une fois par semaine, et je le fais depuis que j'ai commencé au Centre, parce que c'est très compliqué. Notre groupe a été mis sur pied de façon structurelle, en ce qui concerne mes rapports hiérarchiques, conformément à ce que Mme Deschamps a recommandé, mais on ne nous a pas confié la totalité du mandat que Mme Deschamps voulait nous confier. Par conséquent, cela a miné notre capacité de nous acquitter de certains aspects de notre mandat de façon aussi indépendante qu'elle l'avait imaginé.
    Il est tout à fait possible de passer notre cadre de gouvernance en revue, que nous continuions de faire rapport au ministère ou à l'extérieur de celui-ci. Il est essentiel d'examiner le mandat lorsqu'on se penche sur la structure particulière ou la forme qu'il prendra. Il se peut que certaines des fonctions que le CIIS exerce actuellement devraient raisonnablement être maintenues au sein du ministère en raison de la nécessité de travailler en étroite collaboration avec les gens. Cependant, il se peut fort bien que d'autres aspects de notre mandat, surtout s'ils sont améliorés de la façon envisagée par Mme Deschamps, soient mieux exécutés par une entité plus indépendante.
    Tout cela pour dire qu'il est important que le tout fasse l'objet d'un examen plus approfondi.
    Merci. Je pense que ce serait un excellent point à aborder dans notre rapport final.
    Général Eyre, je crois que vous en avez déjà parlé, et c'est tout à votre honneur, mais dites-nous simplement ce que vous avez dit au sujet de la modification des systèmes pour qu'ils soient plus indépendants.
    Je pense que ce qui est important ici, c'est l'effet à créer. À l'heure actuelle, il faut que les victimes aient confiance dans le système.
    Vous remarquerez qu'il y a un quart de siècle, dans le rapport sur la Somalie, l'une des recommandations voulait qu'il y ait un inspecteur général indépendant, et nous nous y sommes opposés. Or, je pense que l'époque où nous reculions est révolue, et qu'il est impérieux de rétablir cette confiance.
    Merci.
     Comme je crois que mon temps est presque écoulé, je vais céder la parole à quelqu'un d'autre.
    Oui, votre temps est écoulé, monsieur Bagnell.
    Merci beaucoup.

[Français]

     Monsieur Barsalou-Duval, vous avez la parole.
    Je vous remercie, madame la présidente.
    Avec le temps, on a appris que, lorsque l'ancien ombudsman, M. Walbourne, s'est adressé à vous, monsieur le ministre Sajjan, vous avez transféré l'information au Bureau du Conseil privé. Celui-ci a communiqué avec l'ombudsman, qui a refusé de lui transmettre de l'information parce que, dans la chaîne de commandement, le bureau de l'ombudsman ne relève pas du Bureau du Conseil privé, mais plutôt du ministre de la Défense nationale. Il ne peut donc pas transférer au Bureau du Conseil privé de l'information de nature confidentielle, par exemple. Or il n'y a pas eu d'enquête, finalement. On s'est donc retrouvé dans un cul-de-sac.
    Trouvez-vous normal que, finalement, le cul-de-sac ait été votre bureau?

[Traduction]

    Madame la présidente, les nominations par le gouverneur en conseil sont gérées par le Bureau du Conseil privé, et non par les ministres. Dans ce cas-ci, étant donné que l'information a été fournie au sujet d'une nomination par le gouverneur en conseil, je voulais m'assurer que l'information — soit dit en passant, cette information est fournie par un ombudsman qui connaît le processus, parce que c'est à ce moment-là qu'ils sont sélectionnés pour le poste... Je voulais m'assurer que l'indépendance serait maintenue pour que... Comme je ne savais pas à ce moment-là qui était cette personne, de quel genre d'allégations il s'agissait, je voulais m'assurer qu'elle était traitée de façon appropriée et indépendante, et c'est pourquoi le dossier a été transmis au Bureau du Conseil privé.
    Donc, non. À titre de ministre, oui, je suis responsable des Forces armées canadiennes. Le chef d'état-major de la défense relève de moi en ce qui concerne la Loi sur la défense nationale. Toutefois, la nomination et la gestion des nominations par le gouverneur en conseil, comme celle du chef d'état-major de la défense, ne relèvent pas du ministre de la Défense nationale, mais bien du Bureau du Conseil privé. Je crois que Mme Sherman en a déjà parlé.

  (1320)  

[Français]

    Monsieur le ministre, au fond, le bureau de l'ombudsman n'a pas le pouvoir de mener une enquête.
    On a demandé au lieutenant-colonel Éric Leblanc si le fait que vous vous adressiez au Service national des enquêtes des Forces armées canadiennes pour lui signaler un problème et lui demander de faire une enquête aurait constitué de l'ingérence. Il nous a dit que non et que ce serait seulement le cas si vous décidiez de vous impliquer personnellement dans le processus d'enquête. En fin de compte, il n'y a pas eu d'enquête.
    Qu'est-ce qui vous empêchait de le faire? Cela n'aurait-il pas été la bonne approche?

[Traduction]

    C'est une très bonne question. Permettez-moi de préciser.
    Si un citoyen lambda donnait de l'information, ce serait une autre histoire. Dans ce cas, on parle de l'ombudsman, dont les directives précisent à qui l'information peut être transmise, et le juge-avocat général peut en fait vous fournir ces renseignements à ce sujet, au grand prévôt, au juge-avocat général également, et cela peut aussi être transmis au Service national des enquêtes. Le juge-avocat général pourra apporter des précisions si quelque chose m'a échappé.
    Dans ce cas-ci, comme il s'agit d'une nomination par le gouverneur en conseil, le traitement de l'information est extrêmement important. Je comprends ceux qui remettent en question ce que j'aurais dû faire, mais je vous le dis, je voulais m'assurer que l'information, quelle qu'elle soit, était traitée de façon indépendante, de sorte qu'au bout du compte, si jamais elle se retrouvait devant les tribunaux, il n'y a aucune raison pour laquelle une personne pourrait s'en tirer. Je voulais m'assurer que l'intégrité du processus soit protégée. En fait, j'ai été plus prudent que la moyenne en m'assurant de cela.
     Merci.
    Monsieur Garrison, vous avez la parole.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    Monsieur le ministre, je veux revenir sur la façon dont vous saviez qu'il y avait une possibilité d'enquête criminelle lorsque vous avez refusé d'examiner la preuve. Si vous n'avez pas examiné la preuve, comment auriez-vous pu savoir que vous protégiez l'intégrité d'une éventuelle enquête criminelle?
    Madame la présidente, c'est une excellente question. Il s'agit de s'assurer que si un dossier fait l'objet d'une enquête, vous devez pouvoir supposer que quelque chose pourrait arriver à un point... Je ne peux pas présumer tout de suite que ce ne sera peut-être pas le cas. Cela aurait pour effet de préjuger de la personne qui s'est présentée et aussi de l'information. Ce que je voulais faire, peu importe l'information, c'est m'assurer de donner des pouvoirs à la personne pour qu'elle puisse les fournir à un organisme indépendant, de sorte qu'au cas où il y aurait une enquête, elle pourrait être protégée.
    C'est ce que vous devez faire pour vous assurer... On ne peut pas supposer que cela n'ira nulle part. Je préférais être prudent, de façon à ce que cela puisse donner lieu à une enquête qui pourrait aboutir devant les tribunaux... Je voulais m'assurer que tout le processus serait protégé.
    Eh bien, que nous soyons d'accord ou non sur cet aspect de votre travail, il y a un autre aspect aux fonctions du ministre de la Défense, et c'est de s'assurer que le chef d'état-major de la défense est un chef qui respecte les normes les plus élevées et dont la conduite est irréprochable. Ce n'est pas un emploi dans lequel on est automatiquement promu. C'est un poste pour lequel vous êtes sélectionné en raison de vos capacités de leadership. De toute évidence, le général Vance est resté au-delà du nombre normal d'années à titre de chef d'état-major de la défense.
     Ne vous est-il jamais venu à l'esprit que, compte tenu des préoccupations relatives à l'inconduite sexuelle dans l'armée, un autre chef d'état-major de la défense aurait pu assurer un meilleur leadership à ce moment-là que le général Vance, étant donné que vous étiez au courant des allégations d'inconduite sexuelle?

  (1325)  

    Tout d'abord, l'information qui a été fournie... Parce que, madame la présidente, nous parlons en rétrospective de ce que nous savons, de l'information qui a été fournie, ce qu'il est important de dire ici, comme je l'ai déjà précisé, c'est qu'il faut suivre le processus réel, et c'est exactement ce qui a été fait.
    En vertu de la Loi sur la défense nationale, j'ai la responsabilité d'assurer la direction des Forces armées canadiennes par l'entremise du chef d'état-major de la défense, n'est-ce pas? Pour ce qui est de la gestion du processus, les nominations par le gouverneur en conseil se font en fait par l'entremise du Bureau du Conseil privé.
    Merci beaucoup.
    Madame Gallant, vous avez la parole.
    Merci, madame la présidente.
     Madame la présidente, je m'adresse au ministre. Vous a-t-on jamais dit que Gary Walbourne avait refusé de fournir l'information au Bureau du Conseil privé?
    Madame la présidente, pour répondre à la question, je lui ai demandé à plusieurs reprises s'il y avait des mises à jour ou d'autres mesures à prendre. C'est un certain nombre de mois plus tard, je crois, que j'ai appris qu'aucune autre information n'avait été fournie et qu'aucun suivi ne pouvait être fait par le Bureau du Conseil privé dans ce cas.
    Lorsque cette question vous a été soumise, avez-vous demandé au conseiller à la sécurité nationale quelles mesures il fallait prendre ou quelle était la possibilité qu'il puisse y avoir un problème...?
    Madame la présidente, je suis désolé. Je ne comprends pas la question.
    Lorsque des allégations ont été faites au moment de la nomination du chef d'état-major de la défense, le conseiller à la sécurité nationale a été interrogé sur la possibilité qu'il y ait eu des communications inappropriées. Avez-vous fait cela? Avez-vous consulté le conseiller à la sécurité nationale?
    Non, madame la présidente. Comme je l'ai dit, j'ai transmis l'information au Bureau du Conseil privé pour qu'il prenne une décision.
    Je pense que dans ce cas-ci, la députée confond peut-être les deux questions, parce qu'en 2015, une enquête a été lancée sous le gouvernement précédent à laquelle a participé le conseiller à la sécurité nationale.
     Dans ce cas-ci, le dossier a été transmis aux personnes compétentes au Bureau du Conseil privé. Ces personnes devaient ensuite décider à qui exactement l'information devait être transmise, que ce soit au conseiller à la sécurité nationale, au SNEFC ou à la GRC. Cela devait se faire de façon indépendante.
    Merci beaucoup, monsieur le ministre.
    Le 19 février, vous avez dit que les allégations contre le général Vance faisaient actuellement l'objet d'une enquête du SNEFC. S'il s'agit de l'autorité compétente pour les enquêtes, pourquoi avez-vous transmis les allégations au Bureau du Conseil privé en mars 2018 au lieu de consulter directement le SNEFC?
    Madame la présidente, dans ce cas-ci, tout d'abord, l'ancien ombudsman aurait pu s'adresser directement au SNEFC, mais parce que l'information que l'ombudsman avait... Je voulais m'assurer que l'information serait examinée par une instance indépendante, afin qu'elle puisse être communiquée exactement là où elle devait l'être...
     Monsieur le ministre...
    ... sans aucun risque d'ingérence politique.
    Le 12 mars, vous avez dit avoir informé M. Walbourne exactement de ce qu'il fallait faire. Vous avez dit qu'il devrait utiliser les pouvoirs et les processus existants pour traiter la plainte. Si le SNEFC est la seule instance d'enquête publique, pourquoi ne lui avez-vous pas dit de s'adresser à lui, plutôt que de transmettre l'information directement au Bureau du Conseil privé? Ce dernier doit-il s'occuper des enquêtes que vous voulez cacher au public?
    Madame la présidente, je m'inscris en faux contre la dernière affirmation de la députée.
    Cependant, je lui ai demandé pourquoi il ne s'était pas adressé au SNEFC. Quel que soit le grade ou le poste et... cela ne devrait même pas accompagner... pour que cela puisse se faire indépendamment d'un ministre.
    Dans ce cas-ci, parce que nous avons pris la question très au sérieux, plutôt que d'attendre de voir si l'ancien ombudsman irait... En fait, j'ai présenté l'information au Bureau du Conseil privé, par l'entremise de ma cheffe de cabinet, pour m'assurer qu'un suivi adéquat soit fait afin qu'on ne puisse jamais voir que...
    Merci, monsieur le ministre.
    En ce qui concerne...
    Madame, laissez-le finir sa phrase, s'il vous plaît.
    Merci, madame la présidente.
    ... pour que cela ne puisse jamais, au grand jamais, donner l'impression que quelqu'un a gardé l'information secrète. Je voulais m'assurer que le processus était adéquat, mais en même temps assurer aussi la transparence, afin que l'information puisse être transmise aux autorités compétentes pour que...
    Madame la présidente, nous avons déjà entendu cette partie de la réponse.
    En ce qui concerne l'inconduite sexuelle, s'applique-t-elle aux soldats des Forces armées canadiennes qui sont entraînés à l'étranger? Les stagiaires d'autres pays sont-ils assujettis aux mêmes règles sur l'inconduite sexuelle que les membres des Forces armées canadiennes?

  (1330)  

    Madame la présidente, la députée pourrait-elle préciser sa question? Dans quel contexte? De quelles autres armées parle-t-elle?
    En 2018, des plaintes ont été portées à votre attention au sujet de stagiaires, de gens que les FAC entraînaient, qui montraient sur leurs téléphones cellulaires des vidéos d'eux-mêmes violant des civils. Je veux simplement savoir si les règles qui s'appliquent aux Forces armées canadiennes s'appliquent également aux personnes qu'elles entraînent dans le cadre de leur mission?
    Madame la présidente, la députée vient de dire qu'on m'a montré une vidéo. Je veux que ce soit très clair...
    Non, ce n'est pas ce que j'ai dit. J'ai dit qu'on avait montré des vidéos aux soldats.
    Je n'ai pas...
    Je pense que nous en avons terminé sur ce point.
    Je peux vous assurer que tout le monde est tenu de rendre des comptes, peu importe de qui il s'agit.
    Nous allons maintenant céder la parole à M. Baker.
    Merci, madame la présidente.
    Monsieur le ministre, ma première question s'adresse à vous. Lorsque l'ancien ombudsman vous a rencontré en 2018 pour vous dire qu'il y avait des allégations concernant le général Vance, je crois comprendre que vous avez indiqué ici, au Comité, que le Bureau du Conseil privé et le Cabinet du premier ministre en ont été immédiatement avisés.
    Les membres du Comité ont indiqué aujourd'hui que le premier ministre était au courant de ces allégations. Je voulais simplement vous demander de le confirmer. Le premier ministre était-il au courant de ces allégations?
    Madame la présidente, comme je l'ai déjà dit, le premier ministre a appris les détails des allégations dans les médias. Toutefois, il savait que son bureau avait été mis au courant dès 2018 des mesures qui avaient été prises.
    Merci.
    Ma prochaine question s'adresse au lieutenant-général Eyre.
    Lieutenant-général, il y a d'énormes répercussions sur la santé reproductive des femmes en raison de l'environnement dans lequel elles doivent souvent servir. Par exemple, il y a des taux plus élevés de fausses couches et d'infertilité qui ne sont souvent pas reconnus. L'une des façons de régler ce problème est d'augmenter les dépenses en recherche et développement pour comprendre les répercussions sur les femmes et la façon dont nous nous y attaquons.
    Êtes-vous d'accord pour que les Forces armées canadiennes s'attaquent à ce problème? Dans l'affirmative, comment y arriver?
    Oui, je suis tout à fait d'accord pour dire que nous devons élargir la portée de nos programmes pour la santé des femmes.
    Dans le cadre de la phase d'écoute de notre approche, nous entendons sans cesse dire que nous devons élargir la gamme des soins et du soutien médical que nous offrons aux femmes en uniforme. Nous devons nous pencher sur des questions comme le congé de deuil dans les cas de fausse couche. Nous devons nous assurer que nos médecins ont les compétences et les connaissances nécessaires pour mieux soigner nos collègues de sexe féminin.
     Merci beaucoup.
    Si vous me le permettez, j'aimerais revenir sur un sujet dont je n'ai pas eu l'occasion de parler avec vous au cours de ma dernière série de questions, c'est-à-dire les différentes tailles d'équipement et de vêtements qui ne sont pas normalement en stock dans les bases.
    Je sais, lieutenant-général, que vous avez parlé de cette question, mais nous avons été interrompus. J'aimerais revenir sur le fait que, dans bien des cas, du moins à l'heure actuelle, lorsque du matériel différent est nécessaire, le paiement est effectué à même un budget de base ou un budget local. Je vous prie de m'excuser — je ne connais pas toutes les structures, mais ce que je comprends, c'est que le paiement provient d'un budget de base.
    Ce coût pose un défi pour l'intégration, parce qu'il faut prendre des décisions pour dépenser cet argent au niveau local, et c'est ce que j'ai entendu de la part des membres qui ont servi dans les Forces armées canadiennes.
    Je vous demande donc si vous appuyez cette façon de procéder et quelles mesures vous prendriez pour vous assurer qu'elle ne constitue plus un obstacle. Autrement dit, y aurait-il un budget distinct pour s'assurer que cet équipement puisse être acheté sans nuire aux budgets de fonctionnement locaux de la base?
    Tout d'abord, la partie de l'équation qui concerne l'argent relève du sous-ministre, mais je dirai que l'achat d'uniformes et d'équipement provient d'un budget national pour l'approvisionnement national, ce qui cause un certain stress, mais nous ne cessons d'insister pour que les sommes nécessaires soient investies dans les uniformes et l'équipement.

  (1335)  

    J'aimerais simplement souligner que j'ai entendu dire que c'est un élément important pour déterminer comment nous pouvons intégrer plus efficacement les femmes dans les forces armées.
    Madame la présidente, combien de temps me reste-t-il?
    Il ne vous en reste plus. Désolé, monsieur Baker.
    Merci.
    Nous passons maintenant à M. Benzen.
    La parole est à vous.
    Merci, madame la présidente.
    Monsieur le ministre, après votre rencontre avec Gary Walbourne le 1er mars 2018, il a présenté plus d'une douzaine de demandes de rencontre avec vous, qui ont toutes été rejetées.
    Pouvez-vous nous expliquer pourquoi aucune de ces réunions n'a eu lieu et pourquoi les demandes ont été rejetées?
    Madame la présidente, il est important de signaler que je n'ai pas rejeté les demandes de réunion. Il est également important de noter que l'ex-ombudsman avait donné sa lettre d'intention de démissionner et qu'il était en congé de maladie pendant cette période. Non, je n'ai pas refusé de rencontrer l'ombudsman. J'ai rencontré régulièrement l'ombudsman chaque fois que l'occasion se présentait afin de discuter d'un certain nombre de sujets.
    L'avez-vous rencontré, lui avez-vous parlé ou avez-vous communiqué avec lui après le 1er mars 2018?
    Pas même par courriel? Il n'y a eu aucune communication?
    Aucune communication directe, mais mon ex-cheffe de cabinet a communiqué avec l'ex-ombudsman au sujet des allégations à quelques reprises.
    Elle a communiqué avec lui et lui a demandé s'il y avait des progrès, si quelque chose se passait, ce que vous pouviez faire pour l'aider. Est-ce bien exact?
    C'était pour fournir l'information dont il m'avait parlé au Bureau du Conseil privé afin que les mesures qui s'imposaient puissent être prises.
    Il a pourtant dit qu'il ne vous a jamais demandé de transmettre l'information à qui que ce soit.
    Il était allé vous voir et vous avait demandé de lui répondre personnellement, et de lui donner une orientation claire sur la façon de procéder.
    Il a dit avoir été estomaqué quand le Conseil privé l'a appelé pour lui poser des questions à ce sujet; il ne s'attendait pas à ce que vous en parliez à qui que ce soit. Au départ, il voulait simplement que vous réfléchissiez à la façon dont cette situation très explosive pourrait être traitée de manière à protéger la personne qui la présente. Il a été surpris lorsqu'il a reçu cet appel, mais vous ne lui en avez pas parlé personnellement, et cela était en quelque sorte contradictoire... En fait, ce n'était pas exactement contradictoire, mais ce n'était tout simplement pas ce à quoi il s'attendait.
    Vous attendiez-vous à avoir une autre conversation avec lui à ce sujet?
     Tout d'abord, il n'est pas question de confidentialité lorsqu'on parle du chef d'état-major de la Défense. Je pense qu'il serait tout à fait inapproprié pour un ministre, et ce l'aurait été pour moi à ce moment-là, de garder un secret et ainsi nuire à un certain processus. Je pense qu'il est très important pour notre gouvernement, et ce sera le cas pour tout gouvernement futur, si des renseignements sont fournis au sujet d'une nomination par le gouverneur en conseil, qu'ils soient immédiatement communiqués à des fonctionnaires indépendants afin que les mesures qui s'imposent puissent être prises. C'est exactement ce qui s'est produit.
    Il est intéressant de vous entendre dire cela, parce que ce qui s'est passé en fin de compte, c'est que tout cela est justement resté secret. Ce secret n'a jamais été dévoilé. Il n'a jamais fait l'objet d'une enquête, parce que la personne qui s'est manifestée devait comprendre qu'il fallait une certaine forme de protection. À cause de la chaîne de commandement et de tout ce qui se passe, des représailles et de tout ce qui se passe dans cet environnement toxique, il n'était pas sécuritaire de communiquer cette information. L'information était là. Il y avait des preuves. M. Walbourne détenait cette information, mais vous n'avez jamais vu cela. Je comprends et je respecte cela.
    Il y avait cette impression qu'il allait falloir trouver un moyen de révéler ce secret, et c'est la position dans laquelle vous vous trouviez. À titre de ministre, vous avez dû trouver le moyen de faire connaître ce secret tout en préservant et en protégeant cette personne et cette intégrité, et en veillant à ce que l'ensemble de nos forces armées et l'intégrité de ces forces soient protégées.
    Comment y êtes-vous arrivé?

  (1340)  

    C'est une excellente question et c'est exactement ce à quoi j'ai essayé de répondre. Plutôt que de demander à un ministre, un politique, de gérer un tel dossier, nous nous sommes assurés, dans ce cas-ci, que le Bureau du Conseil privé, les responsables des nominations par le gouverneur en conseil, reçoivent ce document et puissent voir exactement quel serait le processus à adopter pour le gérer et aussi pour travailler avec l'ombudsman pour essayer de trouver une façon de faire confiance à la personne et de travailler avec elle. Je crois que, d'après le témoignage qui a été présenté, cela a déjà été expliqué.
    Merci beaucoup.

[Français]

     Monsieur Robillard, vous avez la parole.
    Je vous remercie, madame la présidente.
    Monsieur le ministre, vous avez dit à plusieurs reprises que toutes les options étaient sur la table afin de résoudre les problèmes actuels auxquels font face les Forces armées canadiennes.
    Qu'est-ce que cela signifie exactement?

[Traduction]

    Madame la présidente, lorsque je dis que toutes les options sont sur la table, nous ne devons rien laisser au hasard. Le premier aspect, qui est le plus troublant, c'est qu'un membre n'était pas sûr de pouvoir se manifester, à cause de la chaîne de commandement. Nous devons faire preuve d'indépendance et donner aux membres l'assurance de pouvoir se manifester. Nous devons nous pencher sur cet aspect au sein des Forces armées canadiennes, et nous devons aussi examiner un système externe. Ce problème systémique est beaucoup plus important que celui des Forces armées canadiennes. Il y a donc cet aspect à considérer. Comme le chef d'état-major de la Défense par intérim vient de le mentionner, nous envisageons actuellement un poste d'inspecteur général à cet égard, mais comment serait-il structuré?
    Je ne veux pas faire une annonce pour le simple plaisir de dire que nous avons fait quelque chose. Je veux voir ce qui va réellement entraîner ce changement de culture. Par exemple, d'après ce que nous ont dit nos survivants et les membres qui ont servi dans les Forces armées canadiennes et qui servent actuellement, nous devons examiner où doit se produire le changement de culture, et c'est aux échelons inférieurs. Comment pouvons-nous nous assurer qu'aux plus bas échelons, nous choisissons les bons dirigeants? Devons-nous envisager — et je pose la question pour la forme — des entrevues tous azimuts? Nous devons examiner non seulement le rendement de la personne, mais aussi déterminer si elle exerce un ascendant et si elle est apte à commander. Nous devons nous demander de quel type de personne il s'agit et nous assurer que, lorsque quelqu'un doit prendre le commandement d'une unité ou commander un navire ou même un escadron, il doit obtenir ce commandement.
    Des entrevues tous azimuts, des évaluations d'unité et, plus important encore, la formation qui s'impose, doivent être effectués de sorte qu'à partir du moment où quelqu'un se joint à l'équipe, peu importe ses opinions, on s'attend à ce que tout le monde sache clairement ce qui doit être fait. Plus important encore, si un problème survient, à qui peut-on s'adresser pour obtenir le bon soutien, mais aussi pour obtenir justice?

[Français]

     Docteure Preston, selon vous, à quoi ressemble un changement de culture au sein des Forces armées canadiennes?

[Traduction]

    Madame la présidente, le changement de culture est un concept très vaste. De façon très générale, cela suppose un changement d'attitude, de valeurs et de croyances chez les membres. De plus, pour ramener cela à un niveau individuel, il faut modifier le comportement des membres en ce qui concerne la façon dont ils se traitent les uns les autres au niveau individuel. Mais il passe aussi par des politiques, des processus et des programmes qui sont disponibles au sein d'une organisation. La réalité, c'est que l'on ne changera jamais tous les membres des Forces armées canadiennes pour qu'ils aient toujours les mêmes valeurs, attitudes et croyances. Ce qu'il faut faire, c'est créer un environnement qui rend tout à fait inacceptable le type de comportement nuisible qu'ils adoptent les uns envers les autres. Si une personne choisit de ne pas contrôler son comportement, l'environnement doit le contrôler pour elle et les conséquences doivent arriver sans tarder. Il faut adopter une approche descendante qui tient compte des personnes, de la culture, des valeurs et des attitudes, mais il faut aussi examiner la question du début à la fin. Il faut voir qui sont les membres qui arrivent, comment ils sont endoctrinés, ce qui leur arrive au cours de leur carrière, comment le leadership est développé, comment les leaders dirigent et ce qui est promu ou récompensé. Lorsque les choses tournent mal — parce que cela est inévitable —, il faut mettre en place les politiques et les processus appropriés pour que les membres sachent à qui s'adresser, que les réponses soient rapides, que les membres soient traités avec compassion, que les choses soient réglées efficacement et, en fin de compte, que l'on garde en poste les gens et qu'ils demeurent des membres productifs des forces armées. Pour moi, c'est à cela que doit ressembler le changement de culture.

  (1345)  

    Merci beaucoup.

[Français]

    Monsieur Barsalou-Duval, vous avez la parole.
    Je vous remercie, madame la présidente.
    Monsieur le ministre, vous nous avez beaucoup parlé de responsabilité ministérielle, aujourd'hui. C'est la raison que vous avez évoquée pour expliquer pourquoi votre personnel n'aurait pas le droit de témoigner devant ce comité. Pourtant, vous avez refusé toute responsabilité quant aux raisons pour lesquelles il n'y a pas eu d'enquête sur le général Vance et pour lesquelles il est resté en place pendant des années, malgré les allégations qui pesaient contre lui.
    C'est sous votre gouvernement que l'opération Honneur a été un échec, on va se le dire. C'est aussi sous votre gouvernement que l'affaire entourant l'amiral McDonald a vu le jour, tout comme l'affaire entourant la personne responsable des ressources humaines au sein des Forces armées canadiennes.
    Compte tenu de tous ces éléments qui s'accumulent, est-ce que vous pensez que cette responsabilité ministérielle, théoriquement, devrait s'appliquer à vous?
    Acceptez-vous la responsabilité de toutes ces situations?

[Traduction]

    Permettez-moi d'être très clair. Depuis que je suis devenu ministre de la Défense nationale, ma priorité a toujours été de mettre l'accent sur nos membres et de veiller à assurer un environnement inclusif, peu importe la couleur de la peau, l'orientation sexuelle ou le sexe d'une personne. Je me suis enrôlé en 1989, au moment où on commençait à intégrer les femmes au combat. J'ai vu certaines des difficultés auxquelles elles ont été confrontées directement. C'est pourquoi, lorsque nous avons commencé les consultations au sujet de notre politique de défense, nous avons dit très clairement que nous voulions nous concentrer sur nos membres. C'est exactement ce que nous avons fait. Les changements que nous avons apportés font partie de ces progrès. Nous savions que nous ne pourrions pas tout réussir du premier coup. Nous savions à l'époque, et nous en avons discuté il y a de nombreuses années, qu'il y avait des survivants au sein des Forces armées qui ne s'étaient pas manifestés. Nous avons dit que nous voulions qu'ils se manifestent et que nous allions nous occuper d'eux.
    Comme madame Preston l'a dit, nous voulons nous assurer de les habiliter. C'est pourquoi nous avons adopté le projet de loi C-77, que le gouvernement précédent avait laissé mourir au Feuilleton. C'est aussi pourquoi nous avons affecté des ressources et apporté des changements aux politiques pour nous assurer...

[Français]

    Merci beaucoup, monsieur le ministre.
    Cependant, ce que je vous ai demandé, c'est si vous acceptiez la responsabilité des échecs de votre gouvernement.

[Traduction]

    J'ai bien peur que votre temps soit écoulé.
    Nous passons maintenant à M. Garrison.
    La parole est à vous.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    J'aimerais reprendre là où M. Barsalou-Duval s'est arrêté et parler de l'échec de l'opération Honour.
    Monsieur le ministre, il est clair que l'opération Honour n'a pas permis d'atteindre l'objectif visé, qui était d'éradiquer l'inconduite sexuelle dans l'armée canadienne et de provoquer le changement de culture qui s'imposait. Nous avons parlé, au début, de la responsabilité ministérielle.
    Qui est responsable de l'échec de l'opération Honour? Est-ce l'ex-chef d'état-major de la Défense, le général Vance, ou est-ce vous, à titre de ministre, qui devriez assumer la responsabilité en vertu du concept de responsabilité ministérielle?
     Absolument, pour tout ce qui se passe au ministère, malgré les difficultés auxquelles nous avons fait face, je prends la responsabilité ministérielle très au sérieux. En ce qui concerne les défis que nous avons... L'opération Honour est devenue une affaire de nom et d'individu, mais ce dont nous avons besoin, c'est d'un effort d'équipe complet, et c'est exactement ce que nous faisons. Lorsque de telles situations se produisent, il ne s'agit pas de fuir les problèmes; il faut avancer et apporter les changements nécessaires, et c'est exactement ce que nous faisons.
    Les défis auxquels nous sommes confrontés aujourd'hui en raison de la grande médiatisation des allégations... Nous savons que des gens souffrent, et nous nous sommes engagés dès le départ à créer un environnement inclusif. J'ai parlé à beaucoup d'entre vous, y compris au député, madame la présidente, et nous n'allons pas nous arrêter là.
    Oui, je suis responsable de ce qui se passe, mais je vais m'assurer que nous maintenons ces progrès et que nous maintenons ce qui a fonctionné dans le cadre de l'opération Honour, mais je vais aussi voir comment nous pouvons accélérer le changement nécessaire. J'ai entendu de très bons exemples, et ce que nous devons maintenant faire, c'est déterminer exactement comment ces recommandations vont fonctionner et, plus important encore, comment nous allons pouvoir mesurer les résultats et ne pas simplement annoncer que le processus est terminé. Nous devons être en mesure d'être assez souples pour que tout ce que nous mettons en place puisse survivre à un gouvernement et à des ministres, de sorte que le changement ne puisse pas régresser et qu'il puisse toujours se poursuivre, parce que la société va évoluer et que les Forces armées canadiennes doivent continuer d'évoluer avec elle.

  (1350)  

    Monsieur le ministre, vous êtes donc d'avis, rétrospectivement, que vous n'aviez pas à agir différemment et à faire autre chose que de confier cette affaire au Bureau du Conseil privé. Si c'est le cas, il me semble que vous vous déchargez de votre responsabilité ministérielle sur les épaules du premier ministre. Le chef d'état-major de la défense est resté en poste pendant trois ans après qu'une allégation d'inconduite sexuelle ait été soulevée, et aucune enquête n'a été menée. Si ce n'était pas vous, en vertu de la responsabilité ministérielle, n'était-ce pas le premier ministre qui en était responsable? Cela n'a-t-il pas une incidence sur la confiance que les femmes qui servent dans les Forces canadiennes peuvent avoir à l'égard de leur capacité de servir également?
    Madame la présidente, n'en déplaise au député, comme je l'ai dit, le premier ministre n'était pas au courant. Aucun politicien, qu'il s'agisse du premier ministre ou d'un ministre, ne participe à une enquête. Madame la présidente, c'est notre premier ministre qui a nommé le premier Cabinet composé à 50 % de femmes, qui a mis l'accent sur les choses...
    ... mais qui n'a rien fait.
    Madame la présidente, puis-je répondre à la question, s'il vous plaît?
    Vous avez répondu à la question en...
    J'essaie de répondre à la question.
    Répondez à la question, s'il vous plaît.
    La question ne porte pas sur le féminisme du premier ministre.
    Madame la présidente, il m'a posé une question au sujet du premier ministre, et j'essaie de répondre à la question.
    En ce qui concerne les ressources, le premier ministre était d'accord pour que les Forces armées canadiennes obtiennent 63 milliards de dollars de plus, alors que le parti du député va voter sur la question de savoir si nous devrions avoir des Forces armées canadiennes. Pour être honnête...
    Merci beaucoup. Le temps est écoulé.
    Monsieur Bezan, vous avez la parole.
    Merci, madame la présidente.
    Je tiens à remercier mon collègue, M. Garrison, de ses questions.
    Je peux vous dire, monsieur le ministre, que vous ne semblez pas du tout vous excuser de ce qui s'est passé. Vous êtes confronté à ce problème, surtout depuis 2018, et le général Eyre a parlé de la perte de confiance dans le leadership des Forces armées canadiennes, y compris vous-même en votre qualité de ministre.
    Monsieur le ministre, regrettez-vous d'avoir laissé le général Vance diriger l'opération Honour?
    Madame la présidente, je comprends où le député veut en venir. Chaque fois qu'un membre des Forces armées se rend coupable d'inconduite, c'est extrêmement douloureux. J'aimerais que nous puissions accélérer immédiatement le processus pour réparer les torts causés. Une chose que j'ai faite dès le début, c'est m'assurer que, peu importe la nature de l'inconduite, nous mettions les bonnes ressources à la disposition de notre personnel, et c'est exactement ce que nous avons fait.
    Regrettez-vous, monsieur le ministre, d'avoir laissé le chef d'état-major Vance en charge de l'opération Honour?
    Madame la présidente, avec le recul, si j'avais su ce que je sais, les choses seraient évidemment très différentes. En ce qui concerne l'opération...
    Vous saviez, en 2018, qu'il y avait une allégation. Vous saviez qu'il y avait une allégation contre le général Vance et vous l'avez quand même laissé en charge de l'opération Honour.
    Madame la présidente, si le député veut aller sur ce terrain-là, vous étiez au courant de quelque chose en 2015. Bien sûr, tout ce que je peux faire, c'est suivre le processus approprié...
    Donc...
    Le député sait qu'il y a eu une enquête en 2015. J'assume la responsabilité de ce qui...
    Donc, vous vous contentez de changer de sujet
    Monsieur Bezan, veuillez laisser le témoin répondre à la question.
    J'assume la responsabilité du travail que nous devons faire et je le prends très au sérieux, madame la présidente. Je me suis assuré que nous mettions en place les bonnes ressources et que nous changions les politiques. Nous avons fait certains progrès, même si ce n'est pas encore les progrès dont nous avons tous besoin, que nous voulons et que méritent nos militaires. Nous avons encore beaucoup de travail à faire.
     Nous avons entendu...
    Je vais être honnête avec vous.
    Oui, j'assume la responsabilité du travail qui se fait dans les Forces armées canadiennes. Plus important encore, c'est l'une des raisons pour lesquelles nous travaillons plus fort.
    Monsieur le ministre, vous parlez d'essayer d'agir. Gary Walbourne, l'ancien ombudsman militaire, a encore parlé, la semaine dernière, dans les médias de l'incapacité de dégager la piste pour que la plaignante puisse se manifester. Elle a retiré sa plainte parce que vous n'avez pas fourni les conditions dans lesquelles elle pouvait se manifester sans ingérence de la chaîne de commandement.
    Regrettez-vous de ne pas avoir pris d'autres mesures pour veiller à ce que les allégations de la plaignante soient présentées dans le cadre d'un processus exempt d'ingérence de la part du chef d'état-major de la défense?
    Madame la présidente, c'est exactement ce que nous avons fait. Nous nous sommes assurés qu'un processus clair, libre et indépendant était en place.

  (1355)  

    Une charge publique n'est pas indépendante.
    C'est exactement ce que nous voulions. Nos fonctionnaires sont indépendants.
    Ils informent...
    Ils ne relèvent pas d'un parti politique.
    Ils informent le premier ministre. Ils informent le Cabinet, alors ils vous donnent des directives, à vous et au premier ministre.
    Regrettez-vous que le premier ministre et vous-même n'ayez jamais pris d'autres mesures, d'autant plus que le général Vance est resté en poste pendant trois autres années et que vous avez prononcé un discours élogieux à son sujet lors de la passation de commandement en janvier dernier?
    Madame la présidente, je prends mes décisions en me fondant sur l'information dont je dispose.
    Mais vous le saviez en 2018.
    Madame la présidente, le député était secrétaire parlementaire du ministre de la Défense en 2015, et il y a eu une enquête.
    Ce que je veux dire, c'est que nous pourrions emprunter cette voie. J'ai expliqué à maintes reprises exactement le processus que nous avons suivi. J'ai aussi dit que, oui, je suis responsable, et je vais continuer d'assumer mes responsabilités et de prendre davantage de mesures pour m'occuper de notre personnel.
    Savez-vous quoi, madame la présidente? Notre gouvernement a pris cette question au sérieux. Nous avons affecté les ressources là où on en avait besoin; nous avons apporté les changements de politique là où c'était nécessaire et, plus important encore, nous sommes prêts à en faire plus, et nous le ferons.
    Mais, monsieur le ministre...
    Merci beaucoup.
    Nous allons passer à M. Spengemann.
    Allez-y, s'il vous plaît.
    Madame la présidente, merci beaucoup.
    Monsieur le ministre, j'aimerais vous donner l'occasion de réfuter ce que je considère comme une interprétation erronée de la part non seulement d'un, mais de plusieurs partis de l'opposition. On laisse entendre qu'il y a eu une allégation dûment étayée qui n'a donné lieu à aucune enquête. Même l'ancien ombudsman, M. Walbourne, a dit qu'il n'était pas possible de donner suite à cette allégation.
    Monsieur le ministre, j'aimerais revenir sur la nature de ces allégations et clarifier, aux fins du compte rendu, votre perception de ces allégations et de leur statut en ce qui concerne la possibilité d'intenter des poursuites, et à quel point il est important que les droits d'un plaignant soient pleinement et très délicatement respectés.
    Madame la présidente, nous voulons que toutes les personnes qui ont une plainte puissent se manifester afin que nous puissions prendre les mesures qui s'imposent et que, lorsque quelqu'un se manifeste, nous prenions immédiatement des mesures qui peuvent aboutir à un résultat équitable.
    Dans ce cas-ci, malheureusement, l'intéressée n'a pas fourni l'information. Ce n'est pas à nous de juger pourquoi cela s'est produit ou non. Notre rôle est de mettre en place un processus approprié afin que, lorsqu'une personne désire loger une plainte, elle ait pleinement la possibilité de le faire.
    Ce que nous voulons faire, pour que personne ne craigne des représailles, c'est donner aux gens les moyens de se manifester. S'ils le font, ils seront entendus, écoutés et soutenus et ils recevront les conseils appropriés sur la procédure à suivre. C'est exactement notre objectif.
    À l'heure actuelle, même si nous avons des systèmes en place, nous savons qu'ils ne sont pas suffisants. Nous allons examiner la possibilité de regrouper un grand nombre de ces systèmes pour qu'il n'y ait qu'un seul endroit où appeler, peu importe la nature de l'inconduite.
    Nous devons approfondir l'indépendance dont vous avez tous parlé, pour bien faire les choses. Nous voulons nous assurer, pour ce qui est de l'indépendance, que les gens ont l'assurance que s'ils portent plainte, des mesures seront prises. Dans ce cas-ci, madame la présidente, nous avons pris des mesures. Évidemment, nous aurions aimé que le résultat soit différent, mais dans ce cas-ci, nous devons protéger le processus, parce qu'en fin de compte si, d'une manière ou d'une autre, nous perturbons par inadvertance le processus indépendant, nous compromettrons un résultat juste dans notre société.
    Merci beaucoup, monsieur le ministre.
    Dans le temps qu'il me reste, j'aimerais vous ramener encore une fois en arrière.
    Vous avez beaucoup parlé des options possibles pour l'avenir. En plus d'examiner les plaintes dont nous sommes saisis, le défi fondamental de notre comité est vraiment d'orienter les Forces canadiennes dans une direction différente.
    Il y a quelques minutes, vous avez eu un échange avec mon collègue, M. Robillard.
    Quel serait l'élément que vous voudriez changer plus rapidement, peut-être même avant d'autres priorités dans la même veine, pour vraiment amorcer un changement de culture avec profondeur et direction?
    Y a-t-il une priorité que vous demanderiez au Comité d'examiner plus à fond, peut-être, afin qu'il formule des recommandations?
     En fait, il s'agit plutôt de voir pourquoi les personnes qui ont des allégations à formuler ne se sentent pas à l'aise de le faire. Nous devons nous assurer de leur donner confiance, de sorte que c'est la première chose que nous devons faire, et cela comme il faut. Quels systèmes pouvons-nous avoir pour que les personnes qui désirent loger une plainte puissent le faire sans représailles? Nous y travaillons et nous aimerions entendre vos recommandations.
    L'autre aspect qui est tout aussi important et qui concerne la prévention à long terme est un changement de culture. Comment créer un environnement inclusif? Cela pourrait être en ayant un environnement exempt de harcèlement où un processus indépendant permettra de donner aux gens l'assurance que, s'ils ont une plainte, ils seront entendus et que des mesures pourront être prises.
    En fin de compte, ce que j'aimerais voir ressortir de tout cela, madame la présidente, c'est que lorsqu'une personne signe sur la ligne pointillée pour se donner entièrement — vous l'avez fait, les membres du Comité l'ont fait et je l'ai fait, en disant littéralement que j'étais prêt à risquer ma vie — elle puisse obtenir tout ce dont elle a besoin pour avoir un environnement inclusif afin de pouvoir ajouter de la valeur aux Forces armées canadiennes.
    Les militaires qui sont parties... et ce sont ces départs qui sont le résultat le plus inquiétant de tout cela. Notre organisation a perdu du terrain. J'ai vu l'impact des femmes dans les armes de combat. J'ai eu des conversations avec de nombreux militaires qui m'ont demandé ce que je pensais des femmes au combat. Je leur réponds: désolé, mais nous avons déjà eu cette conversation il y a longtemps. Prenez l'Afghanistan.
    La dernière récipiendaire du prix du capitaine Nichola Goddard... J'ai servi avec elle en 2006. Liz faisait partie de la section dans laquelle j'ai servi. Combien de fois ai-je été témoin de sa bravoure qui a littéralement sauvé nos vies? Quand vous voyez cela, et que vous regardez... Nous parlons de masculinité toxique, mais ce ne sont pas vos muscles qui vous mènent là, c'est la grandeur de votre cœur. Êtes-vous prêt à risquer votre vie? C'est donc ce que tout le monde a fait.

  (1400)  

    Merci.
    C'est ce que nous devons créer.
    Je suis désolé, mais cela me tient énormément à coeur, madame la présidente.
    Merci.
    Merci.
    Au nom de tous les membres du Comité, je tiens à remercier tous les témoins de leur témoignage d'aujourd'hui. Cela a beaucoup éclairé notre étude.
    Sur ce, nous allons suspendre la séance pendant 30 minutes pour laisser les nouveaux témoins s'installer et permettre à tous de prendre une pause.
    Merci encore une fois. Nous avons beaucoup apprécié votre témoignage.
    Nous allons suspendre la séance.

  (1400)  


  (1430)  

[Français]

     Bonjour et bienvenue à tous.

[Traduction]

     Pour ceux qui viennent de se joindre à nous pour la deuxième moitié de la séance d'aujourd'hui, je déclare la séance ouverte.
    Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement et aux motions adoptées par le Comité le mardi 9 février, le vendredi 12 mars et le lundi 22 mars, le Comité reprend son étude des mesures à considérer face aux problèmes d'inconduite sexuelle dans les Forces armées canadiennes, y compris les allégations à l'endroit de l'ancien chef d'état-major de la Défense Jonathan Vance.
    Aujourd'hui, par vidéoconférence, nous entendrons, à titre personnel, M. Michael Wernick, ancien greffier du Conseil privé et secrétaire du Cabinet. Nous accueillons également M. Gregory Lick, ombudsman de la Défense nationale et des Forces armées canadiennes.
    Vous aurez jusqu'à six minutes pour faire votre déclaration préliminaire. Je crois comprendre que M. Lick fait une déclaration préliminaire, mais pas M. Wernick. Nous pouvons poursuivre maintenant.
    Monsieur Lick, je vous invite à prendre la parole et à faire votre déclaration préliminaire. Merci.
    Ceci est mon premier témoignage devant le Comité au sujet de l'inconduite sexuelle dans les forces armées, et il suit mon témoignage du 25 mars qui portait sur le statut des femmes. Je suis accompagné de Robyn Hynes, directrice générale des Opérations au Bureau de l'ombudsman..
    En tant qu'ombudsman, j'ai notamment pour rôle de prendre le pouls de la communauté et d'agir comme médiateur, enquêteur et rapporteur pour les questions qui touchent le MDN et les FAC, et ce, en toute neutralité et objectivité. Dans le respect de ce rôle, je ferai l'observation que nous surveillons la façon dont la question de l'inconduite sexuelle dans les forces armées est traitée dans les médias et devant les comités, avec le constat qu'il y a une plus grande préoccupation envers la posture politique et institutionnelle qu'envers la résolution du problème. Pourtant, le problème continue de se manifester dans la vraie vie des survivantes, survivants et témoins qui passent entre les mailles du filet d'un système défaillant, et qui n'osent parler par crainte de possibles représailles ou répercussions fatales pour leur carrière.
    Jusqu'à maintenant, cet enjeu s'accompagne d'informations contradictoires, voire erronées. Les témoignages ont changé au sujet des personnes qui étaient au courant, du moment où elles ont été mises au courant, des personnes qui avaient le pouvoir d'agir, de ce qui aurait dû être fait et des personnes devant être tenues responsables. Je dis assez. Assez de l'autoprotection et de l'évitement. Assez du traînage de pieds politique. Il est temps de mettre nos énergies collectives sur le changement de la culture et l'établissement de processus qui seront réellement au service des personnes qui sont victimes d'inconduite de nature sexuelle ou de tout autre type d'abus de pouvoir au sein du système militaire.
    J'ai énoncé plus tôt le rôle de mon bureau, mais laissez-moi le préciser davantage. L'ombudsman ne peut se pencher sur aucune allégation de nature criminelle ou pouvant constituer une infraction au Code de discipline militaire. Si, au cours du traitement d'un dossier, des indications d'actes criminels font surface, nous transférons, avec le consentement du commettant, l'affaire au Grand Prévôt — et non au BCP, au JAG ou à quelque autre instance, comme cela a été suggéré dans des témoignages précédents.
    L'ombudsman rend des comptes directement au ministre de la Défense nationale. De façon générale, ce qui est attendu de nous est que nous avisions la personne à qui nous rendons des comptes lorsqu'il y a des problèmes dans l'organisation de cette même personne. Dans le cas qui a été porté à l'attention du ministre, il n'y a pas eu d'enquête, car la personne qui a porté plainte n'y a pas consenti. Le Bureau de l'ombudsman ne mène pas d'enquête sans le consentement explicite du plaignant.
    J'ai entendu de diverses sources qu'il y a des discussions en cours dans les Forces armées canadiennes et le ministère au sujet d'une reconfiguration des systèmes de traitement qui abordent cet enjeu. Je ne participe pas à ces discussions, et je ne peux pas y participer. Il y aurait un conflit d'intérêt si je contribuais à la conception de processus que je serais plus tard appelé à examiner. J'applaudis tout effort pour résoudre cet enjeu, particulièrement les efforts pour relever le défi énorme qu'est le changement de culture. Le changement de culture doit comprendre des garanties comme quoi les dénonciations d'inconduite ou d'abus de pouvoir à caractère sexuel, raciste, discriminatoire, etc., n'entraîneront pas de représailles ou de répercussions sur la carrière pour les personnes qui osent parler.
    Attention cependant: la refonte des processus internes des Forces armées et du ministère de la Défense ne sera pas suffisante. Il doit y avoir une entité en dehors de la chaîne de commandement et du ministère, responsable de surveiller les mécanismes de redressement des FAC et du MDN. Cette organisation ne peut relever d'une autorité ayant un intérêt direct dans l'issue de toute affaire individuelle ou systémique.
    J'ai précisé ce que mon bureau ne peut pas faire. Laissez-moi vous expliquer ce qu'il continuera à faire.
     Nous écoutons nos commettants et on leur donne de l'information pertinente dans leurs cas. Lorsque cela est approprié, nous les orientons vers les services de soutien et mécanismes de redressement existants. Notre but est d'aider les commettants à se débrouiller dans un système complexe afin qu'ils puissent obtenir de l'aide et trouver le meilleur recours selon les circonstances.
     Nous jouons un rôle de facilitateur ou de médiateur lorsqu'il y a rupture des communications dans un processus déjà en cours. Lorsqu'un commettant croit avoir été traité injustement dans un processus, nous pouvons examiner les étapes du processus pour nous assurer qu'il y a eu un traitement équitable et faire des recommandations au décideur pour revoir sa décision. Mon bureau peut intervenir dans des circonstances urgentes, lorsque l'accès à un mécanisme de recours existant causerait des difficultés indues au commettant ou nuirait à ses intérêts.
    En plus d'offrir une assistance générale, d'agir comme médiateurs et d'examiner les processus, nous avons aussi le pouvoir d'enquêter sur des problèmes de nature systémique. Nos enquêtes sont fondées sur la collecte de données probantes et donnent lieu à des recommandations visant à améliorer le bien-être de la communauté militaire.

  (1435)  

    Au cours des dernières années, des mécanismes internes ont été établis au ministère et dans la chaîne de commandement qui ont dédoublé les fonctions remplies par le Bureau de l'ombudsman. Comme notre mandat nous oblige à orienter les commettants vers les mécanismes existants, cela a eu pour effet de graduellement remplacer des fonctions indépendantes par des fonctions internes. Malgré tout le mérite qu'ont ces initiatives, elles ne sont pas indépendantes.
    Un organisme externe avec le pouvoir de garantir l'équité, la confidentialité et la protection contre les représailles est nécessaire. S'il y a une réelle volonté politique de créer une entité en dehors de la chaîne de commandement et du ministère, alors ne cherchez pas plus loin. Il faudrait relativement peu d'intervention pour que mon bureau étende ses services de soutien à la communauté de la Défense pour fournir des services de conseil, fournir des rapports statistiques supplémentaires sur les problèmes soulevés sans obligation de rapporter des cas individuels et renforcer notre capacité actuelle de garantir que tous les plaignants sont traités équitablement et que nos recommandations sont mises en œuvre en faisant rapport au Parlement sans filtre politique.
    Les Forces canadiennes ne ressemblent à aucun ministère ou agence fédéral. Les questions touchant les forces armées ont une incidence sur la sécurité nationale et touchent tous les députés, circonscriptions et citoyens de ce pays. Il est essentiel que le Parlement reçoive les informations nécessaires pour que le Cabinet prenne les mesures appropriées pour traiter des questions qui pourraient jeter le discrédit sur l'institution militaire et même affecter le recrutement et le maintien du personnel.
    Le Bureau de l'ombudsman a été créé, il y a plus de 23 ans, pour enquêter de façon indépendante et neutre sur des enjeux soulevés par les membres de la communauté militaire, lorsque toutes les avenues de redressement possibles du système ont été épuisées. Le Bureau agit comme un filet de sécurité lorsque le système interne défaille. Nous faisons partie de la solution, mais pas de toute la solution. Ce dont le Bureau de l'ombudsman a besoin pour continuer de faire partie de la solution est un mandat défini en loi et une existence permanente. Pour le moment, l'existence du Bureau est seulement inscrite dans une directive ministérielle et une DOAD signées par le CEMD et le SM. Notre existence pourrait cesser avec le retrait ou la modification d'un de ces instruments.
    D'autres pays, comme le Royaume-Uni, l'Australie et l'Allemagne ont établi des organismes de surveillance de l'armée pleinement indépendants, ayant un mandat légal, et pouvant se rapporter au Parlement. Le Canada pourrait faire de même s'il y avait une volonté politique. Cela n'a pas été le cas jusqu'à maintenant.
    Nous sommes à la croisée des chemins, et je crois que l'avenir commence par un changement de culture comprenant de solides mécanismes de redressement à l'intérieur du MDN et des FAC, avec une entité externe pleinement indépendante qui s'assure que les victimes de tout type d'inconduite ou d'injustice ne passent pas entre les mailles du filet.
    Merci, madame la présidente.

  (1440)  

    Bien. Merci beaucoup, monsieur Lick. C'était un très bon exposé.
    M. Wernick n'a pas souhaité faire une déclaration préliminaire. A-t-il changé d'idée? Non.
    Nous passerons ensuite aux questions. Monsieur Bezan, vous avez la parole.
    Merci, madame la présidente, et je tiens à remercier nos témoins d'être parmi nous.
    Monsieur Lick, je tiens à vous remercier de votre déclaration préliminaire et du témoignage que vous avez présenté au Comité de la condition féminine la semaine dernière. Votre participation a été très constructive, et ni moi ni les députés de ce côté-ci de la table ne contesterons la nécessité de veiller à ce que votre bureau soit entièrement indépendant et fasse rapport au Parlement en vertu de ses propres lois indépendantes.
    Je voudrais toutefois adresser mes questions à M. Wernick, pour que nous puissions entamer le dialogue au cours des témoignages d'aujourd'hui.
    Monsieur, des documents fournis au Comité indiquaient que, le 2 mars, vous aviez déjà participé à deux conversations concernant les allégations contre le général Vance. Avec qui ces conversations ont-elles eu lieu, en 2018?
    Je ne sais pas de quel témoignage vous parlez, monsieur Bezan. Je vais faire de mon mieux pour reconstituer la chronologie. Mes assistants de recherche sont Google et Wikipedia, alors j'ai fait de mon mieux pour reconstruire les événements d'il y a trois ans.
     Si je me souviens bien de la séquence des événements, le vendredi 2 mars, Elder Marques est venu du deuxième étage, a demandé à me voir et a soulevé la question pour la première fois. C'est la première fois que j'en ai entendu parler. C'était le vendredi 2 mars.
    Je crois comprendre, d'après les articles publiés dans les médias, que M. Walbourne est allé voir le ministre Sajjan. Le ministre Sajjan en a parlé à Mme Astravas, sa chef de cabinet. Mme Astravas a contacté Elder Marques, au CPM, à un moment donné entre le 1er mars et le 2 mars.
     Elder Marques est venu me voir dans la matinée du 2 mars. Il m'a dit que le ministre s'inquiétait au sujet d'un problème concernant le chef d'état-major et qu'il voulait que nous l'examinions. J'ai dit, d'accord, vous devriez aller voir Janine Sherman, qui était, à l'époque, ma collaboratrice chargée des questions touchant le personnel supérieur, et c'est ce qui s'est passé l'après-midi.
    Je peux clarifier un des articles des médias sur le courriel envoyé vers 14 heures. Son texte était: « Vous êtes difficile à trouver. Pouvons-nous nous rencontrer? Nous allons devoir mettre les choses par écrit. » C'était un courriel de Elder Marques à Janine Sherman.
    Puis, il y a eu des conversations dans l'après-midi du vendredi entre Elder, Zita et Janine. Je n'ai pas participé à ces conversations. Je ne suis pas certain de pouvoir les classer dans le bon ordre, mais elles portaient effectivement sur la meilleure façon de répondre à M. Walbourne.
    À la fin de la journée de vendredi... Là encore, je me fonde sur un article. Le ministre a répondu à M. Walbourne en fin de soirée, le vendredi, en lui disant d'aller parler au BCP. Puis, le lundi matin, après la fin de semaine, Zita Astravas lui a envoyé un courriel très semblable, qui est rapporté dans l'un des articles des médias, disant qu'il devrait aller en parler au BCP.
    Entre la matinée et la soirée du 2 mars, le dossier s'est effectivement retrouvé entre les mains du Bureau du Conseil privé.

  (1445)  

    Quels détails concernant ces allégations connaissiez-vous, le 2 mars?
    Aucun — seulement qu'il y avait un problème concernant le chef d'état-major de la Défense que le ministre voulait examiner.
    J'ai pris connaissance des allégations plus tôt cette année, dans les médias.
    On ne vous a donc jamais dit qu'il s'agissait d'allégations d'inconduite sexuelle?
    Je n'ai pas le texte des courriels sous les yeux. Je crois qu'on parlait de « harcèlement sexuel potentiel ». Il y a eu un échange de courriels entre Zita, Janine et Elder. Je peux certainement dire qu'il était question d'inconduite sexuelle ou de harcèlement sexuel, mais je ne pourrais pas parler du libellé exact.
    Après le 2 mars, avez-vous eu des contacts avec quelqu'un d'autre au Cabinet du premier ministre au sujet des allégations contre le général Vance?
    Non. De notre point de vue, c'était entre les mains du BCP. J'ai demandé à Janine de communiquer avec M. Walbourne pour essayer d'en savoir plus. Cela a mené aux événements de la semaine suivante. Il a fallu, je crois — je suis en train de reconstituer la chronologie — une série de courriels et d'appels pour persuader M. Walbourne de rencontrer Janine. Elle l'a rencontré le 16 mars.
    Dans le cadre de ce processus, entre le 2 et le 16 mars, Janine et d'autres employés du BCP — Elder Marques et Zita Astravas — ont-ils communiqué avec vous au sujet d'autres mesures à prendre, d'autres avenues à envisager, pour essayer d'établir quelles étaient les allégations?
    Non. Je pense, avec le recul, que nous en étions à la première étape, qui était d'aller voir M. Walbourne. Nous savions que M. Walbourne avait communiqué quelque chose au ministre, alors notre première étape a été de contacter M. Walbourne. À ma connaissance, il n'y a pas eu d'autres mesures. Je sais que Mme Sherman a témoigné plus tôt, mais je ne suis pas au courant d'autres mesures.
     Notre intention était de communiquer avec l'ombudsman pour essayer d'en savoir plus.
    À titre de greffier du Bureau du Conseil privé, pensiez-vous agir en sachant que le premier ministre était au courant des allégations, en mars 2018?
    Non. Je n'ai aucune raison de croire que le premier ministre était au courant de cela à l'époque. À ma connaissance, la seule personne qui était au courant était Elder, et je ne sais pas à qui il en aura parlé au sein du CPM, à l'époque.
    Je pense que le ministre Sajjan et le Cabinet du premier ministre ont effectivement confié le dossier au BCP.
    Vous ne savez donc pas si Elder Marques a eu des conversations avec d'autres personnes au deuxième étage du...
    Je ne sais jamais qui parle à qui au Cabinet du premier ministre.
    D'accord.
    La boucle a été bouclée après que M. Walbourne a rencontré Janine et l'a ni plus ni moins envoyée promener, en lui disant qu'il ne partagerait aucun renseignement, qu'il n'avait pas le consentement du commettant ou du plaignant — je crois que M. Lick a utilisé cette expression. Le 16 mars, nous nous sommes donc trouvés dans une impasse. Nous avons probablement communiqué de nouveau avec le CPM vers le 16 ou le 17 mars pour signaler que nous étions dans une impasse.
     Merci.
    Monsieur Bagnell, vous avez la parole.
    Merci, monsieur Lick, d'être ici. Vous occupez un poste très important, et j'ai été ravi que vous parliez des deux grandes conclusions que d'autres experts ont apportées, soit l'indépendance et le changement de culture, qui s'imposent pour s'attaquer à ces problèmes rapidement, de la nécessité d'aller de l'avant et d'arrêter les manoeuvres politiques, ce que M. Baker et moi-même disons depuis le début. Nous devons nous attaquer à ces problèmes. Avec un peu de chance, au cours de ces deux heures, nous pourrons obtenir des suggestions de votre part et de celle de M. Wernick sur la façon dont nous pouvons aborder la question de l'indépendance et du changement de culture qui constituent une partie importante du rapport de notre comité.
    Monsieur Wernick, diriez-vous que Mme Sherman a suivi le processus approprié pour traiter les allégations?

  (1450)  

    Si je comprends bien la question, oui, je pense que Mme Sherman a fait ce qui était approprié pendant la période du 2 au 16 mars et qu'elle a suivi la voie qui nous était ouverte à l'époque.
    Il semble y avoir une certaine confusion quant aux raisons pour lesquelles l'ancien conseiller à la sécurité nationale n'est pas intervenu dans cette affaire.
    Pouvez-vous dire quelque chose à ce sujet?
    Je pense que c'est une situation hypothétique. Je ne vois pas très bien comment le conseiller à la sécurité nationale aurait pu ajouter quoi que ce soit à l'équation à ce moment-là. Nous savions que l'ombudsman avait soulevé une question et que le moyen le plus direct était de parler à l'ombudsman.
    Pour répondre peut-être à d'autres questions, je ne vois pas très bien à qui d'autre nous pouvions nous adresser. Comme il s'agissait d'une plaignante anonyme, nous ne pouvions pas lui parler. Comme il n'y avait pas de témoins d'un incident entre deux personnes, nous ne pouvions pas leur parler. Il aurait été inapproprié d'aller parler au général parce que cela aurait soulevé un risque de représailles. Franchement, la seule personne à qui nous pouvions parler était l'ombudsman.
    Des membres du Comité vous ont reproché de ne pas en avoir fait assez et pensent que les allégations justifiaient, à elles seules, une enquête sur le général Vance.
    Pouvez-vous nous en dire davantage sur la façon dont le BCP a tenté de mener une enquête?
    L'enquête s'est essentiellement arrêtée vers la mi-mars, je crois, à la réunion du 16. Nous l'avons confirmé par la suite et nous ne pouvions pas aller plus loin. Comme je l'ai dit, comment lancer une enquête à partir de là, avec une plaignante anonyme et aucun témoin, alors qu'il aurait été inapproprié de simplement confronter la personne visée par la plainte à ce moment-là?
    Nous n'avons jamais fermé le dossier. J'aimerais dissiper un peu cette impression. Nous avons décidé de laisser la porte ouverte et de voir s'il y aurait des changements, si l'ombudsman révélerait plus de détails qui nous permettraient au moins de commencer une sorte de recherche des faits, ou si la plaignante déciderait de nous faire suffisamment confiance pour nous parler.
    Je crois qu'on peut faire un parallèle — il n'est pas parfait —, avec les incidents à Rideau Hall. Personne ne s'est manifesté dans le cadre des processus officiels, mais une fois qu'il y a eu des plaintes dans les médias, mon successeur, M. Shugart, a embauché un enquêteur indépendant, et a mené une enquête sur ce qui se passait, et fait une évaluation du milieu de travail. La différence, c'est qu'il y avait plusieurs plaignants et plusieurs témoins à interroger.
    Je crois comprendre qu'il était impossible d'aller plus loin sans plus d'information.
    C'était notre jugement à l'époque. Peut-être qu'en rétrospective, et l'information est sortie plus tard, il y avait d'autres voies possibles. À l'époque, nous estimions être dans une impasse.
    De façon plus générale, quelle est la règle générale du BCP à l'égard des enquêtes sur des allégations concernant une nomination par décret?
    Une nomination par décret est une nomination à de hautes fonctions. C'est un cadeau du premier ministre. C'est une nomination par le pouvoir exécutif. Le ministère du premier ministre, le BCP, assume la responsabilité générale de tous les processus, soit la sélection et la nomination, l'examen du rendement et les mesures disciplinaires à l'égard des personnes nommées par décret.
    Le bureau de Mme Sherman est assez occupé parce qu'il y a 160 nominations par décret à temps plein et environ 1 000 à temps partiel.
     Oui, c'est beaucoup.
    Enfin, il ne reste presque plus de temps, mais avez-vous quelque chose à dire au sujet de l'indépendance des députés, du système politique et du système de justice? Évidemment, la classe politique ne devrait pas exiger que le système de justice mène des enquêtes sur des gens.
    Cela exige une réponse plus longue, et je serai heureux d'approfondir la question.
    Je pense que dans le système de Westminster, il y a toujours un ministre responsable. Les ministres doivent rendre compte de diverses choses au Parlement et aux Canadiens. Même avec le système judiciaire, même avec les tribunaux et les organismes indépendants, il y a une obligation fondamentale de rendre compte au Parlement. Pour chaque organisme que le Parlement crée par voie législative ou auquel il alloue des fonds, un ministre doit rendre des comptes.
    Ce n'est pas de l'ingérence politique. L'ingérence politique consisterait à fouiller dans les rouages internes, à s'ingérer dans une affaire. Vous pouvez imaginer différents scénarios. Je pense qu'il y a une distinction et des limites à établir, ainsi qu'un jugement à prendre quant au moment où un ministre qui doit rendre des comptes au Parlement devrait intervenir, et dans quelle mesure.

  (1455)  

    Merci beaucoup.
    Merci.

[Français]

     Monsieur Barsalou-Duval, vous avez la parole.
    Je vous remercie, madame la présidente.
    Monsieur Lick, dans son témoignage précédent, le ministre Sajjan blâmait, en un sens, l'ombudsman qui vous a précédé, en disant que c'était à lui de s'occuper du dossier en allant voir d'autres autorités pour faire avancer les choses ou, du moins, en fournissant de l'information au Bureau du Conseil privé pour lui permettre d'aller plus loin. On peut l'entendre un peu aussi de la part du représentant du Bureau du Conseil privé.
    Quel est votre point de vue à ce sujet?

[Traduction]

    Comme je l'ai dit dans ma déclaration préliminaire, je crois que le principe primordial, c'est qu'il revient à la plaignante de décider si une enquête doit être menée dans cette affaire. À mon avis, la question fondamentale, surtout pour le Comité, c'est que nous devons bâtir un système qui donnera confiance à ceux qui voudront loger une plainte.
    En l'espèce, si nous examinons, en rétrospective, tous les témoignages et tous les commentaires dans les médias, autant que nous le sachions, il est très probable que, lors de la conversation que mon prédécesseur a eue avec elle, la plaignante n'avait aucune confiance que quoi que ce soit serait fait. Je pense que c'est fondamentalement le problème qui se pose pour le Comité.
    Essentiellement, la plaignante n'était pas convaincue que quelque chose serait fait et qu'elle serait protégée contre les représailles. Quant à savoir si le BCP est le bon organisme d'enquête dans ce cas particulier, je ne pense pas que ce soit fondamentalement la question qui se pose. Le BCP aurait pu s'en charger s'ils avaient eu l'information, comme M. Wernick l'a dit —  peut-être. Mais je dirais qu'il est un peu plus complexe d'enquêter sur l'inconduite sexuelle d'un militaire que, disons, au sein d'une organisation civile. Je crois qu'il faut avoir une certaine connaissance de l'armée pour bien faire enquête. Cela pourrait peut-être être confié à un enquêteur de l'extérieur, mais fondamentalement, je pense que dans ce cas-ci, c'était le manque de confiance à l'égard de ce qui serait fait.
    C'est pourquoi cette enquête particulière n'a pas été menée.

[Français]

    Je vous remercie.
    Supposons qu'un haut gradé des Forces armées canadiennes ou même le commandant en chef pose des gestes clairement inappropriés, qu'ils soient de nature sexuelle ou non, mais qui ne seraient pas de nature criminelle pour autant. C'est un exemple complètement fictif. Je ne parle pas de la situation en cause, puisque je ne suis pas au courant de ce qui s'est passé. Ce n'est donc pas quelque chose qui pourrait mener à un procès ou à une peine d'emprisonnement.
    Si le ministre décidait de ne pas tenir compte de telles informations mettant en cause le général ou le plus haut gradé de l'armée, parce que cela pourrait constituer de l'ingérence, et qu'il ne prenait aucune mesure, quel recours vous resterait-il, en tant qu'ombudsman ayant l'information en main?

[Traduction]

     Comme je l'ai dit dans ma déclaration préliminaire, si une telle allégation est portée à mon attention ou à celle de mon bureau, nous avons des options à notre disposition. Comme je crois l'avoir dit dans un témoignage précédent, je n'ai pas le pouvoir de procéder à une enquête sur des allégations de nature criminelle ou pouvant entraîner des accusations en vertu du Code de discipline militaire. C'est clair.
    Dans le cas que vous suggérez, je pourrais, avec le consentement du plaignant — et encore une fois, comme je l'ai dit, si le plaignant a l'assurance que des mesures seront prises — renvoyer la question au grand prévôt.

[Français]

     J'ai une autre question à vous poser.
    Dans un contexte où vous ne relèveriez pas du ministre de la Défense nationale, mais plutôt directement du Parlement, par exemple, qu'est-ce que cela changerait, concrètement, à la manière dont les choses seraient traitées et à l'avancement des dossiers d'inconduite sexuelle en particulier?

  (1500)  

[Traduction]

    En fait, il y a une deuxième partie à ajouter à votre contexte. Nous supposerons, pour l'instant, que je n'aurais pas le pouvoir d'enquêter sur des allégations de nature criminelles ce qui ne serait pas approprié de toute façon, à mon avis, ni sur des allégations qui pourraient entraîner des accusations en vertu du code de discipline militaire.
    Le rôle que nous jouons aujourd'hui et que nous jouerons à l'avenir en tant qu'organisme externe indépendant, en tant qu'ombudsman selon les principes que nous appliquons, consiste essentiellement à assurer l'équité du processus afin de donner aux membres des FAC et aux plaignants l'assurance que, lorsqu'un processus est suivi, il est équitable. C'est un rôle que nous jouons maintenant, et je crois sincèrement et fermement que nous le jouerons également à l'avenir.
    Cela dit, le fait de relever du Parlement signifie que l'ensemble du Parlement est en mesure de s'assurer que le processus est équitable — plutôt que de faire rapport par l'entremise d'un ministre, lorsqu'il peut y avoir un intérêt politique direct.
    Merci beaucoup.
    Nous allons passer à M. Garrison, s'il vous plaît.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    Je remercie nos deux témoins d'être parmi nous aujourd'hui.
    J'aimerais commencer brièvement par M. Lick. Vous avez dit au comité de la condition féminine que vous auriez fait essentiellement la même chose avec cette plainte et que vous l'auriez portée à l'attention du ministre de la Défense. Est-ce exact?
    Comme je l'ai déjà dit, si les circonstances avaient été exactement les mêmes, j'aurais porté cette plainte à l'attention de la personne dont je relève directement et qui assume la direction et la responsabilité du ministère dont elle est chargée. Je pense que c'est la chose à faire.
    Si nous comprenons bien ce qui s'est passé, le but était d'examiner les options qui pouvaient être disponibles pour donner suite à la plainte et pour assurer un certain niveau de confiance et de protection à la plaignante contre d'éventuelles représailles, afin que la militaire qui a porté plainte n'y soit pas assujettie.
    Donc, oui, fondamentalement, j'aurais fait la même chose. Même avec le recul, j'aurais probablement fait la même chose.
    Dans ce cas-ci, nous savons maintenant, grâce aux articles des médias, quelle était la preuve. Il semble qu'il s'agissait d'un document dont les renseignements personnels auraient pu être supprimés. Pouvez-vous penser à une raison pour laquelle un ministre ne devrait pas examiner cela? Si vous apportiez au ministre un document ne comportant pas d'identification personnelle, y a-t-il une raison pour laquelle il ne pourrait pas l'examiner?
    Je ne crois pas. Je pense que c'est la raison pour laquelle mon prédécesseur a présenté cette information. Il s'agissait au moins de donner un peu de substance à l'idée qu'il y avait une allégation crédible — non pas qu'elle avait été jugée fondée, mais qu'il y avait une allégation crédible et importante à laquelle il fallait donner suite.
    Je pense que la suppression des renseignements personnels était une mesure appropriée.
    Étant l'ombudsman militaire actuellement en poste, y a-t-il une autre instance à laquelle vous jugeriez approprié de transmettre ce genre d'information?
     Eh bien, nous voyons maintenant, je pense, que ce n'est pas... J'en reviens au fait qu'il ne s'agit pas vraiment de savoir à qui transmettre l'information. Il s'agit de savoir dans quelle mesure le plaignant a l'assurance qu'il sera donné suite à sa plainte de façon équitable et qu'il sera protégé contre les représailles.
    Comme je l'ai déjà dit, le BCP aurait peut-être pu s'en charger ou confier l'affaire à quelqu'un de l'extérieur, mais je crois vraiment que dans ce cas-ci, compte tenu de l'identité de la personne sur qui portaient les allégations, il fallait avoir une connaissance et une compréhension approfondies de l'environnement militaire, et pour cette raison, il pouvait être difficile de trouver quelqu'un.
    Je pense que fondamentalement, il faut revenir à ce qui donnera au militaire ou au plaignant l'assurance que quelque chose sera fait et que sa protection sera assurée.

  (1505)  

    Merci beaucoup, monsieur Lick.
    Je m'adresse maintenant à vous, monsieur Wernick. Étant donné qu'il s'agit de quelqu'un nommé par décret, quelqu'un qui, comme vous l'avez souligné à juste titre, est au service du gouvernement, lorsqu'il y a eu une plainte d'inconduite sexuelle, votre bureau, le Bureau du Conseil privé, a-t-il accès au dossier personnel de toute personne nommée par décret? S'il y avait déjà eu des enquêtes officielles sur sa conduite ou son inconduite sexuelle, votre bureau aurait-il eu accès à cette information?
    Il vaudrait probablement mieux poser ces questions à Janine, en ce qui concerne les vérifications qui sont faites. Nous aurions des renseignements sur chacune des personnes nommées par décret en raison de leur nomination, de leur sélection et de leur processus de nomination. Nous ne tenons pas de dossier sur tous leurs faits et gestes. Cela dépend de l'endroit où elles ont travaillé et de l'organisation qu'elles ont dirigée. Lorsque nous recueillons des faits au sujet d'une allégation, nous cherchons évidemment tous les renseignements pertinents, y compris le genre de choses dont vous avez parlé.
    Si vous me permettez de poursuivre dans la même veine que M. Lick, je pense qu'il s'agit d'une situation vraiment unique, parce que vous parlez de la personne à la tête même de l'organisation. Je ne préconiserais jamais que le BCP intervienne dans les affaires internes des forces armées. Ce n'est pas souhaitable, mais comme il s'agissait d'une personne nommée par décret, c'est-à-dire la personne nommée par le pouvoir exécutif à la tête de l'organisation, nous avions, dans une certaine mesure, la responsabilité d'examiner la plainte.
    Une analogie peut être faite avec les allégations d'inconduite contre la commissaire à l'intégrité, Mme Ouimet, en 2010, les allégations d'inconduite contre la présidente de la Commission canadienne des droits de la personne, Mme Chotalia, en 2013, et même, dans une certaine mesure, les allégations contre la gouverneure générale en tant que chef d'État. Lorsque c'est la personne au sommet de l'organisation, à quelle autre instance s'adresser?
    Dans votre première réponse à une question de M. Bezan, je crois, vous avez dit qu'il y avait toujours un ministre responsable. M. Sajjan a parlé du Bureau du Conseil privé comme d'un bureau indépendant. Je me demande si vous pourriez nous en dire plus au sujet de la caractérisation du Bureau du Conseil privé comme étant un bureau indépendant. Est-ce qu'il fonctionne de façon indépendante ou est-ce toujours le premier ministre qui est responsable des actes du Bureau du Conseil privé?
    Le Bureau du Conseil privé est le ministère du premier ministre. Il fait partie du pouvoir exécutif du gouvernement. C'est le ministère du premier ministre, et il a le premier ministre pour ministre, comme dans tout autre ministère, et le greffier en est le sous-ministre, comme dans tout autre ministère.
    Il n'est pas indépendant au sens des tribunaux, mais il est séparé du ministre Sajjan. Je suppose que c'est l'argument qu'il faisait valoir. C'était quelqu'un de l'extérieur.
    D'accord. Merci beaucoup.
    La parole est maintenant à Mme Alleslev.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    Monsieur Wernick, selon vous, à qui revient alors la responsabilité générale de veiller à ce que le poste de chef d'état-major de la défense soit confié à une personne dont le comportement est irréprochable et sans inconduite sexuelle ou harcèlement?
    La nomination est la recommandation du ministre de la Défense au premier ministre, et le premier ministre donne ou non son accord à la nomination recommandée. Le ministre Kenney a recommandé la nomination au premier ministre Harper, et les décisions subséquentes concernant sa promotion et son mandat ont sans doute été recommandées par le ministre Sajjan au premier ministre Trudeau.
    Donc, le ministre de la Défense nationale est responsable de s'assurer qu'un CEMD dont le comportement est représentatif des valeurs des Forces canadiennes, etc.
    Oui.
    Parfait.
    Chaque ministre est responsable des portefeuilles dont il doit rendre compte au Parlement.
     Nous savons, d'après le témoignage du ministre Sajjan, que vous et lui avez eu une conversation téléphonique à l'automne 2018 pour discuter du rendement du général Vance et, je présume, de son comportement et de sa conduite.
    Pouvez-vous confirmer que vous avez effectivement parlé au ministre Sajjan au sujet de son programme de gestion du rendement?
    Il s'agissait de l'année de rendement 2017-2018. Le cycle de gestion du rendement va du 1er avril au 31 mars, avec une certaine marge de manœuvre à la fin de l'année.
    Comme Mme Sherman a essayé de l'expliquer, je crois, nous demandons toujours aux ministres de recommander une cote de rendement. Il est vrai que les ministres ne fixent pas la rémunération, mais ils donnent leur avis sur la cote de rendement. Tout le système se trouve sur Internet, et vous pouvez voir les critères, les classements, etc.

  (1510)  

    Vous lui en avez parlé.
    Oui. J'ai parlé au ministre Sajjan à deux reprises, en mai et en juin — je crois que c'était autour du 18 mai et du 25 juin — au sujet des problèmes dans les forces armées, de la durée du mandat du général Vance, du moment où il devrait y avoir un changement de commandement, et des problèmes liés au roulement et aux grades supérieurs. Je peux parler plus en détail de ces conversations...
    C'est parfait. À ce moment-là...
    Je tiens à préciser que c'était en mai et en juin 2018.
    À ce moment-là, aviez-vous fermé le dossier des allégations d'inconduite sexuelle?
    Non, le dossier était ouvert, en ce sens que si nous avions reçu de nouveaux renseignements après la mi-mars, nous en aurions tenu compte. Dans aucune des conversations que j'ai eues avec le ministre Sajjan, je ne me souviens pas d'avoir soulevé des questions de conduite, et il n'a pas non plus abordé le sujet avec nous. Les conversations portaient sur d'autres questions, et je me ferais un plaisir d'en parler.
    Vous êtes donc resté confiant que ces allégations n'étaient pas fondées, malgré le fait qu'il y ait eu une enquête.
    Il n'y avait pas eu d'enquête. La seule personne qui était au courant de la gravité des allégations, à l'époque, était M. Walbourne.
    Lorsque vous examinez les nominations par décret, est-ce que vous vérifiez les autorisations de sécurité, les antécédents? Faut-il qu'une plainte soit déposée pour qu'on enquête sur la conduite et le comportement d'une personne nommée par décret?
    Oui.
    Vous ne pouvez le faire qu'en cas de plainte. On ne peut pas examiner la conduite d'une personne sans qu'une plainte ait été déposée.
    Cela dépend de la façon dont l'information arrive. Dans le cas de Rideau Hall, mon successeur en a été informé par un reportage de Radio-Canada. Les vérifications de sécurité et d'antécédents sont effectuées au moment de la nomination. Elles ont été faites en 2015 par le gouvernement Harper. Ensuite, le général a été nommé à titre amovible, jusqu'à ce que des faits nouveaux surgissent.
    L'ombudsman n'a pas le même poids que Radio-Canada.
    L'ombudsman n'a pas communiqué d'information au Bureau du Conseil privé.
    Il vous a dit qu'il y avait quelque chose de préoccupant.
    Et il a déclaré que cela ne relevait pas du BCP.
    Donc, le BCP, même si le ministre de la Défense nationale lui a demandé de s'en occuper, a estimé que sans cette information précise, il n'y avait pas lieu de donner suite.
    À la mi-mars, nous avons jugé que nous étions dans une impasse. Il n'y avait pas de plaignante à interroger, pas de témoin à interroger, et il aurait été inapproprié de confronter le général Vance. Nous n'avions aucun moyen d'aller plus loin.
    Il y a eu des missions d'enquête sans plaintes dans d'autres cas.
    Non, il y avait des plaignants et des témoins à interroger.
    Par conséquent, une augmentation de salaire a peut-être été accordée à une personne nommée par décret alors que des allégations non résolues n'avaient pas été examinées.
    Oui, parce que les problèmes de conduite ne sont pas entrés dans la discussion sur la cote de rendement pour 2017-2018. L'augmentation qui a été accordée au printemps 2019 était l'augmentation économique. C'était trois ans de rattrapage pour l'inflation. Toutes les personnes nommées par décret au gouvernement du Canada ont obtenu une augmentation de salaire au printemps 2019.
    Merci beaucoup.
    Nous allons passer à M. Baker, s'il vous plaît.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Merci à vous deux d'être venus nous parler aujourd'hui.
    Monsieur Wernick, j'aimerais clarifier un élément de votre témoignage. À votre connaissance, y a-t-il quelqu'un d'autre à qui le BCP aurait pu parler ou aurait pu interviewer pour faire avancer une enquête?
     Pas à ma connaissance. Je pense que l'impasse a été créée de bonne foi par le refus de M. Walbourne de nous communiquer de l'information et par le refus de la plaignante de faire confiance au processus, comme M. Lick...
    Je pense que M. Walbourne était de bonne foi. Le ministre était de bonne foi, et nous étions de bonne foi, mais cela a créé une impasse.
    En rétrospective, y avait-il une autre voie à suivre?
    Je n'en voyais certainement aucune à l'époque. Je sais que d'autres suggestions ont été faites au Comité, et je pense que vous devrez voir si, dans votre rapport, vous voulez... M. Walbourne, la plaignante, le ministre Sajjan et le Bureau du Conseil privé auraient peut-être pu choisir d'autres voies. Il existe de nombreuses autres solutions hypothétiques.

  (1515)  

    D'accord, mais à l'époque, il n'y en avait pas, à votre avis?
     C'était notre jugement, et ce n'était pas le seul problème — et j'aimerais y revenir à un moment donné. Nous avions d'autres préoccupations au sujet des hauts gradés des forces armées à l'époque, et je reconnais, avec le recul, qu'elles nous ont probablement fait perdre de vue le problème de l'inconduite sexuelle.
    Je crois important que le travail du Comité débouche sur des solutions pour aller de l'avant.
    Monsieur Lick, je crois que vous en avez parlé au début. Vous nous avez exhortés à mettre fin aux politicailleries et à travailler à régler le problème, et je pense que vous avez parlé de travailler à changer la culture.
    Monsieur Wernick, selon vous, que faut-il faire pour changer la culture des Forces armées canadiennes afin de s'attaquer au problème du harcèlement sexuel et des agressions sexuelles?
    C'est une excellente question, et si vous me le permettez, je pense qu'il y a plusieurs éléments de réponse.
    Il s'agit en partie de reconnaître que c'est un gros problème et un défi qui va au-delà d'une seule personne. Il aurait peut-être été nécessaire d'arracher les pissenlits et de changer le leadership au sommet, mais cela n'aurait pas suffi à placer les Forces canadiennes là où nous voulons qu'elles soient.
    Si vous regardez le rapport Wigston, au Royaume-Uni — que je recommande au Comité et à tous ceux qui nous regardent —, il s'agit d'un rapport exhaustif sur le même problème qui se pose dans l'armée du Royaume-Uni. Il s'agit d'un plan très complet pour aller de l'avant avec 36 recommandations, et le gouvernement Johnson s'est engagé à y donner suite et a déposé chaque année des rapports de suivi sur les progrès réalisés à cet égard. Je pense qu'un mécanisme semblable serait nécessaire.
    Je suis tout à fait d'accord avec M. Lick pour dire que, quel que soit l'organisme que les parlementaires décident de créer, il devrait faire l'objet d'une loi et être permanent. Je pense qu'une des façons d'avancer serait, qu'au lieu d'attendre que le gouvernement dépose un projet de loi, le Comité et le comité de la condition féminine conseillent le gouvernement sur ce que devraient être les caractéristiques de ce projet de loi. Je suis tout à fait disposé à en parler davantage.
    Monsieur le président, combien de temps me reste-t-il?
    Il vous reste une minute et demie.
    Monsieur Wernick, je vais revenir sur cette question, si vous me le permettez.
    Bien sûr.
    Quelles caractéristiques de conception recommanderiez-vous?
    Je pense que M. Lick a soulevé une question très importante. Allez-vous enchâsser l'obligation d'obtenir le consentement d'un plaignant pour donner suite à sa plainte, ou donneriez-vous à l'organisme d'enquête un certain pouvoir discrétionnaire pour agir sans ce consentement? C'est un énorme problème, et je n'ai pas d'opinion à ce sujet, mais vous feriez mieux d'y aller prudemment.
    Il faut envisager toutes sortes de scénarios, y compris celui où la personne au sommet de la chaîne de commandement fait l'objet de la plainte, et ce que vous feriez dans ce cas, par exemple. C'est analogue, je crois, à ce qui se passe à la GRC, qui est aux prises avec les mêmes problèmes. Comme nous l'avons appris à Rideau Hall et ailleurs, il ne suffit pas d'avoir un processus en place. Je suis tout à fait d'accord avec M. Lick pour dire que si vous n'avez pas confiance dans le processus et que les gens n'ont pas l'impression qu'ils peuvent se manifester, vous pouvez avoir toutes les formalités, tous les pouvoirs et tous les organismes d'enquête que vous voulez.
    Le gouvernement allemand a créé de nouvelles structures il y a quelques années. L'an dernier, la France a mené une enquête sur les agressions sexuelles dans ses académies militaires. Le président Biden a parlé de harcèlement sexuel et d'inconduite dans l'armée américaine, il y a à peine un mois, à l'occasion de la Journée internationale des femmes. Il est clair que nous avons un problème profondément enraciné à surmonter pour changer la culture militaire et bâtir le genre de culture militaire que nous voulons au XXIe siècle, ainsi que des systèmes de recours appropriés.
    Mon conseil au gouvernement — même si ce n'est plus mon rôle d'en donner —, c'est qu'il pourrait déposer un avant-projet de loi sous forme de livre blanc afin d'en faire un exercice moins partisan pour l'élaboration du projet de loi, ou il pourrait invoquer l'article 73 du Règlement et renvoyer le projet de loi au Comité avant la deuxième lecture et vous donner beaucoup de latitude pour le modifier. Je suis d'accord avec ce que M. Lick a dit au sujet de la nécessité de faire preuve de moins de partisanerie et de moins ressasser le passé. Je crois important d'établir ce qui s'est passé, mais je pense que les cinq partis d'un gouvernement minoritaire devraient pouvoir travailler ensemble et élaborer un nouveau projet de loi.
    Une mesure législative serait nécessaire, mais insuffisante. Il faut un programme beaucoup plus vaste que cela.
     D'accord. Merci beaucoup.
    Je comprends. Merci.

[Français]

     Monsieur Barsalou-Duval, vous avez la parole.
    Je vous remercie, madame la présidente.
    Je tiens d'abord à dire que j'ai beaucoup apprécié les témoignages de nos témoins jusqu'à présent. Ils sont très instructifs.
    Vivez-vous ou avez-vous vécu une situation semblable? Est-il facile pour vous d'entrer en contact avec le ministre?
    Monsieur Lick, l'ancien ombudsman, M. Walbourne, a déclaré qu'il avait fait plus d'une douzaine de demandes de rencontre avec le ministre, après sa réunion du 1er mars 2018, et qu'elles avaient toutes été rejetées.

  (1520)  

[Traduction]

    Je n'ai jamais eu de problème à voir le ministre depuis mon entrée en fonction. Bien sûr, le ministre est un homme très occupé, à la tête d'un ministère de la taille des Forces armées canadiennes et du ministère de la Défense nationale. Cela va de soi. Mais je n'ai pas eu de problème. Lorsque j'ai demandé un rendez-vous avec le ministre, je l'ai eu sans difficulté.

[Français]

    Lors de votre entrée en fonction, avez-vous eu des échos ou, du moins, des breffages de la part de votre prédécesseur? Avez-vous eu des contacts avec lui pour vous préparer à ce poste?
    Vous a-t-il parlé, par exemple, de difficultés relatives aux dossiers d'inconduite sexuelle dont on parlait, ou même de relations avec le Bureau du Conseil privé ou le ministre de la Défense?

[Traduction]

    Juste avant mon entrée en fonction, Mme Hynes et l'équipe de gestion m'ont fait part des responsabilités générales du bureau de l'ombudsman, des types d'enquêtes qu'il menait, de la structure du bureau et de la gestion du bureau. Ce fut un très court breffage, parce que je devais aller témoigner devant un autre comité juste après, mais cela m'a donné un très rapide aperçu de ce que faisait le bureau à l'époque et de la façon dont il était structuré — le budget, la structure, etc.
    Il n'a pas été question d'allégations d'inconduite sexuelle à ce moment-là.
    D'accord. Merci beaucoup.
    La parole est maintenant à M. Garrison.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    J'aimerais revenir à M. Wernick et à la durée du mandat du chef d'état-major de la Défense, le CEMD. Je crois savoir que la nomination du chef d'état-major de la Défense n'est pas fermée, c'est-à-dire qu'il n'a pas de date fixe d'expiration.
     Vous avez eu des discussions avec le ministre sur la durée du mandat du CEMD, et il semble que le général Vance ait servi plus longtemps que la plupart de ses prédécesseurs. Pouvez-vous nous dire quelle serait normalement la durée du mandat du chef d'état-major de la Défense, et ce qu'on fait pour la prolonger ou l'abréger?
    Vous êtes en sourdine, monsieur Wernick.
    On dirait que c'est le nouveau mot de 2021. Mes excuses.
    Je peux me tromper, mais je crois comprendre comme vous que la nomination faite par le gouvernement Harper en 2015 était ouverte. Autrement dit, il n'a jamais été question de le prolonger. Il allait rester en poste jusqu'à ce que quelqu'un s'avise de dire: « Ça y est, nous allons avoir une passation de commandement », faire une rétro-ingénierie à partir de cette date et lancer un processus de succession. En 2018, à l'époque dont nous parlons, le général était là depuis trois ans. La convention prévoyait quatre ou cinq ans.
    Si vous vérifiez, vous verrez que certains ont fait quatre ans et d'autres cinq. Faites le calcul, et vous verrez que son mandat expirerait après quatre ou cinq ans en 2019 ou 2020. Avec des élections à date fixe et le blocage des nominations importantes à l'automne 2019, il fallait décider s'il allait être en poste quatre ans ou cinq ans. La passation de commandement allait-elle précéder ou suivre les élections? C'était essentiellement... Il n'y a jamais eu de prolongation, et sa promotion de DM 2 à DM 3 remontait à 2017, après deux années en fonction.
    La question était de savoir si le gouvernement devait choisir une date pour la passation de commandement et amorcer un processus de recherche pour la succession. Tel était l'essentiel des conseils et du contenu de la note que j'ai adressée— que le Bureau du Conseil privé a adressée — au premier ministre au sujet du général Vance au début de juillet 2018. Cette note comporte deux choses. La première était la cote recommandée pour 2017-2018, dont je suis heureux de parler. Puis, elle soulevait la question de la durée du mandat et présentait un choix au premier ministre: voulez-vous régler cela en 2019 ou en 2020?
    À ce moment-là, l'intérêt du général pour le poste à l'OTAN était un facteur, tout comme ce qui était en train de devenir un roulement très rapide chez les hauts gradés de l'armée, et je suis heureux d'en parler également.

  (1525)  

     Merci beaucoup.
    Et c'était le principal...
    Désolée.
    Madame Gallant, vous avez la parole.
    Monsieur Wernick, en apprenant qu'il y avait une allégation contre le général Vance, avez-vous fait sortir son dossier au Bureau du Conseil privé, pour voir s'il y avait déjà eu des enquêtes sur lui?
    Que je sache, il n'y avait pas de dossier de cette nature au Bureau du Conseil privé. Il faudrait poser la question à Mme Sherman, mais, non, je n'ai pas consulté de dossier le concernant.
    Les allégations contre le général Vance avaient-elles jamais été soulevées dans une réunion avec le personnel du Bureau du Conseil privé, le BCP, et du Cabinet du premier ministre, le CPM? Un simple oui ou non suffira.
    J'ignore quelles conversations a pu avoir le personnel politique du premier ministre. Sans doute des conversations entre Janine Sherman et certains membres du personnel du CPM.
    Au total, combien de personnes auraient été au courant des allégations contre le général Vance?
    Je ne saurais répondre à cette question.
    Avez-vous déjà présenté au Cabinet du premier ministre des options concernant les allégations contre le général Vance qui ont été portées à l'attention du BCP et du CPM? Un simple oui ou non suffira.
    Je ne me rappelle pas si nous l'avons fait ou pas. Je crois comprendre, en m'appuyant sur un article paru dans les médias, que Mme Sherman a rédigé une note au sujet du processus entourant une enquête. J'ai lu cela dans les médias.
    Quelles options avez-vous proposées au CPM?
    Je n'ai rien proposé. Je pense que Mme Sherman a parlé à quelqu'un, à M. Marques, je suppose, du Cabinet du premier ministre.
    Pourquoi le chef de cabinet du premier ministre s'adresserait-il au greffier du Conseil privé plutôt qu'au conseiller à la sécurité nationale?
    Désolé. Je ne comprends pas.
    Pourquoi le chef de cabinet, Elder Marques, irait-il...
    Non. Il n'était pas chef de cabinet. Il était un des agents. C'est Katie Telford qui est cheffe de cabinet du premier ministre.
    D'accord. Alors pourquoi M. Marques se serait-il adressé au greffier plutôt qu'au conseiller à la sécurité nationale?
    Parce que je suis le patron du ministère du premier ministre. Il serait ainsi allé directement au sommet en disant: « Nous avons un problème très grave. Le ministre veut qu'on se penche là-dessus. Comment faut-il procéder? »
    C'était donc à vous de décider s'il y avait lieu ou pas de confier l'enquête au conseiller à la sécurité nationale.
    À ce moment-là, j'ai jugé qu'il s'agissait d'un dossier concernant un fonctionnaire nommé par décret. Je l'ai donc confié à Mme Sherman.
    Pour revenir à la question de la rémunération, un décret d'augmentation de rémunération pour un chef d'état-major de la Défense serait-il normalement signé par le ministre de la Défense nationale?
    Les augmentations économiques n'étaient pas du ressort du ministre Sajjan. Comme je l'ai dit, toutes les personnes nommées par décret — il y en a 160 à temps plein et environ 1 000 à temps partiel — ont eu une augmentation économique, une augmentation de salaire, au printemps 2019. L'augmentation a été retenue trois ans, parce que le ministre Brison au Conseil du Trésor ne voulait pas d'augmentations salariales pour les hauts fonctionnaires pendant que le système de paie Phénix était toujours en panne.
    Il y a eu trois ans de rattrapage et un remaniement des échelles salariales qui s'est répercuté sur toutes les nominations par décret, au printemps 2019. C'est ce décret que vous auriez vu.
    Si le ministère d'autorisation d'un décret d'augmentation de salaire est le Cabinet du premier ministre, cela exige-t-il la signature du premier ministre?
    Nous aurions eu besoin d'une version écrite de l'accord. Les décrets sont autorisés ou recommandés par les ministres.
    À la fin de votre mandat de greffier, quel jour de la semaine les réunions du Cabinet avaient-elles habituellement eu lieu?
    Du temps que j'y étais, le Cabinet se réunissait normalement le mardi matin dans les semaines où la Chambre siégeait, et pas pendant les pauses parlementaires.
    La présence de quelques douzaines de décrets adoptés le même jour signifie-t-elle qu'une réunion du Cabinet avait eu lieu ce jour-là, ou qu'un décret particulier a circulé?
    Non. Les décrets exécutifs ne sont pas tous soumis au Cabinet. Beaucoup le sont, mais un grand nombre passent en fait par le Conseil du Trésor. Le Conseil du Trésor a le pouvoir délégué de prendre toutes sortes de décrets, de décrets du conseil. Les décrets sont une grande partie du rôle du Conseil du Trésor également. Certains sont envoyés au premier ministre pour approbation. Ils sont ensuite traités, essentiellement.
    Ils aboutissent tous sur le bureau du gouverneur général.

  (1530)  

    Le premier ministre reçoit-il des notes de breffage sur les décrets?
    Elles sont habituellement mises en lots.
    Si le Cabinet du premier ministre était le bureau responsable d'un décret, quelles notes de breffage le premier ministre recevrait-il et quelle serait la probabilité qu'il y appose sa signature?
     De façon générale, il y aurait une note de couverture d'une recommandation au premier ministre pour indiquer qu'il s'agit d'un lot de décrets ou d'un décret individuel appelant une décision du premier ministre.
    Le premier ministre joue un rôle particulier dans les nominations et dans les changements à l'appareil gouvernemental — le démantèlement et la reconstitution d'organisations gouvernementales.
    Habituellement, le BCP présente une recommandation ou des options demandant son accord, et le premier ministre les renvoie avec une mention d'accord ou une indication quelconque, ou ne reviennent qu'après un certain temps.
    Il existe un système de gestion des documents où est consignée chaque note que le BCP adresse au premier ministre, et chaque note qui revient.
    Qui au CPM...
    Merci beaucoup.

[Français]

Monsieur Robillard, vous avez la parole.
    Monsieur Wernick, vous parliez plus tôt des 36 recommandations qui ont été formulées en Grande-Bretagne afin d'aborder le problème des inconduites sexuelles.
    Seriez-vous capable de nous en nommer une en particulier qui nous permettrait d'encourager les victimes à témoigner?
    Je n'ai pas tous les détails devant moi, mais je pense que le rapport Wigston soulève la même question que M. Lick, c'est-à-dire la confiance dans le processus et le changement de culture relatif à l'acceptation de comportements qui sont devenus normaux au sein de l'armée.
    Je vous remercie.
    Monsieur Wernick, que pensez-vous de l'idée d'un bureau indépendant qui rendrait des comptes directement au Parlement, une idée de plus en plus avancée dans le milieu de la défense?
    C'est une bonne idée, mais ce n'est pas nécessairement la solution.
    Il y a une douzaine d'agents du Parlement: le vérificateur général, le commissaire à l'information, le commissaire aux langues officielles, etc. Il y a une gamme d'organismes qui aident le Parlement à surveiller l'exécutif, c'est-à-dire le gouvernement. On peut certainement en ajouter un autre. Ce n'est pas une garantie de succès, mais ce pourrait être une façon de procéder.
    Je suis d'accord qu'il faut avoir un organisme autonome et indépendant.
    J'aimerais vous laisser un peu de temps, si vous le voulez, pour nous parler d'une autre méthode qui vous aurait permis d'aller au bout de l'enquête contre le général Vance. Sinon, je vous invite à approfondir une de vos réponses précédentes.
    En passant, je vous félicite pour votre français impeccable.
    Je vous remercie. C'est tout un compliment puisque, depuis que j'ai pris ma retraite, j'utilise rarement la langue de Molière.
    Je n'ai pas de recommandation précise à faire. Si vous le voulez, je peux aborder de nouveau la question et vous donner mes conseils lorsque le gouvernement aura déposé un projet de loi. Le rapport Wigston est peut-être un modèle à suivre pour le Parlement et le gouvernement.
    Mon interprétation de ce qui s'est passé, c'est qu'on a créé un cercle vicieux. Ce sera à vous, au moment de rédiger de votre rapport, de décider si vous êtes d'accord ou non avec moi. Le ministre Sajjan avait d'autres options, M. Walbourne avait d'autres options et j'avais aussi d'autres options, mais ce qui s'est passé s'est passé. Sur le fond, le fait que la source était anonyme et que la personne qui a déposé la plainte ne nous a pas donné la permission de procéder a créé une impasse.
    Selon moi, c'est vraiment le système dans son ensemble qui a créé la situation.

  (1535)  

[Traduction]

    Je pense que le ministre Sajjan avait le choix de faire les choses autrement. Je pense que M. Walbourne pouvait faire les choses autrement, et je peux voir que le Bureau du Conseil privé pouvait aussi faire les choses autement, ce qui aurait changé les délais.
    La somme de ce qui s'est passé a créé une impasse, et nous n'avons pas pu aller de l'avant. Je le regrette.

[Français]

     Merci beaucoup.

[Traduction]

    Si vous avez fini, monsieur Robillard, nous allons passer à M. Benzen.
    Merci, madame la présidente, et merci aux deux témoins de leur présence aujourd'hui.
    Monsieur Wernick, vous êtes là pour conseiller le premier ministre et le tenir au courant de ce qui se passe. Arrive une allégation de harcèlement sexuel, qui reste sans suite, mais vous ne l'oubliez pas. Que pensiez-vous de nos adversaires étrangers? Que pensiez-vous des autres pays du monde et de la façon dont ils pourraient découvrir ces allégations et s'en servir pour compromettre notre premier soldat? Quelles étaient vos réflexions à ce sujet?
    Vous pensez que des pays étrangers auraient piraté le bureau de l'ombudsman?
    Non. Je dis que ces allégations étaient bien connues... peut-être pas celle-ci en particulier, mais il y avait des allégations qui circulaient, et d'autres pays auraient bien pu être au courant. Votre soldat numéro un se trouve dans cette situation très délicate. Cela ne vous a-t-il pas traversé l'esprit?
    Vous avez dit que nous étions dans une impasse et que nous ne pouvions pas aller de l'avant, mais sachant qu'il y avait une impasse et que vous aviez ce soldat numéro un... Ce n'est pas un soldat ordinaire que l'on peut laisser s'en tirer. C'est un problème que vous devez régler. Vous devez commander une enquête.
    Je m'inquiète de ce que vous avez pensé de cet aspect — la possibilité d'atteinte à la sécurité nationale — et de la raison pour laquelle vous avez laissé l'impasse se produire, sans faire une sortie pour annoncer qu'il faut régler le problème.
    Ma foi, je pense que vous devrez expliquer dans votre rapport quelle était la solution de rechange. Comme je l'ai dit, il n'y avait pas de plaignant à interroger; pas de témoins non plus, et il aurait été inapproprié de confronter le général à ce moment-là. Je ne connaissais pas les détails de l'allégation. Je les ai appris cette année. Même chose pour les allégations contre l'amiral McDonald et le vice-amiral Edmundson.
    Vous n'étiez peut-être pas au courant, mais il y avait quand même des allégations.
    Pourquoi ne pas aborder le problème sous cet angle? Vous avez là votre soldat numéro un, responsable de l'opération Honour visant à éliminer l'inconduite sexuelle et le harcèlement dans les forces armées, et c'est lui qui est accusé. N'était-ce pas, encore une fois, dans l'optique de la perception pour ce qui est de conseiller le premier ministre, un problème qui vous ferait dire: « Cela ne peut pas se passer. Nous devons régler ce problème et mettre cela derrière nous »?
    Ne croyez-vous pas qu'il était urgent d'aller de l'avant et de régler l'affaire?
    Nous n'avons pas fermé le dossier. Nous étions prêts à aller plus loin, si nous avions eu d'autres renseignements. J'espérais recevoir d'autres renseignements qui auraient pu ouvrir d'autres avenues. Je reconnais que la question est disparue de l'écran radar au printemps 2018 et qu'il n'y avait pas d'urgence à l'époque. D'autres problèmes chez les hauts gradés de l'armée empêchaient de voir ce qui se passait. J'ai perdu de vue cette question. Je le concède.
    Avez-vous déjà rédigé un rapport proposant au premier ministre un moyen de nommer un nouveau chef d'état-major pour mettre fin prématurément au mandat du général Vance?
    Comme je l'ai dit, la note sur l'évaluation du rendement qui a été envoyée au début de juillet — il n'y a aucune raison pour que le Bureau du Conseil privé ne puisse pas confirmer la date d'envoi, mais je crois me rappeler que c'était au début de juillet 2018 — saisissait le premier ministre de deux questions. La première était une recommandation concernant la cote de rendement pour l'exercice 2017-2018 avec justification. L'essentiel de la note portait sur la question de savoir quand la passation de commandement aurait lieu. C'est la note du début de juillet. Elle n'est revenue du Cabinet du premier ministre qu'après plusieurs mois en 2019.

  (1540)  

    Lorsque vous avez parlé au ministre de la défense au cours de vos réunions — celles de la fin de l'automne, et celle que vous avez eue en mai...
    Désolé. Elles ont eu lieu en mai et en juin.
    Cela a-t-il fait partie de vos discussions sur la durée du mandat du général Vance et sur la possibilité de l'abréger, et de remplacer le général?
     Oui. Je ne voulais pas improviser mes recommandations sur la cote de rendement ou sur la durée du mandat et sur le moment où il aurait fallu procéder à la passation de commandement sans y avoir réfléchi, mais je me suis adressé au ministre de la Défense nationale et à la sous-ministre de la Défense nationale , mes principales sources d'information à ce sujet.
    Il y avait d'autres problèmes touchant la cote de rendement, si vous me permettez de les énumérer rapidement. C'était pour le cycle de rendement de 2017-2018, de sorte que les choses qui étaient dans notre ligne de visée étaient que nous en étions à la première année de la mise en œuvre de la nouvelle politique de défense, annoncée en juin 2017, et qu'il y avait des investissements à faire. Et le processus d'acquisition des avions de chasse a été relancé, après une longue interruption. Il y a eu le déploiement au Mali. Et le fait que le Canada avait accepté d'assumer le leadership de la mission d'entraînement de l'OTAN en Irak. Il s'est fait de l'excellent travail pour refermer l'écart avec le ministère des Anciens Combattants; pour la première fois depuis de nombreuses années, les Forces armées canadiennes et le ministère des Anciens Combattants travaillaient très bien ensemble. Le dossier des excuses aux militaires LGBTQ a été réglé, tout comme celui des 100 millions de dollars. Franchement, nous lui reconnaissions le mérite de l'opération Honour et du travail accompli sur les questions de santé mentale et de milieu de travail. Il y a eu beaucoup de points positifs cette année-là.
    J'ai fait part au ministre de certaines préoccupations au sujet du roulement des cadres supérieurs, parce que, à ce moment-là, le 2 mars, il y avait eu un important remaniement du groupe d'officiers supérieurs. Par coïncidence, le vendredi 2 mars était la date de l'annonce des promotions et des départs à la retraite. Tout un chambardement. Je crois qu'il y a eu un reportage de la CBC à ce sujet.
    Et le 9 mars, la Gendarmerie royale du Canada a porté des accusations criminelles contre l'amiral Norman, ce qui a entraîné un autre remaniement. Puis il y a eu encore un autre au printemps, ce qui m'a amené à demander au ministre ce qui pouvait bien se passer. C'était un facteur.
    L'ambition du général Vance, qui convoitait le poste à l'OTAN, était pertinente. Je voulais savoir si le ministre pensait que c'était réaliste ou non. Le général était-il un candidat sérieux, ou son ambition était-elle illusoire? Si je me rappelle bien, le ministre a dit que oui, sa candidature serait prise au sérieux.
    Et ensuite, il y a eu le problème du maintien de bonnes relations avec l'armée américaine en 2018, avec un commandant en chef erratique à la Maison-Blanche. Le général Vance avait d'excellentes relations avec l'armée américaine. Tout cela faisait partie d'un tourbillon de problèmes, et je reconnais que nous avons perdu de vue les problèmes d'inconduite. Je ne me rappelle pas que nous nous en soyons parlé.
    C'est bon. Merci beaucoup.
    Allez-y, monsieur Spengemann.
    Madame la présidente, merci beaucoup.
    Merci beaucoup, monsieur Wernick, d'être des nôtres aujourd'hui. Je tiens à vous remercier pour vos années de service. Avant d'être élu, j'ai eu la chance de faire un bref séjour au Bureau du Conseil privé, entre 2003 et 2005. Nous avons bien dû nous croiser à ce moment-là.
    J'aimerais revenir à une question assez générale. Je ne sais pas si vous pouvez nous en faire un résumé convaincant. Au sein de la fonction publique au sens large, comment traite-t-on les allégations d'inconduite sexuelle et de harcèlement? Y a-t-il des éléments communs entre les diverses branches de la fonction publique pour ce qui est de ce genre de comportements?
    Je ne suis pas le mieux placé pour donner les détails, mais vous pourriez sans doute les obtenir de Mme Sherman ou du Conseil du Trésor. Il y a un processus très formel et structuré pour les questions de harcèlement, de discrimination et d'inconduite. Les organisations ont des obligations très claires, et il y a des mécanismes de recours. Cela se rattache également à la négociation collective et au droit d'utiliser les griefs et les syndicats pour se faire représenter dans ces dossiers, et ainsi de suite.
    Nous avons aussi utilisé des sondages annuels approfondis de la fonction publique et une foule de questions sur le harcèlement et la discrimination pour essayer de cerner les points chauds et de cibler avec précision les gestionnaires qui pourraient poser problème et ainsi de suite. Certes, je ne pense pas que c'était parfait ou que nous avons fait tout ce que nous aurions pu faire, mais nous avons fait des progrès.
    #MoiAussi est arrivé à l'hiver 2017, et nous avons fait un examen sérieux de ce qui se passait dans la fonction publique civile. Il y avait des équipes de travail. De fait, Mme Sherman en a piloté une, sous ma direction. Mme Thomas a joué un rôle très actif en tant que sous-ministre principale, et ainsi de suite. Donc, nous nous en sommes occupés.
    Cela me donne l'occasion de dire officiellement que l'une des choses que nous avons faites à la suite de #MoiAussi et de ce processus d'examen a été de modifier le processus de rémunération au rendement des personnes nommées par le gouverneur en conseil. Vous verrez sur le site Web que la dernière mise à jour de la politique date d'avril 2018. De fait, c'est le principal changement que nous avons fait: la rémunération au rendement est désormais révocable et récupérable dans les cas graves de gabegie et d'inconduite. Ce n'était pas le cas auparavant, et les coupables pouvaient s'en tirer en prenant leur retraite ou en quittant. Ce qu'ils ne peuvent plus faire.

  (1545)  

     C'est utile. Merci beaucoup.
    Est-il juste de dire que les droits, les préférences et les intérêts du plaignant ou de la plaignante sont au cœur de la gestion de ces cas?
    Oui. Le problème est énorme, et la solution n'est jamais facile.
     Encore une fois, je suis tout à fait d'accord avec M. Lick. Au bout du compte, il y a toujours moyen de formaliser les structures, les processus et les responsabilités; mais si on ne leur fait pas confiance, on ne les utilise pas. Rideau Hall en est le meilleur exemple.
    Merci, monsieur Wernick.
    Vous avez été à la barre de la gestion du changement dans notre fonction publique au plus haut niveau. Je vous suis très reconnaissant de votre témoignage sur les expériences comparatives, notamment sur le rapport Wigston et d'autres administrations. On peut supposer que, si c'est un problème ici, c'est un problème ailleurs.
    Selon votre évaluation de ces initiatives, y a-t-il un pays aujourd'hui qui a su bien faire les choses, qui a surmonté une culture négative et qui a mis en place de façon plus permanente les changements que vous avez évoqués? La plupart des pays en sont-ils encore à l'étape des rapports d'enquête, aux prises avec le problème?
    Je ne suis peut-être pas qualifié pour me prononcer là-dessus. Ces dernières semaines, j'ai multiplié mes recherches sur Internet sur la question. Ce qui me frappe, c'est que tous les pays qui ont une armée cherchent à l'aligner sur les valeurs du XXIe siècle pour ce qui est de la conduite, et particulièrement du rôle des femmes dans les forces.
     Personne ne semble satisfait. Regardez ce qui se passe au Royaume-Uni, en France, aux États-Unis, en Allemagne, en Israël ou en Inde, autant de pays qui sont aux prises avec le problème. Au bout du compte, je pense que nous devrons trouver une solution propre au Canada et faite au Canada.
    Je vous remercie.
    Selon votre témoignage, la loi elle-même est insuffisante. Pourriez-vous nous donner quelques-uns des autres éléments et nous préciser dans quel ordre il faut les mettre en place pour réussir?
    Je ne suis pas sûr qu'il y ait une bonne séquence de lancement. Il faudrait que j'y réfléchisse. Disons quand même que le changement de culture et l'engagement en sont un grand facteur. La confiance ne se bâtit pas du jour au lendemain. On peut la perdre du jour au lendemain, mais on l'établit au fil des ans en prêchant par l'exemple. Cela fait partie de la formation. C'est ce qu'on fait dans les collèges militaires. La transformation d'une grande organisation complexe, particulièrement d'une organisation de commandement et de contrôle, comporte de nombreux aspects. Il est frappant de voir que la Gendarmerie royale du Canada, la GRC, et l'armée souffrent du même mal.
    Merci, monsieur Wernick.
    Merci, madame la présidente.
    Merci beaucoup.

[Français]

     Monsieur Barsalou-Duval, vous avez la parole.
    Je vous remercie, madame la présidente.
    Monsieur Wernick, j'ai trouvé tout votre témoignage très intéressant. Vous avez dit que la plaignante ne faisait pas confiance au processus et que, puisque l'ombudsman ne voulait pas transmettre plus de détails au Bureau du Conseil privé, on s'est retrouvé bloqué. Je comprends cette perspective et cette histoire.
    Toutefois, d'un autre côté, en 2015, il y a eu une enquête sur des allégations du même type visant le même général. Ne vous est-il pas venu à l'idée, à cette époque, de rouvrir ces dossiers pour voir s'il n'y avait pas quelque chose qui clochait, en voyant que cela persistait dans le temps? C'est comme un boulet ou un bruit ambiant qui persiste.
    Il me semble que c'est un indice assez parlant.
    Oui. Ce que je peux dire, c'est que je n'avais pas connaissance des allégations de 2015. J'ai accepté le fait que le général était passé par un processus de sélection et qu'il avait été nommé, et je n'ai pas rouvert les dossiers de 2015.
    L'entourage du ministre de la Défense était-il au courant, lui, de ces antécédents?
    Je ne peux pas vous le dire, parce que je ne le sais pas.

  (1550)  

    Cela ne devrait-il pas être un réflexe, dans un tel processus, de s'informer pour savoir s'il y a des antécédents?
    C'est une question qu'il faut poser au ministre ou au sous-ministre de la Défense nationale. Moi, je n'avais jamais été au courant des allégations, passées ou actuelles, visant le général.
    Quand il y a des allégations de comportements inappropriés de la part d'un haut gradé de l'armée, comme le chef d'état-major de la Défense, qu'ils soient de nature criminelle ou non, qui est responsable des gestes de celui-ci, en fin de compte?
    On parle beaucoup du Bureau du Conseil privé. Le ministre a souvent répété qu'il lui avait envoyé l'information.
     Est-ce le Bureau du Conseil privé ou le ministre qui est responsable de cela?
     Je ne suis pas certain de la réponse. Je pense qu'il faudrait poser la question à un avocat.
    Selon ce que j'en comprends, le Bureau du Conseil privé a toujours l'obligation de faire un premier tri, un examen des faits, et de décider d'un processus à suivre par la suite. Comme quelqu'un l'a suggéré, il peut s'agir d'engager le conseiller à la sécurité nationale. Si les premières indications laissent entrevoir la possibilité d'actes criminels, on appelle tout de suite la Gendarmerie royale du Canada.
    N'a-t-il pas été envisagé de communiquer, par exemple, avec le Service national des enquêtes des Forces canadiennes, qui avait mené une enquête en 2015?
    Je sais que vous n'étiez peut-être pas au courant, comme vous l'avez dit, de ce qui s'était passé avant, mais cela aurait pu être une idée d'appeler ces gens pour voir s'il existait un dossier là-bas.
    Selon ce que j'en comprenais à l'époque, c'était l'ombudsman qui était responsable du dossier.

[Traduction]

     Merci beaucoup.
    Nous passons maintenant à M. Garrison. Allez-y, s'il vous plaît.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    J'aimerais revenir à M. Wernick et parler des changements de personnel des hauts gradés des Forces canadiennes. La distinction entre ce que fait notre comité et une étude plus vaste, c'est que nous cherchons à découvrir pourquoi rien n'a été fait lorsqu'il y a eu de graves allégations portées contre le général Vance, et comment il a pu rester en poste pendant trois ans.
    Les hauts dirigeants comprennent bien que c'est ainsi que l'on aborde la question de confiance, et réagiront aux allégations d'inconduite sexuelle. Avec tous les changements dont nous sommes témoin, il me semble curieux, compte tenu surtout du féminisme que professe le gouvernement et compte tenu également du mouvement #MoiAussi, que les femmes n'aient pas accédé aux échelons supérieurs de commandement dans les Forces armées canadiennes entre 2015 et 2021. En a-t-il été question dans les discussions que vous avez eues avec le ministre ou dans celles que vous auriez pu avoir avec le Cabinet du premier ministre?
    Non. Je n'ai pas discuté de nominations précises à un niveau inférieur à celui du chef d'état-major de la défense.
    Personne n'a soulevé cette préoccupation? Lorsqu'on veut s'attaquer à l'inconduite sexuelle, comme toutes les études le démontrent, il faut une masse critique de femmes dans des postes de responsabilité pour changer la culture organisationnelle.
    Cela n'a pas fait partie de la discussion?
    En toile de fond, pendant tout le temps que j'ai été greffier, il y avait un effort pour réaliser une plus grande parité entre les sexes dans tout l'éventail des nominations et des collectivités relevant du gouvernement fédéral. C'était toujours un enjeu ou un facteur à considérer pour voir si nous pouvions infléchir la courbe, pour ainsi dire, vers une plus grande parité entre les sexes.
    Mais c'est toujours un ministre qui recommande qui nommer à tel ou tel poste. Dans le cas des diplomates, les recommandations viennent du ministre des Affaires étrangères. Pour les juges, elles viennent du ministre de la Justice. Pour le personnel militaire, elles viennent du ministre de la Défense.
    Les progrès à faire vers la nomination de femmes à des grades supérieurs et la réalisation d'une masse critique de femmes aux échelons supérieurs auraient été de la responsabilité du ministre de la Défense. Je pense que vous venez de le dire clairement. Suis-je...
    Cela aurait été la responsabilité collective du ministre, appuyé par le CEMD et de la sous-ministre, oui.
    Vous ne pouviez pas savoir si ces discussions ont eu lieu entre le ministre, le chef d'état-major de la défense et la sous-ministre.
    Non, et le Cabinet du premier ministre ne participait pas aux discussions internes au sujet de la dotation dans les forces armées.
    Merci beaucoup.
    Nous arrivons à M. Bezan. Allez-y, s'il vous plaît.
    Merci, madame la présidente.
     Monsieur Wernick, j'apprécie le regret que vous exprimez pour ce qui s'est passé depuis 2018, et ce que nous avons appris depuis quelques mois.
    Pourriez-vous simplement énumérer toutes les personnes à qui vous avez parlé au sujet des allégations contre le général Vance lorsque vous étiez encore en poste en 2018?

  (1555)  

    Pour autant que je me souvienne, il s'agit de Mme Janine Sherman et de mon premier contact avec M. Elder Marques. Je ne me rappelle pas avoir repris contact avec M. Elder Marques. Peut-être que oui — il faudrait le lui demander — mais je ne me rappelle pas d'un suivi dans ce cas.
    Je pense que nous avons signalé en mars que nous étions dans une impasse et avions gardé le dossier ouvert. Il y a quelque part une note sur les processus qui ont été suivis. Je ne connais pas la date exacte par cœur. Ce doit être au printemps 2018. En mai ou en juin, nous étions passés aux autres questions au sujet du mandat, du roulement et de la passation de commandement, et de la situation générale aux échelons supérieurs.
     La sous-ministre de la Défense nationale relevait de vous. N'auriez-vous pas eu cette conversation avec Mme Jody Thomas?
    Je me rappelle une conversation que j'ai eue avec Mme Thomas dans le contexte de cette évaluation générale du rendement au sujet du roulement de personnel, des répercussions des accusations criminelles contre l'amiral Norman, et de la question de savoir si le général Vance était un candidat sérieux au poste de l'OTAN et de ce qu'elle en pensait. Cela faisait partie d'un tourbillon de questions sur l'état des forces armées.
    Je m'inquiétais un peu de ce qui se passait dans l'armée, mais je m'en remettais à la sous-ministre, au ministre et au chef d'état-major de la défense à ce stade-là. Je ne m'en suis pas trop mêlé.
    Le ministre Sajjan a dit plus tôt qu'il avait une conversation téléphonique annuelle de 15 minutes avec vous au sujet de l'évaluation du rendement du chef d'état-major de la défense et aussi au sujet de la sous-ministre. Est-ce la bonne façon de prendre des décisions difficiles concernant l'évaluation du rendement — un simple coup de fil de 15 minutes — ou y a-t-il eu quelque chose de plus poussé?
    Je ne saurais être catégorique quant à la durée de l'appel. Je n'ai pas mes calendriers sous les yeux. L'appel durait généralement aussi longtemps que le ministre avait envie de parler. Parfois, il était bref. Parfois, nous parlions près d'une heure pour avoir des avis sur la sous-ministre... Cela dépendait du portefeuille, si cela peut être utile. S'il y avait beaucoup de dirigeants de sociétés d'État ou de sous-ministres délégués, s'il y avait d'autres organismes, la question était toujours la même: « Avez-vous des vues à nous faire connaître sur certaines de ces personnes? », et ainsi de suite.
     Le ministre Sajjan ne vous a encore jamais rappelé cette allégation d'inconduite sexuelle. L'exercice 2017-2018 a pris fin le 31 mars et, bien sûr, en mars 2018, vous vous affairiez à l'examen des allégations.
    Je ne peux parler que du cycle de 2017-2018 et des conversations du printemps 2018. Je n'ai pas soulevé les questions d'inconduite, et lui non plus. Je reconnais que j'aurais pu en parler au ministre, mais le ministre aurait pu m'en parler lui-même. Nous ne l'avons pas fait. Nous avons parlé d'autres choses. C'était probablement une conversation téléphonique précipitée.
    Je me souviens qu'il y en a eu une deuxième en juin, où nous avons conclu qu'il y avait un problème. Un ancien général — en fait, un ancien chef d'état-major de la défense — m'avait confié à l'époque qu'il était préoccupé par les accusations contre l'amiral Norman et par l'accélération de départs à la retraite et du roulement. Il avait entendu une rumeur — et je suis désolé de la reprendre — selon laquelle le général Vance aurait confié à ses collègues qu'il allait rester jusqu'à ce qu'il décroche le poste à l'OTAN, mais pas plus tard que 2022. Sept ans. Il était très inquiet. Je suivais de près la question de savoir quand la passation de commandement devait avoir lieu, et j'ai perdu de vue la question de l'inconduite.
    Vous avez parlé plus tôt de la ligne de visée et de toutes les bonnes choses que vous attribuez au général Vance. Les allégations contre le vice-amiral Mark Norman sont-elles dans la ligne de visée également? Nous savons qu'il a été accusé le 8 mars 2018.
    Oui. L'amiral Norman a été accusé par la Gendarmerie royale du Canada, agissant de façon indépendante, et par le directeur des poursuites pénales, agissant aussi de façon indépendante. Ce qu'il faut retenir, je suppose, c'est que cela a déstabilisé les hauts gradés. Les accusations criminelles contre le vice-chef sont des plus troublantes, comme vous vous rappellerez, et cela a eu un effet domino et donné lieu à d'autres changements aux échelons supérieurs. Il y a eu une vague de... On venait de faire une série importante de nominations et d'annonces de départs à la retraite le 2 mars. Puis, l'amiral Norman a été accusé, et il y a eu une autre série de nominations et de départs à la retraite, en avril ou en mai, sauf erreur. Le tableau d'ensemble est celui d'une organisation qui est très instable au sommet.

  (1600)  

    Merci beaucoup.
    Nous allons passer à Mme Vandenbeld, s'il vous plaît.
     Merci beaucoup.
    J'aimerais d'abord corriger certains points que certains membres du Comité ont soulevés au cours de la séance.
    En premier lieu, pour ce qui est des officières générales, en 2015, il y en avait 6 à ce niveau ou plus haut, et il y en a aujourd'hui 15. Cela devrait répondre à la question sur la promotion des femmes.
    L'autre chose qui me préoccupe beaucoup est que, selon ce que nous apprennent de nombreux membres du Comité, il y avait des allégations très bien connues contre le général Vance. Je pense que nous devrions revenir au témoignage selon lequel en 2018, comme l'ont dit tous les témoins, on n'était pas au courant d'autres allégations. Les seules personnes qui étaient au courant dès 2015 étaient M. O'Toole et son chef de cabinet. Il faut prendre garde, parce que si les députés de l'opposition sont au courant de multiples allégations... On sait qu'il y a une enquête en cours, et j'espère beaucoup que quiconque est au courant d'autres allégations les soumettra aux autorités compétentes pour examen dans le cadre de l'enquête en cours.
    Cela dit, j'aimerais demander quelques précisions, encore une fois, à M. Wernick.
    Monsieur Wernick, des membres du Comité nous ont appris certaines choses au cours de cette séance et des séances précédentes. Nous les avons entendus expliquer qu'il y a eu des allégations fondées d'inconduite sexuelle en 2018 et que le gouvernement, le ministre et le BCP n'ont rien fait, les ont traitées comme un problème épineux, ou ont fermé les yeux. Dans certains cas, il y a eu des insinuations, qui ont été délibérément écartées. Diriez-vous, monsieur Wernick, que c'est un portrait exact de ce qui s'est passé en 2018?
    Je me contenterai de répéter ce que j'ai dit aujourd'hui. Nous avons pris en charge le dossier le 2 mars. Dans les 24 heures de la visite de M. Walbourne chez le ministre, nous avions pris en charge le dossier et avions communiqué avec M. Walbourne pour voir ce que nous pourrions trouver. Nous nous sommes retrouvés dans une impasse à la mi-mars, incapables d'aller plus loin.
    Monsieur Wernick, pensez-vous qu'il convenait que le ministre, sitôt sorti de sa rencontre avec M. Walbourne, en parle avec votre bureau, avec le BCP?
    Je pense qu'il avait le choix de prendre l'enveloppe et de la refiler immédiatement à quelqu'un pour qu'il nous l'envoie. Il aurait pu être le messager et dire: « D'accord, je la prends, mais je l'envoie au BCP ».
    Je pense que M. Walbourne aurait pu trouver une version expurgée de l'information à nous remettre, ce qui aurait pu nous donner plus de matière à examiner.
    Pensez-vous que le résultat aurait été différent, étant donné que Mme Sherman a dit dans son témoignage qu'elle a demandé à M. Walbourne de transmettre des renseignements anonymisés, des renseignements sur la nature des allégations, même sans nommer la personne incriminée, et que M. Walbourne, selon le témoignage de Mme Sherman, n'a pas voulu ou n'a pas pu donner ces renseignements? Aurions-nous toujours été exactement dans la même impasse?
    Il est impossible de connaître les détails de cette autre possibilité.
    Je ne veux pas avoir l'air de critiquer M. Walbourne. Je pense qu'il agissait de bonne foi, selon sa compréhension du système, et que Mme Sherman était aussi de bonne foi.
    Croyez-vous que, si M. Walbourne était revenu et avait obtenu la permission de la plaignante d'aller de l'avant, ou s'il lui avait peut-être même dit que le BCP voulait lancer une enquête — rien ne prouve jusqu'ici qu'il l'ait fait — et s'il y avait eu effectivement plus d'information... Si la plaignante était prête à s'avancer ou était disposée à fournir plus de détails, même sans nommer personne, est-ce que vous, le BCP, votre bureau, auriez alors donné suite à l'affaire?
    Je pense qu'on aurait pu y donner suite, du moins jusqu'à un certain point, si on avait eu plus d'information. Ce n'est pas facile quand il s'agit d'un seul incident entre une seule personne et... Il n'y aura pas beaucoup de témoins. Il n'y aura pas beaucoup de corroboration. C'est la partie vraiment difficile des questions liées à la conduite sexuelle, à toute forme de conduite, d'intimidation ou de harcèlement. En l'absence de témoins pour corroborer les faits, il faut s'en tenir aux allégations des parties. Il n'est pas facile d'aller au fond des choses, d'où l'utilité de faire appel à des organismes professionnels spécialisés dans le domaine des enquêtes.

  (1605)  

    Je pense que ce que nous constatons ici, c'est qu'il s'agit d'un problème systémique, comme vous l'avez dit tout à l'heure dans votre témoignage. Ce qu'il faut vraiment régler, ce sont les formalités et le genre de climat qui font hésiter les femmes aussi bien que les hommes à l'heure de vouloir se manifester.
     En fin de compte, diriez-vous que ce qui s'est passé ou ce qui n'a pas marché ici est en fait le signe d'un problème systémique plutôt que d'un comportement individuel ponctuel?
     Je ne tiens pas à minimiser la gravité d'un comportement individuel, surtout s'agissant d'une personne qui occupe un poste de confiance et responsabilité. La conduite et le comportement au sommet sont très importants. Je n'essaie pas de détourner l'attention de la gravité de la question ni de la raison pour laquelle le Comité voudrait l'examiner, pas plus que de la façon dont on y a répondu.
    Je pense que le système a échoué, collectivement parlant. Il a laissé tomber la plaignante et les femmes et les hommes des forces armées. Je le regrette profondément. En fait, je voudrais m'excuser auprès d'eux si ma décision, ou ma décision de m'abstenir de faire quoi que ce soit a prolongé la situation. Je présente mes plus sincères excuses aux hommes et aux femmes des forces armées.
    Par ailleurs, si le Comité veut faire valoir que la suspension ou le congédiement du général Vance à l'été 2018 aurait tout réglé, je ne pense pas que les Canadiens seraient du même avis.
    Merci beaucoup.
    La parole est maintenant à Mme Alleslev.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    Merci beaucoup, monsieur Wernick, de vos excuses, mais en fin de compte, si je comprends bien, le fait de s'assurer que les militaires ont un chef d'état-major irréprochable relève du ministre de la Défense nationale. C'est bien ce que vous avez dit?
    Ces postes sont choisis par le premier ministre sur la recommandation du ministre de la Défense nationale, oui.
    Merci beaucoup.
    Pourrions-nous passer à la note d'information dans laquelle vous avez décrit, si je vous ai bien compris, le cheminement à suivre pour remplacer le chef d'état-major de la défense? C'était en juin ou juillet 2018. C'est bien cela?
    Il s'agissait de la note qui combinait la cote de rendement recommandée avec la question de savoir quand un changement de commandement devait avoir lieu.
    Si ma mémoire est bonne, il me semble que la note a dû être envoyée au début de juillet. Le Bureau du Conseil privé peut facilement confirmer la date d'envoi, parce qu'il y a un registre des documents.
    À qui cette note d'information a-t-elle été envoyée?
    Elle a été envoyée au premier ministre, mais toutes les notes vont de l'étage du Bureau du Conseil privé au 80, rue Wellington, à celui du Cabinet du premier ministre, toujours au 80, rue Wellington, de sorte qu'elle a dû aboutir au bureau où la correspondance est triée et où l'on décide quelles sont les notes à présenter au premier ministre et quand.
    A-t-elle également été remise au ministre de la Défense nationale?
    Non. Une note au premier ministre n'est pas transmise aux ministres. C'est entre le Bureau du Conseil privé et le ministre.
    Les commentaires qu'il vous a faits auraient été inclus dans cette note.
    Oui, mais en utilisant nos propres mots. Les cadres supérieurs du Bureau du Conseil privé rassemblent, recueillent, compilent et rédigent une note contenant des recommandations sur les cotes de rendement. Je me souviens d'avoir envoyé des lots de deux, trois ou quatre notes par année avec différentes catégories de recommandations. Elles devaient passer par le Cabinet du premier ministre avant d'être présentées au premier ministre, et à toutes fins pratiques, c'est le personnel de son cabinet qui est chargé de trier et de contrôler ce qui se trouve dans la mallette qui lui est destinée chaque soir.
    Cela remonte à environ trois mois après que les allégations d'inconduite du général Vance aient été portées à votre attention?
    Oui. La nature générale de la question a été portée à notre attention en mars. Les discussions sur le rendement ont eu lieu en mai et en juin, et j'ai envoyé cette note, je crois, dans les 10 premiers jours de juillet.
    Votre entretien sur le rendement aurait-il également porté sur la rémunération à risque?
     C'est la conséquence et non pas un facteur à ajouter. Ce qui se passe, c'est que les gens reçoivent deux types de salaire. La majoration économique correspond au salaire de base plus rajustements au titre de l'inflation. Ceux-ci sont en grande partie établis dans le cadre de conventions collectives, et le gouvernement détermine ensuite des équivalences pour les juges et d'autres catégories professionnelles. Grosso modo, les gouverneurs en conseil obtiennent ce que les syndicats ont pu obtenir. C'est le Conseil du Trésor qui tranche en la matière.
    La prime au rendement est le système qui figure sur le site Web depuis plus de 10 ans, c'est-à-dire la rémunération au risque, ou la rémunération au rendement. On parle de prime, mais pour moi, il s'agirait plutôt d'une retenue. C'est le montant de la paie qui est touché par la cote de rendement.

  (1610)  

    Qui a décidé de ne pas remplacer le chef d'état-major de la défense à la suite de cette note au premier ministre?
    Il n'y a pas eu de décision explicite de ne pas agir. C'est simplement que la note est restée au Cabinet du premier ministre et n'est pas revenue. Si je me souviens bien — et Mme Sherman pourrait le confirmer —, tous les autres ont obtenu leur augmentation salariale et leur prime au rendement à l'automne 2018. La note du général Vance est toutefois restée coincée. Je l'avais envoyée, mais nous n'avons pas reçu de réponse. Elle est donc demeurée quelque part au Cabinet du premier ministre entre juillet 2018 et le début de 2019.
    Je pense que c'était enfin... Il y aurait eu une note lui demandant de débloquer la prime au rendement, au moins, et c'est...
    Alors déblocage...
    C'est le décret — si vous me permettez de terminer ma pensée. Le cycle de rémunération au rendement a pris fin après mon départ, en mai 2019. Le général Vance aurait eu droit à un rajustement de salaire et à un chèque pour prime au rendement pour cette année-là.
     Par conséquent, la prime au rendement aurait été versée malgré les allégations d'inconduite qui demeuraient non résolues.
    Oui, il n'y avait pas d'allégations précises, mais il y avait une parenthèse ouverte au sujet de...
    Il y avait des allégations non résolues concernant sa conduite malgré cette prime au rendement.
    Oui, la rémunération au rendement a été accordée cette année-là, en 2017-2018, en fonction de tous les autres facteurs que j'ai mentionnés dans une réponse il y a un moment.
    Merci.
    Monsieur Lick, pourriez-vous déposer votre témoignage devant le comité de la condition féminine? Merci.
    Merci beaucoup.
    Nous allons passer à M. Bagnell, s'il vous plaît.
    Merci.
    Monsieur Wernick, vous avez mentionné dans quelques-unes de vos réponses que vous pourriez donner plus de détails sur deux ou trois aspects. Avez-vous eu l'occasion de le faire, ou pourriez-vous le faire?
    Je pense que j'en ai déjà parlé. Vous me direz si j'en ai oublié, d'une certaine façon. Pour le cycle d'évaluation du rendement de 2017-2018, j'ai précisé quand ces conversations ont eu lieu, et je vous ai donné une idée de tous les autres facteurs qui auraient influé sur la cote de rendement cette année-là. Je pense que c'est une bonne description.
    J'ai parlé au ministre Sajjan en mai et en juin, et mis à part la question générale de la cote de rendement, ce qui est ressorti — l'essentiel des conversations, si je me souviens bien —, c'était vraiment le roulement et l'instabilité dans les rangs supérieurs de l'armée. Quand le changement de commandement devrait-il avoir lieu, et le général Vance était-il un candidat sérieux pour l'OTAN? C'est l'essentiel de la conversation que j'ai eue avec lui.
    Merci.
    Comme M. Lick l'a dit — et je conviens que nous devrions nous attaquer aux principaux problèmes structurels —, l'indépendance et le changement de culture sont probablement les deux plus importants, comme l'ont aussi mentionné d'autres témoins. Je suis ravi que M. Lick soit dans cet état d'esprit et qu'il occupe le poste qu'il occupe, car il sera en mesure de nous aider et de nous encourager à apporter ces changements.
    Monsieur Wernick, vous avez mentionné la possibilité d'apporter ces changements au moyen d'un projet de loi, tout en précisant qu'un projet de loi ne suffirait pas. Pourriez-vous nous rappeler ce que contiendrait un projet de loi sur l'indépendance et le changement de culture, et quels autres éléments pourraient en faire partie? Ce sont les deux principaux problèmes dont nous ont fait part les victimes et les experts qui s'en sont occupés.
    Qu'y aurait-il dans un projet de loi pour changer ces deux éléments principaux — changement de culture et indépendance — et que pourrait-on faire en marge du projet de loi, surtout à votre connaissance, parce que vous avez peut-être entendu d'autres pays parler de ces changements importants qui profiteraient grandement à de nombreuses femmes dans l'armée?
     Vous me prenez un peu au dépourvu, mais je pense que l'essentiel serait de remettre à zéro le cadre législatif, et il faudrait un projet de loi pour le faire. Il y serait question de toute une série de pratiques administratives au sein du ministère de la Défense nationale et de l'armée canadienne.
    Il y a un lien que je ferais ressortir, et c'est qu'il n'est pas sans rapport avec le système de justice militaire, parce qu'à un moment donné, c'est le droit militaire qui est enfreint. Il y a un débat à tenir sur la question de savoir si ces questions de conduite devraient être traitées par le droit militaire ou le droit civil. Chaque pays a trouvé ses propres réponses à la question.
    D'après ce que j'ai trouvé dans mes recherches sur Google, un examen du système de justice militaire est en cours, dirigé par le juge Fish, un juge à la retraite, qui donnera au gouvernement des conseils à ce sujet. Je pense qu'il serait vraiment important d'examiner la ligne de démarcation et les bornes entre le système de justice militaire et le système de recours que vous voulez créer, et qui serait axé sur les questions de conduite non criminelle. Ce serait vraiment important.
    D'après les autres questions qui ont été soulevées, il y a des éléments sur lesquels vous devrez vous prononcer à titre de législateurs. Voulez-vous maintenir cette garantie de confidentialité? Comment pouvez-vous l'assurer? Quel pouvoir discrétionnaire voulez-vous accorder aux gens? Direz-vous « doit » mener ou « peut » mener une enquête, car ces mots sont importants, et qui prend la décision en fin de compte? Il y a des principes conceptuels ici.
    Ce que j'ai constaté — et je le dis sans ironie —, c'est que nous avons quelque 14 mandataires du Parlement, et qu'il y a des problèmes de limites et de bornes, de couloirs de nage, si vous voulez, où l'on semble parfois empiéter sur le couloir de l'autre, entre une plainte relative aux droits de la personne, une plainte de la Commission de la fonction publique, une plainte concernant un dénonciateur ou une plainte concernant l'intégrité. L'essentiel serait probablement de bien délimiter les bornes pour que les gens puissent se manifester et obtenir des résultats palpables. C'est une question de conception de l'appareil gouvernemental. Je sais que cela peut sembler terriblement bureaucratique, mais vous n'avez probablement qu'une seule chance de bien faire les choses.
    Il y a d'autres rapports sur lesquels on peut s'appuyer. Vous pouvez remonter jusqu'à celui sur la Somalie. J'ai lu qu'il recommandait la création d'un poste d'inspecteur général indépendant, alors où cela s'insère-t-il dans tout cela?
     Ce n'est pas évident. Je ne vais pas vous dire exactement comment procéder. Ce serait peut-être une bonne idée que ce comité et le comité de la condition féminine se réunissent et travaillent ensemble sur le problème.

  (1615)  

    Merci beaucoup.

[Français]

     Monsieur Barsalou-Duval, vous avez la parole.
    Je vous remercie, madame la présidente.
    Monsieur Wernick, tout à l'heure, je vous ai demandé si vous étiez au courant des allégations visant M. Vance lors de sa nomination initiale, en 2015. Vous m'avez dit que vous n'étiez pas vraiment au courant. Cela m'amène à me questionner un peu.
     Si je ne me trompe pas, au départ, M. Vance a été nommé par le Bureau du Conseil privé. À ma connaissance, la première enquête, qui a eu lieu en 2015 et qui concernait des rumeurs de relation inappropriée, entre autres, a été menée dans le contexte de sa nomination. C'était donc une vérification préalable à la nomination.
     D'ordinaire, quand on nomme quelqu'un à un poste quelconque, on vérifie son dossier et d'autres documents, et si on trouve des traces douteuses, on s'assure que cela ne pose aucun problème.
    Est-ce que le Bureau du Conseil privé avait perdu ces documents ou ces archives, ou est-ce que je comprends mal comment cela fonctionne?
    Je ne pense pas vraiment pouvoir vous donner une réponse complète. Je n'étais pas greffier à cette époque. J'ai été nommé en janvier 2016, alors je n'ai pas participé au processus de sélection ou de nomination du général Vance. C'est le gouvernement précédent, celui du premier ministre Harper, qui était au pouvoir, et c'est Mme Charette, ma prédécesseure, qui était greffière. Moi, je n'ai jamais eu connaissance d'allégations ou de processus qui avaient eu lieu précédemment.
    D'accord.
    Monsieur Lick, de votre côté, puisque vous relevez directement du ministre de la Défense, sentez-vous que cela peut parfois vous placer en situation de conflit?

  (1620)  

[Traduction]

     En ce qui me concerne, je ne vois pas de conflit d'intérêts. Cependant, je pense que ce que nous voyons maintenant avec le...

[Français]

     Je suis désolé de vous interrompre, je ne parlais pas de conflits d'intérêts.
    Est-ce que cela peut vous amener à avoir des positions conflictuelles avec celles du ministre, qui pourraient limiter votre champ d'action?

[Traduction]

    Non. Essentiellement, l'un de mes rôles dans le cadre de mon mandat est celui de conseiller spécial auprès du ministre. Mon rôle est de lui fournir des conseils honnêtes, ouverts et transparents, surtout honnêtes. S'ils sont contraires à son point de vue, je n'y peux rien. Ma seule préoccupation est de lui donner des conseils ouverts et honnêtes. Cela ne devrait pas avoir et n'a en fait aucune incidence sur les gestes que je pourrais poser de mon côté.
    Merci.
    Nous allons passer à M. Garrison, s'il vous plaît.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
     Je veux simplement répondre à un commentaire du secrétaire parlementaire sur la question de savoir si l'inconduite sexuelle du général Vance était amplement connue et d'où ça vient.
    Je me reporte encore une fois à une entrevue que Mercedes Stephenson, de Global News, a effectuée avec la majore Brennan le 21 février 2021. Dans cette entrevue, elle lui a demandé si les hauts dirigeants militaires étaient au courant de la relation inappropriée que le général Vance avait eue avec elle alors qu'elle était une subalterne. La majore Kellie Brennan a répondu, et je cite: « Je le sais parce que je le leur ai dit. »
    Il est manifeste que beaucoup de gens croyaient que les allégations d'inconduite sexuelle étaient amplement connues.
    Comme nous manquons de temps aujourd'hui, j'aimerais revenir à ce que j'estime être un témoignage très important, celui de M. Wernick, qui a parlé d'autres mesures que l'on aurait pu prendre. Il a dit que le ministre aurait pu prendre l'enveloppe et la transmettre au Bureau du Conseil privé. Il a parlé de la possibilité pour l'ombudsman de caviarder davantage d'information avant de transmettre la note.
    Il a peut-être été interrompu avant de pouvoir poursuivre. Y a-t-il d'autres choses que le Bureau du Conseil privé aurait pu faire à ce moment-là?
    Je pense qu'il y a d'autres échéanciers que le Bureau du Conseil privé aurait pu respecter si nous avions obtenu plus d'information à un moment donné du processus, après mars. Nous n'avons pas fermé le dossier indéfiniment. Si d'autres renseignements nous avaient été fournis, nous aurions essayé de trouver un processus pour l'avenir, et je pense que d'autres témoins ont comparu devant le Comité et ont proposé d'autres solutions.
    Le dernier aspect sur lequel je vais revenir est la question de la durée du mandat. Il est difficile de ne pas parler de prolongation pour le général Vance, mais vous avez dit très clairement qu'un choix a été présenté au premier ministre quant au moment où le changement de commandement devrait avoir lieu — soit avant ou après les élections, essentiellement — et c'est tout à fait compréhensible ainsi décrit.
    Le premier ministre aurait-il consulté le ministre de la Défense au sujet du moment du changement de commandement, ou s'agissait-il simplement d'échanges entre le Bureau du Conseil privé, le premier ministre et vous-même?
    Je ne suis pas au courant d'autres conversations. Le premier ministre et le ministre se rencontraient chaque semaine au Cabinet et au caucus libéral, alors je ne peux pas répondre de conversations auxquelles je n'ai pas participé. Il a peut-être interrogé le ministre au sujet de la durée de son mandat.
    Je demande simplement si cela aurait été normal dans le cas des nominations par le gouverneur en conseil. Normalement, est-ce que les ministres et le premier ministre en parleraient, ou est-ce que la conversation aurait lieu exclusivement entre le premier ministre et vous?
    Eh bien, c'est un peu hypothétique. Ce dont je me souviens de la note, c'est que c'était extrêmement clair. Il y avait essentiellement une option de quatre ans et une autre de cinq ans. La question de savoir, si sa candidature à l'OTAN a été un facteur est soulevée dans la note qu'il a reçue. Je ne sais pas à quel moment cette note s'est retrouvée sur le bureau du premier ministre.
    D'accord. Merci.
    Madame Gallant, vous avez la parole.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Lick, votre bureau a produit une analyse juridique des événements survenus en 2018 lorsque l'ancien ombudsman Gary Walbourne a informé le ministre Sajjan d'une allégation contre le général Vance. Pourquoi a-t-on fait cette analyse?
    L'analyse a été faite pour moi, afin que je puisse comprendre les options qui auraient pu être offertes au cours de ce processus. Souvenez-vous que je n'étais pas présent à ces réunions et que, par conséquent, je n'étais au courant d'aucune conversation, pas plus que mon bureau.
    Après ce dont nous avons entendu parler pour la première fois dans les médias, je voulais comprendre quelles options particulières auraient été disponibles et si mon prédécesseur aurait pu faire un choix — ce genre de décision.

  (1625)  

     On y comparait également le témoignage du ministre Sajjan au cadre juridique dans lequel M. Walbourne travaillait. Pouvez-vous répéter au Comité si vous croyez que M. Walbourne a agi de façon appropriée avec les éléments de preuve qu'il détenait lorsqu'il en a parlé au ministre Sajjan?
    En l'occurrence, comme nous l'avons entendu dans les médias — et je vais partir de cette hypothèse —, la plaignante tenait à se protéger contre les représailles, et je crois qu'elle a permis à mon prédécesseur de s'adresser au ministre pour l'informer du problème et des allégations connexes. Dans ce cas particulier, nous devons retenir que tout progrès d'une enquête, qu'elle soit confiée à un organisme ou à un autre, est contrôlé par la partie plaignante.
    La nécessité de protéger la vie privée d'une victime présumée est primordiale lorsque des renseignements sont communiqués à l'ombudsman. Cela a-t-il empêché le ministre Sajjan de diriger une enquête sur l'allégation à partir des renseignements que M. Walbourne lui avait fournis?
    Dans ce cas particulier, l'allégation... Il est difficile de dire en quoi a consisté la conversation avec la plaignante. Je ne suis pas au courant de cet entretien, mais tout ce que je peux dire, c'est que mon prédécesseur, M. Walbourne, cherchait, selon ses propres mots, une « couverture » pour protéger la plaignante, avant de procéder.
     Le ministre Sajjan a affirmé à maintes reprises qu'il avait fait ce qu'il fallait en donnant l'information au Bureau du Conseil privé. Avait-il raison de se laver les mains après qu'on ait refusé d'enquêter?
    Tout ce que je peux dire, c'est que le résultat que nous avons vu à la fin... Les allégations n'ont pas été poursuivies. C'est là le vrai problème. Pourquoi ne leur a-t-on pas donné suite? Je crois que la plaignante craignait que ça n'allait rien donner. Voilà le problème.
    M. Walbourne a déclaré qu'il y avait des options que le ministre aurait pu suivre pour enquêter sur l'allégation, même s'il n'a pas été en mesure de nommer la présumée victime. Êtes-vous d'accord avec cela?
    Oui. Je pense qu'il y avait des options qui auraient pu être poursuivies, mais l'important, c'est que la plaignante avait besoin d'une certaine protection ou d'une certaine confiance pour pouvoir donner suite à certaines de ces allégations, et je pense qu'elle n'a rien eu de tout cela, ou elle était méfiante et, par conséquent, rien n'a été fait.
    Si vous aviez été à la place de M. Walbourne, comment auriez-vous aimé ou attendu que le ministre réponde?
    Si je lui demandais... Comme mon prédécesseur l'a déjà dit dans son témoignage, il cherchait une protection ou une couverture, de quoi confirmer qu'il n'y aurait pas de représailles. Même ces mots tout simples auraient pu suffire pour que la plaignante décide de se lancer dans telle ou telle voie. Le Bureau du Conseil privé était-il la bonne solution? Peut-être que oui, en ce qui concerne sa capacité de mener une enquête de ce genre. C'est une option, mais ce qui compte en définitive, selon moi, c'est que la plaignante s'en méfiait, qu'elle hésitait à croire qu'une telle enquête allait fonctionner.
    Peut-être que si nous examinons l'enquête du gouverneur général et la façon dont cela s'est produit... C'était extrêmement public. Tout le monde savait que le Bureau du Conseil privé avait confié cette tâche en sous-traitance. Il y a eu un résultat, peut-être de quoi laisser croire à la personne que c'était la bonne façon de procéder, mais on ne peut pas s'attendre à ce que tous les membres des Forces canadiennes soient au courant de la compétence du Bureau du Conseil privé pour l'exécution d'une telle tâche.
    Ce que nous devons à nos membres, c'est un organisme externe qui puisse surveiller ces processus afin qu'ils soient menés de façon équitable et qu'ils répondent aux besoins de la victime, mais aussi à la nécessité de respecter la légalité.

  (1630)  

    Merci beaucoup.
    Ce sera au tour de M. Baker.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    Monsieur Wernick, je voulais revenir rapidement sur le changement de culture. Il en a été amplement question dans votre témoignage et dans celui de M. Lick aujourd'hui, ainsi que lors de réunions précédentes.
    J'ai déjà été consultant au Boston Consulting Group. Si on avait fait appel à nos services pour produire un changement de culture — et j'ai travaillé à pas mal de projets de la sorte au fil des ans —, nous nous serions interrogés sur le cadre de travail, les diverses catégories de choses qui devaient avoir lieu et l'échéancier correspondant. Je simplifie à l'excès, mais c'est en synthèse ce à quoi cela ressemblerait et ce que nous viserions.
    Si vous produisiez cela pour nous — et je sais bien qu'il ne peut s'agir que d'une estimation approximative —, quelles sont certaines des principales catégories ou mesures qui doivent être prises, à votre avis, pour changer la culture? Vous avez parlé de législation, mais ce ne sont pas tous les changements qui passent par le législateur.
     Oui, la question est de taille. Je ne pense pas pouvoir lui rendre entièrement justice.
    Permettez-moi d'intervenir en réponse à l'échange avec M. Lick. De toute évidence, il faut procéder dans l'ordre. L'enquête à Rideau Hall a eu lieu en 2020, et elle n'était pas connue ou n'aurait pas pu être connue ou même imaginée en 2018, lorsque nous avons examiné... mais elle parle pour la capacité du Bureau du Conseil privé de se renseigner sur les faits. Les enquêtes ne sont pas comparables, comme je l'ai dit, parce que dans l'affaire à Rideau Hall, il y avait plusieurs plaignants et de nombreux témoins à interroger, ce qui n'était pas le cas pour le général Vance.
    Je vais revenir à votre question. J'ai passé trois ans à essayer de changer la culture de la fonction publique civile, avec des résultats mitigés. Vous nous avez rappelé qu'au cours du mois de mai 2018, mon ami Michael Ferguson, le vérificateur général, a déposé un rapport sur le système de paie, qui était très cinglant au sujet de la fonction publique et qui parlait d'une culture d'obéissance envers les ministres. J'ai comparu devant le comité des comptes publics et j'ai discuté de la question avec lui.
    Je suis parfaitement conscient que changer la culture d'une grande organisation composée de dizaines de milliers d'êtres humains n'est pas chose facile et peut prendre du temps. Je pense que les fondements législatifs sont importants pour ce qui est des mesures incitatives et dissuasives, des conséquences et de la transparence. Il faut faire beaucoup de recherches et d'essais sur le milieu de travail, au moyen de sondages et d'autres mécanismes, pour déterminer où se trouvent les problèmes. Il faut nommer les bonnes personnes aux bons postes et prêcher par l'exemple. C'est un programme aussi vaste que complet, car il y va de formation, dans les écoles, au Collège militaire royal, etc. Je vous renvoie une fois de plus au rapport Wigston, car il tente d'établir une architecture à ces fins, et je pense que vous en auriez besoin.
    Dans le cas qui nous occupe, et sachant ce que nous savons, que le rapport Deschamps était insuffisant, que l'opération Honour était insuffisante elle aussi et que le système semble avoir laissé tomber la plaignante et ce dossier, nous devons nous attaquer aux principes mêmes de la loi.
    Merci.
    Je tiens à remercier nos témoins d'aujourd'hui. La séance a été très utile, et je vous remercie d'avoir partagé votre précieux temps avec nous.
    Sur ce, je vais suspendre la séance pour poursuivre à huis clos. Je vous reverrai tous ici dans 10 minutes.
    [La séance se poursuit à huis clos.]
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