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HUMA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent des ressources humaines, du développement des compétences, du développement social et de la condition des personnes handicapées


NUMÉRO 016 
l
1re SESSION 
l
44e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 31 mars 2022

[Enregistrement électronique]

  (1545)  

[Traduction]

     La séance est ouverte.
    Bienvenue à la 16e séance du Comité permanent des ressources humaines, du développement des compétences, du développement social et de la condition des personnes handicapées de la Chambre des communes.
    La séance d'aujourd'hui se déroule à nouveau dans un format hybride, conformément à l'ordre de la Chambre du 25 novembre. Les députés participent en personne et à l'aide de l'application Zoom. Ceux et celles qui assistent en personne doivent suivre les protocoles sanitaires actuellement en vigueur.
    Pour assurer le bon déroulement de la réunion, j'aimerais faire quelques observations à l'intention des témoins et des membres du Comité.
     Attendez que je vous accorde la parole avant de parler. Si vous assistez à la séance par vidéoconférence, veuillez cliquer sur l'icône du microphone pour activer votre micro. Pour ceux et celles qui sont dans la salle, votre microphone sera contrôlé par l'agent des délibérations et de la vérification. Lorsque vous ne parlez pas, votre micro devrait être en sourdine.
    Les députés et les témoins peuvent s'exprimer dans la langue officielle de leur choix. Des services d'interprétation sont offerts au cours de la présente séance. Si vous assistez par vidéoconférence, vous avez le choix entre le parquet, l'anglais ou le français au bas de votre écran. Si vous êtes dans la salle, vous pouvez utiliser un écouteur et sélectionner le canal désiré. Si vous perdez l'interprétation, veuillez m'en informer et nous veillerons à ce qu'elle soit rétablie avant de poursuivre la séance. Je vous rappelle que toutes les interventions doivent s'adresser à la présidence.
    Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement et à la motion adoptée par le Comité le jeudi 3 février, le Comité reprend son étude des pénuries de main-d'œuvre, des conditions de travail et de l'économie des soins.
    J'aimerais souhaiter la bienvenue à notre premier groupe de témoins. Nous commencerons par des déclarations préliminaires de cinq minutes, qui seront suivies de questions. Je demanderais aux témoins de bien vouloir limiter leur déclaration préliminaire à cinq minutes. Si vous avez des renseignements supplémentaires, vous pouvez toujours les faire parvenir au Comité, et ils figureront au compte rendu.
    Encore une fois, lorsque vous avez la parole, je vous demanderais de parler lentement afin de faciliter le travail de nos services de traduction et d'interprétation.
    De la Atkinson Foundation, nous accueillons Armine Yalnizyan; de l'Association dentaire canadienne, Richard Holden, président, et Aaron Burry, directeur général par intérim; et de l'Association canadienne pour la santé mentale, Rebecca Shields, directrice générale, York and South Simcoe branch.
    Nous allons commencer par la Atkinson Foundation, pour cinq minutes.
     Madame Yalnizyan, vous avez la parole.
    Mesdames et messieurs les membres du Comité, je suis très heureuse d'avoir l'occasion de vous entretenir aujourd'hui de l'un des enjeux de politique publique les plus pressants auxquels les Canadiens sont confrontés et de la qualité future de notre vie — la pénurie de main-d'œuvre et les conditions de travail dans l'économie des soins.
    Je remercie Bonita Zarrillo d'avoir présenté la motion pour étudier la question.
    Vous ne me connaissez peut-être pas. Je suis économiste, ancienne présidente de l'Association canadienne de science économique des affaires et chroniqueuse économique pour le Toronto Star. Je suis également titulaire de la bourse de recherche Atkinson sur l'avenir des travailleurs, et je remercie la Fondation Atkinson qui se consacre à la promotion des principes de justice économique et sociale, comme l'a fait Joseph Atkinson, journaliste et fondateur de l'un des journaux les plus populaires et les plus influents de l'histoire du Canada, le Toronto Star.
    Il savait alors, comme vous le savez aujourd'hui, que des entreprises solides sont renforcées lorsque leurs travailleurs et leurs clients ne font pas des pieds et des mains pour répondre à leurs besoins fondamentaux. Pour ce faire, il faut que des gouvernements solides soient déterminés à faire en sorte que des programmes comme les soins de santé, les services de garde d'enfants et les soins aux aînés — qui soutiennent l'économie tout autant que les routes et les ponts — soient en bon état et adaptés aux besoins.
    L'économie des soins est souvent considérée comme un dérivé, « quelque chose qu'il est bon d'avoir » une fois que l'économie fonctionne. Ce n'est pas le cas et, comme la pandémie l'a clairement indiqué, elle jette les bases de toutes les autres activités économiques. Il se trouve que c'est une puissance économique à part entière qui représente 12,6 % du PIB. Saviez-vous qu'elle est plus importante que les secteurs de l'automobile, du pétrole et du gaz? En réalité, aucun secteur de l'économie, à l'exception des finances et de l'immobilier, ne l'égale — et nous savons à quel point tout va bien pour ces deux secteurs.
    Les soins pour ceux qui sont trop jeunes, trop vieux et trop malades pour travailler sont toujours partiellement non rémunérés. C'est toujours un travail d'amour, mais les soins rémunérés représentent maintenant un emploi sur cinq au Canada. Bien que chaque emploi puisse être excellent dans ce secteur, de nombreux emplois sont non rémunérés et précaires. C'est peut-être parce qu'il est à prédominance féminine. Plus de 90 % des personnes qui œuvrent dans la plupart des professions de la santé et de l'éducation sont des femmes, sans oublier que la main-d'œuvre est également racialisée de façon disproportionnée.
    Considérés comme essentiels, ces travailleurs sont fondamentalement traités comme des travailleurs remplaçables. Le vieillissement de la population signifie que ce secteur de l'économie est destiné à croître. Par conséquent, la façon dont il croît est importante. Nous sommes déjà aux prises avec des pénuries de main-d'œuvre dans les petites et les grandes villes. Il est donc important de trouver des solutions à ces pénuries, car elles façonneront notre économie et notre pays. Nous pouvons faire de chaque travail un bon emploi, et nous transformerions l'ensemble de la société en le faisant, ou nous pouvons nous débrouiller tant bien que mal, la plupart du temps en ne réglant pas les problèmes.
    À l'heure actuelle, il n'y a pas de problème plus pressant sur le marché du travail que la façon dont nous préparons l'économie des soins aux décennies de vieillissement de la population qui nous attendent, ce qui fait paraître les défis d'aujourd'hui dérisoires en comparaison.
    Afin de maximiser notre potentiel et de minimiser les défis imminents, nous avons besoin d'une stratégie pancanadienne pour qu'aucune province ne soit perdante. Les questions que vous avez posées plus tôt à d'autres témoins ont laissé présager ce que cette stratégie pourrait comporter.
    Premièrement, nous avons besoin de meilleurs salaires et de meilleures conditions de travail, ce qui est possible parce qu'une grande partie de l'économie des soins est financée par l'État. Deuxièmement, nous avons besoin d'une formation plus opportune et plus ciblée, notamment des programmes « d'apprentissage tout en gagnant un revenu ». Troisièmement, nous devons harmoniser les politiques fédérales de développement des compétences pour nos propres citoyens avec les politiques fédérales visant à attirer de nouveaux arrivants. Ces nouveaux arrivants entrent au pays de plus en plus en qualité de résidents temporaires; ce ne sont pas des immigrants qui restent et qui bâtissent des collectivités, qui se contentent tout simplement de combler des emplois. Quatrièmement, nous devons accélérer la reconnaissance des titres de compétences des professionnels formés à l'étranger et offrir plus de voies vers la permanence à ceux qui entrent comme travailleurs étrangers temporaires. Dès votre première journée, vous avez appris que le Programme des travailleurs étrangers temporaires ne représente que 0,4 % de la population active, mais que des centaines de milliers d'autres personnes entrent comme résidents temporaires dans le cadre de différents programmes et travaillent également.
    Une meilleure utilisation de la technologie est évidemment un autre élément. Nous pouvons améliorer l'accès en temps opportun aux soutiens, recourir davantage à la télésanté, mieux utiliser l'IA pour compléter les compétences humaines afin d'accélérer et d'améliorer les diagnostics, mieux utiliser les dossiers médicaux électroniques pour améliorer les temps d'attente et détecter les tendances plus rapidement. Enfin, nous avons besoin d'une meilleure surveillance de l'augmentation fulgurante des agences de placement temporaire et des applications sur demande, parce qu'elles ont tendance à produire des dépassements de coûts et à accroître l'exploitation par le truchement de l'établissement d'horaires. Cela signifie qu'il faut moderniser nos lois du travail afin de réduire le nombre croissant de personnes qui sont mal classées comme entrepreneurs indépendants et qui ne peuvent pas avoir accès à des protections ou à des droits en matière de travail.
    Nous avons besoin de toute urgence d'une stratégie nationale pour les ressources humaines en santé et nous avons besoin de normes pour les soins de longue durée avant que le gouvernement fédéral ne débourse un autre dollar, et ce, en nous appuyant sur ce que nous avons appris grâce aux ententes bilatérales sur l'apprentissage et la garde d'enfants qui ont été signées au cours de la dernière année.

  (1550)  

     Je vous souhaite bonne chance dans vos efforts pour éclairer et guider nos prochaines étapes.
    Je serai heureuse de répondre à vos questions.
    Merci encore.
    Merci, madame Yalnizyan.
    Nous passons maintenant à l'Association dentaire canadienne.
    Qui va parler en votre nom?
    Je vais le faire, monsieur le président. Merci. J'espère que vous m'entendez bien.
    Veuillez continuer.

[Français]

     Je souhaite un bel après-midi à tous les membres du Comité.

[Traduction]

    Je m'adresse à vous depuis Charlottetown, sur le territoire non cédé de la Première Nation micmaque Abegweit.
     Ma femme et moi pratiquons la dentisterie à l'Île-du-Prince-Édouard depuis plus de 30 ans. Je travaille activement dans le domaine de la dentisterie organisée depuis deux décennies. Je représente actuellement l'ADC à titre de président.
    Depuis 120 ans, l'ADC représente les dentistes de chaque province et territoire et est le porte-parole de la profession dentaire au pays. Nous savons que la santé buccodentaire est une composante essentielle de la santé générale. La dentisterie fait partie intégrante des soins de santé au Canada, où l'on compte plus de 25 000 dentistes. Si l'on inclut les hygiénistes dentaires, les assistants dentaires et d'autres, le secteur dentaire représente un effectif d'environ 100 000 personnes.
    La pandémie de COVID-19 a eu un énorme impact sur l'accès aux soins dentaires, causant la fermeture de cabinets dentaires pendant des mois. Lors de la réouverture, nous avons dû mettre en place de nouvelles procédures de prévention et de contrôle des infections pour empêcher la propagation d'infections. Cela comprenait le port d'EPI améliorés, la rénovation des cabinets pour mieux séparer les aires de traitement et l'achat de nouvel équipement de filtration d'air. Ces précautions ont été très efficaces, mais elles ont coûté cher.
    La réalité de l'après-pandémie a intensifié le défi de l'embauche et du maintien en poste des assistants dentaires, qui sont le ciment des cabinets dentaires. L'assistance dentaire est une profession spécialisée qui exige un permis ou un agrément dans huit provinces. En fait, dans la Classification nationale des professions, EDSC a récemment reclassé l'assistance dentaire et en a fait une profession qualifiée.
    La dernière fois que vous êtes allé chez le dentiste, la personne qui a placé les digues en caoutchouc, qui a pris des radiographies et qui vous a expliqué votre plan de traitement ou vos instructions de suivi était probablement un assistant dentaire. Ce qui est crucial, c'est que les assistants dentaires secondent les dentistes pendant la plupart des interventions dentaires, depuis les obturations jusqu'aux extractions en passant par les traitements de canal.
    Même avant la pandémie, le nombre d'assistants dentaires ne permettait pas de répondre aux besoins des Canadiens en matière de santé buccodentaire. En 2019, 36 % des cabinets dentaires comptaient des postes d'assistant dentaire non dotés. Entre 2010 et 2020, le ratio des nouveaux assistants dentaires agréés par rapport aux nouveaux dentistes qui intègrent le marché du travail est passé de plus de trois pour un à presque un pour un. La pandémie n'a fait qu'exacerber cette pénurie. Les dentistes ont besoin d'assistants dentaires dûment formés pour satisfaire aux nouvelles lignes directrices en matière de santé et de sécurité, mais les taux d'attrition se sont détériorés.
    Les cabinets dentaires, en particulier pendant la pandémie de COVID-19, peuvent être un milieu de travail stressant, et l'assistance dentaire peut être physiquement exigeante. De plus, 99 % des assistants dentaires au Canada sont des femmes âgées en moyenne de 38 ans. Beaucoup quittent l'assistance dentaire pour exercer d'autres professions en raison, notamment, de préoccupations créées par le milieu de travail, comme le stress et la santé mentale, le désir d'avoir un horaire flexible et, plus récemment, l'attrait des possibilités de travail à domicile.
    Nous souhaitons travailler en collaboration pour régler ces problèmes qui ont une incidence directe sur le maintien en poste des assistants dentaires. Nous espérons que les engagements du gouvernement fédéral en matière de garde d'enfants aideront à réduire les obstacles à la pleine participation des femmes et des hommes au marché du travail à l'avenir.
    L'ADC s'est récemment associée à l'Association canadienne des assistants(es) dentaires pour présenter un projet au Programme de solutions pour la main-d'œuvre sectorielle d'EDSC. Notre projet, « Building the Professional Dental Assisting Workforce of the Future », vise à s'attaquer aux nombreux facteurs qui influent sur l'attrition des assistants dentaires de leur profession de la façon suivante: offrir une formation sur la santé mentale et le mieux-être au personnel des cabinets dentaires, offrir une formation sur les ressources humaines aux dentistes et aux gestionnaires de cabinet, accroître l'accès aux programmes d'assistance dentaire agréés en élaborant un programme d'études en ligne, et élaborer des plans d'action pour lutter contre la mobilité interprovinciale de la main-d'œuvre et pour mettre en place une meilleure intégration des immigrants à la main-d'œuvre œuvrant dans le secteur des soins dentaires. Je me ferai un plaisir de vous fournir de plus amples renseignements et je vous saurais gré de tout soutien que vous pourriez apporter.
    J'encourage le Comité, et celui de la santé de la Chambre des communes qui mène également une étude sur les ressources humaines du secteur de la santé, à tenir compte de ces préoccupations liées à la main-d'œuvre lorsqu'ils formuleront des recommandations au gouvernement. Le fait de se concentrer uniquement sur les besoins et les défis en matière de RH du système public de santé du Canada pourrait avoir un effet néfaste sur les soins de santé fournis dans des contextes privés, comme les cabinets dentaires. L'augmentation du recrutement dans certaines professions, ou l'imposition de salaires à d'autres, peuvent aggraver les pénuries pour le reste.
    Je terminerai en commentant l'engagement pris la semaine dernière par le gouvernement fédéral d'offrir un meilleur accès aux soins dentaires aux familles à faible revenu. L'ADC appuie tous les efforts visant à améliorer la santé buccodentaire des Canadiens et à accroître l'accès aux soins dentaires. Nous recommandons depuis longtemps que le gouvernement fédéral investisse pour stabiliser et améliorer les programmes provinciaux et territoriaux qui offrent des soins aux Canadiens qui n'ont pas accès à des soins dentaires. Ces programmes sont sous-financés de façon chronique et sont financés presque exclusivement par les gouvernements provinciaux et territoriaux.

  (1555)  

     Une telle approche permettrait d'offrir aux personnes qui en ont le plus besoin un meilleur accès et un accès plus rapide aux soins, en utilisant l'infrastructure existante, par opposition à un nouveau régime de soins dentaires fédéral à grande échelle administré à Ottawa. Cela permettrait également de réduire au minimum les perturbations pour ceux qui ont déjà accès à des soins dentaires, que ce soit dans le cadre de programmes existants ou de prestations fournies par l'employeur.
    Nous sommes impatients de collaborer étroitement avec le gouvernement fédéral pour mieux répondre aux besoins des Canadiens en matière de santé buccodentaire.
    Je tiens à vous remercier de m'avoir donné l'occasion de m'adresser à vous. Je serai heureux de répondre à vos questions, en compagnie du Dr Aaron Burry, directeur général par intérim de l'ADC.
    Merci.

  (1600)  

    Merci, docteur Holden.
    Nous passons maintenant à l'Association canadienne pour la santé mentale.
    Madame Shields, vous avez la parole pour cinq minutes.
    Bonjour. Je suis directrice générale de la Section de York et South Simcoe de l'Association canadienne pour la santé mentale.
    L'ACSM compte de 11 divisions provinciales et territoriales, elles-mêmes composées de 75 sections desservant plus de 330 collectivités à la grandeur du Canada. Nous sommes l'un des plus importants fournisseurs de services cliniques en Ontario.
    Je ne pense pas étonner qui que ce soit en disant que les besoins en santé mentale des Canadiens ont augmenté à un rythme alarmant à cause de la pandémie et qu'il nous faut, pour soutenir la santé mentale des Canadiens dans l'ensemble de la population active, un secteur de soins communautaires solide et vigoureux.
    Les pressions auxquelles nous sommes confrontés justifient une augmentation massive, et bien pensée, des investissements. Un sondage mené par l'ACSM de l'Ontario pendant la pandémie fait voir des chiffres sont alarmants. En effet, environ 57 % des Ontariens se sentent davantage esseulés qu'avant la pandémie et près de 80 % croient que nous aurons une crise de santé mentale une fois la pandémie terminée.
    La toxicomanie est en hausse et les listes d'attente sont plus longues que jamais. Comme mes collègues l'ont mentionné, la pandémie touche de façon disproportionnée les femmes, surtout celles ayant de jeunes enfants à la maison, qui subissent à la fois des pressions financières et des pressions liées à la garde d'enfants. Cependant, chez les hommes, nous constatons une augmentation des taux de toxicomanie, tant pour l'alcool que pour le cannabis. C'est une préoccupation majeure, car les services nécessaires ne sont pas aussi disponibles qu'il le faudrait.
    Il n'est pas étonnant que la demande de services soit à un niveau sans précédent et que la complexité des soins impose des temps de service plus longs pour recouvrer la santé.
    Environ 80 % de tous les soins de santé mentale sont fournis par des organismes communautaires, comme le mien. Il se peut que les pressions qui pèsent sur le secteur de soins communautaires ne soient pas bien comprises, alors qu'il est tant question du secteur des soins hospitaliers et de longue durée. Il faut cependant comprendre que, sans un secteur robuste de soins communautaires, les problèmes ne feront qu'augmenter, puisque les deux secteurs privilégient la prévention, l'intervention précoce, de même que rétablissement et le traitement continus. Or, le financement de notre programme de base n'a pas été augmenté depuis plus de 15 ans et nos moyens sont donc nettement insuffisants. Bien que nous ayons connu une croissance, celle-ci tient à la mise en place de de nouveaux services; les services existants n'ont pas augmenté.
    Nous ne sommes pas concurrentiels par rapport à nos partenaires hospitaliers, et il est certain — avec l'accentuation des politiques de soutien à d'autres secteurs — que nous sommes en train de perdre du terrain. Nos coûts d'administration demeurent à 10 %, ce qui nous rend incapables de maintenir notre capacité de leadership et d'adaptation technologique, malgré notre volonté d'instaurer une culture organisationnelle axée sur l'obtention et l'analyse de données en regard des renseignements opérationnels afin de nous assurer de pouvoir obtenir des résultats de qualité pour notre clientèle.
    À l'ACSM, nous savons que les services d'urgence ont fait un bond de plus de 60 % et, parallèlement, notre pénurie de personnel infirmier en soins intensifs n'a jamais été aussi grave élevée, comme partout ailleurs.
    Même avant la pandémie, certaines de nos sections étaient submergées. Bien qu'il y ait eu une certaine extension des programmes dans certaines régions du Canada, il ne fait aucun doute que d'autres prennent du retard. Je vais vous donner un exemple. À l'échelle locale, mes infirmières sont payées 66 % de ce que gagnent les infirmières des hôpitaux et des établissements de soins de longue durée. Comme vous pouvez le supposer, il nous faut ces infirmières, malgré leur épuisement professionnel, pour assurer les soins à notre population de sans-abri, à notre population vulnérable et, de plus en plus, aux nouveaux arrivants et réfugiés qui ont recours à nos services.
    Je veux expliquer pourquoi cela si important. Comme vous pouvez l'imaginer, avec la crise ukrainienne, l'ACSM a encore été appelée à intervenir. L'an dernier, nous avons offert des services à plus de 292 nouveaux arrivants et réfugiés. De ce nombre, 89 % des personnes souffrant de dépression et 85 % de celles souffrant d'anxiété ont connu une amélioration de leur condition, ce qui a permis des transitions et des réinstallations plus sécuritaires. C'est énorme, quand on considère qu'il s'agit de réinstaller les gens rapidement et que c'est au secteur communautaire qu'incombe la tâche de répondre rapidement aux besoins urgents de ces gens.
    L'autre problème qui vient aggraver la crise des ressources humaines en santé, c'est la demande d'autres travailleurs de la santé. Partout au Canada, les sections de l'ACSM ont élaboré des programmes, comme le Retrouver son entrain, qui visent expressément la gestion du stress et de l'épuisement professionnel. Cependant, nous constatons que les stress causés par la pandémie perdurent dans tous les secteurs des soins de santé et qu'il y a érosion générale des ressources en soins de santé.

  (1605)  

    Pour venir à bout de cette situation de stress et d'épuisement professionnel, il faudra certains investissements critiques, de même que des programmes d'allégement et de répit pour les employés, ne serait-ce que pour leur permettre de prendre leurs congés. Nous avons travaillé en heures supplémentaires pour fournir des soins continus, sans financement accru pour répondre à ces besoins.
    Nous avons besoin d'un financement particulier pour assurer la diversité, l'équité et l'inclusion. J'ai parlé d'un programme visant le bien-être des nouveaux arrivants, mais nous devons aussi continuer de répondre aux besoins très divers du Canada.
    En terminant, je tiens à remercier le Comité de m'avoir écoutée. J'ai encore beaucoup de choses à dire et beaucoup d'autres questions auxquelles répondre.
    Pour récapituler, notre financement de base n'a pas été augmenté. La demande est à son plus haut niveau, pour nous et tous nos partenaires de la santé. Il nous faut un système de soins de santé intégré dans lequel les soins communautaires sont financés aussi bien et aussi efficacement que les soins hospitaliers de courte durée, faute de quoi les problèmes existants continueront de s'exacerber du fait que, pour beaucoup de gens, le premier contact avec les services de santé mentale se produit à l'hôpital, alors qu'il devrait avoir lieu avec un intervenant des soins communautaires ou avec le fournisseur principal de soins.
    Merci, madame Shields.
    Nous allons maintenant passer aux questions, en commençant avec Mme Gladu, pour six minutes.
    Merci, monsieur le président, et merci à tous nos témoins.
    Je vais m'adresser d'abord au Dr Holden.
    Vous avez parlé de la pénurie d'assistants dentaires dans le système de soins dentaires. À la lumière du plan néo-démocrate-libéral de création d'un programme national de soins dentaires, dont bénéficieraient des gens qui ne sont pas couverts actuellement, avez-vous les ressources suffisantes pour le réaliser et, si non, comment allons-nous les obtenir?
    C'est une excellente question. Je crois que je vais commencer en disant que, selon la façon dont le programme sera structuré, nous estimons traiter les trois quarts de la population canadienne de façon assez acceptable. Ce sont ces 25 à 30 % qui sont laissés pour compte.
    Nous sommes d'avis que les dentistes et les assistants pourront faire le nécessaire. Les ratios dentiste-habitants demeurent satisfaisants. Il y a certainement des facteurs géographiques qui peuvent parfois jouer. Nous savons, la dentisterie étant ce qu'elle était dans les années 1960, 1970 et 1980, que les dentistes et le personnel de bureau étaient alors certainement plus sollicités. Je pense que nous serions à la hauteur, certainement pour ce qui est permettre à plus de gens de cette population vulnérable d'avoir accès à des soins dentaires. Je pense que c'est une entreprise à laquelle la profession dentaire s'attèlerait volontiers.
    Il y a des difficultés. À notre avis, il faut faire quelque chose pour s'assurer du personnel nécessaire, mais je pense néanmoins que nous pourrions probablement y arriver.
    Je suis accompagné de mon collègue, Dr Burry, qui est le directeur général par intérim de l'Association dentaire canadienne.
    Dr Burry, voulez-vous ajouter quelque chose?
    Je pense que vous avez bien décrit la situation, en ce sens que les dentistes ont toujours fait acte de présence dans de telles périodes. Dans ce cas également, nous nous assurerions de nous occuper de tous ceux qui en ont besoin.
    Je pense que cela réduirait également en partie la demande dans le système de soins hospitaliers à mesure que les choses avancent et... Je peux en parler en tant que dentiste. Dans bien des cas, je peux, dans une demi-heure ou trois quarts d'heure, régler un problème qu'il est tout simplement impossible de traiter en salle d'urgence.
    C'est très bien. Merci.
    J'ai une question pour Mme Shields.
    J'ai vu que l'ACSM a réalisé une étude avec l'Université de la Colombie-Britannique qui montre que 41 % des Canadiens ont rapporté une régression de leur santé mentale depuis le début de la pandémie. C'est ce que vous avez dit.
    Savons-nous quelle a été l'incidence de cette augmentation des problèmes de santé mentale sur l'emploi? Je m'attendrais à ce que les gens s'absentent davantage du travail. Avons-nous des renseignements quantitatifs à ce sujet?
    Je n'ai pas de chiffres précis à vous donner, mais je peux vous donner des renseignements anecdotiques. Nous savons que le recours aux congés de maladie augmente partout au pays. Pour une grande part, les congés de maladie, d'invalidité de longue durée et de d'invalidité de courte durée sont liés à des problèmes de santé mentale, principale cause d'invalidité.
    La corrélation est forte, les gens étant vraiment au bord de l'épuisement professionnel. Nous constatons, en particulier, un très haut niveau d'épuisement professionnel dans le secteur des soins de santé. Nous voyons que nombre d'infirmières prennent leur retraite. C'est ce qu'on appelle la « grande sortie », le départ de gens incapables de suivre le rythme qu'ils avaient suivi jusqu'alors et de qui on exige pourtant qu'ils le suivent. Il s'agit d'une crise, puisque qu'on sait que le stress et l'incertitude font des ravages.
    Encore une fois, cela touche de façon disproportionnée les femmes, en particulier celles qui vivent avec de jeunes enfants. Elles sont notamment deux fois plus susceptibles de tomber en dépression et une fois et demie plus susceptibles de souffrir d'anxiété généralisée. Cela a également des répercussions sur toute leur famille.

  (1610)  

    Tout à fait.
    L'autre chose dont je veux parler, c'est l'augmentation de la toxicomanie qui a été constatée. Depuis que j'ai été chargée des dossiers de la santé dans le cabinet fantôme, c'est avec passion que je demande un service de rétablissement de longue durée, afin d'offrir aux gens une porte de sortie pour échapper à leur dépendance. Il n'en avait déjà pas assez.
    Pourriez-vous nous donner une idée de ce que le gouvernement fédéral pourrait faire pour combler cette lacune?
    Je suis très heureuse que cette question soit posée.
    Il y a deux ou trois choses vraiment importantes. Je crois vraiment que nous avons besoin d'une campagne de sensibilisation à la santé publique sur la consommation modérée d'alcool et de cannabis en particulier.
    Depuis le début de la pandémie, nous avons constaté, chez les hommes, une hausse de 39 % de la consommation problématique de cannabis et de 28 % de la consommation problématique d'alcool. Chez les femmes, c'est respectivement de 18 % et de 35 %. Ces chiffres sont tirés d'un document du Centre canadien sur les dépendances et l'usage de substances et de la Commission de la santé mentale du Canada.
    Les gens consomment davantage. Bien entendu, plus ils consomment sur de plus longues périodes, plus il devient difficile de les traiter. Nous devons donc faire des efforts d'éducation et d'intervention précoces. Nous avons absolument besoin de programmes faciles d'accès. Il faut que le gouvernement fédéral finance davantage de services de désintoxication et de crise pour que les gens puissent être pris en charge.
    Je suis d'accord avec vous pour dire que, pour certaines personnes, il nous faut des programmes de soins de longue durée et de soins en établissement. Nous devons également porter plus d'attention à la gestion du sevrage et aux services intégrés continus.
    Merci.
    Excellent.
    Je crois que mon temps est écoulé. J'en suis désolée, puisque j'avais d'autres questions pour le prochain témoin. Je vais m'arrêter là-dessus.
    Merci.
    Merci, madame Gladu. Il vous restait 10 secondes, mais elles sont envolées.
    Monsieur Van Bynen, vous avez la parole pour six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je tiens à remercier tous nos témoins d'avoir contribué à notre discussion aujourd'hui, et vous, madame Shields, en particulier, pour l'excellent travail que vous faites dans notre collectivité.
    Je n'ai que trois minutes, puisque je prévois partager mon temps de parole. Je vais donc poser mes questions sans plus tarder et vous laisserai répondre à celles qui vous paraissent les plus importantes.
    Tout d'abord, nous avons pris connaissance des difficultés liées au financement et nous comprenons quelles en sont les répercussions. Au-delà de ces difficultés, pouvez-vous dire quels sont les défis auxquels vous êtes confrontés pour conserver et attirer les gens de votre personnel, surtout pendant la pandémie?
    Ma deuxième question est la suivante. Comment, à l'heure actuelle, votre organisme surmonte-t-il ces difficultés? Qu'est-ce que vous recommandez comme élément de solution durable au problème de disponibilité de main-d'œuvre?
    Je vous remercie de cette question.
    Nous avons certainement eu des difficultés du fait que notre financement de base n'a pas été augmenté. Il va sans dire que nous sommes très préoccupés par le projet de loi 124 du gouvernement provincial qui limite notre capacité actuelle d'offrir des salaires concurrentiels pour attirer de nouveaux talents. Comme nous ne pouvons pas compter sur plus d'argent et offrir une meilleure rémunération, sur quoi devons-nous nous rabattre?
    Nous avons opté pour une stratégie axée sur le talent et la culture qui vise vraiment à créer un milieu de travail positif, agréable, engagé et animé par sa mission. Je pense d'ailleurs que c'est ce qui attire les gens vers le milieu des soins. Quels qu'ils soient — dentistes ou intervenants en santé mentale, travailleurs dans un centre de soins actifs ou de soins de longue durée —, tous veulent changer les choses.
    Cependant, nous voulons aussi sentir que l'importance de notre travail est reconnue et que notre apport a une certaine valeur dans la profession. Récemment, tous les fournisseurs de soins de santé de la région centrale de l'Ontario ont rédigé une déclaration de solidarité et de soutien en réponse aux attaques lancées contre nous par des opposants au port du masque et à d'autres mesures de santé publique. Les abus que nos secteurs ont subi étaient terribles. La stratégie que nous avons adoptée devant ces attaques implique que nous devons faire preuve de solidarité, protéger nos travailleurs de la santé et être en première ligne pour les soutenir.
    Il ne fait aucun doute qu'une augmentation de notre financement nous aiderait à mettre les salaires à niveau et à attirer des talents. En même temps, je sais pourquoi les gens de mon personnel restent au poste. Ce sont des gens qui veulent changer les choses et qui tiennent à ce que les services soient disponibles pour leurs clients. C'est leur réussite qui leur tient à cœur. Ce qu'il nous faut vraiment, c'est de pouvoir faire ce travail en partenariat et d'assurer la disponibilité des services.
    Merci de votre attention.

  (1615)  

    Merci.
    Pourriez-vous nous en dire davantage sur les défis en santé mentale qui se posent aux travailleurs aujourd'hui, notamment les travailleurs de la santé et les intervenants en santé mentale et en toxicomanie et, tout particulièrement, ceux de l'équipe que vous dirigez et organisez?
    Je pense que cela se répartit en fonction de la complexité croissante des soins. Bien franchement, nous voyons des symptômes exacerbés du fait que les gens qui auraient pu être été traités plus tôt ont attendu trop longtemps. Les gens sont aux prises avec des problèmes beaucoup plus complexes et profonds liés à la toxicomanie, à l'itinérance et à un hébergement insatisfaisant. Ils hésitent à se présenter, peut-être en raison de la pandémie, et nous tentons de les rejoindre virtuellement, ce qui n'est pas suffisant.
    Dans certains cas, les services en virtuel peuvent fonctionner lorsqu'il s'agit d'une dépression ou d'une anxiété légère à moyenne, mais lorsque les problèmes nécessitent des soins complexes, il faut voir les clients en personne pour être en mesure de les évaluer correctement.
    Nous avons eu des problèmes avec des membres de notre personnel qui ont l'impression qu'il y a beaucoup de détresse morale et qu'ils ne peuvent pas répondre aux besoins de tous les Canadiens ou des gens qu'ils servent. C'est déchirant pour eux. Ils ont choisi cette profession pour faire changer les choses et, voyant la liste d'attente s'allonger et la complexité des problèmes, ils peuvent céder au découragement.
    Dans le cadre de nos programmes de lutte contre l'itinérance, nous avons aussi éprouvé d'importants problèmes d'abordabilité du logement. Dans la région de York, il n'y a pas de logements abordables. Même avec les suppléments au loyer, le POSPH et d'autres prestations, nous n'arrivons pas à trouver de logements sécuritaires et abordables. Encore une fois, cette situation est cause de détresse morale. Dans ce domaine, une stratégie solide de création de logements abordables et supervisés pour tous les Canadiens qui en ont besoin est essentielle pour que nous puissions nous occuper des cas les plus complexes. Notre personnel, tout épuisé qu'il soit, travaille sans relâche pour tenter de régler ces problèmes.
    Merci.
    Madame Ferrada, il vous reste un peu moins de deux minutes.

[Français]

     Merci, monsieur le président.
    Merci, madame Shields. Ma question s'adressera à vous.
    Il me reste moins de deux minutes de temps de parole. Vous avez déjà abordé quelques solutions qui permettraient d'offrir une meilleure reconnaissance au milieu communautaire. Vous avez utilisé le mot « reconnaissance » pour parler de la façon dont le milieu communautaire soutient le système de santé, surtout en ce qui a trait à la santé mentale. Pourriez-vous revenir là-dessus?
     Vous avez déposé un rapport, le 1er mars dernier, dans lequel vous abordez quelques solutions. Au cours de la dernière minute et demie qu'il nous reste, j'aimerais que vous nous donniez une réponse concise à ce sujet. Vous pourriez même faire parvenir votre rapport au Comité.

[Traduction]

    Le rapport décrit un solide secteur communautaire en santé mentale et en traitement des dépendances qui offre aux Canadiens un accès rapide et facile aux services. En plus de faciliter l'accès, nous aidons les clients à naviguer dans le système et leur offrons un service d'aiguillage. Tous ces services sont intégrés à ceux de nos partenaires du secteur des soins de santé.
    Nous devons voir cela comme un solide secteur de soins de santé mentale pour enfants qui met l'accent sur les familles et l'intervention précoce. La plupart des problèmes de santé mentale apparaissent autour de 12 à 17 ans. Nous devons investir dans un nombre accru de services pour les jeunes, car la pandémie les a touchés de manière disproportionnée dans leur scolarité. Nous croyons vivement qu'il est nécessaire d'investir dans les jeunes, en particulier dans les adolescents, et de travailler en collaboration avec nos partenaires scolaires et avec tous les services offerts aux jeunes.
    Nous devons également nous pencher sur la santé mentale des aînés et nous attaquer aux problèmes de solitude et d'isolement parce que, là encore, la solitude chronique est l'un des principaux facteurs à avoir une incidence sur les coûts de santé globaux et sur le bien-être de chaque personne. Je transmettrai volontiers notre rapport au Comité au terme de cette réunion, à titre d'information.
    Je vous remercie.

[Français]

    Merci, madame Martinez Ferrada.
    Madame Chabot, vous avez la parole pour six minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je salue les témoins et je les remercie de leur participation et de leur contribution à cette étude.
    Ma première question s'adressera à Mme Yalnizyan.
    Vous avez une formation en économie et vous êtes chroniqueuse. Vous avez donné des exemples relatifs à l'économie des soins. Cependant, les répercussions de la pénurie de main-d'œuvre sur l'économie canadienne se font sentir dans plusieurs secteurs d'activité, dont le secteur manufacturier et celui de la petite et moyenne entreprise. Je pourrais aussi parler de la transformation alimentaire du secteur agricole.
     J'ai lu ce que la Chambre de commerce de l'Ontario a écrit au sujet de la pénurie de main-d'œuvre. En résumé, les deux facteurs qui inquiètent les entreprises sont la pénurie de main-d'œuvre et l'inflation.
    D'un point de vue plus large, auriez-vous des constats à faire en ce qui a trait aux répercussions de la pénurie de main-d'œuvre sur l'économie canadienne? Quelles solutions pourraient être envisagées?

  (1620)  

[Traduction]

    Je vous remercie pour cette question, madame Chabot.
    Si j'ai bien compris, vous voulez savoir si les pressions économiques liées aux pénuries de main-d'oeuvre ont un lien avec les pressions inflationnistes qui touchent toutes les entreprises.
    Je sais que la période transitoire est plus longue que tout le monde l'aurait souhaité, mais il ne faut pas oublier que nous avons eu une guerre en plus d'une pandémie qui ne disparaîtra pas tant que nous ne la prendrons pas au sérieux. Les pressions inflationnistes ne devraient pas se faire sentir à long terme; en revanche, les pénuries de main-d'oeuvre risquent de s'aggraver au cours des deux prochaines décennies. Nous avons besoin d'une stratégie pour régler ce problème. Je signale simplement que les hausses salariales finiront par accélérer l'inflation, si c'est là notre seule stratégie.
    Nous devons absolument maximiser le potentiel des gens qui sont sous-utilisés dans notre propre économie — les Autochtones, les jeunes à risque, les personnes handicapées, les nouveaux immigrants et les femmes. Nous pourrions exploiter pleinement le potentiel de toute une gamme de personnes. Nous pourrions embaucher des travailleurs qui ont déjà une formation.
     Richard Holden a dit des choses intéressantes au sujet des techniciens dentaires. À la fin des années 1970 et au début des années 1980, en Saskatchewan et au Manitoba, l'une des solutions que nous avons mises en place pour répondre aux besoins des enfants en matière de soins dentaires primaires et préventifs a été justement de mettre sur pied des écoles de techniques dentaires. Les dentistes ont ainsi cessé d'être les premiers intervenants à cet égard, ils ont plutôt joué un rôle de soutien. Ce sont les techniciens dentaires qui faisaient le gros du travail en allant dans les écoles rencontrer les jeunes de moins de 13 ans pour leur offrir des soins primaires et préventifs. Cet exemple démontre bien que nous sous-utilisons la capacité que nous avons à portée de main.
    Comme je l'ai dit dans mon allocution préliminaire, il existe des solutions pour éviter que les salaires deviennent le principal facteur d'inflation. Les accords sur l'apprentissage et la garde des jeunes enfants conclus l'an dernier sont un excellent exemple. Ils permettront d'offrir de meilleurs salaires dans le secteur des services de garde, tout en réduisant les coûts pour les parents.
    À une époque où un aîné canadien sur quatre vivra avec un faible revenu ou un revenu fixe et sera très résistant face à toute période d'inflation prolongée...

[Français]

     J'avais une autre brève question à vous poser, et il ne me reste pas beaucoup de temps.
    Croyez-vous que la participation des travailleurs étrangers temporaires peut être une solution à la pénurie de main-d'œuvre?
    Il y a aussi le contexte démographique dans certaines provinces au Canada, où les courbes démographiques indiquent que la situation de pénurie de main-d'œuvre va perdurer. Le Québec en fait partie, je crois que l'Ontario aussi. La participation des travailleurs étrangers temporaires ne devient peut-être pas la solution à long terme, mais, au moins, c'est une solution qu'il faut envisager.
    L'immigration fait-elle partie d'une solution à la pénurie de main-d'œuvre?

[Traduction]

    Tout à fait. Nous ne pourrons pas venir à bout de nos pénuries de main-d'oeuvre en embauchant seulement des personnes nées au Canada.
    La différence entre les personnes qui sont invitées à venir ici en tant que résidents permanents pour y construire leur vie et celles qui sont invitées ici seulement pour travailler, sans avoir le droit de rester, pose un problème non seulement éthique, mais aussi social et économique. Oui, nous allons probablement faire appel à un plus grand nombre de travailleurs étrangers temporaires à court terme, parce que l'immigration est ralentie. Nous devons cependant leur proposer plus de voies vers la résidence permanente. Ce n'est pas possible de penser que ces travailleurs soient assez compétents pour venir travailler ici, mais pas assez pour s'y établir. Je ne suis pas à l'aise avec cela en tant que Canadienne et je suis certaine que vous ne l'êtes pas non plus en tant que Québécoise.

  (1625)  

[Français]

    C'est un lien important que vous faites.
    Madame Shields, je n'ai malheureusement plus beaucoup de temps.
    En ce qui concerne la santé mentale, je comprends mieux ce qui se passe au Québec. Tous les groupes communautaires de santé mentale relèvent du ministère de la Santé et des Services sociaux du Québec pour obtenir du financement. Ces groupes communautaires au Québec offrent un service complémentaire à l'offre de services publics. Ils jouent donc un rôle important.
    Vous savez que le Québec et les provinces demandent au fédéral une hausse de financement en santé. Êtes-vous d'accord pour dire que nos systèmes de santé devraient être mieux financés?

[Traduction]

    Veuillez répondre rapidement, je vous prie.
    Certainement. Il faut investir massivement. Le gouvernement doit investir dans les services communautaires de counselling et de psychologie. Plusieurs programmes ont été lancés récemment à travers le Canada, notamment le programme Retrouver son entrain, et ils doivent être offerts à tous les Canadiens. Nous devons investir prioritairement dans le logement, le soutien au revenu et la sécurité alimentaire, parce qu'une personne qui a peur de ne pas avoir un toit sur la tête ou de n'avoir rien à manger ne réussira jamais à retrouver sa santé mentale. Nous devons accroître le financement et renforcer la capacité des services et des soutiens essentiels de santé mentale et de traitement des dépendances.
    Je vous remercie, madame Shields. Vous pourrez poursuivre en répondant à une autre question, car le temps de parole de Mme Chabot est écoulé.
    Nous passons maintenant à Mme Zarillo. Vous avez six minutes.
    Madame Zarillo, c'est à vous.
    Merci, monsieur le président.
    Je vais utiliser tout mon temps pour poser des questions à Mme Yalnizyan. Les témoins précédents nous ont clairement indiqué pourquoi ce secteur de l'économie est en croissance.
    Madame Yalnizyan, mes questions visent simplement à mettre en lumière les raisons pour lesquelles l'économie des soins n'a pas reçu toute l'attention qu'elle mérite dans le passé et pourquoi il est plus important que jamais de combler les pénuries de main-d'oeuvre qui frappent le secteur des soins. Pouvez-vous également nous dire pourquoi ce secteur économique peut contribuer à la croissance de l'économie et offrir une vie meilleure aux Canadiens. Je vais commencer par ces questions, en espérant qu'il me restera encore un peu de temps.
    Merci, madame Zarillo. Je remercie le Comité d'avoir lancé cette discussion et de se pencher sur ce sujet dans le cadre de son étude. Je suis contente que vous me posiez ces questions sur les raisons pour lesquelles nous n'avons pas investi auparavant, même si je n'ai pas de toutes les réponses.
    Nous savons tous que le secteur des soins de santé est celui qui reçoit le plus de fonds publics. La pandémie a démontré que les services de garde sont aujourd'hui tout aussi essentiels que l'éducation pour le fonctionnement de l'économie, sauf qu'ils étaient principalement offerts par le marché privé à la grandeur du pays. Une grande partie de ce secteur s'est effondré à cause de la pandémie. Ce sont les mêmes problèmes que Richard Holden a mentionnés: des coûts plus élevés, des revenus plus bas, moins de gens qui entrent sur le marché du travail et des dépenses plus élevées pour offrir le service. Cette situation touche également les entreprises qui offrent des services de garde d'enfants dont les marges de profit sont nettement plus faibles et qui offrent des services de haut calibre à forte intensité de main-d'oeuvre.
    Pourquoi n'avons-nous pas investi davantage dans les services de garde? Depuis quelques mois, les gens ne cessent de me demander comment nous allons payer pour ces services? Pourtant, toutes les données recueillies depuis 25 ans indiquent que le coût de ces services est amorti par la hausse des taux de participation à la population active. C'est le résultat à court terme. À long terme, cela dépend du type de programme que vous avez, parce que le simple fait de dépenser plus ne vous donnera pas nécessairement un rendement optimal. Vous obtenez le rendement maximal quand vous offrez des soins de grande qualité aux enfants qui risquent de ne pas être prêts à apprendre au moment où ils commencent l'école ni à avoir une aide à l'apprentissage durant leur scolarité.
    Si vous fournissez des soins de grande qualité à ces enfants à risque et, comme le mentionnait Rebecca Shields, aux nouveaux arrivants, aux immigrants, aux réfugiés et aux personnes ayant vécu un traumatisme, si vous aidez les personnes ou les enfants handicapés, et si vous donnez à toutes ces personnes une chance égale durant leurs premières années d'école, vous maximisez leur potentiel pour le reste de leur vie. Vous réduisez leur dépendance à l'assurance-emploi. Vous réduisez leur dépendance aux soins de santé, tout en réduisant leur risque d'avoir d'être pris en charge par les systèmes policier ou carcéral. Ces mesures rapportent des dividendes au Trésor public à de nombreux égards, tout en augmentant les revenus de ces personnes et leur potentiel de gagner leur vie. Vous améliorez leur capacité d'apprentissage et leur contribution au Trésor public, au lieu de les rendre dépendantes des fonds publics.
    Nous aurions dû faire cela il y a 50 ans, quand la Commission royale d'enquête sur la situation de la femme l'a demandé. Il nous a fallu 50 ans pour y arriver. Il ne suffit pas de signer un accord, nous devons aussi offrir d'excellents services.
    Je vais maintenant parler des soins de longue durée. La pandémie a démontré que la façon dont nous prodiguons les soins de longue durée est importante. Les établissements de soins privés à but lucratif, qui sont les principaux fournisseurs de soins au pays, ont été le cercueil d'un si grand nombre d'aînés parce que les profits avaient préséance sur les soins. Il y avait trop de patients dans des chambres surpeuplées, trop de travailleurs mal payés qui n'avaient pas l'autorisation de faire un nombre suffisant d'heures supplémentaires pour avoir droit aux prestations. Ils devaient donc se déplacer d'un établissement à l'autre, propageant ainsi la maladie. Nous devons tirer des leçons de la pandémie, surtout en ce qui concerne les aînés, et reconnaître l'importance des soins à domicile, des services prodigués dans les établissements de soins de longue durée, des services offerts dans les garderies et des services hospitaliers. Ces services sont là pour répondre aux besoins des citoyens lorsqu'ils en ont besoin afin qu'ils puissent travailler et devenir plus prospères, ce qui leur permettra de s'adonner à d'autres activités qui feront croître le PIB. Comme je l'ai déjà dit, l'économie des soins est trop souvent considérée comme une économie dérivée. C'est ce qui arrive quand l'économie va bien.
    En fait, nous devons comprendre que c'est le fondement même d'une économie qui atteint son plein potentiel. Le vieillissement de la population n'est pas un phénomène unique au Canada; il se manifeste dans tous les pays de l'hémisphère nord. Tous ces pays connaîtront des pénuries de main-d'oeuvre. Nous serons en concurrence avec d'autres pays riches pour attirer de nouveaux arrivants, temporaires ou permanents, parce qu'il n'y aura tout simplement pas assez de travailleurs nulle part.
    Nous allons découvrir, si nous sommes prêts à y prêter attention, ce que la pandémie nous a déjà révélé: si vous donnez aux gens la chance d'aller travailler, vous maximisez leur potentiel, parce qu'ils ne passent pas tout leur temps à prodiguer des soins sans être rémunérés. Vous rendez les gens en meilleure santé, comme l'a dit Rebecca Shields. C'est comme le disaient MM. Burry et Holden, si vous avez des dents saines, vous pourrez obtenir un meilleur emploi, n'est-ce pas? Il est possible de prévenir les caries si vous offrez des programmes de fluoration aux enfants et si vous faites des examens périodiques. Ce sont autant de coûts que nous pourrons éviter. Pourquoi n'investissons-nous pas davantage? C'est parce que quand ça saigne, ça paie, autrement dit, plus vous faites de bruit, plus vous obtiendrez de fonds. La pandémie nous oblige à réfléchir à cette approche des soins de santé préventifs, tout comme la guerre en Ukraine.

  (1630)  

    Que faisons-nous pour prévenir tout cela? C'est loin d'être intéressant. Nous versons des « dividendes », au risque de ne plus avoir beaucoup d'argent à dépenser quand le quart de la population vieillira, paiera moins d'impôts et aura davantage recours aux services. Nous avons donc intérêt à trouver une façon de maximiser le plus rapidement possible l'argent de nos impôts.
    Merci, madame Zarillo, votre temps est écoulé.
    Nous passons maintenant à M. Liepert. Vous avez cinq minutes.
    C'est à vous.
    Merci, monsieur le président.
    Merci également à nos invités d'être parmi nous aujourd'hui.
    Madame Shields, je peux confirmer que vous aviez raison tout à l'heure de dire que la consommation d'alcool a augmenté. Je n'ai jamais autant bu que durant ces deux dernières années.
    Sérieusement, j'aimerais faire quelques observations et vous demander si je fais fausse route ou non.
    J'aimerais d'abord vous dire que j'ai eu le privilège d'être ministre de la Santé de l'Alberta durant deux ans, en 2009 et 2010. Dans le cadre de cette fonction, j'ai toujours eu l'impression que le secteur des soins de santé de notre pays souffre d'un problème structurel. Nous dépensons toute notre énergie et notre argent à traiter la maladie, mais nous n'investissons pas suffisamment dans la prévention. J'ai toujours pensé que la santé mentale était le parent pauvre du budget de la santé, parce que les maladies mentales y sont pratiquement occultées. Si quelqu'un se casse une jambe ou a le cancer, nous allons le soigner sans hésiter, mais la santé mentale est un sujet quasi tabou.
    Malgré tout l'argent que nous avons consacré aux soins de santé et les sommes colossales que nous continuons à y injecter, Mme Smart, de l'Association médicale canadienne, qui est venue témoigner à notre réunion précédente, a dit le système de santé du Canada était en mode survie et en crise.
    Ne pensez-vous pas que nous devons régler le problème structurel du système de santé, au lieu de simplement continuer à y injecter de l'argent? C'est pourtant ce que ne cessent de réclamer toutes les personnes à qui nous demandons comment corriger les lacunes du système de santé?

  (1635)  

    Je suis tout à fait d'accord. Je pense que nous devons nous efforcer de mieux intégrer le système de santé afin que nous puissions offrir des soins holistiques. Il peut s'agir de stratégies numériques qui nous permettraient à tous d'avoir accès aux dossiers médicaux électroniques, ou encore, comme vous l'avez dit, d'investir davantage dans la prévention.
    Je vais prendre un instant pour parler d'un sujet soulevé par les services de santé de l'Alberta, soit l'incidence de la solitude chronique sur le coût des soins de santé. Il a été démontré que la solitude chronique est l'un des principaux facteurs du maintien à l'hôpital de personnes qui pourraient bénéficier d'autres niveaux de soins au lieu d'être à l'hôpital. Il a également été démontré que la solitude est probablement la principale raison pour laquelle une personne âgée se retrouve à l'hôpital. La solitude est aussi un facteur de maladie chronique et elle équivaut à fumer 15 cigarettes par jour.
    La solitude chronique est un énorme problème, comme d'autres problèmes, dont le coût pourrait être transformationnel. La solitude est une cause d'anxiété et de dépression, elle fait grimper les taux de suicide et a bien d'autres répercussions. En favorisant l'intervention précoce, en faisant la promotion de la santé mentale et en renforçant le sentiment d'appartenance, nous pourrions améliorer grandement la santé et le bien-être de la société.
    Je vous remercie.
    Deuxièmement, j'aimerais parler brièvement du véritable défi que nous devons relever. En tant que pays, nous avons la chance de pouvoir être un chef de file en matière d'aide humanitaire. Je pense toutefois que nous ne comprenons pas certains des traumatismes vécus par de nombreux nouveaux arrivants au Canada.
    Quand nous avons enfin réussi à relocaliser 200 Yésidies à Calgary, j'ai eu le privilège d'en accueillir un grand nombre dans ma circonscription. Certaines ont vécu des expériences inimaginables et les traumatismes qu'elles ont subis affectent clairement leur santé mentale.
    Comment arrive-t-on à traiter des cas semblables, quand il n'y a pas nécessairement un problème physique? Bon sang, ce doit être un travail difficile.
    Je vais vous parler du projet mis en place par ma filiale de l'Association canadienne pour la santé mentale. C'est la première initiative du genre au Canada financée par le gouvernement fédéral, par le biais d'Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada. Nous avons intégré dans les organismes d'établissement un service de soins holistiques de santé mentale tenant compte des traumatismes. Ces services ne sont offerts que dans notre région, dans des « centres d'accueil » comme nous les appelons. Notre équipe a été intégrée à ces centres d'accueil pour offrir des soins afin que ces personnes ne soient pas aiguillées hors de la sphère des services d'établissement.
    Nous avons une infirmière praticienne qui s'occupe des problèmes de santé, ainsi que des intervenants spécialisés en santé mentale et sensibilisés à la culture des patients. Nous avons aussi créé des partenariats avec des spécialistes des traumatismes afin de pouvoir traiter les personnes qui ont vécu des problèmes familiaux, des problèmes liés à leur établissement et des problèmes physiques. Les nouveaux arrivants et les réfugiés ne veulent pas toujours parler de leurs problèmes de santé mentale. Il s'agit parfois de problèmes de santé, mais quand nous creusons un peu, cela entraîne des coûts de santé sous-jacents.
    La réponse, c'est que nous avons une équipe de soins holistiques qui offre aux nouveaux arrivants et aux réfugiés des soins primaires intégrés à un traitement spécialisé et adapté à leur culture au moyen d'une approche axée sur les traumatismes. C'est un travail qui ne peut se faire en silos. Nous devons travailler avec la communauté pour nous assurer que ces services seront parfaitement intégrés, tout en renforçant la capacité du personnel des services d'établissement à reconnaître les problèmes et à orienter les personnes au bon endroit.
    Je vous remercie.
    Merci à vous.
    Madame Shields et monsieur Leipert, je vous remercie.
    Nous passons maintenant à M. Long pour le dernier tour. Mais avant, je veux informer madame Chabot et madame Zarillo qu'elles auront le temps de poser une brève question avant la fin de cette ronde de questions.
    Monsieur Long, c'est à vous.
    Merci, monsieur le président.
    Bonjour chers collègues.
    Monsieur Muys, je vous souhaite la bienvenue à notre comité.
    Ma première question est brève et s'adresse à Mme Yalnizyan. Je suis impressionné par votre collection de disques. J'aimerais savoir si vous en avez des groupes April Wine, BTO ou Stampeders?
    Vous plaisantez? Bien sûr que oui.
    Je suis ravi de l'entendre.
    Mes questions s'adressent à vous, madame Shields. Je vous remercie de votre témoignage.
    Je remercie également tous les témoins. Vos témoignages nous sont très utiles.
    Madame Shields, je veux vous donner l'occasion de nous donner plus de détails sur la crise que traverse notre système de santé, en particulier en ce qui concerne la santé mentale.
    Je vais vous citer rapidement l'extrait d'un article qui j'ai lu aujourd'hui sur le site de CBC:
Rose Mary Buote dit qu'elle passe ses quarts de travail à s'excuser. S'excuser auprès d'un patient très malade parce que son opération a été reportée. S'excuser d'avoir mis en attente le proche d'un patient. S'excuser d'être trop débordée pour prodiguer les soins comme elle le voudrait.
    Elle se sent « tellement coupable ».
    Nous sommes tous bien conscients que de nombreux travailleurs de la santé craquent sous la pression du système. En tant que société et en tant que communauté, nous essayons de nous remettre de la pandémie, mais le personnel de la santé et les proches aidants sont épuisés et décimés. De nombreux témoins nous ont dit que les travailleurs de la santé sont épuisés et en détresse, et que les taux d'épuisement professionnel sévère parmi les travailleurs de la santé ont presque doublé. Selon des données récentes, 20 % des travailleurs de la santé de première ligne ont pensé au suicide et, 6 % ont planifié une tentative.
    Madame Shields, pouvez-vous nous en dire davantage sur ce que votre organisation a entendu de la part des travailleurs de la santé?
    Je vous remercie.

  (1640)  

    J'ai entendu la même chose que vous. En fait, nous en sommes témoins. Nous travaillons en partenariat les hôpitaux et nos équipes sont intégrées au personnel hospitalier.
    Nous sommes donc en mesure de constater la détresse morale générée par l'incapacité de prodiguer des soins, l'épuisement professionnel, le nombre de décès survenus durant la pandémie et le transfert de patients. Une infirmière m'a dit avoir dû se faire violence lorsqu'elle a été obligée de transférer des patients vers un autre hôpital très éloigné de leur famille. Elle ne pouvait pas faire autrement, même si elle savait que ce n'était pas la meilleure solution ni pour les patients ni pour leur famille. Il n'y avait tout simplement pas de place.
    La réalité, c'est que nos unités de soins intensifs débordent de malades atteints de la COVID. La pandémie n'est pas terminée pour le système de santé, ni pour les soins de longue durée. J'ai raconté comment les travailleurs de la santé se sentaient face aux menaces et aux protestations de patients contre directives de la santé publique. On ne parle plus de manifestations de casseroles. Imaginez ce qu'ils ont ressenti quand on leur a dit qu'ils ne pouvaient plus porter leurs uniformes habituels pour donner des soins.
    Nous devons être solidaires de nos travailleurs de la santé. Nous devons rappeler aux Canadiens que ces travailleurs méritent la compassion et l'empathie que nous leur demandons d'avoir à notre égard. Comme tous les Canadiens le souhaitent, lorsque vous présentez à l'urgence pour un problème personnel ou pour accompagner un proche ou un enfant, vous voulez que le personnel médical ou infirmier qui vous traite soit à son meilleur. Lorsqu'ils sont épuisés et fatigués, les soignants risquent de ne pas l'être, ce qui met tout le monde à risque.
    Je vous remercie pour ces commentaires.
    Madame Shields, je vais poursuivre. Notre ministre de la Santé mentale et des Dépendances et ministre associée de la Santé, madame Bennett, a reçu le mandat de renforcer nos systèmes de santé mentale. La semaine dernière, notre gouvernement a annoncé un transfert de deux milliards de dollars aux provinces et aux territoires pour les aider à améliorer leurs services en santé mentale. Selon vous, si nous accordons la même importante à la santé mentale qu'à la santé physique, est-ce que cela encouragera des gens à faire carrière dans le domaine des soins de santé? Comment cet investissement permettra-t-il de rémédier aux pénuries de personnel que nous connaissons actuellement?
    Je vous remercie.
    Je pense qu'en plus de cet investissement, il y a aussi le fait que les gens constatent qu'il y a des possibilités de faire carrière dans le domaine de la santé mentale où ils pourront améliorer le bien-être de leur collectivité et il y a aussi l'intégration de la santé physique et mentale. Nous savons que la santé mentale, c'est aussi la santé. Grâce à l'intégration des soins, je pense que les gens seront davantage attirés vers cette profession qui leur permettra de changer la donne et d'améliorer le bien-être des patients. C'est pour cette raison que nous faisons cela. C'est pour changer les choses que je m'acquitte de mon rôle.
    Je me réjouis de cet investissement, mais je veux faire une recommandation. L'une des solutions recommandées consiste à accroître le financement des collèges et des universités et à financer des services de counselling et d'orientation pour les jeunes. J'ai bien peur que le gouvernement finisse par financer les collèges et les universités pour la prestation de ces soins, au lieu de financer les services communautaires ou les fournisseurs de soins. En finançant les soins de santé par le biais des universités et des provinces, il crée un silo de plus. Je préconise vivement l'intégration de tous les services, comme cela a été fait dans le programme pour les réfugiés et l'établissement dont je vous ai parlé. Ces deux volets sont intégrés afin que les gens reçoivent des services holistiques et pour réduire le cloisonnement d'un service à l'autre.

  (1645)  

    Merci beaucoup.
    Madame Shields et monsieur Long, je vous remercie.
    Madame Chabot, c'est à vous.

[Français]

     Ma question s'adresse au Dr Holden, de l'Association dentaire canadienne.
    Je veux bien comprendre. J'ai bien compris qu'il y a un problème de pénurie de main-d'œuvre chez les hygiénistes dentaires. Je connais la situation du Québec. En ce qui concerne les formations au Québec, c'est une formation postsecondaire, donc personne ne s'improvise hygiéniste dentaire. C'est une formation qualifiée.
    Sur le plan de la pénurie de main-d'œuvre, pouvez-vous détailler cela par région ou par province? Est-ce une pénurie de main-d'œuvre uniforme dans tout le pays ou certaines provinces ont-elles des problèmes différents?

[Traduction]

    La pénurie se fait sentir à l'échelle régionale, provinciale et territoriale. C'est comme ça... Je veux apporter une précision. Il faut faire une distinction entre les assistants dentaires et les hygiénistes. Pour devenir hygiéniste dentaire, vous devez normalement avoir un diplôme postsecondaire, universitaire ou collégial, tandis que les assistants dentaires font des études moins longues que les hygiénistes. Selon nos calculs, il y a probablement entre 26 000 et 29 000 assistants dentaires au Canada, mais en Ontario et au Québec, cette profession n'est pas réglementée. Quelque 20 000 assistants dentaires sont agréés et ont un permis d'exercice, comparativement à environ 30 000 hygiénistes. Il y a probablement une pénurie dans les deux professions, mais il est évident que les assistants dentaires sont essentiels. Je connais des dentistes qui ne peuvent pas faire leur travail correctement s'ils n'ont pas un assistant dentaire à leurs côtés.
    Monsieur Burry, vous voulez peut-être ajouter quelque chose?
    Pouvez-vous répondre brièvement, monsieur Burry?

[Français]

    Je crois que vous avez souligné plusieurs problèmes, c'est-à-dire qu'il y a des différences entre les provinces au Canada.
    Un deuxième élément du problème réside surtout dans les changements d'habitudes des hygiénistes dentaires, qui découlent en grande partie de la pandémie. Certaines personnes ont pris la décision de réduire leurs heures de travail ou même de tout simplement quitter la profession. Comme le Dr Holden l'a souligné précédemment, en ce moment, c'est une formation professionnelle d'une durée qui varie entre deux et quatre ans, selon la province. Il y a moins de pression pour l'instant, mais il y a un manque de personnel dans les centres dentaires au Canada, même en ce qui concerne le personnel de bureau.
    Merci, madame Chabot.

[Traduction]

    Madame Zarillo, vous pouvez poser une question, je vous prie. Nous arrivons à la fin du premier groupe.
    Merci, monsieur le président.
    Ma question s'adresse à Mme Yalnizyan. Je reviens à ce qui a été dit au sujet des agences de placement temporaire et des applications de services à la demande.
    Vous avez parlé de la classification erronée des travailleurs et des risques que posent ces agences et ces applications de services à la demande. Pourriez-vous nous en dire davantage à ce sujet?
    Veuillez répondre brièvement, je vous prie.
    Je pense que vous avez entendu Linda Silas de la Fédération canadienne des syndicats d'infirmières et d'infirmiers lors de votre deuxième réunion.
    En lisant les témoignages de cette réunion, j'ai constaté qu'elle a été la première personne à dire que les infirmières et les infirmiers étaient épuisés et abandonnaient le secteur hospitalier parce qu'ils n'avaient aucun contrôle sur leurs horaires de travail. Ces travailleurs se tournent vers les agences de placement temporaire.
    Dans des régions rurales de l'Ontario, il n'y a pas de soins à domicile. Les réseaux de santé intégrés locaux sont incapables de fournir un accès aux soins à domicile. En gros, si vous habitez à plus de 100 kilomètres d'un hôpital, vous n'avez pas accès aux services à domicile. Vous êtes inscrits à une liste financée par des fonds publics, mais vous n'avez pas accès aux soins à domicile.
    Des entreprises se lancent dans ce domaine au moyen d'applications de services de soins à domicile à la demande et elles répondent à un besoin. Environ 12 000 personnes sont inscrites à une seule application de services à la demande.
    Ce sont justement ces techniques de répartition de travailleurs qui encouragent des soignants à laisser des emplois couverts par des protections.

  (1650)  

    Merci, madame Yalnizyan.
    Nous en parlerons.
    Je suis désolée, monsieur le président. Puis-je demander que la fin de cette réponse nous soit envoyée par écrit? Mme Yalnizyan peut-elle nous la transmettre plus tard?
    Je vous remercie.
    Oui, c'est une très bonne idée, madame Zarillo.
    Madame Yalnizyan, pouvez-vous nous la transmettre par écrit? Ce serait très apprécié.
    Merci à tous nos invités de ce premier groupe d'être venus témoigner devant le Comité. Nous vous en sommes très reconnaissants. Merci.
    Nous allons suspendre la séance quelques minutes avant de passer au deuxième groupe.

  (1650)  


  (1650)  

    Chers collègues, nous accueillons maintenant notre deuxième groupe de témoins.
    Je souhaite la bienvenue aux témoins du deuxième groupe que nous entendrons aujourd'hui. Je vous demanderais de limiter vos déclarations préliminaires à cinq minutes ou moins, car nous avons des contraintes de temps.
    De l'Association canadienne des constructeurs d'habitations, nous accueillons Kevin Lee, directeur général. Nous entendrons également Mike Collins-Williams, membre et directeur général de l'Association de la construction résidentielle du secteur ouest. Nous recevons aussi Dimitri Fraeys, vice-président, et Isabelle Leblond, directrice corporative du Conseil de la transformation alimentaire du Québec. Et enfin, nous entendrons Kathleen Sullivan, présidente-directrice générale de Aliments et boissons Canada.
    Nous commencerons par l'Association canadienne des constructeurs d'habitations. Vous avez cinq minutes.
    Messieurs, l'un ou l'autre d'entre vous peut commencer.

  (1655)  

    Je m'appelle Kevin Lee et je suis président-directeur général de l'Association canadienne des constructeurs d'habitations.
    L'Association canadienne des constructeurs d'habitations, ou ACCH, est la voix de l'industrie canadienne de la construction résidentielle. Nous représentons environ 9 000 entreprises membres à travers le Canada, dont des constructeurs domiciliaires, des rénovateurs, des entrepreneurs spécialisés, des fabricants de produits et de matériaux ainsi que des fournisseurs de produits et de services de construction. L'ACCH est une organisation qui travaille à trois niveaux — national, provincial et régional. Nous comptons plus d'une cinquantaine d'associations aux niveaux régional et provincial.
    Je suis accompagné aujourd'hui de mon collègue Mike Collins-Williams, président-directeur général de l'Association de la construction résidentielle du secteur ouest de la région d'Hamilton-Halton. Mike présentera le contexte régional et répondra aux questions des membres du Comité.
    Comme vous le savez peut-être, notre industrie, comme tant d'autres, connaît des pénuries chroniques de main-d'oeuvre. Le problème date d'avant la pandémie. Ces pénuries de main-d'oeuvre entraînent des retards dans la construction de logements grandement nécessaires. Selon notre indice du marché de l'habitation, 71 % de nos membres sont touchés par ces retards.
    Près de 20 % de nos travailleurs prendront leur retraite au cours de la prochaine décennie. Cela veut dire que le secteur devra embaucher plus de 148 000 nouveaux travailleurs pour suivre le rythme des départs à la retraite et de la demande. De ce nombre, seulement 107 000 devraient provenir de nos sources habituelles, ce qui laisse un déficit de personnel de 30 %. Une grande partie des nouveaux travailleurs devront donc provenir de groupes traditionnellement sous-représentés au sein de la population active de la construction, notamment les femmes, les Autochtones et les nouveaux arrivants au Canada.
    Je tiens à souligner que ces données proviennent de ConstruForce Canada, un organisme national dirigé par l'industrie qui représente tous les secteurs de la construction et dont la mission est de promouvoir le marché du travail au sein de l'industrie. Malheureusement, le financement habituellement versé à ConstruForce pour produire de l'IMT dans le cadre du programme d'appui aux initiatives sectorielles d'EDSC lui a été refusé cette année, tout comme celui versé à de nombreuses organisations qui diffusent de l'IMT dans divers secteurs. ConstruForce doit maintenant présenter une nouvelle demande dans le cadre d'une nouvelle initiative, mais le financement demeure incertain. Permettez-moi de souligner qu'en cette période où l'industrie de la construction, comme bien d'autres, connaît de graves problèmes de main-d'oeuvre, il est important pour nous que ces mécanismes de financement de l'IMT soient rétablis.
    Quant aux mesures à prendre pour combler ces pénuries de main-d'oeuvre, l'ACCH demande au gouvernement de maintenir toutes les mesures visant à promouvoir les carrières dans les métiers spécialisés, à appuyer la formation et à fournir un soutien financier aux entreprises et aux particuliers pour recruter des travailleurs spécialisés. Notre association travaille sans relâche pour combler les lacunes dans les métiers spécialisés, et l'aide gouvernementale à cet égard est très bénéfique.
    Compte tenu des pénuries de main-d'oeuvre prévues dans les bassins nationaux, l'ACCH demande au gouvernement d'améliorer le système d'immigration pour les travailleurs qualifiés en leur offrant des possibilités de résidence permanente. À cette fin, il peut faciliter la sélection d'immigrants ayant des titres de compétences dans les métiers spécialisés ou de l'expérience dans la construction pour faire en sorte que le secteur de la construction résidentielle reçoive sa juste part de nouveaux arrivants. Il est également essentiel d'augmenter les attributions de travailleurs spécialisés issus de l'immigration et de simplifier le processus de transition des travailleurs temporaires au statut de travailleurs permanents.
    L'ACCH travaille actuellement sur une nouvelle initiative visant à accroître la capacité de notre industrie de la rénovation à adapter les maisons afin de permettre aux gens de vieillir chez eux, un soutien important tant pour les aînés que pour le système des soins de santé. Je serai ravi de vous donner plus de détails si cela vous intéresse.
    Je vais maintenant inviter mon collègue Mike à vous dire quelques mots.
    Les problèmes dont vient de parler mon collègue à l'échelle nationale sont très présents dans la région d'Hamilton et à l'extrémité ouest de la région du Golden Horseshow. Au cours de la prochaine décennie, on s'attend à ce que l'industrie ontarienne de la construction résidentielle enregistre une croissance de 4 % qui pourrait être beaucoup plus forte si nous comblons la pénurie de main-d'oeuvre dans le secteur résidentiel. Heureusement, ce problème est aujourd'hui bien reconnu en Ontario et ailleurs au pays.
    Pour atteindre la croissance nécessaire des mises en chantier de maisons, l'Ontario doit maintenir le cap sur le renouvellement de la population active dans le secteur de la construction résidentielle, car 22 % des travailleurs devraient prendre leur retraite au cours de la prochaine décennie, ce qui est stupéfiant. Comme les derniers baby boomers atteindront l'âge de 65 ans en 2029, près de 52 400 travailleurs du secteur ontarien de la construction résidentielle partiront à la retraite.
    En raison du vieillissement de la population et de la concurrence accrue entre les industries de la province pour recruter de jeunes talents, il sera difficile d'attirer de nouveaux travailleurs vers des carrières en construction. En s'appuyant sur les tendances historiques, l'Ontario devrait recruter 42 732 nouveaux travailleurs de 30 ans et moins dans la population locale. À ce rythme, on s'attend à ce que des départs à la retraite soient reportés chaque année durant la période de prévision.
    Si le recrutement n'augmente pas, la province pourrait connaître une pénurie de 17 700 travailleurs d'ici 2030. Nous constatons déjà les répercussions de ces pénuries de main-d'oeuvre. L'indice du marché de l'habitation de l'ACCH dont a parlé mon collègue dans son introduction fait état de retards de 11 semaines dans le secteur ontarien de la construction en raison de problèmes liés à la main-d'oeuvre et aux chaînes d'approvisionnement.
    Je ne vais pas répéter les recommandations formulées par Kevin, mais je dirais simplement qu'elles s'appliquent également à la région de Hamilton.
    Je vous remercie. Nous répondrons volontiers à vos questions.

  (1700)  

    Je vous remercie.

[Français]

     Monsieur Fraeys, du Conseil de la transformation alimentaire du Québec, vous disposez de cinq minutes.
    Je m'appelle Dimitri Fraeys et je suis le vice-président de l'innovation et des affaires économiques au Conseil de la transformation alimentaire du Québec, le CTAQ. Je suis accompagné de ma collègue Mme Isabelle Leblond, qui est directrice corporative chez Olymel.
    Le CTAQ est le principal regroupement d'entreprises du secteur de la transformation des aliments et des boissons au Québec. Le CTAQ est une fédération de 14 associations sectorielles au Québec. Au Québec et au Canada, l'industrie de la transformation des aliments et des boissons est le premier employeur manufacturier, avec 75 000 emplois au Québec et 300 000 emplois au Canada.
    L'industrie des aliments et des boissons fait face à une crise majeure de pénurie de main-d'œuvre. Le nombre de postes vacants est à la hausse, et il varie entre 20 et 40 % selon les usines. La fabrication des aliments et des boissons connaissait déjà des problèmes de main-d'œuvre avant la pandémie de la COVID‑19, mais la pression de la pandémie a amplifié la situation, et le secteur a maintenant besoin d'une solution urgente.
    Malgré les initiatives de recrutement énergiques pour pourvoir les postes vacants, il a été impossible de trouver suffisamment de Canadiens pour pourvoir les emplois dans le domaine de la fabrication des aliments et des boissons. Il est extrêmement difficile de recruter du personnel. Alors que d'autres secteurs sont également confrontés à des problèmes de main-d'œuvre, nous sommes maintenant tous en concurrence pour les mêmes travailleurs, qui se font de plus en plus rares.
    L'incapacité de maintenir une main-d'œuvre stable a une incidence sur la sécurité alimentaire, la reprise économique et le bien-être animal, et elle sape la capacité du secteur à soutenir un système agricole et alimentaire national. Puisqu'elles n'ont pas suffisamment de travailleurs, les entreprises abandonnent déjà certaines gammes de produits, interrompent la production et imposent des heures supplémentaires, ce qui entraîne l'épuisement d'une main-d'œuvre déjà confrontée à des contraintes supplémentaires en raison de la pandémie. Parfois, les entreprises reportent tout simplement leurs plans d'expansion et il n'est pas rare que les membres de la famille participent aux activités dans les usines afin de poursuivre la production.
    Bien que la transformation des aliments et des boissons ne soit qu'un des nombreux secteurs qui connaissent des pénuries de main-d'œuvre, l'incapacité de répondre aux besoins actuels aura une incidence sur la sécurité alimentaire nationale et l'abordabilité des aliments, ainsi que sur la capacité des Canadiens à accéder facilement aux aliments qu'ils veulent. Une augmentation du coût des aliments constituera un défi supplémentaire en raison de l'inflation, qui a déjà eu pour effet d'augmenter le coût de la vie.
    En cette période de baisse de l'offre alimentaire mondiale, il est impératif que le Canada augmente la production et la transformation alimentaire afin de pouvoir partager ses denrées avec les pays qui n'ont pas cette chance. Le Programme des travailleurs étrangers temporaires permet de combler ce manque de main-d'œuvre. Ce programme est une bouée de sauvetage pour les entreprises qui sont à bout de souffle.
    Ce programme devrait devenir permanent, puisque les courbes démographiques indiquent que la pénurie de la main-d'œuvre va perdurer au moins jusqu'en 2030. Notre inquiétude porte sur les délais. Il s'écoule entre 8 et 10 mois entre le dépôt des études d'impacts sur le marché du travail, les EIMT, et l'arrivée des travailleurs étrangers temporaires. Les délais sont de quatre à cinq mois pour l'analyse des EIMT et de trois à six mois pour l'obtention des visas.
    Pour le Québec, les délais sont encore plus longs et vont jusqu'à un an, puisque les entreprises doivent recruter les travailleurs avant de déposer des EIMT. Les entreprises agricoles sont exemptées de visas, car leurs travailleurs viennent du Mexique ou du Guatemala. Par contre, les entreprises de transformation du Québec recrutent des employés dans des régions francophones, comme l'Afrique du Nord et Madagascar, qui n'ont pas cette exemption, ce qui allonge les délais.
    Nous proposons quelques solutions pour accélérer le processus.
     Premièrement, il faudrait avoir la possibilité de déposer des EIMT par usine, ce qui permettrait de regrouper un grand nombre de travailleurs sur un même document. Moins d'EIMT signifie moins de travail pour les analystes et une accélération du processus d'analyse.
    Deuxièmement, il faudrait permettre aux entreprises de bénéficier du temps d'étude de ces EIMT pour recruter des employés. C'est un problème qui touche particulièrement le Québec.
    Troisièmement, il faudrait conclure des ententes avec des pays francophones afin d'obtenir l'obtention des visas de manière accélérée. C'est déjà le cas pour le Mexique et le Guatemala pour l'accès aux fermes.
    Quatrièmement, il faudrait créer une catégorie d'employeurs de confiance pour les entreprises qui déposent des EIMT régulièrement depuis cinq ans et qui les renouvellent chaque année. Ce que nous proposons, c'est l'équivalent du programme Nexus ou une accélération du processus d'immigration. Ainsi, les entreprises n'auront plus à attendre le fameux processus d'analyse qui peut prendre de quatre à six mois.
    Cinquièmement, il faudrait augmenter le maximum de travailleurs étrangers à 30 %, notamment au Québec, qui a déjà une entente spéciale à 20 %.
    Nous vous remercions de cette occasion de nous exprimer devant vous et nous sommes prêts à répondre à vos questions.

  (1705)  

     Merci, monsieur Fraeys.

[Traduction]

    Nous passons maintenant à Mme Sullivan. Vous avez cinq minutes.
    Je m'appelle Kathleen Sullivan et je suis présidente-directrice générale d'Aliments et boissons Canada, l'association nationale qui représente les entreprises du secteur canadien de la fabrication d'aliments et de boissons. Je vous remercie de me donner l'occasion de discuter avec vous des pénuries de main-d'oeuvre au sein de notre industrie.
    Le système alimentaire canadien est l'élément clé de la souveraineté alimentaire de notre pays. Il contribue aux économies nationale, provinciale et régionale du Canada, il favorise l'atteinte de nos objectifs en matière de commerce international et il soutient la production alimentaire et la sécurité des aliments.
    Le secteur de la fabrication d'aliments et de boissons est au coeur de ce système alimentaire. Nos membres, qui font partie de l'infrastructure essentielle du Canada, exploitent près de 8 000 usines, génèrent 118 milliards de dollars par année en ventes et, en période de pointe, emploient près de 300 000 travailleurs. En fait, nous sommes le plus gros employeur du secteur manufacturier au pays.
    La crise de la main-d'oeuvre que nous traversons aujourd'hui est toutefois déstabilisante. Les usines alimentaires font état de taux d'inoccupation structurelle de 20 % par jour, en moyenne, et parfois de 30 % et plus. Ces pénuries ont entraîné une réduction de la production alimentaire, une augmentation des préoccupations relatives au bien-être des animaux et un important stress émotionnel et physique et un taux élevé d'épuisement professionnel parmi nos travailleurs.
    Ces pénuries de main-d'oeuvre sont devenues structurelles et elles se poursuivront même après la pandémie. Pire encore, nous nous attendons à ce que la situation se détériore car les entreprises prévoient un nombre important de départs à la retraite au cours des cinq prochaines années.
    Nous nous réjouissons des récents engagements pris par les gouvernements fédéral et provinciaux pour régler les problèmes de main-d'oeuvre. Cela comprend évidemment les 85 millions de dollars en ressources supplémentaires pour aider EDSC et IRCC à réduire les délais de traitement des dossiers, mais la vérité, c'est qu'il faudra du temps pour mettre ces initiatives en oeuvre et nous n'obtiendrons pas l'aide dont nous avons besoin dans l'immédiat.
    Nous avons été très heureux de constater que les lettres de mandat de la ministre Bibeau et de la ministre Qualtrough reconnaissent les graves problèmes de main-d'oeuvre dans le secteur agroalimentaire. Nous avons d'ailleurs demandé à ces ministres d'élaborer une stratégie pour remédier aux pénuries persistantes et croissantes de main-d'oeuvre dans les secteurs de l'agriculture et de la transformation alimentaire. En fait, notre industrie s'est proposée pour jouer un rôle de premier plan dans l'élaboration de cette stratégie.
    Le Conseil canadien pour les ressources humaines en agriculture, la Fédération canadienne de l'agriculture et mon organisation ont mis en chantier un plan stratégique pour le secteur de la fabrication d'aliments et de boissons dans le but de régler les problèmes chroniques de main-d'oeuvre qui le frappent; comme le secteur de la fabrication d'aliments et de boissons est orienté sur l'avenir, nous avons besoin d'aide dès aujourd'hui.
    Depuis l'automne dernier, mon organisation est à la tête d'une coalition de 11 associations industrielles qui a présenté une version révisée du Programme des travailleurs étrangers d'urgence afin d'aider l'industrie à traverser cette crise immédiate. Cette proposition s'appuie sur des programmes déjà mis en place par EDSC et d'IRCC et facilitera le recrutement d'un plus grand nombre de travailleurs étrangers au cours des 18 à 24 mois dans notre secteur, tout en leur offrant des voies d'accès à la résidence permanente.
    En terminant, je tiens à souligner le dévouement dont ont fait preuve tous les intervenants du système alimentaire du Canada au cours des deux dernières années pour assurer le fonctionnement continu de la chaîne d'approvisionnement alimentaire. En travaillant de concert, ils ont veillé à ce que les Canadiens aient accès à des aliments canadiens. Il est impératif que nous leur donnions maintenant le soutien dont ils ont besoin pour poursuivre ce travail.
    Je me ferai un plaisir de répondre à vos questions.
    Merci.
    Je vous remercie, madame Sullivan.
    Nous allons maintenant passer aux questions en commençant par vous, madame Kusie. Vous avez six minutes.

[Français]

    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je remercie les témoins d'être parmi nous aujourd'hui.

[Traduction]

    Madame Sullivan, comme vous l'avez dit, Aliments et boissons Canada, conjointement avec d'autres associations, a récemment présenté au gouvernement une proposition visant la mise en oeuvre d'un programme des travailleurs étrangers d'urgence.
    Pourriez-vous transmettre cette proposition au Comité?
    Bien sûr, je vous la ferai parvenir avec plaisir.
    Je précise simplement que cette proposition s'appuie sur l'actuel programme des travailleurs étrangers temporaires. Elle comporte trois éléments principaux.
    Premièrement, il faut hausser le plafond ou la limite quant au nombre de travailleurs étrangers que les entreprises peuvent recruter.
    Deuxièmement, il faut prolonger la durée de validité des études d'impact sur le marché du travail, ou EIMT. Actuellement, elles ne couvrent qu'un an. Par conséquent, si vous faites venir le même travailleur l'année suivante, vous devez recommencer toutes les démarches administratives. Nous demandons donc que les EIMT aient une durée plus longue, de deux ans ou plus.
    Enfin, nous demandons à ESDC d'alléger la paperasse ou les démarches administratives que les entreprises doivent faire lorsqu'elles présentent une demande pour faire venir des travailleurs étrangers temporaires au pays.
    Il s'agit d'un allégement des démarches administratives et je tiens à dire très clairement que cela ne diminue nullement les protections et les avantages que nous devons offrir aux travailleurs étrangers durant leur séjour ici.

  (1710)  

    Qu'est-ce qui vous a incités à élaborer cette proposition de programme des travailleurs étrangers d'urgence avec ces autres organisations?
    De l'avis de ces organisations, le gouvernement en fait-il assez actuellement pour atténuer les pénuries de main-d'oeuvre dans le secteur agroalimentaire?
    Je signale la présence ici du CTAQ et de son représentant, M. Fraeys, qui est membre de mon organisation ainsi que de notre coalition de 11 entreprises.
    Nous en sommes arrivés à travailler ensemble parce qu'il s'agit du pire problème à frapper le secteur de la fabrication d'aliments et de boissons. Nous n'avions pas le choix. Nous aurions pu prendre des mesures à court terme pour alléger les pressions auxquelles nos entreprises, mais surtout nos travailleurs, font face. Ces deux dernières années, ces travailleurs n'ont cessé de travailler dans des lieux de travail confinés afin que nous ayons de quoi manger.
    Comme vous le savez, nous travaillons sans relâche depuis trois mois. Je suis heureuse d'annoncer que lundi dernier, nous avons eu une réunion avec la ministre Qualtrough d'ESDC. Elle nous a confirmé avoir fait un examen minutieux de notre proposition. Nous avons quitté cette réunion avec l'espoir que cette proposition attirera l'attention du gouvernement fédéral sur notre secteur.
    Excellent.
    D'après vous, quelles répercussions ces pénuries de main-d'oeuvre auront-elles sur l'offre alimentaire et sur la facture d'épicerie des Canadiens?
    Selon le sondage mené par Sécurité publique Canada en janvier dernier, les entreprises ont dit que les pénuries de main-d'oeuvre avaient entraîné une baisse de 20 % de leur production alimentaire. Il est difficile de croire qu'un pays comme le Canada est incapable de maintenir le rythme de sa propre production alimentaire. C'est incroyable. Nous savons que notre industrie n'est pas la seule à avoir des problèmes de main-d'oeuvre.
    L'impact sur l'offre alimentaire est important. Il faut aussi penser au bien-être des animaux. M. Fraeys en a parlé. Pour une grande partie de notre production alimentaire, nous devons recevoir des animaux et s'il n'y a personne pour les recevoir dans les usines de transformation, cela pose un problème dans les fermes et aussi pour les producteurs. Les préoccupations au sujet du bien-être et de la gestion de ces animaux dans les exploitations agricoles n'ont jamais été aussi importantes.
    Quant aux prix des aliments, il est clair que l'inflation est forte au Canada. À la fin de février, elle était de 7,4 %. Je pense que c'est un sommet jamais atteint depuis les années 1990.
    De toute évidence, les Canadiens paient un prix pour toutes les répercussions des problèmes qui frappent le secteur alimentaire et la chaîne d'approvisionnement.
    Je vous remercie.
    Nous nous attendons à ce qu'il augmente encore cette année.
    C'est vrai. Je vous remercie.
    Monsieur Lee, l'industrie de la construction continue de connaître des pénuries chroniques de main-d'oeuvre et de compétences. À votre avis, quelle incidence ces pénuries ont-elles eue sur l'offre de maisons au Canada?
    Il y a certainement des retards dans la construction. Comme mon collègue Mike l'a dit, notre indice du marché de l'habitation indique un retard de 10 semaines en moyenne à l'échelle du pays.
    Je signale que l'an dernier, le nombre de mises en chantier a été très élevé, ce qui est remarquable. Nous en avons eu 271 000 à la grandeur du pays. La grande question est de savoir si nous pourrons les mener à terme. Est-ce qu'il sera possible d'achever tous les projets? Comme plus de 70 % de nos membres sont touchés par ces pénuries de travailleurs, il y a forcément des retards. Plus les pénuries perdureront, plus le défi sera difficile à relever.
    Nous avons quand même bon espoir que les nouvelles mesures que le gouvernement mettra en place nous permettront d'avoir accès à plus de terrains et d'accélérer le processus d'approbation des projets de développement afin que nous puissons continuer à construire, mais c'est certainement un gros défi.

  (1715)  

    Quelles ont été les répercussions des pénuries de travailleurs dans d'autres secteurs de la chaîne d'approvisionnement, à part celui de la construction, sur la construction de maisons à travers le pays?
    En plus des retards... C'est un problème de main-d'oeuvre, mais je dirais que presque tous les produits utilisés dans la construction sont bloqués quelque part en amont.
    Nous avons également constaté, dans l'ensemble de notre secteur et dans bien d'autres, une rapide inflation du prix de divers produits et matériaux. C'est une combinaison de la pénurie et d'autres problèmes. Par exemple, pour une maison moyenne de 2 500 pieds carrés au Canada, nous constatons que le coût du bois d'oeuvre fait grimper le prix d'environ 34 000 $ et plus encore si nous ajoutons le coût du système de plomberie, des cloisons sèches et de tout le reste. Actuellement, les perturbations sur les chaînes d'approvisionnement font grimper le coût d'une maison de 68 000 $ en moyenne, juste pour les frais de construction.
    Madame Kusie et monsieur Lee, je vous remercie.
    Monsieur Collins, vous avez six minutes.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Bienvenue à tous nos témoins. C'est toujours agréable d'accueillir un concitoyen de la région de Hamilton. Ma première question est pour M. Collins-Williams.
    Comme il le sait, notre gouvernement a fait du logement abordable et de l'accessibilité au logement une priorité. On parle beaucoup de la pénurie de logements et de son effet sur le coût des logements. Dans quelle mesure les pénuries de main-d'oeuvre et de travailleurs spécialisés font-elles grimper les prix des maisons?
    C'est un facteur important. Calculer le prix d'une maison et de tout ce qui entre dans ce prix est un exercice complexe. En gros, il y a trois composantes, le terrain, les matériaux et la main-d'oeuvre. Nous avons beaucoup de difficulté à combler des postes à Hamilton et dans l'ensemble de l'Ontario et, comme M. Lee pourrait certainement le confirmer, dans l'ensemble du pays.
    Si vous alliez vous promener autour de n'importe quel chantier de construction à Hamilton, vous seriez surpris de voir l'âge moyen des travailleurs. Parmi ceux qui exécutent des tâches difficiles, certains ne sont plus tout jeunes. Nous devons attirer plus de travailleurs dans le secteur, et notre rôle consiste notamment à promouvoir les carrières dans la construction. Nous collaborons avec les collèges communautaires et les écoles secondaires de la région pour inciter un plus grand nombre de jeunes à s'engager dans ces carrières qui peuvent être très valorisantes.
    L'un des défis que nous devons relever et pour lequel nous demandons l'aide du gouvernement fédéral, consiste à attirer plus de travailleurs spécialisés, dans le cadre du volet de l'immigration économique, pour combler ces postes. En passant, nos membres me disent que la pénurie de main-d'oeuvre est tellement grave que certains constructeurs vont débaucher des travailleurs sur d'autres chantiers. Ce problème se fait sentir dans tout le sud de l'Ontario. Nous avons un problème d'offre de logements en ce moment en raison de la croissance démographique. Nous construisons beaucoup de maisons, cela exige de la main-d'oeuvre, surtout des travailleurs spécialisés.
    Une maison, c'est un système complexe. Pour la construire, nous avons besoin de toute une gamme de travailleurs spécialisés dans divers métiers, comme des électriciens, des plombiers, des menuisiers, des couvreurs et ainsi de suite. Ce secteur offre d'excellentes possibilités d'emploi.
    Je vous remercie, monsieur Collins-Williams.
    Ma prochaine question porte sur ce à quoi vous avez fait allusion, le lien entre les pénuries de main-d'oeuvre et l'immigration. Dans votre allocution préliminaire, vous avez dit, je pense, que votre industrie connaissait une pénurie de 17 000 travailleurs. Comme vous le savez, le gouvernement a fait de l'immigration l'une de ses priorités. En 2022, nous prévoyons accueillir 431 000 nouveaux arrivants, un nombre sans précédent, et nous sommes évidemment impatients de voir ces travailleurs se trouver un emploi bien rémunéré au Canada.
    Que fait votre secteur pour attirer de nouveaux immigrants? Comment nos politiques relatives aux travailleurs étrangers temporaires peuvent-elles vous aider à pourvoir vos postes vacants, qu'il s'agisse des 17 000 dont vous avez parlé ou du nombre plus élevé mentionné par M. Lee dans son introduction?
     Il y a peut-être là deux ou trois fils d'intérêt. Il est incroyable que le Canada soit une destination pour les plus brillants cerveaux de la planète, qui viennent chez nous pour étudier, vivre et fonder une famille. Mais nous devons par ailleurs fournir du logement à ces gens-là pour les aider à s'établir et à réaliser le grand rêve canadien de l'accession à la propriété et à prospérer dans leur collectivité.
    Au niveau des perspectives d'emploi, l'industrie offre des possibilités extraordinaires. On doit aux immigrants italiens, portugais et polonais la construction d'une grande partie du sud de l'Ontario, en particulier, lors des précédentes vagues d'immigration, ainsi qu'à une foule d'immigrants d'Europe de l'Est dans les décennies précédentes. Mais on observe un changement de la composition de notre immigration, et dans certains des pays d'origine de nos immigrants la propension à privilégier le secteur de la construction n'est pas aussi grande. Je pense qu'il est important que le gouvernement fédéral s'efforce d'attirer des travailleurs qualifiés qui détiennent déjà ces certificats, qu'il s'agisse, encore une fois, de plombiers, d'électriciens et de certains travailleurs qualifiés dont nous avons désespérément besoin.
    Nous avons passé beaucoup de temps à promouvoir l'économie du savoir, et c'est fantastique. Les Canadiens sont très instruits, et je pense que nous devons tâcher d'attirer au Canada des personnes qui peuvent occuper les emplois que nous avons tant de mal à combler ou à faire accepter par les jeunes Canadiens.
    J'ajouterais que ces emplois sont hautement spécialisés. Ils ne sont pas pour une main-d'œuvre générale non qualifiée. Les immigrants économiques apportent au Canada des talents, de l'innovation et des investissements financiers, si bien que nous aimerions certainement mettre l'accent sur le programme fédéral des travailleurs qualifiés. Mettons l'accent sur les travailleurs qualifiés, dont nous avons besoin à Hamilton, en Ontario et à l'échelle du Canada.

  (1720)  

    Merci de vos réponses.
    Je pense que mon temps est écoulé, monsieur le président.
    Merci, monsieur Collins.
    Cela donnera un peu plus de temps à Mme Chabot.
    Allez-y, madame Chabot.

[Français]

     Merci, monsieur le président.
    Je salue tous les témoins et je les remercie de leur présence, de leur contribution et de leurs témoignages.
    Au fond, vos trois organisations représentent le secteur résidentiel, qui correspond au besoin de se loger, et le secteur alimentaire, qui correspond au besoin de se nourrir. Nous sommes donc dans le sujet des besoins fondamentaux des citoyens. Votre apport est important et on devrait effectivement vous soutenir.
    Ma question va s'adresser à M. Fraeys, du Conseil de la transformation alimentaire du Québec.
    Ce qu'on est heureux de constater, sur le plan fédéral, c'est que le secteur de la fabrication des aliments a été inclus dans le secteur des infrastructures essentielles du Canada. À cet égard, vous avez illustré les problèmes que vous vivez. Par exemple, les problèmes liés à la délivrance des études d'impact sur le marché du travail, ou EIMT, font souffrir plusieurs entreprises. Comme députés, nous devons nous pencher là-dessus. Je sais que vous avez transmis à la ministre un programme d'urgence avant les Fêtes pour remédier à la situation des travailleurs étrangers temporaires. Or nous sommes maintenant en avril.
    Avez-vous reçu des réponses claires concernant ce programme d'urgence? Des solutions ont-elles été mises en place?
     Sinon, pourquoi?
    Je vous remercie.
    Oui, nous sommes bien appuyés par la ministre de l'Agriculture ainsi que par Mme Qualtrough. Il y a eu une rencontre avec celle-ci la semaine dernière, et elle a fait preuve d'ouverture et d'une grande écoute. Toutefois, je dois dire que les choses n'ont pas nécessairement changé dans l'immédiat.
    Notre inquiétude concerne les délais. Demain, c'est le 1er avril, et les agriculteurs vont commencer à ensemencer leurs champs. Ensuite, nous, les transformateurs, allons devoir accueillir les récoltes dans les usines. De notre côté, nous avons encore un petit délai d'environ trois mois, mais il est essentiel que les travailleurs arrivent au cours des prochaines semaines. Je ne vous cacherai pas que nous sommes très inquiets, car, compte tenu des délais actuels, nous nous demandons comment ce sera possible.
    L'année dernière, dans le cas des usines de transformation de concombres, la récolte avait eu lieu au mois d'août et les travailleurs étaient arrivés au mois de septembre. Ce n'est pas très utile. C'est un gaspillage de temps pour les fonctionnaires qui ont dû travailler pour les faire venir ici. Nous avons donc proposé de simplifier le processus pour que ce soit beaucoup plus rapide. Plus tôt, Mme Sullivan vous a proposé le fameux programme d'urgence. Ce que nous demandons, effectivement, c'est une réduction des délais, et nous avons proposé des solutions en ce sens. Par exemple, on pourrait regrouper les EIMT. Quant aux visas, on pourrait réduire les délais à quelques semaines ou quelques mois pour le Québec, qui a aussi la contrainte d'avoir des travailleurs francophones. Nous souhaiterions que ces délais redeviennent plus raisonnables. Avant la pandémie, c'était possible d'accueillir les travailleurs en trois mois. C'est ce que nous espérons, à très court terme, pour notre industrie.

  (1725)  

    Pouvez-vous expliquer en détail les conséquences concrètes des délais de traitement pour un employeur?
    Nous entendons parfois que des entrepreneurs abandonnent totalement leur projet ou leur récolte parce qu'ils n'ont pas cet apport des travailleurs étrangers temporaires. Dans le contexte de la pénurie de main-d'œuvre, qui s'est aggravée, comme vous l'avez illustré plus tôt, j'aimerais que vous nous disiez ce qui nous empêche d'agir plus rapidement et quelle est la conséquence concrète de l'inaction.
     En fait, en ce qui a trait aux usines, la conséquence est la rationalisation relativement à la gamme de produits. Il y a des produits qui ne sont plus transformés, parce que cela demande davantage de main-d'œuvre.
    Un peu plus tard, Mme Leblond va vous expliquer ce qui se passe sur le plan des abattages.
    Dans certaines usines, des produits ne sont pas fabriqués et d'autres sont livrés en retard. Comme on l'a mentionné plus tôt au sujet des maisons, les délais d'approvisionnement sont aussi beaucoup plus longs; les usines doivent donc revoir tout leur calendrier de production. Quand il y a moins de travailleurs, cela fait que des travailleurs de bureau doivent mettre la main à la pâte.
    Dans le secteur agroalimentaire, les usines sont souvent des usines familiales. Les sœurs, les tantes, les mères et les oncles des propriétaires doivent donc travailler à l'usine pour donner un coup de main. Souvent, le propriétaire travaille à l'usine de 8 heures à 17 heures, et il fait son travail de bureau le soir ou le matin. Les heures de travail sont donc longues et les employés sont fatigués.
    Je vais vous donner un exemple. L'année dernière, des travailleurs d'une usine de légumes ont travaillé pendant 12 journées d'affilée; l'employeur a dû leur donner une fin de semaine de congé. Cependant, s'il y avait eu des travailleurs étrangers, cela aurait permis aux travailleurs de l'usine de se reposer.
    L'embauche de travailleurs étrangers sert de soupape aux travailleurs de l'usine et permet d'assurer la santé et la sécurité au travail. Cela permet aussi de nourrir la population de façon adéquate et d'accumuler des stocks pour le prochain hiver.
    Merci, madame Chabot et monsieur Fraeys.

[Traduction]

     Nous passons maintenant à Mme Zarrillo, pour six minutes.
    Merci beaucoup.
    Merci à tous les témoins qui sont venus nous parler aujourd'hui.
    Ils ont beaucoup parlé des départs à la retraite dans leurs témoignages. Chacun des témoins pourrait peut-être nous parler de son industrie et des départs à la retraite, et nous dire s'il y a eu de la planification cinq ou dix ans auparavant.
    Si les départs à la retraite étaient planifiés, pourquoi les travailleurs locaux ne comblent-ils le vide? Pourquoi certains de ces emplois ne vont-ils pas à des travailleurs locaux et comment en sommes-nous venus à être à ce point tributaires des travailleurs étrangers?
    Je pourrais intervenir, si vous voulez, en commençant par le secteur résidentiel.
    Cela ne nous surprend pas. Ce n'est pas nouveau pour nous. Cela nous préoccupe depuis un certain temps et nous en avons discuté. Notre secteur ne dépend pas autant des travailleurs étrangers que de l'immigration. Ainsi, nous ne sommes pas de grands utilisateurs du Programme des travailleurs étrangers temporaires parce qu'il nous faut du monde à longueur d'année et en permanence. Les recommandations que nous aurions à formuler sur des aspects comme les travailleurs étrangers temporaires rejoignent l'idée d'ouvrir l'accès — comme d'autres témoins vous l'ont dit — à la résidence permanente.
    Depuis le début de la session en cours, nous n'avons pas encore entendu parler de l'importance d'un programme pour les employeurs de confiance, qui aiderait considérablement ceux qui doivent constamment recourir à ces systèmes.
    Pour ce qui est des départs à la retraite, c'est une simple question de démographie au Canada qui se pose dans chaque secteur. Je sais que vous avez entendu parler plus tôt du vieillissement des sociétés de nombreux pays développés. Le problème nous a intéressés. Chacun veut voir quels groupes sous-représentés pourraient être davantage employés. Nous avons donc aussi besoin d'immigration.
    Je pense que presque tous les autres secteurs s'intéressent à la productivité également, car, vous l'avez entendu, nous sommes tous en concurrence pour une offre très limitée de main-d'œuvre au Canada en raison de la composition démographique. Nous sommes tous en recrutement actif et nous cherchons tous à relever encore davantage l'attrait de nos industries pour les travailleurs. Heureusement, la construction résidentielle offre aussi des emplois bien rémunérés, mais c'est un défi. Ce n'est pas nouveau. Ce n'est rien de nouveau, mais c'est un grand défi pour nous et pour bien d'autres secteurs.
    Merci.

  (1730)  

     Je pourrais peut-être répondre pour le secteur des aliments et boissons.
    Sur la question des départs à la retraite, vous avez raison. Nous avons toujours prévu un mur de la retraite. Même avant la COVID, nous commencions à examiner ces questions et pour essayer de comprendre comment nous assurer d'avoir la main-d'œuvre pour l'avenir.
    Avec la COVID, par contre, le mur de la retraite a semblé se rapprocher de plusieurs années. Au début de la pandémie, nous avions un taux de vacance structurel d'environ 10 %. Au cours des seules deux dernières années, ce pourcentage est passé à 20 %. Notre secteur a connu un exode, et souvent la main-d'œuvre a subi le même sort.
    Quant aux travailleurs locaux, ils posent certainement un défi à un grand nombre d'industries. À certains égards, il semble que nous sommes près du plein emploi. À ce stade-ci, nous devons vraiment comprendre comment nous pouvons élargir le bassin de main-d'œuvre canadien. Il y a plusieurs aspects différents.
    Le premier concerne les groupes de personnes qui ne sont tout simplement pas encore prêtes pour le marché du travail. Comment pouvons-nous éliminer les obstacles auxquels elles font face et vraiment leur donner la capacité d'entrer sur le marché du travail, que ce soit dans mon secteur ou ailleurs?
    Nous avons discuté jadis des moyens à prendre pour y arriver. Il faut croire que la crise est un grand facteur de motivation. Il est évident pour tout le monde que nous devons nous pencher très sérieusement sur la façon de repérer les groupes de Canadiens qui ne participent pas à la population active et de les aider à y arriver.
    Nous ne comptons pas beaucoup sur les travailleurs étrangers. Moins de 10 % de nos travailleurs sont des travailleurs étrangers temporaires. Le vrai problème du secteur est que la plupart de nos travailleurs ne sont pas admissibles aux volets d'immigration. Ils n'auraient pas assez de points. Encore là, nous faisons face à ce problème avec nos volets d'immigration et nos systèmes de points, ayant choisi de nous concentrer sur des groupes particuliers de travailleurs, ou sur des travailleurs ayant des compétences particulières.
    Nous avons besoin de travailleurs qualifiés et de scientifiques, mais souvent aussi de travailleurs sans spécialité qui, pour la plupart, n'arrivent pas à franchir le système d'immigration. Souvent, nos entreprises utilisent le Programme des travailleurs étrangers temporaires non pas pour des emplois temporaires, mais pour faire entrer des travailleurs au Canada et essayer ensuite de leur trouver une voie d'accès à la résidence permanente.
     Dans le cadre de notre programme de travailleurs étrangers d'urgence, nous demandons, bien honnêtement, rien de plus qu'un cataplasme. Nous devons vraiment commencer à comprendre comment structurer nos programmes de travailleurs étrangers pour attirer et faire venir chez nous des travailleurs qui pourront s'établir ici, avec leur famille, devenir de bons Canadiens et contribuer à différentes collectivités canadiennes.
    Vous avez le temps de poser une brève question, madame Zarrillo, si vous en avez une.
    Je pense qu'il reste un seul témoin à entendre.

[Français]

     Je désire ajouter que nos usines sont principalement situées dans les milieux ruraux, où il n'y a pas beaucoup de main-d'œuvre.
    On doit pouvoir planifier les départs à la retraite. Dans certaines usines, il manque déjà 300 travailleurs. Cela devient donc très difficile à gérer. À un certain moment, on atteint le point critique, car on sait que certaines personnes vont prendre leur retraite.
    Dans l'expression « travailleurs étrangers temporaires », le mot « temporaires » fait partie du titre, mais ces travailleurs obtiennent habituellement leur résidence permanente. En fait, 87 % d'entre eux font leur demande de résidence permanente lorsqu'ils sont prêts. Par la suite, ils font venir leur famille. On offre également un emploi aux membres de leur famille. Le programme des travailleurs étrangers temporaires permet de faire revivre nos régions et sert de passage vers la résidence permanente.
    Nous prévoyons les départs à la retraite, mais il y a un manque de main-d'œuvre, puisqu'il y a un manque de travailleurs dans les régions où sont situées les usines. Comme l'a dit M. Fraeys, il s’agit d'un projet essentiel à la survie de notre entreprise.

  (1735)  

    Merci, madame Zarrillo.

[Traduction]

    Monsieur Ruff, vous avez cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci aux témoins.
    J'ai des questions pour le porte-parole des secteurs des aliments et boissons et de l'habitation. Ma première question s'adresse à Mme Sullivan.
    Si j'ai bien compris la documentation que vous nous avez remise, vous avez demandé le programme des travailleurs étrangers d'urgence aux ministres provinciaux et fédéraux de l'Agriculture à la fin de novembre. Lorsque j'ai vu les représentants d'Exceldor et des Aliments Maple Leaf, qui ont tous deux une usine de transformation dans ma circonscription, leur première demande était la mise sur pied de ce programme pour le 31 janvier.
    La ministre Bibeau ou la ministre Qualtrough vous ont-elles dit pourquoi cette demande restait sans suite à la fin de janvier?
     Non, on ne nous a rien dit de précis pour expliquer pourquoi nous n'avons pas eu de réponse ou pourquoi notre proposition n'a pas été retenue à la fin de janvier. Je soupçonne que c'est simplement parce que la machine gouvernementale est beaucoup plus lourde que nous le souhaiterions tous.
    En tout cas, nous espérons toujours une réponse. M. Fraeys a raison de dire que les délais sont de rigueur. Une grande partie de la transformation est liée à la production agricole et, comme la plupart d'entre vous le savent, les saisons sont souvent un facteur là-dedans, de sorte que le plus vite nous aurons une réponse et un programme, mieux ce sera, c'est évident. Le 31 janvier aurait été l'idéal pour nous. À ce stade-ci, nous serons heureux de recevoir une réponse dans les meilleurs délais.
    Bien sûr, je pense que l'essentiel sera la substance de cette réponse. Notre proposition, en particulier, vise à alléger le fardeau d'entreprises comme Olymel qui cherchent à faire venir des travailleurs étrangers temporaires, mais nous devons aussi accroître le nombre de personnes qui arrivent. Il sera crucial pour nous de savoir si le gouvernement fédéral accepte de relever le plafond actuel pour les entreprises de transformation alimentaire, un plafond qui n'existe pas dans l'agriculture primaire. Ce plafond doit être relevé si nous voulons augmenter le nombre de travailleurs disponibles dans notre secteur.
     Merci, madame Sullivan.
    Pour les gens du secteur de l'habitation, j'ai lu votre documentation ici et je m'intéresse au zonage d'inclusion dont il y est question. Le problème, c'est que, dans une perspective de pénurie de main-d'œuvre, surtout dans le Canada rural, un si grand nombre d'industries éprouvent de la difficulté à trouver des travailleurs parce qu'il n'y a pas d'endroit où les loger à leur arrivée. Dans votre commentaire, vous dites qu'il faut augmenter le pourcentage du logement — du logement du marché et du logement abordable.
    En parlant à un grand nombre des promoteurs et des constructeurs de ma circonscription, même l'été dernier, j'ai compris que le plus gros problème était la pénurie de main-d'œuvre, dont j'avais entendu parler pendant toute la campagne électorale. Le fait est qu'ils sont ouverts à cela, pourvu que ce soit équitable pour tout le monde, pour tous les promoteurs, afin que le promoteur A soit traité exactement sur le même pied que le promoteur B. J'aimerais que vous nous en disiez un peu plus long sur les plus grands défis liés à la construction de logements abordables, et un peu plus également sur vos préoccupations, car vous dites que la prudence est de mise dans ce zonage d'inclusion.
    Bien sûr. J'en parlerai avec plaisir.
    Dans le cas du zonage d'inclusion, en principe, le défi consiste à s'assurer que si l'on doit attribuer et exiger une certaine proportion de logement abordable... Il y a différents niveaux de logement abordable. Bien souvent, le logement abordable n'est pas celui dont on a les moyens, mais plutôt du logement social, typiquement. Dans le secteur de l'habitation, c'est cela, le logement abordable. Si l'on veut qu'un certain pourcentage doive être ce logement social abordable, le vrai problème, c'est de savoir comment le financer.
    Vous dites que ce sont les promoteurs qui paieront, mais ce n'est pas ainsi que les affaires se font. Au bout du compte, ce sont les nouveaux acheteurs qui paient si le gouvernement n'accorde pas une autre forme de subventions, soit en fournissant du terrain soit en accordant des congés de taxes d'aménagement, etc. Donc, est-il important de traiter sur le même pied tous les promoteurs d'une zone donnée pour ce qui est du zonage d'inclusion? Oui, mais il est tout aussi important de prendre garde, dans la conception du zonage d'inclusion, de laisser monter par inadvertance le prix des logements du marché. Mettons que 20 % des logements sont censés être des logements abordables. Si les 80 % qui restent subventionnent les 20 %, on vient d'augmenter le coût du logement dans la région.
    Également, s'il devait y avoir 100 logements, et que 20 doivent maintenant être abordables, c'est très bien. Mais si 100 logements sont sur le marché et que nous connaissons un énorme problème d'offre — ce qui est en fait un facteur important de la hausse du prix des maisons —, il faut veiller à maintenir la cible de 100 logements et à réaliser 20 autres logements abordables en plus. C'est un peu ce qui nous préoccupe.

  (1740)  

    Je crois que mon temps est écoulé, monsieur Lee. Merci.
    Un dernier commentaire: je sais que nous avons proposé un groupe de travail sur le logement pour l'ensemble du pays. Je vais probablement en accueillir un dans mon coin de pays. Je me réjouis à la perspective de voir votre association participer à ce groupe de travail dans les semaines à venir. Merci.
    Nous passons maintenant à M. Coteau, pour cinq minutes.
     Merci beaucoup, monsieur le président, et merci beaucoup à tous nos témoins. Tous les exposés étaient excellents.
    Selon Statistique Canada, les employeurs cherchaient à combler 69 000 postes dans le domaine de la construction au quatrième trimestre de 2021. C'est un chiffre est tout à fait remarquable.
    Récemment, un homme m'a apostrophé dans la rue près de chez moi: « Vous voulez un boulot? » « Non, que je lui ai répondu, ça va très bien pour l'instant. » Je lui ai alors demandé: « Quel travail m'offrez-vous? » C'était pour une équipe qui faisait des travaux de construction. C'est la première fois que quelqu'un m'offre un emploi comme ça dans la rue. C'est donc que le besoin est là.
    Cela a évidemment des répercussions sur les résidences de la population et sur notre économie. Le problème est très grave. Je sais que dans ma ville et dans tout le pays... À Toronto, le taux de chômage des jeunes est d'environ 17,5 %. À l'échelle du pays, je crois qu'il avoisine les 14 %.
    Comment pouvons-nous tirer parti de la prochaine génération d'éventuels travailleurs de la construction? Je suppose que la rémunération est très bonne. Il y a beaucoup de travail, pour des travailleurs hautement qualifiés. Ma question s'adresse à MM. Lee et Collins-Williams. Que faisons-nous pour tirer parti de la prochaine génération de jeunes chômeurs?
    Je pourrais peut-être commencer, quitte à laisser M. Collins-Williams terminer.
    C'est certainement un domaine où nous avons été très actifs, car il est crucial de susciter l'intérêt de la prochaine génération. Nous avons pas mal d'initiatives en cours dans ce domaine, juste pour encourager les travailleurs et surmonter différents obstacles et perceptions. Je dirais que nous avons moins de problèmes avec les jeunes qu'avec les parents, les conseillers en orientation et, en quelque sorte, le système.
    Depuis de nombreuses années, nous ne privilégions pas les carrières dans les métiers spécialisés pour les jeunes. Nous leur proposons plutôt une carrière dans un métier spécialisé comme deuxième, troisième ou dernier choix plutôt que comme premier choix.
    Ce n'est pas parce qu'on réussit bien à l'école qu'on ne ferait pas un excellent électricien ou plombier qui réussirait probablement très bien à monter sa propre entreprise, à faire une belle carrière et à contribuer pour beaucoup à l'économie.
    Nous faisons pas mal de travail dans ce domaine pour tâcher de promouvoir les avantages pour la prochaine génération.
    M. Coteau pourra compléter ma réponse.
    Peut-être pourrais-je ajouter quelque chose, et vous pourriez peut-être en parler. J'ai parlé à votre association des perspectives qui s'offrent aux jeunes.
    Comment tirer parti des jeunes marginalisés dans les collectivités où les taux de chômage atteignent 25 %? J'ai vu des charpentiers, des groupes comme les Hammer Heads, qui essaient de relever ces défis pour attirer des jeunes marginalisés dans la construction.
    Avez-vous une idée de ce que nous pouvons faire en tant que parlementaires pour aider l'ensemble de l'industrie?
    J'aurais quelque chose à ajouter aux commentaires de M. Lee, quelque chose qui répondra exactement à votre question. Nous avons vraiment besoin de faire de la promotion — et cela vaut également pour l'industrie. Nous devons mieux promouvoir les possibilités de carrière dans la construction.
    Ce ne sont pas tous les jeunes qui devaient faire sept années d'études pour devenir médecin ou avocat. Comme M. Lee l'a dit, les possibilités dans le domaine de la construction sont extraordinaires. La construction donne l'occasion de travailler dehors, l'occasion de travailler de ses mains, l'occasion de vraiment créer quelque chose et de pouvoir retourner sur place dans 10 ou 15 ans pour dire: « Hé, c'est moi qui ai construit cela ».
    C'est aussi une carrière très enrichissante. On y trouve des gens dans la mi-vingtaine ou en fin de vingtaine qui gagnent littéralement un revenu dans les six chiffres. C'est l'occasion de devenir entrepreneur indépendant et de construire sa propre équipe.
    Notre industrie s'efforce d'attirer des personnes encore plus jeunes. Nous essayons d'entrer dans les écoles secondaires. Nous essayons de parler aux conseillers en orientation et aux enseignants au sujet des possibilités, et nous participons aussi à des salons de l'emploi.
     Je pense qu'il y a une occasion de recruter davantage, à l'exemple des universités et des collèges qui vont faire du recrutement dans les écoles secondaires. Notre industrie doit jouer un rôle là-dedans, tout comme le gouvernement peut-être, par nos réseaux d'éducation également, pour promouvoir la diversité des possibilités d'emploi qui s'offrent.
    Jadis, il y avait des ateliers dans beaucoup d'écoles secondaires. Ces ateliers ont commencé à disparaître. Les élèves doivent être bien formés et apprendre à maîtriser diverses compétences, mais il pourrait y avoir des jeunes en 9e ou en 10e année qui n'ont aucune idée de ce qu'ils peuvent faire de leurs mains et des compétences qu'ils ont pour construire et créer des choses. Dans ces collectivités marginalisées, c'est une voie qui n'oblige pas à passer par le collège ou l'école. On peut sortir de l'école secondaire, suivre une formation d'apprenti, et, au lieu de dépenser des dizaines de milliers de dollars en frais de scolarité, tout de suite commencer à faire de l'argent en tant qu'apprenti.
    Non seulement cela débouche sur une carrière, mais encore il n'y a pas autant d'obstacles au début si l'on a la capacité de faire de l'argent tout de suite.

  (1745)  

     Très juste. Merci.
    Merci.
    Sur ce, monsieur Coteau, nous allons terminer.
    Je remercie les témoins de leur comparution aujourd'hui et de leurs témoignages fort éclairants. Merci beaucoup.
    Chers collègues, avant de quitter, comme vous le savez, j'ai communiqué avec un certain nombre d'entre vous au sujet de jeudi prochain, jour du budget. Depuis, je crois comprendre que les whips se sont mis d'accord pour annuler notre séance de jeudi prochain. Comme je l'ai dit, j'ai consulté les vice-présidentes et Mme Zarrillo. Nous n'aurons pas de séance jeudi prochain.
    Sur ce, nous nous reverrons lundi. Encore une fois, merci beaucoup.
    La séance est levée.
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